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Finances publiques

Université Jean Moulin Lyon 3 / Université Aïn Chams


Jérémy Bousquet
Maître de conférences

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Introduction
L’étude des finances publiques consiste à observer les flux d’argent public, c’est-à-dire les
recettes qui alimentent les caisses des administrations publiques et qui permettent de
financer leur action, mais aussi les dépenses que ces administrations réalisent. Ce flux
d’argent public présente de nombreux traits singuliers : l’Etat, les communes, les universités,
ne gagnent pas leur vie et ne gèrent pas leurs fonds comme un particulier ni comme une
entreprise privée.

Les finances publiques sont intimement liées à la notion même d’Etat - peut-il même y avoir
un Etat sans finances ? – et dès lors, elles existent sous une forme ou une autre depuis
l’apparition de l’Etat organisé, sous l’Antiquité, voire au-delà. Néanmoins, au Moyen Age
notamment, ces finances publiques se conçoivent comme les finances du royaume, voire
du roi lui-même et, dans une conception alors plus étroite, l’apparition des finances
publiques est liée à l’apparition d’un droit de regard du peuple, par le biais de ses
représentants, sur les finances de la nation.

On remarquera alors que de tout temps, le rôle du Parlement dans les institutions est
intimement lié à son pouvoir en matière budgétaire. Ainsi, l’histoire des finances publiques
peut-elle s’analyser comme un cycle dans lequel se succèdent les phases d’accroissement et
de réduction des pouvoirs budgétaires du Parlement et permet de comprendre les
motivations qui ont conduit à la modernisation des finances publiques par une réforme très
importante ayant conduit à l’adoption de la loi organique sur les finances publiques du 1 er
août 2001.

Il faut alors s’intéresser à la dimension politique du pouvoir budgétaire avant de voir le


cadre juridique des finances publiques.

1. La dimension politique du pouvoir budgétaire


Comme l’énonce Gaston Jèze : « Le budget est un acte politique puisqu’il traduit et met en œuvre les
choix politiques d’un gouvernement donné ». Le pouvoir financier est depuis ses plus lointaine
origines, très étroitement imbriqué avec le pouvoir politique. La gestion de l’argent public
vise simplement à accompagner l’action des pouvoirs publics, en leur donnant les moyens
financiers de réaliser les projets politiques qu’ils se fixent. En un mot, cette gestion vise à
garantir le financement des missions d’intérêt général. D’ailleurs, le mot budget a acquis un
sens ayant une forte connotation publique : acte de prévision et d’autorisation des dépenses
et des recettes de l’Etat
C’est en effet lors de l’établissement du budget de l’Etat lors de l’élaboration, chaque année
des lois de finances, que va être prévu les grandes orientations politiques de l’Etat, ce que
l’Etat va dépenser, dans quel secteur et pour quel montant.

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Il est alors possible d’identifier un objectif politique qui est principalement attaché depuis
la Révolution française de 1789 aux règles de droit qui encadrent la manière dont l’Etat gère
ses finances : l’objectif de légitimer le prélèvement des impôts, le principe du consentement
à l’impôt (A). Au-delà, les finances publiques sont un indicateur de puissance de l’Etat car
elle montra sa santé économique (B).
A. Le consentement à l’impôt
L’apparition des finances publiques est liée à celle du droit de regard des parlementaires sur
les finances du royaume et à l’apparition du principe du consentement à l’impôt puis à la
reconnaissance des pouvoirs budgétaires du Parlement. Il est courant de faire remonter au
XIIIe siècle la première affirmation de l’idée selon laquelle l’impôt ne peut être
éternellement levé sans l’accord des contribuables. Avec ce principe, l’impôt sera établi en
fonction de règles juridiques auxquelles auront acquiescé les contribuables ou leurs
représentants (parlement) et pas seulement en raison du bon vouloir du souverain.
1. L’origine britannique
C’est en Angleterre que le principe de consentement à l’impôt est apparu au XIIIe siècle.
Le roi Jean sans Terre, après de nombreuses batailles infructueuses subit une révolte de la
noblesse anglaise. Les barons anglais réussissent alors à imposer au roi la Grande Charte
(Magna Carta) du 15 juin 1215 mettant fin à l’arbitraire du roi. Il va ainsi consentir à la
formation s’assemblée obligatoirement consultées en matière fiscale. Cette charte
considérée comme l’acte de naissance du parlementarisme affirme explicitement le principe
selon lequel l’impôt ne peut être levé sans que ceux qui l’acquittent, ou au moins leurs
représentants y consentent : no taxation without representation (pas d’impôt sans
représentation). A présent, l’impôt ne peut être levé, selon l’article 12 de ce texte, qu’après
que le Conseil commun du royaume n’ait donné son consentement.
Cette reconnaissance a néanmoins été plus progressive et surtout plus violente, les rois
anglais n’ayant de cesse de se confronter à la noblesse et de contourner la Grande charte en
particulier s’agissante de la levée des impôts. C’est notamment au XVIIe siècle, sous Charles
1er, que le conflit va devenir plus violent. En effet, Charles 1 er a besoin d’argent et va
contourner le Parlement principalement en créant des impôts indirects. Le conflit éclate à
nouveau entre le roi et ce qui est devenu le Parlement qui est dissous à plusieurs reprises.
Finalement le roi est contraint d’accepter un texte fondamental, la Pétition des droits
(Petition of Rights) du 7 juin 1628 qui renouvelle le principe de consentement de l’impôt en
étendant d’ailleurs son périmètre à l’ensemble des impositions. A présent, chaque année, le
Parlement doit autoriser le roi à percevoir les impôts. Malgré cela, le roi Charles 1 er décida
par la suite de lever de nouvelles taxes douanières sans l’aval du Parlement ce qui conduira
à une révolution et à la décapitation du roi en 1649.
2. La réception française tardive

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En France, le principe de consentement à l’impôt a eu plus de mal à s’imposer. En réalité il
apparait dès le XIIe siècle par le biais de la convocation des Etats généraux (représentant
des trois ordres : le clergé, la noblesse et le tiers Etats) chargés d’autoriser le roi à lever
l’impôt. Mais dès le XVe siècle, le roi obtient un droit permanent de lever l’impôt et
s’affranchit donc du consentement des Etats généraux qui ne seront plus réunis jusqu’en
1789.
Dans un contexte financier dégradé, Louis XVI convoquera les Etats généraux en 1788 et
seront réunis en 1789. Bien entendu, ces etats généraux se concluront par la Déclaration
des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 qui entre autres, consacre le principe
de consentement à l’impôt en son article 14 et va même au-delà puisqu’il fonde le droit
budgétaire avec un droit de contrôle des citoyens et de leurs représentants) sur les comptes
publics en son article 15.
C’est à partir de ce texte que le législateur français doit adopter tous les ans un budget, c’est-
à-dire un document de prévision et d’autorisation détaillé des recettes comme des dépenses
de l’Eta pour l’année à venir que l’on nomme la loi de finances. L’élaboration de ce budget
et son exécution est alors soumis à un ensemble de règles et de principes que l’on regroupe
sous le terme droit budgétaire ou droit des finances publiques.
B. La mesure de la puissance de l’Etat
Les finances publiques sont un facteur de puissance pour l’État. Selon l'économiste
autrichien Joseph Schumpeter (1883-1950), "ce sont les besoins financiers qui ont été à
l’origine de l’État". Depuis l’Antiquité, le pouvoir politique s’est toujours préoccupé de
l’organisation de ses finances parce qu’elles sont un outil pour assurer sa puissance et le
bien être de sa population.
À partir de la fin du Moyen-Âge, en France, un système financier organisé et performant
procure au roi les ressources stables et dynamiques dont il a besoin pour :
• faire la guerre (défendre ou accroître son territoire) ;
• pour asseoir son pouvoir : financer un appareil judiciaire remplaçant la justice des
ecclésiastiques et des Seigneurs, par exemple).
La perception des recettes permet de mettre en place un appareil administratif puissant sur
tout le territoire. Le poids des finances publiques révèle l’importance du rôle de l’État dans
la société. Elles prennent en charge des besoins nouveaux et n’ont jamais cessé de croître.
Au XXe siècle, l’impôt devient aussi un outil de justice sociale à travers la redistribution des
revenus.
Cette puissance de l’Etat en matière financière apparait à travers deux notions
fondamentales que sont les ressources/recettes de l’Etat – l’argent que l’Etat peut lever, ce
dont il dispose – et les dépenses de l’Etat, ce qu’il va dépenser pour assurer des missions
d’intérêt général. Plus un état à de ressources et plus un Etat dépense, plus il est puissant
car en bonne santé économique.
a. Les recettes
- Les prélèvements obligatoires :

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Sont des prélèvements obligatoires, les versements opérés par les agents économiques aux
administrations publiques afin de financer leurs dépenses. Ils constituent à peu près 46%
des recettes totales de l’Etat. Ils sont constitués de l’impôt et des cotisations sociales.
L’impôt est une prestation pécuniaire requise des particuliers ou des entreprises par voie
d’autorité, à titre définitif et sans contrepartie, en vue de la couverture des charges
publiques. Il est voté par le législateur et son prélèvement est autorisé chaque année par la
loi de finances. On distingue l’impôt selon qu’il porte sur les revenus (impôt sur le revenu,
impôt sur les sociétés), sur le capital (impôt sur la fortune immobilière, droits de succession
et de donation, taxe foncière etc.) ou sur la consommation (TVA par exemple).
Les prélèvements sociaux quant à aux (cotisations sociales) sont constitués des apports des
personnes protégées ou de leurs employeurs à des institutions octroyant des prestations
sociales en vue d’acquérir et de maintenir le droit à des prestation. Ces cotisations se
définissent alors comme des versements obligatoires effectués par les personnes physiques
et leur employeur pour acquérir des droits à des prestations sociales (allocations chômage,
allocations familiales, remboursement des soins médicaux etc.)
Si la fonction principale de ces prélèvements est d’alimenter les caisses publiques, il est
apparu qu’il s’agissait également d’un outil permettant de favoriser certains objectifs de
politique économique et sociale. Il s’agit même d’un outil permettant d’inciter les personnes
à privilégier certains comportements (moins imposés) au détriment d’autres (plus imposés).
- L’emprunt
Pour financer le déficit, c’est-à-dire la différence négative entre les recettes et les dépenses,
couvrir son besoin en financement et assurer le paiement des emprunts arrivant à échéance,
l’Etat recourt à l’emprunt ce qui a pour conséquence de créer une dette d’Etat. En effet, les
Etats ont un besoin de financement lorsqu’il existe une différence entre les recettes et les
dépenses en cas de solde négatif. La dette s’autoalimente des déficits successifs et des
charges d’intérêts liées à son remboursement. En d’autres termes, la dette s’accroit
mécaniquement du fait d’un recours continu à l’emprunt.
La soutenabilité de la dette exprime la capacité d'un État à rembourser ses emprunts et donc
sa solvabilité. Elle est liée aux recettes prévisibles qui permettront de rembourser, à moyen
terme, la dette et l'ensemble des frais associés, ainsi que les intérêts qui s'y rattachent La
soutenabilité de la dette est généralement rapportée au produit intérieur brut (PIB).
Au-delà, l’emprunt est lié à la confiance placée par les marchés dans le sérieux budgétaire
et les perspectives de croissance économique des Etats. Les agences de notation peuvent
dégrader la note qu'ils attribuent à des pays jugés à risque car peu solvable et donc peu
crédible et sommés, à ce titre, de faire la preuve de leur capacité à contenir l'augmentation
de leur dette publique et à réformer leur système économique pour convaincre les marchés,
composés d'investisseurs de leur prêter de l'argent à faible coût.
- Les ressources diverses
D’autres ressources représentent des montants plus modestes. S’agissant de l’Etat, on peut
citer les intérêts des différentes formes de prêts et avances octroyés à des tiers (entre 500
millions et 1 milliard par an) le produit des amendes et des autres pénalités notamment
pénales (1 à 2 milliards par an) et d’autres recettes diverses (revenus de l’exploitation de ses
propriétés, frais d’inscription à des concours ou examens publics).

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Ces ressources diverses sont souvent liées au pouvoir de contrainte de l’Etat.
b. Les dépenses
L’histoire des dépenses publiques est celle d’une constante et importante progression
depuis le 19e siècle. Si en 1914 en France, la dépense publique représentait 12% du PIB, elle
représente aujourd’hui 57%.
Les dépenses publiques augmentent mécaniquement et constamment pendant le 19e siècle
et cette augmentation devient de plus en plus importante au 20e. En effet, le développement
de l’État-providence (notamment par la logique assurantielle et prestataire de service)
entraine la prise en charge accrue et progressive par l’Etat des missions de plus en plus
diversifiées d’où un alourdissement des charges publiques.
Les dépenses de l’Etat recèlent deux spécificités : le poids des dépenses de personnel et la
charge des intérêts de la dette.
- Les dépenses de personnel représentaient en moyenne au début des années 2000,
40% du budget de l’Etat. Ce poids conséquent a justifié qu’un intérêt particulier leur
soit accordé avec l’objectif d’en diminuer le montant.
- La charge de la dette de l’Etat, soit le montant des intérêts dus au titre des emprunts
contractés représente un autre poste budgétaire important au sein du budget de
l’Etat. En 2018, elle représente 12% des dépenses de l’Etat.
2. Le cadre juridique des finances publiques
Les normes applicables ç la matière budgétaire s’apprécient en fonction de leur valeur
juridique qu’elles soient constitutionnelles, organique ou législatives. Pour l’essentiel, ces
normes permettent d’identifier les voies et actions des finances publiques notamment par
la détermination et la répartition institutionnelle des pouvoirs financier et budgétaire. A ce
titre, il faut comprendre que le rôle du parlement dans les institutions est intimement lié à
son pouvoir en matière budgétaire. L’histoire des finances publiques est un cycle dans lequel
se succède finalement les phases d’accroissement et de réduction des pouvoirs budgétaires
du Parlement. Cela permet de comprendre et c’est très important, les motivations qui ont
conduit à la modernisation des finances publiques par la loi organique du 1er août 2001
(LOLF), et le décret du 7 nov. 2012 sur la gestion budgétaire et la comptabilité publique
qui est venu la compléter. Ce renforcement du pouvoir du parlement en matière budgétaire
apparait tant à travers les normes constitutionnelles que législatives applicables.
A. Le lien entre régime politique et ambition financière : les normes
applicables
- DDHC : ce texte fondamental en droit français a un lien avec les finances publiques
voire même, comme on l’a vue, leur sert de fondement. Ainsi l’article 13 prévoit le
principe de nécessité de l’impôt. L’article 14 fonde le principe de légalité de l’impôt
et donc la compétence du législateur pour fixer un impôt. L’article 15 fonde les règles
de comptabilité publique et surtout la mission de contrôle du Parlement et la mission
d’assistance en la matière de la Cour des comptes.

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- La Constitution du 4 octobre 1958 : plusieurs dispositions intéressent la matière
financière et sont intéressantes puisqu’elles conduisent à un encadrer assez fortement
le rôle du Parlement.
• Son article 34 réaffirme la compétence du Parlement pour adopter les lois de
finances. Il rappelle également le principe du consentement à l’impôt en
évoquant la compétence du Parlement pour fixer l’assiette, le taux et les
modalités de recouvrement des impositions de toute nature.
• Son article 39 exprime le principe de priorité de l’Assemblée nationale dans le
vote des lois de finances mais donne compétence pour initier et établir la loi de
finances au Gouvernement. Cette règle de priorité de l’AN sur le sénat provient
du principe du consentement à l’impôt tel que doit l’exprimer la représentation
nationale dont la chambre basse est la première manifestation.
• L’article 40 de la Constitution limite le pouvoir d’initiative et d’amendement du
Parlement : les parlementaires sont strictement encadrés dans leurs possibilités
de modifier le contenu des lois de finances présentés par le Gouvernement (ils
ne peuvent que réduire la dépense ou augmenter une ressource).
• L’article 47 enserre le Parlement dans de strictes limites de temps pour adopter
les lois de finances. Il ne dispose que d’un délai global de 70 jours pour adopter
ou rejeter le projet de loi de finances du Gouvernement. Si le Parlement ne vote
ni l’adoption ni le rejet, passé ce délai, le Gouvernement la mettra en vigueur lui-
même.
- La loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001 : les lois organiques
ont vocation à préciser le contenu de la Constitution. En raison de leu importance,
ces lois sont adoptées selon une procédure particulière (article 46 C°) et soumises
obligatoirement au contrôle de constitutionnalité exercé par le Conseil
constitutionnel. En matière de finances publiques de l’Etat c’est la LOF de 2001 qui
vient précise le contenu de la Constitution. Ce qui est important de comprendre,
c’est que cette loi a conduit à un renforcement du rôle du Parlement et à une
modernisation des finances publiques qui doivent être performantes.
Cette loi apporte les précisions nécessaires en vue de l’adoption des lois de finances
par le Parlement. Y est également précisé le rôle de ce dernier dans le contrôle de
l’exécution de ces lois par le gouvernement. C’est d’ailleurs à cet effet que l’article
47 de la Constitution renvoie à une loi organique la détermination des conditions de
vote des projets de lois de finances.
La LOLF remplace un précédent texte organique en date du 2 janvier 1959 adopté
en période d’installation des institutions de la Ve république et qui a rencontré de
nombreuses limites : dispositions inconstitutionnelles, inapplicables ou incertaines
dans leur interprétation. Il était en réalité devenu nécessaire de modifier ce texte de
1959.

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Avec les dispositions de la LOLF, deux perspectives doivent être appréhendées :
l’objectif a été clairement ciblé par les parlementaires, véritables auteurs de la LOLF
contrairement au décret de 1959, de rénover le pouvoir financier du Parlement mais
aussi d’améliorer la gestion publique.
Il faut aussi préciser qu’un décret en date du 7 novembre 2012 relatif à la gestion
budgétaire et comptable publique (RGCP) vient compléter cette loi et s’intéresse à
l’exécution budgétaire. Ces dispositions ont vocation à préciser : le rôle des acteurs
de l’exécution budgétaires que sont les ordonnateurs et les comptables publics ; les
règles d’exécution des opérations de dépenses et de recettes.
B. Les différentes lois de finances applicables
a. LOLF = Loi Organique Relative aux Lois de Finances
Loi générale et unique d’organisation de toutes les lois de finances annuelles. Valeur infra-
constitutionnelle et supra-législative.
Son objectif est une plus grande efficacité de l’action administrative, donc elle importe les
mécanismes des entreprises privées (management) et se fonde sur une gestion de
« performance ».
L’action publique doit être :
Economique (recherche du moindre coût)
Efficace (rapport des résultats par rapport aux objectifs)
Efficiente (rapport des résultats par rapport aux moyens)
Nouvelle structure du budget :
Missions : Le Parlement vote le budget par mission (unité de vote). Une mission est créée à
l’initiative du Gouvernement et peut être ministérielle ou interministérielle. La mission
regroupe un ensemble de programmes concourant à une même politique publique. Le
Parlement peut modifier la répartition des dépenses entre programmes au sein d’une même
mission. Il y en a 33 ;
Programmes : Le programme est l’unité de l’autorisation parlementaire. Il constitue une
enveloppe globale et limitative de crédits. Il relève d’un seul ministère et regroupe un
ensemble cohérent d’actions. On compte 138 programmes pour le budget général
Actions : Découpage indicatif du programme, l’action apporte des précisions sur la
destination prévue des crédits. Pour la mission « Sécurités », qui figure au budget général
de l’État pour 2022, le programme « Police nationale » comprend par exemple les actions
suivantes :

• ordre public et protection de la souveraineté


• sécurité et paix publiques
• sécurité routière
• police des étrangers et sûreté des transports internationaux
• missions de police judiciaire et concours à la justice
• commandement, ressources humaines et logistique

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Indicateurs de performance mentionnés dans les PAP projets annuels de performance, et
dans les RAP rapports annuels de performance. Pour chaque programme, un projet
annuel de performance définit des objectifs, dont la réalisation est mesurée par des
indicateurs. À l’issue de l’exercice, le rapport annuel de performance mentionne les
résultats. Ces objectifs permettent d’aborder l’action publique de différents points de
vue :

• par son efficacité socio-économique : par exemple, la réponse aux besoins de


qualification supérieure, mesurée par le taux d’insertion des jeunes diplômés trois
ans après leur sortie de formation initiale ;
• par la qualité du service rendu à l’usager : par exemple, l’accroissement de
l’effectivité et de la qualité des décisions prises au sein des maisons
départementales des personnes handicapées, mesuré par le délai moyen de
traitement des dossiers déposés auprès de celles-ci ;
• par l’efficience de la gestion : par exemple, le coût kilométrique de construction
des routes permet de mesurer l’objectif de réalisation au meilleur coût des projets.

b. LFI = la loi de finances initiales

L’exercice budgétaire débute avec l’adoption de la loi de finances de l’année Elle prévoit et
autorise pour l’année à venir les dépenses et les recettes de l’Etat. Souvent désignée par son
millésime, par son année d’exécution qui est toujours l’année d’après l’année de vote : lf-
pour 2022 est votée en 2021, soit n-1. Elle est obligatoire et l’article 47 de la Constitution
prévoit qu’elle doit être votée impérativement avant le 1er janvier. C’est elle qui va autoriser
pour l’année à venir les dépenses et les recettes de l’État. C’est le document de référence
pour une année budgétaire.

Première caractéristique de cette loi de finances, son caractère prévisionnel et aléatoire car
elle est basée sur des perspectives de croissance qui, certes, doivent être les plus
vraisemblables possibles mais qui peuvent présenter des décalages en phase d’exécution. Ce
caractère prévisionnel explique que la loi de finances puisse être modifiée en cours
d’exercice par une ou des lois de finances rectificatives.

c. LFR = loi de finances rectificatives

Parce que la loi de finances initiales peut ne pas correspondre aux réalités rencontrées en
phase d’exécution, le Gouvernement a la possibilité de solliciter le Parlement en vue de
l’adoption d’une loi de finances rectificative. Une loi de finances rectificatives intervient
obligatoirement si les grandes lignes de l’équilibre économique et financier défini par la loi
de finances initiales sont modifiées (cas en crise économique ou sanitaire par exemple).

Plus concrètement, une loi de finances rectificatives doit être adoptée lorsque, en cours
d’exercice budgétaire, donc année n, si des mesures ont affectée l’exercice budgétaire et
donc la loi de finances initiales telle qu’elle a été votée à l’année n-1.

Ces LFR sont présentées dans les mêmes formes que la loi de finances initiales.

d. La loi de règlement
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Une fois l’exercice budgétaire achevé, une loi de règlement rend compte des dépenses
effectivement réalisées et des recettes réellement perçues. Cette loi permet de constater les
résultats financiers de chaque année civile et d’approuver les différences entre les résultats
et les prévisions de la loi de finances initiales et des lois de finances rectificatives. Une loi
de règlement intervient donc a posteriori, à l’année n+1, et ne s’inscrit pas dans la même
logique que les lois de finances I et R.

Chainage vertueux : La LOLF prévoit (article 41) que la discussion du projet de loi de
finances pour l’année à venir (n+1) ne pourra débuter avant le vote de la loi de règlement
de l’année afin que les parlementaire, avant de voter la nouvelle loi de finances ait une idée
précise de la situation antérieure des finances. En gros, les parlementaires doivent connaître
désormais de l’exécution budgétaire de l’année n-1 pour voter de manière éclairée le budget
de l’année n+ 1. Le but est seulement l’information du Parlement car même un vote négatif
du Parlement sur la LR permet de passer à la discussion sur la LFI.
e. LPFP = Lois de programmation des finances publiques
L’article 34 de la Constitution consacre les lois de programmation des finances publiques,
catégorie de lois appelée à définir « les orientations pluriannuelles des finances publiques »
et devant s’inscrire dans « l’objectif d’équilibre des comptes des administrations publiques ».

Concernant les dépenses de l’État, la loi de programmation des finances publiques définit
pour les 3 premières années de la programmation les plafonds des crédits des missions du
budget général, constituant le budget triennal de l’État qui sert de cadre à la préparation
des projets de loi de finances, qui demeurent votés chaque année par le Parlement. Cette
démarche pluriannuelle constitue le cadre indispensable pour mettre en œuvre les réformes
structurelles qui permettront de dégager les ressources nécessaires au financement des
priorités de l’action.

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CHAPITRE 1. L’ELABORATION DES LOIS DE FINANCES
Dès le XIXe siècle, sous la Restauration, le baron Louis avait énoncé une règle des quatre
temps alternés : si le gouvernement prépare le budget et l’exécute, le Parlement décide et
contrôle. Ce calendrier manifeste une répartition des compétences alternées où le rôle du
Parlement n’est en rien dérisoire. L’objet de cette leçon sera d’étudier la phase de décision
budgétaire et la phase de contrôle du Parlement. On va ici s’intéresser au calendrier
d’adoption de la LFI, à la manière dont elle est élaborée et votée, et par qui.
Section 1. La préparation de la loi de finances initiale par le gouvernement
C’est une étape très importante dans laquelle le gouvernement va jouer un rôle important
en particulier le premier ministre. Ce dernier va avoir une autorité importante en la matière,
la LOLF précisant à son article 38 qu’il « prépare les projets de lois de finances qui sont
délibérées en conseil des ministres ». Il s’agit de plus d’une phase technique et complexe qui
demande donc beaucoup de temps. Il ne fait tout de même tout cela pas seul, il est
fortement aidé par le ministre des finances et la direction du budget qui est une
administration du ministère des finances
§1. Les conférences budgétaires
Février à avril : conférences budgétaires ou conférences d’économies structurelles, entre le
ministre des finances et les ministères dépensiers.
Il s’agit de réunions entre les ministres et la direction du budget qui consistent en des
négociations budgétaires. La direction du budget va chercher à faire des économies et suivre
les grandes orientations budgétaires fixées par le premier ministre en amont, alors que les
ministres dépensiers vont chercher à préserver leurs crédits voir même à obtenir plus de
crédits que l’année passée.
§2. Les arbitrages du Premier ministre
S’en suit alors les arbitrages du Premier ministre. Ils vont se dérouler pendant les mois
d’avril, mai et juin. Au cours de ces mois, chaque ministre va discuter avec le premier
Ministre pour essayer d’obtenir des crédits supplémentaires ou faire pencher la balance de
leur côté par rapport aux conférences budgétaires. Finalement, même si la direction du
budget n’est pas d’accord, ce sera toujours le premier ministre qui décidera et qui rendra ses
arbitrages si les deux parties ne sont pas d’accords. Ces arbitrages vont se matérialiser dans
les lettres de cadrage que le premier ministre envoie à chacun des ministres et qui fixe les
crédits qu’il compte octroyer à chacun.
§3. Le débat d’orientation des finances publiques au Parlement
Parallèlement, au mois de juin ou au mois de juillet, le Gouvernement va ouvrir avec le
Parlement un débat d’orientation des finances publiques afin de lui présenter les grandes
lignes du projet de lois de finances et ne pas exclure totalement le Parlement de cette phase
de préparation. Ce débat est prévu à l’article 48 de la LOLF mais n’en fait pas une obligation.
En pratique, il est tout de même organisé chaque année en juillet ce qui permet que soient
communiqués par le gouvernement les plafonds de crédits arbitrés par le Premier ministre.

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Le débat d’orientation des finances publiques ne remet pas en cause le rôle de l’Exécutif
dans l’élaboration du projet de loi de finances. Il s’agit plutôt d’une consultation du
Parlement sur les choix budgétaires du Gouvernement. Cela évite ainsi une opposition trop
importante de la part des parlementaires à certains choix budgétaires du Gouvernement
lors du vote du projet de loi de finances.
L’article 48 prévoit également que des documents soient fournis aux parlementaires pour
ce débat, notamment un « rapport sur l’évolution de l’économie nationale et sur les
orientations des finances publiques ». La loi organique prévoit que ce rapport contienne
certains documents qui permettent au Parlement d’avoir une vue assez fidèle sur le projet
de loi de finances qu’il va devoir voter en fin d’année.
§4. La finalisation du budget
C’est la période la plus longue, durant les mois de juillet, août et une bonne partie du mois
de septembre. Le ministre des finances va ajuster les recettes aux dépenses et ajuster les
crédits alloués aux différents ministres aux termes d’une seconde vague de conférences
budgétaires moins déterminantes que la première puisqu’il ne s’agit que d’ajuster à la marge.
On répartit alors les crédits entre les différentes missions et les programmes.
Le projet de lois de finances sera alors prêt à être voté par le Conseil des ministres en
septembre. Une fois votée, il est déposé au plus tard le 1er mardi d’octobre sur le bureau de
l’Assemblée nationale. On passe alors à la deuxième phase de l’élaboration des LFI,
l’adoption par le Parlement.
Section 2. L’adoption de la loi de finances initiale par le Parlement
La loi de finances initiales est adoptée selon les modalités évoquées par l’article 47 de la
Constitution telles que précisées par les dispositions de la LOLF : délais et règles de vote
sont déterminés dans un souci de rationalisation de la procédure législative. Voila pourquoi
les délais sont strictes et le Parlement encadré dans son pouvoir.

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§ 1. Les délais
Afin de s’assurer d’une adoption de la loi de finances avant que ne débute l’exercice
budgétaire auquel elle s’applique, des délais d’adoption ont été prévus. Ces délais
garantissent le respect du principe d’annualité budgétaire. Je ne le développerai pas mais
sachez que l’hypothèse a été envisagée d’un retard dans l’adoption de la loi de finances :
dans ce cas, le Gouvernement peut recourir à des procédures d’urgence qui lui permettent
de minimiser les implications de ce retard.
En application de l’article 39 de la Constitution, « les projets de loi de finances sont soumis
en premier lieu à l’Assemblée nationale », le Sénat n’intervient qu’après que l’AN n’ait
adopté le texte.
Le Parlement dispose d’un délai de 70 jours au total pour adopter ou rejeter la LFI à
compter du dépôt du projet par le Gouvernement. Dans ce laps de temps, si l’AN n’a pas
émis un vote en première lecture dans un délai de 40 jours, le Gouvernement saisit le Sénat
qui dispose d’un délai de quinze jours pour se prononce (art. 40 Lolf). EN revanche, si l’AN
a respecté le délai qui lui était imparti, le Sénat dispose d’un délai de 20 jours pour se
prononcer.
Si le Sénat n’a pas émis un vote en première lecture sur l’ensemble du projet de loi de
finances dans le délai imparti, le Gouvernement saisit à nouveau l’Assemblée du texte
soumis au Sénat, modifié, le cas échéant par les amendements votés par le Sénat. Le projet
de LFI est alors examiné selon une procédure d’urgence prévue à l’article 45 de la
Constitution : intervention de la Commission mixte paritaire qui a pour but de concilier les
positions politiques des deux chambres et obtenir un texte commun (le texte est ensuite
soumis au vote des deux assemblées). Si le texte commun est rejeté par l’une ou l’autre, le
dernier mot accordé à l’Assemblée nationale.
§ 2. L’encadrement du Parlement
A. Les possibilités de vote contraint de la loi de finances
Le Gouvernement dispose, au fil du débat budgétaire, de mesures de contraintes pour
accélérer ou faciliter le vote de la loi de finances. Ces mesures s’entendes des irrecevabilités
opposées aux amendement non présentés en commission (art. 44, al. 2 Constitution), du
vote bloqué (art. 44 al. 3) et de l’engagement de la responsabilité du Gouvernement (art. 49
al 3.).
- L’irrecevabilité des amendements non présentés en commission : cet article permet
au Gouvernement, après l’ouverture du débat parlementaire, de s’opposer à
l’examen de tout amendement qui n’a pas été antérieurement soumis à la
commission des finances de chacun des assemblées.

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- Le vote bloqué : Ici la discussion ne s’arrête pas mais les modalités de vote changent.
Article que le gvtn peut utiliser soit à l’AN soit au Sénat. En général, la discussion
se fait et ça tourne mal pour le gvnt, les parlementaires font des propositions, des
amendements, change le texte du gvnt, le gvnt se rend compte que cela tourne à son
désavantage. Il peut alors utiliser l’article 44 al 3 de la Constitution : le gouvernement
délimite le texte en choisissant de faire voter l’une ou l’autre assemblée sur tout ou
partie du texte en discussion mais en ne retenant que les amendements proposés ou
acceptés par le gouvernement. Cela permet au gouvernement de dire que les
amendements du parlement n’étaient pas pertinents. Mais procédure risquée car si
vote négatif c’est tout le texte choisi qui est rejeté.

- L’engagement de la responsabilité du gouvernement : le Gouvernement peut


engager sa responsabilité sur le vote d’un projet de loi de finances. Dans ce cas, le
projet est considéré comme adopte, sauf si une motion de censure, déposée dans les
24h est votées dans les conditions prévues par l’article 49 al3 c’est-à-dire majorité
absolue.
B. L’obligation d’adopter la première partie (les recettes) avant la seconde (les
dépenses)
Le débat en séance publique se déroule en plusieurs étapes. Comme le projet de loi de
finances se présente en deux parties, une relative aux recettes, l’autre aux dépenses, l’ordre
des votes suit une procédure précise que développe l’article 42 de la loi organique : « La
seconde partie du projet de loi de finances de l’année et, s’il y a lieu, des projets de loi de
finances rectificative, ne peut être mise en discussion devant une assemblée avant l’adoption
de la première partie ». Il est en effet nécessaire de voter d’abord les recettes, l’argent que
l’on va avoir avant de voter les dépenses. Pourquoi ? car pour assurer l’équilibre budgétaire
(dépenses = recettes) on ajuste les dépenses une fois que l’on connait les recettes.
Une fois la première partie adoptée, conformément à l’article 42 de la loi organique,
l’Assemblée entame la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances, dont
l’unité de vote est la mission. Il doit y avoir un vote par mission.
C. Un pouvoir d’amendement limité
Le pouvoir d’amendement des parlementaires est strictement encadré par l’article 40 de la
Constitution de la Vème République :

« Les propositions et amendements formulés par les membres du Parlement ne sont pas recevables lorsque
leur adoption aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou
l’aggravation d’une charge publique ».

Cet article énonce aux parlementaires ce qui leur est interdit. L’article 40 énonce deux
interdictions aux initiatives parlementaires : les parlementaires ne peuvent pas diminuer les
ressources publiques et ils ne peuvent pas aggraver une charge publique. Manifestement,
on le voit, l’objet de cet article est de limiter le pouvoir des initiatives parlementaires par le
biais des amendements.

14
Il y aura irrecevabilité si l’amendement entraine soit une diminution des ressources, soit une
augmentation de charges.

Il existe néanmoins des cas plus complexes :

• La compensation entre une charge et une ressource : cela est interdit parce que les
parlementaires ont interdiction d’agir sur les charges ;

• La compensation entre différentes ressources : puisque le rôle du Parlement est


notamment de donner le consentement à l’impôt, il est tout à fait compétent pour
donner son consentement en matière de recette. Il peut donc les compenser à sa
guise. De plus, le mot ressource est au pluriel dans l’article 40. Il faut donc entendre,
le terme ressource dans sa globalité, et non individuellement.

• La compensation entre plusieurs charges : le droit d’amendement est élargi par


l’article 47 de la loi organique. En effet, la notion de charge publique s’applique « aux
crédits de la mission ». Cela permet aux parlementaires de créer de nouveaux
programmes en transférant des crédits d’autres programmes de la même mission.
Ainsi, le droit d’amendement est limité par le montant de chaque mission, ainsi que
le transfert entre mission.

§ 3. Le contrôle de la loi de finances


Les lois de finances sont des lois ordinaires d’un type particulier et qui respectent une
procédure spécifique. Le Conseil constitutionnel joue un rôle de plus en plus important
dans le contrôle de constitutionnalité des lois de finances.

Une fois que la majorité à l’Assemblée Nationale a voté la loi de finances, l’opposition, , va
alors intervenir presque systématiquement et saisir le Conseil constitutionnel pour lui
demander si une ou plusieurs dispositions de la loi de finances ne contredisent pas les
normes constitutionnelles.

Ca va contraindre le Gouvernement au respect de certaines règles, notamment les grands


principes budgétaires mais aussi les cavaliers budgétaires.

En effet, certaines dispositions n’ont pas leur place dans une lois de finances. Il s’agit de
toutes les dispositions qui ne sont ni obligatoire, ni exclusives, ni partagés.
- Certaines dispositions doivent obligatoirement être contenu dans une loi de
finances : on parle de contenu obligatoire comme l’autorisation de percevoir les
impôts.
- Le contenu exclusif s’entend des dispositions qui n’ont pas nécessairement à être
contenues dans une loi de finances pour que celle-ci soit qualifiée de loi de finances
mais qui, si elles doivent être adoptées par le législateur, ne peuvent l’être que dans
le cadre des lois de finances. Ces dispositions ne peuvent pas figurer dans une loi
ordinaire. Si jamais elles figurent dans une loi ordinaire, le Conseil Constitutionnel
pourra être saisi. Celui-ci pourra censurer cette loi et retirer les disposions qui ne
devraient pas relever du législateur ordinaire.

15
- Le contenu partagé, les dispositions peuvent figurer indifféremment dans la loi de
finances soit dans une loi ordinaire.

Le contenu interdit conduit ainsi à identifier, par opposition, les dispositions qui n’ont pas
leur place en leur sein, c’est-à-dire qui non rien à voir avec la matière financière ou fiscale.
En ce qu’elles apparaissent étrangères au contenu de la loi de finances, ces dispositions sont
censurées par le Conseil constitutionnel qui les identifie comme des cavaliers budgétaires et
les exclues de la loi contrôlée.

Le but est alors d’éviter que la loi de finances ne devienne un fourre-tout législatif et éviter
certaines manœuvres moralement douteuses qui auraient pour objet de faire voter par le
Parlement des dispositions peu populaires.

On sait que le budget de l’État suit une procédure accélérée. On va alors chercher à glisser
une disposition qui n’a pas de rapport avec la loi de finances dans la procédure du vote du
budget. Cette disposition on va lui donner le nom de cavalier. Le budget c’est le cheval et la
disposition que l’on va ajouter va être le cavalier —> la disposition deviendra obligatoire.

C’est ajouter à la discussion du budget des dispositions qui n’ont rien à voir ; c’est une
pratique ancienne et interdite. Pourquoi faire ça ? car la loi de finances étant tellement dense,
l’on y verrait que du feu d’autant plus qu’aucune publicité n’est faire sur ladite disposition
votée un peu par hasard, car noyée au milieu de 300 articles et 50 tableaux.
Sous la Ve République, le Conseil Constitutionnel a le pouvoir de censurer ces cavaliers
budgétaires. Lorsqu’il est saisi, il examine les dispositions, et si la disposition ne fait pas
partie du contenu obligatoire, exclusif ou facultatif par voie de conséquence c’est un cavalier
budgétaire, c’est une disposition étrangère à l’objet des LF, c’est une disposition interdite.
Il faut préciser ici qu’un grand nombre de cavaliers budgétaires sont d’origine
gouvernementale, soit qu’ils soient inscrits dès l’origine dans les projets de loi de finances
déposés par la Gouvernement, soit – ce qui est le cas le plus fréquent – qu’ils soient
introduits, par voie d’amendements ou d’articles additionnels, au cours de sa procédure
parlementaire d’adoption.

Quoi qu’il en soit le Conseil Constitutionnel reste compétent pour censurer les cavaliers
budgétaires. Chaque fois que le Conseil Constitutionnel sera saisi, il va vérifier tous les
articles de la loi de finances pour vérifier qu’il n’y a pas cavalier. À partir de 85, de sa propre
autorité il enlève les cavaliers. À partir de moment où il sera saisi il vérifiera de façon
systématique que chaque article à sa place dans la loi de finances.

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CHAPITRE 2. LES PRINCIPES BUDGÉTAIRES
Six principes encadrent l’élaboration du budget de l’Etat et donc de la loi de finances. Ces
principes induisent :
- L’adoption de la loi de finances chaque année pour une année (annualité budgétaire)
- Une clarté dans l’information budgétaire adressée aux parlementaires en vue de
l’adoption de la loi de finances (unité et universalité budgétaires)
- Une présentation suffisamment détaillée des crédits budgétaires contenus dans la loi
de finances (spécialité budgétaires)
- Un équilibre entre les recettes et les dépenses de l’Etat (équilibre budgétaire)
- Une sincérité dans le contenu de la loi de finances (sincérité budgétaire)
Section 1. Le principe d’universalité
Le principe d’universalité est un principe d’analyse et de séparation des dépenses et des
recettes. Il répond à un double souci d’assurer la clarté des comptes de l’État et de permettre
par là un même contrôle plus efficace du Parlement. Ce principe, complémentaire à celui
d’unité, implique une présentation intégrale des recettes et des dépenses du budget de l’État
qui doivent être séparé.
§ 1. Le principe de non affectation des recettes aux dépenses
La règle de non-affectation des recettes interdit d’affecter les recettes avec des dépenses :
il n’est pas possible de flécher une recette sur une dépense. Il faut respecter la ligne de
démarcation. On la retrouve aujourd’hui à l’article 6 de la loi organique. N’importe quelle
recette peut financer n’importe qu’elle charge.
Il existe des exceptions :
- Les fonds de concours : ils sont constitués de ressources mises à disposition de l’Etat
et dont la particularité réside dans le fait qu’elles doivent être utilisées
conformément à l’intention de la partie versante. Il s’agit notamment des dons et
legs des personnes privées.
- Les attributions de produits : les attributions de produits permettent d’affecter à un
service de l’Etat les recettes tirées des prestations qu’il fournit à des tiers. Il s’agit
des ressources propres dégagés par chaque service. On évite que cela tombe dans
le pot commun. Ca va être le cas des produits tirés de la location des bâtiments
publics.
§ 2. Le principe de non compensation
Cette règle suppose que les montants des crédits inscrits dans le budget y figurant pour
leur montant intégral et ne soient pas le fruit d’une contraction entre recettes et dépenses.
À partir du moment où on fait un budget, c’est pour exposer, c’est pour présenter de façon
intégrale les recettes et les dépenses. Il est donc interdit de compenser une recette et une
dépense. On appelle cela aussi non compensation. C’est la règle du produit brut, les
chiffres du budget doivent être systématiquement des chiffres bruts.

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La règle du produit brut est une règle très rigide qui existe en France depuis 1818. Article
6 de la loi organique de 2001 : il ne doit pas y avoir de contraction entre les recettes et les
dépenses. Cette règle a quelque chose de très important car s’il n’est pas respecté, des
chiffres du budget disparaissent finalement. C’est une atteinte pure à la transparence
même. En effet, un solde net ne renseigne ni sur le montant total, ni sur la nature des
opérations compensées ce qui interdit d’en mesurer le volume et d’en contrôler le détail
et permettant alors des dissimulations d’opérations potentiellement interdites.
Ex classique : lorsqu’une personne publique achète un véhicule neuf moyennant reprise
de son ancien véhicule par le vendeur, on ne peut pas porter en dépense que le solde de
l’opération (prix du véhicule neuf – la recette de la reprise). Il faut porter séparément en
dépense le prix du véhicule neuf et en recette le prix de la reprise.

18
Section 2. Le principe d’unité
Comme pour l’Universalité, le principe d’unité impose une présentation du budget qui
facilite à la fois le contrôle et la décision du Parlement.
§ 1. Le principe
Le principe unité impose que toutes les prévisions de recettes et de dépenses soient
rassemblées dans un document unique donnant à la fois une vue d’ensemble et une
description détaillée de toutes les ressources et les dépenses afin de permettre une décision
libre et éclairée du Parlement.
Ainsi, le budget doit être présenté en un seul document faute de quoi, le contrôle serait
fragmentaire et la décision partielle ou partiellement éclairée.
Sur le plan matériel, le document présenté par le Parlement lors du vote du budget doit être
unique. Plus précisément, il doit s’agir d’un ensemble unique « un et indivisible »
correspondant à ce qu’on appelle le budget général. Toutefois, une appréhension extrême
du principe d’unité conduirait à exiger également que ne soit établi qu’un budget par an, par
la loi de finances initiale. L’unité serait alors appliquée d’un point de vue non seulement
matériel mais également temporel. Or, cela n’est pas le cas, le réalisme imposant que soit
pris des lois de finances rectificatives.
§ 2. Les démembrements
L’article 16 de la LOLF prévoit certains aménagements au principe d’unité mais aussi au
princioe d’universalité, deux principes qui se recoupent assez largement : « Certaines recettes
peuvent être directement affectées à certaines dépenses. Ces affectations prennent la forme de budgets annexes,
de comptes spéciaux ou de procédures comptables particulières au sein du budget général, d'un budget annexe
ou d'un compte spécial ».
L’Etat a ainsi la possibilité à côté du document supposé unique du budget général, de
constituer à côté de celui-ci, des budgets annexes et des comptes spéciaux dans lesquels
seront retracées des recettes et des dépenses incombant à l’Etat qui plus est faisant, par
principe l’objet d’une affectation contrairement au principe d’universalité.
A. Les budgets annexes
En vertu de l’article 18 de la LOLF, ils permettent de retracer des opérations de services de
l’Etat non dotés de la personnalité juridique et résultant d’une activité de production de
biens ou de prestation de services donnant lieu au paiement d’une redevance. L’intérêt est
donc d’isoler les activités commerciales de l’Etat et d’avoir plus de souplesse dans la gestion
de ces activités. Ayant parfois fait l’objet d’abus de la part du gouvernement, la LOLF de
2001 a encadré plus strictement le recours à ces budgets annexes de sorte qu’il n’en reste
aujourd’hui que deux : l’aviation civile qui représente 2 milliards d’euros et les publications
officielles environs 170 millions d’euros. Le premier retrace les opérations de services de
l’aviation civile donnant lieu au paiement de redevances, taxes ou prix (organisation et
contrôle du trafic aérien, guidage des avions etc. ; le second retrace l’activité d’impression
et de vente des publications faites par l’Etat.

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Il s’agit pour ces deux activités, de missions d’intérêt général qui se traduisent par de pures
prestations de service offertes à de véritables clients sur la base d’un fonctionnement proche
de celui d’une entreprise privée.
B. Les comptes spéciaux
Les comptes spéciaux dont définis par l’article 19 de la LOLF. Ils permettent directement
d’affecter certaines recettes à certaines dépenses, par exception au principe de non-
affectation également afin de réaliser des opérations spécifiques.
Créés à l’origine pour retracer de simples mouvements de fonds provisoires, les souplesses
offertes par les comptes spéciaux en firent un instrument très utilisé. Ainsi, on en comptait
environ 400 en 1947, avant que leur nombre diminue. L’ordonnance de 1959 chercha à
rationaliser et à encadrer leur utilisation : en réservant leur création à la loi de finances (et
non à la voie réglementaire), puis en les soumettant à la règle de l’annualité (même si leur
solde est reporté sur l’exercice suivant) et au contrôle parlementaire.
La LOLF a rationalisé les comptes spéciaux en en restreignant le nombre de catégories à
quatre :
- Les comptes d’affectation spéciale : ils retracent des opérations pour lesquels il y
a un lien, une relation directe entre les recettes et les dépenses donc une affectation.
Ainsi, généralement, ils servent à isoler des activités qui sont financées à partir d’une
recette spécifique. Par exemple, le CAS « contrôle de la circulation et du
stationnement routiers » retrace les dépenses (déploiement des dispositifs de
contrôle etc.) financées à partir du produit des amendes.
- Les comptes de concours financiers : ils rassemblent les recettes et les dépenses
liées à l’aide financières de l’Etat envers certaines personnes publiques ou privées.
Essentiellement, ils retracent les avances et les prêts consentis par l’Etat notamment
aux collectivités territoriales, aux Etats étrangers ou même à des particuliers dans
des domaines précis.
- Les comptes de commerce : ils retracent quant à eux des opérations de caractère
industriel ou commerciale effectuées à titre accessoire par des services de l’Etat non
dotés de la personnalité morale. Il en existe une dizaine. Par exemple le CC Gestion
de la dette retrace les opérations budgétaires relatives à la dette de l’Etat et
notamment la politique d’émission et de gestion de la dette, la charge de la dette etc.
Le CC Régie industrielle des établissements pénitentiaires est destiné à retracer les
opérations relatives à la fabrication et à la vente d’objets divers par les ateliers des
établissement pénitentiaires, c’est-à-dire la production des détenus.
- Les comptes d’opérations monétaires : ils retracent les recettes et les dépenses
de caractère monétaire comme les pertes et bénéfices de change (par exemple les
pertes et bénéfices résultants des fluctuations des taux de change), l’émission et le
retrait des monnaies métallique et les opérations avec le FMI.
Il est aussi intéressant de remarquer que les comptes spéciaux constituent également un
aménagement au principe d’annualité car le solde de chaque compte spécial est reporté
automatiquement sur l’année suivante.
20
Section 3. Le principe d’annualité
Ce principe repose sur l’article 47 de la Constitution qui précise que la loi de finances de
l’année doit être votée avant le début de l’exercice, c’est-à-dire le 1er janvier.

D’autres dispositions sur l’annualité vont figurer dans la loi organique relative aux lois de
finances. Elle regroupe en effet plusieurs dispositions sur ce principe.
- C’est notamment le cas de son article 1er qui énonce que l’exercice de l’année budgétaire
s’étend sur l’année civile.
- On retrouve aussi le principe d’annualité à l’article 6 alinéa 2 de la LOLF : le budget
décrit pour une année les recettes et les dépenses de l’État. Il suppose une annualité de
l’autorisation budgétaire accordée par le Parlement et une annualité de l’exécution
comptable.
Le principe d’annualité est donc bel et bien un principe qui dispose d’une base
constitutionnelle.
§ 1. Le principe
Le principe d’annualité entraîne trois obligations distinctes.

- L’antériorité : le budget, et plus largement la loi de finances initiale doivent être


votés avant le 1er janvier, avant le début de l’exercice. Procédure de dissuasion
budgétaire, possibilité pour le Gouvernement de mettre en vigueur le budget par
ordonnance.

- L’autorisation unique : le parlement doit donner pour l’année une autorisation


unique : une fois pour toutes.

- L’année budgétaire doit se limiter à 12 mois : Autrement dit, le gouvernement


dispose de 12 mois pour encaisser les recettes et payer les dépenses avec un délai
supplémentaire de 20 jours en cas de circonstances particulières. C’est un principe
de remise en ordre. Le gouvernement doit demander l’autorisation chaque année au
parlement. On le comprend, c’est donc un principe avant tout démocratique.
L’autorisation d’exécution est limitée à douze mois. En effet, l’ouverture des crédits
et l’autorisation de prélever les impôts s’achèvent le 31 décembre ; au-delà, elles sont
caduques.
§ 2. Les exceptions
a. Les lois de finances rectificatives

La loi de finances de l’année est prévisionnelle donc aléatoire car elle est basée sur des
perspectives de croissance qui doivent être le plus vraisemblables possible, mais qui peuvent
présenter des décalages en phase d’exécution. Cela explique qu’elle puisse être modifiée en
cours d’exercice par une ou des lois de finances rectificatives. Ces dernières sont prévues et
régies par l’article 35 de la LOLF. Ces lois sont les seules à pouvoir modifier les chiffres de
la loi de finances initiale.

b. La loi de règlement

21
Cette loi est prévue à l’article 37 de la LOLF. À travers elle, le Parlement peut accorder des
autorisations rétroactives au gouvernement. Si le premier n’a pas accordé des autorisations
de dépenses et que ces demandes n’ont pas été faites, elles doivent être acceptées de façon
rétroactive. Ici on fractionne l’autorisation.

C’est une loi qui intervient a posteriori, une fois l’exercice achevé. Elle rend compte des
dépenses effectivement réalisées et des recettes réellement perçues. Elle n’est pas une loi de
prévision. Elle va ensuite accorder des autorisations qui seront rétroactives.

c. La loi de programmation des finances publiques

Découle de l’article 34 de la Constitution modifié en 2018, LPFP contient le budget


triennal de l’état, un budget prévu pour 3 ans, et donc ce budget prévu pour 3ans va
s’imposer aux lois de finances.

d. Les décrets d’avance

Il s’agit d’une procédure prévue à l’article 13 de la LOLF. Cet article prévoit que le
Gouvernement peut ouvrir des crédits en cas d’urgence sans attendre la loi de finances
rectificatives. Par conséquent, le décret d’avance constitue de l’argent que le gouvernement
aura décidé d’avance par rapport à la loi rectificative.

e. Les reports de crédits

En application de l’article 15 al 1 de la LOLF, les crédits ouverts au titre d’une année ne


créent aucun droit au titre des années suivantes. Le principe est donc celui d’une
impossibilité des reports de crédits. Par exception, il est néanmoins possible de procéder
à un report d’une année sur l’autre de crédits inutilisés. Cette possibilité fait l’objet d’un
encadrement juridique précisé par les dispositions de la LOLF qui permettent d’en limiter
l’emploi.
Cependant une application rigide entraîne généralement une accélération de la
consommation des crédits en fin d’année souvent peu justifiée au regard de l’utilité de cette
consommation. En effet, si des crédits ne sont pas utilisés, ils risquent d’apparaître inutiles
et donc d’être supprimés l’année d’après. Certaines administrations préféreront les dépenser
inutilement plutôt que de risquer de les voir disparaître.
f. Les engagements par anticipation
Ils sont prévus à l’article 9 de la LOLF. Avant le début de l’année, à partir du 15 novembre,
il est possible que pour certaines dépenses le Gouvernement soit obligé d’anticiper ces
dépenses, les payer avant que la nouvelle loi de finances ne soit votée.
L’article 108 de la loi de finances pour 2005 précise qu’à partir du 1er novembre de chaque
année et dans la limite du quart des crédits de l’année en cours ouverts par les lois de
finances sur les titres correspondants de chaque programme ou dotation, les engagements
de dépenses autres que de personnel et d’investissement peuvent être pris sur les crédits de

22
l’année suivante.

23
Section 4. Le principe de sincérité
Plus récent, le principe de sincérité s’impose au contenu des budgets publics. IL constitue
un garant en termes d’exactitude des informations qui y sont contenues et de fiabilité de
l’équilibre budgétaire qui y est retracé. Le principe de sincérité a été consacré par la loi
organique du 1er août 2001 article 32 et s. puis constitutionnalité à l’occasion de la révision
constitutionnelle du 23 juillet 2008.
§1. L’apparition du principe
C’est à compter de 1993 que le Conseil constitutionnel a été saisi par les parlementaires
d’arguments tirés de l’insincérité des lois de finances. Un argument rejeté par le Conseil
constitutionnel dès lors qu’aucune erreur manifeste dans l’évaluation ne pouvait être
détectée. De manière récurrente, le Conseil estime que « les prévisions critiquées doivent être
appréciées au regard des informations disponibles à la date du dépôt et de l’adoption du texte dont est issue
la loi déférée et compte tenu des aléas inhérents à leur évaluation ».
Le Conseil a également souligné à l’occasion de sa décision relative à la LOLF de 2001 que
le principe de sincérité, tel qu’introduit par son article 32 implique s’agissant des lois de
finances initiales et rectificatives l’absence d’intention de fausser les grandes lignes de
l’équilibre déterminé par la loi de finances.
§2. Les fondements organiques et constitutionnels du principe
La loi organique de 2001 a consacré le principe de sincérité au travers de deux articles, 32
et 33. Aux termes de ces dispositions, les lois de finances présentent de façon sincère
l’ensemble des ressources et des charges de l’Etat. Leur sincérité s’apprécie compte tenu
des informations disponibles et des prévisions qui peuvent raisonnablement en découler.
LE Conseil constitutionnel a néanmoins précisé que ce principe n’avait pas la même portée
s’agissant des lois de règlement et des autres lois de finances dans sa décision de 2001 sur
la LOLF. Pour les secondes, la sincérité se caractérise par l’absence d’intention de fausser
les grandes lignes de l’équilibre déterminé par la loi de finances en raison de leur caractère
prévisionnel. Dit autrement, il n’y aura jamais défaut de sincérité pour ces lois sauf s’il est
prouvé une intention du gouvernement de fausser les chiffres du gouvernement (impossible
à démontrer au demeurant). Dans le cas de la loi de règlement, la sincérité s’entend, en
outre, comme imposant l’exactitude des comptes. C’est une loi qui intervient a posteriori
et qui récapitule les résultats de l’exécution des lois de finances, on peut donc se permettre
d’exiger une sincérité très exacte des comptes.
C’est ensuite l Constitution avec son nouvel article 47-2 introduit à la faveur de la révision
constitutionnelle du 23 juillet 2008, que le principe de sincérité a bénéficié d’un fondement
constitutionnel. Aux termes de ces dispositions, « les comptes des administrations publiques sont
réguliers et sincères. Ils donnent une image fidèle du résultat de leur gestion, de leur patrimoine et de leur
situation financières ».

24
Depuis la loi organique du 17 décembre 2012, l’exigence de sincérité du budget a pris une
tonalité supplémentaire avec la création du Haut conseil des finances publiques qui a
vocation à se prononcer sur les prévisions économiques, financières et budgétaires et sur
les perspectives budgétaires retenues par le Gouvernement dans le cadre des lois de
finances. Son avis est transmis aux parlementaires lors de la procédure d’adoption des lois
de finances.
§3. L’ineffectivité du principe
Force est de constater que malgré l’extension progressive, le principe est toujours resté
d’une application limitée. Le Conseil constitutionnel n’a jamais censuré une loi de finances
sur le grief de l’insincérité alors même que la Cour des comptes ou le Haut conseil des
finances publiques ont pu pointer du doigt les prévisions optimistes et improbables du
Gouvernement.
On le voit, si la LOLF a consacré le principe de sincérité, elle n’a pas rendu plus effective
l’application du principe par le juge constitutionnel. La sincérité est un principe ambigu,
plus politique que juridique et qui constitue plus un dogme, une règle morale qu’un véritable
principe juridique.
Section 5. Le principe de spécialité
Le principe de spécialité est un principe lié à la présentation et au vote des crédits. Il suppose
que les crédits soient présentés puis adoptés avec un certain niveau de détail, une
spécialisation qui s’imposera aux gestionnaires dans le cadre de l’exécution du budget. Ainsi,
en spécialisant les crédit le Parlement va fixer une répartition de crédit qui ne pourra être
remise en cause par la suite par le pouvoir exécutif sauf autorisation du Parlement et sauf
exceptions prévues par la LOLF. Parallèlement, cette présentation détaillée permet un
meilleur contrôle du Parlement sur la dépense. Ce principe est malgré tout en retrait et des
aménagements nombreux ont été maintenus.
§1. Un principe en retrait
Avant la LOLF de 2001, les crédits étaient présentés par ministères, titres et chapitres. Les
parlementaires faisaient porter leur vote et donc leur contrôle sur les quelques 900 chapitres
du budget général. Il y avait donc une forte spécialisation. Or, la LOLF a procédé tout
d’abord à une globalisation des crédit (et donc un retrait de la spécialité) puisque s’est
substituée à cela une présentation par destination des crédits qui détailles les crédits par
missions (entre 30 et 35) et par programme (entre 120 et 150). La spécialisation des crédits
est donc moins fines.
Plus encore, la LOLF a également dissocié le vote et la spécialisation des crédits puisque les
crédits sont votés par missions et sont spécialisés par programmes. Aux niveaux inférieurs
des programmes, la répartition est indicative et la répartition des crédits peut être modifiée
à tout moment à l’intérieur des programmes (donc entre plusieurs actions d’un même
programme) par le gestionnaire.
§2 Des aménagements maintenus

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La LOLF a pari ailleurs maintenu les aménagements existants sous l’ordonnance de 1959
en les réduisant tout de même. Afin de facilier l’exécution de la loi de finances des
aménagements ont été apportées. Essentiellement, ces aménagements consistent en des
techniques permettant soit une non spécialisation des crédits soit de modifier la répartition
des crédits en cours d’exercice.
- Ainsi l’article 12 de la LOLF permet de modifier en cours d’exercice la répartition
des crédits en opérant un virement d’un programme à un autre pour un même
ministère ou un transfert d’un programme à un autre pour deux ministères distincts.
Il existe tout de même un plafonnement des virements limité à 2% des crédits du
programme. On le verra plus précisément dans le chapitre 3.
- L’article 7 de la LOLF prévoit également la création de dotations qui sont des
missions spéciales. Il en existe deux : une qui concerne les crédits des pouvoirs
publics et une dotation pour provision. Or, ces dotations sont dotées de crédits dits
globaux c’est-à-dire qu’ils ne sont pas spécialisés et constituent des enveloppes de
crédits disponibles sans affectation précise à charge, pour l’exécutif d’en déterminer
la destination au moment de la dépense. Dit autrement, il s’agit de crédits globaux
destinés à faire face à des dépenses éventuelles, à des dépenses accidentelles ou
encore à des dépenses dont la répartition par programme ne pouvait être déterminée
au moment où ils ont été votés. Cela correspond à des crédits non spécialisés, le
gouvernement les utilise en fonction de ses besoins.
Les dépenses pour mesures générales en matière de rémunération et les dépenses
accidentelles et imprévisibles. Ces crédits sont globaux pour permettre une dépense
exceptionnelle mais rendue nécessaire par les aléas de l’exécution.
- Enfin, il existe des fonds spéciaux, appelés aussi fonds secrets qui ont un régime
particulier et justement par leur caractère secret, ne dont pas l’objet d’une
spécialisation. L’affectation est inconnue. Ce sont des crédits du Premier ministre
qui ne sont pas spécialisés en raison justement du secret dans lequel ils sont utilisés
et qui permettent de financer le contre-espionnage et les dépenses de
communication du 1er ministre. Il s’agit en quelque sort de dépenses de souveraineté
et il n’est pas question de dire au parlement qu’ils vont permettre de financer telle
ou telle opération. Ils concernent principalement la DGSE et le GIC, groupement
interministériel de contrôle, créés au sein des services du Premier ministre pour
exécuter les interceptions de sécurité autorisées.
Section 6. Le principe d’équilibre
Strictement entendu, l’équilibre du budget de l’Etat se formalise dans une équation égalitaire
entre ressources et dépenses : le budget ne doit ni présenter un déficit (l’Etat s’endette) ni
présenter un excédent (l’impôt n’est alors pas nécessaire). Un constat s’impose : ce principe
budgétaire tel qu’appliqué par l’Etat relève de la fiction. Les chiffres parlent d’eux-mêmes
car chaque année, le budget de l’Etat est en déficit, déficit qui est devenu systématique
depuis 40 ans (Le déficit est aujourd’hui de l’ordre de 90 milliards d’euros. Les contraintes
issues de l’Union européenne n’ont pu contribuer à limiter les dérapages budgétaires.

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Pourtant, et aussi relatif soit-il, le principe d’équilibre possède une dimension juridique
importante.
§1. La portée relative du principe d’équilibre
L’exigence d’équilibre a été inscrite dans la Constitution avec la révision constitutionnelle
du 23 juillet 2008. L’équilibre y a en effet été introduit parmi les objectifs d’orientation des
finances publiques. Très concrètement, l’article 34 a été complété et prévoit que les
orientations pluriannuelles des finances publiques doivent s’inscrire dans l’objectif
d’équilibre des comptes des administrations publiques.
S’agissant du budget de l’Etat, l’article 1er de la LOF a retenu trois dimensions de l’équilibre :
« les lois de finances déterminent, pour un exercice, la nature, le montant et l’affectation des ressources et des
charges de l’Etat, ainsi que l’équilibre budgétaire et financier qui en résulte. Elles tiennent compte d’un
équilibre économique défini, ainsi que des objectifs et des résultats des programmes qu’elles déterminent ».
Ces dispositions se concrétisent au travers d’un article d’équilibre clôture la première partie
de la loi de finances et qui doit être voté par les parlementaires. Cet article d’équilibre
exprime la politique budgétaire du Gouvernement et conditionne l’examen de la deuxième
partie de la loi de finances. Le contenu de cet article a été substantiellement enrichi avec la
LOLF. Il n’en reste pas moins que peu contraignant malgré quelques mécanismes
permettant d’assurer la préservation de l’équilibre.
§2. Les mécanismes de préservation de l’équilibre
L’article 14 de la LOLF permet de prévenir les détériorations de l’équilibre budgétaire au
moyen d’annulation de crédits. Très concrètement, afin de prévenir une détérioration de
l’équilibre tel qu’il est défini par la dernière loi de finances afférente à l’année concernée, un
crédit peut être annulé. Un crédit devenu sans objet peut également être annulé selon cette
même procédure.
Au-delà, il faut citer la loi organique du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à
la gouvernance des finances publiques pris pour transposer le pacte de stabilité au sein de
l’Union européenne. Ce traité renforce la discipline budgétaire en imposant un objectif
d’équilibre, l’interdiction d’un déficit structurel trop important (0,5 % du PIB ou 1% si la
dette est inférieure à 60% du PIB) sauf circonstances exceptionnelles (comme la crise
sanitaire) et une obligation de diminution de la dette excessive d’1/20e par an (si la dette est
supérieure à 60% du PIB.

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CHAPITRE 3 – L’EXECUTION DES LOIS DE FINANCES
Etudier exécution et le contrôle des lois de finances revient à se poser la question de ce que
devient la loi de finances à partir du moment où elle est promulguée. L’exécution de la loi
de finances suppose l’intervention du pouvoir réglementaire, de l’exécutif. A partir du
moment ou elle va être promulguée, la l’exécutif s’assurera de la mise à disposition de
l’administration des crédits votés par le Parlement. Cette mise à disposition effectuée, le
pouvoir réglementaire conserve ensuite compétence en cours d’exercice budgétaire pour
précéder à l’adaptation des dispositions retenues et votées en loi de finances initiales. Elle
pourra alors être exécutée au cours de l’année budgétaire. Nous verrons alors comment sont
utilisés ces crédits.
Section 1 – La répartition des crédits
La répartition des crédits correspond à la phase de mise à disposition des crédits c’est-à-dire
à la procédure par laquelle les crédits sont concrètement répartis et attribués aux différents
services de l’Etat, à l’administration. Ainsi que le précise l’article 7 de la LOLF, les crédits
ouverts par la loi de finances doivent être mis à disposition des ministres. Cette mise à
disposition prend la forme de décrets et d’arrêtés de répartition. Les décrets de répartitions
sont indispensables à l’exécution de la loi de finances. Il s’agit du pendant des décrets
d’application des lois ordinaires. Dès la promulgation de la loi de finances de l’année ou
d’une loi de finances rectificatives, le Gouvernement (Premier ministre) prend des décrets
portant ;

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- Répartition par programme des crédits ouverts sur chaque mission, budget annexe
ou compte spécial ;
- Fixation par programme du montant des crédits ouverts sur le titre des dépenses de
personnel.
Aussi, le Premier ministre peut au moyen d’un décret prélever les crédits inscrit dans la
mission « crédit non répartis » pour abonder d’autres programmes. Ainsi en matière de
dépenses accidentelles et imprévisibles, il est possible de répartir les crédits ouverts sur la
dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles au moyen d’un décret.
Il existe ensuite des arrêtés de sous-répartition car la répartition par décret entre les
ministères n’est pas assez précise, il faut des arrêtés ministériels de répartition au sein de
chaque programme = « sous-répartition ». Cela relève de l’organisation interne de chaque
ministère et chaque ministre pour son ministère répartit les crédits de chaque programme
par actions et sous-actions.
Section 2 – La modification réglementaire des crédits
Les aléas de la gestion peuvent entraîner la nécessité d’adapter l’autorisation budgétaire en
cours d’exécution. Pour ce faire, le Gouvernement peut recourir à une ou plusieurs lois de
finances rectificatives. Il s’agit même du principe car cela permettra au parlement d’être
informé, de contrôler et surtout consentir les nouvelles autorisations. Pourtant, par
exception, le Gouvernement tire de l’article 21 de la Constitution, un pouvoir réglementaire
lui permettant d’opérer lui-même ces modifications à charge pour lui de faire ratifier ensuite
ces modifications par le Parlement par une loi de finances rectificatives après coup ou par
la loi de règlement.
On parle alors de « régulation budgétaire » c’est à dire la gestion des crédits budgétaires en
cours d’exercice en permettant, par décisions d’annulation ou de report, de maintenir les
équilibres initiaux en mettant en œuvre les adaptations nécessitées par l’évolution de la
situation économique et sociale. Il s’agit donc d’une marge de manœuvre conféré au
Gouvernement à l’égard de l’autorisation budgétaire accordée par le Parlement. Voila
pourquoi la Lolf encadre ces possibilités tout en les autorisant.
Tout doit être retracé a minima dans la loi de règlement à n+1. Concerne environ 2000
millions € par an.
Plusieurs caractéristiques peuvent être affectées par des actes réglementaires : en principe
les crédits sont :
- crédits sont annualisés (l’autorisation annuelle de dépenser expire avec l’exercice
concerné)
- crédits sont facultatifs (l’inscription des crédits n’emporte aucune obligation de les
ouvrir)
- crédits sont limitatifs (une fois ouverts, les crédits sont impératifs = l’autorité ne doit
pas dépasser le montant initial)
- crédits sont spécialisés (les ressources ne sont pas affectées en vertu du principe
d’universalité, mais les crédits sont affectés à des dépenses, c’est le principe de
spécialité ; l’autorité réglementaire ne peut pas modifier cette spécialité)

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le pouvoir réglementaire peut pourtant modifier ces caractéristiques :
- Annualité :
➢ Anticipation de crédits (art 9 LOLF) pour engager des crédits sur l’année
suivante, pour les dépenses qui présentent un caractère urgent. Que pour les
dépenses de fonctionnement et à partir du 15 novembre.
➢ Report de crédit (art 15 LOLF) possible par arrêté de report du ministre des
finances de reporter des crédits non utilisés sur l’année d’aprés. Publiés au plus
tard le 15 mars de n+1. Il sont limités à 3% des crédits initiaux.
- Facultatif :
➢ Annulation de crédit par des décrets d’annulation (art 14 LOLF) : si le crédit
est devenu sans objet, après information des commissions des finances de AN
et Sénat ; le montant cumulé des annulations ne peut pas dépasser 1,5 % des
crédits ouverts. But : prévenir une détérioration de l’équilibre, ou annuler des
crédits devenus sans objet et ne pouvant pas être reportés (difficile à interpréter,
la CDC condamne la pratique quand ils sont finalement rétablis càd ils n’avaient
pas perdu leur objet). En réalité, utilisé par le gvt pour résorber le déficit ou
financer des activités insuffisamment dotées si on le couple à un décret d’avance
=> véritable outil de régulation budgétaire
➢ Gel des crédits : la réserve de précaution. C’est un blocage provisoire des
crédits. pour financer les aléas de gestion ou les besoins nouveaux. Pour chaque
programme, la LF indique le taux de mise en réserve possible des crédits. On
met en réserve une partie des crédits aux alentours de 6% des crédits totaux.
- Limitatif :
➢ Décrets d’avance : art 13 LOLF. Ils permettent d’ouvrir des crédits
supplémentaires qui ne sont pas prévus par la LFI dans deux situations. En cas
d’urgence et si l’équilibre financier de la loi de finances n’est pas affecté (ce qui
suppose d’annuler au préalable des crédits d’un montant équivalent ou de
constater des recettes supplémentaire), le Premier ministre peut ouvrir des
crédits supplémentaires (ex : sécheresse de l’été 2003 ; participation de la France
aux secours à la suite du raz de marée en Asie en 2004 ; financement de la lutte
contre le terrorisme en 2015). Il faut pour ce faire remplir des conditions
formelles notamment deux :
- Limite du plafond de 1% des crédits votés dans la LFI
- La ratification sera demandée au Parlement dans la prochaine loi de finances rectificative ou
de règlement.
Il existe un autre cas d’ouverture de crédit supplémentaire : en cas d’urgence et de
nécessité impérieuse d’intérêt national, c’est possible en portant cette fois ci atteinte
à l’équilibre de la LFI. Dans ces cas-là, un projet de lois de finances rectificative doit
être immédiatement déposé (ex : élection présidentielle de 1974 à la suite du décès
de G. Pompidou).
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- Spécialisés :
➢ Crédits globaux et prévisionnels : dépenses éventuelles ou accidentelles («
chapitres réservoirs »), art 11 LOLF
➢ Fongibilité asymétrique des crédits : faculté de choisir l’objet et la nature des
dépenses au sein d’un programme pour en optimiser la mise en œuvre. Les
crédits de personnel (titre 2) peuvent être utilisés pour d’autres natures de
dépenses (investissement ou fonctionnement), mais pas l’inverse. Cela permet
une meilleure gestion des crédits en permettant des réaffectations de crédits pour
pallier d’éventuels aléas de gestion ou pour permettre le redéploiement de marges
de manœuvres dégagées en cours de gestion vers des dépenses dont les crédits
sont jugés insuffisants.
➢ Transferts de crédit : art 12 LOLF. On procède à des transferts de crédits entre
programmes de ministère distincts. Cependant, on ne peut pas utiliser cette
procédure pour modifier l’objet de la dépense, seul le service bénéficiaire de ce
crédit est modifié.
➢ Virements de crédit : art 12 LOLF. Il s’agit de virement de crédits entre les
programmes d’un même ministère. Il y a donc une modification de la nature de
la dépenses (ex : une dépense en personnel peut être transformée en dépense
d’investissement). Ils modifient la nature de la dépense contrairement aux
transferts de crédit donc véritable atteinte à la spécialité. Procédure plus stricte
que les transferts de crédit : possible qu’au sein d’un même ministère, dans la
limite de 2% des crédits de la LF.
Section 3 – L’exécution des opérations de dépenses
Le décret du 7 novembre 2012 fixe les règles d’exécution des budgets publics. En
application, sont identifiés les acteurs de cette exécution que sont les ordonnateurs et les
comptables et les procédures au terme desquelles il est possible de réaliser les dépenses et
recettes publiques. Durant cette phase, un principe est fondamental, c’est celui de la
séparation des ordonnateurs et des comptables.
Cette règle permet d'assurer un contrôle réciproque entre l'ordonnateur et le comptable et
ainsi éviter la fraude, ou du moins la limiter. La préoccupation majeure qu'il traduit est donc
de la régularité.
Le comptable contrôle la régularité formelle de l'exécution des recettes et des dépenses de
l'ordonnateur. Ce dernier fait de même à l'égard du comptable. Il s'agit de la transposition
en droit financier du principe de séparation des pouvoirs.
Cette séparation des ordonnateurs et des comptables est énoncée dans l'article 9 du décret
du 7 novembre 2012 : « Les fonctions d'ordonnateur et de comptable public sont
incompatibles ». Il pose ainsi une distinction organique mais aussi fonctionnelle des
compétences.
Cette règle rend incompatibles les fonctions d'ordonnateur et de comptable. D'une manière
sommaire, il peut être résumé ainsi : le rôle de l'ordonnateur est de décider des dépenses et

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des recettes ; Le comptable, quant à lui, doit se contenter de procéder à une série de contrôle
avant d'encaisser les recettes ou de payer les dépenses. Celui qui manie l’argent n’est pas
celui qui ordonne le paiement.

Pourquoi un tel principe ? Il a été énoncé en vue de limiter les risques de corruption. Il se
justifie également en raison de l'incompétence de certains ordonnateurs en matière de
comptabilité publique. Le comptable public est en effet le garant de la régularité des
opérations projetées par l'ordonnateur. La juxtaposition des compétences de l'ordonnateur
et du comptable public doit permettre par confrontation, d'apprécier la régularité des
comptabilités tenues d'une par le comptable et d'autre part par l'ordonnateur. Le
rapprochement de ces deux comptabilités doit conduire à mettre en évidence les éventuelles
irrégularités

Concernant la procédure, l’exécution de la dépense publique répond à un schéma établi qui


suppose, un engagement, une liquidation, un ordonnancement et enfin un paiement de
ladite dépenses.

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§ 1. La phase administrative : l’ordonnateur
Est qualifié d’ordonnateur « toute personne ayant la qualité, au nom de l’Etat, d’une collectivité ou
d’un établissement public, pour contracter, constater, liquider une créance ou une dette, ou encore, ordonner,
soit le recouvrement d’une créance, soit le paiement d’une dette ».
L’ordonnateur est, au sein de l’administration, l’autorité administrative qui détient un
pouvoir de décision en matière financière. A ce titre, sont des ordonnateurs, les ministres,
les préfets, les maires, les directeurs d’établissements publics comme les présidents
d’Université etc. mais aussi tout administrateur doté par délégation ou en qualité de
suppléant de ce pouvoir financier.
- L’engagement de la dépense publique : l’engagement constitue la première
étape de la procédure d’exécution de la dépense publique. Il signale la phase par
laquelle une personne crée ou constate à son encontre une obligation de laquelle
résultera une charge. L’engagement de la dépense publique ne peut -être le fait
que de l’ordonnateur compétent.
- La liquidation de la dépense : a l’engagement de la dépense publique, succède
une procédure de liquidation qui a pour objet de vérifier la réalité de la dette et
d’arrêter le montant de la dépense. Effectuée par les services de l’ordonnateur,
la liquidation est le préalable nécessaire à l’ordre de paiement adressé au
comptable public. Ainsi, la liquidation suppose l’appréciation du service fait.
Tout fonctionnaire ayant satisfait aux obligations qui lui incombaient, doit
percevoir par exemple l’intégralité du traitement qui lui est dû. Il en va de même
du cocontractant de l’administration qui a droit à obtenir le paiement des
prestations dès lors qu’elles ont été exécutées.
Si les conditions sont réunies, l’ordonnateur est tenu de procéder à la liquidation
de la dépense.
- L’ordonnancement de la dépense publique : c’est l’acte administratif
donnant l’ordre de payer la dette de l’organisme public. Très souvent, la
liquidation et l’ordonnancement d’une dépense sont le fait d’un seul et même
acte adressé au comptable public en vue du paiement correspondant.
L'ordonnancement doit contenir toutes les pièces justifiant le paiement, indiquer
l'imputation de la dépense.
§ 2. La phase comptable : le comptable public
Est comptable public, tout fonctionnaire ou agent ayant qualité pour effectuer au nom de
l’Etat, des collectivités territoriales ou des établissements publics, des opérations de
recettes ou de dépenses ou de maniement d’argent. Le comptable public peut aussi se
définir au travers de ses attribution de paiement des dépenses, de recouvrement des
recettes, de conservation des fonds appartement à des organismes publics. En matière de
dépenses, ils sont chargés de procéder au paiement sur la base d’ordres émanant des
ordonnateurs. Toutes les opérations des comptables publics doivent être enregistrées au
sein d’une comptabilité dont il assure la bonne tenue. Il assure aussi la conservation des
pièces justificatives.

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Aux trois étapes administratives de l’exécution de la dépense publique, succède la phase
comptable du paiement. Le paiement est l’acte par lequel une personne se libère de sa
dette. Seul un comptable public peut valablement procéder au paiement d’une dépense
publique. Mais avant de procéder au paiement, le comptable public doit accomplir
certains contrôles :
- S’assurer de la qualité et de la compétence de l’ordonnateur
- De la disponibilité des crédits
- De l’exacte imputation des dépenses au regard de la règle relatives ç la
spécialité budgétaire
- De la validité de la créance quant à l’exactitude des calculs de liquidation et à la
justification du service fait
§ 3. L’atteinte à la séparation des ordonnateurs et des comptables : la réquisition
L’exécution de la dépense se concrétise au travers du paiement effectué par le comptable
public, point de ponctuation de cette procédure d’exécution. Mais l’hypothèse peut
s’envisager qu’au terme des contrôles effectués, le comptable public se refuse à procéder au
paiement. Le refus ainsi opposé ne peut être outrepassé par l’ordonnateur que dans certains
cas strictement déterminés au moyen de la réquisition de paiement. La phase comptable de
l’exécution de l’opération de dépense n’exclut donc pas l’intervention de l’ordonnateur : à
la suite d’un refus de paiement formulé par le comptable public, l’ordonnateur peut requérir
ce dernier et obtenir que le créancier soit payé en dépit du refus du comptable.
En principe, lorsque le comptable accomplit une opération de dépense, il en supporte la
responsabilité à raison des irrégularités constatées. Cette responsabilité peut toutefois être
écartée dès lors que l’ordonnateur compétent à produit un ordre de réquisition. C’est ce
dernier qui devient alors responsable en cas d’irrégularité.
Très concrètement, lorsqu’à l’occasion de l’exercice de son contrôle, le comptable constater
des irrégularités, il est tenu de procéder à la suspension de la procédure de paiement et d’en
informer l’ordonnateur. Ce dernier peut, soit procéder aux régularisations si elles sont
possibles, soit user de son pouvoir de réquisition et ordonner au comptable de payer. Cela
a pour effet de décharger le comptable public de toute responsabilité et de la transférer à
l’ordonnateur qui sera recherchée devant la Cour de discipline budgétaire et financière.
Le comptable public est cependant tenu de persister dans son refus et ne pas se soumettre
à l’ordre de réquisition pour les irrégularités les plus graves à savoir l’indisponibilité des
crédits ou de l’absence de service fait.
Section 4 – L’exécution des opérations de recettes
En fonction de la nature de la recette à recouvrer, les modalités de recouvrement diffèrent.
Par exemple les recettes fiscales sont soumises à des régimes spécifiques de recouvrement
par opposition aux créances publiques ordinaires soumises à une procédure standardisée et
recouvrées au moyen de titres de recettes tels que l’ordre de versement ou les états
exécutoires.
Dans le domaine de l’exécution des opérations de recettes, un standard peut être dégagé
mais ne concerne pas les recettes fiscales, en trois étapes :
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- Un acte juridique créateur de la créance (loi, règlement, contrat…)
- Une opération de liquidation de la créance et d’émission de l’ordre de recette
correspondant
- L’encaissement par le comptable public du montant de la recette.
Ainsi, les ordonnateurs constatent les droits et assurent la liquidation de la créance et le
comptable les recouvrent ensuite.
Comme en matière de dépenses, il appartient au comptable public de contrôler les recettes
avant d’en assurer le recouvrement. Ces contrôles s’avèrent toutefois moins prononcés que
ne le sont ceux exercés en matière de dépenses tout simplement car les débiteurs, ceux qui
doivent payer l’Etat vont nécessairement exercer eux-mêmes un contrôle effectif à l’égard
des sommes qui leur sont réclamées. Dit autrement, contrairement à la dépense, le
comptable public peut compter sur le débiteur pour que celui-ci ne paye pas plus qu’il ne
doit.
Les titres de recettes sont dits exécutoires : quelle que soit la nature de la créance publique,
confrontée à un débiteur récalcitrant, l’administration peut user directement de procédures
d’exécution forcée pour obtenir le recouvrement de sa créance. Il n’a pas besoin de
demander l’intervention des tribunaux pour procéder à une saisie sur salaire, saisie
immobilière etc.

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