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Les Cahiers du Gres

Immigration, mondialisation et diversité culturelle : comment


« gérer » les défis ?
Victor Piché

Volume 5, numéro 1, printemps 2005

URI : https://id.erudit.org/iderudit/010877ar
DOI : https://doi.org/10.7202/010877ar

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Éditeur(s)
Groupe de Recherche Ethnicité et Société
CEETUM

ISSN
1499-0431 (imprimé)
1499-044X (numérique)

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Citer cet article


Piché, V. (2005). Immigration, mondialisation et diversité culturelle : comment
« gérer » les défis ? Les Cahiers du Gres, 5 (1), 7–28. https://doi.org/10.7202/010877ar

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IMMIGRATION, MONDIALISATION ET DIVERSITÉ
CULTURELLE : COMMENT« GÉRER » LES DÉFIS ?

Victor Piché
RÉSUMÉ/ABSTRACT

Le contexte mondial actuel se caractérise par une accélération de la circulation


des capitaux, des biens et des services, créant des pressions sur les mouvements
migratoires internationaux. Depuis les dix dernières années, on assiste effectivement
à une augmentation de la migration internationale, en particulier dans les pays
développés qui deviennent par le fait même de plus en plus multi-ethniques et
multiculturels. La diversité culturelle qui en découle engendre de nouveaux défis
de “gestion” pour les États et les organisations internationales. Les réponses
politiques à ces défis se situent à la fois au niveau international, par l’augmentation
du multilatéralisme en matière de migrations internationales, et au niveau
national, par l’adoption de solutions qui empruntent soit la voie législative (e.g.
interdiction des symboles religieux à la française), soit la voie légale (e.g. jugements
des cours de justice basés sur la notion d’accommodement raisonnable à la
canadienne). Même si la voie de l’accommodement semble davantage appropriée
aux sociétés multiculturelles, elle n’est pas exempte de dérives comme pourrait
l’être l’introduction de la charia dans les médiations conjugales et familiales.

The present global context is characterized by the accelerated circulation of


capital, goods and services. Globalization also exerts pressures for increased
international migration. Indeed, during the last ten years, international movements
are on the increase, particularly in developed countries, which are becoming
increasingly multi-ethnic and multicultural. With the resulting cultural diversity,
nation-states and international organizations are facing new challenges in the
management of migratory flows. Political responses are found at both
the international level, as expressed by increased multilateralism in the area of
international migrations, and the national level, solutions to problems posed by
diversity take a legislative approach (e.g. the interdiction of religious symbols as
in France) or a legal approach (e.g. court judgements based on the notion of
reasonable accommodation as in Canada). Although accommodation seems more
appropriate to multicultural societies, it is not exempt from certain forms of
extremism, as exemplified by the introduction of the charia in conjugal and family
mediations.

Mots-clés: mondialisation, immigration, diversité, politiques migratoires,


intégration.
Key-words : globalization, immigration, diversity, migrations politics, integration.

Diversité urbaine, vol. 5, no 1, printemps 2005 7


LA QUESTION DE LA STIGMATISATION est par le haut. Dans les faits, plusieurs
au cœur des préoccupations actuelles groupes de la société civile sont
dans presque tous les pays du monde également impliqués dans cette gestion,
vivant une situation de diversité ethnique que ce soit les associations de défense
et culturelle croissante. Que recouvre des droits, les ONG qui traitent des
concrètement le terme de questions d’immigration, etc. Il s’agit
stigmatisation ? D’abord et surtout, la alors d’une approche par le bas. Bref,
stigmatisation fait référence à la le terme « gestion » implique les deux
discrimination et au racisme dont aspects comme faisant partie d’une
l’interdiction est de plus en plus enchâs- même dynamique. Ceci dit, dans le
sée dans les Chartes des droits de la présent texte, il sera surtout question du
personne. Mais elle concerne également rôle des gouvernements, de leurs
un champ plus flou, plus culturel, celui appareils institutionnels ainsi que des
des pratiques « nouvelles » pour les cours de justice qui doivent appliquer
sociétés d’accueil, comme par exemple les règlements car il apparaît évident que
le port du voile chez les Musulmanes les enjeux migratoires sont de plus en
(France, Québec) ou du turban chez les plus discutés et balisés au niveau de ces
Sikhs (Canada, Angleterre), la référence instances étatiques et juridiques.
à Dieu dans le serment d’allégeance
(USA), le débat sur les sukkats juifs Comme deuxième remarque
(Canada) ou encore la médiation liminaire, il faut insister sur le fait que
familiale par des tribunaux religieux la diversité culturelle ne constitue pas
(Ontario). Nous reviendrons sur un phénomène nouveau. Toutes les
quelques-uns de ces exemples plus loin, régions du monde ont toujours été
mais il est déjà clair que la question de traversées par des différences religieuses,
la « gestion » de la différence n’est pas linguistiques et ethniques, différences
simple et dépasse la seule dimension de introduites par des invasions, des
la discrimination. migrations massives ou par des
annexions territoriales forcées ou
D’entrée de jeu, deux remarques planifiées. Ainsi, le 19e et le début du
liminaires s’imposent. La première a 20e siècle ont été témoins de nombreux
trait au vocabulaire issu du bouleversements (Chaliand, Jan et
« management » généralement utilisé Rageau, 1994). C’est aussi la période
lorsqu’il est question du traitement des d’émergence des états-nations et des
différences culturelles. En effet, dans la mouvements nationalitaires tant en
littérature, le traitement des différences Europe que dans les anciennes colonies
passe par la « gestion », vocabulaire d’Asie et d’Afrique, période où sont
technocratique et bureaucratique s’il en apparus de nombreux conflits entre
est. En fait, il laisse entendre que les minorités et majorités (Yacoub, 1998 :
différences culturelles doivent 52-53). Nous ne parlerons pas ici de ce
nécessairement être « gérées » par qui est convenu d’appeler les
l’État, ce qui révèle donc une approche « anciennes minorités », non pas parce

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que la gestion de ces conflits n’est pas les dispositifs des chartes (partie III).
importante - comme en témoignent les Nous allons essentiellement arguer (1)
nombreux conflits toujours d’actualité que l’immigration est en hausse dans les
que ce soit dans les Balkans ou en pays développés et qu’elle s’est
Afrique Centrale (Diekoff, 2000) - mais considérablement diversifiée en termes
parce que nous voulons plutôt nous d’origines nationales; (2) que cette
concentrer sur les « nouvelles nouvelle donne est perçue par les États
minorités » issues de l’immigration et comme posant des problèmes de
qui posent des défis fort nouveaux. « gestion » de la cohésion sociale; et (3)
que la réponse politique va actuellement
Si la diversité a toujours existé, elle dans le sens d’une plus grande restriction
se distingue aujourd’hui par deux de l’immigration ainsi que vers une
caractéristiques importantes : (1) elle est gestion plus « serrée » des frontières.
en croissance constante depuis la Nous concluons que le nouveau contexte
Deuxième Guerre mondiale, et ce un peu de la régionalisation (construction de
partout dans le monde; (2) elle met en blocs géo-politiques) va à l’encontre du
contact de nombreux groupes nationaux protectionnisme en matière de
qui ne revendiquent pas une autonomie migrations internationales, et qu’il
quelconque (territoriale, politique, exerce d’autre part des pressions vers une
institutionnelle, etc.) mais qui plus grande ouverture à l’immigration
néanmoins luttent contre les et une plus grande tolérance des
discriminations et souhaitent obtenir le différences culturelles.
respect des différences culturelles. Les
réponses à ces nouvelles revendications Immigration et diversité : les faits
ne sont pas uniformes d’un pays à l’autre
et reflètent en fait la diversité des Depuis une dizaine d’années, on peut
expériences historiques face à lire un peu partout que les mouvements
l’immigration. de population sont de plus en plus im-
portants. Certains titres d’ouvrages ré-
Le présent texte vise donc cents laissent entendre que nous vivons
premièrement à examiner les faits, c’est- une époque tout à fait exceptionnelle en
à-dire documenter la diversité culturelle matière de migrations internationales :
issue de l’immigration (partie I). Nous The Age of Migration (Castles et Miller,
examinerons ensuite les effets de cette 1998), Worlds in Motion (Massey et al.,
diversité à travers les réponses apportées 1998), The Turbulence of Migration
aux nouveaux défis de l’immigration. (Papastergiadis, 2000) pour ne mention-
Deux types de réponses seront privilégiés ner que ceux-là. Il n’est pas facile de
ici : les réponses politiques, à savoir mesurer précisément les mouvements de
comment les gouvernements tentent de population dans le monde d’aujourd’hui.
gérer cette diversité (partie II), et la Le plus souvent, les statistiques migra-
réponse légale, c’est-à-dire comment les toires puisent dans les recensements les
tribunaux interprètent les règlements et informations sur les lieux de naissance

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des personnes recensées. Que disent ces sieurs maux (e.v. Buchanan, 2002).
statistiques? Globalement, on recense L’importance politique de l’immigration
près de 175 millions de personnes qui dépasse donc son importance purement
vivent en dehors de leur pays de nais- statistique, du moins au niveau mondial.
sance : cela ne représente qu’environ
3% de la population mondiale, ce qui Par ailleurs, si l’on divise le monde
signifie que, somme toute, peu de per- en deux comme on le fait souvent, soit
sonnes sont en situation de déplacement en pays développés et pays en
(World Bank, 2002). Certes, on peut développement (voir le Tableau 1), on
penser que 3% n’est pas très élevé et constate qu’il y a eu effectivement une
qu’il n’y a pas là matière à préoccupa- augmentation assez importante de la
tion. En fait, les préoccupations omni- proportion de personnes nées à l’étranger
présentes concernant les enjeux de la dans les pays développés. Cette
migration internationale démontrent que proportion est passée de 3,1% en 1965
l’agenda politique n’est pas uniquement à 4,5% en 1990 et à 8,7 en 2000. C’est
une affaire de chiffres comme en témoi- donc dans les pays dits du Nord que se
gnent les nombreux discours radicaux concentre l’essentiel des mouvements
de l’extrême droite qui n’hésitent pas à migratoires internationaux. En fait, on
faire de l’immigration la source de plu- voit que c’est en Amérique du Nord

Tableau 1 - Estimation de la migration (née à l’étranger) : en pourcentage de la région

Région 1965 1975 1985 1990 2000

Total – Monde 2,3 2,1 2,2 2,3 2,9

Pays développés 3,1 3,5 4,1 4,5 8,7


Pays en développement 1,9 1,6 1,6 1,6 1,5

Dont…
Afrique 2,5 2,7 2,3 2,5 2,1
Asie 1,7 1,3 1,4 1,4 1,4
Amérique Latine et Caraïbes 2,4 1,8 1,6 1,7 1,1
Amérique du Nord 6,0 6,3 7,8 8,6 13,0
Europe (+ Ex-URSS) 2,2 2,7 3,0 3,2 7,7
Océanie 14,4 15,6 16,9 17,8 19,1

Sources :
Hania Zlotnik (1998); « International Migration 1965-96 : An Overview », Population
and Development Review, vol. 24, no 3, p. 429-468.
United Nations (2003), International Migration 2002.

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d’abord, puis en Europe, que se situent sés par la nouvelle immigration. Pour
les plus importantes augmentations de les pays comme les États-Unis, le Ca-
populations immigrantes. Dans les pays nada et l’Australie, dont l’histoire est
du Sud, la proportion des personnes nées intimement liée à l’immigration mas-
à l’étranger a plutôt diminué depuis sive, le multiculturalisme fait depuis
1965, passant de 1,9% à 1,5% (Tableau longtemps l’objet de débats et de politi-
1). Cela confirme que nous assistons ques. Par contre, pour les pays d’immi-
aujourd’hui à une accélération de la gration de l’Europe de l’ouest, ce n’est
migration Sud-Nord et que les que récemment qu’ils ont été forcés
préoccupations actuelles en matière d’examiner les relations entre la diver-
d’immigration sont surtout apparentes sité ethnique, l’identité nationale et la
en Amérique du Nord et en Europe. citoyenneté et de considérer des politi-
ques allant dans le sens du
Outre la croissance des mouvements multiculturalisme (Castles, 1993 : 28 ;
migratoires eux-mêmes, c’est l’origine Bauböck et Rundell, 1998).
des groupes immigrants qui a considé-
rablement changé depuis les années 60. Avant d’aborder les réponses politi-
En effet, si l’on prend l’exemple des pays ques aux nouveaux défis de la diversité,
traditionnels d’immigration (États-Unis, il convient de s’arrêter quelques instants
Canada, Australie), les statistiques mon- sur l’avenir probable des politiques mi-
trent clairement le renversement de ten- gratoires. Certes, sur le plan purement
dances dans l’origine des immigrants. démographique, avec la baisse de la fé-
En effet, les pays développés ont connu condité en deçà du seuil de remplace-
des transformations importantes de leurs ment un peu partout dans le monde dé-
flux migratoires internationaux. Que ce veloppé, l’immigration constitue actuel-
soit en Amérique du Nord ou en Europe, lement la source la plus importante de
les migrations internationales en prove- croissance démographique et, dans un
nance des pays en développement ont avenir assez rapproché, constituera le
graduellement dominé les flux migra- seul mécanisme de ralentissement de la
toires, transformant de façon importante décroissance. L’exemple du Québec est
la composition ethnique et raciale de ces assez représentatif de ce qui risque de
pays (Kuijsten, 1994 ; Massey et al., se passer dans la plupart des pays déve-
1998 ; Piché, 2004). Avec le temps, les loppés. Ainsi au Québec, la part de la
pays occidentaux ont pris conscience de croissance naturelle (naissances – décès)
leur caractère multiethnique et dans la croissance totale n’a cessé de
multiculturel, souvent à l’occasion de diminuer depuis les années 50. Les pro-
débats publics virulents sur la nécessité jections suggèrent que dans quelques
(ou non) de freiner toute immigration. années ce sera l’immigration qui pren-
Mais en même temps, la multiethnicité dra la relève. Évidemment, les hypothè-
était déjà omniprésente, voire incontour- ses migratoires demeurent conformes à
nable, et demandait des réponses politi- ce qui se passe aujourd’hui et ne vont
ques et sociales aux nombreux défis po- donc pas empêcher la décroissance, mais
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tout au plus la ralentir - à moins bien le monde développé et les régions
sûr que les niveaux d’immigration soient pauvres crée les conditions structurelles
considérablement augmentés, ce qui pour l’émigration internationale.
n’est pas évident pour le moment.
Le droit actuel régissant les
Mais les pressions pour une migrations internationales s’est
immigration accrue ne sont pas que développé essentiellement au cours du
démographiques, elles sont également 20e siècle et est basé sur les prémisses
économiques. En effet, la chute de la de la souveraineté et de la sécurité
natalité entraîne inévitablement le nationale. Les politiques migratoires
vieillissement de la population, visent ainsi à satisfaire les besoins
phénomène bien connu aujourd’hui nationaux, qu’ils soient économiques
(Légaré, 2004). Or, les effets du (besoins en main-d’œuvre) ou socio-
vieillissement se font et se feront surtout culturels (maintien de la cohésion
sentir au niveau des coûts de la santé et sociale). Par ailleurs, le système légal
des retraites. Par exemple, on estime en matière de réfugiés, mis en place à
au Québec que pour une personne la fin de la Deuxième Guerre mondiale,
pensionnée en 1941, il y avait 10 constitue une exception notoire à la règle
travailleurs. Aujourd’hui, le rapport de la souveraineté nationale puisque les
pensionné/travailleur est de 3 alors qu’en États signataires de la Convention de
2041 (cent ans plus tard) il y aura à peine Genève ont accepté de transférer une
plus d’un travailleur pour un pensionné partie de leurs pouvoirs à une instance
(Légaré, 2003 : 189). internationale, notamment le HCR.
Même si, depuis les années 1990
Une troisième source de pressions en plusieurs signes indiquent que
faveur d’une plus grande circulation des l’approche libérale adoptée dans les
personnes provient du processus accéléré années 1950 est minée par des politiques
de la mondialisation. Ces pressions de plus en plus restrictives en matière
s’exercent à la fois « par le haut » dans de refuge, il faut reconnaître qu’une
la mesure où le marché de travail se partie du droit migratoire est géré au
globalise (compétition pour la main- niveau multilatéral. Cette approche
d’œuvre très qualifiée) et où les États basée sur la sécurité nationale est encore
tentent de faire face aux pénuries de dominante aujourd’hui. Néanmoins,
main-d’œuvre liées entre autres au dans le contexte de la mondialisation et
ralentissement de la croissance de la régionalisation des frontières, il
démographique. Mais les pressions apparaît que les États-nations sont de
s’exercent également « par le bas », en moins en moins en mesure de gérer les
provenance des groupes de migrants qui flux migratoires et acceptent de plus en
développent des stratégies plus de discuter de migrations dans un
transnationales facilitant la circulation contexte international (Simmons et
des personnes. En outre, l’accroissement Piché, 2002; Pellerin, 2004). Enfin, la
des inégalités socio-économiques entre mondialisation n’est pas qu’économique

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et les nouvelles technologies de la dans leur pays et seulement 7% le
communication augmentent trouvaient trop élevé (Figure 1). En
considérablement la circulation des 2003, le taux de satisfaction diminue à
idées, ce qui a pour effet, entre autres, 75% alors que la proportion jugeant le
de favoriser le développement du droit niveau trop élevé augmente à 21%. Il
des migrants dans un contexte non plus en va de même quant à la position des
uniquement national mais global. C’est gouvernements face aux politiques sur
ainsi que l’expression « droits humains l’immigration : en 1976, 86% des
globaux » a fait récemment surface gouvernements affirmaient que leur
(Weiner, 1997). Finalement, la politique allait dans le sens du maintien
mondialisation comporte deux des niveaux en vigueur et seulement 7%
conséquences fondamentales du point de pensaient les diminuer (Figure 2). En
vue de l’avenir des migrations 2003, la proportion visant la réduction
internationales. D’une part, les règles de l’immigration atteint 34%. Cette
en matière de circulation des personnes tendance est certes en contradiction avec
vont de plus en plus se dessiner dans un les pressions mentionnées ci-dessus et on
cadre multilatéral de coopération peut penser qu’elles viendront à bout des
internationale (Hollifield, 1998). résistances actuelles face à
D’autre part, il est tout à fait logique de l’immigration. Mais pour le moment,
penser que la libre circulation des on ne peut que constater ce tournant
capitaux, des biens et des services sera défavorable à l’immigration, tournant
accompagnée d’une plus grande qui s’est sans doute consolidé avec les
circulation des personnes, ce qui événements du 11 septembre 2001.
d’ailleurs est déjà le cas à l’intérieur de
l’Union Européenne. Quoi qu’il en soit, Quel que soit l’avenir, il faut
les pressions iront certainement dans ce reconnaître que l’expérience migratoire
sens. des 40 dernières années a d’ores et déjà
introduit une nouvelle dynamique socio-
On pourrait donc penser que face à politique. Les états sont de plus en plus
toutes ces pressions internes multiethniques et multiculturels. À ce
(démographiques et économiques) et titre, ils doivent faire face à de nombreux
externes (droits des migrants), les défis liés à la gestion des différences
politiques migratoires des pays (Gagnon et al. 2003). On verra que les
développés devraient favoriser un réponses apportées sont loin d’être
accroissement de l’immigration. Or, uniformes.
une compilation récente faite par les
Nations Unies montre que les tendances Les réponses politiques
depuis 1976 vont plutôt dans le sens
d’une restriction de l’immigration. Par Il est difficile de séparer la question
exemple, en 1976, 86% des de la gestion de la diversité de celle des
gouvernements du monde trouvaient politiques d’immigration. En effet, une
satisfaisant le niveau d’immigration politique d’immigration comprend
Diversité urbaine, vol. 5, no 1, printemps 2005 13
Figure 1
Position des gouvernements sur le niveau de l'immigration: 1976,
1986, 1996 et 2003

100
Pourcentages des pays

86
90
76 77 75
80
70
60
50
40
30 21 21
20
20
7 7 5
10 4 2
0
1976 1986 1996 2003
Années

Source: United Nations, World


Trop bas Satisfaisant Trop haut
Population Policies 2003 , table 16, p.41

Figure 2
Politiques sur l'immigration: 1976, 1986, 1996 et 2003

100
86
Pourcentages des pays

90
76
80
70 62
60 55

50
40
40 34
30
20
20
7 7 5
10 4 4
0
1976 1986 1996 2003
Années

Source: United Nation, World Population


Policies 2003, table17, p.43 En hausse Maintenues / Pas d'intervention En baisse

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essentiellement deux volets, un premier moment, elles sont surtout de nature
axé sur la sélection (critères et restrictives et visent le contrôle des
conditions d’entrée) et un second axé sur migrations, en particulier celles liées au
l’intégration. Si au cours du 19e siècle trafic des êtres humains et aux
et une grande partie du 20e siècle les migrations clandestines (Pellerin, 2004 :
politiques migratoires ont opté pour le 9). Les quelques mesures incitatives qui
laisser-faire en matière d’intégration, il existent visent essentiellement à faciliter
faut reconnaître que, depuis les années la circulation des travailleurs qualifiés
1980 en Amérique du Nord et les années dans le contexte de l’intégration
1990 en Europe (en particulier les pays régionale et des traités réglementant le
de l’Union Européenne), plusieurs pays commerce et les services (ibid. : 12).
ont développé des politiques explicites Pour le moment donc, la préoccupation
d’intégration. Les réponses politiques des États impliqués dans les discussions
aux nouvelles tendances migratoires se multilatérales est centrée sur
sont déployées sur les deux l’harmonisation des politiques
plans international et national. d’immigration en vue surtout de
renforcer les frontières externes (e.g.
Sur le plan international construire la forteresse d’Europe) ou de
développer un périmètre de sécurité entre
Sur le plan international, la les États-Unis et le Canada, en particulier
mobilité de la main-d’œuvre est devenue après le 11 septembre 2001
un enjeu crucial compte tenu des (Piché et Djerrahian, 2002). Par contre,
pressions liées à la mondialisation et à les initiatives multilatérales se
la problématique de l’intégration préoccupent très peu, voire pas du tout,
régionale qui la sous-tend (Simmons et des droits des migrants. Une exception
Piché, 2002). L’étude très récente de notoire concerne la charte des Nations
Pellerin (2004 : 6-7) affirme qu’il y a eu Unies sur le droit des travailleurs
depuis les années 1990 une nette migrants et des membres de leur famille
augmentation des initiatives (International Convention on the
multilatérales en matière de migrations Protection of the Rights of All Migrant
internationales, initiatives qui ont Workers and Members of their
surtout une portée régionale en lien avec Families). Ce traité, adopté lors de
les efforts d’intégration économique. De l’Assemblée générale des Nations Unies
telles initiatives ont eu pour conséquence en décembre 1990, constitue
une implication croissante du juridique l’instrument le plus important visant à
dans les relations internationales et dans établir un régime international de
la gestion multilatérale de la migration protection des travailleurs migrants (de
internationale. Varennes, 2002 : 15). Le fait qu’à la
date du 31 janvier 2003, seuls 21 États
Les exemples d’initiatives l’aient ratifié et que parmi les signataires
multilatérales de gestion de la migration aucun ne provienne de pays développés
internationale démontrent que, pour le en dit long sur les réticences des pays à
Diversité urbaine, vol. 5, no 1, printemps 2005 15
lier leurs prérogatives en matière de rer une interaction harmonieuse
migrations à une régulation entre les populations et les grou-
pes possédant des identités cultu-
internationale qui serait contraignante.
relles plurielles, variées et dyna-
miques (…). Les politiques visant
Devant l’ampleur prise par les divers l’inclusion et la participation de
flux migratoires dans le monde tous les citoyens sont des garantes
(immigrants, revendicateurs du statut de de la cohésion sociale, de la vita-
réfugié, travailleurs migrants) la lité de la société civile et de la paix.
Ainsi défini, le pluralisme culturel
promotion de la cohésion sociale et de
constitue l’expression politique de
la diversité culturelle apparaît la réalité de la diversité culturelle.
également à l’ordre du jour des (…) »
discussions multilatérales. Une
initiative importante dans ce domaine,
L’article 4 stipule que la défense de
lancée d’ailleurs par le Canada,
la diversité culturelle constitue un
concerne le projet Metropolis qui
impératif éthique indissociable du
regroupe 17 pays du Nord et qui se
respect de la dignité humaine et
présente comme un forum international
implique un engagement dans les droits
pour la recherche et le développement
humains fondamentaux. Enfin, l’article
de politiques publiques sur les
10 fait référence à la nécessité du
migrations, la diversité et les villes en
renforcement de la coopération et de la
évolution (www.metropolis.net). Le
solidarité au niveau international dans
discours de ce forum international est
la défense de la diversité et de la création
centré sur les notions de citoyenneté
culturelles.
partagée, d’inclusion et de cohésion
sociales. Le postulat de base est que la
En résumé, malgré les réticences des
gestion de la diversité exige de plus en
pays à partager la gestion des migrations
plus des politiques publiques explicites
internationales et de la diversité avec
qui favorisent la cohésion sociale
des instances multilatérales, il est clair
(Kymlicka, 2003).
que depuis dix ans, la gestion de la
migration internationale relevant dans
Une autre initiative, plus ambitieuse
le passé de la souveraineté exclusive des
celle-là, en faveur de la promotion de
États devient de plus en plus discutée,
la diversité culturelle provient de
voire encadrée, par des instances
l’UNESCO qui a adopté en novembre
régionales (Pellerin, 2004). On parle
2001 une Déclaration universelle sur la
d’ailleurs de plus en plus d’un régime
diversité culturelle1. Trois articles sont
mondial de gestion de la migration
particulièrement éloquents pour notre
internationale (Ghosh, 2000) et, même
propos. Tout d’abord, l’article 2 établit
si nous n’en sommes pas encore là, les
la distinction entre la diversité culturelle
pressions économiques et
et le pluralisme culturel :
institutionnelles actuelles vont pour le
« Dans nos sociétés de plus en plus moins dans ce sens.
diversifiées, il est essentiel d’assu-

16 Diversité urbaine, vol. 5, no 1, printemps 2005


politiques et les catégories statistiques
Sur le plan national qui les supportent sont présents dans
toute société (Nobles, 2000). Toutefois,
Malgré les pressions de la les constructions statistiques autour des
mondialisation et de la montée du catégories ethniques recouvrent une très
multilatéralisme en matière de grande diversité qui rend difficile toute
migrations, il est clair que les tentative de généralisation. Cela est dû
prérogatives relatives aux migrations essentiellement aux spécificités
internationales demeurent encore historiques et sociales et aux divers
largement de juridiction nationale. On processus à la base de la stratification
peut alors se demander comment les raciale et/ou ethnique : conquêtes,
pays répondent actuellement à annexions, redécoupages de frontières
l’émergence de sociétés de plus en plus ou migrations, autant de processus qui
pluralistes et multiculturelles. En fait, ont placé certains groupes dans des
il n’existe pas de réponse unique mais situations minoritaires, qu’il s’agisse de
une très grande diversité d’approches en minorités anciennes ou récentes (Streiff-
matière de politiques d’intégration. En Fenart, 1997: 3). En simplifiant, quatre
effet, celles-ci sont directement cas de figure semblent résumer les
tributaires de la conception même des expériences historiques et actuelles en
rapports entre minorités et majorités. matière de statistiques ethniques.
Actuellement, et en simplifiant
beaucoup, deux modèles d’intégration Le premier cas (compter pour
s’opposent dans le monde : soit le dominer et exclure) a caractérisé une
modèle républicain qui, à toutes fins bonne partie des expériences historiques
pratiques, nie toute pertinence de liées au colonialisme. Quoique
l’ethnicité dans les rapports des individus largement répandu historiquement, il
avec l’État, soit le modèle demeure toujours d’actualité dans
multiculturaliste qui vise à protéger les certains pays nouvellement
droits des minorités surtout en matière indépendants. Historiquement, ce type
de racisme et de discrimination. de catégorisation a été étroitement
associé à la situation coloniale
Il existe plusieurs façons d’examiner fortement imprégnée de l’idéologie
les réponses politiques en matière de raciste et de la problématique
gestion des différences culturelles. La supériorité/infériorité, héritage de la
façon dont les États traitent les questions domination impériale (Kertzer et Arel,
des catégories ethniques dans les 2002). Cette approche a caractérisé
statistiques officielles constitue un bon l’ensemble des régions sous domination
indicateur des réponses politiques au coloniale, surtout l’Afrique et l’Asie mais
niveau national. Ce traitement est fort aussi l’Europe de l’Est. De façon
révélateur des rapports entre minorités générale, il s’agissait de recourir à des
et majorités (Rallu et al., 2004). En catégories reflétant les divisions raciales
effet, les liens entre discours et projet et ethniques considérées comme
Diversité urbaine, vol. 5, no 1, printemps 2005 17
scientifiquement évidentes et dans presque tous les pays de l’Europe
administrativement pertinentes (Uvin, de l’ouest, au nom du principe
2002). Une telle conception de la nation républicain de l’unicité nationale. Dans
et de la stratification, héritée de ces derniers pays, un inventaire récent
l’Europe, vise essentiellement à montre que les raisons pour lesquelles
reconnaître des droits aux dominants et les pays refusent, par exemple, d’inclure
à exclure les dominés du champ de la une question sur le groupe ethnique dans
citoyenneté. Il est intéressant de noter leur recensement sont surtout d’ordre
que l’approche « compter pour dominer politique, constitutionnel et légal. C’est
et exclure » ne s’est pas développée le cas notamment de la France, de
uniquement dans des situations l’Allemagne, de l’Espagne, de la
coloniales. En effet, cette problématique Belgique, du Danemark et de l’Italie.
a longtemps été présente dans les pays Pour la Suède, la Suisse et l’Irlande, il
d’immigration comme les États-Unis et semble que cette information ne soit pas
le Canada. Par exemple, dans le Canada pertinente et qu’il n’y ait pas de demande
du 19e et du début du 20e siècle, la sociale pour ce genre de données
problématique raciale était inscrite dans (Courbage, 1998 : 55).2
la politique d’immigration visant à
Un petit retour historique permet de
exclure certains groupes comme les
constater ici le double standard des
Noirs et les Asiatiques. Il faudra attendre
pratiques métropolitaines dans les
les années 1960 pour que soient éliminés
colonies. Ainsi, la France, la Grande-
les critères racistes (Piché, 2003).
Bretagne et la Belgique, qui refusaient
Le deuxième cas de figure (ne pas d’inclure des questions sur
compter au nom de l’intégration l’appartenance culturelle ou ethnique,
nationale) est associé à la perspective incompatibles avec leur notion d’État-
républicaine pour laquelle l’identité nation, n’ont pas hésité à le faire dans
nationale ne peut qu’être unique. Les les colonies (Kertzer et Arel, 2002 : 10).
différences ethniques sont ainsi niées, Dans le cas spécifique de la France, la
devant disparaître grâce à un processus colonisation, créant un système de
d’assimilation inéluctable. À l’opposé classification ethnique, constitue un déni
de la problématique « compter pour de l’universalisme républicain (Otayek,
dominer », plusieurs pays ont plutôt opté 2000 : 24-25).
pour une absence de comptabilisation
Le troisième cas (compter ou ne pas
des populations sur des critères ethniques
compter au nom de la mixité) est moins
ou nationaux. Les justifications ne sont
répandu. Il est aussi bien associé au fait
pas toutes identiques mais, dans tous les
de compter que de ne pas compter, mais
cas, l’ethnicité comme base de
pour des raisons qui ont peu à voir avec
stratification sociale est niée, soit,
les approches racistes ou d’unification
comme dans une bonne partie de
nationale. Il s’agit plutôt d’un discours
l’Afrique actuelle au nom de
de valorisation de la mixité. Ici c’est
l’intégration nationale, soit, comme
l’expérience latino-américaine qui se

18 Diversité urbaine, vol. 5, no 1, printemps 2005


démarque de la plupart des expériences minoritaires et les idéologies anti-
historiques notées jusqu’ici. Dans cette racistes et anti-discriminatoires. Si
région, le fait de la mixité raciale est l’Afrique semble échapper pour le
reconnu dans le discours politique et moment à ce mouvement (par exemple,
idéologique comme une valeur positive la Côte d’Ivoire) la reconnaissance du
et, à ce titre, elle ne doit pas poser de pluralisme impose de plus en plus de
problème. Dans ce contexte idéologique, nouvelles pratiques statistiques et risque
on retrouve deux pratiques distinctes. de transformer les pratiques comptables
D’une part, dans la plupart des pays (par des recensements. Cela est
exemple, au Vénézuela, en Colombie, à particulièrement vrai dans le cas de
Cuba, en République Dominicaine) les l’Europe de l’est où la problématique du
catégories de race et de couleur pluralisme fait son apparition (Blum et
n’existent pas dans la statistique Gousseff, 1997 ; Abramson, 2002 ; Arel,
officielle (Nobles, 2000 : 66). D’autre 2002). De l’autre côté, les pays comme
part, et c’est le cas du Brésil, le discours la France, caractérisés par l’absence de
racial fait en quelque sorte l’éloge de la statistiques ethniques, se voient
mixité, insistant sur les relations raciales confrontés à la montée d’une demande
harmonieuses, et les données statistiques sociale pour des données exigeant la
servent alors à mesurer le degré de quête d’informations sur les modalités
blanchiment de la population (Nobles, d’insertion des immigrés au-delà des
2000 : 43 et 62). premières générations (Streiff-Fenart,
1997). On voit poindre dans l’ensemble
Enfin, le quatrième cas de figure
des pays de l’Union européenne une
(compter pour justifier l’action positive)
nouvelle problématique, soutenue
est d’apparition récente et implique un
d’ailleurs par le Conseil de l’Europe, qui
renversement total du discours par
exprime le besoin de données statistiques
rapport à la perspective raciste et
fiables « pour favoriser les relations
discriminatoire caractérisant le premier
interculturelles pacifiques et assurer la
cas. Si la plupart des pays se situent
protection des minorités nationales »
actuellement dans les trois premiers cas,
(Haug, 1998 : 11). Enfin, des pressions
les pressions sont de plus en plus fortes
en faveur de l’action positive
en faveur de la reconnaissance des
apparaissent tant en Amérique Latine,
minorités et de la nécessité de la
par exemple en Colombie (Barbary,
statistique ethnique pour documenter les
2001) et au Brésil (Nobles, 2000) qu’en
pratiques discriminatoires.
Asie, par exemple en Chine (Courbage,
Actuellement, toutes les constructions 2002). En d’autres termes, on passe de
idéologiques autour des notions de race la diversité des situations passées à un
et d’ethnicité se trouvent sous pression modèle pluraliste et multiculturel qui
et remises en question. D’un côté, les tend à remplacer le nationalisme
pays utilisant les catégories statistiques ethnique par un nationalisme plus
à des fins de domination sont pris à parti civique (Dieckhoff, 2000 : 191).
par le mouvement des droits des groupes

Diversité urbaine, vol. 5, no 1, printemps 2005 19


de même que sur les programmes
La gestion « légale » de la diversité d’accès à l’égalité. C’est ainsi que la
culturelle plupart des conflits de nature culturelle
ou religieuse se sont retrouvés devant
En plus de la gestion par les États, les tribunaux qui ont ainsi été forcés
on observe de plus en plus le recours à d’interpréter les chartes et les
la voie légale comme mécanisme de programmes. Ils ont dû trancher les
gestion de la diversité. En général, le litiges en développant la notion
type de gestion par voie légale est d’accommodement raisonnable. C’est
fortement tributaire des réponses le cas notamment du Canada dont nous
politiques discutées plus haut. Ainsi, le allons surtout parler ici en nous référant
modèle républicain à la française rejette aux marqueurs religieux qui ont émergé
toute reconnaissance des droits de comme facteur de conflit, non seulement
certains groupes basés sur des critères en milieu scolaire (McAndrew, 2002)
ethniques, culturels ou religieux. Cette mais aussi dans d’autres espaces publics.
approche, que l’on peut caractériser de
« tolérance zéro », va opter pour une Que signifie la notion
gestion législative des conflits. d’accommodement raisonnable? Tout
L’exemple le plus fréquemment cité dans d’abord, cette notion fait référence à la
la littérature est certes celui des débats présence de deux « droits » qui
parfois virulents concernant le port du s’affrontent : l’un revendiqué par les
voile islamique à l’école. Au nom des représentants de la société dite d’accueil
principes républicains et de la laïcité, (e.g. les employeurs, les enseignants, les
le gouvernement français a finalement administrateurs d’institutions publiques)
adopté un règlement interdisant tout l’autre revendiqué par un individu (ou
symbole religieux ostentatoire. Parfois, un groupe) issu d’un groupe minoritaire
les termes du débat peuvent paraître et qui se sent discriminé. C’est la cour
extrêmes comme en fait foi l’utilisation qui doit trancher le litige :
d’expressions telles que « le foulard l’accommodement raisonnable signifie
contre la république » (Vianès, 2004 : alors que le droit du minoritaire doit être
205) ou encore les «voilomanes » (ibid.: respecté pour autant qu’il ne constitue
224) en parlant des personnes qui pas une contrainte excessive pour
défendent le port du voile. Évidemment, l’institution où ce droit sera mis en
dans ce modèle, les recours à la voie œuvre. De façon précise,
légale sont limités, voire inexistants. l’accommodement raisonnable peut se
définir comme :
Par contre, le modèle
multiculturaliste, en admettant la « l’obligation d’adapter une règle
diversité culturelle comme un droit conçue pour une majorité, dans le
fondamental, a dû développer une but de répondre aux besoins spé-
approche plus tolérante essentiellement cifiques de certaines personnes ou
axée sur les chartes des droits et libertés d’un groupe afin que ceux-ci ne

20 Diversité urbaine, vol. 5, no 1, printemps 2005


soient pas victimes de discrimina- parce que sa religion lui interdit de
tions liées aux caractéristiques qui porter autre chose sur la tête qu’un
les différencient de la majorité. turban. Bhinder a perdu son emploi
Cela implique de faire des excep- parce que la compagnie refusait de faire
tions aux règles générales ou de des exceptions à la règle et que Bhinder
les modifier de manière à compo- refusait d’accepter un autre travail
ser avec les besoins propres à cer- n’exigeant pas le port du casque de
tains groupes ou personnes, afin sécurité. En 1981, un tribunal nommé
de respecter leur droits à l’éga- par la Commission des droits de la
lité. » (Drapeau, 2001 : 306, cité personne en était venu à la conclusion
par le Conseil des relations que M. Bhinder avait été victime de
interculturelles, 2004 : 50). discrimination et que l’employeur se
devait de le réengager et de lui fournir
Les exemples de jugements qui une compensation salariale. Par contre,
appliquent un tel principe abondent au la Cour d’appel fédérale a annulé la
Canada. Ainsi, tout récemment (30 juin décision du tribunal et lui a renvoyé
2004), la Cour suprême du Canada a l’affaire pour qu’il rende une décision
donné raison à un groupe de Juifs en considérant que la condition de
orthodoxes contre les propriétaires d’un travail ne constituait pas un acte
immeuble qui voulaient interdire la discriminatoire. L’affaire qui avait
construction de sukkats sur les balcons débuté en 1978 avec la mise à pied de
de l’immeuble, cette interdiction ayant l’employé, s’est rendue en Cour suprême
déjà fait l’objet d’une entente dans le du Canada. Cette dernière a statué que
contrat d’achat. Il faut mentionner que le CN n’avait pas violé la Charte
les propriétaires avaient auparavant canadienne des droits de la personne
gagné leur cause à la fois à la Cour lorsque l’employeur avait demandé à M.
supérieure et la Cour d’appel du Québec. Bhinder de remplacer son turban par un
casque de sécurité ou de mettre ce
Ceci dit, le principe de dernier sur le turban. La Cour suprême
l’accommodement raisonnable ne du Canada a donc décidé que le port du
s’applique pas de façon automatique et turban sikh pouvait être interdit sur les
mécanique comme en font foi deux chantiers de construction. Même s’il y
jugements contradictoires sur le port du avait violation de la liberté de religion,
turban. Dans le premier cas, un le port obligatoire du casque de
employé du CN (Canadien National) construction avait une fonction de
avait été mis à pied parce qu’il refusait sécurité publique qui devait prévaloir sur
de satisfaire aux règles de sécurité de la le droit de l’individu (voir jugement du
compagnie. En effet, le CN a posé comme 17 décembre 1985, « K.S Bhinder et la
condition d’emploi que tous ses Commission canadienne des droits de la
employés portent un casque de sécurité personne (appelants), contre la
en un lieu particulier de travail. Bhinder, Compagnie des chemins de fer nationaux
un employé sikh, a refusé d’obtempérer du Canada, (intimés) »).
Diversité urbaine, vol. 5, no 1, printemps 2005 21
Cette décision n’a pas empêché cinq Le cas du voile islamique (le hijab)
ans plus tard, soit le 15 mars 1990, que est beaucoup plus compliqué. Les
le Gouvernement fédéral décide exemples suivants permettent d’illustrer
d’autoriser le port du turban parmi les cette complexité. Le 7 septembre 1994,
policiers sikhs de la GRC. Le port du Émilie Ouimet, une étudiante de 12 ans,
turban était déjà accepté aux douanes est expulsée de l’école Louis-Riel dans
et dans l’armée. C’est la Section de l’est de Montréal pour s’être présentée
première instance qui a statué qu’il n’y en classe coiffée du hijab (voile
avait pas eu d’infraction à la Charte islamique) et portant une longue
lorsque des membres de la GRC tunique. Les règles vestimentaires de
adhérant à la religion Sikh ont été cette école ne permettaient pas le port
autorisés à porter leur turban ainsi que du voile (même si d’autres écoles le
d’autres articles religieux avec leur permettent). S’ensuivent la controverse
uniforme. Cette décision suivait la et un débat public où s’affrontent les
requête du commissaire de la GRC faite tenants de la tolérance zéro et ceux en
en avril 1989 et qui demandait au faveur de l’accommodement. En février
gouvernement de modifier le règlement 1995, suite à deux plaintes concernant
policier afin que les convictions l’interdiction de porter le voile à l’école,
religieuses des Canadiens d’origine sikh la Commission des droits de la personne
soient respectées. du Québec publie un rapport sur le port
du foulard islamique à l’école et au
Un autre cas d’accommodement travail. Par ce rapport, la Commission
concerne l’affaire du kirpan (petit trace les principes au sein desquels les
couteau porté par les Sikhs) dont le jugements seront prononcés. Ce rapport
jugement a été rendu le 17 mai 2002 fait part d’un avis juridique (et non d’un
(titre du jugement : «Balvir Singh jugement) qui affirme que les écoles du
Multani, en qualité de tuteur de son fils réseau public ne peuvent de façon
mineur Gurbaj Singh Multani générale interdire le port du hijab. Cette
(requérants), contre Commission scolaire interdiction constituerait un geste
Marguerite-Bourgeois, (intimée)»). discriminatoire compromettant le droit
Dans cette affaire, il avait été interdit à l’instruction publique ainsi que la
au jeune Gurbaj Singh Multani qui liberté de religion. En mai 1995, la
fréquentait l’école Ste-Catherine Centrale de l’enseignement du Québec
Labouré à Montréal de porter le kirpan. (CEQ) s’oppose formellement au port du
Le jugement en question stipule que G.S. hijab à l’école. Face à cette opposition,
Multani pourra aller à l’école avec son la Fédération des commissions scolaires
kirpan à condition qu’il soit dans un du Québec répond que la décision
fourreau en bois, que le tout soit d’interdire ou non le voile reste entre
emprisonné dans une étoffe solide, qu’il les mains de chaque école. En mai
le porte constamment sous ses vêtements 2003, le Comité sur les affaires
et ne s’en départisse jamais à l’école. religieuses du ministère de l’Éducation

22 Diversité urbaine, vol. 5, no 1, printemps 2005


publie un document prônant la tolérance problèmes, surtout lorsque s’affrontent
en matière de symboles religieux. Tout deux séries de droits, celui de la liberté
récemment (26 mars 2004) le Conseil religieuse versus celui de l’égalité entre
des relations interculturelles a également les sexes. Poussé à l’extrême, ce principe
tranché en faveur de la tolérance peut aboutir à un courant de plus en plus
religieuse dans le milieu scolaire et en vogue dans la littérature, celui du
rappelle l’obligation de pluralisme légal (Macdonald, 2003). Ce
l’accommodement raisonnable. modèle reconnaît explicitement la
capacité de divers groupes (sociaux,
Les débats sur le port du voile sont psychologiques, affectifs ou virtuels) de
révélateurs de la complexité des enjeux. générer des règles légales. De plus, cette
D’une part et comme nous venons de le approche stipule que c’est la médiation
documenter, il s’est développé au Ca- des intérêts et non les décisions juridiques
nada et au Québec une volonté d’ac- (adjudication of rights) qui constitue le
commodement qui se démarque de la mode optimal pour encadrer et
tolérance zéro. Ce courant dominant reconnaître légalement la diversité
présentement se porte à la défense du sociale (ibid. : 85). Dans ce contexte,
droit des jeunes filles qui revendiquent la médiation peut avoir lieu dans
le port du voile à l’école au nom du res- plusieurs espaces et à des niveaux
pect de la diversité culturelle et reli- locaux : ainsi, le pluralisme légal stipule
gieuse (Geadah, 1996 : 245). Par qu’il existe une pluralité de sites
ailleurs, pour Geadah, une Québécoise producteurs de lois plutôt qu’un seul site
d’origine égyptienne, il faut éviter de étatique juridique (ibid. : 98). Une telle
tomber dans la rectitude politique (ibid. : position peut aboutir à des situations
261). Selon elle, l’accommodement rai- inacceptables pour plusieurs personnes
sonnable est une voie à deux sens et et groupes. L’exemple le plus flagrant
«le droit à la différence ne doit pas abou- est la décision récente (décembre 2003)
tir à une différence des droits » (ibid. : d’implanter en Ontario des tribunaux
288). Le port du voile constitue un af- islamiques parallèles qui peuvent
front à la valeur fondamentale que cons- prendre le relais des tribunaux officiels
titue l’égalité entre les sexes. Sa posi- canadiens dans le règlement de certains
tion reste néanmoins mitigée dans la conflits entre Musulmans. Il s’agit d’un
mesure où elle ne prône pas la tolérance tribunal judiciaire fondé sur la charia
zéro comme en France. Elle suggère plu- et destiné à traiter par arbitrage les
tôt de décourager le port du voile à conflits matrimoniaux entre Musulmans.
l’école à travers une approche souple et La loi ontarienne permet ce genre de
incitative plutôt que coercitive, et d’uti- règlement, pour autant qu’ils soient
liser la persuasion par le dialogue (ibid. : négociés à l’aide d’un arbitre et de façon
269). volontaire par les deux parties.
Toutefois, les tribunaux ontariens ne
Le principe de l’accommodement reconnaîtront pas les jugements issus de
raisonnable ne va pas sans poser des ce tribunal s’ils violent la Charte
Diversité urbaine, vol. 5, no 1, printemps 2005 23
canadienne des droits et libertés. On l’ampleur aussi bien en Amérique qu’en
peut imaginer le tollé que suscite une Europe, aidés en cela par les événements
telle décision, non seulement de la part du 11 septembre 2001, et les politiques
des groupes de femmes mais de tous les migratoires deviennent de plus en plus
groupes soucieux du respect du droit à sélectives, ne permettant qu’aux déten-
l’égalité des sexes.3 teurs de capitaux, qu’ils soient financiers
ou humains, de circuler librement dans
En bref, dans le modèle canadien si, le monde.
comme nous venons de le voir, la
position de l’État face à la diversité laisse Il est difficile pour le moment de
beaucoup de place à la voie légale, il prédire dans quelles directions iront les
n’en demeure pas moins que cette voie politiques migratoires et la gestion de
ne peut à elle seule régler les nombreux la diversité culturelle. Selon ma lecture
conflits qui font appel à des systèmes des tendances de fond, donc au-delà des
de valeurs parfois diamétralement événements du 11 septembre et des
opposés. guerres lancées au nom de la lutte anti-
terroriste, il me semble que le processus
de la mondialisation est inéluctable et
Conclusion que les sociétés développées devront de
plus en plus ouvrir leurs portes et
Il faut reconnaître en terminant que permettre une plus grande circulation
la question de la diversité sociale et cul- des personnes. Il en découle que le
turelle est – et sera pour longtemps en- modèle « multiculturaliste » deviendra
core – à l’ordre du jour des grands dé- de plus en plus prégnant et que
bats de société. L’avenir à ce sujet est l’approche légale qui le sous-tend
loin d’être acquis. D’une part, les si- constituera une voie privilégiée dans la
gnes d’ouverture sont évidents. L’immi- lutte contre le racisme et la
gration est de plus en plus discutée dans discrimination.
un contexte multilatéral et global et
dans une perspective positive. La lutte
pour les droits des migrants et contre le
racisme et la discrimination prend une
dimension également globale. L’idée
d’une plus grande liberté dans les mou-
vements migratoires fait son chemin.
L’idéologie du multiculturalisme rem-
place de plus en plus celle de l’assimi-
lation. Enfin, la gestion de la diversité
culturelle loge de plus en plus du côté
du respect plutôt que du rejet. Mais en
même temps, les mouvements anti-im-
migration d’extrême droite prennent de

24 Diversité urbaine, vol. 5, no 1, printemps 2005


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