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Réforme et modernisation des douanes en Afrique

subsaharienne francophone, 1995-2010


Customs Administration Reform and Modernization in
Francophone Sub-Saharan Africa, 1995-2010
Gilles Montagnat-Rentier, Gilles Parent
Dans Revue d'économie du développement 2012/3 (Vol. 20), pages 105 à 146
Éditions De Boeck Supérieur
ISSN 1245-4060
ISBN 9782804175764
DOI 10.3917/edd.263.0105
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Réforme et modernisation des douanes
en Afrique subsaharienne francophone,
1995-2010
Customs Administration Reform and Modernization
in Francophone Sub-Saharan Africa, 1995-2010
Gilles Montagnat-Rentier
Gilles Parent 1

Cet article expose les grandes lignes des réformes de modernisation des douanes réalisées dans les
pays francophones d’Afrique subsaharienne depuis le milieu des années 1990. Il met également
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en évidence les problèmes non encore résolus de ce processus. Des progrès sont enregistrés en
matière d’automatisation des opérations et de procédures, avec des efforts importants et cons-
tants pour mobiliser les recettes douanières et améliorer la facilitation du commerce dans un cer-
tain nombre de pays. Cependant, le rythme et l’étendue de la modernisation restent insuffisants,
particulièrement en ce qui concerne le développement des contrôles douaniers et la capacité de lutte
contre la fraude, le renforcement des ressources opérationnelles, et l’amélioration de la gestion et
de l’encadrement des services. Les constats suggèrent qu’un fort engagement des autorités dans
la réforme, des transformations dans l’organisation et la gestion, une assistance technique et une
gestion de projet adéquates, ainsi que la mise en œuvre effective des normes douanières modernes
sont essentiels à l’accélération de la modernisation des douanes en Afrique subsaharienne fran-
cophone.

1 Le présent article est tiré de : Montagnat-Rentier, Gilles et Parent, Gilles, Customs


Administration Reform and Modernization in Francophone Sub-Saharan Africa,
1995-2010, IMF Working Paper, 2012. Les positions exprimées dans cet article sont
celles des auteurs et ne doivent pas être attribuées au Fonds Monétaire International,
à son conseil d’administration ou à sa direction. De même, les erreurs et omissions sont
seulement attribuables aux auteurs. E-mail des auteurs: GMontagnatrentier@imf.org,
GParent@imf.org

105
106 Gilles Montagnat-Rentier, Gilles Parent

Mots clés : Douane, administration douanière, Afrique, francophone, réforme,


modernisation, recettes.
Classification JEL : H29, O57

This paper outlines reforms that have been achieved in the modernization of the customs admi-
nistrations of francophone sub-Saharan (African) countries since the mid-1990s. It also highli-
ghts the remaining issues in this process. Progress has been made in automation of operations
and procedures, with constant and significant efforts to strengthen revenue collection and
improve trade facilitation in a number of countries. However, the pace and scope of moderniza-
tion remains insufficient, particularly in developing customs control and enforcement capacities,
and enhancing operational resources and management. The findings suggest that the authorities’
strong commitment to reform, organizational and management changes, adequate technical
assistance and project management, and effective implementation of modern customs standards,
are critical to accelerate the modernization of customs in francophone sub-Saharan Africa.

Key words: Customs administration, Africa, francophone, reform, modernization,


revenue.

1 INTRODUCTION

Cet article examine les réformes entreprises par les douanes des pays franco-
phones d’Afrique subsaharienne (PFAS) du milieu des années 1990 à 2010. Il
se fonde principalement sur les constats et les conclusions de l’assistance
technique (AT) du Département des Finances Publiques du FMI (FAD) et de
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deux centres d’assistance techniques régionaux du FMI, l’AFRITAC de
l’Ouest et l’AFRITAC du Centre 2. Les pays couverts sont le Bénin, le Burkina
Faso, le Burundi, le Cameroun, la République Centrafricaine (RCA), l’Union
des Comores, la République du Congo, la République Démocratique du Congo
(RDC), la Côte d’Ivoire, le Gabon, la Guinée, Madagascar, le Mali, la Mauri-
tanie, le Niger, le Sénégal, le Tchad et le Togo. Sans entrer dans l’expérience
particulière de chaque pays, l’article tente de dresser un bilan général des
changements opérés aux douanes, d’identifier les enjeux et d’esquisser des
solutions pour la poursuite de la modernisation de ces administrations, ceci
dans le contexte des réflexions en cours sur la mobilisation des ressources
intérieures dans les pays en développement, dans lesquels une part impor-
tante des recettes est collectée par les douanes.

2 Seize des dix-huit pays étudiés étaient membres de l’AFRITAC de l’Ouest, établi en
2003, ou de l’AFRITAC du Centre, établi en 2007.
Réforme et modernisation des douanes en Afrique subsaharienne francophone 107

2 RÉFORMES ENGAGÉES

2.1 Contexte et enjeux des réformes d’administration doua-


nière depuis la fin des années 1990
Les douanes, à travers le monde, remplissent trois missions principales : (1) la
perception de recettes ; (2) la mise en œuvre des politiques commerciale et
tarifaire, comme fondement des politiques de concurrence et de développe-
ment ; et (3) la protection (par exemple, en s’assurant du respect de normes de
sécurité pour les consommateurs et des droits de propriété intellectuelle, ou
en participant à la lutte contre le trafic de drogues et le terrorisme). Dans les
PFAS, dans les années 1990, le besoin de mobiliser les recettes publiques, les
carences des administrations fiscales nationales (voir Fossat et Bua, 2012, à
paraître) et l’importance des marchandises importées en tant que base impo-
sable, rendaient la première mission essentielle. Certaines caractéristiques
des tarifs douaniers compliquaient la tâche des douanes : un grand nombre de
taxes et de taux, des écarts importants entre les taux, une utilisation massive
d’instruments quasi-tarifaires (Keen, 2003) 3, des surcharges et retenues
d’impôts diverses s’ajoutant aux droits de douane, et de multiples exonéra-
tions applicables aux importations. Les douanes attiraient aussi l’attention
sur l’insuffisant respect de la réglementation par les opérateurs.
Au-delà de la question des recettes, les administrations douanières des
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PFAS ont cependant dû prendre en compte l’impératif de facilitation du
commerce dans le contexte d’une concurrence économique mondiale plus
aiguë. La croissance des échanges – bien que moins marquée dans les pays
africains – et une plus grande interdépendance des économies ont obligé les
douanes à adopter des pratiques reconnues à l’échelle mondiale et ont aug-
menté leur charge de travail. La plupart des accords commerciaux régionaux
auxquels participent les PFAS définissent des réformes tarifaires et des poli-
tiques d’harmonisation à mettre en œuvre par les douanes nationales. Du
fait de l’augmentation de la fraude et du commerce illégal s’appuyant sur le
crime organisé, et d’une menace terroriste intensifiée et mondialisée depuis
2001, l’importance de la mission douanière de protection a été notablement
renforcée.

3 Bien que les taux des droits de douane aient été harmonisés dans la CEMAC en 1994,
ils n’ont pas été mis en œuvre immédiatement. Les taux harmonisés de l’UEMOA sont
entrés en vigueur en 2000.
108 Gilles Montagnat-Rentier, Gilles Parent

Pour les administrations douanières des PFAS, la modernisation et l’amé-


lioration des performances devaient s’effectuer dans un contexte de faible
niveau de développement. Douze PFAS appartiennent au groupe des pays à
faibles revenus. Leur économie est peu diversifiée, le secteur industriel réduit,
et le secteur informel pléthorique. Les PFAS importent principalement des
produits de première nécessité et exportent essentiellement des ressources
naturelles. Alors que les échanges de la région avec les pays tiers se font sur-
tout par voie maritime, les infrastructures portuaires et de transport sont
souvent déficientes. Sept pays sont totalement ou partiellement enclavés, ce
qui augmente les coûts du commerce et les risques de fraude douanière. Au
cours de la période étudiée, les PFAS ont traversé des crises politiques, ce qui
n’était propice ni aux réformes, ni à l’implication des partenaires du dévelop-
pement dans la modernisation des douanes.

2.2 Objectifs de réformes


Les douanes engagées dans un processus de modernisation doivent se confor-
mer au cadre international des douanes établi par les conventions de l’Organi-
sation mondiale des douanes (OMD) et par les obligations nées de l’adhésion à
l’Organisation mondiale du commerce (OMC) 4 5, qui s’appuient sur des bon-
nes pratiques reconnues facilitant l’insertion dans les échanges internatio-
naux, et encouragent la coopération entre les douanes nationales et les
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opérateurs. Le diagnostic des douanes dans les PFAS, par l’AT du FMI et
d’autres partenaires du développement, a cependant conduit à un ajustement
des prescriptions et recommandations internationales en fonction de la situa-
tion de chaque administration. D’une manière générale, les objectifs de
modernisation suivants ont été défendus et retenus :

4 Les douanes des pays francophones d’Afrique subsaharienne sont toutes membres de
l’OMD. Tous les pays francophones d’Afrique subsaharienne étaient membres de
l'OMC en 1997, sauf l’Union des Comores, qui y a obtenu le statut d’observateur en
2007.
5 Il s’agit en particulier du Système harmonisé (SH), nomenclature internationale poly-
valente des marchandises, de l'Accord de l'OMC sur l'évaluation en douane, de la Con-
vention de Kyoto révisée qui vise à harmoniser les méthodes et procédures appliquées
par les autorités douanières nationales, de la Déclaration d’Arusha révisée sur
l’éthique douanière, qui constitue la référence en matière de traitement des questions
liées à la corruption dans les administrations des douanes, et du Cadre de normes
visant à sécuriser et à faciliter les échanges commerciaux internationaux (le cadre
SAFE) de l’OMD qui énonce des normes pour renforcer la sécurité de la chaîne logis-
tique internationale et faciliter son fonctionnement.
Réforme et modernisation des douanes en Afrique subsaharienne francophone 109

– Adopter des politiques commerciales et tarifaires cohérentes et mettre en


place la législation appropriée. Le travail et les performances des douanes
dépendent de lois simples et bien pensées, présentées dans un cadre clair.
Pour faciliter l’administration, les réformes doivent chercher à rationaliser
les taxes, les exonérations et les obligations.
– Adopter des procédures simples et modernes. Les procédures doivent réduire
les coûts et les tracasseries administratives pour les opérateurs économiques,
limiter les possibilités d’infractions et faciliter le contrôle douanier. Elles
doivent être rationalisées avant leur informatisation. Des procédures efficaces
d’exportation sont particulièrement importantes pour veiller à la bonne admi-
nistration des remboursements de TVA.
– Revoir l’approche et les méthodes des contrôles douaniers. Cet objectif vise
l’introduction des techniques de gestion des risques, une distribution adéquate
des contrôles tout au long des procédures douanières, y compris après le
dédouanement, ceci dans le cadre d’une stratégie visant l’augmentation du
niveau de respect spontané des règles. Ces réformes exigent une spécialisation
du personnel.
– S’assurer que les structures administratives, les pratiques de gestion et les
incitations soutiennent l’efficacité et une conduite éthique des douanes.
L’objectif est de servir l’intérêt général, protéger les douanes contre toute
ingérence extérieure et limiter la corruption et la fraude. Au-delà de l’amé-
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lioration des performances administratives, l’enjeu réside dans le renforce-
ment des institutions et de la gouvernance.
– Mettre en œuvre l’informatisation de l’intégralité du processus. L’informatique
est l’outil indispensable pour le succès des réformes ci-dessus. Les systèmes
doivent être modernisés, généralisés, et pleinement utilisés par les douaniers
et les opérateurs.

2.3 Assistance technique fournie


De 1995 à 2010, FAD a organisé dans les PFAS, 63 missions du siège du FMI
traitant de l’administration des recettes. De 1995 à 2002, 22 missions ont été
menées, dont trois ont été exclusivement consacrées à l’administration des
douanes. À compter de 2003, l’AT à l’administration douanière a considérable-
ment augmenté. D’une part, 41 missions ont eu lieu au cours de cette deuxième
période, dont 12 ont été exclusivement consacrées à l’administration des douanes.
D’autre part, l’AFRITAC de l’Ouest et l’AFRITAC du Centre ont été établis.
110 Gilles Montagnat-Rentier, Gilles Parent

L’assistance technique a été également fournie par les autres partenaires


du développement. Tous les PFAS, à l’exception du Sénégal qui a conservé son
propre système informatique douanier, ont reçu un appui technique de la
Conférence des Nations Unies pour le Commerce et le Développement (CNU-
CED) pour la mise en place de SYDONIA et de ses versions améliorées. La
Banque mondiale a engagé des projets de facilitation des échanges par les
grands corridors du continent. L’Union européenne (UE) a lancé, dans la
période récente, plusieurs projets d’appui à la modernisation douanière,
notamment dans les pays d’Afrique centrale. Les deux ont apporté des finan-
cements importants pour l’acquisition de matériel informatique et des instal-
lations nécessaires à la mise en place de SYDONIA. L’OMD, dans le cadre du
programme Columbus, a effectué des missions d’évaluation des administra-
tions douanières dans la plupart des PFAS depuis 2006, et a ouvert un bureau
régional pour le renforcement des capacités à Abidjan et des centres régio-
naux de formation à Ouagadougou et à Brazzaville. La France a nommé des
conseillers techniques résidents auprès des administrations douanières, dis-
pensé de la formation et de l’assistance technique de courte durée et apporté
des financements. L’Agence canadienne de développement international
(ACDI) a mené au Bénin un programme pluriannuel (2004-2008) de réforme
de l’administration des douanes. Les États-Unis ont financé de nombreuses
activités dans le cadre de leurs programmes d’assistance technique (United
States Agency for International Development [USAID], Millenium Challenge
Corporation, U.S. Customs), en particulier au Sénégal et au Bénin. Dans le
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cadre du compte administré au nom du Japon pour certaines activités du FMI,
le Japon a financé des missions d’assistance technique de FAD dans cinq pays.
La Banque africaine de développement et le Programme des Nations Unies
pour le Développement (PNUD) ont également financé des activités de moder-
nisation des douanes.

3 PROGRÈS DES RÉFORMES ET QUESTIONS


EN SUSPENS

3.1 Aperçu général des progrès réalisés


De nets progrès ont été réalisés en matière d’automatisation des opérations
d’import-export, et dans une certaine mesure, sur la simplification et la fiabi-
lité des procédures de dédouanement et de recouvrement. L’essentiel des pro-
grès date de la deuxième partie de la période étudiée (depuis 2003) au cours de
laquelle l’assistance technique a été nettement accrue.
Réforme et modernisation des douanes en Afrique subsaharienne francophone 111

Les évolutions ont été beaucoup plus lentes en ce qui concerne le dévelop-
pement des capacités de contrôle et de lutte contre la fraude et la corruption, la
mise à niveau des ressources opérationnelles, et la modernisation de la gestion.
L’application de normes internationales majeures telles que l’Accord sur
l’évaluation en douane de l’OMC et les procédures pour le transit internatio-
nal des marchandises n’a pas été achevée. Le nombre de pays recourant aux
services d’entreprises privées, en particulier pour l’évaluation des marchandi-
ses, n’a pas varié (seize pays sur dix-huit).
La vérification des droits à exonération a été renforcée, mais le nombre et
l’impact des exonérations n’ont pas été réduits (ceci est d’abord un problème
de politique fiscale). Les progrès ont aussi été incomplets en ce qui concerne la
mise en place des aspects douaniers des accords commerciaux régionaux et la
coopération avec les administrations fiscales. En ce qui concerne la facilitation
des échanges commerciaux, un certain nombre de PFAS ont amélioré leur per-
formance à la fin des années 2000, comme l’ont souligné les études internatio-
nales.
Malgré le conservatisme des méthodes de contrôle, les douanes ont produit
un effort important et continu pour établir la base taxable, en renforçant les
opérations courantes (comme la prise en charge du fret ou l’évaluation des mar-
chandises). Dans le contexte de libéralisation des échanges, les recettes douaniè-
res rapportées au PIB n’ont que légèrement baissé (globalement les droits de
douane et autres droits à l’importation sont passés de 3,1 % à 2,8 % du PIB – cf.
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détail section 4). Cependant, une analyse serait nécessaire pour mesurer
l’impact de l’administration sur le niveau des recettes.

3.2 Les avancées dans les différents aspects


de l’administration douanière

Informatisation

Presque tous les PFAS ont choisi le logiciel SYDONIA++ développé par
la CNUCED, qui a fourni une assistance à l’installation et à la mise en route 6.
L’installation de SYDONIA++ a parfois été longue en raison des interrup-
tions du financement ou de la composition des équipes d’experts informati-
ciens. La connexion des bureaux à un serveur unique et l’accès à distance au

6 Le logiciel SYDONIA est fourni sans frais par la CNUCED. Cependant, SYDONIA est
installé à la demande des gouvernements des pays en développement avec l’assistance des
experts de la CNUCED, les pays gardant la responsabilité du financement du projet.
112 Gilles Montagnat-Rentier, Gilles Parent

système pour les opérateurs sont toujours en cours dans plusieurs pays, ce qui
limite, momentanément, la valeur ajoutée du système. Pour des raisons finan-
cières et techniques, nombreux sont les postes distants des grands centres
d’affaires qui ne sont ni équipés ni connectés. Malgré ces problèmes, compte
tenu de la concentration des importations et des exportations sur un petit
nombre de ports, environ 85 à 90 % des chiffres du commerce international et
des recettes sont gérés électroniquement.
Les modules de base du système informatisé sont en général bien utilisés.
Ceux afférents à la sélectivité des contrôles, à la gestion des marchandises en
transit, ou à la production de tableaux de bord, sont encore sous-utilisés. Il
reste beaucoup avant de parvenir à des procédures totalement dématéria-
lisées. Les fraudes constatées confirment l’obligation pour les douanes d’assu-
rer la sécurité du système et des données. Les perspectives de développements
informatiques incluent principalement l’intégration des procédures douanières
dans un guichet électronique unique 7, l’automatisation de la gestion des ris-
ques, l’informatisation des autorisations d’exonérations, et l’interconnexion
régionale des bureaux des douanes.

Procédures d’importation et d’exportation

L’informatisation a facilité la rationalisation des procédures d’importation


et d’exportation. Le sondage d’opinion du Forum économique mondial sur le
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niveau d’efficacité des procédures douanières fait apparaître qu’un certain
nombre de PFAS sont près du score moyen (tableau 1). Le partage des rôles
entre le déclarant et l’inspecteur des douanes est désormais la norme 8. Les
administrations chargées des réglementations techniques confient généralement
aux douanes la réalisation des principales inspections et le recouvrement de
redevances applicables aux importations ou aux exportations 9. Grâce à l’infor-
matisation, en particulier l’enchaînement automatisé des étapes de la procé-
dure, le dédouanement est plus sûr. Beaucoup de douanes ont informatisé leurs
procédures d’urgence. Le paiement différé fait l’objet d’un meilleur suivi et le

7 La Commission Économique pour l’Europe des Nations Unies envisage le guichet


unique comme un moyen permettant aux partenaires du commerce et du transport de
transmettre une information et des documents normalisés aux points d’entrée pour
s’acquitter de toutes les formalités requises en matière d’importation, d’exportation ou
de transit. Ce guichet peut être soit physique, soit électronique.
8 L’auto-déclaration est nécessaire à une claire séparation des rôles entre opérateur
économique et agent des douanes : l’importateur/exportateur déclare et paie spontanément
les droits de douane, l’agent des douanes vérifie ces opérations.
9 Avec des exceptions notables, comme la RDC où des agences interviennent en parallèle
à la douane, en dépit de progrès réalisés en matière de guichet unique.
Réforme et modernisation des douanes en Afrique subsaharienne francophone 113

système douanier est raccordé à la direction de la comptabilité publique du


ministère des finances de manière à communiquer les montants liquidés et les
montants perçus 10.
En dépit des progrès réalisés, il est encore nécessaire d’éliminer les ins-
pections redondantes qui nuisent aux échanges. Les procédures engagées par
les sociétés d’inspection pour évaluer et inspecter les marchandises devraient
être intégrées aux procédures douanières. Les agents des douanes devraient
être rigoureux dans le suivi des obligations des entreprises bénéficiant d’exo-
nérations ou de suspensions conditionnelles des droits. Les formalités admi-
nistratives avant le dédouanement imposées par les ministères et organismes
n’exploitent pas pleinement le potentiel des systèmes et données douaniers
automatisés. Le nombre de documents requis pourrait être réduit considéra-
blement.

Tableau 1 : Charge des procédures douanières dans plusieurs pays francophones


d’Afrique subsaharienne, 2010

Score de 7 (très efficace) Rang (sur 139 pays


Pays/économie
à 1 (très peu efficace) ou économies évalués)
Sénégal 4.4 43
Mauritanie 4.0 61
Burkina Faso 3.8 76
Mali 3.7 80
Madagascar 3.6 86
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Côte d’Ivoire 3.3 98
Cameroun 3.2 102
Burundi 3.0 109
Tchad 2.3 124

Source : Forum Économique Mondial, The Global Enabling Trade Report 2010.

Plusieurs ports, dont Douala (Cameroun) et Matadi (RDC), ont mis en


place des guichets uniques qui regroupent physiquement divers services, dont
portuaires, douaniers et bancaires. Le défi est aujourd’hui de mettre en place
des guichets uniques virtuels. Les administrations douanières devraient jouer
un rôle fondamental dans ce type de projet. Madagascar a déjà mis en place un
type de guichet unique électronique. Le Bénin et le Togo ont engagé le projet.

10 Dans tous les pays francophones d’Afrique subsaharienne, les administrations


douanières valident les liquidations de droits de douane, mais dans plusieurs d’entre
eux, la direction générale de la comptabilité publique se charge des recouvrements.
Cette formule est acceptable pour autant qu’il n’y ait pas de rupture dans la chaîne
automatisée des opérations douanières entre la déclaration des marchandises et le
dédouanement.
114 Gilles Montagnat-Rentier, Gilles Parent

Le Sénégal a mis au point des plateformes liées à son système informatique


douanier pour le guichet unique du commerce extérieur et le télépaiement.

Évaluation des marchandises

Selon l’Accord de l’OMC sur l’évaluation en douane, l’évaluation est basée sur
la valeur transactionnelle (la méthode d’évaluation antérieure consistait à
appliquer le prix auquel les biens seraient vendus dans le cadre du commerce
international). Même si les PFAS ont amendé leurs législations pour intégrer
cet accord, la mise en œuvre est lente et reste incomplète. Les administrations
douanières ont mis en place quelques aspects de la nouvelle procédure (par
exemple, le cadre d’examen des différends relatifs aux valeurs en douane à
Abidjan), mais, malgré les initiatives lancées et l’assistance technique fournie,
la gestion des risques, les demandes d’information aux importateurs formulées
selon les procédures en vigueur, et le développement des vérifications post-
dédouanement pour une analyse approfondie des transactions commerciales, ne
se sont pas matérialisés. Dans ces circonstances, il n’est pas certain que les
valeurs appliquées par les services douaniers soient bien alignées sur la valeur
transactionnelle (ou sur les autres valeurs autorisées dans certaines situations).
Qui plus est, des valeurs administrées, qu’elles soient officielles ou non, sont
appliquées à un certain nombre de produits de grande consommation. Ceci étant,
le manque de fiabilité des factures et des documents commerciaux crée de sérieux
problèmes de vérification et impose de lourdes contraintes administratives aux
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douanes. Par souci d’atteindre les objectifs de recettes, et pour combattre la
sous-évaluation, réputée courante, celles-ci ont poursuivi leurs efforts visant à
vérifier toutes les déclarations de valeur. Les autorités ont continué à sollici-
ter l’opinion des sociétés d’inspection sur les prix à l’importation. Dans une
certaine mesure, les administrations douanières ont tenu compte des opinions
des sociétés, mais la coopération entre les deux a été limitée.
Il reste à prendre les dispositions administratives pour garantir la trans-
parence et l’équité des décisions et pour empêcher les distorsions attribuables aux
évaluations arbitraires ; et à renforcer les capacités des administrations douaniè-
res pour détecter les valeurs déclarées anormales et évaluer correctement les mar-
chandises conformément aux exigences de l’OMC (et à la législation).

Maîtrise des exonérations de droits

En raison du montant très élevé du manque à percevoir au titre des exonéra-


tions (cf. tableau 5), les administrations douanières ont renforcé la gestion de
ces mesures pour remédier aux abus. Cela faisait partie des recommandations
de l’assistance technique du FMI visant à accroître le contrôle du Ministère
des finances sur les exonérations fiscales qui émanaient principalement de la
Réforme et modernisation des douanes en Afrique subsaharienne francophone 115

législation non fiscale, notamment des codes d’investissement, des codes


pétroliers et miniers, des accords ponctuels et des exigences des bailleurs de
fonds 11. Une importante mesure positive a consisté à exiger systématique-
ment une autorisation préalable du Ministre des finances ou du Directeur
général des douanes pour toutes exonérations. Les exonérations discrétion-
naires ont été sensiblement réduites ou éliminées. L’assistance technique a
souligné la nécessité de renforcer la vérification de l’utilisation finale des mar-
chandises exonérées. Elle a recommandé d’associer les administrations doua-
nières et fiscales à une évaluation des textes accordant des exonérations en
vue d’abroger les dispositions dont on ne peut suivre l’application ou qui
encouragent manifestement la violation des règles. Plusieurs pays comme la
Côte d’Ivoire et le Gabon ont pris des mesures préliminaires dans ce sens.
Néanmoins, l’impact des améliorations administratives sur la maîtrise des
exonérations ne peut être que marginal. L’harmonisation des exonérations
permettrait de limiter la concurrence fiscale entre les pays. Une analyse objec-
tive de la justification économique ou sociale de toutes les exonérations per-
mettrait de rationaliser ces mesures. À cet égard, FAD a recommandé
l’identification et la quantification complètes des dépenses fiscales, ainsi que
leur examen annuel par les autorités à travers la procédure budgétaire. Le
Sénégal a amorcé cet exercice en 2009.

Réforme tarifaire et intégration régionale


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En 1994, la Communauté Économique et Monétaire d’Afrique Centrale
(CEMAC) a établi un tarif extérieur commun (TEC) simplifié et un tarif pré-
férentiel régissant le commerce intrarégional, mesure achevée en 1998. Elle a
également substitué à des obstacles quantitatifs à l’importation des surtaxes
temporaires à l’importation. L’Union Économique et Monétaire d’Afrique de
l’Ouest (UEMOA) a éliminé progressivement les tarifs intérieurs à partir de
1996 et institué un TEC à quatre bandes en 2000 après des réductions du taux
maximum de droits à partir de 1998 12. Après avoir examiné la mise en place
des deux TEC, Doe (2006) a constaté qu’ils étaient globalement conformes
aux taux fixés par la CEMAC et l’UEMOA, mais qu’il existait de nombreux
écarts, surtout en termes de redevances supplémentaires et surtaxes. Des dis-

11 Pour un résumé des questions relatives à l'exonération des projets financés par les
bailleurs de fonds, voir “Tax Treatment of Donor-Financed Projects”, International
Tax Dialogue, 2006.
12 Les bandes tarifaires de l’UEMOA sont de 0, 5, 10 et 20 %. Un TEC est désormais envis-
agé pour l'ensemble de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest
(CEDEAO) : les chefs d'État de la communauté ont récemment convenu d'élargir le TEC
de l’UEMOA à la région CEDEAO, à condition d'y inclure une cinquième bande de 35 %.
116 Gilles Montagnat-Rentier, Gilles Parent

cordances entre la bande tarifaire effective et le TEC ont été relevées pour un
certain nombre de produits. L’absence d’harmonisation des exonérations au
niveau régional 13 et le décalage entre les règles et les pratiques d’évaluation
en douane constituent encore des obstacles majeurs à l’harmonisation des
tarifs. Enfin, le fait de limiter l’informatisation aux seules administrations
nationales accroît le risque de disparités (volontaires ou non) dans la mise en
œuvre ; il faudrait informatiser le tarif au niveau communautaire.
La CEMAC et l’UEMOA ont adopté chacune un code douanier commu-
nautaire en 2001 14. La Communauté de l’Afrique de l’Est (CAE) a adopté sa
loi sur la gestion des douanes en 2004. Les législations des États membres
sont en général alignées sur ces codes en matière de procédure, mais les législa-
tions communautaires et nationales devraient intégrer toutes les normes doua-
nières modernes, notamment la déclaration des marchandises à la douane
avant leur arrivée ou la soumission électronique des documents. Les disposi-
tions relatives aux différends et aux pénalités méritent également d’être
revues, car certaines d’entre elles sont dépassées ou ne sont pas totalement
conformes aux exigences de l’OMD et de l’OMC 15. En général, l’état actuel de
la législation n’est pas un obstacle majeur à la progression des réformes. Par
contre, la coordination pour l’harmonisation des pratiques administratives
entre administrations douanières ainsi qu’entre les douanes et les organismes
communautaires reste insuffisante. Les décisions cruciales pour la mise en
œuvre, notamment la classification des marchandises dans la nomenclature
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tarifaire, requièrent des positions concertées.
Les PFAS avaient besoin de réduire les délais et les coûts d’acheminement
des importations et des exportations, en particulier à travers les pays encla-
vés, et d’empêcher les pertes de recettes dues au détournement des marchan-
dises en transit (circulant hors taxes) vers les marchés intérieurs. Les
procédures douanières adoptées par la Communauté Économique des États
de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) (programme de transit routier inter-États
— TRIE) et la CEMAC (programme de transit international dans les pays de

13 L’UEMOA n'a pas encore adopté de code d'investissement régional. La CEMAC en a


adopté un en 1965, mais il n'est pas appliqué. En matière d’harmonisation des
exonérations, l’UEMOA a cependant suggéré des catégories d'exonérations douanières
applicables par les États membres.
14 L’UEMOA a adopté le livre I de son Code des douanes, harmonisant ainsi l'organisation,
les procédures et les régimes douaniers.
15 Le Bénin, la Mauritanie, la RDC et le Togo ont lancé un examen de leurs législations
douanières. Madagascar et le Burundi ont adopté un code douanier révisé en 2006 et
2007, respectivement.
Réforme et modernisation des douanes en Afrique subsaharienne francophone 117

l’Afrique centrale — TIPAC) n’ont pas bien fonctionné, faute de garanties


internationales valables et de coordination des services douaniers. Pendant
longtemps, les administrations douanières se contentaient de prendre des
mesures préventives au niveau national en utilisant des méthodes dépassées
comme l’escorte systématique des véhicules. Récemment, plusieurs pays ont
pris des dispositions consistant à utiliser SYDONIA pour l’échange d’informa-
tions entre bureaux de douane (Burkina Faso) et le système de navigation
(GPS) pour localiser les véhicules sur les principaux axes (Cameroun). Avec la
participation de l’UE, la CEMAC et la CEDEAO ont lancé des initiatives des-
tinées à promouvoir l’interconnexion des bureaux douaniers dans les pays tra-
versés. L’amélioration de la gestion douanière du transit régional devrait faire
partie de programmes plus larges visant à renouveler les véhicules, accroître
le taux de conteneurisation, assurer la sécurité du fret, stopper le harcèlement
notoire des camionneurs par les agents des forces de l’ordre, et créer une nou-
velle infrastructure. Les projets en cours de la Banque mondiale destinés à
faciliter le commerce sur les principaux axes (corridors) de l’Afrique centrale
et occidentale sont des initiatives cruciales à cet égard.
L’imposition effective des droits de douane requiert une bonne application
des règles établissant les pays d’origine des marchandises quand il existe des
accords préférentiels et quand des droits antidumping et compensatoires sont
en vigueur. Jusqu’ici, les PFAS ont accordé peu d’importance à l’origine, sans
doute en raison du caractère limité et stagnant des échanges intrarégionaux 16.
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Pourtant, des instruments comme les accords de partenariat économique
(APE) dont la négociation est en cours avec l’Union européenne, augmenteront
sensiblement, quoique graduellement, les risques de fraude en matière d’ori-
gine et de classification tarifaire, d’où la nécessité de renforcer les capacités
dans ces domaines. Le contrôle de l’origine pourrait bien constituer le principal
défi des administrations douanières en ce qui concerne les nouveaux accords
préférentiels. Celles-ci devraient mettre au point des programmes pour com-
battre la fraude par un suivi étroit des flux commerciaux, en rehaussant la capa-
cité de détecter les déclarations et documents douteux, et par une assistance
administrative mutuelle efficace entre pays partenaires. L’harmonisation et la
simplification des règles d’origine faciliteraient de telles mesures.
Les principaux accords d’intégration régionale existants dans les PFAS
sont des unions douanières (CEMAC, CAE, UEMOA) et des zones de libre-

16 Au cours des années 2000, en pourcentage du commerce total, le commerce régional


représentait en moyenne 2 % dans la CEMAC, 4 % dans le COMESA, 9 % dans la
CEDEAO et la SADC, et 11 % dans l’UEMOA.
118 Gilles Montagnat-Rentier, Gilles Parent

échange destinées à devenir des unions douanières (Common Market of Eastern


and Southern Africa [COMESA], CEDEAO, South Africa Development Com-
munity [SADC]). Le nombre de ces accords et, plus problématique encore, la
concomitance des règles attribuables à leur chevauchement, compliquent l’acti-
vité douanière, surtout en ce qui concerne la détermination de l’origine des
marchandises et la normalisation des procédures. Les formalités douanières
sont encore en vigueur aux frontières internes des unions douanières. Sur
l’expérience de l’Union européenne, et comme première étape, l’on pourrait
permettre aux importateurs de payer les droits de douane séparément des
taxes intérieures (à la frontière externe ou sur le territoire après une procédure
de transit), accordant ainsi aux marchandises un « statut communautaire ».
Les taxes intérieures sur les importations seraient payées dans le pays de desti-
nation finale. Des bureaux de douane juxtaposés aux frontières internes
auraient des avantages limités, à moins que les marchandises ne soient contrô-
lées une fois, rapidement, par une équipe conjointe binationale – une option dif-
ficile qui n’a pas encore été envisagée.

Facilitation du commerce et services

Les autorités et les responsables douaniers ont pris une conscience nettement
accrue de la nécessité pour les douanes de faciliter le commerce, surtout dans
les pays dont les programmes gouvernementaux accordaient une grande
importance à l’amélioration du climat des affaires et dans les principaux ports
maritimes, qui se livrent concurrence pour capturer le commerce régional 17.
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Les mesures douanières axées sur la facilitation du commerce ont rarement
fait l’objet de plans d’actions spécifiques, elles ont consisté à résoudre les pro-
blèmes constatés ou soulevés par les opérateurs. Même si les progrès ont été
inégaux, les améliorations récentes constatées dans les enquêtes internationa-
les sur une courte période constituent des signaux positifs. Il s’agit notam-
ment de l’efficacité accrue des douanes et de la réduction du nombre de
documents nécessaires pour importer et exporter.
Les administrations douanières ont pris soin de limiter les délais de
dédouanement des marchandises. Les responsables douaniers et les commerçants
ont indiqué que les opérations relevant exclusivement des fonctionnaires de
douane ne duraient pas plus de 24-48 heures. Ces résultats sont conformes au
Logistics Performance Index (LPI) de la Banque Mondiale (tableau 2). Toutefois,

17 La facilitation du commerce fait partie du programme de travail du cycle de Doha. L’objec-


tif est d'accélérer la circulation, la libération et le dédouanement des marchandises, y com-
pris celles en transit. Les articles pertinents du GATT 1994 sont les suivants : Article V
(“Liberté de transit”), Article VIII (“Frais et formalités liés à l’importation et l’exporta-
tion”), et Article X (“Publication et administration des règles commerciales”).
Réforme et modernisation des douanes en Afrique subsaharienne francophone 119

le suivi régulier des procédures de dédouanement n’est généralement pas assuré,


à quelques exceptions notables près (Cameroun), et la prévisibilité des opéra-
tions, souci majeur des commerçants, n’est pas encore garantie. À noter que
des retards sont souvent indûment imputés à l’administration douanière.

Tableau 2 : Durée du dédouanement dans certains pays francophones d’Afrique


subsaharienne et par région, 2010

Durée du dédouanement (jours)


Sans inspection Avec inspection
physique physique
Pays
Burkina Faso 2,00 3,00
Cameroun 2,64 3,31
Gabon 5,89 9,12
Mali 2,00 3,00
Mauritanie 0,50 1,00
Sénégal 1,73 3,16
Tchad 1,00 15,00
Togo 0,71 2,45
Région
Afrique subsaharienne
2,06 5,05
francophone (pays ci-dessus)
Afrique subsaharienne 2,83 4,94
Asie orientale et Pacifique 1,55 3,36
Europe et Asie centrale 1,48 1,89
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Amérique Latine et Caraïbes 1,62 3,41
Moyen-Orient et Afrique du Nord 1,78 2,91
Asie du Sud 2,17 3,20
Niveau de revenu
Pays à haut revenu 0,83 1,83

Source : Logistics Performance Index, Connecting to Compete 2010 ; et McLinden


et al. (2011).

Des cadres de consultation ont été établis, soit au niveau décisionnel à tra-
vers des réunions périodiques et des comités, soit au niveau opérationnel à
travers diverses initiatives comme par exemple : une « Journée du partenaire »
organisée chaque semaine au bureau des douanes du port de Pointe-Noire
afin de résoudre rapidement les litiges ; un Observatoire de la célérité du
dédouanement créé au port d’Abidjan ; une direction de la facilitation et du par-
tenariat avec l’entreprise à la douane du Sénégal. Le secteur privé reconnaît
que l’administration douanière accorde une attention accrue à ses besoins,
mais déplore les carences dans la mise en œuvre des décisions, les divergences
d’interprétation de la loi entre les agents de terrain et les services centraux,
ainsi que l’insuffisance des consultations et l’absence de préavis lorsque des
120 Gilles Montagnat-Rentier, Gilles Parent

changements interviennent. L’exercice du droit de recours montre que les


interactions entre les usagers et les administrations sont effectives, mais peu for-
malisées, ce qui accroît le risque de décisions discrétionnaires.
De solides partenariats susceptibles de contribuer à la résolution des pro-
blèmes d’intérêt commun et de promouvoir l’application spontanée des règles
tardent à se matérialiser. Toutefois, la mise en place de sites Internet doua-
niers (encore incomplets) et les efforts de diffusion des instructions adminis-
tratives aux organisations professionnelles ont amélioré l’accès aux règles
douanières. La simplification des procédures de dédouanement pour les opé-
rateurs agréés est encore limitée dans les PFAS. Les dispositions douanières
visant à encourager l’activité manufacturière dans les pays (par exemple, les
procédures de perfectionnement actif et de ristourne des droits de douane)
sont prévues dans la loi, mais sont peu utilisées, sauf dans les pays plus indus-
trialisés et dans ceux où les zones franches appliquent de telles dispositions
(Togo, Madagascar). Le nombre de redevances et les divers prélèvements sur
les importations et les exportations sont importants au regard de la facilita-
tion des échanges. Dans les PFAS, aucune mesure décisive n’a été prise pour
réduire ces coûts additionnels. L’émission de certificats et d’autorisations
préalables au dédouanement engendre des frais élevés. Sur le plan douanier,
l’addition de la redevance destinée à la maintenance et à l’extension du sys-
tème informatique douanier, de la redevance d’inspection par scanneur, et de
celle relative aux services des sociétés d’inspection (généralement à la charge
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des opérateurs) entraîne également une charge substantielle dans la plupart
des pays. Le plus souvent, les frais statistiques s’élèvent à 1 % de la valeur
c.a.f. des marchandises, et les frais d’inspection à au moins 0,7 % de cette
valeur.

Contrôles douaniers, gestion des risques et lutte contre la fraude


Les administrations douanières ont fait des efforts pour renforcer le contrôle
traditionnel dans les bureaux de dédouanement. La prise en charge des con-
teneurs et des marchandises a été améliorée, avec des méthodes nécessaire-
ment différentes selon la gestion des terminaux portuaires et le degré de
sécurisation des enceintes portuaires. Le recours aux scanneurs pour vérifier
le contenu des conteneurs et des camions s’est répandu au cours des cinq der-
nières années. Le nombre d’infractions qu’ils ont permis de constater est fai-
ble, mais ils ont un effet dissuasif probable, quoique difficilement
quantifiable. Les données du LPI (tableau 3) montrent que certains PFAS
visés par l’enquête ont réduit les taux d’inspection physique et d’autres l’uti-
lisent encore excessivement – les missions d’assistance technique ont cepen-
dant parfois observé des taux d’inspection physique plus élevés que ceux
Réforme et modernisation des douanes en Afrique subsaharienne francophone 121

indiqués dans ce tableau. D’après le LPI, l’inspection physique est beaucoup


plus courante dans les pays ayant une faible performance logistique.

Tableau 3 : Inspections physiques de marchandises dans certains pays franco-


phones d’Afrique subsaharienne, 2010 1/

Inspections physiques
Inspection physique
multiples
(% des cargaisons
(% des cargaisons
importées)
physiquement inspectées)
Burkina Faso 75 35
Cameroun 12 4
République Centrafricaine 50 n.d.
Gabon 55 3
Mali 75 3
Mauritanie 50 1
Sénégal 18 1
Tchad 18 18
Togo 9 18

Source : Logistics Performance Index, Connecting to Compete 2010.


1/ Sont incluses les inspections par les administrations chargées des normes
techniques et sanitaires.

Les changements dans l’organisation et les méthodes de contrôle douanier


ne se sont pas produits comme prévu. Les contrôles après mainlevée, courants
et obtenant de bons résultats dans les administrations plus avancées, restent
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peu utilisés dans les PFAS (bien évidemment, les risques liés à la sécurité et
aux trafics illicites exigent partout des mesures immédiates). Dans la plupart
des PFAS, les unités de contrôle après dédouanement sur pièces n’existent
pas ou ne sont pas opérationnelles ; les unités chargées des contrôles et enquê-
tes chez les opérateurs commerciaux ne sont pas à la mesure des défis qu’ils
doivent relever notamment pour la vérification des entreprises multinationales
et des grands opérateurs économiques du secteur informel. La majeure partie
des inspecteurs et enquêteurs n’ont ni la formation, ni les accréditations pro-
fessionnelles nécessaires. Les administrations douanières ont présenté des
arguments qui expliquent en partie ce constat : difficultés de la formation,
manque de discipline dans l’application du numéro d’identification fiscale
(NIF) aux importateurs et exportateurs, difficultés pour localiser les opéra-
teurs, assurer la traçabilité de leurs transactions en l’absence de documents
comptables fiables et recouvrer les droits impayés. Les administrations conti-
nuent d’accorder la préférence aux inspections aux frontières où les marchan-
dises constituent la garantie du paiement des droits de douane. Travaillant
dans leur propre intérêt, les inspecteurs préfèrent aussi procéder à l’inspec-
tion des marchandises avant dédouanement.
122 Gilles Montagnat-Rentier, Gilles Parent

Du fait de l’absence d’une fonction véritable d’analyse du risque, la sélec-


tivité des contrôles est demeurée rudimentaire. Les critères de sélection des
contrôles se sont révélés trop prévisibles et peuvent avoir été préjudiciables.
Les administrations douanières du Burkina Faso, de la Côte d’Ivoire, du Mali,
et du Sénégal ont lancé des projets visant à automatiser l’analyse du risque en
2009 avec l’appui technique de l’AFRITAC. Geourjon et Laporte (2005) ont
démontré les avantages théoriques du ciblage automatique et rationnel des
transactions douanières à inspecter. Le maintien et l’exploitation de bases de
données fiables sont une première étape clé de la mise en place de la fonction
de gestion du risque en douane qui pourrait être complétée par le développe-
ment de cette fonction en vue d’améliorer la sélectivité des autres contrôles à
la frontière, par exemple celui des normes sanitaires et phytosanitaires (Gri-
goriou, 2012).
La profession de commissionnaire en douane agréé, intermédiaire chargé
de faciliter les opérations en douane, reste mal surveillée par les administrations
douanières. Les recommandations visant à améliorer le niveau de la profession
n’ont pas été suivies d’effet. À l’heure actuelle, le métier est un milieu dispa-
rate dans lequel certains commissionnaires sont peu fiables et s’emploient en
fait à favoriser la fraude en douane.
En matière de lutte contre la fraude organisée, l’assistance technique du
FMI a été axée sur la fraude concernant les recettes. Néanmoins, les recom-
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mandations formulées pouvaient être adaptées, selon les besoins, pour mieux
combattre le commerce illicite tel que le trafic de stupéfiants ou de produits
dangereux, une mission clé de la douane. Plusieurs facteurs ont freiné les
réformes à cet égard. La priorité donnée au recouvrement des droits de
douane a relégué la mission de répression au second rang des préoccupations.
La mise en place d’unités d’intervention spécialisées et bien équipées s’est
avérée un projet de modernisation complexe et coûteux. Malgré des progrès
dans la formation des agents et le matériel de détection, et quelques succès
dans la saisie de cargaisons de drogue, les capacités douanières restent faibles.
La surveillance mobile des frontières, le ciblage des produits illicites et l’échange
d’information sur la fraude avec les administrations douanières étrangères,
n’atteignent pas le niveau opérationnel requis. La surveillance maritime est
quasiment inexistante. La dissuasion est encore plus affaiblie par les rares
poursuites pénales, même pour les cas de fraude graves.
Réforme et modernisation des douanes en Afrique subsaharienne francophone 123

Coopération avec les administrations fiscales pour mobiliser les ressources


intérieures
Il est apparu très vite évident que les administrations douanières devaient être
parties prenantes aux réformes visant à générer plus de ressources fiscales inté-
rieures. Les administrations douanières ont appliqué la TVA sur les importa-
tions (en 2010, tous les PFAS avaient introduit cette taxe à l’exception de la RDC
et de l’Union des Comores) 18, qui est devenue le poste de recettes douanières le
plus important, se situant en moyenne entre 45 et 65 % du montant brut de la
TVA dans les PFAS. La plupart des administrations douanières identifient
désormais les importateurs et exportateurs par le Numéro d’Identification Fis-
cale (NIF) attribué par la direction des impôts 19. Mais des carences subsistent en
matière de mise à jour des bases de données NIF par les administrations fiscales,
et de recours abusifs des douanes à des numéros génériques pour des opérations
indûment libellées comme non commerciales 20. La douane transmet les données
afférentes aux importations et aux exportations à la direction des impôts dans de
nombreux pays mais cette mesure n’est pas encore appliquée partout par accès
électronique au système informatique de la douane. L’échange de renseigne-
ments sur la fraude reste aussi rare que le sont les interventions mixtes.
S’agissant de la mobilisation des recettes liées aux ressources naturelles,
la valeur ajoutée de la douane à travers le contrôle des flux exportés et la mise
à disposition de données demeure insuffisante. Il y a pénurie d’agents des
douanes spécialisés dans les secteurs pétrolier, minier et forestier, et l’impor-
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tance économique des ressources naturelles n’est pas suffisamment reflétée
dans la structure des services. Toutefois, des initiatives opportunes ont été
lancées (communication par les services douaniers de la Côte d’Ivoire de don-
nées sur les hydrocarbures à un comité gouvernemental, douanes gabonaises
dotées d’une équipe spécialisée dans l’application de valeurs forfaitaires au
bois exporté).

Gestion des ressources humaines, formation et intégrité


De sérieuses lacunes persistent dans la gestion des ressources humaines.
Dans la plupart des PFAS, le ministère de la fonction publique est responsable
du recrutement des nouveaux agents des douanes, qui s’effectue en général
sans consultation préalable suffisante avec les administrations douanières.
Cela ne permet pas la prise en compte des impératifs de qualification et de

18 En RDC, la TVA a été introduite en janvier 2012.


19 De bonnes pratiques d’immatriculation des opérateurs ont été constatées au Port de
Moroni (Comores).
20 Ceci nuit aux contrôles douaniers après dédouanement, comme précédemment indiqué,
et aux contrôles fiscaux.
124 Gilles Montagnat-Rentier, Gilles Parent

dotation en effectifs. De plus, les interventions extérieures et le transfert


d’agents non qualifiés d’autres ministères perturbent le recrutement et
l’affectation. La dotation en effectifs des directions des douanes des PFAS est
en général adéquate, voire excessive dans un certain nombre de pays. Le per-
sonnel est cependant mal réparti. Les principaux problèmes relevés sont la
concentration dans les grandes villes, en dépit des besoins aux frontières ; les
affectations fonctionnelles privilégiant les postes au contact des opérateurs ;
la rotation excessive des agents des douanes entre les postes ; l’excès de per-
sonnels administratifs et de généralistes 21 ; et la désignation de personnes
sans expérience préalable de supervision de personnel à des postes de direc-
tion. Il n’existe pas de politique prospective de recrutement ni de gestion des
carrières ou de promotion. Les outils de gestion sont à peine développés, à
l’exception de quelques pays.
La formation des agents des douanes demeure insuffisante. Plusieurs
pays souhaitent créer une école de la douane ou au moins un centre de forma-
tion mais disposent de peu de moyens pour gérer un tel établissement. Le
manque de spécialistes est général alors qu’une administration douanière
moderne ne laisse guère de place à la permutation des personnels. La forma-
tion des spécialistes reste occasionnelle et ne répond que partiellement aux
besoins réels. Les pays ont bénéficié d’actions de formation de partenaires
techniques et financiers, et parfois de sociétés d’inspection. Ces efforts n’étant
pas intégrés à une gestion moderne des ressources humaines, ils ont été trop
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souvent anéantis par les pratiques de réaffectation des agents et la non prise
en compte des qualifications acquises.
Les administrations douanières disposent en général de gestionnaires
expérimentés, souvent formés à l’étranger, mais elles font face à des difficul-
tés quant au personnel d’encadrement moyen et débutant. La plupart des
membres du personnel qui accèdent à des postes de responsabilité n’ont
qu’une maîtrise partielle des fonctions de planification, de contrôle et d’éva-
luation. Les récentes missions d’assistance technique ont constaté la pénurie
de membres du personnel pouvant assurer immédiatement la relève des pos-
tes de direction. L’AFRITAC de l’Ouest a fourni une assistance technique en
matière de gestion des ressources humaines à plusieurs de ses membres
depuis 2010.

21 Pour tirer parti de l’investissement dans les formations spécialisées tout en limitant les
risques de corruption, il est en général recommandé que le personnel reste à un poste
donné pendant environ trois ans.
Réforme et modernisation des douanes en Afrique subsaharienne francophone 125

La corruption au sein des services douaniers reste une grande préoccupa-


tion, attestée par de nombreux travaux (Stasavage et Daubrée, 1998 et Hors,
2001 par exemple). Selon la déclaration révisée d’Arusha, adoptée sous l’égide
de l’OMD, les PFAS ont adopté et diffusé des codes de conduite ou de déonto-
logie au sein des administrations douanières, bien qu’ils ne soient pas stricte-
ment appliqués. Les manquements sont rarement sanctionnés par des
mesures disciplinaires appropriées. Néanmoins, l’automatisation a certaine-
ment permis de limiter la corruption et la fraude, grâce à des dispositifs de
sécurité dans les procédures, la réduction des contacts en personne, le suivi
des opérations antérieures et l’amélioration de la surveillance opérationnelle.
Avec l’assistance technique de la Banque mondiale et de la France, le Came-
roun a efficacement utilisé SYDONIA++ pour la surveillance du dédouane-
ment 22. La Mauritanie a expérimenté le recoupement des données de la
société d’inspection avec celles des bureaux de douane.
Les politiques de rémunération varient considérablement d’un pays à
l’autre. Les salaires de base sont généralement très bas, tandis que de subs-
tantiels compléments de salaire sont obtenus sous forme de divers bonus. Ce
système favorise les postes qui offrent un contact direct avec les opérateurs et
devient une forme d’incitation à donner la priorité aux avantages immédiats.
Sur la base de bonus qui sont souvent peu justifiés, il pose des questions quant
à l’équité de la redistribution et au manque de transparence. Tous les PFAS
doivent se doter de politiques salariales saines et exhaustives pour les agents
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de la douane, qui soient intégrées à tous les autres aspects de la gestion des
ressources humaines.

Organisation, budget et gestion de la direction des douanes

Les administrations des douanes et des impôts des PFAS sont des services
du ministère des finances ou, rarement, du ministère de l’économie (Gabon).
Au Burundi cependant, à compter de 2009, les administrations des douanes et

22 En janvier 2008, l’administration douanière du Cameroun a mis en place un programme


interne de contrôle opérationnel basé sur 24 indicateurs dans 11 bureaux des douanes
visant la performance en matière de revenu et de facilitation, et portant sur l’éthique
professionnelle. La Banque Mondiale et la Coopération française ont appuyé cette ini-
tiative. Les revenus ont augmenté de façon significative en 2008 comparativement à
2007, et cette augmentation n’était pas entièrement attribuable à l’activité économique
(Libom Li Keng, Cantens et Bilangna, 2009). Comme deuxième étape, ces indicateurs
ont été intégrés dans les contrats individuels de performance passés entre les cadres
opérationnels et le Directeur général de la douane. L’objectif du contrat de performance
vise l’amélioration du respect des règles et n’a pas comme objectif principal l’optimisa-
tion de la gestion des ressources (Cantens, Raballand, Bilangna, Djeuwo, 2012).
126 Gilles Montagnat-Rentier, Gilles Parent

de l’impôt ont été intégrées à l’Office burundais des recettes qui a été doté
d’une autonomie de gestion supérieure à celle dont une direction administra-
tive est normalement dotée 23. En revanche, l’administration des douanes de
la République Démocratique du Congo (RDC), établie dans les années 1980 en
tant qu’office des douanes et des accises semi-autonome est récemment rede-
venue une direction du ministère des finances. Se fondant sur les résultats
d’un questionnaire envoyé aux agences semi-autonomes existantes et d’un
examen de la littérature, Kidd et Crandall (2006) ont conclu que le modèle de
l’agence fiscale, adopté par de nombreux pays (en particulier en Afrique
anglophone et en Amérique latine), présente des avantages en termes d’auto-
nomie et de reddition des comptes mais que son établissement doit s’accompa-
gner d’un ferme engagement d’opérer des réformes pour améliorer l’efficacité
de la perception des recettes et le respect des obligations fiscales. Le débat sur
cette question reste ouvert et il faudra analyser attentivement les change-
ments organisationnels récemment opérés.
Dans les directions des douanes des PFAS, la structure de l’administration
centrale répond généralement aux besoins de l’organisation fonctionnelle
recommandée. Il lui faut encore mieux intégrer et confier à des spécialistes les
nouvelles fonctions, telles la gestion des risques et les services aux entreprises
et autres usagers. L’organigramme devrait également prendre en compte les
préoccupations liées aux « gros clients » (importateurs et exportateurs appor-
tant la plupart des recettes ou bénéficiant de la plupart des exonérations) et aux
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secteurs économiques-clés. Les fonctions de l’administration centrale et des ser-
vices extérieurs sont délimitées mais il convient de mieux marquer la sépara-
tion entre les missions du siège (fonctions de conception, de gestion et
d’évaluation) et les fonctions opérationnelles, même s’il est nécessaire de trou-
ver des compromis organisationnels viables dans les petites structures. Les
bureaux de dédouanement sont assez bien situés pour contrôler les flux com-
merciaux. Leur structure interne se rationalise au fur et à mesure de l’informa-
tisation. Au contraire, les postes frontaliers situés loin des centres économiques
souffrent de l’isolement et de conditions de travail médiocres. Pour réduire
l’évasion frauduleuse des recettes liées aux échanges, la République Centra-
fricaine prévoit de construire à la frontière un bureau de douane à part
entière, sur l’axe reliant Douala à Bangui.
La plupart des services douaniers des PFAS continuent de souffrir d’une
insuffisance notoire de ressources budgétaires et matérielles. Les dotations
budgétaires sont de montant inégal, de paiement incertain, et chroniquement

23 Le projet en cours bénéficie d’une assistance technique du Department for International


Development (DfiD) (Ministère de la coopération du Royaume-Uni) et de la Belgique.
Réforme et modernisation des douanes en Afrique subsaharienne francophone 127

insuffisantes. Les administrations des douanes ont recours à d’autres sources


de financement, d’un montant limité et affectées en partie à la rémunération
du personnel, telles qu’une fraction des redevances de traitement des données
ou des redevances statistiques perçues, ou une fraction des amendes collectées.
Dans de nombreux cas, des besoins essentiels ne sont pas satisfaits, concernant
par exemple l’alimentation électrique des systèmes automatisés, le réseau de
télécommunications, ou la rénovation des locaux du personnel. À ce jour, la
recommandation faite de centraliser toutes les ressources et dépenses n’a pas
encore été appliquée alors qu’il est essentiel de disposer d’un budget consolidé
pour appuyer les décisions stratégiques, planifier les investissements et pro-
mouvoir la transparence.
Grâce aux activités de l’OMD, les hauts fonctionnaires connaissent bien
les normes internationales et les objectifs stratégiques des douanes. Toutefois,
peu d’outils de gestion sont utilisés pour diffuser ces objectifs en vue d’établir
des plans d’action pertinents au sein de chaque unité et d’assurer le suivi des
résultats. Les objectifs et actions du personnel sont axés sur le recouvrement
de recettes à court terme. Dans la mesure où l’on accorde peu d’attention aux
voies empruntées pour obtenir des résultats, il existe peu d’analyses des fac-
teurs susceptibles d’influencer la performance en matière de recettes. Cela a
pour effet d’encourager le travail individuel et de limiter l’exploitation des
synergies entre les services douaniers. Les administrations des douanes des
PFAS souffrent d’une façon générale de l’absence de suivi et de rapports sur
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les opérations, alors même que les données et informations se trouvent déjà
dans le système informatique. Des outils de gestion de ce type ont toutefois
été introduits dans quelques administrations des douanes (Cameroun et Côte
d’Ivoire par exemple). L’audit et l’inspection internes sont peu valorisés et
rarement utilisés, mais quelques pays ont pris des mesures pour remédier à
cette situation. Dans certains pays, l’inspection générale du ministère des finan-
ces inspecte les administrations des douanes. Il reste que les audits externes des
procédures, systèmes et budgets des douanes ne sont pas courants.

4 TENDANCES DES RECETTES DOUANIÈRES


ET QUELQUES INDICATEURS DE PERFORMANCE
DOUANIÈRE

Un certain nombre de données disponibles sont regroupées ci-dessous en vue


d’aider à mieux apprécier les performances des douanes dans les PFAS. Peu
d’instruments nationaux existent à cet effet. L’administration des douanes
n’est cependant que l’un des facteurs déterminant les recettes et seule une
128 Gilles Montagnat-Rentier, Gilles Parent

analyse détaillée, par pays, permettrait d’évaluer l’impact de chacun d’eux,


parmi lesquels la structure des importations, la part des importations totale-
ment ou partiellement non-taxées, et la politique des taux.

4.1 Tendances en matière de recettes douanières


Les recettes générées par les droits de douane et autres droits d’importation,
en pourcentage du PIB total des PFAS, ont subi une légère baisse entre 1996
et 2009, passant de 3,06 % à 2,82 % du PIB (voir graphique 1) 24. Le taux de
droits de douane prélevés a chuté de 19,5 % à 11,1 % pendant cette même
période 25. Les importations de marchandises ont augmenté, passant de
15,7 % du PIB en 1996 à 25,4 % du PIB en 2009. Leur croissance est plus
rapide que celle du PIB depuis 2000.

Graphique 1 : Pays francophones d’Afrique subsaharienne : Importation de


marchandises et droits de douane, 1996-2009
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24 Les droits de douane et autres droits à l’importation sont les principaux composants des
taxes spécifiques au commerce extérieur. Ils peuvent être corrélés aux opérations
douanières. La TVA et les droits d’accise sur les importations, ainsi que les taxes à l’expor-
tation dans certains pays, constituent aussi des revenus douaniers. Il faut souligner que
certains ajustements ont dû être opérés sur les droits de douane et autres droits à l’impor-
tation, à cause des carences et de l’absence de données. Les données incluent, pour cer-
tains pays, la TVA ou des taxes sur le chiffre d’affaires appliquées aux produits importés.
25 Ici, le taux de droits de douane prélevés est la somme des droits de douane et autres
droits à l’importation prélevés, rapportée à la valeur en douane des importations.
Réforme et modernisation des douanes en Afrique subsaharienne francophone 129

Les tendances relatives aux pays francophones de l’UEMOA 26 sont simi-


laires à celles de l’ensemble de l’Afrique subsaharienne francophone. La nette
baisse du taux des droits de douane prélevés en 2000 correspond à la princi-
pale phase de réforme des droits de douane. Les droits de douane et autres
droits à l’importation y représentaient 3 % du PIB régional en 2009, contre
3,9 % en 1996. Dans les pays francophones de la CEMAC 27, les droits de
douane et autres droits à l’importation sont restés quasiment stables sur la
période (2,4 % du PIB en 2009 contre 2,55 % en 1996). La croissance des
importations était équivalente à celle de l’UEMOA. Pour le groupe des PFAS
non membres de l’UEMOA, ni de la CEMAC 28, les recettes des douanes et des
autres droits à l’importation représentaient 2,4 % du PIB en 2009, contre
1,9 % en 1996. De 2003 à 2008 une croissance rapide des importations a été
enregistrée. La possibilité de taux de droits de douane maximisant les recettes
devrait être étudiée de plus près pour expliquer ces résultats, bien que
d’amples variations des taux et des évolutions dans le temps soient observées
au niveau des différents pays 29. Le tableau 4 montre un recul du taux des
droits de douane prélevés dans dix pays, et une augmentation dans sept
autres 30. Quinze pays ont enregistré une croissance des importations de mar-
chandises en pourcentage du PIB entre 1996 et 2009 (10 pays ayant enregis-
tré une croissance de plus de 30 % par rapport à 1996). Dans les trois pays
restants, le recul de la part des importations en pourcentage du PIB est resté
limité. L’évolution des droits prélevés en pourcentage du PIB a varié
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considérablement d’un pays à l’autre.

26 L’UEMOA compte sept membres francophones (le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire,
le Mali, le Niger, le Sénégal, et le Togo), et un membre lusophone, la Guinée-Bissau.
27 LA CEMAC compte cinq membres francophones (la RCA, le Cameroun, la République
du Congo, le Gabon. et le Tchad) et un membre hispanophone, la Guinée Équatoriale.
28 Le Burundi, les Comores, la RDC, la Guinée, Madagascar et la Mauritanie.
29 Sur l’analyse des implications sur les recettes de la libéralisation des échanges, incluant
un débat sur les taux de droits de douane maximisant les recettes, voir Ebrill, Stotsky,
and Gropp (1999).
30 Les données du Tableau 4 excluent, pour tous les pays, les taxes indirectes intérieures
sur les importations.
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Tableau 4 : Pays francophones d’Afrique subsaharienne : Importation de marchandises et droits de douane, 1996–2009
Droits de douane et autres droits d’importation
130

En % de la valeur des importations


Importations de biens en % du PIB de biens (taux de droits de En % du PIB
douanes prélevés)
1996 2009 Variation (%) 1996 2009 Variation (%) 1996 2009 Variation (%)
Bénin 12,9 14,8 14,7 15,4 26,9 74,7 2,0 4,0 100,0
Burkina Faso 17,1 17,9 4,7 17,7 12,6 -28,8 3,0 2,3 -23,3
Burundi 11,5 20,2 75,7 19,6 13,1 -33,2 2,3 2,7 17,4
Cameroun 11,6 19,9 71,6 11,0 11,0 0,0 1,3 2,7 107,7
RCA 14,2 12,9 -9,2 23,1 10,5 -54,5 1,9 1,4 -26,3
Comores 21,3 31,9 49,8 14,1 11,8 -16,3 3,0 3,8 26,7
Rép. du Congo 11,8 12,1 2,5 24,6 12,2 -50,4 2,9 1,5 -48,3
RDC 14,0 44,5 217,9 8,4 7,9 -6,0 1,2 3,5 191,7
Côte d’Ivoire1 10,6 12,1 14,2 43,1 11,7 -72,9 4,5 3,1 -31,1
Gabon 16,9 16,8 -0,6 13,0 19,1 46,9 2,2 3,2 45,5
Gilles Montagnat-Rentier, Gilles Parent

Guinée 15,1 26,4 74,8 9,6 10,6 10,4 1,4 2,8 100,0
Madagascar 16,1 28,3 75,8 11,3 15,4 36,3 1,8 1,0 -44,4
Mali 19,1 24,9 30,4 10,7 11,4 6,5 2,0 2,8 40,0
Mauritanie 31,2 47,2 51,3 9,1 3,1 -65,9 2,9 1,5 -48,3
Niger 18,7 20,4 9,1 10,2 18,1 77,5 1,9 3,7 94,7
Sénégal 24,9 33,2 33,3 20,6 8,2 -60,2 5,1 2,7 -47,1
Tchad 15,1 37,1 145,7 13,7 2,5 -81,8 2,1 0,9 -57,1
Togo 35,1 32,6 -7,1 5,6 9,3 66,1 2,0 3,0 50,0
Moyenne non 17,6 25,2 43,2 15,6 12,0 -23,1 2,4 2,6 8,3
pondérée

Sources : Données du Département Afrique et du Département Moyen-Orient et Asie Centrale (pour la Mauritanie) du FMI, et calculs
des auteurs.
1 Côte d’Ivoire: données de 1997.

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Réforme et modernisation des douanes en Afrique subsaharienne francophone 131

Exonérations et suspensions de droits ont eu un fort impact sur le taux


des droits de douane prélevés. Les données disponibles, partielles et insuffi-
santes, ne permettent pas de dégager une tendance générale, mais le poids des
exonérations (tableau 5) est évident, et nous n’avons aucune indication claire
de son recul 31. De plus, les données relatives à l’exonération ne prennent pas
en compte l’admission temporaire de marchandises sur lesquelles les droits
sont suspendus, méthode habituelle lors de l’attribution de ces exonérations
(en conformité en principe avec la législation nationale). L’impact du transit
sous douane sur les droits de douane collectés devrait aussi être évalué. Les
douanes n’ont probablement pas eu d’intervention notable sur l’application
des taux nominaux, ceux-ci ayant été informatisés ; cependant des erreurs de
classification de marchandises dans la nomenclature tarifaire, y compris des
erreurs volontaires, ont pu avoir des conséquences importantes. Par contre, la
tendance des importations laisse penser que le contrôle du fret dans les points
d’entrée principaux et les vérifications des valeurs déclarées ont eu des effets
positifs sur la détermination de l’assiette d’imposition. Nous manquons d’élé-
ments, cependant, pour tirer des conclusions précises quant au rôle des doua-
nes, notamment sur l’évaluation des marchandises. Les douanes estiment
plutôt que la perte de recettes a généralement pour origine la sous-facturation
et les difficultés de contrôle des prix à l’unité. Néanmoins, une partie des
importations a probablement été surestimée, du fait de l’application de
valeurs administrées, d’une application insuffisante des procédures de l’OMC
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(qui a laissé à la discrétion des douanes le soin d’ajuster les valeurs pour
atteindre des objectifs de recettes), ou d’opérateurs cherchant à exporter leurs
capitaux ou à dissimuler leurs profits dans les prix payés à l’extérieur.
Des analyses détaillées, incluant des comparaisons entre pays partenaires,
seraient nécessaires pour mesurer les effets des décisions des douanes sur
l’évaluation du commerce extérieur. Le rapprochement des importations
enregistrées dans les PFAS et les exportations du Reste du Monde vers ces
pays auxquelles on applique l’ajustement habituel de 10 % pour fret et assu-
rances, montre une cohérence des valeurs de 2009 dans deux tiers des PFAS
(à partir des données du Département des Statistiques du FMI). Ces données
doivent être interprétées avec beaucoup de précaution, de multiples facteurs
pouvant être sources d’incohérences, et l’ajustement de 10 % pouvant s’avé-
rer insuffisant dans le cas des pays enclavés d’Afrique subsaharienne.

31 Le Tableau 5 évalue les recettes concédées sur les droits de douane et autres droits à
l’importation, sur la TVA et sur toute autre taxe intérieure sur les importations.
132 Gilles Montagnat-Rentier, Gilles Parent

Tableau 5 : Pays francophones d’Afrique subsaharienne :


Recettes concédées au titre des exonérations à l’importation,
1996-2009 (% du PIB)

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009
Bénin 1,37 2,05 1,20 0,85 0,60 1,44
Burkina 1,85 0,75 0,81
Faso
Burundi 1,19 2,47 5,19 7,00 4,17 4,48 3,72
Cameroun 0,64 0,53 0,46
Rép. du 3,08 2,69 2,82 2,26 5,74 6,15
Congo
RDC 1,31 1,47
Côte
d’Ivoire 0,50 2,33 2,13
Gabon 1,62
Guinée 3,00 2,44 3,49 3,16
Mali 0,89
Niger 1,73 1,11 1,48 0,93
Sénégal 3,42
Tchad 4,96 2,60 2,15 2,00 2,04 2,04
Togo 0,75 0,77

Source : Données des Douanes, Département Afrique du FMI (PIB).

Le Tableau 6 compare les recettes fiscales totales et les droits de douane


des PFAS de 1996 et 2009. Le poids des droits de douane et autres droits
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d’importation dans les recettes fiscales totales a diminué dans dix pays. Ceci est
en cohérence avec le processus de « transition fiscale » des pays en développement
(Chambas, 2005), qui vise à réduire la part des recettes douanières, en les com-
pensant par une fiscalité à moindres effets pervers, telle que les impôts indirects
intérieurs et les impôts directs. Dans des pays où les recettes fiscales totales
ont nettement augmenté (onze-douze pays), les douanes n’ont été ni le seul, ni
le principal contributeur 32. Sur les huit pays où le poids des droits de douane
et autres droits d’importation en % du PIB a baissé, six ont compensé les per-
tes de recettes par des recettes fiscales intérieures. Ce qui laisse penser que les
PFAS ont gagné en efficacité pour récupérer des recettes abandonnées du fait
de la libéralisation des échanges 33.

32 Pour des explications sur la contribution des réformes de l’administration fiscale à


l’augmentation des recettes intérieures, voir Fossat et Bua, 2012 (à paraître).
33 En 2005, Baunsgard et Keen ont constaté que la récupération des recettes douanières
perdues avait été très faible dans les pays à faible revenu au cours des 25 dernières
années.
Réforme et modernisation des douanes en Afrique subsaharienne francophone 133

Tableau 6 : Pays francophones d’Afrique subsaharienne :


Droits de douane et recettes fiscales totales, 1996-2009

Droits de douane
Droits de douane
Recettes fiscales et autres droits
et autres droits
totales d’importation1
d’importation1
(% du PIB) (% des recettes
(% du PIB)
Pays fiscales totales)

Variation

Variation

Variation
1996

2009

1996

2009

1996

2009
(%)

(%)

(%)
Bénin 12,6 16,1 27,8 2,0 4,0 100,0 15,9 24,8 56,0
Burkina 11,5 12,5 8,7 3,0 2,3 -23,3 26,1 18,4 -29,5
Faso
Burundi 13,0 17,0 30,8 2,3 2,7 17,4 17,7 15,9 -10,2
Cameroun 9,8 12,7 29,6 1,3 2,7 107,7 13,3 21,3 60,2
RCA 6,0 8,7 45,0 1,9 1,4 -26,3 31,7 16,1 -49,2
Comores 11,7 10,8 -7,7 3,0 3,8 26,7 25,6 35,2 37,5
Rép. du
10,9 8,2 -24,8 2,9 1,5 -48,3 26,6 18,3 -31,2
Congo
RDC 6,0 12,4 106,7 1,2 3,5 191,7 20,0 28,2 41,0
Côte
d’Ivoire2 18,7 16,5 -11,8 4,5 3,1 -31,1 24,1 18,8 -22,0
Gabon 10,6 16,0 50,9 2,2 3,2 45,5 22,0 20,0 -9,1
Guinée 6,7 11,7 74,6 1,4 2,8 100,0 20,9 23,9 14,4
Madagascar 8,5 12,1 42,4 1,8 1,0 -44,4 21,2 8,3 -60,8
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Mali 12,9 17,1 32,6 2,0 2,8 40,0 15,5 16,4 5,8
Mauritanie 13,3 13,4 0,8 2,9 1,5 -48,3 21,8 11,2 -48,6
Niger 7,1 13,8 94,4 1,9 3,7 94,7 26,8 26,8 0,0
Sénégal 15,0 18,0 20,0 5,1 2,7 -47,1 34,0 15,0 -55,9
Tchad 6,4 6,4 0,0 2,1 0,9 -57,1 32,8 14,1 -57,0
Togo 13,0 15,4 18,5 2,0 3,0 50,0 15,4 19,5 26,6

Sources : Données du Département Afrique et du Département Moyen-Orient


et Asie Centrale (pour la Mauritanie) du FMI, Fossat and Bua (à paraître,
2012), et calculs des auteurs.
1 Exclut la TVA, les autres taxes sur le chiffre d’affaires, et les taxes à l’expor-
tation.
2 Côte d’Ivoire : données de 1997.

4.2 Résultats des contrôles douaniers


Les données du Tableau 7 (l’identité des pays n’est pas indiquée pour des rai-
sons de confidentialité) montrent essentiellement que les montants des droits
et pénalités résultant des contrôles douaniers sont faibles, sauf exception, ce
qui confirmerait l’impact limité des inspections et autres formes de vérifica-
134 Gilles Montagnat-Rentier, Gilles Parent

tions douanières, et la nécessité d’un contrôle sélectif. L’assistance technique


du FMI a par ailleurs recommandé l’automatisation afin de favoriser une
transmission complète et en temps utile des infractions par les bureaux des
douanes.

Tableau 7 : Résultats des contrôles douaniers dans une sélection


de pays francophones d’Afrique subsaharienne

Nombre d’infractions Amendes, droits et taxes


Pays Année
douanières (% des recettes douanières)
1 2000 3 036 1,52
2001 2 359 2,13
2003 674 1,58
2004 1 165 1,27
2005 1 703 1,28
2 2008 n.d. 0,83
2009 n.d. 0,33
3 2005 15 0,05
4 2007 39 0,96
2008 n.d. 1,09
5 2003 73 0,77
2004 29 0,89
2006 n.d. 0,98
6 2005 272 8,23
7 2004 n.d. 0,43
2005 n.d. 0,34
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8 2004 172 2,49
2006 48 0,94
9 2008 132 3,68
2009 82 10,89

Source : Douanes.

4.3 Efficacité des douanes et impact sur la facilitation


du commerce
L’étude Doing Business de la Banque Mondiale et de la Société Financière
Internationale (SFI), dans le cadre du thème du « Commerce Transfrontalier »,
évalue les procédures d’import-export à partir de trois critères : le temps, les
documents et le coût. Sans être spécifique aux douanes, l’étude met en évi-
dence des conclusions et tendances sur la facilitation du commerce internatio-
nal dont les douanes sont parties prenantes. Pour le « Commerce
Transfrontalier » (tableau 8) la moyenne des PFAS se situe au 147e rang sur
183 en 2009, 1 étant le rang le plus élevé en matière de facilitation. Ce résultat
est meilleur que celui du classement de l’indice général « Facilité de Faire des
Réforme et modernisation des douanes en Afrique subsaharienne francophone 135

Affaires » où la moyenne des PFAS n’apparaîtrait qu’au 166e rang 34.


Entre 2006 et 2011, le Burkina Faso, Madagascar, le Mali, le Sénégal et le
Togo ont réduit le temps et la documentation requis pour l’import-export. Il
faut noter que le temps requis pour l’import-export dans Doing Business
inclut les préparations et toutes les formalités (douanières et non douanières),
le dédouanement ne comptant que pour une faible fraction du temps total
requis. Selon le Logistics Perfomance Index (LPI) de la Banque Mondiale 35,
dans les PFAS, le dédouanement dure en moyenne deux jours sans inspection
physique des marchandises, et cinq jours avec inspection (cf. tableau 2). Ces
résultats sont encourageants. Dans les pays d’Afrique subsaharienne en 2011,
les importations nécessitent en moyenne 8,7 documents (4,9 dans les pays de
l’OCDE). Le Bénin, le Sénégal et le Togo sont en dessous de ce nombre. Le
coût moyen d’importation par conteneur dans les pays d’Afrique Subsaha-
rienne est de 2 492 $US (1 106 $US dans les pays de l’OCDE). Le coût moyen
de la CEMAC est nettement plus élevé (5 069 $US), celui des autres pays fran-
cophones d’Afrique subsaharienne étant en moyenne légèrement inférieur.
Dans le LPI, bien que l’indice de satisfaction par pays montre que les
PFAS sont encore en dessous du résultat médian (tableau 8), sept des treize
douanes nationales évaluées en 2007 et en 2010 ont progressé au cours de
cette courte période : le Bénin, le Burkina Faso, Madagascar, le Niger, le
Sénégal, le Tchad et le Togo. L’Indice de facilitation du commerce du Forum
économique mondial évalue l’efficacité des douanes dans 125 pays. L’indice de
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2010 a classé dix PFAS entre la 86e place (Sénégal) et la 124e (Tchad).

34 Le « Commerce Transfrontalier » est l’un des dix critères retenus par l’indice « Facilité
de Faire des Affaires ».
35 Le Logistics Performance Index de la Banque Mondiale et de ses partenaires utilise des
évaluations par pays établies par 1 000 transporteurs internationaux, afin de saisir les
aspects les plus importants de l’environnement logistique dans six domaines, dont
l’efficacité des procédures de dédouanement.
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Tableau 8 : Pays francophones d’Afrique subsaharienne : Évaluation de l’administration douanière


Forum Économique Mondial, The Global
Banque Mondiale, Banque Mondiale-SFI, Doing
136

Enabling Trade Report 2010—Enabling


Connecting to Compete 2010—Logistics Business: Commerce
Pays Trade Subindex: Efficacité des
Performance Index: Douanes Transfrontalier, 20091
administrations douanières
Rang2 Score3 Rang4 Score5 Rang6
Bénin 80 2,38 112 2,83 127
Burkina Faso 105 2,22 96 3,16 175
Côte d’Ivoire 114 2,16 116 2,74 160
Mali 128 2,08 119 2,69 154
Niger 132 2,06 – – 174
Sénégal 70 2,45 86 3,58 67
Togo 75 2,40 – – 93
Moyenne UEMOA 101 2,25 106 3,00 136
Cameroun 123 2,11 99 3,11 155
RCA – – – – 182
Rép. du Congo 137 2,02 – – 180
Gabon 102 2,23 – – 134
Gilles Montagnat-Rentier, Gilles Parent

Tchad 96 2,27 124 2,32 171


Moyenne CEMAC 115 2,16 112 2,72 164
Burundi – – 113 2,83 176
Comores 142 1,96 – – 135
Rép. Dém. du
Congo 59 2,60 – – 172
Guinée 88 2,34 – – 129
Madagascar 87 2,35 121 2,66 106
Mauritanie – – 118 2,72 163
Moyenne Autres 94 2,31 117 2,74 147
Moyenne
générale 103 2,24 110 2,86 147
1 Dépasse le domaine douanier et inclut le nombre de documents, le temps et le coût pour importer et exporter.
2 Nombre de pays/économies étudiés : 155.
3 Échelle de 1 (moins bon) à 5 (meilleur).
4 Nombre de pays/économies étudiés : 125.
5 Échelle de 1 (moins bon) à 7 (meilleur).
6 Nombre de pays/économies étudiés : 183.

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Réforme et modernisation des douanes en Afrique subsaharienne francophone 137

5 LES FACTEURS QUI AFFECTENT LE COURS


DES RÉFORMES

La présente section met en lumière un certain nombre de facteurs qui ont eu


des effets notables, négatifs pour la plupart, sur le déroulement des opérations
de modernisation dans les PFAS.

5.1 Objectifs fixés aux douanes


Les administrations des douanes modernes doivent gérer les échanges avec
l’étranger conformément à des normes établies visant à garantir la neutralité,
la prévisibilité, la mise en œuvre des politiques de concurrence et de dévelop-
pement et l’intégration dans l’économie mondiale. C’est dans ce cadre et sous
ces contraintes qu’elles doivent mobiliser des recettes. Dans les PFAS, compte
tenu de la focalisation sur le résultat de recettes à court terme, les administra-
tions des douanes n’ont guère été incitées à moderniser dans les domaines qui
ne généreraient pas directement et immédiatement des recettes, et ainsi à
mieux s’aligner sur ces normes. Ainsi, la nature même de l’Accord de l’OMC
sur l’évaluation en douane, qui n’a pas été conçu pour produire des revenus, a
probablement été un obstacle à sa mise en œuvre effective, sans sous-estimer
les difficultés pratiques qu’il présente. Des objectifs douaniers spécifiques à
l’harmonisation des procédures, aux pratiques communes et à la coopération
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mutuelle, par exemple, auraient pu accélérer les progrès de l’intégration
régionale. La politique fiscale n’a également guère été compatible avec les
réformes administratives : le nombre d’exonérations et leur impact sur les
droits étaient en conflit avec l’objectif de maximisation des recettes douaniè-
res, sans compter que l’administration de ces mesures a mobilisé des ressour-
ces importantes.

5.2 Mise en œuvre de la réforme


La plupart des douanes ont formulé des plans d’action pour la mise en œuvre
des réformes, avec une assistance technique, en particulier de l’AFRITAC.
Toutefois, leur exécution a été entravée par la pénurie de professionnels expé-
rimentés. Les chefs et les équipes de projet n’étaient pas affectés à plein-
temps au projet et n’étaient pas intégrés dans une structure chargée d’appli-
quer la réforme. L’absence d’outils de suivi des progrès a aussi été un obsta-
cle à la conduite des réformes. Il existe peu de données détaillées sur les
processus et les résultats. La modernisation est aussi entrée en conflit avec
des priorités immédiates. En l’absence de séparation nette entre les opérations
138 Gilles Montagnat-Rentier, Gilles Parent

courantes et la gestion du changement, et sans l’affectation de ressources sup-


plémentaires aux programmes de modernisation, des remèdes temporaires
ont souvent été préférés aux réformes structurelles. La participation des par-
ties prenantes de la réforme a été sous-optimale. Le secteur privé n’a été ni
suffisamment associé au processus de réforme, ni suffisamment consulté. On
a souvent relevé que les politiques et initiatives menées par les ministères et
organismes chargés du commerce extérieur et de la logistique n’étaient pas
compatibles avec les objectifs de la réforme douanière. Les agents des douanes,
généralement les premiers touchés par les réformes, n’étaient pas suffisam-
ment impliqués et n’adhéraient pas aux changements. Les organismes régio-
naux n’ont finalement eu qu’un rôle limité dans l’application des conventions
et normes internationales, en dehors de l’harmonisation de la législation.
Plusieurs directeurs généraux des administrations des douanes et minis-
tres des finances ne sont restés en poste que peu de temps, ce qui a compromis
la continuité des réformes, d’autant plus que les initiatives de réforme étaient
étroitement liées à des personnes. De fréquents changements de personnel,
révélateurs de lacunes dans la gestion des ressources humaines et d’ingérences
extérieures, ont également perturbé l’exécution des programmes de réforme.
De 1995 à 2010, onze PFAS ont connu une forme ou une autre d’instabilité
politique et quatre d’entre eux ont subi des conflits internes (le Burundi, le
Congo, la RDC, et la Côte d’Ivoire). Ces conflits ont entraîné une dégradation
des infrastructures, une fragmentation de fait des territoires douaniers, des
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difficultés à exercer les missions douanières dans certaines zones et ont con-
duit à des déplacements de personnel des douanes pour des raisons indépen-
dantes des besoins de l’administration. Les administrations des douanes ont
montré leur résilience en maintenant leur capacité d’encaisser les recettes,
mais les programmes de réforme ont été suspendus. Les financements alloués
aux réformes ont souvent été gelés et l’assistance technique interrompue (La
Guinée, Madagascar, la Mauritanie et le Niger en sont de récents exemples).

5.3 Financement de la réforme


Dans le scénario le plus souvent rencontré, aucun crédit budgétaire n’a été
affecté au programme de modernisation. Dans le meilleur des cas, des finance-
ments partiels ont été mobilisés au fur et à mesure de l’exécution du projet
(des sources nationales et extérieures ont cependant financé les services
d’informatisation de la CNUCED). L’insuffisance de financements budgétai-
res a retardé l’exécution de dépenses majeures concernant les systèmes de
communication, les infrastructures et la réorganisation des unités de contrôle
aux frontières. D’autres réformes, nécessitant des budgets moins importants,
Réforme et modernisation des douanes en Afrique subsaharienne francophone 139

(telles que la formation) ont souffert du manque de synchronisation entre la


disponibilité des fonds et la mise en œuvre des plans d’action et d’un manque
de souplesse quant au règlement de dépenses urgentes.

5.4 Environnement en matière de gouvernance


La faible performance des PFAS en termes de gouvernance (dont témoi-
gnent par exemple les indicateurs de Kaufmann, Kraay et Mastruzzi, 2010, et
Banque mondiale, 2010) ont entravé l’exécution de projets tels que le déve-
loppement des programmes d’audits après dédouanement, d’investigations et
d’inspections internes qui sont potentiellement les outils les plus efficaces
dans la détection de graves affaires de fraudes et de corruption, ainsi que
l’application de mesures telles que la revalorisation de la profession de com-
missionnaire en douane (pas de suppression des licences en cas de fraude), la
limitation des exonérations et des dérogations, la rationalisation des divers
prélèvements, et les actions administratives visant à accroître la transparence.

5.5 Environnement en matière de logistique et de respect


des obligations
Dans les PFAS les moins avancés, les parties prenantes à la chaîne logistique,
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à l’exception des grands opérateurs du secteur formel, ont à peine automatisé
et modernisé leurs opérations. Le déficit d’infrastructure, le faible développe-
ment du transport terrestre par conteneurs, le mauvais état des véhicules
commerciaux, et le recours limité au transport ferroviaire sont autant de
freins à la modernisation des procédures douanières 36. Ainsi que le note le
Logistics Performance Index, la performance des pays enclavés en matière de
douane en a particulièrement souffert. Par ailleurs, en raison du faible niveau
de respect spontané des règles, les administrations des douanes ont manifesté
une certaine prudence à l’égard de l’introduction de nouvelles procédures fon-
dées sur la confiance à l’égard de l’opérateur. On peut en donner pour exemple
la procédure dite « du circuit vert » qui consiste à autoriser le dédouanement
sans contrôler les déclarations considérées comme présentant un risque fai-
ble. Enfin, les importations des opérateurs appartenant au secteur informel,
dont la part augmenterait, selon les douanes, dans plusieurs pays, posent conti-

36 À l’inverse, l’exemple du terminal pour conteneurs du port d’Abidjan, géré électronique-


ment, montre comment des infrastructures modernes peuvent faciliter les modalités
d’intervention des douanes.
140 Gilles Montagnat-Rentier, Gilles Parent

nuellement des problèmes d’identification et l’évaluation des marchandises


diverses 37.

5.6 Assistance technique et services


Peu nombreux ont été les projets d’assistance technique des partenaires au
développement apportant un appui à des programmes complets de réforme
d’administration douanière (Il faut cependant noter le lancement récent de
projets de modernisation bénéficiant de l’appui de la Commission européenne
en Afrique centrale). Les incertitudes relatives aux conflits et à la gouver-
nance ont probablement pesé sur la décision de s’engager à long terme dans
certains pays de la région. L’assistance technique du FMI n’avait pas été con-
çue pour l’exécution de tels projets, ni n’était dotée de ressources à cet effet.
Sans ce type d’assistance technique, la modernisation a pris la forme d’initia-
tives sectorielles, ce qui explique en partie le caractère sporadique des progrès
réalisés.
Les PFAS ont largement fait appel à la contribution de prestataires de
services d’inspection, mais les contrats conclus n’ont guère contribué à moder-
niser les douanes. Les prestations avaient essentiellement pour objet de four-
nir des renseignements aux services de douanes, principalement sur la valeur
des marchandises importées et d’effectuer des vérifications croisées avec les
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données utilisées par les douanes afin de lutter implicitement contre la cor-
ruption. Depuis quelques années, ces prestataires proposent des services
d’appui technologique que les administrations des douanes ont commencé à
utiliser (scanneurs pour l’inspection des cargaisons, localisation par GPS des
cargaisons en transit, marquage des produits pétroliers, mise en place de gui-
chets uniques). Sous réserve de l’évaluation des besoins en vue de bien les
intégrer dans les projets de réforme, ces services peuvent contribuer à la moder-
nisation des douanes 38.

37 En 2010, la douane mauritanienne a estimé que les articles divers importés par les com-
merçants du secteur informel représentaient entre 25 % et 30 % de la valeur totale des
importations.
38 Dequiedt, Geourjon, et Rota-Graziosi (2012) ont néanmoins montré que la mise en
œuvre d’un programme de services permettant à la fois la vérification des importations
et la modernisation de l’administration des douanes est un objectif incohérent. Si les
deux services sont envisagés, ils ne doivent pas être confiés à un seul prestataire, car ils
sont en conflit.
Réforme et modernisation des douanes en Afrique subsaharienne francophone 141

6 ENSEIGNEMENTS ET SUGGESTIONS
POUR LES PROCHAINES ÉTAPES

6.1 L’engagement et l’appui politique à la réforme


sont des éléments cruciaux
Du fait de son ampleur, la modernisation des douanes est une entreprise qui
exige un consensus politique et un fort appui des autorités au programme de
réforme. Dans les PFAS, les autorités devraient concrétiser plus encore leur
engagement à l’égard des programmes de réformes. Les autorités devraient en
particulier fixer les voies de la modernisation de l’administration douanière
en conciliant la réalisation des résultats de recettes avec tous les autres objec-
tifs (la mise en œuvre des engagements multilatéraux et régionaux du pays, la
bonne exécution des politiques commerciales et tarifaires, le développement
d’un environnement favorable aux entreprises, le développement de l’éthique
et le renforcement des capacités dans les institutions publiques). La cohérence
entre les réformes et mesures liées au commerce international et le pro-
gramme de modernisation des douanes devrait être assurée. Les politiques et
la législation doivent aussi tenir compte de la nécessité de faciliter l’adminis-
tration des douanes et d’en réduire le coût, cela tout particulièrement en ce
qui concerne l’allégement des procédures d’importation et d’exportation, l’éli-
mination des cas dérogatoires et, point important du point de vue de la perfor-
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mance dans le recouvrement des recettes, la rationalisation des exonérations
fiscales. Les autorités devraient s’attacher à mettre en œuvre les réformes qui
sont particulièrement problématiques sur le plan sociopolitique, dans les
domaines où les actions à mener ne sont pas simplement techniques et ne peu-
vent être menées exclusivement par les douanes (fraude et corruption doua-
nières, application uniforme des règles, transparence, gestion moderne des
ressources humaines, en particulier). Enfin, les programmes de modernisa-
tion ne devraient être adoptés qu’à l’issue de l’évaluation et de l’obtention des
ressources nécessaires en matière de financement, de personnel qualifié, et
d’assistance technique. En tant que de besoin, on devrait évaluer l’opportu-
nité de remanier les budgets existants et de modifier le contenu des marchés
de services du secteur privé, pour les concentrer sur la modernisation.

6.2 Gestion des ressources et adaptation du cadre de gouvernance


Il est nécessaire d’opérer des changements radicaux dans les politiques des
ressources humaines et les politiques budgétaires pour les douanes et dans
tous les aspects de leur gestion, que les réformes ont à peine effleurés. Les
142 Gilles Montagnat-Rentier, Gilles Parent

nouvelles politiques et procédures devraient s’inspirer de principes faisant


passer l’intérêt général avant les intérêts individuels ou privés, promouvoir
l’éthique et la performance, et appuyer les projets à long terme. À cet effet, il
convient d’offrir des incitations adaptées. Il est peu probable que les réformes
nécessaires puissent être mises en œuvre dans le cadre institutionnel et bud-
gétaire qui régit actuellement les douanes dans les PFAS. En effet, elles ne
disposent pas d’une marge de manœuvre suffisante pour se doter de la sou-
plesse nécessaire dans l’allocation des ressources, tenir le personnel responsa-
ble des actions menées et des résultats, et écarter les ingérences extérieures.
Le modèle de l’agence semi-autonome est l’un des moyens de parvenir au
niveau d’autonomie et d’obligation redditionnelle requis en vue d’atteindre
ces objectifs. Un autre instrument est celui du contrat de performance, conclu
entre le ministère des finances et ses directions, qui lie les crédits budgétaires
à la performance. Avant d’envisager l’adoption d’un modèle quelconque, il
faut que les autorités identifient les lacunes et déterminent les solutions les
mieux adaptées. La question du regroupement des administrations fiscale et
douanière au sein d’une entité commune, situation la plus fréquente dans les
agences, est distincte de celle de l’autonomie de gestion et devrait faire l’objet
d’un autre débat. De manière significative, les différences dans les processus
fiscaux et douanier, le développement des missions douanières ne traitant pas
de fiscalité, et la facilitation des échanges entre les deux administrations par
l’informatisation, font pencher la balance en faveur de deux entités distinctes.
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6.3 Mise en place d’une gestion de la réforme
et d’une assistance technique adéquates
Il est souhaitable d’élaborer une stratégie et un programme de modernisation
douanière uniques pour chaque pays et de parvenir à un consensus entre les
autorités, la direction des douanes et les partenaires techniques et financiers.
Ceci devrait constituer le seul cadre de coordination de l’assistance technique
et de financement des réformes. La réalisation de projets d’assistance techni-
que demeure un élément essentiel au succès de la modernisation. Des projets
à moyen et long terme, soutenant si possible l’ensemble du programme au
sein de ce cadre unique, sont préférables à la dispersion des initiatives 39. Ce
programme de réforme douanière devrait s’articuler aux projets connexes, tels
que les projets de modernisation de ports, de facilitation du commerce sur les
corridors et de réforme de la fonction publique. Là où des unions douanières

39 Avec des financements extérieurs, le FMI s’est récemment engagé dans une démarche
programmatique, axée sur les résultats, en matière d’assistance technique.
Réforme et modernisation des douanes en Afrique subsaharienne francophone 143

ont été établies, l’assistance technique devrait aussi s’organiser au niveau


communautaire. Les opérations courantes et les mesures prises à court terme
pour accroître les revenus devraient rester en dehors du programme de
réforme. La mise en place effective d’une structure de gestion des réformes,
incluant une commission de niveau ministériel responsable de la stratégie et
de la supervision, un comité directeur de la réforme, et une entité de gestion
du projet dotée d’un personnel spécialement affecté, est une condition indis-
pensable. Des commissions devraient permettre de consulter régulièrement le
secteur privé, les représentants du personnel des douanes, et les ministères et
organismes traitant de questions liées au commerce international. Les moda-
lités de mise en œuvre de la réforme devraient être suffisamment souples
pour s’ajuster à la volatilité du contexte des réformes de nombreux pays en
maintenant la continuité du programme de modernisation douanière. Des
indicateurs rigoureusement choisis devraient permettre de suivre les progrès
de la réforme et de la performance des douanes, et il serait spécialement
opportun d’établir une capacité d’analyse des recettes au sein de l’administra-
tion des douanes afin d’aider à repérer les manques à gagner au niveau straté-
gique et d’appuyer ainsi la prise de décision.

6.4 Les options techniques pour la prochaine phase


de réformes
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Dans des pays fragiles, le risque de voir les réformes compromises ou annulées,
est élevé. On a pu le constater dans les administrations des recettes publiques
des PFAS. Une des principales préoccupations devrait être de consolider les
progrès accomplis. Cela concerne tout particulièrement l’automatisation,
qu’il faut poursuivre et étendre. Par ailleurs presque tous les PFAS ont besoin
de renforcer les fonctions douanières fondamentales, comme l’évaluation des
marchandises, la détermination de l’origine et la classification tarifaire. Il est
ensuite nécessaire d’adopter un modèle de traitement des importations et des
exportations fondé sur la gestion de l’opérateur (le client) plutôt que sur le
traitement de chaque déclaration, en faisant largement appel à la gestion des
risques, la sélectivité, et une gamme complète de contrôles complémentaires,
conformément à la Convention de Kyoto révisée de l’OMD. Il convient néan-
moins de trouver le juste équilibre entre les meilleures pratiques et la néces-
sité de les adapter au contexte national. Les douanes devraient aussi largement
tirer parti des nouvelles technologies et des nouveaux équipements, à condi-
tion de bien les intégrer dans les processus.
144 Gilles Montagnat-Rentier, Gilles Parent

Certains concepts modernes n’ont pas encore été introduits, comme celui
de la segmentation. Séparer l’administration des contribuables selon qu’il
s’agit de gros, de moyens ou de petits contribuables s’est révélé très pertinent
dans le domaine de l’administration de l’impôt, et devrait être transposé à
l’administration des douanes, en l’adaptant. Les programmes établissant des
« opérateurs économiques agréés » qui s’appuient sur le Cadre de normes de
l’OMD devraient s’intégrer dans cette politique de segmentation. De même,
les administrations des douanes des PFAS ne devraient pas se contenter
d’être réactives, mais développer de solides capacités prédictives grâce au ren-
seignement, aux données et à l’analyse. Ainsi que l’a noté l’OMD, il s’agit
d’identifier et de s’occuper des risques au niveau opérationnel (contrôle), mais
aussi d’appliquer les connaissances au niveau stratégique et à la gestion des
douanes 40. Pour améliorer leur efficacité, les douanes des PFAS ont particu-
lièrement besoin d’être intégrées dans un réseau de partenaires et d’appro-
fondir la coopération au sein du réseau. Cet objectif comporte de multiples
aspects et devrait englober le resserrement de la coopération avec l’adminis-
tration fiscale, la gestion intégrée des frontières (les douanes agissant comme
chef de file dans des projets de guichet unique), le développement de partena-
riats mutuellement bénéfiques avec le secteur privé, le renforcement des inter-
actions opérationnelles entre administrations des douanes qui appliquent un
accord douanier régional, et le développement d’échanges de données régu-
liers entre les douanes des pays d’exportation et les douanes des pays d’impor-
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tation, étape préliminaire en vue de l’établissement d’un réseau douanier
mondial.

RÉFÉRENCES

BAUNSGAARD, Th., and M. KEEN (2005), “Tax Revenue and (or?) Trade Libera-
lization”, IMF Working Paper No. 05/112 (Washington: International Mone-
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CANTENS Th., G. RABALLAND, S. BILANGNA, M. DJEUWO (2012),
« Comment la contractualisation dans les administrations fiscales peut-elle
limiter la corruption et la fraude ? Le cas des douanes camerounaises », Revue
d’Économie du Développement, ce numéro.
CANTENS Th., R. IRELAND, G. RABALLAND (eds) (2012), Reform by numbers:
Measurement applied to customs and tax administration in developing coun-
tries, World Bank, à paraître.

40 La douane au XXIe siècle – Favoriser la croissance et le développement par la facilitation


des échanges et le renforcement de la sécurité aux frontières, OMD, juin 2008.
Réforme et modernisation des douanes en Afrique subsaharienne francophone 145

CHAMBAS, G. (2005), Afrique au Sud du Sahara : Quelle Stratégie de Transition


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