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Mohamed KARIM

Management
des finances publiques au Maroc :
Contexte actuel et évaluation

Dépôt légal

2006/1529

IMPRIMERIE EL MAARIF AL JADIDA- RABAT 2006


 Examiner les modalités pratiques d’exécution comptable de la dépense par les comptables
assignataires de la TGR ainsi que la tenue de comptabilité d’ordonnancement,
d’engagement et de comptabilité en derniers et en valeurs.

 Décrire et analyser les mécanismes du contrôle interne et externe à l’administration.

 Evaluer le feedback ayant existé entre les décisions de recettes et de dépenses lors de
l’exécution de la loi de finances du fait qu’en venu de la loi organique des finances, les
autorités publiques possèdent des marges de manœuvre pour changer le profil initial de la
loi de finances.
Préparation et adoption du projet du budget

Chapitre 1

Préparation et adoption du projet du budget


En matière de gestion des finances publiques, les rôles respectifs des pouvoirs exécutif, législatif et
judiciaire sont clairement définis : le Gouvernement prépare le projet de loi de finances qui est
examiné et voté par le Parlement. Ce dernier a un pouvoir d'amendement encadré par des dispositions
constitutionnelles (non-recevabilité d'amendements tendant à aggraver une charge publique ou à
diminuer une recette (article 51)). En cas de non vote par le Parlement dans les délais prescrits, le
Gouvernement a la possibilité, d'ouvrir par décret, les crédits nécessaires au fonctionnement des
services publics.

Avant le vote de la loi de finances et lors de sa discussion au niveau des commissions sectorielles du
Parlement, notamment au niveau de la Commission des Finances du Parlement au sein de ses deux
chambres, celle-ci fait l'objet de différentes questions, de demandes d'explications et de requêtes
émanant des députés.

Dans ce chapitre, nous présenterons dans une première section le processus de préparation du budget
et nous aborderons, dans une seconde section, les modalités de son adoption.

Section I

Préparation du projet du budget


Dans son article 32, la loi organique des finances précise que c'est le Ministre des Finances qui
prépare le projet de loi de finances, sous l'autorité du Premier Ministre. Le processus de préparation
du projet de budget fait intervenir l'ensemble des directions du Ministère des Finances, mais de façon
essentielle trois directions du ministère : la Direction des Etudes et des Prévisions Financières
(DEPF), la Direction du Trésor et des Finances Extérieures (DIFE) et la Direction du Budget (DB).

Ce processus, plus ou moins complexe, se déroule en deux phases prévues par le décret d'application
de la loi organique du 26 avril 1999 : (i) une première phase interne, durant laquelle se fait le cadrage
global du budget, fait intervenir les trois directions citées plus haut, (ii) la seconde phase, conduite

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sous la responsabilité de la Direction du Budget, permet la validation du projet du budget une fois
négocié par les départements ministériels.

I. Cadrage macro-économique, financier et budgétaire

Les cadrages macro-économique, financier et budgétaire du projet du budget se déroulent dans une
première phase, interne au Ministère des Finances, qui s'étale de janvier à mai.

(i) Cadrage macro-économique

Le cadrage macro-économique du projet du budget relève des missions de la DEPF et de la DTFE. La


DEPF est chargée d'élaborer des prévisions économiques du taux de croissance du PIB, du taux
d'inflation, du solde du compte courant de la balance des paiements et du prix du baril du pétrole
brut.... En outre, elle utilise des outils quantitatifs tels que la maquette de comptabilité sociale, les
simulations de chocs de politique économique, notamment budgétaire et fiscale. Elle effectue aussi la
prévision des récentes potentielles en les corrigeant de l'effet des politiques réelles de recouvrement
afin de mieux refléter la réalité de l'activation du recouvrement des créances fiscales et présente en
mai une esquisse économique et budgétaire qui servira de base au discours annuel du Premier
Ministre sur les orientations économiques et financières de l'Etat. Notons que la principale source
d'incertitude, en matière des prévisions de croissance économique demeure toujours la récolte
agricole, elle-même tributaire des conditions climatiques.

Pour réduire cette incertitude, des outils de prévision et de suivi des opérations budgétaires sont mis
en place. Les informations sur les recettes et les dépenses sont validées par les organismes collecteurs
dans le cadre des réunions tenues mensuellement au sein du Comité de Conjoncture Financière
(CCF). Soulignons que ce comité rassemble toutes les directions du Ministère des Finances et siège à
la Direction du Trésor et des Finances Extérieures (DTFE).

(ii) Cadrage financier

La DTFE est chargée de la gestion de la trésorerie et de la dette publique. Elle détermine la capacité
de financement du budget et participe à la détermination du déficit soutenable, en concertation avec la

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Préparation et adoption du projet du budget

DEPF, (en référence à un objectif de déficit, fixé à 3% du PIB au cours des dernières lois de finances)
et du taux d'endettement (en référence à un objectif à terme de 65% du PIB)1."

La DTFE contribue à l'évaluation des ressources d'emprunt nécessaires au financement du déficit


budgétaire et apprécie les conditions de mobilisation sur les marchés financiers nationaux et
internationaux. Elle prépare aussi le discours annuel du Ministre des Finances au Conseil de
Gouvernement sur la politique budgétaire et financière de l'année en cours et de l'année à venir.

La DTFE suit l'exécution du budget tout au long de l'année en assurant la collecte des informations de
dépenses et de recettes fournies par le réseau comptable de la TGR, ce qui lui permet d'établir le
tableau des charges et ressources du Trésor (édité chaque mois, avec 20 jours de décalage). Il s'agit
d'un tableau qui, en prévision, découle d'un reclassement par nature économique des opérations
inscrites en loi de finances et, en exécution, découle d'un reclassement des opérations exécutées chez
les comptables.

Ce document, présenté au Comité de Conjoncture Financière, constitue un outil de référence de suivi


de l'évolution réelle du déficit et du besoin de financement de l'année en cours, ce qui permet de
mieux éclairer les choix des décideurs pour l'année en cours et pour l'année à venir. La DTFE assure
également la gestion de la trésorerie et de la dette, de sorte qu'elle dispose, en première main, des
informations nécessaires pour le cadrage financier.

(iii) Cadrage budgétaire

La Direction du Budget assure le cadrage des dépenses budgétaires sous l'autorité du Ministre des
Finances et du Premier Ministre. Elle détermine les montants globaux de dépenses par grandes
masses (personnel, matériel et divers, investissement et dette). Ses outils d'information sur l'exécution
budgétaire, notamment les situations des postes budgétaires, des engagements et des

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Les pays membres de l'Union Européenne (UE) ont convenu des critères de convergence de Mastricht : un
déficit public de 3% du PIB et un encours de dette publique rapporté au PIB de 60%. Nous estimons qu'il
faudra préciser à ce niveau les contenus des grandeurs financières retenues en JE par rapport à nos finances
publiques. Le parallélisme n'a pas lieu d'être, au moins pour le moment, parce que le déficit dont on parie en
UE prend en compte toutes les opérations des entités du secteur public (voir partie II). Par contre, celui retenu
jusqu'à présent au Maroc est restreint au Budget de l'Etat. Aussi, les bases d'enregistrement ne sont pas les
mêmes. En France, par exemple, c'est le principe des droits constatés qui est adopté ; au Maroc, c'est le
principe d'e encaissement/décaissement

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ordonnancements de crédits, la rendent mieux placée pour estimer les besoins en dotations des
ministères en vue d'élaborer une première esquisse du projet de budget.

Ce projet fait l'objet, au préalable, de nombreux travaux préparatoires en comité budgétaire interne au
Ministère des Finances et, par la suite, d'une discussion en Conseil de Gouvernement, parfois en
plusieurs séances, avant d'aboutir à sa validation par tous les ministres.

Le Premier Ministre émet, vers le mois de juin, la lettre d'orientation pour la préparation du projet de
loi de finances. La lettre d'orientation constitue le document central en matière de préparation
budgétaire. Elle présente un panorama complet de la situation budgétaire, des orientations globales
(déficit maximum, niveau des recettes, des dépenses et d'endettement,...) et sectorielles (annonce des
secteurs prioritaires) arrêtées par le Gouvernement.

Sur la base de la lettre d'orientation, la Direction du Budget émet une circulaire à l'ensemble des
ministres. Cette circulaire, dite lettre de cadrage, fait référence aux orientations fixées dans la lettre
d'orientation et détermine les enveloppes de crédits pour chaque ministère, réparties entre créations
d'emplois, dépenses de personnel, dépenses de matériel et diverses, et dépenses d'investissement.

Pour garantir la fiabilité de la lettre de cadrage, la Direction du Budget veille à maintenir un lien
direct entre les prévisions de l'année suivante et les dernières réalisations connues de l'année en cours
et de l'année précédente.

La lettre de cadrage individualise aussi, au sein des dépenses de matériel, les crédits correspondant
aux dépenses obligatoires : eau, électricité, téléphone..., - bref, des dépenses qui sont
traditionnellement difficiles à contrôler.

II. Négociations budgétaires avec les ministères dépensiers

La phase de négociations s'étale.de mai à septembre et est menée sous la responsabilité de la


Direction du Budget. Cette dernière assure la conformité des demandes ministérielles à la lettre de
cadrage et encadre la procédure d’arbitrage.

La Direction du Budget organise et préside les commissions budgétaires au sein desquelles les
ministères déposent leurs demandes budgétaires, en référence à la lettre de cadrage. Généralement,
ces réunions interviennent au mois de juillet.

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Préparation et adoption du projet du budget

Les discussions avec les ministères peuvent conduire à de légères modifications dans la répartition
interne des crédits entre ministères sans qu'il y ait dépassement du plafond global des charges.

En cas de différend entre un ministère quelconque et le Ministère des Finances, une procédure
d'arbitrage auprès du Premier Ministre est prévue. Généralement, les arbitrages n'aboutissent qu'à des
modifications très marginales du fait que l'équilibre économique et financier est déjà quasiment fixé
durant la première phase de préparation du projet de budget.

Une fois les arbitrages rendus, la Direction du Budget prépare et coordonne l'ensemble du projet de
loi de finances en recettes et en dépenses ainsi que ses diverses annexes.

Le projet de loi de finances est ensuite soumis à l'approbation du Conseil de Gouvernement qui
l'adopte, souvent dans plusieurs séances, puis il est soumis à l'approbation du Conseil des Ministres
avant d'être déposé sur le bureau de l'une des deux chambres du Parlement pour examen et
approbation.

Les négociations budgétaires entre les ministères et la Direction du Budget ne commencent


véritablement qu'après réception par les ministres de la lettre de cadrage, qui fixe le plafond des
enveloppes, de sorte que les négociations portent essentiellement sur la répartition des enveloppes
que sur sa r sa détermination.

Par ailleurs, durant le processus de préparation du projet de budget plusieurs remarques pourront être
émises :

Premièrement, il semble que peu de ministères considèrent que cette procédure est non adéquate. Elle
a été instituée pour mettre un terme aux pratiques de négociations qui traînent en longueur sans
aboutir à des résultats définitifs et satisfaisants.

Deuxièmement, la détermination des opérations des projets est effectuée après notification des
enveloppes, et non avant. Les ministères sont tenus d'assurer une capacité de programmation interne
et de présenter à la Direction du Budget un projet établi sur ces bases, notamment pour
l'investissement. Certains ministères se rapprochent de cette configuration, notamment ceux qui
disposent de plans d'actions à moyen terme.

Troisièmement, l'absence de ciblage des crédits selon leur niveau d'utilisation, central ou
déconcentrée, constitue une autre faiblesse majeure de la programmation actuelle des crédits. La

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programmation budgétaire doit prendre -en compte le besoin en projets des services déconcentrés,
faute de quoi les crédits sont déterminés de manière normative, en termes d'enveloppe.

Quatrièmement, l'absence de cadre de programmation pluriannuelle du budget rend plus difficile la


négociation ascendante des crédits, les opérateurs n'ayant pas de visibilité suffisante sur les quelques
années à venir, tant au plan technique (les opérations ne sont pas inscrites dans une perspective
d'ensemble pluriannuelle qui liste les priorités, notamment pour l'investissement, et qui facilite les
choix) qu'au plan financier (le coût des opérations ne peut faire l'objet d'une visibilité suffisante. Elle
retarde donc les choix budgétaires.

Pour ces diverses raisons, une modernisation des procédures de préparation, de négociation et de
programmation des crédits budgétaires s'impose. A cet effet, les autorités publiques ont entrepris, en
liaison avec la Banque Mondiale et l'Union Européenne, un vaste chantier de réformes budgétaires.
Cette modernisation doit aussi couvrir le champ de la gestion budgétaire (la globalisation et la
contractualisation des crédits, les budgets de programmes et la gestion par les résultats ainsi que la
performance et la mise en place d'un Cadre de Dépenses à Moyen Terme (CDMT)).

L'organisation actuelle de négociation et de programmation des crédits est en cours de modernisation.


A moyen terme, cette procédure tend vers une programmation des crédits plus élaborée. Elle vise à
déterminer, en amont, les opérations et projets qui sous-tendent les crédits, la destination centrale ou
déconcentrée des crédits au niveau de leur utilisation et l'intégration des crédits dans un cadre de
programmation pluriannuelle de la préparation du budget.

Une telle organisation présenterait des fondements solides pour bâtir une procédure de préparation
coordonnée du budget et du CDMT. Toutefois, le développement d'un CDMT similaire aux modèles
les plus avancés demande du temps.

Par rapport à la phase de cadrage budgétaire actuelle, les travaux de projections porteront sur une
période triennale et les plafonds sectoriels seraient notifiés avec la lettre de cadrage.

Il faudra signaler aussi que la lettre de cadrage doit être en parfaite conformité avec le cadre de
dépenses déjà élaboré. Rappelons aussi que le choix a porté sur cinq ministères pilotes à l'occasion de
la préparation de la loi de finances pour l'année budgétaire 2007.

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Préparation et adoption du projet du budget

Section II

Adoption du projet de budget


Le budget est soumis, depuis la réforme constitutionnelle de 1996, au vote des deux chambres du
Parlement, dans des conditions identiques. Le délai d'adoption de 70 jours (60 jours avant la révision
constitutionnelle) donné aux deux chambres par la Constitution est un délai satisfaisant pour un
examen en profondeur des recettes et des crédits. Le Ministre des Finances présente le projet de loi de
finances, en séance plénière, devant une des deux chambres.

Le projet est examiné, par la suite, par les députés au sein de la Commission des Finances. Passés
trente jours, le même travail est refait au niveau de la seconde chambre avec examen du projet de
budget en Commission des Finances.

Parallèlement à l'examen du projet de loi de finances par la Commission des Finances, des
commissions spécialisées du Parlement procèdent à l'examen des budgets sectoriels, en présence des
ministres concernés. Le vote de ces budgets sectoriels ne peut cependant intervenir qu'après adoption
du projet de budget.

Concernant le vote du projet de budget, il est à signaler que (i) la seconde partie de la loi de finances
ne peut être mise à discussion devant une chambre du Parlement avant le vote de la première partie,
(ii) les dispositions de la loi de finances sont votées article par article, (iii) les évaluations de recettes
font l'objet d'un vote d'ensemble pour le Budget Général et d'un vote par catégorie de Comptes
Spéciaux du Trésor, (iv) les dépenses du Budget Général font l'objet d'un vote par titre et à l'intérieur
du même titre par chapitre et (v) les dépenses des Comptes Spéciaux du Trésor sont votées par
catégorie de comptes.

Si la première lecture n'a pas permis d'aboutir au vote d'un texte identique, le Gouvernement peut
déclarer l'urgence et convoquer la commission mixte paritaire qui dispose d'un délai de sept jours
pour aboutir à un texte consensuel que les deux chambres adoptent dans un délai de trois jours.

En cas de désaccord avec le Gouvernement, pour inconstitutionnalité du projet de loi de finances ou


de l'une de ses dispositions, ou de retard (ou rejet) dans l'adoption du projet budget, une clause de
sauvegarde est prévue par la Constitution dans son article 50 « ...le Gouvernement ouvre, par décret,
les crédits nécessaires à la marche des services publics et à l'exercice de leur mission, en fonction des

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propositions budgétaires soumises à approbation. Les recettes continuent à être perçues


conformément aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur les concernant à l'exception,
toutefois, des recettes dont la suppression est proposée dans le projet de loi de finances. Quant à
celles pour lesquelles ledit projet prévoit une diminution de taux, elles seront perçues au nouveau
taux ».

Cette disposition constitutionnelle permet au Gouvernement, en début d'année budgétaire, de disposer


des moyens financiers nécessaires à la marche des services publics et à l'exercice de leur mission en
attendant l'entrée en vigueur de la loi de finances. / Elle se traduit par l'adoption par le Gouvernement
de deux décrets, l'un autorisant la perception des recettes et l'autre portant sur l'ouverture des crédits
budgétaires. Si le désaccord persiste, le Gouvernement transmet le projet de loi à la chambre des
représentants qui se prononce à la majorité absolue des membres la composant.

Depuis l'avènement de la loi organique de 1998, ce délai a été respecté, mais dans le cadre d'une
limitation très stricte du droit d'amendement qui ne permet de modifier le budget que légèrement.

En effet, l'article 51 de la Constitution stipule que les parlementaires ne peuvent minorer les recettes
ni majorer les dépenses (sauf à en minorer d'autres). En pratique, le Gouvernement refuse très souvent
les amendements parlementaires pour ces motifs (déclarations d'irrecevabilité). Ce contrôle de
constitutionnalité est une garantie de conformité des lois des lois de finances à la loi organique.

La version de la loi de finances, adoptée par le Parlement et revêtue de la signature des présidents des
deux chambres, est transmise au Premier Ministre pour contreseing. Elle est ensuite promulguée par
dahir et publiée au bulletin officiel.

Par ailleurs, plusieurs documents officiels, cités en encadré 1.1, sont remis au Parlement lors du dépôt
du projet de loi de finances, ce qui exige beaucoup de travail de la part des directions concernées du
Ministère des Finances, notamment la Direction du Budget et de l'Institution Parlementaire.

En dehors des documents officiels, un volume non négligeable d'informations est transmis au
Parlement. Mais il s'agit de transmissions à la demande alors que bon nombre de ces informations
gagneraient, cependant, à être formalisées et mieux standardisées. Elles pourraient faire l'objet de
publications et fournies soit directement dans les documents officiels remis avec la loi de finances,
soit faire l'objet d'annexes nouvelles.

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Préparation et adoption du projet du budget

Encadré 1.1

Documents officiels remis au Parlement à l'occasion de la présentation du projet de loi de finances

 La note de présentation du projet de loi de finances qui fournit une explication complète du contexte
budgétaire global et une analyse des projets de budgets de chaque ministère et enfin des commentaires
se rapportant à chaque disposition fiscale du projet de loi de finances (Direction du Budget) :
 Le projet de loi de finances proprement dit avec généralement, une soixantaine d’articles et 10 tableaux
annexes relatifs aux crédits et aux recettes (coordination de la Direction de Budget):
 Le rapport économique et financier qui dresse un panorama complet de l'économie nationale et
internationale (Direction des Etudes et des Prévisions Financières):
 Le rapport sur l’activité des Services de l'Etat Gérés de Manière Autonome (Trésorerie Générale du
Royaume et Direction du Budget):
 Le rapport sur les Comptes Spéciaux du Trésor (Trésorerie Générale du Royaume, Direction du Trésor
et des Finances Extérieures et Direction du Budget) :
 Le rapport sur les dépenses fiscales remis pour la première fois avec le projet de la loi de finances 2005
(Direction Générale des Impôts).
 Le rapport sur les entreprises et les établissements publics (Direction des Entreprises publiques et de la
Privatisation) :
 Les morasses budgétaires de chaque ministère comprenant les crédits de fonctionnement (Direction du
Budget):
 Les morasses récapitulant tous les crédit d'investissement avec le détail des opérations pour l’ensemble
des ministères (Direction du Budget);
 Les morasses récapitulant tous les emplois budgétaires pour chaque ministère (Direction du Budget).

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Management des finances publiques au Maroc

Conclusion
Vu les insuffisances de programmation actuelle qui affectent l'efficacité de la dépense, il est urgent
d'achever la mise en place du nouveau dispositif budgétaire de contractualisation et de globalisation
des crédits déjà commencé en 2002.

Il faudrait également assurer les conditions nécessaires à la mise en œuvre d'une politique de
performance : définition préalable des objectifs de performance par les ordonnateurs et de leurs
conditions de réalisation (la globalisation, le système d'information, les indicateurs de mesure de la
performance, l'adaptation des modes de management et le développement d'une culture d'évaluation).

Enfin, il est utile de mettre en place un Cadre de Dépenses à Moyen Terme, outil permettant une
meilleure programmation pluriannuelle des dépenses publiques au lieu que ces dépenses soient
décidées en fonction de la disponibilité des recettes budgétaires. Ce cadre présente l'avantage de lisser
dans le temps les dépenses afférentes aux passifs latents.

Chapitre 2

Portée et limites de la présentation actuelle des supports


budgétaires
Le budget voté par le Parlement comprend toutes les composantes du Budget de l'Etat. En outre,
toutes les recettes encaissées sont destinées à couvrir toutes les charges de l'Etat en vertu du principe
de la non affectation des recettes aux dépenses. Toutefois, certaines recettes budgétaires, prévues dans
la loi de finances, peuvent être affectées à la couverture de certaines dépenses. Elles peuvent être
effectuées dans le cadre des budgets des Services de l'Etat Gérés de Manière Autonome, des Comptes
Spéciaux du Trésor ou sous forme de fonds de concours. Ces affectations de recettes à des dépenses
sont budgétisées et sont exécutées et contrôlées dans les mêmes conditions que le Budget Général.
Cette multitude de comptes est prévue par la loi organique des finances de 1998.

Dans ce chapitre, nous présenterons de façon succincte, dans une première section, la portée de la
présentation des supports budgétaires. La seconde section examinera les limites de la présentation
actuelle des comptes au niveau de la loi de finances de l'année.

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Portée et limites de la présentation actuelle des supports budgétaires

Section I

Portée de la présentation des supports budgétaires


La loi organique des finances de 1998 constitue la base légale instituant les supports budgétaires. Elle
prévoit quatre supports budgétaires différents qui sont le Budget Général de l'Etat (BGE), les Services
de l'Etat Gérés de Manière Autonome (SEGMA), les Comptes Spéciaux du Trésor (CST) et un
Budget Annexe (la Radio et Télévision Marocaine qui devient une société anonyme et sera, par
conséquent, supprimée du budget au titre de l'année budgétaire 2007). Ces comptes sont présentés
selon une logique de ventilation prévue par la loi organique des finances.

I. Budget Général de l'Etat

Le Budget Général de l'Etat constitue le budget des administrations et des départements ministériels y
compris les services déconcentrés, les services de la Primature, les trois hauts commissariats (le plan,
les anciens combattants et les eaux et forêts), la Cour Royale, les deux chambres du Parlement et les
juridictions financières.

Les comptes du Budget Général retracent les ressources et les crédits des départements ministériels et
des institutions. Les ressources sont présentées, par article, c'est-à-dire par ordonnateurs, tandis que
les dépenses sont ventilées selon trois catégories de dépenses présentées par titre : le titre 1 pour le
fonctionnement, le titre 2 pour l'investissement et le titre 3 pour les crédits réservés à la dette

Le budget de fonctionnement (titre 1) comprend quatre chapitres :

(i) Les dépenses de personnel : ce chapitre prend en charge la rémunération du personnel titulaire
(chaque département ministériel et institution dispose de ce chapitre) ;
(ii) Les dépenses de matériel et dépenses diverses: cette rubrique comprend les dépenses de matériels
au titre des moyens de travail des administrations et comprend notamment les carburants et lubrifiants,
le transport et les déplacements, l'entretien et la réparation, les locations, les bourses, les fournitures de
bureau, les dépenses au titre des redevances d'eau, d'électricité et des télécommunications et les
subventions de fonctionnement aux établissements publics, aux Services de l'Etat Gérés de Manière
Autonome et au Budget Annexe de la RTM (à disparaître du budget en 2007) qui couvrent en grande
partie les salaires du personnel de ces entités (chaque département ministériel et institution dispose de
ce chapitre);

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(iii) Les charges communes de fonctionnement : les dépenses prévues dans ce chapitre sont constituées
essentiellement de la part patronale devant être versée à la Caisse Marocaine de Retraite (CMR), à la
Caisse Nationale des Organismes de Prévoyance Sociale (CNOPS) et à la mutuelle des FAR, et du
soutien des prix de certains produits de base. Cette compensation couvre uniquement la compensation
des prix du sucre et la farine nationale de blé tendre et des produits pétroliers (ce chapitre est sous la
seule responsabilité du Ministère des Finances) ;

(iv) Le chapitre des dépenses imprévues et dotations provisionnelles : les crédits inscrit dans ce
chapitre sont des dotations budgétaires ouvertes pour faire face à des imprévus. Exemple, l'opération
de la promotion interne hors régime du quota, l'invasion acridienne, le séisme... (ce chapitre n'est dédié
à aucun ministère, il est sous la responsabilité de la Primature).

Le budget d'investissement (titre 2) comprend deux composantes


(i) Les budgets d'investissement des ministères : ces budgets tiennent compte des projets jugés
prioritaires dont ceux bénéficiant de financements extérieurs (infrastructure, agriculture, éducation,
santé,), des actions continues qui sont essentiellement des opérations d'entretien et de maintenance
des infrastructures et accessoirement des dépenses de fonctionnement dont notamment les salaires
d'occasionnels (chaque département ministériel et institution dispose de ce chapitre) ;
(ii) Les crédits disponibles au niveau du chapitre charges communes d'investissement couvrent les
transferts d'équipement aux établissements publics et aux SEGMA. Dans ce compte, sont pris en
charge les transferts effectués au profit des offices régionaux de mise en valeur agricole (ORMVA), de
l'Office National des Chemins de Fer (ONCF), du Centre National de l'Energie des Sciences et
Techniques Nucléaires... et les arriérés de terrains des administrations, le versement au profit du fonds
de promotion des investissements, la mise en jeu de la garantie de l'Etat, la couverture des risques de
change... (ce chapitre est sous la seule responsabilité du Ministère des Finances).

Le compte de la dette (titre 3) comprend deux chapitres.

(i) Un chapitre pour les intérêts et commissions de la dette publique dans lequel sont inscrits les
remboursements au titre des intérêts de la dette flottante et de la dette amortissable, que ce soit en
monnaie locale ou étrangère ;

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Portée et limites de la présentation actuelle des supports budgétaires

(ii) Un chapitre pour l'amortissement de la dette publique à moyen et long terme dans lequel sont
inscrits les crédits nécessaires au remboursement en capital de la dette publique d'une maturité
supérieure à 5 ans.
Notons que l'ordonnateur du compte de la dette est le Ministère des Finances et que le sous-
ordonnateur central est le Directeur du Trésor et des Finances Extérieures.

Soulignons que les crédits inscrits dans le Budget Général représentent 85% environ des crédits
totaux.

Rappelons aussi qu'en vertu du principe de l'universalité et de la non affectation, l'article 9 de la loi
organique des finances de 1998 stipule qu’« il est fait recettes d'un montant intégral des produits sans
contraction entre les recettes et les dépenses et l'ensemble des recettes assurent l'exécution de
l'ensemble des dépenses. Toutes les recettes et toutes les dépenses sont imputées au budget général ».
Cependant, des exceptions sont prévues au niveau de l'article 22 pour les SEGMA, les Comptes
Spéciaux du Trésor et les autres procédures comptables particulières.

II. Services de l'Etat Gérés de Manière Autonome

Dans le cadre du renforcement de la transparence budgétaire et en application des dispositions de la


loi organique des finances, les SEGMA constituent depuis l'année 2000 une composante à part entière
du Budget de l'Etat. Leurs recettes et leurs dépenses sont prévues par la loi de finances et sont exécuté
et contrôlées dans les mêmes conditions que celles appliquées aux autres opérations budgétaires.

En vue de conférer aux services publics érigés en SEGMA plus d'autonomie et de souplesse dans leur
gestion, le cadre juridique les régissant prévoit des dispositions spécifiques' notamment en matière de
report automatique de l'excédent de recettes dégagé au titre de l'exercice antérieur et de la possibilité
de relever le plafond des charges, chaque fois que les recettes propres dépassent les prévisions de la
loi de finances.

Les SEGMA constituent des services de l'Etat, sans personnalité morale mais dotés de ressources
propre. Ils reçoivent des subventions et bénéficient d'une certaine autonomie de gestion tels les
centres hospitaliers, les cités universitaires, certains services techniques des ministères. Il s'agit
parfois de services en voie de transformation en établissements publics, bien que la loi organique ne
l'annonce pas expressément.

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Management des finances publiques au Maroc

Ainsi, l'érection des services publics en SEGMA a pour objectif d'améliorer la qualité des prestations
rendues et d'instituer un système de tarification permettant le recouvrement d'une partie des coûts de
ces prestations.

Les crédits des SEGMA sont inscrits dans des comptes spécifiques présentés dans un état annexe au
projet de loi de finances (tableaux G et H répartis en dépenses d'exploitation et d'investissement). Les
créations de SEGMA doivent se limiter, en principe, aux seuls services qui peuvent justifier d'un
niveau de recettes propres pouvant couvrir une partie de leurs dépenses courantes, notamment les
salaires.

On en dénombre plus d'une centaine, tous rattachés à un ministère de tutelle. Leurs dépenses de
personnel restent rattachées au budget du ministère de tutelle et seules les dépenses de matériel et
d'investissement sont inscrites au SEGMA. Les crédits des SEGMA représentent 1% des crédits
totaux.

III. Comptes Spéciaux du Trésor

Les Comptes Spéciaux du Trésor visent, conformément aux dispositions de l'article 17 de la loi
organique des finances :

 « ...soit à décrire des opérations qui, en raison de leur spécialisation ou d'un lien étroit de cause à
effet réciproque entre la recette et la dépense, ne peuvent être commodément incluses dans le cadre
du budget général ;
 soit à décrire des opérations en conservant leur spécificité et en assurant leur continuité d'une
année budgétaire sur l'autre
 soit à garder traces, sans distinction d'année budgétaire, d'opérations qui se poursuivent pendant
plus d'une année...».

Par ailleurs, en vertu des dispositions de l'article 18 de la loi organique des finances, les Comptes
Spéciaux du Trésor sont créés, modifiés et supprimés par la loi de finances qui prévoit leurs plafonds
de ressources et fixe le montant maximum des dépenses qui peuvent y être imputées.

Les crédits des Comptes Spéciaux du Trésor, regroupés autour de plusieurs types de comptes, sont des
dotations budgétaires ouvertes en dépenses et en recettes. Généralement, les dépenses ne peuvent être
effectuées qu'à hauteur des récentes (les soldes des comptes d'affectation spéciale et des comptes de

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Portée et limites de la présentation actuelle des supports budgétaires

dépenses sur dotation sont nuls). Soulignons que la masse de leurs crédits représente environ 13% des
crédits totaux.

Au titre de la loi de finances 2006, les Comptes Spéciaux du Trésor n'ayant pas été mouvementés
pendant plusieurs années ont été supprimés et leur nombre est ramené actuellement à 78 comptes,
contre plus de 150 comptes une année auparavant.

Les Comptes Spéciaux du Trésor comprennent cinq grandes catégories selon l'article 19 de la loi
organique des finances :

 Comptes d'affectation spéciale

Ces comptes retracent les recettes affectées au financement d'une catégorie déterminée de dépenses et
l'emploi donné à ces recettes.

 Comptes d'adhésion aux organismes internationaux

Ils décrivent les versements et les remboursements au titre de l'adhésion du Maroc aux organismes
internationaux. Ils retracent, au débit, le montant des souscriptions initiales et additionnelles et, au
crédit, les dotations budgétaires destinées à l'apurement des souscriptions.

 Comptes d'avances et de prêts

Ces comptes décrivent les versements faits par l'Etat sur les ressources du Trésor et accordés pour des
raisons d'intérêt public à des organismes relevant de l'Etat. La différence étant la durée de
remboursement qui est inférieure ou égale à 2 ans pour les avances et supérieure à 2 ans pour les prêts.

 Comptes d'opérations monétaires

Ils décrivent les mouvements de fonds d'origine monétaire qui sont de différentes natures. Au niveau
de cette catégorie, deux types d'opérations sont prises en compte :

(i) Les différences de change sur vente et achat de devise


(ii) Les opérations relatives aux contrats d'échange de taux d'intérêt des emprunts extérieurs et aux
contrats d'échange de devises des emprunts extérieurs.
 Comptes de dépenses sur dotations

Ces comptes retracent les opérations relatives à une catégorie spéciale de dépenses dont le
financement est assuré par des dotations budgétaires.

15
Management des finances publiques au Maroc

Par ailleurs, les opérations des Comptes Spéciaux du Trésor sont prévues, autorisées et exécutées
dans les mêmes conditions que les opérations du Budget Général. En outre, en vue de conférer aux
comptes d'affectation spéciale et aux comptes de dépenses sur dotations un cadre souple et simplifié
de gestion, des règles spécifiques ont été introduites à leur profit. Il s'agit de (i) la nécessité pour ces
deux catégories de comptes d'être créditeurs ou à solde nul et, pour cela, la réalisation des recettes au
titre de ces comptes doit précéder les dépenses, (ii) la possibilité, en cours d'exercice budgétaire, de
relever par arrêté du Ministre des Finances leurs plafonds de charges dans le cas où les recettes
réalisées excèdent les plafonds de ressources prévues par la loi de finances et (iii) la suppression des
comptes d'affectation spéciaux et des comptes de dépenses sur dotations non mouvementés pendant
trois ans.

Pour l'ensemble des Comptes Spéciaux du Trésor, la loi organique des finances prévoit la possibilité
de reporter d'année en année le solde de chaque compte.

Globalement, les comptes d'affectation spéciale sont financés par :

 Des recettes fiscales, des taxes spéciales ou des redevances affectées auxdits comptes par dérogation
au principe de la non affectation des ressources, conformément aux dispositions de l’article 9 de la loi
organique des finances ;
 Des contributions budgétaires ;
 Des produits de ventes et de services rendus tels que le produit de la vente de terrains du domaine
privé de l'Etat affecté au Fonds de réemploi domanial ;
 D'autres recettes tels que les dons, les contributions du Fonds Hassan II pour le Développement
Economique et Social et les versements des collectivités locales.

Par ailleurs, sans nous livrer à une présentation exhaustive de tous les Comptes Spéciaux du Trésor,
nous présenterons dans ce qui suit les comptes d'affectation spéciale les plus importants eu égard à la
masse des recettes et des dépenses qu'ils gèrent.

Part des collectivités locales dans le produit de la TVA

L'article 65 de la loi n° 30-85 relative à la TVA stipule que « le produit de la taxe est pris en recette, on
budget général de l'Etat et dans une proportion ne pouvant être inférieure à 30% et qui sera fixé par

16
Portée et limites de la présentation actuelle des supports budgétaires

les lois de finances, aux budgets des collectivités locales après diduction, sur le produit de la taxe
perçue à l'intérieur, des remboursements et des restitutions prévues par la présente loi »

Afin de permettre la comptabilisation de ce transfert de TVA affecté su collectivités locales, la loi de


finances pour l'année budgétaire 1986 avait créé un compte d'affectation spéciale dénommé « Part des
collectivités locales dans le produit de la TVA » dont l'ordonnateur central est le Ministre de
l’Intérieur.
En ressources, ce compte retrace :
La part du produit de la TVA affectée aux collectivités locales :
Le produit des remboursements de l'avance au profit des fonctionnaires et des agents des collectivités
locales pour l'accès à la propriété de logements sociaux.

L'ensemble des recettes précitées est destiné à couverture au financement des dépenses incombant
aux collectivités locales telles que (i) le fonctionnement des projets d'investissement et (ii) la
couverture des dépenses de fonctionnement des collectivités locales.

 Fonds spécial relatif au produit des parts d’impôts affectées aux régions

Ce Fonds a été institué par la loi de finances au titre de l'exercice 1999/2000 et à pour ordonnateur
central est le Ministre de l'Intérieur. Il enregistre dans son crédit une part du produit de l'impôt
général sur le revenu (1%) et de l'impôt sur les sociétés (1%) revenant au Budget de l'Etat.

Outre les ressources propres des régions, les produits issus de la fiscalité, figurant au crédit du
compte, sont destinés à financer leurs dépenses de fonctionnement ainsi que leurs programmes
d'actions portant notamment sur la protection de l'environnement, la formation professionnelle, la
promotion du sport et la réalisation d'opérations d'équipements scolaires, de santé de base et d'intérêt
régional et local.

 Fonds spécial routier

Ce Fonds, créé par la loi de finances au titre de l'année 1959, vise la comptabilisation des opérations
afférentes à la construction, la réhabilitation, l'entretien du réseau routier classé, ainsi qu'au
désenclavement du monde rural.

Les ressources affectées audit Fonds sont constituées notamment du :

 Produit de la taxe à l’essieu ;

17
Management des finances publiques au Maroc

 Produit de la taxe additionnelle d'immatriculation sur les véhicules automobiles ;


 Produit du prélèvement sur les quotités de taxes intérieures de consommation applicables à
certains produits pétroliers :
Supercarburants : 50 DH/hectolitre ;
Essence ordinaire : 50 DH/hectolitre ;
Gasoil : 32,5 DH/hectolitre.

Les ressources collectées par le Fonds sont destinées à financer divers projets comme : (i) la
construction et l'aménagement de routes rurales et l'ouverture de pistes, (ii) la maintenance, l'entretien
courant, la réparation des dégâts des crues et autres et (iii) la réalisation des études techniques.

 Fonds de soutien des prix de certains produits alimentaires

Ce compte a été institué à partir du 1er janvier 1995 et le Ministre des Finances est son ordonnateur
central. Il retrace les opérations liées à la protection de certains produits agricoles de base instituée
par la loi n° 13-89 relative au commerce extérieur, sous forme de prélèvement à l'importation égal à
la différence entre le prix de référence et le prix réel à l'importation. Les ressources mobilisées dans
ce cadre sont destinées à contribuer au financement du système de compensation du sucre et de la
farine nationale à l'effet de stabiliser leurs prix de vente.

Ce compte retrace au crédit :

 La part supérieure à 27,5% de la valeur en douane au titre du droit d'importation perçu sur le sucre
de betterave à sucre, et/ou de la canne à sucre, sous toutes ses formes tant que ces produits
demeurent compensés ;
 La part supérieure à 17,5% de la valeur en douane au titre de droit d'importation perçu sur le blé
tendre tant que la farine nationale de blé tendre demeure compensée ;
 La part supérieure à 50% de la valeur en douane au titre du droit d'importation perçu sur les
dérivés du blé tendre tant que la farine nationale de blé tendre demeure compensée.

Au débit, ce compte retrace les versements au profit de la Caisse de Compensation des recettes
perçues au titre du sucre de betterave à sucre, et/ou de cannes à sucre, sous toutes ses formes, ainsi
que les versements au profit du budget de l'Office National Interprofessionnel des Céréales et des
Légumineuses (ONICL) des recettes perçues au titre du blé tendre et de ses dérivés.

18
Portée et limites de la présentation actuelle des supports budgétaires

Ces versements contribuent à la compensation du :

 Prix du sucre, à travers l'octroi d'une subvention forfaitaire de 2000 DH/T du sucre vendu, servie
aux sucreries raffineries correspondant à une charge annuelle de 2 000 MDH. L'objectif de cette
subvention est de maintenir les prix à des niveaux supportables par le consommateur.
 Prix de la farine nationale pour un contingent de 10 MQx institué depuis août 1998. La
subvention unitaire allouée dans ce cadre est de 143,38 DH/Ql

Le soutien de la farine nationale consiste à compenser la différence entre son prix de revient et le prix de
vente, fixé à un niveau de l'ordre de 200 DH/Ql ce, dans la limite d'un quota de 20 MQx

Il est à signaler que la réforme de la filière oléagineuse entrée en vigueur le 1er novembre 2000, s'est
traduite par l'abandon du système de protection par les équivalents tarifaires et son remplacement par
des droits d'importation classiques de 2,5% pour les graines oléagineuses et les huiles brutes et de 25 %
pour les huiles raffinées et les tourteaux.

 Fonds de développement agricole

En vue d'intensifier la production agricole, le Fonds de développement agricole a été créé par la loi de
finances pour l'année 1986. L'ordonnateur central est le Ministre de l'Agriculture.

Les ressources du Fonds sont constituées des :

 Subventions budgétaires ;
 Droits d'importation perçus sur le lait, les viandes, les céréales autres que le blé tendre et leurs
dérivés et produits du prélèvement sur les quotités de la TIC applicables sur les supers carburants,
l'essence ordinaire et le gasoil ;
 Versements effectués par le Fonds national forestier pour l'octroi de subventions au titre des
opérations de reboisement.

Les dépenses du Fonds sont constituées des :

 Versements au Crédit Agricole du Maroc (CAM) au titre de l'octroi de subventions prévues par le
code des investissements agricoles et des primes à l’investissement ;
 Subventions pour la réalisation d'actions de développement agricole et pour le financement du
Programme National d'Irrigation (PNI) ;

19
Management des finances publiques au Maroc

 Versements au Fonds de calamités naturelles institué pour la prise en charge totale ou partielle des
dépenses afférentes au rééchelonnement ou l'allégement des dettes des agriculteurs, à la lutte
antiacridienne et à la contribution au système d'assurance de la production céréalière contre les effets
de la sécheresse ;
 Dépenses afférentes à des opérations d'aménagement foncier des terres agricoles et à la
distribution de plants fruitiers.

Rappelons qu'un bon nombre de Comptes Spéciaux du Trésor figuraient dans les lois de finances des
années antérieures sans qu'ils soient mouvementés pendant plusieurs années. En 2006, ce nombre a été
réduit parce que la multitude de comptes complexifie l'analyse des opérations retracées dans ces comptes
du fait de l'existence de transferts internes entre eux ou entre ces comptes et le Budget Général de l'Etat.

IV. Budgets Annexes


De façon générale, les crédits des Budgets Annexes regroupent les crédits et les recettes des services de
l'Eut à caractère industriel et commercial. Le Budget Annexe constitue un vrai budget autonome avec une
section d'exploitation et d'investissement. Un seul Budget Annexe figure encore en loi de finances 2006,
celui de la Radio et Télévision Marocaine qui est transformée en société anonyme.

Section II

Limites de la présentation des supports budgétaires


La présentation des crédits budgétaires dans ces différents comptes trouve son fondement dans la loi
organique et a été validée par le Conseil Constitutionnel. La loi organique a prévu des exceptions au
principe d'universalité, selon lequel il est fait masse intégrale du montant des recettes et des dépenses qui
répondent à une logique de gestion individualisée, soit à caractère comptable (CST), soit à caractère
économique et commercial (SEGMA) :

L'examen de la présentation actuelle du budget fait ressortir plusieurs insuffisances qui sont :

 Le nombre des Comptes Spéciaux du Trésor est jugé trop élevé et complexifie inutilement
la lecture de la loi de finances. Il faudra poursuivre l'action de la résorption des Comptes Spéciaux du
Trésor notamment, ceux qui ne sont pas mouvementés pendant plusieurs années. Concernant les

20
Portée et limites de la présentation actuelle des supports budgétaires

SEGMA, il conviendrait de ne plus créer de SEGMA artificiels et de limiter les créations aux entités
qui dégagent des recettes propres substantielles ;

 La présentation diversifiée en quatre types de supports budgétaires aboutit, certes, à un


solde unique du budget au sein du tableau d'équilibre financier, véritable cœur de la loi de finances.
En effet, dans l'ensemble le solde du budget procède de l'ensemble des recettes et des dépenses qui
sont retracées dans la loi de finances. Cependant, cette présentation ne permet pas de distinguer le
solde au-dessus de la ligne et celui en dessous de la ligne (voir chapitre 7) ;

 Les garanties de l'Etat correspondant à des obligations contractées vis-à- vis d'organismes,
sous forme de garanties d'emprunts notamment, et qui peuvent être honorées en cas de défaillance des
bénéficiaires, donnent lieu à des inscriptions de crédits au niveau du chapitre des charges communes
d'investissement. L'enregistrement de ces garanties, n'apparaissant pas dans la loi de finances,
nécessite un traitement comptable de type patrimonial qui, pour le moment, n'est pas mis en œuvre
tant qu'une comptabilité patrimoniale n'est pas adoptée et tenue ;

 La loi organique des finances, dans son article 25, prescrit une présentation administrative
des recettes qui n'apporte pas d'informations sur le plan de l'analyse économique. Ainsi, les recettes
du Budget Général de l'Etat sont présentées (tableau A de la loi de finances) selon une classification
purement administrative, par service collecteur, et non selon une classification. Par nature
économique, plus utile.

Un tableau trop agrégé présentant les recettes selon une classification économique figure dans la note de
présentation du budget, mais il s'agit d'un tableau trop agrégé. Un autre tableau, celui des charges et
ressources du Trésor constitue un outil analytique pertinent qui présente les recettes et les dépenses selon
une classification par nature économique. Il pourrait être élaboré à partir de la loi de finances et des
tableaux annexes simplifiés de la note de présentation du budget. Il est à noter que rien dans la loi
organique n'interdit qu'il soit intégré dans la liste des annexes officielles de la loi de finances. Signalons
que ce tableau est obtenu par un reclassement, qui n'est pas aisé, de toutes les opérations inscrites au
niveau de la loi de finances par nature économique (voir chapitre 7) ;

L'insuffisance majeure de la présentation des recettes tient à l'absence de chainage entre les dernières
réalisations de recettes connues, les prévisions actualisées pour l'année en cours et les prévisions de

21
Management des finances publiques au Maroc

recettes inscrites au prochain budget, si bien qu'il est très difficile d'évaluer objectivement le réalisme des
prévisions des recettes ;

Les crédits de chaque ministère sont retracés dans le corps de la loi de finances dans des états annexes (le
tableau B pour les dépenses de fonctionnement et le tableau C pour les dépenses d'investissement). Il
s'agit d'états trop agrégés qui ne donnent pas une vision d'ensemble de chaque budget. Il est vrai que la
composition et le détail des crédits des budgets se trouvent dans des morasses budgétaires propres à
chaque ministère, ou communes à tous les ministères, mais toujours pas facile à examiner ;

La présentation des crédits de chaque ministère se fait en trois morasses différentes : une première
morasse propre à chaque ministère pour les crédits de fonctionnement y compris les crédits de personnel ;
une seconde morasse commune à tous les ministères pour les investissements et une troisième morasse
pour les emplois de chaque ministère et propre à chacun d'entre eux. Cette séparation des morasses porte
atteinte à une vision d'ensemble de l'action d'un ministère. Ainsi, les crédits de personnel et les effectifs
correspondants relèvent de deux morasses distinctes alors qu'ils sont indissociables. L'investissement et le
fonctionnement sont contenus dans deux morasses différentes, dont l'une est commune à tous les
ministères.

Conclusion
Malgré une grande dispersion des comptes et malgré les insuffisances dans la présentation des supports
budgétaires, le budget dans son ensemble est assez exhaustif. Cette dispersion apparente des crédits et
recettes ne tronque pas le résultat d'ensemble du budget.

Quant aux Comptes Spéciaux du Trésor, les autorités publiques ont rationalisé leur présentation et ont
réduit leur nombre par la suppression des comptes qui n'étaient pas mouvementés pendant plusieurs
années. On assiste également à la suppression de tous les budgets annexes et actuellement à la
suppression du seul Budget Annexe restant, celui de la Radio et Télévision Marocain

La présentation des supports budgétaires gagnerait à être mieux formalisée et mieux standardisée pour
une meilleure accessibilité des chercheurs et des politiciens. Aussi est-il exigé de tout acteur intéressé par
l'examen de la loi de finances de déployer un effort et d'avoir un minimum de connaissances en la matière
pour examiner en profondeur les tableaux annexés au budget.

22
Exécution budgétaire des crédits inscrits en loi de finances

Chapitre 3

Exécution budgétaire des crédits inscrits en loi de finances


Au sein du Ministère des Finances, la Direction du Budget (DB) et le Contrôle des Engagements de
Dépenses (CED) jouent un rôle d'encadrement des modifications en exécution du profil initial de la
loi de finances.

La Direction du Budget se charge de l'exécution budgétaire de la loi de finances puisque toutes les
procédures sont soit initiées par elle, lorsqu'elles résultent d'une initiative du Ministre des Finances
(lois de finances rectificatives, décrets d'ouverture de crédits supplémentaires, reports...), soit
soumises à son accord préalable lorsqu'elles résultent d'une initiative d'un ministre dépensier en cas
de mouvements de crédits, ou de mouvements concernant les emplois.

Le CED joue lui aussi un rôle crucial dans la maîtrise de la gestion budgétaire puisqu'il exerce un
contrôle a priori2 en s'assurant du respect d'un certain nombre de règles dont notamment l'imputation
de la dépense (elle contraint l’ordonnateur à respecter l'imputation des dépenses sur les dotations
inscrites en loi de finances) et la disponibilité des crédits. Autrement dit, l'ordonnateur ne peut
procéder aux mouvements de crédits nécessaires s'il ne dispose pas des crédits suffisants pour un
besoin déterminé.

Du côté des ordonnateurs, des marges de manœuvre sont prévues par la loi organique pour modifier
les crédits initiaux votés par le Parlement. Ces marges sont limitées par la loi organique des finances :
elles font l'objet des articles 41 à 46. En fait, ces marges sont destinées à apporter un juste équilibre
entre la nécessaire flexibilité qui doit être laissée aux gestionnaires de crédits et le respect de
l'autorisation parlementaire.

2
Rappelons à ce niveau qu'en février 2006, les services du CED ont été fusionnés avec ceux de la
TGR dans la perspective de migrer vers un contrôle expost. Le contrôle a priori sera modulé en
fonction de l'état des systèmes d'information et du contrôle interne des ordonnateurs.

23
Management des finances publiques au Maroc

Mais toujours est-il que ces marges peuvent aboutir à une « dénaturation » du profil initial de la loi de
finances. C’est pour cette raison qu'un projet de loi de finances rectificative doit être présenté pour
adoption en vue d'ajuster les dépenses et les recettes, au cas où le changement du profil risque de
dépasser les limites acceptables. Dans la pratique marocaine, la dernière loi de finances rectificative a
été présentée en 1990. (2008)

A notre avis, à défaut de présentation d'une loi de finances rectificative, une situation actualisée
d'exécution de la loi de finances initiale peut être présentée au Parlement pour son information et son
suivi.

Pour examiner ces divers aspects, le présent chapitre sera organisé comme suit: La première section
présentera les moyens d'ordre réglementaire et législatif pour modifier en gestion la répartition des
crédits votés en loi de finances initiale. La seconde section portera sur les modalités d'exécution du
chapitre du personnel de tous les ministères.

Section I

Moyens d'ordre réglementaire et législatif


Les moyens d'ordre réglementaire sont énoncés aux articles 41 à 46 de la loi organique des finances
de 1998 permettant aux ordonnateurs centraux (les ministres) et les sous-ordonnateurs centraux de
modifier en cours d'exécution la répartition des crédits fixée dans la loi de finances initiale.

Ainsi, dans son article 41, la loi organique des finances stipule que « les dépenses ne peuvent être
engagées, ordonnancées et payées que dans la limite de crédits ouverts ». Il en découle que les
crédits sont par principe limitatifs, sauf exception prévue pue par cette loi et qui se rapporte aux
dépenses de personnel et de ceux de la dette. Ces deux catégories de dépenses peuvent s'imputer
au-delà de la limite inscrite aux rubriques qui les concernent dans la loi de finances.

Concernant les créations de postes budgétaires, leur niveau fixé dans la loi de finances ne peut pas
être dépassé, ce qui évite toute augmentation incontrôlée des effectifs réels en exécution, et leur
dépassement en masse sont encadrés par des mesures statutaires prises après la date d'entrée en
vigueur du budget. Les mesures décidées en cours d'année requièrent des autorisations particulières à

24
Exécution budgétaire des crédits inscrits en loi de finances

ce sujet. La suite de l'article 41 prévoit que « …en cas de dépassement se rapportant à la


rémunération précitée, seules sont prises en compte les dispositions statutaires régissant les
personnels applicables à la date d'entrée en vigueur de la loi de finances ». En outre, d'après l’article
44 de la loi organique des finances « Les créations et suppressions d'emplois me peuvent résulter que
de disparitions prévues dans la loi de finances ».

La Direction du Budget et le CED veillent au respect du tableau des emplois afin que l'effectif réel ne
dépasse pas l'effectif théorique du nombre de postes.

Les dépenses d'investissements font l'objet de l'article 46 qui interdit leur report d'une année à l'autre
sauf exception prévue par la loi organique qui prévoit que « toutefois, et sauf dispositions contraires
priver par la loi de finances, les crédits de paiement disponibles au titre des dépenses
d'investissement sont reportés selon les modalités fixées par voit réglementaire. Ils s'ajoutent aux
crédits de paiement ouverts par la loi de finances de l'année ». De même, l'article 45 stipule que les
dépenses d'investissement peuvent être abaissées, par voie réglementaire, lorsque la conjoncture
économique et financière l'exige, « ... le gouvernement peut en cours d'année budgétaire surseoir à
l'exécution de certaines dépenses d'investissement. Les commissions parlementaires compétentes en
sont informées ».

Au sujet des dépenses imprévues, des dotations provisionnelles non affectées et soumises à décret
peuvent être utilisées. La loi organique des finances prévoit dans son article 42 qu’ « un chapitre
spécial qui n'est affecté à aucun service est ouvert pour les dépenses imprévues et les dotations
provisionnelles en ce qui concerne le titre 1 du budget général ». L'objectif est d'assurer, par un crédit
supplémentaire, la couverture des besoins prioritaires (urgents ou non prévus) lors de la
programmation budgétaire, sans que cela se traduise par une aggravation des charges du budget.

Signalons qu'en cas de nécessité impérieuse d'intérêt national, l'article 43 stipule que « ... des crédits
supplémentaires peuvent être ouverts par décret en cours d'année en application de l'article 45 de la
Constitution » sous réserve d'en informer le Parlement.

Concernant les crédits ouverts par voie de fonds de concours, l'article 22 de la loi organique de
finances prévoit que les fonds versés par des personnes morales ou physiques pour concourir avec
ceux de l'Etat à des dépenses d'intérêt public ainsi que le produit des dons et legs, sont directement
portés en recettes du Budget de l'Etat, selon le cas, au Budget Général de l'Etat, aux budgets des

25
Management des finances publiques au Maroc

Services de l'Etat Gérés de Manière Autonome ou aux Comptes Spéciaux du Trésor. Un crédit de
même montant est porté au niveau du budget ministériel concerné. Ces crédits additionnels n'affectent
pas le résultat du budget puisque les dotations budgétaires sont majorées par des crédits additionnels à
hauteur des recettes. Toutefois, l'affectation des fonds de concours et les modalités de leur utilisation
doivent être conformes à ce qui est convenu avec la partie versante ou le donateur.

Par ailleurs, afin de garantir une meilleure exécution budgétaire axée sur l'efficacité de la dépense
beaucoup plus que sur la consommation des crédits, la loi organique des finances prévoit la
possibilité pour les gestionnaires des crédits de procéder à des mouvements de crédits entre les
dotations budgétaires (entre lignes d'un même paragraphe). Les mouvements de crédits ne sont pas
autorisés entre crédits de nature différente, notamment entre crédits de personnel et de matériel. Ces
mouvements de crédits ne sont pas limités en montant pour le fonctionnement, par contre, ils sont
limités à 10% des dotations initiales pour l'investissement et ils sont fréquemment utilisés.

Tableau 3.1. Passage des autorisations des dépenses de la loi de finances initiale ace crédits totaux
disponibles en gestion (fonctionnement et investissement)

1. Crédits de la loi de finances

(+) reports de crédits précédents

(+) fond de concours

(+) crédits exceptionnels

(+/-) mouvements de crédits

2. Moyens disponibles

3. Crédits utilisés (ou ordonnancées)

L'examen sur plusieurs années des dépenses de fonctionnement fait révéler une exécution conforme à la
prévision sauf en 1995 et 2002, deux années de sécheresse, avec un dépassement important par rapport au
budget initial. Pour ce qui est de l'investissement, les mouvements de crédits sont généralement inférieurs

à 10% conformément à la loi organique et les taux d'engagement sont très élevés, supérieurs à 90%; le
taux d'ordonnancement est inférieur ou égal à 70%.

26
Exécution budgétaire des crédits inscrits en loi de finances

Il est à rappeler que les ouvertures et les mouvements de crédits sont effectués en vertu de textes officiels
(décisions, arrêtés ou décrets) et que seuls les décrets portant ouverture de crédits supplémentaires en
vertu de l'article 43 de la loi organique des finances sont publiés au bulletin officiel et présentés à la
ratification du Parlement. Hormis ces mouvements de crédits soumis à décret, il n'est donc pas possible
de suivre tout au long de l'année budgétaire l'évolution des mouvements et des ouvertures additionnelles
de crédits.

Notons par ailleurs que, outre les modifications des crédits prévues par voie réglementaire, d'autres le
sont par voie législative et permettent de modifier les crédits initiaux. A cet égard, seules les lois de
finances rectificatives les permettent en vertu de l'article 4 de la loi organique des finances, et sous
certaines conditions, la loi de règlement.

Une loi de finances rectificative permet d'ajuster le budget initial en recettes et en dépenses aux besoins
nés de l'exécution de la loi de finances initiale. A ce titre, elle constitue un acte législatif précieux qui
fournit, avant la clôture définitive d'un exercice, un état actualisé des crédits et de consommation de
crédits. Elle synthétise les mouvements sur les crédits initiaux difficiles à retrouver, sauf à dépouiller tous
les textes relatifs aux mouvements de crédits de l'année, et qui de toutes les façons ne sont pas publiés au
bulletin officiel.

Il semble que les autorités publiques aient évité à plusieurs reprises de présenter des lois de finances
rectificatives sous argumentation qu'il n'y avait pas eu lieu de modification de grande envergure du
scénario économique initial. Cependant, cette argumentation reste discutable et minimise l'apport des lois
de finances rectificatives en matière de gestion budgétaire.

Il est vrai aussi que les autorités publiques se contentent d'un travail d'actualisation de la loi de finances
initiale en cours d'année. Cependant, ce travail n'est pas porté à l'information des parlementaires pour des
raisons de souplesse, de gain de temps et d'économie d'efforts.

Néanmoins, une seule fois, la présentation d'un projet de loi de finances rectificative aurait été justifiée ;
c'est précisément le cas lorsque l'opération de la privatisation de 35% du capital de Maroc Télécom, qui a
rapporté 23,5 MMDH, a été reportée de 2000 à 2001. Les recettes n'ont pas été encaissées l'année même,
et les dépenses ont connu un rythme d'engagement élevé sans liaison avec le report de l'opération. La
conséquence immédiate a été l'accumulation des arriérés de paiement à la TGR à fin décembre 2000, de

27
Management des finances publiques au Maroc

plus de 12 MMDH. L'accumulation des arriérés a pénalisé la trésorerie de la petite et moyenne entreprise,
créatrice de richesse et d'emploi.

D'autres occasions sont à rappeler ; ce sont des moments d'encaissement des plus-values importantes au
titre des recettes fiscales (dépassement des recevoir fiscales aux prévisions initiales). Il a fallu dans ce cas
remettre la loi de finances au Parlement pour rediscuter de la répartition de ces plus-values.

Par ailleurs, la loi de règlement, état d'exécution définitive des recettes et des dépenses, vise des objectifs
tout à fait différents de la loi de finances rectificative. L'article 47 de la loi organique des finances prévoit
son dépôt au Parlement « au plus tard à la fin de la deuxième année qui soit l'année d'exécution de la loi
de finances »

Le délai de 2 ans1, déjà long, est loin d'être respecté pour des raisons techniques tenant essentiellement
aux difficultés de rapprochement des comptabilités des ordonnateurs, des contrôleurs et des comptables
(voir chapitre 4).

Section II

Gestion et paiement des crédits de personnel

A la différence de tous les autres types de dépenses, les ministères ne gèrent pas véritablement leurs
crédits de personnel titulaire qui représentent presque 12% du PIB. Les dépenses salariales sont
exécutées par trois directions du Ministère des Finances qui sont la Direction du Budget, le Contrôle
des Engagements de Dépenses et la Paierie Principale des Rémunérations.

La paye de l'ensemble du personnel titulaire des ministères est effectuée au niveau central par une
direction dépendante du Ministère des Finances qui est la Paierie principale des rémunérations (PPR).

3
Les autorités publiques ont fourni un effort important pour apurer le stock des lois de règlement en instance grâce
à la mise en place d'une Commission permanente de suivi des difficultés de production des lois de règlement et des
documents législatifs dans les délais requis par la loi organique des finances. Rappelons que la dernière loi de
règlement présentée au Parlement est relative à l'année 2001.

28
Management des finances publiques au Maroc

Elle suit la consommation des crédits ouverts et informe la Direction du Budget et l'ordonnateur
concerné du dépassement éventuel Aussi, limite-t-elle les possibilités de dépassements aux seuls effets
des mesures statutaires régissant les personnels applicables à la date d'entrée en vigueur de la loi de
finances.

La PPR, direction dépendante de la TGR, n'assure que le paiement des agents et l’édition des bulletins

de paye. Elle tient aussi une comptabilité des paiements culés, correspondant aux salaires versés,
qu'elle communique chaque fin de mois à chaque ministère. Pour les crédits du personnel occasionnel,
dont les crédits sont limitatifs, la PPR exerce un contrôle réel de - leur disponibilité.

Il faut préciser que la Paierie n'assure pas la gestion des crédits de personnel à la place des ministères
concernés. Son acte de gestion se limite au paiement et demeure, de ce fait, purement comptable. Ainsi,
elle ne gère pas directement le fichier des agents et le tableau des emplois qui sont tenus et actualisés
par les ministères eux-mêmes. Cependant, la PPR assure le suivi des tableaux d'effectifs produits avec
les morasses pour éviter tout paiement au-delà des effectifs prévus dans lesdits tableaux. De même, elle
met en application les décisions individuelles concernant les salaires des agents en exigeant seulement
le visa du CED sans vérifier l'enveloppe des crédits initiaux puisqu'ils sont sans ordonnancement
préalable et réputés évaluatifs.

La Direction du Budget, pour sa part, suit chaque mois les mêmes états récapitulatifs de la paie et
assure la prévision et l'encadrement des dépenses par ministère.

En fin d'année, sur la base de l'état récapitulatif des dépenses de personnel constatées, les ordonnateurs
de chaque ministère font un simple engagement de régularisation (un report sur la fiche d'engagement
de la dépense effectuée).

S'agissant du CED, son rôle consiste à surveiller le tableau des postes budgétaires et les mesures
individuelles nuis il n'est pas en mesure de contrôler la masse salariale d'un ministère puisque, à aucun
moment de la procédure, il n'aura été saisi d'un dossier d'engagement rapprochant la dépense prévisible
du crédit autorisé.

Il est à rappeler que la gestion des crédits de personnel est assurée par les ministères eux-mêmes. Ces
derniers assurent le recrutement, la vérification de la disponibilité des postes budgétaires, l'organisation
des concours de recrutement et les nominations en liaison avec le Ministère de la Fonction Publique et
la Direction du Budget du Ministère des Finances.

29
Management des finances publiques au Maroc

Ils assurent aussi tous les actes liés à la carrière de leurs agents tels que l'avancement, la promotion, la
discipline, et soumettent tous ces actes au contrôle a priori dès qu'ils conduisent à une dépense
nouvelle. Ainsi, les actes de recrutement, les avancements et les promotions entrainant des charges
budgétaires supplémentaires sont soumis au visa du CED qui les rejette en cas de non- conformité
(exemple : organisation d'un concours pour lequel les postes budgétaires ne sont pas prévus dans la loi
de finances, dépassement de l'effectif autorisé par la loi de finances, promotion contraire au statut...).

Le fait que les ministères ne procèdent à aucun engagement des crédits de personnel, en début d'année,
résulte d'une interprétation sujette à débat en ce que ces dépenses sont payées sans ordonnancement
préalable et, de ce fait, n'auraient pas à être engagées. C'est pourquoi les ministres ordonnateurs se
contentent, en début d'année, de déléguer leurs crédits de personnel à la PPR qui en assure
matériellementla paie. Cette situation paraît paradoxale parce que les ministères suivent de très près la
gestion des dépenses relatives à leurs personnels non titulaires dont les salaires sont imputés sur le
budget d'investissement. Cette dépense fait l'objet d'un engagement initial en début d'année visé par le
CED et que les gestionnaires des crédits sont tenus de respecter tout au long de l'année.

30
Exécution budgétaire des crédits inscrits en loi de finances

Conclusion
Les moyens d'ordre législatif et réglementaire donnés aux gestionnaires des crédits sont destinés à
apporter un juste équilibre entre la nécessaire flexibilité qui doit leur être laissée, et la préservation du
profil initial de la loi de finances. En pratique, ce juste équilibre est difficile à obtenir.

En matière de gestion du personnel de l'Etat, une meilleure responsabilisation des ordonnateurs pourrait
s'inscrire dans une perspective de politique axée sur la performance. De plus, la mise à disposition
d'outils de gestion moderne s ressources humaines, notamment de gestion prévisionnelle des effectifs,
devrait accompagner ce transfert de responsabilités accrues en matière de gestion des crédits. Les
autorités publiques envisagent de mettre en place un système de Gestion Prévisionnelle Intégrée du
Personnel de l'Etat (GPIPE).

En outre, bien que les ministères assument la responsabilité des actes de gestion courante de leurs
personnels, ils n'assument pas la rémunération de leurs personnels, ce qui constitue un handicap à la mise
en place de toute modernisation de la gestion publique. Il serait opportun que les ministères gèrent leurs
crédits de rémunération du personnel titulaire tout comme le personnel occasionnel.

Chapitre 4

Exécution comptable de la dépense


Le circuit comptable de la dépense comprend deux phases bien distinctes avec un système de contrôle a
priori imbriqué dans le circuit de la dépense. Au stade du paiement, toutes les dépenses retracées dans la
loi de finances transitent les circuits de la TGR, ce qui constitue une garantie majeure de fiabilité de
l'exécution de la dépense au Maroc.

Un rapprochement des comptabilités des ordonnateurs, des contrôleurs et des comptables permettrait une
meilleure organisation du circuit d'exécution de la dépense à travers.

A cet effet, un système de gestion intégrée de la dépense (GID) reliant les trois acteurs est en cours de
mise en place et résoudrait, grâce à son architecture intégrée, les difficultés actuelles.

31
Management des finances publiques au Maroc

Pour traiter ces points, ce chapitre sera organisé comme suit : la première section présentera les phases
d'exécution de la dépense. La seconde et la troisième section examineront respectivement
l'enregistrement comptable des opérations budgétaires et les difficultés de saisie en comptabilité.

Section I

Phases d'exécution de la dépense


Deux phases sont à distinguer dans le circuit d'exécution de la dépense, une phase dite administrative,
relevant de l'ordonnateur et du contrôleur, et une phase dite comptable, relevant du comptable avec un
double niveau d'exécution de la dépense selon que la dépense est exécutée au niveau central ou au niveau
déconcentré.

Notons que toutes les dépenses de fonctionnement, exception faite des dépenses de personnel et
d'investissement, sont exécutées selon la même procédure composée de quatre phases prévues par le
règlement général de comptabilité publique de 1967 : l'engagement, la liquidation, l'ordonnancement et le
paiement.

Les trois premières phases sont exécutées à l'initiative de l'ordonnateur central ou le sous-ordonnateur
central ou territorial alors que le paiement est réalisé sous la responsabilité des comptables assignataires
au niveau des trésoreries principales ou régionales. Le visa du contrôle des engagements est, quant à lui,
exercé par les contrôleurs centraux ou locaux.

Il est à signaler que chaque intervention se traduit par une écriture dans la comptabilité de l'intervenant :
la comptabilité administrative pour l'ordonnateur, la comptabilité des engagements pour le contrôleur, la
comptabilité en deniers et en valeurs pour les comptables assignataires.

I. Phase administrative

Cette phase comprend donc l'engagement, la liquidation et l'ordonnancement de la dépense :


(i) l'engagement est l'acte juridique par lequel l'Etat s'engage juridiquement vis à vis d'un tiers fournisseur
ou prestataire de services (il s'agit d'un bon de commande ou d'un marché), (ii) la liquidation de la
dépense est l'acte juridique par lequel le montant de la dépense est définitivement fixé, après constatation
du service fait (réception du bien ou de la prestation), et (iii) l'ordonnancement de la dépense est l'acte

32
Exécution comptable de la dépense

juridique par lequel l'ordonnateur donne l'ordre de payer au comptable, matérialisé par une ordonnance de
paiement (appelé aussi titre d'émission).

1. L'engagement

Bien que les modalités d'engagement soient similaires, il faut distinguer selon que les dépenses sont
engagées par (i) les ordonnateurs ou par les sous- ordonnateurs centraux ou bien par (ii) les sous-
ordonnateurs territoriaux.

Au niveau central, les dépenses sont engagées et ordonnancées par des ordonnateurs centraux (les
ministres) ou leurs délégués (les sous-ordonnateurs centraux notamment les directeurs des
administrations centrales) qui engagent les dépenses dans la limite des crédits qui leurs sont ouverts dans
la loi de finances.

Un contrôle a priori s'exerce au stade exclusif de l'engagement. Ce contrôle consiste, principalement, à


vérifier la régularité de l'acte juridique d'engagement et la régularité financière de la dépense
(disponibilité des crédits budgétaires imputation de la dépense). Ce contrôle des dépenses engagées se
matérialise par l'apposition sur l'acte d'engagement soit d'un « visa », soit d'un « visa avec observations »,
soit d'un « refus de visa motivé » qui peut bloquer la suite de la procédure sauf recours devant une
commission spéciale.

La procédure de contrôle a priori des engagements de dépenses par le CED est complexe. Le contrôle de
la régularité des engagements de dépense constitue une garantie de fiabilité de l'ensemble du système
d'exécution de la dépense, mais il est aussi relativement lourd. Ce problème de retard pourrait être
surmonté, en partie, avec le rapprochement intervenu entre la TGR et le CED.

33
Management des finances publiques au Maroc

2. La liquidation et l'ordonnancement

La liquidation est l'acte juridique par lequel l'ordonnateur arrête le montant de la dépense. Les dépenses
sont ordonnancées par les ordonnateurs centraux et les sous-ordonnateurs centraux ou par les
ordonnateurs territoriaux après leur liquidation, c'est-à-dire après la constatation du service fait ou de la
livraison de la marchandise, dont la mention est portée sur la facture.

Les crédits délégués par les ordonnateurs centraux aux sous-ordonnateurs territoriaux ne constituent pas
encore une véritable dépense. Ils sont ordonnancés par les premiers comme s'il s'agissait d'une
consommation définitive. Après-visa du CGED, la délégation de crédit est ordonnancée au profit de
l'ordonnateur territorial concerné. Une ordonnance de délégation, établie en trois exemplaires, est
envoyée respectivement à l'ordonnateur territorial concerné, à la Trésorerie Principale et au CED. La
première porte, dans ses livres, le crédit mis à sa disposition et les deux derniers annotent leur
comptabilité et informent leurs services régionaux et locaux respectifs du crédit mis à la disposition de
l'ordonnateur territorial.

L'ordonnateur prépare alors un « titre d'ordonnancement » qui doit comporter toutes les indications
nécessaires au comptable pour payer et imputer la dépense, notamment l'objet, le montant de la dépense,
l'identification du véritable créancier et, bien entendu, la signature de l'ordonnateur préalablement
accrédité auprès du comptable.

Encadré 4.1

Intervenants dans le processus budgétaire

 Les contrôleurs appartiennent au CED, direction hiérarchiquement indépendante rattachée organiquement


au Ministère des Finances. En février 2006, les services du CED ont été fusionnés avec ceux de la TGR
dans la perspective de migrer vers un contrôle expost. Le contrôle a priori sera modulé en fonction de
l'état des systèmes d'information et du contrôle interne des ordonnateurs ;
 Les ordonnateurs représentent les différents ministères gestionnaires de crédits (ordonnateurs et sous-
ordonnateurs centraux et territoriaux) ;
 Les comptables appartiennent au réseau indépendant de la TGR, dépendant du Ministère des Finances
mais jouissant, de par leur statut, d'une grande indépendance vis à vis des ordonnateurs et des contrôleurs.

34
Exécution comptable de la dépense

L'ordonnateur enregistre l'ordonnance dans sa comptabilité et l'envoie au comptable assignataire


(Trésorier Principal ou Régional) à l'appui des pièces justificatives de la dépense.

La procédure d'ordonnancement est anormalement longue. Il semble que les délais moyens, entre la date
de l'émission de la facture par le fournisseur à la date de la liquidation et à la date d'ordonnancement,
dépassent sensiblement les délais prévus par les textes.

II. Phase comptable

Les ordonnances émises par les ordonnateurs sont visées par le comptable assignataire de la dépense. Ce
dernier, après avoir vérifier la qualité de l'ordonnateur, l'imputation de la dépense, la justification de la
prestation du service, les calculs de liquidation, la disponibilité des crédits correspondant à la dépense, la
régularité de l'opération et le caractère libératoire de la créance, procède au paiement.

Au niveau central, les comptables assignataires, essentiellement les trésoreries principales, vérifient et
paient les ordonnancements émanant des ordonnateurs centraux.

Au niveau local, les trésoreries régionales, préfectorales ou provinciales vérifient et paient les
ordonnancements émanant des sous-ordonnateurs territoriaux.

Par ailleurs, suite à l'examen du processus d'exécution comptable de la dépense, différentes remarques
suivantes peuvent être émises :

Premièrement, la procédure de paiement est trop longue du fait, notamment, de l'exécution tardive des
opérations de dépenses qui conduit à une accumulation massive des ordonnancements en fin d'année. Il
en résulte une surcharge des services comptables, pendant plusieurs mois à compter du mois de
décembre, retardant un bon nombre de règlements.

Les dossiers contrôlés par le comptable sont revêtus, soit d'un rejet en cas d'irrégularité, soit d'un visa
« vu bon à payer » et la comptabilisation de la dépense au compte d'imputation concerné.

Deuxièmement, la réglementation sur le versement d'intérêts moratoires n'est pas appliquée (les
entreprises ne les réclamant pas), mais on estime que les entreprises pratiquent une surfacturation par
rapport au prix de marché. Cette contrepartie pèse sur le Budget de l'Etat et pose, avec acuité, la nécessité
d'appliquer les dispositions de la loi, sur la responsabilité des ordonnateurs et des comptables, relatives
aux intérêts moratoires.

35
Management des finances publiques au Maroc

Troisièmement, la mise en place de tableaux spécifiques de surveillance, notamment pour les


investissements (avec saisie des dates de décompte, dates d'ordonnancement et de règlement) permettrait
à chaque ordonnateur un meilleur suivi des délais moyens d'ordonnancement et des délais moyens de
paiement à la Trésorerie Principale.

Parallèlement à cette séparation de pouvoirs, s'ajoute un système de responsabilités partagées entre les
trois acteurs en vertu de la loi de 1999, mis en œuvre en 2002. Dans ce système, seul le comptable
encourt une responsabilité personnelle pécuniaire en cas de non-conformité de la dépense, tandis que les
sous-ordonnateurs et les contrôleurs encourent une responsabilité pénale, sans être tenus au
remboursement des sommes indûment dépensées. En vertu de la même loi, les ministres ordonnateurs
sont exclus de ce système.

Par ailleurs, on constate que la responsabilisation des acteurs n'est pas équilibrée entre le niveau central et
le niveau déconcentré. En effet, actuellement, on assiste à une déconcentration très marginale en masse,
de crédits et à des retards très importants quant à leur délégation et leur mise à disposition aux sous-
ordonnateurs territoriaux.

Néanmoins, la délégation des crédits doit être faite en fonction de chaque type de dépense: (i) les
dépenses de personnel constituent un des points difficiles en matière de déconcentration; les difficultés
rencontrées sont essentiellement à des questions juridiques et statutaires, (ii) les dépenses de matériel des
services extérieurs de l'Etat sont gérées de façon centralisée et le nombreux préalables doivent être pris,
notamment en matière de programmation et de nomenclature, (iii) par contre, les dépenses d'équipement
sont les plus adaptées à une procédure de déconcentration (nomenclature des dépenses, plans directeurs
nationaux, compétences techniques et financières des services extérieurs des grands ministères).

Section II

Enregistrement comptable de la dépense


I. Comptabilité administrative des ordonnateurs

Chaque ordonnateur tient une comptabilité administrative, en partie simple, dans laquelle il suit les
crédits qui lui sont ouverts dans la loi de finances ou qui lui sont délégués selon qu'il s'agit d'un
ordonnateur central, d'un sous-ordonnateur central ou encore d'un sous-ordonnateur territorial. Le
règlement général de comptabilité publique de 1967, en vigueur actuellement (un nouveau règlement est

36
Exécution comptable de la dépense

en cours de validation), impose à chaque ordonnateur de tenir trois livres comptables : (le livre
d'enregistrement des droits des créanciers, (u) le livre journal des ordonnances émises et (ii) le livre de
comptes par chapitre de dépenses.

Quelle soit sa présentation, la comptabilité administrative doit permettre que de connaître à tout moment
par chapitre, article, paragraphe et éventuellement, par ligne :

- Le total des crédits ouverts ou délégués ;


- Le total des engagements ;
- Le montant des crédits disponibles après engagement ou délégation par différence :
- Le total des émissions, c'est-à-dire les ordonnancements.

A la fin de chaque mois, les ordonnateurs établissent une situation de leurs opérations faisant ressortir,
par rubrique, budgétaire les crédits ouverts, les émissions acceptées par le comptable et les crédits
disponibles. Ils adressent cette situation au comptable pour visa de conformité. En fin d'année, un
rapprochement de la situation des marchés est également effectué entre les ordonnateurs et les
comptables. Cependant, le règlement général de comptabilité publique de 1967 ne prévoit, cependant, le
rapprochement de leurs comptabilités avec celles de l'ordonnateur central que selon une périodicité
déterminée.

Une liaison mensuelle est établie avec le contrôleur régional ou provincial des engagements de dépenses
qui reçoit une situation des engagements effectués par chaque sous-ordonnateur territorial qu'il contrôle.
Une telle liaison existe également entre l'ordonnateur central et le sous-ordonnateur central, et le
contrôleur central des engagements de dépenses.

Ces comptabilités sont tenues au niveau central et au niveau déconcentré, mais les difficultés se situent
principalement au niveau déconcentré.

II. Comptabilité des engagements des contrôleurs

Les contrôleurs centraux et les contrôleurs provinciaux ou régionaux tiennent une comptabilité des
engagements en partie simple, sur la base des fiches que leur transmettent respectivement les
ordonnateurs centraux et les sous- ordonnateurs territoriaux. Cette comptabilité met en évidence, par
rubrique budgétaire élémentaire, les crédits ouverts ou délégués, les engagements de dépenses et, par
différence, les crédits disponibles. Chaque mois cette comptabilité est recoupée avec celle tenue par les

37
Management des finances publiques au Maroc

ordonnateurs concernés lors de la transmission par ceux-ci. Le Contrôleur Général centralise ensuite,
mensuellement, les comptabilités tenues par les contrôleurs centraux, provinciaux et régionaux.

III. Comptabilité en deniers et en valeurs des comptables

Les dépenses budgétaires sont enregistrées au jour le jour dans la comptabilité en deniers et en valeurs
par les comptables de la TGR sur la base des mandats de paiements émis par les ordonnateurs et visés
bon à payer. Les dépenses payées sans ordonnancement préalable4 ont comptabilisées lors de la mise en
parlement.

Ces écritures sont constatées au débit des comptes d'imputation provisoire par les percepteurs
(comptables assignataires) et par le crédit d'un compte de règlement. Elles sont transférées
mensuellement aux receveurs des finances puis, par ces derniers, au Trésorier Principal par
l'intermédiaire de comptes de liaison.

L'ensemble des opérations de dépenses du Budget de l'Etat se trouve donc réuni, avec un mois environ de
décalage par rapport à la période de constatation, dans la comptabilité centrale de l'Etat tenue par le
Trésorier Général, responsable de l'imputation définitive.

Dans le cadre du suivi des opérations budgétaires de dépenses, la TGR a mis au point un procédé
informatique pour le suivi régulier de la situation d'exécution de chaque loi de finances.

Un fichier des crédits ouverts est créé à partir des morasses budgétaires communiquées par la Direction
du Budget. Il est mis à jour quotidiennement au vu des délégations et de nouvelles ouvertures de crédits.

Le Trésorier principal communique, mensuellement, cette situation à la Direction du Budget et à chaque


ordonnateur central pour les dépenses qui le concernent. Il communique également au CGED une
situation des dépenses payées sans ordonnancement préalable.

4
Il s'agit notamment des dépenses de personnel et de remboursement de la dette. Il existe 30 natures de dépenses
sans ordonnancement préalable : les prêts aux promoteurs, les frais de justice, les dégrèvements, certaines dépenses
de la défense nationale et des affaires étrangères...

38
Exécution comptable de la dépense

Encadré 4.2

Système de Gestion Intégrée de la Dépense

La mise en place du nouveau système de gestion intégrée de la dépense (GID) vise un traitement parallèle
de l'ensemble des opérations. Ce système prendrait en charge le système d'information de la Direction du
Budget et reposerait sur les principes suivants :

 La mise en réseau des trois systèmes de traitement informatique des données relatives à la dépense
appartenant chacun actuellement à l’ordonnateur, au contrôleur et au comptable
 La création d'une base de données unique gérée par l'instance de coordination qui en tiendra aussi une
comptabilité de référence :
 Le principe de la saisie unique (chaque acteur introduit ses informations sans reprendre celles des autres
acteurs en amont) :
 La résolution des difficultés de rapprochement des écritures des trois acteurs, ce qui permettrait de
produire automatiquement les données nécessaires à la production de la loi de règlement (dépenses).

Il existe des procédures de paiement de dépenses plus rapides que la procédure classique. Par exemple, la
procédure de régies de recettes et/ou de dépenses ou de dépenses payées sans ordonnancement préalable,
mais elles sont toutes encadrées par le réseau comptable et soumises aux mêmes règles de responsabilité
des comptables. Néanmoins, le recours à ces procédures reste exceptionnel du fait que le montant des
dépenses en jeu est faible. Il est d'environ 400 MDH pour les régies et de 350 MDH pour les dépenses
sans ordonnancement préalable.

Il est à noter qu'en cours d'exécution de la dépense, les lourdeurs du système se rencontrent, à des degrés
divers, à tous les stades, mais il semble que les points les plus délicats se concentrent principalement en
phase administrative de la dépense.

Chaque réseau comptable (ordonnateurs, CED, TGR) émet périodiquement des situations reprenant
l'ensemble des opérations effectuées. Ces situations de recoupement ont un double objectif : d'une part,
elles permettent d'ajuster les différentes comptabilités et, d'autre part, de redresser les erreurs qui
pourraient être constatées. Ces situations ont pour intérêt principal d'informer les responsables sur la
gestion des finances publiques.

39
Management des finances publiques au Maroc

Le règlement général de comptabilité publique de 1967 prévoit, qu'en fin d'exercice et après
centralisation des opérations des sous-ordonnateurs, chaque ordonnateur central doit préparer un compte
administratif.

De même, le Trésorier Général doit établir un compte de gestion décrivant l'ensemble des opérations
budgétaires et de trésorerie, compte qui est destiné à la Cour des Comptes. La synthèse annuelle de
l'exécution de la loi de finances est réalisée dans le Compte Général du Royaume. Ce compte doit être
préparé par la Direction du Budget au vu des comptes administratifs des ordonnateurs centraux et du
compte de gestion du Trésorier Général.

Malgré ces difficultés, pour l'essentiel, la comptabilisation des opérations budgétaires semble
fiable et exhaustive.

40
Exécution comptable de la dépense

Encadré 4.3

Limites des principes budgétaires

Les principes budgétaires traditionnels ne suscitent plus aujourd'hui qu'un intérêt limité aussi bien au
Maroc que dans d'autres pays ayant le même système. En dépit de l'affirmation de ces principes dans la loi
organique des finances de 1998, de nombreuses exceptions viennent infirmer la volonté exprimée par les
textes. Si les nécessités de la gestion justifient parfois les écarts par rapport à la règle établie, ces derniers
doivent cependant rester dans des limites acceptables.

 L'annualité budgétaire : La notion de la période complémentaire, d'une durée toujours aléatoire,


assouplit la rigueur du système de gestion en autorisant de déborder sur l'année suivante sans changer
pour autant d'exercice. En plus, les autorisations de programmes pluriannuelles en matière
d'investissement, le report des crédits y afférents et le report des soldes créditeurs des Comptes Spéciaux
du Trésor sur l'année suivante constituent une entorse au principe de l'annualité et affectent la trésorerie
et l'équilibre général des finances publiques ;
 L'universalité budgétaire : Ce principe exprimé par la loi organique des finances souffre de
nombreuses dérogations sous forme de Comptes Spéciaux du Trésor (78 comptes dans la loi de finances
de 2006). Les Comptes Spéciaux du Trésor mobilisent des ressources consistantes, soit plus de 2 MMDH
d'excédents chaque année ;
 L'unité budgétaire : Le regroupement de toutes les recettes et de toutes les dépenses dans un document
unique, conformément à ce principe, facilite l'analyse et le contrôle budgétaire. Cependant, les pratiques
budgétaires illustrent parfaitement l'abandon de ce principe avec l'existence des « morasses budgétaires
distinctes difficiles à réunir, puis à interpréter. En plus, la loi de finances elle-même est présentée en
partie sous forme de tableaux qui ne permettent pas de faire ressortir la notion du déficit (-) / excédent
(+) budgétaire de l'année ;
 La spécialité budgétaire : L'application de ce principe reste très souple puisque la spécialité des crédits
est limitée au niveau des budgets des ministères. L'existence de crédits réservés pour les dépenses
imprévues et les dotations provisionnelles limite également la portée de la spécialité budgétaire. En dépit
de la rigidité de ce principe, une plus grande spécialité des crédits est souhaitable.

41
Management des finances publiques au Maroc

Section III

Difficultés de saisie en comptabilité


Les difficultés de saisie et de remontée des informations concernent surtout les opérations sur crédits
déconcentrés, dues à des difficultés de rapprochement des comptabilités entre les ordonnateurs centraux
et les sous-ordonnateurs territoriaux (principalement pour les départements de l'éducation, la santé et
certains services du Ministère des Finances) et à des difficultés de remontée des informations des
trésoreries régionales et préfectorales vers le Comptable Général.

La « balance générale des comptes » est le principal document produit par la TGR qui sert de base pour
l'arrêté des comptes et la clôture de fin d'année. Elle centralise l'ensemble des comptabilités des trésoriers
régionaux, préfectoraux et provinciaux, des percepteurs et des comptables rattaches (receveurs de
l'enregistrement, receveurs des douanes,...).

Cette balance offre une bonne articulation entre la comptabilité générale et les comptabilités auxiliaires
(dépenses et recettes budgétaires du Budget Général, des Comptes Spéciaux du Trésor, des comptes de
fonds particuliers, des comptes de correspondants...).

Les liaisons entre la comptabilité générale et les comptabilités auxiliaires permettent des contrôles
comptables simples et aisés (à titre d'illustration, les dépenses du Budget Général de l'Etat apparaissent en
une ligne à la balance générale des comptes).

Notons que l'une des insuffisances du système de comptabilité publique au Maroc est la non production
d'une comptabilité patrimoniale. Un projet de nouveau plan comptable de l'Etat est en cours de validation.
C’est un plan comptable très proche de celui de 1982 de la France mais il n'intègre pas les conventions
relatives à la conception en « droits constatés ».

Précisons que la passerelle entre l'enregistrement des opérations budgétaires sur la base des « droits
constatés » et la base « caisse » est le montant des arriérés de paiement.

40
Exécution comptable de la dépense

Encadré 4.4

Arrières de paiement

Les arrières de paiement correspondent à des dépenses dont l'exécution n'a pas été menée jusqu'à la fin du
processus. Elles peuvent être de deux types différents :

 Les restes à payer : certaines dépenses sont menées jusqu'au terme de la phase administrative et sont reçues
par le comptable qui, faute de trésorerie suffisante, ne peut procéder au paiement et les met donc en attente.
Ces arrières n'apparaissent pas nécessairement dans les comptes budgétaires puisque la dépense
correspondante a été ordonnancée et se trouve, dès lors, comptabilisée. Ils apparaissent seulement au niveau
des écritures auxiliaires des comptables ;
 Certains crédits de fonctionnement (électricité, téléphone, eau…) donnent lieu à des engagements budgétaires
mais de façon très formelle, l'utilisateur de ces prestations restant très éloigné de l'ordonnateur.

Ces types d'arrières sont d'importance variable dans le budget annuel de l'Etat. Ces arriérés semblent parfois
être très importants suite à la contrainte de trésorerie en fin d'année, ou suite au report d'encaissement de
recettes importantes d'une année à l'autre (exemple de la privatisation de 35% du capital d'IAM) de 2000 à
2001.

A rappeler aussi que ces dépenses font l'objet d'une mention particulière dans les lettres de cadrage, avec une
enveloppe qui leur est obligatoirement affectée.

Conclusion
L'examen de la gestion des crédits fait ressortir que le système marocain, très concentré, laisse peu de
place à la gestion déconcentrée des crédits budgétaires par les ordonnateurs territoriaux. En effet, la part
de crédits déconcentrés est de l'ordre de 25% pour l'investissement et de 10% pour le fonctionnement,
soit 35% au total. A titre de comparaison, cette part est supérieure à 70% en France.

La concentration excessive d'exécution des crédits budgétaires ralentit considérablement la délégation des
crédits. Ainsi, la répartition des crédits par les ordonnateurs centraux ne peut intervenir qu'avec retard du

41
Management des finances publiques au Maroc

fait de la lenteur et de la difficulté à opérer des choix, d'abord entre administration centrale et régions et,
ensuite, entre régions et, au sein de chaque région, entre projets.

Pour le futur, de grands espoirs sont placés dans le système de gestion intégrée de dépense qui permettrait
d'obtenir, compte tenu de sa configuration en réseau, des rapprochements entre les écritures des différents
intervenants dans le processus d'exécution de la dépense.

Par ailleurs, précisons que le retard dans la présentation de la loi de règlement n'est pas un indicateur de
manque de fiabilité des comptes budgétaires, pour que ces retards ont résulté essentiellement des
difficultés de comptabilisation des écritures comptables au niveau déconcentré.

Chapitre 5

Le système marocain de contrôle de la dépense


Le système marocain de contrôle de la dépense est un système qui se rapproche beaucoup du système
français : un contrôle a priori à la charge de l'administration intervient avant toute opération de trésorerie
(paiement d'une dépense, encaissement d'une recette) et un contrôle a posteriori intervient après
l'opération de trésorerie. On distingue aussi entre un contrôle opéré au sein de l'administration, appelé
contrôle interne, et un contrôle exercé en dehors de l'administration, dénommé contrôle externe.

Le cadre juridique régissant ce système de contrôle est aujourd'hui en voie d'achèvement. Les derniers,
textes sont afférents à la réforme constitutionnelle de 1996, au code des juridictions financières
applicable dès 2003 et à la loi de 1999 relatifs à la responsabilité des différents acteurs de la procédure de
la dépense (ordonnateurs, contrôleurs et comptables).

D'autres textes sont en cours de préparation, notamment pour le contrôle des collectivités locales par les
Cours Régionales des Comptes et la redéfinition des missions des corps d'inspection interne et de
l'Inspection Générale des Finances (IGF).

Il est à craindre que chaque instance de contrôle cherchera à renforcer sa position, ce qui pourrait aboutir
à un allongement du processus d'exécution et de contrôle de la dépense avec la multiplication des
contrôles au moment où le but recherché est l'amélioration de la gestion publique au plan de la régularité
et de l'efficacité.

42
Le système marocain de contrôle de la dépense

Ce chapitre sera organisé comme suit : la première section examinera le contrôle interne, a priori et a
posteriori, et la seconde section abordera le contrôle externe.

Section I

Le contrôle interne a priori


Le système de contrôle interne de la dépense a été redéfini par la loi de 1999 (mise en œuvre en 2002) sur
le partage des responsabilités entre l'ordonnateur, le contrôleur des engagements de dépenses et le
comptable public. Si cette loi a eu le mérite de définir les règles de responsabilités, elle contient toutefois
des dispositions qui méritent d'être éclaircies.

I. Le partage de responsabilités entre les ordonnateurs, les contrôleurs et les


comptables

La loi de 1999, relative au partage des responsabilités entre les trois acteurs intervenant dans l'exécution
de la dépense, prévoit ce qui suit :

 « Les ordonnateurs sont … personnellement responsables du respect des règles d'engagement, de


liquidation et d'ordonnancement des dépenses publiques... (article 1) ;
 « tout fonctionnaire ou agent placé sous les ordres d'un ordonnateur, d'un contrôleur ou d'un
comptable public ou agissant pour le compte de l'un d'entre eux, peut être rendu personnellement
responsable aux lieu et place de l'ordonnateur … lorsqu'il est établi que la faute commise est imputable
audit fonctionnaire ou agent » (article 7) ;
 « …lesdits ordonnateurs… encourent une responsabilité qui peut être disciplinaire, civile ou pénale,
sans préjudice des sanctions qui peuvent être prises à leur encontre par la cour des comptes ou les cours
régionales des comptes… » (article 1) mais l'article 4 exclut les ministres, ordonnateurs centraux, de
cette disposition ;
 Les contrôleurs doivent « s’assurer de la disponibilité des crédits, de la disponibilité du poste
budgétaire, du respect des règles statutaires régissant les recrutements, les nominations et les
promotions de grades, de la conformité du projet de marché à la réglementation relative à la passation

43
Management des finances publiques au Maroc

des marchés publics …que le montant de l'engagement proposé porte sur la totalité de la dépense à
laquelle l'administration s'oblige… » ;
 « Les comptables publics … sont personnellement et pécuniairement responsables, dans la limite des
compétences qui leur sont dévolues… du contrôle de la validité de la dépense portant sur la justification du
service fait, l'exactitude des calculs de liquidation, l'existence du visa préalable d'engagement, le respect
des règles de prescription et de déchéance et le caractère libératoire du règlement. Ils sont en outre
responsables, mais sans engagement de leur responsabilité pécuniaire de la vérification de la qualité de
l’ordonnateur, de la disponibilité des crédits, de l'exacte imputation des dépenses aux chapitres qu'elles
concernent, de la production des pièces justificatives qu'ils sont tenus d'exiger avant le paiement des
dépenses en application de la réglementation en vigueur ».

Même si la loi de 1999 a bien délimité les responsabilités des ordonnateurs, des contrôleurs et des comptables,
et les délits qui peuvent leur être attribués en matière de discipline budgétaire et financière, ce partage de
responsabilités peut conduire en pratique à quelques situations d'arbitraire et de dysfonctionnement.

II. Les situations possibles d'arbitraire et de dysfonctionnement

Les principaux cas possibles sont les suivants :

 Les ordonnateurs et les contrôleurs tiennent chacun sa comptabilité de dépenses. En cas de divergence, il
serait parfois difficile de déterminer le partage des responsabilités ;
 La responsabilité de l'ordonnateur, au stade de l'engagement de la dépense, pourrait s'avérer problématique
du moment que la responsabilité de la vérification de la disponibilité des crédits relève en fait du contrôleur.
En effet, l'ordonnateur n'a pas forcément la même connaissance de la situation des dépenses engagées que le
contrôleur (qui, de droit, n'est pas obligé de lui transmettre sa comptabilité) et pourrait donc commettre des
erreurs purement matérielles au niveau de l'engagement de la dépense ;
 La responsabilité pécuniaire des comptables est désormais limitée, notamment à la disponibilité des crédits,
laquelle ressort aussi de la responsabilité du contrôleur. Il y a là un partage de responsabilité qui n'est pas clair ;
 Le transfert de responsabilité vers les agents subordonnés peut être source de difficultés ;

Par ailleurs, le contrôle des engagements de dépenses de l'Etat souffre encore de l'absence de références
stables. Il faut souligner que le texte fixant la liste des pièces justificatives à produire à l'engagement des
actes de dépenses est tout récent.

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Le système marocain de contrôle de la dépense

Section II

Le contrôle interne a posteriori


L'exercice du contrôle a posteriori est effectué par des inspections des services ministériels, dont fait partie
l’Inspection Centrale des Services Comptables de la TGR et, à un niveau hiérarchique supérieur, par
l'Inspection Générale des Finances (IGF) du Ministère des Finances.

Les inspections générales des ministères autres que celles du Ministère des Finances voient leurs attributions
fixées par des textes qui méritent une actualisation de leurs missions à partir d'une base réglementaire.
L'exemple de l’Inspection Générale de l'Agriculture illustre bien le caractère disparate, au plan formel, des
textes institutifs et la définition assez vague des attributions de ce corps.

I. L'Inspection Centrale des Services Comptables

L'Inspection Centrale des Services Comptables dépend de la TGR. Elle exerce une activité effective mais
souffre d'une insuffisance de moyens humains.

Jusqu'à présent, aucun texte de valeur réglementaire ne définit précisément les attributions ainsi que le
fonctionnement de l'Inspection Centrale.

II. L'Inspection Générale des Finances

L'IGF est un corps de contrôle de niveau supérieur dont les textes connaissent actuellement une
actualisation. Le cadre juridique régissant l’IGF doit lui permettre de pérenniser son rôle de premier plan
dans la fonction de contrôle de la dépense.

Les attributions essentielles des inspecteurs généraux des finances, placés sous l'autorité d'un Inspecteur
Général, sont donc définies dans la loi du 14 avril 1960 et consistent en :

 Les vérifications des services des caisses et de comptabilité en deniers et matière, des comptables
publics et, de façon générale, des agents de l'Etat, des collectivités locales, des établissements et des
entreprises publics et de tout organisme public ;
 Le contrôle de gestion des comptables publics, des ordonnateurs, des contrôleurs et de tout
administrateur pour s'assurer de la régularité et de la sincérité et de la matérialité des opérations
enregistrées dans leurs comptes ;
 Le contrôle de gestion des entreprises et des établissements publics ;

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Management des finances publiques au Maroc

 L'extension du contrôle aux organismes publics ou semi-publics tels que notamment le contrôle des
sociétés gérant un service public, les sociétés ou autres bénéficiaires de concours de l'Etat, des groupements
professionnels autorisés à percevoir des taxes ou des redevances.

Le programme de travail de l'IGF est fixé par le Ministre des Finances, sur proposition de l'Inspecteur
Général, en tenant compte notamment des demandes de vérification qui sont présentées par les autres
ministres ou par ses propres services.

Notons que deux tendances se profilent dans les interventions de l’IGF :

 L'inspection intervient, désormais, moins sur les trésoreries, d'où la nécessité de renforcer
l'Inspection Centrale des Services Comptables de la TGR ainsi que les inspections régionales ;
 L'inspection se consacre plus à des audits sur la gestion des ordonnateurs ministériels et du secteur
public, et à la vérification des comptes d'emploi de financements externes.
 Dans le cadre de ses programmes de vérification, le dosage, entre les vérifications des services
comptables, fiscaux et douaniers, reste pour l'inspection un exercice difficile.

Section III

Le contrôle externe
Le contrôle externe au Maroc est exercé par la Cour des Comptes qui est une institution supérieure de
contrôle répondant aux normes INTOSAI définies dans la convention de Lima signée en octobre 1977 et
par le Parlement.

Si l'existence de la Cour des Comptes est ancienne, ses attributions et ses méthodes de travail (ainsi que
celles des futures Cours Régionales des Comptes) ont été redéfinies récemment par le code des juridictions
financières, et sont applicables à partir de 2003.

Quant au rôle du Parlement en matière de contrôle des finances publiques, il est encore insuffisant et il est
appelé à être davantage renforcé.

46
Le système marocain de contrôle de la dépense

I. La Cour des Comptes

Le champ de compétence de la Cour et des Cours Régionales des Comptes est très large puisqu'il inclut,
outre les comptes des ministères, celui des collectivités locales, des entreprises publiques et des
associations recevant des deniers publics.

La Cour des Comptes doit avoir accès à toutes les informations nécessaires à l'accomplissement de sa
mission. Elle est dotée de moyens coercitifs vis à vis des différents acteurs de la dépense publique.

La Cour des Comptes existe depuis 1979 et a été compétente pour juger les comptes des comptables
publics à partir de l'exercice 1973. Elle a participé activement à l'assainissement des finances publiques du
pays.

Elle exerce, en matière de contrôle de la dépense publique, deux activités essentielles : (i) le contrôle de la
régularité des comptes des comptables publics et (ii) le contrôle de gestion de l'ordonnateur.

Dans le cas d'un contrôle de régularité des comptes des comptables, la Cour des Comptes constate les
irrégularités comptables et place le comptable en infraction par la procédure dite de mise en débet. Cette
procédure engage la responsabilité pécuniaire et personnelle du comptable qui est tenu au remboursement
des sommes litigieuses.

Dans le cas d'un contrôle de gestion de l'ordonnateur, à l'occasion d'un contrôle de comptes, la Cour peut
relever une irrégularité de l'ordonnateur. Elle peut alors déclencher la procédure dite de référé adressée au
ministre, supérieur hiérarchique de l'ordonnateur, afin qu'il soit mis fin à cette irrégularité.

Par ailleurs, la Cour pourrait apporter une assistance aux pouvoirs publics (Parlement et Gouvernement).
Ainsi, elle doit répondre aux demandes d'informations du Parlement à l'occasion du dépôt de son rapport
sur la loi de règlement et de la déclaration générale de conformité qui l'accompagne (article 92 de la
Constitution et article 47 de la loi organique des finances).

Il est à craindre qu'une insuffisance des effectifs pousse la Cour des Comptes à privilégier l'activité de
jugement des comptes au détriment des autres missions, et notamment des missions plus nouvelles d'audit
et d'évaluation de la dépense publique.

La mise en place des Cours Régionales des Comptes devrait permettre à l'administration locale de
bénéficier de l'expérience technique des magistrats acquise en matière financière, notamment pour « une
question intéressant la gestion des organismes soumis à leur contrôle ». (article 153 du code) et le contrôle

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Management des finances publiques au Maroc

des actes budgétaires des collectivités locales suivant l'article 142 du code: "le Ministre de l'Intérieur, le
Wali eu le Gouverneur... peut soumettre à la Cour Régionale toute question se rapportant aux actes relatifs
à l'exécution du budget d'une collectivité locale".

II. Le Parlement

Le contrôle classique du Parlement, dans le domaine des finances publiques, porte sur les conditions
d'exécution de la loi de finances. Notons que ce contrôle peut être concomitant à la réalisation du budget ou
expost, lors du vote de la loi de règlement.

L'intervention du Parlement lors de l'exécution du budget n'est pas prévue par les textes. Un parlementaire
n'est pas habilité à se rendre dans un ministère pour prendre connaissance des conditions d'exécution de la
loi de finances. En revanche, la création de commissions d'enquêtes est prévue par la Constitution (article
42).

La compétence du Parlement en matière de contrôle budgétaire se limite à l'adoption de la loi de règlement


à l'occasion de laquelle il dispose de l'assistance de la Cour des comptes. En fait, avec les retards
enregistrés dans la production des lois de règlement, il à douter pour un parlementaire, d'examiner en 2006
les conditions d'exécution de la loi de règlement au titre de 2001, alors qu'il aura à débattre la loi de
finances pour l'année 2007.

Conclusion
Un allégement du contrôle a priori est nécessaire pour une meilleure exécution de la dépense, ce qui
permettrait de réduire le délai entre la date de la liquidation et la date du paiement de la dépense.

Concernant le contrôle a posteriori, faute d'obtenir une coordination des travaux des différents acteurs
concernés, la vision intégrée du contrôle des finances publiques par l'IGF et par le Parlement ferait défaut.

L’IGF est amenée à développer ses interventions en matière d'évaluation des politiques publiques. Il
conviendrait, dans cette optique, d'instituer une coordination de ses travaux avec ceux des autres
inspections centrales des ministères techniques. Ceux initiés par la Cour des Comptes doivent porter sur la
gestion des marchés publics, les lois de règlement, les SEGMA, les restes à recouvrer...

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Management des finances publiques au Maroc

Chapitre 6

Relation causale entre les recettes et les dépenses au


Maroc : une évaluation à l’aide d’un modèle de
coïntégration et à correction d’erreur2

L’impératif de soutenabilité, à long terme, des finances publiques de tout pays plaide en faveur d’une
stratégie de redressement et d’ajustement budgétaire.

Une telle stratégie doit reposer sur une maîtrise raisonnée et durable des dépenses publiques et sur
l’optimisation des prélèvements fiscaux et non fiscaux ayant pour objectif de réaliser un niveau de déficit
budgétaire jugé acceptable.

Il est intéressant de savoir si ces ajustements au Maroc, de par le passé, étaient causés par les recettes, par
les dépenses ou par les deux simultanément, en vue d’en tirer les enseignements nécessaires quant à
l’enjeu de la politique budgétaire actuelle.

5
Ce chapitre est une version d’une communication co-écrite avec Mohamed BOUZAHZAH, (FSJES de Salé, Université
Mohammed V-Souissi) et présentée aux Premières Journées Scientifiques du Forum des Economistes Marocains les 28 et 29
Avril 2006 à Marrakech.
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