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Culture et Franc-maçonnerie

Entretien avec Alain Géraudelle, Propos recueillis par Bertrand Levergeois


Dans Humanisme 2007/4 (N° 279), pages 5 à 11
Éditions Grand Orient de France
ISSN 0018-7364
DOI 10.3917/huma.279.0005
© Grand Orient de France | Téléchargé le 21/02/2024 sur www.cairn.info (IP: 41.202.219.162)

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POSITIONS

CULTURE
ET FRANC-MAÇONNERIE
Entretien avec Alain GÉRAUDELLE
GRAND OFFICIER CHARGÉ
DE LA CULTURE, L’ÉDITION, LA PROSPECTIVE SOCIÉTALE

La nomination d’un nouveau responsable des


affaires culturelles au Grand Orient de France
offre toujours de nouvelles voies de réflexion.
Culture, franc-maçonnerie ? La question de leur
rapport a été posée à Alain Géraudelle qui livre
ici comment il voit cette union dans un souci
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d’ouverture. Et notamment pour Humanisme,
à d’autres cultures et à la prospective.
© DR

Humanisme : Quelles relations la franc-maçonnerie entretient-elle avec la


culture ?

Alain Géraudelle : Si elle veut améliorer à la fois l’homme et la société, la franc-


maçonnerie doit entretenir des relations étroites avec la culture, qui comprend
toutes les formes de pensée, scientifique ou autres, et de comportement.
La culture est le facteur d’humanisation, de socialisation et de progression de
l’humanité. Humanisation, puisqu’un être n’est humain que s’il a une culture, et
cela dès l’apparition de l’humanité. Le premier être qui élabora une culture
devint ipso facto un être humain. Socialisation, puisque ce sont les éléments
culturels qui unissent les membres d’un groupe et constituent une société.
Progression, puisque l’humanité ne progresse que par les idées, même dans les
domaines scientifiques et techniques, et que ces idées ont besoin pour se
concrétiser du support de la culture et pour se répandre du véhicule de la culture.
La franc-maçonnerie n’a trop souvent trouvé d’intérêt qu’à la culture, disons
pour faire simple, bourgeoise et élitaire. Cela est sans doute dû à son recrutement

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par cooptation. Le Grand Orient de France doit, s’il veut être en symbiose avec
les hommes et les femmes de son époque, s’intéresser à tous les aspects
contemporains de la culture, même à celle de l’underground.
La franc-maçonnerie a, d’autre part, trop pris en considération une forme de
culture centralisée et unificatrice de la nation. Le Grand Orient de France, s’il ne
veut pas être accusé de « parisianisme », doit se tourner vers les cultures régionales
et les langues régionales, qui en sont les supports. Le Grand Orient de France est
une fédération de rites, il doit être aussi une fédération de cultures. La revue
Humanisme doit donc aborder le problème du bilinguisme et se faire
régulièrement l’écho des manifestations culturelles organisées par nos loges.

Humanisme : Le Grand Orient de France dispose de plus en plus d’outils


culturels, à commencer par ses trois revues : Humanisme, La Chaîne d’Union et
Chroniques d’histoire maçonnique, auxquelles tu es d’ailleurs abonné depuis de
nombreuses années. Sur le plan maçonnique, quel regard portes-tu sur ce triple
engagement culturel de l’Obédience ?

Alain Géraudelle : Effectivement, il vient d’être question de la revue Humanisme.


Mais elle n’est pas notre seul outil culturel, puisque nous disposons de deux sortes
d’outils culturels, qui sont complémentaires. Les uns sont ponctuels, ce sont les
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colloques, les tenues blanches ouvertes ou fermées, les représentations théâtrales ou
autres. Les autres sont réguliers, ce sont les trois revues auxquelles tu fais allusion.
Ces trois revues recouvrent des domaines différents et balaient ainsi l’ensemble
du champ culturel. Par la qualité de leur présentation et de leurs contenus, elles
font honneur à notre Obédience.
Humanisme est notre revue d’extériorisation. Elle s’adresse autant aux profanes
qu’aux francs-maçons et répond aux préoccupations morales, sociales et
politiques, au sens noble du terme, de notre époque. Il est regrettable qu’elle ne
soit pas plus diffusée dans le grand public, ses seuls points de vente sont environ
une douzaine de librairies qui ont un rayon franc-maçonnerie.
La Chaîne d’Union occupe le terrain purement maçonnique, en particulier celui
du symbolisme, des rituels et des rites. Elle évoque aussi la mémoire de grandes
figures de la franc-maçonnerie et porte un regard maçonnique sur des
événements culturels actuels. Pourquoi ne pas diffuser plus largement cette revue
en la réservant cette fois-ci aux rayons franc-maçonnerie des librairies ? Ces
rayons sont remplis d’ouvrages, qui en révèlent beaucoup plus sur la franc-
maçonnerie.
Et pourquoi ne pas en faire autant pour la revue Chroniques d’Histoire
maçonnique, qui, bien que moins généraliste, est toujours d’un grand intérêt. Les
revues qui traitent de l’histoire attirent un nombre croissant de lecteurs. L’histoire
de la franc-maçonnerie fait partie de notre patrimoine historique.

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Mais, puisque nous parlons de l’histoire, revenons à Humanisme, qui est notre
« revue-phare ».
Il faudra veiller à ce qu’elle ne soit pas trop passéiste. Certes, le présent est en
partie le produit du passé, mais c’est l’avenir qui nous intéresse et il est plus le
produit du présent que d’un passé la plupart du temps révolu. Il faudrait donc
surtout se préoccuper des problèmes d’aujourd’hui, ceux que pose la bioéthique,
par exemple, et envisager ceux de demain, ceux qui concernent notamment le
développement durable. Rappeler le passé, c’est bien, mais percevoir le présent et
imaginer l’avenir, c’est encore mieux. Bref, moins d’histoire et plus de
prospective.
D’autre part, il est bon qu’une place soit accordée aux travaux des loges. La
publication des travaux qui méritent souvent d’être connus, la sélection en étant
faite par le comité de rédaction, donne à Humanisme un aspect interactif et en
fait vraiment la revue du Grand Orient de France.
Toutes ces décisions sont à examiner par le Comité de rédaction.

Humanisme : Peut-on parler d’une culture spécifiquement maçonnique ?

Alain Géraudelle : Cette question appelle une double réponse.


Comme tout groupe humain, la franc-maçonnerie a une culture qui lui est
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spécifique, caractérisée par la disposition et la décoration de ses Temples, par son
symbolisme, par ses rites et ses rituels et par un vocabulaire où certains mots ont
une connotation particulière. Par là, la franc-maçonnerie participe à la vie
culturelle de notre pays et nombreux sont nos concitoyens qui visitent son musée
ou les Temples lors de la Nuit des Musées. Cela est même allé jusqu’à la diffusion
télévisée d’une Tenue.
Mais la culture maçonnique a un aspect plus subtil et plus indéfinissable. Nous
pourrions tenter de le définir en nous demandant ce qui manquerait à notre
culture si la franc-maçonnerie n’existait pas, et surtout la franc-maçonnerie dite
adogmatique, qui a coulé des idées neuves dans un moule traditionnel.
Il manquerait à notre culture l’expansion d’une spiritualité laïque, qui répond à
un besoin de l’être humain, cet « animal métaphysique » pour reprendre la
définition de Schopenhauer, le besoin que pourraient satisfaire les religions, si
elles n’enfermaient pas l’absolu et l’infini dans les limites arbitraires de leurs
dogmes.
Il manquerait aussi à notre culture une forme de pensée rationnelle, qui n’est pas
pour autant rationaliste, puisqu’elle est symbolique.
Il manquerait aussi à notre culture, qui, de plus en plus scientifique et technique,
s’appuie sur des certitudes du moment, cette recherche perpétuelle et personnelle
d’une vérité, une recherche revigorante et non désespérante, qui donne un sens
au monde, à la vie et à la mort.
Notre culture souffre de ces manques et tente de les combler par une forme de

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religiosité qui la rend intolérante. Inutile de rappeler ici la fameuse formule de


Malraux.

Humanisme : Certains dénoncent le déclin de la culture en France, du moins de


sa qualité et de son influence internationale. D’autres, au contraire, parlent de
son développement de plus en plus marchand, de son exploitation purement
quantitative. Quel est ton sentiment à cet égard ?

Alain Géraudelle : Certes, nous avons tous tendance à estimer que tout était
mieux dans le passé. Mais l’on peut parler de déclin de la culture d’abord et
surtout parce qu’elle n’est plus vécue spontanément ; elle est filtrée et diffusée par
des intermédiaires, tout comme les produits de la nature, ceux de l’agriculture ou
de la pêche. Et cela concerne à la fois la culture élitaire et la culture populaire.
Ses supports techniques et financiers sont tels que la culture élitaire
contemporaine est dépendante des galeristes, des maisons de disques, des
distributeurs de films, de la privatisation des musées, des radios, des chaînes de
télévision et des théâtres. Elle dépend de plus en plus de puissances d’argent, qui,
et c’est normal, pensent d’abord au profit. Les mécènes sont de plus en plus rares
et pensent surtout à la publicité que leur fait leur mécénat. L’État devrait être un
mécène, mais il n’est pas bien riche et la culture passe après d’autres priorités. Les
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quelques théâtres subventionnés ne le seront bientôt plus ou devront pour
continuer à l’être, abandonner tout ce qui est d’avant-garde et de peu de profit.
Nous allons sans doute vers la privatisation de fait des musées. Cette culture
élitaire est amenée à devoir « rester dans les clous » pour continuer à exister.
La culture populaire, essentiellement régionale, est victime du jacobinisme et de
l’industrie touristique. Le jacobinisme fait que les cultures régionales sont
souvent considérées comme inférieures ou comme les fers de lances des
autonomismes, même s’ils n’expriment que de vagues velléités. L’industrie
touristique réduit les manifestations culturelles traditionnelles à des
manifestations folkloriques sans âme.
En Allemagne, qui est une fédération de Länder, c’est-à-dire de Régions, la
culture populaire régionale coexiste avec une culture élitaire régionale, et l’une et
l’autre sont également considérées et financièrement aidées. L’enseignement
artistique est largement dispensé dans les établissements scolaires et les familles,
même modestes, le complètent souvent.
L’accent doit être mis à la fois sur l’excellence et sur l’aspect pédagogique. Le
Grand Orient de France doit participer à cet effort, même si cela a un coût et si
les résultats ne sont pas quantitativement perceptibles.

Humanisme : En quoi des revues et des ouvrages peuvent-ils encore contribuer au


développement culturel, y compris du point de vue maçonnique, dans un monde
de plus en plus lié à des techniques non imprimées ?

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Alain Géraudelle : Pour réaliser ce que nous venons d’évoquer, deux outils sont
à notre disposition, l’imprimé et l’audiovisuel. La place qu’occupe le second est,
à notre époque, de plus en plus large, au point que l’UNESCO a institué, à partir
de cette année 2007 une « Journée mondiale du patrimoine audiovisuel ». Nous
utilisons de plus en plus les techniques modernes de diffusion, la vidéo, pour, par
exemple, faire connaître les discours du Grand Maître ou permettre aux
Conseillers de l’Ordre d’expliquer quel est leur secteur de responsabilité. Nous
utilisons aussi le CD pour, par exemple, envoyer dans les loges le règlement
général ou les comptes-rendus des Convents.
Cependant la place de l’imprimé reste importante, aussi bien dans le monde
profane qu’au Grand Orient de France.
Chaque année, les libraires proposent un nombre toujours croissant de livres
nouvellement édités ou réédités ; chaque semaine, chaque mois, les kiosques
regorgent de revues qui couvrent tous les domaines de la culture, qu’elle soit
générale ou spécialisée. Et si tant de livres, de magazines et de revues sont
proposés à la vente, c’est qu’il y a des acheteurs.
Le Grand Orient de France accorde, lui aussi, une large place à l’imprimé. Outre
les trois revues dont il a été question au début de cet entretien, la collection
« Grand Orient » publie un certain nombre d’ouvrages, par exemple, en cette
année 2007, le tome III des Questions de santé publique et de bioéthique, les
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Travaux des Loges Questions à l’étude 2006, les actes du colloque Changer la
République ? Changer de République ?
Il maintient ainsi l’équilibre entre information et formation. Car il faut
distinguer information, éducation et culture. Il y a une différence entre faire part
et enseigner, entre l’objet du faire part et celui de l’enseignement. Les journaux
ont une rubrique qui nous informe des événements culturels du moment ; la
culture est dans le contact avec ces événements culturels et ce sont eux qui vont
nous former. Les trois revues du Grand Orient de France, les ouvrages cités plus
haut, doivent donner, s’ils répondent à leur objectif, cette culture humaniste
nécessaire à tout citoyen ou plus simplement à tout être humain.

Humanisme : Comment envisages-tu la relation entre l’imprimé maçonnique et


le vécu maçonnique ?

Alain Géraudelle : La franc-maçonnerie a cette particularité qu’elle ne s’enseigne


pas, mais qu’on l’apprend peu à peu en la vivant. Sinon, la lecture des très
nombreux ouvrages sur la Maçonnerie dispenserait de l’initiation et il suffirait de
continuer à les lire pour devenir un excellent franc-maçon. Là encore, la
différence est à faire entre information et formation.
C’est là aussi que se situent les limites de l’extériorisation. Peut-on extérioriser
une expérience intérieure ? Cependant, nous ne devons pas devenir un groupe
d’autistes fermés sur eux-mêmes et incapables de communiquer ce qu’ils vivent.

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Certes, à l’intérieur de la loge il y a communication et surtout « co-


développement », c’est en nous frottant les uns aux autres que nous polissons
notre pierre brute. Mais le problème est la communication avec des frères
d’autres loges ; elle évite que le système de la cooptation à l’intérieur de la loge
n’y introduise que des sosies. C’est là que les revues du Grand Orient de France
doivent être un instrument d’extériorisation non seulement vers le monde
profane, mais aussi entre loges, en somme une sorte de bulletin de liaison.
Intranet est un outil d’information, non de formation. Même problème de
communication et de « codéveloppement » entre Obédiences. Peut-être faudrait-
il envisager une revue interobédientielle.
Certes, notre tradition donne la primeur à l’oral, mais, fluide et perpétuellement
changeant, le vécu maçonnique risque de se perdre, comme l’eau dans le sable,
s’il n’est pas recueilli dans l’imprimé et communiqué aux autres, initiés et
profanes. Intervient alors l’obstacle du secret maçonnique. Mais, à y regarder de
près, ce secret quel est-il ? Il est dans le vécu, il est d’abord dans le choc
émotionnel de l’initiation, cette étincelle qui peut enflammer toute une vie, il est
ensuite dans l‘égrégore, cette mystérieuse alchimie. Relevant souvent plus de
l’inconscient que du conscient, ce secret n’est pas transmissible par l’imprimé.
Certains profanes, qui ne trouvent pas dans les livres de réponses à leur
questionnement sur ce qu’est le fait d‘être franc-maçon, demandent parfois s’il ne
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leur serait pas possible d’assister à une Tenue. La transmutation du profane en un
initié ne se réalise d’ailleurs pas nécessairement : certains francs-maçons ont eu la
malchance d’avoir vécu une initiation ratée ou de vivre dans une loge où
l’égrégore n’existe pas ou plus. Même à ces francs-maçons-là, aucun imprimé
maçonnique ne pourra transmettre le secret.

Humanisme : Quels sont à tes yeux les critères d’une culture maçonnique de
qualité ? L’accessibilité, la diversité ?

Alain Géraudelle : La nécessité d’une culture maçonnique de qualité est évidente


et aucun des deux critères évoqués n’exclut l’autre. Humanisme prend très bien
en compte l’un et l’autre.
La revue est accessible à tous, francs-maçons ou non. Elle jette sur le monde un
regard maçonnique, imprégné de nos principes et de nos valeurs, mais un regard
qui n’est étranger à aucun « honnête homme », puisque nos principes et nos
valeurs ne sont pas notre bien exclusif. C’est ainsi que la culture maçonnique
trouve sa place dans le paysage culturel de notre époque et lui apporte quelque
chose de particulier et d’indispensable.
D’autre part, une culture n’est pas monolithique et, si elle veut en refléter ses
aspects divers, une revue d’extériorisation comme Humanisme ne doit pas non
plus être monolithique, même si la pierre est bien polie. L’idée de publier dans
chaque numéro un dossier, dont le thème est chaque fois différent, est très

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bonne. Ce dossier n’exclut cependant pas un certain nombre de rubriques que le


lecteur retrouve à chaque fois. Le dossier et les rubriques régulières donnent à
Humanisme à la fois sa consistance et sa diversité.

Humanisme : Toutes les Obédiences maçonniques n’ont pas le même souci de


s’extérioriser sur le plan culturel. L’extériorisation est-elle un devoir, une mission
ou une obligation ?

Alain Géraudelle : Pourquoi s’extérioriser ? Parce que nous devons répandre hors
du Temple les Lumières que nous avons acquises. C’est un devoir pour chaque
franc-maçon, et ce doit l’être aussi collectivement pour une Obédience, de faire
connaître nos valeurs et nos principes.
Nous ne sommes pas des missionnaires et nous ne pratiquons pas le prosélytisme,
mais nous avons l’obligation d’enrichir notre Chaîne d’Union de nombreux et
solides maillons. Et pour cela, il faut nous faire savoir qui sont les francs-maçons
et pourquoi la franc-maçonnerie existe.
Au nom de nos valeurs et de nos principes, nous devons dire ouvertement notre
indignation à propos d’événements où ils sont bafoués. À la barbarie, nous
devons opposer notre culture. C’est la grandeur de la franc-maçonnerie et du
Grand Orient de France d’être une de ces voix qui sont l’espoir quand tout est
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désespérance, une de ces voix qui sont l’honneur et la dignité de l’idée d’homme
quand les hommes sont dans le déshonneur et l’indignité, une de ces voix qui
donnent un sens au monde, à la vie et à la mort, quand le monde, la vie et la
mort semblent absurdes.

Propos recueillis par


Bertrand Levergeois

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