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Bachelor 3
“La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires.”
En droit pénal l’individualité des personnes prend une place prépondérante. En effet, il est
admis selon le principe de la personnalisation de la peine découlant de l’article 8 de la
DDHC, que le juge se doit d’attribuer une peine en tenant compte uniquement de la
personnalité de l’auteur, de sa situation et de la nature de l’infraction qu’il a commise. Ce
principe a pour conséquence de complètement rejeter l’idée qu’il puisse exister une
responsabilité collective ou une responsabilité pour le fait d’autrui comme ça peut être le
cas en droit civil, le juge est donc tenu de rendre un jugement et une peine individuelle
même lorsque plusieurs personnes ont participé à la réalisation de l’infraction.
Cette conception autour de l’individu s’est heurtée au fil du temps à la montée de la
criminalité organisée devenue de plus en plus complexe à appréhender et faisant toujours
plus de victimes. Face à ces nouvelles problématiques, le législateur fut contraint de prendre
des dispositions afin de couvrir les manquements que comprenait l’ancienne loi. Ainsi, avec
l’instauration du nouveau code pénale en 1994, la notion de groupe prit une lecture plus
complexe et multifacette.
Tout au long de ce travail nous nous aurons une réflexion sur comment le droit pénal
envisage-t-il le groupe ? Afin de répondre à cette question nous étudierons la notion de
groupe selon que l’on soit auteur (I) ou victime d’une infraction (II).
En droit pénal, le fait d’être en groupe lorsque l’on commet une infraction sera la plupart du
temps une circonstance aggravante mais peut aussi constituer une infraction autonome. Les
circonstances aggravantes nommées par le code pénal sont les cas d’infractions commises
en réunion et en bande organisée. La différence entre les deux est que la réunion présente
un caractère fortuit dans le rassemblement des auteurs de l’infraction tandis que la bande
organisée (définie à l’article 132-71 du code pénal) suppose non seulement que les auteurs
se soient préparés en groupe à la réalisation d’une infraction mais aussi qu’ils aient une
structuration ainsi qu’une hiérarchisation claire (cass. Crim 4 novembre 2004). Dans certains
cas le simple fait de se réunir en groupe pourra constituer une infraction, il s’agit de
l’association de malfaiteurs. L’association de malfaiteurs est définie dans l’article 450-1 du
code pénal comme “tout groupement formé ou entente établie en vue de la préparation,
caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'un ou plusieurs crimes ou d'un ou
plusieurs délits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement”. L’objectif du législateur était
donc de prévenir la commission en groupe d’infractions graves mais depuis sa promulgation,
elle fait l’objet de beaucoup de critiques de la part de la doctrine pour sa répression de la
liberté de réunion, sa constatation très large en raison de la difficulté de pouvoir déterminer
si les auteurs préparaient effectivement un délit et enfin depuis que la Cour de cassation a
estimé qu’elle était cumulable à une autre infraction commise en bande organisée. (cass
crim 9 juin 2022)
Ainsi, cette première partie a mis en lumière comment le groupe auteur d’une infraction
selon sa structure et la participation de ses membres peut avoir une influence sur la nature
voire même la gravité de l’infraction. Nous allons désormais observer le cas du groupe
victime d’infraction et plus précisément l’importance que le droit pénal peut leur accorder.
Cette seconde partie sera centrée autour des moyens de protections des groupes de
victimes en droit pénal (a) et nous aborderons aussi la question de la représentation
collective (b)
En plus du fait qu’un nombre élevé de victimes pour une même infraction aura pour
conséquences une sanction plus lourde, il existe aussi une autre situation dans laquelle le
droit pénal accordera de l’importance aux groupes de victimes : celle où il voudra les
protéger. L'on retrouve ainsi l’existence d’infractions n’affectant qu’un groupe de victimes
précises comme celles relatives aux mineurs telle que le détournement (article 227-8) ou
celles portant sur les minorités telles que l’incitation à la haine ou l’injure raciste (articles
r625 et r625-8-1). Ce type d’infractions pensées comme des moyens de protéger des
groupes spécifiques, permettent à ce que des associations défendant l’intérêt de ces
groupes puissent se constituer partie civile afin d’assister les victimes dans leur procédure.
Enfin notons aussi la présence d’infractions caractérisées par le fait que les victimes doivent
nécessairement être un groupe de personne, ce seront tous les crimes contre l’humanité
comme le génocide cité à l’article 211-1 du code pénal par exemple.
b) La représentation collective
A l’heure actuelle le droit pénal ne prévoit pas d’actions collectives en justice particulières
pour les groupes de victimes. La coutume admet qu’elles ont la possibilité de déposer une
plainte commune avec constitution de partie civile pour obtenir réparation, cependant cette
méthode comporte des défauts étant donné qu’elle mène à autant de procédures que de
demandeurs et un nombre élevé de procédures donnera potentiellement lieu à beaucoup
de jurisprudences différentes. Face à ces problèmes, de nombreux juristes estiment que
l’élargissement des actions de groupe au droit pénal pourrait être une solution. L’action de
groupe est une procédure de poursuite collective permettant à un groupe de victimes d’un
même préjudice, causée par une entreprise ou une personne, de s’unir afin d’agir en justice
par le biais d’une association agrée. Elle a été instaurée en 2014 et n’était à l’origine
applicable que dans le domaine de la consommation avant de s’élargir aux domaines de la
santé, de l’environnement, de la discrimination au travail, de l’immobilier et en matière
administrative. Cette procédure inspirée de la “class action” américaine, fut favorablement
accueillie car elle permettait de donner du poids aux victimes qui n’oseraient pas en temps
normal agir en justice de peur de voir leur demande se faire rejetée en plus de faciliter les
choses en regroupant l’ensemble des réclamations en un dossier et en ayant besoin que
d’un avocat. Si aujourd’hui malgré les côtés pratiques qu’elle propose, l’action de groupe
reste peu utilisée en raison des nombreuses contraintes qu’elle possède, cela pourrait
changer grâce à une proposition de loi du 15 décembre 2022 visant à étendre son champ
d’action et à augmenter son accessibilité.