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Les dessous du Web est un livre qui voyage.

Les lecteurs déposent leur exemplaire, après l’avoir lu, au hasard des villes
(sur un banc public, dans le métro, dans un aéroport…), afin qu’un autre
lecteur le prenne, le lise et le dépose quelque part, à son tour. Ces lecteurs
racontent où ils ont trouvé le livre, où ils l’ont ensuite déposé, sur le site de
Frenchweb.fr et sur le site www.lesdessousduweb.fr. L’itinéraire de
l’ouvrage, tout au long de sa route, est ainsi décrit.

Plusieurs capitales du monde, Paris, New York, Tokyo Hong Kong,


Bombay, Dubaï, etc. ont ainsi servi de points de départ à son lancement.
TABLE DES MATIÈRES
Mot du directeur de collection

Remerciements

Préambule

Introduction

Chapitre 1 ENVIRONNEMENT
Quand Harvard inventa le business romantism
Arsène Lupin, Gentleman Manager
Ce qui brille éblouit
Mac vs. PC
Le silence des génies anonymes
Compétition et coopétition
La loi du plus… nombreux
Le foyer digital
Dans les nuages
C’est que… c’est la crise !
Nomadisme.com
Echantillons gratuits
Chapitre 2 ENTREPRISE
Picasso contre Michel-Ange
Taille et importance
Vu à la télé
KISS
En tout affinité
La langue originelle
Diversion vs. Dix versions
Peur de son ombre
La sagesse des cadets
Le droit d’aimer
Free
Concours d’apnée
Chapitre 3 MANAGEMENT
Petit Google fight
L’imparfait du conditionnel
Les deux questions récurrentes
A chacun son rythme
Vices et vertus du sport
Verre à moitié plein, verre à moitié vide
La tête, le cœur et le ventre
Nom de Zeus
Ne te fais pas si grand
Quelle version du marketing ?
Self learning
Le testament de Peter Drucker
Les absents ont toujours raison
Détecteurs de talents
On gagne quand…
A chacun son mode
Blue collars, white collars et web collars
Chapitre 4 TEMPS
Socrate vs. Buddha
New leaders, new ladders
Le virus Y
Passer par le passé
L’écume du Web
Molière est mort sur scène
A condition que
Le marketing post mortem
Brain vs No brain
Entrepreneurs précoces
Web tragedy
Chapitre 5 ESPACE
La tour de Babel
Gandhi et l’illettrisme
Pelouse au repos
En attendant Godot
Caisse de résonance
Ce que cela te fait
Invention ici, réalisation là bas
Origami
Hors les murs
Le message c’est le medium
Le Web de la rue
Chapitre 6 INNOVATION
Innover autrement
Mieux que l’original
Innovation ou invention
Le mythe de l’innovation
Re Création
Au petit coin
On / Off
Benchmarker ailleurs
La marque rédacteur en chef
De l’autre côté du miroir
En grève
Chapitre 7 ILLUSIONS
Improvisation et préparation
Free, perfect and now
Spry
Rollover
Sur le ring
Backstage
Et Dieu créa la femme
Chifumi
Bla, bla, bla
Apprendre à se taire
First moover is the winner
Pour la bonne forme
Psychanalyse du Web
Chapitre 8 STRATÉGIE
Le temple du roi Salomon
La lettre manquante
La stratégie à la chinoise
Les 3 C de Monsieur K…
La science des nombres
Ford vs. Sloan
Miyamoto Musashi
La pomme
Baby foot management
ASCV
Au fur et à mesure
Du GRP au GRP n
Marketization/De-marketization/Re-
marketization
Chapitre 9 LES DESSOUS DU WEB
Quelques principes
La roue
Le dernier kilomètre marketing
Demain
Post Scriptum
Conclusion

Bibliographie
Ouvrages
Presse
Playlist

L’auteur

Crédit
Mot du directeur de collection
Ce « mot du Directeur de Collection », j’aurais pu l’appeler Les dessous des
dessous du Web.
Flashback : je viens d’arriver à New York, et je suis jet-lagué dans ma
chambre d’hôtel, l’hôtel 31 dans East Lower Manhattan, à l’occasion de la
semaine du Social Media Week. Et je découvre pour la première fois le
tapuscrit complet d’un livre… qui n’a pas encore de titre, sauf un titre
provisoire et bizarre qui tourne autour de Web 69 (explication ci-dessous au
premier §)… C’est le livre que vous tenez aujourd’hui entre vos mains.
Ce livre est étonnant, étonnant à plusieurs titres :

• tout d’abord, c’est, vous l’avez vu, un livre bilingue recto verso. En
effet, il est destiné à deux populations, la francophone et l’anglo-
saxonne.

• ensuite, c’est un livre voyageur. Dans son introduction, Bertrand


vous invite, une fois votre lecture terminée à le laisser dans un
espace public afin qu’un autre lecteur s’en empare et puisse donner
libre cours à son tempérament de voyeur pour regarder ce qui se
passe dans les dessous du Web.

• c’est un livre démonstratif puisque FrenchWeb, l’excellent site


dirigé par mon ami Richard Menneveux, nous donnera très
régulièrement des nouvelles des tribulations urbi et orbi des
volumes qui feront le tour du monde.

• c’est un livre iconoclaste. Foin de la technique, Bertrand prend du


recul et tel un Candide du 21e siècle nous montre à voir ce que la
plupart d’entre nous – internautes, blogueurs, twittos et geeks
réunis dans le même panier - n’avions pas encore vu (tiens, cette
formule me rappelle quelque chose, du côté de Hip Ip Ip…).

• c’est un livre qui n’hésite pas à tutoyer la langue en construisant de


multiples barbarismes qui feront date. Parmi ceux-ci, j’ai adoré les
Digital Homeless.

• c’est un livre qui agace souvent, tant le point de vue qu’il nous
montre semble évident (ah, je le savais, … mais ne l’avais jamais
dit ou je n’avais pas trouvé les mots pour le dire). Et nous nous
retrouvons tel le lapin prisonnier des phares d’une voiture qui
éclaire si fort le paysage qu’il en devient tout ébloui (le lapin, pas le
paysage !).

• c’est un livre qui prend parti et qui n’hésite pas à appeler un chat un
chat. Et qui n’a pas peur d’aborder le terrain psychologique sur
lequel se fourvoient souvent les internautes en mal de réputation.

• c’est un livre visionnaire.

• c’est un livre qui vous apprend que par exemple Google Fight
existe et qu’il y a 150 fois plus de recherches sur le ‘’Oui mais’’
que sur le ‘’Oui et’’… Le Oui mais est une plaie méconnue des
sociétés et l’argument tant redouté de tous les créatifs qui
présentent leur nouvelle idée du siècle. Plébiscitons le Oui et,
tellement plus positif et énergisant ! Même punition, même motif
pour l’utilisation délétère de l’imparfait du conditionnel en
entreprise.

• c’est un livre indispensable pour tout internaute qui veut


approfondir son métier, et aussi pour tout internaute mondain qui
voudra briller en société devant des gens imperméables au Web.

Retour dans ma chambre de l’hôtel 31 à Lower East Manhattan… où je


mets le point final à ma lecture du tapuscrit. C’est promis, je n’utiliserai
plus jamais le « Oui mais ».

Henri Kaufman
hipipip@gmail.com
Remerciements
Pour commencer et afin de n’oublier personne, nous remercions Pierre,
Paul, Jacques et tous les autres.
Merci à Henri Kaufman, Christophe Dussoliet et Xavier Wargnier.
Un grand coup de chapeau à FrenchWeb pour ses contributions, ses idées,
ses remarques, son dynamisme, son énergie et son enthousiasme.
Un grand merci à l’équipe de Richard qui a su trouver le temps nécessaire,
entre son déménagement, sa levée de fond, ses multiples projets, pour
améliorer cet ouvrage et en assurer le lancement.
Une pensée chaleureuse pour les correspondants ou amis, éparpillés dans le
monde et qui ont participé au lancement mondial du livre.
Nous remercions aussi celles et ceux qui ont encouragé, inspiré, insufflé
l’écriture de ce livre. Nous citons leurs prénoms par souci de discrétion,
leur laissant le soin de se reconnaître eux-mêmes : Anne, Anne-Charlotte,
Alain, Arnaud, Agnès, Alexandre, Antoine, Annie, Anne-Marie, Alexandra,
André, Alban, Anthony, Aïcha, Aude, Aziza, Bruno, Béatrice, Benoît,
Brigitte, Bénédicte, Bernard, Bertrand, Christophe, Christelle, Catherine,
Christine, Corinne, Carole, Céline, Christian, Cécile, Caroline, Chloé, Cyril,
Claude, Claire, Cédric, Cathy, Charles, Coraline, David, Didier, Delphine,
Dominique, Denis, Daniel, Damien, Dorothée, Eric, Emmanuel,
Emmanuelle, Elisabeth, Etienne, Frédéric, Flore, François-Henri, Franck,
Fabrice, Florence, François, Fabienne, Françoise, Frédérique, Florent,
Francesco, Gilles, Guillaume, Gwénaëlle, Géraldine, Gérard, Guy,
Geneviève, Gilbert, Hervé, Hugues, Henri, Isabelle, Ingrid, Jérôme, Jean,
Jean-Baptiste, Jean-François, Jean-Marc, Jean-Pierre, Jean-Luc, Jean-
Michel, Jean-Christophe, Jean-Philippe, Joël, Jacques, Jean-Claude, Jean-
Marie, JeanYves, Jean-Louis, Jean-Paul, Jean-Jacques, Jean-Charles, Julien,
Jacqueline, Jean Antoine, Karine, Katia, Laurent, Laurence, Lionel,
Ludovic, Laure, Laetitia, Loïc, Luc, Louis, Michel, Marc, Muriel, Marie,
Marine, Marina, MarieLaure, Maude, Michael, Martine, Mireille, Marie-
Christine, Matthieu, Minh Tri, Moi-même, Nandita, Nicolas, Nathalie,
Olivier, Olga, Paul Henry, Philippe, Pascal, Patrick, Pierre Louis, Patricia,
Patrice, Pierre, Pascale, Paul, Richard, Raphaël, Robert, Stéphane,
Sébastien, Sandrine, Sylvie, Sophie, Stéphanie, Sylvain, Sabine, Serge,
Sandra, Séverine, Samuel, Serge, Thierry, Thomas, Vincent, Violaine,
Valérie, Véronique, Virginie, William, Xavier, Yannick, Yann, Yves, Yi,
Yvan, Zina.
Merci également à toutes celles ou ceux que nous aurions pu oublier et qui
estiment avoir apporté leur pierre à l’édifice qu’est ce livre.
Merci aux cafés Costes de m’avoir accueilli à ses terrasses. Encore mille
excuses à Nathalie, la serveuse d’un autre établissement qui se reconnaîtra
et m’aura peut-être pardonné, à l’heure où nous écrivons, d’avoir renversé
son plateau. Une pensée pour les cuisiniers et ceux qui nous ont servis
(l’équipe FrenchWeb et moi-même), des différents restaurants du marché
des Enfants Rouge. Un clin d’œil au(x) poteau(s) de chez Monsieur
Richard.
Nous remercions également toutes celles et ceux croisés régulièrement sur
nos sites, nos blogs, nos pages Linkedin, Viadeo, Plaxo, Facebook, Twitter,
Google +, Wayn, A Small World, The Sphere, etc.
Préambule
Le Web est tout en contrastes. Il ressemble à une pièce de monnaie dont les
deux faces ne se quittent jamais, mais ne se rencontrent jamais non plus.
Du côté face, l’apparition d’une nouvelle économie, des créations
d’emplois, la croissance spectaculaire d’un nouveau type d’entreprises,
l’invention de nouveaux services, l’accélération de l’innovation, la diffusion
des idées et des savoirs, l’évolution des modes d’interaction entre les
individus, etc.
Du côté pile, l’hyper-puissance d’acteurs organisant l’information au niveau
mondial, la destruction de pans entiers de l’industrie (musique, cinéma…),
la disparition de medias traditionnels (journaux, radios…), le remplacement
de l’information par l’opinion, la remise en question de la propriété
intellectuelle, l’évaporation de prérogatives des États Nations…
Ce livre s’intéresse tantôt au Web lui-même, tantôt à ce qu’il influence,
transforme, modifie : des métiers (le marketing, le management, la
conception des produits…), des comportements, des mœurs, des idées (sur
l’innovation notamment), le travail, la communication, la connaissance, la
culture...
Il est destiné à celles et ceux qui ne veulent pas jouer à pile ou face. Il est
équivalent à la pièce de monnaie posée sur sa tranche, révélant ainsi les
deux faces d’un même phénomène.
Internet a d’abord été un média. Il s’est organisé en une industrie avant de
devenir une communauté. Celle-ci se doit de réfléchir à ce qu’elle est, à ce
qu’elle fait, à ce qu’elle pense. Ce livre pose, et pose à cette communauté,
un certain nombre de questions, amorce des réponses et ouvre des pistes de
réflexions.
Il ne dénonce rien ni personne. Il énonce simplement, souvent de manière
originale et insolite, parfois de façon iconoclaste, des idées nouvelles
hébergées davantage dans l’ère du Web que suspendues dans l’air du temps.
Les dessous du Web n’est ni un ouvrage académique ni un ouvrage
théorique. L’intuition et la liberté y occupent une grande place. Il est basé
sur une décennie et demi passée dans l’industrie du digital, à côtoyer ses
acteurs, ses entrepreneurs, ses coulisses… sans ne jamais perdre l’occasion
de réfléchir, animé par un esprit vigilant et un œil averti.
Soyons clairs, nous ne sommes pas là pour mettre de l’eau dans notre vin,
mais pour mettre du vin dans votre eau. Ce livre est un appel à la réaction,
au sursaut, à la prise de conscience, à l’action, face à une nouvelle réalité
que le Web incarne.
Introduction
Aux Etats-Unis, la célèbre Route 66 traverse trois fuseaux horaires et huit
États, d’Est en Ouest. Elle fut la première route transcontinentale
goudronnée des USA.
Les Américains la surnomment The Mother Road. Depuis, elle a rejoint la
légende et laissé place à une autre épopée américaine, traversant cette fois-
ci tous les Etats et tous les fuseaux horaires du monde entier : le Web.
D’une simple route, nous sommes passés à un monde : le digital. C’est dans
ce nouveau monde que ce livre va nous conduire.
A l’instar du sujet qu’il aborde, le Web, ce livre est :
• En plusieurs langues : en Français et en Anglais.
• Incubateur d’idées, de réflexions, de questionnements, de réponses
d’origines extrêmement diverses et variées.
• Vecteur d’une écriture fragmentaire, discontinue, procédant par
bonds, d’une idée à l’autre.

• Porteur d’une réflexion ressemblant à de la peinture fraiche,


puisque à peine répandue sur des pages blanches et n’ayant pas
encore sa couleur définitive.
• Agencé plus que structuré, aménagé plus qu’organisé, en
construction plus que définitif.
• Planétaire puisque lancé mondialement. Paris, New York, Tokyo,
Hong Kong, Bombay, Dubaï, etc. ayant servi de points de départ à
son lancement.

• En mouvement, car il voyage à travers le monde, au travers des


Etats, des continents et des fuseaux horaires. Les lecteurs déposent
leur exemplaire, après l’avoir lu, au hasard des villes (sur un banc
public, dans le métro, dans un aéroport…), afin qu’un autre lecteur
le prenne, le lise et le dépose quelque part, à son tour. Ces lecteurs
racontent où ils ont trouvé le livre, où ils l’ont ensuite déposé, sur le
site Frenchweb.fr et sur le site lesdessousduweb.frenchweb.fr.
L’itinéraire de l’ouvrage, tout au long de la route digitale, est ainsi
décrit.

A l’heure où vous lisez, des exemplaires des dessous du Web sont peut-être
dans le vol New York - Bombay, ou Paris-Tokyo, en attente d’être ramassés
sur des sièges de trains de Shanghai, sur des tables de restaurants d’affaires
de Mexico, dans des business centers de Moscou, dans les halls d’accueil
d’entreprises californiennes, dans des housses d’ordinateurs…
Quelques précisions sur l’écriture du livre :
Au tout début, cet ouvrage s’est écrit un peu comme un album de rock. Un
groupe content d’être réuni et qui, au lieu de se lancer des rifs de guitares,
d’échanger des rythmes, de s’envoyer des phrases musicales encore
balbutiantes, de chercher les quelques bons accords qui feront que le
morceau fonctionnera, s’échange des idées, confrontent des opinions,
partagent des expériences, soulèvent des questions, ébauchent des réponses,
au fil de carrières professionnelles entremêlées, de conversations avec des
connaissances communes, d’échanges d’e-mails, de coups de fils via Skype.
Au final, le résultat ressemble davantage à une jam session, à un concert de
jazz, à une séance de free-style, qu’à la partition bien ordonnancée d’une
symphonie de musique classique.
Ce livre a comme premier intérêt, l’échange qu’il a permis, les débats qu’il
a suscité, les idées qu’il a fait naître, chez les uns et chez les autres. Cet
ouvrage n’est pas le nôtre. Il est celui d’une communauté.
Les dessous du Web est, et entend bien rester, un agent actif, un principe
positif, un expédient, un stimulant, un excitant. Rien de définitif.
Simplement une étape le long de la route digitale, que vous avez déjà
commencé à parcourir et qui se terminera avec la poursuite des échanges,
des débats et des questions que le livre continuera à susciter.
Chapitre 1
ENVIRONNEMENT

Quand Harvard inventa le business


romantism
Les parallèles audacieux, entre des choses que l’on ne juxtapose
ordinairement pas, peuvent s’avérer fructueux. Tentons l’essai avec la
littérature courtoise du Moyen-âge et les business book américains.
Au Moyen-âge, l’Europe féodale se civilise peu à peu en devenant le foyer
1
de la Chrétienté . L’Eglise, alors toute puissante, est confrontée à un
paradoxe : elle prêche l’amour et la paix parmi les hommes, tandis que les
croisades lui ont permis de répandre la bonne parole, mais dans le sang. Les
jeunes nobles, à qui leur rang interdit de travailler, ne rêvent que d’exploits
chevaleresques, de prouesses militaires, de batailles. Il faut canaliser cette
génération.
L’Église invente, finance et promeut alors une nouvelle forme de récit : la
2
littérature courtoise . La quête du Graal en est l’un des chefs d’œuvre et
Chrétiens de Troyes l’un des maîtres. Ces romans tempèrent les ardeurs de
la jeunesse en inventant la figure du preux chevalier qui erre en quête
d’aventures, aime sa belle d’un amour courtois, se bat pour son roi, sous le
regard de Dieu.
Des siècles plus tard, les colons qui ont arraché l’indépendance des Etats-
Unis aux Anglais, rejouent presque le même scénario. La conquête du
continent s’est faite dans le sang. L’enjeu est désormais la quête de la
prospérité. Mais l’appât du gain est plutôt contraire aux préceptes religieux.
On bâtit alors les premières universités. Harvard est conçue pour enseigner
la théologie et le commerce. Depuis, les États-Unis n’auront de cesse de
développer une nouvelle littérature : la littérature managériale. Celle qui
encense de nouvelles théories comme le Fordisme, invente de nouvelles
sciences comme le marketing ou le management, mais surtout raconte les
success stories des entrepreneurs américains. Elle réconcilie les aspirations
individuelles des lecteurs (enrichissement, pouvoir, réussite…) avec des
valeurs collectives (prospérité, moralité, intégrité, travail…). Tout y est
politiquement correct. Les personnages n’ont presque plus rien à voir avec
la réalité, tant ils sont irréprochables.
La route digitale est elle aussi jalonnée de héros, d’exploits et de légendes.
La véritable réalité est moins belle. Trop observer la légende que la route
digitale a su façonner sur elle-même décourage, donne des complexes et
conduit à se remplir les poches du pantalon et de la veste, de lest, alors qu’il
faut avancer dans le monde digital.

Arsène Lupin, Gentleman Manager


Nous connaissons tous Arsène Lupin, le sympathique personnage de
Maurice Leblanc, surnommé le gentleman cambrioleur. En revanche, nous
ignorons qu’il est aussi un véritable manager. Bien des romans où il
apparaît, le montrent entouré de toute une équipe de complices qu’il
organise et manage de main de maître. La préparation de ses cambriolages
n’ont rien à envier à bien des stratégies. Les moyens lui permettant de
cacher le butin de ses cambriolages dans l’aiguille creuse de la plage
d’Etretat, forment un véritable dispositif logistique. La façon dont il
récompense ses complices rappellerait presque les politiques de
motivations. L’utilisation qu’il fait des journaux pour narguer la police,
médiatiser ses projets ou construire sa notoriété est un plan de
communication bien orchestré.
Bref, Arsène Lupin est un manager, mais qui n’existe qu’en roman.
En revanche, bon nombre d’organisations illégales bien réelles (mafia,
pègres, cartels…) comptent elles aussi des managers dans leurs rangs. A
vrai dire, elles sont comparables à des entreprises. Comme elles, elles ont
des stratégies, des objectifs, des organisations, des process, une hiérarchie,
des collaborateurs, des concurrents, des produits à vendre, des clients… Les
étudier est peut-être un moyen d’apprendre, de découvrir, d’identifier des
3
best practices .
Pour sortir de l’ornière dans laquelle l’entreprise est parfois embourbée, il
faut peut-être oser regarder ce qui « n’est pas conforme à la morale et au
bonnes meures » pour trouver la solution.

Ce qui brille éblouit


Livres, études, articles, émissions, sites Web, blogs ressassent les
sempiternelles mêmes exemples de « meilleures entreprises ».

• Dans les années soixante, on ne jurait que par Chrysler.

• Dans les années quatre-vingt que par IBM.

• Dans les années quatre-vingt-dix que par General Electric.

• Dans les années deux mille que par Microsoft.

• Dans les années deux mille dix que par Apple ou Google.

99,99% des entreprises du monde ne feront jamais aussi bien, n’arriveront


jamais à la cheville de ces légendes.
Ne devrions-nous pas nous intéresser à des entreprises moins
spectaculaires, nous ressemblant davantage, et plus imitables ?

Mac vs. PC
Mac vs. PC ? Derrière cette simple opposition entre deux marques
informatiques, deux philosophies d’affrontent.
Celle du PC, ou personnal computer, est héritée du passé. Elle demande à
l’homme de s’adapter à la machine. Celle du Macintosh est plus moderne.
Elle s’efforce d’adapter la machine à l’homme. La première capitalise sur
les capacités d’adaptation de l’individu tandis que la seconde s’appuie sur
ses potentialités. Dans le premier cas, l’homme est au service de la
machine. Dans le second, la machine est au service de l’homme. La
première est machine centric, la seconde est human centric. Toutes nos
entreprises, nos stratégies, nos process, suivent la logique PC. L’homme est
convié à se plier à des règles, des modes de fonctionnement, des habitudes,
une hiérarchie, des tableaux de bord, des ERP, des progiciels, etc. Et quand
cela ne marche plus, les organisations demandent à leurs collaborateurs de
s’adapter encore plus, en devenant toujours plus flexibles, mobiles,
souples... Et parce que nous ne sommes pas à un paradoxe près, on observe
les vainqueurs du moment, tel Google ou Apple, et on en on déduit que la
clef du succès se trouve dans la créativité, l’innovation, la
communication… Bref dans les potentialités de l’homme, que la
philosophie du Mac se propose précisément de libérer.
En somme, il y aurait deux types d’entreprises.
Celles obnubilées par l’organisation, la planification, l’implémentation
d’une stratégie prédéfinie. Les individus y sont conviés encore une fois à
s’adapter à un cadre. Même les chantres des nouvelles formes
d’organisations ou de travail, tel IBM ou Cisco, ont reproduit malgré elles
ce travers. Ces entreprises sont company centric.
Et puis, il y aurait les sociétés où l’on part davantage des individus, pour
construire le cadre qui leur permettra de donner le meilleur, de travailler
plus efficacement, de mieux réussir. Ces entreprises sont people centric.
Cette manière d’envisager l’entreprise, ce mode d’organisation, cette
philosophie peut permettre d’avancer à l’ère du digital.

Le silence des génies anonymes


Nous savons voir les génies qui ont une œuvre : les musiciens et leurs
symphonies, concertos ou opéras ; les peintres et leurs esquisses, leurs
dessins ou leurs tableaux ; les scientifiques et leurs découvertes, théories ou
théorèmes ; les inventeurs et leurs inventions, leurs exploits ou leurs
expérimentations ; les entrepreneurs et leurs sociétés, leur travail et leurs
fortunes ; les leaders politiques et leurs campagnes, leurs partis, leurs
conquêtes… En revanche, nous ne savons pas repérer, ni même reconnaître,
les génies sans œuvre. Les quoi ? Les « génies sans œuvre ». Nombreux
sont les génies en puissance, à qui la vie n’a pas donné l’occasion de
prendre conscience de leur talent, ou de découvrir le moyen d’exprimer ce
talent ou même simplement l’objet de leur œuvre, etc. L’historien Français
4
Jules Michelet leur consacre un chapitre entier dans son livre Le Peuple .
Selon lui, ces génies en puissance se cachent dans tous les recoins de la
société. Ils sont professeurs, employés, fonctionnaires, mères au foyer…
éloignés ou à quelques mètres d’un Pygmalion qu’ils ne rencontreront peut-
être jamais.
D’ailleurs, est-ce à eux de rencontrer leur Pygmalion ? N’est-ce pas
précisément le rôle de Pygmalion que de découvrir un génie et de l’aider à
se révéler en tant que tel.
Apprendre à repérer ces génies sans œuvre et à les guider sur la voie qui est
la leur est peut-être une façon intelligente de poursuivre sa marche dans le
monde digital ?

Compétition et coopétition
Nous sommes conditionnés pour la compétition.
Nous le sommes biologiquement, depuis la Préhistoire, pour simplement
survivre. Nous le sommes socialement. Nous le sommes
psychologiquement. Nous le sommes culturellement.
Nous sommes donc prédisposés à être confrontés, voire à affronter l’autre.
Le monde économique est le parfait terrain pour permettre à ce penchant de
s’exprimer. Nous abordons nos concurrents animés par un véritable esprit
de compétition. C’est la norme.
Or, la coopération a du bon. C’est parfois en coopérant avec ses concurrents
que l’on avance dans l’univers digital.
Les FAI ou Fournisseurs d’Accès Internet l’ont compris et, bien que se
livrant une concurrence intense, ont adopté en parallèle une démarche de
coopétition, sur certains sujets pour lesquels ils partagent des intérêts
similaires.
Juste un exemple. Tous les fournisseurs d’accès internet proposent à leurs
clients des boîtes e-mail. Il leur revient de correctement distribuer à chacun
de leurs abonnés les e-mails qui leurs sont adressés. Or, le spam fait rage et
les internautes déplorent cet envahissement de leurs boîtes e-mails par des
publicités non sollicitées. Les boîtes mails trop remplies, explosent. Les
courriers que l’internaute attend ne passent plus. Qu’à cela ne tienne ! Les
fournisseurs d’accès Internet Français se sont réunis en un club, dont l’un
des objectifs est de définir les règles de white listing ou de black listing des
sociétés réalisant des e-mailings. Celles qui ne respectent pas les règles
définies sont black listées. Autrement dit, les e-mailing qu’elles routent et
qui passent forcément par l’intermédiaire des fournisseurs d’accès sont
automatiquement bloqués par ces derniers, afin de protéger leurs clients du
spam. A l’inverse, les sociétés qui respectent les bonnes pratiques et se
conforment aux règles édictées par les fournisseurs d’accès sont white
listées. Leurs e-mailing ne sont pas bloqués et sont bien délivrés aux
destinataires finaux.
Par delà l’esprit de compétition qui nous anime, il faut parfois déposer la
hache de guerre au bord du chemin à emprunter, comme cela s’est parfois
déjà fait dans la jungle digitale.

La loi du plus… nombreux


Les succès commerciaux, marketing, passent la plupart du temps par des
effets de masse. On parle du film le plus visionné de l’histoire du cinéma,
du produit le plus vendu, de la boisson la plus bue dans le monde, etc.
Le phénomène devrait se renforcer avec la mobilisation en ligne des
consommateurs sur les espaces sociaux. Là encore, l’effet de nombre joue à
plein. Devenir la marque ayant le plus de Fans, produire le contenu ayant le
plus de Like, mettre en ligne la vidéo la plus téléchargée, sont des
challenges qui ont fait leur entrée dans les objectifs, officieux ou officiels,
des directions marketing.
Tandis que nous sommes assis derrières nos écrans, l’Inde est en marche
avec son milliard d’âmes. L’équipement en téléphones portables explose.
Les abonnements Internet aussi.
La « bombe démographique » comme on l’appelle et dont l’Inde n’est
qu’une partie, s’accompagne d’un accroissement du niveau de vie des
populations pour qui le poste de consommation « téléphone et Internet »
passe avant d’autres. Si en Occident, nous nous sommes équipés
technologiquement après avoir satisfait d’autres besoins, les pays émergents
ne suivent pas le même ordre. Il n’y a pas si longtemps, rappelez-vous, en
Occident, il fallait commencer par avoir un logement avant d’avoir une
ligne téléphonique, puisque la téléphonie mobile n’existait pas encore.
Aujourd’hui à Hong Kong, à Delhi, à Bombay, des jeunes qui sont loin de
pouvoir habiter et vivre autrement qu’avec leur famille, ont déjà des
téléphones portables, des comptes Facebook et twittent. La hiérarchie dans
les priorités de consommation est complètement chamboulée. L’ordre
traditionnel dans lequel les classes moyennes émergentes s’équipent en
biens est sans dessus dessous.
Le monde se globalise. Il devient un « village » à la vue duquel chacun veut
participer au moins de manière digitale. La barrière de la langue s’estompe
puisqu’il suffit de maîtriser quelques idiomes (Like, Poke, Tweet, Link…)
pour interagir un minimum.
A ce petit jeu, le poids démographique des pays émergents, pourrait
énormément compter dans le Web social et devenir un avantage décisif.
Quelle entreprise saura en faire un atout pour prendre de l’avance dans le
monde digital ?

Le foyer digital
Le monde change, l’économie aussi. Elle se tertiarise comme disent les
économistes. Le poids des services dans les PIB et autres PNB augmente.
Les équipements informatiques, les connections Internet, les téléphones et
autres terminaux, sont devenus les outils de travail, de production et de
productivité des salariés. Les collaborateurs d’une entreprise sont désormais
mieux équipés, mieux outillés techniquement, informatiquement,
téléphoniquement… à titre personnel, qu’à titre professionnel. Quand ils ont
deux téléphones et qu’ils ne sont pas dans les sommets de l’organigramme,
celui que leur a fourni leur entreprise est rarement le mieux des deux. A la
maison, l’ordinateur dont ils disposent est souvent plus récent, mieux
équipé en logiciels, doté de plus de mémoire que celui qu’ils utilisent au
travail.
Pour la première fois, quelques artisans mis à part, un salarié dispose de
meilleurs outils de production à titre personnel que ceux que lui fournit son
employeur. Le paradoxe est que les uns ont les outils que devraient utiliser
les autres. De plus, le phénomène devrait s’amplifier avec le développement
de la présence en ligne. De plus en plus de salariés ont une véritable
présence en ligne, sans parler des jeunes générations, tombées dans le Web
dès le plus jeune âge. La frontière entre ce qui est du domaine personnel ou
du domaine professionnel se brouille. Faut-il empêcher un jeune récemment
recruté, de continuer à publier sur un blog consacré au marketing, qu’il a
démarré alors qu’il était encore étudiant en école de commerce, qu’il a
utilisé dans sa recherche d’un premier job et grâce auquel il continue à
s’informer sur son métier, à animer une communauté de pairs, à actualiser
ses propres connaissances, etc. En plus d’être mieux équipés que leurs
entreprises, les salariés sont de plus en plus et de mieux en mieux implantés
en ligne.
Il est probable, qu’à l’heure où nous écrivons, l’audience cumulée des sites,
des blogs, des pages Facebook des collaborateurs d’une même société, soit
supérieure à celle des sites de l’entreprise elle-même.
Et si pour évoluer dans l’univers digital, il fallait que l’entreprise mette à
profit cette présence de satellites en ligne qui gravitent dans une même
galaxie et dont elle pourrait être le point central ?

Dans les nuages


Curieusement, observer l’évolution de notre environnement technique en
général, et informatique en particulier, est souvent riche d’enseignements.
Qui ne se souvient pas que l’expression Big Brother est emprunté au roman
5
1984 de George Orwell ? Fiction prophétique dans laquelle l’auteur prédit
de manière volontairement caricaturale un monde où les machines ont pris
le contrôle des hommes.
De retour au présent, voici venue l’ère du cloud computing ? D’après
Wikipedia, le cloud computing « est un concept qui consiste à déporter sur
des serveurs distants des traitements informatiques traditionnellement
localisés sur des serveurs locaux ou sur le poste client de l’utilisateur ». En
clair, au lieu d’utiliser une machine (un ordinateur) à l’intérieur duquel se
trouvent des programmes (des logiciels), vous utilisez ce même ordinateur,
mais il n’y a plus rien dedans. Plus de logiciels, plus de données. Juste le
strict nécessaire pour utiliser à distance le logiciel dont vous avez besoin,
uniquement quand vous en avez besoin et aller chercher vos données
(photos, dossiers…) là encore stockées ailleurs, uniquement quand vous en
avez besoin. Les programmes et les fichiers ne sont plus dans les machines,
mais entre les machines, d’où la métaphore du nuage (cloud en anglais).
Tout est partagé pour le bien de tous. C’est la réalisation d’un véritable rêve
communiste !
Quel usage pourrions-nous faire de cette évolution tandis que nous
cheminons sur les routes du monde digital ?

C’est que… c’est la crise !


En temps de crise, l’expression qui revient souvent pour expliquer telle ou
telle décision, tel ou tel geste, tel ou tel choix est : « C’est que… c’est la
crise ! ».
Tout d’abord, peu importe l’expression elle-même. Ce qui compte est
qu’elle soit rentrée dans nos têtes. Que nous le voulions ou non, nous
participons à un processus commun qui génère ce que Carl Gustav Jung
appelait l’inconscient collectif. Son importance est de taille puisqu’il
conduit une société entière à réagir, en partie inconsciemment, conditionnée
6
par ce que contient son inconscient collectif .
De retour au business, rappelons-nous qu’un des aspects du génie de
7
l’économiste John Maynard Keynes fut précisément d’intégrer
l’importance de la psychologie dans l’analyse des comportements
économiques.
Ensuite, souvenons-nous que la télévision, puis les médias ont souvent été
montrés du doigt comme responsables de nos comportements collectifs, des
évolutions de nos sociétés, etc. Aujourd’hui, on lit qu’Internet nous
influencerait, nous conditionnerait, alimenterait notre inconscient collectif.
Il y a sans doute une part de vrai là dedans.
Pour finir et pour faire la synthèse des trois paragraphes précédents, nous,
les internautes, sommes désormais un media. En écrivant tous ensemble,
tout le temps, nous nous conditionnons inconsciemment les uns les autres,
nous convergeons vers des croyances communes, qui peut-être influencent
alors nos actes. Par exemple, en parlant de la crise, nous participons à son
installation dans nos économies. En reléguant certaines rumeurs, nous
contribuons à les renforcer. Etc.
Comment faire pour prendre conscience de ce phénomène et parvenir à
œuvrer ensemble pour le bien commun. Quelle entreprise saurait le
comprendre, voir nous guider ?

Nomadisme.com
L’humanité entière a été nomade pendant des millénaires. C’est au cours de
8
la période dite du Néolithique , entre l’an 5000 et l’an 2000 avant Jésus-
Christ, que les hommes se sont sédentarisés. De là sont nées les cités, puis
les cités-états, puis les royaumes et les empires, jusqu’aux Etats-Nations.
Depuis, l’état sédentaire est la norme mondiale.
Pourtant nous sommes redevenus des nomades, différemment, mais des
nomades quand-même.
Les premiers internautes se sont tout d’abord agrégés sur des sites de pages
perso comme Geocities, Tripod, iFrance. Leurs ancêtres venaient de
Mygale. Puis ils ont fini par migrer vers MySpace pour rejoindre une masse
d’individus plus importante. Puis ils ont voyagé pour s’installer, sans doute
qu’un temps sur Facebook. Plus tard, Twitter est devenu la nouvelle terre
promise. Ensuite FourSquare est apparu comme un eldorado, avant que
nous n’apercevions au loin un territoire encore inexploré et prometteur :
Google +.
Sur la route, le flux des nomades a essaimé de multiples autres
communautés comme Linkedin, Viadeo, Plaxo, Wayn, Pure People, A
Small World, The Sphere, Luxury Society… Nous avons plusieurs adresses
e-mail, parfois trois numéros de téléphone, une multitude de « noms
d’utilisateurs » et de « mots de passe », un numéro Skype, un vieil UIN de
l’époque d’ICQ, les codes d’un ancien compte FTP, plusieurs pseudo pour
l’instant messaging, quand ce n’est pas différents avatars…
En réalité, nous suivons des mouvements de foules. Comme nos ancêtres
qui suivaient des troupeaux d’animaux pour les chasser et se nourrir, ou qui
se déplaçaient en fonction des saisons, nous migrons. Nous circulons d’un
lieu à l’autre, sans arrêt, toujours en mouvement. Nous sommes devenus
des D.H.L. : Digital Home Less.
La période du Néolithique fut cruciale. C’est à cette époque que l’homme
inventa l’agriculture. Avant la sédentarisation, cultiver n’avait aucun sens,
puisqu’il faut bien attendre que les légumes poussent pour les cueillir, ce
qui est contradictoire avec le nomadisme. Et pour cultiver, l’homme inventa
aussi la métallurgie, afin de labourer la terre.
Et nous, quelles grandes inventions apporterons-nous à la communauté
humaine, grâce à ce nouveau nomadisme ?

Echantillons gratuits
Tous les acteurs du Web et de plus en plus de marques ont les yeux rivés sur
Google et son algorithme. Pour cause, Google est la porte d’entrée sur le
Web du plus grand nombre.
Apparaître dans la première page de réponses d’une requête Google est
devenu indispensable aux marques si elles veulent émerger. Occuper la
première position, est le Graal dont chacune rêve. Google est the place to
be.
Manque de chance, les règles que Google utilise pour hiérarchiser les sites,
et donc les positionner plus ou moins bien dans les réponses aux requêtes
des internautes, sont de plus en plus nombreuses, de plus en plus
changeantes et surtout, de plus en plus opaques. Et lorsque les efforts
entrepris pour optimiser le référencement naturel d’un site ne suffisent plus,
le recours à l’achat de mots clés peut alors devenir nécessaire.
En somme, le business model de Google a été imaginé pour faire gagner de
l’argent à… Google.
Toute l’histoire de la relation entre Google et les marques est un jeu
consistant pour les marques à parvenir à ruser, à déjouer l’algorithme du
moteur de recherche, à comprendre ses logiques et leurs évolutions, pour
adapter leurs sites afin d’être le mieux référencées. A l’opposé, la stratégie
de Google est d’obliger les marques à recourir tôt ou tard au référencement
payant, en déjouant leurs stratégies de référencement naturel.
Tous les acteurs du Web ont également leurs regards orientés vers
Facebook. Ici tout change. Ce qui n’était qu’un jeu avec Google, est en train
de devenir un kidnapping avec Facebook ! Revenons un instant sur la très
brève histoire de cette société.
Acte I : les utilisateurs entrent en scène

• Scène 1 : Facebook est créé pour permettre aux amis de se


connecter les uns aux autres.

• Scène 2 : Facebook connaît un développement de son nombre


d’utilisateurs jamais vu auparavant.

• Scène 3 : Les internautes deviennent les acteurs principaux de


l’histoire que nous vous racontons.

Acte II : les marques entrent en scène

• Scène 1 : Les marques, les agences, les professionnels, se disent


que Facebook est un media sur lequel il faut communiquer, faire
connaître ses produits, développer son image de marque, etc.

• Scène 2 : Facebook invite les marques à se créer des fan pages sur
Facebook et ce, gratuitement. Les marques le font. Les entreprises
se créent des fan pages ou en confient le soin à des agences. Quant
aux utilisateurs de Facebook, ils deviennent fans des marques sur
Facebook, en masse.

• Scène 3 : Les marques se réjouissent de cette nouvelle audience


captive, messages « publicitaires » à leurs fans, via leur fan pages.
Les marques deviennent les acteurs principaux de l’histoire que
nous vous racontons.
Très bien ! Et alors ?
Et alors ?
Et alors, nous avons oublié dans l’histoire que Facebook, comme Google,
dispose d’un algorithme dont les règles sont de plus en plus nombreuses, de
plus en plus changeantes et surtout, de plus en plus opaques. Il s’appelle
EdgeRank. Jamais deux sans trois. Voici le troisième acte de l’histoire. La
suite est un peu plus triste pour les marques.
Acte III : EdgeRank entre en scène

• Scène 1 : En réalité, lorsqu’une marque adresse un message à ses


fans, EdgeRank est paramétré pour le délivrer à seulement 50% de
ses fans. que si nous recevions 100% des messages qui nous sont
envoyés via Facebook, nos boîtes e-mails et nos comptes Facebook
exploseraient.

• Scène 2 : Chaque fois qu’une marque envoie un nouveau message à


ses fans, l’algorithme de Facebook observe leurs réactions. Ont-ils
lu le message ? L’ont-ils transféré ? Ont-ils cliqué sur le bouton
Like ? Etc, etc. En fonction des comportements observés,
l’algorithme de Facebook prévoit d’envoyer les futurs messages de
la marque à encore moins de fans (40%), ou au contraire à plus de
fans (60%). En clair, les marques qui bombardent leurs
communautés de fans et pour lesquelles Facebook enregistre des
comportements de nature à baisser le EdgeRank, se condamnent à
écrire en réalité à un nombre de fans, de plus en plus réduit.

• Scène 3 : les marques réalisent qu’elles sont prisonnières d’un


espace ; difficile de quitter un endroit où vos propres fans, parfois
des dizaines de milliers voire beaucoup plus dans certains cas, vous
ont rejoint et continuent à dialoguer avec vous.

De plus, les marques comprennent également qu’il va bien falloir continuer


à animer cette fan page, située au sein d’un environnement (Facebook)
finalement assez peu qualitatif, difficile à contrôler, parfois imprévisible,
loin de tirer les marque vers le haut, à mi-chemin entre TF1 et M6…
Ensuite, les marques se demandent aussi comment faire pour réellement
atteindre leurs 100% de fans.
Enfin, les marques prennent également conscience que les précieuses
informations socio-démographiques et surtout comportementales relatives à
leurs fans, sont détenues par Facebook.
Dénouement :
Facebook retourne vers les marques afin de leur proposer des solutions,
mais payantes cette fois ci. Après avoir invité gratuitement les marques à lui
mettre à disposition un actif majeur, leurs bases de données clients,
Facebook est chaque jour de plus en plus en position, de pouvoir revendre
aux marques, un accès à leurs propres clients.
Joli tour de passe-passe, non ?
Moralité de l’histoire :
1. Lorsque l’on vous propose un échantillon gratuit (quelques centilitres de
parfum ou de maquillage, la possibilité de créer une fan pages, etc.), c’est
toujours pour vous vendre quelque chose derrière, que vous soyez en B to C
ou en B to B.
2. Les Américains sont décidemment très fort en marketing. Facebook est
parvenu à transformer les professionnels du marketing en de vulgaires
consommateurs que l’on peut appâter avec un simple échantillon gratuit
(technique inventé il y maintenant bientôt un demi-siècle). C’est l’arroseur
arrosé. 3. Comme bien des entreprises, américaines en particulier, Facebook
a été conçue pour faire gagner de l’argent à Facebook… pas aux marques.
Après avoir appris à jouer avec Google, les entreprises devront peut-être
apprendre à se remettre d’un rapt dans lequel les otages sont difficiles à
identifier (un peu de l’image de marque des entreprises, des données clients,
un droit d’accès des marques à leurs propres clients, etc.) et le ravisseur
difficile à attaquer car :

• Américain et ne relevant pas ne notre juridiction nationale.

• De taille à se défendre.
• Ayant certainement veillé à la rédaction de conditions générales
d’utilisation qui lui soient favorables, par une équipe d’avocats
rompus à ce type d’exercice, et que les particuliers ne lisent presque
jamais et auxquelles les professionnels devraient peut-être prêter
plus attention.
Chapitre 2
ENTREPRISE

Picasso contre Michel-Ange


Michel-Ange disposait des soutiens financiers de l’un des plus grands
mécènes de l’histoire de l’art : Laurent de Médicis, d’un magnifique atelier
à Florence, capitale de l’art Renaissant, d’une équipe d’apprentis, etc.
A contrario, Pablo Picasso a souvent travaillé dans des conditions beaucoup
plus précaires. Sa tète de taureau en est l’illustration. Une tête de taureau
constituée avec le guidon rouillé et la selle en cuir tannée, d’un vieux vélo
démonté, trouvé gisant au fond d’un garage. Les deux artistes produisent
pourtant des œuvres géniales et occupent le même rang dans la hiérarchie
9
des génies artistiques .
Il y a tellement de gens qui attendent d’être dans les meilleures conditions
avant de s’y mettre. Ils voudraient que leur soit réservé le même traitement
que celui dont bénéficia Michel-Ange. Ils s’enferment dans le syndrome de
l’œuf et de la poule. D’un côté, rien ne laisse deviner qu’ils sont géniaux,
donc aucun mécène ne va vers eux pour leur offrir des conditions de travail
exceptionnelles. De l’autre, ils attendent que ces conditions soient réunies
pour se mettre au travail. Pendant tout ce temps, rien n’a été fait.
Qu’est ce que cela cache en réalité :

• Un trouble de la personnalité ? Ils se prendraient pour des génies…

• Un égo démesuré ? Ils ne supporteraient pas d’être traités comme


les autres…

• Un manque de confiance en soi ? Il s’agirait d’une stratégie pour ne


jamais se mettre au travail et permettant de rejeter la faute sur les
autres…
• Une peur de l’échec ? Ce serait un prétexte pour ne pas se jeter à
l’eau…

• De la paresse ? Ce serait une ruse pour en faire le moins possible…

• De la stratégie ? Il s’agirait d’un moyen de noircir le tableau en


amont, pour justifier d‘un travail moyen au final…

Peu importe !
Le travail, qu’il pleuve, qu’il neige, qu’il vente, ou qu’il fasse soleil, avec
ou sans talent, avec ou sans génie, seul ou à plusieurs, peut se faire dans des
conditions rudimentaires, avec peu de moyens. Tout n’est qu’affaire de
volonté.
Le monde digital ne se parcourt pas en empilant les excuses, les prétextes et
les raisons de ne pas avancer.

Taille et importance
La taille et l’importance sont deux notions simples. Alors on ne les
considère plus. Le commun des mortels accordera naturellement plus de
poids à la taille qu’à l’importance. Les choses les plus grandes retiendront
toujours davantage son attention. Pourtant, il existe une distinction aussi
simple que fondamentale entre taille et importance.
Pour le comprendre, il suffit, par exemple, d’observer l’irruption d’Internet
dans nos sociétés. Internet a une immense importance même si son impact
économique, sa taille, est resté finalement longtemps encore faible comparé
à d’autres secteurs (automobile, banque, assurance, tourisme…). Il est
comme le cinéma. Son impact sur l’imagination des hommes a été
certainement bien plus important que son impact économique. Avec le
cinéma, pour la première fois dans l’histoire du monde, les moins éduqués,
les illettrés et même le tiers monde avaient soudainement accès au monde et
à son idéologie dominante. Pourtant le cinéma est loin de représenter le plus
gros des secteurs économiques.
L’impact culturel d’Internet est bien plus important que son impact
économique. Le marché aux enchères s’est développé à une échelle
mondiale. Le troc refait son apparition. L’accès à la création, comme la
musique ou le cinéma, s’effectue par de nouveaux modes comme le
téléchargement. Des individus qui ne se rencontreront jamais partagent
pourtant les ressources et la puissance disponible de leurs ordinateurs, se
fédèrent en communautés, se donnent rendez-vous sur Meetic…
La comparaison vaut car le Web Français a besoin d’une caisse de
résonance de nature à amplifier, à propager, à diffuser en permanence de
nouveaux produits, de nouveaux business models, de nouvelles innovations
qui lui sont propres… Internet est peut-être en passe de devenir ce nouveau
haut-parleur.
Utilisé par les Américains comme un formidable moyen de promouvoir et
développer ses industries, le Web aura peut être un effet boomerang.
Quelques entrepreneurs Français sont déjà partis à la conquête des États-
Unis. Le nouveau monde digital ne permet pas seulement aux États-Unis de
débarquer en Europe mais également aux Frenchies d’exporter leur vision,
leur créativité, leur esprit d’entreprise, chez les Yankees.

Vu à la télé
L’histoire se répète avec une régularité surprenante. Et nous aimons à
l’oublier avec une simplicité déconcertante.
Plongeons un court instant dans les archives de la télévision. L’image est en
noir et blanc, un monsieur en costume gris, bien coiffé avec une raie sur le
côté, nous explique les vertus de cette aventure à laquelle il est semble-t-il
très fier de participer : le lancement de la télévision.
Quelques années plus tard, les potentialités publicitaires de ce nouveau
mass media n’ont pas échappé à la sagacité des observateurs d’alors. Très
vite, on explique aux marques que le business ne se fera plus sans la
télévision, sans publicité télé, etc. Elles le comprennent encore plus vite.
Les marques de l’Amérique nourricière de l’après guerre se précipitent pour
s’exprimer à la télévision. Kellogs Korn Flakes et Coca Cola sont aux
anges. David Ogilvy fait ses armes. A New York, Madison Avenue se
peuple d’agences de publicité.
Mais regardons un peu mieux. La grande majorité des entreprises n’ont
jamais fait de pub télé et s’en portent très bien. Ni au Etats-Unis, ni ailleurs.
Pour cause, c’est beaucoup trop cher et inadapté à bien des business.
Cependant, notre monsieur en costume gris (bien coiffé) et ses disciples
faisaient de la télévision un media incontournable pour les marques…
Aujourd’hui, l’histoire se répète. Le même discours est tenu à propos du
Web. Le monsieur bien coiffé a disparu. Il a été remplacé par une
génération spontanée de gourous autoproclamés, de passionnés, de
blogueurs… Le discours ambiant gravite autour de l’importance
déterminante du Web. Personne n’oserait soutenir ou simplement imaginer
un seul instant que le Web ne sera pas nécessairement indispensables à tout
business.
L’histoire se répète avec une régularité surprenante. Et nous aimons à
l’oublier avec une simplicité déroutante.

KISS
KISS n’est pas seulement un groupe pionnier du hard rock, lui-même
ancêtre du heavy metal, dont les membres étaient maquillés pour faire peur
à papa. Ni simplement une chanson de Prince.
K.I.S.S. est un acronyme anglo-saxon qui signifie Keep IT Stupid and
Simple. En français : faites bête et méchant. Il faut croire que nous avons
une aversion pour la simplicité. Nous aimons imaginer, concevoir, proposer
des projets, des produits, des services compliqués. Or c’est la simplicité qui
marche. Jack Welch lui-même, P.D.G. légendaire de General Electric, sacré
à maintes reprises et considéré grosso modo comme le meilleur P.D.G. de la
seconde moitié du vingtième siècle (l’autre moitié étant acquise à Henry
Ford), aimait à le rappeler :
« Business is simple. Don’t complicate it. »
Nous compliquons tellement les choses, qu’il faut que le grand P.D.G. lui-
même nous le rappelle.
K.I.S.S. sont quatre petites lettres qu’il faut garder sur soi, lorsque l’on
parcourt la route digitale. D’ailleurs, on pourrait changer le sens des lettres
et dire que K.I.S.S. signifie Kilomètre Incontournable d’une Success Story,
Kilomètre Infini Sans Souffrance ou Kilomètre International Sans Sueur, ou
Kilomètre Internet Sans Serveur, ou Kilomètre Important Sans Suspens, ou
Kilomètre Indescriptible Sans Syndication, ou Kilomètre Infatigable Sans
Sieste…

En tout affinité
Qui n’a pas rencontré un recruteur apparemment préoccupé du fit qu’il y
aura entre l’entreprise et vous, entre les équipes et votre personnalité, entre
les valeurs de la société et les vôtres…
L’affinité entre le candidat et l’entreprise est devenue l’obsession lors des
recrutements. C’est comme si l’entreprise vous disait : « Comprenez-nous
Monsieur, nous ne sommes pas des gens tolérants. Par conséquent, si vous
vous avérez différent de nous, nous ne parviendrons pas à vous accepter ».
Manque de chance, ce ne sont pas nécessairement ceux qui aiment le plus
les produits de l’entreprise qui en sont les collaborateurs les plus précieux.
Certes certains collaborateurs sont en parfaite osmose avec leur entreprise.
Sont-ils pour autant les collaborateurs les plus précieux, les plus efficaces,
les plus productifs ?
Les P.D.G. et les membres des comités de direction ne sont pas toujours,
soyons honnêtes, à leurs postes parce qu’amoureux des produits de leurs
entreprises…
Toujours est-il que si les recruteurs ont quelques inquiétudes concernant la
capacité de leurs collaborateurs à tolérer, somme toute, des candidats assez
peu différents d’eux, ils ont encore une autre soupape de sécurité : la
période d’essai qui leur permet de rompre le contrat de travail, simplement,
sans grand formalisme, sans coût additionnel et en toute légalité.
Le périple sur les routes du monde digital nécessite de se doter de bons
collaborateurs. Ce n’est pas en inventant des raisons de ne pas essayer, de
ne pas se donner une chance mutuelle, que l’entreprise se mettra en marche.
Toutes les histoires d’amour n’ont pas commencé avec un coup de foudre.
La majorité des gens mariés ne se sont pas épris l’un de l’autre comme dans
un conte de fée.

La langue originelle
Toutes les traditions religieuses ou spirituelles convergent en un point. Les
hommes, en des temps très anciens, pré-antique, eurent une langue unique
et commune. Elle était simple, constitué d’éléments universels, de
symboles…
Peu importe que cela soit vrai ou non ou que cela inspire ou non le prochain
roman de Dan Brown.
Le monde digital semble vouloir reconstituer une langue universelle,
simple, frustre, mais permettant d’échanger, de partager, de coexister sans
se faire la guerre. Les composantes de cette langue sont des symboles, des
injections univoques, sans nuance, comme : Like, Poke, Tweet...
Peut-on parler d’une langue ? Pas véritablement. D’un vocabulaire, peut-
être un peu plus ! En tous cas d’un ensemble de signes simples et efficaces,
permettant à la communauté des hommes de satisfaire au moins
partiellement quelques uns de ses besoins élémentaires : communiquer,
échanger, se regrouper, s’exprimer, exister, etc.
De quelle légitimité les marques, les entreprises, peuvent se prévaloir pour
s’immiscer au cœur de ces échanges. Il se peut que les marques,
investissant le monde digital, puissent tôt ou tard être classées comme ceci :

• Celles qui organisent l’échange, la discussion, le débat, le vote.

• Celles qui stimulent l’échange.

• Celles qui orientent l’échange.

• Celles qui font l’objet du débat, de la discussion, du vote, etc.

• Celles qui cherchent à tirer profit de l’échange.

• Celles à qui profite l’échange naturellement.


• Celles que l’échange dessert.

Il est peut-être trop tard pour se poser trop de questions. Le monde digital
s’est immiscé dans la vie des consommateurs. Les marques l’ont investi.
Néanmoins, ces dernières empruntent de nouvelles postures, s’exposent à
des situations inédites et ouvrent la porte à de nouvelles secousses.

Diversion vs. Dix versions


Les web years ou années Internet en français, passent huit fois plus vite que
les années classiques. Autrement dit, il se produit autant de changements en
un an dans le secteur Internet qu’en huit ans dans un autre secteur.
Ce rythme spécifique engendre des comportements, des attitudes et des
réflexes particuliers. Les sociétés qui évoluent dans ce secteur développent
des cultures d’entreprise qui leurs sont propres, basée notamment sur des
valeurs comme : la technologie, le changement, l’innovation,
l’entreprenariat, la communication, l’échange, le business, la créativité,
l’audace, la vitesse d’exécution, l’action, la réussite individuelle, la
notoriété, la célébrité, l’argent…
Au passage, se sont introduites trois habitudes : celle du test and learn, celle
du versionning et celle du quick and dirty, autant dire du recommencement
permanent.
Dans le Web, on invente, on innove, on réalise de nouvelles choses ou on
les fait bien souvent pour la première fois. Alors, faute d’expérience, on se
jette à l’eau en se disant qu’il faut tester afin de tirer des enseignements,
pour mieux faire ensuite. C’est du test and learn.
L’évolution de la technologie ou des usages justifie la nécessité de
constamment re-développer les sites Web, de les enrichir de nouvelles
fonctionnalités, de les upgrader, de les faire migrer d’une technologie à
l’autre, de les transposer sur de nouveaux terminaux. Les sites connaissent
parfois un nombre de versions invraisemblable. C’est le versionning.
Le fait que ce qui est développé, n’est pas destiné à durer longtemps,
engendre un autre réflexe, le quick and dirty. On développe pour que cela
marche. Si ce n’est pas parfait, peu importe, une nouvelle version arrivera
de toute manière dans très peu de temps et remplacera l’existant.
La combinaison des cultures du test and learn, du versionning et du quick
and dirty apporte plusieurs bienfaits à l’entreprise :

• L’innovation : l’entreprise est toujours à la pointe.

• La mobilisation : il y a toujours quelque chose à faire.

• La motivation : il y a toujours un challenge à relever, Il y a toujours


une nouveauté récemment lancée, dont on peut se satisfaire…

• La libération : il est plus facile de se jeter à l’eau, de se lancer,


d’essayer…

• La richesse du quotidien : les journées ne se ressemblent pas, les


jobs s’enrichissent, on progresse, les périmètres évoluent…

• Le renouvellement de l’horizon : l’horizon change, il évolue et


demain sera forcément mieux qu’hier.

Mais la face cachée est plus sombre. Elle est affectée par le syndrome du
logiciel. On développe de plus en plus vite (les erreurs de conception
augmentent), on lance de plus en plus prématurément le logiciel (les bogues
sont plus nombreux), pour une durée de vie de plus en plus courte du
logiciel (les bogues demeurent non résolus), en vue de lancer très vite la
version suivante qui fatalement sombrera dans le même cercle vicieux. Le
client est constamment équipé d’un produit imparfait. L’entreprise lui
apporte comme réponse d’acquérir la version suivante, ou le produit de la
nouvelle génération, qui malheureusement souffrira des mêmes vices. Il est
intéressant de noter que dans le secteur informatique, les entreprises qui
s’en sortent sont soit des championnes de la conception de programmes
hyper spécialisés, soit des acteurs qui participent, accélèrent et encouragent
le cercle vicieux décrit plus haut.
Le phénomène se propage. Ce qui prévalait dans le développement des
logiciels informatiques, se voit de plus en plus dans d’autres activités,
d’autres secteurs, d’autres produits. Des biens traditionnellement fiables et
sans surprise deviennent instables : électroménager, ampoule électrique…
Des secteurs adoptent eux aussi la même stratégie que l’édition de logiciels.
Les dix versions futures font diversion aux problèmes du présent.
Faut-il forcément se livrer à cette stratégie de diversion pour parcourir le
monde digital ?

Peur de son ombre


Notre ombre nous suit quand nous la fuyons et nous fuit quand nous la
suivons. Une réalité terrible pour celles et ceux qui ont peur de leur ombre.
Ils sont nombreux. Qu’ils aient peur pour de bonnes ou de mauvaises
raisons, peu importe, ces peurs sont authentiques, sincères,
consubstantielles à leur état du moment. Elles leurs appartiennent.
Le problème est que cela freine l’action, retient l’initiative, retarde la
réaction ou la décision.
Comment faire ?
Lire le grand livre de la nature tout simplement et observer les animaux.
La peur a du bon, si nous la gérons bien. Le philosophe Nietzsche rappelait
que si l’homme est supérieur à l’animal, ces derniers ont parfois des
qualités que nous n’avons pas (agilité, sens de l’équilibre, souplesse,
rapidité…) ou plus développées (meilleur odorat, ouïe supérieure, etc.). La
peur et la manière de bien gérer la peur est précisément un talent des
animaux. La peur n’est pas dénigrée ou assimilée à de la lâcheté ou de la
faiblesse, comme le font les hommes, mais utilisée comme moyen de
protection contre le danger. L’animal sait qu’il faut avoir peur. Que mal
gérée, la peur peut tuer, si l’on se tétanise face à un prédateur par exemple,
et que bien gérée, elle peut sauver, en augmentant la rapidité de la fuite par
exemple.
Le parcours des kilomètres du monde digital, souvent difficile à réaliser,
peut être ralenti par la peur.
Il faut apprendre à vivre, à travailler, à entreprendre, avec nos peurs, avec
nos démons, avec nos traumatismes et nos casseroles… L’essentiel est
d’apprendre à aimer la peur car elle est notre alliée, elle est là pour nous
protéger. En revanche, il ne faut pas la laisser gérer les situations à notre
place. Elle est notre alliée et nous devons rester les rois.

La sagesse des cadets


Les sociétés occidentales vieillissent.
Le jeunisme se développe. Les aînés, les anciens (a priori les plus sages),
par peur d’être out, de se démoder, d’être déconnectés, d’être rejetés,
survalorisent pour certains, la parole des très jeunes, leurs comportements,
les imitent, vont même jusqu’à se laissent coacher par eux. On voit même
des D.G., des Présidents de groupes les plus sérieux, identifier un petit
jeune de leur entreprise pour les initier au Web social, à Facebook, etc.
Parce qu’ils ont simplement une plus grande familiarité avec de nouvelles
pratiques (écrire sur le wall du copain, twitter, dragouiller en ligne, publier
une vidéo à coup de copier-coller de code embed, perdre des heures en
social gaming, préparer Noël à coup de social shopping…), les jeunes sont
écoutés par les aînés, invités dans des comités de direction pour évangéliser,
sollicités pour former. Le danger pour eux est de se croire arrivés, avant
même d’être partis. Leur intérêt est d’accéder à des sphères de l’entreprise
qui ne leurs sont ordinairement pas accessibles. Le risque pour les aînés est
d’oublier de transmettre en retour leur expérience. Leur intérêt est de vieillir
professionnellement, un peu moins vite, du moins d’en avoir l’impression.
Sagesse des cadets, silence des aînés ! Est-ce bon pour l’entreprise ? Est-ce
une solution lorsque celle-ci est lancée dans le monde digital ?

Le droit d’aimer
C’est dur, personne n’aime le faire, mais lorsque l’on lance une entreprise,
un produit, un service, une boutique… il faut avoir préalablement étudié la
concurrence. C’est long et fastidieux. Le pire est que cela peut s’avérer
décourageant. Les concurrents sont déjà là, bel et bien implantés. Ils ont une
longueur d’avance, des acquis, des actifs, des produits au point, des clients,
du chiffre d’affaires, etc.
Plus embêtant encore, trop regarder ce qui marche, peut conduire au
syndrome de la photocopie : comme mes concurrents sont décidément bons,
je vais simplement me contenter de faire tout comme eux. Mauvaise idée !
Au mieux, vous aboutirez à quelque chose de très ressemblant, mais en rien
nouveau. Au pire, vous ferez moins bien et votre copie sera en noir et blanc
face à un original en couleur.
Alors un truc, apprenez à observer, à benchmarker, à imiter et à vous
inspirer des entreprises que vous aimez, même, et surtout, si elles ne sont
pas vos concurrents.
Il est plus facile de s’intéresser à ce que l’on aime. Et ce que l’on aime n’est
pas nécessairement moins riche d’enseignements que l’observation des
concurrents naturels. Cela inspire plus. Cela stimule la créativité. Cela
libère l’esprit du complexe d’infériorité que donne l’observation des
concurrents.
Après, il suffit de transposer. Ce qui était banal dans un secteur (un service,
une façon de faire…) peut devenir époustouflant une fois injecté dans un
autre domaine.

Free
La part de ce que l’entreprise offre gratuitement au consommateur, pour les
acquérir ou les conserver, semble vouée à augmenter.
Après les échantillons gratuits dont raffolent les secteurs de l’alimentaire,
de la cosmétique ou du parfum, le développement des nouvelles
technologies a considérablement amplifié cette technique marketing et l’a
démocratisée dans le secteur des services. Les fournisseurs Internet se sont
affrontés à coups d’heures de connexion gratuites, d’espace disque offerts,
etc. La téléphonie mobile lui a emboîté le pas. La télévision les a suivis :
offre simple play, double play et triple play ont permis aux départements
marketing de rivaliser d’invention pour proposer les combinaisons les plus
savantes, sous l’œil vigilant des financiers. La démarche était purement
quantitative. On offrait des choses mesurables : de la durée, un nombre de
SMS ou de MMS, une réduction de prix, etc.
Depuis, le discount s’est généralisé. Le low cost s’est institutionnalisé.
Celui ou celle qui voudrait payer plein pot, pourrait avoir du mal à y arriver,
dans certaines catégories de produits.
Heureusement, cette surenchère à la remise, au rabais, à l’appât,
essentiellement quantitative, n’empêche pas le qualitatif de tenter une
percée. Par delà les échantillons gratuits, les marques s’efforcent de plus en
plus de s’affronter sur de nouveaux terrains : la qualité du service ; le
lancement de services innovants ; l’expérience clients ; des sites Web de
plus en plus riches ; des contenus de plus en plus utiles ; des prises de
position de plus en plus responsables, écologiques ; des efforts esthétiques
de plus en plus manifestes, etc.

Concours d’apnée
Buffon. Non, pas Gianluigi Buffon, le joueur de foot italien, mais
BUFFON ! Georges-Louis Leclerc de Buffon (1707-1788), naturaliste,
mathématicien, biologiste, cosmologiste et écrivain français. Celui qui a
rédigé une histoire et une description de la nature tellement colossale que
plus personne ne la lit.
Peu importe, Buffon a entre autre observé et décrit le comportement des
animaux. Rien de plus utile pour comprendre les comportements humains.
Alors c’est parti pour une plongée dans le monde obscur de la guerre pour
le meilleur référencement par les moteurs de recherche du Web.
Nous voici en mer, en pleine observation sous-marine. Tout comme le Web,
les fonds marins sont remplis d’un nombre incroyable de formes qui
bougent. Ce ne sont pas des sites Web, des blogs, des pages sociales, mais
des poissons. Il y en a de toutes les tailles, de toutes les couleurs, de toutes
les formes. Comme les sites Web.
Très vite on repère un phénomène étonnant. Parfois on croit apercevoir au
loin un gigantesque poisson.

• Parfois c’est vrai. C’est une baleine ou un cachalot.


• Parfois, c’est faux. C’est un ensemble de touts petits poissons qui
nagent les uns contre les autres, veillant à former une masse qui de
loin ressemble à une baleine et dissuade les éventuels prédateurs.

• Parfois, c’est ni tout à fait vrai, ni tout à fait faux. C’est une plus
petite baleine que de petits poissons entourent afin de créer la
même illusion que celle décrite au paragraphe précédent.

Sur le Web, c’est un peu pareil.

• Il y a les baleines et les cachalots. Ce sont les très gros sites qui
raflent l’essentiel de l’audience.

• Il y a les petites baleines entourées de petits poissons. Ce sont tous


les petits sites Web d’une même catégorie qui repèrent le plus gros
site de leur segment, observent quels mots clés, quels dispositifs
techniques permettent à ce site de remonter en première position
dans les moteurs de recherche, afin de se coller à lui (de faire partie
du même agrégat que lui pour parler comme Google) et profiter de
son ascension.

• En revanche, il n’y a pas de bancs de petits poissons, de petits sites


qui mettraient en commun leurs ressources, leurs efforts, leurs
moyens pour s’entendre et former une masse capable d’améliorer
leur référencement commun. Les acteurs d’autres secteurs sont
parvenus à le faire dans d’autres domaines. A titre d’exemple, les
distributeurs ont appris à partager leurs chiffres de ventes à travers
des panels distributeurs. Il en est de même des marques avec les
panels de consommation et des médias avec les panels d’audience.

Qu’attendent les acteurs du Web ?


Chapitre 3
MANAGEMENT

Petit Google fight


Connectez-vous sur Google. Dans la barre de recherche, écrivez « Google
Fight » et tapez sur le bouton Entrée de votre clavier.
Dans la liste des réponses, Google vous propose de découvrir son module
Google Fight. Cliquez pour y accéder. Google Fight permet de comparer le
nombre de fois qu’un mot A et un mot B sont respectivement trouvés par
Google. Ici, nos mots A et B sont les expressions « Oui mais » et « Oui et ».
Résultat du match : près de cent cinquante fois plus de points pour « Oui
mais ».
Pourquoi ?
Parce qu’il y a deux types de personnes.
Celles qui sont des spécialistes du « Oui mais » et celles qui privilégient le
« Oui et ». Les premières sont de loin les plus nombreuses. Elles adorent
dire « Oui mais ». Leurs phrases préférées sont « Oui mais cela ne marchera
pas », « Oui mais cela va coûter cher », « Oui mais ceci… », « Oui mais
cela… ». Elles sont négatives, démotivantes, conservatrices, défaitistes et
malheureusement un peu partout.
Les secondes s’efforcent de dire « Oui et ». Leurs phrases sont plutôt du
type ; « Oui, et en plus cela présenterait tel avantage », « Oui et cela nous
permettra de nous voir plus souvent », « Oui et c’est un bon moyen de… ».
Elles sont positives. On les croise beaucoup plus rarement que les
premières.

L’imparfait du conditionnel
« Il faudrait que », « Il aurait fallu », « Si seulement ceci », « Si seulement
cela » sont autant de phrases récurrentes en entreprise. Elles sont
révélatrices de démotivation, d’une absence de désir de trouver des
solutions, etc.
Les repérer est un bon moyen de séparer les personnes, les services, les
zones de l’entreprise où les choses ne seront pas possibles à un instant T,
des zones où les choses avanceront. Slalomer, trouver le meilleur chemin
entre les piquets de l’entreprise, est parfois nécessaire à un individu, à une
équipe, à un service, à un département, à une business unit, à une idée, à un
projet… pour avancer.
Les avancées ne s’effectuent pas forcément en ligne droite. Il est rare que
tous les feux d’une même ville soient tous au vert en même temps.
L’entreprise est jonchée d’obstacles voulus ou non voulus, conscients ou
inconscients, facile ou difficile à contourner. Toujours est-il qu’il faut
parfois slalomer entre les facteurs de résistance.

Les deux questions récurrentes


Les psychologues soutiennent que chacun de nous est porteur de deux
questions :

• “Est-ce que j’existe ?”

• “Suis-je aimé ?

Et comme c’est dans la réaction des autres que nous trouvons des éléments
pour répondre à ces interrogations, nous recherchons le regard de l’autre,
observons ses réactions, scrutons ses faits et gestes… à la recherche
d’indices.
Pire, nous agissons pour exister, pour être aimés.
Or il faut agir pour soi.
Attention à ne pas s’enfermer dans le regard de l’autre. Ce serait se mettre
soi-même en prison. Ce serait donner à l’autre le pouvoir de nous y
maintenir séquestré ou de nous en libérer à sa guise.
Or le digital, nous encourage à tomber dans ce piège. Nous nous exposons
de plus en plus au regard d’autrui en nous mettant en avant sur nos pages
Facebook, Twitter… sur nos blogs, etc. Une fois repérés et suivis par les
autres, voici qu’une e-réputation nous colle à la peau. Notre enthousiasme
du début nous a conduit à nous jeter à corps perdu sur ces sites, à nous y
faire valoir, à y montrer nos talents, nos atouts, nos réalisations, à nous y
créer un personnage public… Ensuite, il faut durer, continuer à exister,
rester dans le coup, en maintenant la cadence des publications, des
commentaires rédigés, des Like accordées, des Twitt effectués, des liens
transférés.
Nous voici prisonnier d’une image, d’une position que nous avons acquise,
d’une e-réputation, d’un personnage public que le digital nous a permis de
fabriquer. A l’instar des stars, des célébrités, des people, nous voici amenés
à vivre avec celui que nous sommes réellement et ce personnage que nous
avons créé, qui parfois nous échappe, parfois nous dépasse, et qui nous
enferme dans le regard des autres.
L’emprisonnement ne permet pas d’avancer ni dans le monde digital, ni
ailleurs.

A chacun son rythme


Les entrepreneurs, les dirigeants, les PDG sont rarement de grands
dormeurs. Ils sont plutôt endurant, énergiques, dynamiques. Leur entourage
en fait parfois les frais. Ils sont durs à suivre, exigeants, souvent agacés par
le manque de rapidité d’exécution des décisions prises, contrariés par la
lenteur des réponses apportées aux questions posées… Et ce, du matin au
soir.
Les actionnaires, les employés aiment sentir l’énergie l’enthousiasme et la
détermination d’un meneur. Nous en avons besoin. Qu’il nous entraîne,
soit ! Mais qu’il comprenne en retour que nous n’avons pas tous :

• Le même métabolisme.

• Le même degré de motivation.


• La même implication dans l’entreprise.

• Le même sentiment quant à l’importance à accorder à notre travail.

• Le même intérêt à en tirer.

• Le même potentiel.

Il faut de tout pour faire un monde. Bien des grandes choses de l’histoire se
sont réalisées avec un tout petit nombre d’hommes exceptionnels. Les
conquêtes napoléoniennes en sont l’exemple : un stratège de génie,
quelques généraux hors du commun, quelques maréchaux talentueux.
L’ensemble ayant un âge moyen inférieur à trente ans. Pour le reste, une
masse d’hommes composée pour l’essentiel de paysans inexpérimentés
dans l’art de la guerre, puis des catégories habituelles qui remplissent les
rangs des campagnes militaires : immigrés, mercenaires, hors la loi,
réfugiés, aventuriers.
Fini l’ère du CEO Super-héro, du surhomme, du superman de la direction.
On ne peut pas et il ne faut pas calquer le rythme biologique de toute une
entreprise sur celui d’un seul homme. Le monde digital se conquerra avec le
CEO Super Haro, avec celui qui saura temporiser, prendre le pouls des
équipes, sentir la fatigue des hommes, anticiper leurs peurs, prévenir et
guérir leurs blessures.

Vices et vertus du sport


Le sport est constamment utilisé dans les séminaires de management
comme modèle. A vrai dire, c’est tentant. Les points communs et les
parallèles avec le monde de l’entreprise sont nombreux : performance,
challenge, dépassement de soi, esprit d’équipe, combativité, envie de
gagner, respect des règles, travail… résonnent dans les têtes des managers
en quête de techniques pour motiver les équipes.
C’est un tort. Le sport est truffé d’éléments parfaitement incohérents et
incompatibles avec l’entreprise.
• Une carrière de sportif de haut niveau est un choix extrême, assorti
de sacrifices, que ne fait pas un salarié lorsqu’il choisit un job, une
orientation, un secteur.

• Il y a toujours un arbitre pour voir et sanctionner les fautes. Pas


dans l’entreprise.

• Lorsque le sportif est mauvais, moins bon que d’habitude, fatigué,


ou blessé, cela se voit, tout de suite. Pas dans l’entreprise.

• L’entraineur a le droit d’être dur avec ses joueurs. Le manager ne


dispose pas de la même latitude.

• Ceux qui marquent des buts contre leurs camps sont


immédiatement sortis du terrain. Pas dans l’entreprise.

• La course aux records a engendré des dérives dont l’entreprise n’a


pas besoin : omniprésence du dopage, règlements de comptes en
coulisses…

• Le système a favorisé, a engendré, des egos démesurés et les


survalorise.

• L’intérêt individuel a supplanté la réussite collective.

• L’argent à remplacer le fair play.

• L’exemplarité du sportif s’est évaporée. Les champions ne sont plus


nécessairement des modèles pour nos enfants.

Certes tout ceci n’est pas absolument vrai dans tous les sports. Mais au
fond, ce n’est pas le sport de haut niveau qu’il faudrait observer, mais le
sport amateur.

Verre à moitié plein, verre à moitié vide


La métaphore du verre à moitié plein et à moitié vide est bien connue. Elle
illustre le fait que toute chose peut être considérée sous un angle positif ou
au contraire sous un angle négatif.
Les entreprises, les projets, les situations au travail font penser à ces tables
couvertes de verres d’eau, que l’on trouve le long des marathons et qui
permettent aux coureurs de se désaltérer. Comme les coureurs ne s’arrêtent
pas pour les boire, mais attrapent les verres pour avaler l’eau en courant, on
veille à ne pas remplir complètement les verres, afin que l’eau ne se
renverse pas. Les tables sont donc recouvertes de verres à moitié remplis.
Nos entreprises sont elles aussi envahies de verres à moitié remplis. Ce ne
serait pas un problème si nous n’arrêtions pas notre course, les buvions et
repartions de plus belle. Cependant, nous aimons nous arrêter chaque fois
que nous en voyons un, en parler à des collègues, apporter le verre en
réunion, le déposer au centre de la table pour que chacun donne son avis sur
cette question fondamentale : est-il a moitié plein ou à moitié vide. Chacun
s’exprime. Les uns saisissent l’occasion pour régler des comptes, les autres
pour nouer des alliances, les troisièmes pour lire leurs e-mails, les
quatrièmes pour griffonner sur leurs cahiers, les derniers pour se reposer.
Avec un peu de chance, la scène se passe l’été, la climatisation a sauté, il
fait très chaud et après quelques jours l’eau du verre finit par s’évaporer.
Autrement cela peut durer longtemps !
Toute chose peut être vue négativement ou positivement. Se lancer sur la
route du Web nécessite un regard optimiste sur les choses et une volonté de
ne pas laisser s’installer des débats stériles au cours desquels les
collaborateurs parlementent sans contribuer au projet de l’entreprise, ni à
l’atteinte de ses objectifs, ni à la mise en œuvre de sa stratégie, ni à
l’amélioration de son offre, ni à la satisfaction de ses clients.

La tête, le cœur et le ventre


Les américains ont des tonnes de sobriquets pour classer les hommes. Ils
parlent des doers, des thinkers, des acheivers, des money makers, les rain
makers, des enablers, des managers, des leaders, des followers…
Une distinction simple permet de différencier trois catégories : les experts,
les managers et les leaders. Ceux de la seconde et de la troisième devraient
théoriquement être dotés de ce qui suit :
• Une vision globale ou la capacité à disposer d’une vision globale.
Une aptitude à prendre de la hauteur par rapport à un problème, à
descendre jusqu’au détail essentiel, pour résoudre et reprendre tout
de suite de la hauteur ; à situer ce que l’on fait dans un périmètre
élargi.

• Un sens des réalités ou la capacité à interpréter les informations, à


les traiter, à les comprendre dans un contexte élargi. Réalisme.
Objectivité. Travailler sur ce qu’il faut faire, pas uniquement sur ce
que l’on aime faire.

• De l’imagination ou la capacité à discerner le jeu et le champ des


possibles dans son job. Comment j’invente le contenu de mon job ?
Y-a-t-il des choses nouvelles ? Peut-on faire les choses
différemment ?

• Une capacité d’analyse ou la capacité à transformer, décomposer,


reformuler les problèmes que l’on a en face de soi.

• Du leadership ou les compétences et savoir-être pour exercer son


métier, jumelés au dynamisme pour les mettre en œuvre tout en
respectant autrui.

On sait, vous connaissez déjà tout cela par cœur ! OK, innovons, mais pour
de bon.
Une classification des hommes, qui remonte à l’Antiquité, stipule que nous
serions tous drivés par trois moteurs situés à trois endroits différents de
notre corps :

• Un premier moteur, la raison, qui se logerait dans la tête.

• Un second moteur, l’affect, qui se situerait dans la poitrine.

• Un troisième moteur, le désir, qui serait quelque part dans le ventre.

Ces moteurs agiraient toujours ensemble, mais inégalement selon les


individus.
A quoi ressemblent celles et ceux les mieux prédisposés à partir à l’assaut
du monde digital ? Sont-ils davantage animés par la raison, par l’affect ou
par le désir ?

Nom de Zeus
Une méthode originale pour analyser une culture d’entreprise est celle de
10
Charles Andy .
Le bon vieux pasteur Irlandais écrit que les entreprises ont des
comportements culturels distincts, et qu’elles se différencient par leur
aspiration à ressembler à des dieux grecs différents.
Il y a donc quatre catégories d’entreprises :

• Celles qui se rapprochent du dieu Zeus en favorisant le pouvoir, en


cherchant à dominer leurs concurrents à tout prix et à affirmer leur
empire.

• Celles qui s’apparentent au dieu Apollon en se concentrant sur les


compétences, la capacité des individus à tenir leurs rôles, le respect
de l’entreprise dans son ensemble.

• Celles qui ressemblent à la déesse Athéna en se penchant sur les


résultats, l’atteinte des objectifs, la réussite.

• Celles qui font penser au dieu Dionysos par leur tendance à


privilégier la réalisation personnelle des individus, la créativité,
l’enthousiasme, l’élan personnel, l’audace.

Nous disons qu’il y a deux sortes d’entreprises. Celles qui ont ou qui
sauront franchir les kilomètres et celles qui éprouveront plus de difficultés.
Les premières ressemblant beaucoup à Dionysos, un peu à Apollon et ne
perdant pas de vue Athéna.
Les secondes veulent à tout prix ressembler à Zeus et laissent les moins
bons côtés d’Apollon prendre le dessus.
Ne te fais pas si grand
« Ne te fais pas si grand, tu n’es pas si petit ».
Une jolie phrase de Freud !
Concrètement, il y a :

• Celui à qui nous voudrions ressembler.

• Celui que nous voudrions être.

• Celui que nous voudrions devenir.

• Celui que les autres voudraient que nous soyons.

• Celui que nous pensons que les autres voudraient que nous soyons.

• Celui que les autres croient que nous sommes.

• Celui que nous croyons être.

• Celui que nous sommes réellement.

• Ce dernier est le germe, la graine et le fruit de trois autres


personnages :

• Celui que nous étions.

• Celui que nous sommes devenus.

• Celui que nous pourrions devenir.

Cela en fait du monde là dedans !


Avancer dans le labyrinthique monde digital commence par cesser de
vouloir ressembler à celui que nous voudrions être ou à quelques autres. Il
s’agit de faire une traversée, que personne ne peut faire à notre place. Tout
le monde ne pourra pas monter dans la barque, et tant mieux. Autrement, il
est probable que chacun ne ramerait pas dans le même sens et que la barque
tournerait en rond.

Quelle version du marketing ?


Deux professionnels du marketing se rencontrent. L’un est l’autre sont bien
habillés, la trentaine, dynamiques, les dents longues.
La conversation s’engage. Les sourires et les regards visant à convaincre
l’autre, ponctuent des phrases truffées d’un jargon qui leur est propre. Au
fur et à mesure de l’avancement de la discussion, l’incompréhension
mutuelle s’installe progressivement. Le nombre des mots que l’un emploie
et que l’autre ne comprend pas augmente et vice versa.
Le premier interpelle le second en interjetant :
« Mais au fait, t’utilises quelle version du marketing ? La 1.1.2.6 ou la
1.7 ? »
Cette situation est moins surréaliste qu’elle n’y paraît. Les technologies et
leurs évolutions permanentes colonisent nos métiers. Le marketing est
désormais étroitement lié et de plus en plus impactés par les avancées
informatiques, web, digitale, mobile, etc.
Le marketing lui-même aura bientôt des numéros de versions, exprimant
son niveau de dépendance à telle ou telle technologie, révélant la génération
à laquelle il appartient, explicitant son niveau de développement, tels les
logiciels.
Cela rend le management des équipes marketing extrêmement difficile, dés
lors que le n+1 n’est pas de la partie. Dans le meilleur des cas, les efforts de
pédagogie de l’un n’ont d’égale que les efforts de compréhension et
d’attention de l’autre. Mais souvent cela ne suffit pas. Dans le pire des cas,
celui qu’on ne comprend pas et que l’on ne comprendra de moins en moins
est remplacé. Cela ne résout pas le problème. Cela ne fait que le décaler
dans le temps. Le même scénario se rejouera avec son successeur. Il arrive
même que ceci se produise à l’échelle d’une équipe Web entière, voire
d’une business unit.
Le choc des sous-cultures et des micro-cultures joue à plein. La confiance
que sauront s’accorder mutuellement les membres de cultures différentes,
mais travaillant sous un même toit, sera peut-être un facteur déterminant
lorsque l’entreprise sera pris dans les embouteillages des rues du grand
village digital.

Self learning
Le self-learning est une tendance de fond aux USA. Il gagne du terrain en
Europe.
Face à la montée du digital, il est de moins en moins simple pour une
direction des ressources humaines, de former les collaborateurs d’une
entreprise. Le Web évolue si vite que les organismes de formations
traditionnels d’arrachent les cheveux. Le catalogue des formations imprimé
en début d’année est obsolète avant même la fin du premier trimestre. Le
contenu des sessions devient caduc presqu’aussi rapidement. Les
formateurs peinent à actualiser leurs cours et leurs supports de formation.
Du côté des salariés, il n’importe plus d’avoir appris, mais de savoir
apprendre, d’avoir appris à apprendre pour continuer d’apprendre.
L’investissement personnel qu’il faut faire pour rester à jour tend à grandir.
En dépit de la plus ou moins bonne volonté des départements des ressources
humaines, des efforts des centres de formations et de l’implication
grandissante de certains salariés en termes de self-learning, l’équation
devient de plus en plus difficile à résoudre.
La participation et l’implication des collaborateurs de l’entreprise aux
débats sur leurs métiers, qui ont cours sur le Web semble être la solution par
défaut. Cependant, elle introduit trois questions :

• Quelle est la légitimité de ceux qui s’expriment le plus à l’intérieur


du débat ? Ceux qui parlent le plus ne sont pas nécessairement les
plus intéressants, les plus pertinents, les plus dignes d’être écoutés.

• Quelle est l’intention véritable de ceux qui aliment le débat ? Sont-


ils de simples altruistes, des pédagogues dans l’âme, des
évangélisateurs dénués de tous intérêts, ou les défenseurs de
certaines solutions, des prestataires de services, ou un mélange des
deux ?

• Comment garantir l’étanchéité du mur qui sépare ce que


l’entreprise souhaite garder confidentiel (ses projets, ses résultats,
ses stratégies…) et la diffusion au grand jour des informations,
puisque pour profiter du débat, il faut tôt ou tard se démasquer un
peu ?

En attendant, l’upgrade des compétences de chacun, dépendra de :

• La capacité, de la volonté et de l’énergie qu’il y mettra.

• L’habilité dont il fera preuve pour profiter des débats tout en en


révélant le moins possible.

Après l’ère du e-learning, place à celle du me-learning ?


Est-ce un frein ou un moteur pour les pèlerins dont les pieds fouleront les
chemins du monde digital ?

Le testament de Peter Drucker


En fin de vie, le gourou du management de la seconde moitié du vingtième
siècle, Peter Drucker, n’avait plus rien à prouver.
Après avoir été l’un des dernier élèves ayant suivi les cours de Joseph
Schumpeter, avoir connu personnellement Sigmund Freud, avoir réfléchi
plus de soixante années consécutives au management, publié près de trente
ouvrages, enseignés aux Etats-Unis, conseillé les plus grands, aidé d’autres
business thinkers de talents comme Jim Collins, certaines de ses ultimes
remarques laissent pour le moins pantois :
« Le management et ce qui l’entoure consiste finalement à rendre difficile le
travail des autres ».
« Il y a bien longtemps que la plupart des managers, ont pris leur retraite,
au travail ».
« La seule chose qui ne sera jamais en rupture de stock dans l’entreprise est
l’incompétence ».
Courage à celles et ceux qui voient se profiler à l’horizon de la route des
cols et des côtes. Car il faudra composer et faire avec ce qui précède.

Les absents ont toujours raison


Les absents sont de plus en plus nombreux.
Entre les congés, les RTT, les arrêts-maladies qui se multiplient, il devient
difficile d’avoir tout le monde en même temps dans un service, un
département.
Ailleurs, c’est pire. Une entreprise indienne de deux cent salariés est
forcément confrontée à plus d’une centaine de religions, pratiquées chacune
avec ferveur et offrant chacune au moins une vingtaine de jours fériés
différents d’une religion à l’autre. Il va falloir apprendre à travailler avec les
absents, avec l’absence comme donnée de base.
La confiance entre les collaborateurs pour former des binômes pourrait
devenir cruciale. La nécessité d’expliquer, de transmettre, de former le
voisin de bureau aux tâches que nous effectuons quotidiennement,
s’imposera peut-être. L’effort général, entrepris pour ne pas interrompre le
mouvement en marche est peut-être l’une des conditions de réussite pour
avancer dans l’univers digital.

Détecteurs de talents
Il y a des hommes dont le talent est précisément de savoir révéler d’autres
hommes. Le plus souvent, ils sont ignorés, non reconnus.
Qui se souvient du nom de l’entraineur de foot anglais, à la modeste
carrière, qui a su repérer David Beeckman alors qu’il n’avait pas dix ans et
le coacha pour faire de lui une star du football mondial ?
Qui se souvient que sans un modeste professeur de la troisième République,
perdu dans les Ardennes, Georges Izambard, la littérature n’aurait jamais
été la même, car les écrits du jeune Arthur Rimbaud que sa mère voulait
détruire n’aurait jamais été mis à l’abri.
La boxe aurait-elle connu des champions comme Mohamed Ali ou Mike
Tyson sans Don King ?
Quels rôles pourraient bien jouer ces révélateurs de talents, dans le monde
digital, jalonnée d’auto-stoppeurs en apparence quelconque, mais qui sont
peut être les Jack Kerouac de demain.

On gagne quand…
Un ancien sportif professionnel me disait ceci :
« Dans le monde du sport, tout le monde pense que l’on est heureux quand
on gagne.
En réalité on gagne quand on est heureux.
C’est la leçon que j’ai tiré de mon expérience de sportif professionnel. »
Les entreprises recherchent, plébiscitent et consacrent ceux qui recherchent
la victoire.
Il suffit d’observer la guerre que ces aspirants au podium se livrent parfois
entre eux, en interne, pour aisément déduire que tout cela n’a rien à voir
avec le bonheur. Sauront-il heureux au moins, à la fin, une fois qu’ils auront
franchi la ligne d’arrivée les premiers ? Rien n’est moins sûr. Le plus
souvent ils gaspillent leur énergie à escalader une échelle qui n’est pas
adossée au bon mur. Une fois en haut, ils découvrent que ce qu’ils voient ne
correspond pas à ce qu’ils imaginaient.
Pour gagner, les entreprises devraient plutôt s’évertuer à recruter et
promouvoir, non pas des gagneurs, mais des gens heureux, qui gagneront
simplement parce qu’ils sont heureux. L’équilibre, le bien être, l’harmonie
avec soi confèrent souvent plus de force que les appétits, les désirs, les
envies qui au contraire affaiblissent.

A chacun son mode


Nous avons tous des modes d’acquisition du savoir et des connaissances
très différents.

• Les uns ont besoin de voir les choses pour les assimiler : ils
regardent le tableau du professeur, lisent des livres…

• D’autres ont besoin d‘entendre les choses pour les intégrer : ils
écoutent le professeur, apprennent leurs leçons à haute voix…

• D’autres ont besoin d’écrire les choses pour se les approprier : ils
prennent des notes, ils remettent leurs notes au propre, ils copient
sur leurs voisins ;-)

• D’autres ont besoin d’expliquer les choses pour les assimiler : ils en
parlent à d‘autres, préfèrent les débats aux cours magistraux.

Une nouvelle génération de professionnels se distingue par le fait quelle


écrit, qu’elle publie, qu’elle partage, qu’elle débat en ligne, sur ses métiers,
de son secteur, au travers de blogs, de groupes… Elles comptent
vraisemblablement des personnes dont le mode d’acquisition des
connaissances se situe dans les deux derniers points et plus particulièrement
dans le troisième.
Pourquoi les envoie-t-on à des formations dont le format ne correspond pas
à leur mode privilégié d’apprentissage ?
Pourquoi l’entreprise ne les utilise-t-elle pas comme formateurs internes ?

Blue collars, white collars et web collars


La révolution industrielle a vu naître une nouvelle génération de
travailleurs : les blue collars. Venus des campagnes jusqu’aux villes,
suivant le grand mouvement de l’exode rurale, ces paysans qui
embauchaient à l’usine se voyaient revêtus d’un bleu de travail, d’où leur
surnom, blue collars ou cols bleus en français.
Avec le développement de l’économie des services, une autre génération de
travailleurs vit le jour. Employés de bureaux, ils portaient une chemise de
ville blanche et furent surnommés les white collars ou cols blancs en
français.
Arrivent aujourd’hui une population qualifiée, jeune, diplômée, de plus en
plus expérimentée suite à une succession de stages, formée au digital. Ne
constituent-ils pas la classe des web collars, la classe de ceux dont nous ne
connaissons pas la couleur du col de chemise car :

• Nous les cantonnons à des tâches qu’ils exécutent depuis les plus
bas échelons de l’organigramme, (presque cachés au fond là bas,
dans l’espace situé après la machine à café.)

• Nous ne les conservons pas assez longtemps dans nos


organisations, car ils sont stagiaires, en CDD… pour se souvenir
encore d’eux après leur passage.

• Nous les reléguons à des jobs qu’ils peuvent faire depuis leur
domicile : community manager, développeur web, graphiste, par
exemple.

• Nous ne les voyons pas au travail, car ils sont sans emploi.

Comment les faire monter dans le car qui serpente les routes du monde
digital alors que des orages, des crises et un revêtement parfois abîmé
rendent parfois difficilement praticable ?
Chapitre 4
TEMPS

Socrate vs. Buddha


Nous sommes au sixième siècle avant Jésus-Christ. Le monde connaît une
11
véritable mutation spirituelle .
A l’Ouest, un petit homme barbu discute avec les jeunes Athéniens et
s’apprête à donner sans le savoir le coup d’envoi de ce qu’on appellera plus
tard la philosophie. Il se nomme Socrate.
Au même moment à l’Est, un prince du nom de Sidharta Gautama, vient de
quitter le royaume de son père. Son voyage l’a conduit à prendre conscience
de l’omniprésence de la douleur et de la souffrance chez les hommes. Il a
quitté les sages qu’il avait côtoyés pour trouver un remède à ce problème,
sans solution. Il s’est assis au pied d’un arbre et s’apprête à atteindre l’état
d’éveil qui lui vaudra le surnom de Bouddha (Bouddha voulant dire
l’éveillé, celui qui a atteint le nirvana).
La grande invention du Buddha est de s’être assis pour réfléchir. Par
opposition à son contemporain Socrate qui n’avait de cesse de déambuler
dans les rues d’Athènes, au point d’être mis à mort pour avoir trop perverti
la jeunesse.
Pour franchir les jalons du monde digital, il faut judicieusement alterner
action et réflexion. L’action est tentante. La réflexion parfois frustrante,
mais nécessaire.

New leaders, new ladders


Quelle université américaine n’a pas une chaire consacrée au leadership ?
Sujet de prédilection des américains, le leadership a généré une littérature
abondante.
Lisez un livre américain sur le leadership, un deuxième, un troisième… un
trente-neuvième et vous en aurez marre d’entendre parler constamment des
mêmes exemples. C’est à croire que les Etats-Unis ont déposé une liste
officielle des leaders à prendre en considération :

• Des hommes politiques : Georges Washington fondateur des États-


Unis, Thomas Jefferson auteur de la Constitution Américaine, John
Kennedy symbole de la prospérité du pays…

• Des inventeurs : Thomas Edison et son ampoule électrique, James


Watt et sa machine à vapeur, les frères Wright et leur avion…

• Des entrepreneurs : Henry Ford de Ford Motors Corporation,


Alfred Sloan de General Motors, Andy Groove d’Intel, John
Chambers de Cisco, Michael Dell de Dell, Bill Gates de Microsoft,
Steve Jobs d’Apple…

• Des P.D.G. : Lee Iacocca de Chrysler Corporation, Jack Welch de


General Electric…

• Des sportifs : capitaines d’équipes de basket, entraîneurs d’équipes


de base-ball… Toujours les mêmes.

Les leaders traditionnellement montrés en exemple sont trop vieux pour la


nouvelle génération. Ont-ils eu à franchir des difficultés de même nature
que celles qu’impose le monde digital ? Oui, en quelque sorte. Mais ils l’ont
sans doute fait à pas de géants dans un monde alors différent. Quelques
figures du Web font petit à petit leur entrée dans cette check list.
Une nouvelle échelle de mesure du leadership est peut-être à inventer. Les
leaders du vingt et unième siècle qui nous inspireront pour parcourir la
route du Web n’auront pas la barbe blanche de Georges Washington, le
costume de Bill Gates et le tee-shirt de Steve Jobs. Sans parler de ceux qui
inspirent déjà nos cadets : Kelly Slater, Tony Hawks, Matt Hoffman, Bono,
David Lynch, Barack Obama, Eminem, Lady Gaga, Fifty Cents, Toopak,
Mark Zuckerberg…

Le virus Y
Il y a eu les baby boomers (les Occidentaux nés après guerre), puis la
génération X (les Occidentaux nés entre 1959 et 1981). On parle à présent
de la génération Y. Les Américains utilisent également l’expression digital
natives ou net generation pour pointer le fait que ces enfants ont grandi
dans un monde où l’ordinateur personnel et l’Internet sont devenus de plus
en plus accessibles.
Les portraits que l’on dressait des deux générations précédentes étaient
plutôt flatteurs. Tout change lorsque l’on arrive à la génération Y. Celles et
ceux qui la composent seraient :

• Séparés de leurs ainés par un fossé générationnel.

• Inversés dans la hiérarchisation de leurs valeurs.

• Davantage à l’écoute d’Internet que des institutions (église, armée,


famille…).

• Plus attachés à leurs pairs qu’à leurs pères.

• Déphasés par rapport aux modes de fonctionnement de l’entreprise.

La génération Y est de plus en plus présentée comme un poison : ingérable,


difficile à intégrer dans l’entreprise, impossible à manager. N’est-elle pas
plutôt comme un poisson dans l’eau, au sein d’un monde qui change, qui
bouge, qui vit et qui lui ressemble. Un déluge de changements, de
révolutions, de mutations traversent notre époque et notre société. Les
poissons que nous croyions être des poisons, s’en sortiront peut être mieux
que ceux qui les jugent.
Faut-il condamner cette jeunesse, la laisser envahir les bars qui jalonnent
les rues du monde digital où l’on boit des bières en évoquant les
manifestations que l’on pourrait organiser en plein milieu de la route du
Web ? Sans doute pas. Elle pourrait bien nous surprendre et dans le bon
sens. Thomas Jefferson disait que chaque génération a besoin de sa
révolution. Les boomers eurent les leurs : mai 68 et la révolution sexuelle
en France, mouvement contre la guerre du Vietnam aux USA. La génération
X n’a pas vraiment eu sa révolution. La génération Y a (au moins) pour elle
de s’être mobilisée autour de l’écologie pour protéger la planète. Moins
politisée que ses aînées, elle n’en est pas moins désintéressée par la
politique et exprime simplement ses idées avec de nouveaux leviers comme
le Web social.

Passer par le passé


On croit que les innovations, les inventions, les nouveautés ont un âge et
une époque qui leur est propre. Selon cette croyance, l’Antiquité aurait vu
naître des choses propres à son temps : la stratégie pour organiser les
campagnes de l’armée Romaine, l’astronomie pour guider les expéditions
maritimes… Le Moyen-âge aurait apporté d’autres innovations
correspondant à son temps : les universités pour institutionnaliser la foi
Catholique, le vaccin pour endiguer les épidémies… La Renaissance aurait
apporté des nouveautés propres à son époque : le crédit pour favoriser
l’expansion du commerce, l’imprimerie pour promouvoir les idées…
On se plait à vouloir croire que chaque nouvelle innovation est plus
moderne, plus technique, plus avant-gardiste que la précédente.
C’est un tort ! Le meilleur exemple se situe au cœur des villes américaines
que le dix-neuvième siècle vit grandir et à l’intérieur desquelles les
innovations rythmèrent les mutations. Dans l’ordre :

• Invention de l’éclairage au gaz

• Invention de l’éclairage électrique

• Invention du tramway

• Développement de la presse magazine

• Arrivée des department stores

• Invention du téléphone

La presse magazine est moins technique que le téléphone, elle est le simple
prolongement de la presse quotidienne qui vit le jour un siècle plus tôt. La
rupture qu’elle constitue est moins forte que celle qu’introduit le téléphone
par rapport au courrier… L’enchaînement des innovations présenté ici,
montre que le progrès, l’avancée, n’est pas constant, ni linéaire, ni régulier,
ni exponentiel.
Nous allons plus loin en soutenant que des réservoirs d’innovations latentes
se situent dans le passé et qu’il importe de les débusquer.

• Ceux qui ne parviennent pas à innover cherchent le plus souvent à


innover pour le futur.

• Ceux qui parviennent à innover, cherchent le plus souvent à innover


pour le présent.

• Nous ajoutons, que pour innover pour le présent, il faut oser


regarder dans le rétroviseur, derrière soi, le passé, même le plus
lointain.

Des inventions réservées à des époques anciennes continuent de proliférer.


Il se crée encore aujourd’hui de nouvelles religions et dieu sait si les
religions sont associées par nos esprits aux temps anciens. Nous l’oublions,
mais l’Occident, l’Asie, l’Inde, sont le berceau de nouvelles religions loin
d’être marginales (Mormons aux USA, Krishnaïsme en Inde, Foie Baha’ie
répandue dans le monde, etc.)
L’innovation n’a pas d’âge. Ou plutôt, elle a plusieurs vies. Elle se
réincarne régulièrement. Après avoir été retirés des villes, les tramways
réapparaissent.
Abandonnés par les adolescents, les rollers ont fait leur retour via les
adultes. La bicyclette est revenue sous forme du Velib’…
Sous une apparente linéarité, l’innovation ne cesse de faire vas-et-vient. Il
se créait hier des choses hyper technologiques : les archéologues ne réfutent
pas tous la thèse selon laquelle les Egyptiens auraient inventé quelque chose
12
de comparable à la pile électrique ; invention qui disparut puis réapparut .
Le temps est en réalité infini. Il s’écoule depuis la nuit des temps et
continuera de s’écouler après nous. Prenons le temps, de temps en temps, de
voir ce qu’il nous cache.
L’écume du Web
Dans le roman l’Ecume des jours, Boris Vian fait jouer d’un drôle
d’instrument à l’un de ses personnages : le piano-cocktail. Selon la mélodie
jouée par le musicien, un cocktail est simultanément réalisé par le piano. La
scène se passe dans l’appartement de l‘auteur où il reçoit des amis artistes,
écrivains, musiciens, éditeurs, journalistes… Elle montre que la musique est
une première création (une mélodie), destinée à en déclencher une seconde
(un cocktail), dont l’ingurgitation par les invités favorisera une troisième
création (discussions ou débats), etc.
Ce passage du livre est une très belle illustration de l’effet en chaîne, de
l’effet en cascade, de l’effet de bord qui appelle une question : n’est-ce pas
à l’intérieur de l’effet de bord que se trouve la solution pour avancer dans le
monde digital ? A trop regarder quelque chose de près, depuis trop
longtemps, on borne malgré soi son esprit, qu’on le veuille ou non. On lui
impose des limites. On le force à n’évoluer que dans un champ étroit, à
l’intérieur duquel la solution ne se trouve souvent pas. La résolution d’un
problème et le déblocage de situations se trouvent le plus souvent à
l’extérieur.
Mieux, c’est en s’intéressant aux effets de bord, en observant les résultats
indirects, les effets produits hors de l’activité principale que viennent
parfois les meilleures idées. C’est là que se forment de temps en temps des
réservoirs entiers d’innovations potentielles, d’idées latentes…

Molière est mort sur scène


Molière est mort sur scène. Il se serait éteint en disant ces derniers mots :
« Que le spectacle continue ».
Nous le savons tous.
De son vivant, le maître s’opposait farouchement à ce que ses pièces soient
mises par écrit ou éditées. Le théâtre devait selon lui être vivant, être joué
en public, être déclamé, être entendu, mais certainement pas abordé comme
un lecteur le fait avec un livre : seul, au calme, lisant dans sa tête…
C’est parce que des fans de Molière ont retranscrit des pièces, par écrit et de
mémoire, que les œuvres de l’auteur lui survécurent. À l’époque, Molière
bénéficie d’un tel succès, d’une telle notoriété, que certains nobles d’alors
n’hésitent pas aller voir et revoir ses pièces des dizaines de fois. Elles font
l’objet de discussions dans les salons. On se flatte d’avoir vu la dernière
représentation de Monsieur de Molière à Paris. On s’enorgueillit de
connaître par cœur des passages entiers de certaines pièces. On les récite.
Les partisans de Molière affrontent ses détracteurs. Bref, Molière est une
star. Il a ses fans. Ces derniers sont instruits, riches et issus du beau monde.
Ils ont les moyens de retranscrire les œuvres pour en assurer ensuite une
édition. Les uns, animés par un sentiment altruiste veulent faire connaître au
plus grand nombre les pièces du maître. Les autres, plus vénaux, lancent des
éditions pirates à des fins pécuniaires.
Molière n’aura de cesse toute sa vie de tenter d’endiguer cette hémorragie.
Il n’y parviendra que partiellement. Heureusement, car le siècle suivant
oublie un peu le théâtre. Cet art qui était le genre littéraire par excellence du
dix-septième siècle est supplanté. Molière est un temps oublié par l’histoire,
puis redécouvert plus tard, grâce aux éditions pirates.
Là encore, la démonstration est faite que ce qui est condamnable à un
instant peut être louable à un autre.
Les rues du monde digital, séparent peut-être, avec leurs quelques mètres de
largeur, un comportement répréhensible d’un comportement profitable au
bien commun ?

A condition que
L’esprit humain adore se rassurer, se protéger, anticiper le pire.
Alors, on se plait à bien vouloir faire quoi que ce soit mais à condition que
ceci, à condition que cela, et à condition qu’encore ceci, etc. En cherchant à
réunir des conditions qui ne peuvent pas l’être, on s’assure de l’inaction et
on stagne en face des kilomètres qui composent le monde digital.
Tout un chacun l’a bien compris. Rechignant devant le travail, préférant le
temps libre, le repos, les loisirs, au travail, à l’effort et la peine, nous
mettons consciemment ou inconsciemment en place des stratégies pour
justifier notre absence de prise d’initiative, notre aversion au risque, notre
peur du changement, notre inaction. L’un des moyens les plus utilisé est
l’invocation de conditions qui soient :

• Ne sont simplement pas possibles. Exemple : à condition que nous


ayons un budget deux fois supérieur.

• Ne peuvent pas être présentes à un instant T. Exemple : à condition


d’être rentable dès la première année.

• Ne peuvent pas coexister avec d’autres conditions déjà en place.


Exemple : à condition d’avoir un cadre, des objectifs stables, des
périmètres clairement délimités, des missions bien définies alors
que nous sommes dans une start up, tentant de s’en sortir en
migrant sur un marché d’opportunité.

• Ne peuvent exister du fait que des conditions contraires sont


réunies. Exemple : à condition de recruter, alors que c’est le fait de
limiter les équipes qui permettra à l’entreprise d’atteindre les
objectifs qui favoriseront une levée de fond.

Soyez fermes. Ne laissez pas les conditions s’immiscer partout dans le


discours et dans le quotidien. C’est sans condition !

Le marketing post mortem


Nous sommes conditionnés depuis notre premier âge à être des élèves, à
écouter des maîtres, à comprendre ce que nos prédécesseurs ont découvert,
formulé, théorisé et développé.
Une fois adultes nous conservons ce réflexe. Nous nous préoccupons peu
d’apprendre mais continuons à rechercher des « maîtres » qui se cachent
sous d’autres noms : managers (au travail), mentors, formateurs (dans le
cadre de la vie professionnelle), moniteurs (de sport), coach (alimentaire,
personnel), leaders (entrepreneurs, hommes politiques), inspirateurs
(activistes, artistes…), etc.
Nous aimons les repères, avoir un cadre, savoir comment il faut faire les
choses afin de les faire comme elles doivent être faites.
Nous passons plus de temps à essayer de faire en sorte que ce que nous
faisons soit conforme a ce que l’on nous a enseigné à son sujet, au lieu de
faire ce qu’il faut faire pour que cela marche.
Or personne n’enseigne, ne montre, n’explique comment avaler les
interminables kilomètres du monde digital.
Faisons les choses au présent. Maintenant. Tout de suite. Sans attendre. Et
arrêtons de faire du présent le moyen de rendre hommage au passé. Le
présent ne doit pas être l’otage du passé et nous non-plus.

Brain vs No brain
Une journée de travail est remplie de no brain.
Qu’est-ce que c’est un no brain ?
Un no brain est un point sur lequel il n’y a pas à réfléchir, une question
dont la réponse va de soi, un problème qui doit se résoudre de la manière la
plus simple, avec bon sens. Voici quelques exemples de no brain qui
peuvent venir frapper à la porte de votre bureau :
La responsable du service client entre dans le bureau de son n+1 :
« Bonjour Richard, un client a téléphoné. Il était furieux. Nous n’avions pas
livré à temps ce qu’il avait commandé. C’était il y a trois mois.
Conformément à nos conditions commerciales, il nous avait demandé un
remboursement. Nous lui avons confirmé qu’il serait bel et bien remboursé
dans les trois semaines. C’était il y a deux mois. Il appelle aujourd’hui car
il n’a toujours pas reçu le remboursement. Il est apparemment furieux !
Est-ce que je dois le rappeler ? »
C’est un no brain. Oui elle doit le rappeler au plus vite. Evidemment !
Bon OK, il faut lire entre les lignes. On sait, on sait… Le plus important
dans la communication est de savoir entendre, non pas ce qui est dit, mais
ce qui n’est pas dit. Dans l’exemple présent, ce qui n’est pas dit c’est :
« J’ai pas envie de le rappeler, j’ai d’autres choses à faire », « Je n’ai pas
envie de me faire engueuler par un client furieux », « C’est toujours moi qui
doit réparer les erreurs des autres, c’est injuste », « Confirme-moi qu’après
tout, je peux ne pas le rappeler et que tu ne m’en tiendras pas rigueur. ».
No brain encore une fois. Il n’y a pas à se poser la question. Elle doit
rappeler, malgré tout le non-dit qui vient d’être explicité. Cela fait partie du
job, c’est la vie. Un point c’est tout.
Autre exemple, un collègue de Pierre (chef de produit) le croise dans le
couloir. La société lance une nouvelle gamme de produits aéronautiques
mais manque de budget pour communiquer : « Ah salut Pierre. Tu tombes
bien ! Il fallait que je te voie. Le rédacteur en chef d’Avions Magazine (le
magazine le plus lu du secteur) aimerait nous interviewer. Apparemment
c’est urgent. Il voudrait s’entretenir avec quelqu’un de chez nous, par
téléphone au plus tard demain. Il a également demandé des photos de nos
produits. Je crois que c’est pour le dossier central. Tu penses qu’il faut
qu’on en parle à notre service relations presse ? ». No brain, encore une
fois. Bien sûr qu’il faut !
Arrêtons de perdre du temps. Nous avons des brain (des cerveaux en
français). Alors utilisons les pour chasser les no brain.
Amusez-vous à compter le nombre de no brain dans une seule journée.
C’est édifiant. Le pire est que les no brain sont le plus souvent créés par les
collaborateurs de l’entreprise, par nous-mêmes, le fruit de nos imaginations,
le résultat de nos peurs... S’en débarrasser est primordial. Celui qui a une
longueur d’avance sur la route digitale le sait. Nos brain sont nos alliés
autant que nos ennemis. Nous ne les contrôlons pas complètement. Les
mettre en veille est parfois pas plus mal…

Entrepreneurs précoces
Le talent n’attend pas le nombre des années.
Cet adage est bien connu et pèche par anachronisme. Ceux qui l’utilisent et
citent en exemple les exploits précoces des grands hommes oublient
qu’avoir vingt-cinq ans aujourd’hui n’est pas comparable au fait d’avoir
vingt-cinq ans il y a deux cent ans, il y a cinq cents ans, il y a mille ans.
Certes Alexandre le Grand avait conquis le monde à vingt cinq ans, mais la
durée de vie à son époque était de trente ans. A vingt cinq ans, tous les
hommes de son époque avaient achevé de réaliser l’essentiel de ce qu’ils
réaliseraient dans toute leur vie, comme un homme de soixante-dix ans
aujourd’hui.
Revenons au présent immédiat. A vingt cinq ans, la plupart d’entre nous est
loin d’avoir réalisé le gros de ce qu’il accomplira au cours de sa vie. Et ce
n’est pas si grave, puisque nos vies durent bien plus longtemps qu’avant et
tendent à se rallonger. Cependant, la précocité ne semble jamais avoir été
aussi matinale et aussi fréquente que dans le Web. Jerry Yang et David Filo
avaient vingt-cinq ans lorsqu’ils fondèrent Yahoo ! Idem pour Larry Page et
Sergey Brin de Google. Même scénario pour Pierre Omydiar d’eBay. Plus
fort encore, la tendance est au rajeunissement avec l’arrivée de Mark
Zuckerberg de Facebook et de jeunes entrepreneurs encore adolescents qui
développaient déjà leurs premiers sites Web à douze ans, au lieu de faire
leurs devoirs.
Les entrepreneurs sont de plus en plus jeunes. Peut-être qu’il est plus facile
de courir des heures durant sur la route digitale, à 17 ans qu’a 50 ans ?

Web tragedy
Et si nous nous lassions du Web, dans quelque temps, parce qu’il nous
aurait déçu.
L’hypothèse n’est pas si folle.
Le Web est devenu un bien commun. Il est donc potentiellement menacé
par la tragédie des biens communs (Tragedy of the Commons).
Cette théorie malheureusement trop souvent vérifiée, décrit une compétition
pour l’accès à une ressource limitée, menant à un conflit entre intérêt
individuel et bien commun dont la conséquence rationnelle est un résultat
13
perdantperdant : la surexploitation de la ressource .
Le problème des émissions de gaz à effet de serre est une parfaite
illustration de la tragédie des biens communs : l’impact de l’émission d’une
tonne de gaz à effet de serre est mondial, ce n’est ni une pollution locale, ni
une pollution régionale. Par conséquent, tous les pays profitent des
réductions de gaz à effet de serre effectuées par les autres pays, mais très
peu sont incités à les limiter car :

• L’effort effectué par le pays pour réduire ses émissions de gaz à


effet de serre ne profite pas uniquement à sa population.

• Rien n’assure que les autres pays limiteront également leurs


émissions de gaz à effet de serre.

• L’absence de limitation de leurs émissions de gaz à effet de serre


par les autres pays peut abolir l’effort du premier.

Le Web est un bien commun qui pourrait connaître un sort comparable. Il


ressemble à une ressource illimitée puisqu’il croît et qu’il se développe
constamment. Cependant, il abrite une multitude de ressources limitées :

• L’attention des consommateurs potentiels (à des sollicitations


commerciales).

• Les twitts des potentiels followers sur Twitter ou les likes des
membres de Facebook.

• Le temps consacré par les utilisateurs au Web.

• L’énergie que les internautes voudront bien consacrer ou non, au


jeu en ligne de telle ou telle marque, à la campagne de tel ou tel
candidat, à l’initiative de telle ou telle communauté...

• Etc.

En nous ruant collectivement sur les ressources limitées du Web, nous


risquons peut-être de nuire à notre bien commun, puisque le Web est, et doit
rester, un bien commun.
Chapitre 5
ESPACE

La tour de Babel
Un passage de l’Ancien testament raconte l’histoire de la construction de la
tour de Babel. Les hommes se réunissent pour construire une gigantesque
tour qui touchera le ciel. Leur ambition est de s’élever aussi haut que Dieu.
Dieu finit par détruire la tour afin de punir l’orgueil des hommes.
La plupart d’entre nous connaissent cette histoire pour l’avoir vue en
peinture, en dessin animé ou simplement entendue, utilisée comme
métaphore, dans la vie de tous les jours.
Ce que nous savons moins, c’est que l’histoire précise qu’avant la
construction de la tour, les hommes utilisaient, selon la Bible, une seule et
unique langue. L’harmonie terrestre en était facilitée puisque les hommes
disposaient d’un moyen pour se comprendre. Pour les punir, Dieu détruisit
non seulement la tour, mais divisa également les hommes en leur attribuant
des langues différentes. De là nait tout ce qui peut contribuer à faire
s’opposer les hommes entre eux : origines, ethnies, races, langues, cultures,
coutumes, valeurs propres, mœurs différentes, incompréhensions
mutuelles…
Le phénomène n’est pas isolé et n’existe pas uniquement sous forme d’une
parabole, logée quelque part parmi les quelques trois mille pages de la
Bible. Les générations, les groupes, les mouvements, quels qu’ils soient
font constamment l’objet de divisions. Quand celles-ci ne sont pas de leur
propre fait, elles proviennent de l’externe, car il faut diviser pour mieux
régner. La communauté que forment les professionnels du Web français en
sait quelque chose. Les attaques visibles ou souterraines ne manquent pas
pour entraver sa marche sur la route du Web. Dans le même esprit, combien
de professionnels du Web, perdus au sein de grands groupes mortar, se sont
vus interdire d’aller à telle ou telle conférence, sous prétexte que dans leurs
métiers tout ne se passe qu’en ligne, ou interdire de lignes de téléphone
internationales, sous prétexte qu’ils ont Skype…
Notre communauté a une langue. Veillons à ne pas se laisser imposer
plusieurs langages qui symboliseraient le début de notre division,
l’apparition de dissensions, et la fin de notre marche sur les sentiers du
monde digital.
Se rassembler en ligne est un bon point mais ne suffit pas. Se voir
régulièrement, se rencontrer, échanger autour d’un café ou lors d’une
conférence est indispensable.

Gandhi et l’illettrisme
Gandhi, voilà quelqu’un qui s’est trouvé façe à une impasse, à un blocage, à
un ultime kilomètre qu’il fallait franchir : faire adhérer à un programme
politique (et non des moindres, puisqu’il s’agissait d’obtenir l’indépendance
14
de l’Inde), des centaines de millions d’illettrés .
Le génie de Gandhi fut de proposer un programme politique qu’un
analphabète pouvait saisir. Il tenait en quelques phrases simples, imagées,
faciles à comprendre et à transmettre d’un esprit à l’autre.
Passé au crible des critères habituels que nous utilisons pour évaluer
l’intelligence, la cohérence, la logique… le programme de Gandhi aurait
fini à la poubelle avec une note proche de zéro. Il fit souvent rire dans les
salons des colons Anglais. Gandhi avait simplement saisi que pour
parcourir sa route il fallait faire avec les obstacles et les avantages que lui
présentait le terrain :

• De la simplicité pour être compris non seulement des hommes forts


et vigoureux, mais aussi des vieillards, des femmes, des
adolescents, de tous ceux en âge de participer au mouvement de
désobéissance civile.

• De la brièveté, pour occuper le moins de place possible sur les


tracts, dans un pays où le papier est cher, mais aussi pour accélérer
leur rédaction, car ils étaient le plus souvent recopiés à la main par
des volontaires.

• De la mesure dans l’effort demandé à chacun, afin d’obtenir de tous


au moins un peu ; ce peu multiplié par des centaines de millions
d’individus devenait énorme.

• Des références au quotidien, aux ventres vides, aux maladies, aux


travaux difficiles, à l’avenir des enfants, pour fédérer le peuple le
plus hétérogène du monde, de part le nombre et la variété de ses
religions, de ses langues, de ses castes, de ses cultures…

• De l’humour pour ridiculiser les Anglais, décomplexer les Indiens,


donner à voir que l’adversaire n’était pas si grand et si fort qu’il y
paraissait.

Rien de très coûteux. Rien qui permettrait d’obtenir un prix Nobel de


physique, rien de digne d’un grand homme… Et pourtant le résultat fût au
rendez-vous !
L’ampleur du résultat ne passe pas nécessairement par la spectacularité des
moyens qui ont permis de l’atteindre.

Pelouse au repos
Les Américains voient les Français comme un peuple turbulent, agité,
individualiste, râleur, contestataire, indiscipliné, athée, épris de liberté,
anarchiste... Le tout a même était résumé en une formule lapidaire :
« Le peuple Français est le seul peuple qui a tué Dieu et guillotiné son
15
roi. »
Oui c’est vrai ! Nous sommes comme cela et le Web en un certain sens nous
plait bien car il nous nous permet d’exprimer, de mettre à profit et de
cultiver ces penchants.
Il est difficile d’interdire quelque chose à un Français. On peut toujours.
Mais rien n’assure que l’interdit sera respecté. Le Français sait bien que les
lois sont faites par les hommes, pour les hommes. Mais dès qu’il est face à
une interdiction, il ne peut s’empêcher de penser que les lois sont faites par
un petit nombre, contre un grand nombre d’hommes. Il la voit comme une
injustice criante.
Le Web est souvent stigmatisé pour les comportements illicites qu’il
permet, qu’il encourage, qu’il organise : téléchargement illégal, non respect
des droits d’auteurs, non respect de la vie privée, absence de confidentialité,
imagination sans pareil pour contourner les lois, etc. Par conséquent, dans
le Web et même au-delà, les interdictions augmentent au point de devenir
intolérables. Peut-être faut-il interdire d’une manière plus constructive, en
associant celui ou celle à qui l’on interdit, en l’aidant à comprendre la
raison de l’interdiction ? Par exemple à Paris, le nombre d’espaces verts et
de pelouses est important. Selon les endroits, les quartiers, les parcs, les
jardins, les pelouses sont interdites ou autorisées. Les panneaux « Pelouse
interdites » ont fonctionné un temps. Puis les Français n’en ont plus tenu
compte. Les pelouses se sont recouvertes de pique-niqueurs, de gens se
faisant bronzer, d’autres jouant au ballon…
Les panneaux «Pelouse interdites» ont alors été remplacés par des panneaux
« Pelouses au repos ».
Les pelouses se sont vidées.

En attendant Godot
Dans la pièce de théâtre, En attendant Godot, de Samuel Beckett, deux
vagabonds, Pozzo et Lucky, se retrouvent sur scène, dans un non-lieu (une
route de campagne avec un arbre) à la tombée de la nuit pour attendre un
certain Godot. Cet homme, qui ne viendra jamais, leur a promis qu’il
viendrait au rendez-vous ; sans qu’on sache précisément ce qu’il est censé
leur apporter, il représente un espoir de changement. En l’attendant, les
deux amis tentent de trouver des occupations, des distractions pour que le
temps passe.
La pièce dénonce l’absurde et l’incapacité des hommes à réagir lorsqu’ils se
retrouvent confrontés à lui. Ne pas agir sous prétexte que la situation devrait
évoluer positivement, à une date connue ou inconnue, est un mauvais
prétexte.
La condition de l’homme et celle de l’entreprise, les condamnent à ne pas
tout savoir, à ne pas tout connaître, à ne pas pouvoir tout deviner, à ne pas
pouvoir tout planifier... Il faut accepter d’avancer, non pas les yeux bandés,
mais parfois dans le brouillard, souvent dans la nuit, quelque fois sans
visibilité, le long des voies du monde digital. Le meilleur moyen de savoir
ce qu’il y a là bas au loin est de marcher jusqu’à là bas pour voir de plus
prêt.

Caisse de résonance
Les sources d’information dont l’homme dispose pour en apprendre un peu
plus sur lui-même, sur son présent et sur son passé récent, ont
considérablement évolué.
Les historiens en savent quelque chose. Il semblerait que plus on recherche
loin dans le temps plus les sources d’information sont rares, homogènes et
tangibles. Et qu’à l’inverse, plus on s’intéresse à des époques récentes, ou
même dans le présent immédiat, plus les sources de documentation sont
nombreuses, hétérogènes et volatiles.
L’historien qui s’intéresse à l’Antiquité dispose d’éléments peu nombreux,
homogènes mais concrets : des vestiges, des pierres, des morceaux de
poteries, etc. Son meilleur allié est l’archéologue.
L’historien qui s’intéresse au Moyen-âge, consulte des registres tenus par
l’Eglise (actes de naissances, actes de succession, actes de ventes…). Ils
sont plus nombreux, encore relativement homogènes, tangibles. Son
meilleur partenaire est l’homme d’Eglise qui travailla autrefois avec rigueur
et minutie.
L’historien de l’époque contemporaine consulte des journaux. Ils sont
encore plus nombreux, déjà moins homogènes et encore tangibles, bien
qu’un peu jaunis. Son meilleur ami est l’archiviste ou le journaliste.
L’historien de demain consultera quoi ? Des millions de pages Web,
extrêmement hétérogènes et intangibles. Qui est son meilleur allié ?
L’information qui était rare, localisée et localisable ne l’est plus. Tout au
contraire. L’hyper prolixité que le Web permet, a transformé le média en
une immense caisse de résonance à l’intérieur de laquelle trop de sons
différents trouvent un écho en même temps. Le résultat ne ressemble pas à
une symphonie harmonieuse et compréhensible mais à un vacarme duquel
certains paragraphes musicaux émergent parfois, avant de laisser place à
d’autres.
La route du Web pourrait se faire avec les oreilles bouchées. Mais il est
préférable de pratiquer l’écoute sélective. Autrefois, il fallait savoir humer
l’air du temps. Désormais, il faut apprendre à repérer très tôt les premières
notes du thème qui émergera, prendre le rythme, identifier quels musiciens
s’y joignent, au cœur d’un vacarme incessant de clics.

Ce que cela te fait


Il y a ce que je fais.
Il y a ce que les autres font.
Il y a ce que je ne fais pas.
Il y a ce que les autres ne font pas.
Etc.
Ce qui compte n’est pas tant ce que l’on fait, mais ce que cela nous fait.
Chaque expérience, chaque projet, chaque rencontre, chaque avancée sur la
route nous transforme que nous le voulions ou non. Cela peut nous donner
des idées, nous conforter dans des avis, nous ouvrir des horizons, nous
refermer sur nous-mêmes, augmenter des blocages, accroître nos
complexes, nous déverrouiller…
Pour se préparer à cheminer le long des routes du monde digital il faut
s’être frotté aux choses, s’être transformé à leurs contacts…
Il faut oser choisir, sélectionner, arbitrer entre les gens qui nous inspirent et
ceux qui nous découragent, les lieux qui nous conviennent et ceux qui nous
étouffent, les ambiances qui nous donnent de l’énergie et celles qui nous
pèsent.
Se rendre disponible au changement, à la mutation, à tout ce qui permettra
de saisir une opportunité, tel un auto-stoppeur au bord de la route du monde
digital est primordial.

Invention ici, réalisation là bas


Il n’est pas rare que ce qui est inventé à un endroit soit finalement déployé
ailleurs.
Le Web est un formidable laboratoire. Il incube une quantité incroyable de
nouveaux projets. Il fait circuler les idées, il permet les expérimentations, il
favorise les tests. Il rassemble les curieux d’esprit, les amateurs de
nouveautés, les entrepreneurs, les investisseurs… Il valide, sanctionne,
consacre, propage…
Ceux qui en tirent parfois le plus grand bénéfice ne sont précisément pas
dans le Web. Celui-ci a servi de labo à un média plus ancien et encore plus
puissant que lui : la télévision. Bien des idées de programmes télé sont
inspirés par des usages apparus sur le web.
Le succès de Meetic a peut être bien préfiguré les émissions télé de
rencontres amoureuses. Les succès des sites de cuisine ont peut-être
encouragé les émissions autour de la cuisine.

Origami
Origami est le nom que les Japonais donnent à l’art du pliage du papier.
Bien maîtrisé, cet art permet de réaliser une variété infinie de formes, en
pliant une simple feuille de papier, comme des animaux (grue, chat, chient,
dinosaure…), des personnages (pêcheur, paysan…), des végétaux (arbres,
pomme de pain…), des objets (boîte de Pandore, lampion…).
Une œuvre d’origami est jolie et fragile. On ose à peine la toucher. Elle est
comme certaine situation qui semble harmonieuse et que rien n’invite à
troubler. Pourtant c’est en dépliant, en regardant ce qui se cache sous les
plis que la vérité se découvre parfois. Tout l’art de l’origami se cache dans
les plis. C’est en comprenant cette logique que l’on progresse dans cet art. Il
faut défaire, soulever les parties qui masquent, désolidariser les formes
emboîtées pour que l’origami révèle son secret. Partir d’une figure
d’origami déjà réalisée, la défaire, aide considérablement à reconstituer le
chemin, par lequel elle a été confectionnée. Naturellement, cela ne se fait
pas. L’origami est une œuvre, souvent un présent, parfois un objet religieux.
Se livrer à son dépliage est un acte profane. Les Japonais parlent alors de
« souffler dans le vent » pour dénoncer un acte par lequel l’homme ne sait
pas rester à sa place.
De retour en entreprise, dans un monde moins poétique, on ne peut pas nier
que nous sommes fréquemment confrontés à un dilemme : laisser les choses
telles que, ou les changer. Par exemple : laisser une organisation en place
telle quelle, ou réorganiser ; maintenir la méthode A ou passer à la méthode
B ; remplacer Paul par Pierre où ne rien changer… Les audits classiques ont
leurs limites et ne permettent pas de pénétrer l’âme des choses, la vie
interne des situations ou l’état intime des êtres.
L’entreprise est remplie de situations comparables à des œuvres d’origami.
Il faudrait pouvoir déplier la situation, comme nous le ferions avec un
pliage, afin de pouvoir déceler les secrets de ses forces et faiblesses. Mais
ce n’est pas possible. Cela casserait tout. Il faut donc mettre en œuvre les
mêmes qualités que celles que les maîtres de l’art de l’origami utilisent :
audace dans la conception, vitesse dans la réalisation et patience dans la
contemplation.
Autrement dit :

• S’autoriser à imaginer des organisations inhabituelles, insolites,


jamais vues.

• Les mettre en place rapidement, sans hésitation, sans écart par


rapport au dessein initial.

• Leur donner le temps de trouver leurs harmonies, leurs équilibres,


leurs rythmes, leurs potentiels…

Hors les murs


Un paradoxe : avec le Web un individu lambda peut obtenir plus
d’information sur une entreprise qu’un salarié de cette même entreprise, qui
n’aurait pas accès à internet.
Le salarié lambda (privé d’internet) devrait surmonter des barrières
infranchissables avant de pouvoir accéder à l’information :

• Un rang hiérarchique qui ne lui donne pas le droit de poser


certaines questions.

• Un métier qui le cantonne à un certain périmètre d’information.

• Des règles de confidentialité qui régissent son secteur.

• Des clauses de son contrat de travail.

• La rétention d’information pratiquée en interne.

• La négligence dans l’archivage de l’information elle-même.

• La plus ou moins bonne volonté de ses collègues, l’incompétence,


l’absence, la démotivation...

• Etc.

A contrario, une personne externe à la société ayant accès à Internet peut en


apprendre énormément sur une entreprise. Si celle-ci a un statut l’obligeant
à publier des informations légales (bilans, comptes de résultats…), ce qui
est fréquent, le tour est joué. Si celle-ci est cotée en bourse, ce sera encore
plus simple. OK, des agences de communication financières sont chargées
de mettre en forme les documents légaux, d’en faciliter la lecture aux
actionnaires, tout en en disant le moins aux concurrents. Qui sait lire entre
les lignes s’en sortira très bien !
Voici un axe de travail pour les voyageurs qui empruntent la route qui mène
vers le monde digital. Faut-il s’en moquer ? Faut-il mettre leurs salariés à la
page car s’ils ont Internet, ils n’ont guère de temps pour enquêter sur leur
entreprise ou leurs concurrents ? Faut-il utiliser les gens de l’externe pour
en apprendre sur les autres et sur soi-même ?
Le message c’est le medium
Marshall Mac Luhan, le premier gourou des médias de l’histoire
proclamait : « le message, c’est le medium ». Par là, il voulait dire que ce
n’est pas le contenu qui affecte la société, mais le canal de transmission lui-
même. Un exemple simple permet de mieux comprendre : l’imprimé est un
médium, car il permet de transmettre une information depuis une personne
vers une autre. En tant que média, il est plus rapide que la parole transmise
de bouche à oreille, par exemple, puisque les milliers d’imprimés peuvent
être distribués en même temps et toucher simultanément une population
entière. Ce qui compte ici, n’est pas tant le message diffusé mais le fait
qu’un seul puisse, via ce média, toucher une société entière. Le media a ici
un pouvoir centralisateur : il induit une société structurée autour d’un centre
émetteur de l’information.
Qu’en est-il du Web ? C’est un media décentralisateur puisque :

• Il est possible de réagir au message initial.

• L’ensemble des réactions peut être supérieur au message de départ,


et faire contre poids à l’émetteur premier.

• Chacun, s’il s’en donne la peine, s’il y consacre du temps, s’il a du


talent, peut potentiellement devenir un émetteur et diffuser à un
grand nombre de destinataires, simultanément.

Allons plus loin, sur les pas de Marshall Mac Luhan. Avec le Web, ce qui
compte n’est pas tant ce que nous y lisons, y voyons, y consultons, ni même
y publions, y relayons, y twittons… mais l’effet que le medium Web produit
sur les émetteurs et les récepteurs des messages :

• Fédération

• Agrégation

• Attention

• Addiction
• Adhésion

• Implication

• Mobilisation

• Participation

• Réaction

• Grégarisation

• Responsabilisation

• Emotion

Ce qui importe n’est pas le fond de ce que nous exprimons sur le Web, mais
ce que cela veut dire sur le plan collectif. Que la majorité des actifs du Web
se limitent encore beaucoup à la simple expression du goût (j’aime, j’aime
pas) où au récit homéopathique de leurs quotidien, importe peu. Que nous
jouions complaisamment le jeu des marques et que nous nous soyons
transformés en de véritables hommes sandwiches qui déambulent dans le
monde digital avec nos pages Facebook pendues autour du cou, importe
peu... Les gens croient s’exprimer sur le Web. En réalité, ils votent : ils
approuvent, ils rejettent, ils cautionnent, ils encouragent, ils soutiennent…
Ils participent au développement d’une démocratie parallèle, dans laquelle
le suffrage universel n’a pas cours. Le Web est une démocratie au suffrage
censitaire. Il faut payer un « impôt » pour avoir le droit de voter ; qui se
finance en temps investi à se faire des amis sur Facebook, à twitter
régulièrement, à publier sur un blog, mais aussi à coup de renouvellement
de plus en plus fréquent de terminaux permettant d’alimenter sa présence en
ligne : envoyer des photos depuis son téléphone portable jusqu’à sa page
Facebook, etc. Sur le Web, tout le monde peut théoriquement voter, mais
tout le monde n’a pas le même nombre de voix.

Le Web de la rue
Encore un voyage dans le temps.
Vous êtes prêts ?
Autrefois, il y a longtemps (Antiquité, Moyen-âge, etc.) le pouvoir était
centralisé. Il y avait un empereur, un roi. La richesse n’était pas répartie
comme aujourd’hui. Les droits encore moins. Les tendances, les modes, ce
qui émergeait, venait du haut de la pyramide sociale, de l’endroit où se
situait le pouvoir. Les nobles jouaient à tel ou tel jeu parce que le roi
l’aimait, s’intéressaient à tel ou tel art parce que la reine en était férue,
s’habillaient-en suivant la même mode que le couple royal. La bourgeoisie
copiait la noblesse. La petite bourgeoisie copiait la bourgeoisie. Les
parvenus copiaient la petite bourgeoisie. Les petits commerçants copiaient
les parvenus, etc. Et ce jusqu’au plus bas de l’échelle. Les tendances, les
nouveautés, les modes descendaient bien gentiment du haut vers le bas.
Tout change après la révolution française de 1789 et avec l’essor de
l’industrie et du commerce. Les écarts entre les classes s’estompent jusqu’à
former en deux siècles l’énorme classe moyenne des sociétés développées
d’aujourd’hui.
Les tendances, les nouveautés, les modes viennent alors de partout. Plus
seulement du haut de l’échelle sociale (bains de mer, sport d’hiver, golf,
tennis), mais aussi du bas (Rap, Rn’ B, slam), de la rue (skate board, hip
hop), des artistes (rock, punk, grunge), des entreprises (Nintendo, Xbox),
des marques (streetwear…), des institutions (Velib’), des milieux marginaux
(drogues, tatouages, piercing…), des internautes (flash mobs, street styling,
détecteurs d’amis à proximité)…
Toutes ces tendances, qui furent un temps réservées à un petit nombre, voire
marginales, ont été récupérées, exploitées commercialement, généralisées
au point de rentrer dans les mœurs pour certaines.
Formidable gisement de créativité, de talents, d’énergies, le Web a bien
entendu apporté une quantité de nouveaux usages, de nouveaux
comportements, etc. Cependant, il s’est peu immiscé, peu incéré dans la
rue. Il détournerait même de la rue. On marche désormais, sans regarder ce
qui nous entoure, parce que les yeux rivés sur l’écran de plus en plus grand
de notre téléphone.
Le Web serait-il à la rue ?
Chapitre 6
INNOVATION

Innover autrement
Demandez à un collègue de parler d’innovation !
Faites réagir un groupe de professionnels sur ce même thème dans le cadre
d’un séminaire ou d’une convention d’entreprise ! Dévorez les piles de
livres que les américains ont consacré à l’innovation !
Les mêmes théories, les mêmes cas d’écoles, les mêmes croyances, les
mêmes préjugés, les mêmes idées reçues, les mêmes superstitions, les
mêmes exemples, les mêmes craintes, ressortiront :

• L’innovation est une bonne chose, un bienfait ; elle est positive.

• L’innovation est importante pour l’entreprise, voire indispensable à


sa survie.

• L’innovation est réservée aux grands groupes.

• L’innovation coûte forcément cher.

• L’innovation est nécessairement technique, voire technologique.

• L’innovation provient surtout des départements de R&D ou des


services marketing.

• L’innovation est la chasse gardée des échelons supérieurs de la


hiérarchie.

• L’innovation relève de la science, de l’intelligence, de la raison.

• L’innovation est le fruit de l’esprit.


• L’innovation est une affaire d’homme plutôt que de femmes.

• Etc.

Même si toutes ces phrases comportent une part de vérité indéniable, elles
sont toutes balayables d’un revers de clic :

• L’innovation est une bonne chose, un bienfait ;elle est positive.


Faux : nombreuses innovations dans le secteur de l’alimentaire ou
de la restauration ont contribué au phénomène de malbouffe.

• L’innovation est importante pour l’entreprise, voire indispensable à


sa survie. Faux : votre boulanger, votre libraire, votre boucher,
votre bureau de tabac n’ont pas innové depuis des années et sont
encore là.

• L’innovation est réservée aux grands groupes. Faux : Microsoft


était minuscule lors du lancement de la première version de
Windows.

• L’innovation est nécessairement technique, voire technologique.


Faux : l’utilisation de pigeons « voyageurs » pour transporter des
messages ou l’usage de chiens par la police pour suivre la piste de
suspects n’ont rien de technologique.

• L’innovation provient surtout des départements de R&D ou des


serinventé par un moine..

• L’innovation est la chasse gardée des échelons supérieurs de la


hiédes Post-it.

• L’innovation relève de la science, de l’intelligence, de la raison.


Faux : les inventeurs des arts martiaux n’étaient le plus souvent que
de simples paysans animés par la peur, poussés par la nécessité de
se défendre.

• L’innovation est le fruit de l’esprit. Faux : les hommes de


Christophe Colomb lui dirent qu’il avait perdu l’esprit lorsqu’il
s’apprêtait à goûter cette étrange chose que mangeaient les
indigènes, la pomme de terre, qui devint la grande nouveauté de la
cuisine européenne à cette époque.

• L’innovation est une affaire d’homme plutôt que de femmes. Faux :


Aufeminin.com a été crée par une femme, Netaporter.com aussi…

Pour aller de l’avant dans le monde digital, innover c’est commencer par
sortir des sentiers battus, s’éloigner des sempiternelles débats sur
l’innovation, trouver son propre chemin.

Mieux que l’original


Notre attachement à l’authenticité nous bride lorsqu’il s’agit d’innover.
C’est culturel. L’Europe conçoit le créateur comme l’auteur, le réalisateur,
d’une œuvre originale (un tableau encore jamais peint, une musique encore
jamais composée…) et ressemblant le moins possible à ce qui existe déjà.
L’Asie a une tout autre conception de l’Art. L’artiste est un disciple, qui doit
recopier l’œuvre d’un maître, en visant à s’effacer au maximum derrière
l’interprétation qu’il en fait. Ainsi, un peintre japonais acquiert le statut de
maître lorsqu’il parvient à recopier un tableau original ancien, à dépasser le
maître, sans pour autant qu’on puisse deviner qu’il est l’auteur de la copie.
L’Occident aime les auteurs. L’Asie préfère les interprètes.
L’original n’est pas forcément meilleur que ses reprises ou ceux qu’il
inspire. Certains morceaux de musique sont meilleurs une fois repris que
dans leurs versions originales :
Louie Louie est meilleure par Iggy Pop que par les Kingsmen.
Blowin’ in the Wind est meilleure par Joan Baez que par Bod Dylan.
China Girl est meilleure par David Bowie que par Iggy Pop.
The man who sold the world est meilleure par Nirvana que par David
Bowie.
Alléluia est meilleur par Jeff Buckley que par Leonard Cohen.
Bang Bang est meilleure par Nancy Sinatra que par Sheila.
Jolene est meilleure par les White Stripes que par Dolly Parton.
Nous devrions peut-être fredonner ces airs un peu plus souvent, notamment
lorsque l’heure de l’innovation vient à sonner ?

Innovation ou invention
Ce n’est pas parce que les mots innovation et invention commencent par la
même lettre et se terminent par la même syllabe, qu’ils signifient la même
chose.
Nous nous ingénions à constamment les mélanger, les confondre, et
inverser leurs sens. Wikipedia ne fait que nous embrouiller encore plus sur
16
ce point. Un coup de bon vieux petit Robert nous fera du bien :

INNOVER [in(n)cve]. v. (1315, rare av. XVIe ; lat. innovare).

• 1° V. tr. Introduire dans une chose établie (qqch. De nouveau,


d’encore inconnu) V. Changer. Innover une mode, une coiffure. V.
Inventer, trouver. « Ne rien innover, telle est la loi du pays » (B alz
.)

• 2° V. intr. Innover sur une époque, par rapport à une époque.


Innover en art, en matière d’art.

± ANT. Conserver, copier, imiter.


INVENTER [evate]. v. tr. (1485 ; du rad. d’inventeur).

•1° Créer ou découvrir (qqch. de nouveau).

découvrir, imaginer. Les Chinois ont inventé l’imprimerie. Inventer des


instruments, un jeu, des remèdes, des mots. « Torricelli a inventé la
pesanteur de l’air, je dis qu’il l’a inventée plutôt que découverte, parce que,
lorsqu’un objet est caché à tous les yeux, il faut l’inventer de toutes pièces
pour pouvoir le découvrir » (S artre ). – Absolt. N’imitez pas inventez !
•2° Trouver, imaginer pour un usage particulier. Inventer un
subterfuge, un moyen de s’en tirer. « Ils ne savent qu’inventer pour
tourmenter le pauvre soldat » (G obineau ). – Inventer de, imaginer
de.

•3° Imaginer de façon arbitraire, sans respecter la vérité, la réalité.

± ANT. Copier, imiter. Vrai.


Bon d’accord, la différence est un peu ténue, mais notons quand même que
grosso modo :

• Innover c’est introduire de la nouveauté dans quelque chose qui


existe déjà. Exemple : utiliser le dos des livres pour y écrire une
présentation de l’œuvre, insérer un écran tactile dans un téléphone,
remplacer un moteur à essence par un moteur électrique dans un
véhicule…

• Inventer c’est davantage créer, imaginer, concevoir, lancer quelque


chose qui n’existe pas encore : un iPad, un moteur de recherche
comme Google, un site communautaire comme MySpace.com….

C’est important de le dire car il est plus facile d’innover que d’inventer.
Trop d’entre nous se focalisent sur les inventions et en oublient d’innover.
L’innovation est déjà loin d’être facile en soi, risquée, parfois coûteuse.
Commençons par le plus facile…

Le mythe de l’innovation
L’humanité adore les mythes. Elle en a toujours eu, autant que notre
mémoire nous permette de nous en souvenir : mythe de Sisyphe, mythe
d’Icare, mythe de Prométhée, mythe de l’Age d’Or, mythe de la cité perdue,
mythe de la civilisation engloutie…
L’époque moderne a continué à en inventer : mythe de Faust, mythe de Don
Juan.
Le vingtième siècle a continué à rallonger la liste des mythes : mythe de la
conquête de l’Ouest, mythe du génie industriel, mythe de l’entrepreneur du
Web… et surtout le mythe de l’innovation.
Au fait c’est quoi un mythe au juste ? C’est un récit fabuleux, souvent
d’origine populaire, mettant en scène des êtres incarnant des forces de la
nature ou des aspects de la condition humaine. Génial ! Le mythe de
l’innovation serait donc un récit fabuleux (presque hors de la réalité)
populaire (que nous nous racontons les uns aux autres), mettant en scène
des êtres (des entrepreneurs du Web par exemple) incarnant des forces de la
nature ou des aspects de la condition humaine (vision, créativité, audace…).
Bref, le mythe de l’innovation serait en réalité une fable que nous aimerions
nous raconter pour nous réunir autour d’un idéal, d’un rêve, d’un futur
commun.
Retenons deux points importants :
Premièrement, le mythe de l’innovation comporte un caractère fabuleux ;
c’est-à-dire proche de celui de la fable, qui raconte quelque chose
d’imaginaire et de nature à nous séduire. L’innovation est séduisante.
Cela ne la rend pas absolument indispensable, pour tout, pour tous, partout
et tout le temps. La majorité des entreprises innovent peu. D’autres ont
même rencontré le succès sans innovation.
Deuxièmement, le mythe de l’innovation n’existe que parce que nous le
véhiculons, nous l’alimentons, en se racontant les uns aux autres des
histoires d’innovation. Là encore, le pouvoir de séduction de l’innovation
sur nos esprits joue à plein. Il est toujours plus plaisant de raconter quelque
chose d’innovant, dans un monde assoiffé de nouveautés permanentes, que
d’évoquer des choses moins spectaculaires.
Sachons regarder aussi la réalité plus terre à terre.

Re Création
La créativité se développe très tôt chez nous. Tous les enfants sont créatifs,
à leur manière. L’imaginaire est un stimulant. Les inhibitions existent peu.
Les limites sociales n’ont pas encore délimité les interdits. L’enfant est une
source intarissable de créativité.
Et puis ce penchant se réduit, se tarit, notamment lorsque l’enfant devient
adulte, et parfois s’évanouit.
En vérité, il ne disparaît pas. C’est simplement l’enfant qui est en nous, que
nous empêchons de s’exprimer, alors qu’il est encore là. Les très anciens
17
lettrés Chinois avaient une très jolie théorie à ce sujet . Selon ces
vénérables maîtres, nous naîtrions, puis nous laisserions l’enfant qui est en
nous, s’exprimer au matin de notre vie. Nous accumulerions suffisamment
de forces en devenant adultes, pour canaliser l’enfant qui est en nous, au
point de ne plus du tout lui permettre de se manifester. Puis au crépuscule
de notre vie, les forces nous abandonneraient et le vieillard que nous
deviendrions n’aurait plus la vigueur nécessaire pour tempérer l’enfant qui
n’a jamais cessé d’être en nous. Celui-ci en profiterait pour refaire surface
ce qui expliquerait pourquoi les personnes âgées retombent en enfance.
Les enfants préfèrent la récréation à la classe. Nous aussi. Or nous sommes
grands désormais. Personne ne nous punira si nous quittons les bancs de la
salle de classe pour aller jouer dans la cour. Profitons-en ! C’est là que nous
serons les plus créatifs, les plus inventifs, les plus innovants. Vive la ré-
création.
Pour bien avancer à l’ère digitale, il faut laisser l’enfant qui est en nous
s’exprimer, même s’il est parfois dissipé, excité, imprudent… C’est peut-
être grâce à lui que certains réalisent leurs rêves de gosses et que d’autres
s’aventurent sur des chemins au bout desquels se trouvent l’innovation, la
création, la nouveauté.

Au petit coin
Suivez-nous, on vous emmène aux toilettes. Si, si, si…
Vous allez voir, on a quelque chose à vous montrer. Vous allez comprendre
comment trop d’innovation tue l’innovation.
L’histoire se passe en Inde, dans les toilettes d’un restautant situé à la
périphérie de Mandawa, ville touristique et dynamique du Rajasthan. La
classe moyenne indienne y adopte les mœurs et les pratiques occidentales.
Nos innovations d’hier, comme les cuvettes de W.C., sont un signe de
réussite chez eux. Les waters à l’occidental remplacent des toilettes
habituellement plus rudimentaires.
Ah oui, on oubliait un détail important pour la compréhension de ce qui va
suivre. En Inde, les messieurs font leurs besoins accroupis, comme les
femmes, même quand ils font simplement pipi.
Revenons à ce qui nous occupe :
Il y a quinze ans en Inde, les toilettes de ce restaurant étaient un trou dans la
terre, entouré d’une sorte de cahute en terre.
Il y a dix ans, des toilettes à la turque en émail avait fait leur entrée dans
une cahute désormais en briques.
Il y a cinq ans, une cuvette de WC à l’occidentale avait remplacé les
toilettes à la turque.
Aujourd’hui, une cuvette en émail nouvelle génération, a remplacé la
précédente. Sa nouveauté : deux emplacements pour les pieds, comme dans
les toilettes à la turque, mais situés en hauteur, sur les bords de la cuvette,
de part et d’autre. Ainsi, les Indiens continuant à faire leurs besoins de
façon traditionnelle sont incommodés de devoir s’accroupir, juchés à
cinquante centimètres du sol et n’y vont pas. Ceux qui voudraient s’assoir
ne le peuvent pas, car les deux formes réservées aux pieds les en empêchent
et qu’elles sont salies par les pieds des premiers.
Il arrive que les choses soient bien en l’état, qu’il ne soit pas absolument
indispensable d’innover encore et encore, encore et toujours.
Trop d’innovations tuent l’innovation.
Aller, on tire la chasse !

On / Off
Le on et le off semblent être devenus la norme.
Il y avait un festival d’Avignon. Un festival d’Avignon off vit le jour. Il y
avait le festival de Cannes. Cannes a désormais son festival off. Il
s’organisait une élection des Miss Monde. Une élection des Miss Web est
apparue, en off. La conférence Le Web a remporté un vif succès. Un Le Web
off a proliféré, sous forme de soirées, en marge de l’événement. Les soldes
dans les boutiques de prêt-à-porter se sont généralisées. Les clientes
achètent désormais en off sur Venteprivée. com. Les disques, les films, les
logiciels, les jeux, etc. nous sont proposés dans les rayons des magasins.
Les consommateurs se les procurent de plus en plus en off via le
téléchargement. La liste pourrait s’étendre sur un kilomètre.
Il semblerait que ce qui est on, finit toujours par être suivi de sa version off.
Un marché apparaît et un contre-marché lui emboîte le pas.
C’est en se penchant sur le quotidien que l’historien Français Fernand
Braudel mis le doigt sur ce phénomène en repérant la naissance d’un
contre-marché, d’un marché off, dans l’Angleterre d’avant le dix-huitième
18
siècle . Ecoutons-le !
Au dix-septième siècle, l’Europe connaît un essor commercial. En cette
période d’échanges et de consommation accrus, loin des grandes villes et de
leurs beffrois, les marchés des villages se développent. Apparaît ce que les
historiens anglais appelleront le private market (marché privé), par
opposition au public market (marché public), celui-ci surveillé et contrôlé
par les autorités urbaines. Un marché off émerge donc dans le sillage du
marché officiel. Ce private market s’organise dans toute l’Angleterre et se
traduit par les achats en direct, souvent anticipés aux producteurs, l’achat
aux paysans, hors du marché, de la laine, du blé, des toiles, etc. Se met en
place, contre la réglementation traditionnelle du marché, des chaînes
commerciales autonomes. Elles s’imposent par leur efficacité, à la faveur
des gros ravitaillements nécessaires aux grandes capitales. Le dix huitième
19
siècle finit de développer en Europe, le « contre-marché » . Ainsi, les
défaillances et les incapacités du public market (du marché on) à répondre
aux besoins de son époque, créèrent les conditions favorables au
développement du private market (du marché off.)
Analysé par l’historien, ce processus ne cesse de se renouveler depuis. Les
dysfonctionnements, les défaillances, les blocages, les inerties des
systèmes, des secteurs, des marchés ou des organisations nous mettent au
pied des derniers kilomètres impossibles à parcourir.
Que faire ?

• Légiférer à coup de loi Hadopi pour protéger une industrie (on) au


détriment d’une plus récente (off) ?

• Oublier la théorie de la destruction créatrice, formulée par Joseph


20
Schumpeter , qui désigne le processus de disparition de secteurs,
conjointement à la création de nouvelles activités économiques ?
Les secondes compensant plus ou moins les premières.

• Perdre de vue que les industries on d’aujourd’hui furent, elles aussi,


des industries off hier, détrônant des industries plus anciennes ?

Benchmarker ailleurs
Lorsqu’il s’agit de notre business, de notre entreprise, de notre projet, le
réflexe naturel est de se comparer à ce qui nous ressemble : les sociétés
concurrentes, les projets similaires du secteur… En somme, de cantonner
notre observation à une infime partie de la réalité, de ce qui se passe autour
de nous, de la vie.
C’est en regardant ailleurs, dans d’autres secteurs, d’autres métiers, d’autres
industries, d’autres univers que des idées viennent, des solutions se
trouvent, des envies se créent.

• C’est dans un port marchand, en observant les dockers travailler,


qui ouvraient et fermaient des sacs de marchandise au moyen d’une
fermeture éclair, que l’idée de remplacer les boutons des braguettes
de pantalon par un zip, vit le jour.

• C’est en regardant un paquet de sucres d’orges, bien rangés serrés


les uns contre les autres pour qu’ils ne se brisent pas, que l’idée du
paquet de cigarette apparue.
• C’est en observant le combat entre un aigle et un serpent qu’un
moine Chinois inventa le Tai Chi Chuan.

Nos habitudes de travail, nos entreprises, nos reflexes, le quotidien, nous


poussent à regarder seulement ce qui nous concerne directement, ce qui
appartient à notre périmètre immédiat.
Il faut se forcer à regarder ailleurs. L’ordinateur que la plupart d’entre-nous
ont en face d’eux tous les jours, sous le nez, permet avec le Web de
naviguer d’un secteur à l’autre, en restant assis. Le Web est une fenêtre.
N’en fermons pas les volets.

La marque rédacteur en chef


Les développements du monde digital augmentent considérablement le
nombre d’opportunités de prise de parole des marques.
Hier, silencieuses pendant des semaines, voire des mois, la plupart des
marques concentraient leurs budgets et leurs efforts de communication sur
des périodes clés (Noël, Saint-Valentin, fêtes des mères…). Toutes les
marques sortaient du silence pour se mettre à crier aux mêmes moments.
Avec le digital les prises de paroles des marques sont devenues à la fois plus
continues, plus fréquentes, plus saccadées, plus fragmentées, plus ciblées,
plus expérimentales… Le nombre et la variété des formats dans lesquels les
entreprises s’expriment se sont multipliés.
La communication vit une véritable mutation dont les grands symptômes
sont :

• De devoir communiquer, non plus pour des clients, mais avec des
clients.

• De rechercher le buzz, l’amplification, la diffusion…

• De tenir compte du fait que le message sera archivé, car le Web a


une mémoire.
• D’accepter que les clients approuvent, plébiscitent, rejettent,
sanctionnent le message ou la prise de parole.

• De passer d’une logique de diffusion d’un message à un dialogue


avec ses destinataires.

• De supporter les reprises, les interprétations faites du message par


les internautes.

• De ne plus choisir le moment auquel le client sera exposé au


message.

Bien des marques migrent vers une communication de plus en plus


fréquente, qui les conduit à se créer des « magazines de marques » nouvelle
génération : blogs, pages Facebook, etc. Le challenge pour la marque est de
parvenir à ne pas se laisser cantonner à un simple rôle d’animateur ou de
modérateur, mais de réussir à redevenir les rédacteurs en chef de leurs
propres actualités, de leurs propres destins.

De l’autre côté du miroir


Une petite devinette.
Deux hommes sont l’un et l’autre dans leurs salons. Le premier est assis sur
son canapé et regarde la télévision. Le second est assis sur son canapé, un
ordinateur portable sur les genoux et surfe sur internet.
Quelle est la différence entre les deux hommes ?

• Le premier est ringard et le second dans le coup. Perdu !

• Le premier est vieux et le second est jeune !

• Encore perdu !

• Le premier est passif, le second est un peu plus actif. C’est vrai,
mais ce n’est pas la bonne réponse !

Vous donnez votre langue au chat ?


La réponse est la suivante : le premier regarde un écran, le second est
regardé par un écran.
Lorsque l’on regarde la télévision, nous sommes en dehors du téléviseur et
nous regardons des gens (les acteurs d’une série, les personnes filmées lors
d’un reportage, un présentateur de journal) qui ne nous voient pas, qui ne
savent pas si nous les regardons ou non ce jour là.
Lorsque l’on surfe sur Internet, nos amis en train de chater en sont avertis
instantanément, nos amis de Facebook en sont avisés si nous faisons le
moindre mouvement (cliquer sur Like, envoyer un lien, partager..,), nos
amis de Google + sont informés de nos découvertes effectuées en surfant,
etc. Celles et ceux qui n’étaient pas là à cet instant, le découvriront
simplement le lendemain.
Nous sommes passés de l’autre côté du miroir. Hier nous regardions la
télévision, aujourd’hui nous sommes regardés par le Web. Les
déplacements dans le monde digital ne s’effectuent pas nécessairement en
toute discrétion, il faut apprendre à se savoir observé…

En grève
L’innovation n’est pas que technique. Elle prend toutes les formes et se
situe dans tous les domaines, depuis toujours :

• Politique : la rédaction d’une constitution, le vote d’une loi comme


celle sur la laïcité…

• Social : la galanterie, les rave parties, les flash mobs, les apéros
géants, les fêtes en blanc, les rollers parties, le lip dup, le book
crossing, l’autostop…

• Economique : la monnaie, le crédit, la bourse, les titres financiers,


les produits dérivées…

• Géographique : le dessin de frontières artificielles par opposition


aux frontières naturelles, la création de pays, comme l’Irak, par le
Traité de Versailles au lendemain de la première guerre mondiale,
suite au démantèlement de l’empire Ottoman...

• Médicale : les antibiotiques, les psychotropes, les transplantations


d’organes, les thérapies de groupes, la psychanalyse…

• Biologique : la chirurgie esthétique, le clonage…

• Scientifiques : les statistiques, les probabilités, le calcul


infinitésimal, le satellite, l’accélérateur de particules…

• Botanique : la création de la rose, la taille du bonzaï, les OGN…

• Illégale : héroïne, cocaïne, LSD, ecstasy, crack…

• Artistique : l’utilisation des murs des villes comme support de


peintures, danses urbaines (hip hop, tecktronik …), le pop art, l’art
conceptuel, le body art, le land art, l’art digital, le nouveau roman,
l’autofiction…

• Technologique : les iPod, les tablettes, le GPS, le Nylon, la fibre


Lycra, le Gore Tex…

• Physique : piercing, tatouages, implants, scarifications…

• Sécuritaire : les radars, l’alcootest, l’ABS, l’air bag, les filtres


parentaux, les logiciels anti-virus…

• Sportive : BMX, Kitesurf, free fight, mix wrestling, freestyle


motocross…

• Sexuel : le kamasutra, les sex toys, les jeux coquins…

• Quotidienne : les innovations que les femmes françaises injectent


dans AZ, Le Journal des femmes), le mix and match vestimentaire
que les femmes réalisent en mélangeant des marques ou des styles,
les coupes de cheveux...
• Gastronomique : la pâtisserie de luxe, la nouvelle cuisine, la
chocolaterie…

• Etc.

Nous oublions certainement bien des domaines où l’innovation se loge,


malgré un effort pour mentionner même les plus improbables. On en oublie
surtout un et non des moindres. Le domaine de la lutte sociale, de la
résistance au patronat, du syndicalisme. Toute vieillotte qu’elle paraisse,
cette catégorie compte à son actif bien des innovations : week-end, jours
fériés, congés payés, journée de travail d’une durée limitée… Quel rapport
avec le Web et notre époque ?
Imaginez que des grévistes mal intentionnés, résolus à ne pas respecter les
règles comme cela se voit parfois (fermeture forcée d’une usine, barrage
pour empêcher les non grévistes d’accéder au site de production, chaîne
humaine bloquant l’entrée d’un immeuble aux salariés…), qui hackeraient
le site Web d’un site marchand. Les internautes arriveraient sur une page
d’accueil indiquant :
EN GREVE.
Réouverture du site à la fin des négociations.
Une telle opération ferait assurément la une du journal de vingt-heures.
Que nous le voulions ou non, ceux qui nous accompagnent ou que nous
croisons le long des rues du monde digital ne sont pas que des alliés, et le
Web leur donnera peut-être de nouvelles armes.
Chapitre 7
ILLUSIONS

Improvisation et préparation
L’improvisation ne signifie pas l’absence de préparation. Attention à cette
association trop rapide que nous faisons trop souvent.
L’époque pousse à toujours laisser croire que les choses se sont faites
simplement, naturellement, sans effort. La réalité est ailleurs. Quand les
choses ont l’air improvisées, c’est bien souvent qu’elles sont très préparées.
Pour créer l’impression de naturel, de spontanéité, de fluidité, il faut bien
souvent que les acteurs aient répété la scène, ou le morceau de musique, ou
une présentation commerciale, de nombreuses heures.
Le Web avec son air cool et Californien, son style décontracté et les
relations informelles qu’il encourage ne fait qu’accroître cette confusion
entre improvisation et préparation. Tout à l’air d’être toujours facile, simple,
fruit de peu d’efforts. Dans les coulisses du financement des start up, dans
la course à l’audience, dans la conquête des parts de marché, dans la
surenchère à la pertinence des business models, la compétition fait rage, les
week-end travaillés ne se comptent plus, les journées aux horaires extensifs
s’accumulent, la réduction de l’espace réservé à chaque employé liée aux
locaux qui deviennent trop petits, se généralisent. La facilité apparente des
success stories n’a d’égale que les risques pris, le soin porté à la définition
de la stratégie, l’exigence dans l’exécution opérationnelle, la précision dans
la réalisation, la rigueur dans le contrôle de gestion, l’absence d’états
d’âmes dans le management, la préparation à l’accueil d’une équipe de
télévision venue filmer une entreprise du Web et devant laquelle… on
s’attachera à véhiculer une image de facilité.

Free, perfect and now


Une autre illusion provient des études marketing. Les uns pensent qu’elles
ne servent à rien. Les autres les lisent comme si elles apportaient des
réponses irréfutables.
La vérité ne se situe pas même entre ces deux extrêmes. Elle est ailleurs.
Oui, mais où ?
Elle est cachée derrière la prise en compte de limites qui caractérisent les
études, sans les condamner à nécessairement finir à la poubelle :

• Elles sont parfois commanditées pour défendre un projet, rassurer


des actionnaires, justifier une décision, post-rationnaliser une
situation… Les cabinets le savent et ont l’habitude de lire entre les
lignes des briefs qui leur sont faits.

• Leurs méthodologies, très au point et régulièrement améliorées, ne


sont pas pour autant infaillibles.

• Ceux qui les lisent le font avec tellement de filtres qu’ils


n’appliquent jamais le bon filtre à la bonne étude : ils parcourent
une étude en la croyant commanditée, alors qu’elle ne l’est pas. Ils
boivent les paroles d’une autre étude qu’ils croient hors de tout
soupçon, alors qu’elle n’est pas tout à fait neutre.

• Parce qu’elles sont là pour donner la parole aux clients, les études
sugles meilleurs acteurs du marché.

• Du fait de leurs impératifs de rationalité, de sérieux et de


cohérence, les cabinets d’études s’interdisent toutes folies : le iMac
ne serait jamais sorti si Apple avait suivi les recommandations
d’études.

Résultats des courses, nous ne gérons pas le problème de l’usage qu’il


conviendrait de faire des études. Nous ne faisons que l’amplifier.
Généralement de deux manières :

• On continue à faire des études en pensant qu’il ne faut pas tenir


compte de ce qu’elles racontent. Si leurs recommandations
corroborent ce que nous voulons faire ou ce que nous avions prédit,
nous les trouvons formidables, utiles et nécessaires. Si c’est le
contraire, nous rappelons que les études, de toute manières, ça ne
vaut pas grand-chose.

• On confie le soin de réaliser une étude à un stagiaire, à une junior


entreprise ou à un consultant indépendant ; trois populations dont le
choix ne fait que laisser supposer une instrumentalisation.

Les études ne sont pas Free (gratuites). Elles ne sont certes pas Perfect
(parfaites). Mais c’est Now (maintenant) qu’il faut trancher entre, en faire et
les lire, ou ne pas en faire du tout.

Spry
Les effets Spry sont des améliorations visuelles que vous pouvez appliquer
à pratiquement n’importe quel élément d’une page HTML à l’aide de
JavaScript. Ces effets sont souvent utilisés pour surligner des informations,
créer des transitions animées, ou modifier visuellement un élément de page
21
pendant un certain délai .
Les site Web en sont remplis : Apparition/Fondu (qui fait apparaître ou
disparaître lentement un élément), Surligner (qui modifie la couleur
d’arrière-plan d’un élément), Volet (qui simule l’effet d’un store qui monte
ou descend pour afficher ou masquer l’élément). Faire coulisser l’objet 3D
(qui fait monter ou descendre l’élément), Agrandissement/Réduction (qui
augmente ou diminue la taille de l’élément), Secouer (qui donne
l’impression que l’élément est secoué de gauche à droite, Ecraser (qui fait
disparaître l’élément dans le coin supérieur gauche de la page).
Les effets Spry produisent des résultats parfaitement comparables à ceux
que génèrent les choix stratégiques de nos entreprises :

• Apparition/Fondu : correspond au lancement de nouveaux produits,


de nouveaux services, de nouvelles fonctionnalités (Apparition), et
à la moindre mise en avant des précédents que nous conservons
(Fondu).

• Surligner : correspond à la mise en avant systématique des points


forts de nos offres, de nos sites, etc.
• Volet : correspond à l’alternance entre les périodes où nous
communiquons et celles où nous nous taisons.

• Faire coulisser l’objet 3D : correspond aux va-et-vient de nos


budgets, tantôt rallongés, tantôt rognés.

• Agrandissement/Réduction : correspond aux cycles de vie des


différents services de l‘entreprise, en fonction de l’évolution de
celle-ci.

• Secouer : correspond à ce que nous vivons en temps de crise, quand


un concurrent arrive sur le marché, quand Google explique qu’il va
lancer un service similaire au nôtre…

• Ecraser : correspond au moment où Google, ou Facebook, a


finalement lancé un service concurrent du nôtre et préféré ne pas
nous racheter.

Les effets Spry nous apprennent à nous détromper de l’illusion. Ils sont
jolis, spectaculaires, agréables à l’œil. Mais ce qui compte sur le Web n’est
pas l’effet, mais ce qu’il y a derrière le lien (le contenu, le fond) ; pas ce
qu’il y a au-dessus du lien (le simple effet). Par analogie, les effets Spry
transposés à la stratégie ne doivent pas être simplement constatés du fait de
leurs côtés visibles et spectaculaires. Il faut scruter, comprendre ce qu’il
cache, chez nous comme chez nos concurrents.

Rollover
Si l’effet Spry peut illusionner, l’effet Rollover peut dévoiler. L’effet
Rollover permet de remplacer une image par une autre ou faire apparaitre
un sous menu sous un menu, lorsque l’on passe sa souris sur un élément
d’une page Web. Il est une sorte de révélateur.
Qu’enseigne-t-il à l’entreprise ? Plein de choses que nous savons déjà mais
que nous oublions trop souvent. Il faut révéler. Alors nous les rappelons :

• Faites parler vos chiffres. Torturez-les ! Ils ne se plaindront pas. Ce


ne sont que des entités abstraites et ils adorent être triturés, réduits,
divisés… Profitez-en. Aujourd’hui, ce ne sont plus les chiffres qui
manquent. Nous en avons trop. Ce qui fait défaut est l’intelligence
dans la façon dont nous les utilisons. Prenez un paquet de post-it.
Ecrivez le nom de l’information que donne chacun de vos chiffres
sur des post-it, à raison d’un nom par post-it : chiffre d’affaires,
marge, charges, taux de clic, taux de conversion, masse salariale,
nombre de représentants du personnel, churn, panier moyen…
Mettez tout, n’oubliez rien. Collez tous les post-it sur un mur (de
préférence quand tout le monde est parti sinon vous risquez de
passer pour un dingue). Puis posez-vous la question : quelle
pertinence y aurait-il à mettre tels et tels chiffres en parallèle, à les
convertir en ratio. Faites autant de combinaisons possibles. 98% des
cas seront débiles. 2% pourraient bien être très pertinents et devenir
des clés de lecture de votre business et de votre activité. Ce sont ces
2% qui comptent.

• Pour connaître ses concurrents, il faut constamment les étudier :


acheter leurs produits même s’ils sont chers, s’inscrire à leurs
services, s’abonner à leurs newsletters, rencontrer leurs
collaborateurs…

• Connaître vraiment ses clients, c’est connaitre le nom de leurs


chiens ou de leurs chats. Nous sommes à l’heure digitale. Les
moyens pour en apprendre davantage, pour comprendre autrement
les clients ne manquent pas : fréquentez les en ligne, chater avec
eux, twittez avec eux, regardez leurs albums photos, regardez
comme ils s’habillent, consultez leurs playlists…

• Par delà vos concurrents et vos clients, apprenez à vous connaître.


Le business repose de plus en plus sur les hommes, de moins en
moins sur les machines. Le management prend une place
considérable. Le rapport l’adhésion de tous à la stratégie ressemble
à une nécessité, la mobilisation de tous également… Que savez-
vous de vos équipes ?

On croit toujours connaitre les gens comme on croit se connaître, d’ailleurs.


En voilà bien une nouvelle illusion ! Passez-tout au Rollover. Il le faut.
Sur le ring
Il y avait un match de boxe l’autre soir à la télé. En regardant le match de
boxe, je me suis dit « Qu’elle horreur que cette vie de boxeur ». Erreur.
L’horreur n’est pas sur le ring mais en dehors. En réalité, le moment sur le
ring est le plus beau moment pour le boxeur. C’est l’heure de la gloire, des
récompenses d’années d’efforts, de la consécration quand il gagne. Et c’est
l’heure à laquelle il trouve sa raison d’être, où il exprime ce qu’il sait faire
le mieux, même lorsqu’il perd.
Une horreur trop criante peut faire oublier une horreur encore pire. Les
moments les pires pour le boxeur sont quand il n’est pas sur le ring car il
n’a généralement que la boxe. Les coulisses, les vestiaires, les avants et les
après matchs sont les rendez-vous de la véritable horreur : la drogue, les
menaces, les escroqueries, les pressions sur la famille, les corruptions de
l’arbitre ou de l’adversaire, la violence, les paris, les heures d’un
entrainement des plus durs…
Le voyage effectué dans le monde digital passe lui aussi par des moments
difficiles que personne ne voit jamais : défiance des banquiers, mésentente
entre associés, démobilisation des équipes, infidélité de collaborateurs clés,
démotivation personnelle, doutes, conséquences sur la vie personnelle…

Backstage
Nous sommes tous des Balzac. Oui, même vous qui le détestez. Mais ne
soyons pas dupes comme l’était l’auteur du Père Goriot. Commençons pas
ne plus être dupes à son sujet et à savoir qu‘au-delà des romans que nous
dûmes lire au collège, notre ami Honoré a aussi produit des œuvres plus
22
trash. Dans sa nouvelle Sarazine, son héros est amoureux d’une cantatrice .
Elle s’appelle Sarazine. Il va l’écouter tous les jours. Un soir, après son
récital, il parvient à se glisser dans sa loge. Il y découvre une faune
comparable à celle que l’on croise dans les soirées les plus décadentes
d’aujourd’hui. La loge de Sarazine est le rendez-vous de l’opium, de la
prostitution, de l’argent mal acquis… Pire est la chute du livre. Sarazine est
en fait un transsexuel. Sa magnifique voix qui fit tomber amoureux le
personnage principal est celle d’un castrat.
Le back-stage nous fascine, nous attire. Les marques l’ont compris. L’Oréal
ou Dior révèlent les coulisses des shooting de leurs campagnes de pub. On
filme les séances d’hair dressing et de make up des mannequins de mode
avant leurs défilés sur le catwalk. Sous-couvert de se montrer, de se révéler,
de jouer la transparence, on ne fait que se dissimuler autrement derrière une
collection de vidéos, de sites web, de témoignages soigneusement
orchestrées.
Il y avait la langue de bois. Voici venu le Web de bois. Ne restons pas de
marbre. L’enjeu est de taille puisqu’il touche aux caractéristiques
intrinsèques et originelles du Web : une certaine transparence, une logique
de partage, une forme d’altruisme, une propension au don, une ouverture à
l’autre, une simplicité dans les rapports, une honnêteté et une intégrité, une
foi en la capacité de l’ensemble à s’autogérer, une croyance en la possibilité
d’interagir malgré les différences… Des valeurs qui sont en danger et dont
nous aurons besoin, le jour où il faudra faire le plein d’essence un peu plus
loin sur la route du monde digital. Le mirage serait de croire que chacun est
également attaché aux valeurs propres du Web qui ont fait son succès.

Et Dieu créa la femme


La femme est depuis toujours stigmatisée comme celle par qui les
problèmes arrivent. Eve croque la pomme et les hommes perdent le droit de
vivre au Paradis. Leurs âmes sont déchues et tombent sur terre. La
Théogonie, c’est-àdire le récit de la création du monde des Grecs, qui met
en scène Zeus et les autres dieux du Panthéon, est également parfaitement
machiste. La femme est encore une fois le fauteur de trouble. La
mythologie Indienne avec le Mahabharata lui réserve le même sort. Le
Kojiki, le texte sacré de l’ancienne religion Shintô du Japon, est pire. Ne
cherchez pas. La femme est décidemment responsable de tous les maux de
la terre.
Dieu créa la femme. De son côté, l’entreprise créa l’infâme. L’infâme c’est
celui qui incarne le mal, celui qu’il faudra combattre, celui à cause de qui le
monde est contraire à ce que notre entreprise voudrait qu’il soit. Chez
certains, c’est la médiocrité. Ils la combattent. Ils se reconnaîtront. Chez
d’autres, c’est la complexité des technologies. Il faut la remplacer par de la
simplicité (Apple). Chez d’autres, c’est la dureté des villes dans lesquelles
nous ne nous par parlons plus (Starbucks Cafe). Il est utile cet infâme. Il
permet de fédérer tout le monde autour d’un ennemi commun, a common
ennemy comme disent les américains. On va même parfois jusqu’à penser
qu’il faut un common ennemy si l’on veut réussir de belles choses.
Nous pensons que cette approche pourrait devenir caduque dans l’univers
digital. Il est certainement illusoire de vouloir s’y cantonner. Peut-être
faudra t-il se trouver un ami commun plutôt qu’un ennemi commun.
La génération Y a plein d’amis communs dans l’écologie, le développement
durable, le commerce éthique, le commerce équitable.
Le Web a plein d’amis communs : son langage de développement historique
(le désormais célèbre HTML), sa norme de communication (l’IP), sa
philosophie informatique (l’open source…).
Une très grande partie des associations américaines, qui représentent le
premier employeur aux USA, ont des amis communs. Souvent ils
constituent, l’objet même de l’association : aider les gens à arrêter de fumer,
aider les anciens prisonniers à se réinsérer, protéger telle espèce animale...
Et Dieu créa la femme !

Chifumi
Chifumi ou Pierre-feuille-ciseaux est un jeu effectué avec les mains et
opposant un ou plusieurs joueurs. Les joueurs choisissent simultanément un
des trois coups possibles en le symbolisant de la main : pierre, papier ou
ciseau. Ils comptent jusqu’à trois ensemble. A trois, ils montrent leurs
mains en ayant choisi l’une des trois figures. De façon générale, la pierre
bat les ciseaux (en les émoussant), les ciseaux battent la feuille (en la
coupant), la feuille bat la pierre (en l’enveloppant). Ainsi chaque coup bat
un autre coup, fait match nul contre le deuxième (son homologue) et est
battu par le troisième.
Revenu au monde de l’entreprise et du business, l’illusion serait de croire
qu’il y a les bons, les moyens et les mauvais. Le chifumi démontre que cette
approche est réductrice. Dans le chifumi, aucune des figures n’est la plus
forte ou la pus faible. Chacune est dominée par une figure et domine une
autre :
La pierre domine les ciseaux mais est battue par la feuille.
Les ciseaux dominent la feuille, mais s’inclinent devant la pierre.
La feuille l’emporte sur la pierre, mais succombe face aux ciseaux.
Il en est de même de chacun d’entre nous, de chacun des projets en cours,
de chacune des stratégies, de chacune des entreprises. En réalité, ce qui
importe au chifumi est d’être au bon endroit, c’est-à-dire en face de celui
que l’on domine. Dans le business, les choses périssent parfois parce
qu’elles ne sont pas en face de ce qu’elles dominent, mais en face de ce qui
les domine.
Se concentrer sur un adversaire qui nous dépasse d’une tête et l’affronter est
une chose. C’est faire de soi un challenger.
Se mettre en face de ceux que l’on domine, parfois situés dans un autre
secteur, en changeant de positionnement, peut faire de vous un leader.

Bla, bla, bla


Le marketing est un festival sémantique, un véritable feu d’artifice lexical,
une machine à donner constamment de nouveaux noms aux choses…
comme si l’on attribuait un nouveau prénom à nos enfants, à chacun de
leurs anniversaires.
On dirait que le marketing a autant de noms qu’il y a d’agences, de
directeurs associés, de communiqués de presse, de blogueurs, d’egos à
satisfaire.
Vous ne nous croyez pas ? Voici une liste de termes que leurs auteurs
(blogueurs, formateurs, agences…) ont tenté de médiatiser. Un conseil, lisez
le paragraphe suivant en diagonale.
Social Marketing, Avalanche Marketing, Buzz Marketing, Cascading Style
Marketing, Centrifugal Marketing, Exponential Marketing, Fission
Marketing, Grass Roots Marketing, Organic Marketing, Blog Marketing,
Propagation Marketing, TrackBacks Marketing, Referral Marketing, RSS
Marketing, Ripple Marketing, Self-Perpetuation Marketing, Self-
Propagation Marketing, Wildfire Marketing, Satellite Marketing, Collateral
Marketing, Multilateral Marketing, Self Starter Marketing, Replicated
Marketing, Cross Fertilized Marketing, Mushroomed Marketing, Organic
Marketing, Self Marketing, Germinal Marketing, Do It Yourself Marketing,
Web Centric Marketing, Others Oriented Marketing, Democratic
Marketing, Multilevel Marketing, Each Other Marketing, Third Marketing,
Endorsed Marketing, Over Marketing, Multi sided Marketing, Children of
Marketing, Burgeoning Marketing, Powered Marketing, Extensive
Marketing, Intensive Marketing, Gnitekram Marketing, Flourishing
Marketing, Rewarding Marketing, Tantalizing Marketing, Tentacular
Marketing, Exponential Marketing, Octopus Marketing, Spider Marketing,
Squared Marketing, Multi faces Marketing, Everything, Everywhen,
Everywhere Marketing, Embedded Marketing, Matching Marketing,
Anything, Anywhere, Anytime Marketing, Across The Web Marketing,
One Click Away Marketing, Aggregation Marketing, Embedded Marketing,
Gravitational Marketing, Reciprocity Marketing, Read Me Marketing,
Spiral Marketing, Replug Marketing, Reload Marketing, Unplug Marketing,
Crawler Marketing, Every You Marketing, Every Me Marketing, Happy
Few Marketing, Few to Few Marketing, Few For Many Marketing, Shared
Marketing, Cross-Fertilized Marketing, Crowd Marketing, Spontaneous
Marketing, Online Street Marketing, Me To Marketing, Mobile Marketing,
Tribes Marketing, Exchange Marketing, Bim Marketing, Ping Marketing,
Poke Marketing, Infra Marketing, Unofficial Marketing, Underground
Marketing, Alternative Marketing, Day To Day Marketing, Non Stop
Marketing, Bid Marketing, Crowd Marketing.
Il est possible qu’on en oublie.
Vous vous y retrouvez ?
Vous avez remarqué : personne n’a songé à parler d’Etc. Marketing, de
Marketing and so on, de Marketing2. Ça aurait été plus vite !
Nous concernant, nous pensons que le monde digital doit se parcourir en
parlant pour se faire comprendre, et non en jargonnant pour faire
l’intéressant.
Apprendre à se taire
Il n’a jamais été aussi facile de communiquer. Mais il n’a jamais été aussi
facile de mal communiquer.
Communiquer pour une marque, c’est prendre la parole. La surenchère à la
nécessité de communiquer, pour continuer à exister, dans et via le digital
notamment, pousse à prendre de plus en plus souvent la parole. Or, faut-il
encore avoir quelque chose à dire !

• Comment dépasser la simple tautologie ?

• Comment sortir de la répétition ?

• Comment ne pas lasser ?

• Comment ne pas se lasser soi-même ?

• Comment ne pas s’assoupir ?

• Comment ne pas banaliser son propos ?

• Comment ne pas trahir, à force de le répéter, le faible contenu de


son propos ?

On dit des opinions qu’elles sont comme les clous. Plus on leur tape dessus,
plus ils s’enfoncent. Nous disons que les messages sont comme des vis.
Plus on les visse, plus ils deviennent difficiles à retirer. Autrement dit, il y a
danger. La facilité qu’offre le digital pour installer quelque chose est bien
plus assurée que la facilité pour revenir en arrière ou simplement changer
d’axe de communication, le moment venu.
Comme le dit l’ancien proverbe chinois : « Nous avons deux yeux, deux
oreilles et une seule bouche pour regarder et écouter deux fois plus que
nous parlons ».
Et comme le disait un blogueur pris en auto-stop sur une route du monde
digital : « Nous avons un seul clavier et une seule souris pour écrire deux
fois moins que nous lisons ».
First moover is the winner
L’adage “First moover is the winner” est bien connu. Il repose sur la
croyance selon laquelle le premier arrivé sur un marché sera celui qui en
deviendra le leader. Cela remonte au Far West. Le premier qui plantait un
piquet pour dire : « mon saloon sera à cet endroit de la ville », où la station
de diligence était positionnée, s’assurait d’être le saloon le plus prospère de
la ville.
C’est faux. La preuve en trois exemples :

• Les premiers moteurs de recherche du Web s’appelaient


WebCrawler, Excite, HotBot, InfoSeek, Lycos, Yahoo, AlataVista,
MetaCrawler… And the winner is : aucun d’entre eux, mais
Google.

• Les premiers sites de ventes aux enchères s’appelaient First


Auction et On Sales. And the winner is : eBay.

• Les premiers fournisseurs d’accès Internet s’appelaient Calvanet,


Imaginet, Infonie, AOL, Compuserve, HOL, Club-Internet,
Infonie… And the fruitful winner is : Orange

De nôtre côté, nous pensons que :


« First beta tester, is the winner »
Sur le Web, ce sont ceux qui testent absolument tout, très tôt,
systématiquement, les beta-testeurs, qui acquièrent une prime au succès.
Lorsque la solution, le service, le terminal A, B ou C l’emporte sur les
autres, ils ont alors une longueur d’avance, dans sa connaissance, sa
pratique, son utilisation. Mieux, ils bénéficieront les premiers des
nouveautés. C’est vrai pour un individu qui teste des services, des
applications, des produits, mais aussi pour les sociétés qui beta-testent en
leur sein des business model, des nouvelles activités, des nouveaux
services… Nous osons ajouter :
« Not to be a beta tester, is maybe to be a beta ».
Pour la bonne forme
La surexposition des marques les met à la merci d’attaques, de critiques, de
malentendus avec leur environnement, etc.
Il importe d’adopter le format approprié pour réagir à une attaque, en
répondant à un commentaire avec un commentaire, à une vidéo avec une
vidéo, etc. C’est la règle qui semble s’imposer dans le monde digital. Mais
attention danger. Puisqu’ici l’illusion est quadruple :

• Ne surestimons pas notre capacité à répondre du tac au tac, avec


des formats qui ne nous sont pas familiers, à d’autres qui maîtrisent
parfaitement la production de ces formats. Une start up équipée
d’un studio, du bon matériel vidéo et de compétence en post-prod,
sera toujours plus rapide qu’un acteur traditionnel, sous-traitant la
réalisation de son film à un prestataire, dont le planning de
production est déjà rempli, le studio déjà réservé tous les jours,
pendant les trois prochaines semaines, etc.

• Ce qui compte n’est pas tant le format de la réponse mais la vitesse


à laquelle elle arrive.

• Ce qui compte aussi, ce n’est pas tant le message que sa capacité à


le diffuser et le propager à un très grand nombre, très rapidement.

• Ce qui compte enfin, est le crédit et les relations avec les


influenceurs de la place, ceux qui font et défont les rumeurs.

Le Web a ses règles, ses réflexes, ses travers. Il peut être épidermique,
excessif, injuste, capricieux, tyrannique, imprévisible. Il serait naïf de
penser que nous y pouvons quelque chose. En attendant, continuons tout au
moins à mettre les formes.

Psychanalyse du Web
Voici Pierre et Paul. L’un et l’autre sont parisiens, quarantenaires,
récemment divorcés et largement accaparés par leurs postes à
responsabilités, couronnant deux belles carrières au sein de grands groupes
pressurant. Chacun d’eux se dit qu’il traverse une crise, qu’il se sent un peu
déprimé, ressent comme un mal-être et pense, sans vraiment se l’avouer,
qu’il devrait peut-être consulter un spécialiste.
Quelques mois passent. Sans le savoir, ni se connaître, Pierre et Paul vont
tous deux prendre la même décision importante : démarrer une
psychanalyse. Ils ne choisissent pas le même docteur. Et pour cause ! Pierre
se rend chez un médecin dont il a eu les coordonnées par une amie. Quant à
Paul, il se contente de surfer sur Internet et d’entamer sans le savoir une
psychanalyse.
C’est Pierre qui entre le premier dans le cabinet de son psychanalyste. Tout
est conforme à l’idée qu’il s’était faite de ce type d’endroit. Un divan
l’attend. Allongé, il voit à peine le docteur qui se contente de l’écouter.
Pierre évoque ses questionnements, ses doutes sur sa vie et sur ses choix,
ses angoisses, ses rêves, ses fantasmes… Le psychanalyste intervient
occasionnellement pour orienter la réflexion et la parole de Pierre. Quelques
mois plus tard, Pierre à livré beaucoup de son intimité à son médecin qui
seul, à part Pierre lui-même, en connaît les détails.
A la même période, Paul est à moitié allongé sur son canapé, surfant sur
une tablette. Les requêtes qu’il effectue dans Google correspondent aux
thèmes qu’il aurait abordés chez un psychanalyste.
Les premières portent sur la résolution de son mal-être. Elles le conduisent
sur des sites qu’il imagine capables de l’aider à répondre aux questions
existentielles qu’il se pose : dois-je me remarier ? Comment être un bon
père, bien qu’éloigné de mes enfants ? N’ai-je pas trop privilégié ma
carrière ? Toute cette réussite matérielle m’a-t-elle réellement rendu
heureux ? N’ai-je pas été égoïste ? Ne devrais-je pas en profiter pour me
rapprocher de mon père que je ne vois quasiment plus ? Etc.
Les secondes lui permettent de se changer les idées. Elles le conduisent à
visionner des extraits de films dans lesquelles ses actrices fétiches ont une
scène de sexe, à repérer des destinations exotiques où s’évader, à découvrir
le nouveau modèle de voiture de sa marque préférée, à regarder des scènes
violentes, à régresser en revoyant des dessins-animés…
Tout ceci, Paul ne le dit pas à un psychanalyste. Il le dit à Google. Sans le
réaliser, il fait part de son intimité la plus profonde au site Web le plus
consulté de la planète. Ce que les spécialistes appellent « l’inconscient », de
Paul, est désormais livré par Paul lui-même à Google : ses fantasmes
sexuels, ses rêve de voyages, ses questions existentielles, ses doutes, ses
angoisses, ses regrets… bref, tout un tas de choses qu’ignorait sans doute
son ancienne femme, qu’il ne dira peut-être jamais à la prochaine, et que
son meilleur copain ignore en grande partie. Tout comme Pierre, Paul est
engagé, mais sans le savoir dans une démarche de confession.
Allons plus loin. Paul n’est pas le seul à se livrer à ce jeu. Nous sommes des
centaines de millions, qui chaque jour, livrons un peu plus de notre vie
intime à Google. Google enregistre nos recherches, observe sur quels sites,
proposés en réponse, nous cliquons le plus, de manière à en tenir compte
pour la suite et à toujours apporter la réponse la plus pertinente aux futurs
l’utilisateurs.
En somme Google est devenu, avec notre complicité active, le
psychanalyste de tous. Il connaît une part de l’inconscient de chacun. En
agrégeant nos comportements, pour sans cesse améliorer les réponses
apportées aux requêtes, Google sans le savoir, exploite l’inconscient
collectif de la société dans laquelle nous vivons. Lorsque Paul tape « James
Bond girl sexy », Google lui propose en priorité les sites ayant été les plus
visités par les internautes qui ont effectué la même requête que lui, avant
lui. Pour proposer à Paul les sites répondant le mieux à sa requête, Google
puise dans les fantasmes, logés dans l’inconscient collectif des internautes.
Olga Kurylenko est donc en première position devant Fernanda Ferrari et
Olivia Munn. De plus, Google, tient compte des choix de Paul pour
apporter la meilleure sélection de réponses à ceux qui taperont les mêmes
mots dans Google, à l’avenir. Et ce à l’infini. L’inconscient individuel de
chacun d’entre nous alimente l’inconscient collectif, qui existe depuis
toujours, mais que nul n’était parvenu à exploiter si bien auparavant.
Google s’en nourrit et le nourrit.
Chapitre 8
STRATÉGIE

Le temple du roi Salomon


Moïse demande à David de construire un temple. Il lui transmet les plans
que Dieu lui a confiés pour bâtir un temple abritant toutes les religions sous
un même toit, autour d’un Dieu unique.
Sur son lit de mort, David ordonne à son fils Salomon de construire le
temple qu’il n’a pas pu ériger de son vivant.
Salomon confie la direction des travaux à l’architecte Hiram que des
23
ouvriers assassinent pour lui dérober les secrets de construction . Le temple
ne voit jamais le jour.
Incroyable ! Dans la légende rapportée ici, la légitimité du projet est totale
(elle provient de Dieu lui-même, par l’entremise de Moïse.) Le
commanditaire des travaux est le plus puissant des rois de l’époque. Hiram
est le meilleur bronzier et le meilleur architecte de son temps. Des milliers
d’hommes participent à l’édification du temple. Les matériaux les plus
précieux ont été acheminés depuis les royaumes alentours… Et le temple ne
voit pas le jour.
La moralité de l’histoire est qu’un tout petit nombre d’individus
malveillants, bien que faibles, peuvent démolir les choses apparemment les
plus solides.
Partout ce scénario se produit. Des hommes confient à d’autres hommes de
confiance une réalisation. Celle-ci achoppe car des hommes de moindre
vertu, même peu nombreux, même peu puissants, détiennent un grand
pouvoir de nuisance. S’ils en font usage, c’est la catastrophe.
Pour parcourir sa route digitale, souvent au moment où c’est difficile et où
les mauvais penchants des uns pointent le bout de leur nez, il est impératif
de s’astreindre à :
• Identifier, canaliser ou mettre hors d’état de nuire « les ouvriers mal
intentionnés ». Il y en a toujours.

• Repérer les points faibles, les zones de fragilité, les endroits


vulnérables de ce que l’on est en train de construire. L’entreprise en
est truffée. Ces une ambition commune, la motivation d’ensemble,
la confiance générale, le niveau moyen d’auto-exigence, etc.

Autrement, le périple dans le monde digital pourrait bien s’avérer


interminable, voire ne jamais mener nul part.

La lettre manquante
On connaît ROI qui signifie Return On Investment ou retour sur
investissement en français.
Nous sommes moins nombreux à utiliser l’expression RONI : Risk Of Non
Investing. Il est parfois plus coûteux de ne rien faire que de faire.

• Il est parfois plus coûteux (fiscalement par exemple) pour certains


business angels de ne pas investir dans votre start up, que de le
faire.

• Il est parfois plus coûteux d’attendre que d’autres saisissent une


opportunité de marché et de devoir surinvestir ensuite pour entrer
sur le marché, que d’y pénétrer dès le départ.

• Il est parfois plus cher de s’obstiner à maintenir une sorte de statut


quo que d’innover.

• Il est parfois plus coûteux de s’entêter à continuer à faire son


business selon un mode hérité du passé, face à de nouveaux
concurrents qui bénéficient de leviers issus des évolutions récentes
de l’environnement, que de racheter ses concurrents.

Il faut se rappeler que faire du business n’est pas résoudre des problèmes,
mais saisir des opportunités. Trop d’entre nous l’oublions. Dans les faits
cela se traduit par trois symptômes :
• Nous ne comparons plus la part accordée à la résolution de
problèmes à la part consacrée à la saisie d’opportunité, par nos
entreprises.

• Nous allouons nos meilleurs collaborateurs à la résolution des


problèmes et non à la saisie des opportunités.

• En cas de coups durs, nous remettons à plus tard les opportunités à


saisir plutôt que la résolution de problèmes qui perdurent depuis si
longtemps, que l’urgence qu’il y aurait à les résoudre n’est pas
toujours avérée.

La stratégie à la chinoise
Le digital préfigure peut-être la nécessité de repenser la façon même dont
24
est traditionnellement appréhendée la stratégie .
Nous voilà reparti dans un duel entre l’Ouest et l’Est.
En Occident, la stratégie repose sur un plan dressé à l’avance, projeté sur
l’environnement et que la volonté se fixe comme but à atteindre. Et paf, un
point pour l’Ouest !
En Chine, elle s’appuie sur une conception tout autre, puisque l’idée de
l’efficacité consiste à apprendre à laisser advenir l’effet : non plus à le viser
directement mais à l’impliquer comme conséquence ; c’est-à-dire non pas à
le chercher mais le recueillir, à le laisser se produire.
Le propre de la stratégie chinoise est donc, selon les anciens traités, de
prendre appui sur le potentiel inscrit dans la situation, au lieu de tenter de
prédéterminer le cours des événements au moyen d’un plan dressé à
l’avance. C’est malin, tout de même. Allez, on accorde deux points à L’Est.
Internet a fait table rase de certaines règles, a engendré une forme de chaos
et a participé à l’apparition d’une situation nouvelle, inédite et que sa nature
même rend imprévisible. Il devient donc particulièrement difficile pour une
entreprise, de prédéfinir une stratégie et de parvenir à la dérouler dans le
monde digital. L’un des enjeux est peut-être de procéder à un examen
minutieux et permanent de leur situation sur le Web afin d’analyser le
potentiel inscrit dans le contexte digital du moment, plutôt que de
prédéterminer le cours des événements en fonction d’un plan dressé
d’avance.
Penser en stratèges chinois et agir en opérationnels occidentaux est peut-
être l’une des clés qui permettra d’aller plus loin dans le monde digital ?

Les 3 C de Monsieur K…
Il y eut Monsieur P…, Monsieur Michael Porter, pour ne pas le nommer.
Chantre de la stratégie, ses travaux le conduisirent à constater qu’une
entreprise a toujours à choisir entre trois stratégies possibles :

• La domination par les coûts : elle consiste à maintenir des prix bas
pour Leclerc…

• La différenciation : elle consiste à proposer une offre ayant des


caractéristiques différentes de celles de la concurrence. Elle peut
prendre deux orientations : la différenciation vers le haut ou
sophistication, qui consiste à proposer une offre plus élaborée que
l’offre de référence, mais à la vendre à un prix plus élevé.
Exemples : BMW ou Häagen-Dazs. Et la différenciation vers le bas
ou épuration, qui consiste au contraire à proposer une offre moins
élaborée que l’offre de référence, mais à la vendre à un prix moins
élevé. Exemples : Bic, Ikea ou Ryanair.

• La concentration ou stratégie de niche qui consiste à centrer


l’essentiel de ses efforts sur un segment de marché. Exemple :
Baobaz, Luxury Society, Ykone, Pinterest, FrenchWeb…

Il y eut Madame R… ou Madame la Réalité pour ne pas la citer qui se


rappelle toujours à notre bon souvenir quand nous nous avisons de l’oublier.
Elle nous signala que deux autres stratégies tendaient à se répandre :

• L’exécution opérationnelle : elle consiste à faire la même chose que


ses concurrents mais mieux. Exemples : Zara, Office Depot,
Amazon.com…
• L’innovation : elle consiste tout simplement à innover. Sony, Apple,
Google, Facebook…

Il y eut Monsieur K… Monsieur Philippe Kotler, pour ne pas le nommer qui


stipula que les entreprises pouvaient agir sur quatre variables formant leur
marketing-mix, les quatre P (Produit, Prix, Place, Promotion).
Il y eut Monsieur K… une seconde fois. Toujours le même qui après avoir
25
écrit la bible du marketing, le Marketing Management qui envahit toutes
les bibliothèques universitaires, se sentit obligé de reprendre la plume afin
de répondre à la question que personne n’osait lui poser : le Web amende t-
il ce que vous avez écrit Monsieur Kotler ? Il interrompit ses séances de
natation matinales à la piscine de l’Evantson Campus de la Kellogg School
26
of Management pour écrire Marketing Moves . Habile, il parvint à laisser
penser que le Web n’invalidait pas ses travaux antérieurs et en profita même
pour nous refourguer trois lettres de plus : les trois C (Convenience,
Customer, Cost).
Un moyen astucieux d’intégrer le Web à sa théorie d’ensemble.

• En parlant de coûts (cost) alors que le Web a participé à un


phénomène plus général : le low cost.

• En faisant ressortir le consommateur (customer) sachant bien que le


Web est très customer centric.

• En introduisant de surcroît la commodité (convenience) dans un


monde où l’homme moderne interagit de plus en plus avec son
environnement par l’entremise de terminaux.

Sur les routes du monde digital comme ailleurs, on apprend pas au vieux
singe à faire des grimaces.

La science des nombres


La science des nombres, en voilà une drôle d’expression !
C’est Pythagore qui en parle, précisant que cette science lui serait largement
antérieure, avant d’en faire l’un de ses chevaux de bataille.
Selon cette très ancienne et très illustre « science » les nombres n’auraient
pas seulement une valeur numérique permettant de compter et de calculer,
mais également une valeur conceptuelle. Chacun d’entre eux contiendrait
une idée. L’ensemble des dix nombres permettrait alors d’expliquer
l’univers. Ainsi, le Un correspondrait à l’idée de l’unité, de l’harmonie, de
l’équilibre. Le Deux exprimerait la dualité, la rupture de cet équilibre. Le
Trois symboliserait le rétablissement d’une harmonie, par delà l’opposition
introduite par le Deux, via un tiers, etc. Le point d’orgue de ces conjectures
est la théorie du Nombre d’Or (nombre que l’on retrouve bien souvent dans
les proportions des feuilles d’imprimantes, de nos écrans d’ordinateurs, de
télévisions, ou de tablettes…)
Les nombres font tellement partie de notre quotidien que nous ne les
regardons plus. Pourtant, ils peuvent peut être nous enseigner deux ou trois
choses. Sous couvert d’être simples, ils ont le méritent d’être gratuits et
toujours disponibles. Exemple : un marché est investi par un acteur. Il y a
harmonie. L’entreprise n’a pas de concurrent. Les clients n’ont pas de
raison d’insatisfaction puisque qu’ils n’ont pas de point de comparaison. Un
deuxième acteur arrive sur le marché. La dualité apparaît. La concurrence
peut être très intense. L’arrivée d’un troisième acteur rétablit généralement
un peu l’harmonie. Les deux premiers arrivés, baissent un temps le niveau
de combativité qu’ils mettaient dans leurs affrontements, pour jauger le
troisième. Ce dernier est encore trop petit pour leur faire peur, etc.
Vous n’êtes pas convaincu ? Penchez-vous sur les nombres ! Il y en a neuf
(le zéro n’en fait pas partie). C’est peu et c’est beaucoup, si vous vous
donnez la peine de les faire parler.
Les nombres ne sont pas uniquement faits pour être enfermés dans des
tableaux Excel. Ils sont vivants. Il faut peut être les utiliser comme outils de
réflexion.
A méditer, par exemple lorsque la nuit tombe sur la route digitale, qu’elle se
vide un peu et qu’un sentiment de calme et de solitude en vient à entourer
notre voiture, dont seule la lumière des phares persiste dans la nuit qui
s’épaissit.
Ford vs. Sloan
Henry Ford et Alfred Sloan sont deux figures légendaires de l’industrie
automobile américaine.
A la fin du dix-neuvième siècle, il faut commander son automobile comme
chez le tailleur. Le véhicule obtenu est le résultat d’un sur-mesure total. En
créant la Ford Motor Company, Henry Ford a une idée de génie. Il propose
une même voiture pour tous. Il convainc le client à coup d’arguments
rationnels, souligne la longévité de sa voiture et finalement, standardise les
véhicules.
Un concurrent arrive, General Motors avec un autre génie à sa tête : Alfred
Sloan. Ce dernier crée le premier département style, pour remobiliser le
goût des consommateurs. Il lance également les premières études de
marché, le premier département marketing, le premier bureau de design.
La différence entre les deux hommes est de taille.
Henry Ford, sous couvert de standardiser les produits, standardise en réalité
les consommateurs. Ils n’ont plus le droit d’avoir un désir, une envie ou un
goût différent de celui du voisin. Henry Ford le dira d’ailleurs dans une
citation connue : « Les gens peuvent choisir n’importe quelle couleur pour
la Ford T, du moment que c’est noir ».
En revanche, Alfred Sloan restitue aux clients le droit d’avoir leurs goûts,
leurs désirs individuels, leurs envies propres.
L’histoire de l’économie semble être un jeu de va-et-vient perpétuels entre
standardisation, tantôt des consommateurs, tantôt des produits. Les marques
l’ont intégré à leur propre cycle de vie. Après avoir standardisé nos
cuisines, nos salons, nos chambres, IKEA s’efforce désormais de nous
permettre d’introduire de la différence, du goût personnel, dans nos
intérieurs en proposant de plus en plus d’options. Les iPhone, les iPad, qui
nous standardisent dans nos manières de téléphoner, d’accéder à
l’information, de naviguer sur le Web, sont de plus en plus proposés avec
des options permettant de dire notre différence : couleur de la coque,
couleur de la Smart Cover etc. Après nous avoir appris à chercher sur le
Web, Google s’efforce de nous proposer de plus en plus d’options…
On pourrait imaginer une classification, des entreprises, des concepts, des
produits, en fonction de deux critères :

• En abscisse : le niveau de standardisation des produits.

• En ordonnée : le degré de standardisation des clients.

Amusez-vous à faire l’exercice. Vous verrez que bon nombre des


« meilleurs entreprises », du moment tendent vers la standardisation du
client.
Vers quelle direction conduit l’artère principale du monde digital ?

Miyamoto Musashi
Le Japon adore les histoires de cape et d’épée. Nos d’Artagnan, nos
Ivanhoé, nos Zorro, nos capitaines Fracasse, nos Scaramouche n’auraient
rien à envier à Miyamoto Musashi, s’il n’avait été un personnage réel. Il
était samouraï, vivait au seizième-siècle et appartenait à l’école des deux
27
sabres. On lui doit le Gorin no shô, célèbre traité . La légende lui attribue
une multitude d’exploits : un nombre record de duels au sabre remportés,
des victoires seul face à soixante adversaires, des assauts décisifs lors de
batailles militaires.
Son enseignement sur l’art de la guerre est consigné dans son Traité des
cinq roues, recommandé parfois au même titre que l’Art de la guerre de Sun
Tsun, dans les livres de stratégie ou de management américains. Fidèle à
l’esprit du samouraï, affuté comme la lame d’un sabre, Miyamoto Mushashi
y expose qu’il y a « une seule manière de gagner : la bonne ». Nous voilà
bien avancés ! Il poursuit en racontant qu’il a remporté tous ses duels en
privilégiant une seule technique : « N’attendez pas. Foncez sur l’adversaire
et fendez-lui le crâne d’un seul coup de sabre, assené de haut en bas ». La
victoire est alors assurée, puisque l’adversaire n’est plus en état de
combattre, aux dires du maître. C’est pour le moins expéditif.
Bien entendu, les enseignements du maître sont complétés d’une
philosophie dont les arts-martiaux aime toujours se prévaloir. Ici, il faudrait
comprendre que la victoire ne se situe pas dans l’homme, mais dans le
sabre :

• La tête et le geste sont volontairement séparés l’un de l’autre. La


tête étant remplie de mauvaises pensées, de peurs, de scrupules, elle
peut devenir notre ennemie. Il faut donc réfléchir au préalable, au
calme, à la stratégie que l’on appliquera. Une fois ceci fait, lorsque
l’heure du combat arrive, la tête doit être vide et seulement au
service du sabre, par l’entremise du bras, devenu l’instrument de la
stratégie. Il ne s’agit plus de réfléchir, mais uniquement d’agir.

• La mort provient souvent du fait que le combattant réfléchit trop au


moment de l’action. Il faut réfléchir ou agir, mais pas les deux en
même temps.

• La défaite est réservée à ceux qui ne savent pas saisir la chance,


l’opportunité, l’instant qui leur est donné, l’intervalle de temps qui
s’appelle la victoire.

En extrapolant d’après Miyamoto Musashi, que nous préférons ne pas


contrarier, de peur que son fantôme (car les Japonais croient beaucoup aux
fantômes) ne vienne nous trancher en deux, la route digitale passerait peut-
être par :

• Ne plus se poser de question, une fois arrivé à un certain stade et à


ne faire que ce qui est à faire pour avancer, sans hésitation.

• Ne pas perturber l’action par la réflexion, mais préparer l’action au


moyen de la réflexion.

• Apprendre à repérer les interstices (de temps, de lieu, de


technologie…) où l’on peut marquer des points.

La pomme
L’histoire de l’humanité est remplie de pommes : la pomme d’Adam et Eve,
la pomme de la discorde qui entraîna la guerre de Troie, la pomme qui
tomba sur la tête d’Isaac Newton, le surnom de Big Apple (au sens de grand
28
pari) attribué à New York, le logo d’Apple .
Pourquoi ? Faut-il parcourir la route digitale en mangeant des pommes ?
Peutêtre que oui ! La pomme symbolise tellement de choses de nature à
29
aider à avancer :

• Le désir qu’il faut savoir entretenir, chez soi, chez ses


collaborateurs, chez ses actionnaires, pour continuer à avancer.

• La connaissance qu’il faut avoir, qu’il faut remettre en question,


acquérir à l’ère du digital, actualiser, rénover, réorganiser…

• La révélation à laquelle il faut savoir se rendre disponible, qu’il ne


faut pas rejeter sous prétexte qu’elle ne serait pas conforme à nos
habitudes mentales.

• La conservation de la jeunesse qu’il faut préserver, au moins en


esprit.

Il se dit qu’Apple aurait choisi une pomme comme logo, car durant leurs
jeunes années les fondateurs étaient souvent en manque d’argent et
mangeaient régulièrement des pommes (qui ont l’intérêt d’être
nourrissantes). D’ailleurs, si l’on observe d’un peu plus près, la pomme du
logo d’Apple est croquée. Mangeons des pommes pour les raisons citées
plus haut et parce que la route digitale se fait aussi en franchissant des
interdits (comme Eve), en passant par des discordes (comme la guerre de
Troie), en se prenant des pommes en pleine poire (comme Newton), en se
lançant des paris à nous-mêmes (comme New York), en mangeant des
pommes… quand on démarre (Comme les deux Steve d’Apple), quand les
banques se défaussent, quand les actionnaires hésitent, quand le carnet de
commandes se vide.

Baby foot management


Nous nous sommes vus l’autre soir, avec le traducteur, pour avancer sur le
livre. Il y avait un baby foot dans le café. Un véritable baby foot ancien,
patiné, cabossé, brûlé par les mégots de cigarettes. Nous avons joué. J’ai
gagné.
Le baby foot est une assez bonne métaphore de ce qui se passe en
entreprise. Les choses vont vite. L’imprévu est là. Des temps d’arrêt
alternent avec des accélérations, etc. Parfois, il n’y a rien à faire, la balle est
arrêtée dans un coin. Il faut une intervention externe, pour que le jeu
reprenne. Chacun joue avec ses propres règles, en invoque, en invente… Il
y a autant de versions du jeu qu’il y a de joueurs ayant été en colo.
La seule chose certaine est que pour gagner il ne faut pas laisser la balle
passer à côté de ses joueurs, sans en profiter pour la bloquer, faire une
passe, tirer, contrer, simuler.
Pour parcourir la route digitale, il ne faut pas laisser le ballon filer. C’est
quand la balle est à proximité des pieds de ses joueurs qu’il faut la saisir.
Après c’est trop tard.

• C’est le nombre d’occasions non saisies, d’occasions manquées, qui


font que l’on perd.

• C’est le nombre de petits gestes, de gestes bien faits, qui font


avancer.

• C’est l’enchaînement des coups rapides, des passes, qui maintient


dans une dynamique positive.

• C’est l’hésitation qui pénalise.

• C’est l’absence de concentration, le stress, la pression qui fait


perdre la balle.

• C’est parfois hors du jeu, dans les négociations, les arrêts de jeu, les
bavardages, les disputes, que se perdent ou se gagnent les parties.

Il y a des baby foot dans certaines entreprises. Ils sont présentés comme un
moyen de divertissement. Ils sont peut-être un carrefour d’enseignements ?

ASCV
Le digital a fait émerger de nouvelles attitudes chez les individus, vis-à-vis
des marques. Certains comportements ne reposent pas sur un simple achat.
Ils méritent d’être pris en considération et même d’intégrer les typologies
30
de clients .
Les consommateurs peuvent réaliser, indépendamment ou conjointement,
quatre actions concernant la marque :

• L’acheter.

• La consommer.

• En parler (buzz, blog, tweet...).

• La vendre (boutique eBay, affiliation, ventes d’occasion…).

Le premier comportement est celui de l’achat d’un produit par le client.


Nous appellerons ces individus, les acheteurs.
Le second correspond aux clients qui consomment la marque sans acheter
ses produits : en participant à des expériences clients que la marque leurs
proposera en ligne (essayer de se relooker avec un mannequin virtuel,
découvrir quel type de séducteur ils sont, participer à un jeu, découvrir les
coulisses du shooting de la campagne de pub, visiter virtuellement les
ateliers, etc.) Nous les baptiserons les spectateurs.
Le troisième comportement est celui des individus qui parlent de la marque
sur le Web, dans des blogs, sur les espaces sociaux, etc. Nous les
évoquerons en tant que colporteurs.
Le dernier réunit les individus qui vendent, la marque sur des sites comme
eBay.com ou parce qu’ils ont rejoint un réseau d’affiliation. Nous parlerons
d’eux en tant que vendeurs.
Une nouvelle classification des clients est possible. Nous la baptiserons
ASCV (Acheteurs, Spectateurs, Colporteurs, Vendeurs). Cette nouvelle
typologie ASCV montre la variété et la multiplicité des comportements des
clients sur le Web. Certains ne sont qu’acheteurs ou que vendeurs de la
marque. D’autres sont de simples colporteurs d’informations sur la marque.
Chaque comportement pouvant se coupler à un ou plusieurs autres :
Acheteurs-Colporteurs, Acheteurs-Colporteurs-Vendeurs, etc.
Cinq réactions à chaud :

• Cette nouvelle typologie invite à repenser la notion de « client » et


à s’interroger sur nos segmentations et nos typologies de clientèle.
Et ce, d’autant qu’un type de client peut passer facilement d’une
catégorie à l’autre au cours du temps, en abandonnant ou adoptant
l’un des quatre comportements de base, ou en les combinant entre
eux.

• Le modèle ASCV fait également ressortir le rôle des prescripteurs,


que le Web transforme en potentiels colporteurs.

• Le digital fait également naître une nouvelle notion, celle de porte-


parole de la marque. Si ces derniers sont ordinairement des stars, le
Web introduit la possibilité de s’offrir des porte-parole anonymes,
opérant plus souterrainement, mais pouvant œuvrer efficacement du
fait de leurs actions conjointes, réalisées sur un plus long terme, et
bénéficiant de la force du nombre.

• Le Web introduit la notion de prescripteurs, de colporteurs, de


porte-paroles non sollicités, non désirés, autoproclamés.

• La notion de meilleur client évolue. Qui de Pierre qui achète pour


deux cent cinquante euros de produits par an à une marque, ou de
Paul qui ne consacre que cinquante euros à cette marque, mais qui
via son blog fait venir à la marque, parfois des dizaines de clients
d’un coup, est le meilleur client ?

La route digitale devra se parcourir en conservant à l’esprit cette typologie,


puisque vous y croiserez forcément des acheteurs, des spectateurs, des
colporteurs ou des vendeurs.
Aller, faisons une petite halte au bord de la route, pour souffler un peu, le
temps de réaliser que l’acronyme A.S.C.V. peut également vouloir dire :
Alerte Segmentation Complètement Vérifiable ou Attention Segmentation
Carrément Vitale ou encore A Simplement Commencer Vite.
Au fur et à mesure
La mesure de la performance de l’entreprise était relativement simple avant
le Web. Ce dernier a introduit en vrac une flopée de nouveaux metrics dans
les entreprises mortar : nombre de visiteurs uniques, nombres de page vues,
temps de visites moyen, ranking dans les résultats des moteurs de
recherche, nombre de Tweet…
Certain sont des transpositions au Web d’indicateurs de mesure qui
existaient dans d’autres secteurs. Le taux de conversion est mesuré depuis
longtemps par les points de vente, la fidélité du client aussi, le panier
moyen également. D’autres sont propres au Web : taux de désabonnement à
une newsletter, hard et soft bounces, nombre de requêtes Google, taux de
click, taux d’abandons première page…
Le digital introduit dans les directions marketing, les directions de la
communication, les directions commerciales (avec le e-commerce), les
directions de la relation client et même les directions générales (avec l’e-
réputation) un florilège de nouveaux indicateurs. Ils ont des caractéristiques
de nature à inquiéter :

• Ils sont le plus souvent récents.

• Leur durée de vie n’est pas connue. Nul ne sait si nous les
utiliserons encore dans deux ans.

• On ignore parfois la pertinence de l’information qu’ils apportent.


Que signifie avoir cent cinquante mille fans Facebook ? Sont-ils des
clients ou non ? Le fait qu’ils soient fans les prédispose-t-ils plus à
acheter le prochain trimestre ? Sont-ils fans uniquement de notre
marque à l’intérieur de notre catégorie de produits ? Seront-ils
fidèles ? Sont-ils des acheteurs, des consommateurs, des
colporteurs ou des vendeurs ?

• Les biais qui entourent la mesure des résultats sont nombreux.

• Ils sont de plus en plus pris au sérieux.


• On ose de moins en moins les ignorer.

L’exploration du monde digital se fait en sachant que nous sommes


manifestement condamnés à naviguer dans un environnement :

• De plus en plus mesuré, dans tous les sens.

• Dont la mesure est de plus en plus hétérogène (le meilleur côtoie le


pire).

• Dont les indicateurs de mesure changeront régulièrement.

• Où nous serons condamnés à mesurer constamment, de nouvelles


choses, avec de nouveaux indicateurs, et donc sans historique…

A ce petit jeu, nous n’aurons bientôt presque plus d’historique, plus de base
de comparaison, simplement des pages blanches à remplir.
La route digitale se fera peut-être en regardant uniquement devant soi ?

Du GRP au GRPn
Qu’est-ce que c’est déjà le GRP ? Je me rappelle que c’est un concept vieux
comme la pub, dont le prof de marketing avait parlé.
Le GRP (ou Gross Rating Point), est un sigle utilisé dans le monde de la
communication publicitaire. Il représente un indice de pression d’une
campagne publicitaire sur une cible donnée. Il s’agit du nombre moyen de
chances de contact d’une campagne publicitaire avec le consommateur
rapporté à cent personnes de la cible étudiée.
Plus précisément, le GRP se calcule à l’aide de la formule suivante : taux de
couverture (ou taux de pénétration) × Taux de répétition moyen.
Exemple : Une publicité est diffusée à la télévision entre 12h35 et 12h40
sur la chaîne TF1. On estime que seul 18,6% des femmes entre 18 et 49 ans
regardent TF1 à cette heure-ci. Si cette population cible a l’occasion de voir
deux fois le message publicitaire (fréquence moyenne de répétition de la
publicité = 2), on obtient un GRP de 18,6 × 2 = 37,2 sur la cible des
femmes de 18 à 49 ans.
C’est un peu normal que vous ne vous en souveniez-pas. Ça date des mass
media comme la radio ou la télévision. Depuis, le Web a introduit plein de
nouveaux paramètres et en a amplifié d’autres. Place au GRPn . La formule
s’est enrichie. Nous sommes passés de :
GRP = taux de couverture × taux de répétition moyen
à
GRP = taux de couverture x taux de répétition moyen x taux de réceptivité
de la cible (aux sollicitations publicitaires en général) x taux de
disponibilité (de la cible à cet instant) x taux innovation (du message lui
même) x taux de buzzabilité (du message) x taux de réputation (de la
marque) x taux de pénétration (par la marque des espaces sociaux
fréquentés par la cible) x taux d’encombrement publicitaire (du media à cet
instant) x taux de probabilité que la cible utilisait le bon terminal à cet
instant x taux de Like et autres Twitt du message (par la communauté de la
cible) x taux d’approbation du message (par les influenceurs de la cible) x
une multitude d’autres paramètres qui affectent la communication
publicitaire sur le Web.
Le Web simplifie par certains côtés et complexifie par d’autres. Pas de
panique ! Face aux situations complexes, il faut savoir redevenir simple. En
observant par exemple les données de base : taux de satisfaction des clients,
taux de fidélité des clients, chiffre d’affaires, part du panier moyen global
du client dépensé chez nous, etc. Le monde digital ne doit pas se parcourir
pour amender des théories mais pour vendre et satisfaire des clients.

Marketization/De-marketization/Re-
marketization
Le marketing est apparu lorsque la demande est devenue inférieure à l’offre.
Il y avait deux bouteilles d’eau à vendre à un client qui n’en voulait qu’une
seule. Le marketing est arrivé et a donné un nom de marque à chaque
bouteille, leur a attribué parfois un nom de produit, leur a offert un design
spécifique, les a entouré d’un imaginaire, leur a trouvé des icônes, etc, etc.
Ça a bien marché, pendant longtemps. Mais les clients ont fini par s’en
apercevoir et à déjouer les stratagèmes marketing des marques. On a alors
proclamé que les consommateurs étaient devenus intelligents. Merci pour
leurs ainés qui étaient donc des imbéciles ! (Oups pardon, comme nous
sommes des professionnels de la communication, il nous arrive parfois
d’être très maladroits).
« En fait il y a eu un phénomène de désaffection du marketing par les
consommateurs. Osons-le mot, nous rentrons dans une aire de de-
marketization ».
« Mais alors, il n’y a plus de marketing ? »
« Si, si, mais ce sont les clients qui le font ».
« Et vous, que faites-vous ! »
« Et bien, nous les observons. Quand les clients ont une bonne idée, ont la
déploie en très grand, quand ils changent de communautés nous les suivons,
etc. ».
« Ah oui je comprends »
N’oublions jamais le client. Il n’aime pas ça. Il s’est accaparé le Web
comme un moyen de nous rappeler qu’il faudra désormais travailler avec lui
et plus seulement pour lui. Les embûches ne manqueront pas sur la route
qui se perd à l’horizon du monde digital. Car les clients seront tantôt :

• Indifférents.

• Nos concurrents (qui se font passer pour vos clients.)

• En vacances.

• Occupés à autre chose.

• Moins inspirés que d’habitude.


• Lassés de travailler gratuitement pour des marques qui ne prennent
même plus leurs enfants en stage.

La solution est peut-être d’être meilleur qu’eux, de réapprendre à les


surprendre, de faire notre métier.
Chapitre 9
LES DESSOUS DU WEB

Quelques principes
De ce livre, il se dégage quelques principes :

• La dualité : les plus grands arbres sont aussi ceux qui ont les plus
grandes racines. C’est en poussant vers le bas, qu’ils grandissent
vers le haut. La réussite ne provient pas nécessairement de ce qui se
voit le plus. Les fondamentaux comme le rêve initial, le courage,
l’envie, la passion… sont déterminants.

• La simplicité : nous aimons tout compliquer, mais la simplicité a


ses vertus. Les choses simples fonctionnent, pas toujours certes,
mais plus souvent que les choses compliquées.

• L’innovation : sous toutes ses formes car elle n’est pas que
technologique, même si la technique est l’un des moteurs du monde
digital.

• La vitesse : le monde est en mouvement et sa transformation


perpétuelle est de plus en plus rapide. Héraclite avait raison : « Rien
31
n’est plus permanent que le changement » . Il a son rythme. Il faut
le découvrir pour s’aligner dessus, quitte à battre une mesure sur
deux, pourvu que l’on soit dans le rythme.

• La direction : il n’est pas question de suivre une ligne droite. C’est


impossible. La route est trop parsemée d’embûches. En revanche, il
convient d’être à la barre, d’être aux commandes et de savoir
donner les coups de volant nécessaires, d’accepter de faire des
détours, de profiter de raccourcis… en s’arrêtant le moins possible.

• L’élan : il en faut car la route est dure et longue. Savoir utiliser


l’élan initial, ne pas le gaspiller, pour profiter de la poussée de
départ. C’est lui qui fait le succès.

• L’horizon : il faut lever le nez du guidon pour saisir les


opportunités, se frotter à la réalité, aller à la rencontre de ce qui
alimentera la course.

Vous avez remarqué. Tous ces principes sont applicables à la roue. Une roue
est duale, à la fois mobile ou immobile, allant dans un sens ou dans
l’autre… Une roue est simple. Elle est une grande innovation de l’humanité.
Elle a besoin de vitesse, d’une direction, d’un élan et apporte l’ouverture
d’esprit puisqu’elle fait voyager.
Vous ne voyez pas où nous voulons en venir ?
Lisez ce qui suit…

La roue
Quoi de mieux qu’une roue bien ronde pour parcourir les routes du monde
digital ?
Une roue bien fixée à un axe central et robuste parce que composée de sept
solides rayons que sont les principes implicitement décrits tout au long de
ce livre.
Une roue n’a toujours qu’un seul point de contact avec le sol en même
temps. Il faut rester simple dans tout, en tout, y compris dans nos échanges
avec notre environnement. Il importe de faire ce qui est à faire au moment
approprié, savoir que l’occasion ne se représentera forcément avant
longtemps. L’entreprise a de multiples points de contacts avec son
environnement, mais rarement tous en même temps malgré les apparences.
Une roue a un centre. C’est son centre de gravité. La roue tourne
constamment, mais pas lui. Cependant, il se déplace au fur et à mesure que
la roue avance. Il faut garder à l’esprit la nature de ce centre et avoir en tête
qu’il se déplace dans son environnement. L’entreprise a un centre de gravité
qu’il convient de jauger en fonction des lieux où il est véhiculé.
Une roue est un cercle. Elle met donc en harmonie tous les points qui
composent sa circonférence. Tous se touchent, tous sont égaux et tous sont à
une même distance du centre. Une entreprise n’est pas une structure
démocratique par essence, mais il lui faut harmoniser des opposés, mettre
en synergie des différences, équilibrer son organisation.
Une roue tient sa solidité d’une pression (si elle est pleine) ou d’une tension
(si elle est creuse comme une roue à rayons). La première est lourde. La
seconde est légère, plus agile, plus maniable. La mise en tension créée sa
solidité.
L’entreprise doit être le lieu de tensions, pourvu que celles-ci participent à
une robustesse, à une agilité, à une maniabilité d’ensemble.
Une roue a besoin de mouvement, autrement elle tombe. L’entreprise doit
avancer, même sur un marché en dépression. C’est lorsque la conjoncture
est la pire qu’il est possible de marquer des points, de planter des jalons qui
prépareront la victoire de demain.
Une roue a besoin d’un objectif, d’une direction, d’un horizon pour
optimiser sa course. Trop d’entreprises implosent en raison d’objectifs non
partagés au sein de leurs cellules dirigeantes, de démobilisation de
collaborateurs que l’on laisse sans horizon.
Une roue peut subir les plus grandes tensions, être extrêmement inclinée par
exemple, sans tomber, pourvu qu’elle ait de la vitesse. Freiner est rassurant,
mais diminue l’élan qui viendra à manquer lorsque nous ne serons plus en
descente.
Une roue est souvent entourée d’une enveloppe protectrice, légère et
souple, ne ralentissant pas sa vitesse et la protégeant des mille et un dangers
qui jalonnent la route du Web. Attention cependant. Une fois cette
enveloppe abîmée, avec une crevaison par exemple, c’est toute la roue qui
ne peut plus avancer. La prudence est primordiale mais ne doit pas entraver
la marche d’ensemble.
La roue a surtout besoin de rouler sans arrêt. Rappelez-vous ce que nous
disions au début de ce livre :
Notre environnement immédiat est tout en contrastes. Il ressemble à une
pièce de monnaie dont les deux faces ne se quittent jamais, mais ne se
rencontrent jamais non plus.
Du côté face, les opportunités manquées, les idées ignorées, les talents
inexploités, les projets avortés, les capitaux gaspillés, les énergies mal
utilisées, les stratégies inappropriées, remplissent la surface. C’est le côté
sombre et négatif.
Du côté pile, les talents qui continuent d’apparaître chaque jour, les bonnes
idées en sommeil, le courage des uns, l’énergie des autres, la disponibilité
des capitaux… recouvrent la surface. C’est le côté lumineux et positif.
Si la roue qui sillonne le monde digital venait à ralentir, puis à s’arrêter,
puis à tomber, ce ne serait peut-être pas du côté pile.

Le dernier kilomètre marketing


Il sera planétaire car le livre est publié en Anglais et en Français.
Il surprendra car la mise en page de l’ouvrage ressemble au chiffre
soixante-neuf.
Il sera fait de mouvement. Le livre circule déjà. Il attend les lecteurs sur les
bancs publics des villes, dans le bus, dans des gares, dans des aéroports.
Il continuera d’être collaboratif, social et en mouvement. Vous avez
certainement déjà rédigé un commentaire sur FrenchWeb à son sujet et si ce
n’est pas le cas, allez y !

Demain
Le livre continuera à se lire, tandis que la réalité qui l’a inspiré continuera à
changer.
Peu importe !
Les déclics qu’il aura provoqués, les envies qu’il aura réveillées, les débats
qu’il aura suscités sont ce qui compte le plus.
Comme disent les Taoïstes, ce sont les pas des hommes qui font tourner la
Terre.
Ce sont vos pas qui feront se dérouler les derniers kilomètres sous vos
pieds.

Post Scriptum
En général, le PS (post scriptum) est comme les mentions légales. C’est là
qu’on trouve toutes les mauvaises nouvelles.
Pas de mauvaise nouvelle ici.
Juste un rappel. Ce livre doit circuler. Que vous l’ayez trouvé ou non dans
un jardin public, dans un bus, dans un fast food, ou bien acheté, pour qu’il
voyage, déposez-le à votre tour quelque part dans un lieu public, de
préférence un endroit où il y a beaucoup de passage.
Encore une précision pratique. Pensez à la pluie. Ce livre est comme tous
les autres et comme vous-même, il n’aime pas trop être mouillé. Un sac en
plastique ou une chemise sont idéals, pourvu qu’ils soient transparents.
Pour finir, le livre est épais. Il tient donc debout sur sa tranche. Profitez-en
pour le poser verticalement afin qu’il se voit mieux.
Conclusion
Tout d’abord bonjour à celles et ceux qui commencent les livres par la fin et
que nous voyons pour la première fois à cette page.
Ensuite bravo à ceux qui ont commencé le livre par le début et qui sont
arrivés jusqu’ici.
La conclusion est celle que vous écrirez avec vos propres histoires, vos
projets, vos réalisations.
Elle est dans le prolongement de ce livre, en ligne, dans le monde digital et
dans la vie.
Elle se compose des contributions qui viendront poursuivre et faire vivre les
réactions, les commentaires, les questions que Les dessous du Web aura
suscitées.
Bibliographie

Ouvrages
Les livres abordant des sujets similaires ou connexes à ceux développés
dans cet ouvrage ne se comptent plus. Les meilleurs d’entre eux sont en
anglais. Rangés les uns à côté des autres, ils rempliraient une bibliothèque
32
de plus de seize kilomètres .
La longue liste proposée ci-dessous est composée pour l’essentiel
d’ouvrages, que nous n’avons pas nécessairement dévorés, mais qu’il
convient de mentionner, soit parce qu’ils ont atteint le statut de
« classiques », soit parce qu’ils ont été lus par la communauté du Web
français.
Cette liste abrite également les livres qui ont inspiré l’écriture des dessous
du Web ou que nous aimons. Afin de vous aider à les repérer, ils sont
signalés à l’aide du picto LIKE et notés sur une base cent.
Adam Brandenburger, Barry Nalebuff, Co-Opetition : A Revolutionary
Mindset That Combines Competition and Co-Opetition, Doubleday, 1997.
LIKE 61.
Al Ries and Jack Trout, The 22 Immutable Laws of Marketing : Violate
Them at Your Own Risk!, Harper Business, 1990. LIKE 75.
Al Ries and Jack Trout, Positioning: The Battle For Your Mind, McGraw-
Hill, 2000. LIKE 95.
Alexander Osterwalder and Yves Pigneur, Business Model Generation : A
Handbook for Visionaries, Game Changers, and Challengers, Wiley, 2010.
LIKE 59.
Arlette De Beaucorps, Dominique Bonpaix et Cyrille J.-D. Javary, Le Yi
Jing : Pratique et interprétation pour la vie quotidienne, Albin Michel
2010. LIKE 87.
Ben McConnell, Jackie Huba, Citizen Marketers : When People Are the
Message, Kaplan Business, 2006.
Boston Consulting Group, Perspective on Strategy, John Wiley & Sons,
1998. LIKE 39.
Bertrand Jouvenot, Le Journal de BJ au bureau : Le management facile,
Maxima, 2004. LIKE.
Bertrand Jouvenot, Managing Softly : Learning From Buddha, Gandhi,
Gracie, BookSurge Publishing, 2005. LIKE.
Bo Peabody, Lucky or Smart !, BookSurge Publishing, 2008.
Buckingham and Clifton, Now, Discover Your Strengths, Free Press, 2011.
LIKE 54
Charles Handy, The Age of Unreason, Harvard Business Press, 1991. LIKE
49.
Charles Wheelan, Naked Economics : Undressing The Dismal Science, W.
W. Norton & Company, 2010.
Chip Heath and Dan Heath, Made to Stick : Why Some Ideas Survive and
Others Die, Random House, 2007
Chris Anderson, The Long Tail : Why the Future of Business is Selling Less
of More, Hyperion, 2006. LIKE 41.
Christopher Locke, Rick Levine, Doc Searls, David Weinberger, Clue Train
Manifesto: The End of Business as Usual, Perseus Books Group, 2001.
Chris Zook, Beyond the Core : Expand Your Market Without Abandoning
Your Roots, Harvard Business Press, 2004.
Clayton M. Christensen, The Innovator’s Dilemma : The Revolutionary
Book that Will Change the Way You Do Business, Harper Paperbacks, 2003.
D. B. Holt, How Brands Become Icons : The Principles of Cultural
Branding, Harvard Business School Press, 2004. LIKE 71.
Daniel Goleman, Business: The Ultimate Ressource™, Perseus Publishing,
2002. LIKE 83.
Daniel Goleman, Emotional Intelligence : Why It can Matter More Than
IQ, Bloomsbury, 1995.
Daniel Goleman, Working with Emotional Intelligence, Bantam, 2000.
LIKE 79.
Dave Gray, Sunni Brown, James Macanufo, Gamestorming: A Playbook for
Innovators, Rulebreakers, and Changemakers, O’Reilly Media, 2010.
David Allen, Getting Things Done : The Art of Free-Stress Productivity,
Penguin 2002.
David Gage, The Partnership Charter : How To Start Out Right With Your
New Business Partnership, Basic Books, 2004.
David Ogilvy, Ogilvy On Advertising, Vintage Books, 1997. LIKE 62.
Don Peppers, Martha Rogers, Le one to one, Editions d’Organisation, 1999.
LIKE 45.
Doug Hall, Jump Start Your Business Brain, Clerisy Press, 2005.
Eliyahu M. Goldratt, Jeff Cox, The Goal, North River, 2004.
Ernest Malmesten, Boo Hoo : A Dot Com Story, Arrow, 2002.
Fernand Braudel, La dynamique du capitalisme, Flammarion, 2008. LIKE
86.
Gary Hammel, Leading the Revolution : How to Thrive in Turbulent Times
by Making Innovation a Way of Life, Plume, 2002.
Gary Hamel, C. K. Prahalad, Competing for the Future, Harvard Business
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Gary Klein, The Power of Intuition : How to Use Your Gut Feelings to
Make Better Decisions at Work, Crown Business 2004.
Geoffrey Moore, Crossing the Chasm : Marketing and Selling Technology
Products to Mainstream Customers, HarperBusiness, 2002. LIKE 52.
Geoffrey Moore, Living on the Fault Line : Managing for Shareholder
Value in the Age of the Internet, Haperbusiness, 2000. LIKE 78.
George Gilder, Life After Television, W. Norton & Company, 1994.
Gordon MacKenzie, Orbiting the Giant Hairball : A Corporate Fool’s
Guide to Surviving with Grace, Viking Adult, 1998.
Guy Kawasaki, The Art of the Start : The Time-Tested, Battle-Hardened
Guide for Anyone Starting Anything, Portfolio Hardcover, 2004.
Henry Petroski, To Engineer is Human : The Role of Failure in Successful
Design, Vintage, 1992.
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Comment tirer parti efficacement de l’e-pub, Dunod, 1999.
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Pratique du Marketing, Dalloz, 2003. LIKE 75.
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Work Forever, Vermilion London, 2010. LIKE 51.
Jay Conrad Levinson, Guerrilla Marketing : Easy and Inexpensive
Strategies for Making Big Profits from Your Small Business, Houghton
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Generation, Vanguard Press, 2011. LIKE 90.
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Jeffrey J. Fox, How to Become a Rainmake : The Rules for Getting and
Keeping Customers and Clients, Hyperion, 2000.
Jeffrey Pfeffer, Robert I. Sutton, The Knowing-Doing Gap : How Smart
Companies Turn Knowledge into Action, Harvard Business School Press,
2000.
Jim Collins, Good to Great : Why Some Companies Make the Leap... and
Others Don’t, HarperCollins, 2001.
Jogn Hagel III, Arthur G. Armstrong, Net Gain : Expanding Markets
Through Virtual Communities, Harvard Business School Press, 1998. LIKE
77.
John Maxwell, Zig Ziglar, The Twenty One Irrefutable Laws of Leadership,
Thomas Nelson, 1998. LIKE 79.
Jonas Ridderstroale, Kjell Nordstrom, Karaoke Capitalism : Daring to Be
Different in a Copycat World, Praeger, 2005.
Jonas Ridderstroale, Kjell Nordstrom, Funky Business Forever : How to
Enjoy Capitalism, Financial Time Management, 2008. LIKE 36.
Kevin Kelly, Out of Control : The New Biology of Machines, Social
Systems, & the Economic World, Basic Books, 1995.
Lao-tseu et Liou Kia-hway, Tao-tö king, Gallimard, 2002. LIKE 98.
Lester Wunderman, Being Direct : Making Advertising Pay, Random
House, 1997. LIKE 60.
Larry Bossidy, Ram Charan, Charles Burck, Execution : The Discipline of
Getting Things Done, Crown Business, 2002.
Leonard Berry, Discovering the Soul of Service, Free Press, 1999.
Loïc Le Meur, Laurence Beauvais, Blogs pour les pros, Dunod, 2005.
LIKE 71.
Malcolm Gladwell, The Tipping Point : How Little Things Can Make a Big
Difference, Back Bay Books, 2005. LIKE 51.
Marcus Buckingham, Curt Coffman, First, Break all the Rules : What the
World’s Greatest Managers Do Differently, Simon & Schuster, 1999. LIKE
64.
Cette liste est interminable : c’est incroyable le nombre de livres qui
s’écrivent sur le digital alors que le Web devait prétendument les faire
disparaître !
Mary Modahl, Now or Never : How Companies Must Change Today to Win
the Battle for Internet Consumers, Forrester Research et HarperCollins
Publishers, 1999. LIKE 67.
Mel Ziegler, Patricia Ziegler, Bill Rosenzweig, The Republic of Tea : The
Story of the Creation of a Business, as Told Through the Personal Letters of
Its Founders, Crown Business, 1994.
Meredith Beldin, Changing the way we work, Butterworth-Heinemann,
1999.
Michael E. Gerber, The E-Myth Revisited : Why Most Small Businesses
Don’t Work and What to Do About It, Harper Business, 2015.
Michael Hammer, The Agenda : What Every Business Must Do to Dominate
the Decade, Three Rivers Press, 2003. LIKE 78
Michael J. Mauboussin, More Than You Know : Finding Financial Wisdom
in Unconventional Places, Edinburg University Press, 2007.
Michael Michalko, Thinkertoys : A Handbook of Creative-Thinking
Techniques, Ten Speed Press, 2006.
Musashi Miyamoto, Le traité des cinq roues : Gorin-no-sho, Albin Michel,
1991. LIKE 62.
Nancy Koehn, Brand New : How Entrepreneurs Earned Consumer’s Trust
From Wedgwood to Dell, Harvard Business School Press, 2001.
Naomi Klein, No Logo, la tyrannie des marques, Babel, 2002. LIKE 59.
Natori Masazumi, Bernard Bordas, Axel Mazuer Braudel, Shôninki :
L’authentique manuel des ninjas, Albin Michel Spiritualités, 2009. LIKE
46.
Pablo Picasso, Correspondences Picasso Stein, Gallimard, 2005. LIKE 86.
Paul Hawken, Growing a Business, Simon & Schuster, 1988.
Paul R. Lawrence and Nitin Nohria, Driven : How Human Nature Shapes
Our Choices, Jossey Bass, 1988.
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LIKE 70.
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Next Fifty Years of Computing, Springer, 1998.
Peter Drucker, The Effective Executive : The Definitive Guide to Getting the
Right Things Done, Harper, 2006.
Peter Drucker, The Essential Drucker : The Best of Sixty Years of Peter
Drucker’s Essential Writings on Management, Harper, 2008. LIKE 91.
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Information Transforms Strategy, Harvard Business School Press, 2000.
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the Way Businesses Talk with Customers, Wiley, 2006.
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Insights and Leadership Secrets of the Legendary CEO, McGraw-Hill,
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Corporate Revolution, McGraw-Hill, 1999. LIKE 49.
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Tomorrow, Harvard Business School Press, 2001.
Seth Godin, Permission Marketing : Turning Strangers Into Friends And
Friends Into Customers, Seth Godin, Simon & Schuster, 1999. LIKE 58.
Seth Godin, Purple Cow : Transform Your Businss by Being Remarkable,
Penguin Books Lt., 2005. LIKE 54.
Scott Bedbury avec Stephen Fenichell, A New Brand World : Eight
Principles for Achieving Brand Leadership in the Twenty-First Century,
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Greatest Turnaround King, AMACOM, 1999. LIKE 62.
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Polygons, Design Studio Press, 2007.
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3D Total.com, Digital Art Masters : vol. 2, Focal Press, 2007.
Vance Oakley Packard, Mark Crispin Miller, The Hidden Persuaders, Ig
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Winston Churchill, Never Give In ! Speeches, Hyperion, 2004.
W. Chan Kim, Renee Mauborgne, Blue Ocean Strategy: How to Create
Uncontested Market Space and Make Competition Irrelevant, Harvard
Business Press, 2005.
Yann Gourvennec, Hervé Kabla, Les médias sociaux expliqués à mon boss -
Par ceux qui en font et pour ceux qui aimeraient (mieux) en faire, Media
ACES, 2011.
Zig Ziglar, Secrets of Closing the Sale, Revell, 2004.

Presse
Il serait tout simplement fou d’imaginer pourvoir citer tous les articles de
presse qui ont alimenté la réflexion dont Les dessous du Web est
l’aboutissement. A défaut, voici une sélection de quelques articles
fondateurs.
Eric Raymond, “The Cathedral & the Bazaar”, www.catb.org, 21 mai 1997.
Michael Porter, “Strategy and the Internet”, Harvard Business Review,
Mars 2001.
Tom Glocer, “The two-way pipe – facing the challenge of the new content
creators”, Tom Glocer’s Blog, 11 octobre 2006.
Tim O’Reilly, “What is Web 2.0”, Oreillynet.com, 9 septembre 2005.
Et bien évidemment les meilleurs articles de FrenchWeb.
Playlist
Ce livre s’est écrit au son de morceaux de musique dont voici la liste :

Hanuman, 11:11, Rodrigo y Gabriela

Bank of the River, Big up, Dean Fraser

Rockit, The best of Hearby Hancock : The Hits !, Hearbie Hancock

Black Diamonds, Alive!, Kiss

Kiss, Love or money, Prince and the Revolution.

Louie Louie, American Caesar, Iggy Pop

China Girl, Let’s Dance, David Bowie

The man who sold the world, Unplugged in New York, Nirvana

Alleluia, Grace, Jeff Buckley

Bang Bang, How does that grab you, Nancy Sinatra

Jolene, Under great white northern lights, White Stripes

Joan Baez, Joan Baez Live in Europe, Blowin’ in the Wind

Rihanna, Loud, Man down

Antony & The Johnsons, I am a bird now, Fistfull of love (live)

Overkill, Motörhead

Little talks, Of monster and the men

Overkill, Motörhead
L’auteur
Parce qu’un site web vaut parfois mieux qu’un long discours…
www.jouvenot.com
Et qu’il faut bien connaître l’adresse e-mail de l’auteur d’un livre pour
pouvoir lui écrire…
bertrand@lesdessousduweb.fr
N’hésitez pas.
Crédit
Traduction : Yellow Iris

Promotion : Les Brigades du Marketing


lesbrigadesdumarketing.com
FrenchWeb
frenchweb.fr

Couverture(s) et conception : Christophe Dussoliet

Edition : Les Éditions KAWA


Directeur de publication : Xavier WARGNIER
Retrouvez moi sur : www.facebook.com/xavierwargnier
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Couverture : Christophe Dussoliet


Photo de couverture : Guillaume Monsigny & Amélie Monsigny

Imprimé en France par SOBOOK,


45 rue Rollin 59100 ROUBAIX - Avril 2013
ISBN : 978-2-918866-60-2
EAN numérique 9782918866664
Fabrication numérique : Archicol, avril 2013
Dépôt légal : Avril 2013

Editions Kawa
88, Chemin des Perrières - 74290 Bluffy - France
Conception graphique et réalisation : Christophe Dussoliet
www.dussoliet-creation.com

Retrouvez l’ensemble de la collection des ouvrages édités


par l’agence KAWA sur :
www.editions-kawa.com
1. Le livre Le temps des cathédrales de George Duby
développe longuement ce point. Le lecteur curieux
pourra s’y reporter.
2. D’après l’ouvrage Pour un autre Moyen-âge, de
Charles Le Goff.
3. Le livre The Mafia Manager, d’un auteur qui n’a
pas voulu avoir de problème et qui l’a signé d’un
simple V., part de ce constat.
4. Jules Michelet dans, Le peuple.
5. 1984 de George Orwell.
6. Carl Gustav Jung a exposé, développé et utilisé ce
concept dans trois de ses ouvrages :
Métamorphoses de l’âme et se symboles,
Psychologie du transfert, L’homme a la découverte
de son âme.
7. John Maynard Keynes a notamment ébauché ce
thème dans sa théorie générale. Théorie Générale
de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie.
8. Jean-Jacques Rousseau décrit très bien ces
mutations dans son Discours sur l’origine de
l’inégalité parmi les hommes. Nehru est plus
connu comme premier ministre du parti du
Congrès Indien que comme auteur en France. Ses
Lettres à ma fille, qu’il écrivit en prison, sont
pourtant très éclairantes sur ce point. Et puis,
Claude Levi Strauss, bien sûr, évoque le
néolithique dans Race et histoire.
9. Elie Faure, le grand historien de l’art, présente
dans son Histoire de l’Art, MichelAnge comme
celui qui se disputa le titre de maître de la peinture
du seizième siècle avec Raphaël et Pablo Picasso
comme le maître de la peinture du vingtième
siècle, talonné de près par Henri Matisse.
10. D’après Business Masterminds Charles Handy de
Robert Heller.
11. Arnold Toynbee, La grande aventure de
l’humanité.
12. D’après Le Matin des magiciens de Louis
Pauwels.
13. L’expression a été popularisée par un article de
Garrett Hardin paru dans Science en 1968, intitulé
The Tragedy of the Commons, le 13 décembre
1968.
14. Sur ce point, le lecteur pourra se reporter à
l’ouvrage Mes expériences de vérité du Mahatma
Gandhi, à la célèbre Autobiographie de Nehru,
ainsi qu’à la biographie que Romain Rolland a
consacrée à Gandhi.
15. Nous ne nous rappelons plus duquel de ces deux
livres d’Alexis de Tocqueville : De la Démocratie
en Amérique ou Souvenirs, cette citation provient.
Mais c’est de l’un des deux, nous en sommes
certains ; -)
16. Ici, notre source a été le Petit Robert par Paul
Robert, sous la direction d’Alain Rey, 1973, de la
bibliothèque familiale.
17. D’après Le secret des anciens maîtres Taïchi de
Dr. Yang, Jwing-Ming.
18. Fernand Braudel, Civilisation matérielle,
économie et capitalisme, XVème – XVIIIème
siècles, Tome 1, Les structures du quotidien,
Armand Colins, 2001.
19. Ibid. 126.
20. Joseph Schumpeter, Capitalisme, socialisme et
démocratie, Payot, 1990.
21. Source : L’aide d’Adobe Dreamwaver CS4, 2011,
trouvé en ligne via Google.com.
22. Honoré de Balzac, Sarrazine mais également
l’essai S/Z : Essai sur Sarrazine d’Honoré de
Balzac, de Roland Barthes.
23. La légende d’Hiram a été rapportée d’Orient par
le poète et romancier français Gérard de Nerval,
suite à son célèbre Voyage en Orient. Son
originalité tient à ce que la première partie de la
légende correspond parfaitement à des faits relatés
dans l’Ancien Testament et que la seconde semble
être une digression venue d’Orient.
24. D’après Mode & Internet : le marketing épinglé
de Bertrand Jouvenot, mais surtout d’après le
Traité d’efficacité de François Julien.
25. Marketing Management de Philip Kotler.
26. Marketing Moves de Philip Kotler.
27. Traité des cinq roues de Miyamoto Musashi.
28. Certains pensent aussi que c’est en hommage à
Alan Turing, ou en référence à la pomme d’Isaac
Newton (d’ailleurs, le logo initial de la firme
représentait la pomme, l’arbre et Newton en train
de dormir dessous). Pendant de nombreuses
années, lors des expositions Apple, des pommes
Granny Smith étaient gratuitement mises à
disposition des visiteurs (Source : Wikipedia).
29. Dictionnaire des symboles de Jean Chevalier et
Alain Gheerbrant.
30. Ibid. 21. Et bien oui, on recycle un peu…
31. Héraclite, Fragments.
32. Le site Amazon.com propose 558 170 livres en
réponse à la simple requête « Marketing », dans la
catégorie livres. Si l’on considère que les livres ont
une épaisseur moyenne de 3 centimètres, nous
pouvons déduire que l’ensemble de ces 558 170
livres mis cote à cote, s’étendent sur 1 674 510 cm,
soit 16 754 mètres, soit 16,74 km.

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