Vous êtes sur la page 1sur 10

Pour citer cet article : Gauthier M, et al.

Maladie résiduelle minime dans la leucémie lymphoïde chronique : un enjeu restant


d'actualité. Bull Cancer (2018), https://doi.org/10.1016/j.bulcan.2018.07.008

Bull Cancer 2018; //: ///

en ligne sur / on line on


www.em-consulte.com/revue/bulcan
www.sciencedirect.com

Synthèse
Maladie résiduelle minime dans la leucémie
lymphoïde chronique : un enjeu restant
d'actualité

Martin Gauthier 1, Thibault Comont 2, François Vergez 3, Loïc Ysebaert 1,3,4

Reçu le 16 mai 2018 1. IUCT-Oncopôle, service d'hématologie clinique, 1, avenue Irène-Joliot-Curie,


Accepté le 1er juillet 2018 31059 Toulouse cedex 9, France
Disponible sur internet le : 2. IUCT-Oncopôle, service de médecine interne, 1, avenue Irène-Joliot-Curie,
31059 Toulouse cedex 9, France
3. IUCT-Oncopôle, laboratoire d'hématologie-immunophenotypage et hematologie
cellulaire, 1 avenue Irène-Joliot-Curie, 31059 Toulouse cedex 9, France
4. CRCT, Inserm UMR 1037, 2, avenue Hubert-Curien, 31037 Toulouse cedex 1,
France

Correspondance :
Martin Gauthier, IUCT-Oncopôle, service d'hématologie clinique, 1, avenue Irène-
Joliot-Curie, 31059 Toulouse cedex 9, France.
gauthier.martin@iuct-oncopole.fr

Mots clés Résumé


Leucémie lymphoïde
chronique La maladie résiduelle minime (MRD) est de plus en plus utilisée dans le domaine de l'onco-
Maladie résiduelle minime hématologie. Sa mesure par cytométrie en flux ou biologie moléculaire a notamment une place
Immunochimiothérapie grandissante dans la leucémie lymphoïde chronique (LLC) avec l'amélioration importante des
Thérapie ciblée résultats des traitements ces dernières années. Du fait du bénéfice en survies sans progression
et globale apporté par l'obtention d'une maladie résiduelle minime indétectable, sa mesure en
post-thérapeutique est recommandée comme marqueur de substitution pour l'enregistrement des
médicaments cytotoxiques. Cet effet est indépendant du traitement préalablement reçu et pose la
question de mesures séquentielles de la maladie résiduelle minime en cours de traitement pour
envisager un arrêt précoce en cas de réponse profonde, mais aussi de la poursuite des traitements
jusqu'à obtention d'une maladie résiduelle minime indétectable (en passant par des schémas
associant traitements d'induction puis de maintenance). De plus, un suivi de maladie résiduelle
minime en post-thérapeutique pourrait aider à proposer des traitements préemptifs de la rechute.
Des facteurs tels que la cinétique de croissance de la maladie résiduelle minime ou la lymphopénie
CD4 post-thérapeutique permettent d'améliorer la prédiction de la survie sans progression des
patients ayant une leucémie lymphoïde chronique. Les inhibiteurs de la voie du BCR n'induisent
quant à eux pas de maladie résiduelle minime indétectable, mais leur association à des traitements
cytotoxiques type immunochimiothérapie permet d'augmenter la proportion de patients obtenant
une réponse profonde. Les inhibiteurs de BCL2 permettent l'obtention de maladie résiduelle
minime indétectable chez beaucoup de patients y compris en rechute, ce qui donne à la maladie
résiduelle minime une place centrale dans l'évaluation des traitements actuellement à l'étude.

tome xx > n8x > xx 2018


1

https://doi.org/10.1016/j.bulcan.2018.07.008
© 2018 Société Française du Cancer. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

BULCAN-607
Pour citer cet article : Gauthier M, et al. Maladie résiduelle minime dans la leucémie lymphoïde chronique : un enjeu restant
d'actualité. Bull Cancer (2018), https://doi.org/10.1016/j.bulcan.2018.07.008

M. Gauthier, T. Comont, F. Vergez, L. Ysebaert


Synthèse

Keywords Summary
Chronic lymphocytic
leukemia Minimal residual disease in chronic lymphocytic leukemia: A still current issue in 2018
Minimal residual disease
Minimal residual disease (MRD) is widely used in oncohematology. In chronic lymphocytic
Chemoimmunotherapy
leukemia (CLL), it can be measured by flow cytometry or polymerase chain reaction and is
Target therapy
getting a greater place, owing to the dramatic therapeutic advances in the management this
disease. As MRD decrease after chemoimmunotherapy is associated with improved progression
free and overall survivals, its measure is now recommended as a surrogate marker for cytotoxic
drugs licensures. This association is independent from treatment received and raises a few
questions, such as sequential MRD measures to stop treatment in case of an early deep response
and on the opposite, treatment continuation until reaching undetectable MRD (with the possible
use of maintenance therapy). Furthermore, following MRD after a cytotoxic treatment could lead
clinical trials investigators to propose pre-emptive treatments in case of MRD re-growth, to avoid
overt relaspe. MRD re-growth kinetics and CD4 count after treatment completion can improve
MRD-based survival predictions. On the other hand, BCR inhibitors do not lead to undetectable
MRD, but their association with chemoimmunotherapy increases the proportion of patients
reaching that goal. Moreover, BCL2 inhibitors do lead to deep response including in the
relapse/refractory setting, giving to MRD a central place in currently investigated treatments
evaluation.

Introduction réponse encore plus profonde (maladie résiduelle


Comme dans de nombreuses hémopathies malignes, l'évalua- minime < 104) est également associée à un gain en survie
tion de la maladie résiduelle minime (MRD) après traitement sans progression [3]. Les avancées thérapeutiques faites ces
prend une place importante dans la leucémie lymphoïde chro- dernières décennies ont permis d'obtenir des réponses plus
nique (LLC), et pourrait même à terme remplacer les critères de profondes et donc des niveaux de maladie résiduelle minime
réponse définis par l'IWCLL en 2008, et révisés récemment [1,2]. plus bas (tableau I), et le schéma RFC (rituximab, fludarabine et
En effet après immunochimiothérapie (ICT), l'obtention d'une cyclophosphamide) est l'immunochimiothérapie de référence
maladie résiduelle minime inférieure à 102 (moins d'un leu- chez les sujets jeunes et en suffisamment bon état général car il
cocyte sur 100 étant un lymphocyte de leucémie lymphoïde permet les meilleurs résultats en termes de réponse et de survie
chronique) est associée à un gain en survie globale, alors qu'une sans progression (PFS) [4,5]. Cependant l'arrivée de nouveaux

TABLEAU I
Résultats des schémas d'immunochimiothérapie dans la leucémie lymphoïde chronique

Type d'approche Exemple Réponse Réponse MRD < 10 -4 Durée de


globale (%) complète rémission
(médiane)

Alkylants Chlorambucil 40–60 < 10 Non attendue 1 à 2 ans

Analogues des purines Fludarabine 60–80 8–20 % Rare (< 15 %) 1,5 à 3 ans

Analogues + alkylants FC 80–90 25–35 % 15–25 % 3 à 4 ans

Anticorps monoclonaux Alemtuzumab 80 20–25 % 7% 1,5 ans

Alkylants + anticorps monoclonal Obinutuzumab-Chlorambucil 70–80 20–25 % 35–40 % 2 à 3 ans

Bendamustine + anticorps monoclonal R-Bendamustine 90 30–35 % > 50 % 3–4 ans

Analogues + alkylants + anticorps monoclonal RFC 95 50 % > 50 % > 4 ans

FC : fludarabine-cyclophosphamide ; MRD : maladie résiduelle minime ; R-Bendamustine : Rituximab-Bendamustine ; RFC : rituximab, fludarabine, cyclophosphamide.
2

tome xx > n8x > xx 2018


Pour citer cet article : Gauthier M, et al. Maladie résiduelle minime dans la leucémie lymphoïde chronique : un enjeu restant
d'actualité. Bull Cancer (2018), https://doi.org/10.1016/j.bulcan.2018.07.008

Maladie résiduelle minime dans la leucémie lymphoïde chronique : un enjeu restant d'actualité

Synthèse
médicaments inhibiteurs de la signalisation du BCR remet en Méthodes de détection de la maladie
cause ce dogme de la réponse profonde. résiduelle minime
Deux méthodes sont actuellement standardisées et considérées
équivalentes pour la détection de la maladie résiduelle minime,
Rationnel pour la mesure de la maladie avec un seuil de détection d'une cellule leucémique sur
résiduelle minime dans la leucémie 10 000 leucocytes (sensibilité de 104) [1,6]. Cependant, seule
lymphoïde chronique la cytométrie en flux (CMF) est pratiquée en routine en France,
Suite à un traitement cytotoxique dans la leucémie lymphoïde du fait du coût élevé et de la mobilisation importante du
chronique, le nombre de cellules leucémiques d'un patient laboratoire nécessaire à la technique de PCR (polymerase chain
diminue ; plus leur nombre résiduel est élevé, plus la rechute reaction).
de la maladie sera précoce. Le terme « maladie résiduelle » Le tableau II récapitule les différentes méthodes disponibles
désigne la détection (plus ou moins associée à la quantification) pour la détection de la maladie résiduelle minime.
de la maladie persistante après traitement cytotoxique, avec
une meilleure sensibilité qu'une évaluation selon les critères
IWCLL 2008 (sensibilité estimée 1000 fois supérieure) ; cepen- Méthodes basées sur de la PCR
dant, il persiste des cellules leucémiques en deçà du seuil de Ces méthodes sont basées sur la détection du réarrangement du
détection des différentes méthodes de maladie résiduelle gène de la chaîne lourde de l'immunoglobuline spécifique du
minime : en effet, des rechutes sont constatées à long terme clone leucémique. Elles nécessitent donc un échantillon pré-
chez les patients ayant une maladie résiduelle minime indé- traitement.
tectable. La maladie résiduelle minime est fortement corrélée La méthode la plus simple utilise des amorces consensus s'appa-
à la survie globale ainsi qu'à la survie sans progression, raison riant avec des régions de génome conservées et proches de la
pour laquelle sa mesure à l'issue d'une immunochimiothérapie région hypervariable CDR3. L'amplification de cellules polyclo-
dans la leucémie lymphoïde chronique (2 à 6 mois après la fin nales donne lieu à des produits de PCR de longueur variable ;
du traitement) est acceptée comme marqueur de substitution à l'inverse, le clone leucémique donne naissance à un seul et
pour l'enregistrement de nouvelles molécules d'immunochi- même produit, ce qui permet son identification et sa quantifica-
miothérapie. Son suivi pourrait également aider à prédire la tion. L'inconvénient majeur de cette technique est sa sensibilité
rapidité de la rechute (fonction de sa cinétique de croissance) ou variable d'un patient à l'autre (plus sensible lorsque le produit
à proposer des traitements de maintenance. est d'une longueur peu commune).

TABLEAU II
Différentes méthodes de mesure de la maladie résiduelle minime

Méthode Sensibilité Quantitatif Standardisé Matériel Facteurs influençant les résultats


(seuil)
CMF CD5/19 k/l 10–2 Non Non Leucocytes vivants (< 48 h) Cellules B normales (augmentées si
traitement récent)

CMF quantitative 4 couleurs 10–4 Oui : 10–4 Oui  107 leucocytes vivants Nombre de leucocytes disponibles
(< 48 h) (prélèvements paucicellulaires)

CMF quantitative 6 couleurs 10–5 Oui : 10–5 Oui  107 leucocytes vivants Nombre de leucocytes disponibles
(< 48 h) (prélèvements paucicellulaires)

PCR à amorces consensus IGHV  10–3 Non Oui  106 leucocytes totaux Cellules B normales, type de clone
–5 –4 6
ASO-PCR temps réel 10 Oui : 10 Oui  10 leucocytes totaux Clone typé préalablement (région
CDR3)

Nested ASO-PCR temps réel 10–6 Non Non  106 leucocytes totaux Clone typé préalablement (région
CDR3)

PCR à amorces consensus IGHV 10–6 Oui : 10–5 Non 1 mg d'ADN initial, 6-60 mg Défaut d'amplification possible si
+ séquençage à haut débit pour le suivi leucémie lymphoïde chronique
mutée IGHV

ASO-PCR : allele-specific oligonucleotide-polymerase chain reaction ; CMF : cytométrie en flux ; PCR : polymerase chain reaction.
3

tome xx > n8x > xx 2018


Pour citer cet article : Gauthier M, et al. Maladie résiduelle minime dans la leucémie lymphoïde chronique : un enjeu restant
d'actualité. Bull Cancer (2018), https://doi.org/10.1016/j.bulcan.2018.07.008

M. Gauthier, T. Comont, F. Vergez, L. Ysebaert


Synthèse

L'ASO-PCR (allele-specific oligonucleotide PCR) est plus sensible l'ERIC a permis de standardiser les méthodes de détection de la
et nécessite la fabrication d'amorces spécifiques de la région maladie résiduelle [6]. L'augmentation du nombre de sondes
CDR3 de chaque patient avant traitement, ce qui limite son colorées permet de diminuer le matériel nécessaire et d'augmen-
utilisation en pratique. De plus, l'affinité de l'amorce pour les ter la sensibilité de la technique ; ainsi par exemple, une combi-
cellules polyclonales est variable, rendant nécessaire la déter- naison CD43/CD79b/CD20/CD81/CD19/CD5 est actuellement
mination des sensibilité et spécificité de la technique au niveau considérée comme suffisante et sans redondance pour détecter
individuel. une maladie résiduelle minime à un seuil de 105 dans la
Enfin le séquençage à haut débit offre des espoirs en termes de leucémie lymphoïde chronique. Si l'utilisation de combinaisons
sensibilité : après amplification de toutes les cellules B par PCR de 6 à 8 marqueurs est maintenant de pratique courante dans de
à amorces consensus IGHV, la détection du réarrangement IGHV nombreux centres en France, le seuil de 104 reste celui servant
du patient est possible à des taux très bas grâce à cette tech- à définir une maladie résiduelle minime indétectable [2]. L'étude
nique ; elle nécessite cependant le séquençage préalable de la de la maladie résiduelle minime en dessous de ce seuil peut se
région CDR3 de chaque patient. faire avec des techniques sensibles telles que la cytométrie en flux
avec 6 à 8 couleurs ou le séquençage à haut débit, mais n'a pas de
Méthodes basées sur la cytométrie en flux traduction clinique claire.
La cytométrie en flux permet de déterminer l'expression de Une étude combinée de 530 prélèvements a confirmé l'équi-
marqueurs membranaires des cellules sanguines et/ou médul- valence des techniques ASO-PCR et CMF 4 couleurs pour une
laires. Les cellules de leucémie lymphoïde chronique présentant détection de maladie résiduelle à un seuil de 104 [7]. Ainsi ces
un phénotype aberrant par rapport aux lymphocytes B normaux, deux techniques sont-elles des références dans la mesure de la
il est théoriquement aisé de les détecter. maladie résiduelle minime [1].
La méthode la plus simple–pratiquement abandonnée–consis- Le tableau III récapitule les avantages et inconvénients de la
tait à quantifier les cellules B (CD19+ ou CD20+) co-exprimant le biologie moléculaire et de la cytométrie en flux pour l'étude de
marqueur T CD5 et présentant une monotypie k/l. Sa sensibilité la maladie résiduelle minime dans la leucémie lymphoïde
est faible, de l'ordre de 102. chronique.
Les méthodes actuelles se basent toujours sur le CD5+ puis La figure 1 montre un exemple de maladie résiduelle minime
recherchent une expression différentielle de différents marqueurs quantifiée à 0,2 % dans la leucémie lymphoïde chronique selon
entre les rares cellules B CD5+ normales et les cellules de leucémie les recommandations ERIC en se basant sur les panels CD22/
lymphoïde chronique. Dix combinaisons ont été testées par un CD81/CD19/CD5 et CD43/CD79b/CD19/CD5.
consortium international sous l'égide de l'European Research
Initiative on CLL (ERIC), qui a retenu trois combinaisons d'anticorps
pour la mesure de la maladie résiduelle minime : CD20/CD38/ Signification de la maladie résiduelle
CD19/CD5, CD22/CD81/CD19/CD5, et CD43/CD79b/CD19/CD5 minime
(les marqueurs CD20, CD81 et CD22 étant sous-exprimés, et le D'une manière générale et intuitive après chimiothérapie et
marqueur CD43 étant surexprimé dans cette maladie) ; de plus, immunochimiothérapie, survie globale (OS) et survie sans

TABLEAU III
Avantages et inconvénients de la cytométrie en flux et de la biologie moléculaire pour l'étude de la maladie résiduelle minime dans la
leucémie lymphoïde chronique

Caractéristique CMF ASO RQ-PCR

Nombre de cellules nécessaires  107 leucocytes ffi 106 leucocytes

Délai de résultat Quelques heures Quelques jours/semaines

Nécessité d'un prélèvement initial Non Oui

Délai d'analyse/stabilité 48 heures –

Sensibilité 10 –4, fixe 10–5, mais variabilité interindividuelle

Test patient-spécifique Non Oui

Applicabilité > 95 %  90 %

Mobilisation du laboratoire Modeste Très importante

ASO-PCR : allele-specific oligonucleotide-polymerase chain reaction ; CMF : cytométrie en flux.


4

tome xx > n8x > xx 2018


Pour citer cet article : Gauthier M, et al. Maladie résiduelle minime dans la leucémie lymphoïde chronique : un enjeu restant
d'actualité. Bull Cancer (2018), https://doi.org/10.1016/j.bulcan.2018.07.008

Maladie résiduelle minime dans la leucémie lymphoïde chronique : un enjeu restant d'actualité

Synthèse
Figure 1
Exemple de MRD positive à 0,2 %
A. Repérage des leucocytes (CD45+).
B. Repérage des lymphocytes B (CD19+).
C. Isolement de la population CD19+/CD5+, représentant ici 31,3 % des lymphocytes B (bleu).
D et E. Les panels CD43/CD79b/CD19/CD5 et CD22/CD81/CD19/CD5 permettent l'isolement des cellules de LLC, comptant ici pour 0,2 % des leucocytes totaux (mesure
identique avec les deux panels).

progression sont d'autant meilleures que le patient est en résiduelle minime médullaire inférieure à 5.103 était statisti-
réponse, a fortiori profonde. Une corrélation indépendante quement associée à une OS plus longue [11]. Cette étude ne
d'autres facteurs pronostiques entre l'obtention d'une maladie prenait pas en compte les facteurs pronostiques bien connus
résiduelle indétectable et une survie améliorée (OS et survie maintenant et utilisait un seuil de maladie résiduelle minime
sans progression) a été démontrée avec plusieurs associations différent de celui actuellement recommandé, mais un bénéfice
thérapeutiques [3,8,9]. L'importance de l'obtention d'une mala- à l'obtention d'une maladie résiduelle minime indétectable en
die résiduelle minime indétectable est bien illustrée par les termes d'OS a été retrouvé par la suite dans d'autres publications
données de l'essai randomisé CLL8 dans lequel la survie sans intégrant des modèles multivariés ainsi que des patients au-
progression était dictée par la maladie résiduelle minime indé- delà de la première ligne de traitement [9,12,13]. Chez des
pendamment du type de traitement reçu en induction [3]. patients en rechute recevant de l'alemtuzumab en monothé-
Depuis maintenant plus de 15 ans, les méthodes de maladie rapie jusqu'à obtention d'une maladie résiduelle minime
résiduelle minime se sont améliorées à plusieurs égards : stan- médullaire indétectable en CMF 4 couleurs (seuil de 104),
dardisation, sensibilité accrue et caractère quantitatif. Ce dernier on retrouve une OS médiane non atteinte si la maladie rési-
point a permis de montrer que la survie sans progression était duelle minime est devenue indétectable, alors qu'elle est de
corrélée au niveau de maladie résiduelle minime atteint [3,8]. 19 mois en l'absence d'obtention de l'indétectabilité de la
Le seuil de quantification recommandé est de 104 mais les maladie résiduelle minime [14]. L'analyse de l'essai CLL8 a
techniques actuelles permettent une détection en deçà de ce permis de mettre en évidence un bénéfice à l'obtention
niveau, ce qui témoigne de la persistance d'une maladie rési- d'une maladie résiduelle minime inférieure à 102 en termes
duelle potentiellement quantifiable. Il apparaît donc important d'OS, mais le seuil de 104 était, lui, prédictif de survie sans
de développer des techniques de plus en plus sensibles afin de progression uniquement [3].
pouvoir étudier plus précisément la cinétique de la maladie
résiduelle minime ; en effet, les rechutes sont constamment Facteurs influençant le rôle pronostique de
précédées par une ré-augmentation de la maladie résiduelle la maladie résiduelle minime
minime [10]. Valeur propre de la croissance de la maladie
La première démonstration d'un avantage en OS à l'obtention résiduelle minime
d'une maladie résiduelle minime indétectable date de 2001 : Certaines études ont démontré le rôle pronostique de la rapidité de
chez des patients en réponse complète (RC) suite à un traite- croissance de la maladie résiduelle minime. Après RFC, la valeur de
ment comportant de l'alemtuzumab plus ou moins associé à une maladie résiduelle minime à un an de la fin du traitement ( 1 %
autogreffe de cellules souches, l'obtention d'une maladie ou > 1 %), ou son augmentation d'au moins 1 log par rapport
5

tome xx > n8x > xx 2018


Pour citer cet article : Gauthier M, et al. Maladie résiduelle minime dans la leucémie lymphoïde chronique : un enjeu restant
d'actualité. Bull Cancer (2018), https://doi.org/10.1016/j.bulcan.2018.07.008

M. Gauthier, T. Comont, F. Vergez, L. Ysebaert


Synthèse

à l'évaluation de fin de traitement ont été décrites comme asso- pronostique indépendant, et sert dorénavant à guider les indi-
ciées à une survie sans progression raccourcie [15,16]. cations d'allogreffe de CSH notamment. La leucémie lymphoïde
chronique est différente car très peu de patients sont allogref-
Corrélation entre facteurs pronostiques intrinsèques
fés, mais une évaluation intermédiaire de la maladie résiduelle
et croissance de la maladie résiduelle minime
minime pourrait permettre d'adapter le traitement (avec
Une étude de croissance de la maladie résiduelle minime chez
notamment la question de l'arrêt du traitement en cas de
les patients inclus dans l'essai CLL8 et n'ayant pas rechuté à un
maladie résiduelle minime indétectable).
an de la fin du traitement a permis de mettre en évidence le rôle
Chez les patients traités par RFC dans l'essai CLL8, la signification
indépendant de la croissance de la maladie résiduelle minime
pronostique d'obtenir une maladie résiduelle minime indétec-
en termes de prédiction de survie sans progression. La crois-
table dans le sang était semblable, que cette indétectabilité soit
sance de maladie résiduelle minime était pronostique y compris
obtenue après 3 ou après 6 cycles de RFC (survie sans progres-
pour prédire les rechutes survenant lors de la deuxième année
sion médiane de respectivement 64 et 68,7 mois). Ceci peut
de suivi (très graves). Les facteurs associés à une croissance plus
laisser penser qu'une désescalade thérapeutique serait envisa-
rapide durant la deuxième année de suivi étaient les suivants :
geable après obtention d'une maladie résiduelle minime indé-
Binet B ou C en pré-thérapeutique, délétion 11q ou caryotype
tectable post-RFC, mais reste à prouver avec une méthodologie
normal plutôt que délétion 13q isolée, statut IGHV non muté,
adaptée [3]. De même, une étude américaine concernant
thymidine-kinase > 10 U/L. Il est intéressant de noter que le
148 patients traités par RFC en première ligne disposant
bras de traitement n'avait aucun effet sur la croissance de la
d'une évaluation médullaire de maladie résiduelle minime
maladie résiduelle minime, tout comme la valeur initiale de b2-
après 3 et 6 cycles a été publiée. Cinquante patients ont stoppé
microglobuline, le genre, la présence de signes B ou la lym-
le traitement précocement pour toxicité. Il apparaît dans cette
phocytose pré-thérapeutique [17].
étude que la survie sans progression des patients stoppant le
Avec d'autres schémas thérapeutiques, certains facteurs ont été
traitement après 3 cycles en situation de maladie résiduelle
associés à une ré-augmentation du niveau de maladie résiduelle
minime indétectable n'est pas différente de celle des patients
minime au cours du suivi post-thérapeutique : ZAP-70 et le statut
ayant une maladie résiduelle minime indétectable à l'issue des
mutationnel IGHV dans une étude s'intéressant à l'association
6 cycles, qu'ils aient ou non une maladie résiduelle minime
Fludarabine, Cyclophosphamide et Mitoxantrone (FCM) avec un
positive après 3 cycles. La survie sans progression la plus défa-
seuil de maladie résiduelle minime de 104 ; statut mutationnel
vorable était constatée chez les patients ayant une maladie
IGHV, del11q, lymphocytose et temps de doublement lympho-
résiduelle minime positive après 3 cycles et stoppant le traite-
cytaire pré-thérapeutiques dans une étude s'intéressant à l'au-
ment [13].
togreffe et quantifiant la maladie résiduelle minime par
Cependant le délai nécessaire à une reconstitution hématopoïé-
méthode moléculaire [18,19].
tique suffisante pour permettre l'interprétation de la maladie
Certains facteurs peuvent-ils apporter une résiduelle minime sanguine rend difficile toute approche de
information pronostique complémentaire de celle traitement guidée par l'obtention précoce d'une maladie rési-
fournie par la maladie résiduelle minime ? duelle minime indétectable.
La prolifération des cellules de leucémie lymphoïde chronique a
lieu dans les centres prolifératifs des ganglions au sein d'un Signification d'une maladie résiduelle
micro-environnement tumoral complexe dont la composition minime indétectable après allogreffe de
après immunochimiothérapie pourrait moduler la rapidité de cellules souches
rechute. Si peu de biopsies post-thérapeutiques sont disponi- L'allogreffe de CSH voit ses indications se restreindre avec
bles, il a été montré que le niveau de lymphocytes CD4 sanguins l'arrivée des nouveaux traitements de la leucémie lymphoïde
persistant après immunochimiothérapie par RFC donnait une chronique. En effet, si cette procédure est la seule permettant la
information indépendante de la maladie résiduelle minime pour guérison de la leucémie lymphoïde chronique, elle n'en
la prédiction de la survie sans progression [20]. Ainsi, plus les demeure pas moins grevée d'une morbidité et d'une mortalité
CD4 étaient élevés, plus la rechute était précoce ; cette influence qui ne la font proposer qu'aux sujets jeunes et présentant une
des lymphocytes CD4 serait le fait de leur phénotype majori- maladie agressive.
tairement T régulateur (aux propriétés régulatrices augmen- Le rôle de la maladie résiduelle minime en post-allogreffe est
tées) et de leur rôle de soutien à la croissance tumorale [21]. dorénavant bien démontré, et l'obtention d'une maladie rési-
duelle minime indétectable dans les 12 mois suivant la pro-
Une mesure de la maladie résiduelle cédure est associée à un risque diminué de rechute. La
minime en cours de traitement ? surveillance de la maladie résiduelle minime s'impose dans
Dans les leucémies aiguës lymphoblastiques, l'évaluation de la ce contexte car elle permettrait de diminuer le risque de rechute
maladie résiduelle minime en cours de traitement a un rôle en modulant l'immunosuppression et dans l'actualisation
6

tome xx > n8x > xx 2018


Pour citer cet article : Gauthier M, et al. Maladie résiduelle minime dans la leucémie lymphoïde chronique : un enjeu restant
d'actualité. Bull Cancer (2018), https://doi.org/10.1016/j.bulcan.2018.07.008

Maladie résiduelle minime dans la leucémie lymphoïde chronique : un enjeu restant d'actualité

Synthèse
récemment rapportée de l'essai allemand CLL3X, la meilleure provenance du micro-environnement, régulation positive des
survie sans progression était obtenue chez les patients obtenant molécules de costimulation CD80 et CD86, augmentation de
une maladie résiduelle minime indétectable à 12 mois via une l'expression de CD40L (associée à une restauration de l'immu-
baisse de l'immunosuppression, suggérant un important effet nité humorale normale chez les patients répondeurs). Une
« greffon contre leucémie » [22]. Cette stratégie a été testée cytotoxicité directe a été observée dans le myélome, mais pas
prospectivement lors de l'essai RICAC-PMM où de nombreux dans la leucémie lymphoïde chronique ;
 au niveau des cellules T : augmentation de la synthèse d'IL2
patients répondaient à une modulation de l'immunosuppression
post-allogreffe, avec pour certains l'obtention d'une maladie (IKZF1 et IKZF3 étant des répresseurs du promoteur de l'IL2),
résiduelle minime indétectable ; cependant certains patients polarisation Th1 des lymphocytes T CD4 aux dépens des Th2,
semblaient ne pas répondre à l'immuno-modulation, ce qui inhibition des Treg et restauration de la capacité d'assemblage
pose la question de maladies moins sensibles à l'immunothé- des protéines du cytosquelette (restauration de la synapse
rapie, qu'il conviendrait d'identifier [23]. immunologique et des capacités de motilité) ;
 au niveau d'autres cellules du micro-environnement : diminu-

Rôle de la maladie résiduelle minime dans tion de la réponse aux signaux de survie envoyés par les nurse-
la prise de décisions like cells, inhibition de CXCL12 et diminution du VEGF et du FGF.
Ainsi le lenalidomide a montré une restauration de la synapse
La maladie résiduelle minime n'a pas d'application clinique en
immunologique conjointement à des négativations de maladie
routine pour l'heure. Elle reste cependant un critère se substi-
résiduelle minime après immunochimiothérapie à base de pen-
tuant à la survie sans progression pour les études d'immuno-
tostatine-cyclophosphamide et rituximab ; la synapse immuno-
chimiothérapie, dans lesquelles elle peut servir de marqueur
logique était d'autant mieux restaurée que le nombre de cycles
pour proposer un traitement d'entretien si elle demeure posi-
de lenalidomide était important, et la survie sans progression
tive, ou à l'inverse pour stopper une immunochimiothérapie si la
semblait améliorée par comparaison historique avec des
maladie résiduelle minime est indétectable de manière
patients traités par cette immunochimiothérapie [25]. Plusieurs
précoce.
études encourageantes testant une maintenance par lenalido-
Une maintenance guidée par la maladie résiduelle mide après immunochimiothérapie ont été publiées, mais
minime ? l'émergence de leucémies aiguës lymphoblastiques en cours
Certaines études ont commencé à s'intéresser à une mainte- de traitement dans l'essai CLL6-RESIDUUM doit inviter à la vigi-
nance après immunochimiothérapie d'induction en cas de per- lance vis-à-vis de ce médicament dans cette indication.
sistance d'une maladie résiduelle minime, notamment dans le Vers un traitement pré-emptif de la rechute ?
but de prolonger la survie sans progression : l'alemtuzumab a Il a été suggéré que la ré-augmentation d'une maladie rési-
été utilisé et a permis l'obtention de maladies résiduelles mini- duelle minime indétectable à l'issue d'une immunochimiothé-
mes indétectables, mais s'est avéré trop toxique, sans gain de rapie d'induction pourrait prédire une rechute dans les 2 ans, ce
survie globale. qui pourrait également ouvrir la voie à des traitements pré-
Plus récemment, plusieurs groupes ont proposé des consolida- emptifs dans cette fenêtre, comme cela est testé dans d'autres
tions à base d'anti-CD20, par exemple l'essai français CLL2007SA hémopathies malignes notamment le lymphome du manteau.
qui a permis de prolonger significativement la survie sans pro-
gression de patients de plus de 65 ans sans del17p qui rece- Quelles sont les limites de la mesure de la
vaient une maintenance par Rituximab après 4 cycles de RFC maladie résiduelle minime ?
[24]. La leucémie lymphoïde chronique est une maladie « multi-
Le lenalidomide est particulièrement intéressant dans les hémo- compartimentale » (sang, moelle, organes lymphoïdes secon-
pathies lymphoïdes B de par ses capacités de restauration de la daires), avec d'emblée une atteinte médullaire, ganglionnaire,
synapse immunologique et d'augmentation de la cytotoxicité splénique et hépatique (ces atteintes pouvant rester microsco-
cellulaire dépendante des anticorps (ADCC), d'une manière piques). Or, la maladie résiduelle minime ne se mesure que
générale et après immunochimiothérapie pour une leucémie dans le sang ou la moelle osseuse, et il peut persister des
lymphoïde chronique. cellules tumorales dans un autre organe (« maladie résiduelle
De plus, son mécanisme d'action original implique les lympho- minime nodale ») ; cette maladie résiduelle est difficilement
cytes CD4 du micro-environnement. En effet, le lenalidomide mesurable en routine et il a été rapporté que la présence d'une
augmente l'ubiquitinylation et la dégradation d'IKZF1 et maladie résiduelle minime indétectable avec persistance d'un
IKZF3 par le protéasome (via un mécanisme impliquant cere- syndrome tumoral ganglionnaire diminuait nettement la survie
blon), ce qui a diverses conséquences : sans progression par rapport à une réponse complète avec
 au niveau des cellules de leucémie lymphoïde chronique :
maladie résiduelle minime indétectable (médiane de 60,7 à
diminution de leur réponse aux signaux pro-tumoraux en 30,9 mois, HR = 2,6, p < 0,001) [26].
7

tome xx > n8x > xx 2018


Pour citer cet article : Gauthier M, et al. Maladie résiduelle minime dans la leucémie lymphoïde chronique : un enjeu restant
d'actualité. Bull Cancer (2018), https://doi.org/10.1016/j.bulcan.2018.07.008

M. Gauthier, T. Comont, F. Vergez, L. Ysebaert


Synthèse

Questions en suspens concernant la mesure démontre que le fait d'obtenir une maladie résiduelle minime
de la maladie résiduelle minime sanguine inférieure à 104 est un facteur indépendant pour la
Quel rôle pour la maladie résiduelle minime en prédiction de la survie sans progression et de l'OS contrairement
routine ? à la réponse partielle (RP), alors que 29,1 % des patients ont une
Si le rôle pronostique de la maladie résiduelle minime est établi réponse partielle avec maladie résiduelle minime < 104 ; de
(marqueur de substitution pour la survie sans progression et l'OS plus, les patients ayant une réponse partielle avec maladie
dans les essais évaluant de l'immunochimiothérapie), aucun résiduelle minime indétectable ont une survie sans progression
essai prospectif n'a permis d'établir une stratégie thérapeutique comparable à ceux ayant une réponse complète avec maladie
guidée par le niveau de maladie résiduelle minime, ce qui résiduelle minime indétectable, et supérieure à ceux ayant une
explique que les dernières recommandations internationales réponse complète avec maladie résiduelle minime positive.
n'aient pas validé son utilisation en pratique quotidienne, et Cependant, il est noté un pronostic différent entre les différents
que peu de données de maladie résiduelle minime soient types de réponse partielle avec maladie résiduelle minime
disponibles en situation de vie réelle [2]. Les essais prospectifs indétectable selon le site restant envahi (la persistance d'un
actuels incluent souvent des nouvelles drogues n'induisant pas syndrome tumoral ganglionnaire étant associée à une survie
de maladie résiduelle minime indétectable (inhibiteurs du BCR), sans progression plus courte, contrairement à la persistance
ce qui rend plus difficile l'élaboration d'une stratégie thérapeu- d'une splénomégalie). Ces réponses partielles avec maladie
tique incluant ce marqueur. résiduelle minime indétectable ont été observées avec d'autres
associations thérapeutiques et pourraient être le reflet soit de
Quel site prélever ? masses tumorales nécrotiques (non actives), soit de la persis-
La mesure conjointe de la maladie résiduelle minime dans la tance de maladie purement tumorale [26].
moelle et dans le sang a permis de montrer que la clairance était
plus précoce dans le sang (après R-FCM, 21 % des patients Quel rôle pour la maladie résiduelle minime avec
présentent une maladie résiduelle minime sanguine indétec- les nouvelles thérapies ciblées ?
table et une maladie résiduelle minime médullaire persistante) La maladie résiduelle minime n'est pas utile lorsque les inhi-
[27]. Ceci a également été observé avec des mesures non biteurs du BCR sont utilisés en monothérapie, car l'obtention
concomitantes dans des essais cliniques [3,8]. L'étude CLL2 M d'une maladie résiduelle minime indétectable est rare (quel-
a retrouvé des survies sans progression plus courtes pour les ques % de patients), et l'inhibiteur doit être poursuivi au long
mêmes valeurs de maladie résiduelle minime lorsqu'elles cours. Cependant l'association de ces médicaments avec une
étaient mesurées dans le sang par rapport à lorsqu'elles étaient immunochimiothérapie ou un anti-CD20 seul (permettant une
mesurées dans la moelle [8]. Il est considéré que cette dissocia- approche « chemo-free ») permet d'augmenter la proportion de
tion entre maladie résiduelle minime médullaire et sanguine patients obtenant une maladie résiduelle minime indétectable,
concerne essentiellement les immunochimiothérapies (due aux ce qui se traduira probablement par une survie sans progression
anticorps monoclonaux) et ne retentit sur la survie sans pro- prolongée à l'avenir, et permettra d'arrêter les traitements, y
gression qu'à partir de 3 ans après la fin de traitement. compris les inhibiteurs du BCR [28].
Toutes ces immunochimiothérapies s'inscrivent dans une La maladie résiduelle minime reste importante avec les inhibi-
optique de mise en rémission des patients afin d'obtenir des teurs de BCL2, qu'ils soient utilisés en monothérapie ou en
survies sans progression les plus longues possibles, et une combinaison avec des anti-CD20, des chimiothérapies ou des
mesure de maladie résiduelle minime dans le sang pourrait inhibiteurs du BCR [29]. L'étude de phase 3 Murano fait état de
servir à identifier les patients qui pourraient bénéficier d'une plus de 80 % d'éradication de maladie résiduelle minime avec
maintenance. À l'inverse, lorsque l'objectif du traitement est la l'association rituximab et venetoclax chez des patients en
guérison et donc l'éradication de la maladie, il paraît logique de rechute et/ou réfractaires, ce qui augure d'une importance
viser une maladie résiduelle minime indétectable non seule- capitale de ce nouveau cytotoxique dans l'arsenal thérapeutique
ment dans le sang mais également dans la moelle. des prochaines décennies [30].
La mesure de la maladie résiduelle minime va-t-
elle supplanter les critères IWCLL ? Conclusion
Le suivi à long terme des patients traités par RFC dans la phase Si de nouvelles thérapeutiques ciblant les voies de signalisation
2 initiale retrouvait un avantage en survie sans progression telles que l'ibrutinib ou l'idélalisib ont remis et continuent de
à l'obtention d'une maladie résiduelle minime < 104, quelle remettre en question le rôle de la chimiothérapie dans la
que soit la réponse selon IWCLL [12]. leucémie lymphoïde chronique, le rôle de la maladie résiduelle
De manière intéressante, une analyse regroupant 554 des minime demeure important pour l'évaluation de la réponse aux
patients traités dans les essais CLL8 (randomisant RFC versus nouveaux cytotoxiques tels que le venetoclax ainsi que pour les
FC) et CLL10 (randomisant RFC versus Rituximab-Bendamustine) associations comprenant un inhibiteur du BCR et un traitement
8

tome xx > n8x > xx 2018


Pour citer cet article : Gauthier M, et al. Maladie résiduelle minime dans la leucémie lymphoïde chronique : un enjeu restant
d'actualité. Bull Cancer (2018), https://doi.org/10.1016/j.bulcan.2018.07.008

Maladie résiduelle minime dans la leucémie lymphoïde chronique : un enjeu restant d'actualité

Synthèse
cytotoxique. De plus, les excellents résultats obtenus avec minime indétectable. Les récentes recommandations IWCLL
l'association RFC dans le sous-groupe de patients IGHV mutés abondent dans le sens d'une mesure de la maladie résiduelle
permettent de maintenir cette association comme un standard minime au cœur des préoccupations actuelles des praticiens
dans cette situation en affirmant le rôle pronostique important soignant cette maladie [2].
de l'obtention d'une maladie résiduelle minime indétectable
dans cette situation, et ouvrent la voie à des traitements de Déclaration de liens d'intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de
maintenance permettant l'obtention d'une maladie résiduelle liens d'intérêts.

Références
[1] Hallek M, Cheson BD, Catovsky D, Caligaris- rituximab-containing immunochemotherapy: cyclophosphamide, and rituximab regimen
Cappio F, Dighiero G, Döhner H, et al. Guide- a comparative analysis. Leukemia 2009;23 given in the first-line therapy for chronic lym-
lines for the diagnosis and treatment of (11):2007–17. phocytic leukemia. Haematologica 2013;98
chronic lymphocytic leukemia: a report from [8] Fischer K, Cramer P, Busch R, Böttcher S, (1):65–70.
the International Workshop on Chronic Lym- Bahlo J, Schubert J, et al. Bendamustine in [16] Ysebaert L, Gross E, Kühlein E, Blanc A, Corre
phocytic Leukemia updating the National combination with rituximab for previously J, Fournié JJ, et al. Immune recovery after
Cancer Institute-Working Group 1996 guide- untreated patients with chronic lymphocytic fludarabine-cyclophosphamide-rituximab
lines. Blood 2008;111(12):5446–56. leukemia: a multicenter phase II trial of the treatment in B-chronic lymphocytic leukemia:
[2] Hallek M, Cheson BD, Catovsky D, Caligaris- German Chronic Lymphocytic Leukemia Study implication for maintenance immunotherapy.
Cappio F, Dighiero G, Döhner H, et al. Guide- Group. J Clin Oncol 2012;30(26):3209–16. Leukemia 2010;24(7):1310–6.
lines for diagnosis, indications for treatment, [9] Kwok M, Rawstron AC, Varghese A, Evans [17] Boettcher S, Ritgen M, Fischer K, Stilgen-
response assessment and supportive mana- PAS, O'Connor SJM, Doughty C, et al. Minimal bauer S, Busch R, Fingerle-Rowson GR, et al.
gement of chronic lymphocytic leukemia. residual disease is an independent predictor Minimal residual disease (MRD) re-growth
Blood 2018;131(25):2745–60. 131 (25), for 10-year survival in CLL. Blood 2016;128 kinetics are an independent predictor for pro-
2018, 2745-2760. (24):2770–3. gression free survival (PFS) in chronic lym-
[3] Böttcher S, Ritgen M, Fischer K, Stilgenbauer [10] Milligan DW, Fernandes S, Dasgupta R, phocytic leukemia (CLL) and are related to
S, Busch RM, Fingerle-Rowson G, et al. Davies FE, Matutes E, Fegan CD, et al. Results biologically defined CLL-subgroups – results
Minimal residual disease quantification is an of the MRC pilot study show autografting for from the CLL8 trial of the German CLL Study
independent predictor of progression-free younger patients with chronic lymphocytic Group (GCLLSG). Blood 2011;118(21):1777.
and overall survival in chronic lymphocytic leukemia is safe and achieves a high percen- [18] Bosch F, Ferrer A, Villamor N, González M,
leukemia: a multivariate analysis from the tage of molecular responses. Blood 2005;105 Briones J, González-Barca E, et al. Fludar-
randomized GCLLSG CLL8 trial. J Clin Oncol (1):397–404. abine, cyclophosphamide, and mitoxan-
2012;30(9):980–8. [11] Rawstron AC, Kennedy B, Evans PA, Davies trone as initial therapy of chronic
[4] Eichhorst BF, Bahlo J, Maurer C, Lange E, FE, Richards SJ, Haynes AP, et al. Quantitation lymphocytic leukemia: high response rate
Köppler H, Kiehl MG, et al. Favorable toxicity of minimal disease levels in chronic lympho- and disease eradication. Clin Cancer Res
profile and long term outcome of elderly, but cytic leukemia using a sensitive flow cyto- 2008;14(1):155–61.
physically fit cll patients (pts) Receiving first metric assay improves the prediction of [19] Ritgen M, Lange A, Stilgenbauer S, Dohner
line bendamustine and rituximab (BR) front- outcome and can be used to optimize therapy. H, Bretscher C, Bosse H, et al. Unmutated
line chemoimmunotherapy in comparison to Blood 2001;98(1):29–35. immunoglobulin variable heavy-chain gene
fludarabine, cyclophosphamide, and rituxi- [12] Thompson PA, Tam CS, O'Brien SM, Wierda status remains an adverse prognostic factor
mab (FCR) in Advanced chronic lymphocytic WG, Stingo F, Plunkett W, et al. Fludarabine, after autologous stem cell transplantation for
leukemia (CLL): update analysis of an inter- cyclophosphamide, and rituximab treatment chronic lymphocytic leukemia. Blood
national, randomized study of the German CLL achieves long-term disease-free survival in 2003;101(5):2049–53.
Study Group (GCLLSG) (CLL10 Study). Blood IGHV-mutated chronic lymphocytic leukemia. [20] Gauthier M, Durrieu F, Peres M, Martin E,
2016;128(22):4382. Blood 2016;127(3):303–9. Filleron T, Recher C, et al. Immune recovery
[5] Chai-Adisaksopha C, Brown JR. FCR achieves [13] Strati P, Keating MJ, O'Brien SM, Burger J, refines the prognostic impact of minimal resi-
long-term durable remissions in patients with Ferrajoli A, Jain N, et al. Eradication of bone dual disease on overall and progression free
IGHV-mutated CLL. Blood 2017;130 marrow minimal residual disease may survivals after frontline fludarabine, cyclopho-
(21):2278–82. prompt early treatment discontinuation in sphamide and rituximab (FCR) in CLL patients.
[6] Rawstron AC, Villamor N, Ritgen M, Böttcher CLL. Blood 2014;123(24):3727–32. Blood 2017;130(Suppl 1):1731.
S, Ghia P, Zehnder JL, et al. International [14] Moreton P, Kennedy B, Lucas G, Leach M, [21] Bagnara D, Kaufman MS, Calissano C, Mar-
standardized approach for flow cytometric Rassam SMB, Haynes A, et al. Eradication of silio S, Patten PEM, Simone R, et al. A novel
residual disease monitoring in chronic lym- minimal residual disease in B-cell chronic adoptive transfer model of chronic lympho-
phocytic leukaemia. Leukemia 2007;21 lymphocytic leukemia after alemtuzumab cytic leukemia suggests a key role for T lym-
(5):956–64. therapy is associated with prolonged survival. phocytes in the disease. Blood 2011;117
[7] Böttcher S, Stilgenbauer S, Busch R, Brüg- J Clin Oncol 2005;23(13):2971–9. (20):5463–72.
gemann M, Raff T, Pott C, et al. Standardized [15] Bouvet E, Borel C, Obéric L, Compaci G, Cazin [22] Krämer I, Stilgenbauer S, Dietrich S, Böttcher
MRD flow and ASO IGH RQ-PCR for MRD B, Michallet A-S, et al. Impact of dose S, Zeis M, Stadler M, et al. Allogeneic
quantification in CLL patients after intensity on outcome of fludarabine, hematopoietic cell transplantation for high-
9

tome xx > n8x > xx 2018


Pour citer cet article : Gauthier M, et al. Maladie résiduelle minime dans la leucémie lymphoïde chronique : un enjeu restant
d'actualité. Bull Cancer (2018), https://doi.org/10.1016/j.bulcan.2018.07.008

M. Gauthier, T. Comont, F. Vergez, L. Ysebaert


Synthèse

risk CLL: 10-year follow-up of the GCLLSG [25] Shanafelt TD, Ramsay AG, Zent CS, Leis JF, rituximab, fludarabine, cyclophosphamide,
CLL3X trial. Blood 2017;130(12):1477–80. Tun HW, Call TG, et al. Long-term repair of T- and mitoxantrone (R-FCM) for chronic lym-
[23] Tournilhac O, Garff-Tavernier ML, Tabrizi R, cell synapse activity in a phase II trial of phocytic leukemia. Blood 2013;122
Nguyen-Quoc S, Legrand-Izadifar F, Combes chemoimmunotherapy followed by lenalido- (24):3951–9.
P, et al. RIC allogeneic stem cell transplanta- mide consolidation in previously untreated [28] Davids MS, Kim HT, Brander DM, Bsat J,
tion for high risk CLL followed by preemptive chronic lymphocytic leukemia (CLL). Blood Savell A, Francoeur K, et al. A multicenter
MRD-Based immunointervention – final 2013;121(20):4137–41. phase II study of ibrutinib plus FCR (iFCR) as
results from the phase II ICLL03 Ricac-Pmm [26] Kovacs G, Robrecht S, Fink AM, Bahlo J, frontline therapy for younger CLL patients.
Trial (FILO - SFGM-TC French intergroup). Cramer P, von Tresckow J, et al. Minimal Blood 2017;130(Suppl 1):496.
Blood 2017;130(Suppl 1):4599. residual disease assessment improves predic- [29] Fischer K, Al-Sawaf O, Fink A-M, Dixon M,
[24] Dartigeas C, Van Den Neste E, Maisonneuve tion of outcome in patients with chronic lym- Bahlo J, Warburton S, et al. Venetoclax and
H, Berthou C, Dilhuydy M-S, De Guibert S, phocytic leukemia (CLL) who achieve partial obinutuzumab in chronic lymphocytic leuke-
et al. Rituximab maintenance after induction response: comprehensive analysis of two mia. Blood 2017;129(19):2702–5.
with abbreviated FCR in previously untreated phase III studies of the German CLL Study [30] Seymour JF, Kipps TJ, Eichhorst B, Hillmen P,
elderly ( 65 years) CLL patients: results of Group. J Clin Oncol 2016;34(31):3758–65. D'Rozario J, Assouline S, et al. Venetoclax-
the randomized CLL 2007 SA trial from the [27] Abrisqueta P, Villamor N, Terol MJ, González- Rituximab in relapsed or refractory chronic
French FILO Group. J Clin Oncol 2016;34 Barca E, González M, Ferrà C, et al. Rituximab lymphocytic leukemia. N Engl J Med
(15_suppl):7505 [NCT00645606]. maintenance after first-line therapy with 2018;378(12):1107–20.
10

tome xx > n8x > xx 2018

Vous aimerez peut-être aussi