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Développement et applications
des techniques
de coloration différentielle
des chromosomes
chez les végétaux :
caryotypes
et structures chromosomiques,
identification des espèces
Société Française
et relations phylétiques
de Génétique
Michel Bemard, Sylvie Bemard
Président
E. Moustacchi
ralement dérivés de microspores culti sombres et claires, caractéristique de chromosomes de ces espèces, bonnes
vées in vitro, ou à la suite de croisements chaque chromosome, qui permet donc performances des techniques de banding,
interspécifiques ou intergénériques. d'identifier chacun d'eux. Un point possibilité d'obtention d'hybrides inters
Tous ces phénomènes suggèrent une intéressant est cependant que, pour un pécifiques et de variants chromosomi
extrême tolérance du végétal vis-à-vis de chromosome donné, le « zonage '' peut ques de toute nature, importance éco
modifications de nombre, mais aussi de présenter de légères variations d'un nomique. Parmi les techniques de ban
structure, de ses chromosomes : trans individu à un autre (à condition qu'ils ding, celle qui a eu la faveur des cyto
locations, inversions, délétions, trisomie, n'aient pas le même génotype : deux généticiens travaillant sur les Triticinées
monosomie, n'ont souvent qu'une inci individus tirés d'une même lignée de (blé et espèces voisines) a été celle du
dence faible sur la viabilité et la ferti blé auront le même zonage, deux indi C-baruiing , marquant l'hétérochromatine
lité des individus. De surcroît, il faut vidus appartenant à deux lignées diffé constitutive, qui, bien que conservant le
souligner que les chromosomes végé rentes pourront avoir des zonages dif même principe de base (traitement des
taux, présents sous forme condensée férents pour un ou plusieurs chromo chromosomes dans une base faible, et
dans tous les tissus méristématiques ou somes). Ce polymorphisme entre indi renaturation dans un tampon, le SSC),
sporogènes, sont . d'accès facile. En vidus (on dira aussi : entre génotypes) a fourni des résultats de plus en plus
revanche, leur taille peut être, dans cer peut être utilisé pour leur identification. performants. En 1977, Gerlach [8] a
tains groupes, un facteur limitant les Nombre d'espèces végétales ont été tes proposé une autre technique (dite N
possibilités d'observation. tées au cours de la période 1 970-1975 banding), en fait décrite antérieurement
et par la suite, avec des résultats posi chez l'homme par Dutrillaux [4], qui
Dans ce contexte de tentative de com
tifs pour la plupart : on peut citer parmi fait appel à une dénaturation thermique
préhension de certains mécanismes évo
elles des espèces appartenant aux gen des chromosomes ; cette technique
lutifs, et d'exploitation d'événements
res Vù:ùz, Tn"llium, Hepatica, Fritillo.ria, Cre donne aussi des résultats très perfor
identiques à des fins de sélection, il est
pis [ ! ] , Rhoeo [ 1 0 ] , Tulipa [ 1 1 ] , mants sur orge et blé, mais, contraire
intéressant de disposer de " marqueurs "
Scilla [ 12], Allium [ 13], Anemone [ 1 4] , ment au C-banding, a l'inconvénient de
moins grossiers que ne le sont les seuls
chromosomes. A la fin des années 1960 Nicotiana [ 1 5], Hordeum [8, 1 6 ] , Zea [ 1 7] , ne pas marquer tous les chromosomes
se sont développées de nombreuses E(ymus, Agropyron [ 18, 19], Secale [20, 21], du blé.
techniques de cytogénétique fondées sur Tn"ticum [22], Triticale [23], Phleum [37] . Les quelques exemples que nous allons
l'exploitation de l'hétérogénéité de la Globalement, les techniques de caryoty développer concernent donc essentielle
structure des chromosomes, due notam pes à bandes, ou " chromosome banding "
ment les céréales à paille, et plus parti
ment à l'existence de deux grands types chez les végétaux, sont probablement' culièrement le blé, à partir des résultats
de chromatine : l'euchromatine, peu plus délicates à mettre en œuvre que obtenus en C-banding, soit dans des
visible en interphase, et correspondant sur les animaux, en raison de problè situations intraspécifiques, soit dans des
aux gènes transcrits en ARN, et l'hété mes liés à l'existence d'une paroi cellu situations interspécifiques. Nous réser
rochromatine, correspondant à des laire coriace, de la difficulté de travail verons un paragraphe particulier pour
régions condensées en interphase, et ler sur des cultures de cellules synchro les observations réalisées sur méiose et
comportant essentiellement des régions nisées, de l'état physiologique du maté sur les spéculations concernant le rôle
répétées non codantes. Suivant les tech riel (âge des plantes et des organes - de l'hétérochromatine dans certaines
niques utilisées, on a pu faire apparaî racines le plus souvent - sur lesquels fonctions de la plante.
tre des bandes Q (observables en fluo sont prélevés les méristèmes, teneur en
rescence à la moutarde de quinacrine), eau des cellules). Il est, par exemple,
des bandes G, C et N, par coloration pratiquement impossible de travailler Exploitation des techniques
au Giemsa à la suite de traitements spé sur la première mitose pollinique, en de banding pour la connaissance
cifiques, des bandes R, complémentai raison de l'importance de la paroi, mal du caryotype d'une espèce
res des bandes Q et G, par coloration gré l'intérêt que cela présenterait. Par
à l'acridine orange ( 1 -8] . Ces travaux ailleurs, le nombre et l'intensité des Dans le cas de blé tendre (Tn"ticum aes
se sont développés de façon quasiment bandes sont généralement plus faibles tivum), on peut identifier, avec plus ou
stimultanée chez les végétaux et les ani ch�z les espèces végétales que çhez les moins de facilité, tous les chromosomes
maux, et ont connu un fantastique ammaux. de cette espèce (n = 2 1 , figure 1). Ces
développement en cytogénétique chromosomes peuvent être classés en
Cependant, sur l'ensemble des espèces
humaine, où il a été démontré très rapi de céréales à paille - blé, orge, seigle, trois groupes élémentaires, ou génomes,
dement l'incidence d'anomalies du dénommés A, B et D, qui provien
triticale - et sur de nombreuses espè�
caryotype sur l'apparition de maladies ces voisines, les travaux faisant interve draient chacun d'un ancêtre diploïde,
génétiques. Des phénomènes identiques nir les techniques de banding chromoso en l'occurrence Triticum mon.ococcum pour
ont été mis en évidence chez les mique ont été nombreux au cours des A, Triticum tauschii pour D, et un Triti
animaux [9] . quinze dernières années, et ont apporté cum (ou Aegilops) de la section Sitopsis
Ces techniques révèlent donc sur les des informations intéressantes. Ce déve pour B, eux-mêmes dérivant d'une
chromosomes un « zonage '' plus ou loppement tient à différentes raisons : espèce diploïde ancestrale. De ç_e fait,
moins important, constitué de bandes traditionnelle facilité d'observation des pour tout chromosome appartenant à
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* GLOSSAIRE * -----.
A
Autogame : espèce chez /oquLllt l'auJnjécon
dation (fécondation de l'oosphère par l'auiopol
len) est préporulérante.
Bandes :
G : digestion par enzymes protœ!Jtiques. Colo
ration au Giemsa ;
C : dérwturation par une base (gtnéralemmt
baryte). Coloration au Giemsa (ou Leishnum) ;
N : dinaJuratüm par température limée en tam
B pon phosphate. Coloration au Giemsa ;
Q : coloration à !o. mouJo.Tde de quiruu:rine.
Immersion dans un tampon Mc 1/.voi.ne (pH4
à 7). Observation en fluorescence ;
R : dérwturation thermique. Coloration au
Giemsa ou à l'acridine orange (observation en
fluroresœru:e).
(désignation des) : S
�
Bras chromosomiques
= short = court, L = large = long.
D
Chromosomes homiologues : chromosomes
bras chromosomique.
" "
Recombinaison homiologue : �
entre chromosomes homiowgues.
C'est ainsi que Naranjo [28] a pu mon associant universités américaines, aus
SA 4A 78 trer qu'il existait dans le blé dur (2n = traliennes, japonaises et britarmiques sur
4x = 28, génome AB) des remanie un projet de cartographie moléculaire
ments structuraux importants (translo du blé, dispose par exemple de plus de
cations en chaîne et inversion péricen 1 50 lignées de délétion de la variété Chi
s
trique), concernant simultanément les nese Spring. De même, cette méthode a
chromosomes 4A, 5A et 7B (figure 2). permis à Endo et Mukai [30] de locali
Ces remaniements semblent généraux ser un locus dit speltoïde - impliqué
dans l'ensemble des espèces blé tendre dans la morphologie de l'épi de blé -
et blé dur. n est donc vraisemblable que sur le chromosome 5A. Cette approche
la structure ainsi créée est << née , en permet de vérifier, une fois encore,
L
même temps que ces espèces ; on peut combien sont différentes la carte physi
se demander si elle correspond à un que et la carte génétique (figure 3). Elle
événement aléatoire ou si elle a une permet aussi de constater que les mar
signification particulière dans le proces queurs RFLP issus d'ADNe, et les
sus d'élaboration et de domestication du gènes que l'on peut identifier, sont sou
blé. Cette structure a été confirmée par vent localisés chez le blé dans les por
les analyses moléculaires (RFLP) [29] . tions télomériques des chromosomes, et
Figure 2. Structure des chromoso De façon plus ponctuelle, on sait que rarement dans les secteurs péricentri
mes 4A, 5A et 78 : schéma des les génotypes de blé peuvent différer les ques. Il semble que le seigle présente
réarrangements chromosomiques uns des autres - et de la structure dite une situation identique.
intervenus entre ces 3 chromo << primitive >> que l'on trouve chez la Chez des espèces diploïdes de céréales,
somes. (D'après [28].)
variété de référence Chines� Spn:ng - par notamment le seigle (Secale cereale,
un certain nombre de remaniements, génome R) et l'engrain (Triticum mono
notamment translocations (par exemple coccum), l' identification des différents
un génome, on trouve, dans les autres,
5B5/7B 5, très courante dans de nom chromosomes par C-banding a permis
un chromosome ayant grossièrement les breux génotypes européens). Certaines
mêmes fonctions génétiques. Cet d'isoler avec une relative facilité les dif
de ces translocations sont aisément déce férentes familles trisomiques, ce qui
ensemble de chromosomes constitue un
lables en C-banding. Là aussi, on ne sait offre la possibilité de procéder à des
groupe d'homéologie : ces chromosomes
pas si les différences d'organisation sont analyses génétiques [32 , 33].
ont, en méiose, tendance à s'apparier.
des réponses aux pressions de sélection
Ce type d'appariement est normalement Dans la mesure où il existe un polymor
ou s'il s'agit d'événements aléatoires.
inhibé, chez le blé, par un système phisme intraspécifique, on peut chercher
génétique assez complexe, dont la pièce Une autre application concerne l'élabo à l'utiliser dans des processus d'identi
maîtresse est un gène, Phi, porté par ration et le maintien de tout un ensem fication d'individus, lignées ou clones.
le chromosome 5B ; il s'ensuit que le ble de matériels aneuploïdes (monoso Chez le blé tendre, Friebe et al. [34] ont
blé tendre, espèce polyploïde , a une miques, nulli-tétrasomiques, ditélosomi clairement montré l'existence d'un tel
méiose de diploïde. ques, etc.) qui sont utilisés pour la loca polymorphisme. Sur blé dur et seigle,
Une observation, même superficielle, lisation de nombreux gènes. En effet, N. Jouve et al. [35] ont répertorié 23
des chromosomes de blé tels qu'ils le risque est grand de perdre ces famil bandes polymorphes sur 28 décelables
apparaissent en C-banding, montre que les particulières, qu'il faut contrôler sur le génome A, 36 sur 59 sur le
ceux du génome B présentent des ban périodiquement. La reconnaissance génome B, 30 sur 39 pour le génome
« immédiate >> de nombreux chromoso
des très chargées, principalement autour R. Ce polymorphisme peut faciliter
du centromère, alors que ceux des mes permet d'alléger considérablement l'élaboration de certains matériels. Par
génomes A et D présentent des bandes les procédures de conservation. exemple, nous avons créé au labora
beaucoup moins importantes (figure 1). Plus généralement, l'identification des toire, dans un fonds génétique connu
Or, jusqu'à une époque récente , et sur chromosomes par C-banding peut appor (celui de la variété demi-naine
la base d'analyses génétiques et d'obser ter une aide précieuse à un projet de Courtot), des variants chromosomiques
vations cytologiques antérieures, le cartographie physique. En effet, on peut obtenus en remplaçant un chromosome
chromosome 4A actuel était identifié engendrer, par diverses méthodes particulier de Courtot par un homo
comme étant le 4B, et vice versa. C'est (androgenèse in vitro, embryogenèse logue provenant d'autres génotypes : ce
sur la base des observations en banding somatique), des lignées présentant des travail a été réalisé pour les chromoso
que Dvorak [24] a proposé de revoir délétions plus ou moins importantes sur mes lA, l B, lD, 6A, 6B, 6D. Dans
cette classification ; cette révision a les divers chromosomes, dont certaines certains cas, il a été possible d'utiliser
ensuite été corroborée par des observa peuvent être identifiées ; ce matériel le polymorphisme des bandes pour véri
tions faisant appel à d'autres techni peut alors être utilisé pour localiser fier que la substitution a bien été réali
ques, notamment moléculaires [25]. << physiquement >>, sur une portion de sée [35 ]. De surcroît, il a été observé
Le C-banding a permis aussi d'affmer nos chromosome déterminée, certains loci dans Courtot lui-même, pour deux
connaissances sur la structure chromo identifiés par RFLP. Le groupe ITMI chromosomes ( lD et 6B), une hétéro
somique du blé et du seigle [26, 27]. (international Triticeae mapping initiative), généité pour des phénomènes de pré-
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Société Française de Génétique
x Il 1
�
de proximité dans ce groupe d'espèces.
NOR Des travaux analogues ont été réalisés
220 mégabases sur Phleum [37], ainsi que sur un ensem
ble de sous-espèces de maïs [38] , où il
a été possible de proposer une structu
Figure 3. Cartes physiques et cartes génétiques des bras courts (cc short »)
ration malgré un nombre total de ban
des chromosomes 1R et 68. (D 'après M. Gale -et R. Koebner, communication
personnelle, et [31].)
des relativement faible (6 à 18, suivant
les génotypes).
Une application très immédiate du C
sence/absence de bàndes mineures « ''· Comparaison d'espèces et étude banding est celle de la vérification de
Pourtant cette variété, inscrite au Cata d'hybrides interspécifiques
l'existence d'hybrides, notamment à
logue officiel en 1974, est maintenue
partir de parents qui ont le même nom-.
depuis lors suivant des schémas de bre de chromosomes, mais qui sont dis
La possibilité de décrire les chromoso
sélection conservatrice. Elle présente cernables par leurs phénotypes chromo
mes de façon plus détaillée que par le
cependant une certaine instabilité, et somiques : par exemple Tn'ticum taZLSchii
passé a permis à la cytogénétique
notamment 1 'apparition récurrente de x seigle (2n 1 4), maïs x sorgho (2n
d'apporter d'intéressantes contributions =
plantes plus hautes et à épi plus lâche. 20). Dans le premier cas, l'obten
à l'identification des espèces, à l'établis =
\
! '
1
�;
. '
\ 1 1
,.
- ...,._ , (
Figure 4. Photographies de cellules colorées par la technique de C-banding : cellules somatiques de maïs (a}, d'un
blé porteur d'une translocation 1 B/1 R (b} ; cellules mères de pollen d'un amphiploïde Triticum tauschii x Secale
cereale (c} et d'un hybride triticale x Secale cereale (d}. · En c, d, les chromosomes de seigle sont reconnaissables à
leurs blocs télomériques fortement chargés en hétérochromatine. (Photos a et b : S. Bernard ; photos c et d : M. Bernard.)
et d'autres Triticées (seigle, orge, Aegi l'on peut caractériser. Par exemple, les et l'insensibilité à la photopériode,
lops ou chiendent), ainsi que chez les descendances de croisements entre tri caractères particulièrement utiles en
Crucifères, les cotonniers, etc. , princi ticale et blé ségrègent plus ou moins situation intertropicale. Des études
palement pour introduire chez 1 'espèce rapidement en familles de type triticale systématiques, réalisées sur des popu
cultivée des gènes de résistance aux et familles de type blé, de compositions lations dérivées de ce genre de croise
maladies. Par les méthodes cytogénéti génomiques respectives ABR et ABD. ment et non soumises à des pressions
ques conventionnelles, l'obtention de ces Cependant, il arrive que l'on décèle des de sélection, tendent à montrer [ 42] que
matériels implique un travail considé individus ne comportant pas les géno les différentes substitutions RJD ne sem
rable, et le résultat n'est pas toujours mes R ou D entiers ,, (7 chromoso
<< blent pas équiprobables : pour des
celui espéré. Le C-banding permet dans mes), mais seulement 6 éléments d'un questions de viabilité (zygotique ou
bien des cas de repérer et d'isoler les génome et un de l'autre. C'est . par gamétique), de compétition pollinique,
plantes porteuses du chromosome étran exemple le cas d'une lignée de triticale de fertilité des plantes porteuses, certai
ger souhaité, et de vérifier la constance développée par le CIMMYT (centre nes substitutions sont plus fréquentes
du fonds génétique de l'espèce accep international pour l'amélioration du que d'autres. Cependant, globalement,
trice [41 ] . maïs et du blé) vers 1 970, nommée l'obtention de plantes <<multisubsti
Il arrive aussi que, à partir d'hybrides Armadillo, qui comporte le chromo tuées " semble difficile.
entre espèces, on obtienne des indivi some 2D substitué au chromosome 2R. Réciproquement, dans le blé, on con
dus « recombinants ,, souvent à la suite Cette substitution était intéressante car naît des génotypes porteurs de frag
de réassortiments chromosomiques, que elle apportait une précocité plus grande ments de chromosomes de seigle,
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d'Agropyron ou d'Aegilops, qui ont été le cas des mixogénomes R/D, prece vent s'établir des échanges entre chro
in.troduits par recombinaison homéo demment évoqués, ces 1 28 combinai mosomes homéologues, cytologique
logue ou par translocation. Le plus sons semblent relativement équipro ment décelables. Ces renseignements
connu de ces fragments est le bras court bables, pour autant que l'on s'en sont précieux, dans la mesure où l 'on
du chromosome l R , qui remplace la réfère aux données actuelles [ 45] ; il ne peut déduire a pnori de données
partie homéologue du l B , ce qui a est donc difficile, pour une simple pure m e n t génét i q u e s , bio
abouti à la construction d'un chromo question de probabilités, d'obtenir une chimiques ou même moléculaires, les
some composite l B/l R . Ce chromo composition chromosomique homo possibilités d 'échanges génétiques
some est très facilement identifiable en gène, de type AA RR ou BB RR entre espèces. Par exemple, chez les
banding, car il se différencie notablement [46] . Cela démontre que les chromo Triticinées, les génomes << élémentai
du chromosome l B « normal ''· Les somes A et B sont largement inter res ,, A, B, D, R (et autres), sont très
génotypes qui en sont porteurs, dérivant changeables et confirme la proximité proches quant à leur contenu généti
d'un croisement blé x seigle réalisé de leurs contenus génétiques. Des cas que et leur organisation générale. Or,
probablement au début de ce siècle, ont analogues démontrent que les chromo l'observation des figures d'apparie
été retenus par la sélection pour leur somes du génome D du blé tendre ments chromosomiques conduit à des
résistance à diverses maladies, et aussi sont également facilement substitua résultats assez contrastés. Par exem
pour leur productivité et la stabilité de bles aux éléments homéologues de A ple, dans les confrontations D-R,
leurs performances agronomiques. Ce et B . observables dans les hybrides T. taus
chromosome lB/lR se trouve par chii x seigle ou triticale x blé ten
exemple dans Kaukaz, Aurora, Clé dre, il n 'apparaît presque j amais de
ment, Veery, etc . , toutes variétés qui Observations e n méiose figure d 'appariement [39].
ont marqué leur époque. Cette trans
location s'accompagne de deux autres Un cas intéressant est celui d 'hybri
Les techniques de banding chromo des blé x seigle comportant ou non
particularités : d'une part, elle affecte
beaucoup la qualité technologique car somique sont parfaitement applicables le gène Phl , régulateur des apparie
sur des cellules en méiose (notamment ments chromosomiques chez le blé
le segment « seigle " porte un locus
codant pour certaines protéines de cellules mères de pollen, facilement [ 48] . Le nombre de chromosomes
accessibles). De telles observations per appariés est plus important chez les
réserve qui sont très défavorables à ce
mettent d'estimer, pour une paire de hybrides qui n 'ont pas le gène Phl (5
caractère ; d'autre part, elle semble
chromosomes donnée, identifiable, les à 6 bivalents en moyenne, au lieu de
favoriser fortement les processus de
fréquences d'appariement, par obser 1 ; présence de trivalents). On pour
régénération des embryoïdes obtenus
vation des « chiasmas "• définis au rait donc penser que 1 'élimination de
par culture in vitro des anthères : 60 à
80 % des plantes régénérées (haploïdes, niveau cytologique, visibles en méta ce gène a favorisé les appariements
phase 1 . Cela est susceptible d'appor entre chromosomes de seigle et de blé.
puisque provenant de microspores) sont
porteuses du chromosome transloqué ter des informations intéressantes, En fait, un examen en banding permet
aussi bien en situation d 'homologie de constater que l 'augmentation des
lB/lR [43 ] . En revanche, ce chromo
some semble se transmettre moins faci que d'homéologie. appariements est essentiellement le fait
lement par voie sexuée ; en F2 d'un Il est par exemple connu que les tri d'associations entre chromosomes de
croisement étudié au laboratoire, les ticales, et notamme nt les triticales pri blé (A, B et D), plutôt qu'entre ceux
individus hétérozygotes l B- l B/ 1 R et maires, directement issus du croise du seigle et du blé. De même, dans
homozygotes lB sont sur-représentés, ment entre blé et seigle, ont des com les hybrides triticale 6x x seigle com
les individus homozygotes l B/ l R portements méiotiques beaucoup plus portant le gène Phl, on constate 1 'exis
sous-représentés. irréguliers que ceux de leurs parents, tence d'appariements A-B assez fré
avec présence de nombreux chromo quents [ 49] ; ce phénomène démon
Un autre exemple où le banding a somes non appariés (univalents). Des tre que le génome R porte lui-même
apporté d'intéressantes informations est analyses en C-banding permettent de des systèmes de contrôle des échan
celui des triticales tétraploïdes. Il s'agit voir que ces univalents correspondent ges entre chromosomes qui, dans cer
de triticales à 28 chromosomes, géné majoritairement aux chromosomes de taines situations génétiques, peuvent
ralement dérivés d'hybrides triticale 6x seigle [ 4 7 ] . Il est donc clair que la inhiber l 'action du gène Phl et favo
x seigle ; ces triticales comportent 2 x
coexistence dans une même structure riser l 'appariement entre homéolo
7 chromosomes de seigle, et 2 x 7 des deux génomes blé et seigle gues. De tels systèmes, plus ou moins
chromosomes de blé, provenant indif entraîne des dysfonctionnements au puissants, ont été mis en évidence
féremment des génomes A et B . Ce niveau des possibilités d' appariement chez nombre d'espèces diploïdes voi
dernier ensemble, désigné par le terme des chromosomes, même homologues. sines du blé, notamment certains Aegi
de « mixogénome comporte 2 7
'' • =
En revanche, il est possible de sélec lops, Agropyron, etc. Cela suggère que
1 28 modalités possibles (sans comp tionner des plantes présentant des 1 'existence du locus Ph est antérieure
ter les cas de recombinaison homéo niveaux d'appariement chromosomi à la formation du blé, et que l ' allèle
logue intrachromosomique). Or, con que beaucoup plus élevés. Phl a été sélectionné parce qu 'il con
trairement à ce qui est observé dans Dans des hybrides entre espèces peu- férait un avantage sélectif important
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Société Française de Génétique
Références
1 7 . Ward EJ. Banding patterns in maize chromatin visualizcd by C-banding. Genome Genet Cytol 1982 ; 24 : 83-100.
mitotic chromosome. Gan J Genet Cytol 1 980 ; 1989 ; 32 : 735-12. 52. Papa CM, Morris R, Schmidt JW. Rye