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Cours de toxicologie industrielle - Absorption, distribution,

transformation, et excrétion des substances toxiques

Introduction
L’effet d’un toxique sur l’organisme dépend essentiellement de la quantité du toxique
ou des substances réactionnelles qu’il engendre (métabolites actifs, radicaux libres) qui se fixe
au niveau des sites d’action (enzyme, membrane, récepteurs cytoplasmiques, plaque motrice,
ADN,…). Cet effet est fonction, non seulement de la quantité du toxique actif qui atteint le
site d’action, mais aussi de son affinité pour ce site. Les quatre principaux processus
biologiques influençant la concentration du toxique actif au niveau des sites d’action sont :
l’absorption, la distribution, la biotransformation, et l’excrétion de la substance toxique.
Absorption, distribution, transformation, et excrétion des substances toxiques
1. Absorption et excrétion
1.1 Mécanismes de transfert de substances chimique à travers les membranes
biologiques
L’absorption et l’excrétion de substance chimiques requièrent le transfert de ces
molécules à travers diverses membranes telle que l’épithélium gastro-intestinal, les tubules
rénaux, le parenchyme hépatique, la peau, le placenta. Ce transfert de substances chimiques à
travers les membranes biologiques peut résulter de cinq mécanismes :
1.1.1 Filtration à travers des pores de membranes
La dimension des pores de la muqueuse intestinale est d’environ 4A. Ce mécanisme
joue un rôle dans le transfert de petites molécules hydrophiles, par exemple l’urée, Ce
transfert est fonction du gradient de concentration de part et d’autre de la membrane.
1.1.2 Simple diffusion à travers la membrane
La vitesse du transport est directement proportionnelle à l’importance du gradient de
concentration (cinétique linéaire). Ce processus est limité aux molécules de faible poids
moléculaire (˂ 500).
1.1.3 Diffusion facilitée
Comme la simple diffusion, elle ne peut se réaliser à l’encontre d’un gradient de
concentration, mais elle fait intervenir des substances porteuses. Ce processus de transport est
donc spécifique pour les seules substances qui peuvent se fixer aux protéines porteuses.
Contrairement au transfert par un simple procédé physique, ce mécanisme peut être saturé aux
concentrations élevées du corps chimique.
1.1.4 Transport actif
Ce procédé fait également intervenir des substances porteuses mais contrairement à la
diffusion facilitée, le corps chimique peut être transporté même à l’encontre d’un gradient de

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concentration ou d’un gradient électrochimique. Ce processus nécessite donc une source
d’énergie. Il peut aussi être saturé.
1.1.5 Endocytose (pinocytose et phagocytose)
L’endocytose résulte de la formation d’invaginations de la membrane plasmique qui
englobe soit des gouttelettes de fluide extracellulaire (endocytose fluide), soit des molécules
qui se sont fixées sur des récepteurs membranaires, soit des particules comme par exemple
des fibres d’asbeste ou l’amiante (phagocytose). Ce dernier mécanisme concerne surtout les
macrophages.
1.2 Voies d’exposition usuelles aux substances toxiques
1.2.1 Voie orale
Bouche
Les substances absorbées par la bouche ne sont pas soumises à l’influence des
sécrétions du tractus gastro-intestinal et ne doivent pas d’abord passer par le foie (site
important des biotransformations) avant d’atteindre la circulation générale.
Estomac
De nombreux corps chimiques acides faibles seront rapidement absorbés par l’estomac
parce qu’au pH gastrique, ils existent principalement sous la forme non ionisée. Les acides
forts et les bases ionisées ne seront pas absorbés par l’estomac.
Intestin grêle / côlon
La vitesse d’absorption des substances diffusant à travers la paroi intestinale est aussi
déterminée par leur constante de dissociation et leur liposolubilité.
1.2.2 Voie pulmonnaire
Le poumon constitue la voie d’entrée principale de nombreux toxiques industriels
(aérosols, gaz, vapeurs). Plusieurs substances industrielles (gaz irritants, silice, amiante, …)
exercent une action toxique directe sur les voies respiratoires. Une fraction des toxiques
inhalés peut cependant pénétrer dans la circulation systémique.
Gaz et vapeurs
Les facteurs (outre la concentration atmosphérique et la durée d’exposition)
déterminants la quantité de gaz et de vapeur absorbée par la voie pulmonaire sont : la
solubilité de ces gaz dans le sang et les tissus, le débit sanguin, le gradient de pression
partielle de ces gaz entre les alvéoles et le sang veineux, et la ventilation pulmonaire.

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Une augmentation de la ventilation qui a pour effet de réduire la différence de concentration
entre l’air inspiré et l’air alvéolaire, facilite l’absorption des gaz solubles dans le sang et les
tissus mais a peu d’influence sur l’absorption des gaz insolubles dans ces milieux.
Aérosols
La quantité de toxique inhalée sous forme d’aérosol qui pénètre dans la circulation
systémique dépend de multiples facteurs qui eux-mêmes conditionnent les processus de
déposition, d’élimination (clairance) et de rétention de poussières.
1.2.3 Voie cutanée
Le toxique peut exercer un effet local (irritation, nécrose, eczéma,…) ou être absorbé.
Le transport à travers la peau peut se réaliser par deux voies principales : la voie
transépidermique et la voie pilosébacée (follicules pileux, glandes sébacées, glandes
sudoripares). Le transport transépidermique est moins rapide que par la voie pilosébacée, mais
comme la surface de l’épiderme est 1 000 à 10 000 fois plus importante que celle des annexes
cutanées, l’absorption s’effectue principalement par la voie transépidermique. Néanmoins,
pour certaines molécules volumineuses, diffusant très lentement, la pénétration par la voie
pilosébacée peut jouer un rôle important.
Les principaux facteurs déterminant l’absorption cutanée sont :
. Propriétés physico-chimiques de la substance ;
. Solvant utilisé ;
. Concentration de la substance ;
. Intégrité des téguments ;
. Température ;
. Degré d’hydratation et pH de la peau ;
. Site cutané ;
. Circulation périphérique ;
. Fixation aux protéines du tissu cutané et biotransformation intra-cutanée de la substance ;
. Durée du contact cutané.
1.2.4 Voie oculaire
Le contact oculaire est surtout responsable d’effets locaux, mais des substances
lipophiles et très toxique (par exemple certains pesticides organophosphorés) peuvent
néanmoins être absorées en quantité suffisante pour exercer des effets systémiques.

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1.2.5 Voies parentérales
Bien que les toxiques industriels ne pénètrent qu’exceptionnellement dans l’organisme
par injection, l’étude expérimentale de toxicité après administration parentérale peut fournir
des indications utiles sur le risque toxique. L’injection intraveineuse produit la plus grande
concentration du toxique dans le sang au moment de l’injection, tandis que le pic de
concentration sanguine est atteint plus tardivement et est généralement moins élevé après les
autres voies d’injection. La vitesse avec laquelle le pic de concentration sanguine apparaît
peut jouer un rôle important dans les manifestations toxiques. Ainsi, l’administration
intraveineuse de 10 mg ∕kg d’un toxique peut produire le même pic de concentration sanguine
que l’administration orale de 100 mg/kg. Néanmoins, par suite de l’atteinte progressive de
cette concentration maximale, l’animal peut supporter cette dose orale alors qu’il peut
rapidement mourir suite à l’injection intraveineuse.
1.3 Excrétion (élimination) des substances étrangères et leurs produits
Les substances étrangères ou leurs produits de transformation sont éliminés par : l’urine,
la bile, l’air expiré, la sueur, les phanères, la salive, le lait, et les diverses sécrétions comme
par exemple les sécrétions gastro-intestinales.
1.3.1 L’urine
L’excrétion urinaire résulte de trois processus distincts :
. La filtration glomérulaire ;
. Le transport tubulaire passif ;
. Le transport tubulaire actif.
1.3.2 La bile
Le foie est le principal organe de transformation des substances chimiques étrangères.
Les produits de transformation (métabolites ou conjugués) sont ensuite transportés dans la
circulation sanguine ou dans la bile. Pour certaines substances, les concentrations sanguines et
biliaires seront identiques, mais certains corps hautement polaires sont préférentiellement
excrétés dans la bile par un processus de transport actif.
1.3.3 L’air expiré
Cette voie concerne principalement les substances volatiles (solvants) ou le produit
terminal gazeux (CO₂) de dégradation d’une substance chimique.
Rappelons que des substances déposées dans l’arbre respiratoire (poussières par exemple)
peuvent être directement éliminées avant toute absorption systémique par les processus de
clairance pulmonaire.

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1.3.4 La sueur
C’est un processus en général peu important (par exemple le plomb, le mercure).
Signalons que l’excrétion de substances toxique par la sueur peut provoquer des dermatites.
1.3.5 Les phanères
Certains métaux (Pb, As, TI, Cd,…) sont partiellement éliminés par cette voie.
1.3.6 La salive
Le mercure, le thiocyanate sont en partie éliminés par cette voie. La détection du
mercure dans la salive fut proposée par Jose Löw et ses collaborateurs comme tests
d’exposition à l’Hg.
1.3.7 Le lait
Des substances chimiques peuvent se transmettre par cette voie de la mère au nouveau-
né. Le pH du lait (6.7) étant inférieur à celui du plasma, les bases organiques peuvent se
trouver en plus fortes concentrations dans le lait que dans le plasma.
2. Distribution des substances étrangères
Des substances s’accumulent préférentiellement dans certains tissus. Cette localisation
n’est pas nécessairement en rapport avec le site d’action primaire. Ainsi, les pesticides
organochlorés et les diphénylespolychlorés très liposolubles se concentrent dans les tissus
adipeux et, vu leur stabilité chimique, y persistent pendant de nombreuses années.
L’interdiction de leur utilisation a cependant entraîné une réduction progressive de leur
concentration dans les tissus adipeux humains. Le Flor, le Plomb, l’Uranium, l’antibiotique
tétracycline se stockent dans les os. Dans certains cas le site de stockage d’un toxique dépend
de sa voie d’administration. Il peut aussi être influencé par les biotransformations que
subissent les substances organiques. Ainsi certains biphényles polychlorés peuvent
s’accumuler dans la muqueuse bronchique probablement suite à leur transformation en acides
méthylsulfoniques.
Suite à son transport sous forme de complexe avec la métallothionéine, synthétisée
initialement dans le foie, le cadmium s’accumule préférentiellement dans les cellules
tubulaires proximales du rein. Des corps chimiques peuvent aussi se lier aux protéines
sanguines. Sous cette forme, ils ne peuvent pas traverser aisément les membranes biologiques.
Aussi, cette liaison peut réduire la vitesse de transformation métabolique de ces substances de
même que leur vitesse d’excrétion rénale.
Cette liaison aux protéines peut cependant favoriser l’absorption intestinale d’une substance
étrangère en modifiant le gradient de concentration de la forme libre dans le sens favorable à

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l’absorption. Il est aussi possible que des substances polaires incapables de traverser les
membranes biologiques lorsqu’elles sont libres dans le plasma puissent être absorbées par un
processus d’endocytose lorsqu’elles sont fixées à des protéines.
3. Biotransformations des substances étrangères
3.1 Réactions de biotransformation
Dans l’organisme, les substances organiques étrangères subissent des transformations
métaboliques qui, en général, donnent naissance à des composés plus polaires, plus aisément
excrétés. Ces transformations sont surtout catalysées par des enzymes du réticulum
endoplasmique des cellules parenchymateuses hépatiques (microsomes hépatiques) mais aussi
d’autres tissus (par exemple : la peau, les monocytes et lymphocytes circulants, les reins, les
poumons, le placenta). Certaines réactions sont cependant catalysées par les enzymes non
microsomiques. Il est d’autre part possible que le système réticuloendothélial puisse jouer un
rôle limité dans la métabolisation de certaines substances ou dans la régulation de l’activité
des cellules parenchymateuses hépatiques ; Les globules rouges possèdent aussi la capacité,
via divers système enzymatiques et même l’hémoglobine de catalyser la biotransformation de
diverses substances étrangères. Certaines d’entre elles peuvent aussi être métabolisées par la
flore intestinale, ce qui modifie éventuellement leur toxicité. Ainsi la flore intestinale
influence le pouvoir cancérogène de la 1,2-diméthylhydrazine, et du 2,6-dinitro-toluène.
Les réactions de biotransformation sont habituellement groupées en réactions dites de phase I,
qui comprennent les réactions d’oxydation, de réduction et d’hydrolyse, et en réaction dites de
phase II, qui comprennent les réactions biosynthétiques de conjugaison par lesquelles les
substances étrangères ou leurs métabolites (résultant des réactions de phase I) sont couplés à
des substrats endogènes. Les principales réactions de transformations des corps chimiques
peuvent alors être classées en trois catégories :
- Transformations métaboliques de phase I catalysées par des enzymes microsomiques ;
- Transformations métaboliques de phase I catalysées par des enzymes non microsomiques ;
- Réactions de conjugaison (phase II).
Signalons que certaines substances inorganiques (par exemple l’arsenic, le sélénium) peuvent
aussi subir des transformations métaboliques in vivo. Signalons également que des phases 0 et
des phases III du métabolisme ont été décrites et que celles-ci, qui ne doivent pas être
considérées comme des étapes de biotransformation proprement dites, correspondent d’une
part au passage des xénobiotiques depuis la circulation sanguine vers les hépatocytes et

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d’autre part à l’excrétion des xénobiotiques et∕ou de leurs métabolites grâce à des
transporteurs.
3.2 Conséquences des transformations métaboliques
3.2.1 Favoriser l’excrétion des corps chimiques
La plupart des transformations métaboliques tendent à rendre le corps chimique étranger
plus polaire et favorisent donc son excrétion (principalement rénale).
3.2.2 Engendrer la formation d’un corps plus toxique : concept d’activation
métabollique
Les transformations métaboliques peuvent engendrer la formation d’un corps plus
toxique.
3.2.3 Réduction de la toxicité
C’est la situation la plus fréquente, par exemple, la transformation des cyanures en
Thiocyanate, la conjugaison des époxydes des hydrocarbures aromatiques polycycliques par
le glutathion, l’hydrolyse du paradoxon en paranitrophénol et diéthylphosphate.
3.3 Facteurs influençant le métabolisme des substances étrangères
Le devenir d’une substance étrangère dans l’organisme peut présenter de grandes
variations interindividuelles et même au cours du temps chez le même individu (variabilité
intra-individuelle). Divers facteurs (endogènes et exogènes) peuvent en effet influencer le
métabolisme (absorption, distribution, biotransformation, excrétion) des substances
étrangères. On peut les grouper en trois classes :
3.3.1 Facteurs génétiques
Des différences génétiques dans la capacité de biotransformer les substances exogènes
(médicaments et polluants de l’environnement) sont connues depuis le début des années 1960.
Certains sujets possédant une pseudochlinestérase atypique incapable d’hydrolyser la
succinylcholine manifestent une apnée prolongée lorsque ce médicament leur est administré.
Vessel et Page ont démontré que les grandes variations interindividuelles observées dans le
métabolisme de la phénylbutazone, l’antipyrine et la bishydroxycoumarine étaient en partie
d’origine génétique. Des différences d’origine génétique ont aussi été décelées dans la
capacité de métaboliser l’acétaldéhyde produit à partir d’éthanol. La capacité d’acétylation
des amines aromatiques et des dérivés de l’hydrazine est également sous contrôle génétique.
Les sujets dont la capacité d’acétylation est limitée sont plus sensibles au développement
d’une neuropathie périphérique lors d’un traitement par l’isoniazide, d’un lupus érythémateux
lorsqu’ils absorbent de la procaïnamide, d’un cancer vésical lorsqu’ils sont exposés aux

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amines aromatiques cancérogènes et d’une méthémoglobinémie lorsqu’ils sont exposés à
l’aniline.
Des différences génétiques dans la capacité de métaboliser des cancérogènes pourraient ainsi
moduler le risque de développement de cancer. On a suggéré que la capacité d’hydroxyler la
débrisoquine (CYP2D6) serait un marqueur indirect de la susceptibilité de développer un
cancer pulmonaire chez les sujets exposés aux hydrocarbures aromatiques polycycliques
(fumée de tabac), mais ce sujet reste controversé.
Il est maintenant bien établi qu’un facteur déterminant dans la susceptibilité interindividuelle
aux xénobiotiques repose sur la variabilité génétique rencontrée au sein du groupe d’enzymes
qui participent à la biotransformation de ces composés. Plusieurs variations au niveau des
gènes codant pour ces enzymes ont été identifiées, et il a été établi que dans certains cas, ces
variations sont à la base d’altérations (positives ou négatives) de l’activité de ces enzymes.
Ces différences ont été désignées sous le terme de polymorphisme pharmacogénétique ou
toxicogénétique (écogénétique). Il semble actuellement établi que chaque individu possède
une gamme distincte d’activités enzymatiques et que l’interaction complexe de ces différentes
variantes est finalement à l’origine de variations du métabolisme des substances chimiques
dans l’organisme et donc également de leur toxicité potentielle.
3.3.2 Facteurs physiopathologiques
a) Âge
La plupart des activités enzymatiques microsomiques à l’égard des corps étrangers sont
plus faibles chez les prématurés que chez les nouveau-nés à terme, et aussi plus faibles chez
ces derniers que chez l’adulte. Ces enzymes se développement progressivement au cours de la
période néonatale et atteignent leur activité maximale environ après deux mois. Les nouveau-
nés présentent d’ailleurs une plus grande sensibilité à l’action de nombreux corps érangers,
sauf vis-à-vis de ceux qui doivent être activés par l’organisme. Ainsi Pelkonen a décelé la
présence de cytochrome P450 dans les microsomes du foie fœtal mais la capacité de ce
dernier d’hydroxyler le 3,4 benzo(a)pyrène et l’aniline et de déméthyler l’aminopyrine n’était
que 2,12 et 11 ℅ respectivement de celle du foie adulte. Comme chez l’adulte, il est
néanmoins possible d’induire l’activité des enzymes microsomiques fœtales par
l’administration d’inducteurs à la mère. II est intéressant de signaler que chez le fœtus,
contrairement à ce qui se passe chez la mère, la transformation d’un corps apolaire en un
composé polaire peut réduire son élimination (barrière placentaire) et entraîner son
accumulation dans l’organisme. Après la période néonatale, l’activité des enzymes

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microsomiques peut cependant être plus élevée chez l’enfant que chez l’adulte ; Il semble par
contre que la réaction de glucuronoconjugaison n’atteigne son activité maximale qu’à l’âge
adulte. Une réduction de la métabolisation de certains médicaments a été observée chez les
vieillards.
b) Sexe
L’absorption orale du Cadmium (et peut être aussi du Plomb) semble plus importante
chez la femme que chez l’homme, car, inversement proportionnelle à la charge corporelle en
fer, le rat mâle adulte biotransforme beaucoup de corps chimiques plus rapidement que la
femelle ; Cette différence semble moins évidente chez l’espèce humaine. La demi-vie
biologique du benzène est plus longue chez la femme que chez l’homme. Des différences
marquées en fonction du sexe ont été observées dans les paramètres toxicocinétiques suite à
l’inhalation de 2-propanol mais celles-ci ont principalement été attribuées à des différences de
nature anatomique.
Quand une substance est biotransformée par diverses voies métaboliques, leur importance
relative peut être différente selon le sexe. Ainsi, le trichloréthylène est préférentiellement
oxydé en acide trichloroacétique chez la femme, et en trichloroéthanol chez l’homme ; Suite à
une exposition aux isomères du dinitrotoluène, l’homme excrète proportionnellement plus
d’acides dinitrobenzoïques que la femme et moins de dérivés glucuronoconjugués de l’alcool
dinitrobenzylique.
c) Hormones
Les stéroïdes, en général, stimulent l’activité des enzymes microsomiques. D’autres
hormones (thyroxine, insuline) semblent aussi influencer l’activité de ces enzymes, mais
parfois de manière différente suivant le système enzymatique considéré. L’influence
hormonale pourrait expliquer l’existence d’un cycle circadien dans le métabolisme de
certaines substances.
d) État nutritionnel
L’influence de l’état nutritionnel sur le devenir des substances étrangères a surtout été
étudiée chez l’animal, mais on peut concevoir que dans certaines circonstances (obésité,
malnutrition) elle puisse s’observer chez l’homme.
La quantité de prouduits lipophiles, peu biotransformés (par exemple : chlorure de méthylène)
retenue dans l’organisme sera proportionnelle à la masse du tissu adipeux. Un état de
déshydratation modifie la distribution et ainsi la toxité de substances hydrosolubles (sels

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solubles de Plomb et d’antimoine), mais n’augmente pas la susceptibilité aux substances
liposolubles (benzène, trichloréthylène, parathion).
Un régime déficient en protéines diminue l’activité des enzymes métabolisant les corps
étrangers ainsi que la concentration en cytochromes P450. Un régime riche en hydrates de
carbone exerce le même effet. On a ainsi observé que dans certaines conditions, un régime
déficient en protéines protégeait le rat à l’égard de la toxicité hépatique du tétrachlorure de
carbone, sans doute en réduisant son activation hépatique médiée par le CYP2E1. Les
substances stockées dans le tissu adipeux (par exemple, pesticides organochlorés :DDT,
hexachlorobenzène) peuvent être mobilisées en période de jeune et exercer des manifestations
toxiques vis-à-vis de certaines substances, la toxicité sera d’autant plus augmentée que le
jeune prolongé induit également l’expression du CYP2E1. Un régime déficient en calcium
augmente l’absorption intestinale du plomb.
e) Grossesse
Il se produit, au cours de la grossesse ainsi qu’au cours de la prise de contraceptifs
oraux, une réduction de l’activité des enzymes métabolisant les substances étrangères. Ainsi
les réactions d’oxydation sont nettement réduites en fin de grossesse et ce phénomène va de
pair avec une réduction de l’activité du cytochrome P450. À la fin de la grossesse, la
glucuronoconjugaison des corps étrangers est aussi très réduite, probablement par suite de la
présence d’une grande quantité de progestérone et de prégnandiol qui sont des inhibiteurs de
la glucuronyltransférase. Signalons aussi que les substances stockées dans le tissus osseux
(par exemple le Plomb) peuvent être mobilisées pendant la grossesse (et la lactation) et ainsi
transférées au fœtus (et au nouveau-né).
f) Maladies
Un état d’achlorhydrie est associé à une diminution de l’absorption gastrique des acides
faibles. Une insuffisance hépatique sera souvent accompgnée d’une réduction de la capacité
de métaboliser (biotransformation, excrétion) des substances étrangères. Ainsi, chez les
individus cirrhotiques ou souffrant d’hépatite chronique active, on constate une nette
réduction de la clairance métabolique de l’antipyrine. Ce test est d’ailleurs utilisé pour
apprécier l’état fonctionnel hépatique. Sa perturbation justifie une grande prudence dans
l’exposition aux substances chimiques des sujets cirrhotiques même lorsque le temps de
Quick est normal. Chez le rat, l’induction d’un état diabétique par l’aloxane produit le même
effet. Quelques données pharmacocinétiques indiquent que chez l’homme également le
diabète est associé à une inhibition du métabolisme de la phénacétine et de l’antipyrine. La

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concentration hépatique de différentes formes du cytochrome est cependant augmentée chez
le rat rendu diabétique par la streptozotocine. De la même manière, on observe une
augmentation de l’expression du CYP2E1 au niveau lymphocytaire chez les sujets
diabétiques. Nous avons démontré que chez l’homme, l’insuffisance hépatique est associée à
une modification de la proportion des métabolites méthyles de l’Arsenic excrétés par voie
urinaire. Les rats et les souris porteurs de tumeurs mammaires métabolisent plus lentement le
pentobarbital que les souris controles. Cette effet est dû à une réduction de la concentration de
cytochromes microsomiques suite à une diminution de l’acttivité de l’enzyme acide delta-
aminolé-vulinique synthétase et une augmentation de l’activité de l’enzyme hème oxygénase.
3.3.3 Facteurs d’environnement
. Stress divers (froid, lumière,…) ;
. Exposition aux radiations ionisantes ;
. Exposition à d’autres substances étrangères.

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