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Séquence 1

L’expansion du monde connu (XVe-XVIIIe siècles)

Séance 4
La consolidation d’une civilisation Atlantique au XVIIIe
siècle

LE GOÛT DU XVIIIe SIÈCLE ET LE LUXE DES PRODUITS COLONIAUX

Le déjeuner, François Boucher (1703-1770), 81 cm x 65 cm, peinture à l’huile sur toile, RMN-Grand
Palais (musée du Louvre) / Franck Raux

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OBJECTIFS

Notions et repères Capacités et méthodes


• XVIIe-XVIIIe siècles : développement de la •E
 xtraire des informations d’un ensemble
façade atlantique de la France documentaire
•R
 approcher deux œuvres d’art pour
caractériser un contexte historique
•E
 xtraire des informations d’un ensemble
de documents pour caractériser un groupe
social
•E
 xtraire des informations d’un ensemble de
documents pour caractériser l’expansion des
idées des Lumières dans les colonies

Sommaire
Séance 4
La consolidation d’une civilisation Atlantique au XVIIIe siècle�������������������������������1
1. La circulation des savoirs������������������������������������������������������������������������������������������������������3

Extraire des informations d’un ensemble documentaire���������������������������������������������������������� 4


2. Le négociant, une nouvelle catégorie sociale transnationale������������������������������������������������7

2.1. R
 approcher deux œuvres d’art pour caractériser un contexte historique�������������������������� 7

2.2. E
 xtraire des informations d’un ensemble de documents pour caractériser
un groupe social����������������������������������������������������������������������������������������������������������������� 9
Ouverture vers la prochaine séquence d’histoire : L’Amérique et l’Europe en révolution
(des années 1760 à 1804)��������������������������������������������������������������������������������������������������������� 11

 xtraire des informations d’un ensemble de documents pour caractériser l’expansion


E
des Lumières dans les colonies���������������������������������������������������������������������������������������������� 11

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De barrière infranchissable, l’océan Atlantique s’est transformé en pont à partir de la fin du XVe siècle grâce
à la multiplication des flux internationaux de marchandises, d’hommes, de cultures qui rapprochent ses deux
rives européenne et américaine. Au XVIIIe siècle, cet océan ne symbolise plus, aux yeux des contemporains, une
mer d’aventures, mal connue et mal maîtrisée. Bien au contraire, il est devenu un océan familier que plusieurs
générations de navigateurs ont contribué à presque banaliser. Le temps des galions espagnols chargés de
fabuleux métaux sillonnant l’Atlantique est révolu depuis longtemps déjà. Il a laissé place à un commerce de
marchandises destiné à satisfaire le quotidien des Européens installés aux Amériques, ou à approvisionner les
riches cités du vieux continent en productions coloniales.

En quoi peut-on parler de l’affirmation d’une civilisation atlantique au cours du


XVIIIe siècle ?

1. La circulation des savoirs

Au cours de la première moitié du XVIIIe siècle, faire le « voyage d’Amérique » n’est plus réservé aux
soldats ou aux administrateurs des métropoles coloniales, il est aussi le fait de « simples voyageurs »,
certes aisés, mais qui peuvent s’embarquer pour visiter ces terres et en rapporter des récits lus par
un large public. Ainsi, l’Atlantique est-il devenu autre chose qu’un lieu où les guerres et la quête des
métaux précieux sont les seules activités pratiquées par les Européens qui s’y aventurent.

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Extraire des informations d’un ensemble documentaire
DOCUMENT 1 : LOUIS ARMAND BARON DE LA HONTAN (1666-1716), ET LES PEUPLES DU QUÉBEC

Description curieuse des raquettes et des


chasses des Orignaux, avec description de ces
animaux, extrait de la lettre X

Arrivé au Canada à l’âge de 17 ans pour tenter d’y faire fortune, il y reste 10 ans. Après son retour
en France, il publie en 1703 les Nouveaux Voyages dans l’Amérique septentrionale, suite de lettres
échangées avec un parent lors de son voyage au Canada.

« Au port de Québec, le 8 novembre 1683.


Monsieur,
Je suis surpris que le voyage du nouveau monde puisse tant effrayer ceux qui sont obligés de le faire,
car je vous jure de bonne foi qu’il n’est rien de moins que ce qu’on s’imagine. Il est vrai que la course
est un peu longue, mais l’espérance de voir un nouveau pays ne permet pas qu’on s’ennuie en chemin.
[…] Je n’ai trouvé rien de désagréable en cette traversée si ce n’est quelques jours de tempête […] les
vieux navigateurs n’en furent point émus. […] »

Représentation d’un castor, extrait de la


lettre XVI

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DOCUMENT 1 (SUITE)

« À Québec, le 15 mai 1684


Monsieur,
[…] Québec est partagé en haute et basse ville. Les marchands demeurent à la basse pour la
commodité du port, le long duquel ils ont fait bâtir de très belles maisons à trois étages d’une pierre
aussi dure que le marbre. La haute ville n’est pas moins belle ni moins peuplée. Le château bâti sur
le terrain le plus élevé, domine la ville. Les Gouverneurs Généraux qui font leur résidence ordinaire
dans ce fort y sont commodément logés, jouissant en même temps de la vue la plus belle et la plus
étendue qui soit au monde. La ville manque de deux choses essentielles, qui sont un quai et des
fortifications, il serait facile d’y faire l’un et l’autre, car les pierres se trouvent sur le lieu même. Elle est
environnée de plusieurs sources d’eau vive la meilleure du monde […] Je m’embarquerai dans sept ou
huit jours pour aller à Montréal, cependant je m’en vais faire un tour jusqu’au village de Scilleri habité
par des Abenakis et des Hurons, et comme il n’y a que trois ou quatre lieues d’ici, je serai de retour la
semaine prochaine. Je ne puis vous informer des mœurs de ces peuples, il faut du temps pour bien
les connaître. J’ai été cet hiver à la chasse avec trente ou quarante jeunes Algonkins bienfaits et très
agiles, expressément pour apprendre leur langue. […] j’en ai déjà appris quelques mots avec assez de
facilité, et comme ils se font un vrai plaisir qu’on apprenne leur langue, ils se donnent toute sorte de
peine pour me l’enseigner. »

« À Boucherville, le 2 octobre 1685


Monsieur,
[…] Vous voudriez savoir, dites-vous, en quoi consiste le commerce de la ville de Montréal, le voici.
Presque tous les marchands qui sont établis en cette ville ne travaillent que pour ceux de Québec, dont
ils sont commissionnaires. Les barques qui transportent là les marchandises sèches, les vins et les
eaux-de-vie sont en très petit nombre, mais elles font plusieurs voyages durant l’année de l’une de ces
villes à l’autre. Les habitants [des environs] viennent faire leurs emplettes à la ville deux fois l’an […].
Les sauvages des environs, établis ou vagabonds, y portent des peaux de castors, d’élan, de caribou, de
renards et de martres, en échange de fusils, de poudre, de plomb et d’autres nécessités de la vie. Tout
le monde y trafique avec liberté, et c’est la meilleure profession du monde pour s’enrichir en très peu
de temps. Tous les marchands s’entendent à merveille pour vendre leurs effets au même prix. […] »

DOCUMENT 2: UNE MISE À DISTANCE CRITIQUE DE LA CIVILISATION EUROPÉENNE

La Hontan a bien connu le chef Huron Kondiaronk qui a inspiré le chef Adario dans les Dialogues de M.
le Baron de LaHontan et d’un Sauvage dans l’Amérique, publiés en 1703.
Le Huron Adario répond au sujet des lois
« Un homme n’est pas un homme à cause qu’il est planté droit sur ses deux pieds, qu’il sait lire et
écrire, et qu’il a mille autres industries. J’appelle un homme celui qui a un penchant naturel à faire le
bien et qui ne songe jamais à faire du mal. Tu vois bien que nous n’avons point de juges ; pourquoi ?
parce que nous n’avons point de querelles et de procès. Mais pourquoi n’avons-nous pas de procès ?
C’est parce que nous ne voulons point recevoir ni connaître l’argent. Pourquoi est-ce que nous ne
voulons pas admettre cet argent ? C’est parce que nous ne voulons pas de lois, et que depuis que le
monde est monde nos pères ont vécu sans cela. Au reste, il est faux, comme je l’ai déjà dit, que le mot
des lois signifie pour vous les choses justes et raisonnables, puisque les riches s’en moquent et qu’il
n’y a que les malheureux qui les suivent. »
Source : Dialogues publiés en 1703, texte extrait de l’édition Desjonquières, Paris, 1993, pp 62-63.

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DOCUMENT 3 : LA POSTÉRITÉ DE LA HONTAN AU COURS DU XVIIIE SIÈCLE

L’édition de 1703 Des Dialogues a été lue et reprise pendant une bonne partie du XVIIIe siècle et a
directement influencé les penseurs et les philosophes les plus divers. Parmi ceux-ci on peut relever
le Diderot des Suppléments aux voyages de Bougainville, Montesquieu, Rousseau. […] C’est surtout
[le recours] au thème du voyage et à la technique du dialogue philosophique que l’importance de notre
auteur aventurier se fait fortement sentir. Cette technique du dialogue philosophique qui juxtapose
de longues répliques faites […] par l’homme de la nature [face au] pseudo-défenseur de la civilisation
européenne aura une nombreuse postérité. Il n’est que de songer au Neveu de Rameau de Diderot.
[…] Alors se déploie le relativisme si cher au siècle des Lumières. […] Les dialogues sont rattachés à
cette longue tradition des voyages qui servent à remettre en question la civilisation occidentale. […]
La Hontan et le personnage de l’Indien Adario diffusent en 1703 des idées qui se retrouveront dans les
Lettres persanes (1721) ou les Lettres philosophiques.
Source : Imbert, P. (1976). Comment peut-on être lecteur de Lahontan et de ses dialogues ?
Lettres québécoises, 1 (1), 22 – 24.

Document 1

Question 1

Quels intérêts représentent les récits de voyageurs tels que La Hontan pour les lecteurs européens ?

Question 2

Quelle remarque pouvez-vous faire quant aux conditions dans lesquelles s’est effectué le voyage de La Hontan ?

Document 2

Question 3

Pourquoi le Huron estime-t-il ne pas avoir besoin de lois ? En quoi ce passage est-il une critique de la société
française ?

Document 3

Question 4

Quelle influence a eu La Hontan sur les idées en Europe ?

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DES VOYAGES QUI FONT ÉMERGER UNE RÉFLEXION PHILOSOPHIQUE

Certains voyageurs publient à leur retour le récit de leur périple dans le Nouveau Monde. Leurs livres
contiennent souvent des illustrations, des cartes, des petits dictionnaires de la langue des peuples
rencontrés. Ils sont largement lus, piratés et traduits en Europe. Ils influencent l’opinion de penseurs
du XVIIIe siècle, appelé siècle des Lumières, tels que Voltaire, Montesquieu, Diderot. Ces récits sont
l’occasion de poser un regard critique sur les sociétés européennes et contribuent à habituer l’opinion à
l’idée que l’Océan ne sépare pas deux univers radicalement étrangers l’un à l’autre.
Le Sauvage américain est montré comme un moyen pour le « civilisé », de prendre conscience de
lui-même. S’installe un procédé d’écriture qui va se développer tout au long du siècle et influencer les
philosophes des Lumières : faire parler le Sauvage et permettre au civilisé de trouver un sens dans
l’existence. La civilisation est montrée comme porteuse de violence et d’aliénation. Là où avant le
Nouveau Monde était vu comme une zone primitive à civiliser et à évangéliser, c’est désormais l’Europe
qui est renvoyée face à elle-même et à des questionnements sur son humanité.

2. Le négociant, une nouvelle catégorie sociale transnationale

2.1. R
 approcher deux œuvres d’art pour caractériser un contexte
historique
DOCUMENT 4 : DEUXIÈME VUE DU PORT DE BORDEAUX, PRISE DU CHÂTEAU TROMPETTE

Vernet Joseph (1714-1789), 1759, huile sur toile, © Photo RMN-Grand Palais

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DOCUMENT 5 : PART DES IMPORTATIONS COLONIALES DE LA FRANCE

Source : Meyer, Jean, « Les paradoxes du succès havrais », dans Corvisier, André (dir.),
Histoire du Havre et de l’estuaire de la Seine, Toulouse, Privat, 1987, p. 82-85

DOCUMENT 5 : LA PRÉSENCE DU NOUVEAU MONDE DANS LE QUOTIDIEN

Source : Portrait de marguerite Deurbroucq, épouse d’un grand marchand et armateur nantais,
Pierre-Bernard Morlot, 1753. © Château des ducs de Bretagne - Musée d’histoire de Nantes

Question

En quoi ces deux tableaux illustrent-ils l’évolution de la place des ports français de la façade Atlantique dans les
importations coloniales au cours du XVIIIe siècle ? Appuyez-vous sur les éléments dénotés (éléments présents
dans l’image) pour justifier votre réponse dans un court paragraphe de 4 à 5 lignes.

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UNE FAÇADE MARITIME ATLANTIQUE PROSPÈRE

Tout au long du XVIIe siècle, la prospérité des ports français repose largement sur les relations avec les
colonies situées aux Antilles. Dans ce contexte, les ports de la façade Atlantique, Bordeaux au premier
chef, monopolisent la quasi-totalité des importations coloniales. Ils représentent des marchés de
consommation majeurs. Ils connaissent un développement démographique important. Bordeaux passe
par exemple de 45 000 habitants en 1700 à environ 110 000 en 1790. Nantes pour sa part passe de
45 000 à 80 000 habitants au cours de la même période.
Les relations transatlantiques sont de trois types :
• l’exploitation de la pêche à la morue le long des côtes d’Amérique du Nord
• le commerce en droiture avec les territoires colonisés dans l’aire Caraïbe (voir séance 3)
• l’envoi de marchandises dans les ports espagnols de Séville et Cadix

2.2. E
 xtraire des informations d’un ensemble de documents pour
caractériser un groupe social
DOCUMENT 6 : LA NOUVELLE IDENTITÉ DU COMMERÇANT AU LOIN

Dès la fin du XVIIe siècle, le commerçant au loin, surtout atlantique, se forge une nouvelle identité :
il quitte la « marchandise » devenue vulgaire, pour entrer dans ce que l’on appelle désormais le
« négoce ». Un siècle plus tard, les signes […] de l’attraction exercée par le modèle de la noblesse, sont
évidents. […] L’armateur de la fin du XVIIIe siècle n’est ni un bourgeois gentilhomme, ni un bourgeois
conquérant. Il ne constitue ni une force révolutionnaire luttant contre la féodalité, ni une classe sociale
déclinante. Utilisant au mieux de ses intérêts immédiats les idées de son temps, il sait se vêtir de
plusieurs costumes à la fois tout en gardant son âme. Il rêve d’une société de « fonction » dans laquelle
les individus seraient classés selon leur « utilité » [et] dans laquelle il serait important. En attendant
ce moment, il n’a pas d’autre choix que de mimer son contraire, de ressembler à la noblesse. Les deux
visages du négoce, le matérialiste et l’ostentatoire, ne s’opposent donc pas. Ils définissent le notable
(celui qui a une autorité sur les affaires publiques), ou celui qui aspire à la devenir, et augurent déjà des
grandes lignes de force de la société française post-révolutionnaire.

Source : Pétré Grenouilleau Olivier. Les négoces atlantiques français. Anatomie d’un capitalisme relationnel.
In : Dix-huitième Siècle, n° 33, 2001. L’Atlantique, sous la direction de Marcel Dorigny. pp. 33-48

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DOCUMENT 7 : BONNAFFÉ FRANÇOIS (1723-1809), L’UN DES PLUS RICHES ARMATEURS DE BORDEAUX

En 1740, arrivait à Bordeaux un jeune homme de 17 ans, François Bonnaffé, […] accompagné de son
père qui désirait le présenter chez un des premiers courtiers de commerce de la ville pour y faire
son apprentissage. […] admis chez le courtier bordelais aux conditions ordinaires, 300 livres par an
pour l’apprentissage, la nourriture et le logement, François se mit résolument au travail. Il ne devait
compter que sur lui-même pour faire son avenir, mais il avait l’esprit droit, une probité scrupuleuse,
une activité à toute épreuve et le génie des affaires ; il était sûr de réussir. L’apprentissage terminé, il
débuta modestement, tâtant le terrain, cherchant à se créer une clientèle, complétant son éducation
par l’étude comparée des marchandises de qualité et d’origines diverses, et se faisant peu à peu
la réputation d’un excellent connaisseur. Bientôt le cercle de ses affaires s’agrandit. « Il s’occupa
de pacotille, d’assurances, d’armements à Terre-Neuve, à la Guadeloupe, à la Martinique, à Saint-
Domingue. En même temps, il faisait venir son plus jeune frère, Marc, pour étudier le commerce
sous sa direction et le seconder dans ses affaires. 14 ans après son arrivée à Bordeaux en 1754, il
avait alors 31 ans, ses bénéfices dépassaient déjà 400 000 livres ». […] Il organise un vaste système
de relations avec les principaux marchés de l’Europe et de l’Amérique, […] achète des navires, en fait
construire pour son compte, fonde un comptoir à Saint-Domingue, […] pour recevoir ses navires, en
vendre la cargaison. […] Il s’est marié en 1756 avec Anne Boyer, la fille de Boyer de Poyen, créole de
la Guadeloupe […] où il introduisit la culture de la canne à sucre. […] la profession d’armateur était la
première de toutes et la plus considérée. François Bonnaffé l’appréciait si bien qu’il ne voulut jamais
changer d’état en achetant une charge qui lui aurait fait acquérir des privilèges. […] À Bordeaux, sur
800 négociants, armateurs ou banquiers, on en comptait une soixantaine dont la fortune dépassait
plusieurs millions. […] Parmi les négociants français de la ville, notre armateur était l’un des plus
riches, sinon le plus riche ; sa fortune s’élevait à près de 15 millions ; il possédait plusieurs navires,
deux domaines et 23 maisons en ville. […]
Source : Edmond et Pierre Bonnaffé, Un armateur Bordelais au XVIIIe siècle, Féret et fils éditeurs, Bordeaux, 1909.

Question 1

Caractérisez l’évolution sociale d’un armateur au cours du XVIIIe siècle.

Question 2

Quelles sont les qualités dont fait preuve François Bonnaffé et qui le conduisent à la réussite ?

Question 3

Pourquoi peut-on supposer que François Bonnaffé a aussi construit sa richesse sur le commerce triangulaire ?

LE NÉGOCIANT, TRAIT D’UNION ENTRE COLONIES ET PORTS EUROPÉENS

Au début du XVIIIe siècle, l’économie maritime entre de plain-pied dans l’univers colonial et dans
une croissance spectaculaire. Il est principalement animé par les négociants. Le négoce porte non
seulement sur des produits mais aussi sur des hommes (voir séance 3).
C’est un milieu constitué par des clans familiaux. Être négociant, c’est le signe d’une certaine aisance
financière mais aussi d’une reconnaissance sociale. Ils font du commerce en gros et forment une classe
sociale très influente dans les sociétés portuaires. Ni marchand, ni bourgeois, ils se caractérisent par
l’esprit d’entreprise, des facultés individuelles, la maîtrise d’un réseau, et de puissants capitaux. Ils
occupent des rôles importants dans la gestion des villes. Ils sont marchands, mais aussi armateurs,
propriétaires de navires et parfois même constructeurs de navires. Bien souvent, l’affaire familiale est
poursuivie de génération en génération.

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Ouverture vers la prochaine séquence d’histoire : L’Amérique
et l’Europe en révolution (des années 1760 à 1804)

 xtraire des informations d’un ensemble de documents pour


E
caractériser l’expansion des Lumières dans les colonies

DOCUMENT 8 : UNE BIBLIOTHÈQUE DE COLON EN GUADELOUPE À LA FIN DU XVIIIe SIÈCLE

Dans un milieu colon peu réputé pour son goût de la chose culturelle, l’inventaire de succession
d’Antoine Mercier, propriétaire de l’habitation La Ramée au quartier du Grand Cul-De-Sac dans la
paroisse de Sainte-Rose, en Guadeloupe, frappe en cette fin du XVIIIe siècle par l’exceptionnelle
bibliothèque que s’était constituée le défunt. Exceptionnelle d’abord par sa localisation dans une
habitation sucrerie […]. Exceptionnelle, plus encore par le nombre de volumes […] On n’en dénombre
pas moins de 480, sans compter les brochures, journaux, périodiques. […] Homme de son temps,
Mercier l’est plus encore par le nombre d’ouvrages qui se rattachent au mouvement des Lumières. […]
Montesquieu, que Mercier classait parmi ses ouvrages de droit, […] Voltaire dont les quarante-deux
volumes écrasent Gil Blas et Robinson Crusoë, […] un Racine en trois volumes, […] un certain goût pour
le XVIe siècle avec un Rabelais. […] Sorte d’exil intérieur choisi par ce notable richement possessionné.
[…] Attitude contradictoire - l’esprit à Paris, mais les réalités, pour le meilleur et pour le pire, sur place.

Source : Créoles de la Caraïbe [actes du colloque universitaire en hommage à Guy Hazaël-Massieux,


Pointe-à-Pitre, le 27 mars 1995] / sous la dir. de Alain Yacou ; préface de Bertène Juminer. - Paris : Karthala ;
Pointe-à-Pitre : CERC, Université des Antilles et de la Guyane, 1996

DOCUMENT 9 : UNE SOCIÉTÉ DE PENSÉE À SAINT-DOMINGUE, LE CERCLE DES PHILADELPHES.

Le 15 août 1784 une dizaine d’hommes se sont réunis au Cap Français dans le nord de la grande
colonie française de Saint-Domingue pour constituer une petite société scientifique et médicale, le
Cercle des Philadelphes. Fondé sur le modèle d’une académie de province du XVIIIe siècle, le Cercle des
Philadelphes fut une académie coloniale des sciences installée sous les tropiques. Première académie
coloniale française – l’Angleterre et les Pays-Bas possédaient déjà les leurs – le Cercle fut très actif
et connut un grand succès pendant la période assez brève de son existence institutionnelle, qui dura
neuf ans. […] Doté de 3 000 livres par le gouvernement, il déploya une grande activité jusqu’en 1789.
Il a notamment publié un corpus non négligeable de travaux scientifiques et médicaux par exemple,
des ouvrages sur le tétanos (1786), sur les maladies épizootiques (1788), sur la cochenille (de Thierry
de Menonville, 1787), sur les eaux minérales (ses Mémoires de 1788) et sur les moyens de conserver
le papier dans les pays chauds. […] Le roi de France signa, à Versailles le dimanche 17 mai 1789, les
Lettres Patentes qui reconnaissaient formellement la naissance de La Société Royale des Sciences
et des Arts du Cap Français ; cette création fut la toute dernière des académies royales de l’Ancien
Régime.
Source : James E. McClellan III, « L’historiographie d’une académie coloniale : le Cercle des Philadelphes (1784-1793) »,
Annales historiques de la Révolution française, 320 | 2000, 77-88

Documents 8 et 9

Question

Pourquoi les deux exemples évoqués sont-ils paradoxaux ?

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LA FIGURE PARTICULIÈRE DU PLANTEUR DES LUMIÈRES

Le XVIIIe siècle est resté dans les mémoires comme le siècle des Lumières incarné par des penseurs
tels que Kant, Voltaire, Diderot… Ils ont posé les bases d’une nouvelle approche de la pensée qui
consacre la notion d’individu doué de raison et de libre arbitre. Cet ensemble de valeurs partagées
qui s’incarne dans la République des Lettres, espace virtuel qui dépasse les frontières en Europe
pour réunir les lettrés de tous pays à travers des échanges épistolaires ou des rencontres, touche
également les colonies. Les idéaux de progrès scientifique et moral atteignent une part importante des
élites coloniales. Ces « planteurs des Lumières » se trouvent, avant la Révolution française, face à une
situation contradictoire, d’un côté pris dans les rouages économiques de la société esclavagiste, et de
l’autre au contact de l’idéologie progressiste des Lumières.
Ainsi, les savoirs coloniaux s’inscrivent dans le vaste mouvement qui fait de Paris à l’époque moderne
une « capitale philosophique » de premier plan qui s’affirme comme un modèle culturel à l’échelle de la
planète et que la Révolution Française va encore affermir.

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