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MINISTÈRE DE L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR RÉPUBLIQUE DE CÔTE D’IVOIRE

ET DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE Union-Discipline-Travail

Institut International Polytechnique


Des Élites d’Abidjan

COMMUNICATION
DE CRISE
(LICENCE 2)

Chargé de Cours
Prof. Jan-Clodde Delaunay OULAI

1
INTRODUCTION
Toute entreprise, société, association ou organisation est confrontée un
jour ou l'autre à une situation dite de crise. La communication efficace devient
alors un procédé fondamental de gestion et de résolution. Chaque cas de crise
est unique par sa situation et ses circonstances. L’enjeu est donc d’opter pour
une réflexion, voire un cadre d’action afin d’estomper la survenue d’une crise
ou d’agir, de préférence, par un plan d’action préventive qui prend en charge
l’étude du risque pour minimiser les dégâts irréversibles d’une crise avant ou
après sa survenue. Quelles sont donc les attitudes recommandées qui nous
permettent de gérer au mieux une crise au sein d’une organisation ou d’une
entreprise? L’objectif de notre cours est de repérer les règles majeures
capables de cerner l’entourage d’une crise ainsi que les procédés permettant
son désamortissement.
Les crises ont existé de tout temps. Si le sujet reste d’actualité, c’est
peut-être en raison de la rapidité de propagation des informations, rendue
possible par la radio et la télévision, puis Internet. La mondialisation via la
globalisation des marchés et la présence quasi mondiale des grandes
entreprises rendent tous les acteurs extrêmement réactifs aux évènements,
qu’il s’agisse de clients professionnels, du grand public, des salariés et
partenaires, des actionnaires ou des pouvoirs publics. Les pourvoyeurs
d’informations et prescripteurs que sont les journalistes jouent évidemment
un rôle central dans la communication de crise ;
Au-delà de leur responsabilité d’informateurs, ceux-ci n’oublient pas
leur envie de faire mieux vendre leurs différents supports et leur propre
ambition de notoriété personnelle. C’est pourquoi les entreprises doivent gérer
la communication, nécessaire pendant la crise, quelle que soit son origine,
mais surtout en amont de celle-ci, afin de pouvoir anticiper les réactions de
différents interlocuteurs.
Née, il y a 20 ans, la communication de crise a trouvé ses fondamentaux
à une époque où la communication était essentiellement balistique, faite à
coup de communiqués de presse, de prises de parole, de messages clés, de
notes internes, d’interpellations et de passages savamment orchestrés dans
les médias. Cette vision mécanique et brutale de la communication en

2
situation de crise est obsolète. La pluralité des acteurs confrontés à la crise,
des oppositions, le morcellement de l’opinion, la généralisation des réseaux
sociaux et des affrontements, l’observation même de la communication par
des commentateurs, exigent des réponses à la fois globales et d’une précision
extrême. Toute crise révèle un halo sensible, que la communication de crise «
massue » ne traite pas, où mal. Pour Thierry Libaert « La communication
d’entreprise serait bien inspirée par un retour aux fondements et à redécouvrir
la notion de relation dans ses aspects d’échanges, de concertation, voire même
de confrontation avec ses publics. La proximité est une condition nécessaire à
la crédibilité et aucune communication ne résoudra le problème de la
distanciation sans un dialogue direct. » Eyun-Jung Ki et Kenon A Brown de
l’Université d'Alabama, appuient cette vision en citant une étude de Brown &
White (2011) : « gérer et entretenir des relations positives avec les publics est
plus important que d’utiliser une réponse stratégique à la crise. »

I. LE CONCEPT DE CRISE : DÉFINITION ET ÉTYMOLOGIE


Une crise, au sens général du terme, est définie comme une rupture
d’un équilibre. C’est un événement d’ordre personnel ou social se
caractérisant par un paroxysme des contradictions, incertitudes, instabilités
ou souffrances. Ces derniers peuvent conduire à des révoltes, à la violence ou
à la banqueroute.
Étymologiquement le terme «crise» vient du mot grec krisis, qui signifie
«décider ou distinguer» c’est-à-dire une réponse à une situation particulière.
En effet le terme crise est polysémique, il est employé dans une
multitude de domaines : économique, politique, institutionnel, juridique,
éthique ou social. Même si le concept de crise est un concept ambigu, selon
Ogrizek, Guillery, des spécificités lui sont propres. Dans le langage médical
par exemple, la crise, concept hippocratique, désignait l’état décisif d’une
maladie ou de son état critique. Le terme se serait par la suite, étendu à
d’autres domaines. A. Bejin et E. Morin constatent que « dans la langue
religieuse de la Grèce ancienne, le terme Krisis signifiait : interprétation, choix;
dans le vocabulaire juridique, il exprimait l’idée d’un jugement, d’une décision
ne résultant pas mécaniquement des preuves. Rapporté à la tragédie grecque,

3
le mot désignait un événement qui, tranchant et jugeant, impliquait, à la fois,
tout le passé et tout l’avenir de l’action dont il marquait le cours.
Pour la médecine hippocratique, le vocable dénotait un changement subi dans
l’état du malade, repéré dans le temps et dans l’espace».
D’après Hermann une crise est définie comme « une situation qui
menace les buts essentiels des unités de prise de décision, réduit le laps de
temps disponible pour la prise de décision, et dont l'occurrence surprend les
responsables ». Elle affecte physiquement un système dans son ensemble et
met à l’épreuve les principes fondamentaux des membres de l’organisation.
Dans ce sens, Hermann repère trois caractéristiques à savoir :
1. La mise en péril des objectifs premiers de l’organisation : renvoi à
l’événement de la crise. En état de crise, les objectifs premiers de l’organisation
sont perturbés. Un accident ne se transforme en crise que lorsqu’il est
ingérable.
2. Le retard pour répondre à temps : le manque de temps opportun pour
formuler une réponse est un point fondamental. La gravité de la situation
implique une réaction immédiate. Dans ce cas-là, le temps de réflexion est
omis car l’état d’urgence exige la rapidité et l’efficacité. En effet, la pression
temporelle ajoute une déstabilisation du fonctionnement normal de
l’organisation.
3. La surprise ou le coup de théâtre : la phase inattendue et mystérieuse
pour les décideurs. Cette dernière caractéristique concerne la dimension
inattendue de la crise. P. Lagadec ajoute à l’effet de surprise, la notion
d’incertitude et d’inconnu : « L’insuffisance d’information et de connaissance
est une constante dans toutes les perturbations ; mais ici, encore une fois, on
sort des limites habituelles. On ne dispose ni d’estimations, ni de moyens de
mesure, ni de base d’interprétation (physique, toxicologique, épidémiologie, etc.),
qu’il s’agisse des causes, des effets immédiats, des effets à long terme… On ne
sait pas comment on pourrait savoir. Plus que l’incertitude, on se heurte à
l’inconnu. ». Cet inconnu inévitable entraine systématiquement les premiers
acteurs de l’entreprise dans une peur dite sociale, ils seront confrontés à une
charge émotionnelle intense émanant du sentiment d’impuissance,
d’imperfection, d’inefficacité, d’urgence, d’incertitude, d’angoisse et de

4
culpabilité qui se propagera au fur et à mesure à l’ensemble des individus
touché par la crise en question. D’autant plus l’omniprésence des médias,
puissant instrument de pouvoir, alimente les peurs et craintes permanentes
des acteurs sociaux. Vu l’ampleur des médias et l’évolution des terrains de
crise, de nouvelles caractéristiques émergent afin de mieux cerner les
définitions.
Libaer introduit des paramètres qui renvoient à l’image même de
l’organisation. Il définit la crise comme étant un événement perturbateur et
inattendu mettant en péril la réputation et le fonctionnement d’une
organisation. Il met en évidence la question de la réputation et de l’image des
organisations.
La réputation d’une organisation peut être fragilisée par des causes
multiples, comme la propagation d’une rumeur par exemple. Kapferer (1987)
la définie ainsi : «Nous appellerons donc rumeur l’émergence et la circulation
dans le corps social d’informations soit non encore confirmées publiquement par
des sources officielles, soit démenties par celle-ci». La réputation est
strictement liée à l’image de l’entreprise, mais la rumeur, son ennemie jurée,
peut parfois être l’origine même du déclenchement d’une crise. Face à une
telle situation, l'entreprise peut reconnaître le problème, faire diversion ou
obstruction. Trois stratégies plus ou moins risquées.

II. D’UN PUBLIC AUX PUBLICS ACTEURS DE LA COM. DE CRISE


Il n’y a plus un public, mais des publics devenus acteurs à part entière
de la communication de crise. Si le « two-step flow » (1955 – Katz et Lazarsfeld)
ne peut pas être écarté, notamment dans la logique médiatique, il n’en
demeure pas moins la notion médiatique change de paradigme : il ne suffit
plus de s’adresser aux médias, de convaincre des leaders d’opinion, pour
qu’une communication de crise soit effective. Aujourd’hui, le contrat
communicationnel a muté dans une co-construction où chacun est acteur de
la communication. Souvent, cette co-construction est assimilée à l’usage des
réseaux sociaux : mais ce serait faire abstraction de l’horizontalité de la société
qui accompagne la révolution numérique. Le « two-step flow » qui fêtera ses 70
ans en 2025, correspondait à une époque où l’instituteur, le curé, le

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journaliste et l’ingénieur étaient respectés : dans la société liquide dans
laquelle les liens se font et se défont décrite par le sociologue Zygmunt
Bauman, il y a autant de leaders d’opinion que de groupes sociaux et de sujets,
où les alliances se font et se défont, au gré de la satisfaction immédiate
d’objectifs de plus en plus individualisés et d’un planning instable.
A cela, il faut ajouter le discrédit qui pèse sur la communication : toute action
identifiée comme un « jeu de la communication » est immédiatement rejetée
par les publics. Ainsi, les « éléments de langage », le media training, le
communiqué de presse ne suffisent plus à rendre audible un message. La
structure du message « Empathie / Faits / Actions / Rendez-vous » vole en
éclat. Ne serait-ce parce que une organisation en crise manque souvent et
singulièrement de légitimité pour exprimer de l’empathie pour les victimes.
Cette légitimité ne se trouve plus dans des mots, mais dans des actes liés à la
gestion de la crise et la relation avec les personnes impactées par la crise.

III. LA CONFIANCE : BÉNÉFICE D’UNE RÉPONSE CRISIQUE


RATIONNELLE
Les publics sont de plus en plus méfiants envers les entreprises, les
institutions et les personnalités. N’ayant plus à faire à une opinion, mais à
des opinions, il appartient aux services de communication de s’adresser
spécifiquement à ces publics dans une relation bilatérale : « Nous partons d’un
postulat simple. La communication de crise se double désormais d’un nouvel
obstacle : lever l’incrédulité des publics. Cette ambition, nous la retrouvons dans
les principes des relations publiques. Plutôt qu’une communication de masse ou
médiatique, la communication de crise devra s’adapter de plus en plus finement
aux différents publics, parfaitement différenciés par strates - simples publics,
parties prenantes, alliés et adversaires - et mettre fin à l’idée d’une réponse
unique dans un monde unique. »1 La plupart des observateurs qui ne traitent
pas de « crises à chaud », ne voient que les crises médiatisées, connues du
grand public et, finalement, commentent les crises auxquels ils ont accès ou
la partie visible d’un iceberg qui recèle en général un travail relationnel bien

1
« La communication de crise est morte, vivent les relations publiques de crise ! », Didier Heiderich et Natalie
Maroun, Observatoire Géostratégique de l'information, mai 2013

6
plus intense que quelques tweets ou interviews dans la presse : c’est pourquoi
la plupart s’égarent, évoquent uniquement des problèmes de réputation, dont
très souvent ils donnent une définition floue, lorsqu’elle n’est pas baroque,
jusqu’à mettre en avant des principes éthiques, sans savoir que l’éthique
possède autant d’approches que de publics : l’éthique désigne la façon dont il
faut se comporter dans un groupe social, ce qui est relatif à la culture du
groupe social, ce qui interdit toute vision homogène ou statutaire. Ainsi, la
question de la communication de crise ne peut reposer sur le postulat de la
réputation, et en ceci la « e-Reputation », terminologie qui influence nombre
d’acteurs et par conséquent des principes qu’ils édictent, devrait laisser une
place à la notion complémentaire et indispensable de « e-Trust », de
l’établissement de la confiance, pour ne pas se tromper d’objectif.
Le travail qui permet de « verrouiller les objectifs » de communication de
crise, sur la base de la confiance, procède avant tout d’intenses transactions
avec les différents publics, de relations publiques de crise (RP-crise) qui
englobent une part de communication de crise. Les relations publiques de
crise, pour lever l’incrédulité des publics, nécessitent de dépasser l’idée
erronée d’une réputation qui pourrait être globalisée, pour lui substituer la
réputation perçue par un groupe social, afin d’atteindre les objectifs de
communication : « l’identification sociale favorise le comportement coopératif en
situation de dilemme, ce qui ne vaut que pour le groupe d’appartenance. »2 Etre
accepté dans un groupe social, lever l’incrédulité, construire de la confiance
passe d’abord et avant tout par la relation. Dans ce cadre, la réputation ou l’e-
Réputation de crise sont des principes réducteurs, qui limitent le contrat
communicationnel à une opinion positive (évaluation sociale), alors que c’est
un préalable nécessaire mais insuffisant pour établir la confiance. Et obtenir
la confiance est l’étape nécessaire pour lever les barrières de l’incrédulité, créer
les conditions de la confiance, obtenir un « comportement coopératif » et
remplir les objectifs fixés par la gestion de la crise : alerter, protéger,
reconstruire et éviter le risque de normalisation externe (perte de marché,
perte d’investisseurs, perte d’électeurs, perte de leadership de la direction,…).

2
« Social Dilemmas », Robyn M. Dawes, David M. Messick, INTERNATIONAL JOURNAL OF PSYCHOLOGY, 2000,
35 (2), 111± 116

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IV. LA DIVERSITÉ DES SITUATIONS DE CRISE
Si les crises sont plus d’actualité aujourd’hui que par le passé, c’est
probablement parce qu’elles sont plus médiatisées, mais aussi parce qu’il y a
désormais plus de facteurs qui peuvent déclencher une crise. Il convient dès
lors d’en proposer une typologie en fonction des différentes origines possibles.

IV.1. Typologie des différentes crises


De nombreuses définitions de la crise ont été proposées par les
spécialistes de la question. Pour Christophe Roux-Dufor, « la crise est un
processus qui, sous l’effet d’un événement déclencheur, met en éveil une série
de dysfonctionnement ». Pour Thierry Libaert, « la crise est un événement
inattendu mettant en péril la réputation et le fonctionnement d’une
organisation ». Enfin, pour Patrick Lagadec, « la crise est une situation où de
multiples organisations, aux prises avec des problèmes critiques, soumises à de
fortes pressions externes et d’âpres tensions internes, se trouvent brutalement
et pour une longue durée sur le devant de la scène, projetées ainsi les unes
contre les autres […] Le tout dans une communication de masse, c’est-à-dire en
direct avec l’assurance de faire la ‘’une’’ des informations radiodiffusées,
télévisées, écrites sur une longue période ». Force est de constater que de
nombreuses « crises » peuvent donc être évitées si elles ne sortent pas de
l’entreprise, c’est-à-dire si celle-ci parvient à trouver une solution interne,
sans que l’information parvienne à d’autres acteurs que les salariés. Plusieurs
approches permettent de dresser une typologie des crises potentielles selon
leur nature :
Crises d’origine financière dues à des problèmes de gestion ou à des
problèmes extérieurs provenant d’un nouveau taux de change de
devises ou de l’effondrement d’un client important ;
Crises d’origine humaine à partir du décès brutal d’un dirigeant ou de
sa mise en examen ;
Crises d’origine sociale à partir de grèves consécutives à un plan
social, une délocalisation, un changement de statut ou de conditions de
travail ;

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Crises d’origine externe, comme celles provoquées par un événement
brutal par exemple, une destruction majeure suite à un acte de
terrorisme ou à une catastrophe naturelle. (Cf. Focus 1.)

La perception par le public et par les médias ne sera jamais la même


selon que la cause du déclenchement est d’origine interne ou externe à
l’entreprise. Dans le traitement de la crise, les techniques à employer pourront
être les mêmes, mais l’entreprise sera souvent mieux comprise lorsque
l’origine est clairement extérieure à l’entreprise. C’est pourquoi la typologie la
plus pertinente est celle qui part de l’origine de la crise, interne ou externe.
En s’appuyant sur les travaux des spécialistes de la communication de
crise, il est possible de proposer la typologie suivante, séparant les crises
endogènes, d’origine interne, et les crises exogènes, d’origine externe (Cf.
Tableau 1).

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Tableau 1 : Typologie des crises

ENDOGÈNE EXOGÈNE
TECHNIQUE
- Défaut d’un produit/service - Défaut d’utilisation en dehors des conditions
- Accident dans les installations prévues
- Accident provoqué par un équipement ou - Accident intervenu chez un fournisseur, un
un produit vendu client industriel ou un distributeur
- Panne informatique - Destruction importante de l’environnement :
inondations, tempêtes…
- Dysfonctionnement informatique dû à un
virus extérieur
ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE
- Faillite ou cessation de paiements - Chute du cours boursier suite à une
- Mauvaises performance économiques tendance générale, bulle Internet, nouvelles
technologies…
- Effondrement ou disparition d’un client
important
- OPA hostile
- Boycott par un pays étranger
- Chute de la devise d’un pays qui est un gros
client
COMMERCIALE OU MARKETING
- Rejet par le public d’un produit ou d’un - Apparition d’un produit concurrent de
projet nouveau substitution
- Perception de contradictions entre une - Rejet irrationnel d’une campagne de
nouvelle action publicitaire et les messages communication ou d’un repositionnement
diffusés antérieurement - Boycott par une association de
consommateurs ou d’usagers
- Rumeurs négatives sur un produit ou sur
l’entreprise
SOCIALE
- Grève interne du personnel - Grève chez un partenaire externe
- Sabotage interne : altération de produits… - Sabotage, grève chez un client ou
- Défaillance organisationnelle fournisseur
- Accidents du travail et maladies de salariés - Défaillance organisationnelle d’un
- Comportements déviants, harcèlement partenaire
moral ou sexuel
LÉGALE OU ÉTHIQUE
- Fraude interne de salariés - Modification brutale de normes
- Fraude d’un dirigeant - Mise en examen non justifiée d’un cadre ou
- Activités illégales d’un dirigeant
- Pratiques inacceptables aux yeux de la
société
INFORMATIONNELLE
- Fuites d’informations confidentielles - Espionnage industriel
- Passage d’un dirigeant à la concurrence - Renversement d’une alliance par un
fournisseur ou un client important
ORGANISATIONNELLE OU POLITIQUE
- Décès d’un dirigeant - Enlèvement d’un dirigeant ou attentat
- Rumeur interne contre lui
- Rumeur externe, diffamation
Source : Adapté de Roux-Dufort, C., Gérer et décider en situation de crise, Dunod, 2è édition,
2003

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IV.2. Rapport de forces entreprises/médias pendant la crise
En dehors d’une crise, un rapport de forces en faveur de
l’entreprise : Dans le contexte habituel, les journalistes ne sont
pas fondamentalement demandeurs d’informations. C’est
l’entreprise qui prend l’initiative de diffuser des informations et
fait e sorte que certains éléments soient repris par la presse
générale ou par la presse spécialisée. Le calendrier, en particulier,
est choisi par l’entreprise en fonction des décisions internes
concernant le lancement d’un nouveau produit ou projet, en
fonction des événements civils prévisibles, comme les fêtes de fin
d’année ou la tenue d’un salon de référence. Le rapport de forces
est donc plutôt favorable à l’entreprise ;

Pendant la crise, un rapport de forces en faveur des médias :


La crise, par définition, n’est pas prévisible. Le calendrier n’est
donc pas choisi, et le moment pour communiquer est subi par
l’entreprise qui doit répondre. Les médias sont alors non
seulement en attente de réponses, mais ils risquent d’amplifier
des informations non contrôlées et parfois non vérifiées, prenant
même le risque de manier l’exagération pour les supports qui sont
en mal de sensationnel, à la recherche de titres accrocheurs pour
faire grimper les ventes de leur titre. Dans le meilleur des cas, un
journaliste tempéré harcèlera l’entreprise pour obtenir des
éléments de réponse susceptibles de satisfaire les attentes de ses
lecteurs ou auditeurs. Cette demande pressante d’informations
sera d’autant plus forte que les médias auront l’impression que
l’entreprise ne sait pas comment répondre, surtout si celle-ci
donne l’impression de vouloir dissimuler des éléments
d’informations. Dans le contexte d’une crise, le rapport de forces
est donc déplacé : il est en faveur des médias, et l’on saisit toute
l’importance qu’il y a à savoir instaurer une bonne
communication de crise.

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EXERCICE 1 :
Pourquoi les crises quelle que soit leur origine sont-elles de plus en plus
médiatisées ? Quelles conséquences pour les entreprises ?

V. L’ANTICIPATION DE LA CRISE
Une fois que la crise a éclaté, l’entreprise doit répondre en direct, bien
souvent sans pouvoir prendre le recul nécessaire. C’est pourquoi il convient
de s’y préparer en essayant de prévoir ce qui peut se produire, en constituant
une cellule préventive de crise et en choisissant à l’avance le ou les porte-
parole. Mais il faut également bien analyser les médias pour repérer les
acteurs incontournables, essayer de connaitre nominativement les
journalistes les plus concernés et enfin savoir quelles sont leurs attentes.
L’idéal est de les inviter au sein de l’entreprise en dehors de tout problème,
pour leur montrer le souci de transparence de l’entreprise ainsi que les efforts
déployés pour diminuer les différents risques liés à son activité.

V.1. Communication interne et faiblesses


Avant d’envisager les actions préventives avec les médias, il convient
tout d’abord de se débarrasser d’une culture d’arrogance qui a longtemps
caractérisé les grands groupes. La nouvelle puissance des contre-pouvoirs, et
en particulier des médias, a montré aux dirigeants la vulnérabilité de toute
organisation, même leader sur son marché, face à l’imprévu. Sans basculer
pour autant dans une attitude paranoïaque, il est donc nécessaire de prévoir
l’imprévisible, au cas où tel événement improbable surviendrait tout de même.
En fonction du type de risques auxquels l’entreprise risque d’être confrontée,
une cellule de crise doit être constituée.

V.2. Cellule préventive de crise


Il revient à la direction générale de choisir ses membres avec pertinence,
en fonction des risques encourus et de la taille de l’entreprise. Ainsi, cette
cellule centrale doit être complétée par une cellule décentralisée dans les
principaux sites du groupe. Pour cette cellule, Véronique Sartre propose les
objectifs suivants :

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Recenser les crises potentielles ;
Etablir des scénarii de crises en utilisant deux méthodes de projection :
une approche rationnelle, une approche imaginative ;
Définir les signes avant-coureurs e la crise : les signes d’alerte et les
signes d’entrée en crise ;
Identifier les acteurs potentiels et le rôle qu’ils pourraient jouer :
opposants, appuis ou relais d’informations ;
Evaluer les risques d’occurrence et de gravité et mesurer leur rapport ;
Sélectionner un nombre de crises à fort potentiel d’occurrence ;
Mesurer le niveau de préparation de l’entreprise face aux crises
retenues ;
Proposer des mesures pour améliorer la prévention et la réaction ;
Evaluer la circulation des informations dans l’entreprise et prendre des
mesures visant l’amélioration de cette circulation si nécessaire ;
Choisir le ou les porte-parole de la cellule de crise et envisager des
formations à la prise de parole en public ;
Organiser des exercices de simulation et faire des retours d’expérience.

Cette cellule doit posséder un état d’esprit ouvert et constructif et être


capable d’imaginer « l’inimaginable ». Une fois ce travail accompli, elle peut se
transformer en cellule de veille et réactualiser les données en permanence.

V.3. Anticipation des attentes des médias


Parallèlement aux efforts entrepris en interne pour diminuer les risques
d’origine interne et pour prévoir une bonne organisation dans la réaction à
une crise éventuelle, il est nécessaire de mettre toutes les chances de son côté
afin de bénéficier de la bienveillance des médias. Pour cela, il faut tout d’abord
bien les connaitre.
Bien connaitre les acteurs et les cibles de communication
potentiels : mettre en place une veille médiatique est nécessaire pour
repérer quels médias sont les plus attentifs et les plus réactifs dans le
cas des crises auxquelles l’entreprise risque le plus d’être confrontée.
Cela commence par l’évaluation de son exposition à la médiatisation,

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très variable selon le secteur concerné. Dès lors qu’il s’agit de santé
publique ou de risques graves, comme ceux que peut provoquer l’énergie
d’origine nucléaire, tous les médias sont potentiellement concernés.
Dans les autres cas, il convient de repérer les titres de presse, et surtout
les journalistes, qui reprennent largement les événements
précédemment advenus. La tâche est difficile pour les entreprises
implantées dans de nombreux pays. Mais leur caractère multinational
accroît encore plus les exigences de la presse, d’où la nécessité
d’identifier à l’avance les titres les plus incontournables de chaque zone
géographique ;

Analyser le discours des médias et les préoccupations du public :


Connaitre les principaux supports de communication ne suffit pas. Le
responsable de la communication doit « éplucher » les principaux titres
pour connaître à l’avance leurs possibles réactions et doit par ailleurs
avoir une assez bonne vision de leur lectorat. Il faut analyser le discours
des médias, repérer la façon dont ils traitent les crises existantes et
similaires à celles répertoriées par la cellule préventive de crise. Les
problèmes survenus chez les concurrents sont particulièrement
intéressants à analyser : on s’intéressera aussi bien au contenu des
articles publiés qu’aux réactions de l’entreprise, au choix des arguments
mis en avant.

V.4. Création des liens de confiance avec les médias


Il convient pour être efficace, de procéder à l’analyse marketing des
principaux journalistes redoutés. Quelles sont leurs attentes, leurs besoins en
matière d’informations ? Il est certes difficile de réserver des scoops à tous ; il
convient toutefois de donner à chacun d’eux des informations personnalisées.
Le communiqué de presse (hors crise) constitue d’ailleurs le minimum auquel
il faille s’astreindre. Pour porter ses fruits, la démarche doit être
personnalisée : cela peut consister à inviter personnellement un journaliste à
visiter un site industriel, en le recevant sur place, en présence d’experts
internes qui auront les compétences requises pour répondre à ses

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interrogations précises. Proposer à un journaliste un entretien avec l’un des
dirigeants du groupe est en général une attention appréciée ; le journaliste est
flatté, il se sent pris au sérieux dans l’exercice de son travail. La fourniture de
dossiers appropriés et actualisés permet d’entretenir une relation de
confiance, quitte à expliquer la difficulté rencontrée pour démentir tel ou tel
risque. L’exclusivité d’une information transmise à un seul titre représente la
« cerise sur le gâteau », procédé délicat à exécuter si l’on ne veut pas se mettre
à dos les titres concurrents. Internet a bien sûr sa place dans la panoplie des
outils employés, mais il ne peut venir qu’en complément des relations
interpersonnelles tissées auparavant.
Tous ces moyens sont utiles pour tisser des relations préalables avec les
médias et leur transmettre une image favorable de l’entreprise. Mais quand la
crise survient, l’entreprise doit faire face simultanément à de nombreux
journalistes. Parmi eux, certains ne sont pas connus de l’entreprise et il faut
savoir traiter leurs différentes attentes.

V.5. Formation des porte-parole internes


C’est après avoir été sélectionnés en fonction de leurs compétences et
responsabilités, mais aussi de leur aptitude à communiquer de façon claire et
précise, que les porte-parole seront formés aux différents médias. En effet, on
ne répond pas de la même façon lors d’un entretien téléphonique ou face à
une caméra. Les principaux pièges sont présentés au porte-parole afin qu’il
puisse les déjouer, et les lignes directrices des réponses sont préparées par le
responsable de la communication, lequel doit avoir une vision transversale de
l’entreprise. Il doit obligatoirement s’exprimer dans un anglais parfait. Dans
les situations les plus graves, il est de plus en plus courant que ce soit le
président lui-même qui s’exprime, ce qui suppose qu’il ait été formé au
préalable à l’exercice d’une communication parfaite en direct. Le PDG de
Renault, à l’époque, en a fourni un bon exemple suite à la prétendue anomalie
de la Vel Satis. Il a eu l’opportunité de répondre en direct, pendant le journal
télévisé de 20 heures, où il était invité à l’occasion de la fin du salon de
l’automobile de Paris.

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EXERCICE 2 :
Quelles sont vos principales recommandations pour anticiper c’est-à-dire pour
faciliter la communication avec les différentes cibles lorsqu’une crise éclate ?

VI. LA GESTION DE LA COMMUNICATION DE CRISE EN CRISE


VI.1. L’étude du risque
La communication de crise a principalement pour rôle tout d’abord
d’éviter qu’un incident ou une situation sensible ne se transforme en crise.
Ensuite, si la crise survient malgré tout, il s’agit d’en limiter alors l’impact sur
l’activité de l’entreprise. Cela nécessite que la personne en charge de la
communication de crise soit non seulement parfaitement intégrée dans les
procédures de gestion du risque ″opérationnel″, mais également qu’elle agisse
avec vigilance. Elle surveille régulièrement l’environnement interne et externe
afin d’identifier le plus en amont possible des signes précurseurs de risques
potentiels.
Prévenir les situations de crise, c’est avant tout connaître les risques
induits par les activités de l’entreprise, surveiller les sujets sensibles et vérifier
que les procédures de gestion de crises sont efficaces. La prévention des crises
est l’affaire de tout le management de l’entreprise, elle implique une
sensibilisation des collaborateurs à l’analyse des risques de l’organisation
ainsi qu’une communication du risque qui permet de déterminer les objectifs
à atteindre. C’est la raison pour laquelle qu’il faut tout d’abord étudier le ou
les risques et les prévoir ou les anticiper, s’il le faut, pour mieux les gérer le
problème.
La communication du risque englobe tous les types de communication
servant à identifier, évaluer, apprécier et gérer les risques. La communication
du risque est par conséquent étroitement liée à la gestion des risques. Dans
les entreprises privées et pour les autorités publiques, la communication du
risque peut comprendre la médiation transparente de la gestion des risques
internes et fait alors partie des relations publiques. Mais la communication
du risque est différente de la communication en temps de crise. La
communication du risque comprend l’ensemble du processus de
communication dans toutes les phases de la gestion des risques alors que la

16
communication en temps de crise n’englobe que la communication pendant
un événement extraordinaire et inattendu, à savoir le risque survenu. La
communication en temps de crise vise à surmonter cet état extraordinaire et
à rétablir l’état normal et essaie de minimiser les dommages irréversibles pour
les institutions impliquées. Par contraste, la communication du risque essaie,
par l’information, le dialogue ou une participation active, de permettre aux
personnes concernées d’évaluer personnellement les risques respectifs en se
fondant sur les faits et d’augmenter ainsi l’aptitude des non-initiés à gérer les
risques. La communication du risque sert en outre à expliquer le
comportement préventif officiel.
Les observateurs qui ne gèrent pas de crises à chaud ne peuvent accéder
aux coulisses et ne peuvent pas savoir à quel point la relation avec les publics
prioritaires intervient dès le début de la crise, qu’un contrat
communicationnel est à instituer, qu’un planning viendra définir les étapes
de communication et les étapes destinées à établir la relation. En effet, la
plupart des crises ne concernent pas forcément un large public, et nombre
d’entre-elles se gèrent dans un espace confiné, les crises fortement
médiatisées ou dont la donne médiatique est l’axe principal de la gestion de la
communication de crise, restent une minorité : combien d’associations,
combien d’entreprises disparaissent chaque jour, combien de dirigeants
perdent leur leadership, combien de processus critiques sont rompus,
combien de produits critiques sont retirés du marché, sans pour autant
dépasser l’entrefilet dans la presse, ni provoquer de bad buzz ? Toutes les
crises n’impactent pas des produits « grand public » et certaines crises qui ont
nécessité de déployer des moyens gigantesques dans leur gestion, peuvent
rester inaperçue faute d’impact émotionnel, à l’image de la crise que Total a
géré à Elgin, suite à l’explosion survenue le 25 mars 20123.
Il faut également se souvenir que les pics médiatiques interviennent
généralement dans certaines phases d’une crise, principalement dans la
phase émotionnelle et dans les rebondissements. Et ce n’est pas parce qu’une
crise n’a plus d’impact médiatique qu’elle est pour autant terminée : les

3
« Total Elgin, pourquoi la crise n’a pas eu lieu », Didier Heiderich, Sécurité et Stratégie n°10, Dossier « Gestion
de crise », octobre 2012

17
administrés, les clients, les parties prenantes, le personnel, les autorités, le
politique, le contractant, le sous-traitant, la justice… continuent à être dans
la tourmente de la crise, alors que les médias classiques ou sociaux, seront
passés à d’autres crises. Le rôle de la communication de crise ne s’arrête pas
aux aspects médiatiques ou à la « eReputation » mais accompagne l’ensemble
des phases d’une crise, le plus souvent dans des aspects relationnels.

Quand une crise se déclenche, ce qui a normalement été repéré comme


probabilité d’occurrence plus ou moins forte est devenu une certitude. Il faut
rapidement s’adapter au nouveau contexte ainsi crée afin de pouvoir :
Réparer la panne ou la défaillance si elle relève de la compétence de
l’entreprise ;

Assurer une bonne communication autour de l’événement advenu,


c’est-à-dire mettre tout en œuvre pour diminuer les risques dégradation
de l’image de l’entreprise et, à l’inverse, pour essayer de tirer parti de
cette image. Il s’agira dès lors de choisir une stratégie de défense,
d’occuper le terrain médiatique et de répondre aux différentes
interrogations.

V.2. Mise en place d’une stratégie de défense


Lorsqu’une crise se déclenche, les dirigeants sont circonspects. Les
informations nécessaires sont souvent manquantes, et il est fréquent qu’on ne
connaisse pas réellement la cause du problème. De plus, un sentiment
d’injustice apparaît généralement lorsque la cause est externe, tandis que les
journalistes s’acharnent sur l’entreprise pour obtenir informations et
explications.

V.2.1. Les erreurs à éviter


Les réactions du management peuvent alors être très diverses,
allant du silence au refus de responsabilité :
La stratégie du silence présente un premier avantage, celui
d’éviter les réponses divergentes, voire contradictoire. Par ailleurs,

18
cette stratégie peut aussi être un pari sur la non-durée de la crise.
Elle est alors utilisée par des entreprises qui craignent de « jeter
de l’huile sur le feu » et de réactiver les critiques. Ainsi, lors de la
sortie du film de Morgan Spurlock, défavorable à Mc Donald’s, la
chaîne de fast-food a décidé de ne rien dire. L’absence de
polémique a permis de limiter la diffusion du message aux seuls
spectateurs du film, qui a été assez vite oublié ;

La stratégie du déni continu consiste à refuser toute implication


de l’entreprise dans la crise, en rejetant la responsabilité sur un
autre acteur-partenaire, client ou fournisseur. Ce choix s’avère
catastrophique la plupart du temps car l’attitude de l’entreprise
et de ses managers paraît alors arrogante, fondée sur un excès de
confiance. Par exemple, consécutivement au naufrage d’un
tanker, le pétrolier impliqué a rejeté toute responsabilité de sa
part en tentant d’incriminer le transporteur. Une telle attitude est
toujours très mal perçue par les différentes cibles : victimes,
médias…

V.2.2. Les stratégies gagnantes


Il s’agit fondamentalement d’adopter une attitude de collaboration
constructive, surtout avec les journalistes, les enquêteurs et les organismes
extérieurs de contrôle. Il faut éviter toute tentative de dissimulation ou de
secret, en prouvant que c’est la vérité qui est recherchée quelles que soient les
responsabilités qui se dégageront de l’enquête.
Une stratégie de transparence permet d’obtenir une
attitude neutre, voire bienveillante, de la part des médias
qui doivent proposer des analyses pour répondre aux
interrogations légitimes de leur public. Ainsi, ils doivent
fournir des éléments d’explication au fur et à mesure de
l’avancée de l’enquête, cette transparence devant être
nuancée lorsque la justice est saisie et qu’une procédure
judiciaire se traduit par des mises en examen ;

19
Une stratégie de précaution, voire de discrétion, se traduit
alors par la diffusion mesurée d’informations. En effet,
l’expérience montre que des déclarations hâtives,
notamment de la part d’un procureur ou d’un policier,
peuvent entraver le libre cours de la justice, qui a besoin de
s’exercer en dehors de l’urgence et des pressions diverses,
fussent-elles médiatiques.

V.2.3. Le fond et la forme des messages


Les deux dilemmes principaux sont : dire ou ne pas dire, et faut-
il dire tout de suite ou retarder la diffusion de l’information ?
Expliquer plutôt qu’affirmer : il vaut mieux essayer
d’expliquer ce qui a pu se produire, quitte à proposer
plusieurs hypothèses lorsqu’il est trop tôt pour connaître
celle qui s’imposera. Le pire danger est d’affirmer une
théorie qui pourrait être contredite plus tard. La confiance
même serait perdue, alors que tout se joue sur l’assurance
que l’entreprise cherche à connaître ce qui se déroule dans
ses différents services et sur son souci de ne pas fournir
d’informations erronées. La complexité scientifique du
problème doit inciter à faire montre d’une grande prudence
dans les explications fournies, notamment quand il s’agit
d’un problème dépassant les connaissances actuelles ;

Centrer la communication sur des faits et non des


hypothèses : dans tous les autres cas, il convient
d’annoncer des faits avérés, même s’ils ne représentent
qu’une partie de l’explication, plutôt que de partir sur des
hypothèses, des suppositions ou des promesses. Il faut
montrer que l’entreprise assume les réalités. L’objectif du
message à faire passer est que l’entreprise reconnaît le
problème, puis que l’on prend en charge la crise, c’est-à-
dire que l’entreprise ne subit pas la suite des événements.

20
V.3. Occupation du terrain médiatique
V.3.1. Reconnaître le problème
Le temps joue avec la crise et contre l’entreprise. Le premier
réflexe doit donc être de reconnaître qu’il y a un problème et de dire que
l’organisation assume ses responsabilités. Les stratégies d’attente sont très
dangereuses car les médias diffusent leurs informations et commentaires en
temps réel. Il est donc impératif de donner d’emblée de l’information pour
témoigner de la lucidité de l’entreprise, même lorsque les responsabilités ne
sont pas clairement établies.

V.3.2. Communiquer sans précipitation


Face à la crise, les entreprise sont souvent angoissées et pensent
qu’il faut expliquer et se justifier tout de suite. La compétition entre les médias
accroît encore la pression et les dirigeants se lancent parfois dans des
explications prématurées, mal préparées et surtout dépourvues de soutien
solide.

V.3.3. Montrer que l’on prend la crise en charge


En l’absence d’un diagnostic disponible, il faut montrer que
l’entreprise s’occupe de l’événement en annonçant les dispositifs déployés, les
actions mises en œuvre, les ressources mobilisées et les procédures suivies.
La crise est prise au sérieux et les décisions et actions de l’entreprise sont à
la mesure des événements : tel est le contenu des messages à faire passer, en
l’absence de certitudes.

V.3.4. Gérer le flux d’infos et occuper le terrain médiatique


L’entreprise doit s’engager à tenir ses interlocuteurs informés tout
au long de la crise sans y être sollicitée. C’est sur sa capacité à communiquer
tout au long de la crise que l’entreprise sera jugée par les médias et donc par
la public. En situation de crise, l’information ne souffre d’aucun délai
d’attente. Il faut « garder la main » dans la diffusion de l’information.

21
V.3.5. Favoriser l’accès à l’information
Il faut montrer aux journalistes qu’on les prend au sérieux, qu’on
respecte leur mission d’information et d’investigation et qu’on met tout en
œuvre pour leur faciliter la tâche. Dans le cas de crises importantes, il est par
exemple recommandé, sur le plan matériel, de prévoir une salle de presse,
confortable, et munie des équipements nécessaires de communication :
téléphone, fax et accès Internet. L’objectif pour l’entreprise est de demeurer
l’interlocuteur de référence pour les médias, en restant la source
d’informations nouvelles et pertinentes. De la sorte, elle peut limiter les
investigations des journalistes à l’extérieur et leur recherche d’explications
contradictoires.

V.3.6. Préparer le contenu et la présentation des interventions


Pendant la gestion de la crise, l’image de l’entreprise repose en
grande partie sur le porte-parole chargé des déclarations aux médias. La
qualité du contenu des messages est certes importante, mais la manière de
les faire passer l’est tout autant. Pour un communiqué de presse, le fond est
primordial et il y a relativement peu de risques pour que le message soit
interprété par les personnes ciblées. En revanche, dès lors qu’on a recours à
la télévision, l’interprétation est plus subjective et la présentation prend toute
son importance.
La présentation de l’intervention : Lors d’une interview, les
destinataires interprètent le message global en accordant 30% de crédibilité
au message verbal (choix des mots) contre 70% au non-verbal qui est transmis
par le comportement, l’attitude, les gestes, la tenue vestimentaire, le regard et
les expressions du visage. Les deux langages doivent donc être en forte
cohérence ; sinon, ils pourraient laisser penser que le porte-parole et donc
l’entreprise ne sont pas sincères dans leurs déclarations. Par conséquent, il
est nécessaire que le porte-parole soit à l’aise avec son texte écrit. C’est
pourquoi le discours doit être rédigé dans un style oral simple, avec des
phrases courtes, sans propositions subordonnées à rallonge. Il est souhaitable
de bien séparer l’intervention du porte-parole et le reportage effectué par le
journaliste.

22
Le contenu du message : Les mots doivent être soigneusement choisis
afin d’éliminer le jargon technique propre à chaque entreprise. Pour être en
phase avec les attentes des médias et du public, il faut employer des mots
simples, des analogies évocatrices pour expliquer des réalités complexes. Il
faut chercher à être pédagogue tout en évitant d’être trop simpliste, ce qui
pourrait être perçu comme un certain mépris à l’égard du public. Le discours,
sans être triste, doit rester sobre et éviter toute « frime » technologique ou
commerciale. En revanche, le discours doit se montrer humain, en
manifestant du respect, voire de la compassion pour les victimes ou leurs
familles. La froideur d’un ton « technocrate » est encore plus choquante en
situation de crise.

V.4. Gestion des médias face aux interrogations


Les interrogations proviennent des différents publics de l’entreprise :
salariés, clients, fournisseurs, actionnaires, sans oublier les journalistes.

V.4.1. La chronologie des médias


Les médias jouent des rôles complémentaires dans la diffusion
d’une information. Par ailleurs, le taux très élevé d’équipement des ménages
permet à ces derniers de profiter pleinement de cette complémentarité.
La radio sert de média d’alerte, en diffusant une information dans
l’heure qui suit l’événement. Elle alerte donc le public ;
La télévision prend le relais avec ses journaux de 13h et surtout
de 20h, qui permettent d’en savoir plus et de découvrir les
premières images de l’événement ;
Ensuite, la presse écrite permet aux intéressés d’aller chercher
le complément d’informations qu’ils désirent, en fonction de leur
proximité ou de leur implication dans l’événement ;
Internet joue également ce rôle, dans la limite du taux
d’équipement des particuliers.

L’entreprise ne peut donc maîtriser elle-même la rapidité de diffusion


des informations mais elle doit cibler les messages en fonction des fréquences

23
de parution. Privilégier un vecteur de communication en fonction du public
visé reste une marque de professionnalisme, même s’il faut veiller au jour de
parution, par exemple pour un hebdomadaire. Il peut être plus pertinent de
choisir un journal ou magazine spécialisé lorsque l’événement est sectoriel.

V.4.2. La primauté à la cible interne


Le personnel doit être traité en priorité pendant une crise. Cadres,
ingénieurs et simples salariés enregistrent en effet une information critique
sur leur entreprise. Si l’on veut qu’ils puissent contribuer à la défense de
l’image de l’entreprise, il est nécessaire de les traiter en premier en leur
donnant plus d’informations, plus d’explications que celles transmises aux
médias, même si la différence se joue sur quelques heures. C’est donc une
première opération de communication interne qu’il faut déployer pour
maintenir la cohésion du personnel et le mobiliser positivement pendant la
période de crise. Les outils exploités sont de deux types : journal interne et
explications en direct.

V.4.3. Les cibles externes


Les actionnaires doivent également pouvoir bénéficier
d’informations pertinentes et sélectionnées, notamment grâce au site de
communication financière quand il existe. En ce qui concerne les clients et
fournisseurs, tout dépend de leur importance relative pour l’entreprise. La
situation est différente selon que l’entreprise vend au grand public ou opère
dans un contexte de B to B.

EXERCICE 3 :
Quelles sont selon vous, les cibles à privilégier en termes de communication
pendant le déroulement d’une crise ?

24
VII. LE RETOUR DE CRISE
Si le grec « krisis » signifie « interprétation des choix », le mot chinois pour
« crise » signifie « danger et opportunité ». Il faut donc voir toute crise comme
une opportunité pour positiver, dont on pourra tirer profit à l’avenir. Bien sûr,
cela n’est pas possible « à chaud », pendant la crise, mais doit être envisagé
avec du recul lorsqu’elle est passée. Le retour de crise correspond au bilan
que toute entreprise devrait faire à la suite d’un projet important, avec sa part
de réussite et sa part d’échec, sur les aspects techniques et organisationnels.

VII.1. Tirer profit de la crise en interne


VII.1.1. Eviter que le même scénario se reproduise
Un tel objectif est surtout pertinent lorsque la cause même d la
crise est interne, qu’il s’agisse d’un problème d’origine technique ou sociale.
Si le problème est d’origine technique, il s’agit de décortiquer
l’enchaînement des dysfonctionnements qui ont abouti à la crise. Il sera alors
nécessaire d’améliorer la sensibilisation du personnel à un problème similaire,
en déployant les ressources appropriées.
Si le problème est d’origine sociale, il revient au management d’analyser
les réactions imprévues du personnel suite à une modification des conditions
de travail ou à une nouvelle organisation. Dans ce cas, il s’agit pleinement de
communication interne.

VII.1.2. Améliorer les processus internes


La remise à plat d’une partie de l’organisation interne peut être
une excellente occasion pour ressouder le personnel et mieux le motiver
autour des nouveaux objectifs, lesquels doivent être non seulement acceptés,
mais partagés réellement par les salariés.

25
VII.1.3. Remotiver et remobiliser les ressources internes
La gravité de la crise permet de projeter un avant/après.
L’entreprise montre sa faiblesse pendant la crise ; d’ailleurs, la crise est
généralement l’occasion de casser l’esprit d’arrogance qui peut régner dans
des entreprises puissantes.

VII.2. Tirer profit de la crise en externe


Lorsque l’entreprise a su surmonter la crise, les différentes cibles
externes, médias et clients, peuvent reconnaître l’injustice qu’elle a subie.

VII.2.1. Quand la crise est d’origine externe


C’est alors d’un courant de sympathie que l’entreprise peut
bénéficier, notamment de la bienveillance des médis, plus aptes à diffuser les
informations positives proposées par les services de communication et de
marketing. Tel a été le cas d’Air France après l’effondrement d’une partie du
hub de Roissy ; la situation de Total, après la catastrophe d’AZF à Toulouse,
ainsi que celle d’EDF après la tempête de l’hiver 1999, est similaire.

VII.2.2. Quand la crise est d’origine interne


La même réaction positive du public et des médias s’observe
lorsque l’entreprise est capable de communiquer efficacement sur la
reconnaissance de sa responsabilité et surtout sur les moyens de correction
qu’elle a su déployer, tant sur le plan technique qu’humain.

EXERCICE 4 :
Quelle doit être selon vous la place du président de l’entreprise dans
l’organisation de la communication de crise lorsqu’il s’agit d’une crise d’origine
externe ? Même question lorsque la crise est d’origine interne ?

26
VIII. ANALYSE D’UNE SITUATION DE CRISE : VOLKSWAGEN QUELLE
COMMUNICATION DE CRISE FACE A UN SCANDALE INÉVITABLE?
Il est clairvoyant que Volkswagen constitue déjà un cas d’école en
matière de gestion et de communication de crise. L’affaire est tellement de
grande ampleur que l’on s’interroge sur la place d’une communication efficace
et optimale pour sauver la réputation, d’une entreprise si puissante, déjà à
terre et se prémunir d’un tourbillon économique, financier, judiciaire et social
qui puisse la mettre à l’abrite des dangers des crises dans l’avenir.
Les conséquences du scandale de la fameuse tricherie sur les émissions
polluantes des véhicules diesel de la firme allemande sont colossales : des
milliards de dollars se sont évaporés en Bourse, 11 millions de voitures
concernées, un rappel massif de véhicules au coût encore impossible à
chiffrer, une réputation sérieusement remise en question, les lourdes
sanctions financières imposées par la NHTSA4 américaine, sans oublier la
désaffection redoutée des consommateurs du monde entier.

*Quelle communication de crise faut-il adopter face à un tel


scandale?
La difficulté, outre l’ampleur et le caractère accru de la crise, c’est que
Volkswagen devrait dans l’urgence communiquer sur des faits graves envers
des publics différents tes que :
Les responsables américains qui décident des sanctions, financières et
pénales, à infliger au groupe allemand ;
Les responsables politiques du monde entier qui exigent sur l’immédiat
des éclaircissements sur le sujet ;
Le grand public et les consommateurs, clients actuels ou potentiels de
Volkswagen ;
Les médias assoiffés d’informations, qui ne cessent de tisser le scénario
du feuilleton économique, industriel, politique et judiciaire qui a éclater;
Les employés forcément inquiets : ils sont plus de 500 000 à travailler
pour les entités du groupe (Volkswagen, Audi, Seat, Skoda, Porsche…).

4
NHTSA : National Highway Traffic Safety Administration (Agence Nationale de la Sécurité Routière)

27
La communication de crise de Volkswagen devrait, pour plus d’efficacité,
recadrer les points suivants :
1) Mettre en place une communication ciblée, avec des mots forts et un ton
grave et solennel, à la hauteur de l’ampleur de la crise. Sur ce point, inutile
de reprocher au patron de Volkswagen America d’user de détours. Il faut être
clair et incisive ;

2) La communication de crise doit plier à l’obligation de transparence. Il


faudra au plus vite répondre, dans les règles de l’art, aux questions
essentielles concernant le trucage des contrôles antipollution : Qui ? Quand ?
Où ? Comment ? Pourquoi ?

3) Préparer sa communication et tous azimuts. Comme répondre aux


questions de la presse, à celle du Congrès américain ou des politiques
européens ou asiatiques. Le groupe ne devrait pas attendre d’être sollicité par
les journalistes sur telle ou telle question. Il devrait prendre l’initiative, d’aller
dans l’arène médiatique de son propre chef quand, dans la mesure du
possible, pour anticiper les questions et y répondre de manière claire et
directe. Il faut tenter de reprendre la main dans le processus d’une
communication qui informe de la manière la plus transparente possible.

4) La communication de crise de Volkswagen ne devrait pas se limiter


aux regrets et aux remords. Lorsque le scandale est d’une forte intensité, le
temps des excuses sobres, nécessaires en communication de crise doit être
très vite dépassé. Les déclarations du groupe doivent s’inscrire
immédiatement dans l’action et l’annonce de décisions fortes et décisives.
Sur ce dernier point, le groupe devrait clairement faire passer le message que
l’ampleur de la crise est parfaitement intégrée, que cette vilaine affaire est
presque déjà du passé et que toutes les options sont en cours de traitement
pour surmonter la dure épreuve.

Dans ces conditions, l’avenir du PDG du groupe fait partie des questions
qui faudrait résoudre en premier. Les médias allemands ont mis en cause

28
Martin Winterkorn, sa démission ou destitution est une des premières
décisions à prendre pour sauver le nom du géant automobile mais cette
démarche, qui consiste à nommer un nouveau patron, n’a jamais permis de
résoudre une crise du jour au lendemain. Mais en cas de fraude massive, cette
mesure empêche de faire décrédibiliser tout le groupe. Le sort de la direction
ne sera pas la seule question à régler sur l’immédiat : les changements de
responsables, d’équipes, d’organisation de la production des véhicules diesel,
des moyens de contrôle, sont autant de points sur lesquels Volkswagen sera
jugé concernant sa capacité à sortir de l’impasse, redresser son image et
regagner la confiance.
La reconquête prendra le temps qu’il faudra. Volkswagen a accumulé
d’innombrables erreurs de communications en oubliant les règles simples des
relations publiques. Une gestion de crise désastreuse qui lui a coûté trop cher.
Elle doit orienter son angle d’intérêt vers la crise qui couve en interne et
comment la gérer à court à moyen et à long terme.
Face à une quadruple crise : une crise d'image, une crise de
confiance, une crise de réputation et crise de relations publiques, le
constructeur automobile allemand a ordonné un rappel massif de véhicules
après avoir équipé ses modèles diesel d'un logiciel capable de tromper les tests
de mesure antipollution des autorités.
La marque a enchainé les erreurs de gestion de crise et de
communication. Dans le même temps, ce scandale médiatique a mis sur les
épaules du service de relations publiques de la marque le poids de la mission
de contenir les dommages causés à la réputation de l'entreprise.
Pourtant, il est vite apparu que la marque Volkswagen, en raison de la
gravité des accusations qui pèsent sur elle, a laissé la main à ses avocats
plutôt qu'à ses communicants. Les premiers laissant aux seconds, une très
restreinte marge de manœuvre pour communiquer avec le public et tenter de
limiter l'impact des dégâts sur l'image de marque et la réputation du
constructeur automobile.
Comme toute crise d'entreprise, les premières heures sont les plus
cruciales. Pour répondre à toutes les rumeurs négatives, les accusations, les
allégations malveillantes et, sur ce front, Volkswagen semble-t-il perdu un

29
temps précieux. Aucune publication ne fut dédiée aux rappels sur le champ,
aux excuses ou aux explications. Stupéfiant, à l'heure des chaines
d'informations en continu et de tous les réseaux sociaux, la communication
de crise du groupe ne s'est manifestement pas adaptée à cette nouvelle donne
alors que les techniques de riposte à la crise sont de mieux en mieux
structurées.
Dans un cas comme celui-ci, les communicants de la marque
accompagnés par les professionnels des relations publiques devaient jouer un
rôle clé pour convaincre les cadres de haut niveau de divulguer toutes les
informations relatives aux accusations. Il fallait alors réagir vite et
efficacement pour apaiser l'écho médiatique donné aux évènements. Les
révélations poseront un coup périlleux à la réputation de la société. Il ne s’agit
pas d’un simple défaut de fabrication à l'usine, un banal rappel ou une autre
anomalie accidentelle, mais une crise d'ampleur, il faudra donc beaucoup de
temps et d'effort de communication pour changer le récit de la marque.

CONCLUSION : DE LA RP DE CRISE Á LA COM. DE CRISE


Le silence, le temps mort, l’absence de communication structurée ou de
parole forte, démentit maladroits, déclarations faussement rassurantes,
manque d'humilité ou arrogance, incapacité à donner des informations
minimales sur des données basiques de la crise coutent trop cher à l’avenir
de l’entreprise. Il est temps que les entreprises fuient ces comportements et
choisissent une stratégie de communication de crise efficace : reconnaître qu'il
y a bien un problème quand il y en a un, démontrer son engagement à
résoudre la crise pour rassurer l'opinion, dire tout ce que l'on sait et accepter
de dire que l'on ne sait pas certaines choses pour ne pas abîmer le lien de
confiance qui lie l'entreprise à ses publics.
Les observateurs peu habitués à gérer des situations de crise pourront
trouver l’approche des relations publiques de crise complexe face à l’urgence
d’une crise. Pourtant toute situation de crise relève de la complexité et
nécessite de la prendre en considération et de la traduire en stratégie et
opérations. L’expérience nous montre que la multiplication des acteurs en
situation de crise exige de s’adresser à eux spécifiquement, avec une juste

30
distance. Les relations publiques de crise permettent de franchir un pas dans
l’extension du domaine de la communication de crise, dans une époque
fortement interconnectée, où tous les acteurs ont accès aux médias
individuels de masse et peuvent s’exprimer. Dans ce monde interconnecté, il
est illusoire d’imaginer que la communication de crise est le fruit d’un seul
acteur : il faut donc en accepter la co-construction. A une époque, où les
médias passent d’une émotion à l’autre, où toute opération de communication
est perçue comme une manipulation, la co-construction permet de légitimer
la communication de crise, à condition de ne consentir qu’aux acteurs
impliqués de participer à cette construction commune et d’en bannir nombre
d’observateurs.
La bonne communication de crise s’anticipe en essayant de prévoir à
l’avance les différents scénarii possibles, que l’origine de la crise soit interne
ou externe. La constitution d’une cellule préventive de crise doit permettre,
d’une part, d’essayer d’éviter les crises d’origine interne et d’autre part, de
distribuer à l’avance les rôles au cas où un scénario viendrait à se produire.
L’anticipation nécessite aussi une analyse fine des médias qui seront
concernés, ainsi qu’une connaissance précise des principaux journalistes
leaders d’opinion dans le secteur en question. Pendant la crise, la rigueur doit
la gestion de la communication d’urgence qu’il faut déployer, qu’il s’agisse du
moment, du contenu ou de la présentation des messages choisis.

EXERCICE 5 :
Vous travaillez au service communication corporate de votre entreprise, laquelle
vend des produits de grande consommation. Des produits défectueux ont
provoqué des réactions chez les clients qui ont alerté les médias avant
l’entreprise. Comment réagissez-vous et quelles actions recommandez-vous ?

31
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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Brasseur, M., et Forgues, B., « Communiquer en temps de crise », Revue


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Guerin-Talpin, G., Communication de crise, Editions Préventiques, 2003

Kauffer, R., L’arme de la désinformation, Grasset, 2003

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Roux-Dufort, C., La gestion de crise : un enjeu stratégique pour les


organisations, DeBoek Université, 2000

Tran Tranh Tam, E., Manager les situations difficiles, Editions d’Organisation,
2004

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