Vous êtes sur la page 1sur 12

Maladies Parodontales – Maladies Générales

Pr Nezzal M.

UNIVERSITE SALAH BOUBNIDER CONSTANTINE 3

FACULTE DE MEDECINE

DEPARTEMENT DE MEDECINE DENTAIRE

MALADIES PARODONTALES

MALADIES GENERALES

Année Universitaire 2021 / 2022


Cours de 3ème Année

Pr M. NEZZAL

Service de Parodontologie

Page 1 sur 12
Maladies Parodontales – Maladies Générales
Pr Nezzal M.

SOMMAIRE

INTRODUCTION
1. Quelques définitions
2. Concept de médecine parodontale
3. Santé bucco-dentaire et santé systémique
3.1. Maladie parodontale et Diabète
3.2. Maladie parodontale et Maladie cardiovasculaire
3.3. Complications de la grossesse
3.4. Maladie parodontale et Maladies respiratoires
3.5. Maladie parodontale et Polyarthrite rhumatoïde
3.6. Maladie parodontale et Obésité
4. Addictions
5. Cancers

CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

Objectifs du cours
• Identifier les facteurs de risque.
• Etudier l’association entre maladies générales et maladies
parodontales.
• Connaitre les implications cliniques afin de mieux prendre en
charge les patients à risque.

Page 2 sur 12
Maladies Parodontales – Maladies Générales
Pr Nezzal M.

INTRODUCTION
De nombreuses études ont tenté de rechercher une corrélation entre les maladies de
la cavité buccale, plus particulièrement les maladies parodontales, et diverses maladies
systémiques telles que le diabète, les affections cardio-vasculaires, les complications de la
grossesse, etc. Selon l’OMS, la maladie parodontale est considérée comme une pathologie
chronique non transmissible, qui partage les déterminants sociaux ainsi que de nombreux
facteurs de risque, avec d’autres maladies chroniques non transmissibles telles que les
maladies cardio-vasculaires, le diabète, le cancer et les affections respiratoires chroniques.

1. QUELQUES DEFINITIONS
 Etat de santé parodontale : La santé gingivale clinique a été définie, dans le cas d’un
parodonte intact et réduit chez un patient ne présentant pas de parodontite, avec
moins de 10% de saignements sur des profondeurs de sondage ≤ 3 mm. Le parodonte
intact n’a pas de perte d’attache, alors que le parodonte réduit présentait une perte
d’attache évidente.
 Gingivite : Il s’agit d’une lésion inflammatoire résultant d’interactions entre le biofilm
et la réponse immuno-inflammatoire de l’hôte, qui reste contenue dans la gencive
marginale et ne s’étend pas à l’attache parodontale. Elle est réversible en réduisant
le niveau de plaque à un niveau compatible avec la santé parodontale. Pour les
patients avec antécédents de parodontite, on préférera le terme d’inflammation
gingivale.
 Parodontite : Maladie inflammatoire chronique des tissus de soutien de la dent
engendrée par un microbiote parodontal dysbiotique. La parodontite se manifeste
par une inflammation qui se traduit par une perte d’attache parodontale. Alors que la
formation d’un biofilm bactérien déclenche l’inflammation gingivale, la maladie
parodontale se caractérise par trois facteurs :
- la perte des tissus de support parodontaux, qui se manifeste par la perte d’attache
clinique (CAL) et une perte de l’os alvéolaire radiologiquement observable ;
- la présence de poches parodontales ;
- le saignement gingival.
 Réaction de l’hôte : processus actif résultant d’une attaque microbienne.

2. CONCEPT DE MEDECINE PARODONTALE


 Miller (1891) introduisit le terme « Infection focale ».
 Offenbacher introduisit « Médecine Parodontale » lors du Workshop Mondial de
Parodontologie de 1996.
 Depuis plusieurs années, l’influence des maladies parodontales, maladies
inflammatoires d’origine infectieuse touchant les tissus de soutien dentaires, sur la
survenue et l’évolution de certaines pathologies systémiques telles les maladies
cardio-vasculaires, la polyarthrite rhumatoïde ou le diabète est étudiée.
 Les pathogènes parodontaux, leurs produits ou la réponse inflammatoire
représentent une charge chronique pathogénique et inflammatoire à un niveau
systémique.
 Les bactéries seules ne suffisent pas. Un hôte « susceptible » est une condition
nécessaire pour que la parodontite s’installe : la réponse à l’infection de l’hôte est
insuffisante (liée à des défauts fonctionnels PMN, mécanismes de défense
insuffisants et excès de certains médiateurs de l’inflammation), l’existence de

Page 3 sur 12
Maladies Parodontales – Maladies Générales
Pr Nezzal M.

certains facteurs de risque (facteurs endogènes, génétiques ou systémiques tels que


le diabète)
 Autres facteurs de risque qui rendent plus « sensibles » à la maladie : tabagisme –
stress – hygiène buccale insuffisante.

3. SANTE BUCCO-DENTAIRE ET SANTE SYSTEMIQUE


Chez les patients ne présentant aucune prédisposition à la maladie parodontale, la
réaction inflammatoire associée à la gingivite est satisfaisante et disparait spontanément,
tandis que, chez les patients présentant certaines prédispositions, des facteurs de risque
variés déclenchent une inflammation excessive mais inefficace et irréversible au niveau
du tissu conjonctif du ligament alvéolo-dentaire.

3.1. Maladie parodontale et diabète


Le diabète est un ensemble de troubles métaboliques caractérisés principalement par une
hyperglycémie qui résulte d’un défaut d’action ou de production de l’insuline. Le diabète est
une affection fréquente parmi la population (- 10%), et malheureusement près de la moitié
des diabétiques demeurent non diagnostiqués.
L’OMS indique que le diagnostic de diabète peut être retenu dans 3 situations différentes :
 la présence de symptômes de de diabète (polyurie-polydipsie-amaigrissement) et
glycémie mesurée à n’importe quel moment de la journée ≥ 2 g/l;
 une glycémie à jeun ≥ 1,26 g/l;
 une glycémie 2 heures après ingestion de 75 g de glucose ≥ 2 g/l.
Il existe deux types de diabète :
 diabète de type 1 (DT1) : caractérisé par une carence absolue en insuline et un début
d’installation brutal, le plus souvent avant l’âge de 20 ans. Il est dû à une destruction
sélective, plus ou moins complète, des cellules bêta du pancréas sécrétrices
d’insuline par un mécanisme auto-immun.
 diabète de type 2 (DT2) : caractérisé soit par une insuffisance de sécrétion d’insuline
(insulinopénie), soit par une résistance périphérique des tissus à l’action de l’insuline
(insulinorésistance). Le début est insidieux, survient le plus souvent après 40 ans. Le
diagnostic ne se fait qu’après plusieurs années d’évolution en raison de la bonne
tolérance clinique d’une hyperglycémie modérée. Il représente environ 90% des cas.

Le lien bidirectionnel entre les maladies parodontales et le diabète est déjà bien établi. Il y a
une prévalence et une incidence plus élevées de maladie parodontale chez les patients
atteints de diabète, qu’il soit de type 1 ou de type 2, et que cette association est plus
prononcée chez les patients dont la glycémie est mal contrôlée.
Le patient diabétique a trois fois plus de risque de développer une parodontite, ce qui en fait
la 6èmecomplication du diabète (OMS).
Les mécanismes d’action qui relient les deux pathologies sont une hyperactivation de la
réaction immuno-inflammatoire et une perturbation de la cicatrisation.
Le chirurgien-dentiste doit faire partie de l’équipe pluridisciplinaire et être informé de l’état
d’évolution du diabète de son patient.

La maladie parodontale étant une maladie bactérienne, inflammatoire et multifactorielle,


cette infection chronique aggrave le diabète. Le traitement parodontal peut améliorer le
contrôle de la glycémie.

Page 4 sur 12
Maladies Parodontales – Maladies Générales
Pr Nezzal M.

Le chirurgien-dentiste est un maillon important dans la prise en charge multi disciplinaire du


patient diabétique, mais aussi dans le dépistage.
Lors de l’examen clinique d’un patient diabétique, il faut rechercher des signes de
parodontite comme le saignement gingival, l’halitose, des abcès ou encore une suppuration
de la gencive. Dans le cas où ces signes ne sont pas présents, le patient doit être informé des
risques de développer une maladie parodontale et lui expliquer les options thérapeutiques
pouvant l’aider.
Il est évident qu’un traitement parodontal efficace avec une éducation thérapeutique et un
suivi parodontal professionnel régulier vont permettre d’empêcher l’aggravation aussi bien
de la maladie parodontale que du diabète.
Implications cliniques :
 Diagnostic des parodontites peut permettre de diagnostiquer un diabète ignoré.
 Patients diabétiques doivent avoir des rendez-vous essentiellement le matin. Ces
RDV doivent être de courte durée et sans stress si possible.
 S’assurer que le patient a bien mangé avant son RDV.
 Les anesthésies de longue durée et profondes associées à des analgésiques sont
préférables.
 Les signes vitaux, la tension artérielle et la glycémie doivent être vérifiés avant les
soins.
 Le taux de glycémie peut influencer la cicatrisation et la réponse au traitement. De ce
fait, le patient doit être suivi de près durant la période postopératoire.
 Toute infection active doit être traitée immédiatement, de façon à prévenir une
dérégulation de la glycémie.
 Les visites de suivi et de contrôles dentaires doivent être plus fréquentes.
 Eviter l’hypoglycémie (< 70 mg/dl) : demander au patient de ramener son glucomètre
et vérifier que le taux de glucose avant d’intervenir soit au moins = à 1 g/l.
 Taux d’hémoglobine glyquée (HbA1c) < 7%.

3.2. Maladie parodontale et Maladie cardiovasculaire


Les affections vasculaires liées à l’athérosclérose regroupent les cardiopathies ischémiques,
les affections cérébro-vasculaires et les maladies des artères, artérioles, capillaires ou
maladies vasculaires périphériques.
La pathologie athéromateuse entraine de nombreuses complications résultant soit du
phénomène de thrombose en lui-même, soit du fait de la dissémination au sein de la
circulation générale d’un caillot sanguin provoquant à distance :
- des accidents ischémiques ou thrombotiques pouvant avoir des conséquences graves
- des accidents vasculaires cérébraux
- l’infarctus du myocarde
L’ischémie se définit par un déséquilibre entre les apports et les besoins en oxygène
consécutif à une diminution de la perfusion.
L’athérosclérose est le facteur étiologique principal des cardiopathies ischémiques. Les
facteurs de risque traditionnels sont : tabagisme, hyperlipidémie, HTA, diabète.
La présence d’infections pouvant entraîner une réaction inflammatoire chronique pourrait
contribuer à expliquer la présence d’athérosclérose coronarienne.

Page 5 sur 12
Maladies Parodontales – Maladies Générales
Pr Nezzal M.

Définition de l’athérosclérose : « Association variable de remaniements de l’intima des


grosses et moyennes artères consistant en une accumulation segmentaire de lipides, de
glucides complexes, de sang et de produits sanguins, de tissu fibreux et de dépôts calcaires,
le tout accompagné de modifications de la média » (OMS, 1954).

Définition de l’athérome : « Lésion élémentaire de l’intima des artères, est caractérisée par
une nécrose grumeleuse riche en lipides (la « bouillie athéromateuse »). Rarement isolé,
l’athérome est le plus souvent associé à des lésions de sclérose réalisant un complexe
lésionnel qui correspond à l’athérosclérose ».

Facteurs de risques de l’athérosclérose :


- Facteurs de risque non modifiables : âge, sexe, diabète, indice de masse corporelle,
dyslipidémie, HTA, taux de fibrinogène élevé, numération des leucocytes.
- Facteurs de risque modifiables : sédentarité, stress, consommation d’alcool, régime
alimentaire, tabagisme, infections virales (cytomégalovirus, herpes), infections
bactériennes (Helicobacter pylori, maladies parodontales).

Association entre maladies parodontales et MCV : depuis plusieurs années, de nombreux


auteurs se sont intéressés à la relation entre ces 2 pathologies. Cette association entre MP et
formation de plaques d’athérome est intéressante, notamment afin d’argumenter dans le
sens de protocoles de prévention systématique des pathologies cardio-vasculaires surtout
chez les jeunes présentant des pathologies parodontales agressives.
Aspects biologiques : d’un point de vue biologique, plusieurs hypothèses concernant
l’association entre MP et athérosclérose ont été proposées :
- théorie infectieuse : selon certaines études des bactéries parodontopathogènes (Pg –
Aa – Pi – Tf) ont été retrouvées au sein de la plaque d’athérome (Padilla et al. 2006).
- théorie inflammatoire : Maladie Parodontale et Athérosclérose sont maladies
inflammatoires.
- théorie immunitaire : fondée sur les capacités de réponse de l’hôte face à l’agression
bactérienne (Beck et al. 1996) ; niveau de réponse inflammatoire plus ou moins
élevé ; possible phénomène de réactivité.
Implications cliniques :
 Chirurgien-dentiste doit informer le patient de l’augmentation du risque
d’évènement cardio-vasculaire en cas de parodontite.
 Recommandé d’adresser au médecin traitant les patients atteints de parodontite et
présentant un ou plusieurs autres facteurs de risques cardio-vasculaires (tabac,
obésité, HTA).
 Modification des facteurs de risques comportementaux (tabac, sédentarité, nutrition,
stress) fait partie intégrante du traitement parodontal et est d’autant plus efficace
qu’elle est pluridisciplinaire (médecin traitant, tabacologue, psychologue,
diététicien).
 Traitement parodontal peut réduire l’inflammation systémique et améliorer la
fonction endothéliale.
 Lors de l’anamnèse, une attention particulière doit être portée sur la présence de
facteurs de risque communs.

Page 6 sur 12
Maladies Parodontales – Maladies Générales
Pr Nezzal M.

3.3. Maladie parodontale et effets néfastes sur la grossesse


La grossesse induit une augmentation du risque d’inflammation au niveau gingival. Elle
provoque fréquemment l’apparition de gingivite gravidique et d’épulis, qui régressent
habituellement après l’accouchement. Il existe un risque d’issue défavorable de la grossesse
(accouchement prématuré : < 37 semaines de gestation, nouveau-né de faible poids : < 2,5
kg, pré-éclampsie : hypertension maternelle et protéinurie) chez les femmes ayant une
parodontite.

Données épidémiologiques : Risque d’accouchement prématuré d’enfant de faible poids est


de 7,5 plus important chez les femmes atteintes de parodontite sévère (Offenbacher et al.
1996). L’absence de gingivite chez la femme enceinte entraine une diminution du risque
d’accouchement d’un enfant de petit poids (Dasanayake, 1998).

Trois hypothèses biologiques principales ont été avancées :


– la dissémination des bactéries ;
– l’augmentation systémique des médiateurs inflammatoires ;
– le rôle de la réponse immunitaire fœto-maternelle contre les agents pathogènes buccaux.

Implications cliniques :
 Grossesse n’est pas une contre-indication au traitement parodontal.
 En cas d’infection aiguë, d’abcès ou de conditions prédisposant à la bactériémie ou à
la septicémie, il faut intervenir rapidement, quel que soit le stade de la grossesse.
 Prise de radiographies dentaires indispensables réalisées avec une protection
adéquate est sans danger.
 Epinéphrine doit être évitée autant que possible et est contre-indiquée chez les
patientes présentant une pré-éclampsie.
 Tétracyclines sont contre-indiquées durant la grossesse.
 Grossesse constitue un moment privilégié pour informer la femme enceinte des
habitudes appropriées d’hygiène orale à transmettre à son enfant.
 Importance du dépistage et prise en charge des MP pour toutes les femmes
présentant un risque médical connu pour les naissances avant terme.
 Traitement parodontal non chirurgical durant le deuxième trimestre de la grossesse
est sans danger et efficace.
 Stabiliser le plus précocement possible les pertes tissulaires et programmer plusieurs
séances de contrôle jusqu’à l’accouchement.

3.4. Maladie parodontale et Maladies respiratoires (MR)


Les MR atteignent les voies aériennes qui comprennent les voies nasales, les bronches et les
poumons. Ce sont des affections aiguës comme la pneumonie et la bronchite, ou chroniques
telles que l’asthme et la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO).
La mauvaise hygiène bucco-dentaire est un facteur prédisposant à l’infection respiratoire via
les bactéries parodontopathogènes.
Il existe des données épidémiologiques montrant une augmentation du risque de BPCO chez
les patients atteints de parodontites.
L'hygiène buccodentaire et le suivi professionnel réduisent l'incidence des maladies
respiratoires chez des patients en soins intensifs.

Page 7 sur 12
Maladies Parodontales – Maladies Générales
Pr Nezzal M.

Les mécanismes biologiques du lien entre les maladies parodontales et les maladies
respiratoires sont :
 Rôle de l’infection : le biofilm dentaire constitue un réservoir de pathogènes oraux
créant un environnement favorable à la colonisation secondaire par des pathogènes
respiratoires (pneumocoques). Ceux-ci vont se détacher dans les sécrétions orales et
être aspirés vers les poumons pour contaminer l'arbre respiratoire inférieur.
 Rôle de la réponse inflammatoire : les bactéries orales aspirées avec les pathogènes
respiratoires influencent leur adhésion en stimulant la production de cytokines
induisant des changements cellulaires de l'épithélium respiratoire.
Implications cliniques :
Il existe un bon niveau de preuve indiquant les effets positifs de l’hygiène orale sur la
prévention des pneumonies nosocomiales en utilisant de la chlorhexidine.
Notre rôle :
 Prévenir les MP et leurs conséquences : en supprimant l’étiologie qu’est la
composante bactérienne de la plaque dentaire, en limitant les facteurs de risque :
tabac.
 L’enseignement du contrôle de la plaque dentaire doit être systématique et réévalué.
 Patients à risque : patients hospitalisés/en maisons de retraite.

3.5. Polyarthrite rhumatoïde (PR)


La PR est un rhumatisme inflammatoire chronique auto-immun dégénératif. Au niveau
anatomopathologique, la membrane synoviale, quand elle s'enflamme, forme un pannus,
entraînant la destruction des articulations (figure 1) et générant handicap et douleur. La PR
s'accompagne de manifestations inflammatoires systémiques telles qu'une sécheresse
buccale.

Figure 1 : Modifications de l'articulation atteinte de polyarthrite rhumatoïde (PR)

Points communs entre polyarthrite rhumatoïde et parodontite chronique :


La PR et les parodontites chroniques se développent sous l'influence de facteurs de risque
communs tels que la prédisposition génétique ou le tabac. La contribution des facteurs
génétiques dans la PR a été évaluée à 50 %.

Rôle de la parodontite chronique dans la pathogénie de la polyarthrite rhumatoïde :


La parodontite chronique serait impliquée dans l'initiation et l'évolution de la PR par deux
voies. D'une part, le passage de bactéries et de cytokines pro-inflammatoires d'origine

Page 8 sur 12
Maladies Parodontales – Maladies Générales
Pr Nezzal M.

parodontale dans le sang favoriserait l'évolution de l’inflammation articulaire. D'autre part,


un rôle spécifique de Porphyromonas gingivalis (Pg) existerait.
La PR est associée à la production de certains anticorps (facteur rhumatoïde et Ac
antipeptides cycliques citrullinés (anti-CCP)), plus spécifiques, qui seraient clé dans le
développement de cette maladie.
P. gingivalis est la seule bactérie identifiée à ce jour comme possédant une enzyme
particulière, la peptidyl-arginine-déiminase (PAD), enzyme à l’origine d’un processus de
citrunillation, processus entrainant une modification de la structure des protéines. Elle
favoriserait la génération d’Ac anti-CCP, renforçant l’idée que la parodontite est un facteur
de risque de l’initiation et/ou l’entretien de la PR.

Implications cliniques :
 Le dépistage et le traitement des parodontites chroniques doivent être réalisés chez
les patients atteints de PR.
 La PR est traitée avec des immunosuppresseurs : le praticien doit prendre en compte
le risque infectieux du patient.
Notre rôle :
 Dépistage et la prise en charge des MP chez les patients à risque ou souffrant de PR
apparaissent comme nécessaires
 Cette prise en charge permettra : d’augmenter le confort du patient en traitant sa
pathologie buccale, de limiter les effets systémiques de ces pathologies sur l’évolution de la
PR.
 Pour ce faire, une collaboration plus importante avec les rhumatologues est à
envisager.

3.6. Maladie parodontale et Obésité


L’obésité constitue une véritable pandémie mondiale. Elle progresse dans la très grande
majorité des pays et sur tous les continents. L’obésité est un problème de santé publique car
le tissu adipeux, notamment viscéral, se comporte comme un organe endocrine. Il sécrète
un très grand nombre d’adipokines pro-inflammatoires qui provoquent une inflammation à
bas bruit sans doute impliquée dans l’apparition des pathologies observées chez le sujet
obèse.
On définit l’obésité comme une accumulation anormale ou excessive de graisse dans les
tissus adipeux, pouvant engendrer des problèmes de santé. Il y a obésité lorsque l’indice de
masse corporelle (IMC, calculé en Kg/m2) est ≥ 30.
L’épidémie d’obésité semble refléter un changement général de style de vie, caractérisé par
une diminution du niveau d’activité physique associée à une consommation excessive de
nourriture.
En effet, les habitudes alimentaires ont connu des bouleversements considérables avec une
consommation accrue de boissons sucrées et de produits de restauration rapide. L’obésité
peut avoir diverses conséquences :
 une morbidité sévère,
 un risque accru de maladie coronarienne,
 un diabète type 2,
 une hypertension,
 une perte de qualité de vie.

Page 9 sur 12
Maladies Parodontales – Maladies Générales
Pr Nezzal M.

Mais le lien entre obésité et santé buccale ne se limite pas au risque carieux. Des études
épidémiologiques suggèrent que l’obésité est un indicateur de risque des maladies
parodontales.
Un lien a également été établi entre l’obésité et les maladies parodontales grâce à des
études cliniques menées auprès des populations japonaise (Saito T. et al. 2001), américaine
(Al-Zahrani et al. 2003) et d’Arabie Saoudite (Alabdulkarim et al. 2005).
Le rôle de l’obésité dans le développement des maladies parodontales n’est pas encore
fermement établi, mais il est probable qu’une modification de la sécrétion par le tissu
adipeux de médiateurs pro-inflammatoires soit un élément important de la pathophysiologie
des complications associées à l’obésité.
Implications cliniques :
 Patients obèses répondent cliniquement au traitement parodontal.
 Traitement parodontal peut améliorer les marqueurs systémiques de l’obésité.
 Perte de poids semble favoriser la réponse au traitement parodontal.
Notre rôle : Quelques mesures axées sur les facteurs de risque que les dentistes peuvent
incorporer dans leur cabinet :
• Examen des habitudes alimentaires des patients à risque.
• Suivi alimentaire (peut être en collaboration avec un diététicien) des patients ayant
subi des extractions dentaires.
• Mise en place d’affiches (dans les cabinets dentaires) illustrant les bienfaits
d’habitudes alimentaires saines.
• Vérification du poids corporel à chaque visite, pour déceler tout changement dans ce
facteur chez les patients à risque.
• Aiguillage des patients à risque vers un médecin ou autre professionnel de la santé,
en cas de changements importants dans le poids corporel ou les habitudes
alimentaires.
• Collaboration étroite entre le nutritionniste, l’endocrinologue et le parodontiste :
pour améliorer les marqueurs inflammatoires et diminuer les risques de
complications de l’obésité.

4. ADDICTIONS
Le rôle des bactéries dans le déclenchement des parodontites est un fait bien établi
(Socransky, 1970). La susceptibilité de l’hôte dans leur déclenchement, leur forme clinique et
leur progression est importante.
Un certain nombre de facteurs prédictifs (tabagisme ou diabète) ont été identifiés tandis que
d’autres, comme le stress psychologique, sont pressentis.
- L’alcool, qui possède de fortes activités modulatrices des réponses immunes innées et
acquises, pourrait être impliqué.
Existe-t-il une association entre la consommation d’alcool et l’existence ou le
développement d’une parodontite ne mettant pas en jeu une déficience de l’hygiène bucco-
dentaire ? La consommation d’alcool semble être associée à un risque accru de développer
une parodontite. Cela serait dû à une accumulation d’acétyle aldéhyde (produit du
métabolisme de l’éthanol hautement toxique).

- La toxicomanie peut en effet être considérée comme un comportement symptomatique


d’un dysfonctionnement de la personnalité, quelle qu’elle soit.

Page 10 sur 12
Maladies Parodontales – Maladies Générales
Pr Nezzal M.

Le cannabis appartient aux psychodysleptiques c’est-à-dire aux substances qui provoquent


des troubles mentaux et plus spécifiquement aux hallucinogènes.
Son usage est ancestral mais son principe actif, le delta 9 tétra hydrocannabinol ou THC, n’a
été découvert qu’en 1964. Actuellement les produits rencontrés sont de plus en plus
concentrés en THC.
Au niveau de la sphère oro-faciale, il existe aussi des manifestations communes. En effet
chez la grande majorité des patients toxicomanes, un nombre très élevé de lésions carieuses
ainsi que des problèmes parodontaux sévères sont remarqués. Ce phénomène semble
principalement dû à un manque d’hygiène, au peu d’intérêt qu’accordent ces patients pour
la cavité buccale, aux troubles alimentaires qu’ils soient quantitatifs ou qualitatifs et à leur
terrain souvent immunodéprimé. Pour ces mêmes raisons, sont également fréquemment
rencontrées des candidoses.
Peuvent apparaître :
 gingivites, stomatites,
 hyperplasie gingivale et autres modifications de la muqueuse buccale,
 troubles sensoriels,
 facteur de risque de cancers buccaux.
Les consommateurs de cannabis s’exposent à un risque important de maladies parodontales
graves (3), en raison notamment d’une mauvaise hygiène bucco-dentaire et d’une
hyposialie (xérostomie).
Notre rôle :
• Avant tout traitement, un bilan de santé général est indispensable.
• L’interrogatoire devra également préciser les substances absorbées, leur quantité et
surtout le moment et le mode de prise et en particulier de la dernière prise.
• Les séances devront si possible être programmées à distance de la prise des toxiques.
• Le plan de traitement proposé devra être simple, adapté à la demande de la
personne, et inclure des séances courtes ; le praticien pourra à cette occasion insister
sur l’importance de l’hygiène et du suivi dans la réussite de la prise en charge.
Il semble également essentiel que le praticien garde à l’esprit les principaux risques
généraux, et les précautions qu’ils imposent. C’est notamment le cas :
- du risque de problèmes cardiovasculaires imprévisibles chez le cocaïnomane,
- de la majoration du risque infectieux pour les patients souffrant d’immuno-
dépression sévère,
- du risque d’apparition de cancers des VADS,
- du risque d’endocardite infectieuse (EI).
Eviter les prémédications sédatives, préférer une préparation psychologique.
Vigilance face aux allergies, notamment aux esters chez le cocaïnomane, de manière
générale éviter les anesthésiques de type esters comme la procaïne.
Choix des molécules par rapport à la qualité de la fonction hépatique, éviter les amides en
cas de maladies graves du foie sauf l’Articaïne.
Limitation de l’usage des vasoconstricteurs.
Molécule de choix : articaïne, amide, sans vasoconstricteurs avec une bonne tolérance
hépatique.
Réalisation de l’anesthésie à distance de la prise de substances : cocaïne (délai de 6 à 24
heures) ; cannabis (délai d’une semaine si emploi de vasoconstricteurs).

Page 11 sur 12
Maladies Parodontales – Maladies Générales
Pr Nezzal M.

5. CANCERS
De plus en plus de pathologies systémiques pourraient être influencées par la présence
d’une parodontite. Celle-ci pourrait, d’une part, participer à l’apparition de la pathologie
systémique et, d’autre part, en aggraver l’évolution. Les mécanismes pathogéniques
évoqués font intervenir la dissémination bactérienne et la diffusion de molécules pro-
inflammatoires comme les cytokines.
Les pathologies pour lesquelles la présence d’une parodontite chronique pourrait constituer
un facteur de risque sont :
- certains cancers oro-faciaux, digestifs, du sein et du pancréas ;
- des pathologies rénales ;
- certaines maladies neuro-dégénératives comme la maladie d’Alzheimer.

Des études prospectives et cas-contrôles suggèrent une association entre parodontites et


cancers orodigestifs et du pancréas. Le lien entre les 2 affections a aussi été étudié pour
d’autres types de cancer. La perte dentaire et une mauvaise hygiène dentaire ont été
associées à des cancers du poumon, de la prostate, hématologiques et d’autres encore.
Une association positive entre parodontites et mortalité semble indiquer à nouveau que la
santé parodontale pourrait être un excellent et accessible marqueur de santé. Aussi, il faut
encourager la prévention des maladies parodontales.

CONCLUSION
Les parodontopathies sont des maladies inflammatoires d'origine infectieuse,
multifactorielles, très répandues. Des études récentes établissent des liens entre les
parodontites et certains troubles/maladies systémiques, notamment les maladies
cardiovasculaires, les maladies respiratoires, les complications de grossesse et le diabète.
Bien que les liens physiopathologiques et de causalité ne soient pas clairement établis, le
traitement et la prévention des maladies parodontales peuvent avoir un impact décisif sur la
prévention et l'évolution de ces maladies. L'existence de telles associations, malgré les
controverses, renforce la nécessité d'une étroite collaboration entre le médecin et
l'odontologiste, collaboration qui permet une prise en charge globale et optimale du patient.

Bibliographie

1. Anagnostou F, Itri Jazouli L, Cohen N, Azogui-Lévy S. Maladies parodontales et état de


santé général. EMC, 2011 Elsevier Masson.
2. Bouchard P. Parodontologie et dentisterie implantaire. Volume 1 : médecine parodontale.
Edition Lavoisier. 2014.
3. Dumas C, Antezack A, melloul S, Boyer A, Monnet-Corti V. Nouvelle classification des
gingivitis. L'Information Dentaire n°24 - 17 juin 2020 (page 22-23).
4. Pesci-Bardon C, Precheur I. L’alcool : une drogue licite aux conséquences bucco-dentaires
non négligeables. AOS 2013;262:24-30.
5. Reners M. Le parodonte au cœur de la santé. Espace Information dentaire 2015; 16-82.
6. Bobetsis YA, phoebus N.M. Santé bucco-dentaire et santé systémique. In Reners M. La
parodontologie. Tout simplement. Espace Information dentaire 2018 ; 23-32.

Page 12 sur 12

Vous aimerez peut-être aussi