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SALVY
Entraînement à la dissertation
Sujet :
Mots-clés :
➔ Chacun : tous les personnages de la pièce, de manière individuelle, sont concernés. La mère, Antoine,
Suzanne et Louis. Quid de Catherine ? Pièce rapportée, elle a un rôle un peu à part (témoin de la
souffrance des autres / double de la mère).
➔ Victime : terme désignant une personne ayant connu un dommage physique ou moral, qui en souffre.
Ce terme désigne plus précisément Louis qui, par son retour, essuie les reproches des membres de sa
famille alors qu’il vient leur annoncer sa mort. Il est une double victime : du destin et des siens.
➔ Seul : solitude, intériorité/intimité, singularité. Idée d’enfermement, d’incompréhension. Louis est le
personnage qui incarne la solitude par excellence dans la pièce (nombreux monologues).
➔ Souffrance : Peut être physique et/ou morale. Douleur intense qui est souvent causée par la non maîtrise
de ses sentiments (passions). Induit l’idée d’une tragédie individuelle et familiale. Louis souffre du
manque d’amour qu’il ressent, Suzanne d’un manque d’ambition, Antoine de la rivalité avec son frère,
la mère de voir ses enfants souffrir.
➔ Ne peut se passer des siens pour l’éprouver : entre en opposition avec l’idée de solitude. Suggère la
dépendance à travers la locution « ne peut se passer ». Donc, les autres, les membres de la famille,
sont ceux qui font souffrir mais surtout ceux qui mettent à l’épreuve la souffrance de l’autre. La
polysémie du verbe « éprouver » est intéressante à exploiter :
- Idée de mise à l’épreuve pour faire ressortir qqch (souvent positif)
- Subir une expérience douloureuse
- Un sentiment ou une émotion que l’on ressent
Louis mesure toute sa souffrance lorsqu’il revient parmi les siens : incompris, différent, il est mis à
l’écart par sa famille. Inversement, les autres membres se sentent rejetés par Louis. Sa décision finale
de ne rien dire ou de n’avoir pu rien dire lui confère ce statut de victime. Il a des occasions de dire
mais ne le fait pas : lâcheté, pitié ? refuse-t-il d’être leur bourreau ? Il emportera sa souffrance, son
« grand cri » avec lui et recevra celle des autres membres.
Il met aussi chacun des membres à l’épreuve et face à leur propre souffrance. Souffrance difficile à
exprimer. La mère, nostalgique d’une époque révolue (perte de son mari, l’âge d’or d’une vie de famille
unie) ; Suzanne encore en construction ne parvient pas à donner une direction à sa vie, elle aimerait
être comme son frère mais n’y parvient pas, peut-être qu’elle compense l’absence de son frère aîné en
restant au foyer ; Antoine est rongé par la colère car il a endossé des responsabilités qu’il ne voulait
pas, il se sent incompris, rejeté et menacé par la présence de Louis (le fils prodigue) ; Catherine, quant
à elle, vit dans l’ombre d’Antoine et sous son autorité, cependant sa solitude la rapproche de Louis en
quelque sorte.
Crise personnelle et crise familiale sont interdépendantes. Chaque membre constitue une partie du
noyau. La famille ouvre l’individu sur l’autre et le monde en même temps qu’elle l’enferme et réduit
son champ d’action. En outre, les membres de la famille ne connaissent pas Louis et inversement ce
qui crée une tension, déclenchée par son retour après une longue absence.
➔ Dans quelle mesure : locution interrogative à laquelle on ne peut pas répondre par Oui ou par NON
(c’est une question partielle), invitation à construire une démarche analytique.
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2) Dégager la problématique :
Comment la souffrance de Louis révèle-t-elle celle des autres membres ? Comment la souffrance individuelle
met au jour une souffrance collective ? Comment cette pièce évoque-t-elle l’intime pour mieux traduire
l’universel ? En quoi crise personnelle et crise familiale ont-elles une portée universelle ?
I) La souffrance de Louis
A) Un retour aux sources après des années d’absence
→ La didascalie liminaire précise le lieu « la maison de la mère et de Suzanne » + indication du jour de la
semaine « dimanche », jour propice aux regroupements familiaux et particulièrement dans cette famille-là
(I ;4), souligné par l’emploi de l’adverbe « évidemment ».
→ Dès la première scène, lorsque Louis et Catherine se rencontrent, le spectateur comprend que la présence
de Louis au sein de la famille se fait rare. Dans la scène suivante, l’âge de la fille aînée d’Antoine et
Catherine (8 ans) permet d’avoir une idée du temps d’absence de Louis.
→ Enfin les années d’absence se mesurent également dans la sc.8 qui confronte Louis et sa mère lui expliquant
que son frère et sa sœur sont impatients de lui parler car ils attendent depuis longtemps.
II) Le retour de Louis fait émerger/éclater la souffrance des autres membres de sa famille
A) Suzanne fait le constat douloureux de son incapacité à s’émanciper et de sa résignation
→La sc.3 au début de la pièce donne l’occasion à Suzanne de s’exprimer librement. Ce dialogue se transforme
en soliloque puisqu’elle déverse avec honnêteté, non sans difficulté, ce qu’elle a sur le cœur : « je te fais des
reproches et tu m’écoutes ». Elle n’aborde pas tout de suite sa situation personnelle mais parle de l’absence
de son frère. Ainsi, il semblerait, selon l’organisation du discours de Suzanne, que son absence soit à l’origine
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de l’existence menée par les autres membres. Tout comme Suzanne, ils se sont sentis abandonnés.
→Elle justifie sa présence auprès de sa mère par son jeune âge mais aussi par les services qu’elle lui rend
(voiture). Elle insiste également sur son indépendance en vivant à l’étage et sur les objets qui lui
appartiennent.
→Elle affiche une forme de résignation quant à sa situation « je vis là où j’ai toujours vécu mais je ne suis pas
mal ». La coordination dans cette proposition n’est pas celle que l’on attend (la cause). L’opposition vient
mettre en évidence le malaise de Suzanne et sa résignation. Elle reste peut-être pour compenser l’absence
de Louis.
B) Antoine nourrit une rancœur féroce depuis le départ de Louis et son bref retour le déstabilise
→Il est l’exact contraire de Louis : ouvrier, marié, deux enfants, vit en banlieue. Il a suivi le schéma familial.
Le retour de son frère aîné ravive des douleurs. Dès le début de la pièce, il ne manifeste aucune joie de revoir
son frère. Au contraire, il prend ses distances comme s’il se sentait menacé. Ses répliques dans la première
scène sont courtes et peu avenantes. Dès le départ il se met à distance, comme s’il se sentait inférieur à son
frère.
→Antoine est un être envahi par la colère, tant et si bien que les autres le trouvent « brutal ». C’est pourtant
lui qui a « hérité » du rôle de chef de famille à la mort du père et au départ de Louis. Ceci explique son
caractère autoritaire.
→ Lorsqu’Antoine laisse éclater sa colère (II ;3) il explique qu’il s’est toujours senti coupable du manque
d’amour que ressentait Louis. Peur et culpabilité sont deux sentiments qui tourmentent Antoine et sont à
l’origine de sa souffrance. Sa colère est telle que les mots ne suffisent plus pour l’exprimer ainsi qu’en
témoigne l’expression hautement symbolique « tu me touche : je te tue » mettant fin à toute discussion et
ouvrant la porte à la violence physique. (cf. l’adaptation de Dolan : Cassel interprétant Antoine lève la main
sur Louis).
D) Catherine témoin des souffrances des uns et des autres tait la sienne
→Catherine s’ajoute à cette famille par son mariage avec Antoine. Elle semble d’ailleurs vivre dans son
ombre. Cette idée se remarque par l’explication du choix du prénom de leur enfant, Louis, par exemple.
→En présence de Louis, elle ne parle pas d’elle mais plutôt de ses enfants ou encore d’Antoine dans la scène
6 lorsque Louis l’invite à parler. Toutefois elle refuse de jouer le rôle de médiateur et ne souhaite pas prendre
part aux discussions de famille : « Moi je ne compte pas ». Elle s’exclut.
→Etant à part dans cette famille, membre par alliance et vivant dans l’ombre d’Antoine, elle se rapproche
finalement de Louis en quelque sorte.
III) Un huis clos d’apparence anecdotique qui propose pourtant une réflexion universelle sur les
difficultés de communication entre les hommes.
A) Le thème de la famille : un univers d’union des contraires (« Familles, je vous hais » A. Gide)
→Depuis l’Antiquité le thème de la famille donne lieu à de grandes tragédies (les Atrides, les Labdacides) où
les membres s’opposent et s’entre-déchirent jusqu’à la mort. Dans JLFDM, le retour de Louis va être le
détonateur rompant l’équilibre fragile que les membres avaient établi en son absence. On le remarque
notamment par la jalousie que ressent Antoine lorsque Suzanne manifeste sa joie de voir Louis (sc.1) ou
lorsqu’elle se comporte comme une peste (II ;2) « je ne sais pas ce que tu as après moi, / tu es différente, /Si
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c’est Louis, la présence de Louis », « Toute la journée d’aujourd’hui, tu t’es mise avec lui ».
→La famille rassemble des individus unis par le sang mais aussi par alliance (Catherine) cependant certaines
personnalités peinent à s’accorder. C’est le cas de Louis qui est différent des autres membres. Ce retour
sera l’occasion pour lui d’écouter les reproches des siens sans dire ce qui l’amenait, au fond.
C) Juste la fin du monde met en scène des solitudes qui s’entrechoquent sans ne jamais s’embrasser.
→On voit ainsi que chaque personnage est muré dans sa souffrance. Pourtant Antoine, Suzanne et la Mère
ont trouvé une sorte d’équilibre comme le traduit la phrase d’Antoine « Suzanne et moi nous devrions toujours
être ensemble » (II ;2) ou lorsque la mère aborde le côté protecteur d’Antoine, de cette mission dont il s’est
senti investi après le départ de Louis (I ;8).
→Louis repart encore plus seul après s’être heurté avec les autres. Cette dernière rencontre ne permettra pas
de ressouder cette famille dans laquelle la communication est vraisemblablement impossible. La dernière
image que le héros évoque dans le prologue marque le caractère définitif de cette solitude. Il marche seul vers
la mort, sans les siens pour l’accompagner. La tonalité lyrique de ce passage fait du spectateur l’unique
confident de Louis. Le cri dont il parle est la conséquence de l’impossibilité de communiquer au sein de
cette famille.