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Les crises familiales n’ont peut-être pas pour origine le seul silence
de Louis.
1
?
Flux de paroles
III) La crise familiale est en réalité une crise de la communication
A) La difficulté à dire de ceux qui ne savent pas garder le silence
Reformulation / polyptote
Aposiopèse (scène 2 – Première partie)
« ce que je veux dire » (scènes 3, 5, 8 – Première partie + scène 3 –
Deuxième partie)
B) Le cri final de Louis, qui n’est pas poussé, comme symbole de l’écriture
de Lagarce
Épilogue
Épanorthose
AUTRE PLAN
En quoi le silence de Louis est-il à l’origine de la crise familiale ?
I. Le silence mystérieux de Louis :
a. Pendant sa longue absence, ses seules manifestations ont été des cartes
postales elliptiques, comme le dit Suzanne dans son soliloque. (I, 3) Il a été
injoignable, comme le dit sa mère dans son propre soliloque. (I, 8). Par suite
Suzanne le lui reproche comme s’il montrait ainsi que leur lien n’avait pas
d’importance ; attente d’attention déçue. Pour Antoine exprimé par
l’intermédiaire de Catherine » sa vie ne vous intéresse pas ». ¨Pour la mère
ses deux enfants sont en attente déçue de Louis, qu’il leur donne des
permissions.
b. Durant la pièce, Louis se tait beaucoup : face aux soliloques de sa mère et
de sa sœur, il se tait ; par suite elles peuvent y voir une confirmation de ce
qu’elles pensent : il ne répond pas à leur demande parce qu’elles n’en valent
pas la peine ; cela les enferme dans leur malaise. Les disputes entre Antoine
et Suzanne sont en partie provoquées par l’absence de positionnement de
Louis : ne dit pas si cela lui va de tutoyer Catherine (I, 1), s’il veut que ce
soit Suzanne ou Antoine qui le raccompagne (II, 2)… Les autres
personnages s’affrontent pour donner leur point de vue sur quelque chose
qui le concerne personnellement. On peut supposer que confronté à sa
propre mort, Louis trouve ses questions frivoles, mais elles sont importantes
pour la fratrie dans les disputes
c. Louis se tait sur sa propre mort puisqu’il n’en parle qu’au spectateur
(prologue, monologues, épilogue)… alors que le projet initial était de le dire
à sa famille. Ce non-dit empêche les autres de le comprendre puisqu’ils ne
savent pas pourquoi il est revenu (et la question des raisons de son départ
n’est pas élucidée non plus). Le désarroi se manifeste dans les scènes entre
Antoine et Suzanne dans l’interlude ; et les désirs contradictoires de la fratrie
–Suzanne voudrait qu’il reste, Antoine qu’il parte- sont le prétexte à
l’explosion finale d’Antoine qui se sent bouc émissaire : il se sent désigné
comme responsable du départ de Louis comme il s’est senti désigné comme
coupable de son mal-être quand il était enfant. Louis en ne s’exprimant pas
capte l’attention des femmes aux dépens d’Antoine.
AUTRE PLAN
Étapes de l’intro
❖ Amorce, à partir de la présentation de l’œuvre, en ne donnant que les
infos utiles pour introduire le sujet que vous avez à traiter Ici, rappeler le
retour de Louis après 12 ans d’absence avec son intention d’annoncer à sa
famille sa « mort prochaine et irrémédiable ». Mais souligner la famille en
crise, les difficultés de communication, le silence du héros et la pièce
envahie par les soliloques plein de reproches des autres membres de la
famille.
Ex rédigé : La pièce de Lagarce met en scène une famille en crise où la
difficulté à communiquer et les crises personnelles des personnages jouent
un rôle essentiel. En effet, Louis, parti depuis 12 ans, décide de revenir chez
lui pour annoncer sa mort à ses proches mais il se retrouve submergé de
reproches liés au douloureux passé familial auquel il doit faire face, ainsi
qu’à la rivalité avec son frère Antoine. Louis reste souvent muet face à la
situation, ce qui est loin d’arranger les choses.
❖ Annonce de la problématique et questionnement, pistes pour soulever les
enjeux de la réflexion Nous pouvons nous demander si le silence de Louis
provoque la crise familiale. En quoi ce silence pèse dans les relations
familiales ? Pourquoi Louis reste-t-il silencieux ? Est-ce un silence imposé
ou voulu ? Par ailleurs, le silence n’en dit-il pas plus que la parole elle-même
ne l’aurait fait ? Et Louis est-il le seul responsable de la crise qui se joue au
sein de cette famille ?
❖ Annonce des axes qui seront développés Nous montrerons donc d’abord
en quoi le silence de Louis est responsable de la crise familiale mise en
scène dans la pièce de Lagarce. Puis nous verrons que c’est surtout une crise
de la communication au sein de la famille qui est source de conflit, faisant
émerger les crises personnelles de chacun et la difficulté de tous à dire.
B) Puisqu’il ne dit rien, Louis en est réduit à écouter ses proches dont la
logorrhée (= flux de parole) cherche à combler ce silence en exprimant
reproches et frustrations.
- Louis ne dit rien et ne fait qu’écouter son frère (scène 11 – Première
partie), sa mère (scènes 4 et 8 – Première partie) et sa sœur (scène 3 –
Première partie) exprimer leurs souvenirs et leurs rancœurs. Le silence de
Louis est donc subi puisqu’il se retrouve dépossédé de la parole.
- Soliloque de Suzanne (scène 3, première partie) : elle exprime son
sentiment d’abandon au départ de Louis, lui reproche ses « lettres elliptiques
», « juste des petits mots » qui lui ont donné l’impression que devenu
écrivain, il ne jugeait plus ses proches assez « dignes » pour leur accorder de
l’importance, du temps et pour leur raconter sa nouvelle vie dans de vraies
lettres.
- Soliloque de la mère (scène 8, première partie) : elle imagine un scénario
familial où Louis reprendrait sa place de fils aîné et où chacun dirait ce qu’il
a à dire. Elle tente de l’inciter à reprendre son rôle central au sein de la
famille et à le faire revenir dans le giron maternel. Face au silence de son
fils, la Mère exprime sa frustration : « Petit sourire ? Juste « ces deux ou
trois mots » ? »
- Scène de confrontation entre Antoine et Louis, partie I scène 8 : les
réactions impulsives d’Antoine, face aux maladresses de Louis tentant
vainement de recréer une forme de complicité fraternelle, empêchent tout
véritable dialogue : la parole empêchée de Louis se heurte à la colère
d’Antoine qui refuse d’entendre Louis lui « raconter des histoires », « la part
du mensonge ». Le frère rejette toute tentative de communication,
monopolisant la parole et concluant ainsi : « tu voudras me parler / et il
faudra que j’écoute / et je n’ai pas envie d’écouter. »
Transition : Ainsi, comme nous l’avons vu, Louis est un personnage
silencieux qui choisit de se taire, tout autant qu’il en est contraint. Mais si
son silence suscite du ressentiment et des rancœurs chez ses proches, il ne
porte sans doute pas, seul, la responsabilité de la crise familiale.
II) nous allons montrer que c’est une crise de la communication au sein
de la famille, bien plus que le silence de Louis, qui provoque les conflits.
A) La famille mise en scène dans la pièce de Lagarce ne sait pas
communiquer sereinement ni facilement. On assiste souvent à un échec du
dialogue et des tensions entre les personnages.
- Comme le dit Antoine, dans la partie II scène 3, dans cette famille : « rien
jamais ici ne se dit facilement »
- Des disputes éclatent dont Louis n’est pas toujours le seul responsable : dès
la 1re scène des retrouvailles, on assiste à des frictions entre Antoine et
Suzanne (qui semblent rejouer éternellement les disputes de l’enfance) ; la
scène du repas (partie I, scène 9) est ponctuée par les sorties de personnages
qui finissent par quitter la table, laissant Catherine seule : cette scène
confronte à nouveau Antoine et Suzanne, cette dernière s’emportant de façon
excessive ; dans la scène 2 de la partie II, on assiste à la montée de la tension
progressive, jusqu’à la parole fratricide d’Antoine : « tu me touches : je te
tue » ; dans cette scène de conflit virulent, Louis est au cœur de la crise et à
l’origine de l’affrontement familial. Mais ce n’est pas son silence qui est en
cause, plutôt son nouveau départ (après sa longue absence), vécu par
Suzanne comme un nouvel abandon.
B) Lagarce met en scène une parole qui peine à dire et même ceux qui ne
savent pas garder le silence (ni à se réfugier dans celui-ci comme Louis)
éprouvent de réelles difficultés à exprimer leur pensée.
- Plus d’une fois sur trois dans la pièce, la parole est niée (on retrouve 205
occurrences du verbe « se/dire », qui est nié 76 fois)
- Le dramaturge abuse des reformulations, du procédé de l’épanorthose, les
personnages recherchant constamment le mot « juste » apte à exprimer leur
vérité intérieure : Suzanne et sa difficulté à avouer son désir d’indépendance
et de fuite du giron maternel : « je ne sais comment l’expliquer / comment le
dire » (partie I, scène 3) ; Antoine et son incapacité à exprimer ce qu’il
ressent, à se délivrer son mal être et terminant sa tirade au bord des larmes :
« je disais seulement / je voulais seulement dire / (…) je voulais seulement
dire… » (partie II, scène 2).
- L’expression « ce que je veux dire » est sans cesse répétée (scènes 3, 5, 8 –
Première partie + scène 3 – Deuxième partie) Les personnages sont
confrontés à l’impossibilité de se faire entendre et de communiquer
véritablement. Le langage tourne à vide, perd sa valeur de communication et
la vérité intime des personnages finit par se perdre elle-même.