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N° 3305 – Finances publiques : les règles applicables aux finances de l’État

Date de fraîcheur : 8 Février 2023

Frédéric Lafargue
Maître de conférences HDR – université de Pau et des Pays de l’Adour
Membre de l’Institut Fédératif de recherches sur les Transitions Juridiques (IFTJ)

1. Éléments clés

Les choix budgétaires de la France pour l’année à venir sont arrêtés par le Gouvernement, en Conseil des ministres, à la fin du mois de septembre. Le budget
de l’État est ensuite présenté au Parlement dès le début du mois d’octobre, pour être discuté, modifié et voté par celui-ci avant la fin de l’année.

Le contenu de ces choix budgétaires dépend de la conjoncture économique. En effet, les recettes et les dépenses du budget de l’État dépendent du rythme de
la croissance du produit intérieur brut (PIB), tant sur le plan national qu’international. La croissance économique, c’est-à-dire la progression du PIB, dépend du
niveau des dépenses de consommation des particuliers, du niveau des dépenses d’investissement des entreprises et du solde de la balance commerciale.

En raison du montant très important du déficit budgétaire et de la dette publique de la France, le Gouvernement est tenu de mettre en œuvre une politique d’
assainissement des finances publiques, dans le respect de ses engagements européens.

L’élaboration du budget de l’État doit respecter les règles posées par la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) du 1er août 2001, qui constitue le
texte fondamental applicable aux finances de l’État. Cette loi repose sur une logique de meilleure gestion de la dépense publique. Elle est axée sur la recherche
de la performance et sur l’évaluation des résultats obtenus.

L’élaboration du budget de l’État doit s’inscrire aussi dans le cadre de la gestion pluriannuelle des finances publiques. En effet, une loi de programmation des
finances publiques (LPFP) doit être votée, avant de discuter du nouveau budget de l’État, et ainsi soumettre au Parlement la trajectoire financière envisagée pour
au moins les 3 années à venir, concernant le déficit budgétaire et la dette publique, dans le but de revenir à un solde budgétaire équilibré et à une dette publique
ne dépassant pas 60 % du PIB.

Cette loi de programmation des finances publiques (LPFP) doit désormais prévoir un encadrement pluriannuel des dépenses publiques, c’est-à-dire que le
volume des dépenses publiques ne doit pas dépasser un montant maximal, fixé en milliards d’euros, sur la période de programmation. Ce plafond pluriannuel des
dépenses publiques doit être détaillé pour chaque exercice budgétaire et pour chaque sous-catégorie (État, Sécurité sociale, Collectivités territoriales) dans le
cadre des lois de finances annuelles.

2. Textes de référence

L. org. n° 2001-692, 1er août 2001, relative aux lois de finances : JO 2 août 2001, p. 12480

L. org. n° 2021-1836, 28 déc. 2021, relative à la modernisation de la gestion des finances publiques : JO 29 déc. 2021, p. 13

Ord. n° 2022-408, 23 mars 2022, relative au régime de responsabilité financière des gestionnaires publics : JO 24 mars 2022

D. n° 2012-1246, 7 nov. 2012, relatif à la gestion budgétaire et comptable publique : JO 10 nov. 2012, p. 17713

D. n° 2022-1698, 28 déc. 2022, modifiant le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique : JO 30 déc.
2022

3. Bibliothèque LexisNexis

3.1. Encyclopédies LexisNexis

JCl. Procédures fiscales

3.2. Revues

Revue de Droit fiscal (hebdomadaire)

3.3. Codes et ouvrages

Code LexisNexis, Code général des impôts, 2022

Code LexisNexis, Livre des procédures fiscales, 2022

Connaissances

L’élaboration actuelle du budget de l’État est fondée sur plusieurs principes hérités du XIXe siècle, qui ont connu depuis de nombreuses atténuations. Tous ces
principes répondent à une préoccupation commune, qui est de permettre aux assemblées parlementaires de contrôler les recettes et les dépenses de l’État.

1. Les principes du droit budgétaire

Il s’agit des principes d’unité, d’universalité, d’annualité, de spécialité et de l’équilibre budgétaire. Il faut désormais y ajouter le principe de la sincérité budgétaire,
consacré par la LOLF de 2001.
1.1. L’unité budgétaire

Toutes les recettes et toutes les dépenses de l’État doivent figurer dans un document unique, soumis au vote du Parlement. Il s’agit de donner aux
parlementaires une vue d’ensemble de la situation budgétaire et d’assurer une présentation claire de celle-ci, pour leur permettre d’exercer leur pouvoir de
contrôle.

Cependant, au sein même de ce document, il existe des aménagements. En effet, si toutes les recettes et les dépenses doivent être retracées dans le budget
général, certaines opérations sont retracées à part et font l’objet de votes distincts du budget général. Il s’agit des opérations des budgets annexes et des
comptes spéciaux :

les budgets annexes permettent d’individualiser, au sein du budget de l’État, les activités industrielles et commerciales réalisées à titre principal par les
services de l’État qui ne sont pas dotés de la personnalité morale (budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », budget annexe « Publications
officielles et information administrative ») ;

les comptes spéciaux permettent d’isoler du budget général 3 types d’opérations financières :

les opérations temporaires (prêts et avances accordés par l’État), qui feront l’objet de remboursements (exemple des avances faites chaque
mois par l’État aux collectivités territoriales, en attendant l’encaissement de leurs recettes fiscales),

les opérations à caractère industriel et commercial réalisées à titre accessoire par des services de l’État (exemple du compte intitulé
« Régie industrielle des établissements pénitentiaires » qui retrace les recettes et les dépenses liées aux activités professionnelles des détenus
en prison),

les opérations financées par des ressources spécialement affectées (exemple du compte intitulé « Contrôle de la circulation et du
stationnement routiers » qui retrace, en recettes, une partie du produit des amendes perçues grâce aux radars automatiques, et, en dépenses,
les coûts relatifs à l’entretien et au développement de ces radars).

Pour contourner le principe de l’unité budgétaire, le Gouvernement est parfois tenté de débudgétiser certaines dépenses, c’est-à-dire de reporter sur d’autres
personnes publiques, telles que les collectivités territoriales et les établissements publics, la charge de dépenses qui devraient être supportées par le budget de l’
État (rémunérations d’agents de la fonction publique, etc.). Cette pratique présente l’avantage de réduire le montant du déficit budgétaire.

1.2. L’universalité budgétaire

Toutes les recettes et toutes les dépenses de l’État doivent figurer dans le document budgétaire, pour leur montant intégral et sans liaison entre elles. Il s’agit
de donner aux parlementaires une vue exhaustive de la situation budgétaire de l’État pour leur permettre d’exercer leur pouvoir de contrôle. De ce principe,
découlent deux règles :

la règle de la non-compensation des recettes et des dépenses oblige le Gouvernement à inscrire, dans le budget, l’intégralité des recettes et des
dépenses de l’État pour leurs montants bruts, dans un souci de transparence. Il est donc interdit de ne faire figurer que des soldes de compensation
dont la lecture ne permettrait pas de connaître l’origine et le montant des ressources, ni le détail des dépenses :

le mécanisme des prélèvements sur recettes, organisé au profit des collectivités territoriales et de l’Union européenne, n’est pas considéré
comme une compensation. Ce mécanisme consiste à rétrocéder directement une partie des recettes de l’État aux collectivités territoriales et à l’
Union européenne, sans faire figurer ces opérations en dépenses parce qu’il ne s’agit pas de dépenses pour l’État ;

la règle de la non-affectation des recettes aux dépenses a pour objet d’interdire qu’une recette déterminée soit affectée au financement d’une
dépense déterminée. N’importe quelle recette doit pouvoir financer n’importe quelle dépense. Sur le plan comptable, cette règle se traduit par l’unité de
caisse assurée par le réseau des comptables publics de l’État (Trésor public) :

cette règle connaît beaucoup d’exceptions (budgets annexes, comptes d’affectation spéciale, fonds de concours, attributions de produits,
rétablissements de crédits, impositions affectées à d’autres personnes morales que l’État).

1.3. L’annualité budgétaire

Ce principe a une double signification :

concernant l’autorisation budgétaire, il signifie que le budget doit être voté chaque année par les deux assemblées parlementaires pour permettre au
Gouvernement de percevoir les recettes et de procéder aux dépenses. L’année budgétaire coïncide, en France, avec l’année civile. Pour que l’exécution
budgétaire puisse commencer, le budget doit donc être voté avant le début de chaque année civile (règle de l’antériorité de l’autorisation budgétaire) :

pour les recettes, il n’y a pas d’autorisation permanente de percevoir les impôts et les autres revenus de l’État. Cette autorisation doit donc
être renouvelée chaque année avec les nouvelles mesures fiscales (droit de consentement annuel à l’impôt reconnu par la DDHC de 1789),

pour les dépenses, l’autorisation de dépenser est limitative. Les crédits budgétaires votés par le Parlement constituent des plafonds qui ne
peuvent pas être dépassés dans l’année. Ce principe étant très rigide, un aménagement a été prévu en particulier pour les dépenses d’
investissement. Il s’agit du mécanisme des autorisations d’engagement (AE) et des crédits de paiement (CP), qui permet de financer des
programmes de dépenses qui s’échelonnent sur plusieurs années, et de débloquer, chaque année, les crédits nécessaires au paiement des
dépenses effectuées. Ces crédits peuvent être reportés sur l’année suivante, s’ils ne sont pas consommés ;
concernant l’exécution budgétaire, il signifie que toutes les opérations d’encaissement des recettes et de paiement des dépenses doivent être
exécutées dans l’année. En effet, les dispositions contenues dans la loi de finances ne sont, en principe, valables que pour une année civile. Deux
solutions existent pour assurer l’exécution comptable d’un budget :

le système de l’exercice consiste à rattacher au budget annuel toutes les opérations de recettes et de dépenses qui ont été autorisées par ce
budget, quelle que soit la date réelle de leur encaissement ou de leur paiement,

le système de la gestion consiste à rattacher au budget annuel seulement les dépenses effectivement payées et les recettes effectivement
encaissées entre le 1er janvier et le 31 décembre de l’année considérée. La France a opté pour ce système, même s’il existe à titre
exceptionnel une période complémentaire jusqu’au 20 janvier de l’année suivante. Depuis 2012, en raison de la mise en place du logiciel
informatique Chorus, cette période complémentaire n’est plus utilisée.

Conseil : La loi organique du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques a prévu que la loi de programmation des
finances publiques (LPFP) doit désormais comporter un encadrement pluriannuel des dépenses publiques, c’est-à-dire que le volume des dépenses
publiques ne doit pas dépasser un montant maximal, fixé en milliards d’euros, sur la période de programmation. Ce plafond pluriannuel des dépenses
publiques doit être détaillé pour chaque exercice budgétaire et pour chaque sous-catégorie (État, Sécurité sociale, Collectivités territoriales) dans le cadre des
lois de finances annuelles. Toutefois, cette réforme ne porte pas atteinte au principe de l’annualité budgétaire. En effet, les lois de programmation
pluriannuelles ne s’imposent pas aux lois de finances annuelles, qui peuvent donc s’en détacher. La jurisprudence constitutionnelle garantit le principe de l’
annualité budgétaire, selon lequel le budget doit être voté chaque année par le Parlement. Mais cette réforme a l’avantage d’obliger le Gouvernement à s’
expliquer sur ses choix s’il ne respecte pas ses engagements pluriannuels.

1.4. La spécialité budgétaire

L’autorisation budgétaire votée par le Parlement ne doit pas être globale, car elle laisserait au Gouvernement la maîtrise totale de l’utilisation des crédits
budgétaires. Au contraire, le vote doit être détaillé pour que chaque crédit ait une destination précise :

la spécialisation de l’autorisation budgétaire : Les crédits ouverts aux ministres sont regroupés par mission budgétaire, chaque mission comportant
plusieurs programmes budgétaires. Cette budgétisation par objectifs, qui constitue l’aspect le plus novateur de la LOLF de 2001, repose sur une
logique de performance et non plus de moyens (L. org. n° 2001-692, 1er août 2001, relative aux lois de finances : JO 2 août 2001, p. 12480). Elle vise à
rendre plus lisibles les politiques publiques du Gouvernement, et à mieux appréhender leurs résultats concrets :

les différentes missions budgétaires sont créées chaque année par la loi de finances. Leur nombre varie d’une année à l’autre selon les
préoccupations du Gouvernement,

les programmes budgétaires sont divisés en budgets opérationnels de programme (BOP), eux-mêmes composés d’unités opérationnelles
(UO). La disponibilité des crédits s’apprécie donc au niveau de chaque unité opérationnelle ;

la spécialisation de l’exécution budgétaire : En cours d’année, la répartition des crédits votée par le Parlement ne peut être modifiée que par une loi
de finances rectificative ou, à titre exceptionnel, par le Gouvernement par des virements ou des transferts de crédits :

les virements permettent de modifier la répartition des crédits entre programmes d’un même ministère (ajustements frictionnels),

les transferts permettent de modifier la répartition des crédits entre programmes de ministères distincts, dans la mesure où l’emploi des crédits
transférés correspond à des actions du programme d’origine (politiques interministérielles),

pour assurer l’exécution, les crédits de chaque programme sont répartis par titres (titre II : dépenses de personnel, titre III : dépenses de
fonctionnement autres que celles de personnel, titre V : dépenses d’investissement, titre VI : dépenses d’intervention).

Conseil : Cette répartition par titre n’est qu’indicative, car les gestionnaires de programmes sont autorisés à redéployer les crédits entre ces différents titres (
fongibilité des crédits), pour réaliser leurs objectifs. Toutefois, le titre II des dépenses de personnel constitue un plafond (il n’est pas possible d’augmenter
ces crédits par la redistribution de crédits venant d’autres titres). Au contraire, il est possible de faire des économies sur ce titre II pour les réaffecter en faveur
de dépenses d’une autre nature (fongibilité asymétrique).

1.5. L’équilibre budgétaire

Le principe de l’équilibre budgétaire ne figurait pas dans l’ordonnance du 2 janvier 1959. Il a trouvé une place importante du fait de la construction européenne.
En effet, l’obligation de réduire les déficits publics, prévue par le traité de Maastricht (1992) et désormais par le TSCG de 2012 (Traité sur la stabilité, la
coordination et la gouvernance au sein de l’UE), s’impose à l’État.

1.5.1. Le problème du déficit budgétaire

Le problème du déficit budgétaire n’est pas récent. Même pendant la période classique (1789-1930), l’équilibre budgétaire n’était pas respecté alors qu’il était
un véritable dogme. Les budgets, votés en équilibre, étaient exécutés en déficit. Depuis le début de la période contemporaine (1930), ce déficit n’a cessé de s’
accroître. En France, depuis la loi de finances pour 1978, tous les budgets ont été votés et exécutés en déficit :

pour déterminer le montant du déficit, il faut se référer au tableau qui se trouve à la fin de la première partie de la loi de finances. Ce tableau arrête
les données générales de l’équilibre budgétaire tel qu’il résulte de l’évaluation des ressources budgétaires de l’État et de la fixation des plafonds de ses
dépenses budgétaires (budget général, budgets annexes et comptes spéciaux) :
si le solde de ces opérations budgétaires est négatif, il y a déficit budgétaire (« solde secondaire du budget de l’État »). Il s’agit d’un déficit de
présentation, c’est-à-dire d’une simple évaluation. Le déficit réel ou déficit d’exécution ne sera constaté qu’à la fin de l’année budgétaire, après
la clôture des comptes. Il figure dans la loi relative aux résultats de la gestion (LRG),

certains documents font apparaître le « solde primaire » du budget de l’État. Il s’agit du solde des opérations budgétaires, diminué des intérêts
de la dette (seuls les intérêts des emprunts figurent en effet en dépenses dans le budget de l’État, et non le remboursement du capital). Ce
solde permet de déterminer s’il existe un excédent des recettes sur les dépenses, disponible pour réduire la charge de la dette ;

la nécessité de maîtriser le déficit budgétaire a d’abord été inscrite dans le traité de Maastricht (1992) sur l’UE. L’article 104 C du Traité prévoit que
les États membres doivent éviter les déficits publics excessifs en respectant une véritable discipline budgétaire :

les déficits publics (budget de l’État, budgets des collectivités territoriales et budget de la sécurité sociale) ne peuvent excéder 3 % du PIB,

la dette publique (ensemble des dettes des collectivités publiques résultant des emprunts que celles-ci ont émis ou garantis) doit être
inférieure à 60 % du PIB.

Ce dispositif a été complété par le Pacte de stabilité et de croissance, inscrit dans le traité d’Amsterdam de 1997, qui a imposé aux États membres de l’UE d’
avoir « une position proche de l’équilibre ou excédentaire ». Un mécanisme d’avertissement et de mise en garde par la Commission européenne a été organisé
en cas de dérapage des finances d’un État, et des sanctions ont été prévues de la part du Conseil de l’UE (suspension de prêts, amendes…).

Pour imposer une plus grande discipline budgétaire aux États de l’UE, le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’UE (TSCG) ou «
Pacte budgétaire européen », signé en 2012, contient une série d’engagements :

la situation budgétaire des administrations publiques de chaque État (administrations centrales, locales, sécurité sociale) doit être en équilibre ou en
excédent. Il s’agit de la « règle d’or » des finances publiques ;

chaque État membre doit se fixer, dans son programme de stabilité, un objectif à moyen terme (OMT) pour parvenir au final à cet équilibre. Cet OMT ne
peut, en principe, dépasser un déficit structurel de 0,5 % du PIB. Mais en cas de circonstances exceptionnelles (récession économique grave), il est
admis que les États contractants s’écartent temporairement de leur OMT ;

chaque État membre, qui présente un ratio d’endettement supérieur à 60 % du PIB, doit le réduire à un rythme moyen d’un vingtième par an ;

chaque État membre, qui fait l’objet d’une procédure pour déficit excessif, doit mettre en place, avec la Commission européenne de l’UE, un programme
de partenariat budgétaire et économique contenant une description des réformes structurelles mises en œuvre ;

chaque État membre doit transposer la règle de l’équilibre budgétaire dans son droit national. En France, cette règle a été transposée par la loi
organique du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques. Cette loi précise le contenu des lois de
programmation des finances publiques (LPFP) instaurées par la révision constitutionnelle de 2008. Ces lois doivent définir l’OMT et sa trajectoire sur une
période d’au moins 3ans. De plus, un Haut Conseil des finances publiques a été créé pour vérifier le respect de cet OMT au moment de l’élaboration
des différents projets de lois de finances (LFI, LFR, LFG, LRG, LF2S).

Toutes ces innovations sont destinées à rendre plus stricte la discipline budgétaire des États membres de l’UE, en vue de retrouver l’équilibre des comptes de
ces États. Cependant, la crise sanitaire de 2020, déclenchée par l’épidémie de Covid-19, a considérablement aggravé le montant du déficit budgétaire, obligeant
les institutions européennes à activer la clause pour récession économique sévère du Pacte de stabilité et de croissance. Cette clause du Pacte de stabilité et
de croissance est une clause dérogatoire et générale, qui n’avait jamais été activée jusque-là et qui autorise une déviation par rapport aux cibles budgétaires
prévues par les traités européens.

1.5.2. Le financement du déficit budgétaire

Pour répondre à ses différents besoins de financement au cours de l’année (équilibre quotidien de ses besoins de trésorerie, déficit budgétaire d’exécution et
amortissement de la dette), l’État peut faire appel aux dépôts des Correspondants du Trésor, et aux marchés financiers par l’émission d’emprunts :

les Correspondants du Trésor sont, pour l’essentiel, des services ou organismes qui ont l’obligation de déposer leurs fonds disponibles au Trésor. Tel
est le cas des collectivités territoriales et des établissements publics administratifs, tels que la Caisse des dépôts et consignations (CDC). Les fonds
déposés par ces correspondants peuvent être utilisés par l’État, aussi bien pour combler les déséquilibres momentanés de trésorerie que pour financer
le déficit budgétaire ;

les emprunts permettent à l’État de répondre à ses différents besoins de financement :

d’une part, il s’agit d’emprunts à long terme, émis sous la forme d’OAT (obligations assimilables du Trésor) pour des durées de 7 à 30 ans,
voire même 50 ans, auprès des particuliers, des banques et autres établissements financiers,

d’autre part, il s’agit de bons du Trésor, émis à moyen terme, souscrits uniquement par des investisseurs professionnels (banques,
établissements financiers). Ces bons à taux fixe (BTF) sont émis pour une durée de 13, 26 ou 52 semaines.

Pour permettre au Parlement de mieux appréhender les besoins de financement de l’État, un tableau de financement figure désormais à côté du tableau d’
équilibre à la fin de la première partie de la loi de finances. Ce tableau de financement évalue les ressources et les charges de trésorerie qui concourent à la
réalisation de l’équilibre financier.
Conseil : L’aggravation du déficit budgétaire s’est traduite par une nette augmentation du recours aux marchés financiers et donc par un alourdissement
corrélatif de la dette publique. Lorsque des recettes sont disponibles, l’État procède à une gestion active de sa dette, c’est-à-dire rachète les titres émis sur
le marché financier. De même, la BCE (Banque centrale européenne) procède à l’achat de titres d’emprunts des États membres de l’UE pour alléger la
charge de leur dette (absence d’intérêts à payer ou à des taux dérisoires, absence d’échéance de remboursement de ces emprunts). Malgré cela, il y a une
véritable spirale du financement de la dette publique. En effet, lorsque la croissance économique ne dégage pas suffisamment de recettes fiscales pour
réduire le déficit budgétaire, l’État est obligé d’émettre des emprunts pour financer celui-ci, ce qui alourdit d’autant le déficit (les intérêts des emprunts sont
budgétisés) et donc la dette elle-même. Il s’agit de « l’effet volume » ou « effet boule de neige ».

1.6. La sincérité budgétaire

La loi organique du 1er août 2001 (LOLF) consacre le principe de la sincérité des lois de finances comme un principe fondamental du droit budgétaire. Ce
principe s’imposait déjà en matière budgétaire, en vertu de la jurisprudence du Conseil constitutionnel. En effet, depuis 1993, le Conseil accepte de répondre,
dans ses décisions, au motif de non-sincérité des lois de finances, invoqué par les parlementaires de l’opposition lors de leur saisine.

Selon la LOLF, le principe de sincérité exige que l’évaluation des ressources et des charges de l’État soit réalisée, dans les lois de finances, aussi
correctement que possible compte tenu des informations disponibles et des prévisions qui peuvent raisonnablement en découler :

cette définition de la sincérité des lois de finances implique une présentation exhaustive des ressources et des charges de l’État. Cela exclut tout
solde budgétaire artificiel qui serait déterminé uniquement en fonction des engagements européens de la France. De plus, si des informations nouvelles
parviennent au Gouvernement en cours de discussion de la loi de finances, et qu’elles sont susceptibles de remettre en cause les grandes lignes du
projet de budget, le principe de sincérité impose au Gouvernement de porter ces informations à la connaissance du Parlement ;

ce principe de la sincérité s’applique à l’ensemble des lois de finances (LFI, LFR, LFG, LRG). En particulier, il est applicable aux lois relatives aux
résultats de la gestion (LRG), pour permettre au Parlement d’exercer un véritable contrôle des opérations budgétaires et financières réellement
exécutées.

2. Les lois de finances

Ont le caractère de lois de finances, la loi de finances de l’année, les lois de finances rectificatives, la loi de finances de fin de gestion, la loi relative aux résultats
de la gestion et portant approbation des comptes, et les lois partielles prévues par l’article 45 de la LOLF :

la loi de finances de l’année ou « loi de finances initiale » (LFI) constitue l’autorisation budgétaire donnée par le Parlement au Gouvernement de
procéder aux opérations budgétaires et de trésorerie de l’État. Sa première partie fixe les recettes, les plafonds des dépenses et les données générales
de l’équilibre budgétaire et financier qui en résulte. Sa seconde partie répartit les crédits nécessaires aux dépenses entre le budget général, les budgets
annexes et les comptes spéciaux, et comporte diverses dispositions financières ;

les lois de finances rectificatives (LFR) ou « collectifs budgétaires » permettent de modifier en cours d’année les dispositions de la loi de finances
initiale. Elles permettent d’adapter l’autorisation budgétaire en fonction l’évolution de la conjoncture politique, économique et sociale. Chaque année, une
ou plusieurs lois de finances rectificatives sont adoptées par le Parlement à la demande du Gouvernement ;

la loi de finances de fin de gestion (LFG) est adoptée en fin d’année pour ratifier les modifications règlementaires intervenues en cours d’année. Cette
loi ne peut pas comporter de mesures fiscales nouvelles ;

la loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes (LRG) arrête le montant définitif des recettes et des dépenses du
budget auquel elle se rapporte, ainsi que le résultat budgétaire qui en découle (solde d’exécution). Elle arrête également le montant définitif des
ressources et des charges de trésorerie. Elle est accompagnée d’annexes explicatives présentant les écarts entre les estimations initiales et les
réalisations. Elle est accompagnée de rapports annuels de performances (RAP) pour chaque programme budgétaire, et permet un contrôle a posteriori
sur les gestionnaires de crédits. Le projet de loi de LRG doit être déposé par le Gouvernement au Parlement avant le 1er mai de l’année suivant celle de
l’exécution du budget (n + 1). L’examen du projet de LRG doit avoir lieu avant l’examen du projet de loi de finances de l’année suivante (« chaînage
vertueux »).

Conseil : Lorsque l’examen du budget prend du retard et que la loi de finances risque de ne pas pouvoir être promulguée avant le début de l’exercice
budgétaire, le Gouvernement peut demander l’adoption de lois partielles. Ou bien il demande au Parlement, avant le 11 décembre, un vote séparé sur l’
ensemble de la première partie de la loi de finances de l’année (procédure utilisée en 1962, suite au renversement du Gouvernement Pompidou et à la
dissolution de l’Assemblée nationale). Ou bien il dépose devant l’Assemblée nationale, avant le 19 décembre, un projet de loi spéciale l’autorisant seulement à
percevoir les impôts existants, jusqu’au vote de la loi de finances (procédure utilisée en 1979, car la loi de finances avait été déclarée inconstitutionnelle).

3. La préparation du budget de l’État

La préparation du projet de loi de finances (PLF) relève de la compétence exclusive du Gouvernement. La LOLF de 2001 a cependant revalorisé les pouvoirs
des parlementaires, car le Gouvernement est tenu de mieux les informer tout au long de cette phase de préparation.

3.1. La procédure de préparation du budget

Cette préparation est organisée par une circulaire du Premier ministre, du 21 janvier 2005, relative à la préparation du projet de loi de finances dans le cadre de
la LOLF. Cette circulaire a été complétée et actualisée par une circulaire du Premier ministre du 24 mai 2017.

3.1.1. Les autorités chargées de la préparation du budget


Le ministère des Finances est au centre de la procédure de préparation du budget de l’État, qui se déroule sous l’autorité du Premier ministre. Dans la pratique,
le Premier ministre détient le rôle politique, c’est-à-dire qu’il définit les choix budgétaires, tandis que le ministre des Finances exerce un rôle de préparation
technique du budget. Le Président de la République peut être amené à jouer un rôle en procédant aux arbitrages nécessaires :

pour préparer le budget de l’État, le ministre des Finances peut s’appuyer soit sur un ministre du Budget chargé de diriger à sa place cette préparation,
soit sur un ministre délégué chargé du Budget, soit sur un simple secrétaire d’État au Budget ;

au-delà de ces structures ministérielles qui varient suivant les Gouvernements, il y a en permanence, au ministère des Finances, de grandes directions
à compétence budgétaire et financière, qui jouent un rôle déterminant dans la préparation du budget : la Direction du Budget (DB) qui est la plaque
tournante du processus budgétaire, la Direction générale du Trésor (DGTrésor), la Direction générale des Douanes et des Droits indirects (DGDDI) et de
la Direction générale des Finances publiques (DGFiP) ;

dans chaque ministère gestionnaire, il existe une Direction des affaires financières (DAF) qui détermine les crédits nécessaires pour mettre en œuvre
les choix définis par le ministre, et qui dialogue avec la Direction du Budget tout au long de la procédure.

3.1.2. Le calendrier de la préparation du budget

La préparation du budget de l’État débute en janvier pour finir en octobre par le dépôt du projet de loi de finances à l’Assemblée nationale :

le Premier ministre commence par définir, avec le ministre des Finances, la stratégie d’ensemble en matière de finances publiques. Actuellement, elle
consiste à réduire les déficits publics par une maîtrise de la dépense ;

des réunions techniques sont organisées avec les ministères, à l’issue desquelles le Premier ministre adresse une lettre de cadrage aux ministres
pour leur préciser les orientations retenues ;

des conférences budgétaires ont lieu pour déterminer les besoins des ministères en termes de crédits budgétaires et d’effectifs, ainsi que pour assurer
la sécurisation de la trajectoire budgétaire. Le Premier ministre adresse alors aux ministres des lettres-plafonds qui arrêtent les plafonds des crédits de
chaque ministère, mission par mission, ainsi que les plafonds des effectifs. Le Gouvernement présente alors au Parlement, avant le 15 juillet, un rapport
indiquant ces plafonds de crédits pour chaque mission budgétaire, ainsi que la liste des missions, des programmes et des indicateurs de performance ;

des conférences de répartition permettent ensuite de procéder à la répartition détaillée des crédits de chaque ministère par programme. Ces éléments
sont communiqués au Parlement au cours du débat d’orientation budgétaire organisé à l’Assemblée nationale et au Sénat. Des questionnaires
peuvent alors être adressés au Gouvernement, par les commissions des finances de ces assemblées. Fin septembre, le projet de loi de finances est
adopté en conseil des ministres, avant d’être déposé pour le premier mardi d’octobre à l’Assemblée nationale.

3.2. La présentation formelle du budget

Le projet de loi de finances (PLF) se présente sous la forme de documents multiples transmis aux parlementaires lors du débat budgétaire :

le projet de loi de finances lui-même commence par un article liminaire (placé en tête) qui présente, sous la forme d’un tableau de synthèse, le solde
du budget de l’État, l’évolution et le montant des dépenses publiques, ainsi que les prévisions de prélèvements obligatoires, de dépenses et de dette
publique en pourcentage du PIB.Ce projet de loi est composé de deux parties distinctes, la première constituant un préalable indispensable à la
seconde, car elle en constitue le cadre général :

la première partie comporte l’autorisation de percevoir les ressources de l’État et les impôts affectés à d’autres personnes morales (impôts
locaux par exemple), ainsi que les nouvelles dispositions fiscales. Après avoir évalué le montant des ressources de l’État et fixé les plafonds
des dépenses, elle arrête le solde budgétaire qui en résulte dans un tableau d’équilibre. Elle comporte les dispositions relatives aux emprunts,
et doit évaluer les ressources et les charges de trésorerie présentées dans un tableau de financement,

la seconde partie procède à la répartition des crédits budgétaires, par mission et par programme, dans le respect des plafonds déterminés
par la première partie. Elle comporte également diverses dispositions financières ;

divers documents et annexes sont joints au projet de loi de finances, dans un souci de transparence et de lisibilité :

un rapport sur la situation et les perspectives économiques, sociales et financières de la nation permet de situer le budget dans son
contexte économique et social,

un rapport sur la dette publique permet d’analyser sa trajectoire, ses conditions de financement et de soutenabilité,

un rapport sur la situation des finances publiques locales et sur l’évolution des transferts financiers ente l’État et les collectivités
territoriales permet de présenter la situation financière des collectivités territoriales,

des annexes explicatives permettent de préciser et d’expliciter le contenu du projet de loi de finances (annexe sur les changements de la
structure du budget d’une année à l’autre, annexe regroupant les opérations dans une section de fonctionnement et dans une section d’
investissement, etc.),

des annexes thématiques présentent l’effort financier de l’État en faveur de différents domaines (formation professionnelle, collectivités
territoriales, aménagement du territoire, etc.),

des documents de politique transversale présentent les actions qui relèvent de plusieurs ministères ou de plusieurs programmes (sécurité
routière, prévention de la délinquance, égalité entre les femmes et les hommes, insertion sociale, etc.).
4. L’adoption du budget de l’État

L’adoption du budget par le Parlement est soumise aux règles générales du droit parlementaire, complétées par des dispositions spécifiques prévues par la
Constitution de 1958 et par la LOLF du 1er août 2001.

4.1. La procédure d’adoption du budget

Le débat budgétaire au Parlement est très encadré, pour permettre au Gouvernement d’obtenir le vote de la loi de finances avant le début de l’exercice
budgétaire :

le projet de loi de finances, y compris le rapport sur la situation et les perspectives économiques, sociales et financières de la nation et les annexes
explicatives, est déposé au Parlement au plus tard le premier mardi d’octobre de l’année qui précède l’exécution du budget. Cette règle permet aux
parlementaires de disposer des informations budgétaires suffisamment tôt pour pouvoir exercer leurs prérogatives dans les délais fixés par la
Constitution ;

le projet de loi de finances est soumis, en premier lieu, à l’Assemblée nationale. Il s’agit de l’application du principe de priorité reconnue à la première
chambre en matière budgétaire. Ce principe correspond à la tradition démocratique selon laquelle l’assemblée parlementaire élue au suffrage universel
direct détient un rôle essentiel en matière de consentement à l’impôt :

le Conseil constitutionnel a renforcé ce droit de priorité de l’Assemblée nationale en refusant au Gouvernement la possibilité de soumettre, en
première lecture au Sénat, un amendement au budget, comportant une mesure financière entièrement nouvelle,

cette priorité est valable aussi pour les projets de lois de finances rectificatives, les projets de loi de finances de fin de gestion, les projets de
lois relatives aux résultats de la gestion, les projets de loi de programmation des finances publiques et les projets de loi de financement de la
sécurité sociale ;

le texte budgétaire commence par être examiné par la commission des Finances, avant d’être débattu en séance plénière dans chaque assemblée.
Mais les autres commissions sont saisies pour avis à l’occasion de l’examen de chaque mission budgétaire correspondant à leurs compétences. Il est de
tradition que la présidence de la commission des Finances soit attribuée à un membre de l’opposition. Cette commission, qui est chargée de la
préparation du débat budgétaire, n’a pas la possibilité de substituer son propre texte au projet gouvernemental (Const. 4 oct. 1958, art. 42, al. 2) ;

la discussion budgétaire en séance publique se déroule obligatoirement en deux phases, qui correspondent aux deux parties du projet de loi. La
première partie du projet de loi de finances doit être obligatoirement adoptée avant l’examen de la seconde. En effet, l’article 42 de la LOLF précise que
la seconde partie du projet de loi de finances ne peut être mise en discussion devant une assemblée avant l’adoption de la première partie ;

le Conseil constitutionnel veille strictement au respect de cette disposition. Il s’agit d’éviter que les parlementaires ne commencent à
examiner les dépenses des différentes missions et programmes budgétaires, avant de s’être prononcés sur les recettes et avant d’avoir fixé
globalement les plafonds des dépenses et arrêté le solde budgétaire,

en décembre 1979, lors de l’examen du budget pour 1980, la première partie n’avait pas été adoptée, car certains députés de la majorité s’
étaient abstenus. Malgré tout, l’Assemblée nationale était passée à l’examen et au vote de la seconde partie. Le Conseil constitutionnel a
estimé que la loi de finances avait été adoptée suivant une procédure irrégulière, et il a donc procédé à l’annulation de celle-ci dans son
ensemble (Cons. const., 24 déc. 1979, n° 79-110 DC) ;

la procédure d’adoption des crédits budgétaires a été fondamentalement modifiée par la LOLF. En effet, jusque-là, les dépenses faisaient l’objet d’un
seul vote pour entériner les crédits votés l’année précédente (« services votés »), et les nouveaux crédits étaient votés ensuite par ministères et par
titres (« mesures nouvelles ») :

désormais, les dépenses de chaque ministère sont votées globalement par mission et par programme budgétaire. Cette globalisation des votes
est liée à la responsabilisation des gestionnaires des crédits de l’État. En effet, chaque responsable de programme, ou de budget opérationnel
de programme (BOP), dispose ainsi d’une enveloppe globale dont il dispose pour gérer au mieux les crédits qui lui sont accordés.

Conseil : La LOLF a donc mis fin à la notion de « services votés », qui représentaient de 92 à 97 % des crédits budgétaires, et qui étaient reconduits
automatiquement d’une année sur l’autre, par un seul vote. Désormais, il n’y a plus aucune reconduction automatique de crédits. Ceux-ci doivent donc être
réévalués en totalité, chaque année, en base zéro, puisque les crédits de l’année précédente ne servent plus de référence (système américain du BBZ :
Budget Base Zéro). Le Parlement peut, par conséquent, demander au Gouvernement de justifier chaque euro de son budget (système français de la JPE : «
Justification au premier euro »). Concrètement, cette budgétisation « au premier euro » conduit à réexaminer la pertinence de toutes les dépenses de l’
Administration, et donc les activités des différents services de l’État, dans un but d’économie.

4.2. L’encadrement des pouvoirs budgétaires du Parlement

Les pouvoirs des parlementaires sont très fortement encadrés en matière budgétaire. La révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, qui a revalorisé les
pouvoirs du Parlement, n’a pas pour autant renforcé les pouvoirs de celui-ci dans ce domaine.

4.2.1. La limitation de l’initiative parlementaire

Des limites constitutionnelles importantes encadrent strictement l’initiative des parlementaires en matière budgétaire, pour éviter que ceux-ci dénaturent le projet
de budget du Gouvernement :
l’article 47, alinéa 3 de la LOLF pose l’interdiction des cavaliers budgétaires. Il s’agit de dispositions qui n’ont aucun caractère financier ou qui ne
concernent pas directement les finances de l’État, mais que les parlementaires ou le Gouvernement cherchent à intégrer dans la loi de finances. L’intérêt
de cette pratique est de permettre que ces dispositions soient adoptées plus rapidement avec le reste de la loi de finances, sans avoir à déposer une
proposition ou un projet de loi. Il est fréquent que certaines dispositions de la loi de finances soient déclarées inconstitutionnelles pour ce motif ;

l’article 40 de la Constitution de 1958 limite le droit d’amendement des parlementaires. En effet, cet article dispose que les propositions et
amendements formulés par les membres du Parlement ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour conséquence soit une diminution des
ressources publiques, soit la création ou l’aggravation d’une charge publique :

cette interdiction de réduire les recettes et d’augmenter les dépenses vise à préserver l’équilibre budgétaire arrêté par le projet de loi de
finances, et ainsi à éviter toute aggravation du déficit budgétaire pendant la discussion du budget au Parlement,

en matière de recettes, le Conseil constitutionnel a cependant développé une jurisprudence favorable à l’exercice du droit d’amendement des
parlementaires. Ainsi, les parlementaires peuvent proposer une diminution d’une ressource, si elle est compensée par la création ou l’
augmentation d’une autre ressource. En effet, une telle modification n’entraîne pas une diminution globale des ressources publiques,

en matière de dépenses, au contraire, toute augmentation des crédits d’une mission ministérielle est interdite par l’article 47 de la LOLF,
même si elle est compensée par ailleurs. Cette interdiction permet d’éviter que les parlementaires remettent en cause les différents objectifs
définis par le Gouvernement. Mais les parlementaires peuvent effectuer des compensations entre programmes au sein de chaque mission.

4.2.2. Les délais d’adoption du budget et leur sanction

L’encadrement des pouvoirs budgétaires du Parlement résulte également des délais très stricts qui lui sont imposés pour l’adoption du budget. En effet, la loi de
finances doit être promulguée avant le début de l’exercice budgétaire (règle de l’antériorité budgétaire) :

l’article 47 de la Constitution prévoit que le Parlement dispose d’un délai de 70 jours pour se prononcer sur le projet de loi de finances. Ce délai court à
compter du dépôt du projet de loi, c’est-à-dire au plus tard à partir du premier mardi d’octobre. L’Assemblée nationale a 40 jours et le Sénat 20 jours
pour examiner et voter le projet de budget en première lecture. Le délai global de 70 jours tient compte à la fois de la durée de la première lecture dans
chaque assemblée, et des navettes entre les deux assemblées ;

l’article 47 de la Constitution prévoit que si le Parlement ne s’est pas prononcé dans le délai de 70 jours après le dépôt du projet, les dispositions de ce
dernier peuvent être mises en vigueur par voie d’ordonnance. Cette disposition n’a jamais été appliquée. En effet, le Gouvernement dispose de moyens
constitutionnels pour accélérer la procédure budgétaire :

l’article 42 de la Constitution prévoit que, contrairement aux autres projets ou propositions de loi, la discussion du projet de loi de finances
porte, devant la première assemblée saisie, sur le texte présenté par le Gouvernement et non sur le texte remanié par la commission,

l’article 48 de la Constitution prévoit que, contrairement aux autres projets ou propositions de loi, le projet de loi de finances est inscrit, par
priorité, à l’ordre du jour de chaque assemblée,

l’article 44 de la Constitution permet au Gouvernement de s’opposer à l’examen de tout amendement parlementaire qui n’aurait pas été soumis
à la commission. Il donne au Gouvernement la possibilité d’obtenir le vote bloqué sur tout ou partie du texte en discussion, en ne retenant que
les amendements acceptés par lui,

l’article 49, alinéa 3 de la Constitution permet au Premier ministre d’engager la responsabilité du Gouvernement, devant l’Assemblée
nationale, sur le vote de tout ou partie du projet de loi de finances. Le recours à cette procédure, qui a été limité par la révision constitutionnelle
de 2008 à un seul autre projet ou proposition de loi par session, est possible sans limitation pour les projets de loi de finances,

l’article 45 de la Constitution permet au Gouvernement d’utiliser la procédure de la commission mixte paritaire après une seule lecture par l’
Assemblée nationale et par le Sénat. En effet, la procédure accélérée est de droit pour le projet de loi de finances (L. org. n° 2001-692, 1er août
2001, relative aux lois de finances : JO 2 août 2001, p. 12480, art. 40, al. 5).

Une fois adoptée par le Parlement, la loi de finances est promulguée, dans les 15 jours qui suivent, par le Président de la République. En réalité, ce délai est
souvent plus court, car la loi de finances, adoptée vers le 20 décembre, doit être publiée au Journal officiel au plus tard le 31 décembre. De plus, le Conseil
constitutionnel peut être saisi, notamment par l’opposition, pour contrôler la conformité de la loi de finances à la Constitution et à la loi organique du 1er août
2001. En pratique, la loi de finances est donc promulguée et publiée dans les derniers jours de décembre.

5. L’exécution du budget de l’État

La mise en œuvre de l’autorisation budgétaire fait intervenir deux catégories d’agents publics, qui se partagent de façon nettement séparée les tâches d’
exécution du budget de l’État. Il s’agit des ordonnateurs et des comptables, dont les fonctions sont incompatibles entre elles pour éviter les risques de
malversations.

5.1. Les acteurs de l’exécution du budget

Le principe de la séparation des ordonnateurs et des comptables a été institué en 1822. Il est prévu actuellement par l’article 9 du décret du 7 novembre 2012
relatif à la gestion budgétaire et comptable publique (décret GBCP), qui a abrogé le décret du 29 décembre 1962. La rigidité de ce principe a cependant été très
assouplie ces dernières années par le décret GBCP lui-même et par la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 portant loi de finances pour 2019 :
les ordonnateurs n’appartiennent pas à un corps spécialisé en matière financière. Ils exercent cette fonction en raison de leur statut d’administrateur d’
un service. Il peut s’agir d’ordonnateurs principaux ou d’ordonnateurs secondaires (pour ceux qui ont reçu une délégation de pouvoir des précédents).
Les ordonnateurs ont pour fonction de prescrire l’exécution des recettes et des dépenses :

en matière de recettes, les ordonnateurs vont émettre des ordres de recettes adressés au comptable sous la forme de titres de recettes ou
« titres de perception », pour permettre à celui-ci de procéder au recouvrement des recettes. Un « état exécutoire » regroupe plusieurs titres de
recettes (bordereau de titres de recettes) ;

en matière de dépenses, les ordonnateurs vont émettre des ordres de payer adressés au comptable sous la forme de mandats de paiement
(ou ordonnance de paiement), pour permettre à celui-ci de procéder au paiement des dépenses.

les comptables publics sont des fonctionnaires du ministère des Finances, nommés ou agréés par le ministre des Finances. Ils exécutent, seuls et
sous leur responsabilité, toutes les opérations nécessaires au recouvrement des recettes et au paiement des dépenses de l’État. Ils sont chargés des
opérations matérielles de trésorerie (encaissement, conservation et versement) et de procéder aux contrôles prévus par les articles 19 et 20 du décret
GBCP :

lorsqu’un comptable constate, à l’occasion de ces contrôles, une irrégularité commise par l’ordonnateur, il est tenu de suspendre l’opération.
Concernant les dépenses, l’ordonnateur peut toutefois requérir le comptable de payer. Cet ordre de réquisition a pour effet d’engager la
responsabilité exclusive de l’ordonnateur,

toute personne qui s’immisce dans le recouvrement d’une recette ou dans le paiement d’une dépense, sans avoir la qualité de comptable public
ou sans agir pour le compte et sous le contrôle d’un comptable public, est coupable de gestion de fait. Un comptable de fait encourt les
mêmes responsabilités et les mêmes peines qu’un comptable public,

toutefois, des régies de recettes ou d’avances peuvent être créées par arrêté du ministre des Finances. L’intérêt des régies est de permettre
au régisseur, nommé par l’ordonnateur, d’avoir la possibilité, bien que n’ayant pas la qualité de comptable public, de manier des fonds publics à
la place de celui-ci.

Conseil : Sur la période 2020-2023, la Direction générale des Finances publiques (DGFiP) procède progressivement à une restructuration en profondeur de
son organisation territoriale :

pour les usagers, des accueils de proximité, plus nombreux que les actuels centres des Finances publiques, serviront de point de contact avec le
public. Certains seront intégrés au sein des Maisons France Service (MFS) destinées à permettre un meilleur accès aux services publics dans les
territoires. D’autres pourront prendre la forme de rendez-vous dans des permanences ou des locaux mis à disposition par les collectivités territoriales.
De même, des « services de paiement de proximité » permettent déjà aux usagers de régler leurs factures locales (cantine, crèche, eau, etc.),
leurs amendes et leurs impôts, en espèces jusqu’à 300 € ou par carte bancaire, auprès de plus de 6 000 buralistes partenaires, agréés par la
DGFiP ;

pour les élus locaux, des Services de Gestion Comptable (SGC), regroupant plusieurs Centres des Finances publiques, avec à leur tête un
comptable public, seront responsables de la gestion des comptes des collectivités territoriales qui leur seront rattachés. Un conseiller aux décideurs
locaux (CDL) se consacrera aux demandes des élus locaux de son périmètre de compétence, qui correspondra aux frontières des
intercommunalités. Il s’occupera de l’analyse financière des comptes de la commune, des simulations fiscales avant le vote annuel des taux de
fiscalité directe, des possibilités de financement des projets d’investissement, ainsi que du conseil budgétaire ;

les services fiscaux et les services de contrôle fiscal resteront organisés au sein de la direction départementale des finances publiques (DDFiP) et
de quelques antennes.

Cette réorganisation est la conséquence de la réduction des effectifs du ministère de l’Économie et des Finances. Elle est également liée à la
dématérialisation des tâches et aux nouvelles modalités de gestion des finances locales (GBCP, SFACT, centres de gestion financière, contrôle allégé
partenarial, contrôle sélectif, service fait présumé, etc.). Cette réorganisation va entraîner de nombreuses réaffectations d’agents de la DGFiP.

5.2. Les opérations d’exécution du budget

Les opérations d’exécution des recettes et des dépenses donnent lieu à des procédures formalistes très lourdes. Aussi, dans le cadre de la modernisation de l’
action publique, une dématérialisation des pièces comptables a été mise en place :

les opérations d’exécution des recettes fiscales, qui constituent plus de 90 % des recettes budgétaires de l’État, se déroulent en quatre phases
successives :

l’opération d’assiette consiste à déterminer le montant de la base imposable de chaque contribuable, conformément aux règles fiscales en
vigueur. L’assiette peut donner lieu à une évaluation directe faite par les services de la DGFiP, ou à une évaluation sur la base des déclarations
des contribuables (pour le calcul de l’impôt sur le revenu par exemple). Désormais, la quasi-totalité de ces déclarations est faite en ligne sur le
site internet « impots.gouv.fr », et, s’il n’y a pas de modification de la situation du contribuable par rapport à l’année précédente, celui-ci, après
avoir vérifié les informations préremplies, bénéficie de la déclaration automatique,

l’opération de liquidation consiste à calculer le montant de l’impôt dû par le contribuable, en application des règles fiscales en vigueur. Il s’agit
d’appliquer le ou les taux de l’impôt considéré à la base imposable, pour déterminer le montant d’impôt que chaque contribuable doit payer,
l’opération d’émission du titre de recettes consiste à émettre un titre de perception sous la forme d’un rôle nominatif pour les impôts directs
(impôt sur le revenu par exemple). Il s’agit d’une liste alphabétique des contribuables qui indique le montant de l’impôt réclamé à chacun. Un
extrait de ce rôle est adressé à chaque contribuable sous la forme d’un avis d’imposition. Pour les impôts indirects (TVA par exemple), un tel
ordre de recettes n’est pas nécessaire, car le contribuable se libère directement de son impôt, qui est liquidé et recouvré en même temps au
moment de l’achat du bien ou du paiement de la prestation de services,

l’opération de recouvrement consiste à procéder à l’encaissement de la créance fiscale. Lorsque le contribuable refuse de payer, le
comptable de la DGFiP peut, après mise en demeure, mettre en œuvre la procédure de recouvrement forcé. La procédure de la saisie
administrative à tiers détenteur est la mesure d’exécution la plus utilisée. Elle permet au comptable de s’adresser directement à un tiers qui
détient des fonds du débiteur (banques) ou qui rémunère celui-ci (employeur). Les sommes disponibles sont alors saisies au profit de l’État ;

Conseil : Depuis le 1er janvier 2019 a été mis en place le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu. Ce prélèvement consiste à retenir l’impôt
directement sur le salaire du contribuable. Celui-ci déclare ensuite, au printemps, ses revenus et paye le reliquat d’impôt. Sont concernés les salariés, les
retraités, les demandeurs d’emploi, les travailleurs indépendants. Les revenus des capitaux mobiliers et les plus-values immobilières sont déjà prélevés à la
source. Pour les salariés, l’impôt est prélevé par l’employeur sur la base d’un taux d’imposition calculé et transmis par l’administration fiscale, au même titre
que les cotisations sociales. L’employeur n’est informé ni de la situation familiale ni des autres revenus perçus par le salarié. Les travailleurs indépendants
(commerçants, artisans, professions libérales) versent un acompte mensuel ou trimestriel, calculé par l’administration fiscale sur la base des revenus de l’
année précédente. L’impôt continue à être calculé au niveau du foyer fiscal.

les opérations d’exécution des dépenses se déroulent également en quatre phases :

l’opération d’engagement peut résulter d’un acte juridique par lequel l’ordonnateur crée une obligation financière pour l’État (arrêté de
nomination, bon de commande, marché public, etc.). L’engagement peut aussi résulter d’une décision de justice qui condamne l’État à une
indemnité, ou d’un fait dommageable qui l’oblige à indemniser une victime. L’engagement de la dépense va permettre la réalisation d’une
opération matérielle (la nomination de l’agent, la commande de la fourniture, les travaux, etc.),

l’opération de liquidation a pour objet, pour l’ordonnateur, de calculer le montant de la dette de l’État, lorsque l’opération matérielle a été
réalisée (règle du service fait). En effet, en principe, il ne peut pas y avoir de paiement par avance. Par exception, dans le cadre des marchés
publics, des acomptes peuvent être versés. De plus, la règle du « service fait présumé » a été mise en place pour pouvoir procéder à la
liquidation de la dépense sans avoir à contrôler la réalité de chaque dépense,

l’opération d’ordonnancement consiste, pour l’ordonnateur, à donner au comptable l’ordre de payer la dépense (mandat de paiement). L’
ordonnancement doit préciser l’imputation exacte de la dépense. Il ne doit pas dépasser les crédits disponibles. Le silence gardé par l’
ordonnateur sur une demande de paiement du comptable public, pendant un délai fixé conjointement par l’ordonnateur et le comptable public,
vaut ordonnancement tacite ;

l’opération de paiement relève du comptable. Avant de procéder au décaissement des fonds, celui-ci doit vérifier la régularité des opérations
précédentes. S’il constate des irrégularités, le comptable doit suspendre le paiement. De même, il ne doit pas non plus payer les dépenses
auxquelles s’applique la prescription quadriennale.

Conseil : La complexité de cette procédure rendait l’exécution des dépenses publiques particulièrement longue. Des améliorations ont donc été apportées
pour rendre cette procédure plus efficace et rapide. Ainsi, le décret GBCP prévoit, dans chaque ministère, la mise en place de responsables chargés de
suivre l’exécution de la dépense dans un souci de meilleure performance, et chargés d’évaluer l’efficacité de la dépense. De plus, le programme
informatique Chorus permet, à partir d’une base de données unique, de faire circuler toutes les données comptables de manière dématérialisée. Il réalise
automatiquement les rapprochements nécessaires entre l’engagement, la certification du service fait, la liquidation de la dépense et la demande de paiement.
Le décret GBCP permet aussi de mettre en place des services facturiers (SFACT) auprès des comptables publics. Ces services reçoivent directement les
factures, ce qui permet au comptable de disposer lui-même des pièces nécessaires au paiement des dépenses. Concrètement, un SFACT regroupe des
agents relevant de l’ordonnateur et du comptable public, formant une seule et même équipe sous la responsabilité du comptable public. Enfin, le décret
n° 2022-1698 du 28 décembre 2022 a prévu la création, sous l’autorité des comptables publics, de centres de gestion financière (CGF) chargés par l’
ordonnateur d’exécuter tout ou partie des opérations de recettes et de dépenses qu’il prescrit. Ces centres peuvent être organisés au sein des services
internes de l’ordonnateur ou confiés, par délégation de gestion, à un organisme externe. Ces centres enregistrent eux-mêmes les opérations de recettes et de
dépenses dans le système d’information financière de l’État (Chorus), sous le contrôle du comptable public.

6. Le contrôle de l’exécution du budget de l’État

Il est essentiel, dans une démocratie, de contrôler l’utilisation des fonds publics, pour déceler les irrégularités, les discriminations, les fraudes et gaspillages.
Pour assurer un contrôle efficace et complet, ont été mis en place des contrôles internes à l’Administration, mais aussi des contrôles externes pour assurer toute l’
impartialité nécessaire. La LOLF a toutefois rendu nécessaire la modification de ces contrôles. En effet, il a fallu renforcer les contrôles qui permettent de mettre
en œuvre la logique de performance, et au contraire alléger les contrôles qui ralentissent les procédures et encadrent de manière trop étroite la responsabilité
des gestionnaires de crédits.

6.1. Les contrôles internes à l’Administration

Ces contrôles, exercés sur les ordonnateurs et sur les comptables, visent à vérifier la régularité de leurs opérations respectives, et à sanctionner les éventuelles
fautes commises :
les contrôles exercés sur les ordonnateurs sont opérés par des contrôleurs budgétaires et comptables ministériels (CBCM), avant même l’exécution
de l’opération financière, et par les comptables publics de l’État, au moment de l’exécution de l’opération :

les CBCM examinent, avant l’année d’exécution, les documents prévisionnels de gestion des responsables de crédits et délivrent ou non leurs
visas. Ils donnent un avis sur les redéploiements de crédits effectués, en cours d’année, par les responsables de programmes, dans le cadre
de la fongibilité. Ils contrôlent la régularité des actes de dépense les plus importants et délivrent leurs visas ou avis préalables,

les comptables publics de l’État sont tenus d’exercer, à l’occasion du recouvrement des recettes et du paiement des dépenses, les contrôles
définis aux articles 19 et 20 du décret GBCP. Ainsi, pour les recettes, le comptable est tenu de s’assurer de leur mise en recouvrement sous
peine d’engager sa responsabilité personnelle et pécuniaire. Toutefois, s’il ne peut obtenir le recouvrement pour des raisons indépendantes de
sa volonté (décès du redevable, par exemple), le comptable peut obtenir que ces recettes soient « admises en non-valeur » par décision de l’
ordonnateur. De même, pour les dépenses, le comptable est tenu de vérifier la qualité de l’ordonnateur, la disponibilité des crédits, l’
imputation de la dépense, l’existence du service fait, les calculs de liquidation, l’existence du visa ou de l’avis préalable du CBCM, l’existence
des pièces justificatives régulières et suffisantes, l’absence de prescription ou de déchéance, et le caractère libératoire du règlement de la
dépense ;

Conseil : Dans la logique de la LOLF, le décret GBCP a mis en place des contrôles plus rapides et efficaces. Ainsi, le contrôle sélectif consiste, pour un
comptable public, à proportionner ses contrôles exercés sur la dépense en fonction des risques et des enjeux (contrôle a priori ou a posteriori, contrôle
exhaustif ou par sondage, contrôle complet ou partiel). Ce contrôle mieux ciblé aboutit à des procédures de paiement plus rapides. De même, le contrôle
allégé partenarial consiste à associer, par convention, l’ordonnateur au contrôle de la régularité des ordres de paiement, par un contrôle interne renforcé au
sein de ses services. Ce dispositif ne conduit pas à supprimer les contrôles du comptable, mais à éviter les contrôles répétitifs et inutiles.

les contrôles exercés sur les comptables publics sont opérés par l’Inspection générale des Finances (IGF). L’IGF peut contrôler tous les postes
comptables de tous les ministères. Tous les organismes publics, semi-publics ou privés, qui bénéficient de fonds publics de l’État peuvent faire l’objet de
ses vérifications comptables. L’IGF ne dispose pas de pouvoir de sanction. Elle ne fait qu’informer le ministre des Finances par des rapports publics. Les
missions de l’IGF ne consistent pas seulement à contrôler la régularité de l’utilisation des fonds publics, mais aussi à évaluer la qualité de la gestion
financière des services de l’État. En 2020, le président de la République a décidé de supprimer le corps des inspecteurs généraux des Finances,
mais le service de l’IGF demeure, composé d’inspecteurs généraux des Finances qui ne disposent plus d’un statut particulier. Il s’agit dorénavant, de
fonctionnaires détachés d’autres administrations, pour une durée limitée.

6.2. Les contrôles externes à l’Administration

Ces contrôles sont effectués à la fois par la Cour des comptes, qui est une juridiction financière indépendante vis-à-vis de l’Administration, et par le Parlement
lui-même, tenu de suivre l’exécution de l’autorisation budgétaire qu’il a accordée au Gouvernement :

les contrôles de la Cour des comptes ont été renforcés par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 qui a ajouté un article 47-2 à la Constitution
de 1958, selon lequel : « La Cour des comptes assiste le Parlement dans le contrôle de l’action du Gouvernement. Elle assiste le Parlement et le
Gouvernement dans le contrôle de l’exécution des lois de finances et de l’application des lois de financement de la sécurité sociale, ainsi que dans l’
évaluation des politiques publiques. Par ses rapports publics, elle contribue à l’information des citoyens » ;

les contrôles exercés par la Cour des comptes sont de nature à la fois administrative et juridictionnelle :

la Cour des comptes exerce un contrôle de nature administrative sur la gestion effectuée par les ordonnateurs. Elle s’assure du bon emploi
des crédits gérés par les services de l’État et par les autres personnes morales de droit public. Elle n’émet que des observations sur l’
utilisation des crédits, et elle ne sanctionne pas les ordonnateurs. Elle se borne à informer les autorités compétentes, mais elle peut saisir, en
cas de délit, la juridiction pénale. Ses observations sont contenues dans le Rapport public annuel adressé au président de la République et
présenté au Parlement, et dans des rapports particuliers ou thématiques. La Cour procède également à la certification des comptes des
administrations publiques,

la Cour des comptes exerce un contrôle de nature juridictionnelle sur les gestionnaires publics (ordonnateurs ou comptables), à l’exception
toutefois des ministres et des élus locaux. Il s’agit de sanctionner les gestionnaires publics qui, par une infraction aux règles d’exécution des
recettes et des dépenses ou à la gestion des biens, ont commis une faute grave ayant causé un préjudice financier significatif. Les
infractions constatées sont sanctionnées par des peines d’amende prononcées par la Chambre du contentieux de la Cour des comptes. La
sanction des fautes purement formelles ou procédurales relève désormais d’une simple logique de responsabilité managériale, c’est-à-dire des
pouvoirs d’appréciation du supérieur hiérarchique du gestionnaire concerné. Le contrôle de la Cour des comptes concerne aussi bien les
gestionnaires publics que les gestionnaires de fait (personnes qui se sont immiscées dans la gestion de fonds publics sans avoir la qualité de
gestionnaire public ou sans être sous son contrôle).

Conseil : Le contrôle juridictionnel des gestionnaires publics a été fondamentalement modifié par l’ordonnance n° 2022-408 du 23 mars 2022. En effet,
jusque-là, ce contrôle ne permettait pas de cibler les opérations les plus importantes sur le plan financier, ni de prendre en compte l’évolution des chaînes
financières qui se traduisent désormais par une imbrication de plus en plus poussée des ordonnateurs et des comptables dans le cadre des procédures d’
exécution budgétaire (services facturiers, centres de gestion financière). Cette ordonnance a supprimé la responsabilité personnelle et pécuniaire des
comptables publics, pour la remplacer par un régime juridictionnel unifié de responsabilité des gestionnaires publics, commun aux ordonnateurs et aux
comptables publics, ciblé sur les opérations financières les plus importantes.

les contrôles du Parlement interviennent en cours d’exécution de la loi de finances, et a posteriori lors du vote de la loi de règlement. Ils ont été
renforcés par la LOLF :
en cours d’exécution de la loi de finances, les parlementaires peuvent poser, à tout moment, des questions écrites ou orales au
Gouvernement sur la gestion des finances de l’État. De même, les commissions des finances des deux assemblées peuvent constituer des
missions de contrôle et d’évaluation (MCE). Ces missions procèdent à toutes les investigations sur pièces et sur place, et à toutes les
auditions qu’elles jugent nécessaires. Lorsque la communication des renseignements demandés ne peut être obtenue au terme d’un délai
raisonnable, les présidents des commissions des finances peuvent demander au juge administratif, statuant en référé, de faire cesser cette
entrave sous astreinte (L. org. n° 2001-692, 1er août 2001, relative aux lois de finances : JO 2 août 2001, p. 12480, art. 59). Lorsqu’une MCE
donne lieu à des observations notifiées au Gouvernement, celui-ci a l’obligation d’y répondre, par écrit, dans un délai de 2 mois (L. org. n° 2001-
692, 1er août 2001, relative aux lois de finances : JO 2 août 2001, p. 12 480, art. 60). Depuis 2018, un « Printemps de l’évaluation » a été mis
en place par la commission des finances de l’Assemblée nationale pour organiser, au premier semestre de l’année, une évaluation des
politiques publiques menées par les ministres. Chaque ministre doit répondre aux observations des rapporteurs de la commission des finances,

lors du vote de la loi relative aux résultats de la gestion (LRG), dont l’objet est de constater les résultats financiers de l’année écoulée et d’
approuver ces résultats, les parlementaires peuvent vérifier si l’autorisation budgétaire a bien été respectée et dans quelles conditions. Ils
disposent de l’assistance de la Cour des comptes, qui élabore alors un rapport sur l’exécution de la loi de finances qui analyse par mission et
par programme l’exécution des crédits. De plus, doit être joint, en annexe au projet de loi relative aux résultats de la gestion, l’avis du Haut
Conseil des Finances publiques qui identifie les écarts entre les résultats de l’exécution de l’année écoulée et les orientations pluriannuelles
du solde budgétaire figurant dans la loi de programmation des finances publiques.

Pour aller plus loin :

A. Baudu, Droit des Finances publiques, Dalloz, coll. Hypercours, 2021

Damien Catteau, Finances publiques : Droit budgétaire, comptabilité publique : Hachette Supérieur, coll. Les Fondamentaux, 2022/2023

M. Collet, Finances publiques : LGDJ, Précis Domat, 2022/2023

Exercices

1. Commentaire de données chiffrées

1.1. Énoncé

Commentez les tableaux de l’article 130 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 portant loi de finances pour 2023 (L. fin. 2023, n° 2022-1726, 30 déc. 2022 :
JO 31 déc. 2022, texte n° 1).

1.2. Corrigé

I. Le tableau de l’équilibre présente les opérations budgétaires de l’État

A. Le montant des recettes et des dépenses budgétaires de l’État

Le tableau de l’équilibre fait apparaître les recettes budgétaires de l’État, révélant ainsi la proportion considérable des recettes fiscales (328,1 milliards
d’ €) par rapport aux autres recettes (30,9 milliards d’ €). Concernant les dépenses budgétaires, il montre leur importance (457,4 milliards d’ € hors
comptes spéciaux) et le montant corrélatif du déficit budgétaire (164,9 milliards d’ €). Le budget général regroupe l’essentiel de ces dépenses
455,2 milliards d’ €), contrairement aux budgets annexes (2,2 milliards d’ €).

B. Le caractère prévisionnel des recettes et des dépenses budgétaires de l’État

Toutes ces données chiffrées n’ont qu’un caractère prévisionnel et évaluatif. Selon le rythme de la croissance économique, un écart plus ou moins
grand pourra être constaté entre ces prévisions et les réalisations constatées dans la loi relative aux résultats de la gestion. Pour 2023, le montant
prévisionnel du déficit budgétaire de l’État est 164,9 milliards d’ €, soit 5,6 % du PIB.

II. Le tableau de financement présente les opérations de trésorerie de l’État

A. La détermination des besoins de financement de l’État

Le tableau de financement fait apparaître les besoins de financement de l’État. Outre le financement du déficit budgétaire (164,9 milliards d’ €), l’État
doit assurer l’équilibre de ses disponibilités (12,6 milliards d’ €), et surtout assurer le remboursement des emprunts qu’il a contractés et qui viennent à
échéance dans l’année (149,5 milliards d’ €).

B. Les différentes ressources de financement de l’État

Les ressources de financement de l’État, faute de recettes budgétaires suffisantes, se résument principalement à l’emprunt. L’État émet donc des
emprunts (270 milliards d’ €) pour financer son déficit budgétaire et rembourser ses emprunts. D’où son endettement de plus en plus important. Pour
2023, la dette publique de la France est estimée 111,2 % du PIB.

2. Commentaire d’une disposition de la loi de finances

2.1. Énoncé
Dans l’état A figurant à la fin de la loi de finances pour 2023 (L. fin. 2023, n° 2022-1726, 30 déc. 2022 : JO 31 déc. 2022, texte n° 1), recherchez le
montant du prélèvement sur les recettes de l’État au profit du budget de l’Union européenne :

pourquoi cette participation financière de la France au budget européen n’est-elle pas répertoriée parmi les dépenses de l’État ?

pourquoi ce mécanisme des prélèvements sur recettes, organisé au profit de l’Union européenne, n’est-il pas considéré comme une atteinte au
principe de la non-compensation des recettes et des dépenses ?

2.2. Corrigé

Le montant du prélèvement sur les recettes de l’État au profit du budget de l’Union européenne s’élève à 24,99 milliards d’euros. Cette participation
financière de la France au budget européen n’est pas répertoriée parmi les dépenses de l’État, parce qu’il ne s’agit pas d’une dépense pour l’État
français. Le mécanisme des prélèvements sur recettes, qui existe au profit des collectivités territoriales et au profit de l’Union européenne, n’est pas
considéré comme une compensation (article 6, alinéa 4 de la LOLF). Ce mécanisme consiste à rétrocéder directement une partie des recettes de l’État
aux collectivités territoriales et à l’Union européenne, sans faire figurer ces opérations en dépenses. Il n’y a pas de compensation car le document
budgétaire énumère, d’une part, la totalité des recettes de l’État et, d’autre part, le montant de chacun de ces prélèvements. Dès lors, ce mécanisme ne
conduit pas à diminuer une recette particulière ni à dissimuler une dépense.

Outils

1. Glossaire

Norme « zéro volume » : l’ensemble des dépenses budgétaires de l’État ne doit pas augmenter plus vite que l’inflation. On parle alors de stabilisation
en volume

Norme « zéro valeur » : les dépenses budgétaires de l’État, hors charge de la dette et pensions, ne doivent pas augmenter en valeur réelle, c’est-à-dire
que leur montant ne doit pas augmenter par rapport à l’année précédente. On parle alors de stabilisation en valeur réelle. Les charges de la dette
(intérêts des emprunts) et les pensions (pensions des retraités) connaissent, quant à elles, une augmentation inexorable

Prélèvements obligatoires : il s’agit des impôts et des cotisations sociales

2. Conseils/Pièges à éviter

Connaître les 3 composantes de la croissance économique : dépenses de consommation des particuliers, dépenses d’investissement des entreprises,
solde du commerce extérieur (importations/exportations).

Ne pas confondre équilibre budgétaire (solde des opérations budgétaires) et équilibre financier (solde des opérations de trésorerie).

Ne pas en rester à une approche abstraite des finances publiques : consulter les documents budgétaires disponibles sur le site officiel du ministère des
Finances ( www.budget.gouv.fr ).

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