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Leçon 3. Les politiques publiques comme cadre d’analyse


de l’action publique

L’un des difficultés auxquelles sont confrontés aussi bien les étudiants en cycle
d’initiation que ceux en cycle de recherche est celle d’une certaine polysémie, doit-on dire
abusive, du concept de ‘’politiques publiques’’. C’est qu’en fait, il est fautivement courant de
désigner deux réalités bien distinctes par ce concept, ne faisant pas alors la différence entre
politiques publiques envisagées comme matière substantielle de l’action publique et politique
publiques comme d’analyse de l’action publique. Dans cette dernière perspective, il est alors
d’usage orthodoxe de parler d’ ‘’Analyse des politiques publiques’’. C’est précisément cette
perspective qui est inscrite au bénéfice de notre attention dans le présent segment de notre
enseignement. De ce point de vue, les politiques publiques faire l’objet soit d’une analyse
séquentielle (Section 1), soit d’une analyse cognitive (section 2).

Section 1. L’analyse séquentielle des politiques publiques


L’approche séquentielle des politiques publiques repose sur l’idée d’une schématisation
cyclique des programmes d’action publique. Héritée des travaux du politiste américain Charles
O. Jones, cette analyse séquentielle décrit le fonctionnement des politiques publiques comme
un enchaînement plus ou moins logique et linéaire des phases encore dites séquences.
Seulement, autant que cette approche présente l’avantage de la clarté et de la simplicité
schématique lié à l’idée même de ‘’cycle’’ (paragraphe 1), autant elle recèle des écueils qui
peuvent biaiser la compréhension d’une politique publique (paragraphe 2).

Paragraphe 1. Le cycle de vie des politiques publiques


Les séquences exposées ici sont celles qu’on situe en amont du cycle de vie des
politiques publiques dans la mesure où elles interviennent dans le processus
d’institutionnalisation d’une politique publique donnée. Pour une commodité de l’exposée,
l’on fait le choix d’envisager les phases en amont du cycle de vie (A) et celles en aval du cycle
de vie (B) des politiques publiques.

A. En amont du cycle de vie des politiques publiques


L’institutionnalisation des politiques publiques, quelles qu’elles soient, s’articule
invariablement autour de l’émergence et l’identification d’un problème d’une part et de la mise
à l’agenda et la décision d’autre part.

- De l’émergence et l’identification problème


Cette phase correspond à ce que Charles O. Jones pose comme une situation qui produit
un besoin collectif, un manque ou une insatisfaction identifiable directement ou par le bais de
manifestations extérieures et pour laquelle une solution est recherchée. Il y a alors un problème
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clairement identifié dès lors qu’on constate un écart entre l’état présent et l’état désiré d’une
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Il convient de relever que ce ne sont pas toutes les situations identifiées comme
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problèmes qui font l’ont l’objet d’une politique publique, car ils ne sont pas systématiquement
inscrits à l’agenda et en tant que tels au bénéfice de l’attention des pouvoirs publics en vue de
trouver des solutions ; la société devant opérer des choix en fonction des priorités et
opportunités cruciales du moment.

- A la mise à l’agenda et la décision


Une fois qu’un problème a été identifié, il peut faire l’objet d’une mise à l’agenda en
fonction de la force d’impact des acteurs sociaux qui ont intérêt à le voir être pris en charge par
les pouvoir publics dans l’optique de sa résolution. Par ‘’agenda’’ il faut entendre l’ensemble
des problèmes publics bénéficient de l’attention des pouvoirs publics et déterminent à un
moment donné leur action.

De manière générale, on distingue l’agenda systémique de l’agenda institutionnel. Si le


premier désigne l’ensemble des problèmes faisant l’objet d’une demande et d’une mobilisation
sociales, le second, quant à lui, renvoie à l’ensemble des problème faisant effectivement l’objet
d’une action publique. Pour les distinguer de manière empirique, qu’il suffise de relever que
depuis quelques années, à travers la mobilisation d’une certaine société civile internationale, le
‘’mariage pour tous’’ est inscrit à l’agenda systémique de plusieurs Etat africains, mais ne fait
aucunement l’objet d’une intervention permissive des gouvernants, échouant ainsi à passer de
l’agenda systémique à l’agenda institutionnel. Plus loin, au sein de l’agenda institutionnel, on
peut encore distinguer entre agenda routinier1 et agenda conjoncturel2 qui conduit à la décision
consacrant l’existence matérielle et formelle d’une politique publique dans un secteur donné.

La phase de la décision réfère à l’apogée du travail politique et administratif. C’est ici


que la solution au problème est trouvée et proposé par les pouvoirs publics. De manière
concrète, il s’agit de la séquence au cours de laquelle des orientations sont définies et des
moyens alloués pour la réalisation, à travers la mise en œuvre, des objectifs fixés.

B. En aval du cycle de vie des politiques publiques


Ici sont envisagées celles des séquences qui sont consacrées à la vie proprement dite
d’une politique publique, après son institutionnalisation. Il s’agit alors de la mise en œuvre,
de son évaluation et de sa terminaison.

- De la mise en œuvre des politiques publiques


La mise en œuvre est la séquence consacrée à la concrétisation des solutions. C’est ici
qu’intervient l’administration qui a une double activité d’organisation et d’interprétation. Les
mesures décidées sont alors appliquées par les agents publics à divers niveaux. Cette phase
caractérise le moment de l’action publique où la décision se confronte à la réalité à travers
l’application des directives gouvernementales.

La mise en œuvre peut par ailleurs être considérée comme un processus au sein duquel
une série d’actions sociales mettant en scène un ensemble d’acteurs plus ou moins organisés,

1
Il renvoie aux problèmes faisant l’objet d’un suivi
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Essassade l’Etat.
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de l’éducation,
(Gabon)du chômage,
de la santé, etc.
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Cet agenda désigne les problèmes qui font l’objet d’une attention ponctuelle des pouvoirs publics comme les
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qui occupent des positions hétérogènes et portent aussi bien des intérêts que des ressources
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différents. Dans cette phase, il faut accorder une attention soutenue aux moyens mobilisés, à
l’interprétation des directives par l’ensemble des acteurs et aux modes d’application ou on
application de ces directives.

- A l’évaluation et la terminaison d’une politique publique


A la mise en œuvre succède l’évaluation des politiques publiques. L’enjeu est alors de
voir dans quelle mesure une politique publique est effective, efficace et efficiente. La première
clé de l’évaluation, à savoir l’effectivité permet de voir si la politique publique instituée a
réellement pris corps dans les faits à travers des décrets, des arrêtés et autres actes
réglementaires. La seconde clé de l’évaluation qu’est l’efficacité permet de rechercher s’il y a
des écarts entre l’objectif fixés et les résultats atteints par une politique publique. La troisième
clé d’évaluation qu’est l’efficience perte de faire le rapport coûts/avantages, donc de voir si la
solution n’est pas plus dommageable que problème qu’elle visait à résoudre.

La terminaison renvoie à la phase de clôture d’un programme dû au fait que le problème


pour lequel il avait été institué est résolu. Seulement, il peut arriver que la phase de terminaison
ne soit en réalité qu’une réorientation d’une politique publique.

Par ailleurs, ainsi que relevé plus hait, le modèle de l’analyse séquentiel, bien que
séduisant sa simplicité recèle des biais qui peuvent constituer des obstacles à une bonne
compréhension des politiques publiques.

Paragraphe 2. Les limites de l’approche séquentielle des politiques publiques


Dans l’analyse séquentielle, tout se passa comme si les différentes séquences des
politiques publiques étaient clairement distinctes les unes des autres et s’enchainaient suivant
une chronologie parfaite d’une part (A) et comme s’il y avait un décideur unique et rationnel
(B).

A. L’imbrication empirique des séquences


La linéarité du modèle de l’analyse séquentielle des politiques publiques donne à croire
que les différentes phases sont bien distinctes les unes des autres et se succèdent les unes aux
autres selon une chronologie immuable. Ce qui est loin d’être la stricte réalité.

En effet, du point de vue empirique, il n’est pas toujours aisé de distinguer de manière
décisive et ferme une phase d’un autre dans le cycle de vie d’une politique publique. C’est
notamment le cas en ce qui concerne la décision et la mise en œuvre.

En réalité, les politiques publiques sont marquées par une imbrication de leurs
différentes phases et constituent à vrai dire un flux continu de décisions multiples. Elles sont
donc plus un flux décisionnel complexe et circulaire d’un enchaînement de séquences. Ceci est
d’autant plus vrai que la mise sur agenda peut intervenir après la mise en œuvre, tout comme
la formulation des solutions peut aussi précéder la mise sur agenda.

Les politiques publiques doivent être pensées comme un flux continu de séquences
enchevêtrées, un processus circulaire qui combine de façon plus ou moins aléatoire les diverses
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B. La rationalité limitée du modèle
Le formalisme sous-jacent à l’analyse séquentielle de Charles O. Jones ne cesse de
suggérer un qu’il y a un décideur unique qui consacre l’existence concrète d’une politique
publique. Ce décideur serait donc unique et clairement identifiable.

La réalité est bien plus complexe. En fait, les acteurs impliqués dans la ‘’prise de
décision’’ sont souvent multiples et provenant d’horizons divers, à la fois publics et privés, très
souvent opposés par leurs intérêts et priorités. Ce qui fait qu’une politique publique, au regard
de cette multiplicité d’acteurs, vise rarement un seul objectif clairement identifié. C’est que les
décideurs visent souvent plusieurs cibles au gré de leurs intérêts et priorités.

Il n’y a donc pas un décideur unique et clairement identifiable des politiques publiques
ainsi que le suggère l’analyse séquentielle, car ce modèle, ainsi que le dit Patrick Hassenteufel,
n’offre guère une vision fidèle des politiques publiques concrètes, mais plutôt une perspective
bien déformée qui néglige la dimension aléatoire, bricolée et incontrôlée de la dynamique des
politiques publiques concrètes.

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I. Mémento des notions essentielles de la leçon 3

 Analyse des politiques publiques :


 Analyse séquentielle des politiques publiques :
 Analyse cognitive des politiques publiques :
 Mise à l’agenda :
 Agenda systémique :
 Agenda institutionnel :
 Décision :
 Evaluation :
 Référentiel :
 Référentiel global :
 Référentiel sectoriel :

II. Bibliographie de la leçon 3

Boussaguet (L.), Jacquot (S.), Ravinet (P.) (dir.), Dictionnaire des politiques publiques,
Paris, Presses de Science po, 2010
Elias (N.), La dynamique de l’Occident, « Presses Pocket », Calmann Levy, 1975
Hassenteufel (P.), Sociologie politique : l’action publique, Paris, Armand Colin, 2011
Meny (Y.), Thoenig (J.C.), Politiques publiques, Paris, Puf, 1989
Muller (P.), Surel (Y.), L’analyse des politiques publiques, Paris, Montchrestien, 1998
Weber (M.), Economie et société, Paris, « Presses pocket, 1995

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