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Chapitre II: Spectroscopie moléculaire UV-Visible Pr.

Lynda SERIDI-BOUFELFEL

I. Spectroscopie et spectre électromagnétique


La spectroscopie est l’étude des interactions entre les rayonnements et la matière.
Interactions signifient les modifications subies par cette matière lorsqu’elle effectue une
transition d’un état quantique à un autre état quantique. Divers phénomènes se manifestent de
manières différentes selon le type de rayonnement irradiant. Notons que tout le spectre
électromagnétique est concerné (Fig. II.1).

Fig. II.1. Spectre électromagnétique et interactions.

Les deux phénomènes: Absorption et émission sont à la base de la spectroscopie. Pour


que l’absorption ait lieu, il faut d’abord que l'énergie du photon incident corresponde à la
différence d'énergie entre le niveau fondamental et le niveau excité. Parmi les transitions
énergétiquement possibles, ne sont permises (actives) que celles qui satisfont les règles de
sélection. L’absorption est toujours suivie d’une émission, c.à.d. un retour d’un niveau
énergétique supérieure vers un autre plus bas avec dégagement d‘une énergie sous forme de
chaleur ou lumière (retour de l’état excité à celui fondamental). L’état excité a une durée de
vie variable avec le type de spectroscopie.

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Fig. II.2. Transitions électroniques lors de l’absorption et de l’émission.

Les échanges d’énergie entre matière et rayonnement se font par quantités finies et
élémentaires d’énergie, appelées quanta (E= h = hc/λ). De manière générale, les différentes
formes d’énergie intervenant dans un système sont celle de translation (ET), vibration (Ev),
rotation (Er) et électronique (Ee). L’énergie du système est additive:

Etotale  ET  Er  Ev  Ee ( II .1)

 ET est non quantifiée.


 Les 3 autres énergies sont fonction des nombres quantiques :
J pour la rotation.
v pour la vibration.
n pour l’énergie électronique.
L’ordre de grandeur de ces énergies est différent: Ee  Ev  Er (Fig. II.3).

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Fig. II.3. Niveaux énergétiques et transitions électroniques.

II. Spectroscopie moléculaire UV-Visible


II.1. Domaine spectrale
La spectroscopie UV-Visible est une technique d’analyse rapide et non destructive. Elle
permet d’accéder qualitativement à des renseignements sur la nature des liaisons présentes au
sein de l’échantillon mais également de déterminer quantitativement la concentration
d’espèces absorbant dans ce domaine spectral.
La région ultraviolette s'étend de 10 nm à 400 nm que l’on peut subdiviser en deux principales
zones:
 UV lointain ou UV du vide: de 10 à 200 nm;
 UV proche: de 200 à 400 nm.
Le domaine du spectre ultraviolet utilisable en analyse s’étend environ de 190 à 400 nm.
La région du visible s'étend de 400 nm à 800 nm; cette gamme de mesure est atteinte avec le
même spectromètre utilisé en UV par la simple commutation de la source.

II. 2. Origine de l'absorption dans l'ultraviolet et le visible


L'absorption dans cette gamme d'onde électromagnétique correspond à des transitions
de niveau d'énergie nettement plus important que pour les micro-ondes ou l'IR (Fig. II.4).
Proportionnellement la différence d'énergie entre deux niveaux de rotation successifs compte
pour 1/40 de celle entre deux niveaux de vibration et 1/1000 de celle entre deux niveaux
électroniques moléculaires.
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Lorsque se forme une liaison entre deux atomes, il y a formation d'une orbitale moléculaire
résultant du recouvrement des orbitales atomiques. Elle possède deux niveaux, un liant plus
stable que les orbitales atomiques originelles et un antiliant moins stable. Chacun ne peut
recevoir que deux électrons au plus.

Fig. II.4. Origine du spectre UV-Visible.

A l'état fondamental les électrons des liaisons occupent les orbitales de plus basses
énergies. En prenant pour exemple les composés rencontrés en chimie organique, formés par
la réunion d'atomes légers (H, C, N, O), les transitions dites " vibroniques " ont pour origine
les électrons de valence engagés dans les liaisons σ et π ou les doublets non-liants n, d'où le
terme de spectres électroniques.

II .3. Analyse spectrophotométrique


L'analyse spectrophotométrique est fondée sur l'étude du changement d'absorption de
la lumière par un milieu, en fonction de la variation de la concentration d'un constituant. On
détermine la concentration d'une substance en mesurant l'absorption relative de la lumière par
rapport à celle d'une substance de concentration connue. En analyse spectrophotométrique,
on utilise une lumière sensiblement monochromatique. Ces méthodes d'analyse sont
intéressantes car elles permettent de travailler sur de faibles quantités de substances et sont
non destructrices vis-à-vis de l'échantillon. Elles s'appliquent à un très grand nombre de
dosages.
La colorimétrie est un cas particulier de la spectrophotométrie dans le domaine du
visible. On utilise une source de lumière blanche et les déterminations sont faites à l'aide d'un
instrument simple appelé colorimètre

II.3.1. Spectrophotomètre UV- Vis


Il existe sur le marché des spectromètres UV-Vis mono faisceau ou double

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faisceau. Les seconds étant plus précis et plus chers. Un spectrophotomètre comprend 4
parties essentielles: Une source lumineuse, un système dispersif, un compartiment à
échantillon et un détecteur (Fig. II.5).

Fig. II.5. Schéma de principe d'un spectrophotomètre UV-Vis à double faisceau.

II.3.1.1. Source lumineuse

Elle est constituée par:

 Une lampe à décharge au deutérium ou à hydrogène utilisée pour les longueurs


d’onde inférieure à 400 nm.

Fig. II.6. Lampe UV au deutérium.


 Une lampe à filament de tungstène pour la région allant de 350 à 800 nm.

Fig. II.7. Lampe à incandescence à filament de tungstène.

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 Une lampe à décharge au xénon utilisée dans le domaine UV et visible. Ce type de


lampe est très énergétique. Elle fonctionne sous forme de flash, juste au moment de
faire une mesure.

II.3.1.2. Système dispersif


Il s’agit du Monochromateur dont le rôle est de disperser le rayonnement polychromatique
provenant de la source et d’obtenir des radiations monochromatiques sur lesquelles on effectue
la mesure. Ca peut être un prisme, un réseau plan (ou concave) (1200 traits par mm) ou un
filtre coloré. Dans le montage à double faisceau, le rayonnement passe par le
monochromateur puis est partagée en 2 faisceaux par le photomètre: l’un dirigé vers le
compartiment contenant le solvant pur, l’autre dirigé vers le compartiment de l’échantillon.

Fig. II.8. Monochromateur à réseau.

II.3.1.3. Compartiment à échantillon et cuves


Les échantillons analysés sont le plus souvent en solution, mais peuvent également être en
phase gazeuse et plus rarement à l'état solide. Les cellules de mesures sont des tubes
parallélépipédiques disposées dans le compartiment à échantillon. Elles contiennent soit
l'échantillon en solution diluée soit la référence (cas du spectrophotomètre à double faisceau).
La longueur de la cuve est définie (1, 2, 4 ou 5cm de trajet optique). Elle doit être
transparente aux radiations d'étude. Par exemple en UV, les cuves sont en quartz, elles ne
peuvent être ni en verre ni en plastique (réservé aux mesures dans le domaine visible). Dans
le cas d’un spectrophotomètre mono faisceau, on neutralise l’influence du solvant en réalisant
un blanc, c'est-à-dire en mesurant l’intensité du rayonnement transmis après traversée de la
cuve ne contenant que du solvant.

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 Les solvants:

Il est nécessaire de faire attention aux solvants car ceux-ci peuvent absorber fortement
dans le domaine des ultraviolets

 Ils doivent dissoudre le produit et être transparents dans la région examinée.


 L'éthanol à 95% est le solvant le plus utilisé; il est suffisamment bon solvant
pour beaucoup de composés organiques.
 Les hydrocarbures sont des solvants utilisés pour des substances non polaires ;
ils doivent être purifiés soigneusement pour éliminer toute trace de substances
aromatiques ou éthyléniques.
 L'eau distillée et les acides sont de bons solvants: leur transmission est très
bonne.
 Les solvants ont tout de même des effets : leur polarité changeant, on observe
des changements quant à la longueur d'onde et à l'intensité du maximum
d'absorption

Fig. II.9. Domaines d’absorption UV de quelques solvants/matériaux.

II.3.1.4. Détecteur

La détection se fait par: des photomultiplicateurs, photodiodes ou barrette de diodes.


Le rôle du détecteur est de transformer le rayonnement en un signal électrique proportionnel à
son intensité. Le signal amplifié électroniquement est ensuite enregistré sous forme de
spectre d’absorption sur papier dont le déroulement est synchronisé avec le changement de
longueur d’onde à la sortie du monochromateur. Le spectre enregistré représente l’absorbance
en fonction de la longueur d’onde. La bande d'absorption est caractérisée par sa position en

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longueur d'onde max (nm) et par son intensité reliée au coefficient d’extinction molaire εmax.
La position du maximum d’absorption correspond à la longueur d’onde de la radiation qui
provoque la transition électronique.

II.3.2. Loi de BEER-LAMBERT


Soit un rayon lumineux monochromatique traversant une solution absorbante de
concentration C et de trajet optique égal à l. Si I0 est l'intensité du rayon lumineux à l'entrée de
la solution et I son intensité à la sortie, alors:
I 
A  D.O  log  0    lC ( II .2)
 I 
I
T  10 C l ( II .3)
I0
où A est l'absorbance, D.O: la densité optique, I0: l'intensité lumineuse incidente, I: l'intensité
lumineuse transmise, ε: le coefficient d'extinction molaire caractéristique de la substance
étudiée à une longueur d'onde donnée en L mol-1 cm-1, l: l'épaisseur traversée en cm, C: la
concentration en mol.L-1 et T: transmittance (exprimée en pourcentage).

Loi d'additivité des absorbances: à une longueur d'onde donnée, l'absorbance A d'un
mélange de solutions absorbantes est la somme des absorbances individuelles

A  (1C1   2C2   3C3  ...............) l ( II .4)

ε = ελ: Détermine la probabilité d’absorption donc de transition électronique.


ελ :104-105:très probable;
10-103: peu probable
Cette loi concerne les substances diluées (c << 0,01 mol. L-1), dispersées de manière
homogène. Elle ne concerne ni les substances chimiques instables qui coagulent ou qui sont
soumises à une turbidité.

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II.4. Nature des transitions électroniques


On distingue 4 types de transitions responsables de l’apparition des bandes
d'absorption dans les spectres UV des molécules organiques. Elles sont caractérisées par
la longueur d'onde de leur maximum d'absorption (λmax) et par l'intensité de ce maximum.

Fig. II.10. Transitions rencontrées dans les composés organiques.

II.4.1. Transition σ →σ*


La grande stabilité des liaisons σ des composés organiques se traduit par un écart
important entre les niveaux orbitalaires frontières correspondants. Cette transition d'un
électron d'une orbitale moléculaire liante σ dans une orbitale moléculaire anti liante σ*
demande beaucoup d'énergie; elle est intense et située dans l’UV lointain, vers 130 nm (λmax,
éthane = 135 nm, ε = 10 000). Elle ne présente que peu d'intérêt dans la caractérisation
structurale. Notons que les hydrocarbures saturés, tels l'hexane ou le cyclohexane, qui ne
présentent que des liaisons de type σ, sont pratiquement transparents dans l’UV proche. Ils
constituent donc de bons solvants d'un point de vue optique; 200 nm est la longueur d'onde
limite pour l'usage de ces solvants (cut off). Malheureusement, leur pouvoir de solvatation est
insuffisant pour dissoudre les composés très polaires.

II.4.2. Transition n→π*


C'est la transition de plus faible énergie, elle résulte du passage d'un électron d'une
orbitale moléculaire non-liante n à une orbitale moléculaire anti liante π*. Ce type de

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transition est rencontré, dans le cas des molécules comportent un hétéroatome porteur de
doublets électroniques libres (O, N, S, Cl...) appartenant à un système insaturé (C=O, C=S,
N=O). La plus connue est celle qui correspond à la bande carbonyle, facilement observable,
située entre 270 et 280 nm. Le coefficient d'absorption molaire est faible (ε <100) : pour
l'éthanal par exemple, λmax= 293 nm et ε= 12 (éthanol), Nitro méthane (λmax=271 nm, ε=18.6
dans l’alcool). La polarité de la liaison est modifiée après absorption du photon. Ceci permet
de comprendre pourquoi la nature du solvant peut influer sur la position de la bande
d'absorption. Ce type de bande porte le nom de Bandes R (Radikalartig).

II.4.3. Transition n→ϭ*


Le transfert d'un électron d'une paire libre (doublet n) des atomes O, N, S, X à un
niveau ϭ* est observé pour les alcools vers 180 nm, pour les amines vers 220 nm, pour les
éthers vers 190 nm ainsi que pour les dérivés halogénés. Cette transition d'intensité moyenne,
se situe à l'extrême limite du proche UV. Exemples méthanol : λmax= 183 nm (ε = 500); éther
λmax= 190 nm (ε = 2 000) éthylamine : λmax = 210 nm (ε = 800), Bromure de méthyle:
λmax = 205 nm (ε = 200).

II.4.4. Transition π→π*


Elles sont dues à une transition électronique entre l’orbitale liante π et anti liante π*. Elles
sont intenses c.à.d. très probables et concernent les systèmes insaturés (doubles ou triples
liaisons). Elles sont très sensibles à l’environnement chimique, conjugaison ou présence
d’hétéroatomes qui modifient la valeur de λ max.Exemple: Hexyne 1 (λmax= 180nm, ε =
10000)

 Bandes K (Konjugierte): Elles apparaissent:

o dans les spectres de molécules possédant un système de doubles liaisons


conjuguées.

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o dans les spectres de molécules aromatiques possédant des substituants


chromophoriques.

o Caractéristiques de ces bandes K : forte absorption molaire : εmax >10 000.

 Bandes B (Benzénoïdes):

o Elles apparaissent dans les spectres de molécules aromatiques ou hétéro


aromatiques ;
o Caractéristiques de ces bandes B: ε max <1 000 et structure fine (transitions
vibrationnelles accompagnant celles électroniques).

 Bandes E (Ethyléniques):

o Les composés, qui possèdent une double liaison éthylénique isolée, conduisent
à une forte bande d'absorption vers 170 nm (éthylène λmax = 165 nm, ε =
16000) dont la position dépend de la présence de substituants hétéro
atomiques

o Elles apparaissent aussi dans les spectres de molécules aromatiques substituées


par des groupements auxochromes: les substituants dits auxochromes sont des
groupements liés au cycle aromatique par un hétéroatome porteur d'électrons
libres n.

.......

o Caractéristiques de ces bandes E: leurs εmax varient entre 2 000 et 14 000 ou


plus.

II.4.5. Transition d→ d
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En chimie inorganique de nombreux composés comportent des électrons, engagés


dans des orbitales moléculaires d (métaux de transition), conduisent à des transitions de faible
absorptivité situées dans le domaine visible, responsables de colorations. Ainsi les solutions
3+
des sels métalliques de titane Ti(H2O) 6 et de cuivre [Cu(H2O) 6]3+sont bleues, le
permanganate de potassium donne des solutions violettes, etc.. Les coefficients d’extinction
molaire sont souvent très faibles, de 1 à 100 L.mol-1.cm-1.

II.5. Groupements chromophores


On appelle chromophore tout groupement insaturé covalent présentant une absorption
caractéristique dans l’UV-VIS. Du latin:chromo=couleur, phoros=porteur. Il existe :

 des chromophores forts: capables à eux seul de porter la couleur, tel que le
groupement Azo (-N=N-), Nitroso(-N=O), Quinoide.

 des chromophores faibles: Seuls, ils ne donnent pas de couleur. Celle-ci apparaît
avec leur accumulation. Ce sont les groupements C=C et C=O principalement.

II.6. Effets dus aux solvants: Solvatochromie


La position, l'intensité et la forme des bandes d'absorption des composés en solution,
diffèrent lorsqu'on change de solvant (Fig. II.12). C'est une des raisons qui rendent les
bibliothèques de spectres UV difficilement exploitables. Ces changements traduisent les
interactions physiques soluté/solvant qui modifient la différence d'énergie entre état
fondamental et état excité. L'étude de ces modifications permet de tirer quelques règles
générales.

II.6.1. Effet hypsochrome


Il existe des transitions pour lesquelles la polarité du chromophore diminue quand on
passe de l'état fondamental à l'état excité. Il en est ainsi pour la transition n→ π* du
carbonyle des cétones en solution. Avant absorption du photon, la polarisation C+-O- est
stabilisée en présence d'un solvant polaire dont les molécules seront attirées par effet

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électrostatique autour du soluté. Ceci aura pour effet de nécessiter plus d'énergie pour
provoquer la transition électronique n→ π*, d'où un déplacement du maximum d'absorption
correspondant vers les courtes longueurs d'ondes (effet hypsochrome) comparativement à la
position de la bande d'absorption de ce chromophore dans un solvant non-polaire. L'état
excité étant atteint rapidement, la cage de solvant qui entoure le carbonyle n'a pas le temps de
se réorienter pour stabiliser la situation après absorption du photon. Cet effet s'observe
également pour la transition n→ σ*. Il est accompagné d'une variation du coefficient
d'absorption ε.

Fig. II.11. Effet du pont-hydrogène

II.6.2. Effet bathochrome


Pour les solutés peu polaires, il n'y a pas d'effet d'orientation des molécules de solvant
autour des molécules de soluté. Si le moment dipolaire du chromophore augmente au cours
de la transition, l'état final sera plus solvaté. On rencontre cette situation pour la transition
π→π* des hydrocarbures éthyléniques dont la double liaison de départ est moins polaire avant
absorption du photon. Un solvant polaire a donc pour effet de stabiliser la forme excitée, ce
qui favorise la transition: on observe un déplacement vers les grandes longueurs d'ondes. Cet
effet bathochrome est défini par rapport au spectre obtenu dans un solvant non polaire. En
résumé, l'étude du déplacement et des variations d'intensité des bandes d'absorption par effet
de la polarité des solvants peut aider à reconnaître la nature électronique des transitions
observées.

II.6.3. Effet sur le coefficient d'absorption


Lors de changement de solvant ou d'ajout de substituant sur la molécule, il peut y avoir
une modification du coefficient d'extinction molaire. Si ε diminue on a alors un hypochrome,

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les transitions sont moins favorables et le nombre de photons absorbés diminue. L'effet
inverse, pour ε qui augmente est appelé effet hyperchrome.

Fig. II.12. Résumé des différents effets de solvant ou de substituant en UV-Visible.

Tableau II.1. Influence du solvant sur les transitions du 4- methylpent-3-ène-2-one


Solvant Transition π→π* Transition n→π*
λ ε λ ε
Hexane 229.5 12600 327 40
Diethylether 230 12600 326 40
ethanol 237 12600 325 90
Methanol 238 10700 312 55
Eau 244.5 10000 30540 60

Remarques diverses:
 S'il n'y a pas de perturbation amenée par la présence d'un hétéroatome ou d'une
conjugaison, tous les composés qui renferment le même chromophore absorbent
pratiquement à la même longueur d'onde.
 Lorsque plusieurs chromophores sont séparés les uns des autres par au moins 2
liaisons, ils se comportent comme des chromophores isolés.

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 Par contre, lorsque 2 chromophores sont conjugués, ils se comportent comme une
nouvelle individualité et leur spectre se trouvent totalement transformé.
 Les substituants chromophores déplacent l'absorption vers les grandes longueurs
d'onde avec normalement une augmentation du coefficient d'absorbance.
 La présence sur une double liaison d’un hétéroatome (atome renfermant un doublet
électronique non liant)-tel que OR, Cl, S, N, NH2, OH…)- entraine le déplacement de
la bande d’absorption du chromophore vers les grandes longueurs d’onde (effet
bathochrome) et augmente son intensité (effet hyperchrome). Ce groupement saturé
lié ainsi au chromophore est appelé auxochrome.
 Lorsqu’un auxochrome est lié à un carbonyl, la bande π → π* subit un effet
bathochrome, alors que celle n→ π* subit l’inverse: effet hypsochrome c.à.d.
diminution de la longueur d’onde.
 Un solvant polaire joue le rôle d’un auxochrome seulement sur les enones. Il n’a pas
d’influence sur les diènes et polyènes.
 De façon générale la présence sur une double liaison de substituants alkyles provoque
un déplacement de λ vers le rouge, ceci est expliqué par un changement dans les
niveaux énergétiques des orbitales π et π* provoqué par l’effet inductif donneur du
groupement
Exemple: λ max Butène 1 = 175 nm, λ max isobutène=188 nm,
λ max Butadiène = 217 nm, λ max isoprène= 222 nm.

Fig. II.17. Effet de la substitution.

II.7. Chromophores des systèmes conjugués


III.7.1. Effet de la conjugaison sur les systèmes éthyléniques
Si plusieurs chromophores sont juxtaposés dans une même molécule, l'ensemble forme
un système conjugué de chromophores. Le spectre est fortement perturbé par rapport à la

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simple superposition des effets produits par les chromophores isolés. Plus le nombre d'atomes
sur lequel le système conjugué s'étend, plus la délocalisation spatiale des électrons est
importante et plus l'écart entre niveau fondamental et niveau excité diminue. Le spectre
d'absorption est déplacé "vers le rouge" (effet bathochrome) avec augmentation d'intensité
(effet hyperchrome); ce phénomène est appelé stabilisation par résonance de l'état excité.
En effet l’introduction d’une double liaison conjuguée provoque un dédoublement des
niveaux liants et anti liants du composé avec réduction concomitante de ΔE entre l’orbitale
occupée HOMO et celle vacante LUMO. La promotion de l’électron exige alors moins
d’énergie et on a par conséquent un effet bathochrome.

Fig. II.13. Effet de la conjugaison sur les transitions en UV.

Cet effet est à l'origine de la couleur de nombreux composés naturels dont les formules
semi-développées présentent des chromophores conjugués étendus. Ainsi la couleur rouge
brique de la Crocétine, caroténoïde diacide carboxylique naturel trouvé dans les fleurs de
safran, est due à la conjugaison de neuf doubles liaisons conjuguées dans sa formule
développée, celle orangée de la carotte est due à la β-carotène et provient de la réunion de
onze doubles liaisons conjuguées entre elles (λmax = 497 et 466 nm dans le chloroforme).

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β- Carotène

Fig. II.14. Origine de la coloration dans quelques substances naturelles.

II.7.2. Systèmes aromatiques


L’absorption des composés aromatiques est beaucoup plus complexe que celle des
éthyléniques. Plusieurs transitions, π →π* sont observées et elles présentent une structure
fine. La substitution du noyau modifie les bandes d'absorption de manière très importante.
En effet en considérant le cas du benzène: On remarque qu’il présente une large bande
contenant des pics multiples ou structure fine dans la région de l’UV proche entre 230-270nm,
(ε du pic le plus intense B est à 255 nm). Cette structure fine provient des sous niveaux
vibratoires affectant les transitions électroniques. Elle est souvent détruite par l’utilisation de
solvants polaires. Les bandes E1 et E2 du benzène caractéristiques aussi des structures
aromatiques sont observées respectivement prés de 180 et 200 nm.
Remarques:
 La présence de substituant alkyl sur le noyau benzénique provoque un effet
bathochrome des bandes (E et B). C’est le cas du toluène (λE2=208nm, ε=2460;
λB=262nm, ε=174).
 Si ce substituant est un chromophore ou un auxochrome cas respectif du styrène et
phénol, certaines bandes subissent en plus de l’effet bathochrome, un effet
hyperchrome.
 La présence de plusieurs noyaux condensés entraine aussi un déplacement vers le
rouge jusqu’à ce qu’elle atteigne la région du visible, ainsi qu’une apparition de
bandes d’absorption supplémentaires. Ceci est le cas du naphtalène, de l’anthracène et
du tetracène (orange).

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Fig. II.15. Spectres UV de quelques composés aromatiques polycycliques.

Tableau II.2. Quelques données spectrales.

Exemple Transition λmax (nm) ε Remarques


éthylène (vap) π→π* 165 10000
acétylène π→π* 173 6000 Hors domaine pratique
acétone π→π* 150
n→π* 279 15 Faible ε
Buta-1,3-diène π→π* 217 21000 effet bathochrome et
Hexa-1,3-diène π→π* 258 35000 hyperchrome (conjugaison)
Benzène π→π* 180 60000 Hors domaine pratique
π→π* 200 8000 Absorptions très
π→π* 255 215 caractéristiques
Naphtalène π→π* 221 13300
π→π* 286 9300
π→π* 312 289 Effet bathochrome/benzène
Acétophénone π→π* 240 13000
π→π* 278 1100
n→π* 319 50 Effet bathochrome/acétone
Thiophénol π→π* 236 10000
π→π* 269 700
Styrène π→π* 244 12000
π→π* 282 450
Benzaldéhyde π→π* 244 15000 Effet Bathochrome et
π→π* 280 1500 hyperchrome/ benzène
n→π* 328 20
Acétophénone π→π* 240 13000
π→π* 278 1100
n→π* 319 50

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Chapitre II: Spectroscopie moléculaire UV-Visible Pr. Lynda SERIDI-BOUFELFEL

II.8. Règles de Woodward-Fieser (W.F.)


Avant l'arrivée des techniques plus puissantes d'identification, la spectrométrie UV-
Visible a été utilisée pour analyse structurale à partir des spectres électroniques. L'étude des
spectres d'un grand nombre de molécules a permis d'établir des corrélations entre structures et
maxima d'absorption. Les plus connues sont les règles empiriques, dues à Woodward, Fieser
et Scott, qui concernent les diènes et composés carbonylés insaturés. A partir de tableaux
rassemblant, sous forme d'incréments, les divers facteurs et particularités de structure à
prendre en compte, on peut prévoir la position de la bande d'absorption π→π* de ces systèmes
conjugués particuliers. La concordance est bonne entre les valeurs calculées et les positions
expérimentales. Dans ce qui suit on se limitera aux règles de Woodward-Fieser. Celle-ci
peut s’exprimer comme suit:

  *  base   ( II .5)

avec Δλ= incrément à ajouter et qui dépend de la nature du substituant.

II.8.1 Cas des diènes conjugués


 Diènes conjugués acycliques
La valeur de base correspond à celle de la Butadiène,
CH2=CH-CH=CH2  λbase=217 nm

 Diènes conjugués appartenant à des cycles:


 Valeur de base pour un diène hétéroannulaire (transoide): λbase =214 nm

 Valeur de base pour un diène homoannulaire (cisoide): λbase =253 nm

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Tableau II.3. Incréments dans le cas des diènes conjugués.

Substituant incrément à ajouter

Groupe alkyl porté par le système +5


Double liaison exocyclique +5
Double liaison exocyclique entre 2 cycles +10
Double liaison conjuguée supplémentaire +30
Composé diénique homoannulaire +39
O-R +6
-S-R +30
-OCOR’ 0
Cl, Br +5
NR2 +60
Correction de solvant 0

II.8.2. Composés carbonylés α, β insaturés (enones et diènones)


Ils présentent 2 types de transitions: π→π* et n→π*, celle que l’on prévoit par la règle
de Woodward-Fieser est π→π*. Différentes structures de base sont considérées et la valeur
de l’incrément dépend de la position du substituant par rapport au groupement carbonylé.

Chaine ouverte ou cyclique

Tableau II.4. Prévision des λπ→π* pour les composés carbonylés α,β-insaturés dans
l’éthanol.

Structure de base

Valeur de base 215 215 202 207


(nm)

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Incréments à ajouter (nm)


Nature exocyclique d’une double liaison +5
Double liaison conjuguée supplémentaire +30
Composant diénique homoannulaire +39
Substituant α β γ δ
-R (groupement alkyl) +10 +12 +18 +18
-OR +35 +30 +30
-OH +35 +30 +50
R-CO2- +6 +6
Cl- +15 +12
Br- +25 +30
-NR2 +95
-SR +85
Correction de solvant Variable

Tableau II.5. Correction de solvants (enones).

Solvant Correction (nm)

Ethanol 0
Methanol 0
Dioxane +5
Chloroforme +1
Ether +7
Eau -8
Hexane +11
Cyclohexane +11

II.10. Couleur perçue dans le visible


L’absorption dans le visible est liée à la couleur. Elle explique pourquoi les composés
sont colorés. En effet, un corps qui absorbe des radiations dans le spectre visible, apparaît
coloré. Les différentes couleurs du spectre visible correspondent chacune à un petit domaine
de longueur d’onde.

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Fig. II.16. Spectre Visible.

La couleur d’un composé est le complémentaire de ce qu’il absorbe comme le montre le


cercle chromatique de la figure II.17 (Violet/Jaune, Bleu/Orange, Vert/Rouge…..).

Fig. II.17. Cercle chromatique.


Le tableau suivant fait correspondre à chaque couleur absorbée celle complémentaire qui est
la couleur perçue par l’observateur.

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Tableau II.7. Correspondance entre couleur absorbée et complémentaire en Visible.

λ(nm) Couleur absorbée Couleur complémentaire


400-420 Violet Jaune verdâtre
420-445 Bleu indigo Jaune
445-490 Bleu Orange
490-510 Bleu vert Rouge
510-530 Vert Pourpre
530-545 Vert jaune Violet
545-580 Jaune Bleu indigo
580-630 Orange Bleu
630-720 Rouge Bleu vert

Remarque:
La couleur dépend donc de la manière dont la substance éclairée réagit sous la lumière
blanche. En effet les objets prennent une couleur déterminée en absorbant certaines couleurs
et en réfléchissant les autres. Les rayons lumineux renvoyés donnent la couleur à l’objet. Par
exemple un minéral est jaune parce qu’il absorbe tous les rayonnements lumineux (rouge,
bleu….) sauf le jaune. Un minéral blanc réfléchit toutes les couleurs, tandis qu’un noir
absorbe toutes les couleurs.

II.11. Applications de la spectroscopie UV-Vis


II.11.1. Analyse qualitative
 Les spectres UV fournissent généralement moins de renseignements sur la structure
moléculaire de composés comparés aux spectres RMN ou IR. Les principales
caractéristiques pouvant être détectés sont les systèmes à liaisons multiples, conjugués
ainsi que les hétéroatomes.
 Néanmoins, on les utilise soit pour une confirmation soit pour une identification grâce
à des règles empiriques et à la comparaison avec des spectres-références.

II.11.2. Analyse quantitative


L’analyse quantitative organique est cependant plus importante dans l’UV-Vis. Elle
permet le dosage aussi bien des impuretés que du produit principal par application de la
loi de Beer-Lambert.

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Le dosage par spectroscopie UV-visible suppose que les espèces mises en jeu sont
colorées. Dans un dosage par étalonnage, on procède comme suit :
 A partir du spectre d'absorption, définir graphiquement λ max ;
 Etablir la courbe d'étalonnage à partir de solution colorées dont on connaît les
concentrations. C'est à dire tracer A=f(c) en choisissant λ max. Si la solution
est suffisamment diluée, la courbe obtenue est une droite passant par l'origine.
 Mesurer l'absorbance de la solution inconnue
 Lire graphiquement la concentration correspondante.

Fig. II.18. Exemple d’un dosage UV-Vis par étalonnage.

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