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Chapitre 2 : Techniques d’immunoprécipitation et d’agglutination

I. Aspects fondamentaux de l’immunoprécipitation


C’est une réaction qui se déroule dans un milieu liquide ou gélifié entre un antigène soluble et un anticorps
précipitant. Le précipité est dû à la formation d'un réseau macromoléculaire tridimensionnel qui est visible à
l’œil nu. Bien que la formation d’un complexe soluble antigène-anticorps prend quelques minutes, la
formation d’un précipité visible se développe plus lentement (1-2 jours).
Le phénomène d’immunoprécipitation a été mis en évidence par Heidelberger et Kendall en milieu liquide.
1. La courbe de précipitation :
Une série de tubes à hémolyse est préparée avec une quantité constante d’Ac et des quantités croissantes d’Ag.
La réaction se déroule pendant une nuit puis une centrifugation est réalisée pour recueillir le précipité.
L’analyse de la quantité de culot obtenue permet de tracer la courbe de précipitation qui présente 3 zones :
• Zone d’excès d’anticorps : première partie de la courbe (quantité faible d’Ag) avec peu de précipité (les
molécules d’Ag mélangées aux anticorps ont la totalité de leurs déterminants antigéniques saturés par les
molécules d’Ac, il ne peut pas se former de réseau, les complexes immuns sont de petite taille).
• Zone d’équivalence : partie médiane de la courbe où on a une proportion optimale d‘Ag et d‘Ac donc la
quantité de précipité est maximale.
• Zone d’excès d’antigène : dernière partie de la courbe. L’ajout de grande quantité d‘Ag entraine une
diminution de la quantité de précipité qui tend à s’annuler : les complexes immuns préformés se redissolvent.

Figure 1. La courbe de précipitation

2. Les paramètres physico-chimiques influant la réaction d’immunoprécipitation :


✓ La température : Bien qu’à 37°C, la précipitation est accélérée, la formation de précipité peut rester
incomplète. À 0°C, la durée de la réaction est plus longue, mais la quantité de précipité est importante.
✓ La force ionique : La quantité maximale de précipité est obtenue pour [NaCl] < 0,15 M.
✓ Le pH : La réaction est inhibée aux pH extrêmes < 6 et > 8,5. L’effet dissociant des pH acides est
utilisé pour éluer des Ags ou des Acs.
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II. Les réactions d’immunoprécipitation en milieu liquide


1. Test d’anneaux (ring test) :
C’est une réaction qualitative. Sur le plan pratique, l’anticorps est introduit dans un tube capillaire de faible
diamètre. L’antigène soluble est ajouté par la suite en faisant attention à ne pas perturber l’interface. Si la
réaction est positive, il y aura apparition à l’interface d’un anneau de précipitation au bout de 5 mn. Des
tubes témoins sont nécessaires pour valider la réaction. Aucun précipité ne doit apparaitre dans les tubes
témoins.

Figure 2. Ring test


2. Les techniques de turbidimétrie et néphélémétrie :
Deux techniques automatisables basées sur la déviation d'un faisceau monochromatique laser au contact des
particules de précipité.
Néphélémétrie : Elle s’appuie sur la mesure de la lumière diffractée selon un angle  par rapport à la
direction incidente. La technique consiste à mélanger dans la cuve de mesure du néphélémétrie les dilutions
appropriées de l’échantillon à doser et de l’antisérum spécifique (Figure 3). Après un certain temps
d’incubation, la cuve est introduite dans la chambre de mesure de la néphélémétrie.
Turbidimétrie : Elle consiste à la détermination de l’intensité lumineuse transmise selon l’axe de propagation
de la lumière incidente c’est-à-dire pour un angle d’observation nul (Figure 4). Sur le plan pratique, elle
consiste à mélanger une dilution appropriée de l’Ag à doser à un volume constant de l’anticorps. Après une
incubation, la lecture se fait avec un turbidimètre ou même un spectrophotomètre.
Ces deux méthodes quantitatives nécessitent le traçage d’une courbe d’étalonnage à partir d’une gamme de
dilutions d’un standard et d’y reporter le signal des échantillons pour déduire leurs concentrations.
L’intensité de la lumière mesurée dépend de la taille des complexes Ag-Ac en suspension, de leur forme, de
leur indice de réfraction et de leur nombre. L’immuno-néphélémétrie plus sensible que la turbidimétrie.
Ces techniques sont utilisées pour le dosage de nombreuses protéines sériques ex. immunoglobulines,
complément.
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Figure 4. Turbidimétrie
Figure 3. Néphélémétrie

III. Les réactions de précipitations en milieu gélifié :


Ce sont des réactions au sein d’un gel transparent. Différents gels peuvent être utilisés : polyosides isolés à
partir d’algues marines : agar-agar, agarose. La diffusion des Ags et/ou des Acs se fait à partir d’un puit et
on obtiendra la formation de gradients de concentrations continus. Il n’y a pas de diffusion des complexes
immuns mais plutôt une précipitation du réseau. La lecture se fait soit directement par apparition de zones de
précipitations (arcs, cercles…) ou indirectement après lavage et coloration.
1. Méthode de diffusion simple :
L’un des partenaires de la réaction de précipitation (le plus souvent l’Ac) est inclus à dilution constante dans
le gel où l’autre partenaire diffuse en formant un gradient de concentration.

Exemple : Méthode de Mancini :


C’est une méthode quantitative d‘immunodiffusion simple bidimensionnelle. L'Ag migre concentriquement à
partir d'un puit creusé dans une plaque contenant un gel dans lequel l'Ac est inclus à concentrations constantes.
Au point d’équivalence, les complexes immuns précipitent et s’immobilisent. Il apparaît autour du puits un
cercle de précipitation dont la surface est proportionnelle à la quantité d’Ag. Le taux d’Ag est obtenu à partir
de la courbe d’étalonnage établie avec des standards.
Cette technique permet le dosage des protéines (Ig, fractions du complément, alpha foeto-protéine etc.).

Figure 5. Méthode de Mancini


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2. Méthode de diffusion double


Les Ags et les Acs sont séparés par un gel neutre. Ils migrent l’un vers l’autre spontanément ou sous l’action
d’un champ électrique.
Exemple : Technique d’Ouchterlony
C’est une technique qualitative qui consiste à la diffusion de l'Ag et de l'Ac à partir de réservoirs creusés dans
une couche mince de gel. Les molécules diffusent uniquement en fonction de leur masse moléculaire et il se
forme des lignes de précipitation pour chaque système Ag–Ac aux zones d'équivalence respectives. Cette
technique permet de dénombrer les constituants d’un mélange antigénique (nombre de lignes de précipitation),
de les identifier en comparant leurs réactions à celles de préparations antigéniques connues vis-à-vis d’un
même immunsérum et d’en déterminer les coefficients de diffusion et de ce fait avoir une estimation de leur
masse moléculaire.
Lorsque deux Ags identiques sont déposés dans des puits adjacents, ils sont reconnus par les mêmes Acs de
l'antisérum, et les arcs de précipitation sont continus, car il s'agit du même système Ag-Ac : on parle d'identité.
Lorsque les deux Ags sont différents, ils sont reconnus par deux groupes d'Acs différents, et les deux arcs de
précipitation se croisent. On parle de non-identité, liée à l'existence de deux systèmes Ag-Ac totalement
distincts.
Si certains des épitopes sont partagés entre les deux Ags, il y a formation d'un éperon entre les deux arcs de
précipitation, traduisant une identité partielle.

Figure 6. Méthode d’Ouchterlony

IV. Aspects fondamentaux des réactions d’agglutination


La réaction d’agglutination met en jeu le plus souvent un Ag présent à la surface d'une particule d'une taille
comprise entre 0,1 et 10 microns (hématies, leucocytes, plaquettes, spermatozoïdes, micro-organismes,
billes de latex ou de sépharose) et des anticorps qui en sont spécifiques. La suspension de particules, d'abord
homogène, devient alors le siège d'agrégats visibles à l'œil nu ou au faible grossissement. C’est donc une
réunion de particules en amas à la suite d’une réaction Antigene-Anticorps.
Les réactions d’agglutination dépendent de certains paramètres physico-chimiques, à savoir :
- La température : La température accélère la fixation de l’Ac sur l’Ag, l’agglutination est plus rapide
à 37°C qu’à 4°C. Cependant, la quantité finale d’Ac fixé est plus élevée à basse température (après
24 h). On distingue des Ac « chauds » (fixation à 37°C) et des Ac « froids » (pas de fixation à 37°C).
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- Le pH : optimum entre 6 et 8.

- Les forces ioniques : la formation des réseau macromoléculaires est favorisée par la diminution du
potentiel zêta (la différence du potentiel électrique qui existe entre le nuage ionique entourant la
particule et le potentiel électrique du milieu).

V. Les réactions d’agglutination


1. Réaction d’agglutination directe ou active :
L'agglutination active ou directe résulte de l'association entre un Ac agglutinant et un Ag à la surface de la
particule. Elle se développe en tube, en microplaque, sur lame ou sur une plaque cartonnée plastifiée. Elle
peut être qualitative ou semi-quantitative, si une titration est effectuée, le titre étant l'inverse de la dernière
dilution de sérum à laquelle s'observe l'agglutination. On peut avoir comme applications des tests
d’agglutination :
• La détermination des groupes sanguins
• Le diagnostic des infections bactériennes
La technique d'agglutination exige les contrôles suivants :
• Un témoin positif : qui permet de contrôler la bonne réactivité des particules sensibilisées.
• Un témoin négatif : qui a pour but d'éliminer une agglutination spontanée du réactif.
• Le contrôle du sérum testé : ceci permet d'éliminer les difficultés supplémentaires propres au sérum étudié.

Figure 7. Agglutination directe


2. Réaction d’agglutination indirecte ou passive :
La particule sert seulement de support à un déterminant antigénique soluble artificiellement fixé à sa surface.
On utilise comme particule les globules rouges d’homme ou de mouton et dans ce cas on parle de réaction
d’hémagglutination. On peut également utiliser des particules inertes comme les particules de latex. Les
hématies ont comme avantages d’être uniformes, stables et facilement accessibles.
Par contre, elles sont également fragiles et présentent de nombreuses interférences par la présence de
nombreux Ags à leur surface. Les billes de latex sont des particules calibrées inertes qui n’ont pas
l’inconvénient de présenter des Ags à leur surface. L’Ag doit être au préalable isolé et purifié, sa fixation sur
la particule se fait par simple contact ou par fixation chimique ou immunologique.

Figure 8. Agglutination indirecte


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3. Réaction d’agglutination artificielle :
a. Test à l’anti-globuline :
Le réactif globuline a été utilisé pour déceler des Acs anti-globules rouges non agglutinants
- Test de Coombs direct : appelé test direct à l'anti-globuline (TDA): il permet de révéler une
sensibilisation in vivo des hématies par un auto-Ac (ex. anémie hémolytique auto-immune) ou par un
allo-Ac (ex. maladie hémolytique du nouveau-né, incompatibilité transfusionnelle)

Figure 9. Test de Coombs direct

- Test de Coombs indirect : appelé test indirect à l'anti-globuline (TIA): il permet de rechercher la
sensibilisation in vitro des hématies test par le sérum étudié. Le TIA est à la base de la recherche des
agglutinines irrégulières (RAI) qui sont en règle générale des IgG non directement agglutinantes.

Figure 10. Test de Coombs indirect

4. Inhibition de l’agglutination :
Cette technique permet de déceler la présence d'une substance soluble dans un milieu biologique. Celle-ci
entraînera la disparition de l'agglutination d'un système normalement agglutinant par captation des Acs
agglutinants sous forme de complexes solubles. Elle nécessite un système agglutinant et étalonné
(agglutination active ou agglutination passive).
On peut citer comme application : le test de grossesse

Figure 11. Inhibition de l’agglutination


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