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Professeur agrégé
Comprendre
L'œuvre
de
Bernard B. Dadié
L e s c l a s s i q u e s africains
184, avenue de Verdun
92130 Issy les Moulineaux
N° 860
DANS LA MÊME COLLECTION
N.V.
1
La genèse de l'œuvre
L ' E N F A N C E I V O I R I E N N E (1916-1934)
L e fils de l ' A s s i n i e
Chemin d'Europe
Gabriel Dadié n'a pas renoncé à partir pour le front, mais,
malgré son insistante demande, il n'est incorporé qu'en mars 1921.
Il part avec le régiment de Dakar pour la France en avril et effec-
tue son service au 8e régiment de sapeurs télégraphistes du Génie
de Tours, le terminant avec le grade de sergent le 1 octobre 1922.
Dakar, puis la France vont ouvrir son horizon, le cercle de ses
contacts et de ses amitiés. Ainsi rencontre-t-il à Paris diverses per-
sonnalités noires, en particulier l'Antillais Maurice Satineau, fon-
dateur, en 1928, de la Dépêche africaine, « grand organe indépen-
dant de correspondance entre les Noirs ».
Le militant de la dignité
A son retour en Côte-d'Ivoire, « Africain français, mais Afri-
cain avant tout », comme l'écrit son fils Bernard, Gabriel Dadié
emploie sa qualité de citoyen français à tenter de « changer le
contenu colonial », selon son expression favorite que rapporte
Joseph A n o m a lequel fut quelque peu son disciple, son compa-
gnon et son parent. Très ouvert, sans complexe et sans racisme de
retour à opposer au racisme blanc, on le voit sur le bateau qui le
ramène au pays faire connaissance avec un Lagarosse — futur
sénateur et adversaire acharné — qui vient pour la première fois en
Côte-d'Ivoire, et lui donner des conseils afin de l'aider à s'ins-
taller.
Commis de première classe du cadre secondaire de l'Afrique
occidentale à la solde de 6 000 francs, il reprend son poste de rece-
veur des Postes en 1923 à Bassam, à Bouaké, puis à Dimbokro.
Là, il retrouve Georges Kassi et aussi Joseph Anoma alors institu-
teur, lequel rapporte que le soir, chez Dadié, se tenaient des réu-
nions politiques.
Mais en 1924, il démissionne de l'administration quand, ayant
prétendu aux mêmes avantages que les postiers citoyens français
blancs, ces droits lui sont refusés. Combattre avec acharnement les
injustices, lutter pour la reconnaissance de la dignité de l'homme
noir et de l'égalité des droits avec le Blanc sont des principes sur
lesquels il ne transige pas. Ses démêlés avec les colons et l'adminis-
tration coloniale en font foi. « Lui qui était citoyen français depuis
toujours, pratiquement, j'allais dire, il bâtira toute sa réussite sur
le seul critère de son identification nègre », a souligné fort juste-
ment Doudou G u e y e
Le planteur et le notable
De 1924 à 1925, on le retrouve donc, en pleine période du
« boom » forestier (1920-1930), surveillant de chantier avec Laga-
rosse, puis exploitant forestier à Rubino, d'abord au service, puis
aux côtés de Français anciens collègues des Postes, les frères Clâa.
En 1925-1926, il est à Agboville où il met sur pied, parallèlement à
l'exploitation forestière, une entreprise de petit transport. En 1925,
il projette de contracter une alliance — son union avec Enuayé
Ouessan s'étant défaite — avec une petite-nièce de Yamoussò,
grand-tante de Félix Houphouet-Boigny. Entre 1928 et 1932, il
étend ses activités de planteur. Il est électeur à la Chambre de
commerce et au Conseil supérieur des colonies dès 1927-1928, et le
Journal officiel de la Côte-d'Ivoire le mentionne en 1939 comme
électeur à la Chambre d'agriculture.
Du début de la vie aux dernières années, Gabriel Dadié est
bien un des « notables » de la Côte-d'Ivoire, au même titre que
beaucoup de ces colons blancs qu'il aidera parfois dans leurs
débuts difficiles. En fait, le prestige dont il jouit auprès des Ivoi-
riens comme des Français est évident. Sévère, rigoureux, très actif
et travailleur, il est en même temps un homme de contact.
A l'arrivée de Binger, qui effectue, en 1927, un dernier voyage
en Côte-d'Ivoire, il est délégué par ses pairs africains-français pour
prononcer le discours de bienvenue. Surtout, il est le conseiller de
deux des principaux chefs d'alors : Obodji Soboa, nommé chef
supérieur des Abbey par les Français, puis, à partir de 1927, Boa
Kouassi, roi et chef supérieur de l'Indénié, qui passe pour l'homme
le plus riche du pays. Il accompagne ce dernier à Dakar, au
Conseil du Gouvernement général de l'A.O.F., comme secrétaire-
conseiller, ainsi qu'à Paris pour l'Exposition coloniale de Vincen-
nes en 1931. Mais il s'éloignera de ces hommes quand il jugera que
leur action ne sera plus conforme aux principes qu'il défend.
En même temps, par son action et ses conseils, Dadié suscite
et encourage le développement de la classe toute nouvelle des plan-
teurs africains qui ont pour noms Georges Kassi, Joseph Anoma,
Fulgence Brou et, bien entendu, Félix Houphouet qu'il connaît dès
avant son départ pour la France, auquel le lie ensuite une alliance
familiale et qu'il connaîtra mieux à Abengourou, puisque Hou-
phouet est le neveu par alliance de Boa Kouassi. Il apprécie d'ail-
leurs tout à fait la lettre ouverte au titre retentissant : « On nous a
trop volés » qu'Houphouet publie, le 22 décembre 1932, dans le
Trait d'union de Zimmermann contre la politique de l'administra-
tion coloniale française. Il l'aide, à Abengourou, à organiser la
résistance des paysans africains contre l'exploitation dont ils sont
l'objet8.
L'animateur et l'organisateur
Surtout, après la crise du cacao et du café de 1942, il inspire et
anime de façon déterminante la formation, le 10 juillet 1944, à
« l'Étoile du Sud » à Treichville, du Syndicat agricole africain qui
porte à sa tête le médecin et planteur Félix Houphouet. C'est la
première organisation qui, avant la Conférence de Brazzaville,
avant la Constituante de 1945, préconise la liberté du travail et le
métayage librement consenti. Et c'est ce syndicat qui, avec la
Société coopérative des planteurs africains (P.A.C.), annoncée au
Journal officiel du 15 avril 1945, et l'appui des Comités d'études
franco-africaines (C.E.F.A.), créés à Dakar au début de 1945 et
vite implantés dans toute l'A.O.F., va constituer la première arma-
ture du front électoral qui portera le candidat Houphouet à la
députation le 18 novembre 1945. On oublie en effet trop souvent
que, lors des élections à la Constituante, les communistes appellent
à voter contre Houphouet, accusant ce candidat et les forces qui le
soutiennent de séparatisme. Ce sont donc bien les forces ivoirien-
nes, regroupées et galvanisées par des organisations autochtones,
au sein desquelles Gabriel Dadié joue un rôle décisif, qui condui-
sent à la victoire du candidat H o u p h o u e t
Il est intéressant de voir comment l'action de Gabriel Dadié a
été appréciée, notamment par Ouezzin Coulibaly, un des chefs
prestigieux du P . D . C . I . - R . D . A . En avril 1956, lors du baptême
de l'avenue 8 à Treichville, devenue à cette date avenue Gabriel-
Dadié — cérémonie présidée par le ministre délégué à la présidence
du Conseil, Houphouet-Boigny 11 —, après avoir rappelé à grands
traits la carrière administrative de Dadié, Ouezzin continua :
« C'était l'ère des grandes entreprises agricoles et forestières. Dadié
devint exploitant forestier et, deux ans après, planteur de café. Son
exemple fut suivi et, quelques années après, nous avions de gros plan-
teurs africains tels les Georges Kassi, Félix Houphouet-Boigny,
Joseph Anoma, Fulgence Brou, Marcel Laubhouet, etc. Mais en
même temps aussi va commencer, pour Dadié et ses compagnons, la
lutte pour l'affirmation de leur personnalité et de leurs droits. Un
groupe d'hommes dont il était en t ê t e prenait conscience de leur
valeur. Et, devant les horreurs du travail forcé et l'injustice de la
réglementation officielle de la main-d'œuvre, se constituait le puis-
sant Syndicat des planteurs africains. Parlant presque toutes les lan-
gues de Côte-d'Ivoire, Gabriel Dadié fut l'animateur infatigable de
cet organisme qui posait, pour la première fois dans le pays, des
revendications collectives d'une haute portée sociale. A la naissance
du R.D.A., le Syndicat des planteurs africains forma la première
armature et Dadié devint aussitôt l'homme politique avisé, le doyen
des dirigeants du mouvement. Militant convaincu et conscient de la
justesse de ses idées, il prit part aux campagnes électorales épiques de
1945 et 1946, défendit avec acharnement les principes d'émancipation
de la Constitution. Atteint par un mal retors, il resta, durant les qua-
tre années de souffrance, l'homme des sages solutions et le conseiller
à la technique éprouvée. Il mourut les mains jointes, comme s'il nous
recommandait d'unir toujours. »
Au long de son itinéraire, ce qui guida Gabriel Dadié, ce
furent les principes dégagés ci-dessus et un pragmatisme évident.
Pour « changer le contenu colonial », il lui fallait pouvoir s'expri-
mer, et, pour cela, il dut franchir des degrés : obtenir la citoyen-
neté sans laquelle il y avait peu de chances, avant 1945, d'être
entendu et posséder des moyens financiers. Il est évident que l'enri-
chissement, pour un Gabriel Dadié, n'était pas une fin en soi et
qu'il ne s'agissait point pour lui que la classe des planteurs afri-
cains se constituât au détriment des autres couches de la popula-
tion, qu'elle représentât l'embryon d'une bourgeoisie noire aussi
avide de pouvoir et âpre au profit que la bourgeoisie coloniale
d'alors. Il s'agissait de faire pièce aux colons en luttant sur le ter-
rain où ils seraient les plus vulnérables, avec les moyens disponi-
bles. Par la suite, il n'hésitera pas, personnellement, à s'appauvrir
considérablement en mettant tout son bien à la disposition du
R.D.A. D'autre part, il ne se lia jamais au service d'un leader en
puissance sinon dans l'espoir que l'action de cet homme serait
bénéfique pour la Côte-d'Ivoire ; s'il s'avérait qu'il s'était trompé,
que l'action du chef ne correspondait pas à ce qu'il en attendait, il
s'éloignait : il en fut ainsi pour Obodji Soboa, en 1927. Mais il sut
aussi faire taire ses ressentiments personnels, tout justifiés qu'ils
fussent, afin que triomphât la grande cause de l'émancipation afri-
caine au service de laquelle il s'était depuis si longtemps mis. Dans
la bataille politique qui suivit la Libération, même si ce fut avec la
discrétion qui sied à celui qui veut avant tout préserver l'unité d'un
mouvement, il ne manqua pas de prendre ses distances avec les col-
lègues planteurs et autres dont l'action lui semblait dictée plus par
des motifs égoïstes que par le souci de l'intérêt réel du peuple :
« J'entends vos tam-tams parleurs, mais je ne viendrai pas »,
répondait-il à certains qui sollicitaient l'appui de sa présence.
Beaucoup d'idées, comme le soulignaient Joseph Anoma et
Doudou Gueye, mais aussi beaucoup de livres et beaucoup de jour-
naux, comme le rappelle souvent son fils, circulaient dans sa mai-
son. Ainsi, les ouvrages de Marcus Garvey, mais aussi des jour-
naux : la Dépêche africaine de Satineau déjà citée (1928), la revue
Africa de Tiemoko Garan Kouyaté (1935), surtout les journaux
sénégalais : l'A.O.F. de Carpot (1922) et de Lamine Gueye (1924),
opposé à Blaise Diagne, le Périscope africain du Père Martin
(1929), le Sénégal, pro-dioufiste (1934), passaient sous les yeux du
jeune garçon. Dans Commandant Taureault, sous le pseudonyme
transparent de Gada (Gabriel Dadié), vieux militant de
l'A.P.I.D.A. (Association pour l'indépendance des autochtones),
Bernard Dadié le fait s'exprimer sur la période de l'entre-deux-
guerres :
« Nous entendions de temps à autre parler d'un Senghor commu-
niste, d'un Marc Codjo Tovalou, de nègres qui s'unissaient à Paris
pour défendre les intérêts de l'Afrique, de l'existence de journaux
interdits tels que le Nègre enchaîné, le Travailleur nègre et les
Continents. Un rideau d'airain voulait nous séparer du monde
entier. Un autre journal fut fondé par des nègres : la Dépêche afri-
caine. Les quelques numéros qui purent franchir les lignes douanières
parce qu'ils étaient adressés à des hommes considérables, à des
citoyens français, nous montrèrent les photos des nègres avocats,
écrivains, professeurs, artistes, poètes, industriels. Nous n'avions pas
besoin de les connaître ; les regarder était la preuve que nous pou-
vions n o u s réaliser nous a u s s i »
O n parlait aussi, se souvient Bernard Dadié, de Lamine Sen-
ghor, des droits de l'homme, de la guerre d'Ethiopie. Terre d'ébène,
le livre-reportage accablant d'Albert Londres sur la colonisation
(1928), y était lu et commenté, ainsi que la presse de Gold Coast
qui circulait souvent sous le manteau (son entrée était réglemen-
tée), mais était d'un accès relativement aisé pour le milieu lettré
nzima-agni dont les p o p u l a t i o n s sont à cheval sur la frontière.
Les correspondances et les amitiés de cet h o m m e de contact
étaient internationales, interraciales, nombreuses, et de qualité.
Mais c'est évidemment en Côte-d'Ivoire m ê m e qu'elles furent pré-
cieuses pour la cause qu'il défendait et que défendait le Syndicat
des planteurs africains avec, à sa tête, Houphouet. C'est en partie
grâce à Dadié, grâce à l'amitié qui le liait au M o r o N a b a des
Mossé ou au prince des Sénoufo, G b o n Coulibaly, qu'Houphouet
put recruter plus de mille cinq cents K o r h o g o et plus de trois mille
cinq cents Mossé c o m m e m a n œ u v r e s libres et faire ainsi pièce aux
planteurs blancs. C'est lui qui ira présenter, dans la région
d'Aboisso, en 1945, le candidat à la députation Houphouet. O n
sait moins qu'avant la guerre de 1940 il avait beaucoup recom-
m a n d é et favorisé l'envoi d'écoliers en France, car il ne croyait
point à cette école coloniale qui, à ses yeux, ne formait pas les
vrais cadres d o n t la C ô t e - d ' I v o i r e a u r a i t b e s o i n p o u r c h a n g e r l'état
des choses. Aussi ne put-il qu'être pleinement d'accord avec
l'action du député Houphouet-Boigny quand ce d e r n i e r e n v o y a les
boursiers de 1946 en France. Trois de ses e n f a n t s partirent ainsi.
L'appel au fils
« C l i m b i é é t a i t s e u l . E n v o y a n t l e s m a m a n s d e s e s c a m a r a d e s , il p e n -
sait à la sienne q u ' i l connaissait à peine, d o n t a u c u n trait accusé ne
lui p e r m e t t a i t d e d i r e : " M a mère est d e telle taille, d e telle c o r p u -
lence. Elle est b o r g n e . Mais de quel œil ? " Il n e l e s a v a i t p a s . E t le
plus terrible, c'est q u ' e l l e ne v o u l a i t p a s q u e C l i m b i é vînt la voir, de
p e u r q u e lui aussi n e m e u r e d u m a l m y s t é r i e u x q u i a v a i t e m p o r t é b r u -
t a l e m e n t t r o i s d e ses e n f a n t s à l ' â g e d e q u a t r e a n s . Ils se c o u c h a i e n t le
s o i r e t le m a t i n n e se r é v e i l l a i e n t p l u s . D a n s l a f a m i l l e , o n a c c u s a i t l a
g r a n d - m è r e d e les d o n n e r a u x festins n o c t u r n e s d e s sorciers. C l i m b i é
a v a i t p o u r t a n t f r a n c h i le c a p t r a g i q u e s a n s d i f f i c u l t é . M a i s la m a m a n
n'était p a s r a s s u r é e et c'est p o u r q u o i , a p r è s a v o i r é l o i g n é s o n fils d u
v i l l a g e , elle n e v o u l a i t à a u c u n p r i x q u ' i l y r e m î t les p i e d s »
Le « g r o u p é e n » de Bingerville
Le théâtre
C'est à Bingerville, au cours de l'année 1931, que se produisit,
semble-t-il, la mutation décisive qui marquera la naissance du théâ-
tre africain francophone ou, selon une heureuse expression qui fait
justement référence au théâtre africain traditionnel, du théâtre
« néo-africain ».
Outre les témoignages d'Amon d'Aby et Charles Béart, nous
avons à ce sujet le récit de Bernard Dadié lui-même dans Climbié :
« Un jour, le tailleur qui livrait les uniformes remplaça les boutons
de corozo par des boutons de métal doré. Cela faisait garde-cercle.
L'occasion parut bonne pour s'amuser. Aka Bilé, un élève de pre-
mière année, prit un bâton, mit sa ceinture par-dessus la veste, passa
le bâton dans la ceinture et devint brigadier de garde suivi de deux
acolytes. Ils accompagnaient le Blanc dans les recensements. Le direc-
teur, que les rires avaient attiré, intéressé par le jeu des acteurs, fit
débrousser derrière le réfectoire une grande place carrée entourée de
massifs de fleurs. Et là, les élèves pouvaient à loisir discuter, bavar-
der. Pour encourager les manifestations folkloriques, chaque samedi
soir fut consacré au t h é â t r e . . . »
Le théâtre d'ailleurs ne se limita pas à l'école, comme le rap-
porte Béart lui-même : « Quand vint le gouverneur Reste dont
l'activité était extrême, il vit l'intérêt que pouvait présenter le théâ-
tre franco-africain pour les grandes manifestations spectaculaires
qu'il aimait organiser. Le théâtre sortit de l'école. Il y eut des
représentations publiques avec des centaines de s p e c t a t e u r s » En
fait, c'est pratiquement en concomitance avec l'école William-
Ponty, qui fait jouer alors l'Entrevue de Behanzin et de Bayol (le
11 juin 1933) de Martins Gutenberg, que sont représentés à Binger-
ville le Mariage, le Marchand de bangui, etc., créations collectives
qui tenaient beaucoup de la commedia dell'arte, selon l'expression
de madame B é a r t
En réalité, le début de la carrière de dramaturge de Dadié peut
être daté de la présentation à Abidjan de la pièce les Villes en avril
1934 :
« Ma troisième chance a été la Fête des enfants avec le gouverneur
Reste à l'occasion de laquelle j'ai écrit les Villes, ma première pièce
de théâtre, dialogue entre Assinie, Grand-Bassam, Bingerville, Abid-
jan, Bouaké28. »
Le choix de la carrière
Lors de la Fête de l'enfance, Bernard Dadié fut encore une
fois le témoin indigné des effets de la situation coloniale : les
gardes-cercles arrêtèrent et giflèrent le maître africain qui les
accompagnait parce qu'il n'était pas en uniforme. Sur-le-champ, il
décida, lui qui avait désiré être instituteur, de choisir la filière
administrative à l'école William-Ponty et de ne jamais servir
comme fonctionnaire dans cette colonie de Côte-d'Ivoire où l'on
pouvait impunément gifler un instituteur.
L a v i e f a m i l i a l e e t l e s l i e n s a v e c le t e r r o i r
Les oncles
L'influence du père
Comment ne pas reconnaître l'image et l'influence du père sur
l'écrivain en herbe dans l'oncle Assouan Koffi qui, appelant Clim-
bié auprès de lui, découvre à l'enfant les injustices de ce m o n d e et
les hommes qui les combattent :
« Tu comprendras plus tard, mon enfant. Pour le moment, tu n'as
qu'un seul devoir : étudier. Tes études t'apprendront à secourir tout
homme qui souffre, parce qu'il est ton frère. Ne regarde jamais sa
couleur, elle ne compte pas. Mais, en revanche, ne laisse jamais piéti-
ner tes droits d'homme, car, même dans le plus dur esclavage, ces
droits-là sont attachés à ta nature m ê m e »
L a fidélité à l'histoire ?
ATLAS ET A N A N Z È
Ananzè ou l'ironie