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&&/RECHERCHE

1918-1921.
Les POGROMS
des guerres
civiles russes
Blancs et Rouges, Ukrainiens, paysans insurgés ... Tous ont participé
à des massacres de juifs lors des guerres civiles russes. « Pogroms » :
le terme est-il adéquat pour qualifier ces tueries de masse,
qu'on peut plutôt considérer comme l'antichambre de la Shoah?
Par Nicolas Werth

es pogroms antisémites des guerres civiles juive mondiale. Et ce malgré une très forte émi-
russes de 1918-1921 sont restés un événe- gration notamment vers les États-Unis (1,5 million
ment peu étudié. Ds constituent pourtant les de personnes entre 1861 et 1914), stimulée par
plus grands massacres de juifs avant le géno- des conditions politiques et économiques particu-
cide. Plus de 2000 bourgades et petites villes lièrement dures. Depuis la fin du xvm• siècle en
furent touchées en Ukraine, en Biélorussie, en effet, les juifs étaient soumis à toute une série de
Russie; au moins 100000 tués, 200000 bles- discriminations. Ils étaient notamment cantonnés
L'AUI'EUR sés et invalides, des dizaines de milliers de femmes dans une "zone de résidence "• qui englobait, de
Directeur de
recherche à
violées, 300000 orphelins, plus d'un demi-million la Baltique à la mer Noire, une quinzaine de pro-
l'Institut de réfugiés au total dans une communauté de quel- vinces occidentales de l'empire, de la Lituanie à
d'histoire du que 5 millions de personnes. Trois raisons peuvent l'Ukraine méridionale, en passant par la Pologne,
temps présent
(CNRS), être avancées pour expliquer ce relatif désintérêt : la Biélorussie et la Bessarabie. Sauf dérogation, les
Nicolas Werth l'accès difficile aux sources, dispersées, en partie juifs n'étaient pas autorisés à résider hors de cette
a notamment disparues ou longtemps inaccessibles (pour celles
publié, parmi
de nombreux restées en URSS) ; la dilution des pogroms dans cet
ouvrages, immense tumulte qu'ont été les guerres civiles rus-
La Route
dela Kolyma ses, tout particulièrement dans les confins d'empires Décryptage
(Belin, 2012). (Biélorussie, Ukraine); enfin l'ombre immense por- Une nouveUe génération d'historiens
tée par cet« événement monstre>> qu'a été la Shoah. russes se penche sur les pogroms antisémites
Les pogroms des guerres civiles russes 1 consti- qui suivirent la révolution de 1917 dans
tuent la troisième vague de pogroms dans l'histoire l'ancien empire tsariste, jusqu'à présent
de la Russie moderne. Toutefois, le contexte dans peu étudiés. De nombreuses archives,
lequel ils ont été commis - cet affrontement mul- notamment des témoignages recueiUis
tiforme et désordonné -, leur ampleur sans pré- dès 1919 auprès des survivants ou des
cédent et leurs modalités les distinguent radicale- rapports d'enquête d'organismes d'aide aux
ment des précédents. victimes, contribuent aujourd'hui à repenser
Depuis l'annexion, à la fin du xvm• siècle, de le pas qui a été franchi entre les pogroms
la Pologne par Catherine II, la communauté des d'avant 1914- violences spontanées
juifs de l'Empire russe était la plus importante d'une communauté de voisins- et
au monde. En 1914, elle comptait environ 5 mil- l'extermination planifiée des juifs d'Europe.
lions de personnes, soit la moitié de la population

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Veillée des
LA COMMUNAUTÉ DES JUIFS DE L'EMPIRE RUSSE COMPTAIT, morts
Après tm pogrom
EN 1914,5 MILLIONS DE PERSONNES, SOIT LA MOITIÉ DE LA en 1919, à
Proskourov
POPULATION JUIVE MONDIALE en Ukraine.

zone, ni à acquérir des terres. Un sévère numerus Pour autant, rien ne serait plus faux que de pen-
clausus limitait leur accès aux universités. Les juifs ser que les juifs constituaient une minorité révolu-
étaient en outre exclus de la fonction publique et tionnaire. Au contraire. Dès qu'ils purent exprimer
ne pouvaient accéder aux grades d'officier dans librement leur choix politique, au lendemain de la
l'armée. Aussi étaient-ils cantonnés, dans leur im- révolution de février 1917, les juifs votèrent massi-
mense majorité, aux métiers traditionnels du com- vement pour les partis sionistes et religieux qui dé-
merce, des services, de l'artisanat et de l'industrie. fendaient avant tout l'identité juive. Une identité
A partir des années 1860-1870, un processus souvent mal acceptée par les voisins, ukrainiens,
d'acculturation et d'assimilation d'une minorité biélorusses ou russes de la zone de résidence. Pour
juive désireuse de rompre avec la religion, la culture le petit peuple orthodoxe, majoritairement pay-
et le mode de vie traditionnel du shtetF se déve- san, le juif était par essence l'Autre - celui qui ne
loppe malgré tout. A Saint-Pétersbourg, le nombre travaillait pas la terre, mais se livrait à l'usure et
dejuifspassede SOOen 1859 à35000en 1914.Ala au commerce (souvent assimilé à de la « spécu-
veille de la Grande Guerre, la majorité des juifs de la lation, ou de « l'accaparement,, surtout en pé-
capitale de l'empire maîtrisait parfaitement le russe riode de crise ou de pénuries). Plus fondamentale-
(et avait oublié le yiddish) et une partie d'entre eux ment, l'antijudaïsme populaire était nourri par la
appartenait aux élites économiques ou intellectuel- croyance selon laquelle le peuple juif était « celui
les. Représentant moins de 3 %de la population, les qui avait crucifié le Christ "· A intervalles réguliers,
juifs comptaient, en 1914, pour 8% des étudiants cet antijudaïsme, habilement instrumentalisé par
des universités russes. C'est au sein de cette mino- les autorités, remontait à la surface.
rité émancipée que se recrutaient d'ailleurs nombre Si l'on s'en tient à la période postérieure à
de contestataires du régime tsariste. l'abolition du servage en 1861, rappelons qu'une

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DATES CLÉS
Quelques jours plus tard, la foule, à l'occasion de
BL ANCS CONTRE ROU G ES la fête de Pâques, attaque, trois jours durant, les
quartiers juifs de Kichinev, pille des centaines de
28janvier 1918 magasins, brûle des centaines d'habitations, tue
Décret sur la création d'une Armée rouge, des dizaines de juifs. Les forces de l'ordre res-
instrument militaire des bolcheviques.
tent passives. Les pogroms s'amplifient en 1904
Février 1918 et 1905 pour culminer fin 1905-début 1906. Au
Le 8, les bolcheviques prennent le pouvoir à Kiev. cours des deux derniers mois de l'année 1905,
Formation d'une Armee des volontaires, composée on recensa pas moins de 657 pogroms, plus de
d'officiers, noyau de l'Armée blanche, instrument
des partisans de l'ancien régime tsariste. 3 000 victimes, 15 000 blessés, principalement en
Bessarabie, à Odessa (800 tués, 5 000 blessés fin
6 août 1918 octobre 1905), à Varsovie, dans les provinces de
Prise de Kazan par l'Armée blanche. Moscou, capitale Grodno et de Kherson. La police, les partis monar-
de la Russie soviétique, directement menacée.
chistes et d'extrême droite exploitent habilement
10 septembre 1918 les préjugés populaires dans une situation de pé-
Première grande victoire de l'Armée rouge, nuries et de chaos politique consécutive aux évé-
qui reprend Kazan. nements révolutionnaires et aux grèves insurrec-
tionnelles de l'hiver 1905-1906. Pour le pouvoir
4 mars 1919 tsariste, convaincu de la collusion juifs-révolution-
Début de l'offensive de l'amiral Koltchak (Armée
blanche) qui progresse, depuis la Sibérie, vers la Volga. naires, encourager les pogroms est aussi une ma-
nière de combattre la révolution.
Mai 1919
Offensive du général blanc Ioudenitch à partir de
l'Estonie vers Petrograd. CRIMES DE GUERRE
C'est dans un contexte bien différent que s'ins-
Juin-septembre 1919 crit, à partir de septembre 1914, la troisième va-
Série de victoires des Armées blanches du général gue de violences antijuives. Le premier conflit
Denikine en Ukraine et en Russie centrale.
mondial donne l'occasion aux militaires de mettre
Octobre-décemb re 1919 en pratique des théories développées depuis le dé-
Contre-offensives victorieuses de l'Armée rouge but du siècle dans le milieu des géographes et des
contre Denikine, en Ukraine, Ioudenitch, dans la région statisticiens militaires. Il était admis qu'en cas de
de Petrograd, et Koltchak, en Sibérie occidentale.
conflit, un certain nombre de " populations sus-
7 février 1920 pectes "• au premier rang desquelles figuraient, en
Koltchak, fait prisonnier par les bolcheviques, Asie centrale, les" indigènes musulmans ,,, dans le
est exécuté. Caucase, les " peuples caucasiens " et, sur les mar-
ges occidentales de l'empire, les juifs et les sujets
Fin octobre 1920-novembre 1920 russes d'origine allemande 3, devraient être sur-
Offensive finale de l'Armée rouge en Crimée contre
la dernière Armée blanche commandée par le veillées et pourraient aussi être expulsées.
général Wrangel. Les navires alliés évacuent près Les premières expulsions de communautés jui-
de 140000 civils et militaire blancs sur Constantinople.
Fin de la guerre civile entre Blancs et Rouges. ves par l'armée russe furent mises en œuvre dès
Les troubles continuent jusqu'en 1921. les premières semaines de la guerre, en Pologne.
Le commandement justifiait ces expulsions pré-
ventives par le fait que les juifs, qui parlaient yid-
première vague de pogroms déferla en 1881-1884 dish, une langue <<proche de l'allemand "• étaient
dans le sillage de l'assassinat du tsar Alexandre II autant d'espions et de traîtres potentiels. Avec les
(le 1"'mars 1881). Largement spontanées, ces vio- revers, puis la débâcle de l'armée russe au cours
lences étaient l'exutoire des nombreuses peurs et de l'été 1915, les expulsions de communautés jui-
rumeurs consécutives à l'assassinat du tsar, attri- ves dans les zones du front et du proche arrière
bué aux juifs. La passivité, voire la complicité, des s'amplifièrent, se transformant, par endroits, en
forces de l'ordre permit aux instincts de la popu- véritables déportations organisées par convois fer-
lace, avide de pillage, de se déchaîner tout particu- roviaires affrétés pour l'occasion. Plus d'un demi-
lièrement à l'occasion des grandes fêtes religieuses million de juifs furent déplacés de force dans la
(pogroms de Pâques de 1882, 1883 et 1884). Si seconde moitié de l'année 1915. Ces actions s'ac-
les atteintes aux biens furent considérables (plu- compagnèrent souvent d'exactions et de pogroms,
sieurs dizaines de milliers de propriétés et maga- où s'illustrèrent tout particulièrement les unités de
sins pillés), le nombre de victimes ne dépassa pas cosaques. L'avancée de l'armée commandée par
quelques centaines. le général Broussilov en Galicie (printemps 1916)
La deuxième vague de pogroms déferla dans fut marquée par un déchaînement de violences an-
les années 1903-1906. L'événement déclen- tijuives : pillages, viols, massacres de civils. L'un
cheur en est le meurtre, en avril1903 - aussitôt des plus terribles pogroms perpétré par les mili-
transformé en «meurtre rituel" -, d'un garçon- taires eut lieu dans la petite ville de Butchach où,
net à Dubossary, une petite ville près de Kichinev. en juin 1916, une unité de cosaques massacra

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l'HISTOIH[/ 69

REPÈRES CARTOGRAPHIQUES
LES RÉGIONS MARTYRES

~
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1
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' G {J
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.... (1917)
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Gomel (1917) .... aoOt 1919
Berlin
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Fastov (1919) . ,' Krementchouk
•• (1919)
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... Proskourov (1919)
D Ancienne zone de résidence des juifs Ellzavetgrad 1
1

(1919) 1 0
Frontière de la Russie Ro stov-
UKRAINE sur-le-Don
- en 1914
-- • après le traité de Brest-Litovsk (1918)
Kherson
Avancée de l'armée de Denikine (1919)
C) Contre-offensive de l'Armée Rouge (1919) Odessa
- Frontière de l'URSS en 1921
Ville et bourg martyrs 0
Sébastopol Notes
. 1903-1906 . 1914-1917 1918-1921 200 km 1. Le pluriel est
délibérément
Depuis la fin du XVIII" siècle, la majorité des juifs de Russie était confinée dans une « zone de résidence » utilisé. En effet,
où l'antisémitisme des populations locales conduisit à trois vagues de pogroms en 1881·1884, 1903·1906 les affrontements
et pendant la Première Guerre mondiale. La chute de l'Empire russe et les guerres civiles qui s'ensuivirent des années 1918-
1921 ne sauraient
déstabilisèrent la région et relancèrent le processus, avec une violence encore plus extrême. C'est dans ce être réduits au
contexte que se déroulèrent les massacres de 1918·1921, qui firent au moins 100000 victimes. seul affrontement
révolutionnaires/
contre-
plusieurs dizaines de personnes, saccagea toutes tes 4 aux sionistes, recueillaient toujours la grande révolutionnaires,
" Rouges " contre
les synagogues, profana le cimetière juif. majorité des suffrages des «masses juives ». " Blancs "· Ces
C'est dans le cours des campagnes militaires La violence antijuive, toutefois, ne faiblissait années furent
de 1915-1916 menées dans les zones à fort peu- pas. Tout au long de l'année 1917, les pogroms marquées par de
très nombreux
plement juif que la violence antisémite contre les continuèrent, dans une conjoncture marquée par chevauchements
populations civiles devint une pratique courante la faillite de l'État, l'exacerbation des antagonismes de conflits
multiformes
dans les unités combattantes. Elle conforta, parmi sociaux et nationaux, le développement des pénu- (<< Verts »/
la troupe, formée à 90% de paysans, les stéréoty- ries, la décomposition progressive de l'armée et la paysans/
pes sur le " juif traître », le «juif infidèle>>, le " juif diffusion des violences des zones militaires vers déserteurs contre
<< Rouges , et
accapareur et spéculateur ,, et plus encore le senti- l'arrière. Ces pogroms étaient le plus souvent ini- « Blancs »;
ment d'impunité quand il était question de" casser tiés par des bandes de déserteurs ou des soldats de paysans
du youpin '' (po bit' jida). garnison devenus maîtres de petites villes où plus ukrainiens contre
<< Moskali >>/
aucune autorité n'était en mesure d'assurer l'ordre « Moscovites )) ;
FAUX RÉPIT PENDANT LA RÉVOLUTION public. Les juifs étaient attaqués au prétexte que, se citadins contre
ruraux, etc.).
La révolution de février 1917 et la chute du ré- livrant au commerce, ils spéculaient sur les pénu- 2. Petite ville,
gime tsariste mirent fin aux discriminations légales ries. En réalité, l'occasion était trop belle de se livrer grand << village »
dont souffraient les juifs de l'Empire russe. Le gou- impunément au pillage et aux profanations. Les po- ou quartier juif.
3. Les <<colons
vernement provisoire ouvrit l'accès des juifs à la groms culminèrent en septembre-octobre 1917, à allemands "•
fonction publique et à de nombreux postes de res- Tambov, Roslavl, Gomel, Bobrouïsk, Nesvij. Ces installés comme
ponsabilité, y compris dans l'armée. Des milliers pillages, accompagnés d'exactions, de viols et de paysans depuis
le xvm' siècle
de juifs apparurent sur le devant de la nouvelle massacres, s'inscrivaient clairement dans le pro- dans un certain
scène politique, comme militants ou responsables longement de pratiques de l'armée russe au cours nombre de
marges frontières
de soviets, de comités d'usine ou de quartier, mais des deux années précédentes. de l'empire.
aussi des partis les plus divers : constitutionnel- Soulignant le fil qui relie les pogroms de la 4. Issus du
démocrate (libéral), menchevique, internationa- Grande Guerre, de 1917 et ceux des années 1918- mouvement
socialiste juif
liste, socialiste-révolutionnaire, bolchevique, sans 1921, l'historien américain Richard Pipes inscrit créé à la fin du
compter les nombreux partis juifs qui, des bundis- ces derniers dans le phénomène plus général du XIX' siècle.

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tionnelles paysannes, voisins des


]Udls che Slra sse villages ou des quartiers urbains
environnants- tous ont été impli-
qués dans des violences de masse
contre la population civile juive.
L'Ukraine occidentale (78 % des
pogroms) et la Biélorussie (14%
des pogroms), lieux majeurs de
concentration de la population
juive de l'ex-Empire russe, ont
été les deux principaux champs
de ces violences. Pourquoi cet
acharnement contre la popula-
tionjuive?
En 1918-1919, la «Conjonc-
tion fatale" (Richard Pipes) qui
associe juifs et bolcheviques est
déjà largement consommée.
" Seuls les juifs ont tiré profit de
la révolution, tous les autres n'en
ont retiré que du malheur - telle
Shtetl est l'opinion unanimement ré-
Si un processus razgrom (destruction violente) généralisé qui pandue", écrivait en avril1919, au terme d'une
d'assimilation
s'est développé s'abat sur l'ex-Empire russe à partir de la seconde tournée en Ukraine, l'un des plus proches colla-
dans les grandes moitié de 1917: mise à sac des demeures seigneu- borateurs de Felix Dzerjinski, le responsable tché-
villes, la plupart riales, résurgence des guerres paysannes, dispa- kiste Grigorii Moroz,juiflui-même, dans une lettre
des juifs de rition des frontières entre sphère civile et sphère
Russie
adressée au Comité central. " On entend partout,
continuaient militaire, brutalisation généralisée des compor- dans les wagons, dans les gares, les bazars, les can-
de vivre dans tements sociaux. Un autre grand spécialiste de tines et même dans les clubs ouvriers : les youpins
des quartiers la Russie, Peter Kenez, de son côté, voit dans les sont partout, ils ont pris le pouvoir. Ils sont en train
ou des villages à
part (des shtetls, pogroms perpétrés par l'Armée blanche en 1919 de tuer la Russie. Le pouvoir soviétique, ça pourrait
comme dans un phénomène radicalement nouveau, moderne, encore allers 'il n y avait pas des youpins partout ! "
cette" rue fondé sur un antisémitisme doctrinal exacerbé de- Et Moroz de proposer de remplacer d'urgence, en
des Juifs, à
Novogrudok venu" le point focal d'une vision du monde" qui fe- Ukraine, tous les communistes juifs ayant des pos-
en Biélorussie), rait du mouvement blanc un véritable "mouve- tes de responsabilité par des communistes russes,
qui furent ment proto-nazi"· "En matière d'antisémitisme, à défaut d'Ukrainiens !
saccagés lors écrit-il, les officiers blancs étaient les précurseurs des
des pogroms.
nazis. " Les travaux récents sur les pogroms des « UNE "AKTION" DE TYPE NAZI >>
guerres civiles russes permettent-ils de trancher Si l'adhésion d'une minorité de juifs, le plus
entre ces deux interprétations ? souvent jeunes et éduqués (ayant généralement
L'un des grands apports du Livre des pogroms rompu avec leur milieu d'origine) au bolchevisme,
dirigé par Lidia Miliakova en 2006 est de resituer est une réalité, le phénomène doit être fortement
l'ensemble des violences antijuives des années nuancé concernant la masse de la population juive
1918-1922 dans leur contexte local et de rappe- des petites villes, celle qui eut le plus à souffrir des
ler que tous les protagonistes, sans exception, des pogroms. Un exemple : aux élections locales qui se
guerres civiles se sont massivement livrés à des po- déroulèrent fin 1918 dans quelque 200 commu-
groms. Leur nombre a dépassé les 2 000. Armée des nautés juives d'Ukraine, les partis religieux et sio-
volontaires (Armée blanche) du général Denikine, nistes recueillirent plus des deux tiers des voix.
unités militaires de la République populaire ukrai- Les dirigeants blancs, le général Denikine en
nienne, troupes commandées par les nombreux tête- chef des armées-, se sont toujours défendus,
atamans, chefs de guerre autoproclamés combat- dans leurs écrits et leurs Mémoires, d'avoir encou-
tant pour un camp ou pour un autre ou poursui- ragé les pogroms. Au contraire, ceux-ci auraient
vant leurs propres buts (pillage), Cavalerie rouge largement contribué à la décomposition morale
commandée par le général Boudienny, formations de l'Armée blanche et à la chute de la discipline,
de "bandits » et de déserteurs, armées insurrec- précipitant ainsi la défaite. On pourrait multiplier

POUR LES BLANCS, LES JUIFS ÉTAIENT NON SEULEMENT DES


BOLCHEVIQUES MAIS AUSSI DES AGENTS DE L'ÉTRANGER,
DES« MICROBES», DÉTRUISANT LE CORPS SAIN DE LA RUSSIE
N'398/ AVRIL2014
l'HISTOIRE/71

les exemples d'ordres donnés par tel ou tel géné- Le nombre de victimes se chiffrait alors en dizaines
ral blanc appelant à mettre fin aux violences an- plutôt qu'en centaines ou en milliers. Dans tous les
tijuives. Ces condamnations, qui venaient a poste- cas, les tueurs les plus acharnés semblent avoir été
riori et visaient avant tout à rétablir un semblant les cosaques. La communauté cosaque venait, lors
de discipline, étaient cependant rarement suivies de l'avancée de l'Armée rouge au début de 1919,
d'effets. En revanche, Denikine se refusa toujours d'être victime d'une véritable campagne d'exter-
à accéder aux demandes d'aide des représentants mination perpétrée par l'Armée rouge et les unités
de la communauté juive au motif qu'une déclara- spéciales de la Tcheka, qualifiée sans ambages par
tion officielle condamnant les « excès antijuifs , ne les bolcheviques de « décosaquisation ». Les rela-
pouvait qu'empirer encore la situation des juifs ! tions détaillées de certains pogroms évoquent clai-
Les rares condamnations ne pouvaient évidem- rement le désir de vengeance.
ment pas contrebalancer la propagande antisé- Les formations blanches n'étaient pas les seu-
mite diffusée en permanence par le Département les à commettre des pogroms dont le but premier
de surveillance et de propagande (Osvag) et par
la presse blanche. L'équivalence juif-bolchevique
y était en permanence réaffirmée, aussi bien dans l·t 1:(]!Jfîf:;(J
les libelles antisémites puisant aux Protocoles des LE MYTHE DU JUIF ROUGE
sages de Sion (largement diffusés dans les zones Avant la révolution, Je peuple n'avait
contrôlées par les Blancs) que dans les affiches de <<Ajamais vu un seul j llif en po ition
d'autorité : ni en tant que gouverneur, ni en
l'Osvag représentant le juif Bronstein-Trotski assis tant que policier ni même en tant qu'employé
sur le mur du Kremlin et contemplant une monta- des postes. Et voilà que maintenant on voyait
gne de crânes de victimes de la Tcheka. le juif à chaque coin, dan chaque allée du
Dans la guerre à mort contre le bolchevisme, nouveau pouvoir. Le Russe le voyait à la tête
la profonde méfiance vis-à-vis des juifs, déjà en- de Moscou, l'ancienne capitale, et maître de
la capitale sur la Neva, et de surcroît commandant
seignée dans les académies militaires avant 1914, l'Armée rouge [ ... ].Le Russe voyait que la
se transforma chez de nombreux officiers blancs perspective Saint-Vladimir portait maintenant
en un antisémitisme d'autant plus virulent qu'il le glorieux nom de Nakhimson, la perspective
était appelé à expliquer l'inexplicable : comment Liteinyi avait été rebaptisée Volodarskii et
Pavlovsk- Slutsk [ ... ].Doit-on s'étonner que
la Russie en était arrivée là où elle était, déchi- comparant le passé et le présent, le peuple en
rée, affaiblie, vaincue, en proie au chaos, livrée à soit venu à la conclusion que le nouveau régime
une bande d'athées assassins et de juifs, agents de était le régime des juifs, et donc diabolique?"
l'étranger de surcroît? Les juifs étaient les micro- l. M. Bikerman, Rossia iEvrei, Berlin, 1924, pp. 22-23.
bes détruisant le corps sain de la Russie ; d'où la
radicalité du traitement réservé aux prisonniers
de guerre juifs, systématiquement exécutés dès
leur capture par les Blancs ou les cosaques. Dans
ce contexte, affirme Peter Kenez, '' les pogroms me-
nés par les Blancs ont été les plus organisés, les plus
efficaces, les plus motivés idéologiquement, menés
comme des opérations militaires». Pour preuve, des
crimes de guerre sanglants commis par des unités
de l'Armée blanche : à Fastov, par exemple, des 23
au 25 septembre 1919, la brigade cosaque du co-
lonel Belogortsev massacra en deux jours 1300 à
1500 juifs sur une population totale de 10 000 ha-
bitants. Par petits groupes de trois ou quatre, les
cosaques perquisitionnaient systématiquement Propagande
chaque maison, torturaient leurs victimes jusqu'à Cette affiche
ce qu'elles leur donnent tous leurs biens pré- des Armées
blanches montre
cieux, puis tuaient tous les membres de la famille, Léon Trotski en
contraignant certains à mettre le feu à leur maison monstre, avec
et à périr dans les flammes. Comme le remarque une étoile jaune
autour du cou,
justement Richard Pipes, « on peut parler dans ce les pattes
cas d'une véritable Aktion de type nazi». ensanglantées,
Toutefois, seul un nombre relativement limité contemplant
les crânes des
de pogroms commis par des unités de l'Armée victimes de
blanche déboucha sur des massacres systémati- la Tcheka. La
ques, organisés et massifs où la mise à mort pri- légende indique
mait sur le reste. L'objectif premier était, le plus ironiquement
«Paix et Liberté
souvent, le pillage, accessoirement le viol et l'as- en Russie
sassinat de ceux qui tentaient de résister ou de fuir. soviétique"·

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72/RECHERCHE

était le meurtre, pour citer les ordres donnés à Nikolai Grigoriev. Ancien officier de l'armée tsa-
Proskourov, petite ville ukrainienne, par l'ataman riste sur le front sud-ouest (là où les troupes rus-
Semosenko, commandant d'une unité de cosaques ses avaient mis en pratique, dès 1915, une poli-
de l'Armée populaire ukrainienne, "l'extermina- tique antijuive), Nikolai Grigoriev servit d'abord
tion des y ... , l'ennemi le plus perfide et le plus dange- dans l'armée de Petlioura, avant de rejoindre l'Ar-
reux du peuple ukrainien "· A Proskourov, les 15 et mée rouge en février 1919. Nommé général de di-
16 février 1919, près de 1500 juifs (soit 20 % des vision, Grigoriev refusa, début mai 1919, d'obéir
juifs de la ville), de tous âge et sexe, furent systé- aux ordres du haut commandement et se mu-
matiquement massacrés à l'arme blanche par des tina. A la tête d'une force armée bien équipée de
petits groupes de tueurs. Le but implicite était de 15 000 hommes, formée principalement de re-
faire fuir l'ensemble de la communauté juive. crues paysannes du sud de l'Ukraine, il rédigea
En ce sens, ce type de massacre de masse est alors une Proclamation (Universal) appelant la
à la limite du nettoyage ethnique, même s'il n'est paysannerie ukrainienne à se soulever contre les
nécessairement pas pensé à une grande échelle. " commissaires juifs " et les jido-kommuny (« com-
Mais dans le contexte de ces affrontements multi- munes juives»)- allusion, très mobilisatrice, aux
formes, où les villes étaient prises et reprises par- exploitations collectives que les bolcheviks avaient
fois jusqu'à dix fois en quelques mois, pouvait-il y essayé d'organiser en Ukraine lors de leur avan-
avoir un " plan à long terme , ? cée au cours des mois précédents - et à mettre en
Le nombre de pogroms commis par les unités place un " authentique pouvoir des soviets débar-
de l'Armée populaire ukrainienne aurait été en- rassé des imposteurs communistes "· En quelques
core plus élevé que celui des pogroms perpétrés semaines, les troupes commandées par Grigoriev
par les unités de l'Armée blanche (cf ci-dessous) . perpétrèrent 148 pogroms, le plus meurtrier étant
Encore plus incontrôlables étaient les pillages et celui d'Elizavetgrad (15-17 mai 1919), où plus de
les massacres commis par les unités commandées 1 000 juifs furent sauvagement massacrés.
par les nombreux chefs de guerre mutinés, tel Un grand nombre d'autres atamans et chefs de
guerre s'illustrèrent dans la mise à sac des bourga-
des juives, les pillages, les viols et les massacres :
Zelenyi, Kozyr-Zyrka, Klimenko, Strouk, Grebenko,
Sokolovskii, Balak-Balakhovitch. Ce dernier sé-
vit principalement en Biélorussie comme supplé-

LES JUIFS FURENT AUSSI


VICTIMES D'UN ENNEMI PLUS
INATTENDU : CERTAINES
UNITÉS DE CAVALERIE DE
L'ARMÉE ROUGE

tif de l'armée polonaise, lors de la guerre soviéto-


polonaise de 1920. Les troupes polonaises, sous le
haut commandement du général Pilsudski, com-
mirent aussi un grand nombre de crimes de guerre
BAIN DE SANG EN UKRAINE à l'encontre de la population civile juive, principa-
Après la révolution de Février, l'Ukraine fut brièvement indépendante lement en Biélorussie, mais aussi en Ukraine.
jusqu'en 1920. Mais ce territoire, envahi d'abord par les Allemands,
devint à leur retrait un véritable champ de bataille entre l'Armée rouge Les juifs furent aussi victimes d'un quatrième
et les forces de l'Entente. Ce contexte chaotique favorisa un ennemi, plus inattendu : certaines unités de l'Ar-
déchaînement de violences antijuives ; 78 % des pogroms de 1917 à mée rouge, tout particulièrement celles de la cé-
1921 s'y déroulèrent. Semion Petlioura- chef militaire de la République lèbre Fe armée de cavalerie dirigée par le général
ukrainienne indépendante (au centre)- édicta toute une série de Boudienny. Composées à plus de 90 % de pay-
proclamations réprouvant les pogroms, mais les massacres commis par
son armée furent eux aussi considérables. Les officiers de l'armée sans, russes pour la plupart, les unités de la 6e di-
ukrainienne disposaient d'une très large autonomie au sein d'une armée vision perpétrèrent toute une série de pogroms
hétéroclite où la chaîne de commandement était particulièrement lâche. lors de leur retraite devant l'armée polonaise en
Aujourd'hui encore, plus de quatre-vingts ans après l'assassinat, à Paris, septembre-octobre 1920. L'écrivain Isaac Babel a
en mai 1926, de Semion Petlioura par Shalom Schwartz bard, un juif de
Bessarabie désireux de « venger , les victimes des pogroms perpétrés par superbement rendu compte, dans son recueil de
les Ukrainiens en 1919-1920, les débats restent vifs entre les historiens récits La Cavalerie rouge, du contexte dans lequel se
sur le degré d'implication et de responsabilité du chef militaire. N. W. déroulèrent ces pogroms et des raisons qui poussè-
rent des soldats de l'Armée rouge à s'y livrer. Il met

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l'HISTOIB(/73

MOTS CLÉS
ainsi en scène un simple soldat-paysan écrivant Cosaques
à sa mère : << Et qu'est-ce que nous avons vu dans A partir du XVJ• siècle, communautés de paysans
la ville de Maïkop ? Nous avons vu que l'arrière ne libre et armés organisés en démocraties militaires
sympathise pas du tout avec le front et que partout dont les chefs (atamans) étaient élus. Au
XVJIIe siècle, les cosaques devinrent des paysans-
c'est la trahison, que c'est rempli de youpins comme
soldats, membres de régiments spéciaux de
sous l'Ancien Régime. "Pour ces jeunes soldats à qui la cavalerie russe. La majorité se rangea aux
l'on avait fait croire qu'ils combattaient pour l'avè- côtés des Blancs après la révolution de 1917.
nement d'un monde nouveau, les juifs, avec leurs Elle fit l'objet d'une épuration de la part du régime
traditions, leur religion, faisaient d'évidence partie bolchevique en 1919-1920.
du <<vieux monde, à abattre. Les préjugés hérités
de l'Ancien Régime - sur la « propension à trahir , Pogrom
Terme d'origine russe signifiant « attaque,, ou
des juifs- faisaient bon ménage avec les rudiments « émeute ''· Sous le régime tsariste, mouvement
d'éducation politique assimilés par la troupe- tout populaire antisémite encouragé ou toléré
individu se livrant au commerce était un « exploi- par les autorités et accompagné de pillages et
teur,, toute personne affichant sa foi un« élément de tueries. Le mot désigne par extension un
violent soulèvement contre une communauté
rétrograde». Le juif concentrait tous les défauts. juive, puis " un soulèvement meurtrier avec pillage
Pour mettre fin à la vague de «pogroms rouges », suscité par le racisme».
le Comité militaire révolutionnaire de la ye armée
de cavalerie ordonna la dissolution et le désarme-
ment de plusieurs régiments ; près de 400 soldats des Protocoles des sages de Sion en allemand, sur
et officiers passèrent en cour martiale. La moitié l'idéologue nazi Alfred Rosenberg. Cette influence
d'entre eux furent exécutés. fut-elle aussi décisive que l'estime Richard Pipes
quand il écrit : << La rationalité de l'extermination
LE CHAÎNON MANQUANT? des juifs par les nazis leur a été apportée par les mi-
Le terme de pogrom est-il bien adéquat pour lieux de droite russes [ ... ], avec leur théorie qui liait
caractériser les massacres massifs des juifs du- les juifs au communisme [... ]. De la sorte la Shoah
rant les guerres civiles dans l'ex-empire tsariste? devint l'une des conséquences non anticipées et non
Entre les pogroms «traditionnels », perpétrés en programmées de la Révolution russe " ? On sait
temps de paix par une foule de « voisins , enhar- l'usage que l'historien Ernst Nolte fit de ce « fon-
die par la passivité - voire les encouragements - dement rationnel , pour avancer l'idée que le na-
des autorités locales, et certains massacres mas- zisme n'aurait été qu'une « réponse>> à la menace
sifs et systématiques mis en œuvre, au cours de la bolchevique sur la civilisation européenne. Si l'on
guerre civile, par des unités armées, convaincues part en quête des causalités, des conditions de réa-
de la nécessité et de la légitimité d'exterminer, lisation, des liens entre les événements décrits par
sur une base ethnique, des populations civiles les victimes elles-mêmes et l'extermination totale,
considérées comme ennemies, un seuil qualitatif deux décennies plus tard, des juifs d'Europe, un
de violence a été franchi. génocide qui débuta précisément dans ces mêmes
Les politiques mises en œuvre durant la Grande lieux, l'Ukraine occidentale et la Biélorussie, n'est-
Guerre (expulsions, déportations des juifs considé- il pas plus pertinent de voir avant tout dans les vio-
rés comme des« populations suspectes») ont évi- lences de masse et les crimes de guerre antisémites
demment rendu possible ce passage, cette trans- commis en 1918-1921 ce chaînon manquant, long-
gression. La brutalisation générée par cette« guerre temps oublié ou occulté, qui relie l'antijudaïsme
prolongée» de sept ans (1914-1921) d'une extra- « traditionnel >> des pogroms à la Shoah ? •
ordinaire violence, et qui singularise l'expérience
russe et soviétique, ne saurait cependant gommer
le fait que, dans cette mêlée sanglante, seuls les juifs POUR EN SAVOIR PLUS
furent massacrés parce qu'ils étaient juifs, indiffé- F. Furet, E. Nolte
remment de leur âge, de leur sexe ou de leur affilia- (correspondance), Fascisme
tion politique. Certes, l'antisémitisme ne fut jamais et communisme, Plon, 1998.
érigé en doctrine officielle du mouvement blanc ou P. Kenez, << Pogroms and White
Ideology in the Russian Civil
d'aucun autre mouvement combattant le bolche- War », J. Klier, S. Lambroza,
visme. Les massacres de juifs ne devinrent qu'une Pogroms: Anti-Jewish Violence
«habitude>>, un «réflexe», une «évidence,, aussi in Modern Russian History,
limpide que le signe d'égalité juif= bolchevique. Cambridge University Press,
Les guerres civiles russes firent ainsi le lit d'un my- 1992, pp. 296-316.
the aux conséquences dévastatrices. L. Mlliakova (dir.), Note
N. Werth (édition française), Le Livre des pogroms. S. W. Laqueur,
L'historien Walter Laqueur 5 a fort justement Antichambre d'un génocide. Ukraine, Russie, Russia and
souligné l'influence des milieux antisémites rus- Biélorussie, 1917-1922, Calmann-Lévy-Mémorial Germany, a
ses émigrés en Allemagne, et notamment de Fedor de la Shoah, 2010. Centuryof
Conflict, Londres,
Vinberg, un officier de l'Armée blanche d'origine R. Pipes, Russia Under the Bolshevik Regime, Weidenfeld and
allemande installé à Berlin, traducteur et éditeur 1919-1924, Londres, Fontana Press, 1995. Lincoln, 1965.

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