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Ebh ++
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PLAN DU COURS
INTRODUCTION
EPIDEMIOLOGIE
CLASSIFICATION
-Épidermolyses bulleuses simples (ou épidermolytiques)
-Épidermolyses bulleuses jonctionnelles
-Épidermolyses bulleuses dystrophiques ou dermolytiques
COMPLICATIONS
DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
STRATEGIE DIAGNOSTIC
TRAITEMENT
PERSPECTIVES
CONSEIL GENETIQUE
CONCLUSION
INTRODUCTION
Les épidermolyses bulleuses héréditaires (EBH) sont des génodermatoses rares caractérisées
cliniquement par une fragilité épithéliale conduisant à la formation de bulles et d'érosions
cutanées (et parfois muqueuses) par clivage entre l'épiderme et le derme ;
Ces lésions sont le plus souvent secondaires à un traumatisme (frottement, choc, adhésif, etc.)
mais parfois spontanées ;
Elles sont classées en quatre groupes, trois en fonction du niveau de décollement dans la peau
auxquels a récemment été ajoutée une quatrième forme ;
Leur gravité est très variable, allant d'une gêne mineure à des formes rapidement
incompatibles avec la vie en passant par des affections responsables de handicaps très graves
par les complications infectieuses, nutritionnelles, cicatricielles et fonctionnelles voire viscérales
qu'elles entraînent
EPIDEMIOLOGIE
La prévalence des EBH est mal connue
Elle est estimée entre 1 cas /50 000 et 1 cas /20 000, avec probablement des différences selon
les zones géographiques
Plus 50% des EBH sont des (EB Simples). Parmi ces formes simples, les formes localisées sont
les plus nombreuses (environ deux EBS sur trois).
Les formes jonctionnelles (EB Jonctionnelles) sont plus rares, représentant près de 5 % des
EBH (dont 80 % des malades sont atteints de la forme la moins sévère, dite « généralisée
intermédiaire »).
Enfin les (EB Dystrophiques) représentent près de 20 % des EBH, avec à peu près autant de
formes dominantes que de formes récessives
Les EBH touchent indifféremment les filles et les garçons, quelle que soit leur origine
géographique.
CLASSIFICATION
Les dernières ont permis de distinguer trois groupes selon le niveau de clivage dans la peau
– les EB épidermolytiques ou simples (EBS) sont caractérisées par un clivage intra
épidermique ;
– les EB jonctionnelles (EBJ) ont un clivage situé à la jonction dermo-épidermique au sein
de la membrane basale ;
– les EB dermolytiques ou dystrophiques (EBD) ont un clivage situé sous la membrane
basale épidermique ;
– le syndrome de Kindler avec un clivage mixte au sein et au-dessus de la membrane
basale.
B-Formes supra-basales :
a-L'acral peeling skin syndrome a été récemment rattaché aux EBS supra basales.
A transmission autosomique récessive ;
Se caractérise par des érosions palmoplantaires superficielles indolores ou une desquamation
des extrémités débutant dans la petite enfance et s'aggravant en période chaude ;
Il n'y a pas d'atteinte associée ;
Les bulles, superficielles, ne sont quasiment jamais vues ;
Dans les formes supra basales, plusieurs gènes codant pour des protéines impliquées dans les
jonctions inter-kératinocytaires (desmosomes et/ou jonctions adhérentes) ont été impliqués.
L'acral peeling skin syndrome est dû à des mutations du gène codant pour la
transglutaminase 5, une enzyme intervenant dans la formation et l'assemblage de la couche
cornée.
Épidermolyses bulleuses jonctionnelles
Les EBJ sont caractérisées par :
Un niveau de clivage survenant au sein de la lamina lucida de la jonction dermo-épidermique.
Les formes jonctionnelles se divisent en formes localisées et généralisées sévères (ex-EBJ Herlitz)
ou intermédiaires (ex-non Herlitz).
Très rares, elles sont à transmission autosomique récessive.
Elles se caractérisent par des bulles tendues, parfois hémorragiques et un retard de cicatrisation.
L'atteinte muqueuse est fréquente, parfois très étendue et sévère.
Les ongles sont dystrophiques et il existe très fréquemment une fragilité dentaire due à une
dysplasie de l'émail.
Aspects cliniques :
A-Forme généralisée :
a-L'EBJ généralisée sévère (EBJ-gen sev) (ex-Herlitz)
C’est la forme la plus grave car habituellement létale en quelques semaines ou mois.
Les premières lésions, constatées dès la naissance sous forme de bulles et d'érosions
prédominent sur le tronc, les jambes, le cuir chevelu et le siège.
L'atteinte unguéale, parfois congénitale est évocatrice avec des ongles décollés dans leur partie
distale et des érosions péri-unguéales chroniques.
La cicatrisation est très lente avec apparition d'un tissu de granulation bourgeonnant parfois
sans épidermisation.
Extension progressive des lésions cutanées + Persistance de plaies étendues = dénutrition,
d'anémie et de surinfections.
Il y a en général des lésions muqueuses, en particulier buccales et œsophagiennes, gênant
l'alimentation, et des manifestations ORL (avec risque d'asphyxie par bulle laryngée),
respiratoires, digestives, urinaires et oculaires
Enfin il existe Les EBJ localisées (EBJ loc) avec plusieurs sous-types :
EBJ localisée avec atteinte souvent limitée aux tibias sous forme d'ulcères de jambes
chroniques,
formes inversées (EBJ-inversa)
forme oculo-laryngée et cutanée (LOC syndrome).
Aspect microscopique :
Sur le plan ultra-structural, le clivage se produit au sein de la lamina lucida.
Il existe dans la plupart des cas des anomalies des HD qui paraissent hypoplasiques et
réduits en nombre.
Aspects cliniques
A-Épidermolyses bulleuses dystrophiques récessives
a-La forme généralisée sévère (EBDR-gen sev) (ex-Hallopeau-Siemens)
Responsable de handicaps majeurs.
se manifeste précocement par une éruption bulleuse généralisée mais prédominant aux
extrémités des membres, associée à une atteinte muqueuse sévère responsable de
complications dentaires, de sténoses buccales, anales et œsophagiennes responsables de
malnutrition et de retard de croissance.
La cicatrisation des érosions cutanées, lente et anormale, s'accompagne de grains de milium et
aboutit à des lésions atrophiques caractéristiques et invalidantes (ssyndactylies, contractures en
flexion des membres).
Au cours de l'enfance, la répétition des bulles et des longues périodes de cicatrisation
pathologique aboutissent à un handicap important : la marche et les gestes de la vie courante
deviennent de plus en plus difficiles.
Des érosions anales rendent la défécation douloureuse, une constipation est fréquente.
Les complications sont nombreuses ; infectieuses, nutritionnelles avec anémie, retard de
croissance, syndrome inflammatoire chronique et risque d'amylose.
Le décès survient souvent au cours des 3 premières décennies du fait de ces complications et
du risque très élevé de carcinomes spinocellulaires survenant sur les zones de peau et des
muqueuses les plus atteintes et extrêmement agressifs.
Des formes localisées, prurigineuses, prétibiales, avec atteinte unguéale isolée et acrales, ont
également été décrites tout comme l'épidermolyse bulleuse transitoire du nouveau-né à
transmission dominante.
Aspects microscopiques
Le clivage se localise sous la jonction dermo-épidermique.
Dans l'EBDD, l'examen ultra structural montre une hypoplasie ou une diminution du nombre
de fibrilles d'ancrage.
Dans l'EBDR, les anomalies ultra structurales sont identiques à celles des formes dominantes ;
elles sont beaucoup plus sévères dans l'EBDR-gen sev
Génétique
Les EBD sont dues à des mutations touchant le gène COL7A1 qui code pour le collagène de
type VII. Celui-ci est synthétisé et sécrété sous forme d'un monomère, le proα1 (VII), par les
kératinocytes basaux des épithéliums squameux stratifiés et par les fibroblastes du mésenchyme
sous-jacent.
L'interaction du collagène de type VII par l'intermédiaire de son domaine NC-1, avec la
laminine 332 et avec le collagène de type IV, assure l'attachement des fibrilles d'ancrage à la
membrane basale
Un défaut d'expression du collagène VII compromet donc gravement la cohésion
derme-épiderme.
Dans la plupart des cas, l'EBD récessive généralisée sévère est due à des mutations sur les
deux allèles COL7A1 induisant une absence complète de collagène de type VII et un tableau
clinique grave.
Dans la forme récessive généralisée intermédiaire, au moins un des allèles porte une
mutation (faux-sens ou touchant un site d'épissage), permettant une synthèse réduite de
collagène VII fonctionnel et immun réactif.
Autres syndromes avec épidermolyse héréditaire
A-Syndrome de Kindler
Il associe une photosensibilité avec une fragilité cutanée prédominant aux extrémités, une
atrophie cutanée avec une peau qui devient fine, fripée et une poïkilodermie.
Une kératodermie palmoplantaire est possible.
La fragilité cutanée s'améliore avec l'âge.
Une inflammation des muqueuses buccales (gencives surtout) et parfois du tube digestif est
présente.
Les ongles sont dystrophiques, il n'y a pas d'atteinte dentaire.
a-Infections :
Les bulles deviennent alors purulentes, parfois malodorantes, suintantes, croûteuses avec un
pourtour inflammatoire.
Elles sont souvent douloureuses et ont du mal à cicatriser.
Les principaux germes en cause sont le staphylocoque doré, le streptocoque du groupeA et le
pyocyanique
c-Cancérisation :
Certains patients, en particulier ceux avec une EBDR ou une EBJ généralisée, risquent de
développer des carcinomes spinocellulaires probablement du fait de l’inflammation et du
processus de cicatrisation chronique.
Il s’agit souvent de carcinomes de mauvais pronostic, infiltrant et métastasant rapidement.
Ce diagnostic doit être suspecté et une biopsie réalisée en cas de plaie ne cicatrisant pas ou de
lésions en relief sur ou en bordure d’une plaie, ou des « croûtes » chroniques.
DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
A-Chez le nouveau-né,
cause infectieuse : -iimpétigo bulleux,
-é
épidermolyse staphylococcique aiguë néonatale,
-plus rarement un herpès ou une syphilis congénitale (érosions palmoplantaires),
MAIS :
Le diagnostic d’EBH est SOUVENT CLINIQUE devant :
- l’apparition chez un nouveau-né ou un nourrisson de bulles des zones de frottement
- et/ou d’une fragilité cutanée associée ou non à des signes extra cutanés.
TRAIEMENT :
Il n'existe actuellement aucun moyen de modifier radicalement l'évolution spontanée des EBH.
Les mesures symptomatiques ont donc une importance considérable.
Les problèmes les plus graves sont posés par les EBDR et les EBJ, à un moindre degré par
l'E
EBS-DM, qui nécessitent une prise en charge spécifique.
Une information détaillée sur la maladie, un soutien matériel et psychologique doivent être
apportés aux malades et à leurs parents par les médecins et le personnel infirmier.
La prise en charge sociale est également cruciale pour ces familles dont le quotidien est
bouleversé par cette pathologie.
Traitement médical
Traitement des plaies :
- Il est indispensable pour prévenir les surinfections et obtenir la meilleure cicatrisation
possible. Les soins sont propres mais non stériles.
- Les soins consistent au retrait des pansements sales, au bain avec savon doux (antiseptique
en cas de plaies surinfectées) puis au traitement des bulles et plaies.
- Les bulles sont nettoyées avec un antiseptique puis transpercées à l'aiguille ou coupées aux
ciseaux pour en vider le contenu tout en gardant le toit en place.
- Les croûtes sont enlevées avec de la vaseline.
- Différents pansements peuvent être utilisés mais jamais adhésifs : pansements non adhésifs
siliconés.
- En cas de bulle purulente, malodorante, croûteuse ou douloureuse, l'utilisation de
pommade antibiotique (a
acide fusidique, sulfadiazine) est recommandée.
Traitement général :
- En cas de surinfection, le recours à l'antibiothérapie générale est souvent nécessaire.
- Les antalgiques doivent être utilisés avant les grands pansements.
- à compenser par des apports adaptés (fer, protéines, aliments hypercaloriques, vitamines)
en cas d'anémie et de dénutrition.
- alimentation liquide et parfois des protecteurs gastriques dans certaines EBH.
- Les troubles du transit doivent être traités par des mesures diététiques associées ou non à
des laxatifs.
- La kinésithérapie et les orthèses sont souvent nécessaires dans les EBDR.
- Le traitement du prurit est difficile.
Traitements de fond
- Aucun traitement de fond n'est régulièrement efficace dans les EBH, quelle que soit la
forme.
- La corticothérapie générale courte pourrait améliorer certaines poussées d'EBJ. Ce type de
traitement n'est toutefois pas habituellement recommandé au cours des EBH.
- La vitamine E à fortes doses a été préconisée dans diverses variétés d'EBH, mais son
efficacité est controversée.
- De façon anecdotique, des résultats positifs ont été rapportés avec des inhibiteurs de
protéases, les cyclines, la ciclosporine.
Traitements chirurgicaux
- Les sténoses œsophagiennes des EBDR peuvent être traitées par dilatations endoscopiques
itératives ou chirurgicalement par transposition colique.
- Une gastrostomie d'alimentation devient parfois nécessaire.
- Lorsque les déformations des mains conduisent à l'impotence fonctionnelle : : Réduction
des contractures, séparation des syndactylies.
- Enfin, l'exérèse de carcinomes spinocellulaires doit être large avec greffe de peau si besoin.
- La thérapie protéique consiste à apporter la protéine déficiente par voie locale (injection
intradermique) ou générale (perfusion).
- La thérapie cellulaire consiste à apporter dans l'organisme des cellules capables de produire
la protéine déficiente
- La thérapie génique consiste à introduire grâce à un vecteur viral inactivé et sécurisé la copie
normale du gène responsable de la maladie dans des cellules afin de compenser le manque créé
par le gène muté.
- La greffe de moelle osseuse a été essayée chez certains patients atteints d'EBDR sévère avec
des résultats encourageants (amélioration de la symptomatologie) mais aux dépens d'effets
secondaires graves (mortalité élevée).
CONSEIL GENETIQUE
Dans les formes à transmission autosomique récessive le risque pour les parents d'avoir à
nouveau un enfant atteint d'une forme récessive d'EBH est de 1 sur 4 (25 %).
Dans les formes à transmission autosomique dominante, une personne atteinte a un risque
sur deux de transmettre la maladie à ses enfants à chaque grossesse et quel que soit leur sexe.
Si le couple a déjà eu un enfant atteint d'une EBH et si la (les) mutation(s) est (sont) connue(s), il
est techniquement possible de réaliser un diagnostic prénatal (DPN) pour les grossesses
ultérieures.
La recherche chez le fœtus de l'anomalie génétique déjà identifiée chez un autre malade de la
famille peut se faire à l'aide d'une choriocentèse (12e semaine d'aménorrhée) ou d'une
amniocentèse (16e semaine d'aménorrhée).
CONCLUSION
Les EBH sont un groupe hétérogène de maladies génétiques à transmission autosomique
récessive ou dominante.
Caractérisées par une fragilité cutanée et/ou muqueuse se traduisant par des bulles et
érosions cutanées.
Leur sévérité est très variable, allant de formes localisées à des formes rapidement létales ou
entraînant des handicaps majeurs.
Le diagnostic est clinique, histologique (immunofluorescence) et parfois moléculaire.
La prise en charge doit être multidisciplinaire en centre spécialisé en lien avec les acteurs de
proximité.
Les complications systémiques sont nombreuses, en particulier dans les formes généralisées,
et doivent être dépistées et traitées.