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Master de recherche : Droit Pénal et Sciences Criminelles

Module : le droit pénal comparé

Recherche sous le thème :

Les causes subjectives d’irresponsabilité pénale


(étude comparative)
Version rectifiée

Réalisé par : Soumis à l’appréciation de :

• Nadia BENRHENIA • M . ATMANI KHALID


• Zainab BOUBACHRA

Année universitaire : 2021-2022


Sommaire :

Introduction

Para 1 : les causes subjectives intérieures à l’individu

Section 1 : la minorité

Section 2 : l’aliénation mentale

Para 2 : les causes subjectives extérieures à l’individu

Section 1 : la contrainte

Section 2 : l’erreur de droit

Conclusion

3
Liste des abréviations :

Art. : Article ;

P. : Page ;

C.P.M. : Code Pénal Marocain ;

C.P.P. : Code de Procédure Pénale ;

C.P.F. : Code Pénal Français

4
Introduction
La responsabilité pénale est l'obligation de répondre juridiquement des infractions pénales
dans lesquelles on est impliqué (comme auteur, co-auteur ou complice). Cela implique la
possibilité d'être poursuivi pénalement et finalement condamné par la justice pénale.

« La responsabilité pénale désigne pour une personne le devoir d'assurer les conséquences
pénales de l'infraction à laquelle elle a participé. Si elle choisit de prendre part à la
commission d'un acte délictueux, elle doit répondre à cet acte »1 .

En effet, La responsabilité pénale suppose que soit commise une infraction pénale : doivent
être commis des faits que la loi ou la réglementation qualifient expressément d'infraction
pénale. Dans certains cas, la loi précise expressément que la simple tentative de commettre
une infraction pénale peut entraîner une condamnation pénale.

Ainsi l’imputabilité consiste à rattacher l’acte à son auteur .une fois que l’auteur a été
identifié , que sa culpabilité est établie en dehors d’un évènement de fait justificatif , il
convient de vérifier si les faits lui sont entièrement imputables c’est à dire que l’agent avait
une entière volonté non entravée et qu’il était conscient .Sa responsabilité pourra être
atténué ou écarté par des causes de non imputabilité qui sont personnelles et qui ne
sauraient être étendue aux complices et aux autres auteurs

De ce fait, Pour qu'il y ait infraction pénale et donc responsabilité pénale, il faut que deux
éléments soient réunis : l'élément matériel de l'infraction pénale (les actes qui la
constituent) et l'élément moral de l'infraction pénale (la conscience ou la volonté de
commettre une infraction pénale). Parfois l’élément moral fait défaut c’est ce qui
ressortent des deux articles réciproquement ci-dessous.

D’une part, l’article 122-1 du code pénal français dispose : « N'est pas pénalement
responsable la personne qui était atteinte, au moment des faits, d'un trouble psychique ou
neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes. »

D’autre part, L’article 132 du Code pénal marocain (CPM) pose la règle générale qui
constitue le principe fondamental en matière de la responsabilité pénale en disposant que :
« toute personne saine d’esprit et capable de discernement est personnellement
responsable : des infractions qu’elle commet; des crimes ou délits… »

A la lumière de ce qui précède, il ne suffit pas que l’acte matériel soit accompli et que son
auteur soit identifié pour qu’une infraction donnée soit sanctionnée. Dans ce cas, il faut
aussi que l’auteur soit responsable pénalement. Ainsi, pour asseoir une responsabilité
pénale qui il y ait une infraction pénale et que son auteur soit responsable pénalement qui

1 -M-C. Sordino , droit pénal général ,Ellipses p.108.

1
répond de ses actes délicieux en subissant une sanction pénale .or cette responsabilité se
voit atténuer ou écarter en présence des causes d’irresponsabilité pénale2 .

Les causes de non imputabilité sont des causes subjectives d'irresponsabilité pénale,
spécifiques à la personnalité du prévenu, touchent à l’élément moral des infractions. Par
conséquent, elles produisent un effet in personam. Ces causes vont faire obstacle à
l'imputabilité de l'infraction consommée à son auteur. Elles ne jouent qu'en faveur du
délinquant qui s'en prévaut et ne profitent pas aux autres protagonistes de l'infraction. A
l'inverse, les faits justificatifs sont rattachés à l'absence d'élément légal de l'infraction.
Certes, en raison de l'application in rem de la justification, le comportement devenu licite
n'entraine pas la responsabilité pénale de l'intéressé et devrait supprimer aussi sa
responsabilité civile et bénéficier à toutes les autres personnes poursuivies comme
complices ou coauteurs de l'infraction.

D’un point de vue historique nous nous attacherons donc, à retrouver dans un passé pas si
lointain, les éléments qui constitue la notion d’irresponsabilité pénale des malades mentaux
, trouve sa raison d’être dans Le droit romain qui ne punit en effet l’auteur d’un délit que s’il
dispose d’une capacité dolosive. Alors même que le concept général de non-imputabilité
demeure ignoré par le droit romain, l’absence de capacité dolosive suffit parfois à déclarer
l’agent irresponsable : en particulier s’il s’agit de fous (furiosi) ou d’impubères (impubes). À
partir du XIIe siècle, les enseignements des romanistes, des canonistes et des théologiens,
facilitèrent la prise en compte de l’élément intentionnel et de la notion d’imputabilité dans
l’appréciation du délit. S’agissant des fondements idéologiques de la responsabilité pénale,
les canonistes sont catégoriques : « L’imputabilité matérielle est nécessaire sans doute, mais
elle ne suffit pas. L’auteur doit être moralement responsable de l’acte ».3

De ce fait , notre sujet retrace plusieurs intérêts à savoir ,il nous permet de mieux connaître
les éléments nécessaires pour la mise en œuvre de responsabilité pénale et cerner les causes
d’irresponsabilités subjectives ainsi leur conditions ; d’appliquer une micro-comparaison
entre les deux systèmes juridiques à savoir ( français /marocain) .

De ce qui précède une délimitation est nécessaire, notre sujet ne prétend pas d’étudier
toutes les causes d’irresponsabilité pénales qui sont d’ordre subjectif et objectif.
Cependant, il se focalisera à expliciter davantage les causes subjectives d’irresponsabilité
pénale en droit français et droit marocain à savoir : les causes intérieures et extérieures à
l’individu.
D’où l’inévitable problématique : les causes subjectives d’irresponsabilités pénales quelles
différences existe- il en droit français et droit marocain ?

Dans le souci de répondre à cette problématique, notre travail traitera dans le premier
chapitre les causes subjectives d’irresponsabilité intérieures à l’individu, et un dans
chapitre les causes subjectives d’irresponsabilité extérieures à l’individu.

2il faut comprendre par là que la responsabilité va s'effacer, lorsque la conscience ou la volonté va faire défaut. Autrement
dit, l'absence de raison ou de liberté invite à repenser la question de l'imputabilité et le cas échéant à retenir des causes de
non-imputabilité.

3 Sophocle. Ajax. NRF, « Pléiade », 1967

2
Paragraphe 1 : Les causes subjectives intérieures à
l’individu

La personne qui a commis un acte dans des conditions telles que l'élément moral défini par
la loi paraît s'être manifesté en est responsable. Il y a cependant des hypothèses dans
lesquelles la responsabilité pénale est écartée. Contrairement aux faits justificatifs qui
suppriment l'infraction (elle perd objectivement son caractère délictueux), les causes de non
imputabilité (ou ce que la doctrine classique appelle les causes subjectives de non
responsabilité) agissent « in personam » et ne s'étendent pas aux participants à l'activité
délictuelle. Tout en étant criminel, l'acte n'est pas subjectivement imputable à son auteur.
Au regard donc de l'élément subjectif, l'acte est dépouillé de sa coloration pénale. Ainsi, au
moment de la violation de la loi pénale, il faut vérifier si l'agent jouissait d'une liberté et
d'une volonté capable de lui faire comprendre le sens et la portée et de son acte. C'est la
question/ fondamentale en droit pénal de l'imputabilité, laquelle parachève avec la
culpabilité le régime juridique de la responsabilité. L'imputabilité est donc la condition plus
générale de comprendre et de vouloir ou encore une « capacité de comprendre et de vouloir
». C'est encore la faculté du libre-arbitre qui constitue la clé de voûte du droit pénal
classique « Nullum crimen sine libertas »>. Les causes de non imputabilité se rapportent soit
à la capacité pénale¹ soit à l'exercice par l'agent de ses facultés. Dans ce chapitre nous
étudions la minorité (A) l’aliénation mentale (B) en droit français et en droit marocain .

Section 1: la minorité
A. En droit Français

Le principe de la responsabilité pénale du mineur repose sur sa capacité de discernement.


On considère qu'un mineur ne possède pas le même discernement qu'un majeur et de ce
fait ne se rend pas toujours bien compte de la gravité des actes qu'il commet. On lui
applique des mesures spéciales. Ainsi l'article 122-8 du C.P. dans sa nouvelle rédaction issue
de la loi du 09/09/2002 d'orientation et de programmation pour la justice dispose: "Les
mineurs capables de discernement sont pénalement responsables des crimes, délits et
contraventions dont ils ont été reconnus coupables, dans des conditions fixées par une loi
particulière qui détermine les mesures de protection, d'assistance, de surveillance et
d'éducation dont ils peuvent faire l'objet....." Il convient de déterminer si le mineur
délinquant était capable de comprendre la portée de son acte.

3
1. La responsabilité pénale du mineur

Le code pénal dans son article 122-8 entérine la jurisprudence de la cour de cassation (arrêt
Laboude du 13 décembre 1956 voir Annexe 1) « Qui exigeait que le mineur dont la
participation à l'acte matériel à lui reproché est établie, ait compris et voulu cet acte ; que
toute infraction, même non intentionnelle, suppose en effet que son auteur ait agi avec
intelligence et volonté ; qu'il suit de là que la décision de remise de l'enfant à sa famille n'est
pas légalement justifiée » .

Les mineurs capables de discernement sont pénalement responsables. Ainsi toute infraction
peut être imputée à tout mineur si le juge estime que l'acte résulte d'une volonté libre et
consciente. L'âge du mineur s'apprécie au jour où l'infraction est commise. Les nouvelles
dispositions, tant de l'article 2 de l'ordonnance du 2 février 1945 que de l'article 122-8 du
C.P. maintiennent les principes de primauté de l'action éducative et confirment le principe
de l'atténuation de la responsabilité pénale résultant de la minorité. l

a- les mineurs de moins de 10 ans :Seul l'enfant non capable de discernement est
pénalement irresponsable. Toutefois, le mineur de moins de 10 ans, même capable
de discernement, ne peut faire l'objet que de mesures éducatives.
b- Les mineurs de 10 à 13 ans :Le mineur capable de discernement est pénalement
responsable. Il peut faire l'objet de mesures éducatives comme l'admonestation.
Aucune peine ne peut être prononcée à son encontre. Néanmoins les juridictions
pour mineurs sont désormais autorisées à prononcer des sanctions éducatives à
l'encontre des mineurs à partir de 10 ans.
c- les mineurs de 13 à 18 ans :L'ordonnance du 2 février 1945 offre également au juge
la possibilité de prononcer une peine lorsque « les circonstances et la personnalité
du délinquant »
2. Les mesures applicables aux mineurs délinquants

a- Les mesures éducatives


Le juge des enfants peut imposer les mesures suivantes, énoncées à l'article 8 de
l'ordonnance de 1945 :

- la dispense de peine, s'il apparaît que le reclassement du mineur coupable est acquis, que
le dommage causé est réparé et que le trouble résultant de l'infraction a cessé ;

- l'admonestation ;
- la remise aux parents, au tuteur, à la personne qui a la garde du mineur ou à une personne
digne de confiance ;
- la mise sous protection judiciaire pour une durée n'excédant pas cinq ans ;

- le placement dans une institution ou un établissement, public ou privé, d'éducation ou de


formation professionnelle, dans un établissement médical ou médico-pédagogique, dans un
internat approprié ou, pour les mineurs de moins de treize ans, la remise au service de
l'assistance à l'enfance ;

- la liberté surveillée jusqu'à un âge qui ne peut excéder la majorité.

4
b- La médiation-réparation
Le mineur participe à la réparation du dommage qu'il a causé en effectuant une activité
d'aide ou de réparation au profit de la victime ou dans l'intérêt de la collectivité. Cette
mesure ne peut être ordonnée qu'avec l'accord de la victime, et peut être accompagnée
d'excuses adressées à la victime.
Les mineurs entre seize et dix-huit ans peuvent être soumis à l'obligation d'effectuer un
travail d'intérêt général " présentant un caractère formateur ou de nature à favoriser
l'insertion sociale ".
c- La peine d'emprisonnement
Les peines privatives de liberté prononcées à l'encontre de mineurs de plus de treize ans ne
peuvent être supérieures à la moitié de la peine encourue par un majeur pour la même
infraction.
Toutefois, en cas d'extrême gravité, la peine infligée à un mineur entre seize et dix-huit ans
peut être la même que celle infligée à un majeur.
Les mineurs effectuent leur peine dans des établissements spécialisés habilités à les
recevoir, ou dans des quartiers séparés des maisons d'arrêt.

3. Application de l'atténuation de responsabilité


Les mineurs de plus de 13 ans bénéficient d'une atténuation de responsabilité. Mais une
distinction est faite entre les mineurs de 13 à 16 ans et les mineurs de 16 à 18 ans.
a -Les mineurs de 13 à 16 ans :Les juridictions pour mineurs ne peuvent prononcer une
peine privative de liberté ou une peine d'amende supérieure à la moitié de la peine
encourue. Si la peine encourue est la réclusion perpétuelle, la peine prononcée sera de
20 ans de réclusion au maximum. L'amende prononcée ne peut en aucun cas excéder
7500 € Le juge doit motiver spécialement les peines d'emprisonnement ferme ou avec
sursis.

b -Les mineurs de 16 à 18 ans :Le tribunal pour enfants ou la cour d'assises des mineurs
peuvent écarter « l'excuse de minorité » (art. 20-2 ord. Du 02/02/1945), et le mineur
sera alors traité comme un majeur dans trois situations : personnalité du mineur ; en
raison des circonstances de commission de l'infraction et de la lorsqu'il y a atteinte
volontaire à la vie ou à l'intégrité physique ou psychique de la personne commise en état
de récidive légale ; en cas de dé de violences volontaires, de délit d'agression sexuelle ou
d'un délit commis avec la circonstance aggravante de violence commis en récidive légale.
L'atténuation de peine ne peut en principe être prononcée lorsque les infractions ci-
dessus énumérées ont été commises une nouvelle fois en état de récidive
légale.Toutefois, la cour d'assises des mineurs ou le tribunal pour enfants peuvent
décider de l'application de l'excuse de minorité 4.

4NOTA: La loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance autorise le procureur de la
République, avec l'accord des représentants légaux préalablement convoqués, à proposer au mineur des mesures
éducatives. Il s'agit de mesures alternatives aux poursuites ou de composition pénale pour les mineurs âgés d'au moins
13 ans, respectivement prévues par les articles 7-1 et 7-2 de l'ordonnance du 2 fevrier 1945

5
B- En droit Marocain

La minorité est une cause d’irresponsabilité totale ou partielle. La question de la minorité


constituée l’une des aspects les plus préoccupants et les plus complexes du visage de la
délinquance contemporaine des sociétés démocratiques. C’est pourquoi le traitement de
la délinquance des mineurs doit être spécifique et appelle l’adoption de solutions
spéciales, car l’avenir de la société dépend du traitement pénal de la jeunesse, c’est la
raison pour laquelle, les mineurs délinquants bénéficient aujourd’hui d’un régime
particulier : du droit pénal de fonds (leurs régime de responsabilité pénale est différent de
celui des adultes), et du droit pénal de forme (ils sont jugés par des juridictions
spécialisées qui appliquent des règles de procédure particulières).

De ce fait, le régime de la responsabilité des mineurs délinquants est dominé par deux
caractères : subjectif, organisé beaucoup plus en considération de la personne du
délinquant et de son état dangereux que de l’acte qu’il a commis. Et préventif où
l’infraction commise est relativement peu prise en considération, parce que ce qui
compte pour le mineur est moins ce qu’il a fait que ce qu’il pourrait faire encore, dans
l’avenir, si l’on n’y prend pas garde. Les mesures prises à son égard n’ont donc pas pour
but de le punir, mais de le rééduquer socialement.

Juridiquement, la minorité est une cause subjective d’irresponsabilité pénale ou


atténuation de celle ci. L’application du système dépend de l’âge du mineur, qui
s’apprécie au moment de la commission de l’acte incriminé.

Le " jeune délinquant " ou "mineur délinquant " est celui qui, au jour de la commission
de l'infraction, n'a pas encore atteint l'âge de la majorité pénale; fixé à 18 ans révolus. Le
code pénal marocain distingue entre deux catégories des mineurs ; la première catégorie
est celle du mineur de moins de 12ans non capable de discernement, la deuxième
catégorie relative au mineur de 12ans qui n’a pas atteint 18ans, capable de discernement.

1. L’irresponsabilité pénale du mineur de moins de 12 ans :

Une fois l’impunité établie, on s’attache à la personne qui a commis la faute pour
évaluer sa responsabilité pénale. Selon l’article 132 du Code Pénal, seules les personnes
saines d’esprit et capables de discernement sont personnellement responsables. Le code
pénal marocain pose comme condition à la responsabilité pénale la notion de
discernement, et en raison de la relation qui existe entre l’âge et le discernement, le
législateur a fixé l’âge d’engagement de la responsabilité pénale des mineurs (l’âge où le
mineur peut être capable de distinguer entre le bien et le mal), c’est-dire, la
responsabilité pénale est appréciée selon que la personne est pourvue de discernement
ou pas. En effet, le discernement constitue un des facteurs majeurs dans la
détermination de la responsabilité pénale de l'auteur de l'infraction punie par la loi. Le
discernement est la capacité à évaluer les conséquences de ses actes, de faire la part du
bien et du mal, de distinguer ce qui est permis de ce qui est interdit.

6
Le mineur de 12 ans (Art 138 al 1) ; est considéré comme irresponsable 5totalement par
défaut de discernement, c’est-à-dire, en raison de l’absence de capacité de discernement
qui lui permettre de distinguer entre le bien et le mal, sa responsabilité pénale ne peut
pas être engagée. Ainsi que l’article 458 du (C.P.P) stipule que « Est considéré
irresponsable pénalement le mineur de 12 ans ou moins en raison de l’absence de son
discernement ».

Selon les dispositions du livre 3 du (C.P.P) relatif aux règles spéciales aux mineurs, et
notamment l’article 459 alinéa 1, le jour où l’âge est pris en compte est le jour de la
commission de l’infraction, C’est-à-dire, c’est le discernement de l’auteur au moment des
faits, et non au moment du jugement.

A partir de tous ce qui précède, on déduit que, lorsqu’un mineur a commis une infraction,
l’autorité judiciaire doit en premier lieu se prononcer sur l’existence chez ce mineur d’un
discernement, et si le mineur n’est encore dépassé 12 ans au moment de la commission
de l’infraction est, en principe, pénalement irresponsable, parce qu’il est considéré
comme non discernant. Ainsi, on doit ajouter que ce n’est pas le même cas pour les autres
catégories des mineurs (le mineur de 12 ans et plus).

2. Le mineur de 12 ans qui n’a pas atteint 18 ans

Est pénalement considéré comme irresponsable partiellement en raison d’une


insuffisance de discernement, c’est-à-dire, il a un discernement non complet.

Lorsqu’ils sont capables de discernement, les mineurs peuvent se voir imputer les
infractions qu’ils commettent. Seule leur capacité à subir une peine et à en profiter est
réduite.

Selon l’article 139 du code pénal marocain, le mineur de 12 ans qui n’a pas atteint 18 ans
est, pénalement, considéré comme partiellement irresponsable en raison d’une
insuffisance de discernement. Donc, le mineur dans ce cas bénéficie de l’excuse de
minorité qui se caractérise par une diminution de peine ainsi que des mesures éducatives.
Il ne peut faire l’objet que des dispositions spéciales prévues pour les mineurs dans le
code de procédure pénale6. Ces dispositions se caractérisent par la primauté des mesures
éducatives à l’encontre des sanctions répressives qui ne peuvent être prononcées qu’en
cas d’exception.

En cas de contraventions, et conformément aux dispositions de l’article 468 alinéa 2 du


code de la procédure pénale marocain, le juge des mineurs prés le tribunal de première
instance peut se limiter soit à une admonestation du mineur soit prononcer une amande
prévue par le texte réprimant la contravention.

5 en France , la loi du 9 septembre 2002, dite « Perben »et qui a retouché en profondeur le droit pénal des
mineurs ,a abaissé l’âge à partir duquel le mineur peut faire l’objet des dispositions spécifiques .aussi des
mesures éducatives sont réservées aux mineurs de moins de 10 ans des lors qu’ils sont capables de
discernement .
6 le mineur est considéré comme étant en danger. C’Est la raison pour laquelle est affirmée cette primauté .au

plan international, les Etats ont tenté de renforcer la spécificité du mineur par des « règles de Beijing ».

7
Si les faits constituant un délit, et selon l’article 474 du code de procédure pénale
marocain, le juge des mineurs procède ou fait procéder à une enquête pour déterminer
les mesures qu’il faut prendre pour garantir la protection et la sauvegarde du mineur. Le
juge des mineur reçoit, par le moyen d’une enquête sociale, des renseignements sur la
situation matérielle et morale de la famille, sur les caractères et les antécédents du
mineur, sur son assiduité et sa conduite scolaire, sur son comportement professionnel,
sur ses camardes et sur les conditions dans lesquelles il a vécu et reçu son éducation.

En cas de crime, et si la chambre criminelle estime que les faits sont imputables au
mineur, elle peut prendre à son égard l’une ou plusieurs des mesures prévues à l’article
481 du code de procédure pénale. Elle peut compléter ces mesures ou les remplacer par
l’une des peines prévues à l’article 482. Toutefois, si la peine principale prévue pour
l’infraction est la peine de mort, la réclusion perpétuelle ou la réclusion à 30 ans, la
chambre substitue à cette sanction une peine de 10 à 15 ans de réclusion.

Section 2 :L’aliénation mentale


A-En droit Français

L’article 122-1 du code pénal français de 1992 regroupant, lui aussi, des états intermédiaires
qui, sans recouper la démence médicalement entendue, ont également un effet
d'irresponsabilité. Aux termes de cet article «n'est pas pénalement responsable la personne
qui était atteinte, au moment des faits, d'un trouble psychique ou neuro-psychique ayant
aboli son discernement ou le contrôle de ses actes ». Cet article, tout en tenant des
connaissances actuelles de la science, ne prend plus en considération la démence 7.Comme
c'était le cas pour l'article 64 de l'ancien code français qui indiquant « qu'il n'y avait ni crime
ni délit si l'auteur était en état de démence au moment des faits »8, l'article 122-1 prend en
considération le trouble psychique ou neuro-psychique.

On entend par le terme trouble psychique ou neuropsychique désigne toute forme


d'aliénation mentale enlevant à l'individu le contrôle de ses actes. Il peut s'agir d'une
affection de l'intelligence, aussi bien congénitale (imbécillité, idiotie) qu'acquise par l'effet
d'une maladie (démence précoce), d'une psychose telle que la schizophrénie ou bien encore
d'une folie spécialisée telle que folie de persécution. Le Code pénal indique que le trouble
mental doit exister au moment des faits.

De ce fait, l'article 122-1 al. 1 du CPF dispose: "N'est pas pénalement responsable la
personne qui était atteinte, au moment des faits, d'un trouble psychique ou neuropsychique
ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes". Selon les termes de l'article 122-1
l'irresponsabilité pénale découle donc de la perte du libre-arbitre. Toutes les formes de
troubles mentaux ayant une conséquence destructrice sur les facultés intellectuelles sont

7 Cette rédaction de l'ancien code pénal français comportait des lacunes: la notion de démence n'était pas précisée, la
contravention semblait exclue de son application et le texte disait que l'infraction n'existait pas, ce qui était en
contradiction avec les poursuites du complice. Voir Benoit CHABERT, Pierre- Olivier SUR, Droit pénal général, Dalloz, 2
édition, 1997, P.79.
8 - Le vocable de démence a un sens médical précis, celui d'une déchéance progressive et irréversible de la vie psychique.

Voir Jean Pradel, Droit pénal général, CUJAS, 8ème édition, T. I, 1992, P.465.

8
prises en compte. Peu importe l'origine du trouble : il peut être congénital, dû à un âge
avancé ou lié à un accident ou une maladie (déments, aliénés, débiles, épileptiques,
psychotiques tels les schizophrènes, paranoïaques..., névrosés). Parmi les maladies mentales
on cite trois catégories à titre d’exemples les suivantes :

1. La psychose : La psychose est une maladie mentale grave qui provoque des troubles
sévères tels que des pertes de contact avec la réalité, des bouffées délirantes (délire
soudain) ou des idées irrationnelles (pensées absurdes, déraisonnables). La personne
malade ne sait plus, par moments, ce qui est réel et ce qui ne l'est pas. Elle peut souffrir
d'hallucinations visuelles ou auditives. La psychose correspond à un trouble au niveau du
cerveau. La personne qui en souffre n'a plus les mêmes pensées et émotions. Elle change
de comportement. La maladie peut arriver d'un coup ou, au contraire, se développer
progressivement. Souvent, les désordres psychotiques perturbent la vie personnelle,
familiale et professionnelle du patient à un tel point, que l'hospitalisation de celui-ci
devient nécessaire, du fait que ses réactions deviennent dangereuses pour lui-même et
pour l'entourage. Il faut dire que dans sa vie relationnelle, dans ses propos et ses
sentiments, le psychotique reste incompris de son entourage. Elle existe certaines
maladies considérées comme une psychose à savoir :
- La schizophrénie: Appelée également démence précoce, puisqu'elle fait son
apparition en général entre 18 et 25 ans. La schizophrénie peut être définie
comme un état pathologique caractérisé par une déstructuration ou
dissociation de la personnalité, qui est responsable d'une perte de contact
avec le réel et d'une inadaptation progressive au milieu. Tous les symptômes
des psychoses se vérifient chez le schizophrène qui s'enferme dans un
univers hermétique incompréhensible et incommunicable, à côté des idées
délirantes et des hallucinations mal systématisées.
- La paranoïa: C'est un trouble du fonctionnement mental qui se manifeste
par une méfiance exagérée des autres, une sensation de menace
permanente et un sentiment de persécution qui touche plus souvent les
hommes que les femmes. La maladie est plus importante à partir de 40 ans.
Elle est également définie comme une psychose systématisé, hallucinatoire
et interprétatif.
2. Les psychopathies :
La personnalité psychopathique n'éprouve ni culpabilité, ni honte, ni remords. Il agit avec
une absence totale d'empathie envers son prochain et parfois même avec du mépris vis-à-
vis de celui ci. Ses relations sont souvent peu durables, mais peuvent s'étaler dans le temps
si le psychopathe y voit son intérêt. C'est un manipulateur qui aime tromper l'autre
souvent pour son propre plaisir ou pour son profit. Il ne reconnait pas la loi, la méprise et
gère sa vie par rapport à ce qu'il estime être sa propre loi. Il est incapable de s'amender et
rejette souvent la faute sur les autres et sur la société. Cette maladie fait naitre une forme
de délinquance appelée la délinquance chronique, ce dernier désigne des formes de
récidive pathologique où la violation de la loi pénale se fait à cause de l’impulsion
psychopathique.

9
3. Les perversions sexuelles :

Le terme de perversion sexuelle désigne une attirance ou pratique sexuelle qui diffère des
actes traditionnellement considérés comme « normaux » .il s’agit des pratiques érotiques
dont certaines personnes ont impérativement et même exclusivement besoin pour accéder
au plaisir sexuel. Les perversions sexuelles ne sont pas à confondre avec les infractions
sexuelles dans la mesure où l’infraction sexuelle est une notion pénale nécessitant
incrimination et sanction, alors que la perversion sexuelle relève du champ de la psychiatrie
et de la criminologie et ne tombe pas forcément sous le coup de la répression pénale.

Il est à noter que la qualification d’une pratique comme perverse et déviante, suppose
l’existence d’un modèle ou d’un standard de conduite qui est jugé par la société et la
conscience collective comme étant normal, plus la conscience collective s’attache à ce
standard de conduite, plus les actes qui s’y écartent seront stigmatisés et réprimés. Mais ces
derniers temps, on assiste dans les sociétés occidentales à de grandes manifestations de
tolérance à l’égard de certaines pratiques relevant des perversions sexuelles. Comme le
sadisme, homosexualité, la pédophilie.

1-Un trouble psychique ayant aboli le discernement ou le contrôle des actes

1.1 Conditions de l'irresponsabilité

l'article 122-1 dispose « N'est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte, au
moment des faits, d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement
ou le contrôle de ses actes. »
Le trouble psychique doit être contemporain de l'infraction. Si l'intéressé se trouvait dans un
intervalle lucide au moment de l'infraction, sa responsabilité sera retenue. La perte de
discernement doit être totale. On entend par discernement la faculté de comprendre la
portée de ses actes, la conscience de commettre un acte répréhensible. L'existence d'un
trouble mental doit être prouvée. La chambre de l'instruction ou la juridiction répressive va
donc ordonner une expertise psychiatrique. Les experts rendront un avis sur le point de
savoir si le prévenu était atteint d'un trouble mental au moment des faits, cet avis ne liant
pas le juge.

Dans cette perspective ,la censure l’arrêt de la chambre de l’instruction qui déclare
pénalement irresponsable un témoin assisté .

10
Application jurisprudentielle voir (Crim. 3 mars 2010, pourvoi n° 09-86.405).voir annexe 1

La censure de l'arrêt par lequel la chambre de l'instruction déclare qu'il existe des charges
suffisantes contre la personne d'avoir commis les faits qui lui sont reprochés et qui la déclare
irresponsable pénalement en raison d'un trouble psychique ou neuro-psychique ayant aboli
son discernement ou le contrôle de ses actes, ne peut être rendu qu'à l'encontre d'une
personne qui a été, au préalable, mise en examen, ce qui n'est pas le cas de Frédéric X... qui
n'avait que la qualité de témoin assisté" ;

La cour de cassation a cassé et a annulé, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la


chambre de l'instruction de la cour d'appel de lyon, en date du 28 mai 2009, et pour qu'il soit
à nouveau jugé, conformément à la loi, et a renvoyé la cause et les parties devant la
chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon, autrement composée, à ce désignée par
délibération spéciale prise en chambre du conseil .

1.2 Effets de l'irresponsabilité

Celui qui a commis l'infraction en état de démence va bénéficier d'un arrêt de déclaration
d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental rendu par la chambre de
l'instruction, prononcé par la cour d'assises ou un jugement de déclaration d'irresponsabilité
pénale pour cause de trouble mental émanant du tribunal correctionnel. L'infraction n'est
pas supprimée et les complices demeurent punissables.

2- Un trouble psychique ayant altéré le discernement ou entrave le contrôle des actes

L'article 122-1 al. 2 du CPF dispose que « La personne qui était atteinte, au moment des faits, d'un
trouble psychique ou neuropsychique ayant altéré son discernement ou entravé le contrôle de ses actes
demeure punissable ».de ce fait, lorsque le trouble psychique a seulement altéré le
discernement ou entravé le contrôle des actes, il ne fait pas disparaître la responsabilité
pénale. Certaines personnes voient leur faculté de discernement diminuée : c'est le cas
notamment des personnes souffrant de troubles comme les épileptiques, les hystériques,...
Le code pénal confirme les pratiques suivies antérieurement par les tribunaux. Il indique que
ces personnes demeurent punissables, mais que le juge doit tenir compte de ces
circonstances au moment de la détermination de la peine.

3- Les états voisins du trouble psychique

a- le somnambulisme : il est généralement admis que le somnambule n'est pas responsable


des infractions qu'il commet en état de sommeil. Pour l'hypnose l'irresponsabilité joue pour
la personne hypnotisée, mais la responsabilité de l'hypnotiseur pourra être retenue au titre
de la complicité par provocation.

b- les intoxications volontaires :Les intoxications peuvent être dues à l'absorption d'alcool,
l'administration de substances médicamenteuses ou à la consommation stupéfiants.
L'ivresse est un état passager, qui se distingue de l'alcoolisme, qui peut être dû à d'autres

11
causes que l'absorption d'alcool (stupéfiants, médicaments,...). Si la personne s'est "enivrée"
de manière fortuite, en étant exposée à son insu à des substances enivrantes (gaz toxique...),
ou en ayant absorbé (médicament), elle n'encourt pas de responsabilité. Si l'auteur s'est
intoxiqué sciemment, la jurisprudence admet que l'ivresse, malgré l'altération de volonté
qu'elle entraîne, laisse subsister la responsabilité pénale.

B- En droit Marocain

1- Le cas de l’irresponsabilité totale de l’aliéné

Il découle de l’article 134 du CPM que « n’est pas responsable et doit être absous celui qui,
au moment des faits qui lui sont imputés, se trouvait par suite de troubles de ses facultés
mentales dans l’impossibilité de comprendre ou de vouloir… ». Cet article constitue la
référence des juges en matière d’exonération de la responsabilité pénale lorsqu’il s’avère
que le sujet été atteint de troubles de ses facultés mentales au moment de la commission de
l’acte criminel.

Ainsi pour qu’elle soit cause d’irresponsabilité pénale, l’aliénation mentale doit être assortie
de deux conditions. Une fois ces conditions prouvées par le recours à l’expertise
psychiatrique, l’irresponsabilité pénale est établie et produit ses effets.

1.1 Les conditions à remplir pour statuer sur l’irresponsabilité totale de


l’aliéné

L’auteur de l’infraction doit avoir perdu sa compréhension ou sa volonté suite au trouble


de ses facultés mentales simultanément avec la commission de l’acte criminel.

Première condition : La perte de compréhension ou de volonté suite aux troubles


des facultés mentales
La lecture attentive de l’article 134 du CPM montre qu’il faudra, en premier lieu, apprécier
l’état mental de l’auteur au moment de la commission de l’infraction pour savoir s’il était
dans la possibilité de « comprendre ou de vouloir ». Le législateur marocain n’a pas donné
une définition précise à ces deux termes. Néanmoins, on peut les définir comme suit ;

• La volonté désigne la faculté d’exercer un libre choix gouverné par la raison,


autrement dit la faculté de déterminer une action d’après des normes ou des principes
(par exemple moraux). En effet, elle s’oppose à la spontanéité du désir, ou aux instincts
naturels, dont la réalisation ne fait appel à aucune délibération. La volonté est ainsi
l’expression de la liberté de l’arbitre chez un sujet, ou la manifestation de sa capacité
de choisir par lui-même sans contrainte extérieure.
• La compréhension signifie une relation entre le connaisseur et un objet de
connaissance : comprendre implique des capacités et dispositions respectables envers
un objet de connaissance suffisant pour adopter un comportement intelligent.
• Une compréhension est la limite d’une conceptualisation. Comprendre quelque chose,
c’est l’avoir conceptualisé en une mesure donnée.

12
Il faut noter qu’il n’est pas nécessaire que ces deux situations seront réunies. Puisque la
personne peut avoir la volonté de commettre l’acte criminel sans avoir le discernement
d’apprécier sa dangerosité, ainsi que ses conséquences néfastes sur la société. En effet, pour
un dément qui commet un crime de meurtre avec arme à feu, il est fort possible qu’il ait la
volonté suffisante de prendre l’arme, de la faire ravitailler et de l’orienter vers quelqu’un
pour enfin tirer sans que sa faible intelligence lui permette de comprendre la dangerosité de
son acte9 .

Ainsi, si la doctrine et la jurisprudence restent unanimes sur la compétence du seul juge de


fond d’apprécier la preuve en cas d’existence d’une aliénation mentale, ainsi que sur le choix
de recourir à l’expertise psychiatrique. Néanmoins, cette position risque de se heurter à
deux obstacles majeurs :

• Le premier obstacle consiste dans la nature juridique du terme « trouble mental »,


puisque il a été utilisé par l’article 134 du CPM, ce qui explique que le juge demeure
tenu de présenter les éléments dont il a déduit sa décision afin de permettre à la cour
de cassation de savoir si les faits constituent réellement des troubles mentaux qui ont
causé l’anéantissement de la conscience chez l’auteur ou non. Ce contrôle de la cour de
cassation est justifié par le fait que la question de « trouble mental » est une question
de droit qu’il revient au juge de cassation de contrôler.
• Le deuxième obstacle s’identifie à travers la nature scientifique du terme « troubles
mentaux », et qui conduit à limiter le champ d’intervention et de compétence du juge
pénal, puisqu’il s’agit d’un point proprement technique et qu’il ne peut trancher sans
avoir le recours aux spécialistes afin de savoir si les faits constituent ou non des troubles
mentaux10 .

Deuxième condition : La simultanéité de la commission de l’acte criminel avec la perte de


la compréhension ou de la volonté

L’aliénation mentale doit accompagner la commission de l’infraction. De ce fait, si cette


dernière a été commise dans un moment de lucidité, la responsabilité pénale du délinquant
sera intégrale. Cependant, si l’infraction a été commise antérieurement ou postérieurement
à l’avènement de troubles mentaux, dans ce cas il faut faire une distinction :

• Si les troubles mentaux ont précédé la commission de l’acte criminel, le sujet ne pourra
pas être considéré comme irresponsable de ses actes. Même si on admet parfois qu’il
peut bénéficier de circonstances atténuantes, puisqu’on admet parfois que même si au
moment de la commission de l’infraction le sujet était en pleine possession de ses
facultés mentales, il demeurera sous l’effet des troubles préalables.
• Si les troubles apparaissent postérieurement à la commission de l’acte criminel, ils
n’auront par conséquent aucun effet sur la responsabilité pénale du délinquant, qui
sera considéré comme totalement responsable de la part du tribunal.

9 Tyrode Y. « La violence pathologique dans ses rapports avec l’histoire ». In : Tyrode Y, Albernhe T. Psychiatrie légale.
Paris : Ellipse, 1995.

10 . EL Alami A. L’explication du Code pénal marocain. 3e éd. Casablanca (Maroc) : Édition Najah El Jadida 2009.

13
L’expert doit non seulement établir l’existence de troubles psychiques chez les sujets
soumis à son examen, mais démontrer que ses troubles existaient au moment de
l’infraction.

Si le psychiatre est dans la possibilité de déterminer l’état mental du sujet, sa mission reste
plus délicate lorsqu’il s’agit de déterminer l’état mental au moment de la commission de
l’infraction, puisqu’il doit remonter dans le temps, voire dans les antécédents du sujet afin
d’arriver à un résultat qui certes ne sera pas formel.

Pour cela, le juge pénal doit utiliser et accéder à tous les moyens de preuves mis à sa
disposition et ne pas se contenter de l’avis du psychiatre. Par exemple, l’existence de
témoins au moment de l’infraction pourra être très utile, ainsi que les circonstances dans
lesquelles l’acte a été commis.

1.2 Les effets de l’irresponsabilité totale de l’aliéné

Lorsque le tribunal admet l’existence de troubles mentaux ayant causé la pe8rte de volonté
ou de compréhension de l’aliéné au moment de la commission de l’acte criminel, il rendra sa
décision en déclarant le sujet irresponsable et prononce son absolution de toute sanction
pénale. Si les troubles subsistent, une mesure d’internement dans un établissement
psychiatrique sera prise en cas d’un crime ou d’un délit.

Il reste à préciser que la décision de l’irresponsabilité et de l’absolution ne concerne que


l’aliéné. De ce fait, les co-auteurs et les complices ne peuvent en bénéficier. Étant
irresponsable pénalement, l’aliéné ne pourra pas faire l’objet d’une action de réparation en
matière civile vu qu’on ne peut lui reprocher ses actes. Le juge pénal en rendant sa décision
d’irresponsabilité et d’absolution, demeure incompétent en matière civile.

2- Le cas de l’irresponsabilité partielle de l’aliéné

Au Maroc, le Code pénal reconnaît cette atténuation de responsabilité en précisant dans son
article 135 qu’« est partiellement irresponsable celui qui, au moment où il a commis
l’infraction, se trouvait atteint d’un affaiblissement de ses facultés mentales de nature à
réduire sa compréhension ou sa volonté et entraînant une diminution partielle de sa
responsabilité… ». Il convient ainsi de savoir quelles sont les conditions prévues par le Code
pénal marocain et qui doivent être réunis à fin de permettre au juge pénal de déclarer la
responsabilité partielle de l’auteur d’une infraction, et quels sont les effets de cette décision
sur le déroulement de l’action publique ainsi que sur le sujet.

2 .1 Les conditions prévues par le Code pénal

La juridiction statue conformément à l’article 78 du CPM qui dispose que « lorsqu’une


juridiction de jugement estime, après expertise médicale, que l’auteur d’un crime ou d’un
délit, bien qu’en état d’assurer sa défense au cours des débats, était néanmoins atteint lors
des faits qui lui sont imputés d’un affaiblissement de ses facultés mentales entraînant une
diminution partielle de sa responsabilité, elle doit constater que les faits poursuivis sont
imputables à l’accusé ou au prévenu... »

14
De là, on peut constater qu’il faut réunir deux conditions majeures à fin de pouvoir déclarer
l’irresponsabilité partielle de l’inculpé, il s’agit notamment de prouver que les faits
poursuivis sont imputables à l’accusé ou prévenu, et que ce dernier était atteint lors des
faits d’un affaiblissement de ses facultés mentales.

La première condition :La preuve de l’imputabilité de l’acte criminel à l’individu

C’est le fait d’établir un lien de causalité entre l’infraction et ses conséquences d’une part et
entre son auteur de l’autre part. On parle aussi de la culpabilité du sujet, qui doit répondre
aux actes qu’il a commis. Cependant, l’auteur d’une infraction qui souffre d’un
affaiblissement de ses facultés mentales ayant réduit sa compréhension ou sa volonté ne
peut répondre de ses actes que partiellement. En effet, l’intervention de l’expertise reste
primordiale pour déterminer le degré de cet affaiblissement afin de déduire les
conséquences.

Dans ce cadre, il ne faut pas confondre l’état d’affaiblissement des facultés mentales du
malade mental, avec celle d’un délinquant qui a commis son acte criminel sous l’impulsion
de substances stupéfiantes administrée librement et volontairement.

À ce propos, l’article 137 du CPM dispose que « l’ivresse, les états passionnels ou émotifs ou
ceux résultant de l’emploi volontaire de substances stupéfiantes ne peuvent, en aucun cas,
exclure ou diminuer la responsabilité… ».

il ressort de l’article précité qu’il ne faut pas considérer la responsabilité comme étant
partielle dans la situation où la personne a utilisé des produits alcooliques ou stupéfiants
d’une manière volontaire et passagère ou bien pour avoir le courage de commettre un crime
ou un délit.

Toutefois, la toxicomanie qui entraîne une grande dépendance à l’alcool, et qui se diffère de
la situation d’ivresse passagère, ainsi que l’habitude d’utiliser des drogues, peuvent changer
l’état mental de l’auteur, qui devient dépendant et perd le contrôle de ses actes. Pour cette
raison, elles sont considérées d’une manière générale comme causes de diminution de
responsabilité selon les psychiatres 11.

La deuxième condition : Le sujet était atteint lors des faits d’un affaiblissement de ses
facultés mentales

L’affaiblissement des facultés mentales, appelé autrefois la folie atténuée, constitue un


degré moyen entre les troubles mentaux et l’intégrité des facultés mentales. Ainsi, la
personne souffrant d’un affaiblissement de ses facultés mentales n’est ni une personne
saine qui a une conscience intégrale, ni un aliéné mental total.

C’est pour cette raison que le législateur marocain a prévu des dispositions propres à cette
situation, ainsi l’article 135 du Code pénal marocain dispose qu’« est partiellement
irresponsable celui qui, au moment où il a commis l’infraction, se trouvait atteint d’un

11 Ruolt A. Commentaire du Code pénal marocain. Rabat : Institut national d’études judiciaires, 1990, p. 166.

15
affaiblissement de ses facultés mentales de nature à réduire sa compréhension ou sa
volonté et entraînant une diminution partielle de sa responsabilité… ».

L’article 135 du CPM soulève un grand problème, étant donné que cette aliénation partielle
qui entraîne l’atténuation de la responsabilité pénale complique la mission du médecin
psychiatre. En effet, ce dernier doit déduire d’après son analyse, que la personne qui lui est
présentée souffre d’un trouble mental ou d’une affection qui réduit ses facultés mentales.
Cependant, le psychiatre demeure tenu de déterminer à quelle limite cet état pathologique
peut atténuer la volonté consciente du patient ainsi que sa capacité à comprendre et
apprécier les choses et les événements12 .

2.2 Les effets de l’irresponsabilité partielle

Dans l’hypothèse où le tribunal a estimé, après une expertise médicale, que l’auteur était
atteint lors des faits qui lui sont imputés d’un affaiblissement de ses facultés mentales
entraînant une diminution partielle de sa responsabilisé pénale, et après avoir constaté que
ces faits sont imputables à l’accusé ou prévenu. La juridiction statuant doit déclarer le sujet
partiellement irresponsable et prononcer la peine.

L’article 78 du CPM ajoute qu’il faut ordonner, s’il y’a lieu que le condamné sera hospitalisé
dans un établissement psychiatrique, préalablement à l’exécution de toute peine privative
de liberté. L’hospitalisation s’impute sur la durée de la peine et prend fin dans les conditions
prévues à l’article 77 précité.

La déclaration de l’irresponsabilité partielle et au prononcé de la peine


La preuve de l’existence d’un affaiblissement des facultés mentales, de nature à réduire la
compréhension ou la volonté de l’auteur au moment de la commission de l’acte criminel,
conduira à le considérer comme irresponsable partiellement aux yeux du tribunal.
Néanmoins, la déclaration de l’irresponsabilité partielle de l’auteur de l’infraction
n’entraînera pas son absolution, puisqu’il fera objet d’une peine pénale tel qu’il ressort des
dispositions de l’article 78 et dont l’article 135 fait renvoi.

Ainsi l’article 78 du CPP dispose que « lorsqu’une juridiction de jugement estime, après
expertise médicale, que l’auteur d’un crime ou d’un délit, bien qu’en état d’assurer sa
défense au cours des débats, était néanmoins atteint lors des faits qui lui sont imputés d’un
affaiblissement de ses facultés mentales entraînant une diminution partielle de sa
responsabilité, elle doit :

1. Constater que les faits poursuivis sont imputables à l’accusé ou au prévenu ;


2. Le déclarer partiellement irresponsable en raison de l’affaiblissement de ses facultés
mentales au moment des faits ;
3. Prononcer la peine ; …

Ainsi, la détermination de la peine à appliquer au condamné demeure de la seule


compétence du tribunal, qui va prendre en considération l’affaiblissement des facultés
mentales de l’auteur entraînant par conséquent son irresponsabilité partielle.

12 Ruolt A. Commentaire du Code pénal marocain. Rabat : Institut national d’études judiciaires, 1990, p. 166.

16
De ce fait, le sujet bénéficiera des circonstances atténuantes, qui demeurent de la seule
prérogative du juge pénal et qui ne sont pas énumérées à titre limitatif comme il est le cas
pour les circonstances aggravantes. Néanmoins, le juge doit motiver sa décision et justifier le
choix de telle ou telle sanction. L’auteur repoudra aussi, des dommages qu’il a causé aux
tiers, puisque il sera responsable totalement du point de vue de la responsabilisé civile. De la
sorte, des dommages et intérêts peuvent être octroyés aux victimes des actes commis par le
condamné La possibilité d’ordonner l’hospitalisation du condamné dans un établissement
psychiatrique

Le tribunal peut ordonner l’hospitalisation du condamné dans un établissement


psychiatrique dans le cas où l’examen mental a révélé que l’auteur, atteint d’une diminution
provisoire de ses capacités mentales au moment des faits, a été touché depuis leur
commission.

À la différence aussi de l’internement judiciaire prévu en cas d’admission de


l’irresponsabilité totale de l’aliéné auteur de l’infraction, l’internement judiciaire dans un
établissement psychiatrique en cas d’irresponsabilité partielle ne sera ordonné que si le
condamné reproduit des signes d’aliénation mentale, faisant obstacle ainsi à son
incarcération. C’est ce qui ressort de la lecture de l’article 78 du CPP qui dispose dans son
quatrième alinéa qu’ : « ordonner, s’il y a lieu, que le condamné sera hospitalisé dans un
établissement psychiatrique, préalablement à l’exécution de toute peine privative de liberté.

L’hospitalisation s’impute sur la durée de cette peine, et prend fin dans les conditions
prévues au dernier alinéa de l’article 77. ».

17
Paragraphe 2: les causes subjectives extérieures à l’individu

Les causes de non imputabilité sont des causes subjectives d’irresponsabilité pénales
spécifiques à la personnalité du prévenu. Ces causes vont faire obstacle à l’imputabilité de
l’infraction consommée à son auteur. Nous traiterons dans ce chapitre la notion de la
contrainte (section1) et l’erreur de droit (section2) selon une étude comparative entre les
deux législations ; marocaine et française.

Section 1 : La contrainte
A- En droit français

L’article 122-2 du Code pénal prévoit que « n’est pas pénalement responsable la personne
qui a agi sous l’empire d’une force ou d’une contrainte à laquelle elle n’a pu résister ». La
contrainte, en abolissant la volonté, supprime toute liberté de l’agent. Plus précisément,
comme le trouble psychique ou neuropsychique, elle fait disparaître, à l’égard de la
personne qui l’invoque, l’élément moral de l’infraction et, par là même, supprime la
responsabilité pénale de l’auteur .

La contrainte peut être défini comme étant un événement qui détruit momentanément la
volonté de l’agent en le poussant irrésistiblement à poser l’acte matériel incriminé par la
loi13 .

La contrainte peut être d’ordre physique ou moral ;

La contrainte physique, qui suppose une force s’exerçant sur le corps même de l’agent, peut
avoir soit une origine externe, soit une origine interne.

D’origine externe, la contrainte physique peut provenir d’une force de la nature (tempête,
inondation), du fait d’un animal ou d’un tiers. Mais la contrainte physique peut aussi avoir
une origine interne, c’est-à-dire provenir d’une cause inhérente à l’auteur de l’infraction.
Aussi bien, la jurisprudence a-t-elle admis l’effet exonératoire de la contrainte à l’égard d’un
voyageur, poursuivi pour défaut titre de transport, alors que, s’étant endormi sous l’effet
d’une grande fatigue physique, il avait dépassé la station pour laquelle il avait pris son billet
14. Il en était de même du conducteur d’une automobile, poursuivi pour homicides

involontaires, mise en danger d’autrui et défaut de maîtrise, victime d’un malaise brutal et
imprévisible qui lui a fait perdre le contrôle de l’accélération de son véhicule, lancé à une

13Voy. Cass., 20 mars 2001, R.W., 2003-2004, p.196 ; Cass., 22 mars 2002, Dr. circ, p. 422 ; F. TULKENS, M.
VAN DE KERCHOVE, Y. CARTUYVELS et C. GUILLAIN, Introduction au droit pénal. Aspects juridiques
et criminologiques, Kluwer, 2010, p. 426
14 (Crim. 19 oct. 1922, DP1922. 1. 233

18
vitesse croissante sur l’autoroute, puis l’aire de repos où il s’est immobilisé, après avoir
heurté les véhicules occupés par les victimes15 . La contrainte morale peut être provoquée
par une pression exercée sur la volonté d’une personne ayant pour conséquence d’abolir
son libre arbitre. Comme la contrainte physique, elle peut avoir une cause externe ou une
cause interne. La contrainte morale externe peut résulter soit des menaces, soit d’une
provocation émanant d’un tiers, S’agissant des menaces, elles doivent être pressantes pour
supprimer la liberté de l’esprit de l’agent, Quant aux provocations, elles ne sont retenues
que lorsque le tiers provocateur a utilisé des manoeuvres, telles qu’elles ont aboli le libre
arbitre du prévenu.16

La contrainte morale interne peut provenir des passions, des émotions ou des convictions de
l’auteur d’une infraction. Selon une jurisprudence constante, cette forme de contrainte ne
constitue pas une cause d’irresponsabilité pénale. Une telle solution peut se comprendre,
puisque le droit pénal est notamment édicté pour ceux qui ne savent pas résister à leurs
passions ou émotions. Ainsi, a été condamnée une femme qui, sous l’influence d’une grande
émotion, avait écrit des lettres d’injure au ministre, au procureur de la République et au juge
d’instruction, parce que son mari fonctionnaire était menacé d’une mise à la retraite
anticipée (Crim. 11 avr. 1908, S. 1909. 1. 473, note Roux).

• Illustration jurisprudentielle

Crim., 9 mai 1967 17

Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 1382 du code civil, R. 10 du
code de la route, R. 40, paragraphe 4 du code pénal, et 7 de la loi du 20 avril 1810 pour
insuffisance de motifs et manque de base légale, "en ce que l'arrêt attaque a écarté la
responsabilité de Sigaud dans l'accident litigieux, bien que son véhicule ait heurté l'arrière de
celui de Chalmin qui le précédait ; aux motifs qu'aucune faute n'était établie à son encontre
car il n'était pas justifie qu'il ait eu la possibilité de l'arrêter à temps ;

alors qu'il résulte des constatations de l'arrêt incriminé que Sigaud suivait le véhicule de
Chalmin, qu'il devait dès lors conserver la distance de sécurité qu'impose à tout conducteur
prudent l'éventualité d'un incident de route toujours à prévoir (distance de sécurité
permettant d'arrêter en temps voulu) et que la cour ayant constaté que Chalmin circulait à
vitesse excessive, Sigaud roulait nécessairement à la même vitesse ; alors qu'en tout état de
cause la cour ne pouvait exonérer Sigaud de toute responsabilité sans constater que la

15Crim. 15 nov. 2005, Bull. crim. no 295, RSC 2006, p. 61, obs. Mayaud; v. aussi : Douai, 24 oct. 2000,
JCP 2002.II. 10012, note Maréchal).
16Bernard Bouloc, Haritini Matsopoulo, « Droit pénal général et procédure pénale », 21 édition Dalloz, 2018-
2022, page 175

17 Fiche pédagogique virtuelle, Nicolas Rias, « les causes de non imputabilité »,page 7

19
première collision intervenue entre le véhicule de Chalmin et celui de Faure circulant en sens
inverse avait eu pour Sigaud le caractère d'un cas de force majeure" ;

vu lesdits articles ; attendu que tout jugement ou arrêt doit contenir les motifs propres à
justifier sa décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence
; attendu que, pour infirmer la décision du premier juge, décharger Sigaud de toute
responsabilité et débouter Chalmin de sa constitution de partie civile, l'arrêt attaqué énonce
"qu'aucune faute n'est établie à l'encontre de Sigaud, car il n'est pas justifie que celui-ci qui
s'est trouve brusquement, dans un virage sans visibilité devant l'obstacle inattendu constitué
par les deux voitures accidentées de Faure et de Chalmin, ait eu la possibilité de s'arrêter à
temps" ; mais attendu que l'article R. 10 du code de la route impose à tout conducteur de
rester maître de sa vitesse, de régler celle-ci en fonction des difficultés de la circulation et
des obstacles prévisibles, et de la réduire notamment lorsque les conditions de visibilité sont
insuffisantes et dans les virages ; qu'en l'état de ces seuls motifs, desquels il ne résulte pas
que Sigaud s'est trouvé en présence d'un obstacle ayant un caractère imprévisible et
inévitable, la cour d'appel n'a pas justifie sa décision ; d'ou il suit que le moyen doit être
accueilli ; par ces motifs : casse et annule l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-provence en date
du 1er juillet 196

• Conditions de la contrainte

Qu’il s’agisse d’une contrainte physique ou morale, d’origine externe ou interne, elle n’exclut
la responsabilité pénale que si elle a été irrésistible (l’article 122-2 C. pén. fait état de la «
personne qui a agi sous l’empire d’une force ou d’une contrainte à laquelle elle n’a pu
résister »). Selon la jurisprudence, la contrainte ne peut être retenue que si elle résulte d’un
événement que « la volonté humaine n’a pu ni prévenir, ni conjurer » 18.

La loi imposant la condition de l’irrésistibilité, la jurisprudence en a dégagé une autre : celle


de l’imprévisibilité. C’est qu’en effet, les juges n’admettent la contrainte que si celleci n’a
pas été précédée par une faute de l’agent. Ainsi, a été déclaré coupable de désertion un
marin, qui n’a pu regagner son navire avant le départ, parce qu’il avait été placé en garde à
vue pour cause d’ivresse publique (V. Crim. 29 janv. 1921, S. 1922. 1. 185, note Roux; Crim.
30 juin 1981, Bull. crim. no 223).

Il en a été de même pour le conducteur d’un véhicule automobile, qui ne pouvait


valablement soutenir que la survenance d’une défaillance mécanique constituait un
événement de force majeure, alors qu’il avait omis de vérifier l’état de son véhicule, avant
d’en faire usage, contrairement aux dispositions de l’article L. 311-1 du Code de la route19 .

18 Bernard Bouloc, Haritini Matsopoulo, « Droit pénal général et procédure pénale », 21 édition
Dalloz, 2018-2022, page 177
19 (Crim. 6 nov. 2013, Bull. crim. no 215, Dr. pénal 2014, comm. no 24, note J.-H. Robert)

20
B- En droit marocain

Aux termes de l’article 124-2° du Code pénal « Il n’y a ni crime, ni délit, ni contravention :
Lorsque l’auteur a été matériellement forcé d’accomplir ou a été matériellement placé dans
l’impossibilité d’éviter l’infraction, par un événement provenant d’une cause étrangère
auquel il n’a pu résister ». La contrainte est une cause générale de justification, et non une
simple cause de non culpabilité : elle fait disparaître l’infraction. Dans les deux cas envisagés
par le texte, il s’agit expressément de la seule contrainte physique : l’agent est soit
matériellement forcé d’accomplir, soit matériellement placé dans l’impossibilité d’éviter.
mais qu’est-ce qu’une contrainte physique ? Le Code pénal ne la définit pas à la différence
du D.O.C. qui propose dans son article 269 une définition que la jurisprudence marocaine a
précisée : la contrainte physique, c’est la force majeure. « La force majeure est tout fait que
l’homme ne peut prévenir, tel que les phénomènes naturels, l’invasion ennemi, le fait du
prince, et qui rend impossible l’exécution de l’obligation. N’est point considérée comme
force majeur la cause qu’il était possible d’éviter, si le débiteur ne justifie qu’il a déployé
toute diligence pour s’en prémunir. N’est pas également considérée comme force majeure la
cause qui a été occasionnée par une faute précédente du débiteur ». Ce texte est adapté à
l’article 124-2° du Code pénal dont il constitue, en dépit de son antériorité, un prolongement
précis. Trois conditions sont nécessaires pour que la contrainte physique puisse être érigée
en fait justificatif.

-ELLE DOIT ETRE D’ORIGINE EXTERNE

Provoquée par « un événement provenant d’une cause étrangère », la contrainte physique


apparaît subordonnée à un fait extérieur à la personne de l’agent ; elle ne saurait donc avoir
une origine interne. Serait ainsi soumis à une contrainte exonératoire, l’individu séquestré et
par la même dans l’impossibilité physique de verser à l’échéance une pension alimentaire :
le délit prévu par l’article 480 u Code pénal ne pourrait être constitué.

- ELLE DOIT ETRE IRRESISTIBLE

L’agent « n’a pu résister ». La jurisprudence marocaine apprécie cette irrésistibilité avec une
sévérité particulière. La force visée par le texte doit être imprévisible.

-ELLE NE DOIT PAS Avoir ETE PROVOQUE PAR UNE FAUTE DE L’AGENT

En rappelant dans deux arrêts de principe rendus à propos du délit de blessures


involontaires consécutif à un accident de la circulation, cette nécessité de l’absence de faute
: Pour avoir le caractère de force majeure, la défaillance mécanique d’un véhicule doit avoir
un caractère imprévisible, la Cour Suprême voulant par-là signifier que l’état et l’entretien
du véhicule doivent être insusceptibles de permettre la prévision de cette défaillance. Il
appartient à l’agent de prouver qu’il n’a commis aucune faute d’omission relativement à cet
entretien.

21
Par conséquent, la contrainte physique interne ne peut être invoqué comme fait justificatif.
Ce raisonnement est justifié par « la cause étrangère » imposée par le code pénal. En effet,
la contrainte physique interne se rencontre lorsque l’événement physique poussant le sujet
à agir ne lui est pas étranger, mais est spécifique à son métabolisme, comme par exemple
une crise cardiaque provocant un accident de circulation. à ce propos, la doctrine marocaine
considère que dans ce cas, l’auteur peut invoquer la contrainte physique interne comme
cause de non imputabilité de la responsabilité20 .

Par contre le législateur exclut des faits justificatifs toute contrainte morale. Celle–ci consiste
en une pression extérieur exercée non plus sur le corps de l’individu, mais sur son mental,
c’est-à-dire sur sa volonté. Dans ce cas, le sujet a pleinement conscience de réaliser une
infraction, il ne peut cependant faire autrement. Il ne s’agit plus d’une privation de
mouvement, mais d’une privation de volonté. La contrainte morale peut trouver son origine
dans une cause externe. Celle-ci unanimement considérée par la jurisprudence et la doctrine
marocaine comme une cause de non imputabilité de l’infraction, même en l’absence d’une
disposition pénale expresse. En effet, la contrainte morale trouve aussi son origine dans une
cause interne. Celle-ci n’est admise ni par le législateur, ni par la jurisprudence ou la doctrine
marocaine. En dépit de la contrainte morale interne, l’infraction est quand même imputée à
son auteur et la responsabilité de celui-ci est engagée

Section 2 : L’erreur de droit


A- En droit français

l’erreur de droit consiste en une mauvaise interprétation ou connaissance d’une disposition


de droit qui concerne l’élément légal de l’infraction.

L’erreur de droit est une cause d’irresponsabilité pénale prévue à l’article 122-3 C. pén.. Aux
termes de cette disposition, « n’est pas pénalement responsable la personne qui justifie
avoir cru, par une erreur sur le droit qu’elle n’était pas en mesure d’éviter, pouvoir
légitimement accomplir l’acte », La jurisprudence affirme depuis longtemps la règle selon
laquelle « nul n’est censé ignorer la loi », de sorte que les simples particuliers ont des
difficultés à suivre les multiples évolutions législatives et ne peuvent avoir une parfaite
connaissance du droit en vigueur. C’est pour cette raison que certaines restrictions ont été
exceptionnellement apportées au principe « nul n’est censé ignorer la loi ».

Ainsi, l’article 4 du décret-loi du 5 novembre 1870 prévoyait que « les tribunaux pourront,
selon les circonstances, accueillir l’exception d’ignorance alléguée par les contrevenants si la
contravention a eu lieu dans le délai de 3 jours francs à partir de la promulgation ».

20 Ibid, page22

22
Ce texte n’a toutefois pas été repris par le dispositif actuel. Comme on le sait, les lois entrent
en vigueur à la date qu’elles fixent ou, à défaut, le lendemain de leur publication au Journal
officiel de la République française, qui, depuis le 1er janvier 2016, n’est mis à la disposition
du public que « sous forme électronique » (art. LO 6213-2 du CGCT, modifié par la loi
organique no 2015-1712 du 22 déc. 2015, portant dématérialisation du Journal officiel de la
République française, art. 1er).

• Illustration jurisprudentielle 21

Crim., 24 novembre 1998

Sur le moyen unique de cassation pris de la violation de l'article 122-3 du Code pénal
;Attendu que, pour faire bénéficier des dispositions visées au moyen Loïc Le Breton, gérant
d'une entreprise de déménagements, poursuivi pour avoir, en violation de l'article L. 212-7
du Code du travail, toléré, à douze reprises en un mois, une prolongation excessive de la
durée de travail effectif de ses salariés, le jugement attaqué relève que l'intéressé n'a fait
qu'appliquer les clauses d'un accord professionnel élaboré sous l'égide d'un médiateur
désigné par le Gouvernement et faisant référence au Code du travail ; qu'il en déduit que le
prévenu soutient, à bon droit, n'avoir pu penser que les stipulations de cet accord étaient
moins favorables pour les travailleurs que les prescriptions légales ;

Attendu qu'en prononçant ainsi, le tribunal, qui a pu admettre que l'erreur invoquée
résultait, en l'espèce, d'une information erronée fournie par l'Administration, représentée
aux négociations préalables à la signature de l'accord illicite, n'a pas encouru le grief allégué
;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que le jugement est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience
publique, les jour, mois et an que dessus ; Par ailleurs, même si la Cour de cassation semble
sanctionner aussi bien l’erreur pénale que l’erreur « non pénale » (Crim. 8 févr. 1966, Bull.
crim. no 36), les juges du fond se sont parfois montrés indulgents à l’égard de ceux ayant
commis une erreur sur une disposition étrangère à la loi pénale.

– Sur ce point, on peut citer un vieil arrêt de la cour d’appel de Paris (2 déc. 1924, Rec. Dr.
comm.,

21 Fiche pédagogique virtuelle, Nicolas Rias, « les causes de non imputabilité »,page 11

23
1925. 2. 359), ayant refusé de condamner pour vol l’inventeur d’un trésor qui, ignorant
l’article 716C. civ., se l’était approprié en totalité 22. Mais, il ne s’agit que de décisions
isolées, la jurisprudence faisant preuve d’une grande sévérité en la matière (Crim. 26 févr.
1964, Bull. crim. no 71).261 En réaction contre la position jurisprudentielle, les rédacteurs du
nouveau Code pénal ont retenu « l’erreur invincible ». Selon l’article 122-3 du Code pénal, «
n’est pas pénalement responsable la personne qui justifie avoir cru, par une erreur sur le
droit qu’elle n’était pas en mesure d’éviter, pouvoir légitimement accomplir l’acte ».

Deux situations ont été essentiellement évoquées lors des travaux préparatoires : le défaut
de publicité du texte normatif et l’information erronée donnée par l’Administration,
préalablement à l’acte accompli. Il est évident qu’en cas de doute sur la portée d’un texte,
l’intéressé doit s’adresser à l’Administration compétente.

S’agissant de l’interprétation des textes sur la durée hebdomadaire du travail, la


consultation de l’inspection du travail s’impose (Crim. 5 mars 1997, RSC 1997, 827, obs.
Bouloc). Seule une information erronée fournie par l’Administration compétente peut
produire un effet exonératoire (Crim. 24 nov. 1998, JCP G 2000. I. 235). Ainsi, l’erreur sur le
droit ne saurait être retenue dans l’hypothèse où le dirigeant d’une société a étendu sans
autorisation la surface de vente d’un hypermarché, en se prévalant d’un avis du ministère,
selon lequel l’opération envisagée ne nécessitait pas une autorisation; cet avis ne produisait
aucun effet, dès lors que la société s’était vue refuser à cinq reprises l’autorisation
d’extension qu’elle avait déjà sollicitée auprès de la commission d’équipement commercial
(Crim. 19 mars 1997, Bull. crim. no 115).

Ne peut pas non plus alléguer une erreur sur le droit le gérant d’une société allemande, qui
ne déclarait les salariés aux organismes de protection sociale que postérieurement à leur
embauche (Crim. 20 janv. 2015,Dr. pénal 2015, comm. no 32, note M. Véron). En l’espèce,
pour échapper à sa condamnation pour travail dissimulé, le prévenu faisait valoir qu’il
ignorait que la législation française, contrairement à la législation allemande, imposait une
déclaration préalable à l’embauche des salariés.

Mais, un tel argument ne pouvait prospérer dès lors que l’entreprise était « implantée de
longue date en France », et que l’intéressé avait la possibilité de solliciter l’avis de
l’inspection du travail sur l’étendue de ses obligations en la matière. A été également rejetée
l’erreur sur le droit invoquée par une personne qui détenait un colis renfermant des objets à
caractère pornographique, et qui prétendait que, dès lors que l’administration des Douanes
avait laissé parvenir ledit colis à destination, il avait pu croire que l’origine des objets litigieux
était licite (Crim. 9 juin 1999, Dr. pénal 1999, comm. no 138). Néanmoins, l’attitude de
l’administration des Douanes ne pouvait constituer pour l’intéressé une « erreur de droit

22Revue internationale de droit comparé « les principes et les méthodes de droit pénal comparé »
page 11

24
invincible », exclusive de toute responsabilité. Enfin, n’a pas été considérée comme une telle
erreur celle ayant pour fondement des circulaires ministérielles, à caractère interprétatif, qui
remettaient en cause les termes d’un texte clair portant interdiction absolue de faire
travailler un apprenti les jours fériés (Crim. 18 janv. 2005, Bull. crim. no 22).

B- En droit marocain

Conformément à l’adage « nul n’est censé d’ignorer la loi » le législateur a adopté la même
alignée pour souligner dans son article 2 du code pénal23 « nul ne peut invoquer pour son
excuse l’ignorance de la loi pénale ». Cette reconnaissance repose sur une présomption
irréfragable de la loi pénale. Cette règle a pour connaissance d’interdire à l’auteur d’une
infraction d’échapper à la répression en arguant de son ignorance des textes applicables.
Cette présomption de connaissance du droit est générale. Elle concerne les textes de droit
pénal qu’il s’agisse des lois réprimant des contraventions .

A- Force du principe

Elle peut consister soit dans l’ignorance de la loi pénale, soit dans une interprétation
inexacte de ses dispositions. La règle nul ne peut invoquer pour son excuse l’ignorance de la
loi pénale intégrée dans l’article 2 du code pénal marocain s’oppose absolument à ce que
l’erreur de droit constitue une cause de culpabilité. 24 Le caractère rigoureux de cette règle
est mis en œuvre par la jurisprudence : une erreur de droit ne saurait faire disparaitre,
quelle que soit la cause dont elle découle la culpabilité d’un acte volontairement accompli.
Ainsi, l’ignorance allégué du caractère punissable du fait délictueux ne saurait être cause de
justification ou l’erreur de droit n’est ni un fait justificatif, ni une excuse, l’ignorance allégué
étant sans influence sur l’intention coupable. Une telle sévérité des juridictions du fond n’est
que l’application du principe légaliste et plus précisément l’article 2 du code pénal.

• Les contestations doctrinales

La doctrine dénonce ce principe car elle considère que la présomption de connaissance de la


loi repose sur une fiction juridique. Devant l’inflation législative que connait notre droit
depuis quelques années notamment en matière pénale, il n’est pas matériellement possible
qu’un citoyen connaisse parfaitement l’état du droit. Les professionnels eux-mêmes doivent
être spécialement informés par voie de circulaire de l’entrée en vigueur des nouveaux textes
ce qui montre que l’administration estime insuffisante la seule lecture du journal officiel.
Selon les auteurs et c’est d’ailleurs la position de la jurisprudence française : l’erreur de droit
peut être une cause d’irresponsabilité inévitable.

23
https://www.cabinetaci.com/irresponsabilite-penale-causes/
24 Oussama taleb « doit pénal général » page 295

25
Conclusion générale

La responsabilité est l’attitude de la personne à répondre de ses actes et de ses


engagements en effet, Traditionnellement, on estime qu’il ne suffit pas qu’une faute ait été
commise pour que la responsabilité de son auteur soit engagée, encore faut-il qu’elle lui soit
imputable. Aussi, l’imputabilité implique que l’auteur du dommage soit doué de
discernement. Autrement dit, il doit avoir conscience de ses actes, soit être capable de
savoir s’il commet ou non un écart de conduite. L’auteur du dommage doit, en somme, être
en mesure de distinguer le bien du mal les causes d’irresponsabilité sont qualifiées de
subjectives car elles sont liées à la personne ou la personnalité de l’auteur de l’infraction, a
savoir Ses facultés mentales sont intactes et n'a agit sous aucune contrainte. Le libre arbitre
est la propriété de la volonté humaine de se déterminer librement. L'imputabilité prend en
compte le discernement et la volonté de l'auteur des faits infractionnels. Pour être
pénalement responsable, l'acte accompli doit pouvoir être reproché à son auteur autrement
dit imputer à son auteur. Certaines circonstances empêchent de reprocher un acte à la
personne qui les a accomplis. Il existe trois principales causes de non imputabilité qui
suppriment l'élément moral de l'infraction : les troubles mentaux, la contrainte et la
minorité. Ces trois causes subjectives d'irresponsabilité pénale suppriment le libre arbitre et
la capacité pénale de l'auteur. Elles ont un effet in personam parce qu'elles ne s'attachent
qu'à l'individu qui en établit l'existence au moment des faits. Ces causes sont communes à
toutes les infractions.

C’est bien souvent d'honnêtes citoyens qui, ne bénéficiant plus de leur libre arbitre ou
obligés de se défendre ou d'accomplir leur devoir, transgressent la loi dans des circonstances
que la loi se doit d'excuser. Néanmoins, les causes de non culpabilité imputabilité
s'appliquent de manière restrictive pour mieux affirmer et rappeler que la notion de
responsabilité repose sur celle de la faute.

26
ANNEXE 1
Cour de cassation, Chambre criminelle, du 13 décembre 1956, 55-05.772, Publié au

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

CASSATION sur le pourvoi formé par le procureur général près la Cour de Cassation, dans le seul intérêt de
la loi, contre un arrêt rendu le 1er décembre 1953 par la Cour d'appel de Colmar, chambre spéciale des
mineurs, qui a, dans une procédure suivie contre X... du chef de blessures par imprudence, dit que faute
de raison suffisante, ce mineur ne peut répondre du fait à lui reproché devant la juridiction des enfants
mais prononce cependant sa remise à sa famille. LA COUR, Vu la requête du procureur général ; Vu
l'article 442 du Code d'instruction criminelle ; Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des
articles 1er et 2 de l'ordonnance du 2 février 1945 ; Vu lesdits articles : Attendu que saisie de l'appel d'un
jugement du Tribunal pour enfants de Strasbourg qui avait déclaré le mineur Laboube (Jean) coupable du
délit de blessures involontaires, dit n'y avoir lieu à sanction pénale et ordonné la remise du mineur à sa
famille, tout en déclarant également le père civilement responsable, la Cour d'appel de Colmar "confirme
ce jugement dans la mesure où il avait déclaré les faits matériellement établis et dans la mesure où il avait
décidé que l'enfant devait être remis à sa famille, mais l'a infirmé dans la mesure où il a déclaré le mineur
convaincu du délit de blessures par imprudence et le père civilement responsable de ce délit, le mineur
X..., qui n'était âgé que de 6 ans au moment des faits délictueux, ne pouvant, faute de raison suffisante,
répondre devant la juridiction des enfants du fait à lui reproché" ; Que l'arrêt attaqué déclare que
l'imputation à un mineur d'une infraction qualifiée crime ou délit n'est concevable que si la question
préalable de raison suffisante et d'éveil de la conscience a été posée, implicitement tout au moins, et si
elle a reçu une réponse affirmative ; que la responsabilité pénale d'un tout jeune enfant permettant de
qualifier ses actes crimes ou délits ne peut être retenue s'il ne ressort pas des faits de la cause et de
l'examen de sa personnalité que cet enfant possédait le minimum de raison nécessaire pour comprendre
la nature et la portée de l'acte qu'on lui reproche ; qu'en l'espèce le fait de maladresse ou d'impéritie
reproché au prévenu trouve dans l'âge de l'enfant une explication suffisante ; Attendu qu'en l'état de ces
énonciations, et abstraction faite de tous autres motifs surabondants fussent-ils erronés, l'arrêt attaqué a
pu légalement décider que le mineur X..., en raison de son jeune âge au moment des faits, ne pouvait,
faute de raison suffisante, répondre devant la juridiction pénale des enfants de l'infraction à lui reprochée
; Attendu, en effet, que si les articles 1er et 2 de l'ordonnance du 2 février 1945, modifiés par la loi du 24
mai 1951, posent le principe de l'irresponsabilité pénale du mineur, abstraction faite du discernement de
l'intéressé, et déterminent les juridictions compétentes pour statuer lorsqu'un fait qualifié crime ou délit
est imputé à des mineurs de 18 ans et pour prendre à l'égard de ces mineurs des mesures de
redressement appropriées, sauf la faculté, quand il s'agit des mineurs âgés de plus de 13 ans, de
prononcer une condamnation pénale si les circonstances et la personnalité du mineur paraissent l'exiger,
encore faut-il, conformément aux principes généraux du droit, que le mineur dont la participation à l'acte
matériel à lui reproché est établie, ait compris et voulu cet acte ; que toute infraction, même non
intentionnelle, suppose en effet que son auteur ait agi avec intelligence et volonté ; Attendu, toutefois,
qu'après avoir décidé que le mineur X..., qui n'était âgé que de 6 ans au moment des faits délictueux, ne
pouvait répondre devant la juridiction répressive de l'infraction relevée contre lui, l'arrêt ne pouvait que
prononcer sa relaxe et ne pouvait sans contradiction prendre à son égard une mesure de redressement ;
qu'il suit de là que la décision de remise de l'enfant à sa famille n'est pas légalement justifiée ; Par ces
motifs : CASSE ET ANNULE dans le seul intérêt de la loi et sans renvoi, l'arrêt rendu, le 1er décembre 1953,
par la Chambre spéciale des mineurs de la Cour d'appel de Colmar.

27
ANNEXE 2

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- LE PROCUREUR GÉNÉRAL PRÈS LA COUR D'APPEL DE LYON,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de ladite cour d'appel, en date du 28 mai 2009, qui,
dans l'information suivie contre personne non dénommée des chefs de tentative de meurtre et
violences aggravés, a déclaré Frédéric X... pénalement irresponsable et écarté l'application de la
procédure prévue par l'article 706-135 du code de procédure pénale ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 706-120 et 706-125 du code
de procédure pénale ;

"en ce que la chambre de l'instruction a dit qu'il existe des charges suffisantes contre Frédéric
X... d'avoir à Genas, le 13 février 2007, commis les faits de tentative d'homicide volontaire sur
militaires de la gendarmerie et de violences volontaires sur militaires de la gendarmerie ayant
entraîné une incapacité totale de travail supérieure à huit jours et l'a déclaré pénalement
irresponsable ;

"aux motifs qu'il existe au dossier charges suffisantes d'avoir commis les faits de tentative
d'homicide volontaire sur militaires de la gendarmerie et de violences volontaires sur militaires de
la gendarmerie ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à huit jours mais qu'il
convient de relever l'irresponsabilité pénale de Frédéric X... au sens de l'article 122-1 du code de
procédure pénale ;

"alors qu'en application des dispositions de l'article 706-125 du code de procédure pénale, l'arrêt
par lequel la chambre de l'instruction déclare qu'il existe des charges suffisantes contre la
personne d'avoir commis les faits qui lui sont reprochés et qui la déclare irresponsable
pénalement en raison d'un trouble psychique ou neuro-psychique ayant aboli son discernement
ou le contrôle de ses actes, ne peut être rendu qu'à l'encontre d'une personne qui a été, au
préalable, mise en examen, ce qui n'est pas le cas de Frédéric X... qui n'avait que la qualité de
témoin assisté" ;

Vu les articles 706-120 et 706-125 du code de procédure pénale ;

Attendu qu'il résulte de ces textes que les juridictions d'instruction ne peuvent prononcer une
décision d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental qu'à l'égard d'une personne mise
en examen ;

Attendu que, après avoir constaté l'existence de charges suffisantes contre Frédéric X... de
tentative de meurtre et de violences sur militaires de la gendarmerie, faits commis le 13 février
2007, l'arrêt attaqué a déclaré l'intéressé pénalement irresponsable ;

Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que Frédéric X... n'était que témoin assisté, la chambre
de l'instruction a méconnu les textes susvisés et le principe susénoncé ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Par ces motifs et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen proposé :

28
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la
cour d'appel de Lyon, en date du 28 mai 2009, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à
la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon,
autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la


chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt
annulé ;

29
Bibliographie
Ouvrages généraux :
• Balboul Kawtar, Lahjouji Youssef « droit pénal général marocain »,
1er édition 2019, 269 pages
• Bouloc. Bernard Haritini Matsopoulo, « Droit pénal général et
procédure pénale », 21 édition Dalloz, 2018-2022,
• BOUSETTA .Mourad , « Elément de droit pénal général marocain »,
, 2004 - 280 pages
• EL Alami A. L’explication du Code pénal marocain. 3e éd.
Casablanca (Maroc) : Édition Najah El Jadida 2009.
• Oussama. taleb « doit pénal général » edition dar essalam 2015
385P

• Pradel. Jean , « Droit pénal général », CUJAS, 8ème édition, T. I,


1992,
• Sordino . M-C. , « droit pénal général » ,Ellipses
• VAN DE KERCHOVE, Y. CARTUYVELS et C. GUILLAIN, Introduction au
droit pénal. Aspects juridiques
• Ruolt A. Commentaire du Code pénal marocain. Rabat : Institut
national d’études judiciaires, 1990,

Ouvrages spéciaux :
• Sophocle. Ajax. NRF, « Pléiade », 1967
• Tyrode Y. « La violence pathologique dans ses rapports avec
l’histoire ». In : Tyrode Y, Albernhe T. Psychiatrie légale. Paris :
Ellipse, 1995

Articles et Revues :
• Fiche pédagogique virtuelle, Nicolas Rias, « les causes de non
imputabilité »
• Revue internationaale de droit comparé « les principes et les
méthodes de droit pénal comparé »

30
Textes de lois :
• Code de la procédure pénale française version au 24 décembre 2021. En
vigueur depuis le 08 avril 1958.
• Code pénale Français version au 24 décembre 2021. En vigueur depuis le
01 septembre 1990
• Code pénal marocain version consolidée le 15 septembre 2011

Conventions
• « La convention relative aux droits de l’enfant », Nations unies

Jurisprudences :
• Cass., 20 mars 2001, R.W., 2003-2004, p.196 ; Cass., 22 mars 2002, Dr.
circ, p. 422 ; F. TULKENS, M.
• Crim. 19 oct. 1922, DP1922. 1. 233
• (Crim. 15 nov. 2005, Bull. crim. no 295, RSC 2006, p. 61, obs. Mayaud; v.
aussi : Douai, 24 oct. 2000, JCP 2002.II. 10012, note Maréchal).
• (Crim. 6 nov. 2013, Bull. crim. no 215, Dr. pénal 2014, comm. no 24,
note J.-H. Robert)

Webographie :
• www.em-consulte.com
• www.village-justice.com
• https://www.dismoimondroit.fr/les-causes-subjectives-
dirresponsabilite-penale
• https://www.cabinetaci.com/irresponsabilite-penale-causes/
• https://www.doc-du-juriste.com/droit-prive-et-contrat/droit-
penal/dissertatio

31
Table de matières

Introduction .............................................................................................................................................................. 1
Paragraphe 1 : Les causes subjectives intérieures à l’individu ............................................................................... 3
Section 1: la minorité ........................................................................................................................................... 3
A. En droit Français ......................................................................................................................................... 3
1. La responsabilité pénale du mineur ....................................................................................................... 4
2. Les mesures applicables aux mineurs délinquants ............................................................................... 4
3. Application de l'atténuation de responsabilité ..................................................................................... 5
B- En droit Marocain ....................................................................................................................................... 6
1. L’irresponsabilité pénale du mineur de moins de 12 ans : ................................................................... 6
2. Le mineur de 12 ans qui n’a pas atteint 18 ans ..................................................................................... 7
Section 2 :L’aliénation mentale ............................................................................................................................ 8
A-En droit Français .......................................................................................................................................... 8
1-Un trouble psychique ayant aboli le discernement ou le contrôle des actes ......................................... 10
2- Un trouble psychique ayant altéré le discernement ou entrave le contrôle des actes ......................... 11
3- Les états voisins du trouble psychique .................................................................................................... 11
B- En droit Marocain ..................................................................................................................................... 12
1- Le cas de l’irresponsabilité totale de l’aliéné ...................................................................................... 12
2- Le cas de l’irresponsabilité partielle de l’aliéné....................................................................................... 14
Paragraphe 2: les causes subjectives extérieures à l’individu ................................................................................ 18
Section 1 : La contrainte ..................................................................................................................................... 18
A- En droit français ................................................................................................................................... 18
B- En droit marocain ................................................................................................................................. 21
Section 2 : L’erreur de droit ............................................................................................................................... 22
A- En droit français ................................................................................................................................... 22
B- En droit marocain ................................................................................................................................. 25
Conclusion générale ............................................................................................................................................... 26
ANNEXE 1 ................................................................................................................................................................ 27

ANNEXE 2 ................................................................................................................................................................28

32

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