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Cancer/Radiother 6 (2002) Suppl 1 : 56s–60s

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Contour des volumes cibles en radiothérapie

Contours des volumes cibles en radiothérapie. Généralités


Target volume delineation for radiotherapy. General presentation
G. Kantor a,*, P. Maingon b, F. Mornex c, J.J. Mazeron d
a
Institut Bergonié, service de radiothérapie, 229, cours de l’Argonne, 33076 Bordeaux cedex, France
b
Centre Georges-François-Leclerc, 1, rue du Professeur Marion, 21079 Dijon cedex, France
c
Département de radiothérapie oncologie, EA 643, centre hospitalier Lyon Sud, 69310 Lyon-Pierre-Bénite, France
d
Service de radiothérapie, groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75651 Paris cedex 13, France

Résumé

Le contour des volumes cibles est une étape médicale dans la préparation des radiothérapies de conformation. Dans cet article de
généralités sont discutées les difficultés de l’évaluation du volume tumoral macroscopique (GTV) et du volume cible anatomoclinique
(CTV), la représentation des différents volumes selon les recommandations du rapport ICRU 62, les principales discordances
inter-observateurs lors de la définition des volumes. © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Abstract

Target volume delineation remains an important medical step for conformal radiotherapy. In this general presentation are discussed : the
main difficulties for evaluation of gross tumor (GTV) and clinical target volume (CTV), the main recommendations for representation
according to ICRU 62 report, differences observed during inter-observer volume comparisons. © 2002 Éditions scientifiques et médicales
Elsevier SAS. All rights reserved.

Mots clés: Radiothérapie; ICRU; Volume cible

Keywords: Radiotherapy; ICRU; Target volume

1. Introduction organes à traiter ou à risque (OR). Malgré des recomman-


dations précises du rapport ICRU 62 [13], de nombreuses
Le contour ou délinéation (terme reconnu par le Littré), incertitudes, imprécisions ou divergences existent encore
repose sur l’évaluation anatomoclinique des risques d’ex- actuellement sur cette difficile étape médicale de prépara-
tension macroscopique (volume tumoral macroscopique, tion des radiothérapies de conformation.
GTV) et infraclinique (volume cible anatomoclinique,
CTV) de la maladie cancéreuse. Lors de cette étape, sont
également prises en compte les contraintes techniques de 2. Volume tumoral macroscopique (GTV) et volume
traitement (volume cible prévisionnel, PTV), la mobilité des cible anatomoclinique (CTV)
organes (internal margin, IM) et les incertitudes de posi-
tionnement (set-up margin, SM). Enfin, le choix et la qualité Un numéro spécial de Cancer Radiothérapie a été
des moyens d’imagerie utilisés influencent le repérage des récemment consacré à ce sujet (vol. 5, n° 5 : 465-720,
octobre 2001) et largement diffusé sur cédérom. L’objectif
* Auteur correspondant. Tél. : +33-5-56-33-33-33 ;
de cet ouvrage est d’aider les oncologues radiothérapeutes
fax : +33-5-56-33-33-76. et radiophysiciens à la préparation des traitements. Pour les
Adresse e-mail : kantor@bergonie.org (G. Kantor). évaluations de l’extension tumorale, l’anatomopathologie
© 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
PII: S 1 2 7 8 - 3 2 1 8 ( 0 2 ) 0 0 2 3 0 - 5
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reste une clé incontournable selon la topographie, les


aspects, la taille, le type, le degré de différenciation et le
caractère infiltrant [1,9].
Les études de corrélation des données anatomiques et
cliniques, les contrôles tumoraux des sites de rechute et des
toxicités permettent de mieux réactualiser la connaissance
des extensions tumorales (GTV) et des extensions infracli-
niques, surtout ganglionnaires, influençant le volume cible
anatomoclinique.
La réactualisation des volumes en fonction de l’extension
tumorale s’est modifiée récemment par une meilleure défi-
nition anatomique des volumes à irradier. C’est le cas
notamment :
• pour le rectum avec la définition du mésorectum [18] ;
• pour les tumeurs de prostate avec en particulier les
discussions sur les extensions extracapsulaires et la
limite inférieure de l’irradiation au niveau de l’apex
[3] ;
• pour les tumeurs cérébrales primitives malignes (glio-
mes) avec la discussion sur l’inclusion dans le volume Fig. 1. Illustration des divers systèmes de coordonnées dont il faut assurer
de l’œdème péritumoral et des voies longues associa- la cohérence pour un repérage correct des volumes cibles d’après ICRU
tives [14] ; [13] (avec l’aimable autorisation de J. Chavaudra [7]).
CP : système de coordonnées lié au patient par l’intermédiaire d’un point de
• pour les tumeurs des sinus de la face avec les discus- référence interne.
sions des limites anatomiques des structures [19] ; CI : système de coordonnées lié à l’appareil d’imagerie, à relier au patient
• pour les sarcomes des tissus mous avec une définition par un point de référence interne visible sur l’image.
anatomique des loges et compartiments musculaires et CR : système de coordonnées lié à l’appareil de simulation et à l’appareil
des barrières anatomiques d’extension [16]. de radiothérapie, à relier au patient par un point de référence externe.
La réactualisation des risques ganglionnaires s’est aussi
projections, échelles, systèmes de coordonnées, orientation,
modifiée récemment. Les conséquences sont importantes
légende, relief et topographie [2].
sur les différences des volumes à irradier. C’est le cas
Le rapport ICRU 62 apporte des recommandations sur le
notamment des irradiations ganglionnaires :
système de coordonnées et les légendes des couleurs et
• pour les cancers ORL, en incluant ou préservant
contours.
certains niveaux ganglionnaires [11] ;
• pour les cancers de l’œsophage et du cardia [5,6] ; Les mêmes systèmes de coordonnées sont utilisés
• pour les cancers bronchiques, en tenant compte des lorsqu’ils sont liés aux patients (CP), à un appareil d’ima-
risques d’extension des ganglions médiastinaux, selon gerie (CI), à un appareil de traitement (CR) (Fig. 1).
une cartographie en 14 niveaux ou « stations » [21], en Pour les couleurs, l’ICRU propose un code relatif aux
fonction de la topographie de la tumeur primitive. principaux types de volumes (Fig. 2) :
Toutes ces réactualisations sont basées plus sur des
concepts anatomiques et anatomocliniques que géométri-
ques. La définition des marges de sécurité de plusieurs
centimètres autour de la tumeur est certes plus simple et
facile mais plus discutée dès qu’il s’agit, en s’adaptant au
risque anatomoclinique d’extension, de mieux couvrir le
risque d’extension et de mieux préserver les organes sains
de voisinage.

3. Représentation des volumes, systèmes


de coordonnées et légendes

La représentation des volumes répond aux mêmes prin-


cipes que ceux utilisés en cartographie, notamment pour les Fig. 2. Code des couleurs proposé par ICRU 62 [13].
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Fig. 3. Carte de France physique.


Dans cette carte d’un dictionnaire, le système de coordonnées est donné par la projection des méridiens et parallèles ; l’échelle est indiquée, les codes couleurs
utilisent du bleu pour les mers et les océans, du vert clair au marron foncé pour respecter le relief (topographie), des plaines à la haute montagne.
Dans cette carte personnalisée, le choix des couleurs est arbitraire, la compréhension des reliefs est inhabituelle. L’utilisation constante des mêmes couleurs
pour les mêmes légendes doit permettre dans les années à venir de lire un plan de traitement, comme on a pu intégrer le code des couleurs pour la lecture
d’une carte physique.
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• volume tumoral macroscopique (GTV) : rouge,


• volume cible anatomoclinique (CTV) : rose,
• volume cible prévisionnel (PTV) : bleu clair,
• organes à risque (OR) : vert foncé.
Cette recommandation prend une grande importance dès
que l’on veut faire une interprétation ou une comparaison
des documents utilisés pour les plans de traitement. L’utili-
sation constante des mêmes couleurs pour les mêmes types
de volumes doit permettre, dans les années à venir, de lire
un plan de traitement comme on a pu intégrer le code des
couleurs utilisé pour la lecture d’une carte physique (Fig. 3).

4. Discordances dans la définition des volumes cibles

Les études inter-observateurs font apparaître des diffé-


rences dont les causes sont multiples et liées soit :
• à la connaissance des organes et structures sur les
imageries, d’où les efforts actuels de formation en
radio-anatomie [15] ;
• à la qualité et au type d’imagerie utilisée, d’où les
développements en imagerie multimodalité en recalage
et fusion d’images [4] ;
• à l’étude anatomoclinique des risques d’extension ;
• à l’évaluation des contraintes et imprécisions des as-
pects pratiques de traitement. Fig. 4. Représentation schématique des relations entre les différents volu-
Les principales divergences ont été évaluées en patholo- mes et de la combinaison des marges d’après l’ICRU [13] (avec l’aimable
gie cérébrale [17], bronchopulmonaire [10], prostatique [8] ; autorisation de J. Chavaudra [7]).
GTV : volume tumoral macroscopique ; CTV : volume cible anatomocli-
elles sont liées à la définition du volume tumoral macros-
nique ; IM : marge interne ; SM : marge liée aux incertitudes de mise en
copique et surtout à l’inclusion ou non de parenchyme place et à l’appareillage. La limite externe correspond au volume cible
adjacent ou de territoire ganglionnaire du fait du risque prévisionnel (PTV).
d’extension infraclinique. Scénario A : on retrouve le volume cible anatomoclinique constitué par le
Enfin, les principes de définition des marges de sécurité volume tumoral macroscopique et la marge correspondant à un envahisse-
ment subclinique. Avec la marge interne et la marge liée aux incertitudes de
en dehors du volume cible anatomoclinique, pour aboutir au mise en place et de l’appareillage, on détermine un volume cible prévi-
volume cible prévisionnel (PTV), répondent à trois sionnel qui, dans ce cas, est maximal puisque les deux marges sont ajoutées
contraintes (ou scenarii) selon le rapport ICRU 62 (Fig. 4). simplement.
En première hypothèse, les marges internes (IM) et d’incer- Scénario B : pour éviter d’irradier un volume cible prévisionnel trop grand
titude de positionnement (SM) sont ajoutées pour aboutir à (tolérance des tissus sains), on peut considérer une combinaison quadrati-
que des marges, supposant des relations statistiques entre les incertitudes
un volume maximal. En deuxième hypothèse, pour éviter sur lesquelles reposent les marges, à mettre en évidence et à évaluer dans
d’irradier un volume cible prévisionnel trop grand, une la mesure du possible.
combinaison quadratique est appliquée selon des modèles Scénario C : ce cas correspond à des situations où la présence d’organes à
mathématiques [20]. Enfin, une dernière hypothèse consiste risque conduit à admettre un niveau de probabilité plus élevé pour les
à réduire les marges liées aux incertitudes pratiques en risques liés aux incertitudes portant à la fois sur les aspects anatomoclini-
ques et les aspects techniques.
raison de la présence d’un organe à risque. Toutes ces
hypothèses sont en cours d’évaluation et restent incomplè-
tement validées [22].
1801 par Bichat [12]. Toutes les études actuelles de corré-
lation (anatomiques, cliniques, radiologiques et thérapeuti-
5. Conclusion ques), les études qualitatives d’imagerie, les comparaisons
intra- et inter-observateurs, enfin les évaluations thérapeu-
Le contour des volumes cibles en radiothérapie reste une tiques, permettent d’améliorer cette étape clé pour la pré-
étape médicale très liée au concept « d’anatomie générale paration des nouveaux traitements en radiothérapie de
appliquée à la physiologie et à la médecine », décrit dès conformation et d’intensité modulée.
60s G. Kantor et al. / Cancer/Radiother 6 (2002) Suppl 1 : 56s–60s

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