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INGÉNIERIE DES TRANSPORTS

Ti602 - Systèmes ferroviaires

Infrastructure ferroviaire,
exploitation et sécurité

Réf. Internet : 42576 | 5e édition

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III
Cet ouvrage fait par tie de
Systèmes ferroviaires
(Réf. Internet ti602)
composé de :

Infrastructure ferroviaire, exploitation et sécurité Réf. Internet : 42576

Matériel roulant ferroviaire Réf. Internet : 42630

Signalisation et gestion des circulations Réf. Internet : 42631

Sciences et techniques transverses appliquées aux systèmes Réf. Internet : 42698


ferroviaires

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IV
Cet ouvrage fait par tie de
Systèmes ferroviaires
(Réf. Internet ti602)

dont les exper ts scientifiques sont :

François LACÔTE
Directeur honoraire à SNCF (Matériel et Recherche et Innovation), ancien
Directeur technique (CTO) d'Alstom Transport

Pierre CHAPAS
Ingénieur DPE, Senior Expert (honoraire), ALSTOM Transport

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V
Les auteurs ayant contribué à cet ouvrage sont :

Jean-Louis BOULANGER
Pour les articles : D5560 – TRP3306

Pierre CHAPAS
Pour les articles : D5540 – TRP3000 – TRP3050

Patrick CHARPENTIER
Pour l’article : AG8110

Raymond DEROCHE
Pour l’article : M3070

Chadi EL BOUSTANI
Pour l’article : TRP3064

Anna GIGANTINO
Pour l’article : TRP3314

Alain SAUVANT
Pour l’article : TRP3072

Etienne TRICAUD
Pour l’article : TRP3074

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VI
Infrastructure ferroviaire, exploitation et sécurité
(Réf. Internet 42576)

SOMMAIRE

1– Exploitation, gestion opérationnelle et sécurité Réf. Internet page

Traction ferroviaire. Équipements d'exploitation et de sécurité D5540 11

Maîtrise du SIL et gestion des certificats. Domaine ferroviaire D5560 15

Paramétrage des logiciels ferroviaires selon la norme CENELEC en 50128 : 2011 TRP3306 21

Interopérabilité ferroviaire dans l'Union européenne TRP3314 27

Conception des gares TRP3074 33

L'économie du système ferroviaire TRP3072 37

2– Fret ferroviaire et logistique Réf. Internet page

Transport ferroviaire de fret AG8110 45

3– Alimentation en énergie électrique Réf. Internet page

Alimentation en énergie des trains TRP3000 51

4– Voie Réf. Internet page

Voie ferrée : composants, construction et maintenance TRP3050 57

Rails de chemins de fer. Aspects métallurgiques M3070 61

Longs rails soudés. Efforts longitudinaux et interaction rail-structure TRP3064 65

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VII
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Infrastructure ferroviaire, exploitation et sécurité
(Réf. Internet 42576)

1
1– Exploitation, gestion opérationnelle et sécurité Réf. Internet page

Traction ferroviaire. Équipements d'exploitation et de sécurité D5540 11

Maîtrise du SIL et gestion des certificats. Domaine ferroviaire D5560 15

Paramétrage des logiciels ferroviaires selon la norme CENELEC en 50128 : 2011 TRP3306 21

Interopérabilité ferroviaire dans l'Union européenne TRP3314 27

Conception des gares TRP3074 33

L'économie du système ferroviaire TRP3072 37

2– Fret ferroviaire et logistique

3– Alimentation en énergie électrique

4– Voie

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1

10
Référence Internet
D5540

Traction ferroviaire
Équipements d’exploitation et de sécurité
par Pierre CHAPAS
1
Ingénieur DPE 1977 – EUR ING
Senior Expert ferroviaire

1. Exploitation ferroviaire .......................................................................... D 5 540 — 2


1.1 Objectifs et optimisation ............................................................................. — 2
1.2 Moyens et catégories d’exploitation.......................................................... — 2
2. Sécurité des circulations ....................................................................... — 4
2.1 Risques liés à la circulation des trains ....................................................... — 4
2.2 Composantes de la sécurité des circulations ............................................ — 4
3. Principes de la signalisation ................................................................. — 5
3.1 Espacement des trains, cantonnement, circuit de voie............................ — 5
3.2 Protection des itinéraires ............................................................................ — 6
3.3 Contrôle d’exécution ................................................................................... — 6
3.4 Cas particulier du tramway ......................................................................... — 8
4. Pilotage automatique ............................................................................. — 8
4.1 Principe de « l’Automatic Train Operation »............................................... — 9
4.2 Automatisme intégral.................................................................................. — 9
5. Exploitation en traction électrique : spécificités ........................... — 9
5.1 Gestion de l’alimentation en énergie......................................................... — 10
5.2 Signalisation propre aux lignes électrifiées .............................................. — 10
6. Installations au sol .................................................................................. — 10
6.1 Équipement des voies ................................................................................. — 10
6.2 Postes d’aiguillages et de circulation......................................................... — 11
7. Équipement des engins de traction .................................................... — 11
7.1 Répétition des signaux................................................................................ — 11
7.2 Surveillance du conducteur ........................................................................ — 11
7.3 Informations ponctuelles et continues ...................................................... — 11
7.4 Liaisons radio............................................................................................... — 11
8. Conclusion ................................................................................................. — 12
Références bibliographiques ......................................................................... — 12

a circulation des trains relève de la composante « exploitation » du système


L ferroviaire (voir [D 5 510, § 1]). Elle obéit à des règles et procédures
concourant à l’objectif premier de la satisfaction du client en toute sécurité au
sein d’un système viable économiquement.
Dès les origines du chemin de fer, la sécurité de la marche des trains fut la pré-
occupation majeure. Elle se renforça au fur et à mesure de l’accroissement des
performances en termes de charges remorquées et de vitesses pratiquées. Il est
en effet évident que l’énergie cinétique acquise lors du déplacement d’un lourd
convoi met en jeu le paramètre fondamental qui est sa distance d’arrêt (voir
[D 5 525, § 3.1]). Par ailleurs, la configuration d’un réseau est, dans la plupart des
cas, complexe, comportant des itinéraires sécants ou parcourus dans les deux
sens de circulation. L’ensemble de ces paramètres exige non seulement une pro-
grammation très précise mais une surveillance permanente du trafic, apte à faire
face aux aléas et aux situations dégradées pouvant survenir à tout moment.
Parution : mai 2007

Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie


est strictement interdite. − © Editions T.I. D 5 540 − 1

11
Référence Internet
D5540

TRACTION FERROVIAIRE _________________________________________________________________________________________________________________

L’acteur central de la circulation des trains est l’homme, qu’il soit au sol ou aux
commandes du train. Au cœur de l’exploitation réside ce dialogue permanent
entre le « mobile » et le « sol ». Pour permettre ce dialogue, un langage visuel
« codé » a été mis en place sous forme de « signaux » balisant la ligne de chemin
de fer. L’esprit de ce dialogue repose sur une obéissance « passive » et
« absolue », éliminant toute improvisation. Mais l’homme a ses limites, physio-
logiques notamment, de sorte qu’une défaillance est toujours possible. À ce
1 stade, l’automatisme entre en jeu pour aider, contrôler, voire surveiller l’activité
humaine. C’est le formidable développement des systèmes de sécurité qui ont
investi toutes les fonctions liées à la circulation des trains, allant jusqu’au
« pilotage automatique » largement pratiqué en transport urbain du type métro.
Les technologies de la mécanique puis celles de l’électromécanique et de
l’électronique et de nos jours, l’informatique, sont à la base de l’ensemble des
fonctions de sécurité de l’exploitation.
L’objectif du présent dossier est de décrire l’architecture des principaux systè-
mes de sécurité ferroviaire, leurs composantes et leurs applications actuelles.
Bien entendu, il ne peut être question de décrire tous les systèmes en service ;
une encyclopédie n’y suffirait pas. Nous dégageons les caractères essentiels en
décrivant leurs évolutions.
Nous traitons l’aspect particulier de l’exploitation des lignes électrifiées en ter-
mes de régulation de l’alimentation en énergie, aussi vitale que l’exploitation
des lignes classiques.
Le passager d’un train ou d’un métro ne peut réaliser la complexité de la « toile
sécuritaire » qui, en permanence, autorise le bon déroulement de son voyage ou
de son déplacement quotidien. Cette « toile » ne cesse d’évoluer en bénéficiant
des développements du génie électrique ; elle contribue largement à la satisfac-
tion des clients du transport ferroviaire et à sa rentabilité.
L’un des développements majeurs de l’époque actuelle concerne les réseaux
européens. Ils doivent en effet relever le défi de « l’interopérabilité » apte à assu-
rer la continuité des circulations à travers deux ou plusieurs pays. C’est pourquoi
le présent dossier est complété par l’étude spécifique de l’« ERTMS » – European
Railway Trafic Management System – (voir [D 5 545]).

Il importe donc de tirer le meilleur parti de l’existant selon les prin-


1. Exploitation ferroviaire cipes d’optimisation suivants :
— gestion du trafic par l’adéquation entre la demande et l’offre à
chaque période, journalière, hebdomadaire et annuelle, et par la
1.1 Objectifs et optimisation résolution de situations dégradées dans les délais les plus brefs ;
— gestion des ressources par la collecte des informations relati-
ves aux matériels et au personnel (disponibilité, maintenance) ;
Le terme « exploitation » désigne l’entité en charge de la ges- — amélioration constante du service : fréquence des circulations,
tion du trafic. temps de parcours, information des clients, qualité (réduction des
retards et incidents).

Ses objectifs sont :


— la satisfaction des clients en terme de réponse à la demande de 1.2 Moyens et catégories d’exploitation
transport ;
— la sécurité de la circulation des trains ;
— la qualité de la prestation offerte en terme d’horaires garantis ; 1.2.1 Moyens d’exploitation
— le coût optimal contribuant à la rentabilité du système
ferroviaire. L’exploitation ferroviaire dispose de quatre moyens : le réseau, le
parc de matériel roulant, le système de sécurité associé, les entités
La conciliation des trois premiers objectifs avec un coût minimal
de régulation.
est fortement contrariée pour deux raisons :
— la plupart des réseaux ont été conçus et réalisés en seconde 1.2.1.1 Réseau
moitié du XIXe siècle ; les enjeux et les contraintes actuelles sont
complètement différentes ;
— certaines missions assignées au chemin de fer relèvent de C’est l’ensemble des lignes reliant les points de destination à
choix politiques. desservir.

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D 5 540 − 2 est strictement interdite. − © Editions T.I.

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Référence Internet
D5540

________________________________________________________________________________________________________________ TRACTION FERROVIAIRE

H
2a 2b 2c
A B 1 C D E F

2d 2e

1
G J
2
2f 2g
Itinéraire 1 : A – B - C – G – J
Itinéraire 2 : J – H – G - A

Figure 1 – Itinéraires Figure 2 – Configurations d’un réseau

Chaque liaison est réalisée par un ou plusieurs « itinéraires » 1.2.1.3 Systèmes de sécurité associés
(figure 1). Ceux-ci indiquent donc un chemin parcouru et un sens de
parcours.
Ils comprennent : la signalisation – étudiée (§ 3) – et la
L’architecture du réseau est basée sur différentes configurations : réglementation.
— la voie unique parcourue dans les deux sens de circulation
(figure 2 a) ; Cette dernière explicite les dispositions prises par chacun des
— la double voie ; chaque voie est dédiée à un seul sens acteurs : aiguilleurs, agents de sécurité des terminaux et gares,
(figure 2 b) ; régulateurs, agents de conduite, etc.
— la double voie « banalisée » ; chaque voie est parcourue dans
les deux sens de circulation (figure 2 c) ; 1.2.1.4 Entités de régulation
— la communication permet la liaison entre deux voies
(figure 2 d) ; Les moyens au sol mis en œuvre pour assurer les fonctions de
l’exploitation sont organisés pour réaliser un programme de circula-
— la bifurcation permet la création d’un itinéraire (figure 2 e) ;
tion. À leur tête une instance de commandement – le PC – coor-
— l’évitement ; c’est un segment de double voie permettant le donne et dispose :
croisement de deux circulations (figure 2 f) ;
— des aiguilleurs chargés de l’établissement des itinéraires ;
— le tiroir constitue une voie d’évitement en cul de sac (garage)
— du régulateur « circulations » chargé de leur suivi en temps
(figure 2 g).
réel ;
— du régulateur « sous-station » – ou « énergie » – chargé de
1.2.1.2 Parc du matériel roulant l’alimentation en énergie pour les lignes électrifiées.
Ce poste de commandement est en liaison avec les établisse-
C’est l’ensemble des matériels – remorqués (voitures et ments gérant le matériel et le personnel.
wagons) et moteurs (locomotives, automotrices, rames) – aptes ■ Aiguilleurs : si au début du chemin de fer, chaque branchement –
à satisfaire la demande de transport. ou aiguillage – était manœuvré à « pied-d’œuvre » par un aiguilleur,
très tôt ils ont été groupés en « poste ». Les agents préposés
Ce parc est réparti en établissements (appelés autrefois commandent les itinéraires, c’est-à-dire plusieurs aiguillages asso-
« dépôts »), responsables de leur gestion et de leur maintenance. Il ciés à leur signalisation de protection.
est à disposition de l’exploitant. Un parc est dimensionné en fonc- ■ Régulateur : sa mission est de gérer une ligne, ou portion de
tion du trafic de pointe. ligne. Il dispose du graphique « espace – temps » théorique des cir-
Ces établissements gèrent également le personnel de conduite et culations et est informé en temps réel par les agents de sécurité des
le personnel commercial d’accompagnement. Un établissement a gares, ou par une détection automatique, du passage de chaque
en charge le programme d’emploi des matériels et personnels sous circulation (figure 4). Il trace le graphique réel à partir duquel il est
forme de « roulements » établi sur plusieurs jours. Un exemple de en mesure de résoudre les conflits et incidents, par des garages,
roulement de locomotives est donné en figure 3. doublement sur voie banalisée, etc.

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24
Jour
1 Metz Modane
4321 56789
Dijon

Jour
2 Calais
56777 4342 Thionville

Une locomotive part de Dijon en tête du train 4321 pour Metz, arrivée 7h00 ; elle en repart à 8h30 pour remorquer le 56789,
arrivée à Modane à 17h00 ; départ à 21h01 avec le train 56777 pour Calais où elle arrive le jour 2 à 10h04. Elle en repart à 13h00
en tête du 4342. Et ainsi de suite, la journée1 étant assurée par une autre locomotive de l'établissement.

Figure 3 – Principe du « roulement » du matériel roulant

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D5560

Maîtrise du SIL
et gestion des certificats
Domaine ferroviaire 1

par Jean-Louis BOULANGER


Docteur en science de l’informatique
Évaluateur-certificateur

1. Contexte normatif .................................................................................... D 5 560 - 2


1.1 Normes génériques ..................................................................................... — 2
1.2 Aspect ferroviaire......................................................................................... — 3
2. Mise en œuvre des normes CENELEC EN 50126, EN 50128
et EN 50129 — 5
2.1 Rappels ......................................................................................................... — 5
2.2 Accident ........................................................................................................ — 7
2.3 Mise en sécurité ........................................................................................... — 9
2.4 Nouvelles exigences .................................................................................... — 18
2.5 Contextes normatifs..................................................................................... — 19
2.6 Certification .................................................................................................. — 20
3. Cas des normes CEI/IEC 61508 et 61511 .......................................... — 23
3.1 Graphe de risque.......................................................................................... — 23
3.2 LOPA ............................................................................................................. — 24
3.3 Bilan .............................................................................................................. — 24
4. Conclusion.................................................................................................. — 24
Pour en savoir plus ........................................................................................... D 5 560

es systèmes critiques et sûrs de fonctionnement sont caractérisés par le


L fait qu’une défaillance peut avoir des conséquences graves tant sur la vie
des personnes que du point de vue économique et/ou environnemental. Dans
plusieurs domaines, dont le domaine ferroviaire, il existe des référentiels nor-
matifs qui imposent la démonstration de la sécurité du système réalisé. Ces
référentiels normatifs sont complétés par des décrets et des arrêtés européens
et/ou nationaux qui décrivent les règles à respecter.
Ces référentiels recommandent une séparation des rôles et des
responsabilités :
– une équipe est en charge de la réalisation du système (développement,
vérification et validation) ;
– tandis qu’une autre est en charge de l’allocation des SIL de la démons-
tration de la sécurité du système (réalisation d’études de sécurité, du dossier
de sécurité et analyse de la complétude des travaux) ;
– une troisième équipe, indépendante des deux autres, est en charge d’éva-
luer le niveau de sécurité (Safety Integrity Level SIL) effectivement atteint.
L’évaluation peut être formalisée ou non sous forme de certificat.
Le référentiel ferroviaire est composé de normes spécifiques (CENELEC
Parution : novembre 2011

EN 50126, EN 50128 et EN 50129) qui ont été déclinées de la norme générique


CEI/IEC 61508.

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Référence Internet
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MAÎTRISE DU SIL ET GESTION DES CERTIFICATS __________________________________________________________________________________________

La norme CEI/IEC 61508 caractérise les exigences à mettre en œuvre pour


démontrer la sécurité d’un système électrique/électronique/électronique pro-
grammable. Cette norme a été déclinée pour différents domaines (ferroviaire,
automobile, etc.). La norme CEI/IEC 61511 est dédiée aux automates disposant
d’un certificat et utilisant les langages normalisés (CEI/IEC 1131).
Dans le cadre de ce dossier sont décrits successivement :

1 – le contexte normatif ;
– le processus d’allocation des niveaux de sécurité en allant de l’impact de
l’événement redouté sur le système aux éléments de plus bas niveaux que
sont le matériel et le logiciel ;
– les aspects évaluation et certification ;
– une présentation de l’utilisation des normes connexes qui sont les normes
CEI/IEC 61508 et la CEI/IEC 61511.

Principaux sigles Principaux sigles (suite)


AEEL Analyse des Effets des Erreurs du Logiciel PFH ProbabilIty of Failure per Hour
AMDE Analyse des Modes de Défaillsances PFD Probability of Failure on Demand
et de leurs Effets
RAMS Reliability, Availability, Maintainability, Safety
APD Analyse Préliminaire des Dangers
RAMSS Reliability, Availability, Maintainability, Safety,
CENELEC Comité Européen de Normalisation Security
ÉLECtrotechnique
RER Réseau Express Régional
COFRAC COmité FRançais d’Accréditation
RSD Registre des Situations Dangereuses
E/E/PES Électriques/électroniques/électroniques
programmables SAET Système d’Automatisation de l’Exploitation
des Trains
EOQA Expert ou Organisme Qualifié Agréé
SACEM Système d’Aide à la Conduite à l’Exploitation
EPSF Établissement Public de Sécurité Ferroviaire et à la Maintenance
ERA European Railway Agency SIL Safety Integrity Level
ERTMS European Rail Traffic Management System SIF Fonction de sécurité instrumentée
FDMS Fiabilité, Disponibilité, Maintenabilité SSIL Software Safety Integrity Level
et Sécurité-innocuité
STRM-TG Service Technique des Remontées Mécaniques et
FDMSS Fiabilité, Disponibilité, Maintenabilité, des Transports Guidés
Sécurité-innocuité et Sécurité-confidentialité
THR Tolerable Hazard Rate
FR Failure Rate
UGTMS Urban Guided Transport Management System
FTA Fault Tree Analysis
HAZOP HAZard OPerability
HL Hazard Log 1. Contexte normatif
IEC International Electrotechnical Commission
Il ne s’agit pas de présenter l’ensemble des normes et leurs
ISA Independant Safety Assessor liens, mais juste de situer quelques points de repère qui sont utiles
pour la suite.
ISO International Organization for Standardization
Une présentation des normes applicables par domaine (aéro-
LOPA Layers of Protection Analysis nautique, automobile, ferroviaire, nucléaire, spatial et système à
base d’automate) et une comparaison de ces normes (points simi-
METEOR MÉTro Est Ouest Rapide laires et différences) sont proposées en bibliographie [4] [5].
MODUrban Modular Urban Guided Rail System
NoBo Notified Body 1.1 Normes génériques
OS Operating System 1.1.1 Présentation
PLC Programmable Logic Controller Les systèmes électriques/électroniques sont utilisés depuis des
(Automate programmable industriel) années pour exécuter des fonctions liées à la sécurité dans la plu-

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D 5 560 – 2 est strictement interdite. – © Editions T.I.

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Référence Internet
D5560

__________________________________________________________________________________________ MAÎTRISE DU SIL ET GESTION DES CERTIFICATS

CEI/IEC 61508
Standard général

CEI/IEC 61511
Norme sectorielle
CEI/IEC 61513
Norme sectorielle
CEI/IEC 62061
Norme sectorielle
CENELEC EN 5012x
Ferroviaire
ISO 26262
Domaine
1
Processus industriel Nucléaire Machine automobile

Figure 1 – CEI/IEC 61508 et les déclinaisons

part des secteurs industriels. La norme CEI/IEC 61508 présente une La norme sectorielle « Procédés continus » nommée
approche générique de toutes les activités liées au cycle de vie de CEI/IEC 61511 apporte des précisions en restreignant le champ ini-
sécurité de systèmes électriques/électroniques/électroniques pro- tial d’application de la norme CEI/IEC 61508 au contexte tradition-
grammables (E/E/PES) qui sont utilisés pour réaliser des fonctions nel des procédés continus.
de sécurité.
La norme CEI/IEC 61508 est constituée de sept parties : 1.1.2 Niveaux de sécurité
– CEI/IEC 61508-1. Exigences générales ;
– CEI/IEC 61508-2. Exigences pour les systèmes électriques/ La norme CEI/IEC 61508 définit la notion de SIL (Safety Integrity
électroniques/électroniques programmables concernés par la Level ). Le SIL permet de quantifier le niveau de sécurité d’un sys-
sécurité ; tème. Le niveau d’intégrité de sécurité 1 (SIL 1) est le plus bas
– CEI/IEC 61508-3. Exigences pour le logiciel ; niveau d’intégrité de la sécurité et le niveau d’intégrité de sécurité
– CEI/IEC 61508-4. Définitions et abréviations ; 4 (SIL 4) est le niveau d’intégrité de la sécurité le plus élevé.
– CEI/IEC 61508-5. Exemples de méthodes pour la détermination Les quatre niveaux de SIL pour une fonction de sécurité sont
des niveaux d’intégrité de la sécurité. caractérisés par l’impact des défaillances :
– CEI/IEC 61508-6. Directives pour l’application de la CEI/IEC – SIL 4 : impact catastrophique (niveau le plus haut) ;
61508-2 et de la CEI/IEC 61508-3 ; – SIL 3 : impact sur la communauté ;
– CEI/IEC 61508-7. Vue d’ensemble de mesures et de techniques. – SIL 2 : protection majeure de l’installation et de la production
La norme CEI/IEC 61508 propose une approche globalisée de la ou risque de blessures pour les employés ;
sécurité, au sens sécurité innocuité, que l’on pourrait comparer au – SIL 1 : protection mineure de l’installation et de la production
système ISO 9000 pour la qualité. (le plus bas).
La norme détaille les exigences nécessaires pour atteindre
La norme CEI/IEC 61508 ne couvre pas les aspects confiden- chaque niveau d’intégrité de la sécurité. Ces exigences sont plus
tialité et/ou intégrité qui sont liés à la mise en place de précau- sévères aux niveaux d’intégrité de la sécurité les plus élevés de
tion visant à empêcher des personnes non autorisées à manière à garantir une probabilité de défaillance dangereuse plus
endommager et/ou affecter la sécurité réalisée par le ou les faible.
systèmes E/E/PE concerné par la sécurité. On pense notam- Le SIL, niveau d’intégrité de sécurité (Safety Integrity Level ),
ment à gérer les aspects réseaux afin d’éviter les intrusions. permet de spécifier les prescriptions concernant l’intégrité des
fonctions de sécurité à allouer aux systèmes E/E/PE.
La norme CEI/IEC 61508 est en totale cohérence avec la
convergence que l’on a pu observer entre les différents secteurs
industriels (figure 1) : aéronautique, nucléaire, ferroviaire, automo- 1.2 Aspect ferroviaire
bile, manufacturier, etc.). Le contenu de la norme CEI/IEC 61508 est
tellement complexe, voire inhabituel qu’il est nécessaire d’être Un bilan de la situation concernant la mise en œuvre des nor-
guidé [21] [29]. La figure 1 fait apparaître un lien entre la norme mes ferroviaires a été dressé [10].
CEI/IEC 61508 et la norme CEI/IEC 61513, mais ce lien n’est pas cor- Les projets ferroviaires sont aujourd’hui régis par des textes
rect. En effet, les normes nucléaires existaient bien avant la norme (décrets, arrêtés...) et un référentiel normatif (CENELEC EN 50126,
CEI/IEC 61508 et le lien n’est qu’un lien de nommage. EN 50129 et EN 50128) visant à définir et à atteindre certains objec-
Dans la plupart des cas, la sécurité est obtenue par plusieurs tifs de FMDS (Fiabilité, Maintenabilité, Disponibilité et Sécurité).
systèmes de diverses technologies (mécanique, hydraulique, Les trois normes permettent de couvrir les aspects concernant la
pneumatique, électrique, électronique, électronique program- sécurité-innocuité (SAFETY) du système jusqu’aux éléments maté-
mable). La stratégie de sécurité doit prendre en compte tous les riel et/ou logiciel.
éléments contribuant à la sécurité. Ainsi, la norme CEI/IEC 61508
fournit un cadre d’analyse qui s’applique à des systèmes relatifs à 1.2.1 Présentation
la sécurité basée sur d’autres technologies, puis traite spécifi-
quement des systèmes à base d’électronique. Comme le montre la figure 1, le référentiel ferroviaire CENELEC
Du fait de la grande variété des applications électriques/électro- EN 5012x est une déclinaison de la norme générique CEI/IEC 61508
niques/électroniques programmables et des degrés de complexité qui tient compte des spécificités du domaine ferroviaire et des
très divers, la nature exacte des mesures de sécurité à mettre en expériences réussies (SACEM, TVM, SAET-METEOR, etc.).
œuvre dépend de facteurs propres à l’application ; c’est pourquoi, Le référentiel ferroviaire CENELEC EN 5012x est applicable aussi
dans la norme CEI/IEC 61508, il n’y a pas de règles générales mais bien aux applications ferroviaires de type « urbaines » (métro,
des préconisations concernant les méthodes d’analyse à mettre en RER, etc.) qu’aux applications ferroviaires classiques (ligne grande
œuvre. vitesse, train conventionnel, fret).

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D5560

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sentés dans le dossier [BM 8 070]. Des exemples d’architecture sur


de fonctionnement sont donnés en bibliographie [13] [15].
Système ferroviaire complet
Ces normes sont complétées par une norme liée aux aspects
« transmission ». La norme CENELEC EN 50159 est décomposée
en deux parties :
Système de signalisation – une partie EN 50159-1 dédiée aux réseaux fermés ;
CENELEC
ferroviaire complet EN 50126
– une partie EN 50159-2 dédiée aux réseaux ouverts.

1 CENELEC
EN 50159-1 et -2
CENELEC CENELEC
EN 50128 EN 50129
La figure 4 reprend le cycle de vie de la sécurité dans le cadre du
domaine ferroviaire. Le cycle est décomposé en trois étapes :
– analyses préliminaires (étapes 1, 2 et 3) ;
– réalisation du système, sous-système et/ou équipements
Sous-système individuel
(étapes de 4 à 9) ;
– mise en service et utilisation du système (étapes de 10 à 14).
D’après la norme CENELEC EN 50129, les exigences sont sépa-
rées en exigences relatives à la sécurité d’un système et exigences
Partie individuelle non relatives à la sécurité.
de l’équipement
■ La norme CENELEC EN 50128 permet de manager la sécurité des
applications logicielles. Les techniques de mise en sécurité d’une
application logicielle sont présentées dans le dossier [BM 8 071].
Figure 2 – Normes applicables aux systèmes ferroviaires
■ La norme CENELEC EN 50126 propose les étapes suivantes
(nous ne considérons que les aspects réalisation) pour spécifier et
démontrer la sécurité d’un système :
EN 50126 – définition du système et conditions d’application : profil de
mission, description du système, stratégie d’exploitation et de
Système ferroviaire maintenance et identification des contraintes générées par l’exis-
complet tant (autre système ou autre ligne préalablement développés) ;
– analyse de risque ;
EN 50159-1
EN 50159-2 – exigences du système : analyser les exigences, spécifier le sys-
Système de tème et l’environnement, définir les critères de démonstration et
signalisation complet d’acceptation du système ;
Système de – allocation des exigences du système : spécifier les exigences
communication sous-systèmes, équipements et/ou composants et définir les
critères d’acceptation de ces éléments ;
Sous-système – conception et mise en œuvre : réaliser la conception, le déve-
loppement et procéder aux vérifications et aux validations.
EN 50129 EN 50128
1.2.2 Mise en œuvre
Hardware Logiciel
L’objet du référentiel CENELEC est de :
1. fournir un référentiel commun en Europe afin de favoriser
Figure 3 – Organisation des normes CENELEC applicables
l’élargissement des marchés des constituants du ferroviaire et
aux systèmes ferroviaires l’interopérabilité, l’interchangeabilité et la « cross-acceptance » des
constituants ferroviaires ;
2. répondre aux spécificités du domaine ferroviaire.
Une des restrictions sur ce référentiel ferroviaire CENELEC La sécurité, comme élément de la Sûreté de Fonctionnement, est
EN 5012x est liée au domaine d’application des normes CENELEC obtenue par la mise en place de concepts, méthodes, outils, tout
EN 50128 et CENELEC EN 50129 qui sont normalement limitées au long du cycle de vie. Une étude de sécurité nécessite l’analyse
aux sous-systèmes de signalisation (figure 2). Pour les architec- des défaillances du système. Il faut s’attacher à identifier et quanti-
tures matérielles utilisées dans le cadre d’autres sous-systèmes, il fier la gravité des conséquences potentielles et, dans la mesure du
existe d’anciennes normes qui restent applicables (NF F 00-101, possible, la fréquence prévisible de ces défaillances.
etc.). Des travaux sont en cours au sein des groupes de certifi-
cation pour étendre et généraliser ces deux normes au système Parmi les actions de réduction de risque, permettant d’atteindre
ferroviaire dans son ensemble. un niveau de risque acceptable, la norme CENELEC EN 50129
décrit l’allocation d’objectifs de sécurité aux fonctions du système
Dans le domaine ferroviaire, le référentiel normatif CENELEC et de ses sous-systèmes. Le niveau d’intégrité de sécurité (SIL) est
(figure 3) est constitué de : défini comme un des niveaux discrets pour spécifier les exigences
– la norme EN 50126 décrit les méthodes à mettre en œuvre d’intégrité de sécurité des fonctions de sécurité allouées aux systè-
pour spécifier et démontrer la fiabilité, disponibilité, maintenabilité mes de sécurité.
et sécurité (FMDS) ; La norme CENELEC EN 50128 est plus particulièrement dédiée
– la norme EN 50128 décrit les actions à entreprendre pour aux aspects développement des logiciels pour le domaine ferro-
démontrer la sécurité des logiciels ; viaire. Concernant les logiciels, le SSIL (Software SIL ) permet de
– la norme EN 50129 décrit la structure du dossier de sécurité et définir différents niveaux de criticité de 0 (pas de danger) à 4 (criti-
les moyens à mettre en œuvre pour maîtriser la sécurité des que).
éléments matériels (Hardware).
Alors que les exigences de sécurité ont toujours été prises en
■ La norme CENELEC EN 50129 est donc plus orientée sur la maî- compte au sein des systèmes complexes (transport ferroviaire,
trise de la sécurité des architectures matérielles (Hardware ). Les transport aérien, central nucléaire...). Les obligations contractuelles
principes de sécurisation des architectures matérielles sont pré- sur les performances amènent aujourd’hui les industriels du

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D5560

__________________________________________________________________________________________ MAÎTRISE DU SIL ET GESTION DES CERTIFICATS

Concept - 1 Modification/mise à niveau - 12

Définition du système Acceptation Exploitation et Retrait du service


et conditions d’application - 2 du système - 10 maintenance - 11 et dépose - 14

Analyse du risque - 3 Surveillance des performances - 13


1
Exigence du système - 4 Validation du système - 9

Allocation des exigences


du système - 5

Conception et réalisation - 6
Installation - 8
(nécessité de reprendre le cycle)

Fabrication - 7

Figure 4 – Cycle de vie de la sécurité

domaine ferroviaire, par exemple, à une maîtrise totale des para-


mètres agissant sur la Fiabilité, la Maintenabilité et la Disponibilité 2. Mise en œuvre des normes
(FMD). Le choix des normes et des standards est de la responsabi-
lité du concepteur et/ou du constructeur.
CENELEC EN 50126,
EN 50128 et EN 50129
1.2.3 Sécurité vs disponibilité
Les normes décrivent les processus, méthodes et outils permet-
tant d’atteindre et de démontrer le niveau de SIL requis. Il s’agit 2.1 Rappels
d’une obligation de moyens qui s’ajoute aux obligations de résul-
tats quantitatifs et/ou qualitatifs. Avant tout, il nous faut commencer par rappeler ce qu’est la
Pour l’instant, l’accent a été mis sur l’aspect sécurité (au sens sûreté de fonctionnement.
innocuité) car la sécurité reste le principal aspect de la sûreté de
fonctionnement qu’il est obligatoire d’analyser. Il y a peu ou pas Définition 1 (sûreté de fonctionnement). – La sûreté de fonc-
d’exigence de fiabilité ou de disponibilité qui provienne du cadre tionnement se définit comme la qualité du service délivré par
normatif. un système, qualité telle que les utilisateurs de ce service
Dans le cadre des systèmes critiques (SIL 3 et 4), les principes de puissent placer une confiance justifiée dans le système qui le
mise en sécurité sont en contradiction avec la disponibilité du délivre.
système.
À titre d’exemple, dans le domaine ferroviaire, l’état de sécurité qui Nous utilisons ici la définition 1 mais il est à noter qu’il existe
est l’« arrêt du train » a un impact fort sur la disponibilité globale du des approches plus techniques de la sûreté de fonctionnement. À
système. titre d’information pour la norme CEI/IEC 1069, la sûreté de fonc-
tionnement est la mesure qui permet de montrer que ledit système
Par contre, les obligations induites pour réaliser un système cri- exécute exclusivement et correctement la (les) tâche(s) qui lui est
tique permettent d’améliorer la fiabilité des logiciels. Cette fiabilité (sont) attribué(s).
est induite par une maîtrise de la complexité et de la qualité du
logiciel. Pour de plus amples informations sur la sûreté de fonction-
nement et sa mise en œuvre, il est conseillé de se reporter à la
Dans le cadre des applications logicielles de type non critiques bibliographie [24] [31].
(SIL 0) et peu critiques (SIL 1 et SIL 2), le processus de réalisation
des logiciels est moins contraint (tant au niveau du choix du lan- La figure 5 montre qu’un système est un ensemble structuré
gage et des outils que des processus mis en œuvre), ce qui induit (systèmes informatiques, processus et contexte d’utilisation) qui
une qualité du logiciel moindre qui entraîne une faible fiabilité des doit former un tout organisé.
logiciels. Pour être plus précis, dans le cadre des systèmes non cri-
tiques ou peu critiques, les industriels peuvent utiliser des produits
Nous nous intéressons seulement aux applications logiciel-
dits « sur étagère » (COTS Commercially available Off-The-Shelf).
La maîtrise de la qualité, ayant un impact direct sur la fiabilité et la les qui se trouvent dans la partie système informatique/
disponibilité, des COTS reste une question d’actualité. automatique.

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D5560

MAÎTRISE DU SIL ET GESTION DES CERTIFICATS __________________________________________________________________________________________

Équipement 1 Équipement 2 Processus Environnement

Logiciels Logiciels
Procédure/instruction d’utilisation
Capteurs

1 Matériels Matériels Maintenance

Lien avec d’autres systèmes

Logiciels
……
Actuateurs

Matériels
Système
Informatique/automatique Contexte
Équipement 3

Figure 5 – Système et interaction

Définition 2 (défaillance). – La défaillance (parfois appelée


panne) est une cessation de l’aptitude d’une unité fonctionnelle
Composant à accomplir une fonction requise. Comme l’accomplissement
d’une fonction requise exclut nécessairement certains
comportements et que certaines fonctions peuvent être spéci-
fiées en termes de comportement à éviter, l’occurrence d’un
comportement à éviter est une défaillance.

Système 1 Système 2 Les défaillances peuvent être aléatoires ou systématiques.


La défaillance aléatoire survient de manière non prévisible et se
Faute Impact d’une défaillance
trouve être le résultat d’un ensemble de dégradations qui touchent
Erreur Défaillance les aspects matériels du système. En général, la défaillance aléa-
toire peut être quantifiée du fait de sa nature (usure, vieillissement,
etc.).
Figure 6 – Chaîne fondamentale
La défaillance systématique est reliée de façon déterministe à
une cause. La cause de la défaillance ne peut être éliminée que par
La sûreté de fonctionnement est caractérisée par un ensemble une reprise du processus de réalisation (conception, fabrication,
d’attributs que l’on note FDMS (RAMS Reliability, Availability, documentation) ou une reprise des procédures. Étant donné son
Maintenability and Safety ) : caractère, la défaillance systématique n’est pas quantifiable. La
– la fiabilité (reliability ) ; défaillance est une manifestation externe observable d’une erreur.
– la disponibilité (availability ) ;
– la maintenabilité (maintainability ) ; Définition 3 (erreur). – L’erreur est une conséquence interne
– la sécurité (au sens sécurité-innocuité en anglais le terme d’une faute lors de la mise en œuvre du produit (une variable
safety est utilisé). ou un état du programme erroné).
De nouveaux attributs commencent à prendre une part relati-
vement importante tels la sécurité-confidentialité (au sens du Malgré toutes les précautions qui sont prises lors de la réali-
terme anglais security) et on parle maintenant de FDMSS (RAMSS sation d’un composant, celui-ci peut être soumis à des défauts de
Reliability, Availability, Maintenability, Safety and Security ). conception, à des défauts de vérification, à des défauts d’utili-
sation, à des défauts de maintien en condition opérationnelle, etc.
Comme cela est indiqué en bibliographie [23], la sûreté de fonc- La faute, terme le plus couramment admis, est donc l’introduction
tionnement d’un système complexe peut être mise à mal par trois d’un défaut dans le composant.
types d’évènements (figure 6) :
– les défaillances ; Définition 4 (faute). – Une faute est une non-conformité intro-
– les fautes ; duite dans le produit (par exemple un code erroné).
– les erreurs.
Les éléments du système sont soumis ; à des défaillances, ces À titre de bilan, il faut donc rappeler que la confiance dans la
défaillances peuvent amener le système dans des situations d’acci- sûreté de fonctionnement d’un système peut être compromise par
dents potentiels. Concernant les fautes, erreurs et défaillances, ces l’apparition des entraves que sont les fautes, les erreurs et les
éléments ont été présentés dans le cadre du chapitre 1 de [13]. défaillances.

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TRP3306

Paramétrage de logiciels
ferroviaires selon la norme
CENELEC EN 50128:2011
1
par Jean-Louis BOULANGER
Évaluateur-certificateur
Certifer (Anzin, France)

1. Norme CENELEC EN 50128:2011 ..................................................... TRP 3 306 - 2


1.1 Référentiel CENELEC ................................................................................ — 2
1.2 CENELEC EN 50128:2011.......................................................................... — 2
2. Données de paramétrage .................................................................... — 2
2.1 Problématique ........................................................................................... — 2
2.2 Système paramétré par les données....................................................... — 3
2.3 Caractérisation des données .................................................................... — 4
2.4 Inhibition de service.................................................................................. — 4
2.5 Synthèse .................................................................................................... — 5
3. Du système au logiciel......................................................................... — 5
3.1 Besoin ........................................................................................................ — 5
3.2 Ce que ne dit pas le référentiel CENELEC ............................................... — 7
4. Processus de préparation des données .......................................... — 7
4.1 Contexte..................................................................................................... — 7
4.2 Présentation de la section 8 de la norme 50128:2011 ............................ — 7
4.3 Processus de préparation des données .................................................. — 10
5. Conclusion............................................................................................... — 22
Pour en savoir plus ........................................................................................ Doc. TRP 3 306

es systèmes ferroviaires en charge de la signalisation ont la caractéristique


L de manipuler des données décrivant la topologie de la ligne qu’il gère. Ces
données topologiques sont dites invariantes car elles n’évoluent qu’après
travaux sur la ligne. Les données topologiques regroupent les feux de
signalisation, les aiguillages, les circuits de voie, les quais, la description de la
ligne, etc. Les données topologiques ne sont pas les seules données inva-
riantes utilisables par un système ferroviaire, il y a aussi les données liées aux
caractéristiques du train : masse, longueur, vitesse maximale, accélération
maximale, caractéristique du freinage, caractéristique des portes, temps de
sonnerie à la montée, etc.
La signalisation, mais aussi bien d’autres systèmes ferroviaires, peuvent
donc être construit sur la base d’une application générique (applicable à diffé-
rents sites et à différents utilisateurs) et d’un processus de paramétrage
permettant d’obtenir une application spécifique (dédiée à un site, à une utilisa-
tion, ou à un utilisateur).
La norme CENELEC 50128:2011 permet de traiter les deux aspects : le déve-
loppement d’une application logicielle générique, au travers de sa section 7, et
le développement d’un processus permettant de paramétrer une application
générique, au travers de sa section 8. L’objet de cet article est de présenter la
Parution : septembre 2013

problématique, les notions associées et les attendus de la préparation des don-


nées, au travers d’une analyse de la norme CENELEC 50128:2011.
Un glossaire est présenté en fin d’article.

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TRP3306

PARAMÉTRAGE DE LOGICIELS FERROVIAIRES SELON LA NORME CENELEC EN 50128:2011 _________________________________________________________

1. Norme SSIL
CENELEC EN 50128:2011
Le SSIL est un objectif d’intégrité de la sécurité qu’il faut
atteindre. Cet objectif n’est pas mesurable, c’est pourquoi la
Les projets ferroviaires sont aujourd’hui régis par des textes norme CENELEC EN 50128 introduit la notion d’évaluation.
(décrets, arrêtés, etc.) et un référentiel normatif (CENELEC 50126, Une personne indépendante de l’équipe en charge de réaliser
50129 et 50128) visant à définir et à atteindre certains objectifs de le logiciel va évaluer l’atteinte de cet objectif. Il faut rappeler

1 FMDS (fiabilité, maintenabilité, disponibilité et sécurité). Les trois


normes permettent de couvrir les aspects concernant la
sécurité-innocuité (au sens « safety ») du système jusqu’à
que la principale mesure pour réaliser un logiciel de sécurité
consiste à maîtriser le nombre de fautes systématiques ; et
pour ce faire, il faut maîtriser le processus de réalisation et la
l’élément matériel et/ou logiciel. complexité du logiciel. Le SSIL est lié à la notion de confiance
et la question posée à l’évaluateur est donc : « Avez-vous
Nota : CENELEC pour Comité européen de normalisation électrotechnique. confiance dans la maitrise de ce logiciel ? ».

1.1 Référentiel CENELEC Cette norme recommande la mise en place d’un cycle en « V »
qui va de la spécification du logiciel aux tests du logiciel. L’un des
Le référentiel ferroviaire CENELEC 5012x est une déclinaison de points particuliers de la norme CENELEC 50128 réside dans la
la norme générique CEI 61508 qui tient compte des spécificités du nécessité de démontrer la mise en œuvre de moyen. C’est
domaine ferroviaire et des expériences réussies (SACEM, TVM, pourquoi il est dit que c’est une norme de moyen au contraire des
SAET-METEOR, etc.). normes aéronautique qui sont des normes d’objectifs.
La norme CENELEC 50128 introduit explicitement la notion
Dans le domaine ferroviaire, le référentiel normatif est constitué d’évaluation. Comme nous l’avions montré, dans [2] [3] [6], pour
de : les applications logicielles, l’évaluation logicielle consiste à
– la norme CENELEC 50126 qui décrit le cycle de vie de la démontrer que l’application logicielle atteint les objectifs de
sécurité sur l’ensemble d’un projet et les méthodes à mettre en sécurité (au sens « safety ») qui lui ont été attribués. À noter que la
œuvre pour spécifier et démontrer la fiabilité, disponibilité, norme CENELEC EN 50128 ne traite pas les aspects
maintenabilité et sécurité (FMDS) ; sécurité-confidentialité (au sens « security »).
– la norme CENELEC 50128 qui décrit les actions à entreprendre
pour démontrer la sécurité des logiciels ;
– la norme CENELEC 50129 qui décrit la structure du dossier de
1.2 CENELEC EN 50128:2011
sécurité et les moyens à mettre en œuvre pour maitriser la sécurité La version 2011 de la norme CENELEC 50128 introduit la notion
des éléments matériels (hardware ). d’assurance logiciel qui vise à réaliser un logiciel avec un mini-
Le référentiel ferroviaire CENELEC 5012x est applicable aussi mum de défauts et qui se base sur la maîtrise de l’assurance
bien aux applications ferroviaires de type « urbaines » (métro, qualité, la maitrise des compétences, la vérification et la validation
RER, etc.) qu’aux applications ferroviaires classiques (ligne grande et l’évaluation indépendante. Elle introduit une séparation claire
vitesse, train conventionnel, fret). entre les données de l’application et le logiciel qui est alors noté
application générique.
Une des restrictions (voir figure 3 de [TRP 3 305]) sur ce référen-
Un des points importants de la nouvelle norme
tiel ferroviaire CENELEC 5012x est liée au domaine d’application
CENELEC 50128:2011 réside dans l’ajout de la clause 9 qui est
des normes CENELEC 50128 et CENELEC 50129 qui sont normale-
dédiée à la maîtrise de la maintenance et du déploiement du logi-
ment limitées aux sous-systèmes de signalisation. Pour les archi-
ciel. La figure 9 de [TRP 3 305] présente la structure de la version
tectures matérielles utilisées dans le cadre d’autres sous-systèmes,
2011 de la norme CENELEC 50128.
il existe d’anciennes normes qui restent applicables (NF F 00-101,
etc.). Des travaux sont en cours au sein des groupes de certifica- Comme cela a été indiqué, la norme CENELEC 50128:2011
tion pour étendre et généraliser ces deux normes au système fer- introduit une séparation claire entre la notion de logiciel générique
roviaire dans son ensemble. et les données de paramétrages. La section 7 est dédiée à la
réalisation du logiciel générique et la section 8 à la réalisation du
Parmi les actions de réduction de risque, permettant d’atteindre processus de production des données.
un niveau de risque acceptable, la norme CENELEC 50129 décrit
l’allocation d’objectifs de sécurité (voir la section 4) aux fonctions Dans la suite de cet article nous analysons la section 8 de la
du système et de ses sous-systèmes. Le niveau d’intégrité de norme CENELEC 50128:2011 et fournissons les éléments permettant
sécurité (SIL– Safety Integrity Level ) est défini comme un des de comprendre les objectifs et permettant de la mettre en œuvre.
niveaux discrets pour spécifier les exigences d’intégrité de sécurité
des fonctions de sécurité allouées aux systèmes de sécurité.
La norme CENELEC 50128 permet de manager la sécurité des
applications logicielles. Dans le cadre de [BM 8 071] nous avons pré-
2. Données de paramétrage
senté les techniques de mise en sécurité d’une application logicielle.
Cette norme est plus particulièrement dédiée aux aspects dévelop-
pement des applications logicielles pour le domaine ferroviaire. 2.1 Problématique
Concernant les logiciels, le SSIL (Software SIL), permet de définir dif-
férents niveaux de criticité, de 0 (pas de danger) à 4 (critique). Le GPS (Global Positioning System ) est un outil de la vie
courante et l’un des systèmes où les données sont omniprésentes.
La norme CENELEC 50128 s’applique pour des domaines liés à Pour le GPS, on n’imagine pas d’impacts directs sur la sécurité,
la sécurité ou non – c’est pourquoi la norme CENELEC 50128 même s’il peut exister des situations surprenantes (absence de
introduit le SSIL0 qui est lié aux applications logicielles sans route, itinéraire non optimale ou contraire à la signalisation, etc.)
besoin sécuritaire – et exclusivement aux logiciels et à l’interaction mais le conducteur restant le responsable des décisions, il n’est
de l’application logicielle avec le système dans son ensemble. qu’une aide à la conduite. De nouvelle utilisation du GPS, comme

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TRP3306

__________________________________________________________ PARAMÉTRAGE DE LOGICIELS FERROVIAIRES SELON LA NORME CENELEC EN 50128:2011

le positionnement des trains pourraient avoir un impact sur les


recommandations liées à la sécurité telle que la mesure de la
position, la précision, etc. Paramètres
Comme nous le verrons par la suite, le domaine ferroviaire est
un premier exemple où les données sont omniprésentes dans la
réalisation du système, mais ce n’est pas le seul système. Le
domaine nucléaire, le domaine de l’automobile et le domaine

1
spatial sont des domaines où la maîtrise des données peut avoir
un impact sur la sécurité.
Logiciel
À titre d’exemple, dans le domaine du nucléaire la notion de
générique
donnée de paramétrage est essentielle. Ainsi les systèmes SPIN
(séparation et incinération en réacteur) et US (unité de
surveillance) des réacteurs du palier N4 gèrent un nombre
important de données (plus de 10 000). Certaines d’entre elles sont
mises à jour pendant le fonctionnement du réacteur, pour prendre
en compte notamment l’usure du combustible. Au moins deux
incidents en relation avec les données sont identifiés sur le site de
Plateforme :
l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Suite aux incidents du 14
hardware
février 2000 et du 4 avril 2000, l’analyse a montré que des erreurs
+ OS
de paramétrages ont conduit à une sous-estimation de la + firmware
puissance dégagée par le combustible dans une situation donnée, + middleware
ce qui a conduit à des arrêts automatiques du réacteur. À noter
qu’il s’agit des paramètres du SPIN et de l’US. Ces erreurs étaient
dues à une mauvaise qualité de la documentation utilisée pour la
programmation des systèmes.
Nota : le palier N4 correspond aux réacteurs à eau sous pression d’une puissance de
1 450 MWe en exploitation par EDF.

Dans le domaine du spatial, la préparation d’un vol d’Ariane 5


(voir le chapitre 7 de [20]) nécessite de produire les données liées
Application générique
à une trajectoire. Ces données doivent tenir compte des caractéris-
tiques du lanceur, de la trajectoire identifiée et des conditions
climatiques. Les données sont de trois types : les données
missions (masse, paramètre de l’orbite visée, etc.), les données Application spécifique
famille (type de coiffe, etc.), les données de configuration et les
données dépendantes du lanceur (étalonnage des capteurs, etc.). Figure 1 – Application spécifique versus application générique
Avant de pouvoir élaborer les données, il est nécessaire de réaliser
des études et des simulations. Les données (tabulées) sont
produites sous forme de paquetage ADA exploitables par le d’exécution est appelée produit générique et couvre les aspects
programme de vol. matériels et les aspects logiciels (système d’exploitation, logiciel
de base, couche middleware pour la gestion des communications,
etc.).
2.2 Système paramétré par les données ■ Définition 3 (produit générique). – Un produit générique est
composé d’un ensemble d’éléments matériels et d’un ensemble de
Les systèmes de contrôle/commande développés actuellement
logiciels et a pour objectif de permettre l’exécution d’une
sont de plus en plus volumineux ; ils sont consommateurs de
application logicielle. Un produit générique peut être utilisé pour la
données et la notion de communication y est introduite.
réalisation de différents systèmes.
Ces données statiques peuvent être de deux types :
Comme l’indique la définition 3, un produit générique a pour
– données fixes, dites invariantes, qui caractérisent l’environ- objectif d’exécuter différents types d’application logicielle ; le coté
nement (topologie, trajectoire, etc.), le système (nombre d’objet, générique permet de ne pas la spécialiser ; la notion de produit est
limite, etc.) et des caractéristiques (poids, longueur, vitesse, etc.) ; liée au fait que cet ensemble peut être certifié indépendamment du
– données évoluant avec l’état du système. domaine d’utilisation, c’est par exemple le cas des automates
programmables.
■ Définition 1 (application spécifique). – Une application
spécifique est une application générique à qui un paramétrage a Les données invariantes sont connues à la génération du sys-
été associé. Cette application spécifique n’est utilisable que pour tème et définissent une configuration du système. Il est ainsi pos-
une seule installation. sible de définir un système de façon générique et de l’implanter au
travers d’un paramétrage sur un autre site.
À noter que la notion d’application spécifique (figure 1) couvre
les aspects logiciel et matériel. À titre d’exemple, de la description d’une ligne de métro, il est
possible de déduire un ensemble de données qui seront
■ Définition 2 (application générique). – Une application générique communes à l’ensemble des équipements du système. Ces
est composée d’une plateforme d’exécution (appelée produit géné- données dépendent de la topologie de la ligne, des caractéristi-
rique) et d’une application logicielle. Cette application logicielle est ques des trains et de choix technologiques (temps de réponse,
définie en fonction d’un jeu de données de paramétrage qui devra temps de calcul du processeur, etc.). Dans le monde du ferroviaire,
être instancié en fonction de l’utilisation finale (dépendant du site, elles sont appelées invariants topologiques [4].
dépendant des services à activer, dépendant des caractéristiques Une ligne de métro (voir l’exemple fictif introduit à la figure 20
techniques, etc.). de [TRP 3 305]) est composée de voies de circulation des trains.
L’application générique [TRP 3 305] est alors la composition d’un Ces voies sont constituées de circuits de voie (notés CdV). Chaque
logiciel générique et d’une plateforme d’exécution. La plateforme circuit de voie est une portion de voie qui permet de détecter la

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TRP3306

PARAMÉTRAGE DE LOGICIELS FERROVIAIRES SELON LA NORME CENELEC EN 50128:2011 _________________________________________________________

présence de trains sur cette zone. Les circuits de voie sont en


général connectés à deux autres circuits de voie, mais dans le cas 1 2 100 false false 10 15
où ils sont connectés à trois autres circuits de voie, ils doivent être
associés à un aiguillage qui est un équipement permettant de choi-
sir le chemin.

2.3 Caractérisation des données


1 Une application spécifique (voir définition 1) est donc dédiée à
une utilisation. Cette application utilise des données qui peuvent N’autorise pas l’exécution
être de différentes natures :
– les données d’activation/inhibition de services ;
– les données fixes n’évoluant pas dans le temps, elles décrivent
les caractéristiques du système (topologie, courbe de vitesse, point
d’arrêts, etc.) ;
– les données évoluant dans le temps, le temps d’évolution étant
le cycle ou une durée plus importante.
Les données évoluant régulièrement (dans le domaine
ferroviaire, ces données sont nommées « variant ») peuvent être : Figure 2 – Données contrôlant l’activation d’une portion de code
– des entrées que le système acquière régulièrement ;
– des données que le système calcule comme les variables
globales ou locales et les sorties du système.
■ Définition 4 (données de paramétrage). – Une donnée de para- Projet : A
métrage est une donnée n’évoluant pas durant l’exécution de
l’application logicielle.
V2
Comme l’indique la définition 4, les données de paramétrage
(dans le ferroviaire on parle d’invariant) sont un premier type de
donnée. Les données de paramétrages regroupent en général 1. Spécialisation 2. Généralisation
deux familles de données définissant les caractéristiques
techniques (vitesse, masse, taille, nombre, etc.) et les données
définissant le cadre d’utilisation (la topologie, les courbes de
V1 V1'
vitesse, les points d’arrêts, etc.).
Les données de paramétrage caractérisent la mise en œuvre
d’une application logicielle dite générique sur un cas spécifique. À Produit générique
noter qu’il existe deux types de données de configuration (voir la Spécialisation 3. Synchronisation
figure 21 de [TRP 3 305]) : les données dite de calibration qui au
vue de leur évolution très lente sont considérées invariantes et les
données de configuration qui, elles, sont réellement invariantes.
Comme l’indique la définition 5, les données de calibration sont
liées aux fait que les caractéristiques du système évoluent dans le
temps (diminution de la matière fissible dans le cadre d’une
Projet : X
centrale nucléaire, évolution des caractéristiques des moteurs
suite à l’usure, etc.).
Figure 3 – Ligne de produit
■ Définition 5 (données de qualibration). – Une donnée de calibra-
tion est une donnée évoluant suivant une unité de temps « large ».
utilisation. Autant cette approche peut permettre de réduire le coût
d’un futur projet au travers la réutilisation de l’existant, autant elle
2.4 Inhibition de service peut augmenter de façon non maîtrisée le coût en cas de
développement à priori de fonctions non utilisées sur le projet.
Les données de configuration peuvent être associées à des
données réelles du système mais, dans certain cas, elles sont Les données d’inhibition/activation sont utiles pour définir une
associées à des services comme les données d’inhibition/activa- ligne de produit. La figure 3 présente un processus de réalisation
tion. Les données d’inhibition/activation (figure 2) permettent d’application basée sur la notion de ligne de produit. Le produit
d’autoriser ou non l’exécution de services. générique n’est pas une application à part entière, il est nécessaire
L’utilisation des données d’inhibition/activation est alors de mettre en place une étape de spécialisation qui permet de défi-
associée à la notion de code mort (non exécutable en exécution nir le périmètre commun entre le tronc commun et l’application
réelle). Il est alors nécessaire d’avoir une validation complète de générique à réaliser. À partir de là, il est possible de construire
l’application, avec et sans les fonctions contrôlées par des l’application générique sur un socle commun.
données, pour garantir qu’un défaut d’exécution (anomalie Ce processus est associé à deux activités. La première, que nous
mémoire, anomalie processeur, mauvaise gestion d’un pointeur, pouvons nommer la généralisation, permet de ramener des
etc.) ne peut pas amener l’application logicielle dans une situation comportements de l’application générique qui ont été validés au
non contrôlée. sein du tronc commun, on pourra alors les utiliser dans un prochain
Ce type de donnée permet de mettre en place une activité de développement logiciel. La seconde activité, nommée synchronisa-
capitalisation et donc de mettre en place un processus de réutilisa- tion, est liée au fait de remettre à niveau une application générique
tion de service déjà maîtrisé, mais elle n’est pas compatible avec la par rapport au tronc commun ; en effet, le tronc commun peut avoir
réalisation, a priori, de fonction non nécessaire pour une futur évolué (correction de défaut, généralisation, etc.).

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TRP3306

__________________________________________________________ PARAMÉTRAGE DE LOGICIELS FERROVIAIRES SELON LA NORME CENELEC EN 50128:2011

Nous ne décrirons pas plus avant la notion de ligne de produit, à réaliser dans la phase de réalisation du logiciel, mais en l’état, on
même si ça reste un défi pour maîtriser le coût de la réalisation risque de construire un système qui ne fonctionnera pas.
des applications logicielles. La norme CENELEC 50128:2011
n’identifie pas cette problématique. En effet, un système ferroviaire (figure 4) est constitué de
plusieurs équipements (PCC, PA-Ligne, PA-Section, PA-Embarqué
et tapis de transmission) qui peuvent disposer de plusieurs
2.5 Synthèse applications logicielles paramétrées ou non (figure 5).

1
Dans une telle approche, la principale difficulté concerne la
Cette section a permis de mettre en place un vocabulaire adapté
cohérence des données entre les équipements. Il faut que les
aux applications logicielles paramétrées. Dans le cadre du
données (liste non exhaustive, mais qui permet de donner une
domaine ferroviaire, les notions de produit générique,
idée de la problématique) :
d’application générique et d’application spécifique permettent la
réutilisation mais elles sont surtout essentielles pour partitionner – décrivent un même système : source commune en entrée de la
les études de sécurité. production des données, version identique des données,
La norme CENELEC 50126, qui décrit la maîtrise du processus de interprétation identique des caractéristiques des données, etc. ;
sécurité est applicable du système complet au produit générique et – soient cohérentes : précision compatible, même référentiel des
la norme CENELEC 50129, focalisée sur la formalisation de la unités (km, etc.), référentiel similaire pour le repérage (où est le
démonstration de sécurité, introduit la notion de dossier de point de référence ? etc.), compatibilité des référentiels (passage
sécurité, (safety case ) et la possibilité de réaliser des dossiers de d’un repérage en points kilométriques à un repérage sur des repè-
sécurité pour le produit générique, pour l’application générique res de voie, etc., voir la figure 6), bornes identiques (la vitesse
et/ou pour l’application spécifique. maximale du train doit être la même pour tous les équipements,
Au final, le domaine ferroviaire permet la réalisation de système etc.) ;
sur la base de produit générique, d’application générique et/ou – soient correctes : une activité de validation commune doit
d’application spécifique et n’utilise que des données de paramétra- montrer que les données sont correctes et que le fonctionnement
ges de type configuration. du système est conforme à ce qui est demandé pour toutes les
configurations ;
– etc.
3. Du système au logiciel
La figure 6 présente un exemple de topologie et montre qu’il est
possible d’avoir différents référentiels pour le repérage des objets.
3.1 Besoin Initialement le repérage des objets est réalisé au travers d’une
mesure par rapport à des points kilométrique (noté PK voir la
Les applications logicielles paramétrées nécessitent un travail figure 6a ), mais au niveau des équipements on a tendance à
spécifique pour identifier et élaborer les données qui sont manipu- travailler sur des référentiels locaux plus précis comme le segment
lées. Cette activité est pour l’instant identifiée comme une activité (figure6b ) ou le repère de voie.

PA–Ligne PCC

PA–Section PA–Section PA–Section

Message

Tapis de transmission

Message

PA–Embarqué

Figure 4 – Vision système

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1

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TRP3314

Interopérabilité ferroviaire
dans l’Union européenne
1
par Anna GIGANTINO
Ingénieur en mécanique
Chef d’Unité
Agence de l’Union européenne pour les chemins de fer, Valenciennes, France

1. Contexte.................................................................................................. TRP 3 314 - 2


1.1 Définition de l’interopérabilité ................................................................ – 2
1.2 Enjeux pour le transport ferroviaire ....................................................... – 3
1.3 Comparaison entre le rail et les autres modes de transport ................ – 3
2. Interopérabilité ferroviaire dans l’Union européenne ............... – 7
2.1 Aspects normatifs .................................................................................... – 7
2.2 Aspects techniques .................................................................................. – 13
2.3 Aspects socio-économiques ................................................................... – 19
3. Acteurs de l’interopérabilité ferroviaire ........................................ – 20
3.1 Partenaires et bénéficiaires du transport ferroviaire ............................ – 20
3.2 Industriels et fournisseurs de services de la filière ferroviaire ............ – 20
3.3 Entreprises ferroviaires ........................................................................... – 20
3.4 Gestionnaires de l’infrastructure ............................................................ – 20
3.5 Détenteurs de véhicules .......................................................................... – 21
3.6 Autorités nationales de sécurité ............................................................. – 21
3.7 Agence de l’Union européenne pour les chemins de fer ..................... – 21
3.8 Organismes notifiés et organismes désignés ....................................... – 21
3.9 Organismes de normalisation................................................................. – 21
4. Perspectives........................................................................................... – 21
4.1 Interfaces externes du système ferroviaire............................................ – 21
4.2 Multimodalité, intermodalité et transport combiné.............................. – 22
4.3 Vers une nouvelle conception de l’évolution normative ...................... – 22
4.4 Autres tendances ..................................................................................... – 23
5. Conclusion.............................................................................................. – 24
Parution : décembre 2019 - Dernière validation : janvier 2022

6. Glossaire ................................................................................................. – 24
7. Sigles, notations et symboles........................................................... – 24
Pour en savoir plus ....................................................................................... Doc. TRP 3 314

interopérabilité ferroviaire est l'aptitude du système ferroviaire à permettre


L la circulation sûre et sans rupture de trains qui accomplissent les niveaux
de performance requis. Elle se base notamment sur l’application de normes
communes concernant non seulement les interfaces physiques entre éléments
techniques du système ferroviaire, mais aussi certains facteurs opérationnels
tels que les qualifications du personnel et les échanges de données.
Même si les exigences d’interopérabilité étaient peu ressenties à l’origine
des chemins de fer car ils étaient établis sur des lignes locales et des réseaux
fragmentés, l’intégration progressive des réseaux ferroviaires sur le continent
européen a naturellement généré un besoin croissant d’interopérabilité. Au fil
des décennies, l’évolution politique de l’Europe, aboutissant à la création de

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TRP3314

INTEROPÉRABILITÉ FERROVIAIRE DANS L’UNION EUROPÉENNE _____________________________________________________________________________

l’Union européenne, a progressivement accéléré ce processus. Ceci a conduit à


l’établissement d’un appareil normatif qui est toujours en pleine évolution
pour tenir compte à la fois du progrès technologique et de l’évolution des rela-
tions entre les différents acteurs du ferroviaire.
Pour comprendre les enjeux actuels concernant l’interopérabilité ferroviaire
dans l’Union européenne, il est utile d’en retracer l’histoire et de connaître les
facteurs qui ont influencé son développement. Une vision générale des aspects
1 techniques et opérationnels couverts aujourd’hui par la législation de l’Union
européenne, ainsi qu’une connaissance des rôles et responsabilités des diffé-
rents acteurs du ferroviaire, sont fondamentales pour saisir la complexité de
l’écosystème ferroviaire actuel et déchiffrer ses enjeux techniques, écono-
miques, politiques et sociaux.
En outre, dans une société de plus en plus connectée, mondialisée et sou-
cieuse de l’environnement, les chemins de fer se doivent de renforcer leur rôle
naturel de « backbone » des transports terrestres, notamment par le biais
d’une interopérabilité non seulement ferroviaire mais aussi intermodale.

1. Contexte Gouvernance de l’interopérabilité

1.1 Définition de l’interopérabilité Interopérabilité

Gouvernance intégrée
juridique

des services publics


L’interopérabilité est un concept de portée générale, utilisé dans Interopérabilité
plusieurs domaines parmi lesquels on peut compter, outre le organisationnelle
domaine ferroviaire, l’administration publique, l’informatique et les
domaines aérospatial, médical, militaire et électrotechnique. Interopérabilité
sémantique
Dans le domaine des services publics de l’Union européenne
(UE), le cadre d’interopérabilité européen pour les services Interopérabilité
publiques européens (European Interoperability Framework – EIF, technique
Communication de la Commission européenne (COM(2017)134)
adoptée le 23 mars 2017) définit l’interopérabilité comme suit :
Figure 1 – Niveaux d’interopérabilité dans l’administration publique
européenne (source https://ec.europa.eu/isa2/eif_en)
L’interopérabilité est l’aptitude d’organisations à interagir
en vue de la réalisation d’objectifs communs mutuellement
avantageux impliquant l’échange d’informations et de connais- – dans le transport routier, l’interopérabilité est basée entre
sances entre ces organisations via les processus métiers autres sur le code de la route et les gabarits des ponts, tunnels et
qu’elles prennent en charge, grâce à l’échange de données routes ;
entre leurs systèmes informatiques.
– dans l’administration publique européenne, l’interopérabilité
se décline sur quatre niveaux (juridique, organisationnel, séman-
Dans un domaine plus spécifique, la définition d’interopérabilité tique et technique) dans un contexte de gouvernance générale et
donnée par l’Association francophone des utilisateurs de logiciels de gouvernance du service public intégré (figure 1).
libres est la suivante : Il faut aussi distinguer les notions d’interopérabilité et de
compatibilité. Le tableau 1 résume quelques différences entre ces
deux concepts.
L’interopérabilité est la capacité que possède un produit ou
un système, dont les interfaces sont intégralement connues, à Nota : l’interchangeabilité est ainsi définie par la Commission Électrotechnique Inter-
fonctionner avec d’autres produits ou systèmes existants ou nationale (IEC) : « situation dans laquelle deux ou plus objets présentent des
futurs et ce sans restriction d’accès ou de mise en œuvre. caractéristiques physiques et fonctionnelles si proches qu’ils peuvent être considérés
équivalents pour leur durabilité et performance. Ils peuvent se remplacer l’un l’autre sans
générer aucun besoin d’adaptation ou ajustement de leurs caractéristiques ou du
système dans lequel ils sont intégrés ». Cependant, le secteur ferroviaire a travaillé
L’interopérabilité se base sur la connaissance des interfaces davantage sur la définition d’interchangeabilité et a défini plusieurs degrés d’interchan-
entre les éléments constitutifs des systèmes concernés, y compris geabilité afin d’arriver à une utilisation plus flexible des parties de rechange. Ainsi, la
celles impliquant des éléments immatériels tels que les langages fiche UIC 500 décrit six niveaux d’interchangeabilité, allant de la normalisation qualitative
et comparative jusqu’à la standardisation complète d’éléments identiques. La CER
et les interactions humaines en général. (Community of European Railway and Infrastructure Companies) et l’UNIFE (Union des
Industries Ferroviaires Européennes), à leur tour, ont proposé les trois niveaux d’inter-
Quelques exemples : changeabilité suivants :
– en télécommunications, l’interopérabilité peut être définie – niveau 1 : interchangeabilité uniquement fonctionnelle ;
– niveau 2 : interchangeabilité partielle ou adaptable ;
comme la capacité de fournir et accepter les services d’autres sys-
– niveau 3 : interchangeabilité physique et fonctionnelle complète (« plug and play »).
tèmes, et d’utiliser les services échangés afin de permettre un (Source : ERA complementary study on intechangeable spare parts, ERA/REP/10=2011/
fonctionnement plus efficace pour les deux systèmes ; INT du 26.09.2011).

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Tableau 1 – Interopérabilité et compatibilité


Interopérabilité Compatibilité
Facteurs socioculturels
A priori, pas de limites au Concerne un ensemble fini de
nombre des systèmes/ systèmes ou de composants
composants concernés (très souvent seulement deux
d’entre eux)
Par conséquent, la notion
d’interopérabilité implique un
nombre plus important
Nombre limité d’interfaces Facteurs normatifs et législatifs
1
d’interfaces
Il peut y avoir plusieurs degrés Notion binaire : soit il y a Facteurs techniques et économiques
d’interopérabilité, par exemple compatibilité, soit il n’y a pas
correspondant à la fraction
d’interfaces « compatibles »
par rapport à la totalité des
interfaces
Figure 2 – Facteurs clés pour l’interopérabilité ferroviaire
Indirectement liée à Plus directement liée à
l’interchangeabilité des l’interchangeabilité des
composants composants En premier plan, les facteurs techniques et économiques :
– facteurs techniques : il s’agit essentiellement de tous les élé-
ments qui concernent la compatibilité technique entre les diffé-
Dans le domaine ferroviaire, la directive (UE) 2016/797 relative à
rents éléments du système ferroviaire (par exemple écartement,
l’interopérabilité du système ferroviaire au sein de l’Union euro-
l’électrification, la signalisation, le gabarit) ;
péenne définit l’interopérabilité comme suit :
– facteurs économiques : ils sont liés à la fois aux facteurs tech-
niques (par exemple en relation avec le coût de certains installa-
L’interopérabilité (ferroviaire) est l’aptitude d’un système tions, de leur cycle de vie, etc.), mais aussi au cadre législatif
ferroviaire à permettre la circulation sûre et sans rupture de général (par exemple directives et règlements UE visant à l’ouver-
trains qui accomplissent les niveaux de performance requis. ture du marché des produits et des services ferroviaires).
En deuxième plan, les éléments réglementaires qui encadrent
Cette aptitude repose notamment sur des normes communes les facteurs techniques et économiques :
concernant certaines caractéristiques techniques (par exemple – facteurs normatifs : ils peuvent être strictement liés aux fac-
l’écartement des rails, le gabarit, la signalisation, l’électrification), teurs techniques relatifs à la compatibilité technique entre les diffé-
mais aussi sur des facteurs opérationnels tels que les qualifica- rents éléments du système ferroviaire, mais aussi couvrir d’autres
tions du personnel (par exemple l’aptitude à la conduite) et exigences (par exemple accessibilité aux services ferroviaires pour
l’échange d’informations concernant la circulation des trains. les personnes à mobilité réduite, la nécessité de limiter le niveau
Les problèmes d’interopérabilité ferroviaire dans l’Union euro- de bruit à l’intérieur des véhicules et à proximité des lignes ferro-
péenne sont pour la plupart liés à l’existence de réglementations viaires, le respect de l’environnement, la sécurité incendie) ;
nationales divergentes, multiples et incompatibles, résultant d’une – facteurs législatifs : la présence (ou pas) d’un cadre législatif
évolution progressive des réseaux de chemins de fer au fil des commun à niveau européen, ou seulement à niveau national,
décennies à partir de noyaux nationaux, voire régionaux. réglementant par exemple les méthodes visant à assurer un cer-
tain niveau de sécurité, la certification des organismes de vérifica-
tion, l’autorisation des véhicules et des installations fixes, la
délivrance des permis des conduire, les règles encadrant la
1.2 Enjeux pour le transport ferroviaire compétition et les appels d’offre, etc.
En toile de fond, les éléments relevant des relations humaines,
1.2.1 Analyse PESTEL du contexte socio-politique et culturel et de la connaissance en
général. Ces éléments couvrent des sujets très différents, allant
La nécessité et la mise en œuvre de l’interopérabilité ferroviaire des compétences professionnelles et linguistiques (par exemple la
relèvent non seulement de la dimension technique, mais elles sont connaissance d’une deuxième langue pour les services transfron-
aussi strictement liées à des considérations d’ordre politique, éco- taliers, voire plusieurs langues pour les services internationaux à
nomique, environnemental, législatif et social. longue distance), aux éléments relevant du dialogue social
Le tableau 2, dont certains points ont été repris du préambule de employés-employeurs, jusqu’aux questions d’éthique et déontolo-
la directive interopérabilité 2016/797, résume l’analyse PESTEL (poli- gie professionnelle (conflit d’intérêt, culture de l’équité).
tique, économique, social, technologique, écologique et légale)
concernant les enjeux liés à l’interopérabilité du transport ferroviaire.
1.3 Comparaison entre le rail
1.2.2 Facteurs clés pour l’interopérabilité et les autres modes de transport
ferroviaire
1.3.1 Emplois, nombre d’entreprises, chiffre
La réalisation de l’interopérabilité ferroviaire repose sur plu- d’affaires, volume de trafic
sieurs facteurs, techniques, normatifs, législatifs, économiques et
socioculturels. Du point de vue de l’ingénieur et de l’industriel, le En comparaison avec les autres modes de transport, le secteur
tableau donnant un aperçu des facteurs principaux qui jouent un ferroviaire est caractérisé par une concentration des emplois et des
rôle dans la mise en œuvre de l’interopérabilité ferroviaire peut chiffres d’affaires dans un nombre réduit d’entreprises, voir les
être schématisé comme à la figure 2. figures 3, 4 et 5 (données Eurostat 2015).

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Tableau 2 – Analyse PESTEL


– Le but de l’interopérabilité ferroviaire est de faciliter, améliorer et développer les services de transport ferroviaire
international au sein de l’UE et avec les pays tiers, et de contribuer à la réalisation progressive du marché intérieur
de produits et services relatifs au système ferroviaire de l’UE.
– Il est nécessaire d’établir un cadre législatif commun dans l’UE pour permettre aux citoyens, aux opérateurs
économiques et aux autorités compétentes de bénéficier pleinement des avantages découlant de la mise en place

1
Politique d’un espace ferroviaire européen unique.
– Le système ferroviaire de l’UE est caractérisé par un patrimoine ancien d’infrastructures et de véhicules nationaux,
dont l’adaptation ou le renouvellement impliquent des investissements lourds. Compte tenu aussi de la longue durée
des cycles de vie des véhicules et installations ferroviaires, une approche progressive est nécessaire pour réduire
graduellement la disparité des systèmes existants et de préserver la compétitivité du rail par rapport aux autres
modes de transport.
– Compte tenu des longues périodes de transition (approche progressive), il faut préciser les dispositions à
appliquer en cas de renouvellement ou de réaménagement de sous-systèmes existants, éventuellement
accompagnées de propositions de réalisation graduelle du système cible.
– Pour préserver la compétitivité du secteur ferroviaire et éviter les frais inutiles, l’entrée en vigueur de nouvelles
dispositions ne devrait pas entraîner d’adaptation immédiate des véhicules et de l’infrastructure aux nouvelles
spécifications (c’est-à-dire pas d’application rétroactive de la nouvelle législation, sauf exceptions dûment motivées,
par exemple par des raisons de sécurité).
– Toute innovation devrait aller dans le sens d’une amélioration des performances économiques.
Économique
– Les dispositions relatives à l’interopérabilité du système ferroviaire de l’Union ne doivent pas donner lieu à des
frais injustifiés.
– Afin de définir et mettre en œuvre les solutions les plus avantageuses, lors de l’élaboration de nouvelles
spécifications, les coûts et les avantages estimés pour toutes les solutions techniques envisagées doivent être pris en
compte, ainsi que leurs incidences probables sur tous les opérateurs et agents économiques concernés.
– L’harmonisation des spécifications techniques relatives aux systèmes et composants ferroviaires peut permettre
de réaliser des économies d’échelle non négligeables (ouverture à la concurrence, marchés plus importants, plus
grandes quantités produites, réduction des coûts).
– Un transport ferroviaire sûr, respectueux de l’environnement, efficace et accessible est un facteur fondamental
d’intégration sociale par la mobilité (il peut notamment faciliter l’accès au travail, aux études et aux soins).
– Sur la base de la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées, l’accessibilité des
personnes handicapées et des personnes à mobilité réduite constitue une exigence essentielle en ce qui concerne
l’interopérabilité du système ferroviaire de l’UE.
Sociale
– Les spécifications techniques d’interopérabilité ont une incidence directe ou potentielle sur les utilisateurs et le
personnel intervenant dans l’exploitation et l’entretien des sous-systèmes ; pour cette raison, les partenaires sociaux
doivent être consultés, le cas échéant, lors de l’élaboration de ces spécifications.
– L’avis des partenaires sociaux en ce qui concerne les qualifications professionnelles et les conditions de santé et
de sécurité au travail doit aussi être pris en compte.
– Il est nécessaire d’harmoniser les normes techniques pour favoriser l’interconnexion et l’interopérabilité des
réseaux ferroviaires nationaux ainsi que l’accès à ces réseaux.
– Il faut définir un niveau optimal d’harmonisation technique.
– Les dispositions relatives à l’interopérabilité du système ferroviaire de l’UE ne doivent pas nuire au maintien de
l’interopérabilité des réseaux ferroviaires existants.
Technologique
– L’élaboration et l’application des spécifications techniques d’interopérabilité au système ferroviaire de l’UE doivent
tenir compte de l’innovation technologique.
– Il faut tenir compte de la longueur et de la diversité des cycles de vie des différents éléments du système
ferroviaire, qui se situent typiquement autour de 100 ans pour l’infrastructure, jusqu’à 40 ans pour le matériel roulant
et autour de 10 ans pour les éléments de sécurité et gestion de l’exploitation.
– Le rail est considéré comme l’un des moyens de transport les plus respectueux de l’environnement, en particulier
en raison de la possibilité d’utiliser de l’énergie électrique provenant de sources renouvelables.
– Néanmoins, afin d’encourager les économies d’énergie électrique, il y a lieu de promouvoir l’interopérabilité visant
les échanges de données entre sol et bord concernant la consommation d’énergie électrique, et ceci non seulement
Écologique à des fins de facturation.
– Même si aujourd’hui l’interopérabilité ferroviaire aborde essentiellement l’élimination des barrières techniques
concernant l’exercice ferroviaire, dans le cadre du développement durable et de l’économie circulaire, ce concept
d’interopérabilité des produits des systèmes ferroviaires pourrait être étendu à tout le cycle de vie des systèmes et
composants ferroviaires, y compris leur réemploi, réparation et réutilisation des matières premières.
– Il y a un décalage entre la vitesse d’évolution des technologies et l’adaptation des systèmes législatifs pour tenir
compte des technologies émergentes.
Légale – La « Nouvelle Approche » a tenté de mitiger cette tension déjà dans les années 1980 (voir § 2.1.5), mais, aussi face
au défi de la mondialisation et de la compétition accrue qui en résulte, il y a lieu de repenser les modalités de
fonctionnement de l’architecture législative des normes européennes et des spécifications techniques.

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Emplois par mode de transport (en 1000)


Données UE28 -2015

Services postaux 1 826,1


Activités de stockage et support 2 777,7
Transport aérien 367,8
Transport maritime
Voies navigables intérieures 44,5
181,3
1
Pipelines 26,0
Rail 496,4

Route (voyageurs) 2 056,4


Route (fret) 3 065,2

0,0 500,0 1 000,0 1 500,0 2 000,0 2 500,0 3 000,0 3 500,0

Figure 3 – Emplois par mode de transport

Nombre d’entreprises par mode de transport


Données UE28 -2015

Services postaux 70 682

Activités de stockage et support 147 852

Transport aérien 4 813

Transport maritime 11 464

Voies navigables intérieures 9 963

Pipelines 212

Rail 928

Route (voyageurs) 371 672

Route (fret) 571 046

0 100 000 200 000 300 000 400 000 500 000 600 000

Figure 4 – Nombre d’entreprises par mode de transport

Chiffre d’affaires
Données UE28 -2015

Services postaux 122 486


Acvités de stockage et support 532 307

Transport aérien 148 200

Transport marime 114 047

Voies navigables intérieures 7 865

Pipelines 18 032

Rail 74 113

Route (voyageurs) 139 807

Route (fret) 334 046

0 100 000 200 000 300 000 400 000 500 000 600 000

Figure 5 – Chiffre d’affaires par mode de transport

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Volume fret en milliards de tonnes-km Tableau 3 – Risque de décès pour différents


Données UE28, 2016 moyens de transports et type d’utilisateur
3
Tués par
milliard p-km
(2011-2015)
1 181 1 804 Passager vol commercial (territoire EU) 0,06

1 115
Passager chemin de fer
Passager bus/autocar
0,100
0,225
147
412 Passager transport maritime 0,48
Route Rail
Voies navigables intérieures Pipelines Occupant voiture 2,67
Transport maritime Transport aérien Utilisateur d’un deux-roues motorisé 37,8
Figure 6 – Répartition transport fret Sources : base de données Eurostat, CARE, rapports annuels ERA, EASA
et EMSA

Volume voyageurs en milliards de passagers-km


Données UE28, 2016 Voies d’eau Rail
25 internes 0,6 Autre
106 1,6 0,6
713 Aviation (*)
450
15,4

5 508

Route
81,8
Route Rail Tram et métro
Transport aérien Transport maritime
Route Aviation (*) Voies d’eau internes
Figure 7 – Répartition transport voyageurs Rail Autre
(*) y compris le transport international

Quant aux volumes transportés, le transport ferroviaire se situe Figure 8 – Répartition en pourcentage des émissions de CO2 dans
en troisième position respectivement après la route et le transport l’Union européenne (UE-28, 2015) par mode de transport
maritime pour le fret et après la route et le transport aérien pour
les voyageurs, voir les figures 6 et 7 (données Eurostat 2016).
Cependant, l’utilisation des moyens de transport individuels
implique un risque beaucoup plus élevé : sur la base des données
1.3.2 Sécurité relatives à la même période, les occupants d’une voiture ont eu
une probabilité de décès environ 27 fois plus élevée par rapport
Le rapport 2018 de l’ERA sur la sécurité et l’interopérabilité ferro-
aux voyageurs parcourant la même distance en train. Quant aux
viaires dans l’UE (voir la rubrique Sites Internet du Pour en savoir
utilisateurs des deux-roues motorisés, le risque a été environ
plus) fournit des statistiques concernant le risque de décès dans
380 fois plus élevé de celui des voyageurs empruntant le train.
un accident pour un voyageur utilisant différent moyens de trans-
port (indicateur ROI 04). Ce risque est défini sur une moyenne de De plus, tenant compte aussi du temps passé par un voyageur
5 années. dans le moyen de transport emprunté (durée d’exposition au
Il faut aussi souligner que le risque de décès dans un accident risque), le risque de décès est très nettement en faveur du ferro-
aérien ou ferroviaire peut subir des variations très importantes viaire, tous modes confondus.
d’année en année car un seul accident peut provoquer des dizaines
de décès. Par exemple, un seul accident aérien très grave en 2015
a affecté lourdement les statistiques quinquennales. Pour cette rai- 1.3.3 Impact sur l’environnement
son, ces chiffres doivent être pris avec précaution.
La figure 8 détaille la répartition en pourcentage des émissions
Dans la période 2011-2015, le risque de décès dans un accident de CO2 dans l’Union Européenne (UE-28, 2015) par mode de
ferroviaire se situe aux alentours d’un décès par 10 milliards de transport. Le transport aérien inclut le trafic international, par
passagers-kilomètre, faisant du chemin de fer le moyen de trans- contre le transport maritime international n’est pas pris inclus (il
port terrestre le plus sûr pour les voyageurs. génère environ 4 % des émissions de gaz à effet de serre dans
En fait, dans cette période, le risque de décès d’un voyageur l’UE). Les données statistiques sont basées sur les données de la
dans un accident ferroviaire a été un peu inférieur à la moitié de Commission Européenne (DG ENER, Energy datasheets mises à
celui d’une personne voyageant en autocar, mais presque le jour le 14 février 2018). Il faut toutefois mentionner qu’a priori ces
double de celui d’un voyageur empruntant un vol commercial données ne prennent pas en compte les émissions de CO2 géné-
(tableau 3). rées pour produire l’électricité destinée à la traction électrique.

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32
Référence Internet
TRP3074

Conception des gares

par Étienne TRICAUD


Architecte – Urbaniste - Ingénieur 1
1. La gare : histoire, évolution, typologie ............................................ TRP 3 074 - 2
1.1 La gare au cœur de l’histoire des villes et des transports .................... — 2
1.2 Évolution des gares, enjeux socio-économiques et urbains ................ — 3
1.3 Vers un nouvel âge d’or des gares ......................................................... — 3
1.4 Des typologies multiples ......................................................................... — 4
2. Conception des gares : fonctionnement, urbanité, identité .... — 5
2.1 Disposition spatiale des infrastructures des différents modes
de transport .............................................................................................. — 6
2.2 Organisation des flux piétons ................................................................. — 6
2.3 Conception des espaces dévolus aux voyageurs et visiteurs .............. — 8
2.4 Mise en place des services, commerces et locaux d’exploitation.
Programmes connexes............................................................................ — 10
2.5 Approche structurelle et confort environnemental............................... — 10
2.6 Dimension symbolique............................................................................ — 11
2.7 Le quartier de la gare............................................................................... — 11
3. Le renouveau mondial des gares ..................................................... — 12
4. Conclusion.............................................................................................. — 14
Pour en savoir plus ....................................................................................... Doc. TRP 3 074

a gare constitue un espace public très particulier de la géographie contem-


L poraine. C’est un point où se croisent les axes de mobilité qui traversent
nos territoires, où se rencontrent les foules en transit, un creuset de sociabilité,
un « hyper-lieu », pour reprendre l’expression du géographe Michel Lussault,
qu’il attribue aux espaces de concentration des individus, aux espaces de den-
sité, de diversité. S’il existe en effet un endroit où s’incarne le vivre ensemble,
grand mot d’ordre politique d’aujourd’hui, c’est bien la gare, où l’on se frotte
aux autres, qu’on le veuille ou non. Espaces clefs de la vie quotidienne et de la
ville, la gare et son quartier sont redevenus aujourd’hui, après une longue
éclipse au cours du XXe siècle, l‘objet de toutes les attentions, aussi bien des
concepteurs que des pouvoirs publics.
Mais qu’est-ce réellement qu’une gare à notre époque ? Et vers quel modèle
est-elle en train d’évoluer ? En cheminant à travers l’histoire de ces lieux fasci-
nants, en évoquant leurs variations typologiques dans le temps et dans
l’espace, cet article met en exergue les enjeux fonctionnels et urbains qui les
caractérisent et esquisse la méthodologie de conception, technique et spatiale,
qui répond à ces enjeux.
La conception des gares y est abordée sous l’angle du croisement de plu-
sieurs disciplines : l’histoire dont il faut tirer les leçons, la sociologie qui
qualifie le contexte culturel du projet, l’urbanisme qui caractérise la gare dans
un système urbain, l’ingénierie des flux qui justifie le dimensionnement des
espaces, les études techniques dans les domaines des transports et du bâti-
ment, l’architecture, enfin, qui assure la synthèse des études et propose une
organisation des espaces propre à assurer la pérennité, le bon fonctionnement
et l’agrément des lieux. Vitruve dirait qu’on doit remplir les trois qualités de
firmitas, utilitas, et venustas ; autrement dit un projet solide, utile et beau
(traité De architectura écrit vers – 15 et dédié à l’empereur Auguste).
Parution : août 2021

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TRP3074

CONCEPTION DES GARES ____________________________________________________________________________________________________________

1. La gare : histoire, bains qui en ont favorisé la croissance économique par l’échange
des biens et la rencontre des personnes, puis l’irruption des trans-
évolution, typologie ports ferrés urbains (train, tram et métro) qui en ont permis
l’extension spatiale – on peut désormais habiter loin de son lieu de
travail – et ont souvent façonné la physionomie de ses nouveaux
quartiers. On peut ainsi considérer que l’histoire récente des villes
1.1 La gare au cœur de l’histoire – depuis le milieu du XIXe siècle en Europe jusqu’en Russie et aux
des villes et des transports États-Unis, puis au cours du XXe siècle dans de nombreux pays à

1 Depuis son émergence au milieu du XIXe siècle, la gare nous


parle de la relation de la société à l’espace où elle prend corps.
travers le monde – se confond avec le développement des mobili-
tés mécanisées, pour le meilleur et pour le pire !
Le « meilleur », c’est cette formidable extension du territoire
Son histoire résulte de trois évolutions parallèles qui se nour- accessible par chacun, territoire d’accès à l’emploi, à la formation,
rissent mutuellement : celle des sciences et techniques, celle des à la consommation et aux loisirs. C’est le brassage culturel et le
pratiques sociales, celle de la ville et du cadre de vie. dynamisme économique.
La dernière grande révolution technologique qui a profondé- Le « pire », c’est l’étalement urbain, le fractionnement et l’isole-
ment transformé les pratiques sociales et l’organisation spatiale ment des territoires dont les infrastructures de transport sont para-
des villes, c’est celle des mobilités mécanisées. Le transport ferré doxalement la cause. C’est aussi cet autre paradoxe des moyens
de voyageurs s’est ainsi développé en Europe dès le milieu du de transport qui éloignent les fonctions les unes des autres et a
XIXe siècle, ailleurs dans le monde au cours du XXe siècle, pour pour conséquence d’augmenter les temps de trajet ! C’est enfin,
relier progressivement toutes les grandes agglomérations puis irri- troisième paradoxe, l’exclusion de populations éloignées des
guer tout le territoire. modes de transport collectifs et ne disposant pas de mode de
Dans les grandes villes, la voie ferrée s’est frayée un passage transport individuel, pour qui l’exclusion économique et sociale se
dans les faubourgs pour se rapprocher au plus près du centre his- double d’une exclusion par l’immobilité. Comment cela est-il
torique, que ce soit quand la ville est desservie en ligne, comme à arrivé ? Autour des années 1930 prennent forme des théories urba-
Lyon ou Bordeaux, ou en terminus, comme à Orléans ou Lille. Par- nistiques radicales conduisant à la séparation des réseaux par
fois, le génie des ingénieurs est mis à contribution pour se jouer vitesse et mode de transport, puis des territoires par fonctions.
de la géographie, comme à Marseille où le rail est amené aux Elles seront notamment formalisées par la Charte d’Athènes
limites extrêmes du plateau qui domine le port. À Paris, les sept (1933), sous la direction de Le Corbusier. Ce faisant on a coupé la
premières gares (Saint-Lazare, Nord, Est, Lyon, Austerlitz, Mont- ville en morceaux et détruit le subtil mélange d’activités humaines
parnasse et Denfert-Rochereau) s’installent en terminus, avant que source de la richesse urbaine. Il en est résulté des découpages de
le chemin de fer d’Orléans puis les RER ne les transforment en la ville en « zones » optimisées par fonctions – travailler, habiter,
gare de passage. Là aussi, l’implantation de chaque gare est le acheter, se distraire – reliées entre elles par des infrastructures de
fruit d’une approche subtile de la topographie, à la fois naturelle transport qui sont conçues pour créer du lien et qui trop souvent
(certaines lignes ferrées pénètrent par des vallons, d’autres le long séparent les îles d’un archipel urbain.
de la Seine) et artificielle (les tranchées de Saint-Lazare et gare de Aujourd’hui, de nombreux projets urbains contemporains ont
l’Est, les remblais de gare de Lyon…) pour amener la voie ferrée également leur origine dans le champ de la mobilité : soit pour la
au plus près du centre-ville. favoriser par des projets de transport (collectif, individuel partagé,
À l’extrémité de la voie ou au périgée de son tracé, la gare « doux »), soit pour corriger les effets du développement des
constitue le point d’accès au réseau ferroviaire depuis la ville. Ini- transports sur la structure urbaine.
tialement implantée aux limites de la zone densément urbanisée, La gare est au cœur de ces projets. Point nodal du réseau ferré,
puis progressivement absorbée dans un tissu urbain en pleine et en même temps point d’intensité de l’espace public urbain, la
croissance, la gare se modifie au rythme des évolutions simulta- gare joue un rôle primordial dans la capacité de la ville à rassem-
nées du réseau de chemin de fer et de la ville, qui elle-même voit bler plutôt qu’à exclure. Par son aménagement et celui de son
se développer tous les transports urbains (figure 1). quartier, elle peut contribuer à réparer les conséquences d’un
Jamais auparavant les villes ne s’étaient transformées aussi urbanisme fonctionnaliste et brutal pour créer des espaces où l’on
rapidement que depuis l’irruption des transports ferrés interur- « fait société » par le simple usage du quotidien.

© L’Illustration 11 avril 1868 © SNCF - photographe Louis-Emile Durandelle

a côté rail b côté ville

Figure 1 – Gare Saint-Lazare à Paris dans la courte période où le train était encore le seul transport motorisé

TRP 3 074 – 2 Copyright © – Techniques de l’Ingénieur – Tous droits réservés

34
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TRP3074

_____________________________________________________________________________________________________________ CONCEPTION DES GARES

1.2 Évolution des gares : enjeux socio- Le chemin de fer aura été le premier mode de transport méca-
nisé à se développer sur le territoire. Les premières gares, aux-
économiques et urbains quelles on se rendait à pied ou en voiture à cheval, présentent
donc une organisation du bâti relativement simple : une billetterie,
Pour comprendre la situation actuelle de la gare, revenons à ses un hall et des salles d’attente, accompagnés d’un kiosque à jour-
origines, en cernant cet objet à partir des différents termes qui naux et d’un restaurant pour les plus importantes. Entièrement sur
l’ont désigné et des réalités qu’ils recouvrent. Bertrand Lemoine, le même niveau (à part l’accès aux quais par passerelle ou souter-
dans l’excellent ouvrage Une histoire des gares en France [1], qu’il rain pour les gares de passage), le bâtiment assure la mue du cita-

1
s’apprête à publier, décrit ainsi les premiers temps du chemin de din en voyageur à travers un cheminement unique (où les petites
fer : variations ne sont liées qu’aux classes des salles d’attente) et
balisé.
« Dans ces premières lignes de chemin de fer, il n’y a pas de
gare susceptible d’accueillir des voyageurs, mais de simples lieux Quand les autres modes de déplacement tissent leur toile au
de chargement et de déchargement, accompagnés d’un bureau. À cours du XXe siècle, ils desservent les gares par des infrastructures
l’appellation de “gare” on préfère le mot “d’embarcadère” ou plus nouvelles, souterraines – métro puis RER –, à niveau – tram, bus
rarement de “port sec”. Cette terminologie est clairement emprun- ou voiture – ou en viaduc – métro aérien, ponts autoroutiers –.
tée au vocabulaire des canaux. C’est qu’il y a plus d’une analogie Mais les branchements successifs de ces nouveaux réseaux sur la
entre les deux systèmes de transport, tributaires tous les deux de gare ne donnent pratiquement jamais lieu à une recomposition de
réseaux et d’installations spécifiques où doivent se faire les rup- l’espace dévolu au voyageur. Ses multiples parcours possibles,
tures de charges avec le roulage traditionnel. La gare désigne selon son mode d’accès à la gare, deviennent trop souvent de
alors, comme dans les canaux, les lieux où peuvent s’arrêter les vrais labyrinthes résultants de contraintes purement techniques. Il
trains pour qu’ils puissent se croiser lorsque la voie est unique ou faut sans doute en trouver la raison dans le statut de la gare à par-
encore les lieux où ils stationnent en dehors de leur service. Le tir des années 1930. Supplanté par la voiture, plus souple d’utilisa-
terme de station, d’origine anglaise, est en revanche vite adopté tion, puis par l’avion, plus rapide, le train n’est plus le mode de
dès lors que les lignes sont pourvues de plusieurs arrêts pour les transport moderne et prestigieux qu’il a été. Sa déchéance
voyageurs et que ces haltes sont dotées de bâtiments spécifiques. entraîne celle de la gare à laquelle ni la société dans son ensemble,
Bien que l’appellation de gare soit employée dès les débuts du ni les architectes ne s’intéressent alors. Les transformations suc-
chemin de fer, elle ne rentre véritablement dans les mœurs que cessives des gares liées aux évolutions de leur desserte urbaine
dans les années 1860, tandis que disparaît l’appellation d’embarca- sont considérées comme des projets d’infrastructure où la fonc-
dère. La gare conserve cependant de son origine l’idée qu’est tionnalité première à assurer concerne le passage des véhicules
concerné l’ensemble du site et des bâtiments d’un lieu donné (trains, trams, bus ou voitures), au détriment de la qualité des par-
affectés au service des voyageurs – comprenant le bâtiment-voya- cours des voyageurs. Par habitude, les architectes sont sollicités
geurs ou “BV” en jargon ferroviaire –, des marchandises et à pour concevoir l’aménagement du hall d’accueil des voyageurs,
l’exploitation de la ligne. Le terme de station continue à être utilisé sans qu’il leur soit demandé de porter leur regard sur le territoire
de façon plus restrictive pour les gares de moindre importance, où plus vaste de l’intermodalité.
les trains ne font que s’arrêter quelques instants, et qui sont donc
dépourvues d’installations techniques particulières tels que dépôts
ou ateliers. Enfin le terme de halte désigne les lieux d’arrêt précisé- 1.3 Vers un nouvel âge d’or des gares
ment dépourvus de gares et donc des services correspondants, tel
que celui des bagages. » Il faut attendre les années 1990 et le lancement de la seconde
ligne de TGV, le TGV Atlantique, pour qu’un petit groupe d’archi-
Après les années 1830-1870 qui voient se mettre en place tout
tectes, sous la direction de Jean-Marie Duthilleul, prenne
l’arsenal fonctionnel, technique et sémantique de la conception
conscience, au sein de la SNCF, que le train redevenant moderne,
des gares, on peut considérer que les dernières décennies du
futuriste et attractif avec l’arrivée du TGV, la gare pouvait retrouver
XIXe siècle et les premières du XXe siècle constituent l’âge d’or
« droit de cité ». Concevant des projets sur 34 gares desservies,
des gares et du chemin de fer. Le réseau compte en effet près de
dont la restructuration en profondeur de la gare Montparnasse
62 000 km de lignes au début des années 1930, contre 29 000 réel-
(figure 2 ; architectes : SNCF Atelier d’Architecture/J.-M. Duthilleul,
lement exploitées aujourd’hui. Au cœur des villes, les grandes
É. Tricaud, M. Maillard, J.-P. Savarieau, F. Pradillon), tête du
gares – de passage ou tête de ligne – construites à cette époque
réseau, ils développent des principes fondés sur la double apparte-
affichent encore aujourd’hui, quand elles n’ont pas été trop trans-
nance de la gare, à la fois nœud du réseau ferroviaire et espace
formées au cours du temps ou reconstruites après les guerres, la
public de la ville. Leur credo acte également la nécessaire recom-
foi de l’époque en l’avenir promis par les progrès de la technique
position de l’espace autour de la multimodalité et des multiples
et de l’économie tout autant que la puissance des premières com-
façons de pratiquer la gare. La Charte des gares du TGV Atlantique
pagnies ferroviaires. La monumentalité des bâtiments en pierre de
stipule ainsi :
taille, la statuaire et le décor, le gigantisme des halles de fer et de
verre concourent à développer une nouvelle typologie qui s’appuie – des gares qui ressemblent à des gares ;
« côté ville » sur les règles de l’architecture institutionnelle – des gares qui s’inscrivent scrupuleusement dans leur site ;
contemporaine autant qu’elle révèle « côté trains » les principes – des gares dont le fonctionnement se lit par les volumes ;
d’une nouvelle architecture industrielle naissante mais déjà parfai- – des gares qui mettent en scène les nouvelles techniques ;
tement maîtrisée. On distingue plusieurs variantes dans cette – des gares qui font rêver à la destination Atlantique.
expression monumentale : les gares « palais » (Saint-Lazare),
celles qui magnifient la silhouette du pignon de la halle (gare du Ces principes, tellement simples qu’ils peuvent paraître naïfs,
Nord), les gares à campaniles (gare de Lyon). vont en fait jeter les bases d’une renaissance des gares en France,
notamment à l’occasion de la construction des lignes TGV Nord
Partout le territoire se maille de gares de différentes tailles. Les puis Méditerranée, Est et Rhin-Rhône. À l’étranger, on constatera
plus petites sont souvent construites sur un modèle répétitif des évolutions similaires à partir des années 1990 et le développe-
propre à chaque réseau. L’entre-deux-guerres voit naître de nou- ment de projets majeurs de gares, notamment en Europe, en
velles typologies : gares régionalistes (Deauville) ou gares moder- Chine et en Asie du sud-est et plus ponctuellement aux États-Unis,
nistes (Lens, Versailles-Chantiers). Mais c’est à l’après-guerre en Russie, en Amérique du Sud. L’attention est désormais portée
qu’apparaissent les bâtiments rationalistes de grande échelle qui sur la qualité de l’espace offert aux voyageurs, sur sa lisibilité –
accompagnent la reconstruction des infrastructures ferroviaires pour pallier les difficultés d’usage d’un espace complexe –, sur son
bombardées (Amiens, Angers). confort – pour adoucir le stress lié au déplacement – et sur les

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Référence Internet
TRP3074

CONCEPTION DES GARES ____________________________________________________________________________________________________________

Brotteaux au cœur de ce nouveau quartier. Mais il faudra attendre


1994 pour qu’une autre opération d’envergure voit le jour, à Lille.
Après s’être battu pour que la ligne à grande vitesse passe au cœur
de l’agglomération, le maire de l’époque, Pierre Maurois, lance le
quartier futuriste d’Euralille, à deux pas du centre historique, qui
deviendra là aussi le principal centre d’affaire de la ville (figure 3),
construit autour de la gare Lille-Europe (architectes : SNCF Atelier
d’Architecture/J.-M. Duthilleul, É. Tricaud, P. Saboya).

1 Depuis, non seulement en France, mais également dans tous les


pays où la renaissance des gares a déjà eu lieu, on voit s’épanouir
ces projets urbains que caractérisent intensité et mixité d’activités,
densité, qualité des espaces publics.

1.4 Des typologies multiples


L’histoire a façonné de nombreuses typologies de gare qui coha-
bitent aujourd’hui. On peut distinguer principalement :
– la grande gare urbaine, souvent issue d’un premier bâtiment
du XIXe siècle transformé ou refondé depuis (figure 4). Cette gare
La nouvelle façade marque dans l’espace urbain la transformation des accueille les trains longue distance en même temps qu’elle
volumes intérieurs de la gare à l’arrivée du TGV Atlantique en 1989. Sa concentre tous les modes de transport de la ville contemporaine
forme en arche et ses piles minérales redonnent une identité à la gare, (trains de banlieue, RER ou TER, métros, tramways, bus et cars,
par une écriture contemporaine qui cependant évoque la halle de la taxis et véhicules particuliers, vélos et autres modes de transports
première gare, remplacé en 1967 par le bâtiment anonyme que l’on individuels…) et est souvent située au cœur d’un quartier animé
aperçoit à l’arrière-plan. La transparence de la nouvelle façade et les du centre-ville. Elle mêle dans ses usages les déplacements occa-
grandes ouvertures créées dans les différents planchers de la gare sionnels, de loisir ou de travail et les déplacements quotidiens des
donnent un meilleur confort aux circulations des voyageurs, désormais « commuteurs » ;
baignées de lumière naturelle et rendues beaucoup plus lisibles. – la petite gare urbaine ou périurbaine, point d’arrêt d’une ligne
de banlieue ou de RER, souvent desservie par quelques lignes de
Figure 2 – Porte Océane, gare Montparnasse à Paris (© SNCF – AREP/ bus. Implantée dans des quartiers principalement d’habitation, elle
photographe A. Goustard) est majoritairement fréquentée pour des déplacements domicile-
travail ou domicile-études, objets d’une routine quotidienne :
modes d’accès par bus, vélo ou à pied ; attente sur le quai ;
services et commerces – pour faire du temps contraint de passage
en gare un temps utile et agréable –. – la petite halte rurale desservie par le TER, point d’accès à un
vaste territoire de villages et d’habitats dispersés, essentiellement
L’étape suivante de l’évolution des gares les ancre plus forte- accessible par le bus, la voiture ou dans une moindre mesure le
ment encore à celle des villes. Au tournant du XXIe siècle, la gare a vélo, au vu des distances à parcourir ;
retrouvé son statut d’équipement public majeur de la ville. Mais le – la gare située dans un aéroport qui acte la complémentarité
quartier de la gare est souvent resté dégradé, peu dense, cadre entre les transports ferré et aérien concourt à privilégier le train
d’une activité urbaine peu valorisante… tandis que la gare voit pour les transports intérieurs en laissant à l’avion les très longues
passer quotidiennement le principal flux piéton de la ville ! Cette distances et contribuant ainsi à diminuer l’empreinte carbone des
situation conduit alors de nombreuses collectivités territoriales à déplacements. Ce type de gare, dont celle de Roissy-Charles de
repenser totalement le développement du quartier dans lequel Gaulle (CDG) 2 (architectes : Aéroports de Paris/P. Andreu – SNCF
s’inscrit la gare. Atelier d’Architecture/J.-M. Duthilleul, É. Tricaud, D. Claris) est le
À Lyon, le quartier de la Part-Dieu fait figure de précurseur. Dès le prototype, n’a véritablement vu le jour que quand les bénéfices de
premier TGV, en 1981, la ville décide de faire de l’ancienne caserne la synergie entre train et avion ont pris le pas sur le régime de
son nouveau centre d’affaires et de déplacer la gare historique des concurrence qui a longtemps prévalu (figure 5) ;

La gare TGV génère un nouveau quartier à proximité de l’hypercentre lillois. À gauche, la façade de la gare ouverte sur le parc
et le nouveau quartier. À l’intérieur de la gare, le hall est conçu comme un grand balcon sur la ville, qui donne accès aux quais
TGV en contrebas.

Figure 3 – Gare de Lille Europe, France, 1994 (© SNCF Gares & Connexions – AREP/photographe D. Boy de la Tour)

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36
Référence Internet
TRP3072

L’économie du système ferroviaire

par Alain SAUVANT


Ingénieur général des ponts, eaux et forêts
1
Professeur à l’École nationale des ponts et chaussées
Directeur de l’Autorité de la qualité de service dans les transports
Membre du Conseil général de l’environnement et du développement durable

1. Contexte ........................................................................................... TRP 3 072 – 2


1.1 Économie comme une clé de compréhension du système
ferroviaire ........................................................................................... — 2
1.2 Aperçu sur la diversité des modèles économiques des activités
ferroviaires ......................................................................................... — 2
1.3 Premier aperçu sur les spécificités de l’économie ferroviaire .......... — 3
1.3.1 Un mode guidé ........................................................................ — 3
1.3.2 Un mode lourd et formaté par la sécurité .............................. — 4
1.3.3 Un mode globalement respectueux de l’environnement
et économe en surface ............................................................ — 4
1.3.4 Une grande diversité des modèles économiques
ferroviaires dans le monde ..................................................... — 5
2. Économie des activités de transport ferroviaire ...................... — 6
2.1 Économie du transport ferroviaire de voyageurs ............................. — 6
2.1.1 Transport régional de voyageurs ............................................ — 6
2.1.2 Transport à longue distance de voyageurs............................. — 8
2.2 Économie du transport ferroviaire de marchandises ........................ — 11
2.2.1 Transport ferroviaire conventionnel de marchandises ........... — 11
2.2.2 Transport ferroviaire combiné de marchandises .................... — 12
3. Économie de l’infrastructure ferroviaire et des aspects
système ............................................................................................. — 12
3.1 Économie des infrastructures ferroviaires ........................................ — 12
3.1.1 Infrastructures linéaires ........................................................... — 12
3.1.2 Gares et points nodaux ........................................................... — 13
3.2 Économie des aspects système ......................................................... — 13
3.2.1 Interactions entre fixe et mobile ............................................. — 13
3.2.2 Signaux prix entre fixe et mobile ........................................... — 14
3.2.3 Allocation de capacité dans un mode guidé .......................... — 15
3.2.4 Exploitation dans un mode guidé ........................................... — 16
4. Perspectives de l’économie du système ferroviaire ................ — 16
4.1 Perspectives des évolutions sociales et territoriales ........................ — 16
4.2 Crise sanitaire et perspectives des télécommunications .................. — 17
4.3 Perspectives de concurrence intramodale ferroviaire....................... — 17
4.4 Impacts des évolutions des autres modes de transport ................... — 18
4.5 Impacts de la crise climatique et du développement durable.......... — 21
4.6 Évolutions des politiques de développement ................................... — 21
4.7 Une performance qualitative perfectible ........................................... — 22
5. Conclusion........................................................................................ — 22
6. Sigles, notations et symboles ...................................................... — 23
Pour en savoir plus.................................................................................. Doc. TRP 3 072

’économie du système ferroviaire analyse les besoins des utilisateurs, les


L coûts de production, décrit l’organisation des composants (infrastructures,
matériels roulants, gares…) pour donner des recommandations pour sa bonne
Parution : août 2022

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Référence Internet
TRP3072

L’ÉCONOMIE DU SYSTÈME FERROVIAIRE –––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

administration. Les besoins des utilisateurs consistent à se déplacer rapidement


et à faible coût, mais ils sont également formatés par les caractéristiques de
chaque situation, la rareté de l’espace urbain ou la qualité de la chaı̂ne de la
porte d’origine à la porte de destination du déplacement.
L’économie du système ferroviaire est structurée également par le caractère
guidé (du fait des rails) du mode, qui renforce les interdépendances des com-
posants et ont amené leurs gestionnaires à inventer des méthodes de coordina-

1
tion originales tarifaires et non tarifaires. La présence de forts coûts fixes en fait
également un mode où la viabilité du modèle économique passe par la massi-
fication, rendue plus difficile par l’étalement urbain. Enfin, le renforcement de la
crise environnementale pourrait rebattre les cartes du modèle économique fer-
roviaire en sa faveur, dans un modèle de partenariat public privé innovant, à
condition de gagner en productivité et en qualité.

Cette notion de système est, comme on le verra par la suite, par-


1. Contexte ticulièrement importante pour le mode ferroviaire du fait de son
caractère guidé (lié à la présence des rails qui guident le train), et
qui conduit à de nombreuses spécificités de l’économie ferroviaire,
à la fois dans son sens de description et dans son sens de recher-
1.1 Économie comme une clé che de la bonne administration.
de compréhension du système
ferroviaire
1.2 Aperçu sur la diversité des modèles
Quelques définitions des mots clés « économie » et « système » économiques des activités
peuvent être utiles pour mieux cerner le sujet.
ferroviaires
Une des définitions de l’« économie » donnée par le dictionnaire
Le Robert est la « science des phénomènes concernant la produc- On distingue usuellement le transport de voyageurs et celui de
tion, la distribution, la consommation des richesses, des biens marchandises.
matériels, dans un groupe humain ». Au sein du transport de voyageurs (figure 1), on distingue la lon-
Mais c’est aussi d’après le même dictionnaire « l’organisation gue distance et le régional ou local. Un seuil de distance d’une cen-
des parties, d’un ensemble », ainsi que « la bonne administration taine de kilomètres sépare en général ces deux segments, même si
des richesses matérielles (d’une maison, d’un État). » la définition précise est souvent variable.
On constate donc la polysémie du mot « économie » qui peut Au sein de la longue distance, on identifie souvent le transport à
relever de la description des phénomènes, mais aussi de la recher- grande vitesse au vu de sa vitesse. Au sein du régional ou local, il
che des moyens de les gérer au mieux. est également fait référence à du transport périurbain dans les ban-
lieues des grandes villes, et du transport plutôt capillaire dans des
Elle entend donner ainsi des clés de compréhension et d’action,
zones de faible densité, même si les frontières entre ces deux élé-
aux côtés d’autres sciences ou éléments visant également à décrire
ments ne sont pas toujours évidentes à définir.
et à guider l’action dans un ensemble complexe, notamment la
sociologie, les sciences politiques ou le droit. Au sein du transport de marchandises, on distingue aussi fré-
quemment deux types :
Reste à définir également ce qu’on peut entendre par « système
ferroviaire » : – le transport conventionnel, pour lequel la marchandise utilise le
transport ferroviaire de bout en bout ;
Une des définitions selon cette même source d’un « système » – le transport combiné quand il y a succession d’usage de plu-
est un « dispositif ou appareil complexe mis en œuvre pour aboutir sieurs modes.
à un résultat », ou « un ensemble de pratiques organisées en fonc-
tion d’un but ». Les modèles économiques de ces différentes activités sont très
Enfin cette même source indique que le ferroviaire est ce qui disparates. De manière synthétique, on peut indiquer que ces
est « relatif au chemin de fer », défini comme « moyen de transport modèles diffèrent à la fois par les caractéristiques de demande et
utilisant la voie ferrée » à savoir « un ensemble de rails mis bout de coût très différents.
à bout ». Ainsi, en Europe en tout cas, le transport ferroviaire régional et
Le but du système ferroviaire est donc le transport de voyageurs local, ainsi que la plupart du transport ferroviaire à longue distance
ou de marchandises, autrement dit leur déplacement d’un point à hors grande vitesse sont aidés par les pouvoirs publics, au vu
un autre. On notera d’ailleurs qu’il ne s’agit pas d’un bien matériel, d’une convention (ou contrat) qui fixe les obligations de service
mais d’un service. À cet effet, il met en œuvre des éléments mobi- public en contrepartie desquelles sont versées les aides par les
les (matériel roulant), mais aussi des éléments fixes (infrastructu- entités publiques, qu’elles soient nationales, régionales, voire loca-
res), liés entre eux dans un dispositif (ensemble de constituants les dans certains pays. On parle donc dans ce cas de transport
assemblés au vu d’une finalité) qu’on peut à l’évidence qualifier conventionné.
de complexe, associé à des pratiques (textes réglementaires, pra- En revanche, le modèle économique du transport ferroviaire à
tique des « gestes métier »). grande vitesse (voir figure 2) repose en général pour l’essentiel

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38
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TRP3072

––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– L’ÉCONOMIE DU SYSTÈME FERROVIAIRE

Évolution du trafic voyageurs (*)


voyageurs-kilomètres
(en milliards)
100
ÉPIC + IDTGV + EIL + THI (7)
90

1
THI = Thalys
EIL = Eurostar Total voyageurs ÉPIC + IDTGV
80

70

Voyages SNCF (y c. Ouigo) + IDTGV + EIL + THI (7)


60

50
Voyages SNCF (y c. Ouigo et IDTGV) (5) (6)
40

30

20 Transport Express Régional


Transilien (4)
10

Intercités (6)
0
1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017
Figure 1 – Évolution du trafic voyageurs SNCF en voyageurs–km de 1991 à 2017 (source : SNCF)

Ces différences proviennent de valeurs apportées par le transport


ferroviaire à l’utilisateur (voyageurs ou chargeurs) très variables
Revenus selon le positionnement comparatif de la performance (temps,
% des concours
de l’EF confort, autres éléments de qualité…) du ferroviaire au sein de
publics dans
(en millions l’ensemble des modes de transport, ainsi que des coûts comparés
les revenus
d’euros HT) avec les autres modes de transport (route, avion, fluvial…) de bout
en bout.
TER 3 971 74 %
De ce fait, il est souvent plus pertinent d’analyser les détermi-
Transilien 2 733 62 % nants de la demande et des coûts par activité dans un premier
Intercités 927 32 % temps, puis d’y intégrer les éléments d’infrastructure et les consi-
dérations système.
TAGV domestique 4 593 3%
Ceci étant dit, ces différentes activités sont souvent imbriquées
Sous-total entre elles, au sein de la chaı̂ne de transport que parcourt le voya-
12 223 41 % geur ou la marchandise de bout en bout, qui peut inclure un ou plu-
transport domestique
sieurs maillons ferroviaires, mais aussi des maillons en transports
International collectifs urbain ou locaux, en voiture, à pied ou en vélo principale-
1 146 0,4 %
et TGL non conventionné ment pour les voyageurs, ou en camion pour les marchandises.
Total transport
13 369 38 %
ferroviaire sur RFN
1.3 Premier aperçu sur les spécificités
de l’économie ferroviaire
Figure 2 – Revenus 2015 du transport ferroviaire par activité et %
des concours publics dans les revenus (source : ART (ex Arafer)) 1.3.1 Un mode guidé
Le mode ferroviaire se distingue de la plupart des autres modes
sur les contributions des voyageurs, même si des apports publics en ce qu’il est un mode guidé, les rails et les aiguillages imposant
sont parfois constatés, essentiellement pour soutenir une partie une direction au train. Les fonctions de propulsion et de direction y
du développement des infrastructures, voire certains services trans- sont séparées, la première étant à bord et la seconde au sol, à la
ports à grande vitesse souvent d’envergure régionale. différence par exemple du mode routier où le véhicule intègre à
Pour le transport ferroviaire de marchandises, les aides publi- son bord les deux fonctions, même s’il peut parfois recevoir des
ques au transport sont plutôt une exception, mais il reste des inter- signaux provenant du sol également (feu tricolore par exemple).
ventions publiques pour le développement et certains aspects spé- Cette caractéristique physique du système ferroviaire entraı̂ne
cifiques de services, par exemple le fonctionnement des interfaces de nombreuses conséquences économiques. La principale est celle
intermodales (chantiers de transport combiné, gares fret…). de la gestion de la capacité (de la voie), dans la mesure où le

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39
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TRP3072

L’ÉCONOMIE DU SYSTÈME FERROVIAIRE –––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

dépassement ou le croisement ne sont possibles que si les infra- Face à une demande dont les caractéristiques peuvent évoluer
structures le permettent (par exemple au moyen d’un évitement ou (par exemple du fait des gains de productivité du transport routier
d’une voie double). De ce fait, si plusieurs trains présentent des ou aérien), ces éléments peuvent réduire l’attractivité du mode
vitesses différentes, la capacité globale de la voie chute de manière ferroviaire.
significative, portant ainsi préjudice à la performance globale du sys- L’autre conséquence est qu’il est souvent difficile de trouver une
tème ferroviaire sauf si des installations spécifiques ont été prévues, solution ferroviaire économiquement pertinente pour des flux de
ce qui est possible mais présente un surcoût. faible volume ; autrement dit un flux minimal (ou masse critique)
C’est la raison pour laquelle l’allocation de capacité (procédure est souvent nécessaire, menant à ce que l’on constate que le trans-

1
qui attribue la capacité : sillons, accès à une gare…) est dans la plu- port ferroviaire est souvent plus adapté à du transport massifié.
part des cas planifiée en amont, et que la gestion des aléas de cir- Évidemment, il existe des solutions techniques contrastées (voie
culation effective implique également à la fois le bord mais aussi le unique, double voie, plusieurs doublets de voie, cantons de signa-
sol. lisation courts ou longs…), et sécurisées, qui diffèrent selon les
Ce qui pose ensuite la délicate question du degré de séparation contextes (par exemple le niveau de trafic), mais ces considérations
(dite verticale) entre la gestion du bord et celle du sol dans le sys- limitent en pratique le domaine de pertinence du mode ferroviaire,
tème ferroviaire, ainsi que celle des interactions entre plusieurs dont la part modale est assez rarement majoritaire, sauf dans les
transporteurs. Ce sont des questions que connaı̂t très peu le mode cas de transport très massifié, situés dans les axes de plus forte
routier (un croisement ou un dépassement est presque partout pos- demande (axes vers le centre dans les très grandes aggloméra-
sible quitte à devoir ralentir un peu pour empiéter sur le bas-côté) tions, axes majeurs interurbains…).
et assez peu le mode aérien, sauf au niveau des pistes aéroportuai- On notera que la qualité de la connexion du mode ferroviaire aux
res et de leur approche. autres modes est souvent déterminante pour créer les conditions
Ainsi, dès 1833 soit moins d’une décennie après son ouverture, de la massification des axes ferroviaires eux-mêmes, dans la
le propriétaire du premier réseau de chemin de fer avec présence mesure où un trajet terminal dans un autre mode est presque sys-
de traction mixte vapeur et hippomobile (Stockton-Darlington) a tématiquement nécessaire.
choisi de racheter les droits des autres transporteurs au vu des inef-
ficacités de gestion liées à la diversité des technologies et des 1.3.3 Un mode globalement respectueux
entreprises de transport ferroviaire : pertes de capacité, exploitation de l’environnement et économe en surface
très difficile des modes dégradés…
Le mode ferroviaire est généralement considéré comme particu-
lièrement respectueux de l’environnement et économe en termes
1.3.2 Un mode lourd et formaté par la sécurité de consommation de surface.
Une autre caractéristique du mode ferroviaire est qu’il s’agit d’un Ces deux éléments font que, malgré ses inconvénients rappelés
mode lourd, largement formaté par les considérations de sécurité. ci-dessus, il garde des domaines de pertinence et fait l’objet d’aides
La lourdeur renvoie à la notion de poids élevé du mobile et par publiques dans de nombreux cas.
voie de conséquence de l’infrastructure qui doit le supporter, mais Le bon respect de l’environnement, notamment en matière de
aussi indirectement à un manque de souplesse. consommation énergétique et donc aussi de réduction d’émissions
Les considérations de sécurité sont par nature présentes dans de gaz à effet de serre (GES) ou de pollution locale de l’air, renvoie
pour partie au degré important de massification, mais aussi à la
tous les modes de transport du fait des risques d’accident. Mais
perte d’énergie par frottement plus faible liée à la faible surface de
leur présence est encore plus forte que dans la plupart des autres
contact entre la roue et le rail par rapport à celle entre le pneu rou-
modes, notamment le routier, du fait d’un faisceau de causes :
tier et la route, ainsi qu’au caractère élastique du contact roue-rail.
– le caractère guidé du mode ferroviaire sépare la fonction de
propulsion et celle de direction, et impose donc des procédures Si les émissions du train régional thermique sont globalement
de coordination entre ces deux fonctions qui sont intrinsèquement plus faibles que celles de la voiture thermique, on constate que le
plus simples dans le mode routier où elles sont réunies dans la bilan est plus contrasté entre TER et autocar. Il dépend aussi beau-
coup du niveau de remplissage (voir figure 3, et notamment les
même main en général ; de plus l’évitement de l’obstacle n’est
fourchettes en rose).
pas possible, ce qui implique un arrêt absolu avant celui-ci ;
– le nombre de voyageurs (ou de tonnes de marchandises poten- Le train interrégional émet également moins de GES par voya-
tiellement dangereuses) présents à bord peut être bien plus impor- geur-km que l’avion et la voiture thermique, ainsi que vis-à-vis de
tant que dans une voiture ou un camion, et même qu’un autocar, l’autocar pour le TGV et la partie la mieux remplie des trains
donnant à un éventuel accident un caractère catastrophique pour conventionnels de grandes lignes (figure 4).
les personnes impliquées à bord et potentiellement au sol.
Le haut niveau de sécurité se traduit par des règles de non 160
régression, souvent dénommées GAME (globalement au moins
140
équivalent), ce qui signifie que le niveau de sécurité global obtenu
après une modification doit être au moins égal à celui de l’état 120
[gCO2 /voy.km]

antérieur. Elles imposent souvent des coûts fixes importants dès 100
la première circulation ferroviaire, particulièrement en voyageurs, 80
liés à des dimensionnements minimaux des installations au sol et
60
du matériel roulant, et à des besoins de surveillance.
40
Du fait de la lourdeur et de l’importance des considérations de
sécurité d’une part, et de la durée de vie importante des compo- 20
sants ferroviaires d’autre part (atteignant plusieurs dizaines 0
d’années en général), l’adaptation du système ferroviaire aux évo- RER Transilien Autocars TER Véhicules Deux-
lutions de la demande est souvent plus lente que celle du mode (RATP) (SNCF) (SNCF) particuliers roues
routier, L’inscription dans le terrain de nouvelles infrastructures
n’est pas facile non plus, au vu de l’importance de la moindre évo- Figure 3 – Émissions globales de GES des modes de transport
lution envisagée, et plus particulièrement pour la grande vitesse du de voyageurs en zone régionale par voyageur–km. Sensibilité au taux
fait des rayons de courbure nécessaires. d’occupation en conditions d’utilisation (source : Ademe)

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TRP3072

––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– L’ÉCONOMIE DU SYSTÈME FERROVIAIRE

Ces estimations intègrent les phases amont de production de voyageurs ou de marchandises, et ce même par rapport à des
l’énergie mais pas les émissions liées aux empreintes des véhicules modes collectifs routiers comme l’autobus ou l’autocar. Par exem-
et des infrastructures. En général ces effets liés aux empreintes ne ple, un train Transilien peut comprendre 3 000 voyageurs (dont
sont pas très significatifs, sauf dans les cas de faibles trafics (lignes 1 100 places assises), équivalent à 2 500 voitures, occupant à
ferroviaires à faible trafic, ou bien lignes nouvelles à grande vitesse 80 km/h une file de 80 km. Un train de fret de 500 tonnes représente
à faible trafic, dont les délais de retour carbone peuvent être très l’équivalent de 30 camions.
longs). Il s’agit d’un avantage économique important dans les zones et
La massification peut également contribuer à réduire le bruit uni- axes denses où l’espace est rare, et où l’acheminement d’une quan-

1
taire, sous réserve d’utiliser des équipements efficaces à cet effet, tité comparable de voyageurs ou de marchandises par la route ne
par exemple des semelles de frein peu bruyantes ou le freinage serait pas possible ou occasionnerait soit d’importantes pertes de
« disques seuls ». temps (congestion), soit d’importantes dépenses en infrastructures
de capacité.
L’électrification des grands axes ferroviaires peut également y
contribuer, notamment pour des questions de pollution locale de Cet avantage du mode ferroviaire pèse en revanche assez peu
l’air, voire de gaz à effet de serre dès lors que la production d’élec- dans les zones peu denses, ce qui renforce la prédilection du
tricité en amont est pour l’essentiel décarbonée. mode ferroviaire pour les situations massifiées.
On notera que ces comparaisons sont effectuées par comparai-
Le caractère massifié du mode peut fortement réduire sa
son à des voitures thermiques. À terme, dans la mesure où la voi-
consommation d’espace s’il faut acheminer un flux important de
ture à énergie carbonée ne devrait plus être commercialisée vers
2035 environ en Europe, le diagnostic pourrait évoluer significative-
ment. La décarbonation des avions paraı̂t plus difficile du fait des
325 contraintes pesant sur les densités unitaires massique et volu-
300 mique dans ce mode qui doit soulever son énergie, même s’il pour-
275 rait y avoir des solutions au moyen des agro-carburants et des
250
[gCO2 /voy.km]

225 carburants de synthèse ou vecteurs énergétiques (dont notamment


200 l’hydrogène).
175
150
125 1.3.4 Une grande diversité des modèles
100 économiques ferroviaires dans le monde
75
50 Si le mode ferroviaire est répandu dans la majorité des pays du
25
0 monde, les types de flux acheminés et les principales caractéristi-
TGV Trains Autocars Véhicules Avions - Avions - Avions - ques techniques ainsi que les modèles économiques peuvent large-
grandes particuliers navettes autres régionaux ment différer.
lignes vols
On peut distinguer les modèles types (figure 5) en fonction des
métropole
zones géographiques :
– l’Asie, où les densités de population et d’activités sont souvent
Figure 4 – Émissions globales de GES des modes de transport très importantes puisque plus de la moitié de la population mon-
de voyageurs en zone inter-régionale par voyageur-km. Sensibilité diale y réside. Les transports y sont donc par nature très massifiés,
au taux d’occupation en conditions d’utilisation (source : Ademe) ce qui facilite le recours au mode ferroviaire souvent largement

m vk/caisse ou voiture par an en 2005


16 000

14 000

12 000

10 000
Un méme ratio peut traduire des réalités bien différentes

8 000

6 000

4 000

2 000

0
RU
CHINE
KOR
INDE
JPN
CAN
USA

A
B
D
DK
E
FIN
F
TGV
F idF
resteF
EL
IRL
I
NL
P
S
UK

Figure 5 – Remplissage des trains de voyageurs dans le monde en 2005 (m voyageurs-km par caisse ou voiture par an) (source : d’après données
de la banque mondiale, et données françaises pour TGV et IDF et reste de la France)

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41
1

42
Infrastructure ferroviaire, exploitation et sécurité
(Réf. Internet 42576)

1– Exploitation, gestion opérationnelle et sécurité 2


2– Fret ferroviaire et logistique Réf. Internet page

Transport ferroviaire de fret AG8110 45

3– Alimentation en énergie électrique

4– Voie

 Sur www.techniques-ingenieur.fr
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43
2

44
Référence Internet
AG8110

Transport ferroviaire de fret

par Patrick CHARPENTIER


Directeur de l’Institut de l’exploitation ferroviaire, Groupe SNCF

2
Au sein du Groupe SNCF, l’auteur a été Directeur de la production du Fret, Directeur
de la Stratégie et du Développement du Fret, puis Directeur Général du Groupe Fret
International

1. Branche fret de la SNCF......................................................................... AG 8 110 — 2


1.1 Activité fret au sein de la SNCF .................................................................. — 2
1.2 Filiales de la SNCF ....................................................................................... — 5
2. Services offerts aux chargeurs par le groupe SNCF ...................... — 6
2.1 Chaînes de production du transport .......................................................... — 6
2.2 Transport conventionnel ............................................................................. — 7
2.3 Transport combiné....................................................................................... — 7
3. Performances ............................................................................................ — 8
3.1 Part de marché ............................................................................................. — 8
3.2 Qualité des prestations ............................................................................... — 8
3.3 Performance économique........................................................................... — 8
4. Environnement.......................................................................................... — 9
4.1 Environnement concurrentiel ..................................................................... — 9
4.2 Un environnement institutionnel favorable au rail................................... — 10
4.3 Concurrence intramodale ........................................................................... — 11
5. Défis et mutations ................................................................................... — 11
5.1 Évolution des trafics .................................................................................... — 11
5.2 Ambition de développement ...................................................................... — 11
5.3 Stratégie de reconquête pour chaque métier............................................ — 11
5.4 Alliances ferroviaires européennes............................................................ — 12
5.5 Réorganisation complète de l’outil de production ................................... — 12
6. Conclusion ................................................................................................. — 12

e marché des transports est très concurrentiel. La concurrence intermodale


L a largement profité au mode routier depuis 30 ans. Jusque là contenue par
des accords de coopération entre compagnies ferroviaires nationales, et par les
réelles difficultés d’accès au métier, la concurrence entre entreprises ferroviai-
res, annoncée depuis 1991, s’inscrit désormais dans le paysage européen. Peu
significative en France, elle est en revanche, une réalité dans d’autres grands
pays européens.
Les autorités politiques appellent à un renouveau du mode ferroviaire pour
faire face au défi de la croissance des échanges en Europe et dans le monde.
Elles relayent en cela la pression de l’opinion publique et des acteurs institution-
nels qui redoutent les effets externes d’une croissance des échanges qui ne
serait assurée que par le mode routier. Le renchérissement durable du coût de
l’énergie rend plus que jamais impérative une alternative au « tout route ». Les
chargeurs eux-mêmes, industriels ou apporteurs de fret, souhaitent de plus en
plus bénéficier des atouts intrinsèques du mode ferroviaire.
Les questions de l’harmonisation des conditions de concurrence, de la sous
tarification du transport, ou de la prise en compte des effets externes, sont
Parution : avril 2007

Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie


est strictement interdite. − © Editions T.I. AG 8 110 − 1

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Référence Internet
AG8110

TRANSPORT FERROVIAIRE DE FRET ________________________________________________________________________________________________________

posées depuis des années. Les compagnies ferroviaires ne peuvent évidemment


attendre que le débat entamé soit favorablement conclu pour prendre les mesu-
res qui sont de leur ressort. Tous les chemins de fer historiques mettent dès lors
en œuvre des politiques de restructuration inédites par leur ampleur, sur la base
de modèles industriels nouveaux en vue de retrouver une compétitivité forte et
une qualité de service irréprochable. À bien des égards, tant par ses faiblesses
constatées que par sa profonde mutation industrielle, la SNCF est exemplaire
dans la recherche d’un modèle d’avenir viable pour le mode ferroviaire à
l’échelle de l’Europe.

2
1. Branche fret de la SNCF Industrie lourde : tonnage transporté
Agriculture et industrie de consommation : tonnage transporté
Activités intermodales : tonnage transporté
Tonnage kilométrique taxé
Le transport ferroviaire de fret en France peut encore être examiné

Tonnage transporté (Mt)

Tonnage kilométrique taxé (Gt.km)


25 10
à travers la seule SNCF, même si de nouveaux opérateurs (Veolia 9
20 8
Environnement ou EWSR) ont fait leur apparition. 7
Le groupe SNCF a un chiffre d’affaires consolidé de 22 059 M€ (en 15 6
5
2004). Il se structure autour de quatre branches, dont la Branche Fret 10 4
qui pèse 6 393 M€, soit plus que le chiffre d’affaires de chacune des 3
trois autres branches du groupe SNCF : Voyageurs France Europe, 5 2
Transport Public et Infrastructure. 1
0 0
Céréales, alimentation animale
Denrées périssables
Produits d'épicerie
Boissons
Combustibles solides
Minerais pour la sidérurgie et ferrailles
Produits de la sidérurgie
Métaux, produits non ferreux
Produits des industries mécaniques et électriques
Véhicules, machines agricoles
Produits pétroliers
Produits chimiques
Amendements et engrais
Produits de carrière, matériaux de construction
Verre, céramique
Bois, extraits tannants
Papiers et cartons
Minerais et déchets non ferreux
Groupage et poste
Transports combinés
Divers
Au sein de la Branche Fret, il convient toutefois de soustraire le
poids du groupe Géodis pour avoir une vision des dimensions du
transport de charges complètes par voie ferrée : 3 milliards d’euros.
Celui-ci est partagé entre l’Activité Fret, au sein de l’établissement
public SNCF lui-même pour l’acheminement ferroviaire, et les filia-
les de la SNCF sur des métiers connexes, en particulier la logistique
et la gestion de wagons.

1.1 Activité fret au sein de la SNCF

1.1.1 Fonds de commerce

La SNCF est le plus grand transporteur de France : son volume


d’activité (117,4 millions de tonnes ou 45 milliards de tonnes-kilomè- Figure 1 – Répartition par secteur de marché en 2005
tres par an) équivaut à la mise en route de 23 000 camions gros por-
teurs par jour. La SNCF arrive en seconde position en Europe
derrière une autre compagnie ferroviaire, le groupe Deutsche Bahn 60
53,2 %
(270 Mt ou 74 Gt · km). 50
La SNCF transporte par voie ferroviaire pratiquement tous les
types de marchandises, des produits en vrac à faible valeur, aux pro- 40
duits conditionnés à forte valeur (figure 1).
30
25,1 %
Répartition (%)

Les trafics issus de l’industrie lourde ont un poids prépondérant : 21,6 %


ils correspondent d’ailleurs mieux au domaine de pertinence du 20
mode ferroviaire que les trafics orientés vers la distribution. Ces
deux segments sont assurés par des wagons spécialisés selon la 10
marchandise transportée et forment le trafic conventionnel. Le
transport combiné intermodal représente quant à lui moins du quart 0
Industrie Agriculture Activités
de l’activité en volume : les marchandises, de toutes natures, sont lourde et industrie intermodales
logées dans des conteneurs ou des caisses mobiles routières, eux- de consommation
mêmes placés sur des wagons plats (figure 2).
Figure 2 – Trafic par wagons chargés : répartition des tonnes
La SNCF est depuis longtemps très européanisée : une bonne
kilomètres par catégorie de trafics en 2005
moitié de ses flux de wagons franchit au moins une frontière, même
si, du point de vue de la traction des trains, la SNCF n’opère prati-
quement qu’en France. Les FS, chemins de fer italiens, sont les pre- La SNCF a 10 000 clients de fret en portefeuille. Les cinq plus
miers partenaires ferroviaires de la SNCF, suivis de la SNCB en importants font un cinquième de son chiffre d’affaires, les vingt pre-
Belgique, et de Deutsche Bahn en Allemagne (figure 3). miers font plus du tiers. Mais ces grands clients n’ont pas que des

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AG 8 110 − 2 est strictement interdite. − © Editions T.I.

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Référence Internet
AG8110

_______________________________________________________________________________________________________ TRANSPORT FERROVIAIRE DE FRET

Les unités d’affaires de la SNCF ont en propre la gestion de leur


parc de wagons lorsqu’il s’agit de wagons réseau. En revanche, elles
25 se partagent un même plan de transport et de mêmes moyens de
traction. Seul le transport combiné dispose d’une organisation de la
Trafic en France (Gt.km)

20 production ferroviaire disjointe.

15
1.1.2 Dimensions de la production ferroviaire
10
1.1.2.1 Plan de transport
5
Le plan de transport a pour objet de lier des demandes de prise en
charge de flux de marchandises à la mise en œuvre de ressources
0
Domestique Importation Exportation Transit
ferroviaires.
Comme toute production d’entreprise de réseau, la production
ferroviaire se caractérise en effet :
2
Figure 3 – Trafic domestique et trafic international en 2005 — d’une part par des flux, c’est-à-dire par des couples origine-
destination de plus ou moins grand volume, allant de quelques ton-
nes à quelques millions de tonnes par an ;
— d’autre part par des ressources physiques : les moyens de trac-
tion et l’infrastructure ferroviaire.
1 600
Chiffre d'affaires (M€)

1 460 La gestion optimale des ressources, qui concentrent le capital


1 400
d’une compagnie ferroviaire et l’essentiel de sa main-d’œuvre, est
1 200 évidemment conditionnée par la gestion optimale des flux, et par la
1 000 maîtrise des processus industriels complexes qui les prennent en
800 charge.
600 Les flux sont de plusieurs types :
400 — les flux de marchandises : ils sont groupés ou dégroupés dans
207 des bases logistiques pour constituer des flux de wagons à
200
40 acheminer ; cette opération est réalisée par un opérateur logistique ;
0 — les flux de wagons à acheminer : ils sont groupés ou
Transport Transport Autres
conventionnel combiné opérations
dégroupés dans des triages pour constituer des flux de convois
entre triages ; cette opération est le cœur de métier de l’organisa-
teur de transport ferroviaire ;
Figure 4 – Chiffre d’affaires 2005 du fret SNCF : 1 707 M€ — les flux de convois : ils sont groupés ou dégroupés dans des
relais pour constituer des étapes entre les relais ; cette opération est
le cœur de métier du transporteur ferroviaire.
flux très massifiés : ils sont aussi les principaux pourvoyeurs des Un flux de marchandise emprunte généralement un flux de
flux diffus. À eux seuls en effet, les vingt premiers clients utilisent wagons à acheminer. Un flux de wagon à acheminer emprunte un à
déjà la quasi-totalité du réseau. Parmi les grands clients de la SNCF trois flux successifs de convois. Enfin, un flux de convois emprunte
se trouvent : Arcelor (sidérurgie), Total (pétrole chimie), STVA et un à deux flux successifs d’étapes.
Gefco (automobiles), TMF et Logistra (céréales), groupe Danone Ces opérations permettent de proche en proche de concevoir et
(boissons), Novatrans et Naviland-Cargo (transport combiné). réaliser un plan de transport. À la base même de la création de
Le chiffre d’affaires de l’Activité Fret de la SNCF s’élevait à valeur dans tous les métiers de la logistique et du transport, ces
1 716 M€ en 2004. Il est constitué à 84 % par des transports conven- opérations ont deux finalités dans le transport ferroviaire :
tionnels. Le transport combiné y tient en effet une place modeste en — constituer des flux de volume de plus en plus grand pour
raison de la faible rémunération de la traction ferroviaire perçue par atteindre l’optimum d’utilisation des ressources entre deux nœuds
la SNCF dans la chaîne du transport combiné : elle est en effet de du réseau : il faut par exemple réunir plusieurs centaines de tonnes
4,18 centimes d’euro pour une tonne-kilomètre en transport conven- entre deux points pour employer correctement une locomotive ;
tionnel par wagon, mais elle n’est plus que de 2,11 centimes pour un — donner de la stabilité au système : le mode ferroviaire réclame
transport combiné (figure 4). une programmation rigoureuse de l’exploitation. Il profite donc de
Le prix moyen pour transporter une tonne de fret est de 14,30 € ces paliers pour transformer de proche en proche une commande
pour un transport conventionnel sur 342 km, et de 13,50 € pour un de traitement de flux de marchandises, peu prévisibles, et très dis-
transport combiné sur 640 km. De fortes disparités sont rencon- persés dans le temps et dans l’espace, en un traitement de flux
trées, en fonction de la distance parcourue, du wagon utilisé, du ton- d’étapes assez stables dans le temps et dans l’espace, car il s’agit de
nage remis par envoi, de l’anticipation de la commande de transport leur affecter des ressources contraintes, surtout lorsqu’il s’agit de
par le client et de la nature de la marchandise. personnel de conduite (figure 5).

L’Activité Fret de la SNCF est organisée en unités d’affaires, Le groupe SNCF a des compétences dans tous les métiers de ges-
spécialisées par grands secteurs d’activité économique. Les unités tionnaires de flux : selon la prestation qui lui est demandée, il est
d’affaires s’appuient sur des compétences marketing et sur une donc parfois opérateur logistique (rôle des filiales spécialisées du
force de vente dédiée. Elles pilotent depuis Paris un réseau de vente groupe), souvent organisateur de transport, et toujours au moins
implanté dans les grandes métropoles européennes et françaises. transporteur ferroviaire.
Un catalogue de services et de prix est proposé à la clientèle. Bien À l’échelle des trafics traités par la SNCF et son groupe, concevoir
que construit à partir d’une gamme d’acheminement, d’une gamme un plan de transport équivaut à traiter annuellement un million de
de wagons, et éventuellement d’une gamme de produits logisti- flux de marchandises, à les réduire à 100 000 flux de wagons à ache-
ques, le service est adapté selon les besoins exprimés par les miner, puis eux-mêmes à 1 000 flux de convois, et enfin ces derniers
clients. Dans la quasi-totalité des cas, le prix est négocié. à 100 flux d’étapes.

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47
2

48
Infrastructure ferroviaire, exploitation et sécurité
(Réf. Internet 42576)

1– Exploitation, gestion opérationnelle et sécurité

2– Fret ferroviaire et logistique


3
3– Alimentation en énergie électrique Réf. Internet page

Alimentation en énergie des trains TRP3000 51

4– Voie

 Sur www.techniques-ingenieur.fr
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49
3

50
Référence Internet
TRP3000

Alimentation en énergie des trains


Distribution de l’énergie électrique

par Pierre CHAPAS


Ingénieur DPE 1977
Sénior Expert ferroviaire

1. Distribution de l’énergie électrique .......................................... TRP 3 000 - 2


3
1.1 Architecture.................................................................................................. — 2
1.2 Technologies de base : ligne aérienne – ligne au sol............................... — 3
2. Ligne aérienne de contact ......................................................... — 3
2.1 Fonctions mécaniques ................................................................................ — 3
2.2 Composants ................................................................................................. — 4
2.3 Pose de la ligne aérienne............................................................................ — 5
3. Appareil de prise de courant : pantographe.............................. — 12
3.1 Fonctions électriques .................................................................................. — 12
3.2 Fonctions mécaniques ................................................................................ — 12
4. Ligne de contact au sol ............................................................. — 13
4.1 Conducteur latéral et frotteur ..................................................................... — 13
4.2 Alimentation par le sol................................................................................ — 14
5. Supercapacités.......................................................................... — 15
6. Courant dans les rails ............................................................... — 15
7. Cas particulier : le trolleybus .................................................... — 16
8. Environnement et maintenance de la distribution
d’énergie électrique .................................................................. — 17
8.1 Environnement ............................................................................................ — 17
8.2 Maintenance ................................................................................................ — 18
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. TRP 3 000

’énergie est à la base de tout moyen de transport :


L –les animaux et l’homme pour les caravanes ou le transport de lourdes
charges à l’aide de véhicules équipés de roues ;
– le vent poussant les voiles des navires en mer ;
– la vapeur actionnant les pistons d’un moteur d’une locomotive ;
– la combustion d’un liquide fossile dans les cylindres d’un moteur de
véhicule automobile ou de bateau ;
– la combustion du gaz actionnant un turbomoteur d’avion.
Dans tous les cas, sauf celui du vent, les véhicules, terrestre, aérien ou mari-
time, embarquent leur source d’énergie pour assurer leur autonomie.
Le chemin de fer a une spécificité depuis le développement de l’électricité
industrielle : la voie ferrée est équipée d’une ligne d’alimentation de sorte que
l’énergie électrique est « captée », et non plus embarquée, par le véhicule sur
Parution : novembre 2012

rails. Deux conséquences primordiales en découlent :


– l’autonomie est infinie (tant que la ligne est électrifiée) ;

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51
Référence Internet
TRP3000

ALIMENTATION EN ÉNERGIE DES TRAINS _______________________________________________________________________________________________

– la transformation de l’énergie électrique en énergie mécanique n’engendre


d’autre rejet qu’un très faible dégagement de chaleur dû aux pertes. C’est la
raison pour laquelle, dès la fin du XIXe siècle, les transports urbains ont été les
premiers à mettre en œuvre cette énergie en remplacement de celle du cheval,
de la vapeur ou du moteur à combustion interne, très polluants.
Deux parties distinctes recouvrent l’alimentation des trains. La première est
la fourniture au réseau ferroviaire de la puissance nécessaire sous la forme et
au niveau satisfaisant : ce sont les sous-stations, véritables centrales-interfaces
avec le réseau général.
La seconde partie, développée dans le présent article, analyse les fonctions et
leurs contraintes, pour assurer la distribution de la puissance électrique en ligne.
Les contraintes, électriques, mécaniques, aérodynamiques, sont importantes.
Les différents types d’exploitation des trains demandent une adaptation de ces
technologies. Ainsi, les réseaux métropolitains, construits en grande majorité en

3 tunnels, ont-ils, dès l’origine, privilégié l’alimentation par conducteur fixé au sol
(appelé communément « 3e rail », respectant ainsi le gabarit restreint de telles
infrastructures. De même, le redéveloppement, récent, des réseaux de tramways,
engendre des innovations respectant l’environnement des villes, grâce notam-
ment à l’alimentation en énergie par le sol.
Comme il en est pour toute infrastructure de transport, la garantie de bon
fonctionnement dans les conditions les plus sévères en termes de densité
d’exploitation et de performances économiques, est subordonnée à une main-
tenance rigoureuse, dont nous analyserons les principaux aspects.
La traction électrique ferroviaire a bénéficié des progrès et des développe-
ments de l’électrotechnique et de l’électronique dès l’origine. Une telle
dynamique lui a permis de se placer en tête de tous les moyens de transport. En
termes de rentabilité énergétique, soulignons le niveau record du rendement
atteint par l’engin de traction. Par ailleurs, la transformation de l’énergie
électrique distribuée au chemin de fer n’a aucune incidence néfaste sur
l’environnement.

1. Distribution de l’énergie Réseau général de distribution THT


électrique
1.1 Architecture
Sous-station Sous-station
L’énergie électrique primaire est fournie par les centrales de 1 2
production (hydrauliques, nucléaires, à gaz, éoliennes, solaires)
distribuant le courant à tous les abonnés, domestiques ou indus- Ligne de contact
triels. Le réseau de distribution, en très haute tension (THT),
comprend les postes d’interconnexion alimentant à leur tour des Rails
postes de distribution. Le chemin de fer est l’un de ses abonnés ; il
doit adapter cette tension grâce à des postes qui lui sont propres,
appelés sous-stations. Figure 1 – Principe de l’alimentation électrique des trains
À quelques rares exceptions près, le système ferroviaire utilise
des engins de traction à deux pôles, soit sous tension continue,
soit sous tension alternative monophasée. Les tensions utilisées diffèrent selon les réseaux, ce qui
s’explique par les évolutions et développements de l’électro-
technique depuis 1879, année au cours de laquelle la première
En Europe, citons la ligne de chemin de fer à crémaillère locomotive électrique fut expérimentée par Siemens. Résumons
Zermatt-Gornergrat, alimentée en 725 V triphasé, à l’aide de les principales tensions en service de nos jours dans quelques
deux fils de contact et troisième phase par les rails de roulement. pays [1] [2] :
– courant continu 750 V : réseaux métropolitains et tramways ;
La sous-station est donc un convertisseur de tension triphasée – courant continu 1 500 V (France Sud-Est et Sud-Ouest, Pays-Bas) ;
du réseau général en alimentation « deux fils » (figure 1). Les deux – courant continu 3 000 V (Italie, Belgique, Espagne, Maroc,
conducteurs sont la ligne de contact et les rails de roulement. Pologne, Slovénie, Brésil, Russie en partie...) ;

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52
Référence Internet
TRP3000

________________________________________________________________________________________________ ALIMENTATION EN ÉNERGIE DES TRAINS

– courant alternatif monophasé 15 kV – 16,7 Hz (Allemagne, 2.1 Fonctions mécaniques


Suisse, Autriche, Suède, Norvège) ; dans ce cas, soit les réseaux
ferroviaires disposent de leurs propres centrales de production en
La tension mécanique du fil et sa position par rapport à la voie
fréquence 16,7 Hz, soit les sous-stations sont équipées de
sont assurées par des supports latéraux à la voie, convenablement
convertisseurs de fréquence ;
espacés (distance entre eux appelée « portée »). Le poids du fil
– courant alternatif monophasé 25 kV – 50 Hz (France – Nord, provoque une flèche entre deux supports, régie par l’équation de
Est, Ouest, lignes à grande vitesse, Danemark, Portugal, Grande la chaînette (latin « catena », d’où le nom de caténaire). Le panto-
Bretagne, Serbie, Croatie, Russie (en partie), Turquie, Japon, Corée graphe doit suivre la flèche périodique du fil. Si celle-ci est faible,
(60 Hz), Inde, Chine). le captage est correctement assuré à basse vitesse. C’est le cas sur
Les sous-stations sont dimensionnées pour fournir la puissance les réseaux de transport urbain, ainsi que sur les voies de circula-
maximale demandée par le plus grand nombre de trains en service tion en manœuvre ou en gare.
sur la portion considérée. L’intensité débitée provoque des chutes
de tension en ligne selon la loi d’Ohm. Pour les minimiser, la ligne Au-delà d’une certaine vitesse, 60 km/h environ, la qualité du
de contact doit avoir une section adaptée. Les rails sont utilisés captage exige une hauteur la plus constante possible du fil de
pour le « retour de courant » ; vu leur section, les chutes de contact par rapport au rail, pour éviter les défauts de prise de
tension engendrées sont faibles. Il est aisé de déduire que plus la courant au droit des supports, provoquant des arcs électriques.
tension d’alimentation est élevée, moins la chute ohmique est Cela revient à supprimer la flèche naturelle du fil de contact. Trois

3
importante. solutions sont alors envisageables :
– réduire la distance entre supports en les multipliant, de sorte
que la raideur du fil de contact rende la flèche négligeable. La solu-
1.2 Technologies de base : tion est exclue d’un double point de vue économique et esthétique ;
ligne aérienne – ligne au sol – augmenter la section du fil de contact jusqu’à ce que son
inertie rende la flèche également négligeable entre deux supports.
L’électrification des chemins de fer a débuté dès la fin du Dans certaines configurations, notamment de gabarit réduit en
XIXe siècle au profit des lignes de transport urbain, évitant ainsi les tunnel ou en tranchée, cette solution, appelée « contact rigide »,
pollutions dues aux chevaux ou à la vapeur des locomotives. Les est utilisée ;
États-Unis comptaient 10 000 kilomètres de ligne de tramways en
– introduire des supports intermédiaires, appelés « pendules »,
1900 ! La technique utilisée consiste en un fil de contact aérien
entre le fil de contact et un câble porteur fixé aux supports. La
dans l’axe de la voie sur lequel frotte un appareil porté par le véhi-
longueur des pendules est variable selon la flèche du porteur.
cule. La position élevée de la ligne d’alimentation évite tout risque
Cette association, la plus couramment utilisée, constitue la
d’électrocution du public. Lors de l’extension de ces mêmes
« suspension caténaire » représentée en figure 3.
transports urbains, des lignes souterraines furent construites,
doublant ainsi la capacité des lignes de surface. Par contre, le En théorie, une telle disposition permet, grâce à la tension
gabarit, donc l’espace disponible, de ces tunnels étant réduit, il mécanique du fil de contact et du porteur (figure 4) :
interdit l’emploi d’une alimentation électrique aérienne. Le
conducteur de courant est un « troisième rail », plus exactement – de maintenir constante la hauteur H du fil de contact par
un conducteur latéral, disposé le long de la voie. En « grandes rapport au plan de roulement, pour une pression de contact du
lignes », pour lesquelles aucune contrainte de gabarit ne pantographe donnée, quelle que soit la vitesse du véhicule ;
s’imposait, la ligne aérienne se généralisa [3]. – de compenser l’incidence des variations de température
ambiante sur la longueur du fil de contact et du porteur ;
– d’assurer une tenue suffisante dans le plan vertical, permettant
de résister à l’action du vent latéral.
2. Ligne aérienne de contact En pratique, il convient donc d’obtenir un rapport judicieux entre
l’effort de contact et sa tension mécanique. En statique comme en
Un fil conducteur placé dans l’axe de la voie, permet à un dynamique, un léger soulèvement est inévitable. Les supports de
appareil de prise de courant articulé, appelé « pantographe » placé la ligne doivent permettre une certaine liberté verticale au fil de
en toiture de l’engin de traction, de capter l’énergie pour alimenter contact pour ne pas constituer de points durs, introduisant des
ses équipements de puissance (figure 2). discontinuités et par conséquent des rebondissements du panto-
La ligne de contact assure deux fonctions essentielles : graphe lors de leur franchissement, entraînant des arcs électriques
de rupture.
– électrique : distribution de l’énergie, avec la résistance
ohmique la plus faible possible ; La flexibilité de la caténaire n’est pas constante : elle est maxi-
– mécanique : contact avec le pantographe exerçant une male en milieu de portée et engendre des variations d’effort
pression convenable quelles que soient les incidences du mouve- jusqu’à la limite critique du décollement au droit du support. Le
ment du véhicule ou du fil de contact. tableau 1 donne quelques valeurs mesurées à 160 km/h.

Figure 2 – Ligne aérienne de contact et prise de courant

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53
Référence Internet
TRP3000

ALIMENTATION EN ÉNERGIE DES TRAINS _______________________________________________________________________________________________

Câble porteur Pendules

Fil de contact
H

Support

Portée

3 Figure 3 – Suspension caténaire

Vent
latéral

Soulèvement

Dilatation

Figure 4 – Facteurs influençant le comportement dynamique de la ligne de contact

Tableau 1 – Valeurs de soulèvement de caténaire


Effort statique Effort dynamique
Type de ligne Soulèvement
de contact de contact
avec portée de 63 m (mm/daN)
(daN) (daN)

25 kV monophasé fil de contact 107 mm2 7 13 8 en milieu de portée

1 500 V continu fil de contact 150 mm2 9 24 2 au droit du support

2.2 Composants

2.2.1 Fil de contact 78o


4,53

En cuivre, obtenu par tréfilage à froid, il comprend deux rainures


pour la prise des griffes de suspension (figure 5). Sa section circu-
laire peut aller de 100 à 150 mm2 selon le type d’électrification. 7,71

2.2.2 Suspension
∅ 12,24
Le fil de contact est suspendu au câble porteur par des pendules
reliant d’une part, un cavalier sur le câble porteur, d’autre part une
« griffe » en deux parties sur le fil de contact (figure 6). Figure 5 – Section du fil de contact

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TRP 3 000 – 4 est strictement interdite. – © Editions T.I.

54
Infrastructure ferroviaire, exploitation et sécurité
(Réf. Internet 42576)

1– Exploitation, gestion opérationnelle et sécurité

2– Fret ferroviaire et logistique

3– Alimentation en énergie électrique


4
4– Voie Réf. Internet page

Voie ferrée : composants, construction et maintenance TRP3050 57

Rails de chemins de fer. Aspects métallurgiques M3070 61

Longs rails soudés. Efforts longitudinaux et interaction rail-structure TRP3064 65

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55
4

56
Référence Internet
TRP3050

Voie ferrée
Composants, construction et maintenance

par Pierre CHAPAS


Ingénieur DPE
Sénior Expert Ferroviaire

1. Fonctions de la voie ferrée .................................................................... TRP 3 050 - 2


1.1 Technologie de base – Efforts en présence ............................................... — 2

4
1.2 Géométrie du roulement – Inscription de l’essieu sur la voie.................. — 3
2. Constitution de la voie ferrée ............................................................... — 4
2.1 Plate-forme ................................................................................................... — 4
2.2 Rails et traverses .......................................................................................... — 4
2.3 Ballast............................................................................................................ — 7
2.4 Voie sur dalle................................................................................................ — 7
2.5 Pose de la voie ............................................................................................. — 8
3. Tracé de la voie ......................................................................................... — 8
3.1 Profil en long ................................................................................................ — 8
3.2 Profil en plan ................................................................................................ — 8
3.3 Dévers – Pendulation ................................................................................... — 9
3.4 Raccordement courbe – alignement........................................................... — 9
4. Appareils de voie ...................................................................................... — 10
4.1 Technologie du branchement ..................................................................... — 10
4.2 Traversée ...................................................................................................... — 11
5. Voies spéciales.......................................................................................... — 12
5.1 Voie de métro sur pneumatiques ............................................................... — 12
5.2 Voie en pays montagneux........................................................................... — 14
6. Environnement et maintenance de la voie........................................ — 14
6.1 Environnement ............................................................................................. — 14
6.2 Maintenance ................................................................................................. — 15
7. Conclusion.................................................................................................. — 16
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. TRP 3 050

’invention de la roue est datée 3 500 ans avant notre ère. Son roulement
L sur le sol, si elle est une avancée considérable de l’activité humaine,
présente néanmoins une contrainte importante du fait de sa très faible surface
de contact. Les Romains pallièrent cet inconvénient en construisant des voies
en matériaux durs et même, en aménageant des ornières pour éviter le déra-
page transversal. Deux notions fondamentales prennent ainsi corps : le
support réparti de la charge et son guidage.
Le XVIe siècle apporte une solution à cette problématique : deux roues asso-
ciées, formant un essieu, roulent sur une voie constituée par deux profils
parallèles en bois ; la charge est ainsi répartie sur le sol pour éviter l’enlise-
Parution : novembre 2012

ment. Les deux profils assurent le guidage de l’essieu. La plus ancienne


reproduction de voie date de 1550 montrant un wagonnet poussé par un
mineur dans la mine alsacienne de Leberthal.

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57
Référence Internet
TRP3050

VOIE FERRÉE _______________________________________________________________________________________________________________________

En 1738, dans les mines de Whitehaven en Grande-Bretagne, la voie se per-


fectionne, les profils de bois sont recouverts de plaques métalliques. Reynolds
introduit les premiers « rails » entièrement en fonte en 1763. En 1804, Trevi-
thick construit la première « locomotive » sur voie ferrée, appliquant la théorie
de l’énergie de la vapeur de Denis Papin (1671). L’énergie humaine et animale
est alors remplacée par celle de la vapeur et permet ainsi la traction de lourdes
charges à des vitesses bien supérieures.
Le chemin de fer devient ainsi le premier système de transport terrestre à
grande capacité. La technologie de la voie, assurant la répartition de la charge
et son guidage, autorise la constitution de véritables convois de nombreux
véhicules, attelés les uns aux autres et appelés « trains ».
Du système ferroviaire, l’infrastructure en est la composante fondamentale
au sens propre du terme, comme l’eau pour le transport maritime ou l’air pour
le transport aérien. La voie ferrée en est l’acteur principal. Elle autorise
l’accroissement permanent des capacités de transport qui passent de 100 à
3 000 tonnes ; la charge sur chaque essieu est portée à 20, voire 30 tonnes ; en
1955, la vitesse de 331 km/h sur rail est atteinte en France. Mais, elle en subit
également toutes les contraintes : relief et climat, notamment. Cette infrastruc-
ture reste cependant l’interface essentielle entre sol et matériel roulant dont

4 elle doit garantir les performances et la sécurité de circulation.


Nous analysons les fonctions principales et les fonctions de contrainte de la voie
ferrée pour décrire chacun des composants aptes à satisfaire le résultat. Sont
notées les évolutions majeures de ces dernières décennies pour justifier les résul-
tats actuelles de l’exploitation ferroviaire et l’adaptation de la voie aux autres
exploitations si différentes que sont les transports urbains ou la grande vitesse.
Notons que les développements et progrès relatifs à la voie sont au moins
aussi importants que ceux qui ont permis celui du matériel roulant. Les deux
sont d’ailleurs liés de sorte qu’un dialogue permanent est indispensable entre
les acteurs de ces deux composantes du transport ferroviaire.
Comme sur toute infrastructure, la voie subit les effets de la durée et du
passage répétitif des circulations avec, nécessairement, usures et dégrada-
tions. Il importe de donner les principes directeurs de la maintenance compte
tenu des conséquences économiques de première importance qu’elle entraîne.

1. Fonctions de la voie ferrée


1.1 Technologie de base – Efforts en
présence
Deux roues liées à un axe commun s’appellent « essieu ». La
liaison roues-axe est rigide, de sorte que la vitesse de rotation des
trois pièces est identique. Les roues ont la particularité d’être
dotées d’un épaulement appelé « boudin », permettant de boudins de roues
maintenir l’essieu dans l’axe des deux rails constituant la voie
ferrée (figure 1). rails
Les fonctions fondamentales de la voie ferrée sont :
– le support de la masse roulante et sa répartition sur le sol ;
– le guidage des roues des véhicules par les deux files de rails. Figure 1 – Essieu sur rail
Chaque véhicule étant ainsi guidé, il est possible d’en atteler de
nombreux les uns aux autres pour constituer un train.
Pour assurer ces deux fonctions, la voie transmet de l’essieu au • F < 0 si l’accélération du mouvement est négative, c’est le
sol, les efforts appliqués au point de contact roue-rail C, suivant les freinage ;
directions d’un système de trois axes orthogonaux (figure 2) : 
 – CY, la résultante V des efforts transversaux dus à la force
– CX, la résultante F de l’effort tangentiel provoquant ou centrifuge en courbe ou aux imperfections de roulement ;
s’opposant au roulement : 
• F > 0 si l’accélération du mouvement est positive, c’est la – CZ, la résultante Q des efforts verticaux du poids de la roue et
traction ; des équipements qu’elle supporte.

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58
Référence Internet
TRP3050

_______________________________________________________________________________________________________________________ VOIE FERRÉE

2e

C
Figure 3 – Inscription de l’essieu

F V

X
Y

Q α α
4
D1 D2
Figure 2 – Composantes du roulement

Les réactions de ces trois composantes du roulement sont


exercées par le rail de roulement et son support qui est la plate- R
forme sur laquelle elle repose.
Une telle composition des forces est strictement analogue à
celle du roulement routier à l’exception de la composante
suivant Y. Celle-ci en effet, dans le cas du roulement sur pneumati-
que, est prise en charge par le frottement du pneu sur la chaussée Figure 4 – Inscription en courbe
compte tenu de sa forte valeur. Dans le cas d’une roue en acier sur
rail en acier, le coefficient de frottement est très faible ; l’effort
transversal Y est pris en charge par le contact du boudin de la roue Un tel différentiel assure le guidage en alignement et en courbe
avec la face interne du rail. La différence est ainsi fondamentale mais suppose qu’aucun effort transversal ne vienne perturber
entre roulement routier et roulement ferroviaire : l’équilibre du roulement. La réalité montre que ce n’est jamais le
cas, aussi est-il nécessaire de prévoir la sûreté du guidage en
– sur route, le guidage est assuré grâce au frottement toutes circonstances notamment en courbe de faible rayon (voies
roue-chaussée, variable, et même aléatoire, en fonction des états de service ou de garage) ou mouvements transversaux parasites à
de surface ; vitesse élevée. C’est la fonction du boudin, un épaulement circu-
– sur rail, le guidage est imposé par le contact boudin rail. laire de diamètre supérieur à la table de roulement ménagé sur le
flanc intérieur des roues (figure 1).
1.2 Géométrie du roulement – Inscription L’essieu roulant sur les deux files de rails en alignement est
représenté figure 5.
de l’essieu sur la voie
Les grandeurs caractéristiques, exprimées en mètre, sont :
La voie est constituée par deux files de rails parallèles, dont la – écartement des files de rails, 2e ;
distance s’appelle l’écartement 2e (figure 3). – écartement des faces internes de roues, 2ei ;
Les deux roues de l’essieu étant liées à leur axe, leurs vitesses – épaisseur des boudins de roues, b ;
de rotation sont égales. Si les deux files de rails dessinent une – écartement des faces actives de roues, 2ea < 2e tenant compte
courbe de rayon R, mesuré à l’entraxe de l’écartement, les des tolérances sur l’écartement et évitant ainsi tout contact perma-
longueurs parcourues par chacune des roues sont différentes, nent entre boudins et champignons de rail ;
donc incompatibles avec leurs rotations identiques, pour un roule- – jeux entre faces actives de roues et champignons de rails, j1 ,
ment sans glissement. j2 .
Trois solutions évitent ce problème : En courbe, l’inscription de l’essieu est représentée par la
– rendre les roues indépendantes, non liées par un axe figure 6.
commun ; Les paramètres de la voie exprimés en mètre sont :
– insérer dans l’axe un différentiel autorisant des vitesses de – écartement de la voie, 2e ;
rotation distinctes ; – rayon de l’axe de la voie en courbe, R ;
– donner aux roues un profil conique de demi-angle ␣ – rayon de l’axe du rail extérieur, Rext.
(figure 4). Ainsi, selon la valeur du rayon R, chacune des roues 1 et
2 roule sur un diamètre D1 et D2 . Le profil en dicône de l’essieu Les paramètres de l’essieu exprimés en mètre sont :
joue le rôle d’un différentiel automatique. La plupart des véhicules – diamètre nominal des roues, D = 1 ;
ferroviaires sont équipés de ce type d’essieu. – diamètre de roulement maximal de la roue 1, D1max ;

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59
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TRP3050

VOIE FERRÉE _______________________________________________________________________________________________________________________

axe de voie

2ei
b b
j1 2ea j2
plan
2e en alignement de roulement

Figure 5 – Essieu sur les deux files de rails

4
D D1max D D2min

2ei

b b
2ea j2
2e
R
Rext

Figure 6 – Inscription de l’essieu en courbe

– diamètre de roulement minimal de la roue 2, D2max ; – la nature géotechnique du sol : granularité, dureté, altérabilité
– pente de génératrice des roues, S ; et contenu organique ;
– jeu entre boudin de roue 1 et rail extérieur à la courbe, j1 = 0 ; – les conditions hydrologiques et hydrogéologiques.
– jeu entre boudin de roue 2 et rail intérieur à la courbe, j2.
Ces critères sont étudiés par des sondages très nombreux,
Il ressort de ces deux figures que : conditionnant en partie le choix du tracé.
– l’écartement de voie est tel qu’il permet un jeu permanent
entre rail et boudin de roue, évitant ainsi l’usure ; La plate-forme nécessite, dans la plupart des cas, des aménage-
– en courbe, l’écartement des rails est plus important qu’en ments tels que remblais et déblais. Dans sa configuration défini-
alignement pour permettre le roulement de l’essieu sans glisse- tive, avant pose de la voie, elle comprend différentes couches
ment des roues. indiquées en figure 7.
En France, l’ensemble des plates-formes de voies ferrées repré-
Nota : la conicité des roues est variable selon les réseaux de chemin de fer. Les deux
valeurs les plus fréquentes sont 1/20 et 1/40 (voir § 2.2.2). sente une superficie d’environ 98 000 hectares.

2.2 Rail et traverses


2. Constitution
de la voie ferrée 2.2.1 Rail
Le rail est un profilé en acier laminé, appelé rail Vignole
Composante essentielle de l’infrastructure, la voie ferrée composé de trois parties (figure 8) :
comprend quatre éléments fondamentaux :
– le patin assure la répartition de la charge sur la traverse, il est
– la plate-forme, interface entre voie proprement dite et sol ; caractérisé par sa largeur qui conditionne la rigidité du rail dans le
– les rails et les traverses ; plan horizontal, son épaisseur et la forme du raccordement avec
– le ballast. l’âme ;
– l’âme assure l’inertie verticale du rail : son épaisseur de l’ordre
de 17 mm est conditionnée par les efforts tranchants qu’elle
2.1 Plate-forme supporte ;
– le champignon comprend trois faces actives :
La plate-forme est le terrain aménagé sur lequel repose la voie,
répondant à deux critères principaux [1] : • la table de roulement supérieure, de profil en anse de panier,

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M3070

Rails de chemins de fer


Aspects métallurgiques
par Raymond DEROCHE
Ingénieur des Mines de Nancy
Ex chef de Produit Rail à Sacilor-Unimetal

1. Divers types de rails et conditions d’utilisation


dans le monde.................................................................................. M 3 070 – 2
1.1 Description ......................................................................................... — 2
1.2 Utilisation ........................................................................................... — 2
1.3 Contraintes ......................................................................................... — 3
1.4 Structure métallurgique et caractéristiques mécaniques ................. — 5
1.5 Tenue en fatigue ................................................................................. — 6

4
1.5.1 Mécanique de la Rupture ........................................................ — 6
1.5.2 Limite d’endurance .................................................................. — 8
1.5.3 Vitesse de fissuration en fatigue ............................................. — 8
2. Procédés de fabrication................................................................. — 9
2.1 Filière liquide ...................................................................................... — 9
2.1.1 Procédés des années 1985 et antérieures ............................... — 9
2.1.2 Procédé actuel ......................................................................... — 9
2.1.3 Laminage à chaud ................................................................... — 9
2.2 Suite au laminage .............................................................................. — 11
2.2.1 Refroidissoir ............................................................................. — 11
2.2.2 Dressage des rails ................................................................... — 11
3. Rails modernes ................................................................................ — 12
4. Défectologie .................................................................................... — 12
5. Conclusion........................................................................................ — 12
Pour en savoir plus.................................................................................. Doc. M 3 070

es rails, dont le but est de porter les essieux des trains et de les guider en
L alignement comme en courbe (parfois serrée avec un rayon inférieur à
200 mètres), constituent un élément majeur de sécurité pour les personnes et
les biens transportés.
Les rails sont supportés par des traverses soit en bois créosoté sur les ancien-
nes voies, soit en béton sur les voies modernes ; les voies européennes
comptent 1 700 traverses par kilomètre (2 000 pour les voies lourdement char-
gées). Les rails reposent sur les traverses, elles-mêmes supportées par une
épaisse couche de ballast de pierres calibrées, par l’intermédiaire de semelles
en caoutchouc, fixées par des attaches en ressort d’acier élastique.
Ils sont soumis à l’usure et à des défauts de fatigue internes et de surface,
susceptibles de dégénérer en ruptures fragiles, pouvant provoquer un déraille-
ment d’autant plus grave que l’accident vient à survenir en courbe.
Il s’agit donc d’un produit extrêmement noble qui doit être réalisé dans un
acier de grande pureté et présenter une microstructure adaptée (perlitique jus-
qu’à nos jours).
Ce produit, outre les contrôles finaux de fabrication, doit être vérifié en voie
par ultrasons et visuellement, à une fréquence adaptée à la voie et à la nature
des circulations ferroviaires.
Parution : juin 2013

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M3070

RAILS DE CHEMINS DE FER ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

Le rail est fabriqué à partir d’acierie à l’oxygène ou d’aciérie électrique, en


utilisant la coulée continue et un dégazage sous vide de l’hydrogène ; il est
ensuite laminé à chaud dans sa section définitive sur laminoir dit « universel »,
qui lamine à la fois le champignon et le patin, ainsi que les deux faces de l’âme.
Le contact rail-roue en acier exige peu de coefficient de roulement et l’usure,
même bien mesurable, reste modérée. En conséquence, les changements de
rails ou de roues sont limités et la consommation d’énergie reste la plus faible
de tous les moyens de transport ; le procédé est donc d’un coût économique
intéressant, qui peut être étendu aux voies TGV à grande vitesse et aux trains
les plus lourds. L’article présente les divers types de rails et leurs conditions
d’utilisation, puis décrit les procédés de fabrication.

permettant le croisement des trains descendant en charge


1. Divers types de rails vers le port d’embarquement et des trains remontant à vide
à la mine. Les vitesses ne dépassent pas 50 à 60 km/h, mais
et conditions d’utilisation augmentent pour des raisons de productivité. La nature de

4 dans le monde ce mode de transport exige une sécurité absolue et le rail fait
donc partie des produits les plus nobles.

1.1 Description 72
70,774
Le rail est un produit laminé en acier perlitique (teneur en car-
bone comprise entre 0,5 et 0,85 %) de dureté HB (Hardness Brinell) B
variant de 200 à 440, avec ou sans addition d’éléments d’alliages et A
avec ou sans traitement thermique, présentant une structure lami- Y
née avec un grain d’indice 7 à 9, ce qui correspond à un diamètre

14,3
moyen de grain compris entre 18 et 36 mm. R8 R16
R20 0
R70

Géométriquement, il se compose, à la partie supérieure, d’une


1:20

51
bande de roulement massive appelée « champignon », de largeur
jusqu’à 75 mm avec un rayon transversal de 300 mm sur la partie R3
1:2
,7 5
majeure centrale, complétée par deux rayons symétriques de
R7

80 mm puis de 13 mm en raccord avec les parois verticales


(figure 1). Cette surface quasi horizontale supporte toutes les R35
contraintes de contact rail-roues (contraintes de Hertz) [1], ainsi R120
19,5

que celles des roues motrices (contraintes de Hertz et traction) [2]. R120 16,5

172
La partie soutenant le champignon de roulement est une âme X X
verticale d’épaisseur moyenne de 16 mm et de hauteur de l’ordre
de 100 mm, destinée à résister aux efforts verticaux de flexion. Ligne médiane du contour
32

R120 16,5
Enfin, la partie basse (patin) est en forme de trapèze très aplati
19,5

de 150 mm de large, assurant la pose et la stabilité latérale sur les R120 28,75
80,67

traverses.
76,25

R35
R7
R40

1.2 Utilisation 1:2


,75
31,5

1:14
11,5

L’utilisation des rails est très diversifiée selon les continents : R2 R4


 en Europe, les rails subissent des charges par essieu relative- Y
ment modestes, de 16 à 22 tonnes (22 tonnes pour les essieux 150
moteurs des locomotives) avec des trains de voyageurs de
3 000 tonnes en moyenne, le tout sur voie double, ce qui faci-
lite la maintenance. Les vitesses de circulation sont élevées, Surface de la section : 76,48 cm2
ce qui augmente les contraintes horizontales de contact et Poids au mètre : 60,03 kg/m
développe les contraintes de cisaillement ; Moment d'inertie par rapport à l'axe X-X : 3 021,5 cm4
Module d'inertie de la tête : 330,8 cm3
 dans les grands continents (Amérique du Nord et du Sud, Module d'inertie du patin : 374,5 cm3
Australie, Chine, Afrique du Sud, Mauritanie), ayant à trans- Moment d'inertie par rapport à l'axe Y-Y : 510,5 cm4
porter des pondéreux, charbon, minerais divers, céréales Module d'inertie par rapport à l'axe Y-Y : 68,10 cm3
etc., les charges à l’essieu atteignent régulièrement 35 à Ordre de grandeur des dimensions : A = 23,778 mm
40 tonnes pour les wagons, avec des trains de 20 000 à B = 48,913
25 000 tonnes mus par 3 ou 6 locomotives réparties dans la
longueur du convoi. La dureté des rails se situe aux alentours
de 360 à 440 HB. Il s’agit de voie unique équipée de sidings, Figure 1 – Profil d’un rail

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M 3 070 – 2 est strictement interdite. – © Editions T.I.

62
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M3070

–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– RAILS DE CHEMINS DE FER

1.3 Contraintes tmax = 48,98 kgf/mm2 vers 2,73 mm de profondeur,


S = 189 mm2,
Les contraintes auxquelles la trajectoire de roulement est sou- a = 9,1 mm,
mise sont de diverses natures : b = 6,6 mm.
& Les contraintes résiduelles de fabrication introduites lors du
dressage en galets (sous des forces de 30 à 80 tonnes) sont des & Les contraintes de flexion du rail sont fournies par les équations
contraintes de tension au centre du champignon ainsi qu’au centre de Timoshenko et Langer [5].
du patin, là où s’appliquent les galets. Elles sont de l’ordre de la Déformée verticale :
moitié de la limite d’élasticité du matériau, soit de 250 à 500 MPa
selon les nuances. Les contraintes de tension du champignon se y = ⎡⎣ β / (2k )⎤⎦ P ϕ ( βx )
transforment vite en contrainte de compression sous l’action de
laminage de surface dû au roulement ; mais les contraintes de ten- avec b = [(k/(4 EI)]1/4
sion du patin subsistent durant toute la vie active du rail. j (bx) = e-bx (cos bx + sin bx)
& Les contraintes de contact rail – roue de Hertz et de traction en
surface [1] [2] [3] [4] sont d’autant plus importantes que les rayons
de contact Ri sont plus petits ; elles varient comme la somme des et k coefficient d’élasticité de la voie (kgf/mm2)
1/Ri. Timoshenko [1] donne les formules de calcul des dimensions E module de Young du rail 22 000 kgf/mm2
de l’ellipse de contact en fonction des rayons de contact et de la
charge à la roue : I moment d’inertie du rail (mm4)
P charge/roue (kgf)
S = πab (1)
x et y (mm)

4
avec S surface de l’ellipse (mm2),
Moment de déformation :
a et b demi-longueurs des axes de l’ellipse (mm).
M = ⎡⎣P / (4β )⎤⎦ .ψ ( βx )
La pression maximale de Hertz s 0 au centre de l’ellipse est don-
née par la relation :
avec y (bx) = - e-bx(sin bx - cos bx)
3 P Effort tranchant :
σ0 = (2)
2 πab
T = − (P / 2) .θ ( βx )
avec s0 contrainte de compression (kgf/mm2), sachant
que 1 kgf/mm2 = 9,81 MPa, avec q = e -bx
cos bx
P charge à la roue (kgf). Des valeurs typiques de I, k et b pour divers types de rails sont
reportées dans les tableaux 1 et 2.
Le cisaillement maximal tmax est atteint à une profondeur variant
Les valeurs les plus couramment rencontrées de I (moment
de 0,24a à 0,47a et
d’inertie) et I/V (module d’inertie) sont présentées dans les plans
de rails figurant à la Norme européenne Rails.
τmax = 0,31σ0 . (3)
Le calcul des valeurs de déflexion, de moment et de contraintes
À noter que P0 varie selon la vitesse d’après une formule du type est donné à travers les figures 2, 3 et 4.
(variable selon l’expérience propre à chaque réseau) : La figure 5 présente les différentes unités utilisées pour l’élasti-
cité k de la voie.
Pdyn = P0 + 60∆MV 2

Pdyn (kgf), Tableau 1 – Valeurs de I et I/V


P0 (kgf),
Rail U50 UIC 60 115 RE 132 RE 136 RE
D dénivelée de surface (m),
4
V vitesse (m/s), I (cm ) 2 023 3 055 2 730 3 671 3 950
M poids des masses non suspendues (kgf). I/V (cm ) 3
248,8 335,5 294,90 368,70 391,65

Exemple 1 : au centre du rail, pour une roue de diamètre 0,8 m


chargée à 10 tonnes (train européen) : Tableau 2 – Valeurs de b (en 10-4 mm-1)
σ0 = 135 kgf /mm2
Rail U50 UIC 60 115 RE 132 RE 136 RE
tmax = 41,85 kgf/mm2 vers 2 mm de profondeur,
k = 1 kgf/mm2
S = 110,9 mm2, 8,66 7,81 8,04 7,46 7,33
Voie molle
a = 6,49 mm,
b = 5,41 mm.
k = 3 kgf/mm2
11,4 10,30 10,60 9,82 9,88
Voie courante
Exemple 2 : dans le cas d’un train lourd chargé à 20 tonnes/roue
de diamètre 1 m : k = 6 kgf/mm2
Voie neuve ou voie 13,55 12,25 12,58 11,68 11,47
σ0 = 158 kgf /mm2 lourde

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63
4

64
Référence Internet
TRP3064

Longs rails soudés


Efforts longitudinaux et interaction
rail – structure
par Chadi EL BOUSTANI
Ingénieur d’études
Setec TPI, Paris, France

1. Modèles analytiques du comportement des LRS.................................... TRP 3 064 - 3


1.1 Fonctionnement des LRS en voie courante sous chargement

4
thermique .................................................................................................... — 3
1.2 Modèle analytique pour le calcul des efforts longitudinaux ................... — 3
1.3 Principes de l’interaction entre les rails et l’ouvrage d’art ...................... — 5
1.4 Modèle analytique simple de l’IRS sous chargement thermique ........... — 5
1.4.1 Modèle analytique général................................................................ — 5
1.4.2 Pont isostatique avec un appui fixe d’un côté................................. — 6
2. Stabilité transversale des LRS................................................................... — 6
2.1 Théorie du flambement des rails............................................................... — 7
2.1.1 Modèle analytique simple ................................................................. — 7
2.1.2 Modèle analytique complet............................................................... — 8
2.1.3 Courbes de flambement thermique ................................................. — 9
2.1.4 Les différents modes de flambement............................................... — 9
2.1.5 Flambement statique et flambement dynamique ........................... — 9
2.2 Le concept de sécurité vis-à-vis du flambement ...................................... — 10
3. Paramètres intrinsèques aux problématiques des LRS et d’IRS............ — 11
3.1 Le module de réaction du sol..................................................................... — 11
3.2 La résistance de la voie .............................................................................. — 11
3.2.1 La résistance longitudinale ............................................................... — 11
3.2.2 La résistance transversale ................................................................. — 12
3.2.3 La résistance des attaches................................................................. — 12
3.3 Les caractéristiques du tracé...................................................................... — 13
3.3.1 Les caractéristiques géométriques................................................... — 13
3.3.2 Les déformées initiales...................................................................... — 13
3.4 Les caractéristiques des ouvrages d’art.................................................... — 13
3.4.1 Les caractéristiques mécaniques...................................................... — 13
Parution : mai 2018 - Dernière validation : novembre 2021

3.4.2 Les longueurs dilatables.................................................................... — 13


3.5 Les caractéristiques des rails ..................................................................... — 14
3.5.1 Les caractéristiques mécaniques...................................................... — 14
3.5.2 La température neutre ....................................................................... — 14
4. Règles générales pour l’analyse de l’IRS par des modèles
éléments finis .............................................................................................. — 14
4.1 Règles pour l’élaboration du modèle ........................................................ — 14
4.2 Types d’analyses possibles et recommandations.................................... — 15
4.2.1 Analyse simplifiée des effets séparés .............................................. — 15
4.2.2 Analyse complète des effets conjoints............................................. — 15
4.2.3 Recommandations générales ........................................................... — 15
5. Conclusion ................................................................................................... — 16
6. Glossaire ...................................................................................................... — 16
Pour en savoir plus .............................................................................................. Doc. TRP 3 064

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TRP 3 064 – 1

65
Référence Internet
TRP3064

LONGS RAILS SOUDÉS _______________________________________________________________________________________________________________

vec la mise au point, depuis les années 1960, des nouvelles techniques de
A soudage performantes sur chantier et des nouvelles attaches garantissant
un serrage efficace, l’utilisation des longs rails soudés (LRS) se généralise, tout
particulièrement dans les lignes à grande vitesse (LGV).
Les longs rails soudés sont constitués d’une multitude de rails de longueur nor-
male, conditionnés par les techniques de fabrication et de transport, soudés entre
eux sur place et formant ainsi une seule unité continue. La distinction entre longs
rails soudés et les rails en barres normales est alors très nette : la longueur des
rails normaux en France ne dépasse pas les 36 mètres tandis que celle des longs
rails soudés peut s’étendre sur plusieurs centaines de mètres, voire des
kilomètres.
Cette technique offre de nombreux avantages, notamment une amélioration de
la qualité de trajet, une usure moins marquée des rails et surtout un coût de main-
tenance extrêmement réduit du fait de l’élimination des appareils de dilatation des
rails qui comptent parmi les plus onéreux. Les longs rails soudés ont également
permis l’augmentation de la vitesse des trains qui ne dépassait pas les 160 km/h
pour les circulations voyageurs au début des années 1960. Les longs rails soudés
permettent également de réduire les discontinuités dans la voie et par conséquent
d’éliminer les chocs au passages des roues. Cela améliore la tenue des organes de

4 roulement du train d’une part et réduit l’inconfort ressenti par les passagers
d’autre part. Les longs rails soudés assurent également une meilleure tenue vis-à-
vis des vibrations et surtout une réduction du bruit au passage du train.
La stabilité de tels systèmes s’étendant sur des longueurs très importantes
constitue le cœur même de leur étude. La résistance au flambement suite aux dila-
tations thermiques et efforts longitudinaux constitue le point principal de l’étude
des longs rails soudés. Une déformation latérale non contrôlée pourrait être la
cause de déraillements catastrophiques comme par exemple l’accident de Velars-
sur-Ouche survenu le 23 juillet 1962. Le train roulait à près de 140 km/h sous une
chaleur torride ce qui aurait provoqué la déformation des rails et par conséquence
le déraillement de cinq voitures dont une finira par s’écraser à cinquante mètres
plus bas, au fond de la combe de Fain. Les effets thermiques dans les longs rails
soudés sont tellement contrariants qu’on parle parfois de flambement thermique
des rails. Les déformations survenues lors de la canicule de 2003 (36 au total)
furent tellement importantes que la SNCF a revu ses marges de sécurité et a
désormais introduit une « marge de sécurité liée à la canicule 2003 ».
La présence d’un ouvrage d’art n’est certainement pas sans impact sur le com-
portement des longs rails soudés. Comme le note bien le paragraphe 6.5.4 de la
norme EN 1992-2/NA décrivant la réponse combinée du système voie-ouvrage aux
actions variables : « Lorsque les rails sont continus au droit de discontinuités de
l’appui de la voie (transition pont-remblai, etc.) la structure du pont et la voie
résistent conjointement aux actions longitudinales dues à l’accélération et au
freinage. Les actions longitudinales sont transmises en partie par les rails au
remblai derrière la culée et en partie à l’ouvrage et donc aux appareils d’appui
et aux appuis jusqu’aux fondations. » C’est ainsi que l’interaction rail-structure
(IRS) constitue un élément essentiel lors de l’étude des tracés ferroviaires.
Les normes EN 1991-2, UIC 774-3R et UIC 720 sont les normes de référence
pour tous ces sujets, et spécifiquement la norme UIC 774-3R qui, elle, est des-
tinée à l’étude de l’interaction rail-structure et liste les recommandations que
devront suivre les ingénieurs afin de trancher vis-à-vis de la sécurité des longs
rails soudés. Cependant, tous ces textes affirment la nécessité de telles études
et énoncent les grandes lignes sans pour autant clairement expliquer les
enjeux et les détails. Les modèles d’études deviennent rapidement très com-
plexes et les paramètres entrant en jeu se démultiplient. Cet article vise à
dresser un panorama général des théories, des pratiques et des méthodes de
résolutions des problèmes liés aux longs rails soudés et l’interaction rail-struc-
ture. Nous essayerons d’éclaircir certains points majeurs stipulés par les
normes précitées notamment liés aux modèles de calcul par éléments finis de
l’interaction rail-structure et de fournir un état de l’art des méthodes et des
théories existantes traitant de ces problématiques.

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TRP 3 064 – 2

66
Référence Internet
TRP3064

_______________________________________________________________________________________________________________ LONGS RAILS SOUDÉS

1. Modèles analytiques 1.2 Modèle analytique pour le calcul


des efforts longitudinaux
du comportement des LRS
On considère le modèle de base simplifié suivant : un tronçon
de LRS de longueur dx fixé à une température de référence Tini-
Pour aborder une étude des systèmes de longs rails soudés
(LRS) et la problématique de l’interaction rail-structure (IRS), il tiale, de section Ar, de module de Young Er et de coefficient de
dilatation thermique αr (figure 2). On désigne par Nr(x) l’effort nor-
convient en premier lieu de revenir aux questions classiques de
mal à l’abscisse x dans le rail pris positif en traction et par ur(x) le
mécanique de la voie afin de pouvoir appréhender en second lieu
déplacement longitudinal du rail.
les modèles d’interaction sous chargement thermique ou tout
autre chargement. La connexion entre le rail et son assise, que ce soit par l’inter-
médiaire du ballast ou par pose directe, est modélisée par un
Il est entendu par « voie courante » le système formé par les effort de cisaillement qui s’oppose au déplacement du rail
rails, les traverses et les attaches, fixé par pose directe ou par ur(x). Le comportement de cette connexion sera explicité ultérieu-
l’intermédiaire du ballast, n’ayant aucune zone singulière comme rement dans l’article puisqu’elle constitue un point majeur de la
un appareil de voie, un changement de section des rail, un chan- modélisation. Mais dans un premier temps, des hypothèses sim-
gement du travelage, un ouvrage d’art ou un tunnel, etc. C’est la plificatrices seront retenues pour expliciter les problématiques en
partie du chemin de fer la plus commune. question.
Le rail est sujet à une variation de température de Tinitiale à Tac-
tuelle.On note ΔTr = Tactuelle – Tinitiale.
En effet, le mode de pose influera largement sur les résis- L’équilibre du tronçon de rail donne :

4
tances de la voie et entrera en jeu à partir de sa loi de compor-
tement. Il sera alors judicieux, dans une ligne à grande vitesse
avec divers modes de fixations, de distinguer une « voie cou- (1)
rante à pose ballastée » et une « voie courante à pose directe »,
en comparaison avec une voie sur ouvrage d’art ou voie avec
aiguillage par exemple. En considérant que la réponse du rail est élastique, le déplace-
ment axial s’exprime à l’aide la loi de Hooke par :

(2)
1.1 Fonctionnement des LRS en voie
courante sous chargement thermique L’équation (1) donne alors l’équation différentielle qui régit les
déplacements longitudinaux du rail :
Dans un LRS en voie courante, toutes les sections ne se com-
portent pas de la même manière sous chargement thermique. On
(3)
observe l’existence de trois zones distinctes comme le montre la
figure 1 :
La résolution de l’équation différentielle (3) donne le déplacement
– une zone dite « neutre » où les déplacements dus à la dilata-
longitudinal en tout point du rail. L’effort normal peut alors être
tion thermique sont complètement contrariés du fait de la résis-
déduit de l’expression suivante :
tance de la connexion entre la voie et son assise. Les contraintes y
sont donc maximales aux températures extrêmes ;
– deux zones dites « de respiration », de part et d’autre de la (4)
zone neutre centrale, où la dilatation est partiellement contrariée.
Ils se produit alors des déplacements qui atteignent leurs maxi- Dans le cas des longs rails soudés, la longueur du rail est telle-
mum aux extrémités des barres alors que la contrainte thermique ment importante qu’un état de déformation plane peut être consi-
dans les rails sera minimale voire nulle. déré dans sa partie centrale, bloquant ainsi tout déplacement

Effort normal
dans les rails

Effort normal |Nmax| = ErArαrΔTr

Zone Zone
de respiration de respiration
~150 m Zone neutre Zone neutre ~150 m

Figure 1 – Principe de fonctionnement d’un long rail soudé (LRS) sous effets thermiques

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TRP 3 064 – 3

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Référence Internet
TRP3064

LONGS RAILS SOUDÉS _______________________________________________________________________________________________________________

ur ur + dur
N,u
αrΔTr

Nr Rail Nr + dNr
Effort normal
|Nmax| = ErArαrΔTr Déplacement axial
umax = 0,5 αrΔTr la
τdx

x dx

Figure 2 – Élément de rail de longueur dx Zone


Zone neutre de respiration la

Tableau 1 – Estimation des longueurs des zones Figure 3 – Distribution de l’effort normal et du déplacement longitu-
de respirations dinal dans le rail dans le cas d’un comportement plastique de la
connexion
Voie déconsolidée Voie consolidée
Type de rail
τ0 = 2,5 kN/m τ0 = 6,0 kN/m

4 46 kg U 33 la = 240 m la = 100 m
En remplaçant dans l’équation différentielle (3) on obtient :

(11)
50 kg U 50 la = 260 m la = 108 m
Les conditions aux limites à satisfaire sont les suivantes :
60 kg UIC 60 la = 310 m la = 130 m
– en x = 0, N = 0 ;
– en x → ∞, u = 0.
La résolution de l’équation (11) donne les expressions suivantes
longitudinal. L’effort normal dû à la variation de la température
pour les déplacements et l’effort normal :
sera alors :
(12)
(5)

■ Cas 1 : résistance de cisaillement plastique (13)


Afin de bien expliciter les concepts évoqués dans le para-
avec .
graphe 1.1, on considère le cas où la résistance de cisaillement est
constante et ne dépend que du signe du déplacement :
Dans ce cas, aucune distinction entre zone neutre et zone de
(6) respiration n’est possible (figure 4). Mais pratiquement, dans la
zone centrale, du fait de la présence de l’exponentielle, les
En résolvant l’équation (3) dans la zone de respiration (x > 0 dans variations sont tellement minimes qu’on peut considérer les
le cas de la figure 3) on obtient les expressions suivantes pour le efforts et les déplacements comme constants.
déplacement longitudinal et l’effort normal :

(7)

N,u Effort normal |Nmax| = ErArαrΔTr


(8)

La longueur de la zone de respiration où l’effort normal Déplacement axial


s’annule est alors : |umax| = αrΔTr/μ
x

(9)

Pseudo-zone
■ Cas 2 : résistance de cisaillement élastique de respiration Pseudo-zone neutre

Dans le cas d’un comportement parfaitement élastique de la


connexion, la résistance de cisaillement s’exprime par la relation
linéaire suivante : Figure 4 – Distribution de l’effort normal et du déplacement longitu-
dinal dans le rail dans le cas d’un comportement élastique de la
(10) connexion

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TRP 3 064 – 4

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