Vous êtes sur la page 1sur 239

MANAGEMENT SUP

MANAGEMENT - RESSOURCES HUMAINES

Fondements, pratiques et perspectives

Isabelle Barth

Préfaces
René-Yves Darmon et Jean-Pierre Arnaud
Maquette de couverture : Alain Vambacas

© Dunod, Paris, 2010


ISBN 978-2-10-054253-6
Table des matières

Préfaces V

Introduction générale 1

1 Le management commercial : de nouvelles exigences face à de


nouvelles attentes 5

Section 1 Les évolutions récentes du management commercial 6


Section 2 Le nouveau manager commercial 13
Section 3 Construire les nouvelles compétences du management commercial 19

2 L’élaboration de la stratégie commerciale et sa mise en œuvre 5

Section 1 Élaborer la stratégie commerciale 30


Section 2 Construire le plan d’action commerciale et le décliner 41
Section 3 Configurer l’organisation commerciale 48
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

3 Le pilotage de l’activité commerciale 59

Section 1 La définition et la mise en place des objectifs 60


Section 2 L’animation de l’activité commerciale 68
Section 3 La mise en place du pilotage de la performance commerciale 76

4 L’animation des forces de vente 83

Section 1 La motivation et la performance : deux concepts essentiels


du management commercial 84

III
LE MANAGEMENT COMMERCIAL
Section 2 Deux moments clefs : le recrutement et l’intégration du commercial 92
Section 3 La gestion de la carrière d’un commercial 97

5 Les nouveaux enjeux de la relation client 105

Section 1 Une vente inscrite dans une relation client multicanal 106
Section 2 Principes et enjeux d’une Sales Force Automation (SFA) 115
Section 3 Les nouveaux visages de la relation client 122

6 Les mutations de la négociation commerciale 129

Section 1 La place de la négociation commerciale dans la vente 130


Section 2 Les nouvelles pratiques de la négociation commerciale 135
Section 3 Les mutations de la fonction achat 144

7 Manager dans le village planétaire 151

Section 1 L’internationalisation de l’entreprise 152


Section 2 Bien comprendre les différences 159
Section 3 Manager à distance dans un contexte interculturel 166

8 Le développement personneldu manager commercial 175

Section 1 Le manager commercial sous pression 176


Section 2 Mieux se connaître pour être plus performant 181
Section 3 Être au cœur des réseaux : animer, transférer, essaimer 189

9 Le manager commercial face aux défis de la responsabilité


sociale de l’entreprise (RSE) 197

Section 1 La fonction commerciale et la responsabilité sociale de l’entreprise 198


Section 2 Le management commercial et l’éthique 206
Section 3 Le management de la diversité dans la fonction commerciale 212

Conclusion générale 219

Bibliographie 221

Index 231

IV
Préfaces

RENÉ-YVES DARMON
PROFESSEUR ÉMERITE, ESSEC BUSINESS SCHOOL
PROFESSEUR AFFILIÉ, UNIVERSITÉ LAVAL
Ce livre se différencie des nombreux ouvrages sur le management commercial par
son souci de mettre l’accent sur quelques faits essentiels qui caractérisent la vente
et la direction commerciale dans le contexte de constante évolution économique et
sociale que nous connaissons actuellement. Il est important en effet de souligner le
rôle essentiel et accru que jouent la vente et la gestion commerciale dans les entre-
prises. Le marketing a trop souvent fait oublier que la fonction commerciale est au
cœur de l’entreprise, puisque comme le cœur irrigue et régule toutes les fonctions
du corps humain, la fonction commerciale assure et contrôle le flux des revenus
d’une entreprise, revenus qu’il faut générer dans les conditions de plus en plus dif-
ficiles de la mondialisation.
Dans ces conditions, contrairement aux pratiques du passé, il est urgent pour les
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

entreprises de reconnaître au cardiologue — le directeur commercial – toute son


importance et de valoriser enfin son rôle et sa fonction. Ce sera là la façon la plus
sûre d’y attirer les managers les plus talentueux, à la hauteur des enjeux qu’ils repré-
sentent pour les entreprises.
Le management commercial étant de plus en plus complexe, on ne parviendra à
valoriser cette fonction qu’en assurant des formations de qualité à tous les niveaux,
à commencer par les formations à la vente et au management commercial dispensées
dans les Universités et les Grandes Écoles de Management. Dans ces formations, il
ne s’agit plus de se limiter comme par le passé à l’enseignement des techniques de
vente. Il convient à l’heure actuelle de préparer les dirigeants commerciaux à assurer
leurs fonctions dans le cadre de la responsabilité sociale de leur entreprise, et à

V
LE MANAGEMENT COMMERCIAL

promouvoir les valeurs actuelles telles que le développement durable, l’éthique et le


respect de la diversité.
Ce sont ces grands thèmes caractérisant l’importance et l’actualité de la fonction
commerciale moderne qui sont développés dans cet ouvrage et qui en font sa force
et sa valeur.

JEAN-PIERRE ARNAUD
PRÉSIDENT NATIONAL DCF
L’acte de vendre est d’une importance cruciale pour l’entreprise. Le développement
des sociétés s’appuie sur trois piliers majeurs : innovation, conquête de nouveaux
marchés et création de valeur.
La fonction commerciale interagit tout à la fois avec ces trois critères. Génératrice
de chiffre d’affaires par essence mais également en termes de pérennité du porte-
feuille client, innovante vis-à-vis du management, de l’encadrement et de la forma-
tion des équipes de vente, et toujours au cœur de la conquête de marchés, la fonction
commerciale occupe un rôle clef pour la performance de l’entreprise.
Avec la globalisation, alors que nous sommes engagés dans un monde de commu-
nication et d’échanges, les métiers de la fonction commerciale, en pleine mutation,
se positionnent donc comme un moteur fondamental pour la croissance.
C’est un fait : nous manquons de commerciaux et le manager commercial a un rôle
capital dans l’entreprise, lié aujourd’hui à de nouvelles problématiques humaines,
éthiques et sociales.
Raisonner en réseau, introduire le management commercial dans les formations des
jeunes, recruter des commerciaux issus d’une génération aux motivations nouvelles en
proposant des missions propices à un développement personnel et professionnel, tels
sont les enjeux actuels auxquels est confronté le dirigeant commercial.
Depuis quatre-vingts ans, le réseau des Dirigeants Commerciaux de France s’im-
plique afin de valoriser les bonnes pratiques et l’excellence commerciale en entre-
prise ou pour promouvoir les métiers de la fonction commerciale auprès des instituts
de formation.
A la croisée des chemins entre la recherche fondamentale et la vie en entreprise,
l’analyse d’Isabelle Barth est tout à fait essentielle car elle permet aux dirigeants
commerciaux de conserver un regard prospectif sur leurs métiers et ainsi tendre vers
de nouveaux modèles de performance et d’excellence.

VI
Introduction
générale

Donner du sens au management commercial

« Penser en stratège, agir en primitif »


RENÉ CHAR
Que serait une entreprise sans vente ? Sans commande ? Sans chiffre d’affaires ?
Les univers de plus en plus concurrentiels, les exigences accrues des consomma-
teurs, une homogénéisation toujours plus forte des offres, la certitude de l’enjeu à
« remettre de l’humain » dans la gestion de la relation client, les secousses imposées
par l’environnement socio-économique amènent les entreprises à attendre plus et
mieux de la fonction commerciale.
Dans ce contexte complexe, savoir gérer sa force de vente ne suffit pas, surtout si
les bonnes pratiques se calquent sur les succès du passé. Ce serait réduire le potentiel
du management commercial.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

En effet, le management commercial dépasse largement le simple périmètre de


« la gestion des forces de vente », et les compétences attendues du manager commer-
cial sont nombreuses et diversifiées.
Le cœur du savoir-faire se déplace : si les compétences classiques restent essen-
tielles – la maîtrise de la négociation, la motivation des équipes, l’organisation –
elles ne suffisent plus, et sont peu à peu challengées par des compétences moins
codifiées, mais repérables dans les organisations en capacité de changement. On
peut citer de façon non exhaustive : la capacité à travailler en réseau, la vision sys-
témique de l’organisation, la maîtrise de la veille informationnelle, une lecture par
la chaîne de la valeur, l’inscription des actions dans le cadre de la responsabilité
sociale de l’entreprise.
1
LE MANAGEMENT COMMERCIAL

Les managers commerciaux se situent dans des configurations organisationnelles


diverses, le périmètre de leurs fonctions et de leurs responsabilités varie fortement,
selon la taille de l’entreprise, son activité, son organisation, comme selon le moment
de leur carrière, leur formation initiale, leurs envies et leurs compétences.
Compte tenu de ces vastes mouvements et de ces multiples configurations, il est
donc indispensable de voir le management commercial dans une perspective dyna-
mique.
Cet ouvrage s’inscrit dans cet ambitieux cahier des charges.
Il a donc été construit avec les objectifs suivants :
– se concentrer sur les invariants de la fonction de management commercial
pour redessiner le noyau dur de ses savoirs, savoir-faire, savoir-être ;
– identifier les fondamentaux, pour en comprendre ensuite les déclinaisons et les
variations, en mobilisant tous les champs disciplinaires des sciences sociales (la
gestion est légitime mais le recours à la sociologie, la psychologie sont
incontournables) ;
– garder l’esprit ouvert à l’innovation, observer les évolutions, les phénomènes
émergents, en écartant les fluctuations ponctuelles, et en qualifiant les grandes
tendances à venir ;
– admettre la diversité du management commercial : diversité des situations, des
enjeux, des individus. Une fois dessinées les catégories qui aident à penser, cet
ouvrage proposera à chaque fois des cas, des exemples, des illustrations qui per-
mettent à la fois de fixer les idées, mais aussi, parfois, de « sortir des cadres » ;
– garder présent à l’esprit que le management est un art exercé par des
hommes et des femmes, à destination d’hommes et de femmes, dans toute leur
richesse et leur complexité.

Toujours en mouvement, toujours en veille, le manager commercial se doit de


constamment observer, décrypter, analyser son environnement pour mieux dessiner
ses intentions stratégiques et nourrir ses capacités d’anticipation, vis-à-vis de ses
équipes comme de ses clients, et de l’ensemble des parties prenantes de la fonction
commerciale.
Cet ouvrage est organisé en trois fois trois temps avec une volonté de chemine-
ment didactique, mais il n’est pas indispensable d’en avoir une lecture linéaire :
chaque chapitre comme chaque section est conçu comme une rubrique spécifique. Il
faut prendre ce livre pour ce qu’il est au sens littéral : un manuel, c’est-à-dire un
objet que l’on garde en main ou à portée de main, en cas de question ou de problème.
Un index situé en fin d’ouvrage permet de se référer aux passages en fonction des
mots clefs.

2
Introduction générale

Il est destiné aux managers commerciaux en activité comme en devenir, tous


ceux et celles qui, pour mieux maîtriser l’activité passionnante et trépidante de
management commercial, veulent « comprendre ce qu’ils font ou ce qu’ils seront
amenés à faire », pour devenir des managers commerciaux performants bien sûr,
mais aussi réflexifs et évolutifs.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

3
Chapitre
Le mana ge ment
commercial :
1 de nouvelles
exigences face à
de nouvelles attentes

L ’essence même du métier de manager commercial est d’animer des équipes


d’hommes et de femmes pour les mener à la performance commerciale.
Même si les compétences attendues et l’exercice du management se basent sur quel-
ques principes fondamentaux, on observe une grande diversité des métiers et des
pratiques. À un moment où les critères de performance des entreprises se déplacent,
l’objectif est de comprendre qui est le manager commercial et ce qu’on attend de
lui.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Les nouvelles attentes portent sur quatre grands mouvements que l’on peut obser-
ver dans tous les secteurs d’activité :
– L’animation d’équipes reste le cœur du management commercial, la relation la
plus courante étant le lien hiérarchique, mais on observe le développement de moda-
lités de management « transversal », c’est-à-dire sans relation hiérarchique, ou avec
un lien faiblement structuré : c’est le cas du management en réseau ou par projet.
– De même, les entreprises prennent maintenant en compte la performance
commerciale globale de l’organisation, sans la limiter à la performance « des commer-
ciaux ». Le manager commercial doit alors piloter la performance commerciale de
personnes ou d’équipes dont le métier est tout autre : comptables, agents de produc-
5
DE NOUVELLES EXIGENCES

tion, logisticiens. Cet enjeu le plonge dans d’autres sphères professionnelles dont il
devra acquérir une certaine connaissance.
– L’évaluation de la performance commerciale est de plus en plus fine, voire
sophistiquée, et inclut des paramètres nombreux en lien avec un pilotage financier
des entreprises. Le management commercial est par excellence un management qui
associe performance économique et performance sociale.
– Face à ces nouvelles attentes, les exigences vis-à-vis du manager commercial
se déplacent et portent avant tout sur la rigueur et le professionnalisme. La valo-
risation actuelle de la fonction managériale peut laisser penser qu’il s’agit là d’une
évolution professionnelle « naturelle » pour les meilleurs commerciaux. C’est
oublier un peu vite que le management requiert des compétences et des qualités
spécifiques qui demandent à être acquises, développées, travaillées. Pourtant,
beaucoup d’entreprises investissent encore insuffisamment dans la préparation
aux métiers du management.
Nous allons donc centrer ce chapitre sur trois sujets :

Section 1 Q Les évolutions récentes du management commercial


Section 2 Q Le nouveau manager commercial
Section 3 Q Construire les nouvelles compétences du management
commercial

Section
1 LES ÉVO LUTIONS RÉCENTES DU MANAGEMENT
COMMERCIAL

Selon Freud, il y aurait trois métiers impossibles (Freud, 1925) : « éduquer, soi-
gner, gouverner ». Reconnaissons que « manager » relève un peu des trois, ce qui
laisse entrevoir l’immense difficulté de l’exercice.
Freud associe les trois métiers au fait que, pour chacun d’eux, « on peut d’emblée être
sûr d’un succès insuffisant », ou, du moins, aléatoire, au regard des objectifs. L’essence
de ces métiers, comme celle du management est qu’ils expriment « un pouvoir nu sur
les hommes, autrement dit un pouvoir sans médiation » (Enriquez, 1987).
C’est cette relation incertaine et passionnante, entre humains, qui est au cœur du
management, et du management commercial en particulier.

6
Les évolutions récentes

1 Qui est le manager commercial ?


1.1 Les métiers du management commercial : beaucoup de variété

Une étude menée par l’ICSV-Cnam1 en 2006 en partenariat avec l’association


nationale des Dirigeants Commerciaux de France (DCF) identifie six grandes
familles de commerciaux :
– le dirigeant commercial : il est associé à des postes de direction et participe à
la définition des orientations stratégiques de l’entreprise. C’est à son niveau que
s’opère une collaboration, voire une fusion, entre les différents services marke-
ting et vente. Ce directeur commercial, soit chapeaute les deux services, soit
travaille en très forte proximité mais sans lien hiérarchique avec le directeur
marketing. Peuvent être intégrés à cette catégorie les directeurs de magasins de
grande taille (hypermarchés, grandes surfaces spécialisées), qui, compte tenu du
poids financier du magasin dans l’enseigne, ont un rôle de définition stratégique
de la politique commerciale de l’établissement ;
– le manager commercial : ce manager est responsable d’une zone géographique
(directeur régional des ventes), d’un secteur (chef de rayon, chef de département),
ou encore en responsabilité indirecte d’animation (responsable de réseau). Ce res-
ponsable a en charge les produits qu’il vend ainsi que la formation des commer-
ciaux des distributeurs. Ces managers ont un rôle de conseil, d’accompagnement
et de contrôle de l’activité des commerciaux sur le terrain. Ils conservent souvent
la gestion des grands comptes de leur zone géographique ;
– le responsable commercial de centre de profit : il peut être responsable
d’agence, responsable d’un département de distribution, directeur de boutique.
Certains category managers2 peuvent être responsables de centre de profit.

On trouve également au sein de la sphère commerciale des métiers à forte valeur


ajoutée et sans responsabilité hiérarchique :
– le responsable de projets commerciaux : il intervient de façon ad hoc, pour
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

une mission particulière, soit à temps partiel (c’est souvent le moyen d’enrichir
le poste de travail d’un commercial à potentiel) soit à plein-temps, en mode
transversal à l’entreprise (par exemple pour l’implantation d’un progiciel de ges-
tion de la relation client) ;
– le spécialiste commercial : il est responsable grands comptes3, chef de produit,
responsable marketing opérationnel, responsable export ;
– l’expert commercial : il est caractérisé par ses compétences scientifiques ou tech-
niques. Il n’est pas issu d’une formation commerciale mais technique. On peut

1. L’ ICSV (Institut national des cadres supérieurs de la vente) forme au sein du Cnam (Conservatoire national
des arts et métiers) des cadres commerciaux exclusivement en formation continue.
2. Voir le descriptif du poste section 3.3., chapitre 2.
3. Idem.
7
DE NOUVELLES EXIGENCES

citer ici l’ingénieur avant-vente qui peut, de par ses connaissances techniques,
appuyer une vente et conseiller celui qui est chargé de la vente. L’ingénieur d’af-
faires qui a pour mission de construire un projet et de suivre son exécution peut
aussi être rattaché à cette catégorie.

Enfin, il y a aussi les commerciaux indépendants. Ce sont :


– les VRP (vendeurs représentants placiers), exclusifs (rémunérés sur salaire et
intéressement avec fiche de paie), ou multicarte (payés à la commission avec
fiche de paie) ;
– les agents commerciaux (payés à la commission sur facturation).
On estime à 52 000 le nombre de commerciaux indépendants en France. Environ
40 000 entreprises ont recours aux services de VRP multicartes ou d’agents com-
merciaux pour vendre leurs produits.

1.2 Beaucoup de variété dans les métiers, une faible parité


homme/femme
Le vocable « manager commercial » cache l’immense variété des managers
commerciaux. Si l’on rencontre en effet des managers commerciaux débutants et des
seniors, des managers de toutes origines ethniques, et avec des apparences physiques
diverses, au regard du critère de l’égalité homme/femme, la profession est largement
en retrait, et reste très masculine. En effet, si, depuis 2002, la proportion des femmes
dans les fonctions commerciales est stabilisée autour de 25 % (données DARES), une
étude de Top Management France (Chauliac, Rabaud, 2007) indique que seulement
7,6 % des managers de la fonction commerciale (directeurs commerciaux, directeurs
commerciaux et marketing et directeurs des ventes) sont des femmes (en comparai-
son, ce pourcentage est de 27 % chez les DRH et de 48 % pour les directions de la
communication). Cette relative absence des femmes en management commercial
s’explique par les exigences en termes d’engagement et de mobilité de ces fonctions,
perçues comme peu compatibles pour les femmes souhaitant construire et préserver
une vie familiale. Cet état de fait est regrettable car les femmes n’ont pas le même
rapport au pouvoir et au management (voir tableau 1.1), et la confrontation des
approches enrichirait certainement les pratiques et les visions.

2 Les grandes tendances de la fonction commerciale

Si l’environnement est changeant, les configurations organisationnelles évoluent


également. Ce double mouvement a des impacts directs sur la fonction commerciale.
Pour livrer un décryptage rapide de ces évolutions, et avoir quelques pistes d’ana-
lyse prospective, on peut distinguer (Boyer, Scouarnec, 2006) :
8
Les évolutions récentes
Tableau 1.1 — Comparaison entre management féminin
et management masculin

Le principe féminin en management Le principe masculin en management

Horizontal Vertical

Les réseaux La hiérarchie


Le communautaire La centralisation
L’entraide La compétition
L’empathie, le merci La conquête

Tourné vers le sujet Tourné vers l’objet


Les valeurs de l’en-soi Les valeurs de l’hors-soi

Le principe féminin est Le principe masculin fait

D’après Languirand, 1991.

– la logique d’affaires qui fait référence aux nouvelles façons de concevoir


une activité, dans le cadre des grandes mutations de son environnement
interne et externe ;
– la logique professionnelle qui se définit comme « de nouvelles combinaisons
de connaissances, de compétences et de caractéristiques de champs profession-
nels autrefois considérés comme distincts » (Pichault et al., 2002).

2.1 Les évolutions de la logique d’affaires

Elle connaît plusieurs grandes forces structurantes qui dessinent le nouveau péri-
mètre de la fonction commerciale :
– l’impact des technologies de l’information et de la communication (TIC)
dans la fonction vente : elles ont déjà beaucoup modifié la relation au client, la
nature de l’acte de vente et les métiers mêmes de commerciaux. Cette tendance
va certes continuer, mais on observe le souhait de « réhumaniser » des univers
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

profondément dématérialisés ;
– le contexte de la globalisation des échanges. Cette tendance est considérée
comme une nouvelle donne mais n’est pas une fin en soi : si les managers
commerciaux doivent s’inscrire d’emblée dans un contexte international, les
stratégies vont se jouer à l’avenir entre localisation et mondialisation ;
– les nouveaux comportements de consommation, qui se traduisent par des attentes
souvent contradictoires, placées sous la bannière du « tout et son contraire », boule-
versent les segmentations traditionnelles, et par là même les métiers et les organi-
grammes commerciaux. Ces évolutions sont également marquées par la judiciari-
sation de la relation commerciale, qui implique, pour le manager commercial, une
compétence d’évaluation des risques et de gestion de crise, le cas échéant ;

9
DE NOUVELLES EXIGENCES

– le rapport au temps : la fonction commerciale est directement impactée par


l’urgence qui dicte l’activité de notre société, la réactivité, et (mieux !) la proac-
tivité commerciale sont exigées. Il faut connaître les clients en temps réel et être
capable de leur répondre instantanément, soumettant les équipes commerciales
à des rythmes toujours plus contraignants ;
– l’intensification de la concurrence va obliger les managers commerciaux à
sortir de la logique du prix pour penser en termes de valeur pour le client. Cette
évolution est tout à fait compatible avec la récession économique, car cette
valeur doit s’inscrire dans des scénarios tarifaires, pas forcément dans la montée
en gamme.

2.2 Les évolutions de la logique professionnelle

ORGANISATION

Externalisation
Impact des TIC Scénario du « tout dehors »
Scénario de l’humanisation Scénario de l’externalisation stratégique
de la dématérialisation Scénario des mercenaires du marketing
Globalisation des échanges et de la vente
Scénario de l’internalisation accrue Mutations organisationnelles
Scénario de l’adaptation locale Scénario de l’orientation clients
Guerre concurrentielle Fonction vente/marketing
Scénario de l’élargissement Scénario de la relation client effective
de la valeur Scénario de la taylorisation de la relation
Scénario de la revalorisation culturelle client

EXTERNE EXTERNE

Métiers
Evolutions juridiques Scénario de la proxémique clients
Scénario du « tout juridique » Scénario de la veille
Facteur temps Compétences
Scénario du « toujours plus vite » Scénario de l’optimum relationnel
Scénario du « temps retrouvé » Scénario de l’appareillage
Evolutions sociologiques technique
Scénario de la différenciation personnelle Formations
Scénario de l’attachement communautaire Scénario de la formation intégrée

INDIVIDU

Logique
Logique d’affaires
professionnelle
D’après Boyer, Scouarnec, 2006.

Figure 1.1 — Matrice du devenir des métiers vente et marketing


10
Les évolutions récentes

Elles sont également importantes et annonciatrices des nouveaux « systèmes de


vente » :
– le rapprochement de la fonction vente avec la fonction marketing. C’est vers
une intégration des services marketing et vente que semblent se diriger bon
nombre de structures, rejoignant ainsi le modèle anglo-saxon d’un département
Marketing and Sales, même si on observe une tendance forte dans certains sec-
teurs à une « néotaylorisation » de la vente, qui conduit à définir autant de fonc-
tions que d’étapes de la relation client : du préachat au postachat (cas de la
téléphonie où le client a un interlocuteur différent pour chaque question : abon-
nement, réabonnement, changement de téléphone, panne…) ;
– la question de l’externalisation. Nombre de départements commerciaux ont
appris à travailler avec des forces de vente externalisées, pour gagner en réacti-
vité et alléger les coûts fixes. Cette évolution risque de s’intensifier, elle demande
au manager de bien maîtriser sa chaîne de la valeur commerciale ;
– les grandes mutations organisationnelles amènent toutes les entreprises à
s’organiser autour du principe de l’orientation client, ce qui implique des
modalités de collaboration en transversal à l’organisation et un principe d’ac-
tions conduites en équipes projet (voir figure 1.1).

2.3 Les évolutions des pratiques du management commercial

■■ Les priorités des dirigeants commerciaux actuels

Les grandes priorités dessinées actuellement par les dirigeants commerciaux


(enquête Cegos 2007 réalisée sur un échantillon national de 274 entreprises) sont en
phase avec ces vastes mouvements (voir figure 1.2).
Les priorités majeures portent sur l’amélioration de la marge et la montée en
compétences des commerciaux, confortant ainsi l’hypothèse que la performance
économique est intrinsèquement liée à la performance sociale.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

En toute logique, pour contribuer à ces objectifs, la stratégie commerciale se foca-


lise sur la différenciation concurrentielle par la relation client (surtout pour les entre-
prises de services) ainsi que sur les ventes à valeur ajoutée.
Pour cela, des moyens sont clairement identifiés : la modification de l’organisation
commerciale, la mise en place ou l’optimisation d’un outil CRM1 et des outils de
reporting et de planification (voir figure 1.3).

1. CRM : Customer Relationship Management ou gestion de la relation client.


11
DE NOUVELLES EXIGENCES

STRATÉGIE COMMERCIALE

Amélioration de la marge commerciale 60 %

Croissance forte du CA et gains de parts de marché 52 %

Différenciation concurrentielle par la relation client 40%

Focalisation sur des ventes à valeur ajoutée 34 %

ORGANISATION ET MOYENS

Modification de l'organisation commerciale 36 %

Développement de l'utilisation d'un outil CRM 26 %

MANAGEMENT DES FORCES DE VENTE

Montée en puissance des commerciaux 61%

Motivation et fidélisation des ressources clefs 38 %

DÉVELOPPEMENT DES COMPÉTENCES

Compréhension du marché et des besoins des clients 49 %

Connaissance des produits et des services 41 %

Management et motivation des équipes 35 %

0% 10 % 20 % 30 % 40 % 50 % 60 % 70 %
Source : Premier Baromètre CEGOS des dirigeants commerciaux 2007.

Figure 1.2 — Les 11 priorités 2007 des directeurs commerciaux

Enfin, selon la même enquête, la montée en compétences des commerciaux s’ac-


compagne, pour les managers commerciaux, du développement des moyens de
motivation et de fidélisation des ressources clefs, d’un meilleur pilotage des indica-
teurs de performance, et de nouvelles répartitions des tâches. Si les priorités sont
mises en perspective, les dirigeants commerciaux doivent privilégier trois axes :
– l’inscription de leur activité dans une stratégie internationale ;
– la volonté de conduire des changements ;
– la mise en place d’accompagnement et de coaching pour eux-mêmes.

12
Le nouveau manager commercial

Modification de la politique de distribution 5%

Modification de la politique de marque 7%

Modification de la politique commerciale 11%

Diversification des canaux de distribution 11%

Élaboration d’une stratégie à un niveau international 16%

Politique de défense des prix 29%

Focalisation sur des ventes à valeur ajoutée 34%

Différenciation concurrentielle par la relation client 40%

Croissance forte du CA et gain de parts de marché 52%

Amélioration de la marge commerciale 60%

0% 10 % 20 % 30 % 40 % 50 % 60 % 70 %

Source : Premier Baromètre CEGOS des dirigeants commerciaux 2007.

Figure 1.3 — Les priorités 2007 sur la stratégie commerciale

Section
2 LE NOUVEAU MANAGER COMMERCIAL

Les exigences et les attentes vis-à-vis du manager commercial sont de plus en plus
complexes et nombreuses. Le nouveau manager commercial doit savoir être à la fois
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

un leader et un gestionnaire.

1 Les grands types de management


1.1 Le leader et le gestionnaire

– Les leaders sont perçus comme des visionnaires provoquant ruptures et change-
ments (Zaleznik, 1977). « Un leader est quelqu’un qui obtient des autres qu’ils
fassent ce qu’il souhaite, spontanément. […] Il y a quelque chose dans son
comportement, quelque chose qui amène les autres à lui obéir de leur plein gré »
(Koning, Sandler, 2009). Dotés d’une forte personnalité, ils sont charismatiques,
13
DE NOUVELLES EXIGENCES

solitaires, empathiques, émotifs, intuitifs et téméraires. Ils génèrent en perma-


nence des idées nouvelles et attisent l’amour ou la haine de leurs collaborateurs.
Les leaders ne se rencontrent pas uniquement dans l’entreprise mais également
dans le monde du sport (le leader d’une équipe de football), dans la musique (lea-
der d’un groupe), en religion (prêtre, rabbin, imam), dans le monde politique…
– Les gestionnaires sont, au contraire, des hommes de compromis, rationnels,
méthodiques et organisés, prudents et partisans du travail en équipe. Ils
conservent et régulent l’ordre existant, en maintenant une coopération par la
conciliation d’intérêts parfois contradictoires. Ils utilisent les instruments de
gestion pour influencer leurs collaborateurs, maintenir un contrôle et équili-
brer leurs pouvoirs.

Dans la fonction commerciale où l’engagement individuel, la motivation, la


reconnaissance, jouent un rôle important dans la performance et dans la satisfaction
au travail, la figure du leader charismatique est nettement privilégiée. Il faut cepen-
dant éviter la caricature du « chef de bande », qui entraînera ses troupes, avec le
risque d’un déficit managérial, pénalisant pour tous sur le long terme.
On observe que les organisations actuelles, rationnelles et n’aimant ni le risque ni
le désordre, inhibent le développement des leaders – qui ont besoin pour s’épanouir
d’un cadre tolérant l’agressivité, l’élitisme et l’audace – pour privilégier des mana-
gers moins enclins à l’innovation.

1.2 Les grands types de management

On repère trois grands types de management (à partir des travaux pionniers de


Likert, 1967) : le management autoritaire (exploiteur ou paternaliste), le manage-
ment consultatif, et le management participatif
– Le management autoritaire se caractérise par l’absence de concertation, de
marges de manœuvre pour les collaborateurs, par des prises de décision impo-
sées. Il peut trouver plusieurs formes d’appui : le statut hiérarchique, la person-
nalité, la règle, le pouvoir personnel.
Ce type de management continue à exister mais les résistances se font de plus
en plus nombreuses, l’obéissance est remise en cause car assimilée à de la sou-
mission (Marcelli, 2009). L’autorité est maintenant respectée seulement quand
elle s’adosse à la légitimité.
Or, la légitimité n’est plus donnée, mais construite sur la preuve et l’explication.
Cette évolution majeure dépasse largement le cadre de l’entreprise et trouve sa
première expression dans l’éducation : ainsi, la légitimité des enseignants ne se
fonde plus sur des rapports de force. Les « parce que c’est comme ça », « parce
que je l’ai dit » ou encore « ça ne se fait pas » ne sont plus entendus.

14
Le nouveau manager commercial

Les managers commerciaux doivent bien sûr s’inscrire dans cette nouvelle
configuration où le pouvoir et l’autorité sont constamment discutés.
– Le management consultatif est fondé sur la devise « diviser pour régner ». Il
mobilise la pseudo-participation qui consiste à réunir régulièrement les collabo-
rateurs pour les informer et, le cas échéant, les consulter, mais sans jamais réel-
lement entrer dans une confrontation de points de vue. Malgré toutes les mises
en garde émises à son encontre, le management consultatif continue à régner en
maître dans les entreprises (Eisenhardt, 1997). Par ce mode de management, le
dirigeant qui fuit le conflit avec ses collaborateurs interdit, de fait, l’expression
d’opinions différentes tout en feignant de faire participer son équipe. Les mana-
gers se voient imposer la vision, quand il y en a une, et la stratégie, quand elle
est communiquée, sans jamais pouvoir donner leur point de vue. Même
lorsqu’ils sentent qu’une grave erreur est en train d’être commise, ils doivent
appliquer les directives. Ils sont forcés de s’aligner alors qu’ils souhaiteraient
un ajustement mutuel. Ils ne partagent jamais en profondeur leurs expériences
avec leurs pairs et éprouvent une grande solitude. À la domination des manage-
ments autoritaires exploiteurs et paternalistes, les dirigeants préfèrent souvent
le compromis de façade qu’autorise le management consultatif. Ils exploitent
alors quatre types de leviers : l’inhibition par le leader, la camaraderie menant
à l’autocensure, le rejet du conflit jugé trop désagréable, la peur de débats sans
fin.
– Le management participatif repose sur le travail en équipe, coordonné par un
manager, et s’articule autour de règles du jeu communes. Au sein de chaque
équipe, le développement individuel et collectif des collaborateurs est de la res-
ponsabilité du manager. L’orientation s’organise autour d’objectifs globaux et
personnels, ambitieux et fixés collectivement. Les membres du groupe coopè-
rent étroitement. La prise de décision et le contrôle s’effectuent conjointement.
Enfin, chaque manager occupe une position charnière entre deux niveaux hié-
rarchiques successifs, facilitant ainsi l’articulation verticale des activités et la
coordination globale au sein de l’entreprise. C’est de loin le style de manage-
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

ment le plus performant.


La valeur du projet porté par le manager commercial1 dépend de cette capacité à
faire avancer les hommes et à produire le changement, attendu et nécessaire pour
mener à bien les missions assignées dans l’intention d’une performance optimisée.
Il faut certainement au manager commercial une capacité à « faire rêver » et à don-
ner du sens aux actions demandées. Des injonctions comme « être le numéro 1 sur

1. Par la suite, nous adopterons l’expression « manager commercial » qui convoque des caractéristiques et des
compétences empruntées à la fois au leader et au gestionnaire, compte tenu des spécificités de management des
forces de vente. Le manager commercial sera celui qui pilote une équipe de commerciaux, quels que soient l’intitulé
de son poste et sa place dans la hiérarchie, du directeur commercial au chef des ventes. Nous nous placerons aussi
dans la perspective d’un management participatif.
15
DE NOUVELLES EXIGENCES

son marché » ou « progresser de 20 % », très souvent entendues dans les entreprises,


ont-elles ce pouvoir évocateur ?

2 Les nouvelles figures du manager commercial


2.1 Les tendances récentes en matière de management

Il n’y a pas de « clef magique » du management, cela semble une évidence. Le


nombre même de publications, de propositions de formations, de dispositifs d’ac-
compagnement cherchant à identifier le ressort de la performance managériale mon-
tre bien qu’en matière de management, la complexité règne, comme dans tout ce
qui touche à l’humain.
Cette complexité oblige à être très réservé vis-à-vis des best practices qui sont une
tentation pour les managers, mais souvent aussi source de grandes déceptions, tant
leur valeur est limitée à un moment et à une entreprise donnée. Cette complexité
amène d’ailleurs à parler du management comme un « art », et non comme une
science avec ses capacités prédictives.
Il existe néanmoins des fondamentaux de cet art du management (Drucker, 1954 ;
Fiol, 1998). Ainsi, le rôle du manager peut se définir selon deux grands objectifs :
– être générateur de performance individuelle, selon le triptyque « ressources/
objectifs/résultats », s’inscrivant ainsi dans une logique de but. La relation res-
sources/résultats décrit son efficience, la relation objectifs/ressources sa perti-
nence et la relation ressources/résultats l’efficacité des choix effectués. Cette
perspective suscite et explique la plupart des comportements adoptés par le
manager : se focaliser sur l’action, chercher des solutions, être réactif aux évé-
nements imprévus, mettre en place des actions correctives… ;
– être créateur de situations qui font sens, car si le manager est plutôt perçu
comme un générateur de performance par les échelons hiérarchiques plus éle-
vés, ses subordonnés attendent de lui de créer des situations qui font sens pour
eux. Les traditionnels facteurs de mobilisation que sont la stratégie (direction
reconnue et acceptée par tous), la structure (mode de fonctionnement collectif
organisé) et la culture (ensemble de motivations et de valeurs partagées) ne
constituent que des ersatz de sens. Des études suggèrent (Fiol, Fronda, 2000) de
mobiliser d’autres facteurs : le besoin de comprendre dans quelles perspectives
s’inscrivent les actions menées par chacun, la nécessité de rêver, de se projeter
(espérance d’un futur radieux…), l’esthétique (harmonie du lieu de travail,
recherche de perfection dans le travail…), le plaisir et la passion (trouver de la
joie dans ce que l’on fait)…

16
Le nouveau manager commercial

2.2 Les nouvelles figures du manager commercial

La fonction commerciale est une fonction frontière de l’organisation : frontière


entre l’environnement interne, c’est-à-dire les ressources humaines, les moyens de
production et toutes les ressources fonctionnelles, et l’environnement externe, à
savoir le marché et les clients.
Les principales fonctions du manager commercial s’articulent autour de cette
position très spécifique et les attentes à son égard montent en exigence. Il lui faut
tout à la fois être un expert, un coach, un leader, un stratège, un catalyseur d’éner-
gies, tout en suscitant l’adhésion. On peut mesurer les difficultés de l’exercice, sur-
tout dans des situations où le manager commercial est un manager intermédiaire
(middle manager) et doit de plus encadrer des personnes qui ne dépendent pas direc-
tement de lui.

 Repères Les attentes vis-à-vis du manager commercial

Un fin stratège à l’aise en prospective, contributeur de la stratégie : ce manager très complet


doit savoir définir une politique commerciale, fixer des objectifs de profitabilité susceptibles
de séduire les actionnaires tout en assurant la pérennisation des acquis et le développement
de la croissance de la firme.
Un manager solide, accompagnateur de changement : le management des forces
commerciales réclame des compétences en mobilisation des équipes, en motivation, en
pouvoir d’entraînement : un directeur commercial type dirige une force de vente terrain,
des cadres du trade marketing, plusieurs directeurs régionaux, un patron des comptes
clefs, une équipe de finance commerciale et de comptabilité analytique, une équipe d’in-
formatique commerciale.
Un communicant très relationnel : un directeur commercial est à la fois empathique et
dynamique, il est capable de faire rêver. Son développement personnel l’aide à appréhen-
der le monde et son environnement. Il sait imposer sa vision.
D’après Action Commerciale, Guide 2006.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

2.3 Savoir manager sa hiérarchie

Beaucoup de dirigeants commerciaux sont des managers intermédiaires, ce qui


implique une compétence au management « classique » c’est-à-dire des subordon-
nés au sens hiérarchique, mais aussi une capacité à manager en bottom up1 (son
N + 1) et en latéral, mobilisant des savoir-faire et des savoir-être peu reconnus et
peu enseignés.

1. Bottom up : de façon ascendante, vers le haut .


17
DE NOUVELLES EXIGENCES

On retrouve le « paradoxe du management » : tout manager doit conduire un pro-


cessus dont le but est double : « éliminer ou absorber progressivement l’incertitude
en allant du haut de la hiérarchie vers le bas et promouvoir la flexibilité dans le sens
inverse » (Fiol, Gerard, Mangin, 2007). Si l’on intègre ce point de vue, le manage-
ment ne se limite plus à un mouvement « descendant » mais à un processus « inter-
actif » entre niveaux hiérarchiques et leur environnement. Une bonne relation de
cette dyade manager-supérieur hiérarchique est essentielle au bon fonctionnement
de l’entreprise.
Cette question est d’autant plus importante qu’elle souffre d’un traitement insuf-
fisant dans les organisations et entraîne beaucoup de désarroi chez les middle mana-
gers, qui l’expriment comme étant « coincés » entre « le marteau et l’enclume ».
Le « savoir manager sa hiérarchie » devient alors une compétence à ajouter au
capital de compétences du middle manager. Connaître la façon de décider de son
manager, ses valeurs, ses dysfonctionnements, ses objectifs personnels… est bien
souvent le Némésis pour le piloter de façon efficace, et éviter d’être dans une trop
grande dépendance.

■■ Le cas du management latéral

Un autre défi très courant à relever est celui du management latéral : c’est-à-dire
la capacité à piloter des personnes qui ne dépendent pas directement de vous mais
qui sont dans votre sphère de responsabilité et dont vos résultats dépendent indirec-
tement. Dans le cas du management commercial, il s’agit de gérer des personnes
« indirectement commerciales », comme la personne de la comptabilité client (qua-
lité de la facturation, rigueur des relances des impayés…), le responsable du SAV
(fiabilité de la prise en charge, qualité de l’accueil…), l’incontournable standardiste
(courtoisie de la relation, diplomatie dans la prise en charge, efficacité de la redirec-
tion, qualité du message…).
Cette cohésion latérale, pourtant indispensable à la performance commerciale glo-
bale de l’organisation, est peu mobilisée. On peut retenir plusieurs explications
(Fiol, Mangin, 2008) : la tendance à l’individualisme, la focalisation sur la relation
avec le supérieur hiérarchique, le rejet de la réunionite ou de tout dispositif de coor-
dination, l’idée que le pouvoir ne se partage pas, la faillite aussi de beaucoup de
dispositifs de type matriciel, trop compliqués à gérer.
De plus, la cohésion latérale est un défi souvent soumis à de fortes déstabilisations
de la part des managers directs. Citons pour mémoire : l’omniprésence qui empêche
l’émergence de tout règlement de conflit hors la présence du hiérarchique, la divi-
sion entretenue qui affaiblit les réflexes d’entraide, l’absence de projets collectifs ou
de responsabilités conjointes, toutes pratiques qui peuvent être compensées par des
évaluations à partir de critères de performance collective ou des dispositifs d’anima-
tion et de cohésion en dehors du lieu de travail.
18
Construire les nouvelles compétences

 Repères Témoignage

La performance commerciale : un projet global d’entreprise


« Le 21 novembre dernier, je suis arrivé au bureau à 8 h 20 et là j’apprenais que l’usine
Brioche Pasquier Paris était détruite par un incendie, qui plus est un incendie criminel (nous
l’avons appris quelques jours plus tard). Situation exceptionnelle : nous venions de perdre
23 % de nos capacités de production, en une heure et demie d’incendie. Le 21 novembre,
nous étions à la veille du plus gros mois de CA de l’entreprise. Nous étions en pleine période
de négociation avec la grande distribution, nous avions des accords à signer avant le 31 jan-
vier de l’année suivante.
Pour montrer que l’acte commercial se situe dans une globalité, je vais décrire d’une
manière très synthétique notre manière de réagir, puis vous communiquer les résultats
aujourd’hui.
À 9 heures, les directeurs commerciaux des sites étaient tous convoqués par téléphone
pour prendre les décisions suivantes :
– plan de communication avec nos clients, relayé par nos commerciaux terrain ;
– engagement sur les volumes à livrer pour les 3 jours suivants.
Le lendemain matin, le service Méthodes et Projets du groupe et les services Méthodes et
Projets de l’ensemble des sites redessinaient un plan qui permettait de remettre en fonc-
tionnement le quai, heureusement épargné par cet incendie, de façon à ce que les autres
usines du groupe approvisionnent le site de Paris.
Trois jours plus tard, les services du personnel démarraient des négociations avec l’ensem-
ble des salariés de tous les sites pour savoir comment nous allions aborder la négociation
salariale de 2002. Je vous rappelle que nous étions mi-novembre, donc en pleine négocia-
tion salariale pour 2002. Nous avons négocié un projet pour 2002 qui nous permettait de
travailler le samedi et le dimanche pour approvisionner notre site de Paris. Huit jours après,
nous relancions les commandes, le service informatique avait réparé les dégâts provoqués
dans tout ce qui avait été brûlé (les bureaux ont été détruits à 75 % !). Je peux vous dire que
pour un incendie comme celui-ci, survenu le jeudi 21 novembre à 7 heures du matin, le
samedi, le taux de service de tous nos clients de la région parisienne était de 97 % et le
samedi d’après il était de 99.4 %. Le service commercial, la logistique, méthodes et projets,
l’informatique, le service social de tous les sites de production du groupe, avaient contribué
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

à faire de la vente. »
D’après le témoignage de Louis-Marie Pasquier, directeur général des Brioches Pasquier,
IIe Assises de la vente, Lyon, mai 2001.

Section
3 CONSTRUIRE LES NOUVELLES COMPÉTENCES
DU MANAGEMENT COMMERCIAL

Le métier de manager est certainement celui qui exerce la plus grande fascination
sur les étudiants en gestion, quel que soit leur niveau de formation. À tel point que
nombre d’écoles de commerce se sont rebaptisées écoles de management. Mais sait-on
19
DE NOUVELLES EXIGENCES

bien définir le portefeuille de compétences d’un manager ? Quelle est la part de la for-
mation dans son devenir ? Est-ce qu’il suffit de le vouloir pour devenir un manager
reconnu et performant ?
Telles sont trois questions un peu iconoclastes mais qui doivent être posées pour
fournir quelques éléments de réponse aux aspirants managers comme aux mana-
gers confirmés.

1 Les nouvelles compétences attendues

Nous retenons deux phénomènes : l’émergence des soft skills et la « logique


de l’extenseur ».

1.1 Les soft skills :

Le premier enjeu est celui d’identifier les soft skills, par opposition aux compétences
« cœur de métier ». Tout recruteur travaille sur une grille codifiée et visible, pourtant,
pour nombre de recrutements, dont ceux touchant au management, les parties pre-
nantes sont amenées à communiquer sur des compétences « cachées », « invisibles »,
ou plus simplement « non codifiées » : ce sont les « compétences douces ».

Tableau 1.2 — Le portefeuille de compétences du manager commercial

Le portefeuille de compétences Leurs caractéristiques


du manager commercial

Des compétences cœur de métier


Savoir : – elles relèvent de savoirs et de savoir-faire
– créer et animer une force de vente – elles s’acquièrent par la formation, certifiante,
– définir une stratégie commerciale diplômante
– fixer des objectifs – elles se construisent avec l’expérience
– contrôler les résultats professionnelle
– motiver son équipe – elles s’appuient sur des preuves : CV, dossiers,
– gérer la performance succès professionnels
Savoir-faire :
– avoir une vision de sa mission et la faire partager
– évaluer son marché et adapter sa force de vente
– accompagner les commerciaux en interne
sur le terrain
– fixer des objectifs réalistes et réalisables
– créer et utiliser des tableaux de bord et outils
de suivi
– gérer les entretiens d’évaluation
– Donner à ses commerciaux l’envie et les moyens
d’être plus performants


20
Construire les nouvelles compétences

☞ Des soft skills


Être capable de : – elles s’acquièrent avec de la formation basée sur la
– travailler en groupe pluridisciplinaire simulation et de la réflexivité
– acquérir et gérer de l’information – elles se repèrent en entretien
– gérer son organisation personnelle – elles doivent être objectives et illustrées par des
– gérer et faire évoluer les hommes situations et des cas concrets
– appréhender l’entreprise dans sa globalité – elles nécessitent une prise de conscience du
– évoluer continuellement manager pour être améliorées et valorisées
– maximiser la performance
– être crédible dans son leadership
– être le lien entre le marché, la force de vente et
l’organisation de l’entreprise
– être un manager communicant

Source : Barth, 2001.

1.2 Savoir intégrer les contradictions en management

Les compétences attendues du manager commercial sont donc à la fois très nom-
breuses, de nature très différente et souvent contradictoires.
Il lui faut à la fois « anticiper » et « produire des résultats immédiats », il doit
savoir « gérer la stratégie de vente » et « manager la force de vente », manier les
outils de pilotage commercial « avec souplesse », être en ligne avec la stratégie de
l’entreprise tout en sachant faire preuve d’autonomie… Comme l’expliquait Simons
(dès 1995), le manager est installé dans des logiques de « et » avec l’obligation de
gérer des exigences contradictoires. On revient à la définition de Barnard (1958) qui
indiquait que la fonction des dirigeants est de « faciliter la synthèse dans l’action
concrète des forces contradictoires, de réconcilier des forces, des instincts, des
conditions, des positions et des idéaux conflictuels ».
Admettons que dans l’exercice de l’activité professionnelle, c’est plutôt le « ou »
qui prévaut : les tâches opérationnelles et quotidiennes prennent le pas sur les tâches
de création de potentiel, l’administratif se fait aux dépens de la présence chez le
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

client et la bonne entente personnelle se substitue à la relation professionnelle.


La « logique de l’extenseur » est proposée en lieu et place de la « logique clas-
sique du curseur » (Fiol, 2003). Le principe est simple, au lieu de toujours opposer
deux attitudes : « être concret » à « être abstrait », « la logique de transaction »
s’exerce au détriment de celle de « relation »… on part du principe que les deux
pôles se renforcent mutuellement, ce qui pourrait se traduire par : « plus je suis
concret, plus je suis capable d’abstraction » ou « plus je construis de la relation, plus
je suis performant en transaction ».
Cette image nous aide à sortir de logiques apparemment contradictoires et à renfor-
cer les capacités d’innovation et de développement attendues pour le management.

21
DE NOUVELLES EXIGENCES

 Repères Les grandes tensions capitales


du manager lors d’une prise de poste
– Transformer tout en consolidant l’existant pour une conduite du changement pérenne ;
– Développer des liens tout en maintenant une distance ;
– Chercher de l’aide, savoir identifier des appuis et des ressources tout en apportant de la
valeur nette ;
– Imposer des points de vue, des directions, des procédures, des objectifs tout en jouant un
rôle de facilitation ;
– Prendre son temps tout en fonçant, c’est-à-dire trouver le rythme du changement à pro-
mouvoir ;
– Faire le ménage tout en développant, ce qui amène à se confronter à ses valeurs mana-
gériales et personnelles.
D’après Amado, Elsner, 2004.

1.3 La question de la délégation

Admettons que le manager, même le plus compétent, ne peut déployer et déléguer


que dans les limites de ce qu’on lui confiera. Et c’est bien là que réside la frustration
de bon nombre de middle managers qui vont exercer ailleurs leurs compétences
quand ils ne trouvent pas dans une entreprise les moyens d’exprimer leurs talents.
Il y a deux façons de déléguer :
– la délégation « par expulsion », qui consiste à donner à ses collaborateurs ce
qu’on ne veut ou ne peut faire, c’est une façon de se débarrasser de tâches ingra-
tes, à risques, ou à faire dans des délais impossibles ;
– la délégation « par concertation », qui amène le manager à confier peu à peu à
ses équipes des tâches ou des missions dont il assure le pilotage final.

Cette notion de pilotage est centrale au métier du management commercial, elle


intègre l’idée de synchronisation et de coordination dans les équipes. Elle intègre
aussi une dimension connue en performance sportive et dans le monde musical mais
oubliée en management : le « lâcher prise ».
La dimension du « lâcher prise » est celle qui finalement semble l’ultime illus-
tration du savoir-faire du manager, les compétences s’exercent alors dans le
silence managérial.

22
Construire les nouvelles compétences

 Repères Témoignage

Le lâcher prise en direction d’orchestre


« Pour illustrer le travail d’un chef d’orchestre, je peux dire qu’un orchestre, c’est un fauve
qu’il faut dompter. Il y a besoin d’être très rigoureux, d’avoir une gestique très claire, et une
autorité importante. Il y a des moments très agréables quand on est chef d’orchestre, c’est
le moment où on s’arrête de diriger, là, d’un seul coup vous lâchez l’orchestre, les musiciens
jouent sans vous, à ce moment-là, ils le sentent, le moment où vous reprenez l’orchestre,
où vous reprenez le geste, vous avez un impact beaucoup plus important sur eux, le
moment où vous les lâchez, vous avez l’impression qu’ils soufflent un peu parce que des
fois on est un peu trop sur eux. Il s’agit de trouver l’équilibre entre tout ça. »
D’après Jean-Marie Blanchon, chef d’orchestre et chef de chœur,
IIe Assises de la vente, Lyon, mai 2001.

2 L’intelligence émotionnelle

Le portrait du leader efficace et idéal n’est plus celui d’un manager autoritaire de
façon innée ou légitime a priori (issue de conceptions très militaires du commande-
ment), mais, de plus en plus, celui d’un individu capable d’encourager et de motiver
ses « troupes », montrant des compétences sociales, de l’enthousiasme, la capacité
à développer un climat de confiance.
Ces compétences puisent dans l’intelligence émotionnelle, popularisée par
Goleman (1995). Elles sont la capacité à percevoir, ressentir, comprendre et gérer
ses émotions et celles des autres dans une perspective de renforcement de l’efficacité
des processus cognitifs (utiliser ses émotions pour faciliter la prise de décision ou
savoir créer un climat émotionnel positif pour favoriser l’apprentissage, ou encore
connaître ses propres émotions pour évaluer leur impact sur son propre jugement).
L’intelligence émotionnelle fait partie du portefeuille de compétences du manager
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

efficace, tout particulièrement dans les métiers commerciaux où elle mobilise les
qualités d’interprétation du réel, d’impulsion, de dynamisation, et d’interaction. La
question se pose de savoir si cette intelligence émotionnelle peut être développée au
même titre que les compétences cognitives. Le développement exponentiel depuis
les années 1990 des séminaires de formation sur ces thèmes laisse penser que la
grande majorité des dirigeants d’entreprise ont une attente sur ces sujets. Le système
d’enseignement supérieur reste en retrait malgré des propositions de plus en plus
nombreuses que l’on peut observer.

23
DE NOUVELLES EXIGENCES

 Repères Objectifs de compétences cibles du cours


de gestion de stress et connaissance de soi
Savoirs
Affirmation de soi
– Analyse transactionnelle
– Préférences cérébrales
Savoir-faire et savoir-être
Team Building
Savoir dans un groupe :
– développer l’écoute et les questions efficaces dans une prise de décision
– développer le lâcher-prise
– développer la persévérance et apprendre à convaincre une équipe
– comprendre les différentes intelligences au lieu de les juger
– se focaliser sur les points forts des autres, plutôt que sur leurs points faibles (exemple :
la créativité pour imaginer des solutions et la logique pour les organiser)
– comprendre son propre fonctionnement, être conscient de ses forces, travailler ses fai-
blesses
Management de la hiérarchie
Savoir émettre et recevoir :
– critiques (formuler son mécontentement ou son désaccord)
– compliments (motiver et donner envie de travailler, encourager et conseiller)
– refus (accueillir les demandes : augmentation de salaire, changements… et dire non
quand nécessaire)
– demandes (demander un travail professionnel et dans les temps)
Savoir débuter et arrêter une conversation, gérer les discussions au bureau
Savoir gérer les conflits
Gestion du stress
Savoir :
– comprendre les signes de son corps, puis connaître les gestes pour gérer son stress
– analyser le discours intérieur, puis le transformer
– mieux appréhender les quatre émotions principales, et savoir les exprimer
– construire un plan d’entraînement
Source : Master 2 professionnel Vente et Management commercial, IAE de Lyon (Barth, 2001).

La confiance en soi, l’estime de soi, l’assertivité, sont autant de points d’appui


pour faire grandir les soft skills du futur manager. Elles exigent de parier sur la
dynamique de groupe, la communication, le partage d’expériences, la simulation,
plus que sur la transmission de connaissances. La capacité à connaître et à mobili-
24
Construire les nouvelles compétences

ser son intelligence émotionnelle apparaît également comme une condition sine
qua non de l’efficacité du leader. Ainsi l’intelligence émotionnelle permet les
apports suivants : « la créativité accrue grâce à un état affectif positif », « la capa-
cité à encourager l’ouverture au changement de suiveurs », « la mobilisation des
émotions pour repérer les normes et les valeurs », « la création d’un climat émo-
tionnel positif favorable à l’apprentissage » (George, 2000). Il s’agit bien sûr de ne
pas passer du « tout cognitif » au « tout émotif », mais de savoir prendre en compte
et intégrer les deux pôles.

3 Comment devient-on manager commercial ?


3.1 Les formations

La formation peut prendre plusieurs visages :


– la formation intégrée, qui est prodiguée dans le cadre du poste de travail, soit
par le supérieur hiérarchique, soit par un expert dédié. Les métiers commerciaux
pratiquent beaucoup ce type de formation sur les aspects techniques du métier :
ainsi, le chef des ventes va avoir pour mission d’accompagner en clientèle ses équi-
pes pour les faire progresser dans leur maîtrise du processus de négociation ;
– la formation intra ou interentreprises, qui correspond en général à des dispo-
sitifs « courts » sur des attentes ciblées : c’est ainsi que le secteur bancaire propose
de très nombreuses formations de mise à niveau des produits financiers. Ces forma-
tions peuvent être « certifiantes » si elles sont prodiguées par des organismes accré-
dités comme les « branches professionnelles ». Elles peuvent être sous-traitées à des
cabinets de formation, plus ou moins importants et connus, ou proposées par des
chambres de commerce et d’industrie.
– la formation diplômante a plusieurs entrées :
• une entrée par niveau
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Dès le niveau bac + 2, des cursus forment à des postes d’encadrement commer-
cial intermédiaire, comme le BTS «management des unités commerciales» ou le
DUT «techniques de commercialisation».
Les bacs + 4/5 proposés par les écoles de management, les IAE (instituts
d’administration des entreprises) dans les universités, affichent clairement l’am-
bition pour leurs diplômés d’évoluer vers des postes d’encadrement ;
• une entrée par filière
Si bon nombre de formations bac + 4/5 sont plutôt généralistes, un très petit nombre
de formations diplômantes ont exclusivement pour projet le management commer-
cial. C’est le cas depuis 2001 du Master 2 « Vente et Management commercial » de
l’IAE de Lyon. De telles formations sont encore à développer car elles répondent à
une véritable attente du marché du travail : des cadres commerciaux évolutifs ;
25
DE NOUVELLES EXIGENCES

• une entrée par l’expérience


Entre le projet de devenir manager et la prise de poste effective, il s’écoule plu-
sieurs années, il est en effet rarissime qu’un jeune diplômé démarre sa carrière
comme manager.

Par contre, de nombreux commerciaux confirmés cherchent à monter en compé-


tences ou à mettre à jour leurs connaissances par le moyen de la formation continue
diplômante. C’est alors un retour à la formation, soit de plein droit si le candidat
justifie du diplôme demandé pour entrer dans la formation visée (il est titulaire d’un
bac + 4 pour entrer en bac +5), soit par la validation des acquis professionnels
(VAP) qui, après avis de la commission d’experts, l’autorise, au vu de son expé-
rience professionnelle, à candidater à la formation visée (il n’y a pas garantie d’in-
tégration mais accès au dispositif de candidature).
Il est à noter que les formations aux métiers commerciaux sont très bien adaptées
aux dispositifs d’alternance professionnelle (stages, contrat d’apprentissage, contrat
de professionnalisation). La confrontation régulière qu’ils permettent entre expé-
rience professionnelle et enseignements joue un rôle particulièrement bénéfique sur
les acquisitions des compétences commerciales où l’action et le savoir-faire sont
intimement liés à l’analyse et au savoir (Geay, Hahn, 2008).

3.2 La valorisation de l’expérience avec la VAE

Enfin, l’expérience personnelle et professionnelle peut se substituer à la connais-


sance (loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale). La validation des
acquis de l’expérience (VAE) permet à toute personne de prétendre à la reconnais-
sance, par un diplôme, de l’expérience professionnelle capitalisée. Le dispositif s’or-
ganise autour d’un dossier, suivi en général d’un entretien, afin de pouvoir reconstruire
son parcours et en faire ressortir les compétences en phase avec le cursus. Un jury
d’experts se prononce sur la validation de l’expérience. Celle-ci peut être soit totale
– le candidat est diplômé –, soit partielle – seuls certains modules sont obtenus –, le
candidat a alors trois années pour se mettre en situation de valider les modules man-
quants, soit en revenant en cours, soit par tout autre moyen validé par le jury de
VAE.
Les analyses des profils et d’expériences de managers et de leaders commerciaux
mettent au jour des prédispositions qui s’épanouissent tout particulièrement dans la
confrontation au réel, et des parcours tant personnels que professionnels d’une
grande richesse.

26
Construire les nouvelles compétences

 Repères Témoignages

Récits de vie (extraits) de candidats à la VAE dans le cadre du Master Direction commerciale
de l’IAE de Lyon
« Après plus de vingt années de carrière professionnelle, dont quinze dans une multinatio-
nale anglo-saxonne au sein de laquelle j’ai franchi les différents échelons du management
commercial jusqu’à la fonction de directeur commercial/marketing d’une filiale, j’éprouve
aujourd’hui le besoin de faire reconnaître les connaissances et les compétences acquises
durant mon parcours pour obtenir le diplôme le plus proche de mon expérience. Actuelle-
ment dans une démarche de recherche d’emploi après avoir quitté ma dernière entreprise
lors de mon retour d’expatriation, je perçois les limites d’un parcours d’autodidacte, parti-
culièrement lorsque je me trouve en compétition serrée sur des postes de DG ou de direc-
tion de centres de profits. »
Philippe D. (45 ans).

« J’ai quitté le cursus scolaire en cours de terminale à l’âge de 17 ans pour créer une activité
professionnelle en tant qu’indépendant et maintenant, à 39 ans, je suis en poste avec une
fonction de responsable du développement commercial et marketing/responsable Europe.
J’ai toujours vécu un sentiment de complexe vis-à-vis de mon parcours d’autodidacte, et ce,
malgré une certaine réussite professionnelle. »
Philippe DDH (29 ans).

« Je distingue trois périodes dans ma vie professionnelle :


La première postscolaire me permet d’acquérir les connaissances et expériences propres à
compenser une scolarité interrompue trop tôt […] Très rapidement, le métier de la vente
m’apparaît comme étant la voie à prendre, il me faut construire un CV me permettant
d’être reconnu comme un professionnel…
La deuxième période débute par une formation professionnelle. À ce moment-là, j’aspire
à des responsabilités d’équipes commerciales et à une stabilisation au sein d’une entreprise.
La troisième période me permet de vivre une grande réalisation professionnelle.
Je souhaite maintenant passer à la quatrième période avec la reconnaissance par la VAE :
celle de l’autonomie, du changement et de la pluriactivité… »
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Jacques M. (53 ans).

3.3 La gestion de carrière

L’accès même aux postes de managers diffère selon les secteurs d’activité, la taille
et surtout la culture de l’entreprise. Pour beaucoup de commerciaux, le plan de car-
rière porte sur l’évolution vers un poste de manager. L’aplatissement des pyramides
hiérarchiques limite néanmoins les perspectives et la compétition est souvent vive.
Selon les entreprises, on peut identifier plusieurs modalités de gestion de carrière
(Roussillon, 1998).

27
DE NOUVELLES EXIGENCES

Certaines correspondent peu à la carrière commerciale :


– le modèle des élus : l’entreprise se base sur le repérage de potentiels (les high
po), qui feront l’objet d’un suivi individualisé et d’opportunités de carrière bien
spécifiques ; cette organisation est réservée aux grandes entreprises ;
– le modèle du concours, typique de la fonction publique française, il favorise
l’équité et les compétences théoriques plus que le savoir-faire en situation.

Les trois suivantes se rencontrent plus fréquemment dans les fonctions commer-
ciales :
– le modèle de l’ancienneté, qui privilégie l’expérience ;
– le modèle de la cueillette : la promotion se fait selon des logiques de réseaux
relationnels et d’opportunités ;
– le modèle des baronnies : la loyauté et l’allégeance à un dirigeant sont au cœur
de son fonctionnement ;
– le modèle du professionnel, centré sur les compétences et le consensus établi
autour de la personne.

On observe que ces différentes modalités se côtoient bien souvent dans les entre-
prises. Elles valent par leur adéquation avec le projet professionnel et les valeurs
personnelles de chaque commercial.

Conclusion

Il est important, pour être en phase avec les évolutions des organisations et de
leur environnement, de remettre en perspective une vision du management trop
empesée et calibrée, délivrée de façon standardisée dans les formations depuis
plusieurs décennies.
On peut retenir que LE manager commercial n’existe pas… mais que les managers
commerciaux sont divers, nombreux, variés… et qu’ils évoluent au sein de réseaux
de contraintes multiples avec, toujours, la pression de la performance, mais qui asso-
cie de plus en plus performance économique et performance sociale.
Les évolutions des attentes des salariés, des exigences des parties prenantes, des
configurations des organisations et de leurs environnements, impliquent de déve-
lopper des compétences qui vont au-delà des codes classiques du management
commercial établi.
Le manager commercial doit savoir trouver d’autres chemins vers la performance.

28
Chapitre L’élaboration
2 de la stratégie
commerciale et
sa mise en œuvre

L e manager commercial est l’initiateur, le concepteur de la stratégie commer-


ciale de son entreprise, il doit pour cela connaître et comprendre les grands
enjeux stratégiques, et travailler en intelligence avec les autres fonctions. Cette vigi-
lance aux interfaces doit être maintenue à tous les moments de la mise en œuvre.
L’enjeu est sa légitimité comme membre du conseil de direction de l’entreprise.
L’enjeu est aussi sa légitimité de capitaine d’équipe.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Il y a manager commercial et manager commercial. Certains sont middle mana-


gers et sont à la tête d’équipes réduites, régionales ou locales au sein de grosses
entreprises (chef des ventes, directeur d’agence bancaire, directeur de magasin…) ;
d’autres ont le titre de directeurs commerciaux dans de toutes petites structures. Les
premiers n’interviennent que très faiblement dans l’élaboration de la stratégie
commerciale. Ils sont sollicités par leur N + 1 pour une remontée d’informations sur
le portefeuille clients ou le secteur de leur équipe. Les seconds sont en première
ligne pour la définition de la stratégie marketing et commerciale de leur organisa-
tion, les deux fonctions étant souvent assurées par la même personne. Tous sont
amenés à mettre en œuvre cette stratégie commerciale, directement au sein de leurs
équipes et indirectement avec des fonctions adjacentes (production, logistique).
Dans ce processus d’élaboration et de mise en œuvre de la stratégie commerciale, la
29
LA STRATÉGIE COMMERCIALE

façon de faire, les moyens, les délais, les outils sont différents. Les principes restent
néanmoins les mêmes.
Que le manager commercial soit initiateur, responsable ou exécutant de ce proces-
sus, il est essentiel qu’il en connaisse les grands invariants, ceci pour savoir trans-
mettre et communiquer sur le projet, et piloter une déclinaison optimale à tous les
échelons de la fonction commerciale, ceci jusqu’au « vendeur terrain ». En manage-
ment commercial, il est difficile de faire faire si on n’a pas la légitimité de l’expé-
rience et de la connaissance.
Ce chapitre propose donc de dessiner les grands principes de l’élaboration de la
stratégie commerciale et de la première étape de sa mise en œuvre : l’organisation
commerciale.
Il s’organise en trois sections :

Section 1 Q Élaborer la stratégie commerciale


Section 2 Q Construire le plan d’action commerciale et le décliner
Section 3 Q Configurer l’organisation commerciale

Section
1 ÉLABO RER LA STRATÉGIE COMMERCIALE

La stratégie commerciale est une déclinaison de la stratégie d’ensemble de l’en-


treprise en direction des clients. Elle s’appuie donc sur une stratégie élaborée par la
direction générale et, le cas échéant, par la direction marketing. C’est en effet grâce
à une bonne connaissance de l’environnement et une bonne appréciation du marché
qu’il est possible de bâtir une stratégie commerciale viable et pertinente.

1 Les grands principes stratégiques, quelques points de repère


incontournables
1.1 Définitions, rappels

La stratégie est le lieu où se confrontent pensée et action, elle est faite de mouve-
ments et de réajustements, voire de remises en cause. Les définitions de la stratégie
sont nombreuses et diverses, car elle emprunte à de multiples domaines, dont l’art de
la guerre.

30
Élaborer la stratégie commerciale

Nous retiendrons que : « la stratégie est l’ensemble des desseins, des buts et des
objectifs d’une organisation, ainsi que les principales politiques et les plans pour
atteindre ces buts, établis de façon à définir ce qu’est le domaine d’activité de l’en-
treprise ou ce qu’il devrait être, et le type d’entreprise qu’elle est ou devrait être »
(Christensen, Andrew et Guth, 1965).
La stratégie est un processus (voir figure 2.1), elle inclut le temps et plus particuliè-
rement le long terme. Ainsi, est stratégique toute démarche qui repose sur la définition
de buts à long terme, la détermination des moyens pour les réaliser et la planification
de l’engagement des ressources dans ce délai. L’information et la connaissance sont
centrales au processus stratégique, les dispositifs qui permettent leur captation et leur
traitement également.
La stratégie exprime un choix de positionnement pour l’entreprise dans un univers
concurrentiel changeant, avec deux objectifs : se différencier par rapport au concur-
rent et créer de la valeur (voir figure 2.1).
On peut identifier deux processus stratégiques :
– la stratégie déduite qui identifie les opportunités et adapte ses ressources ;
– la stratégie construite qui utilise ses ressources au gré des opportunités.

On définit différents niveaux de stratégie : la stratégie d’entreprise au niveau de la


direction, les stratégies des domaines d’activité (Business Units) et les stratégies
fonctionnelles (R&D, RH, finance, production, marketing…). La stratégie commer-
ciale s’intègre dans la stratégie fonctionnelle.

Schémas, interprétations, valeurs,


croyances

Formation
Buts de la stratégie :
Mission • diagnostic
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Vocation • évocation de Politiques


solutions
Objectifs • évaluation des choix

Mise en œuvre

Pourquoi ? Quoi ? Comment ?


Desreumaux, Lecocq et Warnier, 2006.

Figure 2.1 — Vision synoptique de l’élaboration d’une stratégie

31
LA STRATÉGIE COMMERCIALE

1.2 La démarche stratégique

Il y a plusieurs écoles de pensée et de nombreuses méthodes, mais toutes reprennent


les mêmes séquences (voir figure 2.2) : il est essentiel de poser un diagnostic de la situa-
tion, tant de l’environnement (analyse externe) que de l’entreprise (diagnostic interne)
pour penser une stratégie qui sera durable. Ce diagnostic doit être partagé par l’ensemble
des parties prenantes car, au-delà de constituer le socle de la réflexion, il est aussi la
condition sine qua non de la légitimité des propositions qui en découleront, et de l’adhé-
sion des équipes.

Analyse externe
PESTEL Choix
Porter stratégiques
Définition Rédaction Implémentation
Intentions
avantage plan de la
stratégiques
concurrentiel stratégique stratégie
Analyse interne
VRIO
DAS

Figure 2.2 — Le processus stratégique

2 Établir le diagnostic stratégique

Pour mener à bien l’élaboration du diagnostic stratégique de l’entreprise, il est indis-


pensable de bien respecter différentes étapes avec des outils ou des méthodes qui ont
fait leurs preuves. À chaque fois, un court rappel est fait avec un exemple à l’appui.

2.1 Première étape : l’analyse de l’environnement général –


le modèle Pestel
L’analyse Pestel permet de décrire le macro-environnement dans lequel évolue
l’entreprise et d’identifier les facteurs environnementaux qui peuvent avoir un
impact significatif sur son activité. Elle se décline en 5 thèmes :
– P pour l’analyse politique : risque politique, régulations/dérégulations, régle-
mentations, politique monétaire et fiscale…
– E pour l’analyse économique : taux d’intérêt, d’inflation, de change, politique
monétaire…
– S pour l’analyse sociétale : style de vie, égalité des chances, valeurs ;
– T pour l’analyse technologique : dépenses en recherche et développement de
l’État, politique de protection des brevets ;
– E pour l’analyse environnementale : gestion des déchets, responsabilité
sociale…
– L pour l’analyse légale : loi sur l’environnement, droit du travail…
32
Élaborer la stratégie commerciale

 Repères L’impact des évolutions sociétales et légales


sur le marché de la distribution automatique
En croissance d’environ 3 % par an depuis quinze ans en France, le marché de la distribution
automatique de boissons (chaudes ou froides) connaît un net ralentissement en 2001.
Une analyse stratégique permet de mettre au jour deux causes issues de l’environnement
légal :
1/ Le passage à l’euro au 1er janvier 2001
Pourquoi ? À cela deux raisons : l’une qui touche au comportement du consommateur, qui
se méfie de la nouvelle monnaie et la manipule avec parcimonie, et la difficulté des entre-
prises propriétaires des machines à les régler en fonction de l’euro, d’où des pannes nom-
breuses et longues qui paralysent la distribution.
2/ Le passage aux 35 heures
Pourquoi ? Parce que de très nombreuses entreprises ont effectué leur passage aux
35 heures en réduisant les pauses, voire en les supprimant ou en ne les rémunérant plus.
Or, c’est bien à la pause que le salarié va boire un café au distributeur de l’entreprise.

2.2 Deuxième étape : l’analyse de l’environnement concurrentiel –


le modèle de Porter
Le modèle de Porter analyse cinq « facteurs » : la menace des produits de substi-
tution, la rivalité entre les concurrents, la menace des nouveaux entrants, le pouvoir
des fournisseurs et le pouvoir des clients. Une illustration de l’utilisation de la matrice
est proposée ci-dessous pour le marché de l’eau en 2004 en France (voir figure 2.3).

FOURNISSEURS
• Les matières premières
• Le packaging (PET, verre)
• Arômes
• Vitamines
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

CONCURRENCE
ENTRANTS POTENTIELS INTRASECTORIELLE
• Internationaux (ex : Coca) Substituts
• Danone, Nestlé Waters, Castel-
• Municipalités, PME Neptune • Eau du robinet

• Eaux des profondeurs • MDD, marques régionales (eau • Jus de fruits,


marines de source), 1er prix sodas, alcools…
• Marques internationales

CLIENTS
• Les distributeurs
• Les restaurants
• Les consommateurs
finaux

Source : Brunet A. ; 2005.

Figure 2.3 — Analyse du marché de l’eau en bouteille en France en 2004 33


LA STRATÉGIE COMMERCIALE

En 2004, le marché de l’eau en bouteille représente 6,2 milliards de litres en


volume et 2 milliards d’euros en valeur. 96,5 % des foyers achètent de l’eau embou-
teillée et chaque Français consomme en moyenne 155 litres par an. Le marché se
caractérise par une forte saisonnalité des ventes (pic : l’été) et de fortes disparités
régionales. Il est dominé par deux leaders mondiaux : Nestlé et Danone. Pour le
moment, les marques nationales dominent mais les parts de marché s’effritent et de
nouveaux concurrents issus des soft drinks arrivent : Coca-Cola et Lipton.

2.3 Troisième étape : le diagnostic stratégique des activités de l’entreprise –


la définition des domaines d’activités stratégiques (DAS)
La première étape est donc d’établir un diagnostic stratégique. Ce diagnostic porte
sur le marché, la concurrence, les technologies, l’environnement légal, les fournis-
seurs… et doit être fait par domaine d’activité stratégique (DAS), car les conditions
varient entre DAS.
La technologie :
PACKAGE
GLOBAL

TOUT EN UN
FONCTIONS TECHNIQUES

CHAUFFAGE
DAS N° 1 : DAS N° 2 :
Les Distributeurs Professionnels Les Professionnels de la Construction

RAFRAICHISSEMENT
ECS
DAS N° 3 :
La GSB
VMC

CHAUFFAGE
FONCTIONS BASIQUES

RAFRAICHISSEMENT

ECS

VMC

Distributeur Distributeur Distributeur GSB Electricien Plombier Génie Maintenance


Plombier Matériaux Electricien Chauffagiste climatique

GSB = Grande Surface Bricolage


VMC = Ventilation Mécanique Contrôlée
ECS = Eau Chaude Sanitaire
Source : Dablain, 2009.

Figure 2.4 — Exemple de l’analyse par DAS d’une entreprise du secteur du bâtiment

34
Élaborer la stratégie commerciale

Un DAS se définit par le type de client, la technologie et l’offre. C’est par la tech-
nique de la segmentation qu’on en dessine les contours. Plusieurs DAS forment le
portefeuille d’activités d’une entreprise. Une question importante est d’identifier les
synergies existant entre DAS, cette mise en synergie permet des réductions de coûts
et de l’accroissement de valeur.
Cette entreprise maîtrise six métiers différents et fortement complémentaires :
ventilation, confort thermique, diffusion et distribution d’air, protection incendie,
acoustique, aspiration centralisée.

Promoteurs Promoteurs
Architectes Entreprises Aménageurs
paysager Bureaux

DAS 4
Commercialisation
15 % DAS 6
27 % DAS 3
Communication
18 %
Volet paysager
DAS 1
28 % DAS 2 DAS 6
Concours
5% 7%
Source : Duret, 2009.

Figure 2.5 — Analyse par DAS d’Astridum, société spécialisée dans la réalisation
d’images de synthèse pour les acteurs du bâtiment et de la construction

2.4 Quatrième étape : l’analyse de l’environnement interne – le modèle


des ressources et des compétences
Elle se focalise sur l’analyse des capacités stratégiques de l’entreprise afin d’ana-
lyser son positionnement sur ses différents marchés. La démarche va consister à
identifier les forces et les faiblesses de l’entreprise pour comparer ses ressources à
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

celles de la concurrence. On va donc procéder à :


– un audit des ressources, qui inclut l’ensemble des moyens physiques, finan-
ciers, humains, intangibles, les connaissances et les savoir-faire ;
– une analyse des compétences : on distingue les compétences fondamentales,
nécessaires, additionnelles ;
– l’analyse de la chaîne de la valeur : c’est-à-dire les différentes étapes qui per-
mettent à une entreprise d’obtenir un avantage concurrentiel et d’en identifier les
sources ;
– l’analyse financière et l’étalonnage, qui est une comparaison avec la concur-
rence (repérage des best practices).

35
LA STRATÉGIE COMMERCIALE
Tableau 2.1 — Analyse des forces et des faiblesses de l’entreprise S
Les forces Les faiblesses

Général entreprise

Notoriété liée à la forte présence en grand public Manque de clarté sur la stratégie et les objectifs
Potentiel de développement Déficit en processus et schémas d’organisation
Forte culture technique Absence de culture commerciale & marketing
Relations simples, franches et directes Faible exploitation des avantages concurrentiels
Complexité et non homogénéité des organisations
régionales
Manque de pression, de challenge sur les équipes
commerciales

Relations humaines

Discipline, respect des consignes Longue durée dans les postes £ difficulté de remise en
Attachement, fidélité à l’entreprise question
Grande expérience des salariés Déficit d’apports externes £ non-brassage
Convivialité, décontraction dans les rapports des expériences
au quotidien Moyenne d’âge élevée
Niveau moyen des rémunérations £ difficulté
d’accrocher des « stars » en commercial

Gestion

Bonne culture du résultat Fort décalage dans la publication des statistiques


mensuelles
Culture papier
Procédures/Outils/Suivi insuffisants et
non homogènes d’un(e) service/région à l’autre

Marketing et commercial

Planogramme merchandising = politique cohérente et Faiblesse numérique du service marketing


centralisée Manque d’innovation machines
Bonne connaissance du tissu local Offres produits peu innovantes
Service grands comptes inexistant
Pas de base de données clients informatisée
Pas d’unité commerciale (chargés de clientèle éclatés
dans les régions)

2.5 Cinquième étape : la détermination de l’avantage concurrentiel –


le modèle VRIO
Après avoir analysé le macro-environnement externe, repéré les forces du marché,
défini les domaines d’activités stratégiques de l’entreprise, comme ses forces et ses
faiblesses, il reste à définir son ou ses avantages concurrentiels. Le modèle VRIO
aide à cette réflexion, il se décompose en 4 thèmes :
– valeur (value) : est-ce que la ressource identifiée est importante ? (ressource
décisive) ;
– rareté (rareness) : est-ce que les concurrents possèdent la même ressource ?
(ressource distinctive) ;
36
Élaborer la stratégie commerciale

– imitabilité ou facilité à être imité (imitability) : est-ce que cette ressource est
coûteuse à imiter ? (ressource défendable) ;
– organisation (organization) : est-ce que l’organisation est structurée pour
exploiter au mieux cette ressource ? (ressource durable).

Car l’avantage concurrentiel doit être décisif, distinctif, défendable et durable


(voir figure 2.6).

Amélioration continue
des opérations d’assemblage Support électronique
Valable, rare, coûteux à imiter : Valable et rare
AC* soutenu AC* temporaire

achat ventes SAV

Téléphone et
Juste à temps Internet
valable et rare Rare et valorisant
AC* temporaire AC* temporaire

*AC: avantage commercial

Figure 2.6 — La définition de l’avantage concurrentiel de l’entreprise Dell

Une fois ces avantages concurrentiels et leur valeur bien identifiés, plusieurs stra-
tégies de développement sont alors envisageables.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

3 La définition de la stratégie commerciale


3.1 Définir la stratégie marketing

Il s’agit d’élaborer, dans un premier temps, la stratégie marketing. La stratégie


marketing est la déclinaison de la stratégie globale sur le marché de l’entreprise. Elle
éclaire aussi les éléments de la stratégie générale en lui apportant sa connaissance
du marché et de la concurrence. Les outils de la stratégie marketing sont la segmen-
tation et le ciblage, c’est-à-dire l’identification du ou des segments cibles sur les-
quels vont se porter les allocations de ressources.

37
LA STRATÉGIE COMMERCIALE

La stratégie marketing définit ensuite les grandes variables du marketing (Kotler


et al., 2009) : conception et adaptation du produit, définition du prix, choix des
canaux de distribution et du mix communication. C’est sur cette base que se fondent
la stratégie commerciale et le plan d’action commerciale.

 Repères L’analyse marketing du marché


de la restauration rapide en France
La restauration rapide se distingue de la restauration traditionnelle par deux caractéris-
tiques essentielles : l’absence de service à table et l’utilisation de vaisselles et d’emballages
jetables.
Le rythme de croissance annuel (source INSEE 2008) s’établit autour de 5,4 % par an en
moyenne entre 2000 et 2008. Le CA de la restauration rapide est de 7,5 milliards d’euros en
2008. Le nombre d’établissements a augmenté de 45 % entre 2000 et 2007, passant ainsi
de 12 968 entreprises à 18 800. Le nombre de salariés du secteur a augmenté de 47 %
entre 2000 et 2007, passant ainsi de 91 400 à 134 100.
La dépense moyenne progresse de 1,5 % à 6,46 euros par personne.
Le prix moyen selon les enseignes varie de 3 à 20 euros.
On peut recenser six DAS avec un descriptif rapide :
1. Les pizzas
DAS saturé avec une concurrence féroce, il se vend 3 milliards de pizzas en France par an. La
pizza exploitée sous forme de chaîne reste un produit à très forte valeur ajoutée et liée à
une forte demande des consommateurs.
2. La petite restauration rapide
Segment qui a fortement évolué notamment grâce à des enseignes comme Paul et la
Brioche Dorée. L’offre est devenue très qualitative et le succès des sandwiches en France ne
se dément pas. Ce segment bénéficie très largement de la crise économique qui pousse une
grande partie des salariés à déjeuner sur le pouce. Le snacking nomade est également une
tendance de fond.
3. La petite restauration branchée
La petite restauration « branchée » reste attractive en termes de marché car elle répond à
une demande croissante des consommateurs ; elle est donc « tendance » mais devrait souf-
frir directement de la conjoncture économique et nécessite une certaine expertise en ter-
mes culinaires.
En outre, le ticket d’entrée est très élevé, les concepts pertinents sont portés par des grands
chefs cuisiniers (Ouest-Express, par Paul Bocuse, ou Sens, par les frères Pourcel).
4. Les pâtes
Le segment des pâtes a connu un essor important depuis 4 à 5 ans avec des enseignes comme
Pasta Cosy, Nooî, Mezzo di Pasta ou Francesca. L’avantage concurrentiel pris par ces marques
pionnières est difficile à rattraper. De nombreux acteurs indépendants ont malgré tout suivi
le succès de ces leaders en adaptant le concept avec un point de vente indépendant.

38
Élaborer la stratégie commerciale

☞ 5. Les burgers
Le marché des burgers est toujours dominé par McDonalds et Quick. Ce segment est resté
sans autre compétiteur jusqu’à l’apparition de Speed Burger et Jacks. Le positionnement le
plus pertinent est celui de Speed Burger où aucune restauration sur place n’est possible.
Cette enseigne connaît un développement rapide sous forme de franchises (24 à ce jour
avec 15 millions d’euros de CA). C’est un marché à fort potentiel de développement pour la
livraison à domicile.
6. Le poulet
Le segment du poulet est occupé uniquement par KFC, qui connaît un fort succès en France
depuis 2004. Il est en compétition directe avec McDonalds et Quick, car KFC se présente
sous forme de fast-food totalement comparable à ces deux professionnels du hamburger
de bœuf. Le ticket d’entrée est élevé (200 K*) pour accéder à la franchise et l’ambition de
développement de Yum’s Brand (propriétaire de la marque) est très élevée (plus de 200 res-
taurants à l’horizon 2012).
Source : Marteau, 2009.

3.2 Évoquer les stratégies possibles de développement commercial

On distingue trois grandes stratégies de développement :


– l’extension géographique, qui peut conduire à l’internationalisation ; c’est le
choix de beaucoup d’entreprises, selon des degrés divers comme on le verra
chapitre 7 ;
– la diversification : elle se traduit par la multiplication du nombre des domaines
d’activité ; c’est le cas de l’entreprise Yamaha qui a développé des savoir-faire
aussi bien dans le secteur des motos que des instruments de musique ;
– l’intégration, qui implique la maîtrise des phases de la chaîne de la production ;
ainsi l’entreprise Michelin a une politique d’intégration par l’amont (intégration
des fournisseurs) et Christian Dior par l’aval (points de vente en propre).

Ces stratégies de croissance peuvent être menées par le développement interne de


© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

l’entreprise. Si le choix se porte sur la croissance externe, elle a alors comme sup-
port des alliances stratégiques ou des fusions acquisitions (cas d’Alcatel Lucent, ou
de Pinault Printemps La Redoute ou de LVMH).

3.3 Penser la déclinaison de la stratégie marketing à la stratégie


commerciale
La stratégie commerciale va être une déclinaison de la stratégie globale ainsi défi-
nie. Il est important qu’elle soit impliquée dès le processus d’élaboration de la stra-
tégie globale, c’est-à-dire que le directeur commercial soit présent au comité de
direction où se décident, en règle générale, les grandes options stratégiques. C’est
39
LA STRATÉGIE COMMERCIALE

une garantie pour la fiabilité des informations sur le client et sur la concurrence.
L’intelligence commerciale se met en place dès cette phase. Cette mobilisation très
en amont permet aussi une bonne appropriation des choix opérés et permet un enga-
gement de la fonction commerciale dans les efforts qui lui seront demandés par la
suite, dans la phase de mise en œuvre.
Il arrive que des managers commerciaux soient amenés à motiver leurs équipes à
mettre en œuvre des actions auxquelles ils n’accordent aucune valeur. Ce phéno-
mène, trop courant, est source de conflit chez le manager commercial et affaiblit
l’engagement des commerciaux.
La figure 2.7 rappelle les principes de cette déclinaison stratégique, sachant que
dans un grand nombre d’entreprises, la direction marketing et la direction commer-
ciale sont assurées par la même personne et le même département.

Stratégie de l’entreprise
Direction générale
Définition de la mission de l’entreprise
Choix du portefeuille d’activité
Formulation des grands objectifs

Stratégie marketing
Direction marketing
Choix des marchés prioritaires
Choix de la politique d’offre
Choix de la politique de distribution

Stratégie commerciale
Direction commerciale
Choix des clients prioritaires
Organisation commerciale
Plans d’actions

Figure 2.7 — Déclinaison de la stratégie d’entreprise


vers le plan d’action commerciale

Il est alors possible sur cette base de construire le plan d’action commerciale
(PAC).

40
Construire le plan d’action commerciale

Section
2 CONSTRUIRE LE PLAN D’ACTION COMMERCIALE
ET LE DÉCLINER

1 Passer des axes marketing aux actions commerciales

Le marketing s’intéresse au marché et à ses segments, la vente aux clients. Chaque


axe stratégique va se traduire en actions commerciales, au regard des moyens et des
ressources mis à disposition (voir figure 2.8).

Axes stratégiques marketing Axes stratégiques commerciaux


Segments marchés prioritaires Clients prioritaires
Politique d’offre Choix de mise en œuvre
Politique de distribution Politique de vente
Organisation/Structure

BUDGET

Plan marketing Plan d’action commercial


Politique de prix
Moyens commerciaux
Moyens produits (R&D, lancements)
Plans d’actions clients
Moyens de communication (Pub, RP)
Moyens humains

Figure 2.8 — Schéma d’ensemble de l’articulation des stratégies et des plans


d’action marketing et commerciale

Tableau 2.2 — Exemple de déclinaison d’axe stratégique en action terrain


© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Objectifs marketing Action commerciale

Développer le nombre de clients Renforcement de la prospection sur le terrain

Développer le CA chez les clients existants Formation à intensifier et/ou spécialisation de la force
de vente

Augmenter la part de marché Baisse des prix et/ou promotion et/ou augmentation
de la prospection

Augmenter la rentabilité client Renfort de l’encadrement pour pilotage précis et/ou


formation de la force de vente à l’offre

41
LA STRATÉGIE COMMERCIALE

2 La construction du plan d’action commerciale


2.1 Le diagnostic des forces de vente

Cet impératif de bien identifier les moyens disponibles demande de mener un audit
de la force de vente. Cet audit comprend deux volets : l’étalonnage vis-à-vis de la
concurrence et un audit de la performance en interne :
– l’étalonnage vis-à-vis de la concurrence amène à pouvoir établir la fiche
d’identité de la concurrence et à bien connaître son organisation ;
Tableau 2.3 — Audit de l’organisation commerciale des entreprises concurrentes
Fiche d'identité concurrence Organisation concurrence

Mode d'organisation
Structure de
Identité Nom, coordonnées, effectifs etc. (fonctionnelle, par marché, en
l'entreprise
BU, etc.

Orientations prioritaires, Structure Organigramme de la Direction


Stratégie
positionnement. Commerciale commerciale

CA, Evolution, Rentabilité, Part


Chiffres clés Périmètre des fonctions
de marché, Effectifs

Produits, Parts de marché par


Offre Effectif commercial
segment, Services

Statut des Types de contrat (salarié, VRP,


Distribution Réseau de distribution
commerciaux multi cartes etc.)

Politique de prix Tarifs et conditions Rémunèration

Stratégie de com, Notorieté, Âge, sexe, formation, ancienneté


Communication Profil de la FdV
Image etc.

International Présence pays

– l’audit des performances de la force de vente en interne se fonde sur l’évalua-


tion d’un certain nombre de ratios parmi lesquels la pression commerciale, la
productivité, la gestion de l’activité ou l’organisation de la coordination.
Tableau 2.4 — Exemple des indicateurs permettant d’évaluer la performance
d’une force de vente
Paramètres Questions à se poser

Pression commerciale Nombres de contacts clients par jour ? Sous quelles formes (visites, téléphone...) ?

Segmentation des visites par types de clients

Cohérence avec la stratégie commerciale ?

Productivité Taux de transformation des contacts en visites ?

Tracabilité des visites

Système de reporting

42 ☞
Construire le plan d’action commerciale

☞ Gestion de l'activité Planification

Suivi des kms/visite

Temps administratif

Coordination Présence de l'encadrement sur le terrain

Remontée d'informations de la force de vente vers le siège

Coordination force de vente/Service Clients

2.2 Le nécessaire dialogue marketing/vente

La stratégie commerciale va se construire à partir de la déclinaison de la stratégie


marketing, Pour mener à bien cette déclinaison, il faut un dialogue facile entre ces
deux fonctions, ce qui n’est pas toujours le cas quand elles sont portées par des ser-
vices et des personnes distincts. Ainsi, une étude1 a récemment mis au jour que seule-
ment 18 % des directeurs marketing français interrogés pensent qu’il est nécessaire
d’intégrer une communication client dans leur stratégie de développement, ils sont
moins de 50 % à penser que le marketing peut impacter profitablement les ventes.
L’insuffisance de communication et de concertation peut générer de nombreux dys-
fonctionnements qui pèseront durablement sur la performance commerciale de l’entre-
prise. La coordination entre les services est donc indispensable et source de valeur.
On peut évaluer l’état des relations entre les services avec un audit portant sur un
certain nombre de points :
Tableau 2.5 — Évaluation de la coopération marketing-commercial
dans l’entreprise

Faux Plutôt Pas Plutôt Vrai


faux d’avis vrai

1. Le chiffre des ventes est souvent proche des prévisions


© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

des commerciaux

2. Si les résultats se révèlent décevants, aucune des deux


fonctions ne pointe l’autre du doigt ni ne la blâme

3. Les marketeurs rencontrent souvent les clients des


grands comptes pendant la phase de négociation

4. Le marketing fait participer les commerciaux à ses


projets

5. L’équipe commerciale communique volontiers les


remontées d’information attendues par le marketing


1. Enquête « Marketing Success » commanditée par Xerox et menée par Coleman Parkes Research en mai et
juin 2008 auprès de 460 directeurs marketing de grandes entreprises européennes.
43
LA STRATÉGIE COMMERCIALE

☞ 6. Lors des réunions, les deux équipes ne perdent qu’un


temps minime en résolution de conflits et gestion de crise

7. Des critères communs ont été établis pour évaluer la


performance des deux équipes

8. Les détachements de collaborateurs ne sont pas rares


entre marketing et commercial

Source : Kotler et al., 2006.

Si les conflits sont évidents, si les deux fonctions doublonnent ou s’il y a concur-
rence pour les ressources ou les financements, il est nécessaire de travailler à
l’amélioration de la coordination. Deux options sont possibles : l’alignement ou
l’intégration.
L’alignement est porté par :
– une communication disciplinée (des réunions régulières, des discussions portant
sur les actions, des relais dans chacun des services, des procédures, des organi-
grammes à jour…) ;
– la multiplication de missions communes et de transferts de personnes : accom-
pagnement des commerciaux par les marketeurs en visite clientèle, implication
des commerciaux dans des réunions d’élaboration des plans marketing… ;
– une cohabitation, avec un rapprochement ou même un partage des locaux ;
– l’intensification des flux d’informations dans les deux sens (marketing → vente :
retour des campagnes de communication, vente → marketing : remontée d’infor-
mation sur les habitudes des clients).

L’évolution vers l’intégration implique de :


– placer les deux fonctions sous la responsabilité du même cadre dirigeant, « res-
ponsable de la performance commerciale » ;
– scinder le marketing en deux groupes : amont (stratégique), et aval (tactique) ;
– définir des objectifs de résultats et de systèmes de rémunération communs ;
– utiliser les mêmes critères d’évaluation pour les marketers et les commerciaux.

S’il n’est pas souhaitable pour toutes les entreprises d’intégrer marketing et
commercial, toutes ont besoin de cette amélioration des relations entre marketing et
vente pour optimiser leur performance commerciale.

44
Construire le plan d’action commerciale

2.3 Communiquer, faire adhérer

■■ Mobiliser la communication interne

Une fois la stratégie établie et le plan d’action commerciale élaboré, il est essentiel
d’y faire adhérer l’ensemble des forces commerciales, l’appropriation est la condition
de leur engagement. Il faut également savoir communiquer à l’extérieur de l’organi-
sation, auprès des clients, pour que les messages diffusés dans l’environnement
externe comme dans l’environnement interne soient cohérents. Plusieurs moyens peu-
vent être mobilisés :
En interne : des réunions d’information, une convention de vente, des supports
diffusés auprès des équipes, une communication sur le site de l’entreprise.
À l’extérieur : des plaquettes, de la diffusion media, des supports d’information
mis en ligne.

 Repères Les pistes pour une convention commerciale


réussie
Une convention commerciale constitue un moment fort entre la direction de l’entreprise et
les équipes commerciales, d’autant plus que les opportunités de se retrouver tous ensem-
ble sont de plus en plus rares dans la vie des entreprises et des équipes de vente.
1. Faire contribuer ses commerciaux
Leur donner la parole à travers des petits reportages faits sur le terrain et qui seront proje-
tés lors de la plénière.
2. Rompre avec les mises en scène classiques
Il faut savoir rompre avec l’habitude, étonner, choisir des scénographies innovantes tout en
restant en cohérence avec la marque. On peut intégrer, dans la phase de travail prépara-
toire, un audit de l’historique des conventions : quels formats l’entreprise a-t-elle testés ?
Les entreprises qui emploient plusieurs milliers de collaborateurs optent ainsi, de plus en
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

plus souvent, pour une approche « Tour de France ».


3. Travailler intelligemment avec l’« invité de marque »
Un moment fort de la convention est la montée sur scène de l’invité de marque. À éviter :
les interventions de « stars » au seul titre qu’ils ou elles sont célèbres, un discours vide de
sens ou trop décalé va creuser le fossé entre les équipes commerciales et leurs dirigeants.
Un fossé qui mettra de longues années à être comblé.
4. Maintenir le suspens jusqu’au bout
En maintenant le secret sur une intervention surprise.
5. Développer la culture d’entreprise
Avoir des intervenants en phase avec les valeurs de l’entreprise est très important, il ne
s’agit pas de faire un « coup » mais de motiver sur le long terme.

☞ 45
LA STRATÉGIE COMMERCIALE

☞ 6. Les séances de travail aussi peuvent êtres innovantes


Les ateliers de réflexion, que l’on retrouve souvent dans la convention force de vente, favo-
risent le brainstorming et l’appropriation des messages. L’objectif est d’instaurer un débat
interactif pour que les participants s’approprient les messages et solutions.
7. Introduire de l’humour
Mobiliser une troupe de théâtre qui imagine des minipièces jouées lors de la plénière, cela
permet de crever des abcès ou de faire passer des messages difficiles grâce à la prise de
recul.
8. Rythmer avec des interventions courtes
Des interventions courtes pour tout le monde, y compris les dirigeants, et ponctuées par
des films, des témoignages en « live ».
9. Faire vivre la convention toute l’année
En diffusant des comptes rendus dans le journal interne ou avec des moments forts mis en
ligne ou proposés sous forme de CD-ROM.
D’après une enquête Anaé-Occurrence - Bilan d’impact réalisé sur 50 événements en
2006 :
Le fait de participer à une convention développe :
– la motivation pour 79 % des répondants ;
– l’esprit d’équipe pour 67 % ;
– l’adhésion aux valeurs de l’entreprise pour 66 %.
Le fait de participer à un événement développe pour 67 % des participants l’esprit
d’équipe.
Et 66 % déclarent avoir l’esprit plus corporate après avoir participé à une convention.
D’après : Action Commerciale n° 274, 1er mai 2007.

■■ Accompagner les commerciaux dans des choix difficiles

Les actions commerciales à mettre en œuvre doivent être comprises et intégrées


par le manager commercial pour qu’il puisse les « vendre » à ses équipes et les
accompagner dans leur réalisation (voir Repère ci-après).

 Repères Implantation de nouveaux objectifs


commerciaux
La société Soliflor est un fabricant de revêtement de sol PVC. La fonction de délégué
commercial pour la société Soliflor consiste à :
– gérer et développer le chiffre d’affaires et les parts de marché sur une région déterminée ;
– assurer la promotion et la vente sur chacune des familles de produits de la gamme ;
– assurer l’interface avec les prescripteurs et la maîtrise d’ouvrage (santé/scolaire/sport/
logement/administration).

46 ☞
Construire le plan d’action commerciale

☞ Début 2009, un changement assez important arrive au sein de la force de vente avec l’ap-
parition d’une nouvelle base de données : Guepard. Cette base de données, très puissante,
donne aux commerciaux une multitude d’informations concernant les différents interve-
nants du marché ainsi que tous les renseignements nécessaires sur les chantiers et projets
en cours ou à venir.
Lors de son entretien annuel, le directeur régional des ventes annonce à Lionel (délégué
commercial) une réévaluation de ses objectifs :
1. passer de 5 à 8 visites quotidiennes ;
2. « nourrir » et tenir à jour la base de données Guepard…
3. tout en maintenant la progression de son CA.
Lionel prévient son directeur régional des ventes qu’il doit faire un choix et que l’applica-
tion de ces 2 règles ne peut être réalisée en même temps : soit il augmente son nombre de
visites au détriment du travail administratif, soit il passe plus de temps à renseigner la base
de données au détriment du nombre de visites.
Le DRV ne veut pas entendre ce type de contre-argument, non pas que ce ne soit pas justifié
mais que cela ne rentre pas dans les ambitions de la société. C’est pourquoi il propose à
Lionel de transformer les contraintes en opportunités, d’auditer son activité et de prendre
trois résolutions :
– mieux organiser ses visites en segmentant mieux les contraintes horaires de ses diffé-
rents clients, il va passer ainsi de 5 à 7 visites en quelques semaines ;
– parier sur la base d’informations et faire le choix de la remplir consciencieusement « au
fil de l’eau », il va se rendre compte assez vite qu’il gagne en efficacité pour ses visites
clients ;
– redéfinir ses priorités en termes de chiffre d’affaires pour continuer à le développer.
Passée une période d’apprentissage où il ne ménage pas ses heures, Lionel va réussir à
atteindre presque les 3 objectifs (7 visites au lieu de 8) et arriver en tête des chefs de secteur
de l’entreprise.
Cas élaboré par Isabelle Barth.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

47
LA STRATÉGIE COMMERCIALE

Section
3 CONFIGU RER L’ORGANISATION COMMERCIALE

La mise en œuvre de la politique commerciale dépend largement de l’organisation


qui va être mise en place. Celle-ci porte sur trois grands thèmes : la définition des
secteurs et/ou des portefeuilles clients, les définitions de missions, et la structuration
du service commercial.

1 La définition des secteurs et du portefeuille clients


1.1 Le calibrage d’une force de vente et de son activité

La définition des secteurs ou des portefeuilles clients doit avant tout viser l’équité
en termes de potentiels. Il faut aussi tenir compte du temps nécessaire à la gestion
de ce portefeuille clients, dans le cas d’un secteur géographique, les déplacements
devront ainsi être pris en compte, les durées des rendez-vous sont variables selon les
secteurs et la nature des clients mais présumés connus de l’entreprise.

 Repères Minicas

Cas de calibrage d’une force de vente dans le secteur de la grande distribution


1. Les exigences du marché
1 000 HM1 : – 500 HM à voir à la semaine (soit 52 visites/an)
– 500 HM à voir à la quinzaine (soit 26 visites/an)
2
7 000 SM : – 2000 SM à voir 1 fois par mois (soit 12 visites/ an)
– 2000 SM à voir tous les 2 mois (soit 6 visites/ an)
– 3 000 SM délaissés
Il y a donc : 500 x 52 + 500 x 26 + 2 000 x 12 + 2 000 x 6 = 75 000 visites/an
2. Si l’on admet qu’un commercial travaille environ 165 jours calendaires par an, une fois enlevé
5 semaines CP - 35
3
15 jours RTT - 15
(52 - 8) = 44 WE de 2 jours - 88
3 jours fériés (hors WE) -3
1 semaine formation -5
1 jour administratif/ semaine - 44
1 jour de réunion/mois - 10

1. HM : hypermarchés.
2. SM : supermarchés.
3. RTT : Réduction du Temps de Travail.
48 ☞
Configurer l’organisation commerciale

☞ 3. Calculer le nombre de visites par jour (N) et par an (A) :


Temps de route = 0,5 heure entre chaque visite
Temps de visite = 1 heure
Temps de repas = 1,5 heure
1 journée = 10 heures
(N +1) x temps de route + N x temps d’entretien + temps déjeuner = 10 heures
– (N + 1) x 0,5 + N x 1 + 1,5 = 10
– N x (0,5 + 1) = 10 - 1,5 - 0,5
– N = 8 ÷ 1,5 = 5,33
Ce qui signifie qu’un chef de secteur peut effectuer : 5 visites/jour soit 5 x 165 = 825 visites/
an/commercial.
La taille théorique de la force de vente est donc de : 75 000/825 = 91 commerciaux.

1.2 L’évaluation du potentiel d’un secteur

La notion de potentiel pour un client est souvent évaluée de façon assez subjective
par les commerciaux. Elle est pourtant primordiale car c’est ce critère qui permet de
constituer des portefeuilles ou des secteurs de clients qui correspondront aux objec-
tifs stratégiques de l’entreprise (CA, marge, pourcentage de développement, respect
des coûts, taux de fidélisation, taux de prospection…)1. On observe que la loi de
Pareto appliquée à l’activité commerciale est très souvent respectée, c’est-à-dire que
80 % du CA est en général réalisé par 20 % des clients. L’objectif pour le manager
commercial est d’avoir une estimation plus fine.
Il faut pour cela obtenir régulièrement la mise à jour de certains critères préalable-
ment établis.
Un bon indicateur est le poids que l’entreprise représente dans les achats du client,
à croiser avec le chiffre d’affaires effectif (petit ou gros client) et le taux de crois-
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

sance de l’entreprise, ainsi que celui de son secteur d’activité.


L’analyse du portefeuille clients peut conduire aussi à la mise en place d’autres
canaux de distribution auprès de certains clients ; on abandonnera les visites trop
onéreuses, pour leur proposer des achats en ligne ou un plateau d’appel. Un toilet-
tage régulier du portefeuille clients est un geste de gestion commerciale important.

1. Il existe de nombreux travaux s’appuyant sur des modèles mathématiques qui permettent de travailler à l’op-
timisation des structures de portefeuilles clients, des quotas commerciaux et des systèmes de rémunération. Nous
renvoyons à Rouziès, 2003, 2009.
49
LA STRATÉGIE COMMERCIALE

 Repères Cas d’une activité de services aux entreprises

Secteur Paris n° 6
– Paris : 5e, 6e, 7e,13e, 14e et 15e arrondissements ;
– Boulogne
– Issy-les-Moulineaux (pépinières d’entreprises)
Potentiel du secteur
– forte concentration dans le secteur tertiaire ;
– forte densité d‘administrations ;
– beaucoup d‘hôpitaux parisiens et de cliniques ;
– sièges sociaux d’entreprises ;
– beaucoup de transferts de sites de Paris vers Issy-les-Moulineaux.
Portefeuille d’affaires actif
– dossiers déjà engagés en négociation ;
– prospects identifiés/à suivre/ à relancer.
Top 50 des + gros prospects
– qualifié et suivi (entreprises > 200 personnes).
Fichiers d’entreprises actifs
– 3 fichiers d’entreprises qualifiés (Kompass, CCI, Coface) ;
– total : environ 1 500 entreprises.

1.3 L’équilibre des secteurs

Il s’agit de projections complexes mais à fort enjeu car ce potentiel pèse beaucoup
sur la performance du commercial. La notion de perception d’équité est primordiale
dans l’engagement que les vendeurs ont dans leur travail (Darmon, 2001). C’est aussi
un antécédent important de la satisfaction au travail. Et l’on sait que l’engagement
comme la satisfaction sont des vecteurs de la performance… Les modifications de sec-
teurs sont donc à conduire avec beaucoup de pédagogie et en douceur (voir figure 2.9).

50
Configurer l’organisation commerciale
Philippe
76 76 Philippe
René
50 14 50 14 René
27 Christophe 27
29 22 61 29 22 61 Christophe
28 Céline 28
35 53 35 53 Céline
56 72 45 Sophie 56 72 45
Sophie
44 49 41 Benoît 44 49 41
Benoît
37 18 37 18
Gérard Vincent
85 36 85 36
79 Christiane
79
86 86 RECRUTEMENT
Vincent

Organisation Force de Vente – Ouest Organisation Force de Vente – Ouest


situation à 9 commerciaux Etape intermédiaire à 8 commerciaux

76 Philippe
50 14
27
René

29 22 61 Christophe
53 28
35
56 72 45 Sophie
44 41
49 Benoît
37 18
36 Céline ou embauche
85 79
86 Vincent

Organisation Force de Vente – Ouest


projection idéale à 7 commerciaux

Figure 2.9 — Réorganisation en deux temps des secteurs commerciaux


d’une région commerciale

1.4 La bonne délimitation des secteurs

Qu’il s’agisse de secteurs d’activité ou de portefeuilles nominatifs, il est essentiel


de les définir très précisément. Les limites sont souvent marquées, dans le cas de
secteurs géographiques, par des frontières naturelles (rivières, ponts…) ou poli-
tiques (départements, arrondissements). Cette définition est un peu plus complexe
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

quand il s’agit de portefeuilles de prospects, surtout dans le cas d’entreprises multi-


sites. L’arbitrage du manager commercial peut être parfois l’ultime recours, on y fait
appel de façon fréquente dans le cas de points de vente où seules des règles parfois
assez floues et non écrites régissent la répartition des chalands entrant dans le maga-
sin. Moins les règles seront explicites, plus les répartitions se feront par ajustements,
avec le risque de s’exposer à des comportements peu éthiques et conflictuels, puis-
que, par nature, les revenus des commerciaux (par le biais des atteintes d’objectifs)
sont en jeu.

51
LA STRATÉGIE COMMERCIALE

2 Les définitions de missions

Les missions doivent être clairement décrites et respectées dès le recrutement. Il faut
veiller à une bonne adéquation entre les compétences du commercial et son emploi pour
éviter l’erreur de recrutement. Enfin, l’entreprise peut externaliser tout ou partie de sa
force de vente, pour des surcroîts d’activité ou par désir d’alléger ses charges fixes.

2.1 La description du poste

Pour chaque niveau de la force de vente, il faut établir :


– le rôle ou la mission principale ;
– les missions repères ;
– le rattachement hiérarchique.

 Repères Brief d’une petite annonce pour un chef


de secteur dans les solutions d’impression
Le rôle et les missions du chargé de clientèle
Rôle
– développer du nouveau CA pour l’entreprise.
Missions
– vendre et revendre ;
– être présent sur le terrain ;
– être gestionnaire et organisé ;
– véhiculer l’image et les valeurs de l’entreprise ;
– informer, communiquer.

La communication se charge ensuite de rendre l’annonce plus attractive, on


retrouve les représentations classiquement véhiculées dans les médias.
Spécialiste international de la valorisation des minéraux, le Groupe Imerys
(CA 2009 : 2,8 milliards d'Euros, 17 016 collaborateurs) est présent dans
47 pays.
Filiale du Groupe, Imerys TC (CA 2009 : 412 millions d'Euros, 1620 collaborateurs
sur 19 sites) est reconnue au travers de ses activités Toiture et Structure en tant
que leader des produits Terre Cuite (briques, tuiles, conduits de fumée).

Responsable de secteur H/F


NOS MÉTIERS : RECRUTER, FORMER, ACCOMPAGNER VERS L’EMPLOI DURABLE
(59, 62) Nous recrutons :
4 coordinateurs Emploi Formation (H/F)
Autonome dans votre organisation, vous êtes responsable du développement 1 poste secteur BTP Bas-Rhin CDI (réf RECRUT’BTP 67)
de votre secteur. Vous menez à bien la négociation des affaires auprès de
Pour en savoir plus sur Imerys
l’ensemble des acteurs professionnels du bâtiment : distributeurs, entreprises,
1 poste Travail Temporaire d’Insertion Bas-Rhin CDI (réf ETTI OPTION 2i 67)
et nos offres d’emploi, rendez
vous sur prescripteurs. Vous vous appuyez sur la structure commerciale et marketing 1 poste secteur BTP Haut-Rhin CDD 1 an (réf RECRUT’BTP 68)
www.imerys.com de votre région. Vous êtes responsable de votre budget commercial et marketing. 1 poste secteur INDUSTRIE et INTERPRO Haut-Rhin CDD 1 an (réf INDUS 68)
www.imerystc.com De formation commerciale ou technico-commerciale supérieure (ESC, DUT,
BTS), vous avez une expérience réussie de 5 à 10 ans de la vente et/ou de la Vous assurez la prospection, le suivi commercial et détectez les besoins des entreprises.
Pour saisir cette opportunité,
merci d’envoyer votre
prescription. Entreprenant et autonome, vous aimez travailler en équipe. Par Vous organisez et mettez en place le recrutement, les parcours de formation des
candidature (CV + LM et
votre sens des contacts, vos compétences techniques et vos capacités salariés, ainsi que leur accompagnement socio-professionnel.
prétentions) sous la commerciales, vous saurez convaincre vos interlocuteurs. Votre réussite vous
référence LY3156 à notre conseil permettra d'évoluer au sein de nos équipes commerciales et/ou marketing.
Vous avez un niveau BAC+2 et une première expérience professionnelle.
KURIBAY HR CONSULTING Nous vous proposons salaire fixe + bonus + participation + intéressement +
Votre connaissance du tissu économique local, votre rigueur, votre enthousiasme
26 rue Bellecordière
voiture de fonction.
et votre aisance relationnelle seront les atouts de votre réussite.
69002 LYON
s.jankowski@kuribay.fr indispensable Rémunération annuelle selon expérience de 24 à 27 K€ + avantages
Kuribay vous contactera sous
aux entreprises, (véhicule de service, tickets restaurant).
3 semaines si votre candidature
est retenue. indispensable Candidature en indiquant la référence à contact@indibatp.com ou par courrier :
à l’emploi.

52
Source : Imerys Terre cuite, annonce parue dans Régions Job, avril 2010 ; Indibatp.
Figure 2.10 — Exemples de petites annonces pour commerciaux
Configurer l’organisation commerciale

2.2 L’organisation de l’activité du commercial

Le métier du vendeur s’organise autour de la rencontre avec le client, en présentiel,


mais aussi au téléphone ou encore via Internet. Une gestion du temps rigoureuse est
impérative pour éviter les dérives vers des tâches agréables mais sans grande valeur
ajoutée, ou encore le contact avec des clients sympathiques mais sans utilité.
Le manager commercial est celui qui aide le commercial à s’organiser dans son
travail avec quelques critères, qui peuvent être très nombreux et très sophistiqués.
Les plus simples et souvent pris en compte sont :
– le nombre de visites ou le nombre de contacts clients avec une durée et une orga-
nisation du temps type ;
– le nombre de visites ou le nombre de contacts prospects avec une durée et une
organisation du temps type ;
– le temps administratif ;
– le temps de déplacement et de restauration ;
– le temps de formation ;
– le temps de coordination/concertation.

L’organisation physique est donc pensée pour rationaliser au mieux l’activité.


Cette organisation peut se porter sur le périmètre du secteur et la façon de le parcou-
rir. Si le réseau des clients est assez dense, le commercial gérera une tournée « en
marguerite », c’est-à-dire qu’il revient tous les soirs à son domicile, si celui-ci est
situé au centre. Si le secteur est plus grand et nécessite des rendez-vous à heure et
fréquence fixes, le commercial peut organiser sa tournée « en escargot », qui tous
les soirs l’éloigne un peu plus de son domicile, les soirées se passant à l’hôtel. Enfin,
en cas d’activité liée au transport (cas de la vente de pneus : les clients sont des
sociétés de transport ou à forte flotte de camions, implantées le long de nationales),
le secteur s’organise autour d’un grand axe routier comme une route nationale.
Là encore, l’éloignement est plutôt hebdomadaire pour éviter les retours trop
fréquents.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

2.3 Le recours à l’externalisation de la force de vente

De plus en plus d’entreprises cherchent à externaliser leurs coûts et à se recentrer


sur ce qu’elles analysent comme leur cœur de métier. La vente participe de cette
tendance avec le recours à des forces de vente externalisées. L’objectif est de rendre
variables les coûts commerciaux, à l’heure où les changements économiques peu-
vent avoir des impacts forts sur la stabilité de l’activité.
Les entreprises ont ainsi recours classiquement à des forces de vente externalisées
lors de pics d’activité, comme au moment du lancement d’un nouveau produit, ou
sur des missions peu ou mal maîtrisées dans l’entreprise.
53
LA STRATÉGIE COMMERCIALE

On peut identifier quatre grandes opportunités pour le recours à l’externalisation


(Leroux, Peretti, 2007) :
– le projet de pénétrer un nouveau canal ou un nouveau secteur de distribution (cas
HP dans le Repères ci-après) ;
– le lancement d’un nouveau produit (cas Candia dans le Repères ci-après) ;
– en cas de forte saisonnalité (comme le pic de l’été pour les ventes de glaces) ;
– pour permettre à une entreprise en phase de démarrage de doper sa croissance et
sa notoriété.

La France est un des pays d’Europe faisant le moins appel à l’externalisation


(29 % des entreprises selon le Baromètre Outsourcing 2008 Ernst & Young1).
Si les coûts sont variables et maîtrisables, la réussite est au rendez-vous à certaines
conditions :
– choisir le bon prestataire ; il faut vérifier qu’il apportera bien de la valeur à l’en-
treprise, des rendez-vous et des réunions chez les prestataires sont à prévoir ;
– en contrepartie, autoriser le prestataire à participer à l’activité de l’entreprise en
amont ;
– élaborer un contrat clair dessinant les contours précis des missions et des respon-
sabilités de chacun ;
– créer une équipe projet mixte qui pilotera l’ensemble des activités externalisées,
en partageant les informations ;
– communiquer auprès des vendeurs internes ; c’est un point stratégique pour évi-
ter les rejets et les résistances, il faut envisager des réunions ou des formations
en commun pour que les personnes se rencontrent ;
– garder la main sur le recrutement et la formation des commerciaux externes ;
– mettre en place un suivi de la performance du prestataire, avec un reporting
régulier ;
– assurer un management rapproché des forces de vente externalisées, assuré par un
manager de l’entreprise, ceci pour ne pas perdre le contrôle de l’activité sous-
traitée, et qu’elle se passe dans le respect de l’image et des valeurs de l’entreprise.

 Repères HP s’impose dans la grande distribution


avec une force de vente externalisée
Hewlett-Packard a opté en 1998 pour l’externalisation de sa force de vente. La vente indi-
recte en B2B à travers les grossistes du monde informatique constituait son cœur de métier,
et l’ambition est alors d’aborder la grande distribution, secteur dont HP ignore totalement
le fonctionnement.


1. Baromètre Outsourcing Europe 2008 – « De l’externalisation à la fragmentation : business model du
XXIesiècle ? » (www.ey.com).
54
Configurer l’organisation commerciale

☞ HP fait alors appel à CPM, prestataire du marché de l’externalisation commerciale dispo-


sant d’une connaissance pointue de la grande distribution et de la distribution spécialisée.
En dix ans, le partenariat est devenu de plus en plus stratégique. Au départ, l’équipe externe
pratiquait un référencement basique des produits, suivi par des actions de merchandising.
CPM missionne désormais 15 commerciaux sur le terrain, encadrés par 2 chefs des ventes se
partageant la France. Ceux-ci assurent environ 15 000 visites par an dans trois catégories de
points de vente et pour une trentaine d’enseignes distinctes : les magasins alimentaires.
L’équipe s’occupe également de la formation des chefs de rayons de ces enseignes.
Ce travail de pointe sur le terrain n’est possible que grâce à une collaboration rapprochée
avec les commerciaux des comptes clefs de HP. Hormis les connexions journalières, via le
système d’information commercial, entre les deux équipes, une réunion trimestrielle de
deux jours leur permet d’échanger sur leur perception du marché et de rencontrer des
membres du marketing de l’industriel.

 Repères Pour le lancement de sa nouvelle brique


de lait, Candia fait appel à des renforts
Afin de garantir à Silhouette Active une présence optimale dans les linéaires de la grande
distribution, Candia a renforcé, durant deux mois, sa force de vente avec 9 vendeurs de la
société Distriplus.
L’objectif est d’obtenir le référencement du nouveau lait Silhouette Active dans 100 % des
hypermarchés et supermarchés de France en deux mois seulement. L’équipe fournie par le
prestataire était constituée d’un chef des ventes et de 8 chefs de secteur.
La force de vente interne de Candia (qui comporte 7 chefs des ventes régionaux, 49 chefs
de secteur, 7 responsables merchandising régionaux et différents responsables du réappro-
visionnement) était capable d’assurer une présence de la marque dans 85 % des points de
vente de la grande distribution en France. Candia a donc fait appel à Distriplus pour toucher
une partie des points de vente non couverts, soit 1 200 magasins.
Le travail cumulé de la force de vente de Candia et de l’équipe de Distriplus a offert à la
marque une distribution numérique (c’est-à-dire le degré d’implantation d’un produit ou
d’une marque dans les linéaires) de 87 %, comparés à un objectif initial de 80 %.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

D’après Action Commerciale n° 293, 1er février 2009 (Chaullac, 2009).

3 Les structures commerciales


3.1 Les différents types de structures

On distingue :
– L’organisation géographique, adaptée quand la gamme de produits est homo-
gène et que les clients nécessitent des contacts fréquents et/ou sont dispersés
(services pour les bureaux, grande distribution). Elle est souvent combinée avec
d’autres variantes.
55
LA STRATÉGIE COMMERCIALE

Direction Commerciale

Dir. des Ventes Dir. Grands Clients ADV et Support

Dir. Région 1 Dir. Région 2 Dir. Région 3 Dir. Région 4

Chef de Ventes 1 Chef de Ventes 2

Responsables de secteur

Figure 2.11 — Organisation géographique d’une force de vente

– L’organisation par produits, adaptée quand les gammes de produits sont dis-
tinctes, avec particularités techniques. C’est souvent le cas dans l’industrie
quand le produit demande une certaine expertise technique ou que les DAS sont
très différents. Il faut veiller à la duplication de l’investissement temps chez le
client.

Direction commerciale

Dir. Gamme A Dir. Gamme B Dir. Gamme C Dir. Grands Clients ADV

Chef de ventes Régional 1 Chef de ventes Régional 2

Ingénieurs Commerciaux

Figure 2.12 — Organisation par gammes de produits d’une force de vente

– L’organisation par marchés ou types de clients : elle convient quand l’entre-


prise s’adresse à des marchés distincts (grandes et moyennes surfaces – GMS – et
restauration hors foyer – RHF –, ou parfumerie et GMS).

Direction commerciale

Dir. Marché Z Dir. Marché Y Dir. Marché W Dir. Grands Clients ADV et Support

Chef de ventes Régional 1 Chef de ventes Régional 2

Commerciaux

Figure 2.13 — Organisation par marchés d’une force de vente

Les entreprises font évoluer constamment leur organisation (car la structure a un


impact sur la performance) ; on note ainsi que les organigrammes se complexifient
et que la fréquence de changement est de plus en plus élevée. Le coût d’adaptation
pour les personnes est important, et doit être pris en considération avant toute déci-
sion de changement lourd.

56
Configurer l’organisation commerciale

3.2 Les évolutions des structures commerciales

On observe des évolutions structurelles dans les organisations commerciales :


– la dématérialisation de la relation avec le déplacement de la relation client vers
Internet ou la télévente, qui se traduit par une réduction des effectifs terrain ;
– la réduction des niveaux hiérarchiques ;
– l’évolution d’une organisation par produits vers une organisation par marchés ou
clients (l’entreprise orientée clients) ;
– l’évolution d’une organisation par fonctions vers des organisations matricielles
ou par projets ;
– l’émergence du Category Manager pour garantir un interlocuteur unique au
client ;
– le renforcement des structures grands comptes ou grands clients ou comptes
clefs ou Key Account Managers.

3.3 Deux métiers encore émergents

Le Category Manager (le catman) est un métier récent. C’est une personne qui
gère ce que l’on appelle une « catégorie de produits ». Par exemple, chez Mars, les
barres chocolatées, les produits destinés aux enfants, les tartinables, mais aussi les
produits que l’on trouve en linéaire, devant les caisses, ou en promo. Il est l’interface
marketing-vente à l’interne comme en externe. Son objectif est de « coller » aux
besoins des distributeurs pour leur proposer des solutions qui augmentent leurs
ventes de la catégorie en général.
Le Category Manager a deux activités distinctes :
– à l’intérieur de la société, il absorbe les stratégies marketing, les adapte et les
synthétise pour les transformer en actions pour les commerciaux ;
– à l’extérieur de la société, il partage avec les distributeurs les analyses de sa
catégorie et lui propose des stratégies shoppers adaptées pour développer son
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

chiffre d’affaires.

Le Category Management est donc un métier à mi-chemin entre le marketing et le


commercial qui nécessite capacité d’analyse, sens du relationnel et pouvoir de
conviction. Il s’agit d’un poste délicat de passeur entre industrie et commerce, celui
d’un facilitateur qui est aussi à l’aise face à un distributeur que dans une réunion de
stratégie marketing interne, et qui nécessite une double compétence marketing et
vente.
Selon les entreprises, les catmen dépendent soit du directeur du développement
des ventes, soit du directeur du marketing. Ce sont des postes à fortes perspectives
d’évolution, car ce type de poste ne touche que des collaborateurs à potentiel.

57
LA STRATÉGIE COMMERCIALE

Le responsable comptes clefs est le responsable du développement des clients stra-


tégiques, les plus « gros » clients de l’entreprise. Il doit constamment négocier les
contrats dans une perspective partenariale fiable, constituer et animer des équipes
multidisciplinaires, planifier et coordonner les différentes actions à entreprendre
pour mener à bien sa mission.
Outre des compétences indiscutables en techniques commerciales et financières,
un bon responsable grands comptes doit savoir convaincre, se poser en leader
d’équipes, se maîtriser en toutes situations et savoir les gérer, quelles qu’elles soient
(Pardo, 2004).

Conclusion

Être manager commercial, c’est être un passeur, entre la réflexion et l’action, entre
l’interne et l’externe de l’entreprise, et entre la fonction marketing et commerciale.
La transversalité est de mise, et le travail en mode projet de plus en plus courant, ce
qui requiert des compétences relevant de différents domaines, et pas seulement limi-
tées au seul périmètre commercial.
Le manager commercial n’est pas le propriétaire du client mais il en reste l’inter-
locuteur privilégié. Cette connaissance particulière, cette intimité l’autorise à inter-
venir très en amont des élaborations stratégiques, et à décliner intelligemment les
axes en actions opérationnelles auprès de ses équipes.
Il construit sa légitimité dans sa capacité motrice à décliner dans les activités
commerciales les plus quotidiennes les ambitions stratégiques de l’entreprise.

58
Chapitre
Le pilotage
3 de l’activité
commerciale

N ous sommes au cœur de la fonction de management commercial, le fameux


walk the talk cher aux entreprises, particulièrement vrai dans une fonction
où règne l’intelligence en action. La performance du management commercial
réside dans sa capacité de passage à l’action. Le résultat ne peut être vu que comme
l’aboutissement d’un processus structurant, la manière d’atteindre l’objectif étant
aussi important que l’objectif visé en soi. Le manager commercial a le devoir absolu
de s’éloigner du diktat du résultat.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Le pilotage de la performance commerciale est assuré par le manager commercial.


Une fois la stratégie élaborée et le plan d’action commerciale construit, il lui faut en
mener la déclinaison auprès de toutes les équipes commerciales, jusqu’au vendeur
de terrain.
C’est l’ensemble des actions, même les plus quotidiennes et les plus minuscules,
qui permettront de construire cette performance de façon pérenne. La vigilance est
de mise pour que les « succès » de quelques-uns n’occultent pas les efforts de l’en-
semble. Pour cela, il va falloir :
– décrire, expliquer, « vendre » des objectifs à des équipes pas toujours convaincues ;

59
LE PILOTAGE DE L’ACTIVITÉ COMMERCIALE

– piloter au quotidien cette activité diffuse et dispersée. La mise en place d’un


contrôle de gestion commercial se montre indispensable, quelle que soit la taille
de la structure ;
– mettre en place les actions correctrices le cas échéant, pour rectifier des dérives
ou pour être en phase avec les grands infléchissements stratégiques ;
– motiver, convaincre mais aussi blâmer, morigéner ;
– montrer le chemin, être exemplaire.

En un mot, il va falloir trouver le courage et l’énergie, tous les jours, de dire et de


faire. Si les comportements et le savoir-être sont essentiels, les outils sont aussi très
structurants dans cette activité de pilotage. C’est donc avec cette double perspective
des outils et des comportements que nous allons traiter, dans ce chapitre, la question
du pilotage du « système force de vente ». Trois actions sont essentielles :

Section 1 Q La fixation et la mise en place des objectifs


Section 2 Q L’animation de l’activité commerciale
Section 3 Q La mise en œuvre du pilotage de la performance commerciale

Section
1 LA DÉFI NITION ET LA MISE EN PLACE
DES OBJECTIFS

Deux principes animent cette mise en place des objectifs commerciaux : la décli-
naison et la négociation. En effet, c’est selon un processus bottom up et top down1
que se dessine le cadre de l’activité de chaque commercial. Comme la négociation
est intrinsèque au métier commercial et que les enjeux sont importants compte tenu
des modalités de rémunération de ces métiers, la négociation est de mise.

1 Qu’est-ce qu’un objectif commercial ?


1.1 Comment définir un bon objectif ?

On attribue en général à un objectif les qualités suivantes, il doit être :


– simple et précis pour se garantir de toute mauvaise interprétation par les ven-
deurs. Il existe parfois des systèmes d’objectifs qui sont de véritables « usines à

1. Nous gardons l’expression anglo-saxonne, faute de traduction française véritablement usuelle dans les entre-
prises : top down décrit le processus descendant, bottom up, le processus ascendant.
60
La définition et la mise en place des objectifs

gaz », avec des énoncés qui restent obscurs ou incompréhensibles, voire contra-
dictoires. Cela se traduit en règle générale par un désengagement des équipes
comme du management, et au retour de l’évaluation « à la tête du client » ;
– mesurable pour piloter et animer la progression des vendeurs vers l’objectif.
Rappelons qu’il n’existe vraiment de performance que mesurable. Elle est à la
fois un effort, un résultat et un succès. Les objectifs fixés doivent servir ces trois
dimensions pour jouer pleinement leur rôle : un énoncé comme « passer de 4 à
5 visites jour sur le 2e trimestre » relève de cette triple exigence ;
– accessible pour maintenir la motivation des vendeurs. En effet, le manager peut
être tenté de mettre la barre très haut pour « booster » ses équipes, on observe
souvent ce phénomène dans les périodes difficiles, ce qui est finalement assez
absurde. Or, quand l’obstacle est trop haut, il y a en général deux attitudes :
l’échec qui décourage et le contournement, évitement. Dans les deux cas de
figure, le résultat n’est pas au rendez-vous. Il faut éviter des objectifs radicaux
comme « réduire les impayés de 10 à 0 % » ;
– compatible avec la stratégie commerciale de l’entreprise. Comme la stratégie
commerciale est la déclinaison de la stratégie globale, les objectifs fixés à cha-
que vendeur sont une déclinaison de cette stratégie, et leurs résultats ont pour
but de la mener à bien. Cette mise en cohérence est très importante pour le sen-
timent d’appartenance et pour le sens qu’elle confère aux actions engagées.
Ainsi « augmenter les ventes du secteur de 5 % » est un objectif tout à fait per-
tinent si le plan d’action commerciale de l’entreprise prévoit ce développement
dans les mêmes volumes ;
– spécifique à chaque vendeur. Chaque commercial est différent, du fait de sa
personnalité, de son expérience, de ses contraintes personnelles… Il en va de
même de son environnement professionnel : ainsi, un secteur peut être plus ou
moins concurrentiel, les clients ont des évolutions différentes… Tout cela est à
prendre en compte dans la fixation des objectifs, le manager doit être capable
d’une adaptation individuelle, sans toutefois avoir de trop grands écarts à la
moyenne de l’équipe, afin de sauvegarder la cohésion ;
– gratifiant, ce qui signifie qu’atteindre cet objectif contribue à l’estime de soi et
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

à la motivation. Les théories de la motivation montrent en effet qu’il existe un


cercle vertueux de la réussite : « plus je réussis, plus je réussis » ;
– modifiable, car il faut prendre en compte l’évolution de l’environnement, même
sur une courte période. Plutôt que de neutraliser l’objectif, il faut pouvoir le faire
évoluer en concertation avec le vendeur. Si, par exemple, le plus gros client,
représentant 40 % de l’activité du vendeur sur son secteur, est mis en liquida-
tion, il faudra être capable de réviser, en cours de période, la répartition comme
le volume global du chiffre d’affaires attendu ;
– perçu comme équitable. En effet, l’activité du vendeur est sans cesse soumise à
comparaison avec le reste de l’équipe, et le sentiment d’équité perçu est un des
moteurs les plus puissants de son engagement. A contrario, avoir le sentiment de

61
LE PILOTAGE DE L’ACTIVITÉ COMMERCIALE

ne pas être traité équitablement peut être destructeur de valeur en générant de la


perte de confiance et donc une moindre motivation ;
– accepté et intégré par le vendeur, qui doit s’approprier l’objectif pour le défen-
dre et trouver la motivation pour l’atteindre.

1.2 Les grands types d’objectifs

Les objectifs peuvent être regroupés sous deux grandes rubriques :


– la création de potentiel : ce sont tous les objectifs qui contribuent au dévelop-
pement de l’entreprise, ainsi « développer les ventes de 5 % sur le premier
semestre », « augmenter le nombre de prospects actifs de 30 % » ou encore
« maîtriser la nouvelle procédure Bêta », sont des objectifs visant à la création
de potentiel de l’organisation ;
– la réduction de coûts ou de dysfonctionnements : ces objectifs s’inscrivent
dans l’amélioration du fonctionnement de l’entreprise, et sont des leviers d’amé-
lioration de l’efficience et de l’efficacité commerciales. Des énoncés comme
« diminuer ses déplacements en maintenant le même nombre de visites »,
« mieux se coordonner avec le service logistique pour réduire les retards de
livraison » relèvent de cette logique d’amélioration du fonctionnement.

On identifie, en règle générale, trois modalités d’évaluation : qualitative, quanti-


tative et financière (Savall, Zardet, 2007).
Les objectifs qualitatifs portent sur la manière de faire, l’acquisition de connais-
sances, les améliorations de comportement. On constate qu’ils sont de plus en plus
présents dans les objectifs demandés. Les managers ont compris qu’ils contribuaient
au caractère durable de la performance en jouant sur des registres comme un
meilleur climat relationnel, une plus grande éthique des affaires, une amélioration
du niveau de compétence. Il faut toutefois constater qu’ils représentent, en règle
générale, une partie très réduite de l’enveloppe globale.
On peut identifier deux freins à leur utilisation :
– la créativité exigée pour identifier des indicateurs de mesure fiables ;
– et le fait qu’ils peuvent amener à aborder des sujets estimés délicats. Ces objec-
tifs sont beaucoup plus impliquants et amènent à déborder de l’appréciation de
la seule activité. Il faut donc une volonté très forte de l’entreprise et de son enca-
drement pour les faire vivre.

Les objectifs quantitatifs sont beaucoup plus classiques, ils évaluent des volu-
mes, du temps, des kilomètres… et sont facilement adoptés par les deux parties pour
leur aspect objectif. Ils ne relèvent pas de la performance finale qui reste financière,
mais en sont des intermédiaires importants.
62
La définition et la mise en place des objectifs

Les objectifs financiers ne sont pas toujours présents car non significatifs dans
certaines activités (chef de secteur sans négociation, personne au contact sans acte
de vente directe…). On observe qu’ils ont encore la plus grande légitimité ; ainsi,
en cas d’évaluation mixte (présence des trois types d’indicateurs), ils justifient tout.
Un vendeur très performant reste encore souvent un vendeur réalisant le plus gros
chiffre d’affaires.

1.3 Les familles d’objectifs

Les objectifs peuvent aussi être répartis par famille, on peut identifier :
– l’activité : avec des objectifs quantitatifs (augmentation du CA, du volume, de
la marge…) et qualitatifs (délais de paiement, acomptes…) ;
– la stratégie : concentration sur des couples produits/segments, faire basculer un
client d’un produit A à un produit B, prospection d’une nouvelle clientèle…
– le relationnel : accroître la fréquentation des clients, accroître le nombre de visi-
teurs à la journée portes ouvertes, développer des relations avec telle cible…
– les compétences : améliorer sa conclusion dans la vente, mieux maîtriser tel
logiciel, suivre telle formation…
– l’offre : accroître le taux de transformation de certaines offres, accroître la fré-
quence ou le nombre de certaines offres pour tel segment…
– le suivi administratif : améliorer le reporting, mettre en place un check store…
– le pilotage de l’activité : mieux gérer son temps, mieux organiser ses tournées…
– la contribution à la veille commerciale : remontées d’information sur la
concurrence, sur le client…
– le comportement : ponctualité, tenue vestimentaire, taux de conflit…

Tableau 3.1 — Exemple d’objectifs qualitatifs, quantitatifs et financiers


pour un chef de vente régional
Objectifs Évaluation Évaluation Évaluation Modalité
qualitative quantitative financière d’évaluation
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Jours d’accompagnement 50 jours dans Agenda


terrain des chefs de l’année
secteurs

Animation de réunion Rigueur de l’ordre Observation in


du jour situ par N +1
Qualité des supports Mise en ligne des
Qualité du dialogue comptes rendus et
Respect des timings des supports

Formation et intégration Mobilisation Nombre de Niveau de Agenda


du nouveau chef de des supports journées performance Entretien de fin de
secteur Dijon (CS) de formation du CS après 3 période d’essai
Confirmation du mois et 6 mois Résultats du CS
CS après période
d’essai

☞ 63
LE PILOTAGE DE L’ACTIVITÉ COMMERCIALE

☞ Accompagnement sortie Absence d’incident Nombre de Maintien Agenda


Durand (CS Besançon) Qualité relais journées performance Système
d’accompagnement du secteur d’information RH

Remotivation Martin Attitude en réunions Nombre de Retour à la Performance CS


(CS Mâcon) régionales journées performance Plainte client
Comportement d’accompagnement Système
chez le client Nombre de d’information RH
journées d’absence
du CS

Développement CA Évaluation CA Suivi du CA


si CA > 6 800 K*
– variable sur salaire brut
annuel 4 %
si CA > 5 800 K*
– variable sur salaire brut
annuel 3 %
si CA > 5 600 K*
– variable sur salaire brut
annuel 2 %
si CA > 5 400 K*
– variable sur salaire brut
annuel 1 %

Respect budget régional Évaluation des Suivi du budget


dépenses : écarts
Si écart < 5 %
– variable sur salaire brut
annuel 3 %
Si écart > 5 et < 8 %
– variable sur salaire brut
annuel 2 %
Si écart > 8 %
–0

Développement avec Nombre de bons SI commercial


grands comptes : de commande
Si 20 affaires signées – 3 % signés
Si 15 affaires signées – 2 %
Si 12 affaires signées – 1,5 %
Si 10 affaires signées – 1 %

Les calculs se font hors acquisitions.


– Les montants du variable seront versés au prorata temporis du temps de présence sur l’exercice du salarié,
dans la mesure où le salarié est toujours présent au 1/10/2011.
– Les calculs sont réalisés hors reprises des provisions.
– Le bonus sera payé en janvier 2012 au plus tard.
– Le paiement du bonus ne sera effectué que si le salarié atteint les planchers définis ou au-dessus.
– La non-atteinte des objectifs qualitatifs peut entraîner une diminution du bonus quantitatif jusqu’à hauteur
de 50 %.

64
La définition et la mise en place des objectifs

2 Le processus de négociation des objectifs


2.1 Vendre les objectifs/donner du sens

Les objectifs sont annexés au contrat de travail, et le fait, pour un commercial, de


ne pas les atteindre peut être un motif de sanction. Il est même possible, lorsqu’une
entreprise rencontre de graves difficultés, qu’elle invoque cette raison pour licencier
son collaborateur.
La qualité et l’appropriation des objectifs sont optimisées quand le commercial
participe à leur définition. Le manager va donc l’impliquer dans la fixation de leurs
propres objectifs (le principe de la DPPO : direction participative par objectifs).
Concrètement, le commercial est invité à opérer un travail d’analyse de son acti-
vité et de son portefeuille clients, afin de formuler, sur cette base, un ensemble
d’objectifs. Parallèlement, le même travail est réalisé par son responsable hiérar-
chique direct. Ensuite, les deux parties vont confronter leur vision des choses lors
d’une séance qui aura tout d’une vraie négociation. Le manager va chercher à entrer
dans le cadre prescrit par la stratégie commerciale et le commercial va chercher à
les ramener vers le bas. Le manager et ses commerciaux s’installent donc dans un
dispositif dit de « navette » : soit la proposition d’objectifs du commercial est réajus-
tée par sa hiérarchie – « navette remontante » –, soit, au contraire, le N +1 soumet
une offre, qui est ensuite négociée avec le vendeur – on parle alors de « navette des-
cendante ». Rappelons que stipuler des objectifs, c’est y associer la mise à disposi-
tion de moyens (voir figure 3.1).

Une compréhension
Des attentes claires
commune
Planification en terme de contribution
des priorités et des objectifs
des individuelle et collective
de l’organisation
performances
Quel est mon rôle ?
Vers où nous dirigeons-nous ?
Reconnaissance
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Feed back
et
continu
développement
Se donner les moyens
Améliorer l'engagement
via un feedback et un
grâce à une reconnaissance
apprentissage
significative et à Entretien de
régulier
des activités ayant du sens performance
De quoi avons-nous besoin
Qu’ai-je à y gagner ?
pour réussir ?

Termignon, 2003.
Figure 3.1 — Les éléments clefs du processus de management des objectifs
commerciaux
65
LE PILOTAGE DE L’ACTIVITÉ COMMERCIALE

Néanmoins, deux paramètres renforcent la difficulté de l’exercice : l’incertitude


forte de l’environnement rend la tâche ardue et beaucoup plus aléatoire, et la pres-
sion des actionnaires se fait sentir avec des exigences fortes d’augmentation des
résultats. Ces deux facteurs conjugués font que les objectifs commerciaux sont plus
souvent fixés en top down, non négociables et souvent perçus comme irréalistes.

 Repères Les directions commerciales sous pression


face au processus budgétaire
La pression accrue : « Ça, c’est le casse-tête et la partie cauchemardesque; la distribution
des objectifs, ça, c’est clair, on y est tous confrontés […] Si vous voulez, les objectifs commer-
ciaux sont fixés à différents niveaux. Au départ, c’est le comité exécutif qui va définir ce que
devront être les objectifs commerciaux globaux au niveau international et ensuite on a un
redispatching qui se fait au niveau des différentes entités. Au niveau des entités, il y a tou-
jours un “Monsieur Plus” qui en rajoute un peu comme partout d’ailleurs. […]. Et en fait, à
l’arrivée au niveau des commerciaux eux-mêmes, c’est toujours le même quelle que soit la
boîte, c’est inatteignable. » (Services)
Des objectifs considérés comme inatteignables : « Une croissance à deux chiffres et une
croissance supérieure aux catégories sur lesquelles vous êtes présents. […] C’est le principe
de base de la direction générale […] Après ça laisse quand même une certaine latitude mais
c’est quand même assez ambitieux et il faut que ça rentre là-dedans. » (Cosmétiques)
Extraits d’entretiens approfondis menés auprès de directeurs commerciaux travaillant
dans de grandes entreprises appartenant à des secteurs d’activité variés (environnement,
produits d’hygiène, pharmacie, informatique, bureautique, transports, spiritueux, etc.), uti-
lisant une procédure formelle de fixation des objectifs et d’évaluation des performances.
Source : Besson, Löning, Mendoza, 2009.

2.2 L’enjeu d’animer une équipe, pas des individus

Il faut rappeler qu’animer une équipe, c’est créer une synergie entre tous les
membres de l’équipe dans le respect des différences de chacun. Le manager
commercial doit, pour ce faire, parfaitement connaître chacun de ses collabora-
teurs, et adapter les objectifs de façon à les rendre équitables (ce qui ne signifie
pas : identiques).
Le premier paramètre est l’expérience du vendeur :
– on attend d’un vendeur débutant qu’il exprime des qualités de base nécessaires
à un vendeur puis ensuite une bonne adaptation et enfin des résultats ;
– le vendeur junior est jugé sur ses résultats mais aussi son adaptation à l’entre-
prise et son apport à l’équipe ;
– le vendeur confirmé est également soumis à l’exigence de résultats mais en
bénéficiant de beaucoup plus d’autonomie.

66
La définition et la mise en place des objectifs

D’autres règles permettent de gérer les objectifs d’une équipe :


1. Ne pas créer de trop grands écarts dans les performances demandées, ceci afin
de préserver la cohésion de l’équipe.
2. Communiquer les objectifs à toute l’équipe ; il est indispensable de travailler
dans la plus grande transparence, il y va de la confiance accordée au manager.
3. Donner des objectifs toujours modérés la première année, l’intégration est un
enjeu important et coûteux, mieux vaut se donner un peu de temps.
4. Manifester une volonté d’encouragement pour les personnes impliquées et loya-
les même si leurs résultats bruts ne sont que moyens.
5. Remotiver de façon musclée le commercial ayant mauvais esprit en lui donnant
des objectifs à la hausse.
6. Fixer les objectifs les plus hauts aux meilleurs de l’équipe, sans trop les éloigner
de la moyenne de l’équipe, tout en préservant une certaine stimulation et en
reconnaissant leur compétence. On peut aussi envisager d’élargir leurs tâches à des
missions autres : encadrement de stagiaires ou d’apprentis, participation à un groupe
projet de l’entreprise…
7. Être à l’écoute du commercial qui a un problème personnel et dont l’activité
s’en ressent.
Le dernier volet du processus de la fixation des objectifs est la construction du
budget commercial.

3 Le processus budgétaire
3.1 Du prévisionnel des ventes au budget commercial

Le prévisionnel des ventes est un document qui indique la quantité d’articles que
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

la société pense vendre au cours d’une période donnée.


Le but est que l’écart entre le prévisionnel des ventes et le chiffre d’affaires effec-
tif soit le plus petit possible car un bon prévisionnel des ventes permet à l’entreprise
de planifier sa production et donc d’optimiser la gestion de ses stocks et ses délais
de livraison.
À plus long terme, il permet à l’entreprise d’estimer son chiffre d’affaires annuel
et d’élaborer son budget pour l’année à venir. Le budget traduit en chiffres la stra-
tégie et les ressources qui y sont associées. Les enjeux du prévisionnel ne sont pas

67
LE PILOTAGE DE L’ACTIVITÉ COMMERCIALE

que financiers, ses répercussions sur l’activité du service commercial sont nom-
breuses. On peut retenir plus particulièrement que :
– c’est à partir des prévisions de vente que sont définis les objectifs commerciaux
quantitatifs et financiers ;
– une bonne gestion des stocks suppose une parfaite connaissance des clients que
les commerciaux sont donc amenés à garder à jour.

C’est le manager commercial qui synthétise ces différentes informations. Deux


grandes méthodes cohabitent :
– la première, fondée sur l’historique des ventes, est utilisée par près de 80 % des
entreprises grâce à sa simplicité. L’entreprise peut ainsi prévoir le volume d’af-
faires en appliquant des coefficients aux chiffres des périodes antérieures ;
– la seconde méthode, dite « explicative », réclame la collaboration de l’ensemble
des services de l’entreprise. Elle réunit les services marketing et commercial qui
feront l’état de l’ensemble des actions envisagées : opérations de marketing
direct, actions promotionnelles, animation de réseau, salons… Ce peut être aussi
une très bonne occasion de communiquer avec le service production et/ou le
service logistique.

À partir du prévisionnel des ventes, chacun établit son budget. Le budget est
ensuite toute l’année le fil rouge de l’activité commerciale : on est « en retard sur le
budget », ou « dans le budget », ou bien encore « en avance sur le budget ». C’est
donc l’occasion de féliciter les équipes, de les encourager ou, au contraire, de tirer
la sonnette d’alarme.
L’exercice budgétaire réclame des compétences de gestionnaire et permet de véri-
fier le potentiel de chaque commercial.
Il est demandé dans beaucoup d’entreprises, au middle management (chef des
ventes) de fournir le chiffre d’affaires attendu chaque mois, les coûts qui y seront
associés (frais de déplacement, de restauration, cadeaux de fin d’année), et donc la
marge correspondante.

Section
2 L’ANIMATION DE L’ACTIVITÉ COMMERCIALE

Même dans un contexte de forte incertitude, avec la pression accrue des action-
naires et des objectifs qui peuvent être considérés comme difficiles à réaliser, le
manager commercial doit tout mettre en œuvre pour que ses équipes se rapprochent
des résultats attendus. Pour cela il peut mobiliser un dispositif d’animation avec plu-
sieurs leviers : la rémunération, les incentives et le pilotage de la performance.
68
L’animation de l’activité commerciale

1 La rémunération/rétribution
1.1 Le salaire fixe

Le système de rémunération doit être à la fois motivant pour les vendeurs et ren-
table pour l’entreprise. Sans oublier qu’il est possible d’en faire un outil de mana-
gement si l’on opte pour une part de variable collectif.
Le salaire fixe sécurise et, de ce fait, dans un contexte d’incertitude forte, il est
de plus en plus exigé des salariés commerciaux, tout particulièrement chez les
jeunes entrants.
Si le salaire fixe rétribue un niveau de responsabilité et la maîtrise d’un poste de
travail, la partie variable rémunère les résultats et la performance.
Globalement (enquête Maesina Hewitt, 20081), et depuis déjà des années, le niveau
du variable tend à diminuer dans la rémunération des commerciaux, quand, dans le
même temps, les rémunérations incluent de plus en plus souvent cet élément
variable.
Il faut également tenir compte de la répartition de la performance commerciale entre
plusieurs services des entreprises (centre d’appel, Internet, le marketing direct…).

1.2 Le salaire variable

Trois questions se posent. Que doit représenter le variable dans la rémunération de


vos commerciaux ? Sur quels types de critères doit-il reposer ? Comment définir la
courbe d’attribution ?
Pour garder sa fonction de motivation, le variable doit varier d’une année sur l’autre,
sinon, il risquera d’être vu comme un fixe par les tribunaux en cas de litige.
Le pourcentage dépend du secteur, de la culture de l’entreprise, de sa taille ou
encore du type de poste occupé et du niveau de responsabilité des vendeurs. Plus
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

une vente est simple, plus la part de variable est normalement importante. Les direc-
teurs commerciaux ont en moyenne 24 % de leur rémunération globale variable,
chiffre qui est de 15 % pour les chefs des ventes régionaux (enquête Maesina
Hewitt, 2008).
Longtemps basée sur le CA et individuelle, la part variable intègre de plus en plus
souvent des objectifs qualitatifs et est associée à des objectifs collectifs. Une bonne
façon de pouvoir additionner des critères quantitatifs et qualitatifs est de passer par
l’intermédiaire de points (voir l’encadré ci-après). Le mode de calcul doit, comme
les objectifs, rester simple et compréhensible, sous peine de voir les commerciaux
se désengager.

1. L’enquête Maesina Hewitt a sondé les DRH de 240 entreprises représentant 7 500 collaborateurs aux fonc-
tions commerciale et marketing. 69
LE PILOTAGE DE L’ACTIVITÉ COMMERCIALE

La progression de la rétribution peut être en marches d’escalier, avec des effets de


seuil, ou en courbe avec des attributions lissées. La progression peut être arithmé-
tique ou exponentielle (avec des effets démultiplicateurs). Le choix dépend souvent
d’une bonne connaissance de l’activité et des équipes. L’enjeu est de maximiser la
performance globale de l’équipe ; différents critères peuvent intervenir comme le
degré d’homogénéité des résultats, ou encore le coût d’un euro gagné.
Il est possible d’introduire des accélérateurs dès que les objectifs sont atteints ;
pour motiver de la surperformance, on applique par exemple des coefficients multi-
plicateurs à toute affaire supplémentaire.

 Repères Mode de calcul d’un dispositif


de classement des commerciaux
L’objectif : classer les commerciaux en mettant à l’honneur les 8 premiers.
Le principe :
Fondé sur le volume d’affaires (évaluation quantitative)
Avec la volonté de valoriser les « belles affaires » quand une action remarquable est réalisée
(à l’appréciation du directeur commercial)
Le dispositif :
Construire un barème de points calculé sur le CA réalisé chaque mois
Le choix est de différencier les meilleurs en créant des paliers plus importants (2 points)
entre les 3 premiers, et moindre ensuite (1 point) entre les suivants
Barème retenu :
1er 2e 3e 4e 5e 6e 7e 8e
10 pts 8 pts 6 pts 5 pts 4 pts 3 pts 2 pts 1 pt
L’affaire exceptionnelle (évaluation qualitative)
Chaque mois un bonus de 5 pts récompense une affaire ou une action particulièrement
remarquable ;
Le résultat est communiqué mensuellement à l’ensemble de la force de vente sous cette
forme :
Repère mode de calcul/affaire exceptionnelle
250,000.00 €

200,000.00 €

150,000.00 €

100,000.00 € 10
8
6
50,000.00 € 5
4 3 2 1
0.00 €
.

A.
.

.
S.
.

.L

.
.

.B
M

N
.M
JP

V.
B.

S.

J.
E.

C
M

70
L’animation de l’activité commerciale

Quel qu’il soit, le dispositif doit être compris et accepté par les vendeurs, dont la
perception peut être assez différente de l’un à l’autre. C’est au manager commercial
d’effectuer la synthèse et d’individualiser cette information auprès de chacun des
membres de son équipe.

 Repères Que dit le droit du travail ?

La rémunération est un élément essentiel du contrat de travail. Elle doit être déterminée ou
déterminable. S’agissant d’une rémunération variable, le plus souvent, elle n’est que déter-
minable, c’est-à-dire que son montant est lié à l’application d’une formule définie dans le
contrat. Cette formule doit être précise et reposer sur des critères objectifs, indépendants
de la volonté de l’employeur.
La clause de rémunération variable comprend ainsi trois éléments essentiels : la formule de
calcul, la méthode de définition des objectifs, et les conditions et modalités de règlement de
cette rémunération. Il n’est pas interdit de prévoir, dans le contrat, que les objectifs seront
annuellement fixés par une décision unilatérale de l’employeur. Cette formule implique que
le salarié n’a pas à accepter ces objectifs. Mais il est indispensable qu’ils soient définis en
fonction de données objectives. ils doivent être sérieux et réalisables. Il n’est pas inutile
d’écrire qu’ils seront définis chaque année en fonction, par exemple, de la situation du mar-
ché ou des résultats passés de l’entreprise. En revanche, il faut savoir que la contractualisa-
tion de la rémunération variable a pour effet de la figer. Prévoir dans le contrat que le salarié
aura droit à une rémunération variable oblige nécessairement l’employeur à la payer, même
si les éléments de calcul de cette rémunération ne sont pas prévus. Il appartiendra au juge,
le cas échéant, de « découvrir » le montant de cette rémunération, au regard des éléments
portés à sa connaissance : pratiques antérieures, pratiques à l’égard d’autres salariés.
Il faut savoir qu’il existe d’autres outils juridiques que le contrat pour mettre en place un
système de rémunération variable. Ainsi, l’employeur peut unilatéralement prendre l’enga-
gement de verser aux commerciaux une rémunération variable en définissant les critères
objectifs de calcul et les objectifs à atteindre. Cet engagement doit être écrit, via une note
de service ou un plan de commissionnement porté à la connaissance des salariés (mais sur-
tout pas par un avenant, qui contractualiserait cette rémunération). Il faut également pré-
ciser que cet engagement est applicable pendant une durée déterminée. Ainsi, à l’issue de
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

ce délai, l’employeur peut librement redéfinir l’ensemble des paramètres.


Toute modification doit faire l’objet d’un accord entre l’employeur et le salarié, ce dernier
n’étant pas tenu d’accepter les modifications qui lui sont proposées. Au demeurant, s’il
refuse, cela ne signifie pas qu’il perd le droit de percevoir une rémunération variable. Ce
droit demeure ; le calcul de la rémunération se fait alors sur la base du dernier mécanisme
accepté par les deux parties.
En cas de refus du salarié, l’employeur peut soit renoncer à cette modification, soit licencier
le salarié, bien que le seul refus ne constitue pas un motif réel et sérieux. L’employeur doit
alors avoir un motif d’ordre économique (par exemple l’accroissement de la concurrence
qui entraîne des difficultés économiques et rend nécessaire une adaptation de la rémuné-
ration) ou un motif d’ordre personnel, comme le refus abusif du salarié, l’abus devant être
caractérisé.
D'aprés Me Jean-Marie Léger, avocat associé chez Avens Lheman & Associés,
in Action Commerciale n° 291, 1er décembre 2008.
71
LE PILOTAGE DE L’ACTIVITÉ COMMERCIALE

Le profil psychologique des commerciaux garantit une appétence pour les objec-
tifs et la compétition. La part variable du salaire, sur la base d’objectifs individuels
et collectifs, est déjà très stimulante en soi pour ces populations (le transfert à
d’autres métiers de l’entreprise n’est pas dans l’évidence). La mise en œuvre d’une
politique de stimulation et d’actions d’incitation (les incentives) entretient ce désir
de se dépasser de façon plus durable et efficace.

2 Les incentives1

Les incentives doivent concerner des objectifs spécifiques dont la réalisation va


au-delà des objectifs initiaux. Il existe différentes techniques :
– le challenge : tout le monde peut gagner la ou les dotations en jeu pour peu qu’il
atteigne les objectifs fixés individuellement ;
– le concours : seuls les vendeurs les mieux classés gagnent ;
– le jeu : il n’a pas de dotation et reste sur une dimension d’animation ludique, il
est à mettre en œuvre ponctuellement à l’occasion des réunions par exemple ;
– les honneurs : une forte marque de reconnaissance est souvent un formidable
stimulant.

2.1 Le concours ou le challenge

Le choix entre concours et challenge dépend surtout du budget et du choix de la


direction de vouloir distinguer seulement quelques commerciaux ou l’ensemble de
la force de vente.
Le challenge (ou le concours) doit donner envie aux collaborateurs de participer
(Poujol, Fournier, 2007). Pour cela, sept critères doivent être respectés :
1. Définir l’objectif de l’opération : s’agit-il d’un challenge tactique (déstoc-
kage) ou stratégique (conquérir une nouvelle cible) ?
2. Déterminer les moyens de mesure : la règle doit être simple et compréhensible
par tous. Chaque commercial doit pouvoir, en temps réel, savoir où il en est. Cette
appropriation au quotidien est une source du succès.
3. Définir clairement les participants : pour éviter toute ambiguïté ou frustration
par la suite.
4. Planifier la période et la durée : tout dépend de l’objectif mais aussi de la
population de vendeurs. Ainsi, les commerciaux sédentaires passent peu de temps
avec chaque client. La communication téléphonique est formatée et ne dure que

1. Nous gardons le terme anglais car il est le seul utilisé dans les entreprises de façon courante.
72
L’animation de l’activité commerciale

quelques minutes. À cela peut s’ajouter la multiplication des références commercia-


lisées. Si les challenges durent entre quelques semaines et quelques mois lorsque
l’on cible une force de vente itinérante ou un réseau de revendeurs ; en revanche ils
doivent être beaucoup plus courts dès lors que l’on s’adresse à des commerciaux
« assis », sur des formats d’une journée (on parle d’opération « flash » ou de
« sprint »), d’une semaine ou d’une quinzaine au plus. On peut aussi opter pour un
mix entre le long terme et des opérations courtes.
5. Choisir les dotations : l’argent est classique et efficace ; mais imposable et en
doublon avec la rémunération variable. Les cadeaux doivent être bien choisis. Pour
convenir à tout le monde, la plus intéressante est la formule du catalogue cadeaux
ou des chèques cadeaux, qui permet aussi d’impliquer les conjoints. Les voyages
sont parfaits pour susciter la part de rêve pendant le concours, avec un effet démul-
tiplié sur l’ambiance et la cohésion pendant le voyage. Il peut être frustrant pour les
conjoints…
6. Nommer un animateur/gestionnaire du concours : il sera le gardien des
résultats et coordonnera l’ensemble de l’animation. Pour que le challenge soit cou-
ronné de succès, il doit être développé en toute transparence avec l’ensemble des
services. Certains seront simplement informés, d’autres vont devenir des relais de
l’opération, d’autres encore seront pleinement parties prenantes du concours (avec
la DRH par exemple, si le concours mobilise les savoirs acquis lors d’une formation
récente). Les managers intermédiaires doivent devenir un rouage essentiel : lors de
la préparation, lors de l’animation ou encore de la validation des résultats.
7. Organiser la communication avant-pendant-après : la récurrence entraîne la
lassitude des participants. Il est donc nécessaire de surprendre et de faire du chal-
lenge un véritable événement. Comment ? En soignant le lancement, la dotation, la
façon de mobiliser les équipes, la thématique, les supports de communication, la
façon de révéler les résultats, le choix des boosters. Animer le challenge demande
du temps et l’implication de la direction commerciale ne s’arrête pas à son coup
d’envoi. Pendant son déroulement, il importe de maintenir le lien avec les parti-
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

cipants. Le Web est l’outil idoine, à condition que les animations soient menées de
façon dynamique et constamment mises à jour.

 Repères Exemples de challenges commerciaux

Pages jaunes fait décoller ses ventes avec la Flight Academy


En février 2007, les 800 télévendeurs et 100 managers des centres d’appels de Pages Jaunes
ont reçu un welcome pack, ressemblant à un plateau-repas d’avion pour présenter la cam-
pagne de motivation mise au point par l’agence Vaudoo. À l’intérieur : une plaquette
« consignes de sécurité » pour décoder la mécanique et le calendrier de l’opération, des
goodies évoquant Bali, la destination du voyage à gagner. Ce challenge de cinq mois, inti-
tulé Flight Academy, a été conçu pour encourager les commerciaux sédentaires de la

☞ 73
LE PILOTAGE DE L’ACTIVITÉ COMMERCIALE

☞ dizaine de centres d’appels à privilégier la vente de nouveaux produits publicitaires et à


élargir leur prospection. Concrètement, ce challenge, à la fois individuel et collectif, compre-
nait un championnat interagences et une coupe des meilleurs télévendeurs par centre.
Au total, les centres d’appels se sont confrontés lors de sept tournois sportifs de trois
semaines chacun. Un coach sportif prenait alors la parole sur le site relayant l’opération. Les
110 meilleurs télévendeurs se sont envolés courant novembre pour une semaine à Bali. Les
autres ont transformé leurs points en cadeaux dans une boutique en ligne. Coût de l’opé-
ration : 70 000 euros hors dotations.
Lafarge motive ses revendeurs grâce au ballon ovale
L’agence Kouro Sivo a monté en 2007, pour Lafarge Couverture, une opération de moti-
vation portant sur le thème du rugby. Tous les maillons du réseau de distribution ont
été inclus.
Le coup d’envoi de l’opération a été donné par Jo Maso, manager de l’équipe de France de
rugby, lors d’une convention réunissant les 50 commerciaux de Lafarge Couverture, en jan-
vier 2007. L’objectif : augmenter les ventes des tuiles en terre cuite dans 900 points de
vente entre février et juillet 2007. À la clef, 450 places pour la Coupe du monde à gagner
pour les responsables d’agence ayant atteint des objectifs individuels fixés par Lafarge ainsi
que pour le vendeur en charge du secteur. Les commerciaux des distributeurs pouvaient
aussi remporter 120 places pour la finale du Top 14, ainsi que des ballons de rugby signés Jo
Maso. Chaque fois qu’un commercial vendait pour 1 500 euros de tuiles en terre cuite, il
envoyait un SMS pour tenter de gagner par tirage au sort des places pour lui et son client.
Enfin, dernier maillon de l’opération : les artisans couvreurs pouvaient jouer dans les points
de vente grâce à un quiz et un tirage au sort, afin, là encore, de gagner des places pour des
rencontres de rugby.
Un site Internet a été conçu en parallèle des plaquettes et de la PLV pour les magasins. Par
ailleurs, neuf vagues d’e-mails ont été envoyées aux participants ainsi qu’un mailing de
relance. Un SMS était également adressé chaque mois aux commerciaux pour maintenir
leur motivation. Une opération dotée d’un budget de 515 000 euros, dont 400 000 euros
pour les dotations.
D’après Action Commerciale N° 280 - 1er décembre 2007.

3 Les autres leviers d’animation


3.1 Les primes exceptionnelles

La prime exceptionnelle est une forme de gratification, en récompense d’une per-


formance individuelle ou collective… exceptionnelle. Contrairement au variable, la
prime exceptionnelle n’est pas obligatoirement contractualisée. Elle donne à la
direction commerciale de grandes marges de manœuvre car ni son montant ni sa
périodicité ne sont fixes. Elle est cependant soumise aux cotisations et à l’impôt.
Pour garder son caractère, elle doit concerner très peu de personnes, et être motivée

74
L’animation de l’activité commerciale

par des raisons extraordinaires : une compensation d’un événement imprévisible et


réduisant à zéro des efforts durables, la remotivation d’un collaborateur précieux,
une façon de garder encore un peu un cadre stratégique en partance, une récompense
pour bons et loyaux services. Elle doit être justifiée – car, en entreprise, comme
ailleurs, tout se sait – et ne pas être vue comme « le fait du Prince ».

3.2 Les honneurs

C’est une marque de reconnaissance, assortie ou pas d’une rétribution. C’est l’oc-
casion pour les meilleurs de monter sur l’estrade lors de la convention de vente ou
de recevoir une lettre (ou un e-mail) de félicitations publiques.
Là encore, tout est affaire de connaissance de la personne et du contexte. Dans
certaines entreprises, ce type de reconnaissance est très apprécié, dans d’autres, on
préférera s’abstenir et remplacer la médaille ou les applaudissements par de l’argent
sonnant et trébuchant.
C’est le manager commercial qui « sait ». Comme c’est lui qui va savoir dire
tout simplement « merci » quand un de ses collaborateurs aura accompli une
belle performance.
La reconnaissance est ce qui manque le plus dans notre société, dans les entre-
prises comme ailleurs et la fonction commerciale n’est pas épargnée.

3.3 Les avantages en nature

Les commerciaux – essentiellement les commerciaux itinérants – ont souvent


droit contractuellement à des avantages en nature qui complètent le package de rétri-
bution qui leur est proposé.
Les avantages les plus courants sont la mise à disposition d’un véhicule, en
dehors des heures de travail, celle d’un téléphone portable et d’un micro-
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

ordinateur. Ils bénéficient également de la prise en charge de leurs frais de vie :


restaurant et hôtel.
Si le principe est dans l’évidence, car lié aux exigences de déplacements de leurs
missions, les modalités mêmes sont souvent valorisées comme des gratifications : ce
n’est pas la même chose de pouvoir rouler en voiture commerciale deux places ou
en berline familiale ; de mêmes, le forfait téléphone, comme les forfaits repas ou
nuitée sont souvent considérés comme symboliques de l’intérêt que l’entreprise
manifeste à ses commerciaux.

75
LE PILOTAGE DE L’ACTIVITÉ COMMERCIALE

Section
3 LA MISE EN PLACE DU PILOTAGE
DE LA PERFORMANCE COMMERCIALE

La confiance n’exclut pas le contrôle, surtout si le contrôle joue un rôle de pilotage


de l’activité. Rares dans les petites organisations, les contrôles de gestion dédiés à
la fonction commerciale se développent dans les grandes entreprises. Dans un
contexte très mouvant, l’horizon d’une année, classique encore il y a peu pour
l’exercice budgétaire, s’est raccourci. Un contrôle de gestion proactif peut être le
moyen de prévenir les problèmes, et d’infléchir les objectifs. On parle alors de pilo-
tage, se rapprochant de la notion de Management Control, c’est-à-dire l’ensemble
des outils aidant le manager à décider et agir.

1 Les indicateurs et les outils de pilotage commercial


1.1 Les indicateurs les plus couramment utilisés

Les indicateurs les plus couramment utilisés par les entreprises (Ingram et al,
2001), restent les volumes de vente (pour 79 %) avec des éléments de comparaison
par rapport aux années précédentes (76 %). Si le volume des ventes par rapport aux
objectifs, ou celui des nouveaux clients sont encore respectivement mobilisés à 65 %
et 42 %, le volume des ventes par canal de distribution l’est encore peu (4 %).
Le nombre de clients perdus (33 %) est bien plus mobilisé que le nombre de
clients avec des impayés (15 %).
Le nombre de visites effectuées est utilisé à 48 % mais le nombre de devis l’est
seulement à 21 %, et le ratio de visites planifiées sur visites non planifiées n’est qua-
siment pas retenu (3 %).
Les indicateurs portant sur la gestion du temps, comme le temps moyen consacré
par visite sont encore peu présents. Par contre, l’aptitude à communiquer (utilisée
par 88 % des entreprises), comme les apparences et les manières (75 %) sont des
éléments d’évaluation très appréciés.

1.2 Un cadre intéressant : le Balanced Scorecard1

Le Balanced Scorecard (BSC) est conçu comme un « tableau de bord prospectif »,


il repose sur l’idée d’un équilibre dans le pilotage des performances :
– équilibre entre indicateurs financiers et non financiers, monétaires et physiques,
qualitatifs et quantitatifs, de résultat (outcomes) et de processus (drivers), rétro-

1. Développement d’après Naro, 2006.


76
La mise en place du pilotage

spectifs (lagging indicators) et prospectifs (leading indicators), de court et de


long terme, tangibles et intangibles ;
– équilibre fonctionnel (finance, marketing, logistique et gestion de production,
gestion des ressources humaines, etc.) ;
– équilibre dans l’attention accordée entre les différents types de stakeholders ou
parties prenantes (actionnaires, clients, salariés, etc.). Le modèle se veut une
représentation équilibrée de la performance globale dans laquelle, autour du
centre de gravité que constituent la vision et la stratégie des dirigeants, s’arti-
culent quatre axes ou perspectives (voir figure 3.2) : financier ou actionnaire,
client, processus internes, apprentissage-innovation.

La construction du BSC repose alors sur un alignement de la vision et de la stra-


tégie des dirigeants à travers un modèle de relations « causes-effets », appelé égale-
ment « carte stratégique ». Ainsi conçu, le BSC devient l’outil pivot de déclinaison
de la stratégie de l’entreprise en objectifs collectifs et individuels. En particulier, sur
ses axes processus internes et clients, le BSC intègre des indicateurs de pilotage de
la fonction commerciale (management des équipes commerciales, planning de pros-
pection et de négociation, taux de conversion des prospects en clients…) et de sa
performance (satisfaction des clients, qualité des produits et des services, image de
marque…) (Zeyl, 2003).
Comment sommes-nous perçus
par nos actionnaires ?

AXE FINANCIER

Pour réaliser notre vision,


comment devons-nous
apparaître à nos clients ?

AXE VISION
PROCESSUS AXE CLIENT
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

ET
INTERNE STRATÉGIE

Pour satisfaire nos clients et


nos actionnaires, dans quels
processus devons-nous
exceller ?

AXE
APPRENTISSAGE
Pour réaliser notre vision,
ET comment allons-nous maintenir notre
INNOVATION aptitude au changement ?

Kaplan, Norton, 2001.


Figure 3.2 — Représentation du Balanced Scorecard
77
LE PILOTAGE DE L’ACTIVITÉ COMMERCIALE

2 Les coûts cachés de la fonction commerciale

Pour compléter les indicateurs « classiques », il peut être intéressant de mettre au


jour les coûts et les performances cachés de l’activité commerciale. On retient
7 indicateurs de coûts (Savall, Zardet, 2007) ou performance cachés et 6 éléments
de calcul des coûts cachés :

2.1 Les indicateurs de coûts et de performances cachés de l’activité


commerciale
– L’absentéisme quand il est non prévu (maladie, accidents).
– Les activités réalisées et non programmées : préparer ou/et effectuer une
livraison – vérifier la qualité d’un produit – assurer des contacts fournisseurs,
ces activités réputées réalisées par d’autres membres du personnel génèrent des
coûts cachés.
– Les activités programmées sans valeur ajoutée : comme relancer des petites
offres auprès de clients non ciblés – des formations non efficaces – des réunions
sans objectifs assortis de décisions – des activités administratives pouvant être
déléguées.
– Le turn-over qui entraîne à la fois des coûts et des performances cachés (absence
de relations clients) et des coûts de recrutement, formation, accompagnement.
– La « contre-performance de ciblage produit » : elle concerne les activités
commerciales (visites clients, mailings, e-mailings…) proposant des offres ne
concernant pas le client ou ne correspondant pas à son véritable centre d’intérêt.
L’opportunité de travailler sur des prestations ou produits à plus forte valeur
ajoutée pour le client et pour l’entreprise a été écartée.
– La « contre-performance ciblage client » : elle intéresse notamment les commer-
ciaux en B2B, Business to Business ou commerce entre entreprises, qui consacrent
trop de temps à des clients ou prospects à faible pouvoir de développement au
détriment de clients ou prospects à fort pouvoir de développement.
– La « contre-performance commerciale » : l’action commerciale ne se traduit
pas par une vente. Exemple : offre refusée – retour sur investissement d’un mai-
ling ou d’une campagne promotionnelle insuffisant…

2.2 Les composants retenus dans le calcul des coûts

– Sursalaire : activité réalisée par un vendeur qui aurait pu être réalisée par un
collaborateur, ou une activité réalisée par un responsable pour suppléer l’ab-
sence ou la non-compétence d’un commercial.
– Surtemps : activité ayant consommé plus de temps car réalisée par un collabo-
rateur dont ce n’est pas l’activité, ou activité réalisée plusieurs fois pour remédier
78
La mise en place du pilotage

à un dysfonctionnement, ou activité réalisée inutilement – tel un rendez-vous


alors que le client n’est pas présent ou une offre écrite n’ayant aucune chance
d’aboutir…
– Surconsommation : exemple des kilomètres parcourus pour rien, de l’électri-
cité, des documents, du consommable.
– Non-création de potentiel : elle inclut les temps consacrés à des activités sans
réelle valeur ajoutée et pouvant être affectés à des activités commerciales à
potentiel.
– Perte de chiffre d’affaires ponctuelle : elle concerne toutes les affaires qui
auraient dû être traitées pendant un laps de temps donné – les offres non trans-
formées et réalisées par un concurrent.
– Perte de chiffre d’affaires durable : elle concerne les conséquences en termes
de clients perdus ou de marchés perdus.

Tableau 3.2 — Synthèse du calcul des coûts cachés dans la fonction commerciale

Composants/ Sur Sur Sur Non- Perte Perte Total Risques


indicateurs salaire temps conso création de CA CA des coûts
potentiel ponctuelle durable
Absentéisme

Activités
réalisées
et non
programmées

Activités
programmées
sans compé-
tence
spécifique

Turn-over

Contre-perf
ciblage client
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Contre-perf
ciblage produit

Contre-perf
commerciale

Total

Concept Coûts économiques Coûts d’opportunité


économique

Concept Surcharges Non produit


comptable

Source : Mahé, 2006.

79
LE PILOTAGE DE L’ACTIVITÉ COMMERCIALE

Ces coûts sont évalués selon deux lectures :


– la lecture comptable d’un coût correspondant à une dépense réelle et quantifiée ;
– la lecture gestion du coût avec le calcul des coûts d’opportunité. Cette approche
du coût est particulièrement intéressante dans le domaine commercial. Elle per-
met d’affecter à un coût, ou à une performance cachée, non pas le coût comptable
estimé, mais la valeur qu’aurait dû représenter l’utilisation efficace du moyen
concerné.

3 Le tableau de bord commercial


3.1 Un outil de pilotage individualisé

Trop souvent, les commerciaux passent leur temps à produire des chiffres au détri-
ment d’un véritable pilotage de leur activité. La décentralisation de cette fonction de
contrôle est une réponse au besoin d’autonomie des vendeurs et à leur développe-
ment de compétences (Darmon, 2001). Il est aussi la garantie d’un audit en temps
réel de l’activité du vendeur.
Le tableau de bord est l’outil le plus approprié à condition de savoir repérer des
indicateurs clefs, synthétiques et peu nombreux. Deux principes sont importants :
– le principe de contrôlabilité : un manager ne peut être tenu responsable que sur
la base des variables sur lesquelles il a une réelle maîtrise et donc, des possibi-
lités d’action ;
– le principe de cohérence : les indicateurs de performance doivent permettre la
cohésion au sein de l’organisation et faire partie d’un système intégré, conver-
geant vers l’atteinte des objectifs organisationnels globaux.

Tableau 3.3 — Architecture du tableau de bord de pilotage d’un directeur


commercial régional

RUBRIQUES INDICATEURS
(nom et contenu)
Qualitatifs Quantitatifs Financiers

1. Gestion du temps
Liste des tâches urgentes à faire X
Planning général des opérations commerciales X

2. Résultats économiques immédiats


Chiffre d’affaires et CHMCV (écart avec n-1) X
Nombre de rendez-vous réalisés (mois) X

3. Communication avec les clients


Messages téléphoniques (clients à rappeler) X
Cartes de visites et plaquettes commerciales X


80
La mise en place du pilotage

☞ 4. Processus de changement
Liste des dysfonctionnements et des coûts X X X
cachés
Actions correctrices mises en œuvre et affectées X X

5. Stratégie de l’entreprise
Plan d’actions prioritaires budgétées du X X X
semestre en cours
Plan d’actions stratégiques internes et externes X

6. Communication avec les autres régions


commerciales
Liste des directeurs de régions et des directeurs X
d’agences
Fiche de résolutions des réunions de direction X
commerciale

7. Références juridiques et comptables


Modèle de contrats commerciaux X
Coefficient d’érosion (non-renouvellement X X X
d’abonnement)

8. Gestion des compétences


Cartographie des compétences des directeurs X
d’agences
Plan de formation intégrée de la région X

Cappelletti, 2009.

3.2 Un point régulier

L’activité commerciale est une activité de mouvement où les données changent


très vite ; il est donc indispensable que le manager commercial sache faire un point
régulièrement avec ses collaborateurs.
L’ensemble de l’évaluation porte sur les quatre thèmes déjà évoqués, à l’aide des
indicateurs négociés lors de la fixation des objectifs :
– la performance : c’est-à-dire l’évaluation des résultats par rapport aux objectifs
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

fixés, financiers, quantitatifs et qualitatifs ;


– la capacité d’apprentissage : il porte sur la capacité d’évolution du vendeur :
comment mobilise-t-il ses connaissances, quelle est sa capacité à en apprendre
de nouvelles ? Comment traite-t-il l’information ? A-t-il une capacité de veille et
d’alerte ? Quelle est sa capacité de transmission aux autres ? Est-il curieux ? ;
– la contribution au projet global de l’organisation : cherche-t-il à trouver des solu-
tions ? A-t-il le sens des responsabilités ? Est-il fiable ? Rigoureux ? Autonome ?
Sait-il gérer ses priorités ? Est-il force de proposition ? ;
– le relationnel dans le cadre de l’entreprise comme avec les clients : s’entend-il
bien avec tout le monde ? A-t-il une bonne capacité de remise en cause ? Sait-il
écouter ? Sa présentation correspond-elle à la culture de l’entreprise ? Est-il ponc-
tuel ? Quelle est sa capacité de résistance aux agressions ? Sa capacité à surmonter
l’échec ? 81
LE PILOTAGE DE L’ACTIVITÉ COMMERCIALE

Il est important que les retours des entretiens annuels et les rétributions associées
soient rendus accessibles à tous (au moins dans leurs grandes lignes). Sinon, il y a
un risque que des rumeurs mettent à mal la confiance dans le manager et minent la
cohésion de l’équipe. Le manager ne doit pas sous-estimer la capacité de manipula-
tion de certains de ses collaborateurs, qui peuvent par exemple faire courir le bruit
qu’ils ont perçu toutes leurs bonifications, alors qu’il est de notoriété publique qu’ils
n’ont pas atteint leurs objectifs.
Le manager commercial, même s’il peut aller très loin dans l’évaluation du
comportement de ses collaborateurs, doit garder une certaine distance et une éthique
dans son attitude ; ne pas se laisser aller à des jugements de valeur est essentiel,
l’objectif est de rester centré sur l’activité. L’évaluation annuelle n’est pas un ins-
trument du pouvoir du manager sur ses collaborateurs, il est l’aboutissement de la
contractualisation des objectifs personnels de chacun avec ceux de l’entreprise qui
les emploie, et dont le manager commercial est, à ce moment de vérité, le porte-
parole.

Conclusion

On nous dit que la performance peut se réduire à une équation1 :


Performance = capacité × effort × opportunité × difficulté de la tâche soit :
P = f (c × e × o × d )
Qui y croirait ? Certainement aucun manager commercial, tant la mission de
développer la performance de leurs équipes est complexe et nécessite compétence
et finesse.
Le pilotage de la performance des commerciaux est une alchimie complexe. Les
ingrédients sont nombreux : objectifs bien choisis, budgets affûtés, rémunérations
attractives, bonus motivants, challenges excitants, ambiance motivante… c’est la
façon de les conjuguer qui compte.
Entre une hiérarchie qui lui demande toujours plus de résultats, et des équipes qui
attendent de lui reconnaissance et attention, les risques de dérives sont importants :
démotivation des commerciaux en demandant plus, perte de crédibilité auprès de la
direction en cas d’objectifs non atteints, crise de confiance… l’exercice est redou-
table et complexe.
Le management commercial est un métier difficile, complexe, mobilisant de nom-
breuses compétences commerciales et techniques, alliées à du charisme, à un solide
relationnel, à une forte empathie… le goût des autres, tout simplement.

1. Lewin K., (1936) Principles of Topological Psychology, New York.


82
Chapitre
L’animation
4 des forces
de vente

M anager les équipes de vente, c’est à la fois donner un cap et les moyens
de l’atteindre, c’est veiller à ce que les résultats soient obtenus dans le
respect de méthodes et de comportements souhaités et préalablement définis. C’est
admettre que la performance commerciale est à la fois économique et sociale et que
ces deux pôles se complètent et se challengent respectivement. La stratégie est
écrite, comprise, le plan d’action est établi, il faut maintenant le faire vivre. Il faut
animer, motiver… et contrôler la performance d’une équipe.
Le management commercial doit actuellement relever trois défis : le fort déficit de
projets professionnels dont souffrent les métiers de la vente, surtout chez les jeunes
diplômés ; une image dégradée de la fonction et des missions qui lui sont associées ;
des attentes nouvelles des salariés, tout particulièrement des nouveaux entrants sur
le marché du travail.
C’est dans le contexte de cette « nouvelle donne RH » que les managers commer-
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

ciaux doivent animer leurs équipes et stimuler la performance de leurs vendeurs.


Or, la vente a ceci de fascinant qu’elle est une des rares activités de l’entreprise à
échapper au formatage d’un processus purement rationnel et définitif. C’est aussi sa
grande vulnérabilité.
On s’éloigne peu à peu de la vision d’une vente instinctive et relationnelle, fondée
sur la primauté des facteurs individuels et l’idée d’un chromosome « vendeur ». Les
chercheurs se sont penchés sur les mécanismes de la performance commerciale et
de nombreux modèles ont jalonné cette progression. Ces travaux, essentiellement
nord-américains, nous livrent un décryptage des phénomènes de motivation et de
performance.

83
L'ANIMATION DES FORCES DE VENTE

Nous proposons, dans ce chapitre, de confronter ces modèles aux pratiques recon-
nues comme les plus légitimes en entreprise. Nous proposons ensuite de repenser
l’animation managériale tout au long du cycle de la carrière commerciale.
Nous organisons donc ce chapitre autour de trois thèmes :

Section 1 Q La motivation et la performance : deux concepts essentiels


du management commercial
Section 2 Q Deux moments clefs : le recrutement et l’intégration du
commercial
Section 3 Q La gestion de la carrière d’un commercial

Section
1 LA MOTI VATION ET LA PERFORMANCE :
DEUX CONCEPTS ESSENTIELS
DU MANAGEMENT COMMERCIAL

Admettons que le management des commerciaux est un management qui présente


bien des particularités, la population des vendeurs ayant souvent la réputation d’être
difficile à gérer. Il y a bien sûr les remarques comme « les commerciaux sont de
grands enfants », « ce sont des affectifs avant tout »… mais aussi des caractéris-
tiques objectives qu’il convient d’intégrer. Si seuls les vendeurs itinérants sont phy-
siquement éloignés de l’entreprise, tous les commerciaux doivent être flexibles et
innovants, et leur performance puise dans la persévérance et l’automotivation, tant
le métier est soumis à l’incertitude.

1 Le moteur de la motivation

Le moteur central de la performance est la motivation. On la définit comme


(Campbell et Pritchard, 1976) :
– le choix d’initialiser un effort vers une certaine tâche ;
– le choix de dépenser un niveau d’effort pour cette tâche ;
– le choix de persister dans la période d’effort pour une période de temps
donnée.

Deux processus cognitifs jouent un rôle déterminant dans les comportements


motivationnels : la confiance en soi et la valeur de la tâche (Barth, Rive, 2003).

84
La motivation et la performance

La confiance en soi dépend de trois autres variables essentielles :


– l’interprétation des résultats antérieurs, en distinguant les causes internes
(comme le travail ou l’effort), et les causes externes (comme la chance et la dif-
ficulté de la tâche). Le degré de contrôle qu’un individu pense pouvoir exercer
sur une de ces causes est l’élément déterminant. Le manager doit donc faire en
sorte de convaincre le commercial d’attribuer toujours l’échec à des causes
contrôlables ;
– les croyances en son efficacité personnelle : le commercial va identifier des
causes qu’il considère utiles pour obtenir un résultat (« L’effort est important
pour atteindre ces objectifs »), et va estimer maîtriser ou non ces causes (« J’ai
les aptitudes nécessaires ») ;
– la difficulté perçue de la tâche : elle correspond à la représentation anticipée
que le commercial se fait de la difficulté d’une tâche qui lui a été assignée. Les
jugements sur la difficulté sont autoréférencés : une tâche sera jugée difficile si
l’on est certain de ne pas pouvoir l’accomplir, et facile si le succès apparaît
comme certain.

Quant à la valeur de la tâche, elle dépend de :


– la valeur de réalisation : c’est l’importance que le commercial va accorder à
une mission, parce qu’elle lui permet de confirmer, ou d’infirmer, des aspects
valorisés de lui-même (contribuant au « schéma de soi » comme « être reconnu
comme compétent ») ;
– la valeur d’intérêt intrinsèque, qui désigne le plaisir éprouvé durant l’accom-
plissement d’une tâche ;
– la valeur d’utilité extrinsèque, qui correspond aux gains futurs espérés avec la
réalisation de cette tâche ; gains matériels et reconnaissance sociale ;
– le coût perçu, qui comprend le coût en temps, en quantité d’efforts à fournir, le
coût émotionnel (anxiété de performance, crainte de l’échec) ; c’est la seule
composante ayant une influence négative sur la valeur de la tâche.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

L’ensemble de ces mécanismes est résumé dans la figure 4.1.


Il faut compléter cette analyse en rappelant qu’il existe des théories qui mettent en
cause le seul rôle de la motivation dans l’accomplissement de tâches. C’est le cas de
la théorie de l’engagement : née dans les années 1950 et popularisée en France dans
les années 1980 (Joule et Beauvois, 1998). Selon cette théorie, pour amener une
personne à agir comme on le souhaite, il convient avant toute chose d’obtenir d’elle
un acte, l’acte le plus à même de la prédisposer à faire ce qu’on attend d’elle.
Quelques procédures ont été décrites, et qui sont souvent mobilisées (sans le savoir)
par les managers commerciaux (Barth, 2005).

85
L'ANIMATION DES FORCES DE VENTE

Les deux leviers de Conduite à tenir par le manager


la motivation pour motiver le commercial

Interprétation des résultats antérieurs


Identifier des causes maîtrisables par
le commercial

Croyance en son efficacité personnelle


Aider le commercial à penser qu’il va
maîtriser ses causes
Confiance en soi

Difficulté perçue de la tâche


Le persuader qu’il a tous les atouts
Motivation pour réaliser la mission
du
commercial
Valeur de réalisation
Valoriser auprès du commercial la
mission en termes d’accomplissement

Valeur d’intérêt intrinsèque


Décrire la mission en termes de plaisir
Valeur de la tâche

Valeur d’utilité extrinsèque


Rappeler les gains possibles
avec la réalisation de cette mission

Coût perçu
Bien calibrer le temps à passer,
l’effort à fournir pour sa réalisation

Figure 4.1 — Comment activer la motivation d’un commercial ?

86
La motivation et la performance

 Repères Quelques procédures pour obtenir des


commerciaux des actes librement consentis
Le principe de l’amorçage
Il consiste à faire prendre une décision sur une mauvaise base d’information, soit en ne
disant pas toute la vérité, soit en mentant carrément. La décision prise, on rétablit la vérité,
ce qui va faire apparaître la décision comme encore moins avantageuse. La personne, libre
de modifier ses choix, va pourtant persévérer dans la décision initiale.
– Survaloriser une prime ou un gain pour la réalisation d’une mission particulièrement
ardue, puis annoncer, quand le travail a commencé, la récompense exacte : les commer-
ciaux vont maintenir leur effort malgré tout.
Le principe du pied dans la porte
C’est la reprise d’une vieille stratégie de démarchage qui consiste, comme son nom l’indi-
que, à mettre le pied dans la porte pour le mettre ensuite dans le salon.
– Il s’agit par exemple de demander à un commercial d’effectuer une petite collaboration
pour obtenir ensuite son accord pour un engagement plus important, qu’il aurait certaine-
ment refusé sans cela.
La « taille de l’acte »
Elle se caractérise, notamment, par le caractère public qui lui sera donné.
– Pour obtenir l’engagement de l’ensemble de l’équipe sur une résolution prise en réunion,
la bonne méthode est de leur demander de confirmer individuellement et devant le groupe
leur accord.
Le toucher physiquement
Cet autre principe est d’établir un contact physique avec la personne à qui on va faire une
requête.
– Il a été démontré qu’elle sera ainsi inconsciemment mieux disposée à réaliser ce qu’on lui
demandera.
D’après Joule et Beauvois, 1998, et Barth, 2005.

2 Développer la performance des commerciaux


© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Le modèle le plus connu et toujours d’actualité est celui de Walker, Churchill et


Ford, datant de 1977 (voir figure 4.2). Il mobilise les variables personnelles (âge,
expérience, traits psychologiques), organisationnelles (style de direction, politiques
de stimulation) et environnementales (stabilité de l’offre, contrainte de production,
position concurrentielle de l’entreprise, potentiel des territoires…) et permet de faire
entrer la problématique managériale dans le champ de la motivation en introduisant
les notions de récompenses et leur influence sur la satisfaction du vendeur.

87
L'ANIMATION DES FORCES DE VENTE

Variables personnelles,
organisationnelles
et environnementales

Perceptions du rôle

Aptitude Récompenses
Médiation Satisfaction
Performance interne Intrinsèque
Médiation Extrinsèque
Savoir-faire externe

Motivation

Walker, Churchill et Ford, 1977

Figure 4.2 — Modèle conceptuel WCF

Si l’on synthétise une littérature nord-américaine foisonnante sur ce sujet, on peut


dessiner une grille de lecture des situations de management commercial :
Tout d’abord, il existe deux grands types de contrôle des forces de vente (Anderson,
Oliver, 1987) :
– le contrôle par les résultats, où le vendeur est vu comme un entrepreneur respon-
sable de sa performance et libre des méthodes et des moyens à mettre en œuvre
pour la réaliser ;
– le contrôle par les comportements (Ouchi, 1980, Eisenhardt, 1985), qui repose
sur la prise en compte du processus, et postule de la capacité du manager à
concevoir les comportements adéquats des vendeurs, à identifier les tâches à
réaliser, voire même à les programmer jusqu’à les standardiser.

Dans la réalité, les entreprises mettent en œuvre un système « hybride » de


contrôle, s’appuyant à la fois sur les résultats et les comportements, c’est-à-dire
que le management commercial cadre à la fois les résultats attendus via la poli-
tique d’objectifs et contrôle en continu les efforts déployés par les commerciaux
pour les atteindre.
Ensuite, les modalités de contrôle peuvent être formelles ou informelles (Jaworski,
1988). La très grande majorité des entreprises pratiquent les deux, et une formalisa-
tion faible ne signifie aucunement que les commerciaux agissent selon leur unique

88
La motivation et la performance

bon vouloir. Beaucoup de petites entreprises développent ainsi leur activité commer-
ciale sans avoir de procédures bien établies, souvent faute de temps.
Il faut cependant admettre que ces modèles explicatifs, et les pratiques managéria-
les qui en sont issues, se heurtent de plus en plus à des comportements nouveaux et
inédits des commerciaux, qui mettent en difficulté les managers commerciaux les
plus aguerris. Cette évolution sociétale doit être comprise et prise en compte.

3 Les nouvelles attentes des salariés


3.1 Les jeunes entrants

Les managers commerciaux sont de plus en plus en difficulté devant les compor-
tements de leurs équipes, surtout quand il s’agit de jeunes entrants. Il existe une
véritable incompréhension qui creuse un fossé entre les générations. Il est impor-
tant de comprendre, pour éviter que le dialogue ne se rompe au détriment de tous,
jeunes, managers confirmés et entreprise. Qu’attendent ces plus jeunes de la vie
professionnelle ?
Tout d’abord, ils expriment un énorme besoin de reconnaissance (Régnault,
2009), ils souhaitent être écoutés et être situés au cœur des processus. Le mana-
gement (avec des différences culturelles selon les pays, il est vrai) est souvent
en déficit de félicitations et il faut se rappeler que dans les rétributions de nature
symbolique, le remerciement est central, d’autant plus si on lui donne un carac-
tère public (copie de mail, affichage). Dans une enquête CEGOS de 20081, 35 %
des vendeurs se disaient « franchement pas satisfaits de la reconnaissance des
efforts fournis ».
Cette génération des 20-30 ans (souvent appelée génération Y) est axée sur les tech-
nologies de l’information, « mondialisée » – les jeunes entrants ont souvent eu des
expériences à l’international au cours de leurs études – ils se montrent aussi habiles
négociateurs et sont à l’aise pour communiquer. On constate aussi un phénomène qui
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

se consolide depuis quelques années : l’allongement de l’adolescence et de la dépen-


dance familiale. Enfin, victimes collatérales des mauvaises pratiques des entreprises
vis-à-vis de la génération qui les précède, ils sont assez méfiants et sceptiques vis-à-vis
des entreprises tout en étant prêts à s’engager lorsqu’on les considère correctement.
Cette prise de distance est souvent interprétée comme un désinvestissement a priori
de la sphère professionnelle. La revendication d’un équilibre vie personnelle/vie pro-
fessionnelle, l’exigence de temps libre ou de différents avantages hors contenu du
poste gênent les recruteurs et les managers confirmés qui vivent avec d’autres modèles
fondés sur une implication importante dans la vie professionnelle. L’envie d’une pro-

1. Enquête CEGOS way of learning, « Management et motivations des commerciaux », juin 2008.
89
L'ANIMATION DES FORCES DE VENTE

gression rapide, sans forcément « avoir fait ses preuves », pose aussi problème à des
entreprises qui n’ont pas toujours d’évolution de carrière à offrir.
Le risque managérial est de rentrer dans une lecture de catégorisation par les âges,
qui opposerait les plus jeunes aux autres, avec les dérives vers les stéréotypes, et
poserait une méfiance a priori vis-à-vis des jeunes entrants sur le marché du travail.
Pour dépasser ces oppositions, le dialogue intergénérationnel, l’envie de se
connaître doivent être activés par les managers commerciaux, chaque fois qu’ils en
ont l’opportunité : lors des recrutements, des formations, des accompagnements en
clientèle ou des réunions d’équipe.

3.2 D’autres gestions de la carrière

Ce désengagement de la sphère professionnelle, s’il est d’avantage attribué aux


plus jeunes, semble bien être transgénérationnel. Le manager commercial doit donc
apprendre à composer avec des équipes qui ont perdu de vue des dogmes comme
celui de la carrière à tout prix, ou de la mobilité professionnelle. Ainsi, nombre de
commerciaux refusent de payer le prix d’une évolution professionnelle quand il faut
pour cela faire déménager sa famille et mettre son conjoint en situation de changer
d’emploi.
On observe de plus en plus la nécessité de savoir gérer des carrières différemment.
La notion de « plateau de carrière », jadis synonyme de stagnation professionnelle,
devient une véritable étape de la vie professionnelle (Perotto, 2008) pour des
commerciaux performants. Il faut que l’entreprise sache proposer un enrichissement
horizontal des tâches pour ne pas voir ses meilleurs commerciaux partir à la concur-
rence. En effet, sur un marché du travail où l’offre d’emploi est structurellement
supérieure à la demande, un commercial à potentiel n’aura aucune difficulté à négo-
cier un changement d’entreprise, sans quitter sa région, tout en obtenant un gain
supplémentaire.
Le management commercial doit aussi faire preuve de créativité et d’innovation
face à l’allongement des carrières professionnelles. En effet, la question des seniors
est maintenant bien présente dans toutes les fonctions de l’entreprise, et se pose avec
encore plus d’acuité dans des métiers où la performance est liée directement à la
dépense d’énergie physique (les déplacements, les horaires à forte amplitude, la pré-
sence chez le client…) et mentale (la force de conviction, l’automotivation, la résis-
tance à l’échec…).
Les chemins pour aller à la performance sont certainement plus nombreux que ne
le laissent supposer les pratiques qui ont fait leurs preuves depuis des décennies,
mais qui se périment peu à peu.
Comment éviter cette exclusion du monde du travail avec l’avancée en âge ?

90
La motivation et la performance

– préparer le renouvellement des générations et favoriser la transmission des


savoirs. La mise en place d’accompagnement des jeunes commerciaux par des
seniors expérimentés est certainement une piste intéressante, même si elle ne
peut être systématisée ;
– contribuer au maintien dans l’emploi des seniors et au maintien de leur employa-
bilité par le suivi de formations et le changement de métier ou de poste tout au
long de la carrière. Le manager commercial doit, comme les autres, penser à
envoyer ses commerciaux les plus expérimentés en formation ;
– favoriser la diversité des âges au sein des équipes, et les amener à confronter
leurs pratiques, forcément différentes ;
– maintenir des évolutions salariales et promotionnelles motivantes tout au long
de la vie ;
– adapter les conditions de travail à la présence de salariés âgés plus nombreux,
avec des actions d’amélioration des postes de travail et de leur environnement
afin d’intégrer les évolutions des capacités liées à l’âge ;
– développer une politique active de santé au travail.

 Repères Les seniors commerciaux performants

Seniorline propose aux entreprises travaillant sur le marché des seniors par le biais du mar-
keting téléphonique de mettre à leur disposition des téléconseillers seniors « qui partagent
les mêmes codes culturels et instaurent une relation privilégiée » avec leurs clients. « Pour
échanger sur des thèmes ou des produits dans le domaine de la retraite, la santé ou la dépen-
dance, il y a un blocage de la part des particuliers à échanger avec un téléconseiller à peine
sorti de l’adolescence ».
Grand Optical a embauché du personnel senior de manière à ce qu’il puisse mieux commu-
niquer avec les acheteurs du même âge, notamment en ce qui concerne la presbytie qui se
déclenche en général à partir de 45 ans. La plupart des salariés de ce magasin ont connu de
longues périodes de chômage, parfois jusqu’à sept ans d’affilée. « À leur embauche, ils ont
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

tous été reconnaissants d’avoir cet emploi. Du coup, ils ont un rapport au travail très différent
de celui des jeunes, car ils savent que c’est leur dernière chance » indique l’une des directrices
de cette enseigne. Autre point souligné par la direction : contrairement aux idées reçues, le
nombre des arrêts maladie n’est pas plus important, toutefois, il convient de préciser que
même si les seniors sont plutôt moins absents que les jeunes, en cas de maladie, ils sont
arrêtés pendant de plus longues périodes.
D’après Senioractu.com et Barth, Falcoz, 2007.

91
L'ANIMATION DES FORCES DE VENTE

Section
2 DEUX MOMENTS CLEFS : LE RECRUTEMENT
ET L’INTÉGRATION DU COMMERCIAL

Le recrutement et l’intégration sont le début du cycle de carrière du commercial :


ils se fondent sur la reconnaissance de la personne, la capacité à faire grandir et évo-
luer le collaborateur. L’image de la société est un point important et beaucoup d’en-
treprises n’hésitent plus à développer un véritable marketing RH pour attirer et
fidéliser des talents, car les attentes des salariés, et plus particulièrement des
commerciaux, sont en pleine mutation.

1 La tension sur le marché du travail : l’absence de projets


professionnels commerciaux chez les jeunes entrants

Le marché de la fonction commerciale est structurellement déficitaire en deman-


des. À cela deux explications : la première est le développement de l’offre avec la
reconversion, dans de nombreux secteurs d’activités, des métiers, de l’expertise vers
le développement commercial. Il en est ainsi de la bancassurance qui cherche de
plus en plus à recruter des jeunes ayant un potentiel commercial, quitte à ne pas
avoir la connaissance de la finance. Le déficit de connaissances techniques est alors
comblé avec des back offices ou des ressources en ligne. On assiste à la même muta-
tion dans les secteurs informatiques ou la téléphonie. Le potentiel des postes
commerciaux est donc en constante progression. La seconde cause est la mauvaise
image que les jeunes ont des métiers commerciaux. Les médias participent large-
ment, avec les quelques commerciaux qu’ils mettent en scène, à la vision caricatu-
rale ou stéréotypée du métier commercial. On peut citer Willy Loman, commis
voyageur vieillissant, qui, après une vie passée sur les routes, se suicide après avoir
été licencié parce qu’il n’était plus assez performant (Mort d’un commis voyageur1,
d’Arthur Miller) ; Séraphin Lampion, agent d’assurances opiniâtre et ridicule, per-
sonnage dans la série Tintin, ou encore Jean-Claude Convenant, commercial (de la
série TV Caméra Café), sans aucune instruction, ne pensant qu’aux femmes et aux
voitures, à la morale douteuse et à la plaisanterie facile.
Compte tenu de l’influence des médias sur les représentations, surtout des plus
jeunes, on comprend mieux les réserves des étudiants. Une étude menée régulière-
ment depuis 2003 sur les représentations des métiers de la vente par les étudiants en
France montre que l’image reste la même depuis soixante ans, et diffère peu entre
les pays anglo-saxons et la France, contrairement à ce que l’opinion publique véhi-
cule. Si l’argent et la réussite sont valorisés aux Etats-Unis, le métier commercial
n’est en rien un projet professionnel pour les étudiants américains.
1. Célèbre pièce de théâtre à succès créée en 1949 sous le titre original, Death of a Salesman.
92
Le recrutement et l'intégration

 Repères Les représentations des métiers de la vente


chez les étudiants français
Une enquête menée auprès d’un échantillon de 398 étudiants selon la méthode de l’Induc-
tion par Scénario Ambigu montre que les étudiants français ont une représentation du
métier de vendeur fort proche des étudiants américains de l’année 1958 (voir des articles
aux titres évocateurs comme « I didn’t raise my boy to be a salesman ! » en 1958 ou
« American Salesmen are prostitutes », en 1962). Cette stabilité est remarquable compte
tenu des distances tant géographiques que temporelles. Ce sont donc les notions de
concurrence, d’argent, de risque, de dynamisme et de stress qui sont constitutives de
l’image du vendeur pour ces populations.
L’étude met au jour deux autres résultats remarquables : plus le diplôme est élevé, moins
l’étudiant souhaite aller ver un métier commercial et ce sont les étudiants en marketing,
toutes disciplines confondues, qui sont les plus réticents à se tourner vers ces fonctions.
Il y a peu de différences entre garçons et filles même si ces dernières semblent beaucoup
plus sensibles à la notion d’éthique.
Enfin, la seule variable semblant pouvoir modérer ces représentations peu positives est la
profession des parents : si un des parents est commercial, le jeune a une image moins néga-
tive de la fonction.
Source : Barth, Biardeau, 2002.

2 Le recrutement : identifier les besoins, sourcer, chercher


2.1 Le recrutement comme un point de départ

L’ensemble de ces outils et des dispositifs de management des ressources humaines


visent à optimiser l’implication du commercial dans son entreprise (organizational com-
mitment) et son engagement dans le travail (job involvement), car il est démontré que ce
sont deux antécédents de la performance pérenne (Commeiras, Fournier, 2001).
Ces deux notions sont proches et complémentaires : l’implication (job involve-
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

ment) traduit la façon dont le salarié a une attitude positive dans l’organisation, et
l’engagement (attaché à la sphère professionnelle) se définit comme l’identification
psychologique avec le travail, le travail contribuant à l’estime de soi. Ces deux
concepts sont très proches et les distinguer permet d’éclairer ce que doit chercher à
mettre en œuvre le management commercial. Il est possible de mesurer le degré
d’engagement et d’implication d’un vendeur en lui demandant de se positionner vis-
à-vis de certaines affirmations.

93
L'ANIMATION DES FORCES DE VENTE

 Repères
Évaluation de l’implication et de
l’engagement dans l’entreprise (extrait
de questionnaires)

Pas du tout Tout à fait


d’accord d’accord
Évaluation de l’implication dans le travail
1. Je suis prêt à faire beaucoup plus que la normale 1 2 3 4 5 6 7 8 9
pour contribuer à la réussite de l’entreprise
2. Je présente mon entreprise à mes amis comme un 1 2 3 4 5 6 7 8 9
bon endroit où travailler
3. Mes valeurs personnelles et celles de mon entre- 1 2 3 4 5 6 7 8 9
prise sont très proches
4. Cette entreprise me pousse à donner le meilleur 1 2 3 4 5 6 7 8 9
de moi-même pour être performant
5. Je suis réellement concerné par l’avenir de cette 1 2 3 4 5 6 7 8 9
entreprise
Évaluation de l’engagement dans le travail
1. Je fais des heures supplémentaires pour finir un 1 2 3 4 5 6 7 8 9
travail même si je ne suis pas payé pour ça
2. La plus grande satisfaction de ma vie vient de mon 1 2 3 4 5 6 7 8 9
travail
3. Je vis pleinement mon travail1 1 2 3 4 5 6 7 8 9
4. On peut se faire une idée assez précise 1 d’une per- 1 2 3 4 5 6 7 8 9
sonne en regardant la qualité de son travail
5. Les petits matins au travail me font planer 1 1 2 3 4 5 6 7 8 9

Source : Lodal et Kejner, 1965, et Porter, Steers, Mowday et Boulian, 1974.

2.2 Les spécificités du recrutement d’un commercial

On compte de façon relativement stable 600 000 commerciaux itinérants en


France depuis ces cinq dernières années (la fonction commerciale dans sa totalité
emploie 2 à 3 millions de personnes selon la DARES1) : 35 000 agents commer-
ciaux, 15 000 VRP multicartes, 150 000 VRP exclusifs et 400 000 salariés dont
100 000 cadres. Ce marché du travail présente deux caractéristiques :
– il bénéficie d’un regain d’offres à chaque fois que l’activité globale des entre-
prises est en baisse ; c’est nettement le cas lors de crise majeure comme celle de
2008-2009, on observe ainsi que « 45 % des entreprises qui vont recruter au deuxième
trimestre 2009 prévoient l’embauche d’un cadre commercial, soit 15 points de plus
qu’au deuxième trimestre 2008 »2 ;

1. Darés : Direction de l’animation et de la recherche des études et des statistiques.


2. Apec, Conjoncture, note trimestrielle n°27, 2e trimestre 2009.
94
Le recrutement et l'intégration

– compte tenu du déficit chronique de vocations, l’offre est toujours structurelle-


ment supérieure à la demande, ce qui fait du recrutement de leurs commerciaux
une préoccupation majeure et récurrente pour la plupart des entreprises.

Cette tension implique également une moindre maîtrise du turn-over des commer-
ciaux qui ont toute facilité pour aller vers des offres d’emploi jugées plus attractives,
si ce n’est dans le contenu, du moins dans la rétribution.
Au coût d’un recrutement s’ajoute l’exigence d’un retour sur investissement le
plus rapide possible de l’intégration du nouveau commercial. Les entreprises cher-
chent souvent des valeurs sûres et efficaces, délaissant souvent les jeunes diplômés
au profit des commerciaux avec expérience (30 % d’intention de recrutement vs
70 %, source Apec 2009). Il s’agit alors de voir le recrutement d’un commercial
comme un véritable enjeu stratégique pour l’entreprise.

2.3 Les qualités à repérer

Il faut être capable d’identifier des candidats avec un réel potentiel commercial. Parmi
les nombreux référentiels existants, on observe une certaine convergence vers quelques
aptitudes spécifiques et évaluables lors des différents entretiens ou tests qui jalonnent
le processus de recrutement. On peut en retrouver une synthèse dans le tableau 4.1, qui
distingue selon les deux principales phases de la vente, phase tactique (face-à-face) et
phase stratégique (approche de compte), quatre types de ressources : les connaissances,
les savoir-faire opératoires, les qualités personnelles et l’expérience.
Tableau 4.1 — Ressources individuelles et phases de vente
TACTIQUE VENTE STRATÉGIE VENTE

CONNAISSANCES Connaissance du produit, des services, Connaissance du produit, des services,


des procédures, de l’environnement des procédures, de l’environnement
professionnel interne et externe. professionnel interne et externe.

SAVOIR-FAIRE Esprit d’organisation, maîtrise de la commu- Esprit d’organisation, maîtrise de la gestion


© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

OPÉRATOIRES nication non verbale, des techniques de de crise, maîtrise des techniques de commu-
communication, de la gestion de conflit. nication.

QUALITÉS FACTEURS DE SOCIABILITÉ FACTEURS DE SOCIABILITÉ


PERSONNELLES Capacité d’écoute, empathie, ouverture Ouverture d’esprit, sens de la diplomatie,
d’esprit, opportunisme, sens du contact, socia- esprit d’équipe, capacité à communiquer,
bilité, sens de la diplomatie, bonne présenta- conscience professionnelle, loyauté,
tion, capacité à communiquer efficacement, éthique, sens des responsabilités, capacité
conscience professionnelle, loyauté, éthique, à déléguer.
sens des responsabilités. FACTEURS PSYCHOLOGIQUES
FACTEURS PSYCHOLOGIQUES Travail, enthousiasme, ténacité, autonomie,
Énergie au travail, dynamisme, travail, goût des initiatives, résistance au stress,
enthousiasme, ténacité, autonomie, goût sens des responsabilités, maîtrise de soi,
des initiatives, force de conviction, résis- capacité à gérer le détail, assurance, esprit
tance à l’échec, au stress, sens des responsa- de compétition, courage.
bilités, maîtrise de soi, capacité à rebondir,
capacité à gérer le détail, automotivation,
assurance, esprit de compétition, agressivité
95
positive, courage.


L'ANIMATION DES FORCES DE VENTE

☞ FACTEURS INTELLECTUELS FACTEURS INTELLECTUELS


Esprit pratique, perspicacité, curiosité, Curiosité, travail, ténacité, perspicacité,
capacité à penser en termes de résultats, esprit pratique, ouverture d’esprit, capacité
créativité, esprit d’analyse, mémoire, sens à travailler en équipe, expertise, esprit
de l’argumentation, qualité d’observation, d’analyse et de synthèse, qualité d’observa-
capacité d’adaptation, bonne culture tion, capacité d’adaptation, bonne culture
générale. générale.

EXPÉRIENCE Capacité à faire face à des situations Homme de réseau, sens des responsabilités,
inattendues, capacité à penser en termes capacité à faire face à des situations
de résultats et à trouver des solutions aux inattendues, capacité à trouver
problèmes des clients. des solutions aux problèmes des clients.

Schillio, 2004.

On mesure l’importance des qualités personnelles intrinsèques, elles ne sont pour-


tant pas garantes de la performance attendue : l’empathie, l’egodrive (aptitude du
négociateur à faire passer sa conviction propre) ou encore la créativité et l’adapta-
bilité sont nécessaires mais doivent être travaillées et développées pour être les
leviers de la réussite.

2.4 Les étapes à respecter pour un recrutement réussi

Elles sont au nombre de 6 :


1. Identifier le besoin de l’entreprise, en termes de compétences attendues, de
profil, mais aussi dans la définition du statut recherché : salariat, VRP exclusif,
VRP multicarte, agent commercial ? Un certain nombre d’éléments en rapport
avec le marché (taille, objectifs de vente, dispersions géographique et thématique
des cibles, saisonnalité des ventes…) et avec l’entreprise (capacité à amortir le
coût de la force de vente, capacité à la manager, capacité à travailler en confiance
avec des partenaires indépendants…) doivent être analysés pour dessiner le cadre
de la recherche.
2. Définir la mission, ses attentes, ses contreparties,
3. Choisir les moyens d’identification : moyens classiques (annonces, job board,
chasse de tête, Internet…) ou plus spécifiques (candidathèque des commerciaux,
méthode du miroir, relayage…),
4. Communiquer : petites annonces, Internet, bouche à oreille, recherche active,
salons, parrainage…, cette offre étant l’occasion de communiquer sur l’entreprise
plus largement,
5. Sélectionner : sur CV, premier entretien, passage de test, souvent deuxième
puis troisième entretien (sachant que les entreprises croisent en moyenne trois avis
différents avant de se décider). L’objectif est de maintenir un délai raisonnable car
les candidats peuvent se lasser et l’entreprise perdre de son attractivité si elle ne se
montre pas assez réactive,
96
La gestion de la carrière d’un commercial

6. Retenir le candidat choisi, car dans le contexte concurrentiel décrit, le candi-


dat peut être séduit par une autre entreprise ou peut mettre en concurrence plusieurs
offres.

3 L’intégration

L’enjeu des premières minutes, premiers jours, premières semaines dans l’entre-
prise est vital pour une intégration pérenne et pleinement réussie. L’attachement à
l’entreprise ne va pas de soi et beaucoup de nouveaux arrivants subissent de plein
fouet le décalage entre ce qu’on leur avait promis lors du recrutement et la réalité
d’une entreprise qui ne se donne pas les moyens de les accueillir. Là encore, il faut
accepter la notion d’un investissement en temps auquel sont encore peu sensibles les
managers. Trop d’entreprises voient leurs commerciaux partir avant d’avoir pu
commencer à développer une activité rentable, les prises de conscience se font sou-
vent quand le phénomène devient trop massif ou obère la performance.
Pour se faire, il faut :
– préparer au minimum les quatre premières semaines du nouvel embauché en
veillant à la disponibilité des interlocuteurs ;
– informer les personnes concernées dans l’entreprise de son arrivée ;
– alterner formation théorique et accompagnement terrain ;
– pour les commerciaux, organiser les premiers accompagnements terrain avec
des vendeurs et sur d’autres secteurs que le sien ;
– attendre 4 semaines avant de le laisser rencontrer ses propres clients, d’abord
accompagné par le chef des ventes, puis seul, après une formation suffisante ;
– faire un point fréquent avec le nouvel embauché ;
– interroger les collaborateurs ayant participé à la formation.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Section
3 LA GESTION DE LA CARRIÈRE D’UN COMMERCIAL

1 La formation

La formation tout au long de la carrière est un vecteur indispensable :


– de performance, par les connaissances et les savoir-faire qu’elle communique ;
– de satisfaction au travail, par la reconnaissance qu’elle promeut ;
– de valorisation de l’attractivité de l’entreprise.
97
L'ANIMATION DES FORCES DE VENTE

Ce triptyque est essentiel à l’heure où les commerciaux, comme tous les autres
salariés, ont des attentes de plus en plus fortes de développement personnel. Une
entreprise qui sait communiquer sur sa capacité à « faire grandir » ses salariés
acquiert une image positive et peut prétendre à intégrer des forts potentiels sur
d’autres critères que le seul salaire.
La formation peut être intégrée, elle se pratique alors pendant l’activité profes-
sionnelle :
– en direct : le manager commercial est en première ligne pour assurer les accom-
pagnements de ses commerciaux, comme observateur et évaluateur du salarié en
action (c’est le cas de l’accompagnement en visite client par exemple). Il doit
être à même de conduire l’animation de formations pour l’ensemble de son
équipe, ou pour d’autres personnes de l’entreprise sur des points d’expertise
qu’il connaît particulièrement (un chef des ventes peut être sollicité lors d’un
stage d’intégration sur la présentation d’un produit ou d’une clientèle) ;
– comme client interne de la RH : on lui demande d’être à même d’auditer
les besoins en formation de ses équipes afin de savoir commander les forma-
tions à la direction des ressources humaines ou de la formation. Cela impli-
que une pleine connaissance, toujours actualisée, de l’état des compétences
maîtrisées par les commerciaux comme celles attendues par l’évolution de
l’activité ;
– au moment de l’intégration de stagiaires, d’apprentis : quand l’entreprise fait
le choix de ce mode d’intégration avec des voies comme l’alternance, c’est sou-
vent le manager commercial qui est désigné comme tuteur ou maître d’apprentis-
sage. Il s’agit alors d’un encadrement bien spécifique avec des exigences particu-
lières, centrées sur la formation du jeune, et l’interaction avec son centre de for-
mation, sans que ce soit au détriment de la performance attendue sur le terrain ;
– comme détecteur de talents : c’est souvent le manager intermédiaire qui
détecte les potentiels qui seront amenés à progresser dans l’entreprise, quitte à
les voir amorcer une carrière qui s’annonce plus rapide et plus prometteuse que
la sienne ;
– comme gardien de l’équité : car il lui faudra aussi veiller à garantir l’accès à
cette offre de formation auprès de personnes moins directement prometteuses.
C’est le cas des seniors, souvent discriminés vis-à-vis de la formation, sur l’ar-
gument du temps limité qu’ils auront pour mettre en œuvre leurs nouvelles
connaissances, et qu’on installe ainsi dans un cercle de démotivation nuisible à
toute l’organisation ;
– pour participer à des groupes de projet : en tant qu’expert, le manager
commercial peut être sollicité pour contribuer à la conception de modules de
formation en présentiel ou, de plus en plus souvent, en e-learning, soit pour
l’élaboration d’un cahier des charges, soit plus directement dans la conception
même de la formation ;

98
La gestion de la carrière d’un commercial

– comme coach : on évoque souvent l’idée d’un « manager coach », montrant par
là même que la dimension de stimulation et d’accompagnement ne va pas for-
cément de soi dans le métier de manager. La logique de la performance sportive
s’est déplacée au monde de l’entreprise et il faut admettre que les similarités des
deux domaines sont fortes. En effet, sport et vente sont deux activités humaines
confrontées à une logique de performance. Il s’agit d’atteindre des objectifs
ambitieux et de relever constamment des défis. Comme le coach sportif, le
manager commercial est amené à créer la cohésion de groupe, à amener ses ven-
deurs à se transcender (en dépassant la jouissance immédiate de la réussite), et
à sanctionner les hors-jeu ;
– en tant que confident : on observe la place du manager de proximité dans la satis-
faction au travail de ses commerciaux, particulièrement chez les plus jeunes d’en-
tre eux ; cet attachement de nature affective est très fréquemment observable et mis
en évidence dans certaines recherches menées chez les jeunes entrants sur le mar-
ché du travail (Carlson et Perrewe, 1999) : « J’aime mon manager ».

La formation est en général prise en charge par la direction des ressources humai-
nes. Les commerciaux ont souvent droit à des formations « directement utiles » :
techniques de vente, techniques de négociation, présentations des nouveaux pro-
duits, nouvelles réglementations… alors qu’ils aspirent souvent à des formations
portant sur le savoir-être (gestion du temps, lâcher prise, confiance en soi…). La
politique de formation des entreprises est souvent le reflet du style de management
global de l’entreprise.

2 L’évaluation et les actions correctrices

Le but est de les remettre en phase avec les attentes de l’entreprise, et surtout de
comprendre et d’analyser la situation. On constate souvent qu’au sein d’une même
équipe les uns sont en avance et les autres en retard par rapport aux objectifs, pour-
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

tant établis avec leur accord. Il est important de savoir féliciter, encourager ou réagir
pour les aider à avancer.
L’enjeu du rendez-vous d’évaluation, qu’il soit intermédiaire ou annuel, est très
important pour le commercial : c’est souvent une des rares occasions qu’il aura de
voir son manager dans un face-à-face qui portera sur « lui ». Le manager doit savoir
que le commercial attend énormément de ce rendez-vous et pas uniquement le mon-
tant maximal du variable ou le déclenchement de la prime.
Le rendez-vous doit donc être planifié et préparé par les deux parties à partir
d’une trame commune pour permettre un dialogue clair et sans ambiguïtés. Le
travail de préparation se base essentiellement sur des données chiffrées (objectifs,

99
L'ANIMATION DES FORCES DE VENTE

chiffre d’affaires, taux de prospection, etc.) mais l’enjeu porte sur leur analyse afin
d’identifier le contexte comme les efforts fournis par le commercial.
C’est le moment également de réfléchir aux mesures d’amélioration (formation,
accompagnement sur le terrain, etc.) et/ou aux leviers de motivation (augmentation
de salaire, gratification) à mettre en œuvre, là aussi, de façon individuelle. C’est
dans ces moments que le manager commercial peut introduire quelques marges de
manœuvre dans le processus (rappeler que les objectifs sont incontournables mais
qu’il a la possibilité de les pondérer différemment par exemple). C’est enfin un
moment où l’on peut évaluer le potentiel d’une personne, envisager de la faire évo-
luer au sein même de l’équipe.
Pour ne rien oublier lors du face-à-face, il est vivement conseillé de se constituer
une feuille de route récapitulant les différents sujets à aborder, et ce dans le bon
ordre. Celle-ci doit rester une trame dont il faudra savoir se détacher lors de l’entre-
tien en pratiquant une écoute active. C’est le moment où des informations capitales
peuvent être livrées (comme l’aspiration à changer de poste, le projet de quitter
l’entreprise, un évènement familial fort…).
Il est important, en début de rencontre, de rappeler au collaborateur les moda-
lités de l’entretien : sa durée, le support et la nécessité d’un dialogue constructif.
Le collaborateur doit sentir qu’il peut prendre la parole librement et pouvoir
obtenir des éléments sur les orientations stratégiques de l’entreprise ou sur cer-
tains projets.
L’entretien doit avoir lieu dans un endroit neutre, une salle de réunion par exem-
ple, mais en aucun cas dans le bureau du manager ou dans celui du commercial. Si
le manager dispose du temps nécessaire pour se rendre dans la région de chaque
commercial, c’est encore mieux. Pour rationaliser ses déplacements, il peut choisir
un point de chute et y mener les entretiens des commerciaux œuvrant dans ce péri-
mètre. Il faut prévoir 1 h 30 à 2 heures pour ce rendez-vous important. Il faut aussi
se rendre totalement disponible et par conséquent couper le téléphone portable. Le
document doit être signé par les deux parties.

3 La gestion des moments difficiles : les crises, les sanctions,


les départs
3.1 La gestion de l’échec

Dans un métier où la performance est centrale, l’échec se définit comme « l’inca-


pacité du vendeur de satisfaire, pendant une certaine durée, les attentes réalistes de
performances établies conjointement par le directeur des ventes et le vendeur, ces
attentes étant typiquement, mais pas toujours, exprimées en termes de production de

100
La gestion de la carrière d’un commercial

revenus » (Morris et al, 1994). Devant l’échec, le manager doit savoir analyser la
situation (Moguet, 2007). Elle peut parfois être très complexe, tant les raisons peu-
vent être diverses.
Trois hypothèses s’ouvrent au manager, qui s’appuient chacune sur une informa-
tion rigoureuse et objective, validée lors d’un entretien :
– soit le vendeur a à affronter un contexte exceptionnel qui le met en difficulté :
une situation personnelle problématique (divorce, maladie…) ou un contexte
professionnel non anticipé (liquidation du principal client, nouveau concurrent
sur la place…), dans ces deux cas, le manager doit encourager ;
– le vendeur ne sait pas faire, déficit de compétences, méconnaissance du produit,
du marché… une formation est alors à envisager, si le vendeur montre le poten-
tiel nécessaire. Dans le cas contraire, le changement de poste, voire le licencie-
ment, est à envisager ;

 Repères Les stratégies d’autohandicap

Les stratégies d’« auto-handicap » sont paradoxales : dans le but de sauvegarder l’estime
de soi, le commercial va dresser lui-même des obstacles sur la route de ses propres succès
ou de son propre progrès. On peut identifier quatre stratégies fondées sur les excuses anti-
cipées (qui peuvent servir, le cas échéant, de justifications pour expliquer l’échec).
– les objectifs impossibles : les buts à atteindre sont tellement élevés que l’échec est pres-
que certain, la cause de l’échec ne peut donc pas être attribuée à l’individu, mais à la trop
grande difficulté de la tâche,
– les objectifs inratables : se fixer des buts tellement bas qu’on n’a aucun risque d’échouer,
manipulant la limite basse de l’« intervalle de satisfaction »1, le vendeur est alors exposé à
l’ennui,
– la cause prétexte : le commercial met en avant une faiblesse ou un handicap mineur afin
d’éviter de laisser paraître, ou de révéler, une faiblesse plus importante pour son estime
personnelle (comme paraître incompétent) ; l’anxiété est l’alibi le plus parfait ;
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

– le pessimisme défensif : en émettant des doutes sur son propre niveau de préparation ou sur
celui de son entreprise ou en exagérant la difficulté de la tâche qui l’attend, le commercial cher-
che à se motiver lui-même. En élevant son niveau d’anxiété lié à un échec qu’il rend volontaire-
ment probable, il est conduit à s’investir fortement afin d’éviter celui-ci. Les commerciaux
adoptant une stratégie de pessimisme défensif obtiennent, de manière caractéristique, des
performances au-dessus de la moyenne, du fait des hauts niveaux d’effort consentis. Le
commercial proclame alors son manque de préparation ou son mécontentement vis-à-vis de la
qualité du travail réalisé, et obtient généralement une haute performance.
D’après Inizan, 2003.

1. C’est l’intervalle qui existe entre la performance la plus basse qu’un commercial peut réaliser sans éprouver
de mécontentement et la meilleure performance qu’il puisse espérer réaliser (Locke et Latham, 1984)

101
L'ANIMATION DES FORCES DE VENTE

3.2 La nécessaire sanction

Autant le manager commercial doit savoir encourager, autant il doit savoir sanc-
tionner. Sa capacité de discernement peut être mise à rude épreuve tant les person-
nalités dans les équipes sont différentes. Mais savoir marquer les limites est un enjeu
essentiel du management commercial. La parole peut suffire dans un premier temps,
le relais de l’écrit se montre souvent indispensable, avec la rédaction d’un avertis-
sement. L’ensemble des motifs doit alors être clairement rappelé, ainsi que la spéci-
fication d’une échéance pour ramener la situation à la normale.

 Repères Exemple de courrier valant avertissement

Pierre,
Malgré mes nombreuses relances, dont la dernière remonte à notre échange téléphonique
du 25 janvier, je n’ai toujours pas reçu par écrit la validation des objectifs pour 2009. Je te
rappelle que la demande initiale t’a été adressée ainsi qu’à toute l’équipe le 28 décembre
dernier.
Je suis obligé de voir dans ce retard une forme de mauvaise volonté, ce que je n’admets
pas.
Par ailleurs, ceci m’interdit de compiler l’ensemble des objectifs de la région et retarde leur
communication à la direction commerciale et à l’équipe.
Ceci a valeur d’avertissement. Sans réponse de ta part d’ici au vendredi 28 janvier, je pren-
drai en compte les objectifs proposés et serai obligé d’entamer une procédure disciplinaire
à ton encontre.
Comptant sur ta réaction rapide.
Régis LEBRUN
Chef de ventes

3.3 La gestion du départ

Évoquer le départ d’un commercial, c’est poser la question de la raison qui le


pousse à s’en aller, surtout si ce départ est de son initiative. Souvent, il y aura eu des
signes d’alerte, mais auront-ils été perçus par le management ? Une fois de plus, le
manager commercial de proximité est mis à rude épreuve puisqu’il doit être à
l’écoute du vendeur suffisamment insatisfait pour partir, tout en n’ayant souvent
aucune marge de manœuvre permettant de le retenir.

102
La gestion de la carrière d’un commercial

Deux causes sont particulièrement explicatives du départ d’un commercial : l’im-


plication et la rémunération.
– Comme nous l’avons vu, l’implication est essentielle dans la performance, sa
baisse peut être motivée par toutes sortes de facteurs : manque de reconnais-
sance, effet de lassitude, moindre satisfaction vis-à-vis du manager… Il est très
important de mener un entretien avec la personne en partance pour comprendre
les raisons de son départ. L’objectif est d’éviter d’autres cas, compte tenu du
coût d’un départ : coût visible du recrutement et de l’intégration d’un rempla-
çant, coût caché de la détérioration du moral de ceux qui restent. Sinon, le mana-
ger risque d’avoir à gérer un « mauvais turn-over » : ce sont les bons qui s’en
vont et les moins performants qui restent, faute d’opportunités.
– La rémunération est une des causes principales motivant les départs volontaires
(Borgi, 2000) : le commercial compare sa rémunération à celle de ses collègues
et fait le constat qu’elle est à son désavantage (sentiment d’iniquité interne), il
la compare à celles de commerciaux dans des entreprises qu’il considère comme
référentes avec le même diagnostic (sentiment d’iniquité externe). Il perçoit
négativement le lien entre ses efforts et la rétribution perçue (justice distributive)
ou encore estime que les procédures qui évaluent son travail et sa rétribution ne
sont pas justes (justice procédurale). Dans chacun de ces scénarios, le vendeur
aura sûrement eu l’occasion d’exprimer sa frustration. Mettre en place une veille
comme des procédures de rattrapage est une des actions managériales possibles
pour remédier aux départs non souhaités.

3.4 La question de la loyauté

Bien souvent, le manager commercial réagit très mal au départ d’un des membres
de son équipe, évoquant le manque de « loyauté ». Éviter d’entrer dans ce piège
affectif permet d’envisager une « remédiation » efficace du phénomène explicatif
du départ comme un éventuel retour quelques années après de ce salarié. La « judi-
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

ciarisation » de plus en plus fréquente des départs de salariés agit comme un « effet
cliquet » sur le processus de carrière professionnelle et interdit à beaucoup d’entre-
prises (comme à des salariés) la possibilité d’un come-back, avec tout l’enrichisse-
ment d’une expérience différente. Enfin, le départ volontaire des commerciaux est à
regarder plus globalement à travers le prisme d’un nouveau rapport des salariés à
l’entreprise : son instrumentalisation dans un projet de carrière individuel.

103
L'ANIMATION DES FORCES DE VENTE

 Repères Équité, transparence et stimulation

Le cas de l’entreprise Euler Hermès


Chez Euler Hermès, chacun des 45 commerciaux sait exactement combien gagne ses homo-
logues, qu’ils soient juniors ou seniors. Il y a dix-huit mois, le directeur général de la filiale
d’AGF a supprimé l’ancien système, qui garantissait à chaque vendeur 23 000 euros bruts
annuels de fixe et autant de variable durant 36 mois. Désormais, le fixe dépend de l’expé-
rience. « Il oscille entre 27 000 euros bruts annuels pour un junior et 38 000 euros pour un
senior, sachant qu’il existe une marge de plus ou moins 10 % en fonction des profils indivi-
duels. » Forte de ce système, qu’elle juge « motivant et équitable », l’entreprise a adopté
une politique de transparence totale, du moins au sein d’un même niveau hiérarchique.
« Les performances sont connues et les mécaniques salariales aussi. Chaque commercial
peut, par conséquent, calculer précisément le bonus de son confrère. » Les avantages de
cette politique ? « Nous avons tous le sentiment d’apporter notre pierre à la performance
économique du groupe. » Ce système est, de plus, particulièrement incitatif : « Cela montre
qu’en étant au top, on peut gagner beaucoup d’argent. » Et de citer l’exemple de ce
commercial qui, en 2005, alors que le nouveau dispositif salarial n’avait été mis en place
qu’en milieu d’exercice, a perçu quelque 60 000 euros de bonus net annuel. « Tout le
monde l’a su, ce qui a créé une forte émulation. Le regard d’autrui valorise les uns et dyna-
mise les autres, estime le directeur général. Et puis, lorsqu’un système de rémunération est
parfaitement juste, il n’y a pas de mal à le dire ! » Bien sûr, une telle politique n’est pas tout
à fait sans risques : « En connaissant la rémunération exacte de leurs homologues les
mieux payés, les commerciaux les moins performants ou ceux qui ont connu un passage à
vide peuvent se décourager… C’est le revers de la médaille. Nous l’assumons. » Une limite
existe, toutefois, à la transparence : « D’un niveau hiérarchique à l’autre, nous ne donnons
pas les montants de rétribution. Il y a bien des indiscrétions, des bruits de couloir… Mais
nous ne communiquons pas de façon officielle. Du moins pas encore. » Un exemple ? « Mes
commerciaux savent comment se décompose ma rémunération, quels sont mes objectifs
et mes critères variables. Mais pas combien je gagne. Demain, peut-être, ferons-nous un
nouveau pas en avant en matière de transparence. »
D' après Action Commerciale n° 267, 1er octobre 2006.

Conclusion

Manager une équipe commerciale est d’une grande complexité. Il faut savoir
s’adapter à chaque personne, tout en maintenant une grande équité dans la gestion
des moyens à sa disposition : salaire, primes, bonus, objectifs… L’exercice est
d’autant plus périlleux que les attentes vis-à-vis du management sont très fortes. Le
rapport au manager commercial est central dans la vie des équipes, mais également
dans la performance obtenue : qu’elle soit économique (développement du CA, opti-
misation des marges…) ou sociale (gestion d’un bon turn-over, développement des
compétences…).

104
Chapitre
Les nouveaux
5 enjeux de
la relation client

L e manager commercial est au cœur de la relation client. L’évolution des dis-


positifs de mises en relation grâce aux technologies de l’information, comme
celle du comportement du client-consommateur, exige de lui une capacité à inscrire
la performance de ses équipes dans une chaîne de la valeur commerciale. Ce nou-
veau défi lui demande de mobiliser des compétences d’intelligence commerciale, de
dialogue avec les fonctions connexes, et de pilotage de populations « indirecte-
ment » commerciales.
Le client est toujours au centre de la préoccupation des entreprises. Les moyens
d’entrer en contact avec lui se sont multipliés, diversifiés et sophistiqués. L’enjeu
principal reste le même : bien le connaître pour nouer avec lui un lien privilégié et
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

lui faire la bonne offre au bon moment. La gestion de la relation client (GRC) est
donc devenue une fonction à part entière dans nombre d’organisations, elle pilote
les actions de communication, le merchandising dans les points de vente, la relation
téléphonique (call center pour appels entrants et sortants, SMS), la distribution
automatique, les sites Internet, et toutes les personnes dites « au contact » de la
clientèle.
Un idéal de la désintermédiation a poussé bon nombre d’entreprises à penser que
les forces de vente pouvaient disparaître, compte tenu de ces vastes dispositifs. Il n’en
est rien, et longtemps traitée à part, la problématique de la relation client rejoint peu
à peu le giron de la fonction commerciale. À cela trois raisons : la saturation de la
concurrence et l’urgence de la différenciation grâce à une relation client distinctive,
105
LES NOUVEAUX ENJEUX DE LA RELATION CLIENT

le rôle de la relation interpersonnelle dans l’enjeu majeur de la fidélisation, et la mon-


tée en puissance des exigences et de la méfiance du client-consommateur vis-à-vis
d’une relation purement technologique et dépersonnalisée.
Une autre évolution de la relation client est capitale, même si elle est diffuse. Il
s’agit de l’irruption du client dans des secteurs d’activité traitant jusque-là avec un
usager (service public), un patient (hôpital), un étudiant ou un élève (système édu-
catif). Cette mutation amène à repenser la relation client avec des personnes « au
contact », qui ne pratiquent pas d’acte de vente mais ont un fort impact sur la per-
formance commerciale globale.
Ce chapitre s’organise autour des trois grandes thématiques suivantes :

Section 1 Q Une vente inscrite dans une relation client multicanal


Section 2 Q Principes et enjeux d’une Sales Force Automation (SFA)
Section 3 Q Les nouveaux visages de la relation client

Section
1 UNE VENTE INSCRITE DANS UNE RELATION
CLIENT MULTICANAL

Les occasions pour le client d’entrer en contact avec des entreprises sont de plus
en plus nombreuses et variées. Ce réseau relationnel à la fois dense et complexe
permet à chaque consommateur de gérer son processus d’achat comme il l’entend.
Si l’entreprise apprend à développer des stratégies commerciales et marketing tirant
profit de ces multiples canaux, le management commercial ne semble pas avoir su
maximiser le potentiel de ce nouveau contexte.

1 Le développement de la gestion de la relation client (GRC)


dans la vente multicanal
1.1 La GRC (gestion de la relation client) ou CRM (Customer Relationship
Management) : définition et enjeux
Il est maintenant trivial de dire que le développement d’Internet a complètement
modifié les relations entre l’entreprise et ses clients-consommateurs et prospects.
Si des secteurs ont avancé plus vite que d’autres (le tourisme, la librairie, l’infor-
matique ont été pionniers en la matière, l’habillement est maintenant leader), si les

106
Une relation client multicanal

petites entreprises n’en ont pas encore la maîtrise complète, tous les secteurs sont
maintenant concernés par la GRC.
La GRC permet de décrypter le comportement du client, ses attentes, ainsi que la
valeur qu’il apportera à l’entreprise. Le principe est de recueillir l’ensemble des
informations le concernant dans des bases de données que toutes les fonctions –
voire tous les salariés – de l’entreprise peuvent se partager.
La GRC se définit selon trois approches :
– un processus relationnel : l’objectif est de développer une connaissance abou-
tie et à jour du client et du prospect (on parle alors de PRM, pour Prospect
Relationship Management), comme de lui donner l’occasion d’avoir des « nou-
velles » régulières et attractives de l’entreprise. L’objectif est aussi de pouvoir
communiquer de façon segmentée avec la clientèle en fonction de la stratégie
marketing et commerciale : ainsi certains clients « à potentiel » pourront béné-
ficier d’une visite de la force de vente, d’autres, à moindre rentabilité, seront
orientés vers le site marchand ou le centre d’appel ;
– un processus organisationnel : la GRC permet d’optimiser le flux d’informa-
tions et de mise à disposition du service ou du produit de sa conception à sa
post-consommation. Elle est l’outil indispensable de l’optimisation de la valeur
commerciale de l’organisation. La GRC doit être conçue comme la plateforme
d’échange de toutes les fonctions de l’organisation, et même de l’interface avec
l’ensemble des parties prenantes (intégrer les fournisseurs par exemple). On
conçoit donc que la mise en place d’une GRC automatisée amène à repenser
l’ensemble du flux d’information et de la chaîne de la valeur commerciale ;
– un processus technologique : c’est l’automatisation de la captation, du traite-
ment, et de la mise à jour de toutes les informations pertinentes dans l’environ-
nement de l’entreprise.

La mise en place d’un programme CRM (ou GRC) est souvent au service d’une
stratégie de fidélisation des clients, comme ce fut le cas pour la chaîne de magasins
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Nature et Découvertes.

 Repères Interview de Marie-Claude Poelman,


directrice des systèmes d’information
de Nature et Découvertes
En 2005, Nature et Découvertes a choisi la solution d’encaissement et de CRM Agil, et a
réussi à fidéliser 200 000 clients.
« Nous sommes certifiés Iso 14001, c’est-à-dire que nous avons une démarche environne-
mentale très forte. Nous avons choisi notre logiciel d’encaissement en ligne avec ces exi-
gences. Au lieu d’imprimer en double les tickets de caisse (le ticket client et le ticket maga-
sin), Agil nous donne par exemple la possibilité de stocker le ticket destiné au magasin sous

☞ 107
LES NOUVEAUX ENJEUX DE LA RELATION CLIENT

☞ format PDF. Il est également possible de paramétrer le logiciel afin de raccourcir la longueur
des tickets imprimés (en choisissant d’y mettre moins d’informations), ce qui permet au
final d’économiser une quantité non négligeable de papier.
[…] Sur trois visiteurs entrés chez Nature et Découvertes, seul un ressortait en ayant acheté
un produit. Notre vraie difficulté a donc été de transformer les visiteurs en clients. Avec la
suite logicielle de Generix, nous avons pu lancer un programme de fidélisation basé sur de
vraies études qualitatives. L’idée est de remonter systématiquement l’information des tic-
kets de caisse et de la rapprocher des profils clients, d’où des opérations vraiment ciblées.
Ainsi, nous faisons des semaines de promotion sur telle ou telle gamme de produits, mais
aussi des ristournes sur les visites « nature » que nous organisons ; nous envoyons égale-
ment des invitations gratuites à des salons touchant aux thématiques nature et environne-
ment… En réalité, nous poussons davantage des services que des produits vers nos
clients. »
D’après Cailloce, L., Lsa.conso.fr, 23 septembre 2008.

1.2 La liaison supply chain/GRC

Intégrer la GRC, c’est-à-dire le système d’information concernant les clients, à la


supply chain, (la supply chain ou chaîne logistique, désigne l’ensemble des maillons
de la logistique d’approvisionnement : achats, gestion des stocks, manutention,
stockage, etc.) naturellement tournée vers la gestion de la production et de la logis-
tique, présente de nombreux avantages, au sein desquels on peut citer :
– une meilleure gestion des stocks, puisque l’on peut mieux anticiper les cycles
d’achat. Ce dispositif permet à l’entreprise de s’engager lors de la prise de com-
mande sur des délais de livraison (système ATP : Available To Promise) ;
– une amélioration de la qualité de l’offre : l’entreprise travaille à partir d’infor-
mations sur les besoins des clients, et non d’hypothèses. Elle peut ainsi, à partir
des préférences du client et de son historique d’achat, lui proposer un produit de
substitution ou des délais de livraison mieux adaptés ;
– une traçabilité en temps réel : les entreprises permettent aux clients de suivre
leurs commandes en temps réel ;
– une réactivité augmentée, puisque l’entreprise est en relation permanente avec
ses clients et bénéficie d’une information en continu ;
– la possibilité d’intégrer le cost to serve lors de la prise de commande : l’entreprise
peut connaître la valeur ajoutée de chaque commande, afin de les orienter en fonc-
tion de sa stratégie (comme se centrer sur les clients à plus forte valeur ajoutée).

1.3 La vente multicanal

La vente multicanal désigne une stratégie de distribution de biens ou de services


utilisant de multiples canaux de distribution et de mise en relation : Internet, la télé-
108
Une relation client multicanal

phonie fixe et mobile, la télévision interactive, un réseau traditionnel de guichets ou


de magasins, la vente par catalogue, la distribution automatique, la force de vente
itinérante. La vente multicanal permet au client de choisir les modalités de son pro-
cessus d’achat comme le moyen de sa mise à disposition.
La mise en place et la gestion d’un dispositif multicanal sont d’une complexité
redoutable. On interpelle :
– la stratégie marketing et commerciale : car il s’agit de définir des triades
produit-service/marché/canal (Negro, 2001). Ainsi un nouvel album de chan-
sons sera proposé au marché des seniors globalement plus attachés au support
physique, sous forme d’un CD en vente en ligne ou dans des magasins, alors que
la même offre sera mise en ligne pour les plus jeunes avec la possibilité de télé-
chargement au titre ;
– la gestion opérationnelle : les comportements d’achat sont de plus en plus
multicanaux et exigeants (le « tout, tout de suite », l’attente de personnalisation
du produit, et une gestion efficace de l’après-vente…), il faut donc veiller à la
formation et à l’information des vendeurs ;
– le contrôle de gestion, pour identifier les performances relatives de chaque
canal pour chaque produit-service et/ou un segment de la clientèle ;
– le management des ressources humaines, afin de maintenir la motivation et la
performance d’équipes qui peuvent se sentir mises en concurrence, surtout lors
de l’intégration d’un nouveau canal. Il est en effet essentiel de travailler à la
mise en synergie des différents canaux (voir l'encadré ci-après), et éviter à tout
prix leur cannibalisation (c’est-à-dire que les achats effectués on line par exem-
ple se fassent au détriment de ceux réalisés en boutique).

Lors de la création d’un canal alternatif, il faut donc penser en termes de fluidité,
de cohérence et de rebond :
– fluidité : il faut que le client puisse passer facilement d’un canal à l’autre, le site
peut ainsi indiquer la localisation des points de vente et la façon de s’y rendre,
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

comme il sera fait mention du site en magasin ;


– cohérence : celle-ci doit s’organiser entre l’offre du site et celle du magasin ;
– rebond : il s’agit de maximiser les synergies entre magasin et site.

Il faut penser le site comme un prolongement de l’usage du magasin : avant, il


facilite la prise de décision (choix, comparatifs, testimoniaux…) ; après, il permet de
donner des conseils d’usage et de suivre la relation client. Le site peut également
être conçu comme outil de formation et d’information pour les vendeurs (fiches
d’usage, fiches techniques, comparaison avec la concurrence…).
Cela amène à un impératif : le manager commercial supervisant les forces de
vente en magasin doit faire partie du groupe de projet à l’origine du cahier des

109
LES NOUVEAUX ENJEUX DE LA RELATION CLIENT

charges du site, sinon, les frustrations risquent d’être fortes, tant pour le client que
pour les vendeurs.
Les managers d’équipe doivent eux-mêmes dialoguer sur leurs différentes straté-
gies afin de les synchroniser et de faire jouer une réelle synergie. Mais c’est aussi
dans le dispositif de rétribution que réside le moteur de la réussite de la vente multi-
canal : ce peut être par exemple la mise en place d’une commission touchée par une
équipe de vendeurs en magasin suite à un achat sur le site marchand par quelqu’un
habitant sur la zone de chalandise.

 Repères Exemples de synergie commerciale entre


les canaux magasins et le site
Indication de l’adresse des points de vente de l’enseigne : Marionnaud propose une liste et
l’adresse de ses points de vente, Ikéa donne un itinéraire personnalisé à partir du domicile.
Promotion croisée d’actions commerciales : pour les 10 ans de Fnac.com, les magasins pro-
posaient des leaflets faisant la promotion du site.
Jouer la régulation : chez Fnac Éveil et Jeux, s’il y a rupture du produit en magasin, le ven-
deur peut donner au client une fiche d’information sur le site, et même passer la com-
mande en ligne pour lui du magasin, avec un code spécial dans les deux cas pour que les
frais de livraison soient gratuits.
Montrer sur le site l’offre du magasin : c’est ce que font Intersport ou Ikéa qui indiquent
très clairement les produits vendus uniquement sur le site, pour éviter les déceptions en
magasin.
Création de minisites par point de vente : l’enseigne Intermarché valorise ainsi sur son site
l’ensemble de ses points de vente de façon personnalisée.
D'après Dia-mart.fr

2 Les impacts de la vente multicanal et de la GRC sur la fonction


commerciale et les vendeurs
2.1 Les nouveaux métiers1

Cette arrivée du contact client on line a généré de nombreux nouveaux métiers,


comme il a modifié les métiers déjà installés. On peut citer :
– le téléconseiller : ses fonctions peuvent se limiter à gérer les appels entrants ou
sortants, ou bien animer une activité multicanal. De simple agent d’information,
il devient progressivement un véritable commercial qui propose et vend des pro-
duits dans un objectif d’amélioration de la relation client. Cette fonction évolue

1. Source : www.en-contact.com/httpdocs/le_magazine.
110
Une relation client multicanal

dans des secteurs comme la banque vers des métiers de conseillers clientèle
multicanal à part entière ;
– l’animateur commercial : coach des conseillers clientèle on line, il est là pour
favoriser et améliorer les techniques de vente à distance. Quel est le produit à
vendre et à quel client ? Quelle est l’attitude à adopter, la meilleure allocution à
utiliser pour épouser les besoins du client ? Comment enrichir le panier de cha-
que abonné ? Il est en contact direct avec les services commerciaux et à la pointe
des offres disponibles ;
– l’animateur de communauté, aussi appelé modérateur ou « forumeur », répond
aux questions des internautes concernant le site pour lequel il travaille, par
exemple par le biais d’un forum. Outre sa mission d’information, il doit aussi
être capable de repérer les intrus qui viendraient déranger les codes de fonction-
nement, voire l’éthique du site, ce qui pourrait provoquer la fuite des autres
internautes et donc une baisse de fréquentation. Les modérateurs ont ainsi la
tâche délicate de stimuler le client en mettant en valeur son nom, sa photo et son
profil. La troisième mission de l’animateur de communauté est à caractère
commercial : il peut, par exemple, mener des actions de rabattage sur d’autres
forums ou des newsgroups liés à son site ;
– le directeur de centre multicanal : sa mission est d’assurer une parfaite cohé-
rence dans le discours adressé aux clients et prospects de la marque, quels que
soient les canaux utilisés : marketing direct, centres d’appels, Internet,
réseaux de vente… Il s’agit de passer d’une organisation par silo à une appro-
che multicanal. Le client doit avoir l’impression qu’il s’adresse à une seule et
même entreprise. Sa seconde mission est d’être à l’écoute de ses clients afin
de les fidéliser. Enfin, il se doit d’utiliser toutes ses ressources et ses outils
pour faire la publicité de la marque. Chaque contact doit se transformer en
lead, chaque lead en prospect, chaque prospect en vente, chaque client en
prescripteur de la marque ;
– le directeur de la relation client : chef d’orchestre des équipes spécialisées, il
rejoint de plus en plus souvent le comité de direction des entreprises et apporte
sa vision et ses compétences aux autres décideurs. Ses missions sont : placer le
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

client au cœur de la stratégie marketing, accepter le challenge du retour sur


investissement, maîtriser les nouveaux médias, explorer de nouveaux modes de
collaboration avec les agences de communication, contribuer au développement
du chiffre d’affaires.

2.2 La remise en question des pratiques classiques de la vente

La vente multi canal modifie en profondeur les comportements du client.


On observe :
– une modification des étapes du processus d’achat car toutes les combinaisons
sont mobilisées : recherche d’information sur Internet et achat sur le point de
111
LES NOUVEAUX ENJEUX DE LA RELATION CLIENT

vente (Click and Mortar), évaluation du produit en magasin et achat sur le Net,
ou encore recherche par Internet et achat par téléphone ;
– un changement du comportement du client face au vendeur en magasin : il est
plus pressé, mieux informé, plus avancé dans son processus de décision, moins
sensible aux argumentations ou à l’atmosphère du lieu de vente. Ce client vient
avec plusieurs objectifs : chercher un complément d’information, toucher le pro-
duit, être rassuré sur son choix, ou effectuer l’achat.

On mesure les impacts que cette nouvelle attitude peut avoir sur la relation avec
le vendeur (Vanheems, 2008) :
– le client en sait plus que lui sur le produit, voire sur l’offre globale de l’enseigne,
le mettant souvent en difficulté ;
– une fois l’achat fait sur Internet, le simple retrait en magasin limite le métier du
vendeur à celui de simple manutentionnaire ;
– enfin, le vendeur n’a souvent pas droit à sa commission, n’ayant pas effectué
la vente.

Il faut donc repenser globalement la façon de motiver, animer, stimuler la force de


vente en magasin, pour que le vendeur joue son rôle de mise en cohérence des dif-
férents canaux mobilisés par le client. On retient l’importance de :
– former les vendeurs sur le contenu du site marchand et de ses offres ;
– respecter la répartition des offres exclusives par canaux, en signalant clairement
ce que l’internaute pourra trouver en magasin, ou pas ;
– synchroniser des actions commerciales entre le site et les points de vente ;
– permettre au vendeur de faire une vente par un autre canal ;
– donner un accès Internet en magasin, pour permettre au vendeur d’être informé
de ce que propose le site, comme la concurrence ;
– le former à un bon accueil du client venant par Internet, sans lui manifester
aucune hostilité.

3 Animer le vendeur dans le contexte d’une vente multicanal


3.1 Savoir mettre en avant la triade produit-canal-marché

L’arrivée d’un nouveau canal doit être valorisée, elle permet de mettre en avant la
« manière de vendre », et de valoriser une offre produit-canal. La transaction ne porte
plus sur le produit ou le service mais sur une offre élargie, qui inclut la mise à dispo-
sition. De facto, il faudrait parler de triade produit-canal-marché car tous les clients ne
se rejoignent pas sur le choix des canaux. Si certains trouvent agréable et pratique de
choisir leur futur jean à deux heures du matin à domicile, si d’autres font du smart
shopping en surfant sur Internet (ou les mêmes, à d’autres moments), d’autres pré-
112
Une relation client multicanal

fèrent aller faire un tour en magasin, on sait ainsi que les « grosses courses » hebdo-
madaires en hypermarchés sont souvent assimilées à une balade en famille. Une fois
les produits proposés en ligne ou en magasin bien identifiés, le commercial, télécon-
seiller ou vendeur en magasin sera à même de proposer la formule qui conviendra le
mieux à son client, lui offrant pour le coup une « offre élargie ».
Pour cela, il doit maîtriser l’ensemble des facteurs expliquant les différences de
comportement du consommateur multicanal :
– l’urgence de la livraison : les catégories pour lesquelles les consommateurs
attendent une livraison rapide peuvent être l’objet d’une recherche d’informa-
tions on line, mais la transaction aura lieu via un canal off line (magasin de
proximité, par exemple) ;
– la complexité de la livraison : un produit difficile à livrer (taille, périssabilité)
présente une propension plus grande à l’achat off line en magasin ;
– les habitudes d’achat à distance : depuis longtemps une partie importante des
achats de voyages se fait on line (téléphone, minitel) ;
– l’achat impulsif ou réfléchi : les catégories de produits dont le cycle d’achat est
long (les voitures par exemple) seront l’objet d’une recherche importante d’in-
formations on line, alors que la transaction se réalisera off line ;
– le besoin de toucher ou d’essayer le produit : ainsi, dans les cybermarchés, il
est plus simple de se faire livrer des bouteilles d’eau ou des conserves que de
déléguer le choix de fruits et de légumes frais.

3.2 Proposer de la formation et de l’accompagnement

La proposition d’une vente multicanal renforce le pouvoir de contrôle du client, il


y a un enjeu fort à le former aux nouvelles tâches qui lui incombent ; c’est le cas des
compagnies aériennes qui accompagnent leurs clients dans l’impression, sur des ter-
minaux, de leur carte d’embarquement à l’aéroport. Les banques qui développent de
plus en plus le concept d’agences avec GAB (gestion automatique bancaire) inves-
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

tissent beaucoup de temps auprès des personnes réticentes à ces nouveaux gestes. Le
mouvement qui consiste à « mettre le client au travail » (Dujarier, 2008) est amené
à se développer encore ; l’objectif, pour l’entreprise, est de l’amener à prendre en
charge les tâches sans valeur ajoutée et répétitives. C’est le cas de la gestion des
comptes au quotidien, des dépôts ou des retraits d’argent, de l’impression des RIB.
L’entreprise est guidée par la création de valeur, en pariant sur la réduction des coûts
commerciaux que représentent les personnes au contact, et sur une amélioration du
contenu de leurs missions.
Les résistances existent devant le fait que ces nouvelles configurations impliquent
des pertes d’emplois (on peut citer les caissières dans la grande distribution qui sont

113
LES NOUVEAUX ENJEUX DE LA RELATION CLIENT

peu à peu supplantées par des caisses automatiques) et une mobilisation du temps et
de l’énergie du client.
Il faut également admettre que les évolutions sont encore en marche et que
d’autres modalités de vente vont encore voir le jour, comme l’illustrent les exemples
de l’encadré ci-dessous.

 Repères Le m-commerce

Autre tendance japonaise qui gagne déjà l’Europe : le m-commerce. Réalisé à partir du télé-
phone mobile des jeunes citadins, ce mode de consommation a généré l’an dernier près de
1,5 milliard d’euros de chiffre d’affaires, au pays du soleil levant.
Avec les terminaux de 3e génération aux écrans surdimensionnés et l’augmentation du
débit sur les réseaux mobiles, les urbains ont plus facilement recours à ce type de consom-
mation, notamment durant les temps de transport. Pour l’instant, le téléchargement de
musiques et de clips constitue l’essentiel des achats, mais avec plus de 10 000 sites de
m-commerce et 71 % des utilisateurs de mobiles se connectant au moins une fois par
semaine à Internet, on assiste certainement à l’essor d’un nouveau type de commerce.
Dans le domaine du tourisme, par exemple, la société Call Expert propose ainsi des packs
« trois en un » : envoi de SMS sur des fichiers qualifiés, mise en relation avec le call center
7 jours sur 7 et 24 heures sur 24 grâce à la pression d’une seule touche sur le mobile, et
transformation des ventes. Les trois étapes peuvent être gérées en 24 ou 48 heures.
D’après Le Journal professionnel des centres de contact et de la relation client (En-contact.com).

3.3 Rassurer et motiver les vendeurs

On peut identifier1 quelques facteurs de résistance des forces de vente à cette nou-
velle forme de valorisation du client :
– des divergences de vision : la volonté des équipes marketing de piloter les
agendas des commerciaux vers les clients à fort potentiel ou valeur se heurte au
feeling des commerciaux ;
– l’incohérence entre la mesure de performance et le concept de valeur : le
mode d’évaluation des forces de vente est souvent basé sur des indicateurs de
volume. L’approche « nombre » est prédominante, car facile à piloter et à suivre.
L’introduction d’un indicateur de valeur complexifie et peut pénaliser les résul-
tats et les efforts des équipes de vente, avec au final une incompréhension des
équipes qui gèrent au quotidien « les bons ou les mauvais clients », et qui ne
comprennent plus l’indicateur de « valeur » affiché ;

1. Source : www.blog-crm.com/valeur-client/35-valeur-client/75-les-facteurs-de-resistance-a-la-valeur-client.html
114
Principes et enjeux d’une Sales Force Automation

– une frustration assez quotidienne de l’utilisation d’un outil peu adapté :


comme la durée de la mise en place de la base de données, les bugs dans le sys-
tème informatique ;
– le client est ROI1 : accepter que des clients ne soient pas rentables est parfois
impossible. L’entreprise peut ne pas être dans une logique marchande (cas des
mutuelles) ou refuser d’assumer ses dysfonctionnements.

Il est donc indispensable de rassurer les vendeurs lors de l’ouverture d’un nou-
veau canal de distribution. Ainsi, le manager commercial devra être capable de
proposer un système de rémunération et de stimulation cohérent avec la politique
multicanal de l’enseigne, pour éviter que les équipes liées à chaque canal ne se
sentent en concurrence.
Dans le secteur bancaire, par exemple, les agences physiques ont évidemment
craint la concurrence d’Internet et la diversification des services proposés sur ses
sites… à tel point que les grandes banques telles que BNP Paribas, la Bred ou
encore la Barclays ont stipulé que, lorsqu’un client souscrivait un produit en ligne,
la commission revenait à l’agence détentrice du compte.

Section
2 PRINCIPES ET ENJEUX D’UNE SALES FORCE
AUTOMATION

Le pilotage des forces de vente constitue la préoccupation principale des managers


commerciaux. Il revêt de véritables spécificités par rapport à nombre de métiers
dans l’entreprise, surtout en ce qui concerne les forces de vente itinérantes, qui fonc-
tionnent en toute autonomie pour la gestion de leur temps. Les technologies de
l’information et de la communication ont complètement changé le paysage, permet-
tant d’établir une traçabilité des vendeurs comme d’en faire les vecteurs actifs d’une
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

véritable veille commerciale.

1 Les Sales Force Automation (SFA)


1.1 Définition d’une SFA

L’automatisation de la force de vente est souvent la dernière brique de la GRC,


elle vise à automatiser le cycle de vente : saisie des objectifs et prévisions ; plans
d’action et diffusion personnalisée aux commerciaux ; gestion des affaires (depuis la

1. Roi, bien sûr, mais aussi rentable (ROI : Return On Investment)


115
LES NOUVEAUX ENJEUX DE LA RELATION CLIENT

proposition jusqu’au contrat) ; suivi des clients (description des actions effectuées et
à réaliser, sauvegarde des comptes rendus d’entretien, requêtes sur les clients ou les
produits, système d’alerte et de relance, gestion du planning des commerciaux) ;
analyse des ventes sous forme de tableaux de bord. En remplaçant des processus
manuels (échanges de documents papier) par des échanges électroniques formalisés,
la SFA a pour objectif des gains de productivité.
Par exemple, après un e-mailing ciblé sur des profils particuliers de clientèle, le
logiciel prend ensuite en charge les retours de la campagne et les distribue vers les
bonnes personnes en fonction de leurs contenus, tout en comptabilisant les informa-
tions essentielles dans une base de données.

1.2 Enjeux et apports des SFA

Les apports des SFA portent sur la compression du temps, la compression de l’es-
pace, l’expansion de l’information stockée et la flexibilité d’usage de cette informa-
tion. Parce qu’elles augmentent les capacités de mémorisation, de traitement, de
transmission, les SFA ont des effets sur :
– la communication : elles permettent de communiquer plus facilement, à coût
plus faible, plus vite, enregistrer et retrouver facilement l’information, en
contrôler l’accès ;
– la décision : en accédant plus facilement à des informations externes, en utili-
sant mieux la connaissance stockée, en combinant plus vite les informations, en
exploitant plus facilement l’information des transactions, les décisions sont
prises plus vite avec une meilleure efficience.

Il y a donc deux flux d’informations, celles qui vont de l’entreprise aux vendeurs
à des fins d’animation, de formation et d’information, et celles attendues des
commerciaux pour alimenter l’information globale de l’entreprise ; on peut parler
alors d’intelligence commerciale.
La SFA elle-même s’organise autour de trois axes :
– la reconnaissance du client grâce à la présentation d’une fiche client complète :
adresses, interlocuteurs, historique de la relation incluant les actions de prospec-
tion et de fidélisation, les commandes et les réclamations ;
– la gestion automatisée des opportunités commerciales : à partir de l’histori-
que du comportement client et des événements, automatisation des alertes et des
relances, synchronisation des agendas et des to-do lists ;
– l’échange d’informations entre les différents acteurs de la relation client :
en mettant en place une SFA, l’entreprise attend des améliorations en efficacité
et en efficience dans trois domaines : la productivité de la force de vente, la ges-
tion de l’information et la relation client.

116
Principes et enjeux d’une Sales Force Automation

 Repères Points d’amélioration de la productivité


de la force de vente par la SFA
– meilleure performance de vente (chiffre d’affaires et part de marché) ;
– réduction des erreurs liées au traitement manuel ;
– réduction des coûts de support ;
– amélioration des taux de conversion (suspects en prospects, prospects en clients) ;
– amélioration du prix moyen de vente par le biais d’une information plus exacte et actua-
lisée sur les tarifs ;
– meilleure prospection par un profilage plus fin des attentes ;
– meilleur processus décisionnel avec accroissement des forces de proposition et plus
grande adaptation au client ;
– meilleure compréhension de l’environnement externe et interne de l’entreprise ;
– suivi analytique des affaires (historique des clients) ;
– connaissance du marché et connaissance technique améliorée (grâce à une information
plus riche et plus accessible) ;
– gain de temps dans les activités administratives et dans l’accès à l’information (le ven-
deur peut donc effectuer un meilleur suivi du client) ;
– accélération du cycle de vente (grâce au cumul des gains de temps à chaque étape) ;
– optimisation de la gestion du temps (programmation des visites, adaptation en fonction
du potentiel et des attentes du client) ;
– meilleure communication auprès des clients grâce aux outils de présentation interactive
et aux supports qui guident le vendeur pour une présentation en fonction du profil du
client et de ses besoins ;
– accroissement de la coordination entre les différents acteurs du service clients (ce qui
permet d’informer et d’orienter les processus internes destinés à créer de la valeur pour le
client) ;
– on observe enfin une plus grande confiance du client grâce à l’amélioration de la qualité
du service et la perception d’une compétence commerciale.
D’après Boujena, Merunka, 2006.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Les gains espérés sont donc nombreux et variés, ils ne peuvent être effectifs que
si la SFA est bien implantée et effectivement utilisée par la force de vente, car, si
les commerciaux peuvent attendre et obtenir beaucoup du système d’information
commercial, la condition est qu’ils l’alimentent de façon régulière et exhaustive
en informations.
Les commerciaux, on l’a vu, sont souvent réticents à ces implantations d’outils
qu’ils vivent comme des instruments de « flicage » du fait de la traçabilité qu’ils per-
mettent, et de perte de temps, car il faut admettre qu’il y a un coût d’apprentissage à
envisager. Les conditions de la mise en place sont donc à identifier et à respecter.

117
LES NOUVEAUX ENJEUX DE LA RELATION CLIENT

2 Les conditions pour une implantation réussie d’une SFA1

On retrouve les étapes classiques de la mise en place d’un nouveau projet.


• Étape 1 : mettre en place un groupe projet
Qui accueille un représentant de la direction générale (pour bien montrer qu’il
s’agit d’un projet stratégique global), un représentant de la direction informatique et
de la direction marketing, le directeur commercial et deux commerciaux terrain (un
réfractaire et un plutôt enthousiaste).
• Étape 2 : définir les objectifs
Recueillir les besoins de chacun, auprès de la force de vente, du directeur commer-
cial, de la direction, du marketing et au service clients, pour éviter de concevoir un
système d’information « en silo », c’est-à-dire sans réelles connections avec son
environnement interne. Après la phase de récolte des attentes, il est essentiel de les
hiérarchiser pour éviter de produire une « usine à gaz ».
• Étape 3 : rédiger le cahier des charges
Le cahier des charges a pour but de présenter le projet SFA auprès des différents
éditeurs consultés. Il sert aussi à mettre l’ensemble du projet par écrit afin d’en avoir
une vision claire et précise. Le document doit expliquer les objectifs et les attentes
de l’entreprise. Pour guider les réponses des éditeurs, il devra mentionner les
contraintes existantes, comme l’utilisation de tel ou tel logiciel. Certaines entre-
prises ne partent pas de zéro, et les solutions existantes peuvent alourdir le projet,
notamment en ce qui concerne la récupération des données.
Le cahier des charges stipule la façon de travailler et les spécificités du métier, qui
peuvent nécessiter des solutions sur mesure. Il faut aussi communiquer sur le profil
de l’entreprise (activité, nombre et type de clients, nombre d’utilisateurs de l’outil),
et demander à l’éditeur, dans sa réponse, d’en faire autant (chiffre d’affaires, effec-
tif, références clients).
• Étape 4 : assurer la communication tout au long du projet
Le directeur commercial se doit de communiquer à son tour de façon plus
directe, tout comme la direction, en mettant en avant les bénéfices de l’applica-
tion. Pour les commerciaux, ceux-ci portent sur des contacts mieux qualifiés, des
relances clients plus efficaces, une meilleure identification des prospects...
• Étape 5 : choisir l’éditeur
Le choix est large avec de grosses structures comme Siebel ou SAP, des sociétés
moyennes comme Selli gent, Pivotal ou Sage, jusqu’à des petits acteurs de type
1. Source : Bailliard, (2008), Action Commerciale no 288, 01/09/2008
118
Principes et enjeux d’une Sales Force Automation

Yellowst one ou Frontrange. Opter pour un petit éditeur, c’est prendre le risque qu’il
puisse fermer ou se faire racheter et que la solution soit abandonnée. Quant à choisir
un gros éditeur, c’est aussi prendre le risque de se retrouver avec une application
trop complexe et surdimensionnée par rapport à ses besoins.
Il faut aussi demander la présence de l’intégrateur afin de juger de ses compétences.
• Étape 6 : tester le déploiement
En créant un groupe de testeurs dont la mission sera d’évaluer le logiciel de
SFA, afin d’améliorer l’outil. Ces pionniers seront des ambassadeurs dans la force
de vente.
• Étape 7 : prévoir une formation pour l’ensemble de la force de vente
Elle est généralement assurée par l’intégrateur. La formation dure en moyenne une
demi-journée. Il faut prévoir une hot line pendant quelques jours afin d’accompa-
gner les commerciaux dans leurs premiers pas face à l’outil. Enfin, il est bon
d’orchestrer une deuxième formation-bilan quelques semaines ou mois plus tard,
afin d’approfondir certains points. La création d’un poste de « M. ou Mme CRM »,
connaissant parfaitement les produits de Salesforce, est souvent un atout.
Au quotidien, le rôle du manager commercial sera ensuite de mieux faire com-
prendre les enjeux et d’aider à lutter contre des résistances et des contournements.
Le commercial considère souvent l’information sur le client comme son capital per-
sonnel et fait l’hypothèse que garder de l’information lui donnera une « longueur
d’avance ». Le management commercial est donc mis à rude épreuve dans l’anima-
tion d’une veille commerciale. Il faut donc qu’il sache :
– gérer l’absence de sensibilité des commerciaux à ces tâches qu’ils considèrent
comme subalternes et périphériques dans l’idée qu’ils se font de leur rôle. Outre
les inclure dans le portefeuille de mission, cette mission peut faire l’objet d’un
objectif rétribué ;
– lutter contre leur envie de garder des informations précieuses pour eux-
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

mêmes ;
– éviter la déception et la frustration de ne pas avoir de retour pertinent et rapide,
ce qui peut leur donner le sentiment d’avoir accompli un travail pour rien.

119
LES NOUVEAUX ENJEUX DE LA RELATION CLIENT

Figure 5.1 — Exemple d’écran de SFA

3 Les implications en termes de formation

La SFA est un puissant moteur d’animation et de formation avec la mise en


place de e-learning. La formation via les nouvelles technologies (Internet, intranet
et CD-Rom) a des atouts et des limites :
Les atouts : une réelle souplesse d’utilisation, le temps de formation peut être
décalé en soirée, après la journée de travail, la possibilité d’offrir une formation
en continu, et bien sûr de faire du sur-mesure et proposer un parcours individuel
et adapté.
Les limites : son caractère très individuel la limite à l’objectif de formation, alors
que se retrouver en groupe, c’est aussi l’occasion de se remotiver, de faire du coa-
ching, de développer le sentiment d’appartenance à la société.
Il vaut mieux alors parler de « mix formation » qui associe formations à distance
via Internet, intranet ou CD-Rom, et des cours collectifs traditionnels en salle.

120
Principes et enjeux d’une Sales Force Automation

Pour mettre en place une formation avec succès, certaines conditions doivent
être remplies : il faut valider que les commerciaux sont prêts à passer d’une forma-
tion de type présentiel à une formation à distance, qu’ils sachent organiser leur
apprentissage et soutenir leurs efforts sans qu’il y ait nécessairement quelqu’un der-
rière eux, et dégager des plages de temps nécessaires.
Pour le choix des supports, le CD-Rom ou la clé USB offrent l’avantage de trans-
mettre aisément de la vidéo, d’être fiable, très facilement transportable et d’un coût
moins élevé que les autres supports. En revanche, il pose un réel problème de mise
à jour des informations. La solution intranet conviendra parfaitement aux sociétés
de grande envergure, et plus encore à celles qui sont implantées à l’international.

 Repères L’utilisation du e-learning


dans l’entreprise Revlon
Fin 2007-début 2008, pour accompagner le lancement d’une nouvelle gamme de colora-
tion, Revlon a conçu un site Web (www.macouleur.fr). Il s’agit d’un portail consacré aux
produits de coloration de Revlon Professional. Il est accessible à tous, mais un « Espace Pro »
est spécialement destiné aux professionnels des salons de coiffure et leur permet d’avoir
recours à des sessions de formation, en cohérence avec une des valeurs clefs qui est la for-
mation des coiffeurs.
Un autre espace, « Accès réservé Salons Elite », est exclusivement destiné aux meilleurs
clients (au nombre de 1 000 aujourd’hui). Le principe de cet espace repose sur un partena-
riat qui doit apporter aux salons des solutions sur-mesure en rapport avec leur activité mais
sortant également du strict domaine de la coiffure. Car aujourd’hui, les coiffeurs doivent
posséder de bonnes connaissances en matière de gestion de leur salon, de comptabilité, de
techniques marketing/communication, ou encore de mise en place de leur vitrine. L’objectif
de Revlon est donc de leur apporter des réponses clefs en main pour leur faciliter la vie.
D’après Relation Client Magazine n° 80 - 1er avril 2009.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Dans cette course à la recherche d’efficacité, au temps gagné, au nomadisme pro-


fessionnel extrême, les technologies ont encore beaucoup à apporter, le téléphone
est déjà un support utilisé de façon intéressante en formation avec la possibilité de
télécharger sur son smartphone des séquences de formation ou d’information, sous
forme de podcasts vidéo de trois à cinq minutes, consultables entre deux rendez-
vous ou dans les transports.

121
LES NOUVEAUX ENJEUX DE LA RELATION CLIENT

Section
3 LES NOU VEAUX VISAGES DE LA RELATION CLIENT

Si l’évolution de la relation client porte essentiellement dans les entreprises sur


l’apport structurant des TIC, comme nous venons de le voir, il semble important
d’identifier deux autres types de changement qui vont avoir un impact important,
dans les années à venir, sur le management commercial et le manager commercial.
Le premier phénomène est sociétal : depuis quelques années, nombre d’organisa-
tions non marchandes abandonnent peu à peu leur rapport à l’usager (SNCF, CAF),
à l’élève (le système éducatif) ou au patient (l’hôpital) pour accueillir des clients,
nécessitant un tout autre mode de gestion de la relation et un regard différent sur la
qualité de service.
Le second est la prise de conscience d’une chaîne de la valeur commerciale
dans l’ensemble de l’organisation, avec la mise au jour d’actes, de missions, de
fonctions « indirectement commerciales », les plus concernées étant les « per-
sonnes au contact ».
Enfin, on observe des mutations dans la façon dont le marché s’organise sous
l’effet de la montée en puissance des réseaux sociaux, cette évolution doit être prise
en compte par la fonction commerciale.

1 Apprendre à gérer des clients


1.1 De l’usager au client

De nombreux secteurs d’activité relevant du secteur non marchand (les services


publics, les administrations…) connaissent depuis plusieurs années une mutation de
leur activité (fondée sur un postulat très fort : ils ont affaire à des clients) qui les
soumet à des exigences :
– d’optimisation de la qualité de service offert (satisfaire ce client) les obligeant à
revoir en profondeur leurs modalités de fonctionnement (raccourcir les délais,
individualiser la relation, supprimer l’anonymat des personnes au contact…) ;
– de rationalisation des activités, en réduisant les coûts de fonctionnement, en
optimisant les circuits d’information, en montant en compétences…

Il s’agit d’une complète révolution dans ces institutions, qui amène à revoir en
profondeur non seulement le mode opératoire, mais également leur représentation
des bénéficiaires de leurs prestations.

122
Les nouveaux visages de la relation client

On constate, en observant les changements opérés, que les modalités de relation


avec la performance et avec le « client » se rapprochent nettement de celles mises
en œuvre dans les entreprises.
La relation de service est par nature intangible et produite à travers les rencontres
d’un client et des personnels en contact (Bancel-Charensol, Jougleux, 2009). Jusqu’à
présent, dans les services standardisés de masse, elle est souvent encadrée par des
procédures de travail, des systèmes d’information et de suivi des flux de contacts.
L’enjeu est de poser la question de la gestion de la relation client. Cela suppose
trois étapes :
Identifier les relations de service dans l’organisation : c’est-à-dire toutes les
interactions existant dans l’organisation entre des clients externes au sens large et
des salariés de l’organisation, quels que soient les canaux de communication utilisés
(face-à-face, téléphone, mail, fax, courrier). En effet, si les interactions avec le
client, organisées dans les front offices de production (centres d’appels télépho-
niques, accueils physiques) sont facilement repérables, d’autres apparaissent dans
des unités en back office où l’essentiel de l’activité relève d’une production de
nature industrielle sans contact avec les clients. L’enjeu est de les inclure dans le
périmètre du management commercial, et de ne pas les traiter à part.
Révéler les enjeux et finalités des relations de service : l’interaction peut contri-
buer à améliorer la satisfaction du client, soit en déclenchant ou produisant un ser-
vice, soit en résolvant ou prévenant un dysfonctionnement, soit en facilitant la
coproduction par simplification ou allégement des tâches du client. Du point de vue
de l’organisation, elle peut aussi améliorer la performance de la production, en éco-
nomisant des ressources, en résolvant des dysfonctionnements provoqués par le
client, en contrôlant sa participation à la production ou en simplifiant les tâches du
personnel. L’interaction peut également favoriser le développement du chiffre d’af-
faires ou de l’activité de l’organisation à travers une communication sur l’offre de
services.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Concevoir et mettre en œuvre un pilotage de la performance : celui-ci doit


inclure les deux volets : satisfaction du client et efficacité de l’activité de l’organi-
sation. C’est la partie la plus complexe car le pilotage classique de ces organisations
est fondé sur des suivis quantitatifs des activités (par exemple : taux de traitement
des dossiers, taux de rejet) et néglige la qualité du service, encore plus celle de la
relation à l’usager pour les personnes au contact.
Il faut apprendre à articuler également trois champs distincts d’évaluation de la
performance des interactions à savoir :
– la qualité des interactions pour le client ;
– la performance opérationnelle et économique ;
– la performance sociale.

123
LES NOUVEAUX ENJEUX DE LA RELATION CLIENT

1.2 Le transfert de méthodes et de personnes

Dans ce contexte, les compétences et les outils commerciaux peuvent être intéres-
sants à explorer et à mobiliser, en pensant bien leur adaptation.
Ces transferts de personnes et de méthodes du monde marchand à d’autres sphères
peuvent présenter plusieurs avantages :
– de réels gains d’efficacité dans les méthodes de travail : on peut ainsi montrer
dans le monde de la création artistique que l’utilisation de plannings, la notion
de certains coûts, l’application de méthodes… peuvent aider à respecter des
délais, et à réaliser des économies, sans toucher à l’intégrité de l’œuvre (cas de
la réalisation des décors de théâtre) ;
– une créativité non bridée par des principes moraux ou éthiques : l’importation des
méthodes de marketing direct au service de la collecte de fonds des ONG est
maintenant acquise (cas de l’organisation Handicap International – voir l’encadré
ci-après) ;
– un respect de la personne, qui implique le souci de la qualité de service tant dans
le résultat final que dans la façon dont la prestation sera réalisée (qui renvoie à
la distinction entre qualité technique, entendue comme la qualité du résultat
de l’interaction, et qualité fonctionnelle, définie comme la qualité du processus
de production mobilisé).

 Repères Développement des activités commerciales


au sein de l’ONG Handicap International
Handicap International (HI) est une ONG au budget d’environ 50 millions d’euros, qui
emploie 360 personnes, 160 au siège et 200 sur 50 pays. HI a reçu le prix Nobel de la paix
en 1997 pour sa participation à la lutte contre les mines antipersonnel et dans le domaine
du handicap.
HI a développé depuis 10 ans des activités commerciales qui sont conçues comme une alter-
native en termes de financement à son activité de collecte de fonds, pour pallier la baisse
des revenus de collecte de fonds, de dons, de parrainages et des financements institution-
nels. Ces activités représentent 15 % des financements.
Il s’agit d’une triple activité :
– les produits partage : HI est fournisseur auprès de la grande distribution (un million de
sacs à sapin par an). Cela signifie que l’équipe a une structure très classique de commercial
grands comptes, d’équipe marketing, de vendeurs, de responsable administration des
ventes,
– un département VPC, avec un catalogue d’objets artisanaux,
– un partenariat entreprise avec de grandes sociétés, qui peuvent aller de Auchan à
Chronopost ou Leroy-Merlin.


124
Les nouveaux visages de la relation client

☞ À l’origine de cette activité commerciale, il y a une double intuition : celle qu’il faudrait un
jour trouver d’autres financements, et l’intuition un peu folle que le projet « sac à sapin »,
c’est-à-dire un sac-poubelle doré pour Noël, soit un projet rentable.
Cela s’est mal passé la première année, avec un échec commercial, mais un succès média-
tique et l’obligation de renoncer au bricolage et de mobiliser des outils et des méthodes
professionnels.
HI, ONG du milieu associatif militant, a donc fait appel à des compétences de gens du
monde du marketing, du monde de la production, de la logistique pour développer des acti-
vités commerciales.
Ce développement d’activité commerciale n’a pas été sans provoquer des débats sur la légi-
timité de ces actions. Un cadre déontologique très strict a dû être posé.
D’après le témoignage du responsable du développement commercial de HI
aux 4es Assises de la vente, Lyon, mai 2004.

2 Piloter la performance des indirectement commerciaux


2.1 Le cas des personnes au contact

Dans de très nombreuses activités, de services essentiellement, des personnes sont


au quotidien « au contact » des clients, sans avoir le moindre acte de vente auprès
d’eux.
On peut citer les personnels de guichet des administrations, les contrôleurs dans
les transports en commun, toutes les personnes chargées de l’accueil, de l’orienta-
tion, tant dans le domaine touristique que du transport, ou encore du culturel
(ouvreurs de salles de cinéma ou de théâtre…).
Ces salariés ont un rôle très important dans la qualité que le client va percevoir du
service proposé et de l’organisation elle-même (Suquet, 2008). Ils ont ainsi un rôle
à jouer dans le « contrôle du client ». En effet, la multiplication des plaintes, des
comportements incivils, le recours de plus en plus massif à la judiciarisation ont un
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

coût de plus en plus élevé pour ces entreprises et ces organisations.


L’entreprise apprend peu à peu, souvent à ses dépens, à « piloter son client », le
mettant au travail, l’éduquant, le « punissant » le cas échéant (cas de l’entreprise de
cinéma UGC qui a privé de cartes d’abonnement illimité des « mauvais clients »).
Le constat est que le client est potentiellement « destructeur de valeur », en détrui-
sant la qualité de service (vandalisme sur des sièges de métro), en pesant sur la
consommation d’expérience de ses pairs (grignotage bruyant de pop-corn ou discus-
sions téléphoniques dans une salle de cinéma), en distillant le soupçon ou la peur
auprès des autres clients (cas des échanges dans les forums sur Internet), en portant
atteinte à l’intégrité du personnel au contact (agressions verbales ou physiques).

125
LES NOUVEAUX ENJEUX DE LA RELATION CLIENT

Un enjeu est donc de codifier les compétences attendues de ces personnes, de les
former pour une meilleure gestion du contact, et certainement de les animer avec des
outils et des méthodes proches du management commercial.

2.2 Tout le monde dans l’organisation est « indirectement »


commercial
La performance commerciale ne se limite pas à la performance des commerciaux,
comme la relation client n’est pas réservée aux équipes de vente. Conforter les
commerciaux dans l’idée que le client leur appartient n’est pas fécond. L’isolement
des services commerciaux/marketing peut renforcer l’insensibilité des autres ser-
vices au client ou au marché.
Même si ce n’est pas dans son profil de poste, le manager commercial doit se don-
ner comme défi de motiver, d’intéresser, de former toutes les personnes de l’entre-
prise à une « attitude client », avec l’objectif d’optimiser la chaîne de la valeur
commerciale.
L’idée à diffuser est que chaque personne dans l’entreprise est porteuse d’une
charge commerciale (Barth, 1994, 2004a), c’est-à-dire que chacun de ses actes, déci-
sions, informations a un impact sur l’image, les opportunités d’affaires, le CA de
l’entreprise, soit directement, soit indirectement. La charge commerciale émise par
un individu n’est pas directement proportionnelle à son pouvoir formel dans l’orga-
nisation ni à sa proximité du service marketing ou du service commercial.
L’objectif est que des salariés, parfois très éloignés, en termes de fonction, du ser-
vice commercial, découvrent ou redécouvrent le client et par là même leur vocation
commerciale, même si elle n’est pas formalisée dans leur activité quotidienne. Ce
« réinvestissement » par tous de la « chose commerciale » est une clef de l’optimi-
sation de la performance commerciale globale de l’entreprise.

 Repères Cas de sensibilisation à la contribution


commerciale
Dans une grande biscuiterie, un panel de consommateurs a été mis en place au sein des
ouvriers de l’usine. On leur demande régulièrement de goûter les produits qu’ils fabriquent
et de les évaluer, ils sont également impliqués dans l’appréciation de nouveaux produits.
Le principe qui anime ce projet est qu’il y a un « savoir » commercial partageable (et qui doit
être partagé) dans l’organisation.
« Les vendeurs mangent nos produits et ils en offrent. » (Directeur commercial,
agroalimentaire)

126
Les nouveaux visages de la relation client

☞ « On est parti du principe que la caissière est un pôle d’information pour la clientèle : elle
récupère toutes les expériences positives ou négatives, c’est la dernière image qu’emporte
le client. » (Directeur des ressources humaines, grande distribution)
« Les gens ont senti, à quelque niveau qu’ils soient, que ce qu’ils faisaient était important
pour le client et le produit final. » (Directeur général, entreprise de métallurgie)
« Les ouvriers sont sensibles au client : je fais passer les copies de réclamation à la maîtrise
et on cherche des solutions. » (Directeur industriel, entreprise de chaudronnerie)
Source : Barth, 1994.

3 Le marché est une conversation : la montée en puissance


des réseaux sociaux

La gestion de la relation client prend aussi d’autres formes avec la montée en puis-
sance des réseaux sociaux. En effet, le foisonnement extrême des relations par l’in-
termédiaire des sites type Facebook ou Viadeo participe au développement de deux
phénomènes qui ont un impact direct sur la relation client :
– l’expertise devient « horizontale » : les consommateurs font en effet confiance à
leurs « pairs », mettant en cause les expertises classiques de type « vertical », et
portées traditionnellement par le professeur, le médecin ou encore l’ingénieur ;
– les campagnes de communication traditionnelles ne font plus recette et sont des-
tituées par des initiatives venant de consommateurs isolés : on peut ainsi citer la
campagne Schoolbus de la fraise Tagada en 2008, qui n’a pas connu beaucoup
de succès, contrairement à des blogs de consommatrices proposant des recettes
de cuisine fun à base de ces bonbons.

On considère maintenant que « le marché est une conversation », et que les entre-
prises doivent y prendre part, c’est-à-dire engager le dialogue avec leurs clients-
consommateurs, sur des blogs ou des forums, sachant que les forums à l’initiative
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

des entreprises ne font pas recette.


Le manager commercial comme ses équipes doivent savoir prendre en compte ces
nouveaux comportements pour gérer encore mieux cette relation client centrale à la
performance commerciale.

Conclusion

On observe l’émergence de métiers nouveaux centrés sur la relation client. Si ces


fonctions exigent des compétences informatiques et des technologies de la commu-
nication, elles demandent aussi un savoir-faire commercial indéniable.
127
LES NOUVEAUX ENJEUX DE LA RELATION CLIENT

Compte tenu de l’habileté du consommateur à jongler avec les multiples canaux


de vente qui lui sont proposés, il est clair que la relation client, vécue globalement,
prend peu à peu le pas sur la fonction commerciale. Ce phénomène se limite pour
l’instant aux grosses entreprises ou à quelques secteurs d’activité. Si le manager
commercial souhaite garder le leadership sur le sujet commercial, il est urgent qu’il
s’empare de la problématique de la vente multicanal et sache mobiliser l’ensemble
de l’organisation dans cette orientation client.

128
Chapitre
Les mutations
6 de la négociation
commerciale

L a négociation est au cœur de l’activité de commerce. L’évolution du contexte,


avec la professionnalisation de la fonction achat en B2B, la dématérialisation
de la relation avec l’utilisation grandissante des TIC dans ce domaine, la montée en
puissance de la relation contractuelle et l’inversion de l’asymétrie de l’information
en faveur du client, amène à penser une réingénierie des pratiques de négociation.
La négociation partage deux choses avec le négoce : sa racine latine et une image
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

ambiguë dans l’opinion. Les deux termes viennent en effet du latin negotium (nec
otium)1, qui signifie « ne pas avoir de loisir », rappelant que le commerce était dans
l’antiquité une activité peu considérée, perçue comme un mal nécessaire à la vie de
la cité, un métier défini par la négative, un « métier sans nom » (Benveniste, 1969).
La négociation est au centre de l’activité commerciale, elle constitue la compé-
tence clef du vendeur qui la met en œuvre auprès de son client, pour mener à bien
1. Les Romains, imitant en cela les Grecs, divisaient la vie en deux temps. Ils appelaient le premier otium.
Ce mot qu’il convient de traduire par loisir ne signifie toutefois pas absence de travail, mais occasion de s’occuper
de ce qui est proprement humain : la vie publique, les sciences, les arts. Le second, les Romains l’appelaient nego-
tium (nec, otium), caractérisé par les efforts nécessaires à la satisfaction des besoins vitaux — et pour rendre ainsi
possible l’otium, indiquant par là le caractère négatif de ces activités par rapport à celles qui portent sur les choses
proprement humaines. Negotium vient du mot grec askolia qui peut se traduire par le fait « de ne pas avoir de loi-
sir », par affaires (Barth, 2002).
129
LES MUTATIONS DE LA NÉGOCIATION COMMERCIALE

sa « vente », comme du manager commercial, qui, en plus de la négociation commer-


ciale, doit maîtriser une négociation dite « sociale », celle qu’il mène, vis-à-vis de
ses équipes, à différents moments : négociation des objectifs, négociation des
contrats, négociation des primes.
Des mutations récentes bousculent les modalités des relations « traditionnelles » :
on observe ainsi l’impact de la généralisation des TIC qui modifient en profondeur
la nature du lien en virtualisant les supports. Il faut bien admettre que le client a
maintenant plus souvent affaire à un standard téléphonique automatique ou à un
écran d’ordinateur qu’à un vendeur en présentiel.
On voit aussi le rapport contractuel tendre à s’imposer comme modèle dans toutes
les relations publiques ou privées. La négociation est partout. Elle s’insinue dans
toutes les relations. Nous proposons de penser les mutations que doit connaître la
négociation autour de trois thèmes :

Section 1 Q La place de la négociation commerciale dans la vente


Section 2 Q Les nouvelles pratiques de la négociation commerciale
Section 3 Q Les mutations de la fonction achat

Section
1 LA PLACE DE LA NÉGOCIATION COMMERCIALE
DANS LA VENTE

Si les champs de la négociation diplomatique, de la négociation de crise, voire de


la négociation sociale ont su mobiliser de nombreux chercheurs et exercent une forte
attractivité sur les jeunes diplômés, la négociation commerciale reste le parent pauvre
de la performance dans le commerce, bien qu’elle en soit le levier indispensable.

1 Les grandes théories de la négociation

« La négociation est l’activité mettant en présence deux ou plusieurs parties (indi-


vidus, groupes ou délégations) qui en raison de leur interdépendance veulent trouver
une issue satisfaisante non-violente à une situation exigeant de la part de chacun la
prise en compte de la réalité de l’autre. » (Dupont, 1994)
La négociation est donc un mode de décision choisi, alternatif à beaucoup d’autres,
parmi lesquels : l’autorité, la règle, le vote, le hasard, l’évitement, et qui amène les
acteurs en présence à se confronter pacifiquement. On peut parfaitement refuser de
négocier : d’abord, car tout n’est pas négociable (on ne négocie pas avec un enfant
130
La place de la négociation commerciale

s’il peut ou non mettre ses doigts dans la prise, un fonctionnaire ne négocie pas son
salaire), ensuite parce que la négociation implique des coûts (en temps et en énergie)
qui diminuent l’utilité pour les parties concernées.
La négociation a été étudiée au cours des siècles avec des grilles de lecture variées
dans des champs disciplinaires nombreux et diversifiés : elle a été ainsi analysée en
économie avec la théorie des jeux, en psychologie cognitive et sociale, en anthropo-
logie culturelle, en rhétorique, en sociologie, en science politique et en droit.
Pour qu’une négociation ait lieu, il faut que soient réunis les paramètres suivants :
– la volonté de la recherche d’une solution, d’un compromis, d’une position com-
mune, d’un accord ;
– la présence d’un projet ;
– un processus d’échange au cours d’entretiens, de face-à-face, d’interactions, de
contacts, qui se construit sur des concessions, des compromis, voire des arran-
gements et des marchandages ;
– pour que la négociation puisse avoir lieu, il faut admettre l’interdépendance des
parties. Le ciment est la confiance, même a minima, celle qui permet que
s’instaure le dialogue suffisant pour parler de cette voie alternative à l’autorité
et à la règle qu’est la négociation ;
– des moyens peuvent être mis en place pour faciliter la négociation : le mandat,
la délégation, les procédures, et les règles qui cadrent la négociation et lui per-
mettent de se dérouler dans des conditions optimales, au minimum équitables et
sûres, pour toutes les parties ;
– enfin, au-delà de l’objet de la négociation, c’est la valeur produite par l’interac-
tion qui va être importante, elle s’évalue plus à l’aune du ressenti des personnes
que de façon purement objective.

L’ensemble de ces descripteurs se retrouvent parfaitement quand il s’agit de négo-


ciation de type commercial, même si celle-ci présente des spécificités (Barth, Bobot,
2010).
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

2 Négociation et vente

La négociation commerciale se définit comme « un processus pensé d’échanges


itératifs de flux informationnels entre des parties, en vue de l’échange d’un flux
produit-service contre un flux financier » (Barth, 2002).
La négociation commerciale n’a jamais conquis ses quartiers de noblesse, elle est
restée longuement reléguée au rayon de la transmission de type folklorique (Barth,
2004), loin de tout projet de conceptualisation. La description célèbre par Balzac de
César Birotteau, marchand et héros central du roman éponyme, résume magistrale-
ment la vision de la négociation commerciale et en scelle définitivement le destin.
131
LES MUTATIONS DE LA NÉGOCIATION COMMERCIALE

« Dans sa parole, se rencontrent à la fois du vitriol et de la glu : de la glu pour appré-


hender, entortiller sa victime et la rendre adhérente, du vitriol pour en dissoudre les
calculs les plus durs. »
La vente et la négociation sont restées très longtemps des concepts différenciés ;
vendre était directement lié à une transaction commerciale alors que la négociation
restait l’apanage, soit des diplomates, soit des managers pour les relations sociales :
il a été clairement établi qu’on pouvait négocier sans vendre et vendre sans négocier
(Audebert-Lasrochas, 1999).
Néanmoins, dans le processus commercial, la négociation précède la vente, elle a
comme aboutissement la vente.

 Repères Illustrations de la relation vente-négociation

– Dans le cas d’une brocante entre particuliers, on observe que la négociation va porter
autour du prix, avec de très faibles enjeux, sur des toutes petites sommes. L’objectif final
étant de créer du lien social et d’avoir le sentiment d’avoir fait une bonne affaire. La vente
elle-même est reléguée au second plan.
Barth, Bobot, 2010.

– De nombreuses associations caritatives proposent dans des entrepôts ou des expositions


temporaires des objets offerts par des donateurs ; on constate que les ventes se font mais
que la négociation est évitée par les bénévoles de ces associations, qui, s’ils admettent la
nécessité de récolter des fonds, ne peuvent se résoudre à endosser un rôle marchand.
Bergadaà, 2008.

– Dans l’acte d’achat le plus banal, le plus transactionnel, c’est sur la répétition que la rela-
tion se construit. Ainsi, dans le cas de l’achat quotidien de la baguette de pain chez le bou-
langer, la vente elle-même est réduite à sa plus simple expression – on tend la baguette
par-dessus le comptoir en échange de la monnaie – les échanges portent sur des éléments
de rituels. La négociation porte sur des éléments mineurs du produit : « bien cuite », « pas
trop cuite » ou sur la création d’un contexte et d’un lien : « Comme d’habitude ? », « Vous
voulez de la monnaie ? »
Traverso, 2001.

La vente connaît au XXe siècle une véritable éclipse pendant plus de cinquante ans,
que ce soit dans les entreprises ou les milieux universitaires (pédagogie et recher-
che), au profit du marketing (Barth, 2002). Dans son principe, le marketing inverse
radicalement les rapports, puisque sa promesse est de faire acheter, ce qui renvoie
au dogme du choix du client.
Dans les années 1980, la négociation commerciale assimilée au bargaining, au
marchandage, va être progressivement abandonnée pour une vision positive de la
négociation, créatrice de résultats « gagnant/gagnant », mais réservée aux domaines
132 de la diplomatie ou du social.
La place de la négociation commerciale

Enfin, la grande spécificité de la négociation commerciale est que, pour être réus-
sie, elle doit être conclue sur une rupture, rupture actée par l’échange de la solution
(produit-service) contre de l’argent (Aglietta, Orleans, 1998). Le vendeur et le client
se quittent pour peut-être ne jamais se revoir, l’un avec l’argent, l’autre avec le bien.
Ceci l’oppose radicalement aux autres types de négociations (politiques et sociales)
dont l’objectif est justement de ne pas rompre, ou de se donner l’illusion de ne pas
le faire, et par conséquent la marginalise.
Il est donc important de bien positionner la négociation commerciale dans le cadre
théorique de la négociation afin de lui ouvrir de plus grandes perspectives.
Tableau 6.1 — Les spécificités de la négociation commerciale
Invariants à toutes Spécificités négociations Spécificités négociations
les négociations non marchandes commerciales
Volonté conjointe des parties – Pas d’enjeu financier direct – Lien indéfectible avec l’argent
Pouvoir/asymétrie – Le lien est plus important que – Objectivation de la relation :
Écoute/empathie le bien on peut négocier sans se connaître,
Argumentation, verbe, discours – Un processus constructif où et encore moins s’apprécier : le bien
Gestuelle les parties prenantes ont l’enjeu est plus important que le lien
Recherche des intérêts de se connaître – La transaction met fin à la négocia-
BATNA – Pas de nécessité de fin pour que tion (même provisoirement)
Interdépendance la négociation ait de la valeur – La négociation commerciale est vue
Processus – Le présentiel est important comme une séquence sans avant ni
– L’éthique est présente après
– Évolue de plus en plus vers du non-
présentiel (plateforme, e-mail, etc.)
– Le commerce est wetfrei (affranchi
de la morale)

Barth, Bobot, 2010.

Si les caractéristiques de la négociation commerciale restent invariantes au cours


des siècles, elle est néanmoins concernée, dans ses modalités et sa pratique, par les
grandes évolutions du contexte actuel.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

3 Les évolutions du contexte

Le nouveau contexte dans lequel baignent les commerciaux est caractérisé avant
tout par la montée en puissance des technologies de l’information. Le chapitre 5 a
décrit largement les nouvelles modalités de gestion de la relation client.
Nous retiendrons ici ce qui peut avoir un impact sur la négociation commerciale.
Dans ce contexte, le vendeur a affaire à un client ou à un prospect :
– surinformé, qui a su aller se renseigner sur Internet avant le rendez-vous ou avant
de venir en magasin. Ce client est donc capable de renverser l’asymétrie d’infor-
mation à son profit : c’est lui l’expert et non plus le commercial. On retrouve de
133
LES MUTATIONS DE LA NÉGOCIATION COMMERCIALE

plus en plus fréquemment cette situation dans le cas de la vente de produits tech-
niques et impliquants comme l’électroménager ou encore la micro-informatique ;
– qui accorde beaucoup plus de crédit à ses pairs (qu’il retrouve sur des sites
communautaires) qu’au commercial qu’il a en face de lui. C’est ainsi que les
réseaux sociaux s’organisent autour d’échanges sur des sujets d’une diversité
incroyable : l’accès au crédit, les amoureux de la DS, les fous de sports de glisse,
les experts du patchwork… avec des échanges d’informations nombreux et des
hiérarchies implicites qui s’organisent, bouleversant les expertises classiques et
les négociations en face-à-face, même dans des domaines aussi spécifiques que
la médecine ou la chirurgie comme le montre l’encadré ;

 Repères Rôle des forums dans le processus d’achat


d’un acte de chirurgie esthétique par Internet
De nombreux pays dits émergents proposent depuis quelques années des prestations
médicales ou chirurgicales invasives aux citoyens de pays à plus fort pouvoir d’achat.
L’argument principal est bien sûr le prix, et le seul canal de communication et de distribu-
tion est Internet. En effet, tout le processus d’information et de décision se passe via le Net :
ainsi, le devis de l’opération même est proposé à partir de photos envoyées par le candidat-
patient. L’enjeu est tel que les personnes tentées par la proposition multiplient les échan-
ges dans des forums médicaux et élaborent des stratégies très complexes de recherche
d’information, fondées sur les témoignages d’anciens opérés. Dans le cas de la chirurgie
esthétique, de nombreuses photos sont aussi échangées.
Extrait de verbatim.
« Tu lui as envoyé les photos direct sur son mail ou via le site ? Ensuite il faut que le chirurgien
voit tes photos pour donner son avis et évaluer le travail à faire et ainsi le prix ! Après son
assistant te mailera ou téléphonera, de toute façon, le devis écrit, ce sera bien sûr par mail
et ensuite, pour faire office d’acceptation, il faudra que tu lui envoies confirmation de tes
réservations d’avion ! »
« J’ai 51 ans et désire faire une blépharoplastie des 4 paupières. Aujourd’hui j’en suis au
point où je n’arrive plus à me regarder dans le miroir tellement je me sens affreuse. Cette
opération j’y pense depuis longtemps »
« Tes photos sont top, tu as eu une lipo super bien réussie, ça te resculpte toute la sil-
houette, je suis bluffée du résultat au bout d’un mois, ça aurait été dommage de ne pas
faire un album pour nous montrer ça, c’est carrément WAOUH !!! »
D’après Hallem, 2010.

– un client devenu très méfiant vis-à-vis des entreprises et de leurs offres commer-
ciales, et qui développe des comportements de résistance envers les organisations
et ceux qui les représentent. On peut par exemple observer la méfiance et la désaf-
fection des sites bancaires de type forum, proposés à leurs clients par les banques,
auxquels sont préférés des sites alternatifs, semblant moins institutionnels et où
le risque de manipulation serait moindre (Notebaert, Attuel-Mendès, 2010) ;
134
Les nouvelles pratiques

– un client qui veut tout, tout de suite : son achat est planifié et il ne supporte pas
la rupture de stock ou l’indisponibilité du produit.

Le consommateur ou le client du XXIe siècle est donc doté de certaines compétences,


inédites il y a peu encore, directement liées à l’avènement d’Internet, et qui mettent
en péril le savoir-faire bien rôdé de nombre de vendeurs, qui se trouvent pris au
dépourvu.
Il va donc falloir leur apprendre à gérer :
– une communication devenue asynchrone, fondée sur les textos, les e-mails, les
posts (messages déposés sur les forums), où le lieu de rencontre disparaît, le
face-à-face s’efface ;
– une perte de l’écoute active, un zapping permanent, qui amène à renouveler la
construction de l’argumentaire. Plus que jamais, le vendeur doit savoir utiliser
le mot juste, à fort impact, écartant les argumentaires trop rationnels et cognitifs.
Il lui faut comprendre que cette négociation arrive à la fin d’un long processus
de recherche d’information et de délibération mené par le client.

Tous ces changements, s’ils infléchissent les pratiques et les modalités de négo-
ciation commerciale, n’en remettent pas en cause les invariants. Nous proposons de
les revisiter dans la section suivante.

Section
2 LES NOU VELLES PRATIQUES DE LA NÉGOCIATION
COMMERCIALE

Il est important de garder en tête des schémas simples, mais qui peuvent permettre
de recadrer en temps réel des actes soumis à une forte tension et toujours pensés ou
réalisés de façon interactive.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Le principe même de la négociation est qu’on est face à un problème avec quelqu’un
dont on a décidé qu’il fait partie de la solution. Cette interdépendance exige une
constante mise à distance de ses sentiments, émotions et réactions spontanées.

1 L’importance d’une bonne prospection et d’une bonne


préparation

On dit souvent que la moitié de la réussite d’une négociation réside dans la prépa-
ration. Ce pourcentage est certainement variable, mais il est indiscutable que, les
enjeux et les contextes des négociations devenant de plus en plus complexes, il est
135
LES MUTATIONS DE LA NÉGOCIATION COMMERCIALE

indispensable de mener une bonne préparation. Celle-ci commence par une bonne
prospection.

1.1 L’enjeu de conduire une bonne prospection

Il est vrai que, dans de nombreuses entreprises, la phase de prospection est


déconnectée de la phase de négociation et que ce ne sont pas les mêmes personnes
qui les assument. De plus en plus, la prospection est menée via Internet, ou surtout
par voie téléphonique, et externalisée auprès d’entreprises spécialisées. Les raisons
avancées sont simples : la prospection ne mobilise pas les mêmes compétences que
la négociation, la moindre valeur ajoutée de la prospection ne justifie pas qu’elle soit
prise en charge par un commercial, c’est une activité qui peut être facilement stan-
dardisable et transférable, d’où l’idée de la sous-traiter, souvent à des centres d’ap-
pels sortants. Si la prospection est externalisée, la société sous-traitante se rémunère
sur le nombre de rendez-vous pris, pas sur le nombre d’appels réalisés. Il vaut mieux
faire appel à un prestataire qui connaît le secteur d’activité et s’impliquer en amont
dans la constitution de l’argumentaire. De même, des points réguliers sont à pro-
grammer pour corriger, le cas échéant, les actions entreprises.
Cette tendance à la sous-traitance n’est pas systématisée, et la prospection fait
encore partie du quotidien de nombreux commerciaux. Quels sont les points à rete-
nir pour la mener à bien ?

■■ En faire une activité stratégique

Il faut dégager du temps dédié aux vendeurs pour cette activité, et l’intégrer à la
politique de rémunération. Il faut aussi, sur la base d’historiques à constituer, être
capable d’avoir des données prédictives des actions menées : 100 appels télépho-
niques doivent déboucher sur 5 leads (contacts). Sans ce cadre fondé à la fois sur le
projet et la motivation, les commerciaux ne prennent pas le temps d’investir sur une
tâche dont ils n’évaluent que très mal le retour sur investissement.
La formation n’est pas non plus à négliger. Un très bon négociateur face à un pros-
pect peut avoir des lacunes lors d’un appel téléphonique destiné à identifier des
contacts.
De la même façon, pour rendre légitime cette activité, il est important de ne pas la
réserver, comme on le voit trop souvent, à des débutants ou à des stagiaires. Cette
position, basée sur l’investissement minimal, est toujours contre-productive : elle
démotive de la vente des jeunes qui n’en voient plus que le côté rébarbatif et qui ne
maîtrisent pas un geste commercial finalement très technique.

136
Les nouvelles pratiques

■■ Travailler avec des outils adéquats et variés

Comme on voit la prospection être confiée à des stagiaires, on constate également


que les entreprises manquent cruellement d’outils fiables et se contentent des Pages
jaunes ou autres fichiers récupérés au gré de rencontres. Une prospection efficace se
base sur des fichiers ciblés, certainement plus onéreux au départ, mais qui permet-
tront de gagner beaucoup de temps et d’énergie.
L’objectif ensuite est d’en effectuer une maintenance régulière et de les mettre à
jour régulièrement en organisant la traçabilité des contacts établis : tel contact est-il
sans suite à donner ou bien, au contraire, à rappeler dans un délai à définir ?
Comme pour la vente, la prospection gagne à être multicanal : le classique mai-
ling, intéressant pour les produits ou services à forte valeur ajoutée, mais onéreux,
est maintenant remplacé par le e-mailing, dont l’envoi est gratuit. Le taux de retour
à escompter excède rarement les 5 pour 1 000 ; par contre, effectuer une relance par
téléphone peut en augmenter l’impact de façon importante (multiplication par trois
ou quatre).
La prospection physique se fait rare, mais survit dans certains secteurs d’activité
comme le service aux entreprises : les prestataires de solutions d’impression conti-
nuent à l’utiliser avec une certaine réussite, même si elle demande une forte dose de
motivation à leurs commerciaux, qui doivent essuyer au quotidien de nombreux
refus.
Les salons sont aussi des lieux où l’on peut faire un travail de prospection active,
à condition d’avoir une stratégie bien établie et de ne pas succomber à la tentation
courante de rester avec les clients connus.

■■ Effectuer un travail de veille commerciale et informationnelle

Les vendeurs doivent, en continu, activer une veille commerciale, qui consiste à
se tenir informé en temps réel de l’activité de leurs prospects et clients, de façon à
pouvoir faire une proposition de service au moment adéquat (Le Bon, 1997). Cette
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

veille passe aussi par une veille informationnelle : la lecture de journaux profession-
nels et la consultation régulière de sites d’information sectoriels sont des réflexes à
acquérir, d’autant plus facilement que les TIC permettent de déclencher à intervalles
réguliers des revues de presse qui condensent cette actualité.
Une autre façon de mobiliser cette veille est de l’intégrer à des offres d’informa-
tion à destination de clients ou de prospects : organiser un petit-déjeuner ou une fin
de soirée autour d’une conférence qui permettra de comprendre la dernière législa-
tion, ou de connaître le dernier logiciel sur le marché, est une bonne façon de remer-
cier ses clients comme de toucher des prospects ayant déjà un intérêt pour l’offre
proposée.

137
LES MUTATIONS DE LA NÉGOCIATION COMMERCIALE

■■ Organiser un réseau de recommandation

Une façon d’obtenir des contacts ciblés est d’utiliser la recommandation de clients
établis et satisfaits : ces clients appartiennent eux-mêmes à des réseaux, professionnels
ou amicaux, et peuvent être des prescripteurs efficaces. Cette recommandation peut
être basée sur la gratuité, comme donner lieu à une reconnaissance, même symbolique.
On observe que les clients, s’ils sont sollicités, sont en général d’accord, s’ils ne le font
pas déjà spontanément, et que cette stratégie présente d’excellents taux de retour.

2 La négociation en face-à-face au cœur de la relation


commerciale

On distingue trois phases, toutes importantes, même si les vendeurs se concentrent


en général sur la seconde, qu’ils considèrent comme leur cœur de métier : la prépa-
ration, la négociation proprement dite, et la proposition.

2.1 La préparation

Une bonne préparation est la clef de la réussite de la négociation commerciale, elle


doit permettre de maîtriser l’exercice dans les meilleures conditions et de donner au
commercial la sérénité nécessaire à la créativité et à la maîtrise dont il aura à faire
preuve lors de l’entretien en face-à-face.
Cette préparation ne doit pas négliger les éléments matériels avec la liste du maté-
riel et des supports à emporter (PC, vidéoprojecteur, plaquettes, bons de commande,
prototype, échantillons…). Il aura fallu aussi prendre connaissance de l’historique
et de l’actualité de la société, car il est essentiel de bien aborder son prospect ou son
client dans un contexte réactualisé.
Des grilles de préparation existent, chaque entreprise a en général adapté son pro-
pre format. La grille de préparation de Watkins (2002) est suffisamment générique
pour être utile, quels que soient le contexte et le projet de la négociation.

 Repères Grille de préparation de Watkins

Les acteurs

u
Qui va participer ou pourra participer aux négociations ?
Acteurs actuels et potentiels, coalitions, facteurs internes aux parties, carte des acteurs.
Les règles

u
Quelles sont les règles du jeu ?
Lois et règlements applicables, conventions sociales, codes professionnels.
138

Les nouvelles pratiques

☞ Les questions

u
Quelles sont, ou pourraient être, les questions à négocier ?
En totalité, séparément, aspects relationnels, questions litigieuses.
Les intérêts

u
Quels objectifs poursuivez-vous ? Et les autres ?
Intérêts communs, échanges commerciaux, accords incertains, intérêts personnels.
Les options
Que faire dans l’hypothèse d’un non-accord ?
u Meilleure alternative théorique, se retirer, effets sur la coalition, contraintes de temps,
confiance en soi exagérée.
Les accords

u
Y a-t-il des accords potentiels qui conviendraient aux deux parties ?
Rayon d’action, pouvoir de l’information, partage des incertitudes.
Les liens

u
Les négociations actuelles sont-elles liées à d’autres négociations ?
Dresser la carte des restructurations concurrentielles, réciproques ou autres.
D’après Watkins, 2002.

La cartographie des acteurs est un outil particulièrement important à élaborer, sur-


tout dans un environnement complexe : savoir distinguer les différentes parties pre-
nantes de la décision, avec leurs enjeux comme les relations d’influence qui existent
entre elles, est incontournable. Ainsi, il est essentiel de bien être face au décideur
lors du rendez-vous de négociation, et non pas face à un simple introducteur qui
n’aurait aucune marge décisionnelle. Les concurrents internes sont également à
identifier car beaucoup moins faciles à repérer que les concurrents externes, en
général bien connus.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

2.2 La phase de contact

Le commercial doit se présenter et annoncer clairement le motif de sa visite dès le


début de l’entretien. Cette phase permet de découvrir aussi son interlocuteur et de le
situer dans le schéma de la négociation : Quels sont ses enjeux ? Quel est son pou-
voir de décision ? À qui doit-il référer ? Toutes ces questions sont des éléments à
mettre au jour très rapidement.
En France, la phase de contact peut être assez courte, mais, on le verra dans le
chapitre 7, il y a des pays où les rituels sont nombreux et où le temps consacré à la
première prise de connaissance n’est pas compressible, sous peine de vexer son
interlocuteur.

139
LES MUTATIONS DE LA NÉGOCIATION COMMERCIALE

2.3 La phase de découverte

Son objectif est de mettre au jour les besoins du client. On utilise la technique du
questionnement afin de mener l’état des lieux de la situation. Il faut savoir alterner
les questions d’information assez large : « Qu’aimez-vous dans une cheminée ? » ou
« Quel type de voiture recherchez-vous ? » et les questions d’orientation, qui per-
mettent de faire préciser les attentes, et de réduire le champ des possibles : « Quel
est votre budget pour cette opération ? » ou « À quelle occasion utilisez-vous votre
voiture ? ».
Au départ, le prospect ou le client va plutôt exprimer une insatisfaction, un
mécontentement, un problème qu’il va falloir transformer peu à peu en besoin iden-
tifié, en lien avec la solution que le vendeur peut proposer.
Quand le vendeur pense avoir suffisamment cerné le besoin, il peut tenter une
phase de synthèse avec la technique de la reformulation : « Si je comprends bien,
vous désirez bénéficier de baignades en famille lors de vos congés d’été, sans qu’il
y ait le moindre risque pour vos enfants ? ». Ce n’est que l’obtention d’un oui, ferme
et définitif, qui permettra de passer à l’étape suivante, de proposition.
Si ce « oui » n’est pas obtenu, il ne faut pas hésiter à recommencer la phase de
découverte, un message a dû être oublié ou mal compris : « Je n’ai pas dû bien saisir
ce que vous me disiez, pourriez-vous me préciser… ? ».
On l’aura compris, cette phase est une phase d’écoute, écoute active avec prise de
note si besoin est. Le meilleur vendeur est celui qui sait se taire et écouter.
Une fois la synthèse approuvée, le vendeur va pouvoir passer à la phase de propo-
sition.
Il est à noter que, trop souvent, cette étape de découverte est bâclée par les ven-
deurs, ou purement zappée, tant ils s’imaginent savoir ce que veut leur prospect, ou
sont obsédés par l’offre à faire. Se précipiter conduit souvent à une vente ratée, ou
insuffisamment optimisée.

2.4 La phase de proposition

Le vendeur va pouvoir entrer dans la phase de proposition, en valorisant les atten-


tes de son interlocuteur : « Vous avez bien raison de vouloir… », et en présentant
son offre comme la solution au besoin identifié et dûment validé.
Cette phase sera régulièrement ponctuée par des moments de synthèse pour bien
contrôler l’accord du prospect sur les avantages mis en avant du produit ou du ser-
vice : « Vous me confirmez que c’est cette qualité d’image que vous exigez ? »,
« Je suis bien en phase avec votre attente ? », « C’est bien ce type de couleur que
vous imaginiez ? ».

140
Les nouvelles pratiques

C’est dans cette phase qu’il va falloir traiter les objections que ne manquera pas
de faire l’interlocuteur. Il faut partir du principe que l’objection est un signe d’inté-
rêt, le pire ennemi du vendeur étant l’indifférence. On peut faire le tri entre trois
types d’objection :
– les objections non sincères et non fondées : prétextes, fausses raisons, elles sont
faciles à contrer même s’il faut les prendre en considération, sans réaction trop
vive : « Je crains que vous ne fassiez erreur… » ;
– les objections sincères et non fondées : idées reçues, a priori, préjugés, elles sont
également faciles à dénoncer : « Je comprends votre inquiétude, mais vous allez
voir qu’il n’en est rien… » ;
– les objections sincères et fondées : ce sont les plus difficiles à gérer. Il faut en
général recourir à la minimisation ou à la mise en perspective des avantages déjà
admis : « En effet, l’autonomie de ce portable n’est pas conforme à ce que vous
souhaitez, mais ce n’est pas cher payé par rapport à la qualité de l’image que
vous obtenez… ».

Un élément central mais souvent mal perçu de la négociation sont les concessions,
elles font partie des tactiques utilisées pour provoquer des concessions de l’autre
partie. L’objectif est donc de ne pas « lâcher » trop vite, et toujours obtenir quelque
chose en échange d’une concession. Il ne faut pas non plus oublier que, dans une
négociation, la façon de faire les concessions est peut-être plus importante que les
concessions elles-mêmes.
Toutes sortes de techniques ont pu être identifiées par les spécialistes de la négo-
ciation : le point par point (ou technique du salami) : tout est traité point par point,
le donnant/donnant (les items de la négociation sont regroupés par paquet) ou encore
le « faux pivot » (ou retournement) : après avoir donné à son interlocuteur le senti-
ment que tout est réglé, le négociateur revient en arrière.
Cette phase se termine par la synthèse de l’ensemble des avantages acceptés, qui per-
met de passer, sauf remise en cause ou nouvelle objection, à la phase de conclusion.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

3 Savoir faire une proposition et conclure par… une vente

La conclusion est souvent difficile, on observe chez beaucoup de vendeurs, sou-


vent performants par ailleurs, une angoisse de la signature. C’est pourtant au ven-
deur de provoquer l’achat, en tendant son stylo, en remplissant le bon de commande,
en posant l’ultime question : « C’est bon, vous l’adoptez ? », « Je vous laisse valider
votre commande ».
Ce moment peut être l’opportunité d’une ultime proposition portant sur un produit
accessoire, ou une quantité supplémentaire.

141
LES MUTATIONS DE LA NÉGOCIATION COMMERCIALE

Dans des ventes plus complexes, la conclusion de la négociation peut être la rédac-
tion d’une proposition qui sera ensuite soumise soit par courrier, soit au cours d’un
nouveau rendez-vous, qu’il faut alors programmer.
Les commerciaux ont souvent tendance à négliger la qualité de cette proposition
qui, pour être performante, doit être personnalisée et percutante. Il s’agit du dernier
maillon de la chaîne de la valeur de la négociation commerciale, et un des plus
importants. On considère souvent que la proposition commerciale est la vitrine de
l’entreprise. Les entreprises ont tendance à stéréotyper à outrance ce document, pour
des raisons d’efficacité et d’économie. Cela constitue une véritable prise de risque
pour l’image de l’entreprise. La forme est importante, il faut aller au-delà du simple
devis pour rappeler des arguments qui ont été acceptés lors de l’entretien et person-
naliser le discours.
L’ensemble du processus est représenté dans la figure 6.1.
Il faut aussi garder à l’esprit que les meilleurs négociateurs commerciaux sont ceux
qui sont capables de faire preuve de créativité et de proposer des alternatives créa-
trices quand la situation de négociation semble bloquée ; les chercheurs ont nommé
ce concept BATNA, acronyme pour Best Alternative to a Negociated Agreement.
Ainsi, la création des marques de distributeurs a été à un moment une alternative
pour la grande distribution afin d’échapper au pouvoir alors très fort des producteurs.
À l’heure actuelle dans le même secteur : c’est la restauration hors foyer qui est
l’alternative pour les producteurs afin d’échapper à la grande distribution.
De nombreuses tactiques dûment répertoriées existent pour conduire une négocia-
tion à son avantage. Beaucoup jouent sur les asymétries :
– asymétries de pouvoir : comme elles existent dans la grande distribution où les
acheteurs des enseignes sont en position de force ;
– asymétries d’acteurs : en jouant sur un nombre de négociateurs plus important
que ceux de la partie adverse, en jouant les asymétries de comportement : le
« bon flic » et le « mauvais flic ».

D’autres utilisent les menaces, explicites ou plutôt (ce qui semble plus efficace)
l’incertitude quant à une punition à venir : « Si vous n’acceptez pas cette réduction
de prix, j’ai peur de devoir remettre en cause le marché XX ».
D’autres tactiques jouent sur les pressions du temps : en donnant un ultimatum, en
accélérant soudainement le tempo, en réduisant le délai initialement prévu.
Nous sommes avec ces tactiques dans une négociation de type distributif, c’est-à-dire
où les parties en présence sont en compétition, tout ce que l’un gagnera sera au détri-
ment de l’autre. Ces stratégies s’opposent aux stratégies coopératives, fondées sur la
construction conjointe de la solution (le fameux win win ou jeu gagnant/gagnant1).
1. Dans la théorie des jeux (Nash, 1950), qui a fortement influencé les négociateurs : soit la somme des gains
des parties est à somme négative (les deux sont perdants), à somme nulle (l’un gagne ce que l’autre perd), à somme
142 positive (les deux sont gagnants).
Les nouvelles pratiques

Vendeur : questions d’information

Client : présomption de besoin

Vendeur : question d’orientation

Client : besoin exprimé

DÉCOUVERTE

Questionnement suffisant
NON
pour proposer une solution?

Vendeur : synthèse de la découverte

Vendeur : valorisation des besoins


présentation des avantages
contrôle de l’acceptation

Clients : avantages acceptés

ARGUMENTATION
NON
Signal d’achat?

Vendeur : reformulation des avantages


© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Vendeur : conclusion

CONCLUSION
NON
Conclusion acceptée?

FIN

Source : Chozas M. et al., 1994.


Figure 6.1 — Le processus de négociation
143
LES MUTATIONS DE LA NÉGOCIATION COMMERCIALE

Section
3 LES MUTA TIONS DE LA FONCTION ACHAT

1 La professionnalisation des acheteurs en B2B

Il est difficile d’évoquer les évolutions de la fonction commerciale sans évoquer


celles que connaît sa fonction miroir dans le milieu B2B : la fonction achat. Cette
fonction, relativement peu connue, ignorée de la recherche, a pourtant mené ces der-
nières années de formidables mutations qui amènent les forces de vente B2B à se
repositionner.
La fonction achat est devenue en moins de vingt ans le « moteur à économies »
des entreprises avec une légitimité revendiquée vis-à-vis de la stratégie de l’entre-
prise. Elle joue un rôle prépondérant dans les projets de réduction de coûts. Sachant
qu’en moyenne les achats représentent 50 % du chiffre d’affaires, le levier de chaque
économie réalisée est forcément très important. Ce sont des actions menées sur les
coûts directs de production, les frais de fonctionnement, la sous-traitance, l’externa-
lisation/ l’outsourcing, la délocalisation dans les pays à bas coûts, qui ont permis les
réductions de coûts observées. De même, la légitimité de la fonction achat est forte
pour ce qui concerne la recherche de leviers de croissance et le maintien d’avantages
concurrentiels.

 Repères La fonction achat dans les entreprises


françaises en 2008
– L’optimisation des coûts demeure l’objectif prioritaire des directions achat ;
– Elles s’organisent pour être force de proposition et apporter plus de services et de valeur
auprès de leurs clients internes ;
– 40 % du panel identifient l’apport de solutions comme l’action la plus efficace ;
– 34 % penchent pour une meilleure explication de la valeur ajoutée ;
– L’effet « crise » est nettement visible dans la baisse des budgets de fonctionnement. Alors
que 54 % du panel déclaraient en 2008 une baisse ou une stagnation du budget de fonction-
nement, 75 % des entreprises consultées déclarent être dans cette situation en 2009 ;
– 78 % des directions achat couvrent plus de 60 % des dépenses, contre 64 % en 2008.
Lancé en 2004, l’observatoire des achats est une enquête effectuée auprès de 200 direc-
tions achat de sociétés de tout secteur, incluant la plupart des sociétés du CAC 40. Cette
étude a été conduite entre juillet et novembre 2009 à partir de 200 entretiens télépho-
niques, complétés de 35 entretiens individuels menés avec des directeurs achat.
D’après Observatoire des achats Microsoft, BearingPoint, Essec et Novamétrie.

144
Les mutations de la fonction achat

1.1 Des métiers émergents

Du point de vue des effectifs, la tendance est au renforcement des départements


achat, accompagnée d’une évolution du profil de la fonction et des attentes en
matière de gestion des ressources humaines et de proximité avec la direction géné-
rale. Les achats représentent en moyenne 50 à 60 % du chiffre d’affaires, ce qui leur
confère une forte valeur stratégique. Les directeurs des achats possèdent souvent
une formation de haut niveau (bac +5 ou grande école) et une expérience d’autres
directions de l’entreprise. Néanmoins, passer par les achats ne semble pas encore
souvent perçu comme un accélérateur de carrière. Il est fort probable que, dans
moins d’une génération, la plupart des acheteurs en poste seront de niveau bac + 3
ou bac + 5, et des filières de formation en middle management sont en création.
En 2009, un quart des PME françaises (de 50 à 250 salariés) ont un responsable
achat, le service ayant en moyenne une année d’existence (Rivière, 2009).

1.2 De nouvelles relations sous-traitants et donneurs d’ordre

Les grandes entreprises établissent depuis quelques années des contrats de progrès
avec leurs fournisseurs, dans l’objectif de s’engager dans une relation gagnant/
gagnant : pour accroître sa propre compétitivité, il faut augmenter celle des fournis-
seurs, et donc diminuer sans cesse les coûts, améliorer la qualité, travailler en flux
tendus…
La gestion des risques de façon anticipée pour le compte de leurs clients internes
doit encore progresser. L’anticipation des risques fournisseurs par une action de
veille, l’application de clauses contractuelles, la réalisation d’audits et de contrôles
qualité… sont jugées prioritaires.
Sont également considérées comme prioritaire l’anticipation de l’évolution du
marché des matières premières ou des composants et la couverture sur le marché à
terme. Toutefois, s’il est indispensable de comprendre les tendances, il serait illu-
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

soire de penser les prédire avec précision. Les directeurs achat savent que la clef
réside dans leur capacité à anticiper en construisant des scénarios alternatifs validés
par les différentes parties prenantes1.

1.3 Vers une contribution plus forte à la qualité et à l’innovation

Les directeurs achat pilotent des revues annuelles de qualité des fournisseurs et un
suivi de la mise en œuvre des plans de progrès qui en découlent. Les secteurs du
commerce et de la distribution sont les chefs de file de cette démarche innovation et
qualité avec les fournisseurs stratégiques. La préoccupation pour le développement

1. D’après Observatoire des achats, lancé en 2004 par Microsoft, BearingPoint, l’ESSEC et Novamétrie.
145
LES MUTATIONS DE LA NÉGOCIATION COMMERCIALE

durable est également une composante forte pour les années à venir. L’un des princi-
paux enjeux humains sera de renforcer l’état d’esprit « service » chez les acheteurs.
Ce que les acheteurs attendent des vendeurs :
– s’intéresser aux clients, à leurs besoins, leurs métiers, leurs niveaux de marge,
pour mieux adapter et structurer leurs propositions. Les acheteurs constatent un
fort déficit de cette connaissance ;
– savoir innover : démontrer une capacité à proposer des solutions différentes,
challenger l’expression du besoin de leurs clients. Ne pas se contenter de répon-
dre aux besoins, proposer d’autres choses, différentes, innovantes ;
– créer de la valeur : ce qui intéresse les acheteurs, c’est que la proposition du
vendeur crée de la valeur pour son entreprise ; être capable d’aller au-delà du
prix, proposer des codéveloppements, des comarketings, et que cela fasse sens
pour l’entreprise. Le message est clair : « ce n’est pas toujours le moins cher qui
gagne » ;
– respecter les engagements pris : est une autre attente fondamentale. Trop sou-
vent, les acheteurs ont le sentiment que, pour certains vendeurs, la vente est
terminée quand ils ont le bon de commande ;
– être réactif : parce que l’entreprise bouge, et entre le moment où l’acheteur a
exprimé le besoin, le moment où il a bâti l’offre avec son fournisseur, le moment
où le fournisseur a été sélectionné et le moment où a été signé le contrat, le
besoin a peut-être déjà évolué. Ce qui va de plus en plus faire la différence sera
la capacité des vendeurs à accompagner leurs clients, y compris sur des sujets
vus comme figés.

2 Les nouveaux outils de la négociation : les TIC1

Autre changement récent et inéluctable : le recours aux nouvelles technologies. La


fonction achat s’inscrit pleinement dans la Supply Chain Management, surtout dans les
grandes entreprises, les ERP permettent de limiter les coûts et de pratiquer plus facile-
ment le sourcing en ayant accès à un grand nombre de fournisseurs dans le monde.
Une tendance forte est l’intégration des achats en amont dans toutes les fonctions
de l’entreprise. Ainsi, les achats hors production – à savoir toutes les dépenses
qu’engage l’entreprise pour son fonctionnement – dépendent désormais de plus en
plus du service achat, alors que, encore récemment, les gains de productivité étaient
seulement réalisés sur les matières, composants et sous-traitance. Par ailleurs, les
acheteurs prennent part aux décisions et sont consultés dès la conception d’un nou-
veau produit, ils anticipent les évolutions de besoins de composants pour la fabrica-
tion et peuvent revoir régulièrement la conception des produits achetés avec le
sous-traitant afin d’obtenir les pièces les moins chères possibles.

146 1. Technologies de l’information et de la communication


Les mutations de la fonction achat

La tendance est aussi à l’internationalisation et la mise en commun des porte-


feuilles d’achat. Les fonctions achat, au niveau des groupes, répondent à ce principe
de globalisation. La délocalisation des sites de production, débutée dans les années
1980, ne cesse de s’amplifier et participe à ce mouvement d’internationalisation.
Dans le même temps, les groupes recherchent des fournisseurs locaux directement
dans les pays low cost afin de conserver le principe de proximité des ressources.

 Repères Le recours aux enchères inversées

Contrairement aux enchères traditionnelles, dans les enchères inversées, les prestataires
vont, à partir du prix de départ, enchérir à la baisse.
Ces enchères inversées posent divers problèmes :
– certaines sociétés seraient tentées de « brader » leurs prestations, ce qui peut engendrer
des conséquences dramatiques, faisant peser des risques sur leur pérennité ;
– choisir le prestataire le moins-disant peut favoriser le dumping social ;
– les enchères inversées participent à faire baisser la qualité des prestations et des marges ;
– elles posent particulièrement problème dans les services prestataires de ressources
humaines ;
– l’acheteur se positionne en arbitre de la baisse des prix et non plus dans une relation
d’élaboration d’une solution avec ses prestataires.
D’après Costa, 2008.

3 Les perspectives pour la négociation commerciale

On constate ces dernières années des évolutions notables dans les modalités de
négociation commerciale. Nous en retenons trois.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

3.1 Les négociations en équipe, les négociations multipartites

Le développement des alliances et des fusions-acquisitions est l’un des phéno-


mènes essentiels qui a bouleversé l’environnement des entreprises au cours de la
dernière décennie. On peut donc envisager d’avoir de plus en plus de négociations
multipartites à engager. Comparées aux négociations bilatérales, les négociations
multilatérales présentent des phénomènes très complexes, car lorsqu’il y a plus de
deux négociateurs, il y a une forte possibilité que certaines parties créent des coali-
tions. Ces dispositifs s’observent dans les ventes complexes, dans les activités B2B,
et dans la grande distribution lors des négociations avec les centrales. Ce sont des
équipes multicompétences qui entrent en négociation, multipliant les interactions et
les domaines de compétences. Chaque membre de l’équipe doit avoir une confiance
147
LES MUTATIONS DE LA NÉGOCIATION COMMERCIALE

totale dans ses partenaires et jouer parfaitement le rôle qui lui a été assigné. Des
tactiques de négociation sont propres à la négociation en équipe. On peut signaler
(Audebert, Larochas, 1999) :
– le bon et le méchant : souvent mis en scène dans les films, en situation, ce stra-
tagème qui alterne un gentil négociateur et un négociateur brutal est toujours
d’une efficacité redoutable ;
– diviser pour régner : la technique consiste à exploiter des désaccords existants
ou à en créer (« Votre collaborateur m’a pourtant dit… ») ;
– le pilonnage : des questions sont assénées tour à tour par les différents membres
de l’équipe pour trouver la faille dans l’équipe d’en face. Elle vise à repérer les
éléments les plus fragiles pour créer des failles ;
– l’essaimage : on simule une division au sein de son propre camp ;
– l’absent a tort : la technique consiste à faire parler des membres de l’équipe
d’un autre, absent.

L’univers des négociations multipartites est immense et complexe.

3.2 La négociation de crise

Dans un contexte où les entreprises sont de plus en plus éclatées, fragmentées,


réticulaires, on observe la montée en puissance du nombre de négociations de crise.
Une négociation de crise « intègre dans ses mécanismes les paramètres d’une situa-
tion où il y a crise, et par conséquent où la tension, l’urgence et l’émotionnel entrent
en jeu » (Veyrat, 2008).
Deux cas de figure se dessinent1 :
– la négociation avec une personne en crise : le négociateur est alors confronté à
des personnes dans un état temporaire de désorganisation entraîné par l’incapa-
cité d’affronter un problème immédiat en se servant des méthodes d’adaptation
habituelles. Celles-ci n’entrevoient aucune autre issue que la violence pour se
faire entendre. Le conflit de personnes l’emporte sur le problème de fond. La
personne en crise est dans un état de rationalité limitée qui la met dans l’incapa-
cité de résoudre efficacement le différend. La tension est à son comble, ses réac-
tions sont essentiellement émotionnelles, la violence verbale est omniprésente.
Des négociations commerciales de nature conflictuelle se rencontrent par exem-
ple lors de fusions d’enseignes avec un acheteur qui découvre à cette occasion
que les conditions accordées à l’enseigne nouvellement acquise étaient plus favo-
rables que celles qu’il avait obtenues du même fournisseur. Vexé, il adopte à son
égard une attitude de représailles totalement contre-productive, difficile à suppor-
ter tant son hostilité rend ses exigences disproportionnées et intraitables. Peu de
1. Cette section reprend largement l’article de Jean-Pierre Veyrat : Qualitique, mai 2010 (sous la direction de
Barth.)
148
Les mutations de la fonction achat

négociateurs sont formés à faire face à ce type de conflit pour le moins impres-
sionnant. Seuls des négociateurs aguerris sont capables de maintenir un dialogue
constructif, sans être victimes eux-mêmes d’une déstabilisation durable. Ils doi-
vent faire appel à un ensemble de techniques de communication dont la reformu-
lation – qui est la répétition brève par le négociateur, avec ses propres mots, de
ce que la personne vient de dire – et la validation émotionnelle, qui apprend à
proposer une autre lecture du sentiment qu’elle est en train d’exprimer ;
– la négociation en situation de crise : les interlocuteurs sont rationnels, déter-
minés, avec un scénario, pour exiger sans conditions la satisfaction de leurs
exigences. Les conflits d’intérêts prédominent. Bien que tous les mécanismes
d’une négociation commerciale classique soient largement transposables, le
win-win, tant recherché dans les négociations concertées, devient alors totale-
ment inopérant car la confiance si nécessaire entre les parties est très entamée.
Le négociateur est prisonnier d’un enjeu vital (la crise à résoudre) dans un
contexte de chantage en cas de résistance, dont il doit absolument se libérer pour
être en état de traiter pied à pied avec la partie adverse. Les négociations où
acheteurs et fournisseurs s’affrontent pour baisser leurs prix de vente tout en
cherchant à sauvegarder leurs marges en sont l’exemple même. La confrontation
ne se déroule plus entre partenaires, mais entre adversaires décidés à aller
jusqu’au bout et à utiliser tous les moyens pour obtenir gain de cause. À cela
s’ajoute l’attitude de négociateurs offensifs dont le credo est de « transformer
l’impossible en possible » grâce à l’instauration d’exigences totalement dispro-
portionnées, présentées avec la plus totale intransigeance, et qui jouent sur la
faiblesse de leurs interlocuteurs. Les commerciaux peuvent être confrontés à des
situations de négociation de crise quand ils sont amenés à travailler dans des
pays en guerre ou dans d’autres où le terrorisme règne sur les échanges commer-
ciaux, du moins pour certaines activités (contrôle par la mafia par exemple).

3.3 La médiation commerciale


© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

La négociation est au cœur de la médiation (Stimec, 2005). Or la médiation commer-


ciale connaît en pratique et en théorie un développement récent. « La médiation est un
processus par lequel un tiers neutre tente, à travers l’organisation d’échanges entre les
parties, de permettre à celles-ci de confronter leurs points de vue et de rechercher avec
son aide une solution au conflit qui les oppose » (Bonafé-Schmitt, 1992).
Les fréquents litiges commerciaux1, nés de l’interprétation d’un contrat, de la
contestation d’une facture ou de la qualité du produit ou de la prestation fournie sont
d’abord et avant tout traités par la négociation, les acteurs étant bien conscients de
la nécessité de conserver une bonne relation commerciale, que celle-ci soit amenée
à durer ou non.
1. Cette présentation est largement inspirée de l’information en ligne sur le site : www.lormediation.fr
149
LES MUTATIONS DE LA NÉGOCIATION COMMERCIALE

Dans la majorité des cas, les parties en situation trouvent un terrain d’entente. Mais
il arrive que la situation se bloque, et que ce qui n’était qu’un litige devienne un véri-
table conflit. Le recours à la procédure judiciaire apparaît alors comme le seul pos-
sible pour faire respecter ses droits. Or, outre le fait qu’il est souvent long et coûteux,
il impose aux parties une solution juridique et technique qui souvent ne satisfait plei-
nement aucune des parties, et qui détruit immanquablement la relation commerciale.
La médiation est une solution alternative. Elle consiste en une intervention, effec-
tuée par un professionnel confirmé et indépendant utilisant une méthodologie spéci-
fique et obéissant à un code de déontologie strict, qui permet à deux parties en
situation de conflit de rétablir une communication suffisamment apaisée et efficace
pour être en mesure de trouver elles-mêmes une solution satisfaisante et pérenne à
leur désaccord, de façon librement consentie.
Par son expertise et sa posture neutre et impartiale, le médiateur va amener les
parties à communiquer de manière non conflictuelle, à exprimer et entendre les faits,
ressentis, besoins et intérêts de chacune, pour ensuite les accompagner dans la
recherche et l’élaboration de la solution. Il est conseillé de mettre dans chaque
contrat une « clause de médiation » qui engage les parties à recourir à la médiation
avant toute saisie d’une quelconque juridiction.
Cette clause oblige les parties à faire appel à un médiateur avant l’engagement de
toute procédure judiciaire, mais ne supprime pas la possibilité de recourir à la voie
judiciaire en cas d’échec de la médiation. Malgré une prise de conscience de tous les
acteurs, le recours à la médiation commerciale reste encore très timide en France
alors qu’elle est fortement implantée, notamment aux États-Unis et au Royaume-Uni.

Conclusion

La négociation commerciale a comme objectif la vente, c’est-à-dire le développe-


ment du chiffre d’affaires, et, dans le même temps, la construction de relations
pérennes avec les clients.
La généralisation des TIC, l’accès démocratisé à l’information, la professionnali-
sation accrue de la fonction achat en B2B, amènent les vendeurs à reconfigurer leurs
stratégies comme leurs techniques de négociation.
Le manager commercial doit élargir son expertise afin de conduire ces change-
ments, et ceci à deux niveaux :
– sortir des techniques de vente pour une ouverture vers la négociation de façon
plus large, afin d’être plus créatif et plus innovateur ;
– utiliser tous les outils et les process à sa disposition pour maîtriser une négocia-
tion qui se caractérise par une complexité grandissante.

150
Chapitre
Manager
7 dans le village
planétaire

L es relations commerciales s’inscrivent maintenant dans un marché mondia-


lisé. Avec les grandes évolutions actuelles tournées vers l’internationalisation
et la délocalisation, mais aussi vers la dématérialisation des structures physiques des
entreprises, les managers commerciaux ont de plus en plus de difficultés à relever le
challenge de diriger des personnes « à distance », distance géographique et/ou dis-
tance culturelle, les deux pouvant être associées.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Savoir « manager à distance » ou savoir « manager la distance », telle est la nou-


velle frontière du manager commercial.
Le développement des entreprises est de plus en plus porté par des politiques qui
introduisent de la distance entre les personnes et les activités. On observe deux
grandes logiques à l’œuvre : l’externalisation et l’internationalisation.
Les stratégies d’externalisation des activités visent la réduction des coûts fixes.
L’entreprise identifie son cœur de métier et sous-traite tout ce qui ne le constitue pas.
Déléguer ou sous-traiter présente l’avantage de la flexibilité, ce qui constitue un véri-
table atout stratégique dans des contextes de variations fortes, mais exige une bonne
capacité de pilotage des mandataires. Cette externalisation peut s’organiser sur de la
délocalisation qui conduit à faire faire certaines tâches hors des frontières nationales.
151
MANAGER DANS LE VILLAGE PLANÉTAIRE

Une autre option est de faire travailler les salariés en home office, dématérialisant
ainsi les structures physiques de l’entreprise. Les professions commerciales ont sou-
vent été les premières à voir leurs bureaux disparaître des entreprises.
L’autre grande politique est le choix de développement géographique, pour passer
du local au régional, du national à l’international. L’internationalisation s’opère en
plusieurs étapes : exportation, implantation de relais, puis de filiales. Les différents
stades impliquent chacun un management de personnes à distance, distance géogra-
phique qui s’accompagne souvent d’une différence culturelle.
Le management « à distance » exige des compétences tout à fait spécifiques, faites
d’écoute, de connaissance des « codes » culturels. Plus que jamais, l’objectif pour
le manager commercial est de synchroniser les efforts de chacun dans des espaces
physiques, des espaces temps, des espaces culturels divers et souvent fort éloignés.
Il faut pour cela susciter la confiance, le dialogue, la coordination et donner du sens
à l’ensemble des actions afin que tous aillent dans la même direction. Ce chapitre
est organisé autour de trois thèmes :

Section 1 Q L’internationalisation de l’entreprise


Section 2 Q Bien comprendre les différences
Section 3 Q Manager à distance dans un contexte interculturel

Section
1 L’INTERNATIONALISATION DE L’ENTREPRISE

Le management « à distance » est spontanément associé à la distance géogra-


phique, qui implique bien souvent la distance culturelle. Si l’une et l’autre sont sou-
vent liées, ce n’est pas de façon systématique. Il est important de comprendre les
mécanismes qui président à ces différentes modalités de mise à distance et leurs
conséquences en termes de comportement.

1 Les étapes de l’internationalisation

On identifie trois étapes d’internationalisation.


1. Le développement des exportations, avec trois modalités :
– l’exportation directe : elle s’appuie sur des campagnes par couponnage dans les
revues étrangères, la participation à des foires et salons à l’étranger ou le parte-
nariat avec un agent commercial ou avec un représentant salarié à l’étranger ;
152
L’internationalisation de l’entreprise

– l’exportation indirecte : l’exportateur peut utiliser les services de courtiers ou


vendre à des sociétés de commerce extérieur, qui s’occupent de toutes les for-
malités douanières, financières et administratives, et concluent elles-mêmes les
contrats de vente à l’étranger ;
– l’exportation associée, avec la création de groupements d’exportateurs qui se
dotent, grâce aux contributions des membres, de moyens de prospection et de
vente.

2. La mise en place d’un réseau de distribution à l’étranger : la constitution de


réseaux de distribution à l’étranger permet d’assurer une présence permanente. Les
modalités sont nombreuses : la franchise internationale (Yoplait), la franchise étran-
gère (chaînes hôtelières), la succursale (sans personnalité juridique), la filiale de
distribution (création d’une personne morale nouvelle comme Renault Export) et
l’investissement à l’étranger (capitaux fournis par l’entreprise d’origine).
3. La multinationalisation : on définit une entreprise comme véritablement mul-
tinationale quand elle présente les caractéristiques suivantes : une part de ses ventes
et de sa production est réalisée à l’étranger, elle est présente dans plusieurs pays
avec un certain nombre de filiales, il existe dans l’équipe de direction une personne
dédiée à l’international, le capital social et la stratégie sont multinationaux.
4. La globalisation : on parle de globalisation quand l’ensemble des stratégies
sont pensées à l’échelle mondiale : les produits, les campagnes de communication
comme la politique RH ou les stratégies de production. Même si de plus en plus
d’entreprises se positionnent dès leur création sur ce projet stratégique et pensent
leur stratégie globalement, peu d’entreprises sont finalement « globales », IBM,
Coca-Cola, ou encore McDonalds peuvent y prétendre.
On observe généralement trois grandes vagues dans la multinationalisation : une
logique industrielle, à la recherche d’économies d’échelle et d’avantages compara-
tifs (pétrole, mines, agroalimentaire, industrie automobile), une stratégie commer-
ciale fondée sur la recherche de positions dominantes dans une économie oligo-
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

polistique, et de plus en plus une logique financière ; les entreprises procèdent alors
à des investissements en se recentrant sur les activités les plus rentables tout en
s’agrandissant.
Le tableau 7.1 propose une catégorisation des différentes modalités d’interna-
tionalisation.

153
MANAGER DANS LE VILLAGE PLANÉTAIRE
Tableau 7.1 — Synthèse des stratégies d’internationalisation
Production à
l’étranger ➔
Présence NON OUI
d’investissement
financier

Opérations commerciales sans Opérations productives sans


investissement investissement
Exportation directe ou indirecte Licence
NON
de produits Franchise
Exportation des services Contrat de fabrication
Exportation de know how Opérations clefs en main

Opérations commerciales avec Opérations productives avec


investissement investissement
Filiale de promotion des ventes Unités d’assemblage
OUI
Unités de stockage Unités de fabrication (en propriété totale,
Unités de services conjointe, participations minoritaires,
Filiale de vente sous-traitance internationale)

D’après Un peu d’économie, animé par J.-P. Simonet (www.yc-arsonval-brive.ac-limoges.fr/jp-simonnet).

2 Comment organiser l’internationalisation commerciale ?

La première étape passe souvent par une étude de marché qui permet d’identifier
des premiers contacts et le potentiel du marché local ou national. Des données géné-
rales peuvent être collectées par des missions économiques, ou tout simplement sur
le Web : données politiques, économiques, financières, climatiques, sociétales,
administratives, sont toutes essentielles. Une étude standard donne une première
information qu’il faut ensuite affiner en fonction du produit pour tester la réceptivité
du marché visé. Il faut en effet s’assurer de l’existence d’une demande, de la perti-
nence des prix, et de la cohérence des conditions de vente, par rapport au contexte
local.
Ensuite, la participation à des salons professionnels dans le pays visé facilite le
démarchage de prospects, même si le budget est souvent lourd (déplacements, coût
du salon, traduction des documentations…). Les CCI internationales facilitent les
contacts dans les pays visés.
La prospection et l’exportation présentent des risques importants pour une entre-
prise. Pour les primo-exportants (et si le chiffre d’affaires n’excède pas 150 millions
d’euros), la Coface (Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur)
propose une avance de fonds et prémunit contre le risque d’échec commercial,
moyennant une prime de 3 %. Les remboursements des indemnités perçues se font
au prorata des recettes d’exportation, et si les recettes ne couvrent pas les dépenses,
la somme reste acquise.
154
L’internationalisation de l’entreprise
Tableau 7.2 — Comment construire une stratégie à l’international
Recommandation Actions possibles Commentaires

Construire un réseau – Trouver un premier partenaire – Avant de pénétrer un marché, il


– Chercher des contacts auprès est vital de connaître les pratiques
des clients et partenaires existants commerciales et de se faire
– Se renseigner auprès accompagner
des investisseurs pour identifier – Construire un réseau permet
une opportunité d’être opérationnel plus
rapidement et de diminuer
les risques d’échec

Construire une stratégie – Incorporer la stratégie – Décrire quel partenaire est


de globalisation dans la stratégie recherché, quel produit, service
de l’entreprise sera proposé, quel investissement
– Rédiger un document spécifique sera consenti, pour quel résultat
pour la présenter

Construire un cadre – Rédiger un contrat en anglais – Rester flexible sur le modus


d’apporteur d’affaires, operandi en fonction des conditions
de distribution, de partenariat, du marché mais intraitable sur
de joint-venture, de licensing, les objectifs et le cœur du produit
fusion-acquisition… ou du service
– Garder toujours en tête le triangle
risque, temps, coût en fonction
des opportunités rencontrées

Construire un terrain de jeu – Définir une liste de critères – Pondérer les critères en fonction
(socio-économiques, culturels, des objectifs, de la connaissance
législatifs…) initiale des marchés et des réseaux
– Choisir les zones géographiques locaux
prioritaires, les pays cibles

Construire une offre – Choisir quels sont les produits – L'utilisation d'un produit/service
et/ou services adaptés peut être différente d'un pays
– Créer ou adapter les produits, à un autre
services existants

Construire une organisation – Développer des procédures – Décider qui fait quoi
et une logistique de communication, de gestion, – Planifier dans quels délais
de reporting, de support… – Identifier quoi déléguer
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

– Développer ou traduire
des documents marketing
et de communication

Construire une équipe – Proposer une description – Décider de passer à l’étape


du management souhaité suivante afin d’accélérer
– Recruter l’équipe et la former le développement et la croissance
– Adapter la formation au contexte
national et en fonction
des différences interculturelles

Construire une culture – Créer un référentiel commun – Analyser le comportement


à l’entreprise des organisations

D'après BenMessaoud, 2009.

155
MANAGER DANS LE VILLAGE PLANÉTAIRE

Le choix de la politique de distribution conditionne la réussite de la stratégie de


vente. Deux critères entrent en ligne de compte : la rapidité de pénétration du mar-
ché et le degré de maîtrise de la distribution. Dans un premier temps, le manager
commercial est alors forcément impliqué, soit directement, soit en mandatant un
responsable export dans le pays ou la zone visée. Jusqu’à la création d’un service
dédié à l’international, il est responsable en direct de la politique d’internationalisa-
tion commerciale de l’entreprise. Ensuite, des postes spécifiques sont créés.

3 Les métiers du commerce international1

Tous les métiers du commerce international exigent, outre de bonnes compétences


commerciales, des connaissances sur les différentes cultures, une bonne capacité
d’adaptation, une connaissance des techniques liées à l’internationalisation et une
bonne pratique des langues étrangères.
Ils se déclinent selon les intitulés suivants : directeur commercial export, respon-
sable de zone export, ingénieur d’affaires export, responsable commercial export,
chef de produit export, négociateur international, responsable de filiale à
l’étranger…

3.1 Le directeur commercial export

Il est ambassadeur de la société à l’étranger. Il définit les objectifs en matière


d’exportation, il est responsable de la stratégie et des résultats obtenus. Il doit mettre
en place une politique marketing export et suivre l’évolution des marchés étrangers,
connaître la concurrence et les contraintes sociales en vigueur dans les pays parte-
naires. Il embauche, forme et anime le personnel export. Il assure la relation avec la
direction générale de l’entreprise ainsi qu’avec les autres divisions. Il contrôle la
logistique. Il reçoit les gros clients. Il a reçu une formation commerciale supérieure
(bac + 4 ou 5). Il a déjà une expérience professionnelle (âgé de plus de 35 ans). Il
a des compétences dans les domaines linguistique, de la vente, du marketing, de
l’animation d’équipe.
Le contenu du poste et l’étendue des responsabilités varient en fonction des choix
de l’entreprise en matière d’internationalisation : lorsque l’entreprise exporte sans
investir sur les marchés locaux, le directeur export dispose de prérogatives clas-
siques. Lorsque l’entreprise définit une stratégie internationale avec investissement
en moyens humains et matériels et création de filiales, le directeur export devient un
directeur international avec prise en charge de prérogatives plus larges. Au commer-
cial s’agrègent alors le financier, le marketing et parfois les achats ou la production ;

1. Cette section s’appuie sur le site : www.studya.com à la rubrique infométiers.


156
L’internationalisation de l’entreprise

le management sera plus large et pourra inclure des responsables de filiales. Enfin,
lorsque l’entreprise devient multinationale, des zones de développement commer-
cial sont créées et la fonction de directeur export ou international peut disparaître au
profit de celle de vice-président chargé de développer les ventes sur les zones
concernées.

3.2 Le chef de zone export

Il doit mettre en œuvre la politique commerciale de l’entreprise sur une zone géo-
graphique précise. Il organise les équipes commerciales, forme et anime la force de
vente sur son secteur. Il est chargé de commercialiser, promouvoir la gamme de
produits de l’entreprise afin de permettre le développement des marchés existants. Il
doit également prospecter de nouveaux débouchés et rendre compte de l’évolution
des marchés. Il est chargé de l’animation d’un réseau de distributeurs et de clients
directs. Il doit être autonome, rigoureux et disponible. Il doit également faire preuve
d’une grande ouverture d’esprit. La maîtrise de deux ou trois langues étrangères est
indispensable. Le chef de zone export exerce en général ses responsabilités dans de
grandes entreprises et se doit d’effectuer de fréquents déplacements qui imposent
des horaires irréguliers. Il est en général titulaire d’un diplôme d’une école de com-
merce ou d’ingénieur. Une excellente connaissance du secteur d’activité est requise.
On accède à ce métier après une expérience professionnelle préalable de cinq ans
minimum dans le domaine de l’export.

 Repères Témoignage

Christian, responsable zone export, Veuve Cliquot Ponsardin


Avec 85 % des ventes, l’export est l’activité phare de Veuve Cliquot. Christian se consacre à
l’Europe du Sud (Espagne, Italie, Portugal), à laquelle se greffent, pour des raisons histo-
riques, le Canada et la Belgique.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Sa mission consiste à décliner, sur les pays dont il a la responsabilité, la stratégie commer-
ciale et marketing de Veuve Cliquot. « Je gère un ensemble d’agents importateurs sélectionnés
en fonction de leur activité (vins et spiritueux) mais également en fonction de leur expertise
marketing et relations publiques. Leur connaissance spécifique du monde du champagne est
un atout supplémentaire. Enfin, je m’assure que l’importateur est en mesure de travailler avec
nous sur la base de l’exclusivité. »
Christian élabore le plan marketing annuel en respectant le guideline fixé par la direction :
« Sur mes zones, la publicité est peu représentée ; en revanche, la promotion passe par de
nombreuses actions de relations publiques : sponsoring d’événements, dégustations auprès
de la presse professionnelle ou grand public. Par exemple, je relaie des événements tels que le
prix Veuve Cliquot de la femme d’affaires ou les soirées Halloween. »
La présence sur le terrain est essentielle : « Je passe 40 % de mon temps en déplacements :
je vais à la rencontre des cavistes, j’accompagne mes importateurs chez leurs clients de la

☞ 157
MANAGER DANS LE VILLAGE PLANÉTAIRE

☞ grande distribution et auprès de leur clientèle hôtel/café/restaurant. Ainsi, je vérifie le respect


de la politique de prix et de communication. Avec les chefs des ventes de nos importateurs,
nous procédons à une business review détaillée des chiffres de ventes réalisés et des objectifs
à atteindre. Je contrôle également la solidité financière d’importateurs, ce qui me permet de
limiter les risques d’impayés futurs. Enfin, je vérifie le niveau de stock de mes importateurs. »
D’après Commercial et Marketing, Apec (www.cadres.apec.fr), 12 novembre 2003.

3.3 Le chef de produit export

Il est le représentant de la marque et d’une gamme de produits à l’exportation. Il


promeut ses produits auprès des vendeurs, voire même auprès des clients. Il réalise
des études de marché, réalise la stratégie produit. Il manage les budgets marketing,
publicitaires et promotionnels.
Il existe d’autres métiers dans le commerce international : conseiller en dévelop-
pement international, responsable import-export, responsable de succursale ou de
bureau à l’étranger, négociateur international.

 Repères Témoignage

Maria-Claudia, négociatrice internationale


Maria-Claudia, de nationalité argentine, est négociatrice internationale au sein de la direc-
tion aviation, raffinage marketing de Total à Paris.
« Nous sommes 5 négociateurs ayant chacun en charge une zone géographique. Je m’occupe
de l’Amérique latine, de l’Espagne, du Portugal et de l’Europe centrale. C’est une mission très
relationnelle qui implique aussi une forte mobilité géographique auprès des clients. Nous
commercialisons notre offre, le Jet A1, carburant communément appelé kérosène, en répon-
dant aux appels d’offres des compagnies aériennes. Sur la zone géographique dont j’ai la
charge, mes responsabilités en tant que négociateur sont d’une part la gestion d’un porte-
feuille de clientèle et d’autre part le suivi des marchés et l’établissement de la politique de prix
des aéroports sur lesquels Total est présent. Je gère, par exemple, une quarantaine de compa-
gnies aériennes et une vingtaine d’aéroports. Cela représente environ 400 000 tonnes de Jet
A1 par an. »
D’après Studya (www.studya.com).

158
Bien comprendre les différences

Section
2 BIEN COMPRENDRE LES DIFFÉRENCES

Évoluer et manager dans des contextes multiculturels exige une bonne compré-
hension de ce qui fait la différence, crée la distance entre les personnes, qu’elles
soient éloignées ou pas physiquement. Le manager doit savoir construire et maîtriser
le dosage entre distance et proximité, pour éviter les malentendus qui conduiraient
aux échecs, aux conflits ou à la rupture de la relation.

1 Les grandes théories de l’interculturel


1.1 Les apports de Hall

Le mot culture ne se conjugue finalement qu’au pluriel, et envisager les cultures,


c’est surtout essayer de comprendre les différences culturelles en les comparant ou
en les opposant. C’est sur cette base que sont fondées les grandes théories qui
décryptent les relations en milieu interculturel.
Dès 1949, l’anthropologue Hall s’est penché, dans le cadre du FSI (Foreign Service
Institute), programme de formation de futurs diplomates, sur la communication inter-
culturelle et en a proposé une conceptualisation qui met en avant trois éléments :
– le rapport au temps : il distingue ainsi des cultures polychrones et des cultures
monochrones. Dans une culture polychrone, le temps est concret (il s’optimise),
il se contrôle, la spontanéité ou les interruptions sont mal acceptées (cas de l’Al-
lemagne). Dans un contexte polychrone, le temps ne compte pas, les délais sont
souples, le processus est plus important que le résultat (Brésil) ;
– la gestion de la distance interpersonnelle : chaque individu tend à sauvegarder
son intimité pour préserver son identité. Cette distance interpersonnelle se
décline en quatre dimensions : intime (la cage d’ascenseur), personnelle (la
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

famille), sociale (le travail), publique (contacts officiels ou formels). Les façons
de faire sont très différentes selon les cultures, si les Américains utilisent la
parole pour rétablir la distance personnelle, pour les Français, ce sera le
silence ;
– le rôle du contexte de communication dans la compréhension des messages. Il
y a les cultures à « pauvre contexte » : les messages sont explicites et à faible
marge d’interprétation (cas des États-Unis, où les choses sont dites cash), et
celles à « contexte riche », où l’implicite est très fort dans la communication (un
regard, un soupir, un silence).

Cette grille est déjà d’une grande aide pour un manager commercial qui serait
amené à négocier ou à animer des équipes en milieu multiculturel, même s’il faut
159
MANAGER DANS LE VILLAGE PLANÉTAIRE

bien sûr garder à l’esprit que la réalité est bien plus subtile et nuancée que les grilles
de lecture.

1.2 Les travaux de Hofstede (1991)1

Dans les années 1970, Geert Hofstede, à partir d’études (sur la base de question-
naires) menées chez IBM dans plus de 140 pays, identifie cinq grands facteurs de
différenciation culturelle et classe les pays selon un continuum construit sur des
oppositions, il retient :
1. La distance hiérarchique : cette dimension correspond au degré d’inégalité
attendu et accepté par les individus. Selon les cultures, le subordonné accepte plus
ou moins, voire recherche cette autorité. La distance hiérarchique se mesure à la
perception que le subordonné a du pouvoir de son chef, car cette représentation va
déterminer son comportement. Parmi les pays à distance hiérarchique élevée se
trouvent les pays latins européens (France, Belgique, Italie, Espagne), les pays
d’Amérique du Sud, les pays arabes et les pays d’Afrique noire. Et parmi les pays
à distance hiérarchique faible sont présents les pays germaniques, scandinaves et
anglo-saxons.
2. Le contrôle de l’incertitude : il désigne le degré de tolérance qu’une culture
peut accepter face à l’inquiétude provoquée par les événements futurs. Dans les
sociétés à faible contrôle de l’incertitude, leurs membres ont une tendance naturelle
à se sentir en sécurité relative. Par contre, dans les sociétés à fort contrôle de l’in-
certitude, les membres sont éduqués à chercher à contrôler l’avenir, la population
présente un plus haut degré d’anxiété qui se manifeste par une plus grande nervosité,
une émotivité et une agressivité plus fortes. Parmi les pays avec un contrôle élevé
de l’incertitude : les pays de culture latine, aussi bien d’Europe (France, Belgique,
Italie, Espagne) que d’Amérique (Mexique, Colombie, Venezuela, Pérou, Chili,
Argentine), le Japon. Parmi les pays avec un contrôle faible de l’incertitude : les
pays scandinaves et anglo-saxons, le Sud-Est asiatique, les pays en voie de dévelop-
pement, comme l’Inde et les pays africains.
3. L’individualisme et le collectivisme : ce critère exprime le degré d’autonomie
de l’individu par rapport au groupe et aux normes sociales, la plus ou moins grande
solidarité du groupe et le degré d’attachement aux valeurs communautaires. D’une
façon générale, on peut dire que les sociétés communautaires valorisent le temps
passé pour le groupe, tandis que les sociétés individualistes valorisent le temps passé
par les individus pour leur vie personnelle.
Dans une culture individualiste, employés et employeurs entretiennent des rela-
tions limitées aux relations de travail. Dans une culture communautaire, faire des
affaires suppose avoir tissé auparavant des liens d’amitié.
1. Geert Hofstede anime son propre site : www.geert-hofstede.com
160
Bien comprendre les différences

Dans les cultures individualistes, un conflit débouchant sur une confrontation


ouverte est considéré salutaire pour tous. Dans les cultures communautaires, il aura
toutes les chances de faire perdre la face à l’un des deux protagonistes, c’est-à-dire
perdre sa dignité, sa fierté, voire son honneur, ce qui est inacceptable. Ces cultures
attacheront donc une grande importance au maintien d’une harmonie, au moins for-
melle, dans les relations interpersonnelles. Les trois pays les plus individualistes
sont les États-Unis, l’Australie et la Grande-Bretagne.
4. La dimension masculine/féminine : il s’agit de savoir si une société est, d’une
part, plutôt plus sensible à des facteurs émotionnels (féminins) ou factuels (mascu-
lins), d’autre part, organisée avec une séparation marquée ou non des rôles des deux
sexes dans les tâches de la vie quotidienne. Le masculin et le féminin représentent
les deux extrêmes d’un continuum définissant l’importance accordée aux valeurs de
réussite et de possession (valeurs masculines) et à l’environnement social ou à l’en-
traide (valeurs féminines).
La répartition sexuelle des rôles est également importante : plus les rôles sont dif-
férenciés, plus la société est considérée comme masculine, plus les rôles sont inter-
changeables, plus la société est féminine. Parmi les pays où l’indice de masculinité
est le plus élevé se trouvent le Japon, les pays germanophones, les pays d’Amérique
latine. Parmi les pays à culture féminine, on trouve les autres pays latins ou encore
les pays d’Afrique noire, le score le plus élevé étant pour les pays scandinaves et les
Pays-Bas.
5. L’orientation court terme/moyen terme : cette dimension, ajoutée plus tardi-
vement, est focalisée sur la façon avec laquelle la société maintient le respect de la
tradition. Un taux élevé indique que le pays est orienté vers un engagement à long
terme. Un taux plus bas indique une culture où les changements apparaissent très
vite et où les engagements – s’ils s’avèrent nécessaires – sont moins importants que
le progrès. Les valeurs associées au court terme sont le respect des traditions, la
satisfaction des obligations sociales. Les valeurs associées à une vision à long terme
(dite « vérité ») sont économie et persévérance.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

1.3 Les recherches de Fons Trompenaars et Charles Hampdel (1998)

Ces deux chercheurs distinguent sept dimensions, qui rejoignent celles identifiées
par Hofstede, mais avec des nuances qui peuvent être particulièrement intéressantes
dans le monde des affaires. Nous retiendrons :
La place respective des relations et des règles : des cultures sont ainsi très atta-
chées aux contrats techniques, détaillés ; les secondes accordent plus d’importance
aux personnes et aux relations qui se tissent autour de ces contrats.

161
MANAGER DANS LE VILLAGE PLANÉTAIRE

Les émotions, qui peuvent être valorisées dans certaines cultures et vues comme
un signe d’authenticité et de richesse ; dans d’autres, elles sont perçues comme la
perte de maîtrise de soi.
Le rôle du statut, qui peut être plus ou moins prégnant : dans certains contextes
culturels, c’est le statut de la personne (ses titres, ses diplômes, sa position sociale)
qui va primer sur ses compétences ; dans les autres, on va d’abord regarder ce que
la personne est capable de faire, et ses résultats.
Toutes ces catégorisations doivent bien sûr être prises et utilisées avec précaution.
Elles sont difficiles à isoler et n’ont de sens que dans leurs interactions les unes avec
les autres, et la « réalité » est toute en demi-teintes, et autrement complexe. Ce sont
néanmoins des grilles de lecture qui permettent de décrypter bien des comporte-
ments et des situations jugés difficiles, ou d’éviter des problèmes dont les retombées
peuvent être graves pour les personnes comme pour les affaires dans le cadre de
l’entreprise.
Dans ces conditions, on comprend que manager les autres, tout en ne prenant pas
en compte leurs valeurs propres, a bien peu de chances de réussir.

2 Le cas de la négociation interculturelle

C’est bien sûr dans le face-à-face que la mobilisation des connaissances des codes
de l’interlocuteur est la plus sensible. Les situations sont par définition multiples et
variées. Nous n’en proposerons que quelques-unes qui ont valeur d’illustration
(Bobot, 2008).

2.1 Le style de négociation chinois

Il est imprégné de l’éthique confucianiste, avec la recherche du comportement


juste, de l’harmonie au sein d’un groupe. Les Chinois négocient en groupe et cher-
chent à créer des relations durables favorables à une relation harmonieuse entre les
partenaires. Ils sont beaucoup plus soucieux de maintenir cette harmonie, de préser-
ver la face de chacun, que de satisfaire à des règles ou des principes abstraits qui
correspondent au mode de pensée occidental plus analytique.
Ils sont habitués à des circuits décisionnels longs et cloisonnés. Ils disposent d’un
temps abondant et leur stratégie générale est basée sur l’usure de la partie adverse.
Les rituels sont garants de cette qualité de la relation : remise de cartes de visite à
deux mains en s’inclinant, remise de cadeaux, formules de politesse abondantes…
jalonnent les négociations.

162
Bien comprendre les différences

 Repères La Chine ou l’empire des mille liens

L’accès aux réseaux en Chine est la condition sine qua non pour tout manager occidental.
Des réseaux souterrains qui exercent leur influence, sous la haute bienveillance du Parti.
« Il existe deux sphères. Une, restreinte, est constituée des proches et des amis avec service
obligatoire, chacun étant redevable à l’autre. La deuxième, plus élargie, représente le marché,
la société où on ne se doit rien, l’exemple même de l’univers impitoyable ».
Guy-Olivier Faure, professeur de sociologie à Paris V et à Shanghai.

Lors d’une rencontre, le bon interlocuteur est rarement celui qui parle ou qui possède le
plus long titre.
« Les Occidentaux ne savent jamais qui est le vrai décideur dans une discussion. Ce peut être
un de ceux qui n’a pas parlé, ou un vieil homme de 75 ans qui est resté chez lui. Combattre
l’influence des clans tient du donquichottisme. Mieux vaut en intégrer un. Ce qui se fera petit
à petit, à force de présentations, en s’adressant par exemple aux Français déjà expatriés. Les
Chinois ne cherchent pas à comprendre la culture des étrangers, d’ailleurs les explications les
ennuient. Ils veulent seulement avoir des outils, des recettes pour s’enrichir plus vite. »
Olivier Meier, maître de conférences à Paris XII et Paris-Dauphine.

D’après Petit Manuel de management interculturel (www.newzy.fr), 26 août 2009.

2.2 Le style de négociation indien

Le continent indien est un pays qui donne l’illusion de la facilité. On y parle


anglais, c’est une démocratie, colonisée pendant plus de deux siècles et demi par la
Grande-Bretagne. On s’attend donc à trouver facilement des repères. Pourtant, c’est
sans doute un des endroits les plus mystérieux et les plus surprenants de l’Asie. Il
faut apprendre à s’adapter à cette mosaïque d’États aux civilisations diverses et aux
quatre croyances : hindouisme (80,5 % de la population), islam (13,5 %), christia-
nisme (2 %) et bouddhisme (0,7 %). Cette immense démocratie est une fédération
de multiples États, qui représentent autant de cultures.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Seuls les Indiens savent exactement comment s’y retrouver entre les différentes
catégories, les généalogies et les « quartiers de noblesse ». Il est inutile de se fonder
sur des idées toutes faites : on peut rencontrer aujourd’hui des cadres supérieurs
« intouchables ». De nature individualiste, les Indiens ont tendance à beaucoup argu-
menter et à travailler leurs interlocuteurs occidentaux à l’usure.

2.3 Le style de négociation saoudien

Le conflit ouvert y est méprisé. De par la tradition ancestrale d’échanges entre


Bédouins, l’acte de négociation est valorisé. L’influence des préceptes coraniques
oriente les négociateurs saoudiens vers une attitude de sympathie, de compréhension
163
MANAGER DANS LE VILLAGE PLANÉTAIRE

et de modération. Le mode de relations sociales très patriarcal privilégie une orien-


tation interpersonnelle forte et la primauté de l’honneur sur l’efficacité.
L’argumentation est de type émotionnel, fondée sur la tradition ou la religion. La
représentation saoudienne du temps est très religieuse : le destin de chacun apparte-
nant à Dieu (Inch Allah) et le rythme quotidien de chacun étant marqué par les
prières.

 Repères Comment perdre une négociation


pour une porte ouverte
Un grand groupe français est en cours de négociation avec des Saoudiens et reçoit une
délégation d’hommes d’affaires saoudiens. C’est pendant la période où est débattue la
question d’interdire le voile en France. Ces débats rencontrent un écho très important dans
le Golfe, où les commentateurs s’insurgent contre ce projet de loi « intolérant », « liberti-
cide » et « antimusulman ». Les Français sont conscients de cette détérioration de leur
image. L’équipe en charge des négociations décide d’orienter ses hôtes vers une pièce voi-
sine de la salle de réunion pour qu’ils puissent éventuellement se retirer pour leur prière
habituelle. Ce faisant, ils sont bien conscients qu’ils contreviennent à la règle de laïcité qui
prévaut au sein de l’entreprise. Sachant qu’une telle initiative ne sera jamais approuvée par
leur hiérarchie, ils décident de ne pas l’informer.
Alors qu’il est midi moins cinq, les Saoudiens se retirent donc dans la pièce en question pour
prier. Les Français se réjouissent, ils savent qu’ils vont pouvoir passer à un autre niveau de
relation avec leurs hôtes. Au même moment, le PDG de l’entreprise, accompagné du comité
de direction, déboule dans les couloirs à la recherche d’une salle pour une réunion improvi-
sée de toute urgence. Il ouvre brutalement la porte de la salle où les Saoudiens sont en
pleine prière. Fureur du PDG qui vire tout le monde… Les Français n’ont plus jamais entendu
parler de ces hommes d’affaires saoudiens.
D’après gestion-des-risques-interculturels.com, site animé par Benjamin Pelletier.

3 Évoluer dans un contexte interculturel

La culture se définit souvent par son contraire : le « choc culturel », quand on


voyage ou quand on a l’occasion de s’immerger dans un groupe humain différent du
nôtre. Tout ce qui paraissait « normal » disparaît et ce qui semble l’être pour les
autres paraît étonnant, et demande à être expliqué et justifié.
La culture est un ensemble de codes, de règles, de pratiques qui sont dans l’évi-
dence. Elle touche les modes de vie, habillement, cuisine, mais aussi les créations
artistiques ou les productions techniques ou scientifiques, enfin elle intègre l’ensem-
ble des valeurs partagées par le groupe humain, de façon souvent implicite. S’il est
assez facile de savoir se servir à table ou de s’habiller ou de s’exprimer en confor-
mité culturelle, il est plus difficile d’être en phase avec les valeurs morales. Parler
couramment une langue ne garantit pas complètement la compréhension profonde
de la culture qu’elle reflète.
164
Bien comprendre les différences

Quels sont les grands pièges à éviter pour un manager commercial appelé à évo-
luer dans un contexte multiculturel ou international (Drummond, 2008) ?
• Piège n° 1 : les stéréotypes
Les stéréotypes correspondent aux jugements des comportements et des individus
à travers nos propres filtres. À travers ces stéréotypes, l’Autre fait souvent peur. En
seconde approche, il est facile de se réfugier dans les stéréotypes qui expliquent
tout : « L’Italien est hâbleur, l’Asiatique est travailleur… ». Le piège est de rester
bloqué sur ces stéréotypes et de vivre le monde à travers eux.
• Piège n° 2 : rentrer dans une discussion sur les différences
Entrer dans un jugement de valeur sur les différences fait entrer dans un cercle
vicieux, la tolérance est la première marche vers la compréhension.
• Piège n° 3 : prendre pour des « évidences partagées » toute similarité
apparente
La tentation de s’accrocher aux similitudes est grande, elle permet de diminuer
l’angoisse, mais débouche très souvent sur de graves malentendus.
• Piège n° 4 : créer l’homogénéité pour « masquer » les différences
C’est l’idée qu’on peut « oublier » les différences, en se construisant des référen-
tiels communs. Si l’idée est bonne sur le principe, elle est impossible à mettre en
œuvre tant les valeurs culturelles remontent à la surface ; nier les différences n’est
pas la solution.
Ne pas identifier les risques interculturels, ou y être trop insensible, peut conduire
à des échecs en matière commerciale, dont certains peuvent être lourds de consé-
quences comme le montre le cas décrit dans l’encadré ci-après.

 Repères Un train peut (définitivement ?) en cacher


© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

un autre
La Corée du Sud a maintenant le KTX-II coréen, jumeau et désormais concurrent direct du
TGV français. Il a inauguré sa carrière commerciale le 2 mars 2010 sur une ligne intérieure
coréenne. Il peut rouler jusqu’à 330 km/h et est construit par l’entreprise Rotem, filiale du
chaebol1 Hyundai.
La date de la mise en service n’a pas été choisie au hasard. Elle précède tout juste la clôture
de la liste des prétendants à l’appel d’offres pour le marché brésilien pour la ligne entre São
Paulo et Rio de Janeiro. Autre contrat en vue : la liaison grande vitesse entre San Francisco
et Los Angeles, d’un montant estimé à 33 milliards d’euros…
En 1993, la France était en pleine négociation avec la Corée du Sud pour la vente du TGV. La
compétition avec le Shinkansen des Japonais et surtout l’ICE des Allemands était féroce.
Pour gagner ce contrat, Alstom a consenti des transferts massifs de technologie, d’abord

☞ 165
MANAGER DANS LE VILLAGE PLANÉTAIRE

☞ avec la transmission à la Corée de 350 000 documents techniques et la formation de 1 000


Coréens.
Puis c’est un contrat de 46 rames de TGV. Les rames 1 à 12 sont entièrement construites en
France par les Français ; les 13 à 17 sont en partie construites par les Français, en partie par
les Coréens ; les rames 18 à 46 sont construites en Corée par les Coréens. 400 formateurs
français assistent les Coréens dans ce transfert de savoir-faire.
Pendant la période de 1994 à 2004, les Coréens ont profité de cet apport massif de techno-
logie pour travailler sur leur propre projet de train à grande vitesse, le G7.
Les Français ont bien vu le danger se profiler, mais aveuglés par l’obsession des performances
chiffrées (la vitesse de pointe), à laquelle s'ajoute l’ivresse de la victoire face aux Japonais et
aux Allemands, et la perspective de réaliser « l'un des plus importants transferts de techno-
logie du monde », ils sont incapables de se livrer à une juste appréciation des risques.
D’après gestion-des-risques-interculturels.com, site animé par Benjamin Pelletier.

1. Nom donné aux conglomérats sud-coréens.

Section
3 MANAGER À DISTANCE DANS UN CONTEXTE
INTERCULTUREL

L’entreprise est un groupe humain pas tout à fait comme les autres, mais néan-
moins un groupe humain ; il n’échappe donc pas au contexte culturel, prégnant dans
le dessein de l’organisation, dans ses modalités de gouvernance, ou encore dans ses
fonctionnements au quotidien.

1 Construire des équipes interculturelles


1.1 Le management face aux peurs et aux appréhensions des équipes2

Le manager interculturel doit comprendre les peurs et les appréhensions des per-
sonnes qu’il dirige, car ces sentiments impactent directement la performance des
équipes. Des illustrations aident à comprendre ce phénomène subtil.
Ainsi, les Français ont la crainte d’une position servile. Cette peur d’entrer dans
un rapport de subordination perçu et vécu comme servile s’accompagne de son dou-
ble : le refus de se soumettre à plus fort que soi, la résistance à l’obéissance, la
contestation de l’ordre, la jouissance de frustrer le puissant ou le supérieur de l’exer-
cice de son pouvoir (d’Iribarne, 1989). La crainte d’apparaître dans une position
servile exige du donneur d’ordre qu’il accompagne ses instructions d’explications
rationnelles établissant un équilibre « d’intellect à intellect », faisant passer au
second plan la distance hiérarchique.
2. Source : gestion-des-risques-interculturels.com/ site animé par Benjamin Pelletier.
166
Manager à distance dans un contexte interculturel

Aux États-Unis, la peur fondamentale des Américains concerne l’éventualité


d’une perte de maîtrise du destin individuel à cause d’une intrusion d’autrui. Tra-
vailler avec des Américains exigera ainsi que l’on respecte cette soif d’autonomie et
il faudra prendre garde à toute remarque ou proposition qui, aussi généreuse soit-
elle, pourra être perçue comme une dangereuse mise sous tutelle.
En Inde, ce qui prédomine, c’est la crainte de la souillure. D’une part, la forte hié-
rarchisation de la société implique une forme de nausée à l’idée du contact avec les
échelons inférieurs, d’autre part, elle entraîne la crainte de déchoir de son rang.
Cette double structuration basée sur la mise à distance de l’inférieur et la peur de
céder son rang se retrouve dans les entreprises (un dirigeant se doit d’avoir une
grosse voiture même pour faire quelques dizaines de mètres).
Au Japon, l’étiquette exige de retenir les vives émotions pour ne pas faire éclater
l’identité publique conventionnelle. La crainte sous-jacente est que les émotions
trop vives ne soient l’indice d’un possible chaos ou déchaînement de violence.
L’harmonie sociale est alors la pierre de touche des rapports interindividuels.
Au Cameroun, la dimension anxiogène est la crainte de ce que les autres trament
contre soi, même les plus proches, la famille, les amis, les connaissances. Des inten-
tions cachées sont dissimulées derrière les intentions apparentes. Le visible com-
porte une part d’invisible dont il faut se prémunir.
Au Mexique, la peur fondamentale tient à la crainte d’être privé de l’appui d’autrui
et d’être livré à sa propre impuissance. Chacun s’insère dans une structure d’en-
traide et d’assistance mutuelle où la solidarité est la valeur cardinale pour conjurer
l’impuissance.

1.2 La compétence interculturelle du leader

Manager des équipes multiculturelles requiert les mêmes qualités que celle d’un
manager « classique », mais avec certainement des sensibilités supplémentaires à
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

développer pour s’adapter à la complexité du contexte (Adler, 1991).


Ces compétences relèvent de quatre groupes, un savoir-faire (1) et trois savoir-être
(2 à 4) :
1. Une capacité à traiter de l’information en langue étrangère, information tech-
nique comme de culture générale.
2. Un goût des autres, une bienveillance naturelle, une ouverture d’esprit, une
curiosité des situations et des personnes nouvelles, la tolérance.
3. Une grande adaptabilité, une capacité à gérer l’incertitude et à se remettre en
cause, une bonne créativité.

167
MANAGER DANS LE VILLAGE PLANÉTAIRE

4. La patience et une bonne stabilité psychologique ; il est en effet indispensable


pour prétendre comprendre les autres de bien se connaître soi-même.

1.3 Construire des équipes multiculturelles

L’objectif d’un manager est d’obtenir la cohésion de ses équipes et d’être perçu
comme un leader légitime aux yeux de tous. Plusieurs techniques peuvent être mobi-
lisées pour gérer au mieux ces différences (Falcoz, 2007) :
1. Pointer les sources d’enrichissement que la diversité culturelle peut appor-
ter concrètement pour l’entreprise, pour la clientèle et aussi pour l’équipe et pour
chaque salarié.
2. Expliquer les difficultés qui risquent de survenir et la façon de franchir les
obstacles ; il est toujours très profitable de demander à chacun de s’ouvrir sur ses
craintes, incompréhensions, méconnaissances, points de blocage ou questions.
3. Développer une attention particulière au langage et aux micro-attitudes qui
sont l’expression des stéréotypes et préjugés, en ayant une attitude pédagogue et
individualisée (expliquer, écouter, rappeler ce qui n’est pas toléré).
4. Maintenir la cohésion (qualité et fréquence du travail collectif et des temps
d’échange, travail sur la vision partagée…) tout en étant vigilant aux pressions du
conformisme de la culture de l’équipe, des profils sociaux et scolaires dominants
s’ils existent…
La recherche d’une base élargie de compétences partagées pouvant constituer un
socle de pratiques est une bonne solution pour développer une cohérence sur les
capacités et les activités et non sur les personnalités et les appartenances ; a contra-
rio, la reconnaissance et la valorisation des spécificités professionnelles et person-
nelles de chacun, et positives pour la vie du groupe, doivent permettre de tenter
d’approcher l’équilibre entre complémentarité et similitude…
Le manager interculturel est plus que jamais un développeur de situations favo-
rables, il oscille entre des moments où il est souhaitable d’aller vite dans un contexte
connu, et d’autres contextes où il faudra prendre le temps de rapprocher les points
de vue tout en laissant les différences produire des idées nouvelles. L’objectif est de
créer une soft law qui gère les rapports des protagonistes, sans rigidité et selon un
processus de coconstruction.
Une fois acquises les bases de culture générale sur le pays, seules des formations
ayant la capacité de mettre en situation ou de simuler peuvent permettre de faire
évoluer ces compétences de manager à l’international. L’apprentissage sur le ter-
rain est aussi souvent la seule école, en souhaitant que les erreurs ne soient pas
payées trop cher.

168
Manager à distance dans un contexte interculturel

2 Manager à distance
2.1 L’évolution des contextes

Les managers commerciaux ont de plus en plus fréquemment à gérer des équipes
diverses, en termes de métiers, en termes de contexte culturel, et avec un éloigne-
ment géographique important. Les questions de distance, de rapport au temps (ne
serait-ce qu’avec le décalage horaire), de référents culturels, de vision de la relation
et de la résolution de problèmes sont donc durement convoquées à chaque fois
qu’une crise survient. C’est en effet dans ces moments que, souvent, les relations se
tendent, les cadres se rigidifient et les sentiments profonds ressurgissent. On peut
identifier trois facteurs explicatifs :
– à distance, les mécanismes qui alertent sur les dissonances entre verbal et non
verbal ne peuvent se mettre en place. La confiance n’est donc pas acquise et
sa construction demande une bonne maîtrise des moyens de communication à
distance ;
– les directives viennent d’en haut et de loin, et sont interprétées localement, il n’y
a pas de perspective globale et partagée ;
– le manager, s’il est à distance, n’est pas perçu comme un membre de la
« communauté chaude », et sa légitimité n’est pas acquise à ce titre, ce qui
accroît le risque de ne pas être suivi.

On observe trois temps quand une crise survient dans un contexte de management
à distance et interculturel (Forthomme, Bekhoucha, 2009) :
• Premier temps : le chacun pour soi
Chaque équipe essaie de comprendre et d’interpréter la situation problématique à
partir de sa perspective locale. De nombreux processus contribuent à un renforce-
ment de l’identité du groupe, afin de souder la cohésion de ses membres, dans l’idée
implicite de mieux faire front à l’adversité.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Des mécanismes se mettent à l’œuvre : construction et utilisation de stéréotypes


culturels (les Français sont exigeants, les Indiens ne sont pas assez professionnels,
les Américains sont trop sûrs d’eux…). Ces constructions locales deviennent alors
des référentiels invisibles. Chacun va s’efforcer d’aller dans le sens du renforcement
des convictions afin de conforter son appartenance au groupe.
Tout ceci se construit sur la base de données partielles et d’informations incom-
plètes. Classiquement, les représentations prennent le pas sur la réalité et nourrissent
tous les fantasmes. C’est alors au manager de rétablir le dialogue et de fournir des
informations intègres.

169
MANAGER DANS LE VILLAGE PLANÉTAIRE

• Deuxième temps : des interactions nombreuses et désordonnées


Chaque groupe, fort de ses convictions, sur la base de son interprétation propre de
la situation, met en œuvre une stratégie qui se montre désynchronisée avec les
autres : le siège exige une réunion de crise, le bureau d’études campe sur son exper-
tise, et pendant ce temps-là, l’usine est en arrêt, sans pouvoir fournir d’explication
à un client local qui s’inquiète des délais.
Ces actions désynchronisées génèrent des pertes de temps significatives, mais éga-
lement d’image et de performance. Elles ont également un coût en temps, en éner-
gie, et en moral, voire en capacité cognitive pour les différents protagonistes.
Souvent, chacun se félicite de son fonctionnement en se comparant aux autres. Il
faut alors une volonté managériale forte pour que la situation se clarifie.
• Troisième temps : l’éclaircissement de la situation et le dénouement
L’exigence de repartir sur un état des lieux partagé et reconnu par tous, la volonté
de trouver des solutions communes une fois le diagnostic posé, en s’orientant sur le
résultat attendu, en oubliant les recherches de coupables, ne peut émaner que du
management.
La mise en phase des informations, en se centrant objectivement sur les faits et les
dysfonctionnements, puis l’action concertée doivent tenir compte du fait que les
moyens techniques utilisés ne peuvent palier l’absence physique des personnes.
L’interprétation de signes non verbaux ou non écrits (comme la stimulation générée
par le charisme du manager), qui sont des leviers importants du management clas-
sique, n’est simplement pas mobilisable.
Il est essentiel de mettre en place une « boucle d’apprentissage », c’est-à-dire tirer,
quelle qu’en soit l’issue, les leçons de la crise et de la gestion, surtout si elle a été
défaillante.
Quels sont alors les moyens pour lutter contre ces tendances centrifuges ?
– créer une double appartenance : respecter la cohésion locale du groupe mais
l’inscrire dans le groupe élargi. Le sentiment d’appartenance au groupe restreint
ne doit pas être exclusif ou en opposition à celui du groupe global ;
– accepter de consacrer du temps et de l’énergie à la construction d’une « commu-
nauté chaude » (plus que dans des situations classiques de proximité), en se
déplaçant (hors crise également), en s’assurant de la mise en phase des relais
locaux, en utilisant les séminaires, les réunions mêmes intercontinentales. Les
outils de visioconférence et de téléprésence sont en cela très utiles ;
– construire du sens, fruit de l’intelligence collective de l’ensemble des parties
prenantes : les messages ne doivent pas uniquement partir du haut mais se
construire en interaction avec les différentes communautés. L’utilisation de la

170
Manager à distance dans un contexte interculturel

messagerie instantanée1, plus que du mail, serait une proposition intéressante,


qui s’apparente pour certains managers à « laisser sa porte de bureau ouverte ».

Si le management peut être mis à rude épreuve dans un contexte interculturel, le


marketing et la communication doivent aussi être vigilants pour éviter les erreurs
commerciales fatales.

2.2 Le cas du marketing interculturel

Les cas d’échec en marketing interculturel sont très nombreux : on peut citer l’exem-
ple de la lessive lancée à grands renforts de publicité au Mexique dans les années 1980
et qui n’a jamais rencontré sa cible, car pour les ménagères mexicaines, la preuve de
l’efficacité d’une lessive, c’est la quantité de mousse, or cette lessive en faisait peu.
Le nom d’un produit peut aussi être une erreur : ainsi Blédina s’est implantée sous
ce nom en Russie, or « blédina » est un terme très vulgaire en russe : Блядина
(attention, il faut bien accentuer le « i » : « blédina ») signifie « pute » dans cette
langue. Les dirigeants ont-ils réfléchi avant d’assumer leur décision ?2
Les forces de vente directement en phase avec les acheteurs sont souvent à même
d’appeler à la vigilance, une bonne utilisation de leur capacité de veille par le mar-
keting est un atout important.
On observe dans le même temps, sur le territoire français, la montée en puissance
du marketing ethnique, qui cible des communautés selon des critères d’origine ou
d’appartenance à des groupes culturels stables.

 Repères L’exemple d’une publicité halal en France

Pour la première fois en août 2010, une publicité pour des produits halal est diffusée, à
l’occasion du ramadan, sur de grandes chaînes nationales. Sur TF1 et M6 ainsi que les chaî-
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

nes de la TNT, un spot TV vante les mérites des plats cuisinés Zakia Halal qui sont, à en
croire le slogan, « toujours un régal ».
Lancée le 17 août, cette campagne à 300 000 euros orchestrée par une marque du groupe
Panzani s’adresse sans détour, et ce, dans un pays laïc, aux cinq millions de musulmans de
France. Elle s’achèvera le 2 septembre avant de reprendre à la fin du mois, au moment des
fêtes de l’Aïd.

1. La messagerie instantanée consiste à pouvoir être en interaction avec son correspondant (le service MSN a
beaucoup développé cette application), contrairement au mail classique (messagerie différée).
2. Source : www.nymeo.com
171
MANAGER DANS LE VILLAGE PLANÉTAIRE

☞ Dans ce spot au ton désuet, on voit un couple, une mère de famille, des jeunes…, tous d’ori-
gine maghrébine, se ruer dans un rayon de supermarché sur les barquettes de paella,
hachis Parmentier et lasagnes certifiés halal.
Une récente enquête de l’agence Solis évalue le potentiel du marché musulman en France
à près de 4 milliards d’euros pour 2009, avec une croissance annuelle estimée à 15 %. Selon
cette même étude, 93,6 % des consommateurs originaires du Maghreb remplissent leur
panier de denrées halal.

Ces stratégies sont cependant à manier avec précaution car elles touchent à l’ambi-
valence entre un besoin de reconnaissance de ces communautés et leur dénonciation
de tout risque de stigmatisation (Barth, Boyer, 2007). Les principales actions concer-
nent les adaptations des éléments du mix marketing : le produit (les livres à gros
caractères pour seniors), le prix (les forfaits hors vacances scolaires dans le tourisme
pour les seniors n’ayant plus de contraintes professionnelles ou familiales lourdes), la
distribution (l’adaptation de boutiques à des personnes handicapées), la communica-
tion (avec la mise en avant de personnes appartenant à ces communautés virtuelles :
des personnes d’origines ethniques différentes dans le cas de la cosmétique).
Si la communication ne disqualifie pas la cible, ne la caricature pas non plus, ou
ne renforce pas les stéréotypes existant à son endroit, alors le marketing communau-
taire joue pleinement son rôle.
Par contre, dans un de ces trois cas de figure, ou s’il s’agit d’un artefact pour inter-
peller une communauté sans autre justification, alors le procédé est ambigu, voire
litigieux. Que penser des labels « gay » dans l’hôtellerie par exemple ? S’ils peuvent
(version optimiste du phénomène) faciliter la prise de contact d’homosexuels,
échaudés par des rebuffades antérieures, et s’ils vont de pair avec un accueil parti-
culièrement friendly, il ne devrait pas y avoir de souci. Se pose pourtant l’utilité
d’une telle démarche, la présence même de ce label induit que l’accueil des gays ne
va pas de soi, pis, qu’il est spécifique… on aboutit alors aux antipodes du traitement
souhaitable, c’est-à-dire indifférencié. On peut imaginer que ce label joue même un
rôle de repoussoir pour des gays ne souhaitant pas faire connaître leur orientation
sexuelle. Bien au-delà de l’orientation sexuelle, on est bien là face au risque d’un
coming out implicite pour le consommateur.
La deuxième question porte sur le résultat, qui peut être la construction ou le renforce-
ment de stéréotypes, c’est-à-dire la pure fabrication de communautés, avec son cortège
de discriminations ou de disqualifications. La segmentation pose alors la question de tra-
vailler dans une logique de juxtaposition, et non d’intégration. Elle est en cela à l’opposé
de la diversité qui se fonde sur l’interaction et la reconnaissance de l’autre. Il faut alors
se prémunir du risque de figer des représentations, de s’engouffrer dans des stéréotypes
pour mieux les structurer, voire d’en créer de nouveaux (valorisants ou pas, question que
nous ne posons pas à ce stade de notre réflexion, même si elle est essentielle).
172
Manager à distance dans un contexte interculturel

Conclusion

Manager à distance, surtout quand cette distance est à la fois géographique, tem-
porelle et culturelle n’est pas spontané. On retrouve tous les ingrédients du manage-
ment classique mais au prix d’une dépense en temps et en énergie bien plus
importante pour le manager. Pourtant, de plus en plus de managers commerciaux,
du fait de l’internationalisation et du brassage des populations, seront amenés à diri-
ger des équipes remote. Connaître, comprendre, repérer les différences, et avoir de
bonnes grilles de lecture est essentiel. Maîtriser les outils également, encore faut-il
accepter le challenge de se connaître soi-même et d’accepter de se remettre en cause
à chaque nouvelle confrontation. La richesse de la différence est à ce prix.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

173
Chapitre Le développement
personnel
8 du manager
commercial
Mieux se connaître pour être plus performant

L e manager commercial est au cœur de l’activité de l’entreprise et se situe à la


frontière de l’organisation. Il doit être vigilant et maintenir en permanence la
motivation de ses équipes comme la séduction auprès de ses clients. Le stress phy-
sique (c’est un métier demandant généralement beaucoup de temps et d’énergie) et
mental (la pression des résultats, les injonctions contradictoires) est souvent au
rendez-vous. Le développement personnel peut aider à relever ces challenges. Le
management commercial est une affaire de savoir-être.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Compte tenu des spécificités des métiers commerciaux, la fatigue, le stress, la


double contrainte, l’automotivation, les dilemmes, l’éloignement… sont choses
courantes, avec des conséquences dramatiques pour la personne, comme pour
l’équipe ou l’entreprise, avec au premier plan : la souffrance et la sous-
performance.
La posture classiquement adoptée par le commercial est davantage celle du rejet
ou du silence que de la prise en compte. Rares sont les manuels de gestion traitant
de ces difficultés et proposant des moyens pour les affronter.
L’objectif est pourtant de retrouver l’intégrité de la personne au sens de « ce qui
est intact, entier ». Il s’agit d’inscrire le métier commercial dans un nouveau para-
175
LE DÉVELOPPEMENT PERSONNEL

digme dont les contours sont aussi : le plaisir d’aller travailler, le bien-être dans
l’activité, le droit aux émotions, la connaissance de soi, la prise de recul, le ressour-
cement. Cela rencontre les nouvelles attentes des salariés, jeunes ou moins jeunes.
Le manager commercial se doit aussi de rayonner en développant ses compétences
d’animateur et de tuteur au sein des réseaux qu’il doit apprendre à constituer.
Nous allons donc explorer dans ce chapitre les thèmes suivants :

Section 1 Q Le manager commercial sous pression


Section 2 Q Mieux se connaître pour être plus performant
Section 3 Q Être au cœur des réseaux : animer, transférer, essaimer

Section
1 LE MANA GER COMMERCIAL SOUS PRESSION

Reconnaître le stress et la souffrance de certaines courses effrénées à la perfor-


mance, sortir d’un univers construit comme celui du souci permanent sont des
réflexions qui ont leur place dans le management commercial. La démarche est clas-
sique : identifier les symptômes, poser le diagnostic, repérer les causes, pour ensuite
élaborer des solutions et aller vers une meilleure prise en compte des personnes de
la fonction commerciale.

1 La face obscure du management commercial : les conflits


de rôle et la double contrainte

Plusieurs éléments concourent à une transformation profonde de la pratique


managériale.
– L’élévation du degré d’autonomie et de responsabilité des salariés (Thévenet,
2003) ne va pas sans remettre en question la légitimité du rôle de l’encadrement,
contraint d’évoluer vers plus de délégation et de traduction des décisions straté-
giques. La relation managériale se doit alors d’être transformée pour être accep-
tée : le simple exercice de l’autorité par transmission d’ordres doit évoluer vers
une relation plus riche, plus coopérative, plus orientée développement, notam-
ment par l’incarnation du sens de l’action, l’illustration et la confirmation de
valeurs, l’explication des rôles à tenir.
– Le repositionnement de l’encadrement intermédiaire face à ses équipes s’ac-
compagne également de son propre repositionnement face à sa hiérarchie.
176
Le manager commercial sous pression

– On observe aussi une fusion du fonctionnel et du hiérarchique par l’usage de


structures plus matricielles, exigeant l’ouverture de nouveaux territoires de
compétences et des parcours variés en réinvention constante.

Cette évolution des rôles voit se succéder quatre grands types de management : la
représentation classique où le manager est vu comme un expert, la représentation
néoclassique qui le présente comme un superviseur, la représentation du courant
social qui en fait un tuteur, et enfin la représentation proactive qui le décrit comme
un développeur (Brassier, 2004).
L’entrée par le conflit de rôle (voir l’encadré ci-après) nous semble éclairante
pour mieux comprendre les difficultés vécues par le management intermédiaire pour
se positionner dans l’entreprise.

 Repères Le rôle en management

La notion de rôle renvoie à un comportement social, à un modèle de conduite assez stéréo-


typé. Dans le même temps, le rôle a pour fonction de normaliser et stabiliser les relations
entre personnes, de concourir à la définition d’un cadre de références permettant aux indi-
vidus de se repérer dans une situation donnée. Le rôle peut ainsi être défini comme un
ensemble d’activités et de comportements attendus. On assiste depuis des années à une
progressive atténuation des caractères contraignants et stéréotypés des rôles, cette insta-
bilité des rôles sociaux semble être elle-même un vecteur d’incertitude quant à la façon
attendue de se comporter.
Le rôle et l’insertion au cœur d’un ensemble de rôles peuvent conduire à des tensions, habi-
tuellement déclinées au travers des concepts de conflit et d’ambiguïté de rôle, depuis les
travaux fondateurs de Kahn et al. (1964). Ces deux concepts sont respectivement définis
comme « l’occurrence simultanée de deux (ou plusieurs) émissions de rôle telles que l’ac-
complissement de l’un rend difficile l’accomplissement de l’autre » et « le manque d’infor-
mation concernant l’évaluation du hiérarchique sur son travail, sur ses opportunités de
carrière, sur son niveau de responsabilité, sur les attentes des émetteurs de rôle ».
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Katz et Kahn, 1966.

Ce nouveau positionnement du manager commercial comme l’élargissement de


ses responsabilités semblent conduire à une multiplication des injonctions para-
doxales et à une pluralité d’attentes de rôle, mouvantes, plus ou moins claires, voire
parfois contradictoires. Il est ainsi demandé aux managers de devenir des coachs,
des accompagnateurs, des tuteurs, et non plus seulement des dirigeants ou des chefs
d’équipe… tout en faisant du chiffre, les mettant souvent en situation de forte dou-
ble contrainte (double bind), créatrice de nombreux dysfonctionnements et de sous-
performance, et également source de stress (Barth, Rive, 2004).

177
LE DÉVELOPPEMENT PERSONNEL

 Repères Les messages paradoxaux en management,


une source de stress
La double contrainte est une injonction paradoxale tant au niveau cognitif qu’affectif, car
aucune réponse n’est possible. Dans ce type de relation, il est impossible de faire le bon
choix. On peut identifier plusieurs situations :
1. Le message paradoxal
C’est un message qui, en même temps, nie ce qu’il affirme et affirme ce qu’il nie. Par exem-
ple, l’injonction : « sois spontané » est un paradoxe. On ne peut être spontané sur com-
mande, et le destinataire d’un tel message est coincé.
2. La présence de deux messages contradictoires sans issue possible.
Dans le cadre professionnel, c’est par exemple la situation d’une personne dont la charge
de travail est devenue tellement importante qu’elle n’est plus capable d’y faire face. Faire
une partie de son travail signifie qu’une autre partie ne sera pas faite. Dans les deux cas, la
personne ne fait pas son travail.
Ou encore le cas de ce manager qui reproche à un vendeur de son équipe de ne pas lui ren-
dre des comptes et, quand ce vendeur demande un rendez-vous pour lui faire un compte
rendu de ses activités, lui reproche de lui faire perdre son temps.
3. Une injonction avec des signaux non-verbaux qui exprime le contraire de ce qui est dit.
« Oui, tu peux, comme tu me le demandes, déclencher cette commande ! » dit sur un ton qui
exprime le refus ou le plus grand rejet induit chez un commercial le doute et il ne saura
quelle décision prendre.
4. Le cas des virus de pensée
C’est le cas de « l’espoir fait mal ». Si l’on adopte cette croyance, on se met dans une posi-
tion de choix entre le désespoir ou la souffrance. Aucun des deux n’est désirable. Or les
entreprises sont des lieux qui regorgent de ce type de phrases : « la réussite est dange-
reuse », « cette commande est suspecte »…
La systématisation de ces comportements peut être profondément toxique et toucher au
harcèlement moral.
D’après Lambrette, 2008.

2 Le stress

Le mot stress vient du latin stringere qui signifie « rendre raide », « serrer », « pres-
ser ». Hans Selye est le premier à utiliser ce mot en médecine1, et c’est en 1969 que
Bradley évoque pour la première fois le problème de la dépression psychologique due
à un stress.
Le principe (mis au jour par Claude Bernard) est que tout organisme vivant doit
maintenir son équilibre interne (principe d’homéostasie) en mobilisant l’énergie utile
aux processus d’adaptation. Cette adaptation est nécessaire lors des variations de
l’environnement, en particulier vis-à-vis des stimuli d’agression physiologique et

178 1. Hans Selye, The Stress of Life, 1956 (en français Le Stress de la vie, Gallimard, 1re éd. en 1962, 2e éd. en 1975).
Le manager commercial sous pression

psychologique. Le stress est une sensation que l’on éprouve lorsque l’on est confronté
à une situation à laquelle on ne croit pas pouvoir faire face correctement. L’organisme
va alors déclencher un ensemble de réactions nerveuses et hormonales.

2.1 Bon stress, mauvais stress

Le stress est par nature positif car il permet de nous protéger et de nous aider à
réagir devant une situation de stress. Certains sportifs ou artistes savent d’ailleurs
que le stress leur procure une certaine efficacité et tend à améliorer leurs perfor-
mances. Cependant, lorsque l’énergie mise en œuvre n’arrive pas à s’exprimer, ou
qu’elle ne résout pas la situation, le stress devient négatif. Par exemple dans un
entretien d’embauche, en dépit des réactions désagréables liées au stress (le cœur bat
plus vite, les pommettes se colorent, la respiration s’accélère, etc.), le niveau de
concentration et de réactivité est meilleur. Mais si les réactions se traduisent par une
difficulté à se concentrer, à trouver ses mots, à mobiliser ses connaissances, à se
laisser envahir par ses émotions, il est évident que le stress est un handicap.
Mais rien n’est simple. S’il est toujours valorisant de s’adapter à une situation nou-
velle ou de relever un défi (« bon stress »), le risque existe de voir une situation plus
stressante encore s’installer. Par exemple, réussir à atteindre des objectifs élevés impli-
que qu’ils doivent être maintenus par la suite. Au contraire, un « mauvais stress », par
exemple un événement inattendu, une remarque désobligeante ou une situation bles-
sante peuvent contribuer à une remise en question, et faire progresser.

2.2 Le stress des commerciaux

L’environnement joue un rôle essentiel dans l’apparition du stress et les situations


professionnelles sont plus ou moins stressantes. Les métiers commerciaux sont de
ceux qui génèrent le plus de stress. Ceci s’explique par une surcharge de travail, une
pression à court terme importante compte tenu des cadres de rémunération, une
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

nécessité d’adaptation constante, une grande autonomie, d’éventuelles agressions de


la part des clients, et des dérives managériales malheureusement assez courantes
dans ces métiers comme le management à la pression.

 Repères Stress et état dépressif chez les professionnels


de la vente
Une étude menée en 2000 compare l’état de santé, notamment anxiodépressif, des pro-
fessionnels de la vente à une population témoin. 220 commerciaux sont comparés à 220
non-commerciaux. L’étude comporte 3 niveaux de recueil de renseignements : un auto-
questionnaire d’évaluation de l’état anxiodépressif, une fiche de saisie médicale, et un


179
LE DÉVELOPPEMENT PERSONNEL

☞ questionnaire professionnel élaboré avec des professionnels de la vente. Les chercheurs


font les constats suivants :
– 1 commercial sur 3 a un niveau d’anxiété élevé contre 1 témoin sur 5 ;
– on retrouve 3 fois plus de commerciaux dépressifs que de témoins ;
– il y a 3 fois plus de commerciaux obèses ;
– les commerciaux fument en moyenne 8 cigarettes/jour contre 3,5 chez les témoins ;
– ils consomment plus d’alcool, ils dorment moins bien, ils ont plus de pathologies, troubles
métaboliques, ulcères, colopathies et dorsolombalgies ;
35 % des commerciaux étudiés sont dans un état d’anxiété avéré et 8 % développent un
état dépressif parfois sévère.
Cette enquête prend une dimension toute particulière dans un contexte de crise. Une
enquête menée auprès de 1 016 personnes entre le 5 et le 25 janvier 2009 donne les résul-
tats suivants :
35,3 % des commerciaux travaillent plus de onze heures par jour. Ils n’étaient que 31 % en
2008 (avant la crise) soit une progression de 4,3 points. Il semblerait qu’avec la crise, les
affaires soient plus difficiles à conclure et les commerciaux doivent donc décupler leur
énergie pour conclure une vente. Ce sont les commerciaux chez qui le stress a le plus pro-
gressé : + 2 points à 80,7 %. L’atteinte des objectifs reste chez eux la première raison du stress
(35,6 %), suivi de la charge de travail (20,2 %) et de l’ambiance dans l’entreprise (14,2 %)
D’après Royfe Marie-Hélène et Tichadou Pierre, XXVIe Congrès national de médecine du travail,
juin 2000, Lille (www.jobmarketingvente.com).

3 L’épuisement professionnel ou burn out

Si un certain niveau de stress est nécessaire à la vie, le dépassement d’un certain


seuil peut devenir dangereux voire fatal. C’est un psychanalyste américain,
Freudenberger (1974), qui a baptisé cet état sous le terme d’épuisement profession-
nel (burn out en anglais).
Il définit l’épuisement professionnel comme un état d’émotion intense venant d’un
surplus de travail et résultant d’une incapacité progressive à y faire face. Les cher-
cheurs (Maslach et Jackson, 1981) identifient trois composantes distinctes en inter-
relation :
– l’assèchement émotionnel : il apparaît d’abord lorsque les demandes exces-
sives de travail drainent les ressources émotionnelles de l’individu. Ce tarisse-
ment des ressources individuelles provoque l’incapacité chez ces individus à
« donner d’eux-mêmes » sur le plan psychologique, de sorte qu’ils ont le réel
sentiment d’être « au bout du rouleau » ;
– la déshumanisation : se sentant vidés de leur énergie et incapables de « faire
face », les individus développent alors une stratégie d’évitement (le cynisme) qui
reflète une indifférence ou une attitude distante envers le travail en général ;
180
Mieux se connaître pour être plus performant

– le sentiment de non-accomplissement personnel : le cynisme réduit l’énergie


considérée comme disponible et diminue le potentiel d’accomplir efficacement
son travail. La personne se sous-estime et s’évalue négativement.

La personnalité entre en ligne de compte, et certaines personnes sont plus à même


de développer un « surengagement » (overcommitment) ou un « besoin de contrôle »
(need for control) dans leur stratégie d’ajustement aux exigences du travail (Siegrist,
1996), ce qui les rend plus particulièrement exposées au burn out.
C’est le « déséquilibre effort-récompense » qui définit les sources de stress au tra-
vail par la dissonance entre des coûts élevés et des gains faibles. C’est au manager
de réduire ces dissonances. À partir des causes de stress professionnel (Hollet,
2008), on peut identifier quelques pistes pour en baisser le niveau :
– être « zen » et aider ses équipes à prendre du recul (pas de management à la
pression) ;
– faire de l’accompagnement, aider à la préparation des situations stressantes
(comme un rendez-vous client difficile) ;
– donner des signes visibles de reconnaissance (avec des primes ou des récom-
penses mais aussi des remerciements, des gestes) ;
– ouvrir des perspectives de carrière, car une des sources les plus importantes du
stress est l’absence de possibilité d’évolution professionnelle, ce qui n’est pas
simple à gérer quand on connaît la saturation des pyramides hiérarchiques dans
la vente ;
– bien veiller à l’adéquation formation/emploi, ne pas avoir les compétences pour
mener à bien ses missions est profondément anxiogène et amorce le processus
de sous-estime de soi ;
– prévoir un accompagnement professionnel dans les changements de situation
importants (dans l’échelle du stress proposée par Holmes et Rahe (1967), le
changement professionnel est à 39/100).
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Section
2 MIEUX SE CONNAÎTRE POUR ÊTRE PLUS
PERFORMANT

« Un bon vendeur est quelqu’un qui vous donne de vos nouvelles », qui a donc su
être à l’écoute de son prospect ou de son client, et qui a cherché à le connaître avec
bienveillance pour établir une relation durable. Mais comment bien connaître les
autres si on ne se connaît pas soi-même ? Pour cela, il faut accepter de prendre du
recul, comme on entre véritablement dans certains tableaux qu’en s’en éloignant
(ceux des impressionnistes sont particulièrement exemplaires à ce titre). De nom-
181
LE DÉVELOPPEMENT PERSONNEL

breuses propositions existent sur le marché du développement personnel, mais


d’autres paramètres contribuent à une meilleure résistance au stress : le sport et le
support familial en sont les principaux.

1 Le coaching

Le « développement personnel » renvoie à des objectifs : connaissance de soi,


bonheur, efficacité, santé, et à des méthodes : coaching, spiritualité, hypnose, tests,
dépassement de soi, stages outdoor
Les propositions sont fondées sur trois postulats :
1. L’entreprise est un lieu de contrainte, de souci, de souffrance.
2. Chaque individu a un potentiel en soi à développer ; il est responsable, capable
d’initiative, d’autonomie, d’implication, à même de se gouverner lui-même.
3. Le développement personnel de chacun rend son rapport aux autres et à son
travail plus harmonieux et plus efficace.
L’essor de ces méthodes date des années 1970 (après Mai 68), avec une naissance
que l’on peut situer dans les années 1960 avec Mouvement du potentiel humain (né
en Californie), qui s’inscrivait dans la psychologie humaniste (avec Maslow comme
théoricien) dans la recherche du « plus être ». L’aventure est souvent de nature pro-
méthéenne car pour passer d’une vie médiocre à une vie intense, il faut veiller à
l’« actualisation de son potentiel » et à l’« éveil à la spiritualité ».
Parmi les différentes écoles, on peut retenir deux grandes approches qui ont ren-
contré un certain succès dans les entreprises :
– la psychologie cognitive : la programmation neurolinguistique (PNL) a ainsi
connu une très bonne réception dans les méthodes de négociation. L’idée est
d’apprendre à « piloter son cerveau » pour déprogrammer les pensées paraly-
santes que le sujet entretient avec son subconscient et aller vers l’« excellence
humaine » ;
– la psychologie comportementaliste s’appuie sur le renforcement et le dépasse-
ment du moi.

La posture commune à ces approches est celle du changement : changer sa vie, se


changer. Les questions auxquelles on cherche à répondre : « Qui suis-je vrai-
ment ? », « Qu’est-ce que je veux ? » permettent de tendre vers un « moi idéal »
dans le travail. L’objectif est d’avoir une bonne estime de soi, de savoir s’affirmer
tout en respectant les autres, de ne pas être défensif.

182
Mieux se connaître pour être plus performant

Les affinités avec la logique managériale sont nombreuses :


– recherche de la performance et de l’efficacité (« héroïsation » de soi-même) ;
– rôle renforcé du contrôle, de la maîtrise (du temps, des ressources – humaines,
financières, matérielles – des objectifs…), du pouvoir ;
– mobilisation de la rationalité cognitive (avec le déni des émotions) ;
– conscience de la responsabilité : évaluation des risques et des conséquences de
la décision ;
– mobilisation de l’affiliation, du contrat, du mandat ;
– déni de l’intimité.

Nombre d’entreprises ont proposé à leurs cadres à potentiel ce type de prestations


avec de vraies réussites sur les personnes. Ces méthodes marquent néanmoins leurs
limites et font débat. Les risques identifiés sont :
– l’individualisation forcenée des parcours professionnels faisant peser exclusive-
ment sur les personnes leurs succès mais aussi leurs échecs, et les exposant à des
angoisses existentielles ;
– l’intériorisation du pouvoir et le développement d’un « management insidieux »,
niant la capacité critique de l’individu et valorisant seulement ses capacités
d’adaptation ;
– la psychologisation1 des problèmes organisationnels faisant peser exclusivement
sur l’individu les dysfonctionnements de l’organisation ;
– le remplacement de la culpabilité par la crainte de la médiocrité.

Si la posture du coaching et des méthodes qu’il mobilise sont plus d’être un


« apporteur de solutions et de réponses », la psychanalyse est elle aussi entrée dans
l’entreprise en maniant le principe du questionnement.

2 La psychanalyse et le management2
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

La psychanalyse introduit la notion d’inconscient dans l’entreprise, qui va mettre


en scène les pulsions de vie et de mort des hommes et des femmes. En 1913, avec
l’ouvrage Totem et Tabou, Freud ouvre véritablement la psychanalyse au groupe. Il
pointe l’instinct grégaire ; selon lui, l’homme est toujours un être social. On peut
l’isoler comme objet scientifique pour le penser, mais c’est un artifice. La psycha-
nalyse connaît rapidement une forte internationalisation, grâce notamment à Lacan.
Les Anglo-Saxons ont amorcé la rencontre entre psychanalyse et entreprise dès
1. La psychologisation des problèmes organisationnels décrit le phénomène qui consiste à expliquer les dysfonc-
tionnements des organisations uniquement par les relations et les comportements des individus.
2. L’IPM, Institut psychanalyse & management, est une association académique qui réunit des chercheurs et des
professionnels à la fois en gestion et en psychologie et psychanalyse qui souhaitent, par la confrontation, mieux
comprendre l’homme au travail.
183
LE DÉVELOPPEMENT PERSONNEL

1950, le principe n’étant pas de psychanalyser des salariés sur leur lieu de travail
mais d’éclairer des situations vécues en entreprise. L’idée est que les psychanalystes
peuvent aider les managers à réfléchir à la vie en entreprise, sans toutefois se sub-
stituer à leur parole.
On peut retenir quelques éléments clefs qui structurent cette rencontre et en sou-
lignent aussi les tensions (Barth, 2008) :
– le rapport au temps : la psychanalyse travaille avec l’inconscient, or l’incons-
cient ignore le temps, alors que le monde du travail est celui du temps évalué,
mesuré par le conscient. Ainsi, le management utilise le temps, voire l’urgence,
comme stratégie de maintien du pouvoir. Il se tourne vers le futur pour se
détourner de la complexité humaine de la situation, quitte à se couper des ori-
gines, de l’histoire ;
– la distinction entre fonction de direction et pratique managériale : manager des
personnes ou avec des personnes, c’est prendre en compte l’ensemble de leur
réalité psychique, ce qui n’est pas forcément dans la finalité et le savoir-faire du
management ;
– la reconnaissance de la responsabilité des conduites inconscientes dans l’entre-
prise. Il faut rendre compte de ses actes même s’il n’y avait pas intention, ce qui
est souvent nié dans les organisations où la reconnaissance de l’erreur est perçue
comme une faiblesse ;
– dans l’entreprise se jouent et se rejouent les énergies à l’œuvre dans la sexualité.
Le désir est un moteur de la vie des entreprises, qui reste un tabou pour le mana-
gement ;
– il ne peut y avoir de vie dans l’entreprise sans un contrat de liberté, le pouvoir
de dire OUI mais aussi le pouvoir de dire NON. On constate que le droit d’alerte
et de retrait est très peu exercé à titre individuel.

3 Le sport dans l’entreprise : s’investir corps et âme

Le sport est entré dans l’entreprise depuis maintenant des décennies (Pierre,
2009), avec différentes déclinaisons et objectifs :
– la fédération des salariés autour d’un projet commun : qui peut relever du spon-
soring (d’un bateau, d’une équipe cycliste) ou de l’équipe « maison », avec par-
ticipation à des compétitions sous les couleurs de l’entreprise ;
– l’installation d’équipements sportifs dans l’entreprise pour permettre aux sala-
riés de pratiquer des activités sur leur lieu de travail ;
– des soutiens accordés à des projets intra-entreprises comme des associations
sportives ;
– l’utilisation du sport dans des stages de développement personnel ou à finalité
de motivation pour les équipes ;
184
Mieux se connaître pour être plus performant

– l’embauche de sportifs de haut niveau pour véhiculer l’image de l’entreprise ou


pour leurs qualités intrinsèques de gagnants, ou, le cas échéant, pour leur
connaissance du produit ou du service vendu.

Les bienfaits attendus sont d’évidence (voir l’encadré ci-après), les limites aussi.
Le manager commercial se trouve confronté à ses propres affinités avec la pratique
sportive. Il doit faire avec la diversité des sexes, des âges, de la forme physique de
ses commerciaux pour que le sport ne devienne pas le prétexte à l’exclusion de cer-
taines personnes.

 Repères Le sport en entreprise

Pour être performant, le sportif met en œuvre des comportements spécifiques. En voici
quelques-uns transposables dans l’entreprise.
– Le switch : c’est la capacité de passer d’un état mental à un autre (ouvert sur l’extérieur,
concentré). Objectif : se placer dans les conditions les plus appropriées pour faire face à
toute situation au moment de l’action.
Les directeurs commerciaux et responsables d’agence du Crédit du Nord se transforment
en capitaines d’équipe en se familiarisant avec les techniques de l’aviron et du hockey. C’est
leur champ de perception qui évolue : ils comprennent que ramer au même rythme épar-
gne, être réactif face au changement de ligne de l’équipe adverse, ne pas être débordé, est
payant.
– La visualisation : elle permet de générer dans sa tête des séquences d’images au cours
desquelles, par simulation mentale, on « voit » se dérouler l’action à venir. Une technique
efficace, notamment pour le contrôle de l’anxiété des plongeurs de haut vol – et qui peut
aider à la résolution des conflits.
Se préparer, être à l’écoute sont des passages obligés en sport comme en négociation :
ainsi, en karaté, « rectifier la posture » change l’état d’esprit ; synchroniser l’attaque avec
une expiration (et, si possible, pendant l’inspiration de l’adversaire) est également un prin-
cipe actif lors de négociations délicates.
– La stratégie méta : on y est observateur de son propre comportement. Les athlètes recou-
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

rent à cette vidéo mentale pour décomposer leurs gestes, se voir dans toutes les positions
(de face, de profil), mais aussi pour se glisser dans la peau de l’adversaire et prendre
conscience de sa tactique. Utile pour le négociateur qui doit gérer ses émotions.
D’après Missoum, 1992.

4 La quête d’insouciance

Comme on l’a vu, les nouveaux contextes de travail favorisent le stress et les
pathologies au travail. Pour fuir ce quotidien oppressant, la quête d’insouciance est
partagée par de nombreux salariés.
185
LE DÉVELOPPEMENT PERSONNEL

On peut identifier quatre types d’insouciance (Barth et al., 2008) :


– l’insouciance inconsciente : le sujet ignore involontairement les contraintes, il
est inconscient des risques et du danger. Ce type d’insouciance est plus directe-
ment lié à l’absence de formation. Le manager n’a pas su interpeller la personne
sur les limites à ne pas franchir. On peut citer comme exemple le commercial
qui va engager son entreprise sur un délai ou un prix irréalistes qui peuvent
mettre en danger l’activité de l’organisation ;
– l’insouciance refoulée : l’insouciance étant peu valorisée (à l’inverse d’une pos-
ture de sérieux fondé sur des logiques de raison et de maîtrise), rejetée de la
conscience, elle se fait sournoise, expose le sujet au retour du refoulé. Le besoin
d’écart de l’appareil psychique avec le réel reprend ses droits sous la forme d’une
légèreté involontaire, d’erreurs par omission. Le salarié se met alors à commettre
des oublis, des « actes manqués » qui peuvent mettre en péril l’activité ;
– l’insouciance défensive : elle relève d’une fuite dans l’imaginaire du fait d’un
poids excessif des contraintes externes, le sujet cherche à se libérer du réel à
défaut de pouvoir le prendre en compte. La fuite en elle-même peut être
consciente et transgressive. La personne va alors chercher refuge dans l’alcool
ou la drogue, développer des comportements agressifs avec ses subalternes, ses
collègues ou ses clients ;
– l’insouciance raisonnée : quand le sujet s’autorise à lâcher prise momenta-
nément sur le réel pour laisser respirer sa conscience, la ressourcer. Il ne s’agit
que d’une coupure momentanée, délimitée, avec les contraintes réelles et socia-
les. Ces dernières ne sont donc ni relativisées ni rejetées mais simplement mises
en veille, le temps de permettre au sujet de se retrouver lui-même, de démarquer
un espace personnel, par-delà les contraintes. Cette prise de distance est un
moyen d’assumer ces contraintes, de les situer dans un espace propre, délimité.
L’insouciance raisonnée est une manière d’assumer le conflit avec le réel. Ce
sont des moments de shopping entre deux rendez-vous clients ou encore quel-
ques instants de surf sur Internet dans une matinée d’appels téléphoniques de
prospection.

Le management peut favoriser ce type d’insouciance en proposant des « paren-


thèses » à ses salariés : salle de sport, salle de sieste, massages, psychologue… ou
tout simplement fermer les yeux sur des moments de « pause » qui permettent cette
nécessaire rupture dans l’activité.
L’entreprise peut aussi alléger les soucis en développant des offres comme une
crèche d’entreprise, un service de conciergerie.
Beaucoup de grosses entreprises ont compris l’intérêt de ce type de dispositifs,
même s’ils sont en règle générale réservés à des structures « riches » et aux cadres. Le
retour sur investissement est facilement évaluable : meilleure ambiance, plus de temps
sur les lieux de travail, réduction de l’absentéisme, moins de maladies profession-
nelles, moins de turn-over… tous points qui contribuent à la performance.
186
Mieux se connaître pour être plus performant

 Repères Chez Google : travail, performance et bonne


ambiance !
Un simulateur de vol en 3D sur votre lieu de travail, vous en rêviez ? Google l’a fait ! Et ce
n’est pas la seule attraction du nouveau centre de recherche de l’entreprise informatique !
Google entend bien prouver ainsi que les salariés sont d’autant plus performants qu’ils
sont chouchoutés sur leur lieu de travail. Fantaisie, attraction et humour sont en effet au
menu de ce nouveau bâtiment de 12 000 m2 situé à Zurich.
Tout a été pensé pour que les employés travaillent dans les meilleures conditions possibles.
Une ambiance décontractée et ludique avec pour objectif d’accorder « 20 % de temps libre
aux ingénieurs » afin qu’ils puissent développer des projets et des idées innovantes.
Ainsi, outre le simulateur de vol en 3D, le centre de recherche est doté de salles de repos
avec chaises longues et chants d’oiseaux, de baignoires remplies de cubes synthétiques, de
consoles de jeux. Et ce n’est pas tout ! Comme au siège américain situé en Californie, le site
suisse propose au détour des couloirs des flippers, des hamacs pour se détendre, des lieux
insolites comme des cabines téléphériques pour discuter, des tables de billard mais égale-
ment un toboggan en guise d’ascenseur ou encore des salles de massage et de fitness ultra-
modernes !
D’après www.maisonapart.com

5 Le support familial : conjuguer vie personnelle


et vie professionnelle
5.1 Conjuguer vie personnelle et vie professionnelle

Une des causes de l’absence de projet pour les fonctions commerciales est l’idée
d’un métier peu compatible avec une vie personnelle et surtout une vie familiale,
compte tenu des horaires, des déplacements et de l’engagement attendu.
Les commerciales vivent la conciliation de la vie professionnelle et de la vie fami-
liale comme une épreuve quotidienne1. On peut identifier trois grandes explications :
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

– les horaires élastiques et les obligations de résultat


L’allocation temps est un antécédent de la performance commerciale : allouer
du temps à ses rendez-vous prospects et clients, y ajouter les déplacements, sans
parler des horaires décalés (c’est le soir après 18 heures et le samedi qu’on vend
des produits de défiscalisation à domicile) sont souvent la garantie d’être en
phase avec les attentes de l’entreprise, mais rarement avec les impératifs de la
crèche ou de l’école ;
– le nomadisme
Les obligations de remontées d’informations (compte rendu des visites clients,
établissement des devis…) sont autant de tâches qui peuvent se faire « en
1. Une étude de la Halde menée en mars 2008 montre que 12 % des femmes estiment ainsi avoir été déclassées
à la suite d’un congé maternité. (Source : www.halde.fr)
187
LE DÉVELOPPEMENT PERSONNEL

décalé » grâce au bureau virtuel. Ces tâches sont souvent faites en soirée, après
le coucher des enfants ;
– la fatigue
Les déplacements, l’obligation d’être sereine devant son client, sont autant de
sources de stress et d’obligation de mobiliser de l’énergie physique et mentale.
Quand s’y ajoute la « seconde journée », celle où l’on s’occupe de la maison et
des enfants, la grande fatigue guette.

5.2 La vie familiale comme support de la vie professionnelle

Il y a donc ce qu’on peut nommer un conflit « travail-famille », car les exigences


de l’emploi et les exigences familiales sont souvent incompatibles, rendant l’impli-
cation dans un rôle difficile dans l’autre. Cette relation est encore plus compliquée
à gérer dans les cas de familles monoparentales, des couples à deux carrières.
On constate que (St Onge et al., 2005) :
– plus les salariés perçoivent leurs rôles au travail comme étant ambigus, conflic-
tuels et trop nombreux, plus ils expriment ressentir un conflit « travail-famille »
élevé ;
– le conflit « famille-travail » augmente significativement avec le nombre d’en-
fants mais est réduit par l’appui offert par le conjoint ou la conjointe ;
– plus les employés estiment que leurs exigences professionnelles sont en conflit
avec leurs exigences familiales, moins ils ont des opinions favorables à l’égard
de leur rendement au travail.

Cet équilibre famille/travail est donc essentiel à préserver pour éviter les démoti-
vations et les baisses de performance. Pour cela, les managers doivent d’abord et
avant tout veiller à occuper et à offrir des postes où les rôles sont peu conflictuels,
peu flous et peu « surchargés ». Ils ont également intérêt à offrir de l’aide en matière
d’équilibre travail-famille à leurs employés parce que cela s’avère avoir une influ-
ence positive directe sur la satisfaction et le rendement au travail de ces derniers.
La gestion du conjoint ne s’apprend pas dans les écoles de management ou à l’uni-
versité, mais elle se pratique lors de moments de rupture de la vie professionnelle
comme l’expatriation. Les entreprises savent que la prise en charge psychologique
du conjoint et une bonne préparation à sa nouvelle vie sont essentielles à la réussite
de l’expatriation en famille, et donc à la performance professionnelle de l’expatrié.
Il est important qu’au-delà de ces cas particuliers, le manager commercial soit capa-
ble, au quotidien, de veiller à ne pas perturber la vie personnelle de ses équipes.

188
Être au cœur des réseaux

Section
3 ÊTRE AU CŒUR DES RÉSEAUX : ANIMER,
TRANSFÉRER, ESSAIMER

Le manager commercial est au cœur de l’entreprise : il est le passeur entre la direc-


tion générale et ses équipes, il est le lien entre l’entreprise et le client, il est aussi au
centre de nombreux réseaux qu’il se constitue pour mener à bien son activité. D’expert
de son produit, il est devenu un développeur d’activités et de talents. Ceci exige de
savoir gérer des exigences souvent contradictoires, et un nouveau talent d’animateur.

1 Développer des réseaux


1.1 Les objectifs

Le manager social va avoir comme objectif de créer son capital social selon deux
voies :
– exploiter de façon optimisée toutes les opportunités du marché, ouvrir de nou-
veaux marchés, fiabiliser les processus de vente et d’achat, et pérenniser la rela-
tion ;
– réduire sa vulnérabilité vis-à-vis de son entreprise car les relations hors de ses
circuits professionnels « naturels » resteront son capital propre. L’entreprise sera
alors dépendante des liens créés, non substituables par définition.

L’enjeu pour lui est d’avoir accès à l’information, conçue comme une ressource
mise au service de la performance commerciale. Dans cette stratégie, l’autre, les
autres sont considérés de façon systématique avec un a priori positif, car potentiel-
lement utilisables dans la construction de réseaux.

1.2 Le processus de construction d’un réseau


© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

La multiplication des réseaux et leur diversité réduisent la vulnérabilité et ren-


forcent le pouvoir personnel des commerciaux. Elle lui permet aussi de gérer sa
réputation qui peut être faite ou défaite d’autant plus vite que le réseau est dense. Le
manager commercial veille donc à construire à la fois des réseaux larges et diversi-
fiés, comme des réseaux plus denses et resserrés. Certains de ces réseaux seront des
associations professionnelles, d’autres considérés comme plus institutionnels.
Il y a donc dans ces démarches une instrumentalisation de l’autre, qui potentielle-
ment peut être utile et servir le dessein du manager commercial.

189
LE DÉVELOPPEMENT PERSONNEL

Les liens dans un réseau peuvent se distinguer par :


– le niveau de familiarité avec les autres membres ;
– la proximité géographique ;
– la fréquence des rencontres ;
– et le partage des valeurs communes.

La constitution d’un réseau demande une stratégie très élaborée, et souvent une
infinie patience. Comment connaître a priori la valeur d’un contact ? La valeur de
ses propres réseaux ? C’est un véritable investissement en temps.
Un type de vente bien particulier exploite cette configuration du réseau : il s’agit
de la vente directe. Rappelons que, pour qu’il y ait vente directe, il faut mettre en
présence un vendeur et un acheteur en dehors d’un lieu destiné à la commercialisation.
Les deux formes les plus courantes sont la vente au domicile du client et la vente en
réunion. Le vendeur et l’hôtesse assurent l’organisation matérielle de la réunion au
domicile de cette dernière et présentent à ses ami(e)s une gamme de produits. En
2008, la centaine d’entreprises membres de la Fédération de la vente directe
présentent un CA de 1 656 millions d’euros (+ 9 % par rapport à 2007) et emploie
environ 242 000 vendeurs, dont la grande majorité sont des vendeurs indépendants,
très souvent à temps partiel (comme un complément d’activité). Les principaux
secteurs sont l’habitat, leader avec 44 % de part de marché, le bien être (13 %), la
gastronomie (11 %), la cosmétique (8 %), le textile (7 %), les produits d’entretien
(6 %), l’édition (4 %). Ce secteur est donc en pleine expansion et certaines
entreprises sont inscrites au patrimoine économique mondial : qui ne connaît pas
Tupperware ou les produits Stanhome ? Des entreprises récentes ont parié sur cette
troisième voie de la distribution : c’est le cas de Charlotte (lingerie), de Capitaine
Tortue (vêtements d’enfant) ou de Secret des Anges (sex toys).

 Repères La constitution des réseaux


par les commerciaux
Les commerciaux constituent leur réseau par des moyens heuristiques : les contacts déjà
acquis, les clients, les prescripteurs, la recommandation, le bouche-à-oreille, les amis éven-
tuellement, les occasions conviviales (dîners, salons professionnels, etc.), ou « au fil de
l’eau ». Générer des relations, c’est « fréquenter un endroit qui va bien », et utiliser en paral-
lèle quelques réseaux. Beaucoup pensent que prospecter est une perte de temps, et
dérange des professionnels eux-mêmes trop visités, ce qui rend plus difficile encore le pre-
mier contact. Une fois établie, la relation doit devenir proche et familière.
C’est par conséquent en « douceur » que les contacts seront approchés, éventuellement
grâce à un intermédiaire, permettant souvent un gain de temps dans l’approche délicate de
prospects qui doivent sélectionner de plus en plus leurs interlocuteurs. Ils seront « sen-
sibles » à la subtilité avec laquelle on les abordera, même dans un contexte a priori destiné
au relationnel d’affaires. Plutôt qu’une stratégie de prospection systématique, on privilé-


190
Être au cœur des réseaux

☞ giera l’attention portée au potentiel de chaque contact établi, qu’il soit amical, lié à la vie
sociale ou dans le cadre du travail.
Les négociateurs mettent en avant l’importance, tant en impact qu’en investissement de
temps, de « découvrir l’autre », autrement dit d’élaborer une relation interpersonnelle avant
d’afficher ses objectifs professionnels. Plus les contacts semblent détenir un fort potentiel,
être « politiques », plus ils doivent être « chouchoutés » et pris en considération dans cette
approche en deux temps. Cela justifie d’être très investi sur le « terrain », pour être reconnu,
et pour pouvoir à la fois « sélectionner » les relations que l’on veut initier et attendre le
« bon moment », « ne pas forcer » la rencontre. Il y a une forme de rituel dans ces approches
progressives des « chaînes de décision » propres aux clients clefs, qui se dévoilent dans la
durée seulement, mais où chacun pourrait avoir une influence qu’il faut découvrir.
Conséquemment, c’est sur la confiance réciproque que se bâtissent des relations qui durent
souvent au moins une décennie. C’est si l’on est perçu comme un interlocuteur personnel-
lement et professionnellement « fiable » que l’on s’assure de la pérennité de cet investisse-
ment relationnel, dans lequel l’image de marque est cruciale, et doit être entretenue au
moindre signal, qu’il indique une affaire potentielle ou un risque à venir.
D’après Brassier, 2008.

1.3 Les réseaux sociaux sur la Toile

Les prolongements naturels de cette vision réticulaire des affaires, finalement


vieille comme le monde, sont les réseaux sociaux qui se développent sur le Web.
S’inscrire sur LinkedIn, Viadeo, Xing, Ziki, 6énergies, Piwie… peut être source
de contact et de mise en relation potentielle. C’est plus l’affaire de la génération
entrant sur le marché du travail, les commerciaux confirmés pariant encore sur la
présence réelle plutôt que sur la présence virtuelle, mais les postures évoluent vite.
Une règle pourtant ne change pas : il faut s’interdire de s’intéresser aux réseaux
sociaux lorsqu’on est en demande. Il est conseillé de les utiliser lorsque l’on n’en a
pas besoin, et le jour où l’on est en recherche d’opportunités, les personnes aidées
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

aideront très certainement en retour, sachant que plus on a de contacts, plus la cré-
dibilité est grande.

2 Savoir animer les réunions

Malgré la montée en puissance de la communication désintermédiée, par e-mail,


SMS, forums, les réunions présentielles1 restent un moment important dans l’entre-
prise, surtout dans les équipes commerciales itinérantes qui, de par leurs déplace-
ments et leur dispersion, n’ont guère l’occasion de se rencontrer.

1. Où les personnes sont physiquement présentes.


191
LE DÉVELOPPEMENT PERSONNEL

Par-delà les thèmes abordés et les contenus proposés, c’est donc l’occasion égale-
ment de se connaître et d’échanger. Pourtant, ces réunions sont souvent redoutées
par les équipes commerciales qui, ayant une conscience aiguë de la rentabilité de
leur temps, considèrent souvent qu’il s’agit d’une perte de temps pour tout le monde.
Il est donc important que le manager commercial y voit un enjeu important, d’autant
plus que leur coût est souvent très élevé (rémunération des heures passées, location
des locaux et du matériel de projection, repas pris en commun, remboursement des
frais de déplacement…).
Les étapes essentielles doivent donc être respectées pour une optimisation de ces
moments, nous en retenons six :
– se préparer : il faut se fixer des objectifs précis pas trop nombreux et bien ciblés,
choisir les participants adéquats pour éviter les désengagements, fixer la durée,
bien choisir le moment et le lieu et envoyer l’ordre du jour une semaine avant ;
– capter l’attention lors de l’introduction : il est conseillé de commencer par un
événement, une histoire vécue, un fait d’actualité récent, on peut aussi susciter
l’intérêt par des chiffres, des faits marquants… la technique de poser d’emblée
une question au groupe est également efficace ;
– présenter la réunion : il faut ensuite annoncer les grands objectifs de la réunion sans
dévoiler sa proposition, en spécifiant les limites de l’intervention (ce dont nous ne
parlerons pas), le déroulé (l’ordre du jour), le moment accordé aux questions/
réponses, la gestion du temps (les horaires, les pauses) et les documents remis ;
– gérer l’auditoire : donner la parole à ceux qui ne la prennent pas, modérer ceux
qui monopolisent le discours, repérer les signes d’impatience, d’ennui,
d’interrogation...
– faire valider la situation, partager l’état des lieux est essentiel. C’est à partir de
cet accord que l’on peut annoncer sa proposition, développer l’argumentation,
mettre en avant des avantages décisifs, chiffrer, répondre aux questions et aux
objections. Il faut ensuite verrouiller le plan d’action avec des échéances pré-
cises (rappel de l’objectif chiffré, étapes suivantes, moyens et méthodes),
dûment validé par l’auditoire ;
– conclure : la conclusion est un moment fort, après avoir résumé les points clefs,
il faut finir avec un exemple percutant, un slogan, une image marquante qui
incite concrètement à l’action. La fin doit être nette avec des remerciements à
l’assemblée.

192
Être au cœur des réseaux

 Repères L’importance du non-verbal

Le niveau auquel un message particulier s’adresse est souvent communiqué par différents
métamessages non verbaux. Considérons par exemple les différentes implications dans les
messages suivants :
« Tu ne devrais pas faire cela ici. »
« Tu ne devrais pas faire cela ici. »
« Tu ne devrais pas faire cela ici. »
Basé sur le placement de l’inflexion de la voix, le message prend différentes implications
selon le niveau particulier d’intensité. Tu (identité) ne devrais pas (croyances/valeurs) faire
(capacité) cela (comportement) ici (environnement). C’est l’absence ou la présence de ces
métamessages qui détermine souvent comment un message est interprété, et s’il sera, ou
pas, interprété de manière appropriée.
D’après Dilts, 2008, www.ressource.be

3 Savoir désamorcer les conflits


3.1 Le conflit

Le conflit est « une situation où des acteurs (individus, groupes, organisations,


nations), soit poursuivent des buts ou défendent des valeurs opposés, soit pour-
suivent simultanément et de manière compétitive le même but » (Touzard, 1977).
Du point de vue managérial, la plupart des décisions dans une entreprise sont le plus
souvent objets de conflits. C’est d’autant plus vrai que les enjeux sont élevés, à la
fois pour l’organisation elle-même et pour les individus concernés.
Parce que les commerciaux ont une position frontalière au sein de l’organisation
et qu’ils sont sujets à de très nombreuses interactions, les conflits dans cette fonction
sont potentiellement nombreux et peuvent s’exprimer tant à l’intérieur qu’à l’exté-
rieur de l’organisation.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Par ailleurs, les difficultés se trouvent amplifiées pour un manager commercial car
il ne peut avoir qu’une connaissance imparfaite des comportements des vendeurs du
fait de la quasi-impossibilité de les observer systématiquement.
La régulation du conflit est un enjeu important car la manière dont les commer-
ciaux interagissent avec les différents membres à l’intérieur et à l’extérieur de l’or-
ganisation va influer sur la performance, la satisfaction au travail, ou encore les
intentions de quitter l’organisation.

193
LE DÉVELOPPEMENT PERSONNEL

3.2 Les méthodes de résolution de conflit

On peut distinguer cinq stratégies de résolution de conflit (Thomas, 1995) :


– l’évitement : les parties ou l’une d’entre elles considèrent que le conflit est peu
important et elles négligent de le résoudre. La personne en se dérobant devant le
conflit ne satisfait ni ses propres exigences ni celles de l’autre. Les conséquences
de la résolution du conflit tout comme sa résolution ou sa non-résolution « indif-
fèrent » la personne ;
– l’accommodation : l’une des parties se voit plus touchée que l’autre par le
conflit et elle doit négocier en position de faiblesse. Cette stratégie représente la
satisfaction des intérêts d’autrui aux dépens des siens, souvent dans un souci
d’apaisement de la partie adverse. Selon cette approche, une partie croit (à tort
ou à raison) qu’il est avantageux de laisser tomber ses prérogatives et de satis-
faire celles d’autrui ;
– le compromis : les parties cherchent à parvenir à une solution à tout prix en
étant conscientes qu’on ne peut satisfaire tous les antagonismes. Cette stratégie
représente un souci d’entente où les intérêts de chacune des parties ne seront que
partiellement satisfaits selon une forme d’équilibre entre les pertes et les gains
respectifs ;
– la compétition : l’une des parties domine et impose parfois une solution. Une
personne cherche à satisfaire ses propres exigences aux dépens de celles de
l’autre personne. Il s’agit d’une attitude de force et d’autorité. Ce type de gestion
génère facilement un affrontement puisque le conflit est défini selon la perspec-
tive gagnant/perdant ;
– la collaboration ou la résolution de problème : les parties cherchent une solu-
tion satisfaisante pour tous. Ni l’une ni l’autre des parties ne veut tirer avantage
de la situation. Il s’agit d’un effort concerté pour trouver une solution propre à
satisfaire pleinement ses propres aspirations et celles de l’autre.

Parmi les stratégies de résolution de conflit, la « solution bizarre » apparaît comme


une alternative prometteuse. Elle s’inscrit dans le cadre d’une théorie du change-
ment, elle est issue des travaux de trois chercheurs et praticiens du Mental Research
Institute (MRI) de l’école de Palo Alto : Paul Watzlawick, John Weakland et
Richard Fisch (1975).
Elle s’appuie sur le changement des règles du système en fonction des rapports de
force et de la perception qu’ont d’eux les protagonistes.

194
Être au cœur des réseaux

 Repères Scénario de résolution de conflit


dans une équipe
Vous managez une équipe de vendeurs dans un point de vente. Vous ne ménagez pas votre
peine, vous prenez plaisir à votre travail, l’activité est bonne, les résultats sont au rendez-
vous. Vous avez cependant un problème qui, le temps passant, devient aigu : les deux
meilleurs vendeurs se livrent une guerre sans merci, se « piquant » des clients à l’occasion,
mais surtout passant leur temps en disputes souvent vives pouvant aller jusqu’à des insul-
tes prononcées sur un ton très véhément.
Malgré vos interpellations régulières, ces disputes pèsent sur l’ambiance de l’équipe… cela
ne peut plus durer.
1. Vous leur faites un avertissement écrit, les menaçant de sanctions ;
2. Vous les recevez séparément en entretien pour comprendre, et vous tentez une réconci-
liation ;
3. Vous les sermonnez devant toute l’équipe en réunion, en les rappelant à un peu de dignité
dans leur conduite, et en leur signalant les effets négatifs que produisent leurs disputes ;
4. Vous commencez à réfléchir à comment choisir celui dont vous allez devoir vous séparer ;
5. Vous envisagez une formation de type team building pour toute l’équipe.
La solution « bizarre » sera la suivante :
6. Vous leur dites qu’ils ont toute latitude pour se disputer, sans encourir aucune remarque.
La seule contrainte est qu’ils ne le fassent que dans un seul endroit : la salle des photoco-
pieurs, qui deviendra la « salle des disputes ».
Source : Barth, Bobot, 2009.

3.3 L’humour

L’humour a été peu étudié en management mais il est intéressant de voir combien
il peut apporter dans la construction de la relation, tant avec le client qu’avec des
collègues ou ses équipes.
L’humour peut avoir des objectifs très divers (Barth, 2007) :
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

– l’humour peut créer la connivence : ainsi, dans une réunion commerciale où


le climat est particulièrement lourd, une plaisanterie peut détendre l’atmosphère
et remettre chacun au travail ;
– l’humour peut inverser la répartition des places : c’est le cas du commercial
qui pour gagner les bonnes grâces de son client va pratiquer l’autodénigrement ;
– l’humour peut bâtir des coalitions : il peut jouer un rôle de coalition car les
membres d’un groupe peuvent se fédérer autour de la repartie d’un collègue ou
d’un client ;
– l’humour peut désamorcer le conflit : c’est même une de ses fonctions
majeures.

195
LE DÉVELOPPEMENT PERSONNEL

Mais l’utilisation de l’humour lors de négociation peut se révéler risquée car le


climat positif qu’il instaure peut amener à une baisse de vigilance sur la qualité des
informations ou sur les tactiques de l’interlocuteur.
L’humour peut aussi être jugé comme du harcèlement quand il dépasse certaines
limites, pas toujours simples à identifier. Il y va du droit des travailleurs à œuvrer
dans un environnement exempt de toute intimidation discriminatoire, d’insulte ou de
plaisanterie blessante. Il existe une abondante jurisprudence américaine concernant
cette violation du droit (Equal Employment Opportunity Commission).

Conclusion

Les évolutions de la société amènent de plus en plus les managers commerciaux à


élargir leur portefeuille de compétences. Si les savoirs et les savoir-faire classiques
restent nécessaires, l’exigence de maîtrise des savoir-être est de plus en plus forte et
discriminante.
Ce nouveau rôle de développeur des talents de ses collaborateurs oblige le mana-
ger commercial à sortir du rôle classiquement assigné et à dépasser les frontières des
rapports professionnels.
Le développement de la performance des commerciaux ne se limite plus à la rétri-
bution classique : rémunération + variable + primes + avantages en nature, elle
passe aussi par la connaissance de soi, la prise en compte des émotions, le respect
de la vie personnelle, l’acceptation de la différence. Le manager commercial doit
savoir animer, enthousiasmer, motiver ses équipes, il doit aussi écouter et compren-
dre l’indicible.
Un manager mutant ? Non, plus humain, tout simplement.

196
Le manager
Chapitre
commercial face
9 aux défis de la
responsabilité sociale
de l’entreprise1

N ous assistons à un véritable changement de paradigme : la vision d’une


entreprise ayant des obligations morales vis-à-vis de la société et devant
mieux contrôler les conséquences indésirables de ses activités : chômage, pollution,
appauvrissement, discrimination… Le manager commercial, de par sa position
d’intermédiaire entre l’environnement interne et l’environnement externe de l’orga-
nisation, est un acteur important de la conception et de la mise en œuvre de cette
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

responsabilité sociale de l’organisation.


L’entreprise s’intéresse à l’éthique, à l’environnement durable, au management de
la diversité. Ces sujets, très présents dans les discours stratégiques et institutionnels
des entreprises comme des organisations publiques, traduisent la volonté des diri-
geants d’être au plus près des préoccupations et des évolutions sociétales du
moment. Leur mise en œuvre s’inscrit dans le courant de la responsabilité sociale de
l’entreprise (RSE).
La performance intègre alors plusieurs facettes : l’économique et le financier, mais
aussi le social et le durable, et elle ne peut être conçue que de façon globale. Elle
s’installe sur le long terme et ne reste pas bloquée sur le court terme ou le très court

1. RSE.
197
LES DÉFIS DE LA RSE

terme. Dans cette perspective, il se développe une véritable sensibilité aux investis-
sements immatériels : la formation, l’éducation, le tri des déchets, le traitement
équitable des fournisseurs… gagnent en légitimité, au côté des investissements
matériels classiques. Ces nouveaux sujets interpellent l’ensemble des parties pre-
nantes de l’organisation et amènent l’entreprise à travailler véritablement à 360°.
Les dérives existent, la toute première étant celle d’une stratégie « cosmétique »,
quand l’enjeu d’image prend le pas sur les convictions profondes et le prix à payer
peut être élevé, même s’il n’est pas directement visible. Un discours de façade, sim-
plificateur, ne peut que générer des attentes et des espoirs… vite déçus. La réalité
vécue ne ressemble en rien à l’image proposée. Il reste alors aux salariés la démoti-
vation et la « dissonance cognitive », qui amorcent le cercle de la sous-performance.
Si la fonction marketing et celle des ressources humaines sont fortement mobilisées,
la fonction commerciale doit aussi répondre présente et s’insérer dans ce qui est une
conduite de changement structurel. Nous évoquerons donc le nouveau rôle du mana-
ger commercial face aux défis de la responsabilité sociale de l’entreprise.

Section 1 Q La fonction commerciale et la responsabilité sociale de


l’entreprise
Section 2 Q Le management commercial et l’éthique
Section 3 Q Le management de la diversité dans la fonction commerciale

Section
1 LA FONC TION COMMERCIALE ET
LA RESPONSABILITÉ SOCIALE DE L’ENTREPRISE

La responsabilité sociale (ou sociétale) des entreprises (RSE) est un concept dans
lequel les entreprises intègrent les préoccupations sociales et environnementales aux
enjeux économiques, dans leurs activités et dans leurs interactions avec leurs parties
prenantes. Elles le font sur une base volontaire, même si des cadres de régulation
apparaissent.

1 Définition de la responsabilité sociale de l’entreprise (RSE)


1.1 L’historique

On situe habituellement l’origine du concept d’une entreprise socialement respon-


sable à l’article de Bowen en 1953 : « Social Responsabilities of The Businessman ».

198
La fonction commerciale et la RSE

La RSE constitue « les modalités de réponse de l’entreprise aux interpellations socié-


tales en produisant des stratégies, des dispositifs de management, de conduite de
changement et des méthodes de pilotage, de contrôle, d’évaluation et de reddition »
(Capron, Quairel-Lanoizelée, 2007). Elle est au carrefour de trois courants qui ont
irrigué l’histoire des entreprises :
– une conception morale de l’entreprise, héritée du paternalisme du XIXe siècle,
qui se fonde sur les valeurs éthiques personnelles du dirigeant. Cette conception,
largement dominante aux États-Unis, voit les dirigeants s’engager dans des
actions philanthropiques, du mécénat, ou autres créations d’associations dont
l’objet est souvent de mettre en œuvre des actions visant à réparer les dommages
créés par l’activité de leurs propres entreprises ;
– une conception stratégique utilitariste visant à satisfaire les attentes des « par-
ties prenantes » de l’entreprise, ses salariés, ses clients, et toute la communauté
dans laquelle elle est intégrée. L’entreprise entre dans une logique de business
case, en faisant l’hypothèse que les actions menées dans le cadre de la RSE
servent sa performance économique ;
– une conception beaucoup plus récente de « soutenabilité » (sustainability),
visant la contribution de l’entreprise au développement durable. L’entreprise
met au cœur de sa stratégie les préoccupations sociales et environnementales,
développant souvent dans ce cadre des partenariats avec des institutions publi-
ques (mairie, agence Pôle emploi…).

1.2 Une soft law

La RSE demeure avant tout une démarche volontaire et constitue donc une soft
law1, même si l’on voit apparaître des cadres normatifs et légaux, encore peu coer-
citifs. En Europe, le Danemark est le premier pays à avoir imposé un reporting envi-
ronnemental à ses grandes entreprises comme une obligation légale incontournable.
En France, l’article n° 116 de la loi sur les nouvelles régulations économiques
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

(NRE), votée en 2001, demande que les entreprises cotées en Bourse indiquent dans
leur rapport annuel une série d’informations relatives aux conséquences sociales et
environnementales de leurs activités. Il correspond à une modification du Code du
commerce. L’entreprise a l’obligation de fournir des informations concrètes et si
possible quantifiées sur le pilier environnemental (compatibilité environnementale,
réalisation d’objectifs quantitatifs, etc.), sur le pilier social (accidents, lutte contre les
discriminations par exemple, engagements en matière de formation, etc.), mais garde
une entière liberté méthodologique pour ce faire.
Pour renforcer l’objectivité des rapports et en garantir la véracité, des sociétés
d’audit et de notation sociale, proposant des méthodes structurées, se sont créées.

1. Une soft law est un ensemble de règles qui ne relèvent pas d’obligations juridiquement sanctionnées.
199
LES DÉFIS DE LA RSE

Toutefois, la loi ne précise pas les conditions de responsabilité juridique des diri-
geants en cas de manquement à cette obligation de communication ; on compte
davantage sur les exigences des actionnaires et d’une manière plus générale des
marchés financiers via l’approche de l’ISR1, l’information financière se tournant de
plus en plus sur des éléments qualitatifs. Depuis 2005, environ 85 % des entreprises
françaises cotées répondent à cette obligation.

1.3 Émergence de cadres

Plusieurs normes sont apparues ces dernières années, nous retiendrons l’ISO 26000
et le Social Accountability Standard 8000 (SA 8000) :
– la norme ISO 26000 : elle se définit comme la « responsabilité d’une organisation
vis-à-vis des impacts de ses décisions et de ses activités sur la société et sur
l’environnement, par un comportement transparent et éthique qui contribue au
développement durable (incluant la santé et le bien-être de la société), prend en
compte les attentes des parties prenantes, respecte les lois en vigueur, est compatible
avec les normes internationales de comportement, et est intégré dans l’organisation
et mis en œuvre dans ses relations ». Sa publication est prévue pour 2010 ;
– le SA 8000 : ce standard a été initié par le Council on Economic Priorities,
devenu Social Accountability International (SAI), qui le développe et le super-
vise. Il concerne les conditions de travail, l’interdiction du travail des enfants,
du travail forcé, la discrimination, le temps de travail, mais ne traite pas des pro-
blèmes plus larges d’écologie.

2 La RSE et la vente : quelles relations ?


2.1 RSE et vente : deux mondes sans rien en commun

La représentation de la société en catégories est un procédé très courant. Ainsi, le


développement de la science économique (classique ou marxiste) a contribué à bâtir
une représentation du monde caractérisée par la séparation radicale des aspects éco-
nomiques du tissu social et leur construction en domaine autonome. Au XVIIe siècle,
s’établit la croyance que l’économie est une sphère indépendante de l’idéologie et
de la morale et qu’elle obéit à des lois positives. Ainsi, Polanyi (1983) distingue
la Gesellschaft, société commerciale, impersonnelle, régie par le contrat, de la
Gemeinschaft, société non commerciale, conviviale où le statut domine. Hirschman
(1970) utilise le même procédé quand il distingue trois sphères se caractérisant par

1. L’ISR est un investissement socialement responsable effectué selon des critères sociaux, environnementaux,
d’éthique et de gouvernance. L’hypothèse est qu’une meilleure appréhension des risques et un meilleur manage-
ment assurent la performance financière des sommes investies à moyen et long terme.
200
La fonction commerciale et la RSE

le comportement qui prévaut au sein de chacune : exit, voice, loyalty. Ainsi, la


sphère familiale se définit par la loyauté : quoi qu’il arrive, un lien indéfectible nous
unit à notre parenté. La sphère politique est caractérisée par le débat (voice), par
opposition à la sphère marchande qui se fonde sur la défection (exit), c’est-à-dire la
capacité à tout moment de s’en aller, de rompre le lien, de changer par exemple de
fournisseur.
Une forme très aboutie de ce procédé est celle proposée par Boltanski et Thévenot
(1991). Pour eux, l’accord entre des individus n’est pas seulement le produit de
l’habitude, de la culture ou de la contrainte, mais également de systèmes de repré-
sentations partagées. Les situations se comprennent et s’analysent à partir des repré-
sentations du monde qu’ont les individus. Ils distinguent six mondes ou cités : le
monde domestique avec le principe de lignage, le monde inspiré avec le principe de
créativité, le monde de l’opinion avec les principes de renommée, le monde civique
avec le principe d’intérêt général, le monde industriel avec le principe d’efficacité et
le monde marchand avec le principe d’intérêt commercial.
La RSE, qui se préoccupe de l’environnement, du social, du durable, ne peut donc,
dans ces représentations, entrer en relations pacifiques avec la vente ou le com-
merce, intimement liés au monde de l’argent et du profit. L’argent est une valeur
éternelle, mais décidément pas durable.

2.2 Le coût d’une stratégie commerciale non responsable

Pourtant, chercher à vendre sans s’inscrire dans la RSE peut avoir un coût. Il y a
bien sûr les coûts visibles avec la réduction, pour les promoteurs de crises, de leur
chiffre d’affaires, voire même leur liquidation (dans le cas de la crise des subprimes,
bon nombre d’établissements financiers américains ayant contribué au processus ont
fermé leurs portes). On peut y ajouter les coûts directs de réparation, avec les frais
de justice ou d’indemnisation des victimes de ces mauvaises pratiques.
Il y a aussi les coûts cachés avec les effets indirects, diffus et induits de ce type de
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

comportements. On peut ainsi évoquer :


– la perte d’image : l’organisation concernée provoque la méfiance, la détestation,
dans l’opinion publique et sur son marché. De nombreuses entreprises chinoises
ont été ainsi épinglées après avoir mis sur le marché des jouets ou des produits
alimentaires (comme du lait pour bébé) dangereux pour la santé des enfants aux-
quels ils étaient destinés ;
– la baisse d’attractivité : les nouveaux entrants sur le marché du travail sont
moins attirés par les entreprises qui n’affichent pas un réel engagement social.
On peut citer le cas de l’entreprise Total qui reste à tout jamais coupable de pol-
lutions graves, comme celle dite « de l’Amoco Cadiz » ;
– la démotivation : ceux qui y travaillent cherchent à quitter, et travaillent dans
un climat qui peut être suffisamment délétère pour obérer leur performance. On
201
LES DÉFIS DE LA RSE

peut citer le cas de France Telecom qui n’a pas su gérer le virage de sa privati-
sation de façon socialement responsable, et qui a dû affronter des crises graves
(dont des suicides au travail) traduisant le désengagement de ses salariés ;
– la perte de confiance : l’ensemble des parties prenantes perd confiance, les sous-
traitants, les fournisseurs, les prestataires de services, condamnant l’entreprise à
chercher ailleurs et plus cher des entreprises de substitution. La grande distribu-
tion vit cette défiance, de l’opinion publique comme de ses fournisseurs, malgré
de nombreux projets tournés vers la RSE (l’écologie pour Leclerc, la diversité
pour Casino) ;
– les dégâts collatéraux, comme la haine de la concurrence assimilée à l’entreprise
coupable (et non responsable le cas échéant). Ainsi, la crise des subprimes est
née des risques pris de façon aberrante par certains établissements de crédit amé-
ricains, qui ont ensuite contaminé les autres institutions bancaires, qui ont dû
licencier massivement, qui ont vu leurs performances chuter, leurs clients se
retrouver sans toit du jour au lendemain, et leur image durablement dégradée
dans l’opinion publique ;
– on peut voir que le coût est bien souvent inappréciable tant les dégâts peuvent
perdurer. Penser une vente plus responsable peut contribuer à éviter ces crises
majeures, quelquefois fatales pour les organisations.

3 Comment intégrer la RSE au management commercial ?

La RSE peut être déclinée en plusieurs types d’actions, qui peuvent être menées
concomitamment par la même entreprise. C’est le cas du commerce équitable, de la
prise en compte de l’environnement, du commerce solidaire avec la vente de pro-
duits partage.

3.1 Le commerce équitable

« Le commerce équitable est un partenariat commercial fondé sur le dialogue, la


transparence et le respect, dont l’objectif est de parvenir à une plus grande équité
dans le commerce mondial. Il contribue au développement durable en offrant de
meilleures conditions commerciales et en garantissant les droits des producteurs et
des travailleurs marginalisés, tout particulièrement au sud de la planète. Les organi-
sations du commerce équitable (soutenues par les consommateurs) s’engagent acti-
vement à soutenir les producteurs, à sensibiliser l’opinion et à mener campagne en
faveur de changements dans les règles et pratiques du commerce international
conventionnel » (définition proposée par quatre structures internationales de com-
merce équitable FLO, IFAT, NEWS, EFTA en 2001).

202
La fonction commerciale et la RSE

 Repères Les dix normes du commerce équitable

1. La création d’opportunités pour les producteurs qui sont économiquement en situation


de désavantage.
2. La transparence et la crédibilité.
3. Le développement de l’autonomie des travailleurs.
4. La promotion du commerce équitable : en sensibilisant le grand public aux injustices du
système commercial actuel, et en donnant de l’information sur l’origine de ses produits, les
conditions de travail des producteurs.
5. Le paiement d’un prix juste : après dialogue et concertation localement, avec un paie-
ment immédiat et parfois une aide aux producteurs avec le financement d’un crédit avant
la récolte ou avant la production.
6. L’égalité entre les sexes : les femmes doivent toujours être payées pour leur contribution
dans le processus de production.
7. Les conditions de travail : le commerce équitable signifie un environnement de travail
sain et sûr pour les travailleurs.
8. Le travail des enfants : les organisations du commerce équitable respectent la Convention
des Nations unies sur les droits des enfants, les lois et normes sociales sont appliquées afin
d’assurer que la participation des enfants dans les processus de production des produits
équitables ne va pas à l’encontre de leur bien-être, leur sécurité, leurs conditions éducatives
et leur besoin de jouer. Les organisations qui travaillent directement avec des organisations
informelles révèlent la participation des enfants dans la production.
9. L’environnement : le commerce équitable encourage activement de meilleures pratiques
environnementales et l’application de méthodes responsables de production.
10. Les relations de commerce : les organisations de commerce équitable font du commerce
en tenant compte du bien-être social, économique et environnemental des petits produc-
teurs marginalisés et ne font pas de profit derrière leur dos. Elles maintiennent de longues
relations qui reposent sur la confiance et le respect mutuel.
D’après World Fair Trade Organization (www.wfto.com).
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Quelles peuvent être les raisons de s’engager dans le commerce équitable ?


– la conviction d’un changement de donne profond et la prise de conscience que
chacun est citoyen d’un monde perçu comme de plus en plus petit ;
– le désir de construire, de travailler sur le long terme est souvent avancé, dans des
logiques d’entrepreneuriat pérenne, il s’agit de faire du profit fondé sur le tra-
vail, pas sur la spéculation ;
– la certitude que l’environnement ne peut plus supporter la production intensive,
qu’elle soit industrielle ou agricole, et la volonté de lutter contre la dégradation
locale, qui participe pour eux d’une dégradation globale ;
– le souci de préserver des filières qui, sous la seule logique économique, dispa-
raîtraient car jugées non rentables ;
203
LES DÉFIS DE LA RSE

– le projet de construire une relation stable, durable et directe avec ceux qui pro-
duisent ;
– le défi de l’élévation de la qualité du produit ou du service en intervenant sur les
paramètres de connaissance, de formation, de soutien technique et financier dans
le souci d’un partenariat équilibré ;
– l’échange de savoirs, de savoir-faire, d’assistance dans une logique de filière et
pas uniquement d’acte d’achat ;
– l’installation dans la durée, au-delà de la première génération.

Ces managers rejettent l’idée de « faire de l’humanitaire » et revendiquent d’être


dans une logique de gestion d’entreprise avec tout ce que cela implique de logique
économique et de recherche de profit, mais ils veulent travailler « autrement ». Ils
restent dans les prix du marché, préservent la qualité, leur seule concession est en
général de mener moins d’actions marketing.
Le consommateur, le client, de plus en plus averti des grands équilibres plané-
taires, s’inscrit pleinement dans ces démarches, à condition qu’elles ne soient pas au
détriment du produit ou du service qu’il acquiert.

3.2 Environnement : viser le développement durable

La fonction commerciale aborde la question du développement durable autour de


la conception du point de vente par exemple, ou encore de l’« écoconception » qui
définit la conception d’un produit de façon à réduire ses impacts négatifs sur l’envi-
ronnement pendant sa production, son transport, son usage et sa fin de vie, et possé-
dant les mêmes propriétés qu’un produit standard. Certains produits peuvent être
écologiques à tous les stades de leur utilisation, certains à seulement un ou deux
stades.
Le potentiel commercial de l’écoconception est très fort dans un contexte de forte
attente de produits écologiques. Elle contribue aussi à la différenciation du produit.

 Repères Lush, une entreprise entièrement écoconçue

L’écoconception :
Créée en Angleterre en 1995, la société Lush produit et
commercialise des produits cosmétiques frais et faits à la
main à base de fruits et de légumes d’origine biologique,
avec les meilleures huiles essentielles ainsi que des ingré-
dients synthétiques sûrs. Les produits Lush sont écolo-
giques et sont fabriqués dans le plus grand respect de l’environnement, des animaux et de
la peau. En anglais, lush signifie « luxuriant, juteux et appétissant ».


204
La fonction commerciale et la RSE

☞ L’idée est simple et révolutionnaire : éliminer toute substance périssable (c’est-à-dire les
liquides) de leurs produits de beauté pour ainsi faire des cosmétiques solides et sans
emballages. Lush a de cette manière solidifié le shampooing, les huiles de massage, les
sels de bain et les crèmes pour le corps ; et continue de les produire de manière artisanale
en petite quantité et en les vendant au poids.
Avec les emballages et les formules liquides disparaît également le besoin d’ajouter aux
produits des conservateurs, qui sont dangereux pour la santé de la peau.
Lush a une politique commerciale en complète cohérence avec ce positionnement, on peut
citer :
– des actions de marketing partage avec des organisations œuvrant dans l’environnement,
la protection des animaux et la préservation, comme People for Animals, Turtle Conserva-
tion Project, et la Sumatran Orangutan Society ;
– un engagement très fort dans des causes écologiques, comme la défense des requins en
collaboration avec Sea Shepherd. Lush a écrit à certaines fédérations françaises (restau-
rants, pêche, etc.) en leur demandant d’arrêter la pêche et la vente de requin. Lush demande
aussi à ses clients de boycotter les restaurants qui vendent des plats à base de requin (aile-
rons, steak, etc.) jusqu’à ce qu’ils arrêtent d’en vendre.
À travers son site Internet, Lush diffuse une vidéo qui montre le massacre des requins.
Les magasins sont impliqués dans l’ensemble des actions et les vendeurs comme leurs
managers doivent partager les valeurs fortes de l’entreprise. Le succès grandissant de cette
enseigne (plus de 650 boutiques dans le monde) prouve l’attractivité commerciale de tels
projets.
Source : www.lush.fr

3.3 Le commerce solidaire (les produits partage)

Un produit partage est un produit dont une part des bénéfices est reversée à une
organisation type ONG, organisation humanitaire, écologique ou autre. Le marke-
ting partage coordonne ces opérations de produits partage qui sont souvent faites
sous forme de promotion.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Pour éviter que le client n’ait le sentiment de payer seul, il faut que l’entreprise
sache communiquer sur sa propre participation financière, et pas uniquement
logistique. Le consommateur regarde avec une certaine méfiance ces actions,
même si elles lui donnent parfois bonne conscience pour la décision d’achat de
certains produits.
Il est également essentiel, comme on le voit dans les trois exemples retenus, que
l’entreprise sache impliquer les salariés, et tout particulièrement les commerciaux
dans ces actions. Il y a manifestement un véritable effet d’entraînement et une valo-
risation de l’image auprès de l’ensemble des parties prenantes.

205
LES DÉFIS DE LA RSE

 Repères Deux cas d’action de marketing partage

Blédina et les Restos bébés du cœur


Les Restos du cœur distribuent systématiquement des produits pour les bébés. Après avoir
vendu pendant deux ans des produits à des tarifs préférentiels aux Restos du cœur, Blédina
leur propose en 2001 un partenariat marketing partage avec une opération promotionnelle
(pour quatre produits achetés, un produit est donné aux Restos du cœur) et une association
des deux marques, puisque Les Restos du cœur est une marque. En 2002, dans une grande
enquête menée auprès des familles avec bébés, il ressortait que la deuxième opération la
plus connue des familles avec enfants, après les « pièces jaunes », était Blédina et les Restos
du cœur.
Casino et les Écoles du Soleil
En 2001 le groupe Casino a créé une association qui s’appuie en France sur « SOS Villages
d’enfants » : les Écoles du Soleil. L’opération de marketing partage s’appelle : « les fleurs du
bonheur ». Des bouquets de fleurs (conçus en interne) sont mis à la vente dans les points
de vente Casino au prix de 5 euros, 1 euro est reversé au point de vente et 1,30 euro directe-
ment à l’association Les Écoles du Soleil.
Crédit mutuel du Sud-Est et Docteur Clown
La Caisse du Crédit mutuel est une coopérative avec 1 830 agences à travers la France et
3 500 points de vente. L’opération Docteur Clown est née d’un groupe de réflexion des
directeurs d’agence. Chaque retrait effectué pendant le mois de décembre déclenche un
versement de 10 centimes d’euro pour l’association Docteur Clown. Compte tenu de la
notoriété de l’association, l’ensemble de l’opération a été largement relayé par les médias.
Source : Assises de la vente, 2004.

Section
2 LE MANA GEMENT COMMERCIAL ET L’ÉTHIQUE

Associer l’éthique à la vente est un pari difficile tant ces deux termes paraissent
antinomiques depuis des siècles de civilisation judéochrétienne.
Pourquoi ces représentations dégradées de la vente et de ses métiers ? Peut-on
envisager une possible articulation entre vente et éthique ?
Ce sont ces deux questions qui vont guider notre réflexion.

1 La vente et l’éthique : je t’aime, moi non plus

Quelques définitions :
Une étude du passé nous fait découvrir une longue histoire de désamour entre
éthique (ou morale) et acte marchand (ou commerce). Nous y associons la négocia-
206
Le management commercial et l’éthique

tion commerciale qui se définit comme « le processus d’interaction entre un vendeur


et un prospect avec comme projet la conclusion de la vente1».
Convenons qu’il est impossible de distinguer éthique et morale par l’étymologie.
Nous en proposons les définitions suivantes :
La morale commande : elle désigne les normes propres à une société et renvoie
à des règles de conduite universelles et atemporelles.
L’éthique recommande : c’est un chemin, un processus par lequel on traite tous
les possibles d’une situation. Elle est finalisée et centrée sur la situation, non sur la
règle. Elle est plus contextuelle ou plus individuelle.
Enfin, la déontologie (mot inventé par Bentham en 1834) est un ensemble de
règles propres à un groupe professionnel précis, même si au départ elle se présente
comme la science de « ce qu’il faut faire ».

1.1 Une vision historique des relations de l’éthique et du commerce

Dans l’Antiquité, le travail était indigne ; au Moyen Âge, le commerce déconsidéré


et, plus récemment, au XXe siècle, l’argent reste sale (Even Granboulen, 1998). La
morale a longtemps été perçue comme contraire à l’efficacité, alors que cette opposi-
tion n’a pas lieu d’être car la morale encadre l’activité, dont le but premier est l’effi-
cacité. La religion catholique a joué un grand rôle en restant hostile à l’argent. En
rejetant le profit, l’Église a longtemps stigmatisé l’usurier et même parfois l’entreprise
source de ce même profit. Il convient cependant de distinguer avec Aristote « écono-
mique » et « chrématistique », la chrématistique étant l’acquisition artificielle ou
l’enrichissement déconnecté de la production des biens réels. Saint Thomas reprendra
ce refus de l’argent que produit l’argent, en reconnaissant le gain issu du travail.
Le catholicisme refuse donc une trop grande accumulation de richesses2 et pour-
suit un idéal de pauvreté, la méfiance envers l’argent corrupteur est constante au
cours des siècles. À l’opposé, le protestantisme a levé cet interdit mis sur l’argent,
le travail et les biens terrestres. L’image la plus connue est l’alliance du sens de la
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

responsabilité et du sens des affaires. Avec la réforme, le travail devient le lieu où


s’accomplissent les devoirs religieux (Weber, 1993).
Cette relation difficile entre religion et activité économique a profondément, et
pour longtemps, marqué les convictions individuelles et sociétales quant à la rela-
tion marchande. Déjà, nous retrouvons cette même méfiance chez Platon quand il
pointait le caractère « corrupteur » de l’activité marchande et affirmait à propos des
marchands : « Quand il leur est loisible de faire un gain mesuré, ils choisissent de
gagner plus insatiablement » (Platon, édition 1950).
1. Même s’il est bien établi que l’on peut négocier sans vendre, comme on peut réaliser une vente sans avoir
négocié (cas de la grande distribution).
2. Nous resterons tout de même nuancés dans notre analyse car il y a eu aussi les marchands vénitiens au
XVesiècle, tout aussi riches et industrieux bien que catholiques.
207
LES DÉFIS DE LA RSE

Nous devons admettre que la vente est longtemps restée liée à la recherche du
profit et qu’à ce titre elle heurte la morale traditionnelle de nos sociétés depuis
l’Antiquité.
Cette explication nous semble satisfaisante mais réductrice. Des signes montrent
que la vente et le vendeur ne sont pas simplement montrés du doigt pour cette seule
relation au profit. Platon nous met sur la voie quand il compare le vendeur qui peut
vendre n’importe quel produit au sophiste qui, lui, peut défendre n’importe quelle
thèse.
Ce détachement du vendeur par rapport au produit (ou service) qu’il vend, comme
le détachement de soi qu’il exerce pendant la négociation (car pour mieux maîtriser
sa relation à l’autre, il doit rester observateur de son action), dérange. Cette percep-
tion d’une instabilité fondamentale est antinomique avec la disposition à agir de
façon constante qui est le fondement même de l’éthique (ethos). Cette adaptabilité,
cette mobilité du vendeur, sa capacité à saisir les opportunités (Hermès vient du grec
hermaïon qui signifie : « fruit tombé, aubaine ») et à maîtriser le discours de l’autre
expliquent aussi que les marchands et les voleurs aient le même dieu (Hermès ou
Mercure) dans l’Antiquité gréco-romaine.
La vente ne serait-elle qu’une metis1, une ruse ? Une ruse peut-elle être éthique ?
C’est ce que nous allons chercher à mieux cerner en interrogeant le mythe du dieu
Hermès.

2 Une vente éthique : un oxymore ?

Tout d’abord, que serait une vente non éthique ? Le vendeur userait de son « pou-
voir » et de sa compétence (la persuasion par exemple) pour vendre plus cher que le
prix prévu, vendre un produit dont personne ne veut ou n’a nul besoin, vendre une
quantité supérieure à celle désirée, vendre du matériel dégradé…
À l’opposé, si l’on essaie de décrire cette vente éthique, on fait appel aux para-
mètres suivants : le respect du client, l’objectivité et la transparence de l’informa-
tion, la satisfaction de l’intérêt du client, le respect des engagements…
On comprend vite que le vendeur se trouve alors soumis à des conflits éthiques ou
des « dissonances éthiques » (Nillès, 1998), car il y a d’emblée des tensions entre
réussir une vente immédiate et l’objectif de fidélisation du client, la transmission
d’une information objective et la persuasion à mettre en œuvre pour emporter l’ac-
cord du client, le respect de la personne et le désir d’influencer sa décision, le souci
de responsabilisation du client et la manipulation dont il peut faire l’objet lors de la
négociation. Les qualités recherchées chez un bon négociateur se confrontent vite au
cadre de l’éthique : ainsi, être persuasif peut très vite se transformer en manipulation
1. Les philosophes grecs distinguaient la theoria, la praxis (l’action), et la metis : que l’on peut définir comme
208 une intelligence pratique.
Le management commercial et l’éthique

du client, avoir le goût du challenge, du risque, du gain peut amener à des rationali-
sations excessives du style : « tous les moyens sont bons » (Barth, 2002).
Quatre situations propices au manque d’éthique :
– La répartition du portefeuille clients entre vendeurs : une équipe de ven-
deurs est composée d’un ensemble d’individus qui travaillent ensemble mais
avec des objectifs souvent dictés par des gains non mutualisés. Il devient alors
tentant et quelquefois facile, grâce au hasard ou à des opportunités, de faire une
vente sur le territoire d’un collègue.
– Les relations entre offreurs : l’entente entre vendeurs contre le client est une
autre pratique non éthique de la vente. Bien des professions ont ainsi une concer-
tation à tous les niveaux pour ne pas perturber le jeu d’une concurrence sous
surveillance. Il ne s’agit, bien sûr, pas forcément d’ententes illicites. Il s’agit tout
de même de contraindre le client à un achat peu optimisé.
– La relation asymétrique de pouvoir avec le client et la gestion de cette asy-
métrie (qui n’est pas forcément toujours en faveur du vendeur) : l’acte de vente
est un acte de conviction, de persuasion, de transformation du client. Dans la
réalité quotidienne, le vendeur se retrouve souvent face à un client qui a besoin
d’être convaincu pour franchir le pas que représente l’acte d’achat. Il a besoin
d’être rassuré (théorie du risque perçu). Il n’a pas compris tous les bénéfices que
pouvait lui apporter le produit ou le service. Il n’a pas complètement pris
conscience de son besoin. Il se trouve face à une alternative concurrentielle…
De cette capacité à informer, expliquer, répondre aux objections, on perçoit
combien il est simple, par paliers successifs, de passer de la persuasion à la
manipulation. Les choses peuvent se faire de façon volontaire ou pas, mais il
n’est pas simple d’évaluer à quel moment la ligne jaune est franchie.
– L’utilisation du temps de travail du vendeur : les cas sont nombreux où le
commercial est suffisamment éloigné de l’entreprise (en distance) pour qu’il soit
extrêmement difficile de contrôler l’utilisation de son temps de travail. Fait-il
des rendez-vous ? Remet-il les offres ? Ou même travaille-t-il ? Là encore, il
s’agit rarement de prises de position bien claires mais plutôt de petits glisse-
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

ments successifs qui conduisent à ce type de situations. La gestion de l’efficacité


est mise au service de l’individu plus qu’au service de l’entreprise.

On retrouve les mêmes tensions quand on s’intéresse aux qualités du vendeur. En


définitive, quelles sont les qualités d’un bon vendeur ?
– être persuasif et fin négociateur, ce qui peut très vite glisser vers la manipulation
du client ;
– être autonome, ce qui pose le problème du contrôle, et ouvre le champ à des
comportements très éloignés de ceux attendus ;
– avoir le goût du challenge, du risque, du gain, ce qui peut amener à des rationa-
lisations excessives du style : « tous les moyens sont bons ».

209
LES DÉFIS DE LA RSE

3 Construire une vente adaptative


3.1 Développer l’orientation client1

L’orientation client se caractérise par un comportement d’assistance du client par


le vendeur dans sa décision d’achat (Saxe et Weitz, 1982). Un commercial est
« orienté client » lorsqu’il s’engage dans des comportements conduisant à la satis-
faction de son client à long terme plutôt qu’à son propre intérêt à court terme. Il doit
savoir faire preuve d’adaptation dans la vente afin de proposer l’offre la mieux ajus-
tée au client et qui le satisfera dans le temps.
L’orientation client comporte sept axes :
– le désir d’aider le client à prendre de bonnes décisions d’achat ;
– l’aide au client pour évaluer ses besoins ;
– l’offre de produits qui satisfont ces besoins ;
– la description conforme du produit ;
– l’adaptation des présentations de l’offre à l’intérêt du client ;
– l’évitement de tactiques d’influence manipulatrices ;
– l’abstention de l’usage de pression sur le client.

Les principaux comportements relationnels qui sous-tendent cette orientation


client sont au nombre de quatre :
– l’adaptabilité commerciale : elle renvoie au changement de comportement
commercial, durant et selon les interactions avec les clients, sur la base de l’in-
formation perçue et de la nature de la situation de vente ;
– l’orientation long terme : elle désigne l’inclination du vendeur à prendre en
compte les conséquences futures de la vente. Un vendeur a une orientation long
terme lorsqu’il est capable de faire des sacrifices à court terme pour atteindre des
résultats à plus long terme ;
– l’orientation service : elle désigne la prise en charge par le commercial de mis-
sions qui ne concernent pas directement la vente mais se situent aussi après
l’acte de vente. Le fait de fournir information et assistance allant au-delà de la
vente traduit une forte orientation service ;
– le processus interpersonnel ou interactif : il reflète la manière dont ce service
est délivré. Il fait référence, chez le vendeur, à sa considération pour le client, sa
capacité à répondre rapidement et efficacement aux demandes, son empresse-
ment à satisfaire les clients, sa créativité pour répondre aux besoins des clients,
sa capacité à bien faire le travail dès la première fois, à chaque fois.

Les commerciaux doivent pratiquer une vente adaptative afin de construire des
attentes réalistes et d’accroître l’effort du client ainsi que sa perception de l’effort

1. D’après Poujol, 2009.


210
Le management commercial et l’éthique

du vendeur. L’écoute du vendeur est un inducteur de confiance, de satisfaction à


l’égard du vendeur et en définitive de continuité de la relation. Ainsi, l’échange
d’informations, les relations interpersonnelles, la résolution des conflits, la connais-
sance du client et l’absence d’agressivité dans la vente ont un effet direct sur la
performance globale du commercial.

3.2 Le business case de l’éthique commerciale

L’idée est que, sur le long terme, l’éthique est payante : en diminuant le sentiment
de risque chez le consommateur (composante forte du processus d’achat), elle per-
met de consolider le lien avec le client et donc d’augmenter CA et profit.
L’éthique fait fonction d’image de marque. L’utilisation de l’éthique à des fins
professionnelles responsabilise les salariés, les conduit à la pratique d’un auto-
contrôle des comportements (attitudes qui sont autant de gains en termes de mana-
gement, de temps, d’énergie…). L’entreprise crée ainsi souvent ses propres valeurs
et élargit l’espace professionnel qui lui est traditionnellement dévolu.
L’éthique de la vente se doit d’être évaluée (et défendue) du point de vue du ven-
deur.
On peut identifier les pistes de recommandation suivantes :
– impliquer le vendeur dans la stratégie de l’entreprise, car l’instrumenter le
pousse à des comportements tels que ceux décrits et dont le plus patent est de
« jouer pour soi » et non pour le projet de l’organisation ;
– éviter les systèmes de motivation privilégiant les gains et le quantitatif qui
amènent à des stratégies de vente « à tout prix », bien souvent au détriment du
client ;
– contrôler les comportements de la force de vente, surtout si elle est disséminée,
pour éviter les tentations de dérives qui nuisent à l’efficacité du travail fourni.
Mais il faut être vigilant car un excès de contrôle peut traduire un déficit éthique
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

de l’entreprise vis-à-vis de son salarié ;


– une autre recommandation est de mieux former les vendeurs, de les amener à
mieux anticiper et à avoir une vision panoramique de leur environnement, pour
mieux mesurer les enjeux de chaque prise de décision ;
– construire un climat éthique dans l’entreprise : le climat éthique se définit
comme « une perception prédominante par les salariés des pratiques et des pro-
cédures de l’entreprise qui ont un contenu éthique » (Victor, Cullen, 1988). Il
s’appuie sur les normes, les pratiques de vente, le comportement des pairs et le
respect et traitement équitable des personnes. Il intègre à la fois l’éthique for-
melle et informelle (Lavorata, 2009). On peut mettre en évidence qu’un climat
éthique fort dans une entreprise favorise les comportements éthiques et l’impli-
cation des vendeurs (Lavorata, 2009).

211
LES DÉFIS DE LA RSE

Section
3 LE MANA GEMENT DE LA DIVERSITÉ
DANS LA FONCTION COMMERCIALE

1 Le management de la diversité dans l’entreprise

Le management de la diversité est un terme qui a envahi la vie des entreprises


comme toute la sphère publique au cours de ces dernières années (Barth, Falcoz,
2008, 2010). Il succède à la lutte contre les discriminations et à la politique d’égalité
des chances, sans les occulter, mais en présentant une face plus positive du phéno-
mène. Le management de la diversité se fonde sur l’idée que la différence est une
richesse. La vente comme fonction frontière de l’organisation est particulièrement
interpellée par ce qui est à la fois une politique, une valeur, une attitude.

1.1 Une compétence organisationnelle

Le management de la diversité se situe au croisement du public (l’organisation) et


de l’intime (l’individu), rendant sa mise en œuvre particulièrement complexe. Nombre
de managers de la diversité s’interrogent sur les frontières à ne pas franchir.
Dans la mise en œuvre de telles politiques : éthique, responsabilité, équité, diver-
sité… on a tendance à laisser croire (dans une logique binaire) que le fonctionne-
ment du global se construit par l’addition des comportements locaux, individuels
(le tout est égal à la somme des parties) en l’occurrence, ce qui conduit à renvoyer
alors les difficultés ou les échecs de mise en œuvre à chacun ou à ses antécédents :
le manque d’éducation, le déficit des religions, la faillite des parents…
S’il n’est pas faux qu’une entreprise ne sera globalement éthique ou responsable
que si l’ensemble des hommes et des femmes qui la composent adhèrent à cette poli-
tique et mettent leurs actes en conformité avec la stratégie proposée, il faut dépasser
cette vision purement additionnelle des choses et accepter que la diversité, comme
l’éthique, relève de « compétences organisationnelles ». Il faut donc savoir prendre
en compte, au-delà des positions individuelles, les interactions qui animent le
groupe, les connexions entre personnes, les rétroactions mises en œuvre…

1.2 L’approche business case

Cette vision, que l’on peut lapidairement renommer « coûts avantages »1, permet
d’identifier les coûts et les retours sur investissement d’actions de nature immaté-
rielle.

1. Calculer la différence entre les coûts du projet et les bénéfices récoltés.


212
Le management de la diversité

Bien souvent, et c’est le cas sur le terrain de la « diversité », l’entreprise est « en


avance » sur la sphère publique ; ses caractéristiques de réactivité, de proactivité,
d’adaptation, de pragmatisme, font d’elle une véritable force de proposition sur
des sujets sociétaux. L’entreprise est dans le « temps court », l’institution dans le
« temps long », et on s’inquiète (on s’indigne même) de sa capacité à prendre des
mesures de type légal ou réglementaire. Si la logique marchande de l’entreprise
fait qu’elle s’empare de thèmes comme la diversité avec efficacité, elle le fait dans
cette perspective business case qui implique des choix et donc des abandons. Il y
a donc (et c’est cohérent) hiérarchisation, priorisation, rationalisation des actions
dans un souci de performance… jusqu’à ce que le projet du moment fasse place à
un autre thème plus prioritaire.
Le pivot de l’approche business case va être la capacité d’évaluation. L’enjeu est
de ne pas vouloir isoler « une » variable explicative des résultats obtenus, mais bien
de s’attacher aux effets, dans une vision constructiviste de la démarche.
Si, de plus, on admet que l’évaluation et la balance que l’on va en tirer peuvent
comporter des indicateurs financiers certes, mais également quantitatifs et qualita-
tifs, le bilan des actions mises en place s’enrichit considérablement et acquiert un
statut dynamique. Le bilan participe alors du mouvement. Concrètement, il s’agit
d’admettre que la « satisfaction » ou le « bien-être » (par exemple) peuvent être mis
sur un pied d’égalité avec des indicateurs purement financiers. Un exemple basé sur
une simulation est proposé ci-dessous.
Tableau 9.1 — Bilan qualitatif, quantitatif et financier (simulation)
de la féminisation d’une force de vente
Indicateurs Évaluation Évaluation Évaluation
(hypothèses) financière quantitative qualitative
Turn-over Réduction du coût Allongement de la durée Sentiment de pouvoir évoluer,
des femmes du turn-over anticipé des contrats des femmes compatibilité meilleure entre vie
des femmes dans l’entreprise professionnelle et vie personnelle
Répartition Comptage, pourcentage
hommes-femmes des femmes commerciales
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

des équipes de FDV


Absentéisme Évolution du coût Nombre de jours Satisfaction des femmes au travail
de l’absentéisme d’absence et sentiment de la prise en compte
de leurs contraintes personnelles
et familiales
Satisfaction clients Évolution du CA, Nombre de nouveaux Satisfaction des clients (affinités,
de la marge clients (transformation perception de professionnalisme…)
prospects)

Source : Barth, 2006.

213
LES DÉFIS DE LA RSE

2 Le management de la diversité commerciale


2.1 Les spécificités de la diversité appliquée à la vente

Le personnel au contact, les vendeurs, incarne l’organisation aux yeux des clients.
Le mot d’ordre est la cohérence entre l’attitude de ce personnel et l’ensemble de la
politique marketing ; il y va de la crédibilité globale de l’organisation. Ainsi, peut-on
promouvoir l’ouverture à des clients d’origines ethniques variées si l’un d’entre eux
fait l’objet d’un refus de vente ? Les très nombreuses campagnes de testing ont sou-
vent mis le doigt sur ces hiatus entre discours et réalité (Amadieu, 2002).
Peut-on communiquer sur la variété des origines si les populations visibles par les
clients, les forces de vente, n’incarnent pas cette variété (en âge, sexe) ?
La fonction vente et les personnes qui y travaillent sont l’image de l’entreprise,
tant par ce qu’elles sont que par ce qu’elles font, d’où cette amplification indéniable
de toute action touchant ces populations. Beaucoup de banques ou d’assurances ont
ainsi fait le choix pour leur campagne de communication de la mise en scène de leur
personnel au contact : portrait de tel ou tel conseiller pour la campagne d’affichage
ou théâtralisation de l’acte de négociation dans les publicités télévisées (campagne
récente du Crédit agricole).
Cette amplification peut aussi amener à deux tentations qui marqueraient les seuils
de ce que nous appellerons : les « stratégies de diversion de la diversité » :
– la première stratégie est de récupérer la diversité pour un discours de façade ;
– la seconde stratégie de diversion est de configurer son offre produit-service et sa
clientèle dans une vision communautariste de consommation.

2.2 La diversité dans la force de vente au nom de la proximité


au produit
Un levier de la diversité dans les forces de vente est fréquemment l’hypothèse
(jamais démontrée) de l’enjeu de la proximité du vendeur avec son produit, c’est-à-
dire de la supposée représentation du vendeur d’un produit donné. Ce qui donne des
scénarios classiques comme ce sont des femmes qui vont vendre des parfums ou de
la lingerie, ce sont des hommes qui vont commercialiser les voitures, ce sont les
Antillais qui vendent le mieux les ananas et les bananes en grandes surfaces… qui
deviennent plus sophistiqués au fur et à mesure de l’ajustement des produits ou des
services à des segments de clientèles, ou au gré d’une stratégie d’innovation et de
diversification.
On part du principe que, pour être mutuellement crédibles, produit et vendeur
doivent se conforter dans l’image qu’ils transmettent, ceci afin de renforcer la
dimension expertise.
214
Le management de la diversité

Cela va alors ouvrir la porte de l’entreprise à des groupes encore peu représentés
et justifier la politique de diversité. Est-ce que la performance est réellement plus
grande avec ce type de recrutement ? On peut ainsi envisager tous les risques de
frustration et de démotivation des personnes embauchées pour cette raison, comme
le risque, à gérer auprès de la clientèle, de ne pas avoir la vraie compétence attendue,
les critères de recrutement ayant été déplacés.
Si l’on se place dans une perspective long terme, le coût risque d’être plus fort que
les gains espérés de telles mesures.

2.3 La « proximité client »

La seconde mise en œuvre de la diversité est celle fondée sur l’idée de la « proxi-
mité avec le client » : on vendrait mieux au client si on lui ressemble ; c’est ainsi que
Grand Optical a décidé de recruter des seniors pour mieux vendre à des clients pres-
bytes ; c’est ainsi que pour attirer des publics de telle origine ethnique, il vaut mieux
parier sur des vendeurs de la même origine… La dimension expertise peut être mise
en avant, comme dans le cas de solutions de téléphonie adaptées aux sourds propo-
sées par France Telecom et vendues par des sourds, mais on peut se poser légitime-
ment la question du risque de ghettoïsation de telles pratiques de RH.

 Repères Diversité du personnel


dans un magasin d’optique
Les magasins Grand Optical ont fait le choix de recruter depuis quelques années du person-
nel senior pour, en première instance, mieux répondre à la demande d’une clientèle gran-
dissante de la même catégorie d’âge, et grande consommatrice de lunettes (presbytie).
Le bilan global est positif : les clients sont plus satisfaits, ont une image de plus grande
expertise du point de vente, se sentent mieux accueillis… mais les clients seniors ne se diri-
gent pas particulièrement vers les vendeurs seniors…
Source : Barth, Falcoz, 2007.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Le risque le plus grand, à terme, est celui de l’anticipation « au nom du client » :


« le client ne veut pas de ». Deux exemples ont été fréquemment cités dans des
débats médiatiques : celui du refus de recrutement de plombiers d’origine maghré-
bine car « les clients ne veulent pas qu’ils pénètrent dans leur domicile », ou celui
de refus de recrutement d’une femme noire pour la commercialisation d’une crème
amincissante car les clientes (blanches en majorité) pourraient penser que « cette
crème ne sera pas performante sur elles, compte tenu des spécificités des deux types
de peau ».

215
LES DÉFIS DE LA RSE

Le problème, c’est qu’au nom du client tout devient possible : on ne recrute pas,
mais du coup, deuxième anticipation, on ne forme pas et l’autocensure se met en
route ; sans débouché réputé, pourquoi se lancer dans tel type de formation ?

 Repères Le rôle de l’apparence physique


dans la fonction commerciale
Dans une société où l’image est partout et où le regard fait force de loi, il est impossible de
nier que l’apparence physique joue un rôle dans la vie professionnelle.
– Il a été prouvé qu’être beau et séduisant facilitait largement l’obtention d’une demande,
rendait les interlocuteurs plus ouverts et plus conciliants.
– S’il ne s’agit pas de beauté, c’est alors la conformité aux stéréotypes pour telle ou telle
profession qui facilite la tâche.
La fonction commerciale est donc particulièrement soumise à des canons, tant la négocia-
tion et la relation client relèvent d’exercices de séduction.
Dès le recrutement, la « gueule de l’emploi » va prendre tout son sens. Pour les commer-
ciaux, un physique disgracieux provoque un rejet pour 66 % des recruteurs (contre 11 % pour
un poste administratif) ; de même, les tics sont la cause de rejet pour 58 % des recruteurs
(quand il s’agit d’un poste commercial, 19 % pour les administratifs).
Dans la vie quotidienne au travail, l’apparence physique participe à sa façon de l’histoire
que l’on veut raconter au client. Les personnes « sous le regard du client » participent de la
mise en scène de l’entreprise, c’est le cas dans les points de vente dits « expérientiels » où
le personnel de vente va porter des tenues confortant la théâtralisation du lieu.
Une étude menée en 1996 aux États-Unis a ainsi montré que les clients préféraient avoir
affaire à des vendeurs au physique agréable. Une autre recherche de 1997 a mis en évidence
que, dans le secteur de la beauté, le chiffre d’affaires des salariés les plus beaux était net-
tement plus élevé que la moyenne.
Pour l’évolution de la carrière, l’apparence physique est également un atout puisque les
personnes jugées belles, ou en conformité avec le milieu (la reconnaissance des pairs est
déterminante, et s’appuie sur des codes et des ressemblances), progressent plus vite que
les autres, moins favorisées.
Le cas de la négociation : une étude conduite en 1999 à la Wharton School, sur la base du
« jeu de l’ultimatum » a permis de démontrer que la beauté était un avantage dans un pro-
cessus de négociation. Les beaux gagnent 8 à 12 % de plus que ceux qui ont un physique
moins avantageux.
D’après Amadieu, 2002.

3 La mise en œuvre d’un management de la diversité


dans la fonction commerciale

Une approche particulièrement prometteuse est celle qui, s’appuyant sur la


méthode des scénarios, permet d’identifier les dilemmes au quotidien sur le sujet.
216
Le management de la diversité

Ces scénarios sont construits avec les personnes travaillant dans l’entreprise, de
façon à être au plus près de leurs préoccupations. Ils permettent d’avoir un retour
pour l’entreprise des pratiques, mais aussi de la bonne compréhension des attentes
de l’entreprise ainsi que de l’appropriation des actions entreprises en faveur du
sujet.
Les réponses apportées par la personne se font aussi sous 3 angles :
– le scénario de réponse que je trouve le plus en phase avec mes valeurs ;
– celui que je vais mettre en œuvre ;
– ce qu’attend l’entreprise.

Enfin, l’outil est administré en ligne pour garantir l’anonymat et permettre des
évaluations globales en temps réel.

 Repères Convictions religieuses/vie professionnelle

Un des membres de votre équipe commerciale est de confession musulmane et le ramadan


coïncide avec 5 jours de séminaire que vous avez organisés pour renforcer la cohésion de
l’équipe. Sports d’équipe, challenges en tout genre, repas pris en commun… rythment les
journées. Or, ce collaborateur présente des signes de fatigue visible, il vient même de
demander à se retirer dans sa chambre pour éviter la partie de beach volley au soleil… Les
autres râlent et trouvent que « ça gâche tout ».
1. Vous faites quelques réflexions allusives en sa présence quant au problème que pose son
comportement ;
2. Vous faites le point avec votre équipe (en dehors de sa présence) en leur demandant
d’être respectueux de cette situation inédite, que vous n’aviez pas anticipée ;
3. Vous ne dites rien : ce sont des questions personnelles et vous n’avez pas à vous en
mêler ;
4. Vous allez le voir, vous lui décrivez le malaise du groupe et vous lui demandez de « faire
un effort ».
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Source : Eval’diversité de la société Socrates. (www.socratesonline.com).

On constate le besoin d’avoir recours à des méthodes de formation moins clas-


siques. L’apport des jeux de rôle, du théâtre, de toutes méthodes d’immersion (pas-
ser une journée dans un fauteuil roulant ou dans le noir complet) est indéniable.
Beaucoup d’entreprises misent aussi sur l’e-learning pour alléger les coûts, mais
aussi parce que les forums de salariés permettent de mener des échanges pour résou-
dre des malaises ou des situations délicates.

217
LES DÉFIS DE LA RSE

 Repères La mise en situation dans le théâtre


d’entreprise
Une mise en situation grâce au théâtre met en relation des comédiens professionnels et
des stagiaires.
Le comédien-formateur écrit une consigne pour le stagiaire décrivant la situation et l’objec-
tif qu’il doit atteindre et écrit le profil des collaborateurs incarnés par le comédien avec des
intentions révélées, des intentions cachées et l’objectif à atteindre par le personnage. Il
pose les règles du jeu dont il est le garant : pas de jugement de valeur, bienveillance réci-
proque, mode de passage… Il observe la situation, les comportements et les réactions des
protagonistes et du public. Il anime les débriefings.
Le comédien est un « amplificateur ». Il interprète un interlocuteur crédible, dont les traits
de caractère et comportements sont amplifiés. Cela permet au stagiaire de révéler plus faci-
lement ses difficultés concrètes.
Le stagiaire mis en situation : Qu’a-t-il ressenti ? Quelles ressources a-t-il mises en œuvre ?
Pense-t-il avoir atteint son objectif ? A-t-il d’autres idées de comportements qu’il aurait pu
mettre en œuvre ?
Les stagiaires-spectateurs : le but est de permettre à chacun de se projeter dans la situation
bien qu’il ne la joue pas, de rechercher les comportements à mettre en œuvre dans un tel
cas par rapport à l’objectif de la situation.
D’après la compagnie Théâtre à la carte (www.theatrealacarte.fr).

Conclusion

La RSE et ses déclinaisons dans la fonction commerciale : le commerce équitable,


le développement durable, l’éthique, la commercialisation des produits partage ou
le management de la diversité sont de véritables défis pour le manager commercial
de demain.
Leur mise en œuvre fédère les équipes, améliore leur implication dans le travail et
leur satisfaction vis-à-vis de l’entreprise. Quand on sait que ces trois sentiments sont
des antécédents de la performance, une approche business case de la RSE semble
incontournable. Il faut néanmoins conduire ce changement, comme tout changement
structurel et durable, en l’arrimant à la stratégie de l’organisation. Il est essentiel que
le manager commercial le pilote auprès de ses équipes. Le manager commercial est
donc attendu tant par ses vendeurs que par les clients, pour lesquels une entreprise
socialement responsable est une entreprise désirable.

218
Conclusion
générale

En forme de synthèse, ou d’ouverture (pour ceux qui feuillettent un livre à partir


de la fin), il semble bon de rappeler les messages clefs qui parcourent l’ensemble
des chapitres de cet ouvrage :
Le management commercial est vital aux entreprises, car c’est lui qui permet
d’orchestrer le processus validant le projet complet de l’entreprise : la vente de pro-
duits, de services… de solutions.
Le manager commercial se situe donc au cœur de l’activité.
Le management commercial ne se résume plus au management des seules
forces de vente, mais doit s’ouvrir à l’ensemble de l’entreprise, pour « l’orienter
client », et faire prendre conscience à chacun qu’il ou elle est « indirectement »
commercial(e) et contribue, dans la moindre de ses tâches, à la performance
commerciale globale. Cette nouvelle perspective implique d’élargir les pratiques
classiques de management commercial pour sortir du lien hiérarchique direct et
mobiliser des savoir-faire en management de projet ou en management transversal.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Compte tenu des grandes évolutions sociétales, de plus en plus de secteurs d’ac-
tivité se marchandisent : l’éducation, l’hôpital, les services publics… amenant
progressivement à dialoguer avec un client, et non un usager ou un patient.
L’encadrement de ces structures doit alors savoir emprunter des clefs de lecture au
management commercial, ou tout simplement des pratiques (à adapter bien sûr) pour
accompagner ces changements.
Si toutes les situations de management commercial sont différentes, si sous le
dénominateur commun de « manager commercial » se retrouvent des pratiques, des
fonctions, des missions extrêmement variées, il existe néanmoins des fondamentaux
qu’il est bon de connaître pour mieux se construire ses propres grilles de lecture. Le
parti pris a donc été de faire l’aller-retour entre contexte spécifique et réflexions
plus génériques.
219
LE MANAGEMENT COMMERCIAL

Afin de toujours s’inscrire dans une perspective d’innovation et de réflexivité, le


choix a été de rester au plus près des préoccupations actuelles des managers
commerciaux et de leurs pratiques les plus émergentes.
Les minicas d’entreprises, les exemples tirés de situations réelles, les emprunts à
la littérature, la mobilisation de la presse managériale complètent le déroulé plus
classique d’une réflexion qui se veut en trois dimensions :
– observer, décrire, repérer le management commercial dans les entreprises, à
travers des situations, des problématiques récurrentes, ou émergentes ;
– interpréter, expliquer, décrypter ces situations-problèmes pour mieux com-
prendre leurs causes, qu’elles soient internes ou externes à l’entreprise ;
– proposer, construire des solutions, soit basées sur des pratiques existantes et
remarquables, soit de façon plus prospective, pour stimuler les capacités d’inno-
vation des managers commerciaux.

La pertinence d’un tel manuel n’existe qu’à travers l’appropriation que ses lec-
teurs en auront.
Il s’adresse à des managers commerciaux en activité qui souhaitent mieux compren-
dre ce qu’ils font, et exercer une prise de recul pour mieux ajuster leurs pratiques.
Il est également conçu pour des managers commerciaux en devenir, des étu-
diants qui auraient un projet professionnel dans ces domaines, et aussi des étudiants
curieux d’une fonction qui ne suscite que peu d’intérêt chez les jeunes diplômés ou
dans les cursus postbac.
Il vise enfin à accompagner des formateurs dans la vaste tâche d’initier au mana-
gement commercial ou, du moins, dans une de ses facettes.
Le management commercial n’est plus depuis longtemps un management unique-
ment fondé sur l’empirisme, l’essai-erreur, le charisme du manager. Il doit aussi
résister aux tentations du « tout technologique » car sa performance est avant tout
celle d’hommes et de femmes, dans leur complexité, leur unicité et leur diversité.
Le management commercial doit être perçu comme un exercice délicat, un équi-
libre précaire, un tricotage fin et quotidien entre ce qui organise les structures (pro-
cédures, système d’information, chaîne de la production, organisation…) et ce qui
génère les comportements (motivation, concertation, coordination, communication,
formation…).
Si le contexte pèse sur le manager commercial, le manager commercial de demain
doit être convaincu (et se donner les moyens d’y parvenir) qu’il peut, en retour,
façonner son environnement.
Nous formulons le vœu, que, modestement mais sûrement, cet ouvrage contribue
à aider les managers commerciaux à raconter leur propre histoire.

220
Bibliographie

Chapitre 1 – Le management commercial : de nouvelles exigences


face à de nouvelles attentes
AMADO G., ELSNER R., Leaders et transitions, Pearson, 2004.
BARNARD C., The Functions of The Executive, Harvard University Press, 1938.
BARTH I., « Le portefeuille de compétences du manager commercial », Master 2 Vente et
management commercial, Université Lyon 2, 2001.
BOYER L., SCOUARNEC A., Études prospectives des métiers du marketing et de la vente, 2006
(lucboyer.free.fr).
Cegos, « Premier Baromètre CEGOS des dirigeants commerciaux », Cegos, 2007.
CHAULIAC (DE) I., RABAUD A-F., « Les femmes sont-elles de meilleurs commerciaux ? »,
Action Commerciale, 1er janvier 2007.
DRUCKER P., The Practice of Management, Harper and Brothers, 1954.
EISENHARDT K. M., KAHWAJY J.-L., BOURGEOIS L. J., « How Teams Have a Good Fight »,
Harvard Business Review, 1997.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

ENRIQUEZ E., in FAIN, M., CIFALI M., ENRIQUEZ E., COURNUT J., Les Trois Métiers impossibles,
Paris, Les Belles Lettres, 1987.
FIOL M., « La convergence des buts dans l’entreprise », thèse de doctorat d’État, université
de Paris IX Dauphine, 1998.
FIOL M., FRONDA Y., « Les fractures managériales comme facteur de risque majeur pour
l’organisation », XXIe Congrès de l’AFC, Angers, 2000.
FIOL M., GERARD B., MANGIN, N., « La dyade manager-supérieur : une dimension oubliée du
contrôle de gestion », Actes du Congrès de l’Association française de comptabilité,
Poitiers, mai 2007.
FIOL M., MANGIN N., « Équipes de direction : pourquoi un tel déficit de coopération ? », dos-
sier L’Art du Management, Les Échos, 15 mai 2008.
FREUD S., Préface in Aichhorn, Jeunesse à l’abandon (1925), Privat, 1973.
221
LE MANAGEMENT COMMERCIAL

GEAY A. ; HAHN C., Former les managers, quand l’alternance s’invite au débat, Vuibert,
2008.
GEORGE J.M., « Emotions and Leadership : The Role of Emotional Intelligence », Human
Relations, 2000.
GOLEMAN D., Emotional Intelligence, Bantam Books, 1995. Traduction française : L’Intel-
ligence émotionnelle, Robert Laffont, 1997.
Guide 2006, numéro spécial, Action Commerciale, 2006.
ICSV-CNAM, « 1956-2006 : cinquante ans de formation au commerce. Le cadre commer-
cial existe-t-il ? », CNAM, 2006.
KONING A.L., SANDLER D., « Le leadership en questions ? », enquête CCIP Advancia, 2009
(leadershipenquestions.tumblr.fr).
LANGUIRAND J., « L’avenir de l’homme, c’est la femme », in Par quatre chemins (adaptation
des textes tirés de la série radiophonique), Éditions de Mortagne, 1991.
LIKERT R., The Human Organization : Its Management and Value, McGraw-Hill, 1967.
MARCELLI D., Il est permis d’obéir, l’obéissance n’est pas la soumission, Albin Michel, 2009.
PICHAULT F., RORIVE B., ZUNE M., « TIC et métiers en émergence », Digitip, Lentic, Sessi,
2002.
ROUSSILLON S., « Les modèles d’accès aux postes de dirigeants », in BOURNOIS, F. ET ROUSSILLON
S., Préparer les dirigeants de demain, Éd. d’Organisation, Paris, 1998.
SIMONS R., Levers of Control : How Managers Use Innovative Control Systems to Drive
Strategic Renewal, Harvard Business School Press, 1995.
ZALEZNIK A., « Leaders and Managers : Are They Different ? », Harvard Business Review,
1977. Cet article a été republié dans la même revue en 1986, 1992 et 2004.

Chapitre 2 – L’élaboration de la stratégie commerciale et sa mise


en œuvre
BRUNET A., « Le défi des marques sur le marché de l’eau en Auvergne », mémoire pour le
master 2 direction commerciale de l’IAE de Lyon, 2005.
CHAULLAC (DE) I., « Bâtir une force de vente à géométrie variable » Action Commerciale –
01/02/2009.
CHRISTENSEN R., ANDREWS R., ET GUTH D., Business Policy, Irwin, Illinois, Homewood,
1965.
DABLAIN S., « Comment accompagner la réussite d’une entreprise sur un nouveau métier
grâce à sa force de vente « promotion et prescription » ? », Mémoire pour le master 2
direction commerciale en FC, IAE de Lyon, 2009.
DARMON R. Y., « Optimal Salesforce Quota Plans Under Salesperson Job Equity
Constraints », Canadian Journal of Administrative Sciences, Jun 2001, vol. 18, n° 2,
pp. 87-100.
DESREUMAUX A., LECOCQ X., ET WARNIER V., Stratégie, Pearson Education, 2006.

222
Bibliographie

DURET O., « Redéploiement des fonctions commerciales et de production en s’appuyant sur


la réorganisation. Cas de la société Astridum », Mémoire pour le master 2 direction
commerciale en FC, IAE de Lyon, 2008.
KOTLER PH., KELLER K.L., MANCEAU D., ET DUBOIS B., Marketing Management, 13e éd.,
Pearson Education, 2009.
LEROUX E., PERETTI J. M., « L’externalisation des ressources humaines des forces de vente »,
Management et avenir, 2007.
MARTEAU F., « Définition d’une stratégie marketing pour le lancement d’un concept de res-
tauration », mémoire pour le master 2 direction commerciale, IAE de Lyon, 2009.
PARDO C., Responsable comptes clés [Key Account Manager], Dunod, 2004.
RABAUD A. F., « Convention commerciale : Les ingrédients d’un cocktail réussi », Action
commerciale, 1er mai 2007.
ROUZIÈS D., « Determinants of Pay Levels and Structures in Sales Organizations », Journal
of Marketing, novembre 2009, vol. 73, n° 6, pp. 92-104 (en coll. avec A. T. Coughlan,
E. Anderson, D. Iacobucci).
ROUZIÈS D., « La rémunération des vendeurs » in Encyclopédie de la vente, A. Bloch,
A. Macquin (Eds), Economica, 2001.

Chapitre 3 – Le pilotage de l’activité commerciale


BESSON M., LÖNING MENDOZA, « Directeurs commerciaux sous pression : quels objectifs et
quelle évaluation pour l’organisation commerciale ? » Revue Management et Avenir,
mars 2010.
CAPPELLETTI L., « Vers un contrôle de gestion intégré à la fonction commerciale : cas d’ex-
périmentation », Management et Avenir, juin 2009.
DARMON R., Pilotage dynamique de la force de vente – Une nouvelle approche pour conci-
lier impératifs stratégiques et moyens opérationnels, éd. Village mondial, Paris, 2001.
KAPLAN R., NORTON D., Comment utiliser le tableau de bord prospectif, Éditions d’Organi-
sation, Paris, 2001.
INGRAM T. N, LA FORGE R. W, AVILA R. A, SCHWEPKER C. H., ET WILLIAM M. R., Sale Mana-
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

gement : Analysis and Decision Making, 4e éd., Fort Worth, Harcourt, 2001.
MAHÉ J., « Pilotage, tableaux de bord et indicateurs au service du management de la perfor-
mance commerciale – Cas d’expérimentation », Mémoire pour le master 2 direction
commerciale de l’IAE de Lyon, 2006.
NARO G., « Les indicateurs sociaux : du contrôle de gestion aux développements récents du
pilotage et du reporting », http://eduscol.education.fr, 2006.
POUJOL F., FOURNIER, CH., « Caractéristique d’un challenge de vente et adhésion des
commerciaux : quelques recommandations », Décisions Marketing, 2007.
RABAUD A.-F., « Rémunération variable : un outil de motivation au service de votre straté-
gie », Action Commerciale – 1er décembre 2008.
RABAUD A.F., « Pages Jaunes fait décoller ses télévendeurs » Action Commerciale
– 1er décembre 2007 – A.-F. R.

223
LE MANAGEMENT COMMERCIAL

SAVALL H., ZARDET V., Maîtriser les coûts et les performances cachés, 4e éd., Economica,
2007.
TERMIGNON (DE) L., « Construire la performance commerciale avec des hommes et des
femmes », Actes des IIIe Assises de la vente, Lyon, 19 juin 2003.
ZEYL A., « Performances des vendeurs et styles de vente attendus », Actes des IIIe Assises de la
vente, « La performance commerciale, entre autonomie et contrôle », Lyon, 19 juin 2003.

Chapitre 4 – L’animation des forces de vente


ANDERSON E., OLIVER R. L., « Perspectives on Behavior-Based Versus Outcome-Based
Salesforce Control Systems », Journal of Marketing, Vol. 51, n° 4, pp. 76-88, 1987.
BARTH I., « Négociation et manipulation : une relation ambivalente. Cas d’expérimentation
dans des situations de management commercial », Deuxième biennale de la négociation,
Negocia, Paris, 17 et 18 novembre 2005.
BARTH I., BIARDEAU S., « Les représentations des métiers de la vente chez les étudiants : dans
quelle mesure ? Confrontation d’une revue de la littérature et d’une étude exploratoire »,
XVIIIe Congrès international de l’AFM, Lille, 23 et 24 mai 2002.
BARTH I., FALCOZ C., Le Management de la diversité – Enjeux, fondements et pratiques,
Editions L’Harmattan, 2007.
BARTH I., RIVE J., « La motivation : un concept jetable ? Réflexions pour une proposition de
réingénierie » avec Jérôme Rive, Colloque AGRH ANDCP 20, 21, 22 novembre 2003,
Grenoble.
BORGI S., « Satisfaction à l’égard de la rémunération et intention de départ volontaire chez
les commerciaux », Actes Congrès Association française du marketing, Montréal, 2000.
CAMPBELL D., PRITCHARD R., « Motivation Theory in Industrial and Organizational
Psychology » In M. D. DUNNETTE (Ed.), Handbook of Industrial and Organizational
Psychology. pp. 63-130. Chicago : Rand McNally, 1976.
CARLSON D., PERREWE P., « The Role of Social Support in Stressor-Strain Relationship : an
Examination of Work-Family Conflict », Journal of Management, vol. 25 n°4, pp. 513-
540, 1999.
COMMEIRAS N., FOURNIER C., « Critical Evaluation of The OCQ : Results of An Analysis of
The Sales Force, The Journal of Personal Selling and Sales Management, vol. 21, n° 3,
pp. 239-245, 2001.
EISENHARDT K.M., « Control : Organizational and Economic Approaches ». Management
Science, 31 : pp. 134-149, 1985.
INIZAN J., « Évaluation du coaching pour la gestion de la motivation et de la performance des
commerciaux », Working paper, 2003.
JAWORSKI B.J., « Toward a Theory of Marketing Control : Environmental Context, Control
Types, and Consequences », Journal of Marketing, 52, pp. 23-29, juillet 1988.
JOULE R.V., BEAUVOIS J.-L., La Soumission librement consentie, PUF, 1998.
LOCKE E.A., ET LATHAM G.P., Goal Setting, A Motivational Technique That Works!
Englewood Cliffs, N. J. Prentice-Hall, 1984.

224
Bibliographie

LODALET KEJNER, « The Definition and Measurement of Job Involvement », Journal of


Applied Psychology, 49, pp. 24-33, février 1965.
MOGUET M. F., « Les stratégies d’influence verbale des managers des ventes face à l’échec
d’un vendeur : proposition d’une échelle de mesure », AFM, Aix-les-Bains, juin 2007.
MORRIS M.H., LAFORGE R.W. ET ALLEN J.A., « Salesperson Failure : Definition, Determinants,
and Outcomes », Journal of Personal Selling and Sales Management, vol. 14, n° 1,
pp. 1-15, 1994.
OUCHI W.G., « Markets, Bureaucracies, and Clans », Administrative Science Quarterly, 25,
1980, pp. 129-141.
PEROTTO F., « Les déterminants de la performance du vendeur en situation de plateau de car-
rière », in SAVALL H., BARTH I., Actes des VIIe Assises de la vente, Lyon, 2008.
PORTER, STEERS, MOWDAYET BOULIAN, « Organizational Commitment, Job Satisfaction and
Turnover Among Psychiatric Technicians », Journal of Applied Psychology, 59, octobre
1974, pp. 603-609.
REGNAULT G., Les Mal-Aimés en entreprise : jeunes et seniors, L’Harmattan, 2009.
SCHILLIO F., « Le recrutement des commerciaux, enjeu stratégique pour l’entreprise », Actes
de la Journée de la recherche sur la vente, Montpellier, 2004.
WALKER O. C. JR, CHURCHILL G.A., FORD N. M., « Motivation and Performance in Industrial
Selling : Present Knowledge and Needed Research », Journal of Marketing Research,
vol. 14, 1977, p. 156.

Chapitre 5 – Les nouveaux enjeux de la relation client


BAILLIARD L., « Automatisation des forces de vente : comment fédérer son équipe commer-
ciale à un projet SFA », Action Commerciale – 1er septembre 2008.
BANCEL-CHARENSOL L., JOUGLEUX M., « Concilier les figures du client pour piloter la relation
de service. L’exemple de la relation professionnel de santé – CPAM », Actes du séminaire
Gérer le client déviant , animé par Suquet JP, Reims, Paris, 2009.
BARTH I, « L’apport de la recherche-intervention à la connaissance de la fonction commer-
ciale – Évaluation de recherches-interventions menées dans 9 entreprises », Actes,
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

XXe Congrès de l’AFM, Saint-Malo, 6 et 7 mai 2004.


BARTH I., « Le commerce peut-il être éthique ? Du passeur des mondes au commis voya-
geur », Actes des IVe Assises de la vente, Lyon, 169 pages, 1er avril 2004.
BARTH I., « Proposition pour un marketing interne-externe innovant, éléments théoriques et
de mise en œuvre. Cas d’expérimentation », Thèse pour le doctorat en sciences de gestion,
université Lumière Lyon 2, 1994.
BOUJENA O., MERUNKA D., « Les bénéfices de la SFA : une analyse comparative des perceptions
des managers et des vendeurs », 7th International Congress on Marketing Trends, Paris,
2006.
DUJARIER M-A., Le Travail du consommateur, Paris, La Découverte, 2008.
NEGRO Y., « Les compétences commerciales à l’épreuve de l’appropriation des technologies
modernes de l’information et de la communication. Le cas de la distribution en milieu
bancaire », Revue Direction et Gestion, 2001.
225
LE MANAGEMENT COMMERCIAL

POUPONNOT J., « Revlon Professional, le Web en renfort », Relation Client Magazine,


1er avril 2009.
SUQUET J.-B., « Les dynamiques professionnelles de la relation de service. Le cas de la lutte
contre la fraude sur le réseau de surface de la RATP », Thèse de doctorat en sociologie,
École polytechnique, CRG (Centre de recherche en gestion), juin 2008.
VANHEEMS R., « Pourquoi l’implantation d’un site Internet marchand par une enseigne
“Brick and mortar” invite à revisiter le rôle du vendeur en magasin », Actes des VIIe
Assises de la vente, Lyon , 31 janvier et 1er février 2008.

Chapitre 6 – Les mutations de la négociation commerciale


AGLIETTA M., ORLEAN A., La Monnaie souveraine, Odile Jacob, 1998.
AUDEBERT-LASROCHAS P., « Comment différencier négociation et vente », in La négociation,
Revue Française de Gestion, 2002.
AUDEBERT-LASROCHAS P., La Négociation : applications professionnelles, Editions d’organi-
sation, 1999.
BALZAC (DE) H., César Birotteau, Folio Classique, 1998.
BARTH I., « Proposition pour une épistémologie de la vente », Colloque épistémologie et
méthodologie en sciences de gestion, 2000.
BARTH I., « Le marchand, le barbare et l’étranger ou la rupture comme clé de compréhension
du désamour de la vente », Gestion 2000, 2002.
BARTH I., « De la rupture comme fondement de la vente au pilotage du contrat dans la rela-
tion marchande », document de synthèse pour l’habilitation à diriger les recherches, sou-
tenue à l’université Jean Moulin Lyon 3, le 6 octobre 2004.
BARTH I., BOBOT L., « Penser la négociation commerciale interpersonnelle » Revue Négo-
ciations, avril 2010.
BOBOT L., Le Négociateur stratège, Editions Choiseul, 2008.
BENVENISTE E., Le Vocabulaire des institutions indo-européennes, tome I économie, parenté,
société, Les éditions de minuit, 1969.
BERGADAÀ M., « Le paradoxe commercial des magasins caritatifs », Journées de recherche
en marketing de Bourgogne, 2008.
BONAFÉ-SCHMITT J.-P., La Médiation : une justice douce, Syros Alternatives, 1992.
CHOZAS M., JULLIEN C., ROUSSEL P., L’Entretien de vente, une méthode, des jeux de rôle,
Foucher, 1994.
COSTA N., « Le recours aux enchères inversées, un procédé contesté pour des prestations
humaines », Décision Achats, 1er septembre 2008.
DUPONT C., La Négociation : conduite, théorie, applications, Paris, Dalloz, 1982, 1990,
1994.
HALLEM Y., « Étude exploratoire de la valeur perçue par le client du tourisme médical. Cas
du tourisme esthétique en Tunisie », Working Paper, EM Strasbourg, 2010.

226
Bibliographie

LE BON J., « Contribution des vendeurs aux activités de veille marketing et commerciale :
d’un cadre conceptuel aux opportunités de recherche », Recherche et applications en mar-
keting, 1997.
NOTEBAERT J.F., ATTUEL-MENDES L., « La résistance du client au travail sur Internet : le cas
bancaire français », Management et Avenir, mars 2010.
RIVIÈRE R., « Les achats tendent vers la maturité », Décision Achats – 1er mars 2009.
STIMEC A., La Médiation en entreprise, Dunod, 2004 (2e édition 2007).
TRAVERSO V., « Interactions ordinaires dans les petits commerces : éléments pour une
comparaison interculturelle », Langage et Société, mars 2001.
VEYRAT J.-P., T.I.N.A., Un modèle de négociation en situation conflictuelle, Editions
Négorisk, 2008.
WATKINS M., Breakthrough Business Negotiation, Jossey-Bass, 2002.

Chapitre 7 – Manager dans le village planétaire


ADLER N., International Dimensions of Organizational Behavior. PWS – Kent Publishing
Company, pp. 313, 1991.
BARTH I., BOYER A., « L’obligation éthique du marketing ethnique » in Barth I., Falcoz C.,
Le Management de la diversité. Enjeux, fondements et pratiques, Editions L’Harmattan,
2007.
BENMESSAOUD F., http://www.cfo-news.com/You-Think-global-Act-local-!_a8829.html,
« You think global ? Act local ! », site : le cercle des financiers opérationnels, 2009.
BOBOT L., Le Négociateur stratège, Editions Choiseul, 2008.
DRUMMOND-GUITTEL V., Déjouez les pièges des relations interculturelles et devenez un
manager à l’international, Gerso Editions, 2008.
FALCOZ C., « Le management des équipes diverses », in Barth I., Falcoz C., Le Management
de la diversité. Enjeux, fondements et pratiques, Editions L’Harmattan, 2007.
FORTHOMME P., BEKHOUCHA S., « Mes équipes travaillent sur trois continents », Expansion
Management Review, juin 2009.
HALL E. T., Le Langage silencieux, Seuil, 1973.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

HALL E. T., Au-delà de la culture, Seuil, 1979.


HOFSTEDE G., Cultures and Organizations, Software of The Mind, Intercultural Cooperation
and Its Importance for Survival, McGrawHill, 1991.
IRIBARNE (D’) P., La Logique de l’honneur, éditions du Seuil, 1989.
TROMPENAARS F., HAMPDEN-TURNER C., RIDING, The Waves of Culture, Understanding
Diversity in Global Business, 2e edition. McGrawHill, 1998.

227
LE MANAGEMENT COMMERCIAL

Chapitre 8 – Le développement personnel du manager


commercial. Mieux se connaître pour être plus performant
BARTH I., « Souci de soi, souci de l’autre et quête d’insouciance », (coord.), Editions L’Har-
mattan, 2008.
BARTH I., BOBOT L., « La place de la solution bizarre dans la résolution des conflits par les
managers commerciaux. Exploration par la méthode des scénarios », Congrès AGRH,
Toulouse, septembre 2009.
BARTH I., « L’humour : quelle contribution à la performance de la relation ? Observation
participante de situations de relations commerciales et managériales », Congrès ACFAS,
Trois-Rivières, Québec, 7-11 mai 2007.
BARTH I., MULLER R., GRIMA F., « L’insouciance : espace de liberté nécessaire à la perfor-
mance ou danger pour l’organisation ? », Actes du Colloque «La question de la liberté et
les sciences de gestion», HEC Montréal, les 9 et 10 juin 2007.
BARTH I., RIVE J., « L’apport de la méthode des scénarios dans l’expression d’un conflit de
rôles chez les managers commerciaux », Journée de recherche du Cerog «Stress, burn out,
conflits de rôle», Aix-en-Provence, le 27 mai 2004.
BRASSIER P., « Le repositionnement du rôle de l’encadrement commercial intermédiaire –
Une approche par les représentations », Thèse de doctorat en sciences de gestion, univer-
sité d’Auvergne – Clermont-Ferrand, 2004.
FREUD S., Totem et Tabou, Petite Bibliothèque Payot, 1913.
FREUDENBERGER H. J., The Staff Burnout, Journal of Social Issues, 30, 1, pp. 159-165,
1974.
HOLLET HAUDEBERT S., « L’examen de récompenses intrinsèques comme déterminants à
l’épuisement professionnel et au départ de commerciaux : que faire lorsque la pyramide
hiérarchique se sature ? », Sous le regard du client, les clefs pour comprendre les muta-
tions de la fonction commerciale, Actes des VIIe Assises de la vente, Lyon, 2008.
HOLMES T., RAHE R., « Holmes-Rahe Social Readjustment Rating Scale », Journal of
Psychosomatic Research, vol. II, 1967.
KHAN R L., WOLFE D., QUINN R., SNOEK J. ET ROSENTHAL J D., Organizational Stress : Studies
in Role Conflict and Ambiguity, New York, John Willey and Sons Inc., 1964.
KATZ D., KAHN R.L., The Social Psychology of Organization, John Wiley and sons, 1966.
LAMBRETTE G., « La double contrainte L’influence des paradoxes de Bateson en sciences
humaines », Thérapie Familiale, 2008.
MASLACH C. ET JACKSON S. E., Maslach Burnout Inventory. Research Edition. Palo Alto, CA :
Consulting Psychologists Press, 1981.
MISSOUM G., Les Stratégies mentales de la réussite, Editions Retz, 1992.
PIERRE J., « S’investir corps et âme en entreprise. Contribution à une sociologie de la mobi-
lisation des cadres par le sport. », Thèse pour le doctorat en management du sport, soute-
nue à l’université de Strasbourg, 2009.
ST-ONGE S., RENAUD S., GUÉRIN G., CAUSSIGNAC E., « Vérification d’un modèle structurel à
l’égard du conflit travail-famille », Relations industrielles, 2002.

228
Bibliographie

SELYE H., The Stress of Life (en français Le Stress de la vie, éd. Gallimard, 1re éd. en 1962,
2e éd. en 1975), 1956.
SIEGRIST J., Adverse Health Effects of High Effort/Low Reward Conditions, Journal of
Occupational Health Psychology, 1, pp. 27-41, 1996.
THÉVENET M., Management, une affaire de proximité, Editions d’Organisation, Paris, 2003.
THOMAS K. W., Conflict and Conflict Management, in Dunette M. D. & Hought L. M. (Eds)
Handbook of Industrial and Organizational Psychology. Chicago, Rand Mc Nally
(pp. 889-935), 1995.
TOUZARD H., La Médiation et la résolution des conflits, Paris, Presses Universitaires de
France, 1977.
WATZLAWICK P., WEAKLAND J. & R. FISCH, Changements – Paradoxes et psychothérapie,
Seuil, Points Essais, 1975.

Chapitre 9 – Le manager commercial face aux défis de la


responsabilité sociale de l’entreprise (RSE)
AMADIEU J.-F., Le Poids des apparences, beauté, amour et gloire, Ed. Odile Jacob, 2002.
BARTH I., « Le mythe d’Hermès ou les contradictions éthiques de la vente » sous la direction
du professeur André Boyer, in L’Impossible éthique des entreprises, Editions d’Organisa-
tion, 2002.
BARTH I., « La diversité à l’épreuve de l’interface organisation/marché : Cas des forces de
vente et de leur management », Les IIe Rencontres internationales de la diversité, Corte,
5, 6 et 7 octobre 2006.
BARTH I., FALCOZ C. (COORD.), Nouvelles perspectives en management de la diversité, EMS,
coll. « Sciences de gestion en liberté », 2010.
BARTH I., FALCOZ C., Le Management de la diversité : fondements, enjeux, pratiques,
(coord.), Ed. L’Harmattan, 2007.
BOWEN H., Social Responsibilities of The Businessman, Harper and Row, New York,
1953.
CANTO-SPERBER M., Dictionnaire d’éthique et de philosophie morale, PUF, 2001.
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

CAPRON M., QUAIREL-LANOIZELÉE F., La Responsabilité sociale d’entreprise, La Découverte,


2007.
EVEN GRANBOULEN G., Éthique et économie, quelle morale pour l’entreprise et le monde des
affaires ?, L’Harmattan, Paris, 1998.
LAVORATA L., « Intégrer l’éthique dans l’entreprise, un moyen d’impliquer les commerciaux
et de les dissuader de la quitter », Décisions Marketing, 2009.
NILLÈS J.-J., « L’éthique comme outil de management des forces de vente, une application à
la vente directe », thèse pour le doctorat en sciences de gestion, université de Savoie,
1998.
PLATON, Œuvres complètes, Gallimard, 1950.

229
LE MANAGEMENT COMMERCIAL

POUJOL F., « Le rôle des comportements relationnels des commerciaux dans la GRC » in
« Regard prospectif sur les métiers commerciaux – Du vendeur ambassadeur au core sel-
ler » Management et Avenir, juin 2009.
SAXE R., WEITZ B., « The SOCO Scale : A Measure of Customer Orientation of Salespeople
», Journal of Marketing Research, 19, pp. 343-351, 1982.
VICTOR B., CULLEN J., The Organizational Bases of Ethical Work Climates, Administrative
Science Quarterly, 33, 1, pp. 101-125, 1988.
WEBER M., L’Éthique protestante et l’esprit du capitalisme, Press Pocket collection Agora,
Paris, 1993.

230
Index

A Commerce solidaire 205


Commerciaux
Acheteurs 146 classement 70
Animateur de communauté 111 Compétences 12
Avantage en nature 75 Comptes clefs
responsable 58
Conclusion 141
B Concours 72
Confiance en soi 85
Balanced Scorecard 76 Conflit 193
Budget résolution 194
processus 67 conflits éthiques 208
contact 139
Contrat de travail 71
C Contrôle
par les comportements 88
Cannibalisation 109 par les résultats 88
Capital social 189 CRM
Carrière (Customer Relationship Management) 106
gestion 90
« plateau de carrière » 90
Category Manager 57 D
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Centre multicanal
directeur 111 DAS
Chaîne de la valeur commerciale 126 (domaine d'activités stratégiques) 34, 35
Challenge 72 Découverte 140
Challenges 73 Délocalisation 151
Charge commerciale 126 Départ 102
Click and Mortar 112 Désengagement 90
Client Développement durable 204
on line 110 Dissonance éthique 208
Climat éthique 211 Distance 151
Coach 99 Distance hiérarchique 160
Coaching 182 Double contrainte 177
Collectivisme 160
commerce équitable 202
commerce international
métiers 156
231
LE MANAGEMENT COMMERCIAL

E Intégration 92, 97
Intelligence
Éditeur 118 émotionnelle 23, 25
Enchère inversées 147 Internationalisation 151
Engagement 85, 93 ISO 26000 200
Équipe
interculturelle 166
Éthique 198 J
Export
chef de produit 158 Jeu 72
chef de zone 157 Jeunes entrants 89, 92
directeur commercial 156
Exportations 152
L

F Leader 13
Logique d'affaires 9
Famille 188 Logique professionnelle 10
Femmes 8 Loyauté 103
Fonction achat 144
Fonction commerciale 8
Force de vente M
animation 83
calibrage 48 Management
Formation 25, 97 autoritaire 14
Forumeur 111 consultatif 15
latéral 18
participatif 15
G Manager
intermédiaire 17
Gestionnaire 14 Marketing
GRC ethnique 171
(gestion de la relation client) 105, 108 interculturel 171
M-commerce 114
Médiation commerciale 149
H Métiers 7
Mission
Home office 152 définition 52
Honneurs 75 Modérateur 111
Horizontale Motivation 84
expertise 127
Humour 195
N

I Négociation 129
de crise 148
Implication 93 indienne 163
Incertitude 160 interculturelle 162
Indicateurs commerciaux 76 multipartite 147
Indirectement commerciaux 125 saoudienne 163
Individualisme 160 Négociation commerciale 133
Insouciance
quête 185

232
Index

O S
Objection 141 salaire
fixe 69
variable 69
P Salarié
attentes 89
PAC Sanction 102
(plan d'action commerciale) 40 Secteur 48, 49
Parité 8 équilibre 50
Performance 87 Senior 91
Personne au contact 125 SFA
Pestel (Sales Force Automation) 106, 115
modèle 32 Situation 16
Peurs 166 Soft law 199
Pilotage 59 Soft skill 20
outils 76 Sport 184
Portefeuille clients 48 Statut 162
Porter Stéréotypes 165
modèle de 33 Stratégie 30
préparation 135, 138 commerciale 29, 37
Prime exceptionnelle 74 démarche stratégique 32
PRM Stress 178
(Prospect Relationship Management) 107 Supply Chain 108
Projet Support familial 187
professionnel 83
Proposition 140
prospection 136 T
Psychanalyse 183
Tactiques 142
Téléconseiller 110
R Traçabilité 117
Triade produit-canal-marché 112
Reconnaissance 89
Recrutement 92
Relation client U
directeur 111
gestion 105 Usager 122
multicanal 106
Représentations 93
© Dunod. La photocopie non autorisée est un délit.

Réseaux 189 V
Réseaux sociaux 127, 191
Réunion 191 VAE
Rôle 177 (validation des acquis de l'expérience) 26, 27
RSE VAP
(responsabilité sociale de l'entreprise) 197 (validation des acquis professionnels) 26
Rupture 133 Vente
multicanal 108
VRIO
modèle 36

233

Vous aimerez peut-être aussi