LA PIERRE CUBIQUE À POINTE RESTITUÉE DANS SA FORCE

SYMBOLIQUE

Irène Mainguy

Grand Orient de France | « La chaîne d'union »

2010/2 N° 52 | pages 10 à 11
ISSN 0292-8000
DOI 10.3917/cdu.052.0010
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-la-chaine-d-union-2010-2-page-10.htm
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 Matière à Débats
expressifs, chacun à sa façon, de la quête de dépasse-
ment humain. Ainsi côtoie-t-on, au fil des pages, les
grands noms de la science contemporaine, les grands
philosophes, les grands religieux. Edgar Morin y avoi-
sine Confucius ou Maître Eckart, Kant y dialogue avec
Bachelard ou Comte-Sponville.
Le vrai maçon s’y révèle le contraire d’un homme
de chapelle. Il est un homme de son temps, attentif aux
recherches, aux découvertes et aux avancées de la pen-
sée humaine. A leur contact, il éprouve, exerce et vivifie
sa propre démarche, la démarche initiatique, qu’il si-
tue sur un autre plan et qui, à ce titre, ne saurait être
contradictoire avec les trois premières.
Comment expliquer cette compatibilité ? C’est
le mérite de Pierre Vajda de répondre à cette question
de façon éclairante. S’il y a compatibilité possible de
la tradition et du progrès dans la démarche initiatique,
c’est que celle-ci ne cherche pas à promouvoir des
contenus de savoir mais qu’elle vise, avant tout, à nous
faire partager une méthode susceptible de nous aider
dans la construction de nous-mêmes.
10 ●
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La pierre cubique
à pointe restituée
dans sa force
symbolique
par Irène Mainguy
La Pierre cubique à pointe, synthèse
de la Connaissance
par Jeanne Leroy
Maison de Vie éd., 2010, 128 p., 10 u
C
omment avons-nous pu délaisser ce
symbole majeur du cheminement maçonnique,
pourtant présent dans tous les ateliers ?
Le sujet de cette étude est fondamental, et il faut
être reconnaissant à l’auteur, Jeanne Leroy, de rendre
toute sa place à ce symbole dans la tradition maçon-
LA CHAÎNE D’UNION n°52 ● Avril 2010
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La tradition, outil nécessaire du progrès
La tradition, dès lors, devient un outil nécessaire
du progrès. Parallèlement, parce qu’elle ne se situe pas
sur le même registre qu’elles, la démarche initiatique
ne compromet aucune des autres démarches avec les-
quelles elle est amenée à dialoguer. Elle est tolérance,
dialogue et puissance d’ouverture. Elle est laïque.
D’où le lien fondamental de la méthode initiatique
et de la pensée symbolique mis en évidence par Pierre
Vajda. D’où aussi l’affection particulière qu’il a à cœur
de nous faire partager pour son Rite de prédilection.
Naturellement, nul n’est obligé de le suivre dans
cette voie. Mais force est de constater que les interpré-
tations qu’il développe pour rendre compte, par exem-
ple, du thème si controversé du GADLU, en lequel il voit
avant tout un « postulat d’essence initiatique », que
celles afférentes à la valeur accordée par le REAA au
référent biblique, ne sont pas sans cohérence voire sans
grandeur. En conséquence, un ouvrage stimulant, posi-
tif et optimiste.
n J.-P. V.
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nique, alors que, de nos jours, il est incompris, négligé,
voire ignoré ou même occulté.
En s’appuyant sur l’iconographie et les textes
du XVIIIe siècle, elle démontre brillamment comment
un symbole, par incompréhension, peut être perdu de
vue et voir ses cohérence et légitimité tomber dans les
oubliettes.
Oswald Wirth, responsable de cette mise à l’écart
La suppression du pyramidion sur la pierre cubi-
que remonte à Oswald Wirth qui ne comprit pas son uti-
lité : dans ses manuels, il mentionne une simple pierre
cubique sur les différents tableaux de loge.
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œuvre de
Marc Leonetti
Depuis 1894, date de la parution de son premier
manuel, cette méconnaissance a eu le temps de faire
école. La plupart des auteurs de symbolisme maçonni-
que se sont engouffrés dans la brèche, entérinant cette
incompréhension.
Un texte de 1809, Le Vrai Maçon, exhumé par
Jeanne Leroy, explique en note qu’à l’époque, il était
d’usage de désigner la pierre cubique à pointe par la
simple appellation de « pierre cubique ».
Le chef-d’œuvre du compagnon fini
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Celle-ci représenterait un cube surmonté d’une
pyramide à quatre faces, cette pierre cubique à pointe
étant le chef-d’œuvre que doit réaliser tout compagnon
fini, que ce soit au Rite Français ou au Rite Écossais
Ancien et Accepté.
De nombreuses illustrations de tableaux de loge
du XVIIIe reproduites par Jeanne Leroy témoignent des
représentations au nord de plusieurs pierres brutes et
au midi d’un nombre correspondant de pierres cubiques
à pointe, indiquant que chaque maçon en loge, sur les
colonnes, est une pierre cubique à pointe potentielle.
La pierre cubique à pointe fait partie, en franc-
maçonnerie, avec la pierre brute et la planche à tracer,
des bijoux dits « immobiles ». Quand on dit « passer de
la pierre brute à la pierre cubique à pointe », on résume
en deux symboles l’ensemble de l’itinéraire initiatique
où chacun est censé dégager sa personnalité vraie de
toutes les gangues d’apparences.
Jeanne Leroy passe en revue les différents as-
pects de ce symbole complexe : bétyle, omphalos et
pierre cubique à pointe ; la pierre cubique à pointe,
chef-d’œuvre du Compagnon fini ; la pyramide ou l’as-
cension de la montagne cosmique ; la pierre cubique à
pointe surmontée d’une hache ; ses rapports avec la
tétraktys.
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Matière à Débats
Pour les hauts grades, une pierre cubique
à pointe couverte des traces
de ceux qui cherchent la lumière
Il est aussi démontré que cette pierre cubique à pointe
synthétise toutes les connaissances des grades de Grands
Élus, de Chevaliers Rose-Croix à Chevalier Kadosh.
Union du quaternaire et du ternaire, la pierre cubique à
pointe symbolise l’achèvement et la réalisation abou-
tie de l’œuvre. Cette pierre, dans les hauts grades, est
représentée burinée, sculptée sur toutes ses faces,
proposant comme des hiéroglyphes un récapitulatif
détaillé des symboles et des mots sacrés et de passe
à chaque degré.
La pyramide est un symbole qui évoque toute
idée d’élévation et de montée graduelle. Le pyramidion
est l’image de l’ascension vers l’Absolu et l’Unité.
Elle ne peut s’ouvrir qu’au moyen
d’une hache – elle aussi symbolique
La pierre cubique à pointe renferme son secret.
Son ouverture n’est possible que par son sommet. La
hache qui y est fichée, semblable à un marteau taillant,
évoque la réalisation spirituelle à son apogée grâce à ● 11
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l’illumination initiatique, nous dit l’auteur. Elle a pour
but de faire jaillir la lumière enfermée au cœur de la
pierre.
Cette image de la montée vers la Transcendance
correspond aussi, sur un plan alchimique, à la recher-
che de la pierre philosophale.
L’auteur publie pour la première fois les rapports
méconnus de ce symbole avec le 30e degré, démontrant
bien son aspect synthétique et récapitulatif de l’ensem-
ble des grades.
Routine et mauvaise interprétation
peuvent tuer un symbole important
Elle constate fort justement qu’au XXe siècle,
par incompréhension de certains symboles, notamment
de cette pierre cubique à pointe, des transformations
arbitraires du rituel ont mis sous le boisseau une part
importante de la tradition maçonnique.
L’analyse approfondie de ce symbole a le grand
mérite de faire œuvre de restauration, et ce avec beau-
coup de clarté. Une démonstration convaincante qui
devrait être lue par tous les francs-maçons.
n I. M.
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