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Éditorial.

La France à quatre vitesses


Dans Esprit 2013/2 (Février), pages 3 à 4
Éditions Éditions Esprit
ISSN 0014-0759
ISBN 9791090270145
DOI 10.3917/espri.1302.0003
© Éditions Esprit | Téléchargé le 20/02/2024 sur www.cairn.info (IP: 92.87.29.32)

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Éditorial

La France à quatre vitesses

LE « redressement productif » dessine-t-il une stratégie pour l’éco-


nomie française ? La visite à la porte des usines en difficulté est un
exercice politique à haut risque : négliger d’y aller, c’est esquiver
ses responsabilités ; arpenter les chantiers, casque sur la tête,
auprès des ouvriers inquiets, c’est souvent s’exposer à promettre plus
qu’on ne pourra tenir. D’où un sentiment de scepticisme devant des
opérations de la dernière chance qui soulignent, à leur insu, en
intervenant si tard, une impréparation collective.
La redécouverte de la question industrielle nous renvoie à une
géographie bien particulière, qui n’est pas exempte de clichés, en
braquant les projecteurs sur les lieux en difficulté, liés à la révolu-
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tion industrielle du charbon et de l’acier (sidérurgie, raffineries,
usines automobiles…), plutôt que sur les secteurs en développe-
ment. Mais les ouvriers qui se battent pour leur site de production
n’ont pas tort de penser que, quel que soit le discours macro-
économique sur l’avenir du secteur industriel en général, leur terri-
toire leur offre peu d’opportunités.
En effet, comme le rappelle le géographe et économiste Laurent
Davezies1, tous les territoires ne sont pas affectés de manière homo-
gène par la crise. Le nord et l’est de la France en particulier concen-
trent le malaise : les industries anciennes déclinent sans que de
nouvelles activités se développent et, dans ce recul d’ensemble,
l’emploi public ne prend plus le relais, encore moins en période de
restriction budgétaire. Sur la carte de l’économie, les écarts terri-
toriaux s’accentuent rapidement.

1. Laurent Davezies, la Crise qui vient. La nouvelle fracture territoriale, Paris, Le Seuil, coll.
« La République des idées », 2012.

3 Février 2013
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Esprit

La situation économique d’un territoire dépend soit de ce qu’il


produit, soit de son attractivité. Si l’on croise ces deux critères, on
obtient quatre situations. Le géographe distingue ainsi la France
productive et attractive, dont la croissance est largement liée à la
dynamique urbaine ; les zones productives mais peu attractives
qui ne bénéficient pas des revenus de transfert ; la France peu
productive mais attractive, largement dans l’ouest et au sud, où l’ac-
tivité est soutenue par les revenus des retraités, du tourisme et de
l’emploi public, et enfin les zones peu productives et peu attractives
qui cumulent les handicaps.
Jusqu’à présent, les divisions de cette géographie étaient
compensées par les transferts financiers liés aux retraites et aux
emplois publics, dont l’effet homogénéisateur était puissant. Avec
la crise de 2008, les amortisseurs ont encore fonctionné en redis-
tribuant les revenus, mais avec la crise de 2010 et le recul de la
dépense publique, la croissance se concentre autour des grandes
villes, ce qui donne de la visibilité au phénomène métropolitain,
dont l’émergence a été longtemps annoncée. Ces constats nous
conduisent bien loin de l’idée ancienne de l’aménagement du terri-
toire, qui s’inquiétait des territoires abandonnés mais ne voyait pas
d’un bon œil la force des métropoles.
Mais si les métropoles peuvent favoriser une nouvelle croissance
en concentrant l’attractivité, l’innovation et un environnement favo-
rable aux entreprises, leur développement est limité par le manque
de logements et le coût de l’immobilier, qui découragent l’arrivée de
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la main-d’œuvre. Le logement apparaît ainsi comme l’un des prin-
cipaux freins au rééquilibrage des territoires, alors que l’avalanche
des mauvaises nouvelles devrait encourager les salariés à la mobi-
lité, au moins au sein de leur région, vers les lieux, souvent métro-
politains, où ils pourraient mieux s’en sortir.
Alors que les mesures de reclassement avec mobilité à l’occa-
sion des plans sociaux apparaissaient comme aventureuses à beau-
coup de salariés (ou comme des chantages plus ou moins explicites),
les nouveaux « accords de maintien dans l’emploi » changeront-ils
assez profondément les négociations d’entreprise pour que la mobi-
lité soit une opportunité et non un risque ? Après un dialogue social
qui a donné lieu à un accord majoritaire entre partenaires sociaux
au niveau national, les opérations de mobilité seront rapidement
mises à l’épreuve dans les mois qui viennent, avec des annonces de
réduction d’effectifs en série (à commencer par Renault).
Esprit

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