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INSTITUTIONS

INTERNATIONALES
par

Claude^Albert COLLIARD
Professeur à la Faculté de Droit
et des Sciences économiques de Paris
Doyen Honoraire de la Faculté de Droit
et des Sciences économiques
de Grenoble

QUATRIÈME ÉDITION

DALLOZ
NUNC COGNOSCO EX PARTE

TRENT UNIVERSITY
LIBRARY
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ÉTUDES
POLITIQUES, ÉCONOMIQUES ET SOCIALES
in-8« (13,5 X 20)

EN VENTE :
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du XVni' siècle à la deuxième guerre mondiale), pai
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2. ORGANISATION ÉCONOMIQUE DE L’ÉTAT, par Bernarc
Chenot.
3. DÉMOGRAPHIE GÉNÉRALE, par L. Chevalier.
4. HISTOIRE DIPLOMATIQUE de 1648 à 1919, par Jacque;
Droz.
5. THÉORIE ÉCONOMIQUE ET IMPULSION KEYNÉ
SIENNE, par Alain Barrère.
6. HISTOIRE DES INSTITUTIONS POLITIQUES DE U
FRANCE MODERNE (1789-1945), par J.-J. Chevallier.
7. HISTOIRE DIPLOMATIQUE de 1919 à nos jours, pa
J.-B. Duroselle.
8 et 12. LES GRANDES PUISSANCES — ÉTUDE ÉCONO
MIQUE, par Jean Chardonnet (2 tomes).
9. ÉCONOMIE ACaHCOLE DANS LE MONDE, par Ren
Dumont (épuisé).
10. LES OPÉRATIONS DE BANQUE, par Jacques Ferronnièri
11. PEUPLES ET NATIONS D’OUTRE-MER, par Hubei
Deschamps.
13 et 15. L’ÉCONOMIE FRANÇAISE, par Jean Chardonne
(2 tomes),
14. POLITIQUE FINANCIÈRE, par Alain Barrère.
16. LE HNANCEMENT DES ENTREPRISES, par Ph. Simon

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INSTITUTIONS
INTERNATIONALES

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DE LA SANTÉ PUBLIQUE, DE LA FAMILLE
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INSTITUTIONS
INTERNATIONALES
par

Claude-Albert COLLIARD
Professeur à la Faculté de Droit
et des Sciences Économiques de Paris.
Doyen honoraire de la Faculté de Droit
et des Sciences Économiques de Grenoble.

QUATRIÈME ÉDITION

revue et mise à jour

DALLOZ
1967
Tx I ^54 . CL O & 13 6 7

• v1
PRÉFACE
DE LA TROISIÈME ÉDITION

L’avant-propos de la précédente édition de ce Précis,


parue il y a deux ans, précisait l’esprit selon lequel il avait
été écrit, avec le souci de présenter la dimension économique
et la dimension technique si essentielles dans l’univers
humain du XX^ siècle.
L’édition actuelle demeure évidemment fidèle à cette atti¬
tude.
Un Précis n’est pas un ouvrage principalement centré
sur des questions de doctrine mais pourtant deux idées
dominent ce manuel : celles de la solidarité et de la finalité
sociales.
Dans un monde international défini comme l’ensemble de
l’humanité il existe deux types différents de solidarité sociale
et les finalités au service desquelles s’établissent les insti¬
tutions sont, elles-mêmes, de deux types.
Il est une première solidarité, intrasociale, qui se mani¬
feste avec force sur le plan politique et caractérise l’Etat
et les institutions internes, dans le cadre territorial corres¬
pondant. Les institutions internationales traditionnelles
demeurent extérieures à une telle solidarité, elles se bornent
à assurer la pluralité des finalités étatiques, à créer des
conditions de non affrontement et de rapports réciproques.
Mais il y a une autre solidarité, intersociale, qui se
manifeste entre les individus composant l’humanité tout
entière et les divers groupements humains et même les Etats.
Les institutions correspondant à cette solidarité élargie ne
sont pas au service de finalités étatiques même si, sur le
plan de leur création ou de leur technique de fonctionnement
VIII PRÉFACE

les Etats jouent un rôle important et parfois presque exclu¬


sif. Il s’agit d’une finalité générale, valable pour des groupes
dépassant les Etats et qui tend à réaliser l’agencement écono¬
mique et social de l’ensemble mondial.
Ainsi apparaissent des solidarités d’intensité et de
domaine différents et des finalités distinctes, mais il existe
toujours des institutions et les techniques utilisées sont
souvent les mêmes car les techniques sont par essence
neutres, s’analysant en de simples procédés.
Cette présentation est inhabituelle mais elle n’est point
particulièrement révolutionnaire, elle dérive d’une analyse
qui fut autrefois dégagée par Duguit, principalement sur
le plan interne et l’auteur pense qu’elle est réaliste.

Le présent ouvrage repose, en effet, sur la réalité inter¬


nationale telle qu’eUe existe aujourd’hui et se place sous le
signe du réalisme. Il s’efforce de présenter et de décrire un
monde réel.
Le monde international réel est un monde de la vie paci¬
fique de tous les jours, très différent de la conception en
laquelle se complaisent certains « politiques » qui l’imaginent
comme une jungle en laquelle s’affrontent éternellement, avec
des fortunes diverses et renouvelées, de grands animaux
politiques de combat, les Etats.
Le monde international réel est également très différent
de la conception artificielle qu’en ont les juristes purs qui
construisent un système juridique parfaitement homogène
oü dominerait la règle abstraite de droit, dépouillée de tout
lien avec la vie réelle.
Le monde international actuel est enfin différent de ces
rêves qui sont illusions et non anticipations. La vision
d’un monde international dans lequel les constructions ins¬
titutionnelles seraient du type de celles des démocraties
internes, avec la règle mécanique de la majorité, relève de
l’utopie ou plus exactement de l’erreur et on ne saurait, en
conscience, la proposer à de jeunes esprits. La crise finan¬
cière de l’O. N. U. dépouillée de ses aspects politiques
contingents fait apparaître qu’il est impossible d’établir
valablement une analogie exacte entre les institutions démo¬
cratiques internes et les institutions internationales générales
pouvant exister dans un milieu social peu homogène.
^ La conception de l’ouvrage, la présentation adoptée,
s’écartent ainsi, tout à la fois des nostalgies, des illusions.
PRÉFACE IX

des rêves. Elle veut être celle des positivistes réalistes sen¬
sibles aux données véritables.
Dans la seconde moitié d’un XX^ siecle domine dans tous
les domaines — ce que n'ont pas vu bien des internationa¬
listes, notamment en France — par l importance ^ des
problèmes économiques et le développement des techniques
les plus évoluées, cette position est beaucoup plus naturelle
et normale qu’elle ne l’était lorsque l’affirmait, a la fin du
XIX^ siècle le grand Louis Renault en écrivant : « les^
administrateurs des postes et télégraphes qui ont créé
l’Union postale et l’Union télégraphique, et dont les noms
sont ignorés du public, ont fait plus, pour la civilisation et
l’entente entre les peuples que bien des diplomates célèbres ».
C’est cette appartenance de chacun, en tout pays, à un
monde international, que ce livre s’efforce de rendre sen¬
sible.
*
* *

Les préoccupations ci-dessus exposées ont commandé le^


plan et la présentation générale de ce Précis qui est destiné
aux étudiants au début de leurs études juridiques, écono¬
miques ou de science politique et à tous ceux qui s intéressent
aux problèmes internationaux. _
Il demeure volontairement simple et il fait, dans un désir
d’objectivité, large place à des descriptions et à des présen¬
tations d’ordre historique car il est bon de travailler sur des
éléments précis et exacts qui appartiennent au monde réel
et non à celui des abstractions ou des chimères.
Les institutions internationales sont devenues si nom¬
breuses que la documentation est maintenant difficile par la
richesse et la variété tant des textes et des éléments de base
que des études. Ce Précis veut être un panorama aussi
vaste et fidèle que possible du monde international actuel
plein de mouvement et de vie. _
Bien qu’il s’agisse d’un ouvrage élémentaire l appareil
scientifique a été renforcé, ou plus exactement est^ devenu
plus apparent. La bibliographie a été, ainsi, considérable¬
ment augmentée, elle a été répartie selon les thèmes et les
chapitres au lieu de se trouver rassemblée à la fin du volume,
sofi 'ynuiticfyieftt seyu uiftsi plus aisé et le telais yets les
sources de documentation ou les études^ spécialisées est
ainsi mieux assuré. C’est à la meme préoccupation la
mise à la disposition du lecteur d’un instrument commode
_ que répond une table alphabétique comportant de plus
X PRÉFACE

nombreuses références aux divers développements contenus


dans l’ouvrage.
Je tiens à remercier Mme Aleth Manin, collaborateur
technique de l’Enseignement supérieur, de l’aide si précieuse
(m’elle m’a apportée four la mise à jour de l’ouvrage, l’éta¬
blissement de la bibliographie, la confection des tables et de
l’ingéniosité avec laquelle elle a su préparer certains hors-
textes que je souhaitais présenter.

C. A. COLLIARD.
15 septembre 1965.
AVANT-PROPOS
(2® édition 1963)

Ce livre est tout d’abord destiné aux étudiants des


Facilités de Droit et des Sciences économiques, il est, à
cet effet, strictement conforme au programme officiel
défini par l’arrêté du 3 août 1962.
Mais il tend aussi à présenter pour im plus large public,
parmi lequel les candidats à divers concours, les aspects
les plus marquants des problèmes internationaux actuels.
L’analyse serait en effet anachronique et insuffisante
qui se bornerait à considérer le monde comme un champ
clos poKtique dans lequel s’affronteraient les seules entités
que constituent les Etats car dans cet univers internatio¬
nal existent, multiples et diverses, exprimant les soucis,
les misères, les esp>oirs et les solidarités des hommes de
tous les continents et de toutes les Nations, les Organi¬
sations internationales dont le nombre s’accroît sans
cesse.
On ne saurait définir ce monde d’aujourd’hui, plus
profondément et intensément international que par le
passé, à partir des seules données pohtiques car ü est
nettement dominé par l’évolution des techniques et les
problèmes de l’économie.
Les institutions internationales sont aujourd’hui non
seulement plus denses qu’autrefois, elles sont aussi diffé¬
rentes parce que la civilisation actuelle est, à bien des
égards, nouvelle. On ne saurait se contenter de notions
politiques et juridiques alors que se posent tant de pro¬
blèmes économiques fondamentaux, comme celui du
développement et on ne peut imaginer que demement
valables les schémas classiques du xix® siècle ou des
premières années du xx® alors que la civilisation contem¬
poraine est celle de l’avion à réaction, de l’énergie ato¬
mique et déjà celle des vols cosmiques. La dimension
pohtique traditionnelle doit être non seulement modifiée
et territorialement élargie, eUe doit être complétée par la
dimension économique et la dimension technique.
Le but poursuivi a été de montrer comment, à partir
de ces données dont l’une est transformée et dont les
autres sont nouvelles, s’édifient, par l’effort des hommes
pacifiques, les institutions internationales modernes.

C. A. COLLIARD.
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TABLE DES ABRÉVIATIONS
DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES

A. E. L. E. Association européenne de libre


échange.
A. I. D. Association internationale de déve¬
loppement.
A. I. E. A. Agence internationale pour l’éner¬
gie atomique.
A. L. A. L. C. Association latino-américaine de
libre commerce.
A. N. Z. U. S. Traité d’assistance mutuelle Aus¬
tralie - Nouvelle-Zélande - Etats-
Unis.
B. E. I. Banque européenne d’investisse¬
ment.
B. I. D. Banque interaméricaine de déve¬
loppement.
B. I. R. D. Banque internationale pour la
Reconstruction et le Développe¬
ment.
B. I. T. Bureau international du Travail.
B. R. I. Banque des règlements internatio¬
naux.
C. A. E. M. Conseil d’assistance économique
mutuelle.
C. E. A. Commission économique pour
l’Afrique.
C. E. A. E. O. Commission économique pour l’Asie
et l’Extrême-Orient.
XIV TABLE DES ABRÉVIATIONS

C. E. C. A. Commtinauté européenne du Char¬


bon et de l’Acier.
C. E. C. L. E. S. Organisation européenne de cons¬
truction et lancement d’engins
spatiaux.
C. E. D. Communauté européenne de Dé¬
fense.
C. E. E. Communauté économique euro¬
péenne.
C. E. E. A. Communauté européenne de l’éner¬
gie atomique.
C. E. E.-O. N. U. Commission économique pour
l’Europe.
CENTO Organisation du traité central.
C. E. P. A. L. Commission économique pour
l’Amérique latine.
C. E. R. N. Conseil européen de Recherche
nucléaire.
C. E. R. S. Organisation européenne de
recherches spatiales.
C. I. C. R. Comité International de la Croix
Rouge.
C. I. J. Cour internationale de Justice.
C. I. M. E. Comité intergouvememéntal pour
les migrations européennes.
COMECON Conseil d’assistance économique
mutuelle.
C. P. A. Cour permanente d’Arbitrage.
C. P. J. L Cour permanente de Justice inter-
f*Çnationale.
E. L. D. O. European launching development
organization.
E. N. E. A. Agence européenne pour l’énergie
atomique.
E. S. R. O. European spatial research organiza¬
tion.
F. A. O. Organisation pour l’Alimentation
et l’Agriculture.
F. M. I. Fonds monétaire international.
F. U. N. U. Force d’urgence des Nations-Unies.
G. A. T. T. General agreement for tariff and
trade; Accord général sur les
tarifs et le commerce.
G. P. R. F. Gouvernement provisoire de la
République française.
TABLE DES ABRÉVIATIONS XV

H. C. R. N. U. Haut commissariat des Nations-


Unies pour les Réfugiés.
0. A. A. Organisation pour l’Alimentation et
l’Agriculture.
0. A, C. I. Organisation de l’Aviation civile
internationale.
0. A. M. C. E. Organisation africaine et malgache
de coopération économique.
0. C. A. M. Organisation commime airicaine
et, malgache.
0. C. C. Organisation de coopération com¬
merciale.
0. C. D. E. Organisation de coopération et de
développement économiques.
0. E. A. Organisation des Etats africains.
0. E. A. Organisation des Etats américains.
0. E. C. A. Organisation des Etats de l’Amé¬
rique Centrale.
0. E. C. E. Organisation européenne de Coopé¬
ration économique.
0.1. C. Organisation internationale du Com¬
merce.
0.1. H. P. Office international d’hygiène pu¬
blique.
0.1. T. Organisation internationale du Tra¬
vail.
0. M. C. I. Organisation intergouvemementale
consultative de la navigation
maritime.
0. M. M. Organisation météorologique mon¬
diale.
0. M. S. Organisation mondiale de la Santé.
0. N. U. Organisation de» Nations-Unies.
0. N. U. C. Organisation des Nations-Unies au
Congo.
0. N. U. D. I. Organisation des Nations Unies
pour le développement indus¬
triel.
0. P. E. P. Organisation des pays exportateurs
de pétrole.
0. T. A. N. Organisation du traité de l’Atlan-
tique-Nord.
0. T. A. S. E. Organisation du traité de l’Asie du
sud-est.
0. U. A. Organisation de l’unité africaine.
XVI TABLE DES ABRÉVIATIONS

S. D. N. Société des Nations.


S. F. I. Société financière internationale.
U. A. M. Union africaine et malgache.
U. E. O. Union européenne occidentale.
U. I. T. Union internationale des télécom¬
munications.
U. N. C. T. A. D. Conférence des Nations-Unies sur
le commerce et le développe¬
ment.
U. N. E. S. C. O. Organisation des Nations Unies
pour l’éducation, la science et la
culture.
U. N. O. Organisation des Nations-Unies.
U. N. R. R. A. Organisation des Nations-Unies
pour le secours et le relèvement.
U. N. R. W. A. Office de secours et de travaux des
Nations-Unies pour les réfugiés
de Palestine dans le Proche-
Orient.
U. P. U. Union postale universelle.
USTE RÉCAPITULATIVE
DES ABRÉVIATIONS UHUSÉES
DANS LA BIBUOGRAPHIE

A. A. A. Annuaire de l’association des Audi¬


teurs et anciens Auditeurs de
l’Académie de droit international
de La Haye, Palais de la Paix,
La Haye.
A. E. Annuaire européen, Martinus Nij-
hoff, La Haye.
A.F.D. I. Annuaire français de droit inter¬
national, C. N. R. S., Paris.
An. suisse Annuaire suisse de droit interna¬
tional, Zürich, Editions polygra-
phiques.
A. J. I. L. American Journal of international
law, New York.
B. Y. I. L. British Yearbook of international
law, Londres.
Chr. Pol. Etr. Chronique de politique étrangère,
Bruxelles.
Cours de IT. E. P. Cours de l’Institut d’Etudes Poli¬
tiques de Paris.
Cours de IT. H. E. I. Cours de l’Institut des Hautes
Etudes Internationales de Paris.
Friedenswarte Die Friedenswarte, Verlag für Recht
und GeseUschaft, Zürich.
Joum. d. i. Journal de droit international (Clu-
net). Editions techniques, Paris.
XVIII TABLE DES ABRÉVIATIONS

N. E. D. Notes et études documentaires,


Documentation française, Paris.
Ned. Tijd. Nederiands Tijdschrift voor Inter-
nationaal Recht, Sijthoff,
Leyde.
Penant Recueil général de jurisprudence de
doctrine et de législation colo¬
niales et maritimes, Boulogne-
sur-Seine, France.
Pol. Etr. Politique Etrangère, Paris.
Prob. éco. Problèmes économiques. Documen¬
tation française, Paris.
Rev. Act. Pop. Revue de l’Action Populaire, Edi¬
tions Spes, Paris.
Rev. belge D. I. Revue belge de Droit Internatio¬
nal, Bruxelles.
R. C. A. D. I. Recueil des Cours de l’Académie
de droit international de La
Haye, Palais de la Paix, La Haye.
Rev. crit. d. i. Revue critique de droit intematio-
?^1nal privé, Sirey, Paris.
R. D. I. L. C. Revue de droit international et de
législation comparée, Paris.
R. D. P. Revue du droit pubHcfet|[de la
science politique. Librairie géné¬
rale de droit et de jurisprudence,
Paris.
Rev. ég57pt. Revue égyptienne de droit intema-
nal, Eg^te.
R. F. S. P. Revue française de science poli¬
tique, Presses universitaires de
France, Paris.
R. G. D. I. P. Revue générale de droit interna¬
tional pubHc, Pédone, Paris.
Rev. hell. Revue hellénique de droit inter¬
national, Athènes.
Rev. hist. dipl. Revue d’histoire diplomatique, Pé¬
done, Paris.
R. J. P. O. M. Revue jmidique et pohtique
d’Outre-Mer, Librairie générale
de droit et de jurisprudence,
Paris.
R. J. P. U. F. Revue juridique et politique de
l’Union française (même adresse
que la revue précéaente).
TABLE DES ABRÉVIATIONS XIX

Rev, Mar. Comm. Revue du Marché Commun, Edi¬


tions techniques et économiques,
Paris,
Rev. N. U. Revue des Nations-Unies, Nations-
Unies, New York.
Rev. Pol. intem. Revue de la politique internatio¬
nale, Union des journalistes you¬
goslaves, Belgrade.
Rev. Pol. et Pari. Revue politique et parlementaire,
Paris.
Rev. trim. dr. eur. Revue trimestrielle de droit euro¬
péen, Paris.
Riv. dir. intem. Rivista di diritto interaazionale,
Rome.
Zeitsc. a. ô, V. Zeitschrift für auslândisches ôffent-
liches und VôUcerrecht, Stutt¬
gart.
Zeit. Schweiz R. Zeitschrift für schweizerisches
Recht, Bâle.
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LES INSTITUTIONS
INTERNATIONALES

INTRODUCTION

1. — Sens de l’enseignement. — L’étude des ques¬


tions internationales, du droit international public, a été
tardivement introduite dans les programmes d’enseigne¬
ment de caractère juridique en France. On demeure sur¬
pris de constater que jusqu’au milieu du xx® siècle cette
étude n'occupe, dans le cadre de la licence en droit, que
la place mineure d’un enseignement semestriel et à option
en troisième année. Avec la rénovation des études de droit
que marque la réforme de 1954, un allongement est réalisé
et sur les deux semestres désormais prévus l’un devient
obligatoire pour tous les étudiants.
Une nouvelle transformation des études en vue de la
licence en droit, réalisée en 1962, accroît notablement le
volume des études portant sur les questions interna¬
tionales.
L’allongement est considérable mais se combine avec
im caractère optionnel largement maintenu. L’étudiant
intéressé par les questions internationales peut suivre
ainsi en troisième année un cours de deux semestres de
droit international public et en quatrième année s’offrent
à lui divers cours de caractère international comme les
organisations européennes, ou les grands problèmes poli¬
tiques contemporains dans lesquels sont inclus bien des
problèmes internationaux.
Mais avant que l’étudiant puisse choisir de telles
options, un enseignement général de base, sous le nom
à’institutions internationales, est prévu en première année
de la licence juridique, il concerne donc tous les étudiants
qui se destinent aux études juridiques, qu’il s’agisse du
droit privé ou du droit public.
L’enseignement à.’institutions internationales a un carac-
1. — mSTITOnONS intkrnationaiæs.
2 INTRODUCTION

tère très général car il s’adresse non seulement aux étu¬


diants qui poursuivent la licence juridique mais aussi aux
étudiants ès sciences économiques. Cet enseignement est
identique mais il est placé là en deuxième année.
Cet enseignement à!institutions internationales qui
s’adresse donc au début même de leurs études à des jeunes
gens qui ne possèdent point de connaissances juridiques
poussées apparaît nécessairement comme un enseigne¬
ment qui ne samrait être centré sur des problèmes stricte¬
ment juridiques.
Cet impératif à la forme négative est heureux. Il est
bénéfique que l’introduction aux études internationales
se fasse par une approche qui ne soit pas exclusivement
ou même principalement juridique.
Ce serait une lourde erreur que de vouloir enfermer
dans d’étroites règles exclusivement juridiques les rap¬
ports internationaux ou que de transposer sur le plan de
la société internationale les solutions valables dans la
société des particuhers et de leurs rapports d’intérêts ou
leurs relations de famille. Les réalités de la vie internatio¬
nale sont pohtiques et sociales et les formules juridiques
que l’on rencontre dans la vie des peuples ne sont jamais
qu’une résultante des circonstances historiques.
L’expression même d'institutions internationales intro¬
duit parfaitement cette notion historique, c’est-à-dire ce
facteur temps puisqu’aussi bien, et même au regard des
juristes les plus stricts, l’institution suppose un ensemble
de droits et d’obhgations qui naissent successivement, à
partir d’une première situation. L’étude des institutions
internationales suppose donc une étude de laquelle ne
seront point exclues les considérations historiques. Celles-
ci d’ailleurs ont toujours joué un rôle important dans cer¬
taines disciphnes juridiques et la formule peut être rap¬
pelée que posait Bielfield au xviii® siècle : « Le droit
public repose sur des faits, pour le connaître il faut savoir
l’histoire. »

2. — Sa complexité. — Si les institutions internatio¬


nales apparaissent ainsi comme le reflet de l’histoire, il
convient d’indiquer tout de suite qu’eUes ne sont point
de simples images. Des facteurs économiques, psycholo¬
giques, géographiques interviennent aussi pour modeler
telle ou telle formule, pour lui donner son sens, pour l’accé¬
lérer ou la ralentir. Telle formule fédérale porura appa¬
raître la même à l’analyse juridique et le sera effective-
INTRODUCTION 3

ment en ses mécanismes techniques, elle signifiera pour¬


tant, selon les cas, le début d’une dislocation politique ou
au contraire une étape de regroupement, une ébauche
imparfaite de reconstruction. Les données techniques elles-
mêmes ne sauraient être néghgées. La société internatio¬
nale se resserre, se rétrécit lorsque les découvertes scien¬
tifiques et leurs apphcations enserrent le monde d’im
réseau télégraphique, du faisceau des ondes hertziennes,
lorsque les avions rapides rapprochent les distances. Mais
le progrès technique peut avoir d’étranges conséquences.
Libre pour la navigation depuis le xvii® siècle, la mer se
ferme pour l’exploration de son sous-sol depuis qu’on sait
en extraire le pétrole. La hberté de navigation des fleuves
peut s’étendre à tous les pavillons, mais l’aménagement
hydroélectrique ne concerne que les riverains. La décou¬
verte technique peut ainsi entraîner la régression. Dans
le domaine de la guerre le problème se pose avec des pers¬
pectives terrifiantes.

3. — La relativité des solutions. — Les institutions


internationales que conditionnent tant de facteurs ne sau¬
raient être présentées dans un cadre purement historique,
et le plan chronologique doit être évidemment écarté.
On ne saurait pourtant faire abstraction d’un élément
qui se rencontre essentiellement dans les disciphnes his¬
toriques et qui est l’aspect inachevé. C’est le propre des
institutions internationales que de se renouveler, de se
transformer sans qu’il y ait d’ailleurs nécessairement de
formes parfaites, au sens absolu, ou même de formes plus
perfectionnées parce que plus récentes. L’évolution doit
être présentée en dehors de tout postulat de progrès. Les
institutions internationales n’évoluent point harmonieu¬
sement vers la perfection. Elles peuvent se succéder dans
un apparent désordre. Les plus ambitieuses ne sont pas
les plus durables ni les mieux adaptées.

4. — Institutions internationales et organisations inter.*


nationales. — Le sens de l’intitulé de l’enseignement
dénommé Institutions internationales est précisé par le
programme officiel de cet enseignement tel qu’il figure
dans l’arrêté du 3 août 1962

* I. L’évolution des institutions internationales depuis la fin du xv* siècle.


II. La société internationale contemporaine : description et structure ;
notions sommaires sur les soiu-ces du droit international, la reconnaissance, les
relations diplomatiques et consulaires et sur la solution des conflits.
III. L’Etat. Statuts étatiques particuliers. Groupements d’Etats. Fédéra-
4 INTRODUCTION

L’étude des institutions internationales a un domaine


qui déborde assez largement celui du droit internatio¬
nal classique. Le droit international apparaît, en effet,
comme essentiellement un droit inter-étatique, or les ins¬
titutions internationales ne se bornent point à l’étude
d’une société inter-étatique mais ont pour objet la société
internationale actuelle qui comporte, à côté d’éléments
étatiques ou inter-étatiques, d’autres éléments : les orga¬
nisations internationales.
Mais on ne saurait confondre « institutions internatio¬
nales » et « organisations internationales ».
On peut dire que les organisations internationales cons
tituent des institutions internationales, mais la réciproque
de cette proposition n’est pas toujours vraie. Il est des
institutions internationales qui tout en tendant, évidem¬
ment, à une idée d’ordonnancement juridico-politique ou
administratif de la communauté internationale ne com¬
portent pas, ne s’analysent pas en des organisations.
L’organisation internationale suppose un perfectionne¬
ment de la technique des rapports internationaux abou¬
tissant à l’élaboration de décisions prises d’une manière
efficace par des organes permanents remplissant à titre
principal des fonctions spécialisées. Il existe d’ailleurs un
certain flottement dans la terminologie. Le plus net appa¬
raît dans le cadre des organisations internationales de
caractère administratif ou technique regroupées dans l’or¬
bite de l’O.N.U. sous le nom d’institutions spécialisées.
Ce sont des organisations internationales typiques et elles
sont désignées sous le nom d’institutions.

^ 5. — Institutions internationales et relations interna¬


tionales. — L’enseignement intitulé institutions interna¬
tionales fait, on l’a indiqué, une très large place aux pro¬
blèmes historiques, économiques, techniques et sociolo¬
giques que pose le monde international. Il tend à décrire
et à exphquer les structures et les mécanismes de celui-ci.
L’élargissement des méthodes d’analyse par rapport au
droit international est certain et il s’agit là d’une nou¬
veauté qui doit être signalée.
Les approches étrangères sont parfois différentes. Ainsi

lisme. Statuts d’inégalité (tutelle-territoires non autonomes). Collectivités


non étatiques. Participation des particuliers à la vie internationale et droits
de la personne humaine.
IV. Les organisations internationales universelles et régionales.
V. Le régime du commerce international, de l’assistance économique,
financière et technique.
INTRODUCTION 5

en Grande-Bretagne et plus nettement encore aux États-


Unis, les problèmes de la vie internationale sont, depuis
quelques années, présentés d’une manière générale et non
juridique dans le cadre de ce qui est appelé « Internationa]
relations ».
C’est une approche qui se situe dans le monde de la
science politique et qui réserve une très large place aux
considérations multiples et regroupées en faisceau des
diverses sciences sociales, et notamment de la sociologie.
Entre l’approche « institutions internationales » et l’ap¬
proche « relations internationales », la différence est essen¬
tiellement de caractère méthodologique et d’ordre quan¬
titatif.
L’étude des institutions internationales garde des
méthodes précises et le vocabulaire institutionnel rigou¬
reux qui caractérise les disciplines de type juridique, mais
elle fait place à des considérations méta-juridiques qui
permettent d’expUquer les solutions et qui montrent le
caractère contingent de ceUes-ci qui varient selon les
époques et les besoins.
6. — Bibliographie. — Il convient de donner au seuil
de ce manuel une bibliographie.
Son étabhssement pose quelques difficultés car elle doit
être élémentaire.
On distinguera les éléments documentaires et les élé¬
ments doctrinaux.
On notera d’ailleurs qu’en raison de la nouveauté et
du caractère particulier de l’enseignement « institutions
internationales » il convient de faire un large appel à des
livres ayant pour thème principal les problèmes de droit
international. Dans la mesure où, à côté de livres français,
une part doit être faite à des livres étrangers on indiquera
des ouvrages portant sur les relations internationales en
même temps que des ouvrages portant sur le droit inter¬
national lui-même.
La bibliographie ci-dessous indiquée a un caractère
général, une bibliographie méthodique figure à la fin de
chaque chapitre.
I. — Documents.
A. — Documents diplomatiques généraux.
Recueil international de traités du XIX^ siècle, par le
baron Descamps et Louis Renault, avec le concours de
M. Basdevant (1801-1825), inachevé, Paris, Rousseau.
6 INTRODUCTION

Recueil international de traités du XIX^ siècle, par le


baron Descamps et Louis Renault, avec le concours
de MM. Capelle, Ruyssenaerts, Fauchille (1901-
1907), inachevé.
Recueil des principaux traités, par Georges Friedrich
de Martens, comporte trois séries et commence en
1761 pour se poursuivre jusqu’à la veille de la Seconde
Guerre mondiale.
Recueil des traités et des engagements internationaux enre¬
gistrés par le secrétariat de la S. D. N. (1920-1946) avec
un index général particulièrement commode.
Recueil des traités enregistrés par le secrétariat de l’O. N. U.
avec des index commodes, depuis 1946.
Pour la France on consultera :
De Clerq, Recueil des Traités, conventions et actes diplo¬
matiques conclus par la France avec les Puissances étran¬
gères (1713-1906).
Basdevant, Recueil des traités et conventions en vigueur
entre la France et les Puissances étrangères, avec table des
traités, table analytique, 4 vol., Paris, 1922.
Pour la période la plus actuelle on trouvera les textes
des principaux traités dans les Publications de la Prési¬
dence du Conseü de la République française, collection
Notes documentaires et études, série diplomatique.

B. — Publications des organisations


INTERNATIONALES.

Les documents se rapportant à la vie actuelle des orga¬


nisations internationales sont publiés régulièrement par
les secrétariats de chacune d'entre elles.
Les pubhcations les plus importantes sont celles de la
S. D. N. et actuellement celles de l’O. N. U. (Assemblée
générale. Conseil de sécurité. Conseil économique et social,
Conseü de tutelle) et des grandes organisations interna¬
tionales, notamment les organisations européennes,
C. E. C. A., Euratom, C. E. E., Conseil de l’Europe.
Les annuaires statistiques, notamment ceux pubUés par
rO. N. U. fournissent d’intéressants renseignements.

C. — Recueil de textes et documents choisis.

Albin, Les grands traités politiques (1815 à nos jours),


Paris, 1911, 3e édition, 1923.
ÎNTRODÜCTION
7

Le Fur et Chklaver, Recueil de textes de droit interna¬


tional public, Paris, Dalloz, 1928, 2® éd., 1934.
CoLLiARD (C.-A.), Droit international et histoire diploma¬
tique, Paris, Domat-Montchrestien, édit., 1948'
2® édition, 1950; 3® édit., 1956 (t. I, 1815-1950; t. II,
1950-1956), 4® édition sous presse.
Reuter (P.), et Gros (A.), Traités et documents diploma¬
tiques, Paris, P. U. F., 2® édition, 1963.

II. — Doctrine.

A. — Ouvrages.

1° Juridiques.
a) Langue française ou Traduction française.
Accioly, Traité de droit international public (traduction
française), Paris, Sirey, 1948, 3 vol. (traduit du portu¬
gais par Paul Goulé).
Alvarez (A.), Le droit international nouveau dans ses
rapports avec la vie actuelle des peuples, Paris, Pédone
1959-
Alvarez (A.), Le droit international nouveau, son accep¬
tation, son étude, Paris, Pédone, i960.
Anzilloti, Cours de droit international public, traduction
française par Gidel, d’après édition italienne de 1929.
Cavaré (L.), Le droit international public positif, 2 vol.,
Paris, Pédone, 2® édition, 1961-1962.
Delbez (L.), Les principes généraux de droit international
public, Paris, Librairie générale de droit et de jurispru¬
dence, 1964.
Dupuy (R.-J.), Le droit international public. Collection
« Que sais-je ? », Presses Universitaires de France,
Paris, 1963.
Fauchille, (P.), Traité de droit international public,
4 volumes parus entre 1921 et 1926.
Guggenheim (P.), Traité de droit international public,
2 volumes, Genève, 1953.
Le Fur, Précis de droit international public, Paris, Dalloz,
4® édition, 1939.
Merle (M.), La vie internationale. Librairie A. Colin,
Paris, 1963.
Reuter (P.), Institutions internationales, Paris, P. U. F.,
5® éd., 1966.
8 INTRODUCTION

Reuter (P.), Droit international public, Paris, P. U. F.,


2® éd., 1963.
Rousseau (Ch.), Principes généraux du droit international
public, Paris, Pédone; t. I, Les Sources du droit inter¬
national public, 1944.
Rousseau, (Ch.), Droit international public, Paris, Sirey,
1953 (exposé très précis et complet du droit positif).
Rousseau (Ch.), Droit international public, Paris, Précis
Dalloz, 3® éd., 1965.
Scelle (G.), Précis de droit des gens (Principes et systé¬
matiques), 2 vol., Paris, Sirey, t. I, 1932; t. II, 1934.
Ouvrage fondamental en raison de sa présentation fort
originale et de sa hauteur de vues.
Scelle (G.), Manuel élémentaire de droit international
public (avec les textes essentiels), Paris, Domat-Mont-
chrestien, 1943.
Scelle (G.), Cours de droit international public, Paris,
Domat-Montchrestien, 1948 (Cours polycopié de la
Faculté de droit de Paris).
SiBERT (M.), Traité de droit international public, Paris,
Dalloz, 1951, 2 vol.
Spiropoulos, Traité théorique et pratique de droit interna¬
tional public^ {tradnction française), Paris, 1933.
Strupp (K.), Eléments de droit international puUic univer¬
sel américain et européen (en français), Paris, 1927.
Tunkin, Droit international public (traduction française),
Paris, Pédone, 1965.
VisscHER (Ch. de), Théories et réalités en droit interna¬
tional public, 3® éd. Paris, Pédone, i960.
b) Langue allemande.
Berber, Lehrbuch des Volkerrechts, 3 vol., Munich-Berhn,
1960-1964.
Dahm (G.), Vôlkerrecht, 2 vol., Stuttgart, 1958-1961.
Heydte (von der), Vôlkerrecht, Cologne, 1958-1960.
Reibstein (E.), Vôlkerrecht, 2 vol., Fribourg-Munich,
1965.
Sauer (E.), Grundlehre des Vôlkerrechts, Cologne, 3® éd.,
1955-
ScHATzEL (W.), Internationales Recht, 3 vol., Bonn, 1959-
1962.
Seidl-Hohenveldern (I.), Vôlkerrecht, Cologne, 1965.
Strupp (K.), Wôrterbuch des Vôlkerrechts. 3 vol. refondus
par H. J. ScHLOCHAUER, Berün, 1960-1962.
Verdross (A. von), Vôlkerrecht, 5® éd., Vieime, 1965.
INTRODUCTION 9

Wengler (W.), VÔlkerrecht, 2 vol., Berlin-Gôttingen, 1964.


c) Langue anglaise.
Brierly (J.), The law of Nations, 6® éd. révisée par
Waldock, Londres, 1963.
Briggs (H .W.), The law of Nations Cases, documents
and notes, Londres, 1953.
O’CoNNEL (D. P.), International law, Londres, 1965.
CoRBETT (P.), Leading Cases in international law, 6® éd.
par Leigh Walker, 1947.
Fenwick (C. g.). International law, 3® éd. Londres-
New-York, 1948.
Friedmann, The changing structure of international law,
Londres, 1964.
Gould, An introduction to international law, New York,
1957-
Green, International law through Cases, Londres, 1959.
Jenks (W.), The common law of mankind, Londres, 1958.
Jenks (W.), Law, Freedom and Welfcire, Londres, 1963.
Tessup (W.), A modem law of Nations, an introduction,
New York, 1948.
Kelsen (H.), Principles of international law, New York,
1952.
Korowicz, Introduction to international law, La Haye,
1959-
Oppenheim (L.), International law, 2 vol. t. II, 7® édit.,
1952, t. I, 8® éd. révisée par Lauterpacht.
ScHWARZENBERGER (G.), International law as afplied by
international Courts and Tribunals, 3® éd., Londres,
1957-
ScHWARZENBERGER (G.), International law, 4® éd.,
Londres, i960.
ScHWARZENBERGER (G.), The inductive approach to
international law, Londres, 1965.
Starke, An introduction to international law, 3® éd.,
Londres, 1954.
d) Langue espagnole.
Navarro (A.), Derecho internacional publico, 2 vol.,
Madrid, 1954.
Sierra, Tratado de derecho internacional publico, 1955.
Ulloa (A.), Derecho internacional publico, 4® éd., 1957.
Planas-Suarez (S.), Estudios de derecho internacional,
Buenos-Aires, 1959.
Iniguez, Derecho internacional publico, t. I, i960.
10 INTRODUCTION

Miaja de Camuela, Introduccion del derecho internacionaL


puhlico, 3® éd., i960.
Jimenez de Arrechaga (E.), Cuyso de derecho intetna-
cional puhlico, Montevideo, ig6i.
Dies de Velasco (M.), Curso de derecho internacional
puhlico, Madrid, 1963.
e) Langue italienne.
Balladore-Pallieri (G.), Diritto internazionalePuhhlico,
8® éd.. Milan, 1962.
Fedozi et Santi Romano, Trattato di diritto internazionale
(traité général en plusieurs volumes).
Monaco (R.), Manuale di diritto internazionale puhhlico,
Turin, i960.
Morelli (G.), Nozione di diritto internazionale, “î® éd.
Padoue, 1958.
Perassi (T.), Lezioni di diritto internazionale, 4® éd.
Padoue, 1955.
Quadri (R.), Diritto internazionale puhhlico, 4® éd.,
Palerme, 1963.
Sereni (P. A.), Diritto internazionale, 4 vol., 1956-1965.
Sperduti, Lezioni di diritto internazionale, 1956.

2® Ouvrages plus spécialement sociologiques.


Aron (R.), Paix et guerre entre les nations, 1962.
Ball (H.), et Kikllough (H. B.), International Relations,
Londres, 1956.
Bosc (R.), La société internationale et l’Église, Paris, 1961.
COLLIARD (C.-A.), Les données fondamentales des relations
internationales. Cours de l’Institut des Hautes Etudes
Internationales, Paris, 1962-1963.
Deutsch (JL.), Nationalism and social communication, 1953.
Deutsch (K.), Political community at the international
level, 1954.
Gottmann (J.), La politique des États et leur géographie,
Paris, Librairie A. Colin, 1952.
Herz (J.), International politics in the atomic âge, 1959.
Hoffmann (S.), Contemporary theory in international
relations, Englewood Cliffs, i960.
Huber (M.), Die soziologischen Grundlagen des Volker-
rechts, Berlin, 1928.
Merle (M.), Pacifisme et internationalisme, Paris, Librai¬
rie A. CoHn, 1966.
Meynaud (J.), Les groupes de pression internationaux,
Lausanne, 1961.
INTRODUCTION II

Morgenthau (H.), Politics among Nations, 3® éd., i960.


Padelford (N.), et Lincoln (G.), The dynamics of inter¬
national relations, New York, 1962.
Renouvin (P.) et Duroselle (J.-B.), Introduction à
l'histoire des relations internationales, Paris, Librairie
A. Colin, 1964.
Schwarzenberger (G.), Power politics, 3® éd., Londres,
1962.
Wright (Q.), The study of international relations, New
York, 1955.

B. — Cours.

On retiendra quelques cours particulièrement impor¬


tants donnés à l’Académie de droit international de
La Haye.
I® Problèmes juridiques et généraux.
Scelle (G.), Règles générales du droit de la paix, année
1933, vol. 46.
Basdevant (J.), Règles générales du droit de la paix,
année 1936, vol. 58.
Kelsen (H.), Règles générales du droitde la paix, année
1953, vol. 85.
VisscHER (Ch. de). Règles générales du droit de la paix,
année 1954, vol. 56.
Rousseau (Ch.), Règles générales du droit de la paix,
année 1958, vol. 93.
Reuter (P.), Règles générales du droit de la paix, année
1961, vol. lOI.
Mme Bastid (S.), Cours général de droit international
public, année 1966 (sous presse).
2° Problèmes et aspects sociologiques.
ScHiNDLER (D.), Contribution à l’étude des facteurs socio-
logiques et psychologiques du droit international, année
1933, vol. 46.
CoRBETT (P.), Social basis of a lawof Nations, 1954, vol. 85.
Mac Dougal (M. S.), International law, power and policy
a contemporary conception, année 1953, vol. 82.
Landheer (B.), Contemporary sociological théories and
international law, année 1957, vol. 91 (traduction fran¬
çaise, vol. 92).
Truyol y Serra, Genèse et structure de la société interna¬
tionale, année i960, vol. 96.
12 INTRODUCTION

C. — Dictionnaires.

Dictionnaire diplomatique. Nombreux tomes. Publi¬


cation de l’Académie diplomatique internationale.
Dictionnaire de la terminologie du droit international,
Paris, 1959.
D. — Revues et annuaires.

Revue de droit international, créée en 1927, ne parait


plus depuis 1940, Paris.
Revue générale de droit international public, créée en 1894,
publication reprise depuis 1945, dirigée par Ch. Rous¬
seau, Paris.
Revue trimestrielle de droit européen, Paris (depuis 1965).
Revue de droit international et de législation comparée
Bruxelles.
Revue belge de droit international, 1965, Bruxelles, dirigée
par J. A. Salmon.
Revue de droit international et des sciences diplomatiques,
Genève.
Revue égyptienne de droit international, publiée par la
Société égyptienne de droit international.
Revue hellénique de droit international, Athènes.
Journal du droit international, Paris.
American Journal of international law, New York.
International Conciliation, New York.
International Organisation, Boston.
The British Yearbook of international law, Londres.
The International and Comparative Law Quarterly,
Londres.
Communita internazionale (itahenne), Rome.
Jus gentium (itahenne), Rome.
Rivista di diritto internazionale, Rome.
Revista espanola de derecho internacional, Madrid.
Die Friedenswarte, Bâle.
Netherlands International law Review, La Haye.
Zeitschrift für auslàndisches ôffentliches Recht und Vôlker-
recht, Francfort.
Europa-Archiv, pubhé par la Deutsche GeseUschaft für
auswàrtige Poütik, Bonn.
International Problems, pubhé par the Institute of Inter¬
national Pohtics and Economy, Belgrade.
Annuaire Français de droit international (créé en 1955 par
Madame Paul Bastid), Paris.
INTRODUCTION 13

Annuaire suisse de droit international, Berne.


Annuaire canadien de droit international public, depuis
1963, publié par the University of British Columbia,
Vancouver.
Annuaire Européen, publié sous les auspices du Conseil
de l’Europe, La Haye.
Annuaire polonais des affaires internationales, publié par
l’Institut polonais des relations internationales, Varsovie.
Annuaire soviétique de droit international, publié par
l’Académie des Sciences de l’U.R.S.S.
Anuario Uragayo de derecho internacional, Montevideo.

7. — Méthode. — Le présent manuel est essentielle¬


ment destiné à des étudiants qui abordent les études
juridiques économiques et sociales.
Ses dimensions réduites ont conduit à limiter les dis¬
cussions doctrinales. On s’est efforcé de respecter l’impé¬
ratif du concret et d’atteindre à un but pratique.
Il nous a semblé qu’un ouvrage élémentaire traitant
des Institutions internationales devait fournir une présen¬
tation simple des grands problèmes du droit des gens et
des relations internationales, décrire aussi les organismes
dont il est question sans cesse dans les revues, les conver¬
sations et les journaux.
Une partie du programme du cours d’Institutions inter-
nationales trouvait autrefois place dans le cours de Droit
international public de troisième année. Si les thèmes sont
identiques, la présentation et les développements ne sont
point sans différence, de manière à montrer combien les
solutions dépendent des données premières de toute cons¬
truction juridique, les complexes données sociales.
C’est le contact avec la vie et la réalité internationales qui
a été recherché.
Les Institutions internationales supposent des méca¬
nismes juridiques. Ceux-ci ont été décrits, mais l’accent a
été mis, sans cesse, sur le caractère contingent des solutions.
Les solutions juridiques ne sont jamais que des mécanismes
techniques au service de fins supérieures. C’est particuliè¬
rement vrai dans le domaine international.
Il a été précisé que le présent manuel n’était point un
ouvrage de doctrine. Mais il convient de dire dès le début
qu’ü a été conçu sur la base du positivisme et même du
relativisme juridique. Il présente les solutions en s’effor¬
çant de les replacer dans leur milieu, de montrer comment
14 INTRODUCTION

elles varient en fonction des données complexes de tout


problème international.
Au milieu de tant de variables qui conditionnent la
solution, le but à atteindre ne varie pas, le progrès des
relations internationales, la multiplication et l’imbrica¬
tion des rapports pacifiques de manière à permettre l'épa¬
nouissement au sein de la commimauté internationale tout
entière des collectivités humaines, étatiques ou autres qui
la composent et qui sont des réalités vivantes et chamelles
ayant pour chaque homme, comme la nourrice à qui son¬
geait le poète, lait, pain et sel.
Plan général. — Le programme du cours à’Institu-
tious internationales a été fixé dans l’arrêté ministériel du
8 août 1962 ; il se retrouve dans le présent manuel. Il a été
ordonné selon le plan suivant.
Après une introduction destinée à caractériser le nouvel
enseignement et à indiquer les moyens qui peuvent être
utilisés par l’étudiât, un titre préliminaire retrace l’évo¬
lution historique générale des institutions internationales.
Cette évolution est particulièrement intéressante depuis
le XVI® siècle mais elle est présentée depuis la fin de
l’Empire romain d’Occident. Cette présentation montre
que les institutions internationales étudiées sont essen¬
tiellement européennes, mais une place de plus en plus
large est faite progressivement aux problèmes extra-euro¬
péens.
L’ensemble de l’ouvrage est divisé ensuite en deux par¬
ties. La première traite de la société des États, la seconde
de la sohdarité internationale.
La première pa,rtie présente essentiellement un aspect
politique ou pohtico-juridique. Traitant des rapports
entre les États et de leurs relations eUe concerne la société
inter étatique. C’est une partie en quelque sorte classique
dans laquelle sont décrits, sous l’angle international, les
composantes de la société interétatique et les rapports qui
existent entre elles. Ces rapports s’établissent normale¬
ment entre les États lorsque leurs relations sont de carac¬
tère pacifique et ne se présentent pas dans le cadre d’un
conflit violent.
La seconde partie est intitulée la solidaritéinternationale.
On s’efforce de présenter dans cette partie les tentatives
et les réalisations qui ont pour but la construction d’une
véritable société internationale. La finalité recherchée
donne un aspect particulier aux institutions. Il ne s’agit
plus seulement d’éviter l’affrontement des États et
INTRODUCTION 15

d’aboutir à une sorte d’équilibre de forces, il s’agit d’une


harmonisation, d’une coopération, d’un concours. Les
institutions changent de sens dans la mesure même où le
but poursuivi est différent. Les techniques demeurent par¬
fois les mêmes ou sont voisines, on trouve des traités, on
trouve des systèmes d’agencement confédéral, mais les
problèmes sont très différents. On poursuit en effet non
pas un non-affrontement entre États considérés comme
des collectivités suprêmes mais un agencement écono¬
mique et social de la société humaine tout entière.
La recherche de cet agencement constitue évidemment
une œuvre complexe qui ne peut se réaliser que lentement
par le moyen de diverses tentatives et l’utilisation de
mécanismes divers.
L’analyse doit porter ici sur deux plans différents. L’un
est celui des mécanismes de sohdarité, le second celui des
domaines de sohdarité.
Au plan des mécanismes il convient d’être sensible à
un aspect évident de la société internationale moderne,
de présenter et de décrire les Organisations internatio¬
nales qui se multiphent sans cesse et prennent place dans
l’univers international à côté des États eux-mêmes. Ce
sera l’objet d’une première sous-partie.
Au plan des domaines de sohdarité on doit noter que
l’étude traditionneUe de la société interétatique est
conduite dans le cadre des relations politiques ou pohtico-
juridiques entre États, mais à côté de ces relations
existent de nos jours d’autres relations, de caractère éco¬
nomique, financier, social, technique, qui revêtent beau¬
coup d’importance et tendent à une sohdarité renforcée.
Ce sera l’objet d’une seconde sous-partie.
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TITRE PRÉLIMINAIRE

L’ÉVOLUTION DU DROIT DES GENS


ET DES
INSTITUTIONS INTERNATIONALES

8. — Le problème du cadre. — Lorsqu’on se propose


de décrire une évolution, il faut nécessairement définir les
limites de temps entre lesquelles on entend la présenter,
fixer donc le point de départ et la période terminale. Pour
cette dernière il ne semble pas qu’il y ait de difficulté. On
peut légitimement faire jouer, dans une présentation de
caractère historique, la fameuse formule selon laquelle
appartient à l’histoire ce qui est arrivé hier. On adop¬
tera comme limite de temps terminale, l’actuahté la plus
récente qui puisse être présentement décrite.
Il est beaucoup plus difficile de choisir la période à
laquelle on entend faire commencer l’étude. Décrire l’évo¬
lution des institutions internationales suppose impéra¬
tivement l’existence de telles institutions, même sous
une forme rudimentaire. Il faut, en effet, qu’existe une
communauté internationale suffisamment vaste et com¬
plexe pour qu’eUe soit différenciée en une pluralité de
groupes humains à la fois distincts les uns des autres et
entretenant pourtant des relations pacifiques, temporai¬
rement au moins.
Cette double condition de communautés particulières
distinctes au sein d’une communauté humaine plus large,
et entrant toutefois en rapport les vmes avec les autres,
sans se fondre toutes ensemble dans la communauté géné¬
rale, ne se trouve pas toujours réalisée.
l8 INSTITUTIONS INTERNATIONALES

C’est finalement parce que les opinions divergent sur la


réalisation de cette double condition que plusieurs solu¬
tions peuvent être fournies au problème de la fixation
même de la période choisie comme point de départ de
l’évolution, donc de l’histoire du droit des gens et des ins¬
titutions internationales.

9. — Le point de départ. — Le problème de l’antiquité.


— Le problème est classique de se demander si la période
la plus ancienne historiquement, désignée sous le nom
de l’Antiquité, a connu des institutions internatio¬
nales.
Les réponses à cette question sont différentes. Certains
auteurs découvrent volontiers dans l’antiquité l’existence
d’institutions internationales. On cite des traités de vas¬
salité, de protectorat, d’alliance dans les rapports entre
peuples de l’Orient. Plus nettement apparaissent les
institutions internationales dans la Grèce antique, dans
cette société de l’archipel grec, divisée précisément en
Cités distinctes mais constituant pourtant, dans son
ensemble, une communauté plus large qui prenait cons¬
cience d’elle-même en faisant face au bloc des « Bar¬
bares ». Le monde hellénique peut ainsi se présenter comme
une société internationale où existent quelques institutions
comme les Amphyctionies, en lesquelles on pourrait trou¬
ver, avec quelque complaisance, une préfiguration des
organisations pohtiques internationales modernes, ainsi
l’arbitrage, ainsi la proxénie, présentée comme l’ancêtre
des institutions consulaires.
A supposer que de telles comparaisons puissent être
tentées,^ ces institutions ne sauraient, en tout cas, être
présentées comme le point de départ d’une évolution
continue. La période romaine, dans une histoire humaine
plus que millénaire, ne peut offrir aucun exemple net
d’institutions internationales. Le fameux jus fetiale ne
semble pas avoir été autre chose qu’un ensemble de pra¬
tiques destinées à mettre les divinités au service de Rome.
Les relations entre le peuple romain et ses voisins d’abord,
les peuples auxquels il s’est heurté ensuite, ont toujours
été placées sous le signe de la domination, de la conquête,
voire du pillage. La vieille formule de la loi des XII Tables
Adversus hostem æterna auctoritas esta, exclusive de tout
droit international, se retrouve plus tard dans le fameux
cri de Caton j: Delenda est Carthago et les conquêtes de
la période impériale marqueront les tendances xéno-
ÉVOLUTION HISTORIQUE IQ

phobes et les desseins impérialistes d’un peuple domina¬


teur.
Ce n’est qu’après l’effondrement du colossal empire, à
vocation universelle, que l’existence d’institutions inter¬
nationales pourra être à nouveau possible.

10. — Le point de départ. — Moyen Age ou XVI® siècle.


— L’effondrement de l’Empire romain brisant le cadre
impérialiste ne pouvait fournir les conditions d’existence
d’institutions internationales que si les collectivités cons¬
tituées par les différents peuples libérés ou victorieux
avaient eu un certain niveau de civilisation et avaient
entretenu entre elles des rapports pacifiques.
Or, pendant de longs siècles, il n’en va pas ainsi. Les
temps sont trop troublés pour des relations normales. La
flamme de la civilisation est vacillante. L’extraordinaire
morcellement du régime féodal pour être l’inverse de la
hiérarchie dominatrice romaine n’est pas plus qu’elle,
pour des raisons strictement opposées, favorable aux ins¬
titutions internationales.
Les institutions qui se développent progressivement et
tendent à mettre de l’ordre dans l’anarchie médiévale pro¬
cèdent d’aiUeurs d’une volonté supérieure, de caractère
rehgieux. Elles tirent de leur origine, nonobstant leur
faiblesse ou leur caractère rudimentaire une vocation uni¬
versaliste et sont une tentative d’organisation générale
dont l’échec ne saurait faire oubher d’une part la gran¬
deur, d’autre part la conception qui est encore celle de
l’empire universel. Les collectivités nationales sont, en
effet, pendant longtemps trop imparfaites pour constituer
la base des relations internationales. Elles ne le pourront
qu’après une renaissance. On ne saurait donc s’étonner
que, pour certains auteurs, le point de départ de l’étude
des institutions internationales soit situé à l’époque du
XVI® siècle. A cette date existent en effet, en Europe du
moins, des collectivités humaines évoluées, de grands
États qui vont entretenir entre eux des relations, rarement
pacifiques d’ailleurs.
Cette conception du point de départ « xvi® siècle » est
celle que consacre le programme officiel du cours Institu¬
tions internationales. Mais il paraît utile toutefois de
prendre comme point de départ, tout en tenant compte
des remarques précédentes, le début du Moyen Age ou la
fin de l'Empire romain d’Occident.
20 INSTITUTIONS INTERNATIONALES

11. — Le cadre géographique. — Il semble que l’étude


de l’évolution des institutions internationales ne jxjse
aucun problème tenant au cadre géographique, et que les
institutions internationales prennent place nécessairement
dans la communauté internationale tout entière, à l’éche¬
lon de la terre eUe-même.
Pourtant le problème se pose. Les institutions interna¬
tionales ne se trouvent que rarement à l’écheUe de la com¬
munauté universelle. EUes ne sont, en tout cas, apparues
à cette échelle que tardivement.
Ceci s’explique par plusieurs raisons : limitations géo¬
graphiques, phénomènes impérialistes, manifestations de
régionalisme.
En posant le problème du point de départ de l’évolution
des institutions internationales on a, plus haut, par prété-
rition, considéré ces institutions dans le cadre spatial du
monde méditerranéen d’abord, puis du monde européen
du Moyen Age. On a donc, du point de vue des ori¬
gines, néghgé tout simplement par ignorance tant le
monde oriental et les problèmes de l’Asie, notamment
de la Chine, que le monde de l’Amérique pré-colom-
bienne.
Le cadre spatial des institutions internationales est,
d’ailleurs, susceptible d’expansion. Au fur et à mesure que
le monde a été exploré, les institutions internationales
dont l’évolution est étudiée, et qui sont nées en Europe,
ont vu s’agrandir leur champ d’application. Certaines
même ont spécialement été créées pour régir les rapports
entre une société d’États européens d’une part et des col¬
lectivités non européennes de l’autre. Les exemples sont
nombreux. On peut citer parmi les plus nets : le régime des
capitulations réglant dès le xvi® siècle les rapports avec
les pays de l’Islam; plus tard les régimes de protectorat,
de cessions à bail, de concessions, de traités inégaux
valables pour des relations des Puissances européennes
avec des collectivités non européennes d’Afrique ou d’Asie.
Un grand nombre d’institutions internationales sont ainsi
liées au phénomène colonial, à l’impérialisme de l’Europe,
tel qu’il s’est manifesté pendant quatre siècles.
On doit enfin remarquer que même à l’époque du monde
fini, les institutions internationales ne sont pas nécessai¬
rement universelles. La communauté humaine générale se
fragmente en une pluralité de grands groupes régionaux,
qui constituent des sociétés internationales limitées. Le
monde américain a connu depuis le début du xix® siècle
ÉVOLUTION HISTORIQUE 21

des institutions internationales particulières. L’Europe du


XX® siècle voit se multiplier les tentatives d’organisations
internationales européennes. Les empires coloniaux, de
nos jours disloqués, donnent parfois naissance à des socié¬
tés particulières dont les « membra disjecta » sont épars à
la surface du globe.
La relativité donc caractérise les institutions interna¬
tionales et leur évolution aussi bien sur le plan géogra¬
phique que sur le plan chronologique.

12. — Plan. — Compte tenu des remarques précé¬


dentes, l’évolution des institutions internationales sera
divisée en trois périodes :
1. La naissance de la société internationale moderne
(v®-xviii® siècle) ;
2. Le siècle des congrès et l’avènement de l’ère indus¬
trielle (Des révolutions du xviii® siècle à la première
Guerre mondiale) ;
3. Les tentatives d’organisation depuis 1919.
CHAPITRE PREMIER

LA NAISSANCE
DE LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE MODERNE

§ ler. — Le Moyen Age.

13. — Le particularisme politique. — Jusqu’au


XV® siècle, pendant un millénaire, en Europe, on peut rele¬
ver dans l’organisation de la société politique deux phéno¬
mènes apparemment contradictoires : celui du morcel¬
lement politique et celui de l’unité.
Le phénomène politique essentiel est celui du morcelle¬
ment. L’Empire romain a perdu son unité lors du partage
opéré par Théodose, en 395, entre ses deux fils et qui
crée un empire d’Orient et un empire d’Occident.
L’empire d’Orient devait durer plus d’un millénaire
avant de sombrer, en 1453, sous les coups des Turcs.
L’empire d’Occident dure moins d’un siècle et s’effondre
à la suite des invasions barbares, à la fin du v® siècle, en
476. Sur ses ruines s’édifient une série de dominations poli¬
tiques précaires et multiples. Le souvenir de l’unité
ancienne hante les esprits les plus cultivés et la grarideur
impériale est le rêve que poursuivent les chefs politiques
les plus heureux et les plus habiles.
Au début du ix® siècle, le roi franc Charles, de la maison
des Carolingiens, dont l’aïeul Charles Martel avait arrêté
à Poitiers en 732 l’invasion arabe, reconstitue à son profit
l’empire Romain d’Occident. Son couronnement impérial
à Rome, en l’an 800, marque le renouveau d’une solution
unitaire.
La réalisation est de courte durée. L’empire d’Occident
24 l'évolution du droit des gens

se disloque en trois tronçons, en 843, au traité de Verdun.


Le partage s’accentue car, aux deux royaumes de France
occidentale et de France orientale, s’ajoute la dislocation
de la partie centrale puisque le royaume de Lothaire se
divise en moins de cinquante ans en royaume d’Italie,
royaume de Bourgogne, puis d’Arles, et en Lotharingie.
Les royaumes eux-mêmes s’effritent et se démembrent
sous les coups de nouvelles invasions et sous l’action dis¬
solvante du principe barbare de la patrimonialité. De la
nébuleuse carolingienne résulte ainsi une poussière d’états.
Les royaumes se multiplient, dont les chefs président, sans
autorité réelle, des associations de vassaux. L’Europe
occidentale s’émiette en de multiples territoires que
dominent des seigneurs indépendants liés les uns aux
autres par les rapports lâches et complexes de la féodalité.
Les tendances particularistes ont triomphé sur le plan
politique. Sur le plan spirituel et reUgieux l’unité s’est
maintenue.

14. — La communauté chrétienne. — « Qu’ils soient


un comme nous sommes un » avait souhaité le Christ.
L’Europe occidentale du Moyen Age satisfait à ce vœu.
Par delà le morcellement et la poussière des seigneuries,
l’ensemble des gens de l’Europe forment néanmoins un
seul peuple, le peuple chrétien. La disparition ou au moins
l’affaiblissement de la notion d’État a facilité l’existence
d’une autorité spirituelle et temporelle de l’Église chré¬
tienne. La religion domine la vie de l’esprit. Les moines
et les prêtres, dans les couvents et dans les Universités,
gardent et dispensent le savoir. Le génie artistique s’épa¬
nouira au cours des derniers siècles dans la dentelle des
cathédrales.
La Civitas christiana de l’Europe occidentale a son chef,
l’évêque de Rome, le pape, guide suprême de la Chré¬
tienté.

15. — Les deux glaives. — Vicaire du Christ, le pape


avait, selon la doctrine chrétienne, en tant que successeur
de saint Pierre, le pouvoir de lier et de délier dans le ciel
et sur la terre. Les papes ne cessèrent ainsi d’affirmer leur
suprématie spirituelle, à l’égard de tous les princes, même
de l’empereur.
Le couronnement de Charlemagne par Léon III, en
1’^ 800, marque syinboliquement cette doctrine. Mais
l’intégration des dignitaires ecclésiastiques, des évêques
LA NAISSANCE DE LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE 25

dans la hiérarchie féodale devait créer des conflits entre


les papes et les souverains purements temporels. La lutte
éclate au xi® siècle entre Grégoire VII et Henri IV, l’em¬
pereur du Saint Empire Romain Germanique. C’est la
querelle des Investitures dont le pape sort victorieux,
humihant son rival à Canossa, en 1077, et que termine
le concordat de Worms en 1122.
L’enjeu de la lutte était plus élevé encore. Les papes
du XII® siècle et du xiii® siècle veulent apparaître comme
les chefs suprêmes de la Chrétienté. Ils disposent des cou¬
ronnes, impériales ou royales, voient dans l’empire lui-
même un fief de la papauté. C’est la lutte des deux glaives,
l’opposition violente de « ces deux moitiés de Dieu, le
Pape et l’Empereur ». Frédéric Barberousse se soumet
ainsi à Venise en 1177, Othon IV reçoit la couronne impé¬
riale et se la voit enlever, Frédéric II de Hohenstaufen
est déposé par Innocent III en 1245.
La papauté victorieuse des empereurs devait, un demi-
siècle plus tard, formuler plus impérieusement encore sa
doctrine, avec Boniface VIII qui affirmait que le pontife
romain, vicaire du Tout Puissant, commandait aux rois
et aux royaumes et précisait que le glaive temporel n’était
entre la main des rois que pour qu’ils en usent pour
l’Éghse, selon l’ordre et la permission du pape. ^
Jamais la théorie de la suprématie pontificale n’avait été
si nette, mais elle était déjà anachronique et le roi de
France la brisait à jamais par la force, en 1303. L’indépen¬
dance des princes et des États s’affirmait, qui allait être
en Europe la grande dominante des siècles suivants.

16. — Les institutions juridiques. — Si 1 on constate,


à la fin du Moyen Age, l’échec politique d’une suprématie
temporelle du chef spirituel de la Chrétienté, il faut noter
du moins que c’est la rehgion chrétienne qui fournit les
éléments essentiels des institutions internationales.
L’occupation habituelle des seigneurs féodaux était la
guerre privée. L’Éghse tenta de réfréner ces instincts bru¬
taux, de restreindre l’usage même des guerres privées,
d’en ümiter les horreurs. Ses efforts sont particulièrement
nets au xi® siècle. Les conciles, les réunions ecclésiastiques
sont des assemblées de paix, on serait tenté d’écrire des
conférences pour la paix. Deux institutions sont ainsi
créées, la Paix de Dieu et la Trêve de Dieu.
La Paix de Dieu, que devait généraliser le concile de
Latran en 1059, est une tentative de réglementation de la
26 l’évolution du droit des gens

guerre. Des personnes pacifiques, gens d’Église, enfants,


femmes, ^hommes sans armes, des biens sacrés, comme les
biens d’Église, ou économiquement utiles, comme les ins¬
truments agricoles, les récoltes, les animaux de labour,
sont mis hors la guerre et doivent être respectés.
La Trêve de Dieu, que réglemente le concile général
de Clermont de 1095, limite la durée de la période où
peuvent se dérouler les hostilités. Les actes de guerre sont
interdits chaque semaine du jeudi au dimanche, et pen¬
dant tout le temps de l’Avent qui précède Noël et du
C^ême qui précède Pâques. On tente l’extension jusqu’à
l’Épiphanie et la Pentecôte de ces périodes de paix.
Une limitation de l’emploi des armes considérées
comme les plus dangereuses est même prévue.
Ces mesures ne sont pas complètement efficaces et
l’Église ne dispose que de l’arme spirituelle de l’excommu¬
nication, mais le pouvoir royal en se renforçant intervien¬
dra dans le même sens et fera respecter progressivement
ces prohibitions.
La guerre ne sévit point d’ailleurs seulement entre les
plus petits seigneurs, mais aussi entre les plus puissants
et entre les États. Pour limiter le recours à la guerre, se
développe la pratique de la médiation et de l’arbitrage
qui trouvent leur origine dans le devoir chrétien de conseil
fraternel. Le pape, guide spirituel, est ainsi pris pour
arbitre des querelles royales. Au xiii® siècle, le rayonne¬
ment du roi de France saint Louis l’amène à arbitrer des
conflits internationaux. En 1270, à la veiUe de sa mort,
il fait conclure par les Répubhques italiennes de Venise,
Gênes, Pise, une trêve de cinq ans.

17. — Les croisades. — Si ainsi se dessine à l’intérieur


de la Chrétienté eUe-même un mouvement contre les
guerres, il est au contraire des expéditions müitaires que
la Chrétienté entreprend du xi® au xiii® siècle : ce sont
les Croisades.
Elles furent les guerres extérieures de la Chrétienté
tout entière, sans distinction d’appartenance politique, et
sous la direction spirituelle du pape. Ces expéditions, dont
la première débute en 1096 et dont la dernière est menée
par saint Louis en 1270, opposent la civihsation chrétienne
à celle de l’Islam. Elles ont pour conséquence pohtique
la création d'États chrétiens plus ou moins fragiles dans
le Proche-Orient, le royaume de Jérusalem, l’empire chré¬
tien de Constantinople. Elles furent l’occasion de la créa-
T.A NAISSANCE DE LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE 27

tion de milices chrétiennes, les ordres religieux militaires,


les chevaliers Hospitaliers, les chevahers du Temple, les
chevcdiers Teutoniques.

§ 2. — Les temps modernes.

18. — La fin du Moyen Age. — La conception théo-


cratique d’rme Répubhque chrétienne dirigée par le pape
et la conception impériale d’une Europe hiérarchisée sou¬
mise à l’empereur sont, à la fin du Moyen Age, invoquées
encore mais dépourvues de force et de réaüté.
La guerre de Cent ans commence comme une guerre
féod.ale et apparaît d’abord comme un duel autour d’une
succession htigieuse; elle s’achève presque en guerre natio¬
nale opposant deux peuples.
Les transformations s’affirment avec la période dite des
Temps Modernes. La féodalité est brisée dans les grands
royaumes d’Occident, où apparaissent les monarchies
bureaucratiques. A l’intérieur du Saint Empire, les princes
se taillent de véritables États. L’Itaüe est le cadre géo¬
graphique de riches Répubhques marchandes ou de sei¬
gneuries opulentes comme Venise, Gênes, Florence, Milan.
Le pape qui n’a pas résisté à la tentation des royaumes
du monde est, en même temps que le chef spirituel de
l’Éghse universelle, un souverain temporel itahen. L’Italie
ainsi morcelée en États indépendants constitue un véri¬
table monde moderne en miniature. EUe devient, selon
l’expression de Burckhard, « la patrie de la pohtique exté¬
rieure ». La Ligue de Lodi, dès 1454, consacre une pqh-
tique de raison, d’intérêts et à!équilibre. Avec la conclusion
de la Très Sainte Ligue de Venise sont jetées, le
31 mars 1495, les bases fondamentales d’un nouveau droit
pubhc.

19. — Les grandes découvertes. — Quelques années


plus tôt, Christophe Colomb avait abordé aux Antilles,
en 1492, et une buUe du pape Alexandre VI Borgia en 1493
avait partagé le monde à découvrir entre TEspagne et le
Portugal. Le traité de TordesiUas, le 3 juin I494> entre
les deux souverains, remaniait les termes du partage,
montrant le peu de cas fait de la volonté pontificale et
l’importance aussi des découvertes maritimes et des
conquêtes coloniales.
Aux États dotés d’un gouvernement centralisé qui ont
28 l’évolution du droit des gens

succédé aux seigneuries féodales s’offre le destin d’une


politique de puissance. A la notion chimérique et unitaire
de l’Empire se substitue la rude réalité des impérialismes
maritimes, océaniques et continentaux.
Aux velléités de conquête des États s’opposent les résis¬
tances de chacun des autres. La communauté chrétienne
disloquée en royaumes, presque déjà en nations, aban¬
donne le principe médiéval d’une hiérarchie ordonnée pour
y substituer le rapport quasi mécanique des forces, le
contrôle, la surveillance réciproques. Le principe italien
de la balance des Puissances devient celui de l'équilibre
européen.

20. — La naissance du sentiment national. — Les


guerres ne sont point d’ailleurs simplement jeux de
princes, soucieux d’étendre leurs possessions ou de
défendre leurs intérêts dynastiques ; les patriotismes
naissent, qui marquent la résistance aux impérialismes.
En 1526, Fremçois I®*", vaincu à Pavie, était obhgé de
céder la Bourgogne à Charles Quint mais prétendait un
peu plus tard, pour ne pas exécuter le traité, que les Bour¬
guignons refusaient de passer sous l’obéissance de l’empe¬
reur, et le Parlement de Bourgogne manifestait son oppo¬
sition. On indique souvent que les trois évêchés de Metz,
Toul et Verdun sont cédés à la couronne de France, non
seulement en vertu du traité de Cateau-Cambrésis de 1550,
mais aussi du consentement des populations, par une sorte
de premier plébiscite. Mais les peuples ne sont point tou¬
jours les soutiens des souverains : les montagnards des
cantons suisses, gardiens des cols alpestres, hés par les
pactes confédéraux du xiv® siècle, sauvegardent leur indé¬
pendance à l’égard de l’Autriche. Les Pays-Bas espagnols
se révoltent pour fonder, en 1579, les Provinces Unies
dont l’indépendance reconnue par une trêve de douze ans,
en 1609, devait être consacrée par un traité particuher
en 1648, dans le cadre des traités de Westphahe.

21. — La Réfonne. —Parmi tant de faits qui opposent


si nettement la période dite des Temps Modernes à celle
du Moyen Age, l’un des plus importants est certainement
la rupture de l’unité religieuse, la Réforme.
A partir de 1517, la robe sans couture de la Chrétienté
est désormais déchirée. Les luttes religieuses entre Pro¬
testants et Cathohques se déroulent sur le plan des guerres
civiles et des guerres internationales. La Paix d’Augs-
LA NAISSANCE DE LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE 29

bourg, de 1555, pose le principe Cujus regio ejus religio et


reconnaît aux princes luthériens la liberté de culte qui
fait de chacun d’eux un pape localisé (Lavisse). Elle accen¬
tue ainsi le démembrement. Parfois instrument de l’indé¬
pendance nationale, comme en Suède, la Réforme est, dans
d’autres circonstances, l’occasion des interventions exté¬
rieures, protestants et cathohques ne craignant pas de
faire appel à l’étranger dans les guerres civiles, ainsi en
France et dans les AUemagnes, et les souverains feignent
de considérer comme un devoir l’aide à leurs corehgion-
naires.
Parfois au contraire, donnant le pas aux considérations
poUtiques, ils aident les sujets étrangers révoltés, les uti-
sant dans leur lutte contre le souverain ennemi. Les sou¬
verains français et leurs ministres cathohques prêtent ainsi
leur appui aux princes protestants d’Allemagne ou aux
Puissances protestantes nordiques dans le cadre de la
lutte contre l’empire des Habsbourg.
La primauté du poUtique entraîne même la séculari¬
sation de la pohtique extérieure, François I®*' s’aUie avec
les Turcs en 1534 et, en 1535, signe une heureuse conven¬
tion commerciale qui crée le régime connu sous le nom de
Capitulations, modèle des traités qui seront conclus par
les Puissances européennes avec la Subhme Porte au cours
des siècles suivants.

22. — Les traités de Westphalie. — Sous l’influence de


ces faits historiques ci-dessus rappelés, un droit interna¬
tional véritable s’élabore. Il règle désormais les rapports
entre elles des Puissances européennes. Le principe fon¬
damental de ce droit européen est la répudiation de l’im-
périahsme et l’adoption du principe de l’équihbre euro¬
péen. Les grands traités internationaux des xvii® et
xviii® siècles reposent tous sur cette même base. Après
de longs conflits où s’épuisent leurs forces, les beUigérants
adoptent des solutions de transaction, de partage de ter¬
ritoires et d’influence.
Le morcellement de l’Europe définitivement acquis
apparaît dans les textes qui constituent les traités de
Westphahe de 1648. Pendant quatre ans, l’Empereur du
Saint Empire et ses alliés négocient à Munster avec
la France et ses aUiés, à Osnabrück avec les princes
protestants. Précédés du traité du 15 mai 1648 entre
l’Espagne et les Provinces-Unies, les traités de Westpha-
üe sont signés simultanément à Munster et à Osnabrück
30 l’évolution du droit des gens

le 24 octobre 1648. Ils expriment un nouveau droit public


européen.

23. — Le statut de l’Europe. — L’Allemagne n’est


plus ^ qu’ime entité géographique formée de plus de
350 États qui reçoivent «le libre exercice de la supériorité
territoriale tant dans les choses ecclésiastiques que dans
les pohtiques ». Ces États sont indépendants les uns des
autres. De ce qu’on appelle « les hbertés germaniques »,
la France et la Suède apparaissent comme les Puissances
garantes. Le rêve de la Chrétienté unie sous les deux chefs,
le pape et l’empereur, s’est écroulé. L’empereur devient,
selon le mot de Lavisse, un « monarque préposé à une
anarchie ». Le pape, dont le nonce a joué à Munster le
rôle de médiateur, proteste contre un traité qu’il refuse
de signer et qui reconnaît aux princes protestants, calvi¬
nistes ou luthériens, la possibilité d’imposer à leurs sujets
leur propre rehgion. Point de départ d’une diplomatie
nouvelle et d’un nouveau droit, les traités de Westphahe
font également table rase du passé dont il ne reste guère
qu’un vestige, la non participation de la Sublime Porte
aux négociations et son exclusion du concert des nations
européennes qui ne prendra fin que deux siècles plus tard,
au Congrès de Paris de 1856.

24. — Le principe d’équilibre. — Ce principe de poli¬


tique européenne est désormais appliqué. C’est lui qui,
au lendemain de dures guerres, hmite l’impériafisme fran¬
çais de Louis XIV. Au traité d’Utrecht de 1713, le prin¬
cipe est posé de la prohibition de la réunion l’une à l’autre
des couronnes de France et d’Espagne.
Les impérialismes coloniaux de l’Angleterre et de la
France se heurtent hors d’Europe, tandis que les conflits
européens eux-mêmes sont rendus plus complexes par
l’entrée en scène, comme grandes Puissances, de la Prusse
protestante érigée en royaume au traité d’Utrecht et de
l’Empire russe qui entre dans le concert européen. Les
traités d’Aix-la-Chapelle de 1748, de Paris de 1763, comme
les partages de la Pologne de 1772, 1791 et 1793 sont dans
la hgne des principes étabhs au xvii® siècle.

25. — Le droit de la mer. — Le partage des terres à


découvrir opéré à la fin du xv® siècle entre Espagnols et
Portugais n’avait évidemment pas contenu la poussée
d’autres Puissances européennes comme les Provinces-
LA NAISSANCE DE LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE 3I

Unies et la France. Les rivalités coloniales se marquent


non seulement dans les territoires ultra-marins mais sur
la mer elle-même. L’Angleterre prétend à la domination
des espaces maritimes, en se fondant sur sa position insu¬
laire. La théorie du dominium maris est ruinée au
XVII® siècle. Le Hollandais Grotius dans son Mare Libe-
rum, en 1609, affirme que la mer est une chose commune
qui échappe à toute domination particulière. L’Anglais
Selden répond à cette thèse en affirmant en 1635 les droits
britanniques, dans son ouvrage Mare clausum, mais ne
peut nier l’existence de la Hberté de navigation.
Cette hberté de la mer, les Puissances neutres s’effor¬
ceront de la faire reconnaître, même au cours des guerres.
Pendant la guerre d’indépendance américaine, la Russie
organise une figue de la neutralité armée qui défend par
la force le principe de la hberté du commerce innocent
des neutres au cours d’une guerre maritime.
CHAPITRE II

LE SIÈCLE DES CONGRÈS


ET L’AVÈNEMENT DE L’ÈRE INDUSTRIELLE

(Des Révolutions de la fin du xviii® siècle


à la Première Guerre mondiale)

§ I®*'. — Nouveauté et tradition.

26. — Un nouveau droit public. — Le système des


XVII® et XVIII® siècles repose sur la notion d’une société
internationale composée d’États souverains, égaux entre
eux. Les Etats sont considérés ainsi comme des entités
abstraites, uniques sujets du droit international. La struc¬
ture politique de ces États n’est pas, en général, prise en
considération. Si la forme la plus répandue est celle des
monarchies absolues, on trouve des républiques comme
les Provinces-Unies, des monarchies constitutionnelles.
Les traités de Ryswick et d’Utrecht ont posé le principe
de la reconnaissance de souverains qui, comme Guil¬
laume d’Orange ou la reine Anne, tiennent leurs pouvoirs
non de la naissance mais d’un contrat passé avec leur
peuple.
La révolte des colons d’Amérique, la déclaration d’indé¬
pendance du 4 juillet 1776 font apparaître plus clairement
la notion du consentement des gouvernés. Le droit pour
le peuple de changer ou d’aboür une certaine forme de
gouvernement est ainsi proclamé par les Insurgents. Les
préliminaires anglo-américains du 30 septembre 1782, que
confirme le traité de Versailles du 3 septembre 1783,
consacrent sur le plan international cette théorie pohtique.
LE SIÈCLE DES CONGRÈS 33

27. — La Révolution française. — La Déclaration des


Droits de l’Homme, formulée en termes abstraits, valable
pour tous les temps et tous les pays, fournit aux peuples
les dogmes libérateurs. Le 19 novembre 1792, le principe
de l’intervention émancipatrice est adopté dans un décret
par lequel : « La Convention nationale déclare, au nom de
la Nation française, qu’eUe accordera fraternité et secours
à tous les peuples qui voudront recouvrer leur liberté. »
Déjà, l’Assemblée Constituante avait décrété l’annexion
d’Avignon et du Comtat Venaissin, se fondant sur les
résrdtats d’un vote populaire. Plus nettement encore, au
nom de la souveraineté nationale, la Savoie est réunie à la
France par un décret de la Convention du 27 dé¬
cembre 1792. Mais la formule de la souveraineté nationale
ne tarde pas à être abandonnée à propos de la Belgique
et, à la fin de l’année 1792, la France révolutionnaire
reprend à son compte les vieilles formules impérialistes et
la théorie de la conquête.
Contre l’impérialisme français rendu plus puissant par
le dynamisme révolutionnaire puis l’organisation napo¬
léonienne, l’Europe se coalise sous l’impulsion anglaise.
Cette ligue des Puissances est une ligue de monarques
défendant leurs trônes mais aussi une ligue d’États, et
elle reprend la formule de l’équilibre européen contre l’ex¬
pansion française.
Ainsi sont maintenus les traditions du droit de la force
et le principe de l’équilibre. Les théories de la souverai¬
neté nationale constituent une nouveauté explosive qui
n’est guère appliquée mais contient partiefiement en
germe le principe d’auto-détermination des peuples dont
le rôle sera décisif aux xix® et xx® siècles.

28. — Le Congrès de Vienne. — Au lendemain de


vingt années de guerre se posa l’œuvre de Reconstruction.
Les territoires abandonnés par la France, que le traité
de Paris du 30 mai 1814 ramenait à ses frontières d’avant
1792, devaient être d’ailleurs redistribués par les vain¬
queurs. Établir un ordre nouveau, un système continental
sohde et statique devait être la tâche du Congrès de
Vienne. Le Congrès se réunit dès septembre 1814 et dure
jusqu’au mois de juin 1815. Il se déroule avec majesté
dans les fastes de la Cour d’Autriche où se rassemblent
90 représentants de princes souverains, 53 représentants
de princes médiatisés et de multiples délégués. Divertis¬
sements, cérémonies, bals fameux, réceptions grandioses
2. INSTITUTIONS INTERNATIONALES.
34 l’évolution du droit des gens

charment l’ennui de ces diplomates car les représentants


de tous les États ou principautés sont trop nombreux
pour avoir jamais été réunis en séance plénière. Le Congrès
de Vienne ne s’est jamais ouvert! Des commissions spé¬
ciales élaborent les textes et le rôle principal est dévolu
à une sorte de commission politique générale dite des
Huit Puissances, composée des quatre grands vainqueurs,
auxquels s’ajoutent la France, l’Espagne et aussi le Por¬
tugal et la Suède. Ce sont les huit qui signent le g juin 1815
l’Acte général.
L'ensemble que l’on désigne sous le nom de traités de
Vienne est une œuvre qui reprend la formule de l’équilibre
européen et qui s’efforce d’instaurer la stabilité du sys¬
tème continental. Cette stabiUté se fonde sur tm principe,
celui de la légitimité, eUe parait devoir être assurée, main¬
tenue et garantie par un directoire européen de cinq Puis¬
sances, les quatre grands États victorieux et la France.

29. — La Sainte Alliance. — Cette idée du Directoire


européen est la transposition sur le plan de la paix
retrouvée de la formule des coalitions qui ont réussi à
gagner la guerre. EUe apparaissait, dès le traité de Chau¬
mont, au cours de la campagne de France, le 9 mars 1814,
qui prévoyait dans son article V la possibilité de réunions
périodiques des Quatre Grands pour se concerter sur les
moyens de maintenir la paix et protéger leurs États. Des
précisions devaient être apportées par le traité mystique
de la Sainte AUiance, conclu le 26 septembre 1815. Dans
cet étrange document, l’empereur de Russie qui en est
l’inspirateur, l’empereur d’Autriche et le roi de Prusse
affirment qu’ils sont « unis par les hens d’une fraternité
véritable et indissoluble » et « délégués par la Providence »
pour gouverner leurs sujets. Le pacte de terminologie reli¬
gieuse est une sorte d’assurance réciproque. Ce système
de sécurité dynastique et de défense monarchique se com¬
plétera et se transformera en Pentarchie par l’adjonction
de la France de la Restauration et de l’Angleterre en
1818.
Ainsi, la formule antérieure de l’équihbre européen se
perfectionne-t-eUe et se caractérise-t-elle par trois traits :
l’équihbre dynamique disparaît pour faire place à un
équihbre statique, et c’est le statu quo européen. Ce statu
quo repose sur le principe monarchique et, sinon pour
l’Angleterre, sur la bcise de la monarchie providentielle.
Ce statu quo enfin est un équihbre garanti qui devra être
LE SIÈCLE DES CONGRÈS 35

maintenu par la force et par la coopération internationale


des cinq grands États.

30. — La fragilité de l’œuvre de Vienne. — Hommes


dEtat ou monarques fondateurs du système ont fait
œuvre vaine dans la mesure où ces solutions sont ana¬
chroniques. Ils ont fait fi des théories révolutionnaires et
des forces morales populaires. Ils les ont ignorées. En
outre, intervenant au lendemain d’un quart de siècle de
guerres européennes, ils n’ont songé qu’à l’Europe, ce qui
est une vue étriquée des choses.
Ces deux vices ne tardent pas à condamner l’œuvre de
Vienne. Les buts initiaux sont vite abandonnés, mais
demeure durable le besoin de paix et aussi la solution
préconisée pour le satisfaire, celle d’un Directoire de
grandes Puissances désireuses d’étudier en commun les
problèmes pohtiques qui se posent, afin de les résoudre
pacifiquement. A l’équilibre qui n’exclut pas les conquêtes,
pourvu qu’eUes soient partagées, se substitue donc — et
sur ce point la formule de 1815 durera près d’un siècle —
la consultation internationale. Par un étrange retour des
choses le procédé sera utüisé non pour maintenir, mais
pour détruire progressivement l’ordre de Vienne. Le siècle
diplomatique qui commence en 1815 pour finir symboh-
quement en 1914 sera ainsi celui de la consultation inter¬
nationale mais aussi celui du principe des nationalités,
antagoniste du principe de légitimité. Et enfin l’extraor¬
dinaire développement industriel et économique qui le
marque transformera profondément encore le droit inter¬
national, cependant que les problèmes se poseront de plus
en plus à l’écheUe du monde et non pas seulement de
l’Europe.

31. — Le Directoire international. — Imaginée par le


traité de Chaumont de 1814, la formule du directoire
international, reprise par le traité du 20 novembre 1815,
est utihsée jusqu’en 1822 dans le cadre de la Sainte-Al-
üance ; ensuite elle servira à assurer la paix et non plus le
statu quo monarchique.
Le système qui, primitivement, maintient en temps de
paix la Quadruple-AUiance, se transforme en 1818 au
Congrès d’Aix-la-Chapelle, au cours duquel la France
entre dans le concert des Quatre qui devient alors, selon
le mot de Mettemich, la « Pentarchie morale ». Un proto¬
cole secret affirme que tout État, c’est-à-dire tout souve-
36 l’évolution du droit des gens

rain qui ferait appel à la Pentarchie recevrait tout l’appui


matériel nécessaire.
Les premières mesures de cet ordre sont prises non par
la Pentarchie mais, sous l’influence de Metternich, par les
souverains allemands aux Congrès de Carlsbad et de
Vienne; elles sont destinées à réprimer des incidents qui
traduisent l’agitation libérale allemande.
L’intervention de la Pentarchie allait se marquer à
l’égard des révolutions libérales d’Espagne et des Deux-
Siciles. Elle fut décidée au Congrès de Troppau (octobre-
décembre 1820), malgré les réticences anglo-françaises.
Au Congrès de Laybach est adopté le principe de l’inter¬
vention autrichienne en Italie, dans le royaume des
Deux-Siciles (janvier 1821), au Congrès de Vérone
(octobre-décembre 1822) l’intervention de la France en
Espagne.
Ce congrès marque la dernière des réunions de la
Sainte-Alliance, l’intervention d’Espagne est la dernière
du système. L’Angleterre déjà s’est à demi retirée. La
politique d’intervention est désormais abandonnée. On n’a
pas osé la pratiquer en Amérique latine contre les colonies
espagnoles révoltées et le message du Président Monroe
du 2 décembre 1823 constitue un net avertissement aux
Puissances européennes.

32. — Concert international et congrès. — La Sainte-


AUiance, inactive depuis 1822, disparaît totalement avec
la mort d’Alexandre en 1825. Mais jusqu’en 1914 s’éche¬
lonnent toute une série de conférences internationales plus
ou moins larges ou étroites qui règlent le sort de l’Europe
ou même de territoires non européens. C’est un véritable
gouvernement international qui apparaît et se manifeste
d’une manière épisodique. Les grandes Puissances euro¬
péennes résolvent des problèmes poütiques, distribuent et
partagent des territoires. Elles sont ainsi amenées à enre¬
gistrer, parfois à garantir les effets du réveil àes nationa¬
lités qui aboutissent tantôt à la réalisation de l’indépen¬
dance nationale par voie de sécession, tantôt au regrou¬
pement géographique, dans le cadre de l’unité nationale.
L’intervention des Puissances se manifeste en particu¬
lier dans la dislocation de l’Empire ottoman entre 1825
et 1914. Ainsi la France, l’Angleterre, la Russie décident-
elles à Londres, en juillet 1827, de soutenir la cause des
Grecs révoltés. Elles garantissent le 3 février 1830 l’indé¬
pendance grecque et choisissent en 1832 un souverain à qui
LE SIÈCLE DES CONGRÈS
37

elles accordent leur appui financier. Les grands congrès


consacrent de nouvelles indépendances, parfois sous la
forme larvée et transitoire de l’État vassal. Ainsi, au len¬
demain de la ^erre de Crimée, le Congrès de Paris de 1856,
qui marque l’entrée de la Turquie dans le concert euro¬
péen, accorde la garantie internationale aux principautés
moldovalaques et à la Serbie. Le Congrès de Berlin de 1878
consacre l’indépendance du Monténégro, de la Serbie, de
la Roumanie et fait de la Bulgarie une principauté auto¬
nome et vassale qui, trente ans plus tard, proclame son
indépendance. A la fin du siècle, l’intervention européenne
se manifeste par les armes avec l’administration interna¬
tionale de la Crète. En 1913, le traité de Londres crée la
principauté d’Albanie.

33. — Les mécanismes de la consultation intematio"


nale. — Ce concert international est multiforme. Les
Conférences groupent un nombre variable de Puissances.
Cette plasticité et cette souplesse sont un reflet du carac¬
tère purement diplomatique des conférences. Cette plasti¬
cité découle de la notion de grandes Puissances et de
Puissances intéressées à la solution d’une question.
A Londres en 1830 se réunissent cinq grandes Puis¬
sances européennes. A Paris en 1856, aux Cinq grands
— l’Autriche,^ la France, la Grande-Bretone, la Prusse,
la Russie — s’ajoutent la Sardaigne et la Turquie qui ont
fait la guerre dite de Crimée contre la Russie, aux côtés
de la France et de la Grande-Bretagne, cependant que la
Prusse et l’Autriche demeuraient neutres. A la confé¬
rence de Londres de 1871 sur la mer Noire siègent les
mêmes Puissances, la Prusse étant devenue l’Allemagne
et l’Autriche l’Autriche-Hongrie, à la suite du compromis
de 1867. On retrouve la même liste d’États à la conférence
de Berlin de 1878. Mais, lorsqu’il s’agit de régler en 1885,
à Berhn, les problèmes posés par l’expansion coloniale en
Afrique, le cercle s’élargit sensiblement, malgré l’absence
de la Turquie, par la présence de la Belgique, de l’Espagne,
du Danemark, des Pays-Bas, du Portugal, de la Suède et
Norvège. Ce sont les Puissances européennes auxquelles
s’ajoutent d’ailleurs les États-Unis. C’est la même liste
que l’on retrouve à la conférence d’Algésiras de igo6. Les
invitations sont plus nombreuses encore en raison de
l’objet aux conférences de La Haye de 1899 et de 1907.
La plasticité des conférences ne se manifeste pas sim¬
plement par une hste variable de puissances participant
38 l’évolution du droit des gens

aux conférences, mais encore par l’existence de confé¬


rences de divers types. Aux grandes conférences diploma¬
tiques s’ajoutent parfois des conférences de caractère plus
limité ou plus technique. Les six grandes Puissances euro¬
péennes interviennent pour la solution du problème cré-
tois en 1896. Mais les Puissances protectrices ne sont que
quatre,l’Allemagne et l’Autriche-Hongrie s’étant retirées.
Ainsi existe la conférence d’ambassadeurs qui, en 1896 à
propos des affaires de Crète, en 1900 à Pékin, au lende¬
main de la guerre des Boxers, en 1912 et 1913» à. propos
des affaires balkaniques et notamment de la question
albanaise, joue le rôle d'un administrateur international,
parfois d’un législateur et même d’un législateur consti¬
tuant puisqu’elle fait naître à la vie juridique la Crète et
l’Albanie.

34. — Le bouleversement de l’Europe de Vienne. —


L’œuvre diplomatique de Vienne avait recherché la sta¬
bilité et affirmé la cristallisation des frontières.
Volontairement ignorées des diplomates de 1815, les
nationahtés allaient lutter et s’afarmer au cours du
XIX® siècle. Les mouvements révolutionnaires tentent
d’ébranler l’Europe de Vienne et éclatent en 1830 puis en
1848. Ils n’aboutissent qu’incomplètement aux unités
nationales.
La Révolution de 1830 se prolonge hors de France en
Pologne et en Belgique. Le mouvement polonais est maté
par les troupes russes, mais le soulèvement belge réussit.
Par un étrange retour des choses les cinq Puissances de
l’ancienne Pentarchie démoHssent une partie de l’œuvre
de Vienne en organisant, par la conférence^ de Londres
(4 novembre-20 décembre 1830) un nouvel Etat, la Bel¬
gique, lui accordant, pour diminuer la tension internationale
en Europe occidentale, le statut de neutrahté pennanente.
Les Révolutions de 1848 qui éclatent en Italie, en Au¬
triche (Bohême-Croatie-Hongrie), en AUernagne échouent
en tant que mouvements de libération nationale.
L’unité itaüenne se fait entre 1859 et 1871, grâce à l’aide
de Napoléon HL L’unité allemande est réahsée par la
direction prussienne et se cimente dans la guerre franco-
allemande de 1871.

35. — Le continent américain. — Les traités de


Vienne avaient consacré un ordre européen. Ils n’avment
concerné les autres continents que dans la mesure où des
LE SIÈCLE DES CONGRÈS 3g

Puissances européennes y possédaient des territoires colo¬


niaux. Les Etats-Unis n’avaient pas été invités à Vienne;
continent américain s’organise
en dehors de 1 Europe. Insurgées depuis 1809, les colonies
espagnoles et portugaises sont toutes devenues indépen¬
dantes en 1824 et aucune intervention européenne ne s’est
mamfestée en raison de la politique britannique et de la
déclaration du Président des États-Unis Monroe.
Le Nouveau Monde ne connaît pas d’ailleurs la paix
pohtique, les colonies devenues États indépendants
entrent en lutte. Prématurément lancé par Bolivar, le
mouvement du panaméricanisme n’aboutit au Congrès de
Panama de 1826 qu’à quelques formules vaines et ne se
développera qu’en 1889 sous l’impulsion des États-Unis.
Tenus à 1 écart en 1815, les États-Unis, après avoir en
1823 pns position contre les interventions européennes,
mteryiennent à leur profit sur le continent américain. Ils
acqmèrent le Texas, le Nouveau Mexique et la Californie
aux dépens du Mexique, puis l’Oregon par une convention
de parta^ avec l’Angleterre, achètent l’Alaska à la Russie
en 1867. Déjà, même au cours de la sanglante guerre civile
dite de Sécession, ils ont obtenu l’abandon de l’interven¬
tion française au Mexique. A la fin du siècle, ils inter-
^ennent contre l’Espagne. Le traité de Paris de 1898 fait
de Porto Rico une colonie de l’Union et de Cuba un État
indépendant, indépendant de l’Espagne et bientôt protégé
par les Etats-Unis. Une pohtique impériahste se développe
dans le Pacifique, elle se marque aux îles Hawaï, à Guam,
aux Phüippines, et la mainmise sur la zone du canal de
Panama.
Am début du xxe siècle les États-Unis participent avec
les Puissances européennes à l’expédition de Chine (1900) ;
ils sont en 1905 les arbitres du conflit russo-japonais. Ils
siègent en 1906 parmi les grandes Puissances qui règlent
à Algésir^ la Question marocaine.
L’élargissement du concert des Nations apparaît sym-
bohquement aux deux conférences de La Haye de 1899
et de 1907. A la première ne sont représentés, comme États
américains que le Mexique et les Etats-Unis, à la seconde
19 Etats représentent en outre l’Amérique latine. Deux
seulement représentent l’Afrique qui demeure un champ
d expansion coloniale pour l’Europe.
40 l’évolution du droit des gens

§ 2. — L’expansion coloniale.

36. — Europe et Afrique. — L’impérialisme des Puis¬


sances européennes refoulées hors d’Amérique se porte
sur d’autres continents. Le xix^ siècle est par excellence
le siècle des empires coloniaux.
A la formule de l’annexion coloniale largement prati¬
quée par la France, l’Angleterre, l’Allemagne et l’Italie
se substituent parfois d’autres procédés. Aux Républiques
boers vaincues après une guerre cruelle, la Grande-Bre¬
tagne offre la formule de l’autonomie dans le cadi-e fédéral
du Dominion d’Afrique du Sud (1910). En Tunisie (1881-
1883), puis au Maroc (1912), la France utilise le procédé
du protectorat qui, d’abord pratiqué à Madagascar (1890),
y est remplacé par l’annexion coloniale en 1896.
Un seul État indépendant apparaît en Afrique à la fin
du siècle, l’Abyssinie qui a maintenu son indépendance
contre les visées et les tentatives italiennes. L’Égypte,
vassale de la Turquie, est occupée militairement par la
Grande-Bretagne depuis 1882. Quant à l’État indépen¬
dant du Congo, qui a succédé en 1885 à l’Association inter¬
nationale Africaine, il est propriété personnelle du roi des
Belges avant de devenir, en 1908, une colonie de la Bel¬
gique. Entre les Puissances européennes avides de terri¬
toires les rivalités sont vives ; pour éviter ou diminuer les
incidents, une conférence se réunit à Berlin (15 no¬
vembre 1884-26 février 1885). Elle pose le principe de
l’occupation effective des territoires, instaure dans le bas¬
sin du Congo l’égalité économique et proclame la Uberté
de navigation sur les deux grands fleuves africains, le
Congo et le Niger. Divers traités de partages de zones
d’influence sont conclus par les Puissances.
Abandonné en Europe, le principe du partage en com¬
mun des territoires se trouve largement pratiqué en
Afrique et, après la conférence de Berlin, divers traités le
consacrent.
Rivales et avides dans leur chasse aux territoires, les
Puissances européennes ont une pohtique plus humaine
en abolissant l’esclavage dans les territoires conquis ou
dominés et en réprimant la traite négrière. Déjà, dans le
cadre du Congrès de Vienne, la déclaration du 8 fé¬
vrier 1815 condamnait cet odieux trafic. La répression
était organisée sur mer par divers traités, notamment la
convention de Londres de 1841. L’œuvre est parachevée
LE SIÈCLE DES CONGRÈS 41

par la conférence anti-esclavagiste de Bruxelles qui réunit,


en 1889, les Puissances européennes ayant des possessions
en Afrique et aboutit à une convention de 1890 qui permet
d’atteindre les négriers dans leurs repaires de la mer
Rouge et de Zanzibar.

37. — L’Europe et l’Asie. — L' expansion européenne


en Asie se manifeste d’une manière différente de celle pra¬
tiquée en Afrique. Certes la Russie conquiert un immense
empire en Caucasie et au Turkestan, met en valeur la
Sibérie et atteint la mer au delà des fleuves Amour et
Oussouri. L’Angleterre achève la conquête de l’Inde et les
deux ^ grands rivaux acceptent, par le traité du
31 août 1907, un partage d’influence en Perse.
Les conquêtes françaises sont de moindre portée. EUes
aboutissent à l’annexion de la Cochinchine et à des pro¬
tectorats sur l’Annam, le Cambodge, le Tonkin.
L’intervention des Puissances à l’égard de la Chine, qui
commence en 1840 avec la guerre de l’opium et qualifiée
généralement de break up of China, montre de nouveaux
procédés d’impérialisme. Les traités dits inégaux ouvrent
progressivenient au commerce occidental des fleuves et
des ports chinois. Les Puissances ne se lancent pas dans
la voie de la conquête territoriale, sauf à l’égard d’États
vassaux (Birmanie-Annam) et à part la curieuse formule
des cessions à bail qui sont obtenues en 1898. La politique
des Puissances occidentales manifeste une certaine unité
en Asie. Elle est symbolisée au cours du soulèvement
national chinois, appelé guerre des Boxers, par l’envoi
d’une véritable armée internationale composée de déta¬
chements européens, japonais et nord-américains (sep¬
tembre-octobre 1900).
Déjà d’ailleurs les Puissances européennes sont inter¬
venues (France, Allemagne, Russie) pour adoucir les
termes de la paix imposée à la Chine à Shimonoseki
(17 avril 1895) par un Japon victorieux. Cet empire nip¬
pon, prodigieusement occidentalisé en moins d’un demi-
siècle, triomphe dans la guerre russo-japonaise et pratique
à son profit une politique de conquêtes continentales. Il
instaure son protectorat sur la Corée (1905).
42 l'évolution . DU DROIT DES GENS

§ 3. — L’ère industrielle.

38. — L’influence des transformations économiques.


— Un des aspects essentiels de l’évolution de la civilisa¬
tion du XIX® siècle est le prodigieux développement de
l’industrie et du commerce.
La civilisation matérielle de 1815 ressemble beaucoup
à celle de 1789 et ne diffère par aucun trait essentiel de
celle de 1648. La civilisation du début du xx® siècle est
totalement et fondamentalement différente. La machine
à vapeur a non seulement transformé la vie industrielle et
posé toute une série de problèmes sociaux, mais elle a
révolutionné les transports.
i® Les chemins de fer se développent à partir de 1840,
Ils jouent rapidement un grand rôle dans les relations
internationales. Ils sont ainsi à la base de la transforma¬
tion de l’AUemagne en une unité pohtique, et des historiens
allemands ont pu, sur le ton lyrique, célébrer en eux « des
liens de mariage », des « anneaux nuptiaux ». Ailleurs, ils
sont les instruments des grandes expansions. Les trans¬
continentaux américains assurent, en Amérique du Nord,
le progrès économique et le développement industriel et
commercial. Ailleurs, les transcontinentaux sont les auxi-
Uaires et les moyens de l’expansion coloniale, comme le
Transsibérien, ou le fameux chemin de fer africain du
Cap au Caire. Débouchés pour la sidérurgie européenne,
moyen d’exploitation de mines diverses, ils sont dans cer¬
tains continents les moyens de l’impérialisme économique.
Avec les tentatives du Bagdad Bahn üs servent aussi les
impérialismes pohtiques.
2® La navigation à vapeur devait jouer un rôle de tout
premier ordre dans les transformations économiques.
Depuis 1838 et la première traversée de l’Atlantique par
im vapeur, les hgnes de navigation se créent et se déve¬
loppent. Le progrès technique commande rm régime libéral
des voies d’eau. Les grandes routes maritimes mondiales
sur lesquelles la vapemr apporte sécurité, vitesse et régu¬
larité doivent être libres au commerce de toutes les
nations, sans discrimination et sans péage. Le principe de
la hberté de la mer va s’étendre progressivement aux
portes mêmes des mers. Déjà le traité d’Andrinople, entre
la Russie et la Sublime Porte, de 1829, accorde aux
navires de commerce de toutes les nations la hberté de
passage, et le principe n’en variera plus. Après la confé-
LE SIÈCLE DES CONGRÈS
43

rence internationale de Copenhague, le traité du


14 m^s 1857 ouvre les voies d'accès de la Baltique, les
détroits danois. Les mêmes principes libéraux sont d'em¬
blée ceux qui commandent le régime juridique des canaux
transocéaniques. La Convention de Constantinople du
29 octobre 1888 consacre le principe de la libre navigation
commerciale dans le canal de Suez ouvert depuis 1869.
Le canal de Panama bénéficie d'un régime analogue qui
repose sur la double base de deux traités bilatéraux (traité
du 18 novembre 1901 entre U. S. A. et Grande-Bretagne;
traité du 18 novembre 1903 entre U. S. A. et Panama).
Sur les fleuves internationaux le principe de liberté de
navigation commerciale a été posé par le Congrès de
Vienne Im-même, dans son acte final du 9 juin 1815
(art. 108 à 116). L'internationalisation se développe tout
au long du xix® siècle; elle concerne le Rhin (règlement de
1815, Convention de Mayence de 1831, Convention de
Mannheim de 1868), l'Elbe (acte de Dresde de 1821),
l'Escaut et la Meuse (traité de Londres de 1839). Au len¬
demain de la guerre de Crimée la formule s’étend, perfec¬
tionnée d’ailleurs, au Danube (Congrès de Paris de 1856,
Congrès de Berhn de 1878, conférence de Londres de 1883).
La solution européenne est apphquée aux grands fleuves
africains du Congo et du Niger par la conférence de Berhn
de 1885.

39. — Évolution technique et institutions internatio¬


nales. — La ré^arité et la rapidité des transports ter¬
restres et maritimes entraînent un développement consi¬
dérable des correspondances. Imaginé en Angleterre en
1837, niis en service dans ce pays en 1840, le système du
timbre-poste est adopté par les divers pays. Après des
solutions bilatérales ou multilatérales, mais régionales, se
crée en 1874 une Union internationale qui prend en 1878
le nom d’Union Postale Universelle, en laquelle s’ex¬
prime symbohquement l’interdépendance des pays du
monde.
Déjà existe d’aiUeurs une autre organisation créée en
1865, l’Union Télégraphique Internationale, qui assure
l’utihsation internationale du télé^aphe électrique. La
radioélectricité, permettant l’utihsation de la radio¬
télégraphie, amenait en 1906 à la conférence de Berlin
la création de l’Union Radiotélégraphique Internationale.
On voit ainsi apparaître un hen étroit entre découvertes
techniques et institutions internationales.
44 l’évolution du droit des gens

Rapetissé, réduit, marqué par le développement d’une


civilisation matérielle quasi identique dans les grands
pays industriels, le monde de la deuxième moitié du
XIX® siècle crée, sous la pression de la technique, et plus
généralement d’une civilisation de la machine que
domine l'économie hbérale capitaliste, un ensemble d’ins¬
titutions internationales qualifiées d’Unions administra¬
tives, dont l’activité s’étend à de multiples domaines.
Ainsi apparaissent TUnion pour le système métrique
(1875), l'Union pour la protection de la propriété indus¬
trielle (1883), l’Union pour la protection de la propriété
littéraire et artistique (1884), l’Union sur les chemins de
fer (1890), etc.

§ 4. — La reclierche de la paix.

40. — Le siècle pacifique. — Un tel développement


économique ne peut se poursuivre que dans la paix ou
tout au moins avec l’absence de grandes guerres.
Le xix® siècle, ou la période 1815-1914, peut ainsi être
considéré comme une période relativement paisible. Les
guerres qu’il connaît sont en général courtes. Les plus
grandes et les plus cruelles sont l’une une guerre civile à
l’échelle déjà gigantesque des États-Unis, l’autre la
cruelle guerre des Boers qui se déroule pendant près de
trois ans (22 octobre 1899-31 mai 1902). A la guerre, les
techniques modernes apportent d’ailleurs de terribles
moyens de destruction. C’est donc encore sous la pression
de la technique que s’organise, au cours du xix® siècle,
un mouvement de lutte contre la guerre.
Les Puissances s’efforcent d’éviter la guerre par une
série de procédures et, dans la mesure où la guerre éclate
malgré tout, elles tentent au moins par une réglementa¬
tion internationale de l’humaniser.

41. — Les Conférences de La Haye. — La pratique


des grandes réunions internationales plusieurs fois utih-
sée au cours du xix® siècle pour la solution de questions
politiques est reprise en 189g et en 1907 dans les confé¬
rences de La Haye. La première se réunit sur l’initiative
du tsar Nicolas II et groupe 26 Puissances, pour la plupart
européennes. Elle aboutit à la signature de trois conven¬
tions, dont l’une sur la solution pacifique des différends
internationaux fut votée à l’unanimité. La conférence
LE SIÈCLE DES CONGRÈS 45

adopta également trois déclarations tendant à humaniser


la guerre sur terre.
La conférence parut remporter un tel succès que la délé¬
gation française émit le vœu qu’elle fût suivie d’autres
réunions semblables pour le plus grand bien de la civilisa¬
tion humaine. Ainsi fut proposée par les États-Unis, dès
1904, le réunion d’une nouvelle conférence, mais la guerre
russo-japonaise amena à remèttre le projet à plus tard et
le tsar devait reprendre l’initiative, comme pour la pre¬
mière, en 1907. La seconde conférence, qui groupa
44 États, dont beaucoup de Puissances non européennes,
aboutit à la signature de 13 conventions, d’une déclara¬
tion affirmant le principe de l’arbitrage obligatoire et à
l’adoption de quatre vœux.
Les conférences de La Haye ont eu sur le plan pratique
des résultats qui s’avérèrent finalement limités, mais elles
exprimèrent un idéal pacifiste et posèrent pour la pre¬
mière fois devant l’opinion mondiale et sur le plan diplo¬
matique le problème de la limitation des charges militaires
et de l’arrêt de la ruineuse course aux armements. Sur
leurs deux thèmes essentiels, l’humanisation de la guerre
et le développement des procédures pacifiques, elles
marquent une importante étape dans l’évolution du droit
international.

42. — Les procédures pacifiques. — L’idée de recou¬


rir à des procédures pacifiques pour le règlement des litiges
internationaux est ancienne. Le Moyen Age, dans le cadre
de la commimauté de l’Europe chrétienne, avait connu
ainsi la médiation ou l'arbitrage. Mais ces procédures
avaient disparu avec le développement des grandes monar¬
chies bureaucratiques. Toutefois, à la fin du xviii® siècle,
l’arbitrage réapparaît sous la forme moderne de l’inter¬
vention d’ime commission mixte, dans le cadre du traité
anglo-américain du 19 novembre 1794 (appelé traité Jay,
du nom du négociateur américain) destiné à régler les
litiges entre les États-Unis et leur ancienne mère patrie.
Une longue éclipse devait encore se produire, et le xix®
siècle semble oublier l’arbitrage, malgré les efforts de mul¬
tiples sociétés pour la paix qui se développent dans les pays
anglo-saxons. Mais, à partir de 1872, de graves con¬
flits, qui auraient pu conduire à la guerre, vont être réglés
pacifiquement. Trois affaires sont célèbres. L’une oppose
la Grande-Bretagne aux États-Unis à propos des dom¬
mages causés au cours de la guerre de Sécession par le
46 l’évolution du droit des gens

croiseur sudiste Alabama armé dans les ports britanniques.


Elle est réglée en 1872. Une seconde surgit également
entre les mêmes États, à propos des phoques à fourrures
de la mer de Behring, et la sentence est rendue en 1893.
La troisième est relative à la frontière des Andes, entre la
Répubhque Argentine et le Chih; eUe est tranchée en 1902.
Déjà, à ce moment, la première conférence de La Haye
a tenté d’organiser une cour permanente d’arbitrage. Il
s’agit simplement d’ailleurs d’une hste d’arbitres et du
cadre virtuel de tribunaux éphémères. Il n’y a de perma¬
nent que le greffe. Mais, à diverses reprises, les États choi¬
sissent sur la hste et la « Cour » put s’enorgueiUir de réus¬
sites dans des cas difficiles comme l’affaire des déserteurs
de Casablanca entre la France et l’Allemagne Jeu 1908),
l’affaire des pêcheries de l’Atlantique entre les États-Unis
et la Grande-Bretagne (1910).
A côté de la solution juridique de l’arbitrage prennent
place d’aiUeurs les procédures de médiation ou de conci¬
liation. Les conférences de La Haye prévoient des Com¬
missions internationales d’enquête. L’une d’eUes, consti¬
tuée à propos de l’incident du Dogger Bank, au cours de
la guerre russo-japonaise, devait jouer un rôle des plus
utiles.

43. — L’humanisation de la guerre sur terre. —


L’atroce vision des blessés et des mourants râlant sur le
champ de bataiUe de Solférino avait bouleversé le Suisse
Henri Dunant. Il réussit à émouvoir l’opinion suisse et la
Convention de Genève de 1864 ha seize États qui s’enga¬
geaient à respecter sur les champs de bataihe terrestre
l’emblème de la Croix Rouge. A la fin du siècle, presque
tous les pays du monde avaient adhéré à la Convention,
complétée en 1868.
La réglementation des moyens d’attaque et de défense
marqua, au cours du xix® siècle, de lents progrès. La
déclaration de Saint-Pétersbourg de 1868 interdit les pro¬
jectiles explosifs de petit cahbre. Et si la conférence de
Bruxelles de 1874 échoue, la première conférence de
La Haye devait dans trois déclarations interdire l’emploi
des projectiles répandant des gaz asphyxiants ou délétères
ou s’épanouissant dans le corps humain, et — pour une
durée de cinq ans — le lancement de projectiles du haut
des ballons. Cette dernière prohibition est reprise par la
seconde conférence qui, par la convention n® 4, codifiait
l’ensemble des lois et coutumes de la guerre sur terre.
LE SIÈCLE DES CONGRÈS
47

44. — La réglementation de la guerre sur mer. —


Sept conventions signées au cours de la seconde confé¬
rence de La Haye concernent la guerre sur mer. L'une
d’elles, la Convention n» 13 est relative aux droits et aux
devoirs des puissances neutres. Elle complète sur ce point
l’oeuvre du Congrès de Paris de 1856 qui a posé les prin¬
cipes fondamentaux de la neutralité dans la guerre mari¬
time. Le Congrès de Paris avait adopté ime réglementa¬
tion très favorable aux neutres. Il avait interdit la guerre
de course qui causait de très grands dommages aux pavil¬
lons neutres, posé le principe de l’insaisissabilité de la
marchandise neutre sous pavülon ennemi et de la mar¬
chandise ennemie sous pavillon neutre, sous réserve de la
notion de contrebande de guerre. Enfin il prohibait la
théorie du xviii® siècle du blocus de papier ou blocus de
cabinet en exigeant pour la validité juridique du blocus
son effectivité navale.
La Convention n® 12 signée à La Haye en 1907 achevait
ce mouvement en prévoyant une Cour internationale des
Prises, et la conférence navale de Londres de 1909 devait
poser les règles à suivre devant cette cour, mais eUe ne fut
pas ratifiée par de nombreux États.
L’élaboration d’un règlement relatif aux lois et cou¬
tumes de la guerre maritime constituait le quatrième vœu
a-dopté par la conférence. C’eût pu être le thème de la troi¬
sième conférence dont la convocation était envisagée pour
l’année 1915.
Mais auparavant la Première Guerre mondiale éclate et,
au siècle de paix relative, succèdent sur terre, sur mer et
même dans les airs des hostihtés jusqu’alors sans précé¬
dent.
CHAPITRE III

LES TENTATIVES D’ORGANISATION


DE LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE
DEPUIS 1919

§ ler. _ Après la Première Guerre mondiale.

45. — La Conférence de la Paix. — Après plus de


quatre années de guerre, les Empires centraux capitulent
successivement à l’automne de 1918.
La Conférence de la Paix, qui se réunit à Pans en 1919,
rappeUe par plus d’un trait le Congrès de Vienne. EUe
utilise, sous les apparences du principe de 1 unammdé,
la distinction traditionneUe du xix® siècle entre grandes
Puissances et petits États. Pendant six mois, une cin¬
quantaine de commissions techniques étudient les pro¬
blèmes. Elles tiennent plus de i 600 séances et tous les
États invités y participent. Mais la réahte des décisions
appartient aux principales Puissances alliées et associées
(États-Unis, Empire britannique, France, Italie, Japon)
qui représentent, au lendemain de la victoire, le nouveau
directoire mondial et qui siègent dmis des conseils res¬
treints, Conseil des Quatre, Conseil des Cinq, Conseil
des Dix Ces décisions sont entérinées par les Puissances
à intérêts limités qui ont participé à la guerre et par les
États en formation. Tout est réglé en outre sans la parti¬
cipation des États vaincus. -1,
Cinq principaux traités sont signés, à Versailles avec
TAlleinagne le 28 juin I9^9> ^ Saint-Germain avec 1 Au-
triche le lo septembre, à Neuilly avec la Bulgane le
27 novembre 1919, à Trianon avec la Hongrie le
LES TENTATIVES D’ORGANISATION 49

4 juin 1920. Le traité de Sèvres du 10 août 1920 avec la


Turquie est remplacé, à la suite de la victoire de Musta¬
pha Khémal sur les Grecs, par le traité de Lausanne
de 1923.
Les traités consacrent des remaniements territoriaux
particulièrement importants, disloquent l’Autriche-Hon-
grie, satisfont les aspirations nationales en Alsace-Lor¬
raine, dans le T5T0I italien par rattachement, ailleurs par
création ou résurrection d’États, la Pologne, la Tchécoslo¬
vaquie, les États baltes. Les textes organisent la mise en
œuvre du principe juridique des réparations.

46. — La création de la S. D. N. — La nouveauté


essentielle des traités de paix est la création d’une orga¬
nisation politique internationale constituée pour le main¬
tien de la paix entre ses membres, sur la base du statu quo
poUtique et territorial, la Société des Nations.
En eUe s'incarne le vœu pieux des combattants de
« la dernière des guerres » et prennent forme les concep¬
tions doctrinales d’une organisation internationale dont
le mouvement est très lointain, tant en Europe continen¬
tale que dans le monde anglo-saxon.
C’est la conception anglo-saxonne, d’ailleurs, qui est à
la base du projet de pacte de la Société des Nations dont
le principe figurait comme dernier point du Message au
Congrès des États-Unis du Président Wilson, du 8 jan¬
vier 1918.
Les conceptions continentales, défendues par la France
et ritahe, ne sont point retenues à cette époque.
L’organisme qui se crée à Genève et qui groupe un
grand nombre d’États, Puissances victorieuses. États
neutres et bientôt les États vaincus au cours de la Grande
Guerre, s’efforce d’organiser sur une base juridique et
rationnelle les relations internationales. La construction
n’est point sans mérites. L’existence d’une Assemblée où
sont représentés tous les membres de la société disposant
chacun d’une voix et d’un Conseil, progressivement élargi
d’ailleurs où siègent les grandes Puissances et à tour de
rôle d’autres États, permet de résoudre d’une manière
satisfaisante l’irritant problème de l’égalité des États sur
lequel avait buté en 1907 la création d’une Cour interna¬
tionale. Précisément, dans le cadre de la S. D. N., fonc¬
tionne depuis 1922 une Cour permanente de justice inter¬
nationale, dont le statut prévu par l’article 14 du Pacte
a été approuvé le 13 décembre 1920. Les réimions
50 l’évolution du droit des gens

annuelles de l’Assemblée, à Genève, au mois de septembre,


les réunions plus fréquentes du Conseil semblent impri¬
mer aux relations internationales le caractère de régularité
et de publicité qui leur faisaient défaut. Par ailleurs,
souffle « l’esprit de Genève », il anime im certain nombre
d’hommes d’État européens, il condamne le recours à la
guerre que le Pacte pourtant ne prohibe pas et qu’il se
borne à réglementer sous l’angle des procédures.

47. — Les faiblesses de la S. D. N. — L’organisation


de la S.D.N. n’est pas sans imperfections. EUe demeure
hée à la victoire de 1918 et se trouve dominée par les Puis¬
sances victorieuses, essentiellement la France et la Grande-
Bretagne. Par un étrange paradoxe la S. D. N., qui a été
essentiellement l’œuvre du Président Wilson, ne compte
pas parmi ses membres les États-Unis dont le Sénat n’a
point ratifié à la majorité constitutionnelle le traité de
Versailles. C’est l’Allemagne qui prend, ultérieurement,
au Conseil un siège permanent de grande Puissance laissé
vide par les États-Unis.
Un problème se pose, qui pèsera pendant de longues
années sur le destin de la S. D. N., celui du statut politique
et territorial de l'Europe. L’article 10 du Pacte pose le
principe du statu quo pohtique et territorial, mais l’ar¬
ticle 19 semble impüquer, sans en prévoir les procédures
de règlement, la possibihté d’un révisionnisme. Puissances
victorieuses et puissances vaincues s’affrontent ainsi à
Genève, sans résultats.

48. — Les problèmes de la guerre et du désarmement.


— Les premières années de la vie de la S. D. N. sont consa¬
crées au perfectionnement de l’institution, au dévelop¬
pement de l’esprit' pacifique. Le Pacte de Locamo du
10 octobre 1925 entre l’Allemagne, la Belgique, la France,
la Grande-Bretagne, l’Itahe, la Pologne, la Tchécoslova¬
quie assure le statu quo territorial en Europe occidentale
et organise des procédures pacifiques dans les rapports de
l’Allemagne et de ses voisins. Dû à la diplomatie des
hommes d’État français et allemand comme Briand et
Stresemann, il semble se substituer à la paix de Versailles
pour réaliser un accord librement consenti. Il efface la
mauvaise impression de l’échec du Protocole de Genève
de 1924 qui n’a pas été ratifié et qui, bouchant les « fis¬
sures » du Pacte, développait les procédures pacifiques de
règlement des litiges internationaux.
LES TENTATIVES D’ORGANISATION 5I

Ce mouvement pacifique semble couronné de succès en


1928. En effet, deux textes diplomatiques sont établis cette
année-là. Le premier en date est le Pacte Briand-Kellogg
du 27 août 1928, ou Pacte de Paris, par lequel renoncent
solennellement à la guerre en tant qu’instrument de poli¬
tique nationale le Reich allemand, les États-Unis, la Bel¬
gique, la France, l’Empire britannique, l’Italie, le Japon,
la Pologne, la Tchécoslovaquie. D’autres États adhéreront
ultérieurement à cet instrument. Le recours à la guerre est
condamné pour les règlements des htiges entre Etats. Sur
le plan jmidique l’iimovation est capitale. La compétence
de guerre n’est plus un élément essentiel du pouvoir éta¬
tique. Les procédures pacifiques qui se substituent au
recours à la guerre sont précisées, décrites et organisées
un mois plus tard dans un texte intitulé Acte général
d’arbitrage signé à Genève le 26 septembre 1928 et qui
constitue un véritable code de procédures internationales
concernant, malgré son nom, non seulement l’arbitrage
mais encore la concüiation et le recours juridictionnel. Le
vieux rêve éternel des penseurs et des hommes pacifiques
semble prendre corps, mais ce n’est à vrai dire qu’une
apparence, comme l'avenir le prouve.
Les articles 8 et 9 du Pacte avaient posé le principe de
la ümitation des armements, et l’obhgation d’une réduc¬
tion de leurs armements avait été imposée par les traités
de paix aux Puissances vaincues, notamment à l’Alle¬
magne. Plusieurs commissions siégèrent sans succès à
Genève depuis 1920, et surtout depuis 1924 pour préparer
une conférence du désarmement. La dernière d’entre elles,
constituée après l’échec du Protocole de Genève, piétina
longtemps mais son échec devint patent lorsque l’iUle-
magne s’en retira le 14 octobre 1933, au nom de l’égahté
des droits. A vrai dire, à cette date, la S. D. N. était
déjà en état de crise.

49. — La crise de la S. D. N. — La S. D. N. avait


pu régler quelques conflits internationaux d’importance
secondaire, l’affaire de Vilna entre la Pologne et la Lithua¬
nie en 1920, la question des îles d’Aland entre la Finlande
et la Suède en 1921. A la voix d’Aristide Briand, alors
président du Conseil de la S. D. N., s’étaient tus les
canons et les mitrailleuses lors du conflit de frontière qui
avcdt éclaté en 1925 entre la Bulgarie et la Grèce, mais la
Société, déjà timide dans l’affaire de Corfou en 1923,
demeure impuissante dans le conflit sino-japonais qui
52 l’évolution du droit des gens

éclate en 1931 à la suite de l’agression japonaise, aboutit


à la création de l’État du Mandchoukouo sous tutelle japo¬
naise (mars 1932) et au départ du Japon de la S. D. N.
le 27 mars 1933. L’impuissance de Genève n’est que par¬
tiellement masquée par quelques autres succès dans le
règlement de divers litiges, celui de Léticia entre la Colom¬
bie et le Pérou qui éclate le septembre 1932 et auquel
met fin un traité de mai 1934, sous les auspices de la
Société ; celui du Chaco Boréal entre la Bolivie et le Para¬
guay à propos duquel est constituée en 1935 une commis¬
sion internationale et que termine en septembre 1938
l’accord des deux États en litige.
A cette date, les échecs de l’organisation de Genève sont
multiples. Le Japon en 1937 a repris sa politique belli¬
queuse en Chine et occupe une partie du territoire chinois.
Au cours du conflit italo-éthiopien l’Assemblée déclare
bien l’Italie agresseur, par une résolution unanime d’oc¬
tobre 1935, mais l’apphcation des sanctions demeure ano¬
dine, dépourvue de toute portée réelle et n’empêche pas
la conquête de l’Éthiopie. L’Italie quitte l’organisation le
Il décembre 1937. La guerre civile d’Espagne, qui a
éclaté en 1936, échappe à toute intervention de la Société
des Nations. La règle de Genève semble être la passivité
devant les agressions et les violations du droit des gens
que multiplient les nations fascistes ; dénonciation du
Pacte de Locamo par l’Allemagne, occupation de la rive
gauche du Rhin, Anschluss, invasion de la Tchécoslova¬
quie en mars 1939, affaire de Dantzig. Les démissions de
la S. D. N. se sont alors multipliées et elles n’ont été que
partiellement compensées par l’entrée de l’U. R. S. S. en
1936 comme membre permanent du Conseü. Au moment
où éclate la guerre de Finlande, l’U. R. S. S. est exclue
de la S. D. N. en décembre 1939, mais déjà a éclaté la
seconde guerre mondiale.
Paralysée par l’impuissance des grandes nations dém(>
cratiques européennes, l’absence des États-Unis et la fai¬
blesse de ses procédures internes, la Société des Nations
a ainsi échoué dans sa tâche de maintien de la paix inter¬
nationale dans l’ordre et la justice.

§ 2. — La Seconde Guerre mondiale


et l’évolution internationcde depuis 1945.

50. — Reconstruction. — La réahté pohtique interna¬


tionale n’était plus à Genève depuis 1035 et même aupa-
LES TENTATIVES D'ORGANISATION 53
ravant. La résistance à la domination nazie et au bloc des
empires fascistes allait se marquer, au cours de la seconde
guerre mondiale, non pas dans les procédures institution¬
nelles mais sur les champs de bataüle.
Le rêve d’une organisation internationale politique
n’était point pour autant abandonné. Au cours même de
la guerre, la Charte de l’Atlantique du 14 août 1941 posait
un certain nombre de principes sur lesquels le Président
des États-Unis, puissance alors neutre, et le Premier
ministre de Grande-Bretagne déclaraient fonder « leurs
espoirs en un avenir meilleur pour le monde ». Exposés en
huit paragraphes, ces principes se résumaient en l’auto¬
détermination des peuples, l’accès égal aux matières pre¬
mières, la collaboration internationale, la sécurité, la
hberté des mers et enfin le désarmement.
A ces principes adhéraient solennellement, le jan¬
vier 1942, les Nations en lutte contre les Puissances fas¬
cistes souscrivant la Déclaration des Nations Unies « enga¬
gées dans une lutte en commun contre les forces sauvages
et brutales qui cherchent à subjuguer le monde ». Les
moyens de mettre en œuvre ces principes devaient être
précisés en 1943 à la conférence de Moscou où était
reconnue la nécessité de créer, après la victoire, une nou¬
velle organisation internationale. Étudiées à l’automne
de 1944 à Dumbarton Oaks, précisées à la conférence de
Yalta en février 1945, les grandes hgnes de la nouvelle
organisation devaient être étabhes en 1945 à la Confé¬
rence de San Francisco (25 avril-26 juin 1945), au cours
de laquelle était créée l’Organisation des Nations Unies,
par un traité signé le 26 juin et qui entrait en vigueur le
24 octobre 1945.
La seconde guerre mondiale avait alors pris fin. L’Alle¬
magne avait capitulé sans condition les 7 et 8 mai 1945.
Le Japon, sur deux villes duquel avaient été jetées par
l’aviation nord-américaine des bombes atomiques, s’était
rendu inconditionnellement le 14 août.
La période de l’après-guerre se caractérise par des trans¬
formations profondes de la vie internationale.
Bien que les thèmes en soient divers et enchevêtrés on
peut schématiquement en dégager quatre principaux ;
— le rétablissement de la paix;
— l’existence d’un affrontement dit Est-Ouest;
— la décolonisation et la création de nouveaux États;
— la multiplication des organisations internationales.
54 l’évolution du droit des gens

A. — Le rétablissement de la paix.

51. — Le rétablissement imparfait. — La conclusion


des traités de paix mettant fin à la seconde guerre mon¬
diale ne s’effectue que lentement et d’une manière par¬
tielle.
Des traités de paix sont conclus en Europe en
1947, mais ils ne concernent pas le principal protagoniste
de la guerre. La paix est rétablie entre les diverses
Nations qui ont lutté contre l’Allemagne nazie et ses
alliés, les traités de février 1947 concernent ceux-ci : Bul¬
garie, Finlande, Hongrie, Italie, Roumanie. Le traité de
paix avec le Japon n’est conclu qu’en septembre 1951 et
l’U. R. S. S. n’y est point partie.
Les négociations avec l’Autriche pour la conclusion
d’un traité qui rend à celle-ci le statut étatique traînent
en longueur et n’aboutissent qu’en mai 1955.
Le traité avec l’Allemagne n’est pas conclu. Au lende¬
main de sa capitulation inconditionnelle, l’Allemagne est
gouvernée par le Conseil de contrôle allié où siègent les
Quatre Puissances : États-Unis, France, Royaume-Uni,
U. R. S. S. En attendant une fixation définitive des fron¬
tières, l’Allemagne est découpée en zones d’occupation et
divisée en une Allemagne dite orientale, une Allemagne
dite occidentale cependant que des territoires de Prusse
orientale sont transférés à l’U. R. S. S. par la conférence
de Postdam (17 juület-2 août 1945) qui, en attendant le
tracé définitif des frontières occidentales de la Pologne,
remet à l’administration de l’État polonais les « territoires
ex-allemands » à l’est d’une ligne partant de la Baltique
et suivant le cours de l’Oder et de la Neisse.

52. — Les problèmes allemands. — Au statut d’occu¬


pation de l’AUemagne succède la création de deux États
allemands. L’année 1948 voit s’affirmer l’opposition entre
les Puissances occidentales et l’U. R. S. S. A la réforme
monétaire décidée le 19 juin, pour la zone d’occupation
par les Occidentaux, l’U. R. S. S. réplique par le blocus
de Berlin jusqu’alors soumis à une occupation quadripar¬
tite. Le blocus dont un puissant pont aérien établi par les
États-Unis réduit l’ef&cacité est levé en mai 1949, mais
Berlin demeure simplement soumis à un statut provisoire,
vestige de la formule primitive.
Les Occidentaux créent, au cours de l’année 1949,
LES TENTATIVES D’ORGANISATION 55
un État allemand, la République fédérale allemande et
nouent avec elle des relations diplomatiques placées sous
le signe de l’égalité des États. L’U. R. S. S. répKque par
la création de la République démocratique allemande en
octobre 1949,
^ La réunification de l’Allemagne pose un problème qui
n est toujours pas résolu. Le problème de Berlin se pose
également, l’ancienne capitale se trouve divisée en deux
zones, Berlin-Ouest et Berlin-Est, et Berlin est séparé de
la République fédérale cependant que le gouvernement de
la République démocratique siège à BerUn-Est.

B. — L’affrontement Est-Ouest.

— La rivalité soviéto-américaine. — L’année 1947


voit l’échec des conférences entre alliés, à Moscou en
mars, à Londres en décembre. La doctrine Truman pro¬
clamée en mars 1947 affirme l’aide américaine à la Grèce
et à la Turquie qui échappent à l’influence soviétique.
CeUe-ci se marque sur la Tchécoslovaquie par l’instaura¬
tion d’un régime communiste (février 1948) et sur la
Pologne par le renforcement du contrôle.
Autour des États-Unis et du Canada se constitue le
4 a's^ 1949 alliance mihtaire dite Pacte atlantique
destinée à faire contre-poids à l’influence soviétique en
Europe centrale.
Les États-Unis cherchent à réarmer l’Allemagne fédé¬
rale et celle-ci après l’échec d’une formule internationale
dite Communauté européenne de défense rejetée par la
France devient membre de l’AUiance atlantique (accords
de Paris d’octobre 1954).
L’Union soviétique crée alors une organisation mili¬
taire symétrique de l’O. T. A. N., en groupant les forces
mihtaires des États socialistes dans le Pacte de Varsovie
(14 mai 1955).

54. — La guerre de Corée — L’affrontement des deux


plus grandes Puissances ne se hmite pas à l’Europe, il se
manifeste plus nettement encore en Asie.
Le régime du Maréchal Tchang Kaï Tchek s’effondre
mihtairement en 1949; à la fin de l’année la Chine conti¬
nentale est au pouvoir de Mao Tsé Toung et la République
populaire de Chine qui est proclamée est reconnue par un
certain nombre d’Etats non socialistes cependant que
56 l’évolution du droit des gens

Tchang Kaï Tchek, soutenu par les États-Unis, s’installe à


Formose. La Chine communiste n’est pas admise à
rO. N. U. où continue à siéger la Chine du gouvernement
Tchang Kaï Tchek.
Le 25 juin 1950, les troupes nord coréennes franchissent
la limite du 38® parallèle qui sépare la Corée en deux zones,
l’une sous influence soviétique au nord, l’autre sous
influence américaine. Les troupes américaines résistent à
l’invasion nord-coréenne et cette intervention se fait sous
le drapeau des Nations Unies. La guerre au coms de
laquelle des troupes chinoises apportent leur appui aux
Nord-coréens prend fin par un armistice étabü en 1953
après de longues négociations et qui consacre le statu quo
ante.
La diplomatie nord américaine que dirige Foster DuUes
met en place une organisation défensive : le pacte de Manille
ou traité de l’Asie du Sud-Est (8 septembre 1954); Elle
le complète par le traité de Bagdad (février 1955) qu’affai-
bht en 1959 la défection de l’Irak et qui devient le
C. E. N. T. O. (central treaty organization). Mais l’Asie et
le Moyen-Orient sont également le théâtre d’une transfor¬
mation politique capitale, l’émancipation des peuples colo¬
nisés.

C. — La décolonisation et la création de
NOUVEAUX États.

55. — Moyen Orient et Asie. — La période de


l’après-guerre se caractérise par les créations multiples
d’Etats indépendants. C’est le cas des États anciennement
mandats A, comme la Syrie, le Liban, la Transjordanie
puis, après le retrait des troupes britanniques, de la Pales¬
tine dont une partie devient l’État d’Israël. Le principe
d’auto-détermination qui trouve dans l’article i®^, § 2,
de la Charte des Nations Unies une base juridique aboutit
à provoquer la dislocation des empires coloniaux. Au
Commonwealth britannique succède en avril 1949 le Com-
monwealth tout court qui compte parmi ses mernbres
indépendants, à côté des dominions traditionnels, l’Inde
et le Pakistan, États créés par l’India independence Bill
du 18 juillet 1947, et Ceylan (4 février 1948). De lui s’est
plus complètement détachée la Birmanie (traité anglo-
birman du 17 octobre 1947).
L’Empire néerlandais disparaît en Asie. Les Indes néer-
LES TENTATIVES D’ORGANISATION 57

landaises obtiennent à la Conférence de la Table Ronde de


La Haye, le 27 décembre 1949, le transfert de la souverai¬
neté et deviennent les États-Unis, puis la République
unitaire d’Indonésie. La domination française disparaît à
son tour ou s’atténue en Indochine.
Aux États sous protectorat français est offert, tout
d’abord, le statut particulier d’État associé au sein de
l’Union française (Laos, 19 juillet 1949, Cambodge
8 novembre 1949). La situation est plus complexe encore
au Vietnam en proie à la guerre civile et à l’intervention
française. La conférence de Genève (26 avril-21 juil¬
let 1954) aboutit à un cessez-le-feu et à un règlement poli¬
tique et militaire qui consacre l’indépendance des divers
États et la division du Viêt-Nam. Le mouvement d’indé¬
pendance des peuples colonisés s’intensifie et s’organise à
la conférence de Bandoeng (avril 1955).

56. — Les indépendances africaines. ;— L’Afrique


avait été le continent dans lequel la politique coloniale
s’était manifestée le plus nettement. L’émancipation
gagne ce continent où se multiplient en quatre années les
indépendances nationales.
Les protectorats français du Maroc et de la Tunisie dis¬
paraissent en 1956. L’ancienne Gold Coast britannique
augmentée du Togo sous tutelle britannique devient, en
mars 1957, l’État indépendant du Ghana. Successivement
deviennent indépendants divers territoires d’Afrique noire
ayant antérieurement le statut colonial.
La Guinée choisit l’indépendance en 1958 et les terri¬
toires d’outre-mer français ne restent pas longtemps d^s
le cadre de l’autonomie interne prévue par la Constitution
française de 1958. Ils deviennent tous indépendants en
i960, de même que le Togo et le Cameroun sous tutelle
française.
Le Nigéria en i960, la Sierra Leone et le Tanganyka en
1961 deviennent également indépendants.
Le mouvement gagne par-delà les territoires administrés
par le Royaume-Uni et la France le Congo belge dont l’in¬
dépendance est proclamée en i960 mais où la décoloni¬
sation s'opère dans le trouble. C’est d’une manière san¬
glante, après une guerre qui dure près de huit ans, que
l'Algérie devient indépendante en 1962.
Quelques territoires africains conservent encore le sta¬
tut colonial mais ils constituent désormais une exception.
Ainsi se marque une transformation politique profonde
58 l’évolution du droit des gens

car l’Afrique en 1914 ne compte comme États indépen¬


dants que l’Éthiopie et le Libéria, l’Afrique du Sud étant
un dominion. En 1939, l’Égypte s’ajoute àcettehste, étant
devenue un État indépendant en 1936 et étant entrée à la
S.D.N. Mais la conquête fasciste en a momentanément
effacé, en fait sinon en droit, l’Éthiopie indépendante.
Actuellement au contraire l’Afrique compte près de
quarante États indépendants.
Le phénomène de « décolonisation » comme l’on dit est
particuhèrement sensible en Afrique dans la mesure
même où ce continent a été le principal champ d’action
des poHtiques coloniales.
Mais la décolonisation dépasse de nos jours l’Afrique.
Une résolution de l’O. N. U. du 14 décembre i960
condamne d’une manière générale les pohtiques colo¬
niales : la décolonisation devient, sinon une obhgation
juridique, du moins un principe international.

D. — La multiplication
DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES.

57. — L’aspect politique. — En même temps que se


développe ainsi un mouvement de morcellement de la
communauté internationale on constate ailleurs des ten¬
tatives de regroupement. L’Union panaméricaine se trans¬
forme par l’acte de Chapultepec du 6 mars 1945 et surtout
par la charte de Bogota du 30 avrü 1948 et devient l’Orga¬
nisation des États américains. Dans le Proche-Orient s’est
constituée le 22 mars 1945 la Ligue Arabe. Mais c’est en
Europe que se multiphent les tentatives de regroupement,
plus exactement en Europe occidentale. Le Pacte de
Bruxelles du 17 mars 1948 renforce les hens culturels, éco¬
nomiques et mihtaires des trois pays du Bénélux, de la
Grande-Bretagne et de la France. Sur le plan économique,
l’Organisation européenne de coopération économique
rassemble à partir du 16 avril 1948 les pays européens
bénéficiaires du Plan d’aide américaine, appelé plan Mar¬
shall. Le rêve d’une Union pohtique européenne ne se
réahse que sous la forme imparfaite et les institutions
impuissantes du Conseil de l’Europe (statut de Londres
du 5 mai 1949). C’est dans le cadre mihtaire du Pacte
Atlantique, signé à Washington le 5 avril 1949, que se
nouent les hens les plus étroits entre une série d’États
européens, le Canada et les États-Unis. A ces « blocs »
s’oppose, par S5nnétrie, le groupement du bloc oriental qui
LES TENTATIVES D’ORGANISATION 59

réunit les États de l’Europe orientale soumis à l’influence


de ru. R. S. S. Le traité de Varsovie de mai 1955 est une
sorte de doublet du Pacte Atlantique.
Malgré les insuccès des tentatives fédéralistes euro¬
péennes, quelques penseurs et quelques hommes d’État
s’efforcent de créer des institutions européennes supra¬
nationales. La formule est apphquée à la Communauté
européenne du charbon et de l’acier (traité du 18 avril 1951
groupant le Bénélux, l’Allemagne, la France, l’Itahe) sur
un plan économique hmité. Elle échoue sur le plan mih-
taire avec le traité instituant la Communauté européenne
de défense signé en mai 1952 et que la France refuse de
ratifier en août 1954. Le rêve de la supra-nationahté appa¬
raît de la manière la plus nette dans l’avant-projet de
Communauté européenne, de caractère politique, qui est
proposé en 1953 et s’analyse juridiquement en un traité
constitutif d’un État fédéral.
Stoppée par l’échec de la C. E. D. en 1954, l’organisa¬
tion de la « Petite Europe » est relancée à la conférence
de Messine (juin 1955). Deux traités sont signés à Rome
le 25 mars 1957, ils créent la Communauté économique
européenne ou Marché commun et la Communauté atomique
européenne ou Euratom.
Ces organisations semblent préfigurer un recoupement
pohtique qui pose le problème complexe de la Communauté
politique européenne.
Les organisations internationales n’apparaissent pas
simplement en Europe. Les nouveaux États indépendants
d’Afrique se groupent à leur tour en de telles organisations.
En 1961, sont ainsi créés le groupe de Casablanca, le
groupe de Monrovia, V Union africaine et malgache. Un
regroupement plus large est atteint en 1963 avec la
conférence d’Addis Abéba et la création de VOrganisation
de l’Unité africaine à vocation continentale.

58. — Les aspects administratifs et techniques. —


Tiraillée, disloquée sur le plan pohtique, parfois organisée
en blocs ou systèmes rivaux, la Communauté internatio¬
nale tend pourtant à s’organiser sur le plan administratif,
technique et économique.
Le progrès scientifique avait entraîné la création
d’Unions internationales au xix® siècle. Elles se multi¬
plient et se rattachent à l’Organisation des Nations Unies
pour devenir des Institutions spécialisées. Déjà le traité
de Versailles avait créé, dans sa partie XIII, VOrganisa-
6o l’évolution du droit des gens

Hon Internationale du Travail. Au cours de la seconde


guerre mondiale d’autres institutions sont établies. Si
VAdministration des Nations Unies pour le secours et la
reconstr^lction instituée en 1943 est dissoute en ■1949,
d’autres institutions sont établies pour une plus longue
période : ainsi les institutions financières comme le Fonds
monétaire international, la Banque pour la reconstruction
et le développement créés par la conférence de Bret¬
ton Woods (juillet 1944), VOrganisation de l’Aviation civile
internationale constituée à la conférence de Chicago en
décembre 1944, l’Organisation des Nations Unies pour
l’Alimentation et V Agriculture créée à Québec en
octobre 1945. La période de l’après-guerre voit de nou¬
velles créations : ainsi l’Organisation des Nations Unies
pour l’Éducation, la Science et la Culture (Londres,
16 novembre 1945), V Organisation Mondiale de la Santé
(New York, 22 juillet 1946), l’Organisation météorologique
mondiale (Washington, n octobre 1947), l’Organisation
intergouvemementale consultative de la navigation maritime
(Genève, 6 mars 1948 entrée en vigueur en 1958).
L’action de la Banque internationale pour la recons¬
truction et le développement est complétée par la création
en 1956 de la Société financière internationale, en i960 de
l’Association internationale de développement.
La formule de l’institution spéciahsée est également
utilisée pour d’anciennes organisations désormais ratta¬
chées à rO. N. U. comme l’Union postale universelle,
l’Union internationale des télécommunications qui a suc¬
cédé à l’Union télégraphique internationale.
C’est également sous l’égide des Nations Unies bien
qu’elle ne soit pas une institution spéciahsée, qu’est placée
Y Agence internationale de l’énergie atomique (29 juil¬
let 1957).
On assiste à l’intérieur même de l’O. N. U. à la
manifestation d’un mouvement de spécialisation fonction¬
nelle. Une résolution 1995 (XlX^^du 30 décembre 1964
crée la Conférence sur le commerce et le développement, en
tant qu’organe de l’Assemblée générale. Une résolu¬
tion 2152 (XXI) du 17 novembre 1966 crée une
Organisation des Nations Unies pour le développement
industriel qui « fonctionnera comme une organisation
autonome dans le cadre de l’O. N. U. ».
D’autres organisations ne dépendent pas des Nations
Unies, sont autonomes ou rattachées à d’autres organisa¬
tions générales; on en rencontre dans divers domaines, en
LES TENTATIVES D’ORGANISATION 6l

particulier ceux des questions atomiques {Centre européen


de recherches nucléaires, 1952 ; Institut unifié de recherches
nucléaires, 1956) ou des questions spatiales [Organisation
européenne pour la mise au point et le lancement d’engins
spatiaux, 30 avril 1962; Organisation européenne de
recherches spatiales, 14 juin 1962).
Parfois l’organisation n’a été créée que sur le papier et
n’est pas véritablement constituée, ainsi VOrganisation
internationale du Commerce instituée par la Charte de
la Havane (24 mars 1948) qui n’est pas entrée en vigueur.
Mais la multiplicité des organisations internationales
montre l’existence d’une solidarité réelle entre les États.
Leur développement, leur réussite souvent est un récon¬
fort et un encouragement qui contraste avec les désillu¬
sions qui naissent des difficultés rencontrées par les orga¬
nisations politiques, a^vec les inquiétudes que font appa¬
raître les rivalités des États et les risques des affrontements
militaires.

59. — Le monde actuel : atome et cosmos. — Le


monde international d’aujourd’hui n’a pas retrouvé la
paix ni la stabilité.
A la seconde guerre mondiale a succédé non pas exac¬
tement la paix mais la « guerre froide » : en divers endroits
du monde existent des délimitations provisoires, zones de
tension pour lesquelles les problèmes ne sont pas définiti¬
vement réglés. Des conflits ont mis aux prises les États-
Unis et ru. R. S. S. sans aboutir d’ailleurs à des hostilités
directes.
a) Les problèmes atomiques.
Les États-Unis et l’U. R. S. S. se sont affrontés en
divers points (Berlin-Corée) sans que d’ailleurs des hosti¬
lités directes entre les deux États géants se soient pro¬
duites.
Cette rivalité à l’échelle planétaire fait peser sur le
monde une terrible menace. Les deux « Grands » possèdent,
depuis 1954 pour les États-Unis, depuis 1955 pour
ru. R. S. S., des bombes thermonucléaires et des sous-
marins lanceurs de missiles en lesquels on voit ce qu’on
appelle « l’arme absolue ».
La multiplication des essais atomiques, l’entrée d’autres
États dans la voie de ces expériences accroissent les
risques que court l’humanité.
Toutefois une détente s’est amorcée, elle résulte de
la notion de « coexistence pacifique », d’une politique
62 l’évolution du droit des gens

de non-affrontement. Le souci de prudence, la nécessité


d’éviter l’irréparable ont abouti à la conclusion ou à la
préparation de divers traités.
Le traité signé à Moscou le 5 août 1963 par les Etats-
Unis, ru. R. S. S. et le Royaume-Uni, « portant interdic¬
tion des expériences des armes nucléaires dans l’atmo¬
sphère, dans l'espace et sous l’eau » constitue une étape
importante dans la voie de la détente et mvêt une
valeur symbolique. Il est entré en vigueur le
10 octobre 1963. Plus de 100 États y ont adhéré. Toutefois
les gouvernements de Pékin et de Paris ont refusé de le
faire et entendent poursuivre leurs expériences atomiques.
Plus récemment quatorze pays de l’Amérique latine
ont signé à Mexico (14 février 1967) un traité de dénu¬
cléarisation interdisant la possession, l’utihsation et la
fabrication d’armes nucléaires en Amérique latine.
Dans le cadre de la Conférence des Nations Unies
pour le désarmement est actuellement préparé un traité
sur la non-dissémination des armes nucléaires qui com¬
portera sans doute des dispositions relatives au contrôle
des armements atomiques et à l’interdiction de leur pro-
hfération ; il constituera un pas important dans la voie du
désarmement atomique et le maintien de la paix du monde.
b) Le cosmos.
Les deux « Grands » ont été également et demeurent en
compétition pour l’exploration de l’espace. Au lancernent
le 4 octobre 1957 de l’engin soviétique Sputnik suivi de
l’engin américain le 31 janvier 1958 succèdent de rnul-
tiples expériences qui marquent le haut niveau scienti¬
fique et technique des deux États.
Les satelhtes de caractère scientifique ou militaire
tournent autour de la terre. Le premier homme quitte la
terre et y revient à bord d’un vaisseau cosmique soviétique
le 12 avril 1961, les années 1961 et 1962 voient de tels
exploits répétés par les États-Unis et l’U. R. S. S. et la
perfection des techniques s’affirme.
Le satellite de télécommunications nord-américain
« Telstar » transmet le ii juillet 1962 la première image en
direct vers l’Europe et à partir du 9 mai 1965 le sateUite
« Early bird » assure des transmissions régulières d’images.
Les satelhtes s5mchrones vont, dans le domaine des
télécommunications, prendre la relève des câbles transocéa¬
niques dont l’immersion avait eu une grande importance
voici un siècle.
LES TENTATIVES D’ORGANISATION 63

,, détente s’est dessinée. Les principes de


1 utilisation pacifique de l’espace et de la coopération
internationale ont été formulés par l’Assemblée générale
de l’O. N. U., particulièrement dans ses résolutions
nP 1721 (XVI) du 20 décembre 1961, n® 1802 (XVII) du
14 décembre 1962, n» 1963 (XVIII) du 13 décembre 1963.
Au cours de la vingt et unième session deux projets de
traités, assez voisins, ont été présentés par les États-
Ums le 17 septembre, l’U. R. S. S. le 4 octobre. Le texte
d un^ projet de traité sur les principes devant régir
1 activité des États ^ dans le domaine de l’exploration et
de l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique, y com¬
pris la lune et les autres corps célestes a été adopté par
l’Assemblée générale le 17 décembre 1966. Le traité a été
signé le 27 janvier 1967 simultanément à Londres,
Washington et Moscou.

60. Le inonde actuel ; le sou8»développement. —


Le haut niveau d’industrialisation de certains pays
contraste avec l’existence de pays dont le développement
économique est très retardé.
Les pays dits du Tiers monde, les pays tropicaux en
général souffrent d’un niveau de vie extrêmement bas et
précaire.
Les différences qui existent sont considérables. L’Atlas
des produits per capüa pubhé en 1966 par la Banque
internationale pour la reconstruction et le développement,
utihsant des chiffres de 1965 fait apparaître un large
éventail entre plus de 3.000 doUars pour les États-Unis
et moins de 100 dollars, pour 34 pays, presque tous
afro-asiatiques.
Éntre la situation économique des pays développés et
celle des pays en voie de développement l’écart croît
sans cesse car la richesse des pays développés augmente
à un rythme considérablement plus rapide.
Ainsi de 1955 à 1962 le produit intérieur brut par habi¬
tant des pays développés à économie de marché est passé
de 1.277 dollars à 1.509. L’accroissement pour les pays en
voie de développement a été, au cours de la même période,
seulement de 119 à 136 dollars.
On a pu noter que l’accroissement des biens et services
mis à la disposition de l’Américain moyen en une année
dépose actuellement le total des biens et services mis à
la disposition de l’Asiatique moyen.
Le monde de l’exploration de l’espace demeure un
64 l’évolution du droit des gens

monde où existent dans certains pays la faim, la misère,


la sous-consommation.
Désormais il apparaît qu’un des buts des institutions
internationales est d’assurer non seulement un relatif équi¬
libre politique, mais aussi un développement économique
harmonieux. Les deux problèmes sont d’ailleurs liés, car
les inégalités de développement peuvent être l’origine de
graves tensions politiques. En outre, les pays sous-déve¬
loppés ayant besoin de l’aide des autres États, des pres¬
sions peuvent apparaître, les États développés pouvant
subordonner leur aide économique à un certain aligne¬
ment politique, les États sous-développés pouvant mon¬
nayer leur attitude politique ou la possibilité d’utilisation
de certains points de leur territoire à des fins stratégiques.

61. — Le problème actuel : blocs de Puissances et


neutralisme. — Il serait inexact de penser que les pays
sous-développés constituent une clientèle d’États devant
nécessairement adhérer à un bloc ou à un autre.
La politique des États du Tiers monde est plus complexe.
Ces États, après avoir proclamé à la conférence de Ban-
doeng (avril 1955) leur droit à l’existence et leur volonté
d’émancipation dans le cadre d’une politique de décoloni¬
sation, formulent aussi leur doctrine politique d’un droit
à intervenir dans les affaires du monde, en raison de la
tension internationale, de la nécessité de maintenir la paix,
de l’incapacité aussi des plus grands États à assurer un
minimum d’harmonie internationale.
Ainsi à la conférence de Belgrade (septembre 1961),
vingt-quatre États, pour la plupart anciennes colonies, et
la Yougoslavie affirment la doctrine du neutralisme et du
non-engagement. Cette hgne de conduite apparaît comme
susceptible d’assurer la paix du monde par l’affirmation
de la nécessité d’une « co-existence pacifique » dont les
principes constitutifs de respect mutuel, de non ingérence
dans les affaires intérieures, de non agression et d’égalité
réciproque ont été posés pour la première fois dans le
traité sino-indien du 29 avril 1954. Dépouillée de tout aspect
politique, cette voie du non-affrontement et de la limi¬
tation de la compétition internationale aux domaines paci¬
fiques est évidemment actuellement la seule dans laquelle
l’humanité puisse s’engager avec quelque chance de survie.
Les politiques des plus grands États semblent adopter
depuis quelques années cette orientation.
La formule dite des blocs ne correspond plus à la réahté
LES TENTATIVES D’ORGANISATION 65

politique. Les analyses qui concluaient un peu vite à


l’existence d’un système « bi-polaire » de relations inter¬
nationales qui ont été en honneur quelque temps aux
Etats-Unis sont parfaitement dépassées. Les « blocs »
n ont jamais été très homogènes, ils se sont fissurés.
La note du gouvernement français relative à l’Alhancè
atlantique (9-10 mars 1966) relève la différence entre les
situations de 1949 et celles qui existent actuellement.
L’équilibre nucléaire entre les États-Unis et l’U. R. S. S.
aboutit à des négociations directes entre leurs gouverne¬
ments. L’installation du fameux « téléphone rouge » entre
le Kremhn et la Maison blanche symbohse cette évolution
(1963)-
La théorie de la « coexistence » apparaît comme
conforme aux impératifs du droit international, et pro¬
pice au développement continu des « Institutions inter¬
nationales ».
Bibliographie du titre préliminaire.
On trouvera les ouvrages essentiels dans les grandes
collections historiques françaises.
Pour la collection Clio, Presses universitaires de France,
retenir principalement les tomes IV, Le monde féodal, Joseph
Caltæette ; V, L’élaboration du monde moderne, Joseph Cal-
mette; VI, Le seizième siècle, Henri Sée, Armand Rébil-
LON, Edmond Préclin; IX, l’Époque contemporaine (1815-
1919), avec un premier volume Restauration et Révolutions
(1815-1871), Louis ViLLAT, et un second volume La paix
armée et la Grande Guerre (1871-1919), Pierre Renouvin,
Edmond Préclin et Georges Hardy, P.U.F. 1939, 3®éd.,
i960.
Dans la collection Peuples et civilisations publiée aussi aux
Presses Universitaires de France on consultera essentielle¬
ment le tome VI, L’essor de l’Europe, par Louis Halphen;
le tome XV, L’éveil des nationalités et le mouvement libéral
(1815-1848), par Georges Weill; le tome XVI, Démocra¬
ties et capitalisme (1848-1860), par Charles Pouthas; le
tome XVII, Du libéralisme à l’impérialisme (1860-1878),
par Henri Hauser, Jean Maurain et Pierre Benaerts;
le tome XVHI, L’essor industriel et l’impérialisme colonial
(1878-1904), par Maurice Baumont; le tome XIX, La crise
européenne et la première guerre mondiale, par Pierre Renou¬
vin ; le tome XX avec ses deux volumes : De Rethondes à
Stresa (1918-1935), De l’affaire éthiopienne à la guerre (1936-
1939), par Maurice Baumont.
8. — INSTITUTIONS INTERNATIONALES.
66 l’évolution du droit des gens

La collection intitulée Histoire des relations internationales,


publiée chez Hachette sous la direction de Pierre Renouvin
est précieuse, notamment Le Moyen Age, par Ganshof;
Les temps modernes (tome I : de Christophe Colomb à Crom¬
well, tome II : De Louis XIV à 178g), par G. Zeller; la
Révolution française et l’empire napoléonien, par Fugier; le
XIX^ siècle en deux tomes, par Renouvin : 1815-1871 et
i87i-igi4.
Pour l’histoire diplomatique, consulter deux ouvrages
classiques parus dans la collection Études politiques, écono¬
miques et sociales de la Librairie Dalloz ; Jacques Droz, His¬
toire diplomatique de 1648 à igig, et J. B. Duroselle, His¬
toire diplomatique de igig à nos jours, 3® éd., 1962.
On utilisera également l’ouvrage collectif publié sous la
direction de Vladimir Potiemkine, Histoire de la diplomatie,
traduit du russe, 3 vol., Paris, 1946-47.
Voir aussi quelques ouvrages plus particuHers comme
R. Redslob, Histoire des grands principes du droit des gens,
Paris, 1923; J. Seydoux, De Versailles au plan Young,
Paris, 1932; E. Bourgeois, Manuel historique de poli¬
tique étrangère, 4 vol., Paris, 10® éd., 1940; B. de Jou-
VENEL, D’une guerre à l’autre, Paris, 1940; P. Renouvin,
La question d’Extrême-Orient (i840-ig40), Paris, 1946;
P. Renouvin, Les formes et les modes de l’expansion euro¬
péenne dans le monde de 1865 à igi4, Paris, 1947; Les
relations germano-soviétiques ig33-ig3g, Recueil d’études
sous la direction de J.-B. Duroselle, Paris, 1954; M. Beau¬
mont, La faillite de la paix, 4® éd., Paris, 1961; J. Droz,
L. Genet et J. ViDALENC, Restaurations et révolutions,
Paris, 1963 ; R. Gardner, Vers un ordre international,
Paris, 1965.
Parmi les cours de l’Académie de droit international.
Pasteur Bœgner, Influence de la Réforme sur le dévelop¬
pement du droit international, R. C. A. D. I., 1925, t. VI;
M. Zimmermann, La crise de l’organisation internationale
à la fin du Moyen Age, R. C. A. D. I., 1933, vol. 44;
M. Bourquin, Stabilité et mouvement dans l’ordre juri¬
dique international, R.C.A.D.L, 1938, vol. 64; R. Dupuis,
Aperçu des relations internationales en Europe de Charle¬
magne à nos jours, R. C. A. D. I., 1939, vol. 68; M. Bour¬
quin, La Sainte Alliance, R. C. A. D. L, 1953, vol. 83 ;
E. Giraud, Le droit international public et la politique,
R. C. A. D. L, 1963, vol. iio ; Truyol y Serra, L’expan¬
sion de la société internationale aux XIX^ et XX^ siècles,
R. C. A. D. L, 1965.
PREMIÈRE PARTIE

LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALÉ

complexité de la société internationale.


— Envisagée de la manière la plus générale, la société
internationale peut être définie comme l’ensemble des
êtres humains vivant sur la Terre.
Cette population considérable, de trois milliards d’indi¬
vidus, se trouve inégalement répartie à la surface du globe,
installée sur moins d’un tiers de l’étendue de celle-ci. En
effet les espaces maritimes occupent 73 % de l’ensemble
de la surface de la planète et les territoires terrestres eux-
mêmes ne sont pas tous habitables. L’installation humaine
devient impossible au delà d’une certaine altitude ou au
delà de certaines latitudes, ou dans des étendues dont le
climat est trop rigoureux ou trop torride. Les géographes
utihsent le^ mot œkoumène pour désigner les espaces habi¬
tables où l’homrne peut vivre d’une manière permanente.
Si l’on considère l’ensemble des êtres humains, on est
frappé aussitôt par le fait que la communauté humaine
apparaît, du point de vue sociologique, comme fragmentée
en une série de collectivités plus petites dont l’ensemble
constitue précisément la société internationale.
Cette fragmentation apparaît sur le plan géographique
comme sur le plan ethnographique. Les diverses commu¬
nautés humaines n’ont point atteint partout le même
degré de développement, la même civihsation. L’ensemble
si complexe des races et des peuples divers qui occupent
la surface habitable du globe est ainsi composé de diverses
68 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

sociétés élémentaires plus ou moins importantes, fixées


sur des territoires d’étendues diverses.
Ces sociétés particulières ont pu parfois co-exister sans
se connaître, sans qu’il y ait de rapports entre elles. La
période de l’Antiquité, celle du Moyen Age ont coimu des
sociétés distinctes, éloignées géographiquement et qui
n'avaient pas de rapports entre elles. Depuis la fin du
XV® siècle et ce que les Européens ont appelé les grandes
découvertes, et surtout depuis l’achèvement des explora¬
tions du monde commencées plus ou moins systématique¬
ment depuis le xix® siècle, les rapports existent entre
toutes les sociétés humciines. Considérés d’un point de vue
sociologique, les rapports entre êtres humains sont déter¬
minés par des phénomènes de soüdarité ; notion de l’ap¬
partenance à un même groupe qui réunit des êtres qui
possèdent en commun, comme une sorte de dénominateur,
des modes de vivre, de croire ou de penser. Après les phi¬
losophes « solidaristes », le grand intemationahste fran¬
çais Georges Scelle a marqué l’importance de ce phéno¬
mène de solidarité par similitude.
Les groupements d’êtres humains unis entre eux par
des phénomènes divers de similitude dans une ou plusieurs
manières de vivre ou d’être sont de plusieurs types. Des
analyses ont pu ainsi distinguer les peuples, les races, les
classes sociales, les groupements religieux, les groupe¬
ments politiques. Parmi ces groupements, et depuis le
XV® siècle, les plus importants du point de vue sociologique
ont pu apparaître comme étant les États.
Précisément la société internationale apparaît essen¬
tiellement comme fragmentée en une série de groupements
pohtiques particuhers, les États à l’intérieur desquels
joue, d’une manière fort étroite et précise, le phénomène
de soüdarité sociale.

63. — Société internationale et société inter»étatique.


Le problème du sujet de droit. — La doctrine classique
du droit international pubüc, sans se üvrer d’ailleurs aux
analyses sociologiques précitées, a eu conscience de la
répartition de la société internationale en une série de
collectivités pohtiques appelées Etats. EUe a vu ainsi
dans le droit international pubüc le droit des relations
entre États. Elle a réservé à ces Etats la qualité de sujets
du droit international pubüc.
Cette conception a été systématisée progressivement.
Considérant la société internationale comme une société
LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE 69

d’Etats, le droit international public classique est apparu


comme réglât les relations entre elles, non pas de per¬
sonnes physiques mais de personnes morales, les États,
seuls sujets de ce droit international.
^nsi s’opposait au droit interne dont les sujets pou¬
vaient être des individus, le droit international dont l’État
seul étmt sujet. A la suite des critiques formulées par
divers juristes, Duguit notamment, contre la notion de
personne morale, des auteurs contemporains ont démontré
que la règle de droit ne peut « s’adresser qu’à une intelli¬
gence capable de la comprendre et de s’y conformer ».
Georges Scelle a pu ainsi affirmer, en réaction contre la
doctrine classique « Il n’y a que des individus qui puissent
être sujets de droit ».
La démonstration est certainement convaincante, mais
le droit positif n’admet pas la conclusion nécessaire et
actuellement ce n’est que d’une manière exceptionnelle
que l’individu est régi directement et immédiatement par
les règles du droit international. Entre celui-ci et l’individu
s’interpose généralement, comme une sorte d’écran, l’État.

64. — Délimitation du champ de l’étude. — Le pro¬


blème du sujet de droit méritait d’être rappelé. Mais il
convient de noter qu’il s’agit d’un problème de technique
juridique. Dans l’étude des Institutions internationales, et
plus spécialement de la partie de ce cours consacrée à la
Société interétatique on peut, sans grand inconvénient,
le néghger. Il s’agit en effet de décrire la société interna¬
tionale. Or, personne ne peut contester que cette société
complexe est constituée d’une pluralité de sociétés élé¬
mentaires qui ont entre elles des rapports.
Un premier titre sera consacré à la description de la
société inter étatique, ou plus exactement des divers types
de sociétés plus restreintes qui la composent. Un second
titre décrira les rapports internationaux normaux, c’est-
à-dire ceux du temps de paix ou si l’on préfère et plus
simplement la vie internationale.
i
TITRE PREMIER

DESCRIPTION
DE LA SOCIÉTÉ INTERÉTATIQUE

.65. — La méthode classique. — La société interna¬


tionale se compose de sociétés humaines plus restreintes.
Parmi ces sociétés à l’intérieur desquelles joue le phéno¬
mène de sohdarité, les plus nombreuses, les plus impor¬
tantes aussi pour des raisons historiques et politiques et
pour des raisons de technique juridique sont les sociétés
étatiques, ou si l’on veut, les États. Mais il en est d’autres,
par exemple les sociétés rehgieuses.
Notre étude portera sur les diverses sociétés, et par
conséquent essentiellement sur les diverses sociétés éta¬
tiques. La présentation de ces diverses sociétés suppose
une classification préalable. La méthode d’exposition choi¬
sie est quelque peu différente de la méthode employée dans
les ouvrages classiques de droit international.
Le droit international classique, en décrivant les États
en lesquels il voyait des sujets de droit, les classait selon
certains critères et distinguait les États souverains et les
États mi-souverains. Il n’&happait point ainsi à une grave
critique car, tout en faisant de la notion de souveraineté
le critère même de l’État, il appelait États des sociétés
humaines qui n’étaient point dotées de la souveraineté.
A cette première critique doit s’en ajouter une autre.
Le classement des États en différentes catégories, les uns
souverains, les autres mi-souverains et certains même
quahfiés de non souverains reposait sur la base d’un pré-
72 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

tendu critère juridique, celui de la souveraineté. Ce clas¬


sement se voulait, bien à tort, juridique. Or, d’une part
il invoquait bien une notion juridique d’ailleurs mal défi¬
nie, celle de la souveraineté, mais il ne l’invoquait que
pour l’abandonner aussitôt en distinguant à côté des États
souverains les États mi-souverains et même les États
non souverains. D’autre part, il était conduit à sacrifier
ime seconde fois la logique juridique. En effet, une classi¬
fication juridique n’est nécessairement valable qu’à la
condition de reposer sur une base fixe et non changeante,
et ensuite de ne pas faire intervenir de considérations
extra-juridiques, telles qu’historiques ou sociales. Or, sans
le dire, la présentation classique était obligée de tenir
compte des variations historiques et décrivait tantôt des
formes actuelles d’États, tantôt des formes disparues, par¬
fois des formes successives.
Sans donner à l’esprit la satisfaction de la fixité, la pré¬
sentation habituelle ne mettait point l’accent sur les rai¬
sons historiques ou sociales pour lesquelles telle ou telle
forme d’État était apparue, avait évolué, avait parfois
disparu ou parfois était demeurée. La présentation clas¬
sique apparaissait ainsi comme une étrange coupe de la
société internationale qui aurait voulu être faite suivant
un plan juridique mais qui, contrairement à toute logique,
se plaçait tantôt à une période déterminée, tantôt en
dehors du temps.

66. — La méthode proposée. — A cette étrange des¬


cription anatomique de la société internationale nous
avons tenté d’en substituer une autre. Elle se place réso¬
lument dans le cadre de la vie elle-même. Elle ne repose
point sur des critères juridiques. Elle s’efforce de saisir
dans leur ensemble les grands mouvements sociaux qui
ont animé et animent encore et animeront peut-être tou¬
jours la société internationale, qui est une réalité vivante.
Elle étudie ensuite, dans leur technique juridique consi¬
dérée comme un simple moyen, les diverses sociétés parti-
cuUères qui ont existé ou qui existent à l’intérieur de la
communauté internationale globale.
Les solutions juridiques ne sont point ainsi négligées,
elles sont mises à leur place, une place seconde.
Ce n’est point pour la satisfaction intellectuelle des
juristes qu’a été imaginé tel ou tel régime juridique, c’est
sous la pression des nécessités politiques et sociales,
donc dans un cadre historique.
DESCRIPTION DE LA SOCIÉTÉ INTERÉTATIQUE 73

La présentation proposée s’efforce de tenir compte des


phénomènes principaux que fait apparaître l'évolution de
la société interétatique.
Certains de ces phénomènes peuvent se présenter d’une
manière brutale, les autres sont de caractère pacifique.
Un affrontement de forces caractérise l’impérialisme ou
phénomène de domination de certaines collectivités à
l’égard d’autres. Mais l’impérialisme a ses Hmites, ü abou¬
tit à la constitution de grands empires mais bien souvent
ceux-ci se disloquent et sur leurs ruines apparaissent ou
ressuscitent des États. L’histoire humaine est marquée
par la succession pendulaire de deux mouvements, l’un
qui tend à créer des grands ensembles autour d’un État
dominateur, l’autre qui hbère les États ou les peuples ainsi
agrégés et aboutit à l’indépendance.
Plus pacifiques apparaissent, au contraire, d’autres phé¬
nomènes qui sont exclusifs de l’affrontement brutal. L’un
est celui du regroupement ou phénomène de Vassociation,
l’autre est celui de la stabilisation ou de l’équihbre marqué
par les systèmes de réglementation caractérisant certains
statuts territoriaux.
La description de la société interétatique sera ordonnée
autour des trois phénomènes d’impériahsme, d’associa¬
tion et de réglementation. Le phénomène d’indépendance
qui donne naissance aux États sera présenté dans une
autre partie de cet ouvrage.
Aux trois thèmes précités s’ajouteront dans le présent
titre deux développements, l’un présentant l’évolution
historique de l’ensemble international complexe que cons¬
titue aujourd’hui le Commonwealth, l’autre décrivant le
statut particuher d’une collectivité qui, bien que non éta¬
tique, a revêtu la forme étatique et en conserve encore la
formelle apparence : le Saint-Siège.
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CHAPITRE PREMIER

LA COLLECTIVITÉ ÉTATIQUE

§ i*'. — Les éléments de l’État.

Si l’on tente d’analyser la collectivité étatique, on peut


la définir comme l’établissement et la vie sur un territoire
déterminé d’un groupe d’êtres humains soumis à un pou¬
voir politique. Trois éléments apparaissent donc : le terri¬
toire, la population, le pouvoir politique.

67. — Le territoire. — i° La base territoriale appa¬


raît comme un élément fondamental de l’État. Il consti¬
tue le cadre spatial dans lequel est établie la collectivité
humaine étatique. La notion de territoire est de nos jours
essentielle, elle matériahse et exprime la fixation au sol,
quelque part sur la surface du globe, de la collectivité
humaine.
On ne peut concevoir un État sans territoire mais la
notion de territoire étatique, qui nous est aujourd’hui si
famihère, n’a pas toujours existé au cours de l’histoire
humaine. La fixation au sol que constitue le territoire
était ignorée des peuples primitifs menant une vie nomade
dominée par une économie de type pastoral. Aujourd’hui,
et sauf peut-être l’exception de quelques peuples arriérés,
les collectivités humaines sont fixées sur le sol.
Un hen étroit existe ainsi entre la collectivité étatique
et une portion de la surface de la terre. Cette portion ter¬
ritoriale est délimitée.
2° L’étabhssement de la population se fait dans un cadre
spatial fini, déterminé par les frontières.
76 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

Impliquant une fixation au sol, le territoire défini par


les frontières comporte une certaine stabilité. Mais cette
stabilité n’est toutefois que relative. Le territoire, cadre
d’établissement de l’État, peut changer. L’histoire d’un
État comporte des changements territoriaux avec tantôt
des accroissements, tantôt des pertes territoriales.
La plasticité ou la stabilité des frontières dépendent de
contingences historiques. L’histoire de l’unité française
montre le patient effort des rois de France vers l'agrandis¬
sement du territoire du royaume. Les frontières de la
France ont été modifiées tout au cours de l’histoire, à par¬
tir d’un noyau central. Certaines portions du territoire
de la France actuelle n’ont été rattachées qu’à une époque
très récente. Il y a seulement un siècle que les régions de
la Savoie et de Nice font partie du territoire français.
L’Europe centrale et orientale a connu de très fréquents
changements de frontière, parfois des phénomènes de ghs-
sement, comme celui que montre l’État polonais actuel
qui, à la conférence de Potsdam de 1945, a bénéficié de
gains de territoires vers l’Ouest, en compensation des ter¬
ritoires perdus à l’Est.
La fixation au sol ne signifie donc pas une fixation
définitive sur telle aire géographique déterminée ne varie-
tur de la surface du globe.
3° Le territoire de fixation n’est pas non plus nécessai¬
rement d’un seul tenant. Il est des États dont le territoire,
cadre de leur existence politique, est composé de plu¬
sieurs aires géographiques, séparées les imes des autres.
Le Reich allemand de 1919 était séparé en deux tronçons,
la Prusse orientale étant coupée par le couloir de Dantzig
du reste de l’AUemagne. Le Pakistan est composé de
deux territoires.
La fragmentation du territoire étatique en aires géo¬
graphiques discontinues est apparue depuis longtemps
dans le cadre de la politique des dominations coloniales.
L'expression souvent usitée de « territoires d’outre-mer »
marque cette coupure géographique entre une métropole,
souvent européenne, et des territoires soumis situés sur
d’autres continents.
40 On notera enfin que, si le territoire est présenté
comme le cadre spatial de l’établissement de la collecti¬
vité humaine, cette formule est elle-même relative. D’une
part, le territoire étatique n’est pas limité au territoire
terrestre, il comporte certains espaces maritimes appelés
en général mer territoriale et qui constituent une sorte
LA COLLECTIVITÉ ÉTATIQUE 77
de frange maritime autour du territoire terrestre. Ces
espaces maritimes sont évidemment impropres à l’éta¬
blissement permanent d’êtres humains. Une remarque
analogue peut être faite à propos de l’espace aérien,
défini comme le prisme d’air existant au-dessus du terri¬
toire de surface.
Le territoire terrestre lui-même n’est pas toujours le
lieu d’un établissement humain. Toutes les portions du
territoire étatique ne sont pas habitables. Les hautes mon¬
tagnes, les déserts intérieurs demeurent, pour des raisons
chmatologiques, impropres à l’étabhssement humain per¬
manent tout en demeurant comprises dans le cadre du
territoire de l’État. Les régions polaires posent des pro¬
blèmes particuliers. Elles sont inhabitables à titre perma¬
nent. Elles peuvent, du point de vue juridique, faire partie
de territoires étatiques ou appartenir à des espaces non
rattachés à un État

68. — La population. — Installée dans le cadre généred


du territoire étatique et régie par le pouvoir politique se
trouve une population.
On a tendance à identifier la collectivité étatique avec
la Nation. Cette habitude est fréquente en France et dans
les pays de langue anglaise. On retrouve cette assimilation
et cette synonymie dans la terminologie des grandes orga¬
nisations internationales, la Société des Nations, l’Orga¬
nisation des Nations Unies. C’est identifier l’État avec
un groupe humain particuher.
La notion de Nation pose un double problème, celui
d’abord de sa définition, celui ensuite de ses rapports avec
la notion de population de l’État.

69. -- La notion de Nation. — Deux conceptions de


la Nation s’opposent traditionnellement.
L'une, dite objective, considère la communauté natio¬
nale comme déterminée par des éléments de fait comme
les caractéristiques raciales, hnguistiques, rehgieuses. For¬
mulée par le Français Gobineau et l’Anglais Houston Ste¬
wart Chamberlain, cette conception a été particulièrement
en honneur en Allemagne. Elle a été poussée à ses hmites
par les théories national-socialistes.

* Les problèmes de la nature juridique du territoire et des rapports existant


entre l’Etat et le territoire ne sont volontairement pas abordés au texte. Aux
termes du décret du 10 juillet 1962, leur étude fait partie du cours de droit
international public de 3' année.
78 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

La seconde conception est dite subjective. Elie fait place


à des éléments volontaristes en voyant dans la commu¬
nauté nationale comme lien essentiel le désir de la vie
commune. C’est à cette conception que se référait, en par¬
tie seulement d’ailleurs, l’Italien Mancini dans sa célèbre
leçon de droit international à l’Université de Turin en
1851, en définissant la nation « une société naturelle
d’hommes que l’unité de territoire, d’origine, de mœurs
et de langage mène à la communauté de vie et de conscience
sociales ». Les philosophes et penseurs français devaient
mettre particuhèrement l’accent sur cette manière de
vivre, hbrement choisie, qui constitue l’essentiel de la
communauté nationale. Renan, dans sa célèbre brochure
parue en 1882 : Qu'est-ce qu’une nation ? parlait du « vou¬
loir vivre collectif » et lançait la formule « Une nation est
une âme, un principe spirituel ». La conception subjective
est non seulement volontariste, reposant sur une notion
d’adhésion à un mode de vivre, de penser et de sentir,
mais elle est aussi historique. La Nation apparaît comme
l’expression d’une conscience nationale lentement façon¬
née par l’histoire.
De ces deux conceptions fort opposées c’est la concep¬
tion subjective qui est exacte. Une démonstration est
fournie par la Suisse. Il existe une nation suisse caracté¬
risée précisément par un vouloir vivre collectif qui assure
la cohésion d’une communauté nationale distincte pour¬
tant sur les plans ethnique, hnguistique, rehgieux.

70. — Nation et communauté étatique. — La ques¬


tion se pose de,savoir si toute Nation est nécessairement
constituée en État, s’il y a identité entre communauté
nationale et communauté étatique.
On doit remarquer qu’historiquement il n’en est pas
ainsi. Il a existé des États supra-nationaux dont la popu¬
lation étatique comprenait plusieurs nations ou nationa¬
lités. L’exemple le plus net est celui de l’Empire austro-
hongrois de 1867 à igi8. Il comprenait non seulement
dans le cadre d’une Union réelle deux nations, la nation
autrichienne et la nation hongroise, mais d’autres nations,
tchèque, slovaque, Slovène, etc. A l’inverse, pendant cer¬
taines périodes de l’histoire, des nations n’ont pas été cons¬
tituées en État. Ainsi en allait-il de la nation tchèque,
de la nation polonaise jusqu’à la résurrection de ces
nations dans le cadre d’États nationaux en 1918.
LA COLLECTIVITÉ ÉTATIQUE 79
71. — Le principe des nationalités. — On désigne
sous ce nom une théorie qui a joué un grand rôle dans les
tentatives d’organisation de la société internationale
depuis le milieu du xix® siècle. Ce principe est générale¬
ment considéré comme signifiant le droit pour toute nation
de se constituer en État indépendant. Mais il a été quel¬
quefois présenté dans le cadre de la politique impérialiste
ciUemande du pangermanisme comme signifiant, au
contraire, le droit pour l’Allemagne de grouper dans un
État grand-allemand toutes les populations de langue
allemande. Ce double aspect du principe des nationalités
n’est que le reflet de l’opposition des deux définitions de
la nation qui ont été indiquées ci-dessus.
Lorsqu’on se réfère, toutefois, au principe des nationa¬
lités, c’est généralement dans le premier sens qu’on l’en¬
tend. La révolution de 1848 en Europe a été une véritable
explosion du principe des nationalités, en Italie, en Alle¬
magne, en Autriche. Le principe n’a point triomphé alors
en Europe, mais il devait être le levier des imités alle¬
mande et italienne au xix® siècle comme le facteur décisif
de la dislocation de l’Empire ottoman. Au lendemain de
la Première Guerre mondiale, invoqué par les Puissances
victorieuses et surtout par le Président Wilson, il devait
entraîner la création d’une série d’États nouveaux ou
ressuscités.

72. — Les minorités nationales. — Toutefois la créa¬


tion d’un État véritablement national, c’est-à-dire dont la
population s’identifierait à la nation elle-même, n’est pas
apparue ^toujours possible. Il est symptomatique de noter
que les États qui ont été créés au lendemain de la paix de
1919, en Europe centrale, sur les ruines de l’ancien Empire
supra-national austro-hongrois, ne sont pas de véritables
États nationaux.
L’aspect plurinational apparaît dans les noms mêmes
des États, ainsi la Yougoslavie s’appelle d’abord royaume
des Serbes, Croates et Slovènes, ainsi la Tchécoslovaquie
comporte la juxtaposition d’une population tchèque et
d’une population slovaque, sans oublier les Allemands des
monts Sudètes qui serviront de prétexte au coup de force
hitlérien de 1938.
Le droit international positif, s’il n'a pu ainsi toujours
assurer la réahsation de l’État purement national, s'est
efforcé d’arriver à une solution satisfaisant à l’impératif
d’identité entre l’État et la Nation. Pour parvenir à ce
8o LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

résultat, il a utilisé parfois le procédé du plébiscite auquel


on a recours lors de la réalisation de l’unité italienne, entre
1860 et 1870, et pour le rattachement de la Savoie et du
Comté de Nice à la France et au lendemain de la pre¬
mière guerre mondiale (traité de Versailles : art. 42, Eupen
et Malmédy; art. 50, territoire de la Sarre; art. 88,
Haute-Silésie; art. 94 et 96, certains districts de Prusse
orientale; art. 109, Slesvig; traité de Saint-Germain,
art. 49, région de Klagenfurt). Cette méthode est abandon¬
née après la Seconde Guerre mondiale, sauf pour Tende
et Brigue (art. 2 du traité de paix avec l’Italie).
^ On a eu aussi recours quelquefois au procédé brutal de
Véchange des populations aboutissant à des regroupements
et prévu par divers traités depuis les guerres balkaniques.
Utihsé par l’AUemagne hitlérienne, cette solution a encore
été admise par la résolution de Potsdam du 2 août 1945,
sous la réserve que ces transferts soient conduits avec
humanité.
Enfin, lorsque n’est point réalisé l’État national, le droit
international pubhc prévoit parfois la protection des popu¬
lations qui, au sein d’un État, constituent des minorités
nationales, c’est-à-dire un groupe différant de la majorité
nationale par la race, la langue, la religion. Ces garanties
ont été formulées tantôt dans des textes conventionnels
(art. 86 et 93 du traité de Versailles, traités de minorités
conclus par les principales Puissances alliées et associées
avec la Pologne, la Tchécoslovaquie, la Grèce, la Rouma¬
nie, la Yougoslavie, et de multiples traités bilatéraux),
tantôt dans des déclarations unilatérales souscrites par
des États lors de leur entrée dans la S. D. N. (Albanie,
Esthonie, Lettonie, Lithuanie, Finlande, Irak).

73. — Le droit des peuples. — Le principe des natio-


nahtés entendu sous la forme de la nationahsation subjec¬
tive de caractère volontariste conduit au principe dit
d’auto-détermination ou encore droit des peuples à dis¬
poser d’eux-mêmes.
Ce principe a été formulé par le Président Wilson, dans
le discours au Congrès du ii février 1918, et apparaît à
plusieurs reprises dans les célèbres Quatorze points. Il
apparaît dans la Charte de l'Atlantique et dans la décla¬
ration de Yalta, notamment dans les passages relatifs à
l’Europe.
Le texte le plus solennel qui fasse actuellement place à
ce principe est le § 2 de l’article i de la Charte des Nations
LA COLLECTIVITÉ ÉTATIQUE 8l

Unies, qui fixe parmi les buts de l’Organisation le dévelop¬


pement entre les nations de relations amicales fondées sur
le respect du principe de l’égalité de droits des peuples et
de leur droit à disposer d’eux-mêmes. La mise en œuvre
de ce principe est actuellement poursuivie par certains
États dans le cadre de l’O. N. U. en vue de son application
aux empires coloniaux qui subsistent. EUe soulève juri¬
diquement deux problèmes, l’un qui est celui de la défini¬
tion du mot « peuple », le second qui est celui de la contra¬
diction existant entre ce § et le § 7 de l’article 2 de la
Charte qui prévoit la compétence exclusive des États dans
certains domaines dont ils seraient d’aüleurs seuls juges.

74. — Population et habitants. — La population ins¬


tallée sur le territoire de l’État apparaît de toute manière
comme un ensemble d’êtres humains habitant le territoire.
C’est la notion démographique qui s’exprime munérique-
ment dans les annuaires statistiques. Cette masse d’êtres
humains comporte, en réahté, une série de catégories et
se subdivise à son tour, indépendamment même des pro¬
blèmes posés par les minorités nationales.
Le pouvoir pohtique de l’État s’exerce d’une manière
différente sur chacune de ces catégories. La distinction
essentielle, au sein de la population d’un État, s’opère
entre les nationaux et les étrangers.
Ces derniers, installés sur le territoire, ont un statut par¬
ticulier, distinct de celui des nationaux et ne disposent
pas de droits pohtiques. Les nationaux bénéficient de cer¬
tains droits mais sont assujettis à certaines obhgations, ils
sont rattachés à l’État par un hen juridique et pohtique.
Certains d’entre eux qui satisfont à certaines conditions,
d’âge par exemple, sont les citoyens. On distingue quel¬
quefois le ressortissant du national. L’expression de ressor¬
tissant est plus large.
Dans les États complexes qui ont des possessions de
caractère colonial, l’expression de national s’oppose à ceUe
de sujet. Rattachés à la collectivité étatique par un hen
de subordination, les sujets ne bénéficient pas nécessaire¬
ment des droits des nationaux, et moins encore des droits
des citoyens. Les solutions du droit positif sont d’aiheurs
variables.
Un problème particulier se pose à propos des protecto¬
rats. Le national d’un État protégé est un protégé dans
le cadre de la collectivité complexe.
82 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

75. — Le pouvoir politique. — Le troisième élément


constitutif de l’Etat est l’existence d’une organisation
politique à laquelle se trouve soumise la population établie
sur le territoire. Ce pouvoir politique est organisé suivant
des dispositions qui ne ressortissent pas au droit interna¬
tional mais au droit interne, droit constitutionnel et droit
public général.
La question s’est posée toutefois, dans le cadre interna¬
tional, de savoir si ce pouvoir politique ne serait pas d’une
essence particulière qui constituerait, pour la différencier
des autres collectivités humaines, la collectivité étatique.

§ 2. — Existe-t-il un critère de l'État?

76. — La notion de collectivité étatique. — La col¬


lectivité étatique a été analysée dans les développements
précédents. EUe est apparue constituée par trois éléments :
territoire, population, pouvoir politique. Mais il est facile
de s’apercevoir que ce trinôme se rencontre dans d’autres
collectivités que les collectivités étatiques. Il existe en
effet dans toutes les collectivités territoriales, non seule¬
ment dans l’État mais dans les circonscriptions adminis¬
tratives en lesquelles se subdivise un État, régions, pro¬
vinces, comtés, départements, communes. D’autres col¬
lectivités territoriales auxquelles on refuse le nom d’États
pour les qualifier parfois de territoires (Dantzig, Tanger,
Trieste) ou de territoires sous tutelle, ou de territoires
sous mandat comportent, elles aussi, un territoire d’abord,
cornme leur nom l’indique, une population et une organi¬
sation politique.
Il convient donc de tenter de découvrir le critère qui
permet de déterminer quand on se trouve en présence
d’une collectivité étatique.

77. — Critère de la souveraineté. — La théorie clas¬


sique fait de la souveraineté le critère de l’État. On
retrouve comme un écho de la solution traditionnelle dans
les traités généraux qui constituent le statut de certaines
organisations internationales. Le § i de l’article 2 de la
Charte des Nations Unies indique formellement : « L’Or¬
ganisation est fondée sur le principe de l’égalité souveraine
de tous ses membres. »
La notion classique de souveraineté, critère de l'État,
n’est en droit international que la transposition de la
LA COLLECTIVITÉ ÉTATIQUE 83

théorie de la toute puissance de l’État telle qu’elle a été


imaginée ou reconstituée en droit interne avec la renais¬
sance du droit romain. L’État est une collectivité souve¬
raine, en ce sens qu’il n’admet point de collectivité à lui
supérieure et qu’il dispose de la plénitude du pouvoir poli¬
tique.
Mais la conception classique de la souveraineté se heurte
à une grave contradiction sur le plan international. Il
serait possible d’admettre que les États soient souverains
si la société internationale était absolument anarchique et
s’il n’existait aucun droit international. Mais, à partir du
moment où l’on admet l’existence d’un droit international
dont les seuls sujets seraient les États souverains, on
aboutit à une absurdité véritable. L’État n’est plus sou¬
verain s’il est soumis au droit. Et si l’État n’est pas sou¬
verain, la souveraineté ne saurait apparaître comme le
critère de la collectivité étatique.
Les variantes de la théorie classique, imaginées par
divers auteurs allemands, théorie du droit propre de
Laband et surtout la fameuse théorie de Jellinek, ou
de y auto-limitation, selon laquelle l’État ne peut être lié
par une volonté autre que la sienne mais se he lui-même
par les traités qu’il passe, se heurtent, en dernière analyse,
aux mêmes objections. É’auto-limitation demeure discré¬
tionnaire de la part de l’État, qui peut s’affranchir de la
règle qu’il a lui-même hbrement créée. La célèbre formule
de Jellinek selon laquelle l’État a la compétence de la
compétence n’est, sous im nom différent d’apparence
scientifique, que la théorie habituelle de la souve¬
raineté.
Inexacte du point de vue scientifique, dangereuse par
les conséquences poHtiques qu’elle imphque, la théorie de
la souveraineté n’est plus aujourd’hui soutenue en doc¬
trine. On la rencontre encore dans la pratique internatio¬
nale. Mais c’est alors une notion émoussée qui comporte
des hmitations, et qui donc ne constitue pas un critère de
l’État et ne saurait être utilisée comme tel.

78. — Autres critères juridiques proposés. — En


dehors du critère classique parfois rajeuni par les formules
de Laband ou de Jellinek, d’autres critères juridiques
ont été proposés. Ils ne sont pas, d’ailleurs, fondamenta¬
lement distincts de la notion de souveraineté.
Un premier critère, dégagé par certains juristes dits de
l’école autrichienne, en particulier Verdross et Kunz,
84 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

est celui connu sous le nom de Vimmédiateté internationale.


La collectivité étatique se distinguerait des autres col¬
lectivités territoriales en ce sens qu’eUe seule serait régie
directement par le droit international, alors que les col¬
lectivités non étatiques seraient régies directement par le
droit interne et d’une manière seulement médiate par le
droit international. La formule est intéressante et ingé¬
nieuse. EUe rend compte d’un certain nombre de situa¬
tions, permet par exemple de dénier le caractère étatique,
au sens international, aux collectivités membres d’un
État fédéral, celui-ci ayant seul le caractère d’État. Mais
le critère n’est pas décisif car le droit international régit
aussi directement le statut des territoires non étatiques,
territoires sous mandat, sous tutelle, Trieste, Tanger, etc.
On peut même dire qu’il régit ces collectivités d’une
manière plus nette encore. On peut donc retenir l’idée de
l’immédiateté internationale, elle est utüisable dans une
série de cas, mais pas dans tous. Ce n’est donc pas un
critère de valeur absolue.
Un second critère a été proposé par M. Charles Rous¬
seau, c’est celui de Vindépendance. Selon cette théorie, la
collectivité étatique disposerait d’une compétence exclu¬
sive de tout autre dans le cadre de son territoire, cette
compétence serait autonome, c’est-à-dire hbre d’agir, enfin
eUe serait plénière.
Cette analyse est évidemment intéressante, mais eUe
ne peut aboutir à dégager le critère de l’État. En effet
elle ne peut définir que l’État indépendant. EUe ne
s’appUque qu’à des cas particuüers. La compétence de
l’État n’est pas toujours exclusive. Il y a de nombreux
cas de substitution de compétence, de partage de com¬
pétence. EUe n’est pas toujours autonome, ü suffit de
songer aux diverses dispositions de certains traités con¬
cernant la protection des minorités, la garantie des
droits de l’homme. EUe n’est pas toujours plénière, que
l’on songe aux régimes de démiütarisation, au Pacte
Briand-KeUogg. Devra-t-on admettre que l’État signa¬
taire du Pacte de renonciation à la guerre en tant
qu’instrument de poUtique nationale n’est plus un État,
alors que le demeurerait une coUectivité en dehors de ce
traité ?
On s’aperçoit finalement que la notion d’indépendance
se heurte à peu près aux mêmes inconvénients que la
notion de souveraineté et que le droit international appa¬
raît comme un ensemble de règles ümitant l’indépendance.
LA COLLECTIVITÉ ÉTATIQUE 85
ce qui ne permet pas de faire de la notion d’indépendance
le critère de l’État.

79. — Absence de critère juridique. — Après avoir


passé en revue les divers critères proposés, on est finale¬
ment amené à conclure qu’il n’existe pas de critère juri¬
dique absolu de l’État.
La notion d’immédiateté internationale est intéressante
pour distinguer entre elles des collectivités hiérarchisées
et peut être conservée à ce titre dans l’étude du fédéralisme
ou du phénomène d’association.
Mais pour distinguer entre elles diverses collectivités
qui sont régies par le droit international, et dont les unes
sont des États et les autres n’en sont pas ou n’en sont pas
encore, c’est à des critères extra-juridiques qu’ü faut
recourir.
Il paraît nécessaire de se rallier ici à l’opinion de
Georges^ Scelle, selon laquelle ce qui caractérise vrai¬
ment l’État ce sont des éléments de nature historique, poli¬
tique, psychologique. C’est par l’analyse de ces éléments
extra-juridiques, la mesure de leur intensité que l’on
pourra distinguer entre elles, classer en collectivités éta¬
tiques et en collectivités non étatiques des collectivités
humaines étabhes sur un territoire et régies directement
par le droit international. Un territoire sous mandat, par
exemple, n’est pas un État pendant un certain temps, puis
le devient. Le changement qui s’est opéré est déterminé
{)ar l’évolution historique, les transformations poHtiques,
e développement du sentiment national.
La notion d’indépendance d’ailleurs, si elle ne peut cons¬
tituer un critère juridique décisif, mérite au contraire
d’être retenue comme un élément important de caractère
non juridique.

80. — Société internationale et sociétés étatiques. —


La société internationale globale se compose, avons-nous
indiqué, de multiples sociétés dont les unes sont des sociétés
étatiques et les autres n’en sont pas. Mais on doit noter
que la collectivité étatique est certainement la plus impor¬
tante des diverses sociétés.
Le nombre des sociétés étatiques n’a cessé d’aüleurs de
croître au long de l’histoire humaine. Les grandes confé¬
rences politiques internationales à partir du xix® siècle,
les grands traités normatifs des xix® et xx® siècles ont été
des faiseurs d’États. La dislocation des grands Empires a
86 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

donné naissance à une série de collectivités étatiques. Ce


processus de désintégration doit être souligné. Il s'est
accompli selon des procédés juridiques divers et a abouti
à l’existence actuelle de près de cent vingt collectivités
étatiques, diverses entre elles certes par leur importance
politique ou économique, leur poids de civilisation ou le
rôle qu’elles jouent, mais théoriquement égales entre elles
précisément en tant que collectivités étatiques.
La collectivité étatique domine la société internationale
actuelle, non seulement d’un point de vue numérique mais
parce qu’elle constitue un véritable modèle pour les autres
collectivités. La collectivité étatique apparaît ainsi comme
le couronnement d’une évolution, la forme à laquelle par¬
viennent, parfois après de longues étapes, d’autres collec¬
tivités territoriales. C’est le droit à se constituer en États
qu’ont revendiqué depuis plus d’un siècle les diverses
nationalités et les peuples soumis à une domination colo¬
niale. L’émancipation des colonies européennes en Amé¬
rique latine, au début du xix® siècle, le mouvement des
nationalités en Europe depuis 1848, les revendications à
l’indépendance qui apparaissent au lendemain de la
Seconde Guerre mondiale au sein des empires coloniaux
marquent ce mouvement. Il arrive même que des collecti¬
vités tentent d’emprunter la forme étatique alors qu’eUes
ne correspondent point, en aucune manière, à des États :
le phénomène est particuhèrement net pour l’organisation
de la Papauté orientée vers la notion d’un pseudo-État.
Les mouvements inverses du processus de l’indépen¬
dance nationale et qui peuvent se définir comme des
regroupements d’États en des collectivités spatialement
plus grandes et peut-être économiquement plus puissantes
n’échappent pas non plus à cette extraordinaire attrac¬
tion étatique. Le fédérahsme aboutit à constituer un État
à la place d’une pluralité d’États. Et, par le plus étrange
des paradoxes, le rêve doctrinal qui, au mépris peut-être
des réahtés sociales et pohtiques, voit dans la disparition
des États la condition d’une organisation internationale
parfaite, aboutit à remplacer une pluralité de collectivités
étatiques par une autre collectivité qualifiée de super¬
étatique mais qui, à la bien analyser, ne serait qu’un État
gigantesque et universel plus colossal encore que n’ont
jamais osé le rêver pour leur empire les conquérants les
plus audacieux.
Point de départ ou point d’arrivée d’une évolution his¬
torique, modèle dont s’inspirent d’autres constructions.
LA COLLECTIVITÉ ÉTATIQUE 87

la collectivité étatique se trouve ainsi au centre de la


société internationale et du droit international. Et qu’on
prenne garde que si existait un jour un État universel, cela
signifierait qu’il n’y a plus de droit international et plus
de société internationale, au sens où nous l’entendons
depuis la fin du Moyen Age.

BIBLIOGRAPHIE

a) Sur le territoire.
Heinrich (W.), Théorie des Staatgebiets, Vienne, 1922;
La Pradelle (P.), La frontière, Paris, 1928; Schœnborn,
La nature juridique du territoire, R. C. A. D. I., 1929, t. V;
Delbez (L.), Le territoire dans ses rapports avec l’État,
R. G. D. I. P., 1932, p. 705-738; Rousseau (Ch.), Les
frontières de la France, Paris, Pedone, 1954-
b) Sur le principe des nationalités.
Redslob, Le principe des nationalités, R. C. A. D. L,
1931, t. III; Ruyssen (Th.), Le droit des peuples à disposer
d’eux-mêmes. Revue de métaphysique et de morale, 1933;
Weil (P.), L’Europe du xix® siècle et l’idée de nationalité,
Paris, 1938; Vergnaud (P.), L’idée de la nationalité et de
la libre disposition des peuples dans ses rapports avec l’idée
de l’État. Genève, Droz, 1955; Scelle (G.), Quelques
réflexions sur le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.
Mélanges Spiropoulos, 1957, p. 385-392; Merle (M.), Les
plébiciscites organisés par les Nations-Unies, A. F. D. I.,
1961, p. 425-444; Heraud (G.), L’Europe des ethnies,
Paris, Presses d’Europe, 1963.
c) Sur le critère de l’État.
SuKiENNiCKi, Essai sur la souveraineté des Etats, thèse,
Paris, 1926; Krabbe, La notion de l’État, R. C.^A. D. L,
vol. 13; Rousseau (Ch)., L’indépendance de l’État dans
l’ordre international, R. C. A. D. I., 1948, t. II; Koro-
wicz (M.), Some présent aspects of sovereignty in interna¬
tional law, R. C. A. D. L, 1961, vol. 102; Guggenheim (P.)
La souveraineté dans l’histoire du droit des gens. Mélanges
Rohn, p. 134-146; Cassimatis (G.-P.), L’État, la société
et le droit, Paris, 1964; Sovereignty within the law par
A. Lawson, W. Jenks et divers auteurs, Londres, 1965.
CHAPITRE II

LE PHÉNOMÈNE DE DOMINATION
L’IMPÉRIAUSME

81. — Objet de l’étude. — Entre les diverses sociétés


qui composent la société internationale, les rapports ne
sont pas placés nécessairement sous le signe de l'égalité.
Le déséquilibre des forces, matérialisé ou non par des
opérations militaires, aboutit à ime modification des com¬
pétences territoriales des collectivités en présence. La
compétence de l'une s'accroît, celle de l'autre par voie de
conséquence s'aménuise.
Les impérialismes ne sont point d'ailleurs toujours dans
une phase ascendante, et le moment peut apparaître de
leur dislocation.
Ces divers faits sociaux ont donné naissance à une série
d'institutions juridiques dont la plupart ont disparu ; les
protectorats, les cessions d'administration, le régime des
concessions, le régime des capitulations, la vassalité.

§ 1®“^. — Les protectorats.

82. — Caractères généraux du régime. — Le protec¬


torat est un régime conventionnel par lequel deux États
organisent entre eux ime répartition inégale de l'exercice
des compétences. L'État protégé perd, en particulier, sa
compétence extérieure. L'État protectem: assure seul la
représentation diplomatique, la protection des ressortis¬
sants de l'État protégé, il est seul internationalement res¬
ponsable. Dans le domaine interne, la répartition des
LE PHÉNOMÈNE DE DOMINATION 89

compétences est variable. En principe, le régime du pro¬


tectorat exclut l’administration directe par l’État pro¬
tecteur, mais on a constaté parfois une certaine tendance
à étendre l’organisation de services publics directement
rattachés à l’Etat protecteur.
Le protectorat établi en 1914 par la Grande-Bretagne
sur l’Egypte a présenté la caractéristique particulière de
procéder d’un acte unilatéral britannique, et non d’un
traité international. On peut citer dans le même sens le
protectorat allemand sur la Bohême-Moravie organisé par
une ordonnance du 16 mars 1939. Toutefois cette ordon¬
nance s’appuie sur le traité du 15 mars et d'ailleurs le
régime de la Bohême-Moravie n’a pas été véritablement
celui d’un protectorat.

83. — Variété des protectorats. — Chaque traité de


protectorat précise les modalités du régime particulier. Il
existe donc une pluralité de régimes de protectorats.
Diverses catégories ont été toutefois dégagées. On dis¬
tingue ainsi le protectorat de droit des gens, le protectorat
colonial, les quasi-protectorats américains.
— La première forme apparaît dans les rapports entre
États de même civUisation, dont l’une est une très grande
Puissance et l’autre une communauté très réduite. ÉUe ne
se présente d’ailleurs que rarement à l’état pur et s’ana¬
lyse souvent en ime simple protection.
— La seconde forme est une manifestation du phéno¬
mène colonial dont elle constitue une variante. Au lieu de
se présenter sous la forme d’une conquête et d’une
annexion territoriale, la domination coloniale maintient
ici la structure gouvernementale et administrative locale
et le régime pohtique, mais exerce un contrôle et une
tutelle très étroits.
La pratique française avait minimisé en Asie la distinc¬
tion entre colonies et protectorats, par exemple en Indo¬
chine où l’ensemble connu sous le nom de gouvernement
général d’Indochine groupait une colonie propre¬
ment dite, la Cochinchine, des protectorats vérita¬
bles, Cambodge et Annam, et un protectorat où s’est
exercée pendant longtemps l’administration directe, le
Laos.
Les solutions françaises ont rattaché longtemps les pro¬
tectorats d’Asie au ministère des Colonies, et les protecto¬
rats de Tunisie et du Maroc au Ministère des Affaires
étrangères. Même dans les protectorats africains, la ten-
go LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

dance a été très nette, pendant longtemps, de réserver


une large place à l’administration directe.
— La troisième forme, celle des protectorats dits amé¬
ricains, est très particulière, elle a réglé pendant quelque
temps les rapports entre les États-Unis et certains petits
États de l’Amérique centrale. Ce sont des formes aujour¬
d’hui caduques.

84. — L’évolution des protectorats. — La formule du


protectorat n’est pas extrêmement stable. D’une part elle
dérive de rapports de force qui peuvent changer, d’autre
part elle constitue parfois une façade et une étape sur la
voie de l’annexion; enfin le protectorat étant présenté
comme une institution destinée à guider et prot%er une
collectivité, il apparaît qu’une évolution normale du pro¬
tectorat est l’accession à la pleine compétence, l’État pro¬
tégé devenant à nouveau un État ordinaire.
Les exemples de transformation de protectorats en ter¬
ritoires coloniaux sont nombreux. Certains protectorats
coloniaux français ont été abohs unilatéralement par des
lois françaises pour faire place à un régime purement colo¬
nial. Au protectorat étabh sur Tahiti par le traité du
9 septembre 1842 a été substituée l’annexion (loi^ du
30 décembre 1880). Madagascar, après avoir été un État
protégé en vertu du traité du 17 décembre 1885, modifié
en 18^95, a été transformé en colonie par la loi du
6 août 1896 et a eu ensuite le statut de territoire d’outre¬
mer avant de recouvrer en i960 l’indépendance. Les sul¬
tanats d’Anjouan, de Mohéh et de la Grande Comore, pla¬
cés sous protectorat français par trois traités de 1886, ont
été annexés par la loi du 25 juillet 1912. La Corée a été
un protectorat japonais en vertu du traité du 17 no¬
vembre 1905, puis est devenue une colonie japonaise à la
suite d’un traité du 22 août 1910. Le Transvaal, placé
sous le régime du protectorat britannique par la Conven¬
tion de Prétoria de 1881, a été annexé à l’issue de la guerre
des Boers par le traité du 31 mai 1902. L’annexion du
Transvaal et de l'Orange devait être d’ailleurs le point de
départ d’une indépendance progressive dans le cadre du
dominion de l’Afrique du Sud groupant les anciens États
boers et les anciennes colonies britanniques du Natal et
du Cap.
Le protectorat britannique sur les Iles Ioniennes, étabh
par le traité de Paris du 5 novembre 1815, a duré moins
de cinquante ans, pour faire place au retour de ces îles
LE PHÉNOMÈNE DE DOMINATION QI

à la Grèce par le traité de Londres du 14 novembre


1863.
Le protectorat britannique sur rEg5q)te, formellement
établi par l’acte unilatéral du 18 décembre 1914, n’a duré
que huit ans, une déclaration du gouvernement protecteur
du 28 février 1922 mettant fin à ce régime.
Les protectorats financiers américains établis à l’égard
de la République dominicaine (traité du 8 février 1907),
du Honduras (traité du 10 janvier 1911), du Nicaragua
(traité du 6 juin 1911), celui, de portée plus large, établi
sur Haïti (traité du 16 septembre 1915) ont successive¬
ment été abandonnés. Une transformation analogue s’est
manifestée à l’égard de Cuba. Après la guerre hispano-
américaine l’assemblée constituante cubaine avait voté, à
la demande des États-Unis, l’introduction dans la consti¬
tution d’une disposition connue sous le nom d’amende¬
ment Platt. Ce texte fut ensuite intégré dans le traité du
22 mai 1903 entre Cuba et les États-Unis. Cuba renonçait
au droit de conclure avec les Puissances étrangères aucun
traité tendant à diminuer son indépendance ou à per¬
mettre leur installation sur son territoire, ainsi qu’au droit
de contracter des dettes étrangères. Les États-Unis rece¬
vaient le droit à!intervention à Cuba pour la garantie de
l’ordre pubhc, la protection de l’intégrité et de l’indépen¬
dance de l’île. Le traité de 1903 étabhssait ainsi un pro¬
tectorat, le caractère perpétuel du régime était affirmé
dans le traité, mais il y a été mis fin par un traité du
29 mai 1934 laissant simplement aux États-Unis la base
navale de Guantanamo.
Les protectorats français d’Asie ont évolué de même
vers l’indépendance avec la forme particulière du statut
d’État associé comme étape intermédiaire (1949-1954),
dans le cadre de l’Union française.

85. — La Tunisie. — Le traité du Bardo du 12 mai 1881


complété par la Convention de la Marsa du 8 juin 1883
avaient établi le protectorat français sur la Tunisie.
La pratique administrative française avait tendu, dans le
domaine interne lui-même, à dépasser les dispositions des
traités et organisé une véritable administration directe.
Les conventions franco-tunisiennes du 3 juin 1955 ont
rétabli l’autonomie interne conforme à la notion véritable
de protectorat. Le régime qu’elles instituaient n’était qu’une
étape vers l’indépendance tunisienne que reconnaissait
solennellement l’année suivante le protocole d’accord franco-
tunisien du 20 mars 1956, complété par l’accord du
92 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

15 juin 1956 sur la représentation diplomatique de la Tunisie,


qui prévoyait en outre une coopération des deux États en
matière de politique extérieure. La Tunisie a été admise
comme membre de l’O. N. U. le 21 novembre 1956.

86. — Le Maroc. — La situation internationale du Maroc


a été pendant longtemps fort complexe, la « question maro¬
caine » a constitué avant 1914 un problème délicat résolu dans
le cadre du concert européen.
Sur le plan économique, le territoire marocain était régi
par le principe dit de la « porte ouverte » posé par l’Acte
d’Algésiras du 7 avril 1906 et confirmé par la convention
franco-allemande du 4 novembre 1911 comportant la faculté
d’adhésion pour d’autres États.
Sur le plan politique, le traité de Fès du 30 mars 1912
avait établi le protectorat de la France sur le Maroc. Mais le
régime était rendu plus complexe par l’existence, malgré un
protectorat unique, de plusieurs zones : une zone française,
une zone espagnole, une zone internationale ou zone de
Tanger.
Le traité franco-espagnol du 27 novembre 1912 avait
reconnu à l’Espagne dans la zone géographique dite du
Maroc espagnol une certaine compétence juridictionnelle et
administrative se superposant au pouvoir détenu par le
représentant du Sultan dans cette zone, le Khahfe.
La zone de Tanger était soumise à un régime d’internatio¬
nalisation.
Le protectorat français avait débordé, comme en Tunisie,
vers des formules d’administration directe. Il fut abrogé par
la déclaration commune franco-marocaine du 2 mars 1956
constatant que le traité de Fès de 1912 ne correspondait plus
aux nécessités modernes, et reconnaissant l’indépendance du
Maroc. Une convention ultérieure du 28 mai 1956 rendait au
Maroc l’existence de ses compétences internationales et
prévoyait une coopération en matière de relations extérieures.
Le statut de la zone dite espagnole a été abrogé par les
accords hispano-marocains du 7 avril 1956. Quant au statut
de Tanger il devait être abandonné avec la conférence de
Tanger (8-29 octobre 1956). Le royaume du Maroc est un
État indépendant membre de l’O. N. U. (12 novembre 1956).

87. — La fin des protectorats français d’Indochine. —


Le caractère temporaire des protectorats s’est vérifié avec
l’évolution des protectorats d’Indochine qui a été marquée
pour le Vietnam par une longue période d’hostihtés (1946-
1954)-
1° Annam et Viêt-nam.
Étabh sur l’Annam par les traités du 15 mars 1874 et du
6 juin 1884, étendu ensuite au Tonkin, le régime du protec¬
torat fut abandonné par l’accord franco-vietnamien du
LE PHÉNOMÈNE DE DOMINATION 93

6 mars 1946 qui comportait la reconnaissance de la Répu¬


blique démocratique du Viêt-nam, État libre ayant son gou¬
vernement, son parlement, son armée, ses finances, faisant
partie de la Fédération indochinoise et de l’Union française.
Quelques précisions devaient être données dans le modus-
vivendi des 14-15 septembre 1946. La Constitution francise
d’octobre 1946 semblait devoir fournir pour le nouvel État
la formule d’État associé, mais la nouvelle Constitution viet¬
namienne de novembre 1946 ne mentionnait en aucune
manière UUnion française. La politique française s’orienta
alors vers des négociations avec d’autres personnalités que
celles qui gouvernaient la République démocratique. L’ac¬
cord de la baie d’Along du 5 juin 1948 conclu avec l’ex-empe¬
reur déchu comportait la reconnaissance d’une indépendance
de l’État du Viêt-nam, qui proclamait son adhésion à l’Union
française en qualité d’État associé. Par un échange de lettres
du 8 mars 1949 le régime était précisé. Le Viêt-nam bénéficiait
non seulement de l’autonomie interne mais d une certaine
compétence extérieure, avec un droit de représentation
diplomatique propre, linuté à certains pays (Saint-Siège, Siam,
Chine ou Inde) et une politique extérieure soumise d’ailleurs
au contrôle du Haut Conseil de l’Union française.
Le Viêt-nam voyait d’ailleurs son territoire accru de la
Cochinchine, qui constituait avant 1949 une colonie et dont
le rattachement au Viet-narci prévu par les accords de 1949
fut effectué par une loi du 4 juin 1949-
Le gouvernement français s’est engagé à transférer toutes
les compétences au Viêt-nam par une déclaration du 3 juil¬
let 1953 et une déclaration commune fut signée à Paris le
28 avril 1954, mais l’indépendance ne devait être acquise que
dans le cadre des accords conclus lors de la conférence de
Genève de juillet 1954, à laquelle étaient représentés l’État
du Viêt-nam et la République déinocratique du Viêt-nam.
Ce texte prévoyait aussi des élections en 1956 destinées à
réunifier le Viêt-nam, elles n’ont pas eu lieu et il existe actuel¬
lement deux États distincts.
2° L’évolution du protectorat établi sur le Cambodge par
le traité du ii août 1863 et la convention du 17 juin 1884
a abouti à une émancipation progressive. Préparé dès
octobre 19451 réalisé en janvier i94^> l’uccord franco-cambod¬
gien, sur une formule d’indépendance interne, fait place,
après un échange de lettres du 27 novembre I947< uu traité
franco-cambodgien du 8 novembre 1949- celui-ci le
Cambodge devient un État indépendant non seulement sur
le plan des affaires intérieures mais aussi, selon des modahtés
diverses d’ailleurs, sur le plan de la compétence extérieure,
le Cambodge étant un État associé à la République française
dans le cadre de l’Union française.
A la suite de la déclaration française du 3 juillet 1953,
des accords du 29 août devaient transférer au Cambodge
94 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

toutes les compétences, d’autres accords d’août et sep- ■


tembre 1953 organisent entre le Cambodge et la France des;
rapports d’assistance technique économique et culturelle.
Le Cambodge est membre de l’O. N. U. (14 décembre 1955).
3° Le statut politique du Laos est demeuré longtemps
fort imprécis. On a pu discuter sur l’existence d’un véritable
protectorat. Il était entendu, en pratique, comme n’excluant
pas l’administration directe. Préparée par l’échange de lettres
des 25 novembre 1947 et 14 janvier 1948, la convention
générale entre la République française et le Royaume du
Laos du 19 juillet 1949 faisait de cet État un État associé.
Le traité franco-laotien du 22 octobre 1953, intervenu
également à la suite de la déclaration du 3 juillet, a reconnu
la pleine indépendance du Laos et une association de carac¬
tère international et contractuel entre les deux États.
Il ne subsiste actuellement entre la France et le Laos que
des accords d’assistance technique, une base militaire fran¬
çaise prévue par les accords de Genève a été depuis évacuée,
le Laos pratiquant une politique de neutralité définie dans
la déclaration du 9 juillet 1962 incorporée dans l’accord de
garantie de neutralité signé à Genève le 23 juillet 1962.

88. — Régimes spéciaux. — On est quelquefois tenté


de qualifier de protectorats certaines situations interna¬
tionales qui comportent quelques analogies avec ce régime
mais ne lui correspondent point exactement. Un exemple
ancien est celui de la viUe de Cracovie soumise à partir de
1815 à la protection, d'ailleurs collective, de la Prusse, de
la Russie et de l’Autriche, à laquelle elle fut annexée en
1846.
Les exemples modernes concernent des territoires exigus
dont le statut politique constitue une véritable survivance
historique.
La République de Saint-Marin, minuscule répubhque
enclavée à l’intérieur du territoire itahen, est placée sous
la protection de l’Itahe (conventions du 28 juin 1897 et du
31 mars 1935). EUe est demeurée neutre au cours de la
seconde guerre mondiale.
La principauté de Liechtenstein a conclu des conventions
postale et douanière avec la Suisse.
Les rapports entre la principauté de Monaco et la France
sont régis par plusieurs textes dont le plus général est le
traité franco-monégasque du 17 juillet 1918, intitulé
« traité d’amitié protectrice ». Le régime n’est pas celui
du protectorat qui ne sera étabh d’après l’article 3 qu’en
cas de vacance de la couronne. Le Prince s’engage à exer¬
cer ses droits de souveraineté en conformité avec les inté-
LE PHÉNOMÈNE DE DOMINATION 95

rêts politiques, militaires, navals et économiques de la


France. Divers accords franco-monégasques ont été signés
le i8 mcd 1963. Par-delà les dispositions politiques géné¬
rales du traité de 1918, ils sont relatifs aux problèmes de
voisinage, aux problèmes fiscaux et douaniers, aux rela¬
tions postales.
Si exigus que soient ces territoires, ils constituent des
États. Tel n’est pas le cas des Vallées d’Andorre, hautes
vallées pyrénéennes dont le statut politique est une
étrange survivance d’une institution de vassalité féodale,
les vallées étant soumises depuis le xiii® siècle à l’autorité
de deux co-princes, l’évêque espagnol d’Urgel et le chef
de l’État français.

89. — Le « protectorat de Bohême-Moravie. » — Poursui¬


vant son œuvre de destruction de l’État tchécoslovaque qui
avait été amputé par les accords de Munich de 1938, le Chan-
ceher Hitler, après une entrevue dramatique avec le Président
de la République tchécoslovaque et le Ministre des Affaires
étrangères, obligea les deux hommes d’État, au moyen de
terribles menaces et de la contrainte physique, à signer le
traité du 15 mars 1939, plaçant le peuple tchèque sous la pro¬
tection du Reich allemand. Une ordonnance allemande du
16 mars organisait ce régime de protection sous le nom de
« Protectorat de Bohême et de Moravie ». Il s’agissait en
réahté d’une annexion marquée par l’occupation du pays par
les troupes allemandes, l’intégration du territoire de la
République dans le territoire du Reich, le pouvoir législatif
reconnu au Protecteur du Reich. L’établissement de ce
régime a constitué une des plus graves violations du droit
des gens dont s'est rendu coupable le régime national-
socialiste.
Détachée de la Bohême-Moravie, la Slovaquie, à la demande
de son Premier Ministre, sollicitait ultérieurement la pro¬
tection du Reich, qui lui était accordée par un traité germano-
slovaque du 23 mars 1939. Dans ce cas il ne s’agissait pas
davantage d’un protectorat, mais cette fois d’une simple
protection.

§ 2. — Cessions d’administration
et cessions à bail.

90. — Généralités. — La pratique des cessions d’admi¬


nistration et cessions à bail est apparue au cours du
XIX® siècle dans le cadre de pohtiques impériahstes dont
elle masquait l’âpreté. Ces formules ont ainsi rernplacé celle
de l’annexion. Au xx® siècle elles ont été utilisées dans
g6 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

le cadre d’une politique militaire de bases stratégiques.


Les raisons politiques qui dominent ces cessions
montrent qu’il ne faut pas attacher trop d'importance
aux formes juridiques utilisées. La formule de la cession
à baü, empruntée à la technique juridique du droit privé,
est évidemment totalement inexacte, car un État n’a pas
à l’égard de son territoire un droit de propriété. La for¬
mule de la cession d’administration est plus valable. Il
s’agit d’une substitution de compétehce. Normalement le
territoire constitue le cadre d’une compétence étatique
exclusive. Avec les cessions d’administration et les ces¬
sions à bail se trouve substituée, sur la portion du terri¬
toire cédée à bail ou faisant l’objet d’une cession d’admi¬
nistration, la compétence d’un État autre que celui qui est
normalement compétent.

91. — Cessions d’administration. ■—• Les exemples les plus


connus s’appliquent à des territoires européens. L’article 25
du traité de Berlin de 1878 concerne la cession à l’Autriche,
par la Turquie, de l’administration de la Bosnie-Herzégovine.
Précisé par la Convention turco-austro-hongroise du
21 avril 1879, le régime fit place à l’annexion pure et simple
du territoire par l’Autriche-Hongrie le 5 octobre 1908.
L’administration de l’île de Chypre fut cédée par la Turquie
à la Grande-Bretagne en vertu d’un traité du 4 juin 1878, et
l’annexion fut prononcée au cours de la première guerre mon¬
diale par un Ordre en Conseil britannique du 5 novembre 1914.
Chypre est devenue un État indépendant en i960, selon le
statut établi par les accords de Londres de 1959 conclus
entre la Grèce, la Turquie et le Royaume Uni.

92. — Cessions à bail : les exemples caducs. — Le procédé


de la cession à bail de certains territoires a été utilisé par les
Puissances dans le cadre de leur politique d’expansion
économique en Chine, à la fin du xix® siècle. C’est une
variante du système colonial qui respecte en apparence le
principe de la souveraineté chinoise et constitue, en réalité,
avec les traités inégaux, un des aspects du break up of China.
Le branle fut donné par le traité germano-chinois du
6 mars 1898 par lequel la Chine cédait à bail pour 99 ans à
l’Allemagne le territoire de Kiao-Tchéou. Quelques jours
plus tard, par le traité du 27 mars, la Russie obtenait pour
25 ans la cession de Port-Arthur et de Talien Wan. Ce a bail »
était transféré au Japon par l’article 5 du traité de Ports-
mouth du 3 septembre 1905 mettant fin à la guerre russo-
japonaise, et porté à 99 ans (accord chinois donné dans le
traité de Pékin du 22 décembre 1905). Un traité du ler juil¬
let 1898 cédait à bail à la Grande-Bretagne le territoire de
LE PHÉNOMÈNE DE DOMINATION 97
Weï-Haï-Weï. Enfin le traité du i8 novembre 1899 cédait à
la France, dans les mêmes conditions, le territoire de Kouang-
Tchéou.
Le régime des cessions à bail des territoires chinois a été
limité dans le temps. Au cours de la conférence de Washing¬
ton, en février 1922, la Chine s’engagea à ne plus céder désor¬
mais à bail aucune portion de son territoire; le traité dit des
Neuf Puissances, du 6 février 1922, contient dans son
article i®r l’engagement de respecter la souveraineté, l’indé¬
pendance, l’intégrité territoriale et administrative de la
Chine. Les rétrocessions eurent lieu successivement. Le
Japon rétrocéda en 1923 le territoire de Kiao-Tchéou qu’il
avait conquis au cours de la Première Guerre mondiale et
que l’art. 156 du Traité de Versailles lui avait donné en
pleine souveraineté. Weï-Haï-Weï fut rétrocédé par la
Grande-Bretagne en 1930. Kouang-Tchéou fut restitué par
la France en 1945 après avoir été occupé par le Japon en
1943- Quant à Port-Arthur, abandonné par le Japon, son
régime est devenu très particuher en vertu des traités sino-
soviétiques des 14 août 1945 et 14 février 1950.

93. — Cessions à bail : exemples actuels. — La for¬


mule des cessions à baü de caractère purement stratégique
a été pratiquée par les États-Unis, à Cuba, avec le traité
de 1903, puis celui de 1934, et dans l’Amérique centrale
avec le fameux traité Bryan-Chamorro du 5 août 1914.
Depuis la seconde guerre mondiale l'emploi de la formule
s'est généralisé.
Des cessions à bail ont été consenties aux États-Unis
dans certaines possessions britanniques (accord dit
d’échange des destroyers contre des bases à Terre-Neuve
du 2 septembre 1940, accord du 27 mars 1941), au Dane¬
mark, en Islande, aux Açores, au Maroc, aux Philippines,
au Japon, en Équateur. ÊUes sont actuellement fort nom¬
breuses.
La Grande-Bretagne a disposé de diverses bases stra¬
tégiques aux Açores et en Islande, au cours de la seconde
guerre mondiale, mais les a restituées après les hostihtés.
L'U. R. S. S. s’était fait octroyer, à l’issue de la guerre
avec la Finlande, la cession à bail de la presqu’île de Han-
goe (traité de Moscou du 12 mars 1940) ; elle a abandonné
ce territoire dans le traité de paix du 10 février 1947 mais
obtenu la cession à bail pour 50 ans du territoire de
Porkkala-Udd comme base navale mihtaire. EUe y a
renoncé d’ailleurs par accord avec la Finlande du 19 sep¬
tembre 1955.

4. - INSTITOTIONS INTERNATIONALES.
98 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

§ 3. — Régime des concessions


et régime capitulaire.

94. — Définitions. — Le régime des cessions à bail


aboutit à soustraire le territoire « loué » à l'exercice des
compétences de l'État qui loue. On retrouve une telle
exclusion de compétence de l'État territorial dans
deux institutions particulières du droit international clas¬
sique, qui sont fort différentes du régime de la cession à
baü dans leur technique, mais qui sont comme eUe une
manifestation de l'impérialisme. Ces régimes sont, non
seulement distincts de celui de la cession à bail, mais sont
encore fort différents entre eux. Ils appartiennent d'ail¬
leurs à une époque révolue de l'organisation des relations
internationales.

95. — Les concessions. — L’institution des concessions


satisfait aux exigences du commerce international en per¬
mettant la protection particulière des commerçants étran¬
gers et plus généralement des étrangers qui bénéficient d’un
privilège d’exterritorialité. Installés dans certaines zones,
les étrangers sont soustraits à la compétence administrative
et juridictionnelle du gouvernement concédant. Les consuls
et une municipalité élue par les étrangers disposent du pou¬
voir législatif et réglementaire, le consul du pouvoir juridic¬
tionnel. Il s’agit donc de sortes d’enclaves étrangères.
Ce régime a été fort développé en Chine dans le cadre des
traités inégaux conclus depuis 1842 et la guerre de l’opium
par les Puissances occidentales. La formule s’est appliquée
sous diverses formes : tantôt de concessions nationales,
tantôt de concessions internationales, au profit d’une col¬
lectivité composée de nationaux de diverses nations étran¬
gères, tantôt de concessions dites mixtes ou sino-étrangères
qui comprenaient des ressortissants chinois. Territorialement
on peut citer les exemples des concessions de Shang-Haï,
d’Amoy, de Canton, d’Hankéou, de Tien-Tsin. La Chine
après avoir demandé, en 1919 à la conférence de la Paix, en
1922 à la conférence de Washington, l’abandon des conces¬
sions étrangères a susccessivement obtenu satisfaction. Le
traité de Versailles fit disparaître les concessions allemandes,
puis ultérieurement disparurent les concessions belges,
russes, certaines concessions anglaises. Au cours de la seconde
guerre mondiale, ou au lendemain, fut réalisée la liquidation
des dernières concessions.

96. — Le régime des Capitulations. — Du régime des


concessions se distingue et se rapproche à la fois le régime
LE PHÉNOMÈNE DE DOMINATION
99
des Capitulations. L’analogie provient de ce que le régime
des Capitulations s’analyse en une restriction des compétences
territoriales, car l’étranger, dans le pays auquel s’applique
ce régime demeure soumis à la compétence de son État
d’origine ou parfois d’un autre État. Mais, à la différence du
régime des concessions, le régime capitulaire repose sur une
notion d’exterritorialité fictive. Il n’y a pas de quartier d’une
ville, qui soit matériellement soustrait à la compétence de
l’État territorial. Le régime capitulaire est extra-territorial
en ce sens qu’il constitue, au fond, une application du prin¬
cipe de la personnalité des lois.
Le régime capitulaire doit son origine à la nécessité de
garantir les étrangers, en particulier les commerçants, ins¬
tallés dans des pays dont les institutions en raison de leur
faible degré de développement ou de leur caractère religieux
ne peuvent pas fonctionner d’une manière satisfaisante à leur
égard. On peut craindre, en particulier, un déni de justice.
Le régime capitulaire est donc discriminatoire. Il a constitué
pour les étrangers qui en bénéficiaient un régime privilégié.
On comprend ainsi que l’application de ce régime se soit
développée dans le cadre général de l’impérialisme des Puis¬
sances, notamment au cours du xix® siècle, bien que les
origines historiques soient plus anciennes. L’aire d’applica¬
tion du régime a coïncidé avec l’expansion coloniale et le
régime s’est appliqué sur le pourtour de la Méditerranée, en
Afrique et en Asie. Manifestation d’un droit international
inégal, le régime des capitulations a disparu en grande
partie.

97. — Les Capitulations et la Turquie. — C’est dans les


rapports entre la France et la Turquie qu’est apparu le
régime capitulaire. Il tire son nom du mot latin « capitulum »
qui signifie chapitre et dont le pluriel, à la fin du Moyen Age,
est synonyme de « traité ». Le premier traité instituant le
régime d’exterritoriahté ultérieurement désigné sous le nom
de régime des Capitulations a été conclu en 1535 par Fran¬
çois I®r et Soliman le Magnifique, dans le cadre de la politique
du roi de France tentant de prendre à revers la Puissance
autrichienne en s’alhant avec le Grand Turc. Au xviii® siècle,
un traité du 28 mai 1740 entre Louis XV et le Sultan Mah¬
moud I®r conférait au régime, dans les rapports entre la
France et la Turquie, un caractère perpétuel. Le régime des
Capitulations s’étendit entre la Subhme Porte et d’autres
États européens que la France. Dénoncé unilatéralement
par la Turquie au cours de la première guerre mondiale, le
régime disparut par voie conventionnelle, en 1917 à l’égard
de l’Allemagne, en 1921 à l’égard de la Russie. L’abohtion
générale en fut stipulée dans le traité de Lausanne du
24 juillet 1923.
100 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

98. — Capitulations et protectorat. — Un régime de Capi¬


tulations avait été institué par divers traités conclus par des
États qui, par la suite, devinrent des États protégés. L’État
protecteur a cherché, après l’étahMssement du protectorat,
à abohr le régime capitulaire. Les motifs de cette pohtique
étant évidemment le désir d’éviter que d’autres États dis¬
posent de certains droits à l’encontre de l’État protégé, et le
prétexte invoqué étant le perfectionnement des institutions
locales. En raison du caractère conventionnel du régime
capitulaire l’abohtion de ce régime devait se faire, juridique¬
ment, par voie de négociations.
Pour la Tunisie, l’abandon fut consenti par l’ensemble des
Puissances à la suite d’une série de négociations diplomatiques.
Le même procédé fut appliqué pour le Maroc. La Grande-Bre¬
tagne renonça seulement en 1937. Les États-Unis ont refusé
d’abandonner les privilèges capitulaires qu’ils tiennent au
Maroc d’un traité de 1836. Dans un arrêt de 1952 la Cour
internationale de justice avait confirmé le maintien au profit
des ressortissants des États-Unis des privilèges juridiction¬
nels de leurs ressortissants soumis à la seule juridiction
consulaire. L’extinction a été aussi réahsée pour les territoires
qui devaient ultérieurement être annexés (Madagascar pour
la France, Tripolitaine pour l’Itahe), ou soumis au régime du
mandat (Palestine, Syrie, Liban).

99. •— Le problème de l’Ëgypte. — L’immunité de juridic¬


tion, qui est une des pièces essentielles du régime capitulaire,
ne s’est manifestée nulle part plus nettement qu’en Égypte
où le régime avait été institué en 1876. La compétence
pénale demeurait réservée aux consuls des diverses Puis¬
sances, sauf appel devant des juridictions ordinaires natio¬
nales. La compétence civile et commerciale était exercée
dans le cadre international des juridictions mixtes, trois
tribunaux et une Cour d’appel, dont la compétence était fort
étendue. L’Égypte, depuis la proclamation de son indépen¬
dance, poursuivit patiemment l’abandon du régime capitu¬
laire. Reconnu par l’article 13 du traité anglo-égyptien du
26 août 1936 comme « incompatible avec l’esprit du temps et
l’état actuel de l’Égypte », le régime capitulaire a été sup¬
primé par la Convention de Montreux du 8 mai 1947 conclue
entre l’Égypte d’une part et les Puissances capitulaires de
l'autre. L’extinction s’est faite d’une manière progressive
et l’année 1949 a vu s’effacer les dernières traces du régime
capitulaire en Égypte.

100. — Les Capitulations en Orient. — Le régime capitu¬


laire a été étabÛ dans les pays orientaux dans le cadre de
l'expansion européenne et américaine. Il a existé en Iran, au
Japon, au Siam, en Corée. On le trouve en Chine, institué par
les multiples traités inégaux conclus par les Puissances avec
LE PHÉNOMÈNE DE DOMINATION lOI

le Céleste Empire. Il a successivement disparu, du Japon à la


fin du XIX® xiecle, de la Corée apres l’annexion japonaise, du
biam et de 1 Iran, et de la Chine où les dernières institutions
capitulaires ont été supprimées après la seconde guerre mon¬
diale.

§ 4- — La vassalité.

101* — La notion d’Ëtat vassal. — Le régime de la vassa-


hté est essentiellement lié à la notion de féodalité impliquant
une hiérarchie de terres et de personnes et des obhgations
réciproques entre une collectivité supérieure dite suzeraine
et une collectivité inférieure dite vassale. Ce régime a ainsi
été pratiqué à Fépoque féodale en Europe, c’est-à-dire à un
moment où les États, au sens moderne, n’existaient pas.
Si elle emprunte aux institutions de la féodalité l’idée d’une
hiérarchie, la notion d’État vassal apparaît comme distincte
d elles. On a désigné sous ce nom le régime juridique d’une
collectivité en marche vers l’indépendance et qui, après
avoir été soumise au pouvoir étatique central, s’en affranchit
progressivement. Eiitre la province, simple circonscription
administrative d’un État dont elle fait partie intégrante et ce
même territoire devenu un État indépendant, les circons¬
tances ^litiques ont quelquefois exigé des étapes de transi¬
tion. L État vassal constitue une telle étape car son régime
est celui de l’indépendance interne avec soumission à l’État
suzerain dans le domaine des affaires extérieures.
Le caractère d’obligations réciproques, qui caractérisait la
vassahté de l’époque féodale, apparaît quelquefois comme
conservé en apparence dans la mesure où l’État vassal paie
tribut au suzerain, et en cas de guerre lui apporte l’appui de
ses contingents et où l’État suzerain donne sa protection
militaire et diplomatique à l’État vassal dépourvu de compé¬
tence extérieure, sauf dans le domaine économique.
Le droit international classique a utilisé la notion d’État
vassal d’une manière très souple dans la conjoncture très
particulière de la désagrégation de l’Empire ottoman.
L’institution de l’État vassal a été ainsi très limitée dans ses
applications, tant du point de vue territorial que du point
de vue chronologique. C’est une institution de la fin du
xix® siècle. Elle se situe bien dans le cadre d’une politique
impérialiste de conquêtes ou d’assujettissement dont elle
constitue le crépuscule et le reflux.

102. — Exemples d’Ëtats vassaux. — L’histoire de l’Empire


ottoman, au xix® siècle, est celle de sa dislocation. Les pos¬
sessions turques en Èurope deviennent successivement
indépendantes. La Grèce acquiert, la première, l’indépen¬
dance, sans transition, les autres territoires habités par des
populations chrétiennes franchissant successivement les
102 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

diverses étapes qui les mènent vers le statut d’État indépen¬


dant.
Cette évolution a été celle de la Serbie, du Monténégro,
des principautés moldo-valaques, devenues la Roumanie.
Ces territoires constitués en États vassaux de la Turquie
par le traité de Paris du 30 mars 1856, ce qui constituait un
* progrès par rapport à leur statut antérieur de provinces
autonomes, devenaient des États souverains par le traité
de Berlin du 13 juillet 1878 (art. 26, 34, 43). L’indépendance
de ces principautés chrétiennes avait été l’œuvre des Puis¬
sances du concert européen. Dans l’évolution de la Bulgarie
l’intervention européenne fut moins nette, au stade terminal
au moins. Le traité de Berlin du 13 juillet 1878 avait fait de
cette principauté formellement une province turque auto¬
nome et en fait un État vassal de la Sublime Porte, car les
articles 3 à 12 du traité conféraient à ses gouvernants une
compétence internationale assez étendue. Entre le vassal et le
suzerain les liens furent fort lâches. A la conférence de la
paix de La Haye de 1899 la Bulgarie dispose d’une représen¬
tation propre et signe l’Acte final, à un rang autre d’ailleurs
que l’ordre alphabétique qui ne lui est accordé qu’à la seconde
conférence, en 1907. La Bulgarie, dont le chef d’État était
depuis 1885 gouverneur de la province autonome de Rou-
mélie, créée par le traité de 1878, au sud des Balkans, pro¬
clama, par la déclaration de Tirnovo du 5 octobre 1908, son
indépendance étendue à la Roumélie, brisant ainsi unilaté¬
ralement le statut de la vassahté. Le fait accomph était
reconnu en 1909 par les Puissances européennes et par la
Turquie.

103. — L’évolution de la situation internationale de l’Égypte.


— L’évolution la plus curieuse vers l’indépendance totale est
certainement celle de l’Égypte. Après avoir été le théâtre
d’une très brillante civilisation dont l’histoire remonte à plus
de quatre mille ans avant notre ère, l’Égypte a été conquise
par les Romains, les Perses puis les Arabes, et devint au
XVI® siècle une province turque occupée d’ailleurs en 1797
par Bonaparte, puis ultérieurement, en 1882, par les forces
anglaises.
Du début du xvi® siècle à 1840, l’Égypte est une province
turque administrée par une gouverneur (pachahk) assisté
d’une assemblée (divan). L’insurrection du gouverneur
Méhémet-Ali, victorieuse en 1838, aboutit à faire de l’Égypte,
en 1840, une province turque autonome dont le statut est
consacré par les Puissances dans le traité du 15 juillet 1840
et dans un firman ottoman de 1841. Le gonverneur devient
héréditaire, avec le titre de vali. Il a droit de lever l’impôt au
nom du sultan à condition de payer tribut. Les lois et les
traités turcs s’appliquent à l’Égypte. Le sultan demeure le
chef rehgieux (calife). L’armée et la flotte égyptiennes font
LE PHÉNOMÈNE DE DOMINATION 103

partie des années et flottes turques. Un firman de 1867 donne


au vali le titre de « khédive », lui permet de faire des actes
administratifs et de conclure des traités de caractère non
politique. Le régime tend de plus en plus vers le statut d’État
vassal que précise un firman du 8 juin 1873 donnant au
lAédive le pouvoir législatif, le droit de battre monnaie, une
liberté financière dont il usera mal, et une armée autonome.
L'Eg5rpte demeure privée du droit de légation et du droit de
guerre. Le traité de Constantinople qui organise le régime du
canal de Suez est ratifié par la Sublime Porte et l’Égypte n’en
est pas partie.
La situation juridique de l’Égypte se trouve modifiée
en fait par 1 occupation britannique de 1882 qui succède au
contrôle financier franco-britannique instauré en 1875
à la suite de la ruine du Khédive. Occupé par la Grande-
Bretagne, 1 Etat vassal ne suit plus la politique étrangère de
son suzerain et demeure neutre au cours des guerres balka¬
niques. La conquête du Soudan et l’organisation d’un condo¬
minium anglo-égyptien par le traité du 19 janvier 1899
montrent le divorce entre le statut d’État vassal de la Turquie
et celui de territoire occupé par la Grande-Bretagne, soumis
en fait à un protectorat. Ce protectorat est proclamé par un
Ordre britannique en Conseil du 17 décembre 1914. Il est
reconnu par plusieurs États, puis consacré par le traité de
Versailles (art. 147).
L’indépendance égyptienne devait être obtenue désormais
non plus dans les rapports entre Égypte et Turquie mais dans
les rapports Égypte-Grande-Bretagne. Proclamée solennel¬
lement par le gouvernement britannique dans une déclara¬
tion du 28 février 1922, l’indépendance égyptienne demeurait
soumise à bien des limitations. Le traité anglo-égyptien du
26 août 1936 mettait fin à l’occupation militaire britannique
en ne laissant subsister qu’un stationnement de troupes
dans la région du canal de Suez et l’Égypte entre en 1937
à la Société des Nations.
Il ne restait plus à l’Égypte qu’à obtenir le départ des
troupes britanniques demeurées dans la région du canal. La
dénonciation unilatérale par l’Égypte du traité de 1936,
en octobre 1951, créait des troubles, sans résoudre le pro¬
blème auquel une solution était apportée en septembre 1954
par un nouveau traité anglo-égyptien. L’indépendance égyp¬
tienne était dès lors pleinement acquise.
Î04 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

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(W.-R.), The end of the extraterritoriality in China.
Berkeley, 1952 ; Bondi (P.-E.-J.), Le Maroc et le régime des
capitulations. Symbolæ Verzijl, La Haye, 1958, p. 88-100.

E. — Vassalité.

Scelle (G.), L’indépendance bulgare. Paris, 1910; Bour¬


geois (A.), La formation de l’Égypte moderne. Thèse
Rennes, 1939.
CHAPITRE III

LE PHÉNOMÈNE D’ASSOCIATION

104. — Les^sociations d’États. — On constate que


les différents États qui constituent la société internatio¬
nale ne se présentent pas toujours complètement isolés et
distincts les uns des autres mais sont quelquefois groupés,
possédant en commun certaines institutions.
Ce phénomène d’association est fort important et s’est
manifesté, à diverses périodes de l’histoire, sous des moda-
htés multiples.
Cette diversité est double. Il existe d’une part une diver¬
sité des techniques juridiques de l’association d’États qui
amène à distinguer les diverses Unions, personnelles et
réelles et le fédéralisme. Il existe en outre une diversité
fondamentale entre des associations d’États à but éta¬
tique et des associations d’États dont le but est précisé-
rnent l’organisation institutionnelle de la société interna¬
tionale, soit d’une manière globale ou universelle, soit
d’une manière partielle sur le plan géographique ou sur
le plan de compétences particuhères (unions administra¬
tives).
Ces remarques amènent à traiter dans le présent titre
seulement des associations d’États à but étatique, en dis¬
tinguant les Unions et le fédérahsme véritable b

* Le fédéralisme sera exposé plus loin dans la section 2 du présent chapitre.


Le fédéralisme « organiciste » est étudié dans la seconde partie de ce Manuel.
Si les organisations internationales peuvent s’analyser en une manifestation
de fédéralisme organiciste, la différence fondamentale, sous l’identité ou la
parenté des techniques juridiques, entre ce fédéralisme organiciste et le fédéra¬
lisme étatique provient de ce que les institutions fédérales dans le cas de fédé¬
ralisme étati(^e sont un moyen de réaliser des buts pxirement étatiques analogues
à ceux de l’Etat unitaire tandis que le fédéralisme organiciste comporte un
dépassement des buts proprement étatiques.
LE PHÉNOMÈNE d’aSSOCIATION 107

Section I. — Les unions d’États.

§ i®^. — Les Unions personnelles.

105. — L’Union personnelle* — On désigne sous ce


nom le groupement de deux États qui, tout en demeu¬
rant complètement distincts l’un de l’autre dans les
domaines de l’organisation interne et de la compétence
internationale, possèdent la caractéristique d’avoir en
commun le mêrne souverain. Il apparaît ainsi que le lien
entre les deux États est très limité et qu’il n’existe pas
entre eux de communauté de destin véritablement durable.
Ce sont les hasards de la dévolution successorale dynas¬
tique qui amènent, à certains moments, la présence sur
deux trônes d’un souverain commun. L’Union personnelle
supposant une organisation politique monarchique ne se
trouve que dans des exemples empruntés à l’histoire et
ne se rencontre plus aujourd’hui, bien que certains auteurs
aient voulu voir une union personnelle entre la Grande-
Bretagne et certains États du Commonwealth qui ont été
autrefois des Dominions, comme le Canada, par exemple.
Même lorsque la forme monarchique était très fréquente
dans l’organisation pohtique intérieure des États, la for¬
mule de l’Union personnelle n’était pas nécessairement
très répandue. Certains traités ont pu l’interdire formel¬
lement. Le traité des Pyrénées du 7 novembre 1659 prohi¬
bait la réunion sur une même tête des couronnes d’Es¬
pagne et de France et, à la paix d’Utrecht (1713), la même
interdiction était à nouveau formulée. Le traité de
Londres du 13 juillet 1863 stipulait dans son article 6,
au moment de l’avènement du roi Georges au trône de
Grèce, l’interdiction d’une union personnelle entre la
Grèce et le Danemark. L’Union personnelle a été parfois
utiUsée, à la fin de l’époque féodale, comme une sorte
d’étape vers l’unification de deux territoires, ainsi l’Aragon
et la CastiUe (1479), la France et la Provence (1484), la
France et la Bretagne (1532). Souvent l’Union person¬
nelle n’a été qu’un accident temporaire, sans portée et
sans incidence sur le destin de deux États.

106. — Principaux exemples d’Unions personnelles. — Parmi


les Unions les plus connues qui ont existé, on peut noter :
L’Union de l’Angleterre et du Hanovre qui est apparue avec
I08 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

l’avènement sur le trône de Grande-Bretagne de la maison


dite de Hanovre, en 1714. Elle a pris fin en 1837, la prin¬
cesse Victoria devenant reine d’Angleterre mais se trouvant
exclue de la succession de Hanovre. Un second exemple de
plus brève durée est celui de l’Union des Pays-Bas et du
Luxembourg. Elle avait été établie par les articles 67 et 71 de
l’Acte final du Congrès de Vienne de 1815 et disparut lors
de l’avènement au trône des Pays-Bas, en 1890, de la reine
Wilhelmine.
En dehors de ces deux exemples classiques on peut aussi
citer l’Union de la Pologne et de la Lithuanie qui dura de
1385 à 156g et fit place ensuite à une Union réelle, et l’Union
de la Prusse et de la principauté de Neuchâtel (1707-1857).

107. — L’Ëtat indépendant du Congo. — L’Union per¬


sonnelle la plus curieuse est certainement celle qui a existé
entre la Belgique et l’État dit indépendant du Congo. On se
trouve ici en présence d’une fiction véritable, car l’Union ne
emportait en réalité qu’un État, la Belgique, le soi-disant
État du Congo n’étant pas un État véritable.
Il s’est agi, ici, d’une entreprise coloniale réahsée par le roi
des Belges Léopold II en Afrique centrale, marquée par la
création en 1876 d’une Association internationale placée sous
le patronage du roi et qui aboutit à la constitution d’un ter¬
ritoire colonial exploré par Stanley, acquis de chefs indigènes.
L’Association fut reconnue en 1884 par diverses Puissances, les
États-Unis, la France, l’Espagne, l’Allemagne. Les repré¬
sentants de l’Association internationale furent admis en
1885 à la conférence africaine de Berlin et signaient l’Acte
final. La même année, le roi Léopold II était autorisé par la
Chambre belge à devenir le chef du nouvel État « indépen¬
dant » et ainsi apparaissait entre cet État et la Belgique une
Union personnelle. L’annexion à la Belgique de ce territoire
colonial devait être réalisée en 1907. Le procédé de l’Union
personnelle n’avait été qu’un détour utilisé pour éviter une
annexion coloniale immédiate d’un territoire africain. Il était
apparu difficile que la Belgique dont la constitution défi¬
nissait le territoire comme situé en Europe et dont le statut
international avait été déterminé à Londres, en 1830, comme
celui de la neutrahté permanente, entrât directement dans
la voie coloniale. Après une expérience d’une trentaine d’an¬
nées, en 1908, la réahté coloniale était rétablie et devait
durer jusqu’en igôo.

§ 2. — Les Unions réelles.

108. — L’Union réelle. — Si l’Union personnelle ne


suppose entre deux États distincts que la communauté
de souverain, conséquence des hasards de la dévolution
LE PHÉNOMÈNE d’ASSOCIATION IOQ

successorale, TUnion réelle, au contraire, comporte outre


cette communauté de chef d’État des organes communs
dont la compétence principale relève du domaine des
affaires extérieures. Il existe donc entre les deux États
membres d’une Union réelle une solidarité organique assez
poussée, bien que dans le domaine intérieur, et sauf inci¬
dence de la politique extérieure commune, subsistent des
administrations et des gouvernements distincts.
La formule de l’Union réelle est plus solide et surtout
moins contingente que celle de l’Union personnelle mais
elle est demeurée d’application assez limitée, tant dans
l’espace que dans le temps. Les techniques juridiques
d’étabhssement et de fonctionnement des Unions réelles
sont diverses ainsi que le montre l’étude des trois Unions
les plus récentes, aujourd’hui d’ailleurs disparues.

109. — L’Union Suède-Norvège. — Séparée du Danemark


auquel elle était rattachée depuis la fin du xiv® siècle, la Nor¬
vège fut attribuée au roi de Suède en 1814 et une Union
réelle établie entre la Suède et la Norvège par l’acte de
Charles XIII (Riksakt du 6 août 1815). Cet acte d’Union
laissait subsister deux États distincts dotés de leurs parle¬
ments, leurs gouvernements, leurs législations propres. La
personne du souverain était commune, mais la formule de la
simple Union personnelle était dépassée car, par delà la per¬
sonne du roi, la pohtique extérieure était aussi commune
aux deux royaumes : conclusion des traités, relations diplo¬
matiques, pohtique étrangère.
L’Union devait durer quatre-vingt-dix ans. Elle fut, à la
longue, mal supportée par l’opinion norvégienne qui estimait
que ses intérêts commerciaux étaient insuffisamment repré¬
sentés par un corps consulaire commun dans lequel prédo¬
minaient les Suédois. L’Union fut rompue en 1905, à la confé¬
rence de Karlstad, sur l’initiative de la Norvège, à la suite
d’un plébiscite qui montra nettement le désir séparatiste
des Norvégiens. Les conventions de Stockholm du 26 octo¬
bre 1905 ont réglé à l’amiable la séparation des deux
royaumes.

110. — L’Âutriche-Hongrie. — La monarchie austro-hon¬


groise, souvent qualifiée de monarchie bicéphale, a constitué
pendant une cinquantaine d’années, de 1867 à 1918, une
curieuse Union réelle. Cette formule a permis de résoudre
pendant quelque temps le désir d’indépendance des Hongrois
par rapport à l’Autriche et a marqué la construction supra¬
nationale austro-hongroise. Un compromis (Ausgleich) fut
négocié en 1867 entre le ministre autrichien Beust et le chef
hongrois Deak et divisa l’ancienne monarchie des Habs-
IIO LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

bourg en deux États juridiquement égaux que séparait le


cours de la Leitha. Le même souverain régnait en Autriche
(Cliseithanie) sous le nom d’empereur et en Hongrie (Trans-
leithanie) sous le nom de roi apostolique. Les principes du
compromis furent développés dans deux lois parallèles et
symétriques, la loi hongroise XII et la loi autrichienne du
21 décembre 1867. Chaque État avait son propre Parlement
et son propre Gouvernement, mais il existait des organes
communs. Ces organes étaient constitués non seulement par
le monarque mais par plusieurs ministères et une assemblée
législative commune, issue de chacun des Parlements dis¬
tincts. . . ,
Les affaires communes, gérées par trois mimsteres com¬
muns, étaient les affaires étrangères y compris la représen¬
tation politique et commerciale à l’étranger, les affaires
militaires y compris la marine de guerre, les finances pour ce
qui concerne les dépenses à pourvoir en commun. L’adminis¬
tration des affaires communes était contrôlée par deux délé¬
gations, en nombre égal, désignées par chacun des Parle¬
ments. En outre les affaires commerciales, douanières, moné¬
taires, la fiscalité indirecte, les questions de chemins de fer
et de défense intérieure de la monarchie étaient traitées non
pas en commun mais suivant des principes identiques à
étabür par voie d’entente commune, pour une période de
dix ans, selon le mécanisme de compromis qui furent réalisés
successivement en 1887, i897> iço?- conclusion des traités
de commerce devait marquer un premier desserrement des
liens entre les deux États. La double monarchie minée par le
séparatisme des multiples nationalités qui existaient en
Autriche-Hongrie ne devait pas survivre à la défaite mih-
taire de la Grande Guerre.

111.—L’UnionDanemark-Islande.—L’Uniondano-islandaise
n’a duré qu’un quart de siècle. EUe reposait sur une loi danoise
du 30 novembre 1918. Ce texte proclamait 1 indépendance
de l’Islande, jusqu’alors possession danoise dotée d’une cer¬
taine autonomie et créait une Union réelle avec souverain
commun, le roi de Danemark, une commission consultative,
une commission arbitrale. La communauté de politique
extérieure se trouvait affirmée mais fort atténuée par le fait
que seul le Danemark se trouvait membre de la S. D. N. et
parce que l’Islande était déclarée perpétuellement neutre.
Symbolisée par la discontinuité géographique, la précarité
de l’Union dano-islandaise se marquait aussi par la possibi-
üté d’une modification de l’acte d’Union, dans un sens sépa¬
ratiste, à partir de 1940, moyennant l’intervention des
deux Parlements et des referendums dans chaque pays.
L’invasion du Danemark par les armées nazies en 1940 et
l’importance stratégique de l’Islande devaient entraîner une
séparation de fait juridiquement consacrée en 1944 par la
LE PHÉNOMÈNE d’aSSOCIATION III

rupture de TUnion par l’Islande devenue un État indépen¬


dant.

Section II. — Le fédéralisme.

112. — Définition. — Le fédéralisme peut être défini,


de la manière la plus large, comme un processus d’asso¬
ciation de communautés humaines distinctes aboutissant
à concilier deux tendances contradictoires : la tendance à
l’autonomie des collectivités composantes, la tendance à
l’organisation hiérarchisée d’une communauté globale
groupant l’ensemble des collectivités élémentaires.
Ces tendances, ces impératifs sociaux ont un caractère
fondamental et on s'explique que certains auteurs, notam¬
ment le Professeur Georges Scelle, aient voulu voir dans le
fédéralisme le phénomène social le plus important qui
existe dans les différentes sociétés humaines. Même si l’on
entend le mot fédérahsme d’une manière plus étroite,
comme ce sera, ici, notre attitude, on ne saurait trop sou-
hgner son imiportance, et aussi sa complexité.
Les solutions fédérahstes apparaissent tout au long de
l’histoire humaine. EUes sont parfois des étapes sur la
route qui conduit à la constitution de grands ensembles
pohtiques, précédant ainsi les grands empires unitaires
et l’on cite volontiers en ce sens le fédérahsme allemand.
EUes peuvent, au contraire, marquer le crépuscule des
dominations impériales et signifier une étape de disloca¬
tion au delà de laqueUe existeront des États purement et
totalement indépendants. Georges SceUe a opposé ainsi,
en une heureuse formule, les fédéralismes à’agrégation et
les fédérahsmes de ségrégation.
Les formes fédérales fournissent non seulement les solu¬
tions que recherchent, dans leur évolution, les sociétés
étatiques, mais eUes peuvent permettre de construire
l’organisation internationale sur le plan régional ou uni¬
versel, sur le plan pohtique ou sur le plan administratif.
Susceptibles d’apphcations si diverses, les inécanismes
fédérahstes recouvrent un ensemble de techniques juri¬
diques variées mais on peut réduire ces techniques à un
petit nombre de lois fondamentales, de caractère socio-
logique.

113. — Les lois fondamentales du fédéralisme. —


Dans des études devenues classiques, le professeur
II2 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

Georges Scelle a dégagé les lois sociologiques du fédéra¬


lisme et systématisé diverses notions, dont certaines
avaient déjà été utilisées par d'autres auteurs.
Les diverses constructions fédérales, quels que soient
leurs buts et quelles que soient leurs modalités juridiques,
font apparaître le jeu de deux lois générales très simples :
la loi de superposition, la loi d’autonomie.
1° La loi de superposition rend compte de l’existence,
dans toute collectivité fédérale, d’institutions globales
dont la compétence s’étend à la collectivité générale com¬
plexe. Ces institutions ont tendance à apparaître comme
des institutions hiérarchisées par rapport aux institutions
de collectivités composantes.
2° La loi d’autonomie constitue le contre-poids de la loi
de superposition. Elle signifie que les collectivités compo¬
santes jouissent d’une compétence propre et ne sont pas
soumises à un contrôle d’opportunité exercé par les ins¬
titutions globales. C’est non seulement par le domaine ou
l’étendue de leur autonomie, mais encore par la nature et
les garanties de cette autonomie que les collectivités com¬
posantes d’un ensemble fédéral peuvent se distinguer des
collectivités décentrahsées qui existent par exemple à
l’intérieur d’un État unitaire.
Ces deux lois fondamentales du fédérahsme, loi de
superposition et loi d’autonomie, constituent les deux lois
de base de tout système fédéral. On peut les envisager
comrne deux forces antagonistes qui déterminent l’état
d’équihbre d’un système fédéral.
Mais il convient de remarquer que ces lois jouent de
diverses manières. Une plus grande intensité de la loi de
superposition marque ce type de fédérahsme qui est appelé
État fédéral. Une plus grande intensité de la loi d'autono¬
mie caractérise au contraire les Confédérations d’États.

114. — La loi de participation. — Certains auteurs


ont cru dégager dans les constructions fédérales l’exis¬
tence d’une autre loi dite loi de participation. Cette notion
a été utüisée par Le Fur dans son ouvrage classique La
Confédération d'États et l’État fédéral (1896) et surtout par
les tenants de l’École autrichienne, les professeurs Verdross
et Kunz. Selon ces auteurs elle caractériserait le fédéra-
üsme et pourrait se formuler ainsi : dans une construction
fédérale (particulièrement dans l’État fédéral), les col¬
lectivités composantes (États membres) participent à la
LE PHÉNOMÈNE d’aSSOCIATION II3

formation de la volonté collective globale (État fédéral).


Une telle formule ne saurait être admise que sous les
plus grandes réserves. Tout d’abord ü est évident qu’elle
ne constitue guère qu’une métaphore car il n’est de volonté
que d’êtres humains, les collectivités humaines n’ont pas
d’autre volonté que celle de leurs gouvernants. Il faudrait
donc modifier en ce sens la formulation même de la loi.
Mais il convient en outre de remarquer que la « participa¬
tion » des collectivités composantes d’une collectivité
humaine complexe se rencontre non seulement dans les
collectivités composées de type fédéral mais encore dans
les collectivités composées sur le t}q)e d’État unitaire. Les
circonscriptions électorales coïncident souvent, pour l’une
des Chambres au moins, même d’un État unitaire à sys¬
tème bicaméral, avec des circonscriptions administratives,
et cela ne signifie pas que ces circonscriptions soient des
collectivités composantes d’un État fédéral. Le professeur
Charles Durand, dans divers ouvrages, a montré les exa¬
gérations et partant les inexactitudes de la loi de partici¬
pation.
En réahté, la loi de participation ne mérite pas d’être
classée parmi les lois fondamentales du fédérahsme. EUe
ne se rencontre pas que dans les constructions fédérales,
sauf peut-être dans le domaine des modifications consti¬
tutionnelles, et cela dépend d’ailleurs de la constitution
fédérale. Par ailleurs cette loi, de portée restreinte, n’est
qu’un coroUaire de la loi d’autonomie. C’est une forme
d’autonomie que garantissent précisément dans le domaine
constitutionnel les modahtés de participation des collecti¬
vités composantes ou plutôt de leurs organes à l’élabora¬
tion des décisions juridiques valables pour la communauté
globale.

115. — La loi de dédoublement fonctionnel. — Plus


intéressante apparaît la loi dite du « dédoublement fonc¬
tionnel ». Elle a été dégagée par le professeur Georges
Scelle et constitue une très intéressante analyse des rela¬
tions internationales, au delà même du phénomène fédéral.
On peut la définir comme la possibihté pour des gouver¬
nants de disposer d’une double compétence, une compé¬
tence directe et propre valable dans un certain domaine
et une autre compétence dans un domaine différent
du premier. Dans les constructions fédérales, la notion
de dédoublement fonctionnel se vérifie. Elle montre le
rôle que telle collectivité composante peut jouer à l’in-
II4 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

térieur de la collectivité fédérale globale. Les exemples


sont évidents. L’empereur allemand et le chancelier allp-
mand dans le système du Reich de 1871 sont le roi et le
chanceher de Prusse. Leur compétence première est prus¬
sienne; par dédoublement fonctionnel ils disposaient aussi
d’une compétence fédérale. Le dédoublement fonctionnel
n’est pas autre chose que la transcription juridique d’une
certaine suprématie pohtique reconnue à l’une des collec¬
tivités composantes d’un ensemble complexe. Mais le
dédoublement fonctionnel n’est pas, non plus, une donnée
de base du fédéralisme. Les exemples sont très nombreux
de collectivités fédérales dans lesquelles n’existe pas de
dédoublement fonctionnel.

116. — Les types de sociétés fédérales. — Les socié¬


tés fédérales sont difficiles à caractériser. C’est un pro¬
blème classique que d’opposer l’un à l’autre les deux t5q)es
principaux de sociétés fédérales, la Confédération d’Etats
et l’État fédéral. Un autre problème est celui de la dis¬
tinction de l’État fédéral et de l’État unitaire. Ces diverses
distinctions doivent être faites sur le double plan de l’ana¬
lyse juridique et de l’étude pohtico-historique. Des fac¬
teurs contingents marquent en effet, souvent, les cons¬
tructions fédérales dont la Confédération d’une part et
l’État fédéral d’autre part ne constituent guère que des
tjqîes moyens, chaque construction réeUe se distinguant
d’une autre analogue par bien des nuances. Il y a toute
une série de confédérations, comme il y a toute une série
d’États fédéraux.

§ i®>'. — La Confédération d’États.

117. — Définition. — La Confédération d’États est une


union organisée d’États reposant sur le principe de l’éga-
hté de ses membres. Elle se distingue de l’^ance par
l’existence d’organes permanents à compétence relative¬
ment étendue, elle se distingue de l’Union administrative
par la plurahté des buts qui sont poursuivis par l’Union.
La caractéristique essentielle de la Confédération consiste
en ce que les collectivités composantes sont des États
véritables, au sens du droit international. La terminologie
allemande souhgne ce fait par la formule Staatenbund.
La Confédération elle-même n’est pas un État. Ses
membres, au contraire, continuent à être régis par le droit
LE PHÉNOMÈNE d’ASSOCIATION II5

international. Les rapports entre eux des États membres


de la Confédération sont réglés par le droit international
particulier de la Confédération elle-même, notamment le
traité constitutif. Les rapports entre un Etat membre
d’une Confédération et des États qui ne font pas partie
de la Confédération sont régis par le droit international
général. En d’autres termes, les membres de la Confédéra¬
tion possèdent toutes les compétences étatiques normales
qui ne leur sont pas retirées par le droit particuber de la
Confédération. v i
Analysée comme une manifestation du fédéralisme, la
Confédération met en jeu les deux lois fondamentales de
superposition et d’autonomie. Toutefois, en règle géné¬
rale, le système confédéral met l’accent sur la loi d’auto¬
nomie et non point sur la loi de superposition.

A. — Les aspects juridiques.

118. — Les institutions confédérales. — Les inrtitu-


tions communes, superposées aux institutions des Etats
membres, sont relativement faibles et limitées.
Il existe généralement un pouvoir législatif confédéral,
parfois un pouvoir juridictionnel, mais les exemples d un
gouvernement confédéral sont rares, bien que les Pro¬
vinces Unies aient connu l’institution du Stathouder et
qu’il ait aussi existé au moment de la guerre d indépen¬
dance américaine, sous le régime des articles de Confédé¬
ration, des départements exécutifs.
L’institution commune essentielle réside en une assem¬
blée délibérante qui s’analyse en une conférence diploma¬
tique dont les membres, nommés par les gouvernants des
collectivités composantes, obéissent normalement aux ins¬
tructions de ceux-ci. Cette assemblée porte souvent le nom
de Diète, ainsi dans le cadre de la Confédération du Rhin
ou de la Confédération germanique. D’autres noms sont
parfois utüisés, Tagsatzung (Confédération helvétique),
Congrès (articles de Confédération), États généraux (Pro¬
vinces Unies). L’assemblée est composée généralement des
plénipotentiaires des divers gouvernements et 1 exernple
demeure exceptionnel des envoyés des législatures (articles
de Confédération). L’assemblée est dominée en général
par la règle de l’égahté des voix, une voix par Etat
membre. La diète de la Confédération germanique (1815-
1866) abandonnait toutefois ce principe. Dans la forma-
Il6 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

tion dite de Plénum, les petites principautés avaient une


voix mais les grands États en avaient plusieurs, quatre
comme l’Autriche, la Bavière, le Hanovre, la Prusse, la
Saxe, le Wurtemberg, trois comme le Bade, la Hesse, le
Holstein, le Luxembourg, deux comme le Brunswick, le
Mecklembourg, Nassau. Dans la formation dite du Conseil
restreint {Engerer Rat), les CTands États disposaient d’une
voix chacun et les petits Etats devaient se grouper pour
disposer en commun d’une voix.
L’assenablée siège tantôt sous une présidence alterna¬
tive des différents États membres (Provinces Unies), tan¬
tôt de certains d’entre eux (Confédération helvétique),
tantôt sous la présidence permanente d’un des États, ainsi
l’Autriche, dans le cadre de la Confédération germanique.
Le principe de l’égahté des États membres entraîne par¬
fois la nécessité que les décisions de l’assemblée soient
prises à l’unanimité. C’est la solution que consacrait la
Confédération germanique pour l’entrée de nouveaux
membres, les affaires reügieuses, les jura singulorum. Par¬
fois d ailleurs les déhbérations de l’assemblée ne sont pas
des décisions exécutoires mais de simples projets qui ne
deviennent définitifs qu’après ratification par les États
membres.

119. — Faiblesse des institutions centrales. — Les


institutions superposées de la Confédération demeurent
faibles. En règle générale, la législation confédérale ne vise
pas directement les individus. Il n’existe pas de natio-
nahté confédérale commune mais les nationaux de chacun
des États membres peuvent bénéficier à l’intérieur de la
Confédération d’une sorte de système d’équivalence :
c’était le cas de la Confédération germanique.
La faiblesse confédérale se traduit sur le plan financier.
L’existence de ressources confédérales directes est rare,
bien que les Provinces Unies, la Confédération helvétique,
avant 1848, aient connu un tel système. Généralement,
les Etats membres de la Confédération acquittent des
contributions matriculaires. Une solution analogue existe
en matière militaire. Les Provinces Unies, les États-Unis
dans le régime des articles de Confédération ont connu
une marine et des troupes confédérales, mais la formule
générale est celle des contingents purement nationaux jux¬
taposés dans un ensemble confédéral.
Caractérisée par la faiblesse des institutions confédé¬
rales, la Confédération laisse subsister très nettement l’au-
LE PHÉNOMÈNE d’ASSOCIATION II7

tonomie des États membres. Cette autonomie existe en


particulier dans le domaine constitutionnel. Quelques
principes généraux peuvent toutefois êtres formulés dans
les textes constitutifs de la Confédération. L’article 13 de
l’Acte du 8 juin 1815 pour la constitution fédérative de
l’AUemagne prévoyait ainsi l’existence d’assemblées
d’États dans tous les pays de la Confédération. Dans les
Provinces Unies, le maintien de la religion réformée
comme religion d’État était de la compétence de la Confé¬
dération eUe-même.

120. — Le partage de compétence. — Entre les États


membres et la Confédération, le partage de compétence est
inégal. La Confédération n’exerce que les seules compé¬
tences qui sont prévues par les textes constitutifs. Le par¬
tage ne s’opère donc pas toujours de la même manière.
Les Articles de confédération réservaient à la Confédéra¬
tion la législation des prises, l’organisation des juridictions
de prise, les négociations avec les tribus indiennes, l’orga¬
nisation du système monétaire et du système de poids et
mesures. Les territoires coloniaux des Provinces Unies
étaient directement administrés par la Confédération. La
Confédération germanique réglementait eUe-même la
Uberté de la presse et l’organisation du commerce inter¬
national et la même solution valait dans la Confédération
helvétique.
C’est également à des institutions confédérales parti¬
culières qu’est confiée la solution des litiges internationaux
survenant entre les États membres. Cette formule était
prévue dans l’organisation des Provinces Unies, dans les
articles de confédération, dans la Confédération helvé¬
tique. EUe était précisée dans l’article ii du statut de
la Confédération germanique interdisant le recours à la
guerre entre les États membres et prévoyant soit la média¬
tion soit le règlement juridictionnel {Austregal instanz).
Le partage de compétence entre la Confédération et ses
membres, très favorable en général à ces derniers dans le
domaine des affaires intérieures, est au contraire très favo¬
rable à la Confédération dans le domaine des affaires exté¬
rieures. La Confédération apparaît, en général, comme
une unité pohtique au regard des affaires extérieures. Le
droit de guerre qui, dans le droit international classique,
est une prérogative importante des États, est hmité par
les textes constitutifs des confédérations. Il disparaît dans
les rapports des États membres entre eux. Il est hmité
Il8 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

dans leurs rapports avec les États extérieurs à la Confédé¬


ration. Les articles de confédération ne le laissaient sub¬
sister que dans rh3q)othèse de la défense contre l’invasion
ou le danger imminent. La Confédération germanique le
limitait aux possessions des États membres qui étaient
extérieures à la Confédération et échappaient ainsi à la
garantie territoriale prévue pour les États membres.
La compétence en matière de traité international est
parfois aussi limitée, notamment pour les armistices et les
traités de paix. En matière de relations diplomatiques, une
compétence concurrente existe entre la Confédération et
les Etats membres, ceux-ci conservant le droit de légation
actif et passif et la Confédération le possédant également.
Toutefois les articles de confédération prévoyaient le droit
de légation au profit de la Confédération eUe-même, les
États membres ne pouvant disposer de ce droit qu’avec
une autorisation spéciale du Congrès.

B. — Les aspects historiques.

Précarité des Confédérations. — La formule de la Confé¬


dération est une formule instable. On constate générale¬
ment que les tendances centripètes l’emportent et le sys¬
tème confédéral se transforme en système fédéral. Une
série d’exemples historiques sont en ce sens. Mais il ne
faut pas voir nécessairement dans de telles transforma¬
tions une fataüté historique. Les circonstances contin¬
gentes ont favorisé une telle évolution aussi bien en
Europe qu’aux États-Unis d’Amérique.

121. — La Confédération helvétique. — Le plus ancien


exemple de confédération d’États est celui de la Confédéra¬
tion helvétique. Fondée entre les trois cantons forestiers i
d’Uri, de Schwyz et d’Unterwalden par le pacte de 1291, ,
l’Union des cantons suisses se réalisa progressivement pour '
devenir à la fin du xvi® siècle une Confédération de treize can¬
tons. La situation centrale de la Suisse devait lui assurer une ■
certaine importance politique et militaire au cours des guerres
européennes et l’indépendance helvétique fut reconnue par les •
traités de Westphalie.
La formule moderne de la Confédération helvétique n’a.
duré que de 1815 à 1848. La Révolution française avait;
entraîné des changements constitutionnels importants,,
l’essai sans lendemain d’une République unitaire en 1798I
puis une nouvelle formule fédérative, celle de l’Acte de'
médiation de Bonaparte, en 1803. Après le Congrès de Vienne,,
LE PHÉNOMÈNE d’aSSOCIATION II9

la Confédération fut réorganisée par le pacte du 7 août 1815.


Après des difficultés diverses et des rivalités entre les cantons,
une tentative de sécession se manifesta en 1847 mais la guerre
du Sonderbund ne dura que quelques semaines. En 1848, fut
adoptée une véritable constitution fédérale. L’État fédéral
se substitua ainsi à la Confédération. Il reste du passé un
souvenir : la Suisse a conservé le nom officiel de Confédération
helvétique bien qu’il ne s’agisse plus, depuis 1848, et moins
encore depuis la Constitution de 1874, d’un système confé¬
déral.

122. — Les Provinces Unies. — C’est de la volonté d’indé¬


pendance et de la défense de ceUe-ci que, comme la Confé¬
dération helvétique, est née la Confédération des Provinces
Unies. Elle a été créée en 1579 avec le pacte d’Union d’Utrecht
lors de la révolte des Pays-Bas contre la domination espa¬
gnole. Ses institutions confédérales étaient d’ailleurs relati¬
vement puissantes et centrahsées. Les Provinces Unies ont
joué un grand rôle pohtique aux xvii® et xviii® siècles et ont
été le berceau d’une civihsation particulièrement brillante.
La Révolution française devait détruire la formule confédérale
et créer un État unitaire qui n’a cessé d’exister sous cette
forme.

123. — La Confédération des États-Unis. — Les treize colo¬


nies insurgées qui proclamèrent leur indépendance, en 1776,
à l’égard de la métropole britannique, eurent à défendre
cette indépendance et se groupèrent à cet effet dans une
confédération. Ce fut le régime dit des Articles de confédéra¬
tion. Le pouvoir confédéral appartenait à une diète appelée
congrès dont les décisions étaient prises à la majorité qualifiée
de 9 voix sur 13. Le régime fonctionna tant bien que mal et
permit même de triompher de l’Angleterre, mais, passée l’ère
militaire, de graves difficultés surgirent et la convention de
Philadelphie de 1787 substitua au système confédéral une
constitution fédérale. La phase de la Confédération fut donc
très brève aux États-Unis, ayant duré moins de dix ans
puisque les articles de confédération datent de 1778.

124. — Le système confédéral en Allemagne. — Si l’on


fait abstraction de l’étrange construction pohtique du Saint-
Empire créé en 962 par Othon le Grand, profondérnent trans¬
formé par les traités de Westphalie qui le réduisent à un
état anarchique, l’Allemagne a connu deux systèmes confé¬
déraux successifs au cours du xix® siècle. La première création
est faite par Napoléon I®’’. Au lendemain d’Austerlitz, l’empe¬
reur détruit le Saint-Empire millénaire et, par le traité de
Presbourg, constitue la Confédération du Rhin dont il
devient le protecteur. Ce système groupe une quinzaine de
princes ou souverains allemands de l’Allemagne de l’Ouest et
120 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

consacre la première reconstruction méthodique de l’Alle¬


magne à partir du chaos féodal. Il ne dura guère et disparut en
1813.
La seconde construction confédérale dura plus longtemps.
C’est la Confédération germanique créée par le Congrès de
Vienne et dont l’acte constitutif fut signé le 8 juin 1815 et
complété par un acte additionnel du 15 mai 1820. La Confé¬
dération germanique groupait 38 États d’importance très
variable. Le pouvoir confédéral était exercé par la diète qui
siégeait à Francfort-sur-le-Main, sous la présidence d’un des
États membres, l’Autriche. La Confédération germanique eut
une existence relativement courte marquée par les rivalités
entre l’Autriche et la Prusse. La faiblesse caractérisait les
institutions confédérales dont un auteur allemand put dire
qu’elles étaient un objet de dérision pour l’étranger, un objet
de tristesse pour les Allemands. La formule d’une diète
diplomatique dont les membres représentaient leurs souve¬
rains ne correspondait plus aux circonstances. Les réahtés
allemandes étaient ailleurs que dans ce congrès solennel de
diplomates. Elles étaient économiques avec le problème du
marché commun, l’union douanière, le réseau de chemins de
fer. Elles devenaient aussi pohtiques avec la Révolution de
1848 qui lance la formule d’une constitution fédérale fondée
sur la souveraineté nationale, et aboutissant à la domination
prussienne. La couronne impériale fut toutefois refusée par le
roi de Prusse qui ne voulait point tenir son pouvoir du peuple.
Mais, ébranlée par les mouvements de 1848, la Confédération
germanique est tiraillée entre l’Autriche et la Prusse. Fina¬
lement, après la guerre des duchés menée contre le petit
Danemark, les hostilités éclatent entre les deux États, au
mépris du pacte confédéral. La Prusse est victorieuse des
troupes confédérales et écrase l’armée autrichienne à Sadowa
en 1866. Le traité de Prague marque la fin de la Confédéra¬
tion germanique avec l’exclusion de l’Autriche. La Prusse
victorieuse forme la Confédération de l’Allemagne du Nord
(Nord-deutscherhund). En réahté il s’agit, malgré la termi-
nologie, d un État fédéral sous direction prussienne Ici
encore la formule confédérale n’a été qu’une étape sur la voie
de 1 Etat fédéral.

C. ■— Confédération et décolonisation.

La formule confédérale a parfois été utilisée dans le


cadre de diverses politiques de décolonisation.

125. — L’Union française. — Avant 1939, l’ensemble


des colonies françaises était placé sous la souveraineté de
la métropole dans le cadre même d’un État unitaire.
LE PHÉNOMÈNE d’aSSOCIATION 121

C’est cette formule à laquelle se réfère expressément la


Conférence de Brazzaville de 1944 que l’on présente géné¬
ralement comme la manifestation d’une politique fédérale
et décentralisatrice. Cette affirmation, pour répandue
qu’elle soit, est absolument contraire à la vérité. Le pré¬
ambule des recommandations de la conférence sur l’orga¬
nisation politique indique clairement l’unité politique
infrangible du monde français et il affirme : les fins de
l’œuvre de civilisation accomplie par la France dans les^
colonies écartent toute idée d’autonomie, toute possibilité
d’évolution hors du bloc français de l’Empire; la constitution
éventuelle, même lointaine, de self-governements dans les
colonies est à écarter.
C’est seulement avec la constitution française de 1946
que l’on voit apparaître une construction de type confé¬
déral non pas en ce qui concerne la République française
eUe-même mais quant à l’Union française. Selon la consti¬
tution, l’Union française comprenait, d’une part la
République française (France métropolitaine, départe¬
ments d’outre-mer, territoires d’outre-mer), d’autre part
les États associés. Dans l’esprit des rédacteurs^ de la
constitution, ces États associés semblaient devoir être les
États sous protectorat français. Mais le Maroc et la Tunisie
n’ayant pas accepté de voir l’association succéder au pro¬
tectorat, l’Union n’a comporté que les États associés
d’Indochine selon les accords conclus par la France avec le
Cambodge, le Laos, le Vietnam, en 1949. Ce régime a duré
fort peu de temps (v. supra, n® 87), et a disparu en 1953 ou
1954. Les organes confédéraux étaient peu nombreux.
Il existait un président de l’Union qui, par dédoublement
fonctionnel était le Président de la République française,
la conduite générale des affaires de 1 Union étant confiée
à un Haut-Conseil composé d’une délégation du Gouverne¬
ment français et de la représentation que chacun des États
associés avait la faculté de désigner auprès du représentant
de l’Union. Le système n’a guère fonctionné, le Haut
Conseil n’ayant été réuni qu’à la fin de 1951.

126. — La Communauté. — La constitution française


de 1958 comporte un titre XII (art. 77 à 87) qui traite
de la Communauté. Mais à la différence de l’Union fran¬
çaise la Communauté, dans le texte primitif, n’avait aucun
caractère confédéral. Cette appellation désignait en effet
l’ensemble politique constitué par la République française
et les États membres de la Communauté. Mais il ne s’agis-
122 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

sait pas ici d’États au sens du droit international, mais


d’États au sens du droit interne. En effet, les territoires
d’outre-mer, au sens de la constitution de 1946, c’est-à-
dire les territoires qualifiés antérieurement de colonies,
avaient évolué, au cours de la IV® République, et contrai¬
rement aux formules de Brazzaville, vers l’autonomie
interne consacrée par la loi cadre du 23 juin 1956 et les
décrets d’application d’avril 1957. Cette autonomie
interne était parachevée par la constitution de 1958 et les
territoires d’outre-mer, par le referendum constituant,
pouvaient décider de leur appartenance ou non à la
Communauté. Seule la Guinée devait répondre « non » au
referendum et devenir ainsi un État indépendant. Les
autres territoires d’outre-mer qui avaient choisi de rester
dans la Communauté ont pu, par im second choix ou
conserver le statut ancien de territoire d’outre-mer ou
devenir des États membres de la Communauté. Ces
collectivités disposaient de l’autonomie interne mais
n’étaient pas des États indépendants, des États au sens
international. L’art. 86 de la constitution prévoyait en
effet : « un État membre de la Communauté peut devenir
indépendant, il cesse de ce fait d’appartenir à la Commu¬
nauté ».
La Communauté conventionnelle. ■— Les dispositions de
la constitution manquaient de réahsme. Très vite certains
Etats de la Communauté souhaitèrent disposer de l’indé¬
pendance sans pour cela quitter la Communauté. Des
accords furent ainsi conclus par la Répubhque française
avec la Fédération du Mah et avec la République malgache
en avril i960; ils aboutissaient à l’indépendance, malgré
l’art. 86. Une révision constitutionnelle fut opérée par
une loi française du 4 juin qui tout en maintenant la for¬
mule précipitée de l’art. 86 ajoutait un alinéa de sens
strictement inverse selon lequel un État membre pouvait
« par voie d accords, devenir indépendant sans cesser de
ce fait d’appartenir à la Communauté ».
Ainsi existe actuellement une Communauté dite conven¬
tionnelle liant la France avec la République malgache
le Sénégal et chacun des quatre États d’Afrique équato¬
riale, le Congo, le Tchad, le Gabon et la Répubhque
centre afncaine.
La Communauté conventionnelle s’analyserait, d’un
point de vue juridique, en une confédération. Des organes
sont prévus. Le Président de la Répubhque française est le
Président de la Coimmmauté. Une conférence périodique
LE PHÉNOMÈNE D’ASSOCIATION 123

de chefs d’État et de gouvernements peut se réunir sous


la présidence du Président de la Communauté pour
étudier les problèmes politiques essentiels. Il peut être
constitué des comités de ministres et d’experts. Enfin
un Sénat interparlementaire consultatif peut être réuni,
il est constitué par des délégués des assemblées législa¬
tives des États de la Communauté.
Mais cette construction confédérale demeure entière¬
ment factice et virtuelle, aucime des institutions collé¬
giales n’a été mise en place. La Communauté convention¬
nelle à sept n’a pas d’existence véritable.
Cette Communauté conventionnelle qui n’existe pas
ne doit pas être confondue avec la Communauté constitu¬
tionnelle proprement dite prévue par les art. 82, 83 et 84
de la constitution qui créaient un président de la Commu¬
nauté, un Sénat de la Communauté et une cour arbitrale.
Ces deux dernières institutions ont disparu après une
brève existence, et la construction politique de la consti¬
tution de 1958 est demeurée purement artificielle.
L’ensemble des rapports de la France avec ses anciennes
colonies d’Afrique ou des territoires sous tutelle se
présente aujourd’hui non pas sous la forme factice des
pseudo-communautés mais dans le cadre purement inter¬
national des accords multiples et divers de coopération.

127. — L’Union hollandooindonésienne. — Les Indes


néerlandaises sont devenues indépendantes sous le nom
d’Indonésie en 1949, à la suite de l’intervention de
rO. N. U. à l’effet d’obtenir un règlement pacifique. Une
conférence dite de la Table ronde, tenue à la Haye (août-
décembre 1949) a réglé la question du transfert de sou¬
veraineté à l’Indonésie et constitué d’autre part une
Union hoUando-indonésienne à l’effet de promouvoir entre
les Pays-Bas et l’Indonésie une « coopération amicale en
pleine hberté et indépendance.... et sur un pied de stricte
égahté ».
L’Union, dont le statut est entré en vigueur le
27 décembre 1949 comportait plusieurs organes. Le Chef
de l’Union était la reine des Pays-Bas, une conférence
ministérielle devait se tenir deux fois par an et des com¬
missions spéciahsées devaient être instituées. Les décisions
de la Conférence ministérielle devaient être ratifiées par
les Parlements respectifs des deux parties composant
l’Union. Une Cour d’arbitrage était prévue pour régler les
htiges pouvant survenir en matière de législation et de
124 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

justice. Il existait des affaires communes de la compétence


de l’Union (défense, affaires étrangères, finances, écono¬
mie, culture).
L’Union ne fonctionna que très peu de temps, il n’y eut
que deux réunions de la conférence ministérielle et
l’Union ne dura qu’un an. Un protocole d’abrogation fut
signé le lo août 1954. La dénonciation de l’Union par
l’Indonésie eût pour cause la situation en Nouvelle-Guinée
et le maintien de la domination coloniale néerlandaise sur
ce territoire (v. infra n° 162).

§ 2. — L'État fédéral.

Dé-finition,. — L’État fédéral peut se définir comme


une collectivité étatique complexe composée d’un cer¬
tain nombre de collectivités plus petites que l’on peut
appeler les collectivités composantes. L’État fédéral n'est
pas une union d’États, car les collectivités composantes
ne sont pas des États, au sens du droit international,
et cela à la différence des États qui sont groupés dans
une confédération. Seul l’État fédéral lui-même, c’est-à-
dire la collectivité globale, apparaît comme un État
au sens international. Cette, distinction entre État
fédéral^ et Confédération d^États est capitale. Elle
apparaît dans la terminologie et la langue allemande
oppose ainsi l’État fédéral (Bundesstaat) à la Confédéra¬
tion (Staatenbund). Mais la terminologie peut parfois être
inexacte car, nous 1 avons déjà noté, des États fédéraux
portent parfois le nom de Confédération d’États, ainsi la
Suisse. En outre, les collectivités composantes de l’État
fédéral, les collectivités membres parfois appelées pro-
^nces, ainsi au Canada, en Afrique du Sud, dans la Répu¬
blique Argentine, ou cantons (Suisse), ou pays (Lânder)
amsi dans le Reich allemand de 1919 ou dans la Répu-
autrichienne de 1920 portent quelquefois le nom
d Etats membres, ainsi aux États-Unis, au Brésil au
Mexique, en Austrahe, dans le Reich de 1871 Mais malCTé
cette appeUation quelquefois rencontrée, les États membres
d un Etat fédéral ne sont pas des collectivités étatiques
au sens du droit international. '

128. — Les États fédéraux. — La forme de l’État fédé¬


ral est apparue avec la constitution des États-Unis de
i.ySy. Depuis cette date les formules fédérales se sont mul-
LE PHÉNOMÈNE D'ASSOCIATION 125

tipliées. On trouve de très nombreux États fédéraux.


L'Amérique latine a adopté cette structure au Mexique,
au Brésil, en République Argentine, au Venezuela. Les
anciens dominions britanniques, le Canada, l'Afrique du
Sud, l'AustraHe sont aussi des États fédéraux. En Europe,
l'Allemagne a connu plusieurs solutions fédérales, en 1871,
en 1919 et actuellement avec la République fédérale
(Allemagne dite de l’Ouest), ainsi que la Suisse (en 1848
et 1874) et l’Autriche. La solution de l’État fédéral a été
utilisée par la Révolution soviétique, avec les constitu¬
tions successives de 1924 et de 1936. La Yougoslavie l’a
adoptée en 1946.
L’étude de ces diverses solutions fédérales n’appartient
pas au domaine même des institutions internationales,
mais entre dans celui des institutions politiques comparées.
On notera que les institutions fédérales ont leur génie
propre. Elles permettent de résoudre certains problèmes,
satisfont au désir d’autonomie provenant d’origines, de
races, d’intérêts distincts et séparés. Il serait inexact de
penser que la forme fédérale est toujours une étape vers
la voie unitaire. Il est des États fédéraux qui ont conservé
cette forme depuis très longtemps, ainsi les États-Unis,
la Suisse. Si quelquefois l’État fédéral succède à la Confé¬
dération d’États, il peut aussi succéder à l’État unitaire et
apparaître ainsi comme un processus de décentralisation,
ainsi en Autriche, au Brésil, en U. R. S. S., en Yougoslavie.
L’État fédéral, comme l’État unitaire, ne saurait se
définir d’une manière purement juridique. Il y a une tech¬
nique juridique fédérale, eUe est caractérisée par une
extrême variété des solutions possibles, eUe est valable,
selon les circonstances, à tel ou tel pays et il ne convient
pas de l’enfermer dans la fatahté inéluctable d’un pro¬
cessus historique prédéterminé ou dans la sécheresse d’une
catégorie juridique.

129. — Critère de l’État fédéral. —■ La doctrine clas¬


sique a tenté de trouver un critère de l’État fédéral dans la
notion de souveraineté. Seul l’État fédéral serait souverain
et non pas les États membres. Actuellement, la théorie de
la souveraineté est abandonnée en général par la doctrine.
Il a été substitué à cette théorie, et à la suite des travaux
de l’École autrichienne de droit international, la théorie
de l’immédiateté internationale (Vôlkenechtsunmittel-
harkeü). Les collectivités membres de l’État fédéral ne
sont pas régies directement par le droit international, alors
126 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

que l’État fédéral lui-même l’est. Cette formule est assez


ingénieuse et permet d’expliquer que les collectivités
membres puissent disposer parfois d’une compétence
internationale qui leur est attribuée par la constitution
fédérale, sans pour cela être de véritables États. Les col¬
lectivités membres ne tiennent pas directement leur com¬
pétence du droit international, même dans les hypothèses,
d’ailleurs rares, où elles disposent d’une compétence dans
le domaine international.
Cette formule de l’immédiateté permet d’opposer d’une
manière assez simple l’État fédéral à la Confédération
d’États. Mais le problème se pose alors de distinguer l’État
fédéral de l’État unitaire. En réalité, et au regard du droit
international, l’État fédéral apparaît comme un État véri¬
table et ne se distingue pas de l’État unitaire décentrahsé.
La question se pose de distinguer alors entre la collectivité
membre de l’État fédéral et les subdivisions administratives
de l’État unitaire. On constate ici qu’il n’existe pas entre
ces deux collectivités de différence de nature, mais seule¬
ment une différence de degré dans la décentrahsation. La
collectivité membre de l’État fédéral est plus décentralisée,
en règle générale, que la subdivision administrative de
l’État unitaire. Cette différence apparaît de diverses
manières, notamment par le jeu des^garanties de l’autono¬
mie des collectivités membres de l’État fédéral, l’absence
d’un contrôle d’opportunité de la part des autorités fédé¬
rales, l’existence d’un domaine réservé aux collectivités
membres. Mais, s’agissant d’une simple différence de degré,
on conçoit qu’il existe une série de solutions variables
selon les pays et les constitutions. On peut dire qu’ü n’y
a pas un type intangible d’État fédéral.

A. — Les institutions fédérales.

130. Les institutions fédérales. — En tant que col¬


lectivité fédérale, l’État fédéral fait apparaître le jeu de
la loi de superposition au profit des autorités fédérales.
Cette loi de superposition joue d’ailleurs ici d’une manière
particuhèrement nette.
On trouve dans l’État fédéral, tout comme dans l’État
unitaire, des institutions centrales qui exercent les trois
pouvoirs, législatif, exécutif et juridictionnel.
LE PHÉNOMÈNE d’ASSOCIATION 127

131. — Le pouvoir législatif. — Le pouvoir législatif


est exercé dans l’État fédéral sous une forme qui est tou¬
jours bicamérale. L’une des chambres législatives repré¬
sente la totalité de la population de l’ensemble fédéral, la
seconde chambre tend, au contraire, à représenter les
États membres.
C’est la présence de cette seconde chambre qui a
entraîné certains auteurs à invoquer une loi de participa¬
tion des collectivités membres à l’élaboration des décisions
fédérales. En réalité une telle loi de participation ne se
trouverait vérifiée qu’à la condition que, dans la chambre
fédérale en question, les membres représentent unique¬
ment les collectivités membres, c’est-à-dire soient liés par
des instructions formulées par les gouvernements ou les
parlements locaux. Cette solution a parfois existé. Le
Reich allemand de 1871 comportait un Bundesrat où sié¬
geaient des représentants des États membres munis d’ins¬
tructions impératives et le Reichsrat allemand de 1919
était composé de membres des gouvernements de chaque
Land. Avant le 17® amendement, la constitution des
États-Unis prévoyait que les législatures de chaque État
désigneraient les sénateurs représentant l’État. Mais une
évolution s’est produite et d’une manière générale on cons¬
tate actuellement que les collectivités membres ne jouent
plus que le rôle de circonscriptions électorales. La seconde
chambre se trouve normalement composée d’une série de
parlementaires qui votent librement. La loi de participa¬
tion ne peut donc être toujours invoquée. Il n’y a pas
nécessairement de différence, à ce point de vue, entre une
seconde chambre d’un État fédéral et les secondes
chambres des États unitaires.
La représentation des États membres à la seconde
chambre se fait tantôt d’une manière égahtaire, chaque
collectivité membre ayant le même nombre d’élus, quelle
que soit son importance démographique ou économique,
tantôt au contraire sous forme inégalitaire. L’égahté existe
aux États-Unis où tout État membre a deux sénateurs.
Elle existe également en Suisse, chaque canton ayant
deux conseillers au Conseil des États. Mais la solution
d’une représentation inégalitaire a été pratiquée en Alle¬
magne tant par le Reich de 1871, avec notamment au
Reichsrat qui comprenait 58 membres l’octroi de 17 voix
à la Prusse, qu’au Reichsrat de 1919 où sur les 66 membres
la Prusse en comptait 26. L’État fédéral soviétique com¬
porte une seconde chambre appelée Conseil des nationa-
128 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

lités, mais dont la composition est très différente car il n’y


a pas que les républiques membres de l’U. R. S. S. qui y
soient représentées mais encore d’autres collectivités inté¬
rieures aux républiques membres, telles que les répu¬
bliques autonomes, les régions autonomes et les arrondis¬
sements nationaux.
A l’intérieur du pouvoir législatif bicaméral qui existe
dans les États fédéraux, le problème des rapports entre les
deux Assemblées est résolu dans des sens différents par les
constitutions diverses. Une compétence particulière de la
« Chambre des États » a existé dans le fédéralisme alle¬
mand en 1871 et en 1919. Aux États-Unis, c’est le Sénat
et non le Congrès qui est compétent en matière de ratifi¬
cation des traités et joue donc un rôle prépondérant en
matière de politique étrangère. Cette solution est le vestige
d’une époque ou les sénateurs obéissaient aux instructions
des législatures.
Considérées sous l’angle législatif, les institutions fédé¬
rales sont, on le voit, très différentes des diètes confédé¬
rales et se rapprochent très nettement des institutions
unitaires,

132. — Le pouvoiir exécutif. — Il n’existe générale¬


ment qu’un seul chef d’État, mais le Reich de 1871, État
fédéral imparfait et à forme monarchique, maintenait la
plurahté des chefs d’États membres, avec des rois (Bavière-
Saxe) et des princes (grand duc de Bade, de Wurtem¬
berg, etc.). L’un des monarques, le roi de Prusse, par jeu
du dédoublement fonctionnel, apparaissait comme le chef
de l’État fédéral avec le titre d’empereur allemand.
Le gouvernement fédéral parfois embryonnaire à l’ori¬
gine, ainsi aux États-Unis, ainsi dans le Reich de 1871 où
n’existait que le chanceher, s’est progressivement déve¬
loppé dans les États fédéraux, en même temps que s’ac¬
croissaient les compétences fédérales. Les constitutions
fédérales les plus récentes prévoient un gouvernement
fédéral complet et partout la pratique s’en est étabhe. Un
corps de fonctionnaires fédéraux a été créé et s’est déve¬
loppé pour exercer l’administration fédérale directe,
notamment dans le domaine diplomatique, mihtaire, éco¬
nomique, monétaire, douanier, fiscal.

133. — Le pouvoir juridictionnel. — H y a des États


fédéraux dans lesquels tous les organes juridictionnels sont
fédéraux; c’était le cas de l’Autnche dans la constitution
LE PHÉNOMÊME d’aSSOCIATION I2g

de 1920. Mais généralement les collectivités membres pos¬


sèdent le pouvoir juridictionnel. Toutefois, dans tous les
États fédéraux existe une cour fédérale suprême. Elle
fonctionne généralement comme un gardien de la légalité
constitutionnelle fédérale, parfois comme un facteur d^’uni-
fication. Elle règle aussi les litiges entre États membres.
Le fonctionnement de la Cour suprême est déterminé d’une
manière différente selon la manière dont est entendu, dans
chaque État fédéral, le principe de la hiérarchie des ordres
juridiques.

134. — Le territoire fédéral. — Le territoire fédéral


comprend nécessairement les territoires des collectivités
membres, mais il peut parfois comporter aussi des terri¬
toires qui sont soumis directement à la compétence des
autorités fédérales et qui s’ajoutent aux territoires des
collectivités pour constituer le territoire de l’État fédéral.
Il est des États fédéraux dans lesquels n’existent pas
d’autres territoires que ceux des collectivités membres :
c’est le cas de la Suisse, de l’U. R. S. S., de l’Allemagne
de 1919, de l’Autriche de 1920. On trouve au contraire des
exemples de territoires directement soumis aux autorités
fédérales et on peut en distinguer quatre t5rpes :
1° Le Reich allemand de 1871 comportait en dehors des
États membres un Reichsland qui était l’Alsace-Lorraine,
dotée en 1911 d’une constitution et disposant de trois voix
au Bundesrat.
2° L’État fédéral peut comporter des colonies adminis¬
trées directement par les autorités fédérales, ce fut le cas
du Reich de 1871, c’est la solution des colonies des États-
Unis.
30 Une modahté voisine est fournie par les territoires
fédéraux qui constituent une formule de transition et
peuvent apparaître comme de futurs États membres. L’his¬
toire des États-Unis, avec la colonisation et le peuplement
des pays de l’Ouest, montre l’existence et l’évolution
de ces territoires. La même solution se rencontre dans
d’autres États fédéraux du continent américain.
40 La solution de l’administration fédérale directe a été
utilisée dans divers États fédéraux pour les capitales fédé¬
rales. Cette formule dite du « district fédéral » évite de don¬
ner à un État membre une suprématie apparente ou
réelle. Elle écarte un aspect du dédoublement fonctionnel
apparu avec Berhn dans les constructions fédérales alle¬
mandes de 1871 et 1919, avec Vienne dans les construc-
5. - INSTITUTIONS INTERNATIONALES.
130 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

tions fédérales autrichiennes. Aux États-Unis, la capitale


fédérale de Washington est située non dans un État
membre mais dans le district de Columbia. Une solution
analogue existe au Mexique, au Vénézuéla, en Argentine,
au Brésil.

B. — L’autonomie des États membres.

135. — L’autonomie des États membres. — Bien que


seul l’État fédéral soit un État au sens international, les
collectivités qui le composent doivent être distinguées des
circonscriptions administratives de l’État unitaire même
décentralisé. Les collectivités membres de l'État fédéral
jouissent d'un degré très élevé de décentralisation. La
décentralisation fédérale concerne non seulement la légis¬
lation et l’exécution, mais s’étend au domaine constitu¬
tionnel. Les États membres possèdent l’autonomie cons¬
titutionnelle dans le cadre de la constitution fédérale. Les
contours de cette autonomie sont déterminés par la cons¬
titution fédérale, ils sont donc variables. Le Reich de 1871
laissait aux États membres une autonomie constitution¬
nelle complète, et l’on trouvait avec des monarchies les
trois viUes hanséatiques à gouvernement répubücain.
D’autres États fédéraux comportent des limitations de
l’autonomie constitutionnelle. La forme républicaine des
États membres est exigée aux États-Unis, en Suisse. Le
réçime de Weimar prévoyait le gouvernement parlemen-
taore dans les États membres. Le régime socialiste sovié¬
tique existe dans chaque répubhque fédérée de l’U. R. S. S.
La constitution fédérale peut même poser des principes
généraux et des règles fondamentales concernant les droits
des citoyens dans tous les États membres, et ces normes
s’imposent aux constitutions particuhères.

136. — Le* garanties de l’autonomie. — L’autonomie


des États membres, étant déterminée par la constitution
fédérale, ne sera véritablement effective que si les États
membres peuvent participer à l’élaboration de la constitu¬
tion fédérale et à sa révision éventuelle. C’est dans ce
domaine de la révision de la constitution fédérale que
l'on peut rencontrer, sous sa forme réelle, la loi dite
de participation. Quelques constitutions fédérales ne pré¬
voient pas l’intervention directe des États membres dans
la procédure de révision, mais généralement une telle
LE PHÉNOMÈNE d'ASSOCIATION I3I

intervention est prévue. Elle se présente sous les moda¬


lités les plus diverses. Le Reich de 1871 organisait une
sorte de droit de veto, les modifications de la constitu¬
tion étaient repoussées lorsque se prononçaient contre
elles, au Bundesrat, 14 voix sur un total de 58. Comme la
Prusse, à elle seule, disposait de 17 voix, elle bénéficiait
d’un veto absolu. D’autres systèmes prévoient l’interven¬
tion directe. La solution la plus connue est celle des États-
Unis : l’initiative de la révision appartient soit au congrès
soit à une majorité des 2/3 des États membres, et les
amendements adoptés ne peuvent entrer en vigueur
qu’après approbation par les législatures des 3/4 des
États membres. En Suisse, la révision exige que soit
acquise la double majorité des cantons et de l’ensemble du
corps électoral. Un autre mécanisme de garantie des États
membres que l’on peut rencontrer est celui qui exclut de
la révision certaines matières ou certaines compétences
spécialement réservées à l’ensemble des États membres
ou à certains d’entre eux.

, 137. — Les droits des États meml^es. — Il y a des


États fédéraux dans lesquels tous les États membres ont
les mêmes droits et d’autres dans lesquels les droits des
États membres sont inégaux. Le nombre des représen¬
tants à la Chambre haute constitue un premier exemple
de cette égahté ou de cette inégalité des droits, mais le
problème peut aussi se poser sous l’angle de certaines com¬
pétences.
L’exemple le plus net de l’inégalité des droits et des
compétences est fourni par le Reich allemand de 1871.
Les auteurs allemands ont ici opposé les droits particuliers
de certains États (Sonderrechte) et les droits réservés
( RcscrvatrtchU ),
L’origine de ces deux séries de droits doit être soigneu¬
sement distinguée. Les droits particuhers sont prévus par
la constitution fédérale, parfois par une loi fédérale, ils
obéissent donc aux règles générales de révision fédérale.
Les droits réservés appartiennent à certains États
membres non pas sur la base de la constitution fédérale
mais sur celle de traités précédant la fondation même de
l’État fédéral ou de traités d’accession. Reposant sur la
base de traités internationaux les droits réservés ne
peuvent être modifiés qu’avec l’assentiment de l’État cjui
en est titulaire. Ils correspondent à une renonciation
incomplète à la compétence internationale. Le Reich de
132 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

1871 comportait ainsi des droits particuliers pour la Saxe


et le Wurtemberg qui possédaient des sièges permanents
dans la commission des Affaires étrangères du Bundesrat,
pour la Bavière qui possédait la présidence de cette com¬
mission et un siège permanent dans la commission de
l’Armée de terre et des forteresses, pour la Prusse qui avec
ses 17 voix au Bundesrat disposait du droit de veto en
matière de révision constitutionnelle. En matière de droit
réservé, l’exemple classique est celui de la Bavière qui
conservait, au sein du Reich, une compétence souveraine
en matière de P. T. T. fondée sur un traité antérieur. Les
formules du Reich de 1871 ont d’aüleurs un caractère
exceptionnel et ne se rencontrent guère dans les États
fédéraux modernes.

C. — Le partage de compétence.

138. — Le partage de compétence entre l’État fédéral


et les États membres. — L’étude des compétences res¬
pectives de l’État fédéral d’une part et des États membres
de l’autre doit être faite en distinguant deux problèmes
différents, celui de l’attribution des compétences, celui
du partage proprement dit. La terminologie allemande
oppose ainsi la Kompetenzerteilung et la Kompetenzvertei-
lung.
L’attribution de compétence appartient normalement
à la constitution fédérale. C’est ce qui exphque la formule
de l’immédiateté internationale. Les collectivités membres
ne sont pas des États car elles tiennent leur compétence
de la constitution fédérale et non pas du droit internatio¬
nal, sauf l’exception évidente mais rare des droits réservés.
Le partage de compétence est opéré aussi par la constitu¬
tion fédérale, mais ici toute une série de solutions sont
possibles. Il est des États fédéraux centralistes dans les¬
quels le partage est favorable aux autorités fédérales et
des États- fédéraux fédéralistes dans lesquels le partage est
favorable aux États membres. On peut concevoir un par¬
tage des domaines de compétence mais on peut concevoir
aussi un partage selon qu’il s’agit de législation ou d’exé¬
cution. Bien des systèmes admettent les compétences
concurrentes. On rencontre souvent des énumérations de
domaines de compétence. C’est la formule de langue
anglaise des enumerated powers. EUe peut s’apphquer dans
deux sens différents. Tantôt l’énumération joue en faveur
LE PHÉNOMÈNE d’aSSOCIATION 133

de l’État fédéral en ce sens que sont énumérées les compé¬


tences des États membres et la présomption de compé¬
tence joue en faveur de l’État fédéral. C’est la solution de
l’Afrique du Sud. Plus généralement l’énumération joue
en faveur des États membres, l’État fédéral ne disposant
que des compétences qui sont formellement énumérées
comme de son domaine. C’est la solution de la Suisse, des
États-Unis, de l’Argentine, du Venezuela. La solution
canadienne est assez curieuse, qui comporte une double
énumération, l’une au profit de l’État fédéral, l’autre au
profit des provinces.
Il apparaît nettement que le partage de compétence
entre l’État fédéral et les États membres est une question
de droit positif et que les solutions sont donc nécessaire¬
ment variables et multiples. L’examen comparé des
diverses institutions fédérales permet simplement de déga¬
ger quelques tendances générales.

^ 139. — Le partage dans le^ domaine des affaires inté»


rieures. — L’autonomie des États membres est en général
très poussée dans le domaine des affaires intérieures. Les
États-Unis fommissent l’exemple très net de l’existence de
multiples législations dans le domaine du droit civil, du
droit pénal, de la procédure civile. D’autres États fédé¬
raux, plus petits, comportent une unification de la législa¬
tion civüe ou pénale.
En général, on constate qu’appartiennent à la compé¬
tence fédérale les questions de monnaie, de poids et
mesures, de postes, télégraphe et téléphone, d’économie
et de commerce, de droits de douane. Sont évidemment
matières fédérales la législation relative à l’exécution de
la constitution fédérale, l’organisation et le recrutement
de la fonction pubhque fédérale, la législation et le gou¬
vernement des territoires soumis à l’autorité immédiate de
l’État fédéral.
L’État fédéral dispose aussi d’une compétence étendue
dans le domaine militaire. La flotte est toujours fédérale,
ainsi que l’armée de l’air. Pour l’armée de terre, la législa¬
tion, le commandement suprême ainsi que la disposition
des forces sont toujours de la compétence fédérale, mais ü
peut exister à côté de l’armée fédérale des milices locales
et les problèmes du recrutement peuvent parfois être de
la compétence des États membres.
Sur le plan financier, le problème se pose du partage des
ressources fiscales entre l’État fédéral et les États
134 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

membres. On trouve toujours des ressources propres de


l'État fédéral, mais elles ont parfois, à l'origine, été limi¬
tées à quelques impôts indirects ou à des droits de douane.
La législation fisc^e fédérale est un grand facteur d'uni¬
tarisme. Elle se développe généralement dans le sens de
l'accroissement des ressources fédérales et aboutit à limiter
très étroitement le droit des États membres de lever des
impôts.

^ 140. — Le partage dans le domaine des affaires exté"


rieures. — Bien que les Etats membres d'un État fédéral
ne soient pas des États au sens international, ils peuvent
disposer d'une certaine compétence internationale qui leur
est attribuée par la constitution fédérale.
On doit noter toutefois qu'une série d'États fédéraux
refusent toute compétence internationale aux États
membres. Cette solution se retrouve dans les États fédé¬
raux qui proviennent d'une transformation d'un ancien
État unitaire, ainsi l'Autriche, le Brésil, le Vénézuela. Elle
existe aussi dans les anciens Dominions britanniques, au
Canada, en Australie, en Afrique du Sud et s'explique
alors par le fait que pendant longtemps la collectivité
complexe elle-même était dépourvue de compétence inter¬
nationale, et donc a fortiori les collectivités^ membres.
D'autres États fédéraux attribuent aux États membres
une certaine compétence internationale. Cette compé¬
tence est généralement très limitée. Jamais n'est reconnu
le droit de guerre. Le droit de légation actif et passif
n'existe qu'exceptionnellement. Il était consacré dans le
Reich allemand de 1871, notamment pour la Bavière et
la Saxe. Il fut maintenu dans le Reich de 1919 en ce qui
concerne la Bavière, pour ses relations avec le Saint-Siège,
en tant qu'État cathohque. Il est consacré au profit des
Républiques sociaüstes soviétiques, à la suite de la révi¬
sion constitutionnelle du février 1944, mais demeure
non utüisé. Quant au droit de conclure des traités inter¬
nationaux, c'est-à-dire des accords autres que ceux inter¬
venant entre États membres ^ l’intérieur de l’État fédéral
ou entre l'État membre et l’État fédéral lui-même, il n’est
reconnu au profit des États membres que moyennant
diverses Hmitations. Les traités politiques sont interdits,
d’autres accords peuvent être conclus à condition de porter
sur un domaine dans lequel l’État membre dispose de la
compétence législative. Les hypothèses normales sont
celles d'accords de voisinage, de conventions de police.
LE PHÉNOMÈNE d’aSSOCIATION I35

d’accords économiques, de conventions de travaux publics.


Diverses limitations sont constituées en outre par le
contrôle que peut exercer l’État fédéral, ainsi en Suisse
et aux États-Unis, ou l’intervention de fonctionnaires
fédéraux seuls habilités à signer de tels accords dont les
négociations préalables seules sont confiées à l’État
membre.
A ces solutions classiques semble s'opposer l’attribution
de compétence diplomatique étendue aux Républiques
socialistes soviétiques membres de l’U. R. S. S. à la suite
de la révision constitutionnelle du i«r février 1944.
L’Ukraine et la Russie blanche sont membres de l’Organi¬
sation des Nations Unies et de diverses institutions spécia¬
lisées. Elles disposent donc d'une compétence internatio¬
nale, mais la structure même de l’État soviétique limite
en fait la possibiüté d'une politique distincte de celle de
l’État fédéral lui-même.

141. — Rapports entre États membres et État fédéral.


— Des traités peuvent être conclus entre un État membre
et l’État fédéral. Le Reich allemand en a connu plusieurs,
mais ce sont des traités de droit interne. Le problème
essentiel des rapports entre États membres et État fédéral
est celui des rapports entre eux des deux ordres juridiques,
l’ordre global et l’ordre particulier. Il peut se définir ainsi :
en cas de conflit entre la lémslation fédérale et la législa¬
tion particulière, laquelle doit l’emporter? Les diverses
constitutions fédérales apportent à ce problème des solu¬
tions diverses.
Parfois existe la maxime : Bundesrecht bricht Landes-
recht. Elle signifie la suprématie de la législation fédérale
et marque un certain « unitarisme ». Elle peut être ren¬
versée et le Reich allemand de 1871 connaissait la formule
inverse. La solution du problème peut être confiée à la
Cour fédérale, mais avec des modahtés diverses. Le tribu¬
nal fédéral suisse contrôle la constitutionnalité des lois
cantonales mais ne contrôle pas la constitutionnahté des
lois fédérales. Il n’existe donc pas de garantie que les
autorités fédérales respecteront leur compétence et le tri¬
bunal apparaît comme un organe d’imification. La Cour
suprême des États-Unis contrôle, au contraire, tant la
constitutionnalité des constitutions et lois locales que des
lois fédérales. La formule Bundesrecht... est donc aban¬
donnée, mais la Cour suprême n’agit pas d’office, elle
n’intervient qu’à la requête d’une partie et se borne à
136 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

déclarer que telle disposition est anti-constitutionnelle,


sans l’annuler. Le mécanisme le plus perfectionné était
celui de la constitution autrichienne, dite constitution kel-
sénienne, qui établissait un tribunal constitutionnel gar¬
dien de la légalité constitutionnelle et lui donnait pouvoir
d'annulation tant des lois locales que des lois fédé¬
rales contraires à la constitution.
On a pu faire remarquer que l’exécution des décisions
juridictionnelles étant confiée à l’État fédéral, il en résul¬
tait nécessairement un déséquilibre de tout système fédé¬
ral au profit de la collectivité fédérale. Il convient de noter
toutefois que l’abandon de la formule Bundesrecht..., la
présence d’un tribunal constitutionnel pouvant apprécier
la constitutionnalité de la loi fédérale, l’absence de tout
contrôle d’opportunité de la part du gouvernement fédéral
à l’encontre des gouvernements et des législatures des
États membres constituent autant de garanties du sys¬
tème fédéral et de l’autonomie des États membres.

142. — L’État fédéral et le droit intemationaL —


Il résulte des développements précédents que l’État fédé¬
ral apparait comme une collectivité particulièrement
complexe comportant, au profit des États membres, une
large décentrahsation garantie par divers procédés et pou¬
vant même s’étendre sur le plan de la compétence interna¬
tionale.
Mais il apparaît qu’au regard du droit international
l’État fédéral se présente comme un État unitaire. Seule
la collectivité globale est directement régie par le droit
international. La conséquence est que sur le plan de la
responsabilité internationale les États étrangers ne
connaissent que l’État fédéral. Cette solution est clas¬
sique, elle a été dégagée dans le cadre des États-Unis à
propos de deux affaires célèbres, celle du lynchage de
sujets itahens à la NouveUe-Orléans en 1891 et celle dite
des écoles de Cahfomie et de la non-admission des enfants
japonais, en 1906.

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et des États africains d’expression française, mémoire
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CHAPITRE IV

LES RÉGLEMENTATIONS

Les institutions internationales, dans leur ensemble,


constituent éAddemment des réglementations. Mais nous
entendons désigner ici sous ce nom une série de solutions
particulières qui modèlent le statut de certaines collec¬
tivités humaines membres de la société internationale.
Ces réglementations sont destinées à éviter les phénomènes
d'impériaüsme étatique, à diminuer les tensions pohtiques,
à rendre plus faciles les relations pacifiques. Elles ont
pu aboutir à doter certains territoires de statuts parti¬
culiers.
Les exemples de telles réglementations sont multiples.
Le concert international a créé jadis les neutralités per¬
manentes, les neutrahsations, et le système du condomi¬
nium a été parfois pratiqué. Plus récemment, et dans le
cadre des tentatives d’organisation générale de la société
internationale, se sont développés les régimes d’intema-
tionahsation de certains territoires, les mandats, les
tutelles.
Dans le système classique, ces statuts se caractérisent
par la limitation de la souveraineté; dans la conception
moderne du droit international, ils se présentent comme
des aménagements des compétences internationales.

§ I®’'. — Le condominium.

143. —Définition. — Le condominium est le régime


d’un territoire sur lequel plusieurs États exercent en
commun les compétences étatiques normalement exer-
LES RÉGLEMENTATIONS I4I

cées ailleurs par un seul État. Il constitue donc un par¬


tage de compétence suivant des modalités diverses de
répartition. C’est une solution de compromis par laquelle
s'exprime une collaboration internationale limitée dans
l’espace. Le régime du condominium demeure d’une
application difficile et les exemples d’application sont
assez rares.

144. — Exemples de condominium. — L’exemple le


plus net de condominium est celui des Nouvelles-Hébrides.
Cet archipel, situé dans l’Océan Pacifique, a été placé sous
le condominium franco-britannique par une série de
conventions conclues entre la France et le Royaume-Uni
(convention du 16 novembre 1887, convention du 20 oc¬
tobre 1906, protocole du 6 août 1914). Chacun des deux
Etats garde son autorité dans le domaine administratif
et judiciaire sur ses nationaux respectifs, ce qui constitue
un régime de personnahté des lois et une formule voisine
de celle des Capitulations. Pour le reste il s’agit d’une
véritable administration internationale.
Le second exemple est une véritable curiosité histo¬
rique, c’est le condominium franco-espagnol sur l’île des
Faisans, dans la Bidassoa, étabh par le traité du
2 décembre 1856 et la convention du 17 mars 1901 qui
réglementent l’exercice de la juridiction et de la pohce
dans l’île.
On cite enfin souvent un troisième exemple, celui du
Soudan anglo-égyptien, condominium établi par la con¬
vention anglo-égyptienne du 19 janvier 1899. Le concours
de compétence entre la Grande-Bretagne et rÉg5q)te qui,
lors de l’étabhssement du condominium, était vassale
de la Turquie et soumise à l’occupation mihtaire de la
Grande-Bretagne demeura assez formel. L'article ii du
traité anglo-égyptien de 1936 a maintenu le régime du
condominium et les pouvoirs considérables du gouverneur
général nommé à l’origine par décret du Khédive avec
approbation de Londres. Un accord anglo-égyptien du
12 février 1953 a reconnu au Soudan le droit à l’autono¬
mie et l’auto-détermination. L’indépendance soudanaise
a été proclamée le 20 décembre 1955.

145. — Zones d’influence. — Il ne faut pas confondre


avec le régime du condominium, qui aboutit à un régime
juridique de collaboration internationale dans l’adminis¬
tration d’un territoire, les zones ou sphères d'influence
142 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALÊ

OU sphères d’intérêts. Le procédé de la zone d’influence


tend à limiter les compétitions internationales dans
une région déterminée en délimitant des zones dans
lesquelles des États se reconnaissent un droit d’interven¬
tion et s’obligent réciproquement à l’abstention dans ce
qui n'est pas la zone qui leur est reconnue. Les sphères
d’influence n’aboutissent pas à l’établissement d’un
régime juridique de collaboration mais délimitent le champ
des impérialismes. Elles ont un aspect purement diplo¬
matique. Le procédé a été fort appliqué lors de l’expan¬
sion coloniale, au xix« siècle et au début du xx®. Les
exemples de conventions établissant des zones d’influence
sont nombreux : ainsi l’accord franco-britannique du
8 avril 1904, l'accord anglo-russe sur la Perse du 31 août
1907, l’accord franco-espagnol du 27 novembre 1912 sur
le Maroc.

§ 2. — Neutralité et neutralisation.

A. — La neutralité permanente classique.

146. — Le régime de la neutralité. — La neutralité


est la situation d^un État qui ne participe pas à une guerre.
Mais le droit international connaît deux institutions
(Efférentes : l'une est la neutralité occasionnelle, attitude
librement choisie par un État au cours d'une guerre,
l'autre est la neutralité permanente qui dérive d’un régime
conventionnel partieuher. La neutralité permanente est
une institution qui permet de diminuer les risques de
conflits entre États en constituant, entre certaines Puis¬
sances, des États qui peuvent apparaître comme des
États tampons. L’État perpétuellement neutre n’est pas
maître de sa politique extérieure, il doit agir conformé¬
ment aux impératifs de la neutralité. Il ne prend pas
partie aux guerres et les beUigérants, en contrepartie,
doivent respecter son territoire. Privé du droit de guerre
offensive, l’État perpétuellement neutre conserve toute¬
fois le droit de se défendre. Le régime de la neutralité
permanente est établi par un traité international qui est
conclu entre diverses Puissances et à la conclusion duquel
l’État neutre ne participe d'ailleurs pas nécessairement. La
neutralité d’un État peut être garantie par d’autres États
qui ont alors l’obligation de défendre par les armes, en cas
(ie conflit, l’éventuelle violation de cette neutralité. L’ins-
LES RÉGLEMENTATIONS 143

titution de la neutralité pennanente a existé en Europe


et constitue une tentative de recherche de la sécurité.

147. — La neutralité de la Suiite. — La Suisse s’est toujours


tenue, depuis le xvi® siècle, à l’écart des luttes des différentes
Puissances européennes entre elles et a conclu avec ses voisins
divers traités de paix perpétuelle. Mais le régime de la neu¬
tralité permanente de la Suisse a été établi en 1815, au len¬
demain des guerres du Premier Empire. Ce régime est établi
par les déclarations du 20 mars 1815 et du 20 novembre 1815.
Par ce dernier texte, les Puissances reconnaissent « que la
neutralité et l’inviolabilité de la Suisse et son indépendance
de toute influence étrangère sont dans les vrais intérêts de
l’Europe tout entière ». Affirmée à nouveau par l’article 435
du traité de Versailles et l’article 375 du traité de Saint-
Germain, la neutralité suisse a toujours été respectée depuis
1815 et notamment au cours des deux guerres mondiales.
Le problème de savoir dans quelle mesure les obligations
dérivant du statut d’État perpétuellement neutre étaient
compatibles avec celles dérivant de la qualité de membre de
la Société des Nations se posa lorsque la Suisse entra, en
1920, dans la Société. Le Conseil de la S. D. N., dans une
déclaration de février 1920, avait tenu compte de la situation
spéciale de la Suisse et admis qu’elle serait dispensée de par¬
ticiper à une action militaire ou d’admettre le passage de
troupes sur son territoire. La Suisse interpréta toujours très
strictement ses obligations en tant que membre de la S. D. N.
EUe refusa en 1921 le passage sur son territoire des contingents
internationaux envoyés à Vilna, ne participa pas par des
forces de police au contrôle international des opérations du
plébisciste de la Sarre, en 1935. Lors de l’établissement, en
1935, du régime des sanctions à l’encontre de l’Italie fasciste
coupable d’agression contre l’Éthiopie, la Suisse n’appliqua
pas intégralement les mesures de sanction économique. A la
veille de la seconde guerre mondiale, la Suisse renforça
encore son régime de neutralité en obtenant d’être dispensée
à l’avenir de l’application de toute sanction économique.
Cette stricte politique de neutralité a conduit actuellement le
Gouvernement helvétique à ne pas faire entrer la Suisse
dans l’Organisation des Nations Unies. Elle participa à
l’O. E. C. E., puis à l’O. C. D. E., à l’A. E. L. E. et
récemment est entrée au Conseil de l’Europe (1963).

148. — La neutralité de la Belgique. — La neutralité per¬


pétuelle de la Belgique fut exigée par les Puissances, sur
l’initiative de l’Angleterre, comme condition de la création
d’un État indépendant, par séparation d’avec le royaume des
Pays-Bas. Le régime en fut établi par un protocole du
20 janvier 1831, puis par l’article 7 du traité du 14 octobre 1831
signé par les cinq Puissances du Directoire européen. La
144 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

Belgique devait adhérer à son tour et signer le 15 novem¬


bre 1831 avec les Cinq un traité par lequel cette neutralité
était garantie. Les Pays-Bas reconnurent en 1839 l’indépen¬
dance belge et la neutralité, mais sans la garantir (traité de
Londres du 16 avril 1839).
Violée en août 1914 par l’Allemagne, puissance pourtant
garante, la neutralité belge devait être abandonnée au lende¬
main de la première guerre mondiale, par les traités de paix
(art. 31 Versailles, 83 Saint-Germain, 67 Trianon). Le traité
de 1839 fut abrogé entre la Belgique, la France, la Grande-
Bretagne et les Pays-Bas par le traité du 22 mai 1936.
Membre sans restriction de la S. D. N., signataire des traités
de Locarno de 1926, la Belgique a repris à partir de 1936 une
politique de neutralité. Il ne s’agissait plus d’ailleurs d’une
véritable neutralité permanente mais d’un régime particulier
que s’engageaient à respecter les Puissances voisines, la
Grande-Bretagne et la France dans une note du 24 avril 1937,
le Reich allemand dans une note du 13 octobre. Renouvelant
toutefois l’acte d’agression de 1914, les troupes allemandes
ont envahi le territoire belge le 10 mai 1940.
Membre de l’Union occidentale en 1948, du Pacte atlan¬
tique en 1949, de l’Union européenne occidentale en 1954,
la Belgique n’est plus aujourd’hui un État neutre.

149. — La neutralité du Luxembourg. — La neutrahté


perpétuelle du Luxembourg a été établie par le traité du
Il mai 1867 en contre-partie du retrait de la garnison prus¬
sienne qui stationnait dans l’une des forteresses de l’ancienne
Confédération germanique dissoute en 1866. En même temps
que le petit État était neutralisé, il était aussi démüitarisé, de
telle sorte qu’il était privé de tout moyen de défendre lui-
même sa neutralité. Celle-ci était garantie par les Puissances
signataires du traité de 1867, Autriche, France, Grande-
Bretagne, Italie, Pays-Bas, Prusse, et reconnue en outre par
la Belgique. La neutrahté du Luxembourg a été violée en
1914 par l’Allemagne, dans les mêmes conditions que la
neutralité belge. Elle fut abrogée par l’article 40 du traité de
Versailles dont le Luxembourg ne fut d’ailleurs pas signataire,
et le Gouvernement luxembourgeois ne manqua pas, à plu¬
sieurs reprises, de rappeler que sa pohtique était une pohtique
de neutralité. Le Luxembourg devait être envahi par les
armées hitlériennes en 1940.
Pour les mêmes raisons que celles indiquées plus haut à
propos de la Belgique, le Luxembourg n’est plus actuellement
un État neutre.

B. — Les neutralités au xx® siècle.

150. — Actualité de la neutralité. — A côté de la


neutralité permanente classique dont l’exemple demeure
LES RÉGLEMENTATIONS 145

la Suisse, la formule de la neutralité a retrouvé au xx® siècle


une actualité. Cette solution se présente sous des formes
différentes de celles de la neutralité permanente. Elle
repose généralement sur des textes de droit interne de
caractère constitutionnel ou législatif, dont parfois un
texte international prend acte (Laos). Quelquefois il n’y
a pas même de texte de droit interne et il s’agit d’une
pratique.
La politique de neutralité, sous la diversité de ses
modes d’expression, s’inscrit quelquefois dans le cadre
du principe plus général de la « coexistence pacifique ».

151. — La neutralité de l’Âutriche. — La neutralité


de l’Autriche a été établie en 1955. La situation inter¬
nationale de l’Autriche résultait des articles 80 du traité
de Versailles et 88 du traité de Saint-Germain. Ce que
stipulaient ces textes étaient Vindépendance de l’Autriche
considérée comme inahénable, si ce n’est du consentement
de la S. D. N. Les restrictions ainsi apportées à la pohtique
extérieure de l’Autriche avaient pour but d’éviter une
annexion par l’AUemagne et assurer ainsi le maintien
d’un équüibre en Europe centrale. Les difficultés financières
de l’Autriche devaient amener les Puissances à lui accorder
en 1922 une aide économique moyennant l’engagement
renouvelé du maintien de l’indépendance. Un projet
d’union douanière austro-allemande fut toutefois élaboré
en 1931, mais abandonné ensuite après qu’un avis consid-
tatif de la Cour permanente de justice internationale l’ait
considéré comme contraire au protocole de 1922. L’Ans-
chluss devait être réalisé par la force en 1938.
Après la seconde guerre mondiale dans laquelle elle
avait été entraînée malgré elle, l’Autriche a recouvré
son indépendance. Le traité « portant rétablissement
d’une Autriche libre et indépendante » a été conclu
après de longues négociations souvent interrompues,
seulement le 15 mai 1955 par les Quatre grandes Puis¬
sances et l’Antriche.
Le trffité interdit l’Anschluss mais ne fait pas allusion
à un statut de neutrahté. Reprenant les formules de la
déclaration de 1815 une résolution du Conseil national
autrichien, le 9 juin 1955, proclamait : « l’inviolabüité du
territoire de l’Etat autrichien est conforme à l’intérêt
pohtique de l’Europe tout entière ». Par une loi consti¬
tutionnelle du 26 octobre 1955, « l’Autriche proclame
hbrement sa neutrahté perpétuelle », eUe affirme qu’ehe
146 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

maintiendra et défendra cette neutralité, n'adhérera à


aucune alliance militaire et n’admettra pas de bases mili¬
taires sur son territoire. L'Autriche, comme le traité
de 1955 l’autorisait à le faire, est entrée à l’O. N. U. le
14 décembre de la même année.

152. — La neutTalité du Cambodge. — Définie en


janvier 1956 par le prince Norodom Sihanouk comme
l’expression d’une poHtique, la neutralité du Cambodge
a été étabhe par la loi constitutionnelle du 12 janvier 1957.
Ce texte proclame que le Cambodge est un pays neutre,
qu’il ne conclut aucune aUiance müitaire ou idéologique
avec les pays étrangers. Selon le principe de neutraUté
le Cambodge n’entreprendra aucune agression contre un
pays étranger, mais s’il était victime d’un acte de force
il se réserve de se défendre par les armes, de faire appel
aux Nations Unies, dont il est membre et même à une
Puissance amie.

153. — La neutralité du Laos. — A la différence des


neutrahtés autrichienne et cambodgienne, la neutrahté
du Laos formulée dans ime déclaration gouvernementale
du 9 juillet 1962 s’intégre dans un accord international
élaboré à la suite d’une longue conférence et conclu le
23 juillet 1962 sous la forme d’une Déclaration sur la
neutrahté du Laos faite solennellement par les Quatre
grandes Puissances, la Répubhque populaire de Chine,
les deux Etats du Viêt-nam, la Birmanie, le Cambodge,
l’Inde, la Pologne et la Thaïlande. La neutrahté est garan¬
tie internationalement, ehe est surveihée même par
l’intervention d’une Commission internationale créée
antérieurement en vertu des Accords de Genève de 1954
et composée sous la présidence de l’Inde de représentants
du Canada et de la Pologne.

154. — La politique suédoise. — On présente souvent


la Suède comme un État neutre. Il n’existe pas de texte
juridique relatif à la neutrahté suédoise. Un projet de loi
sur la neutrahté a été repoussé par le Parlement suédois.
Il s agit en réahté d’une pohtique de non alhance qui est
le fondement de la diplomatie suédoise. Ehe aboutit à
rejeter toute inclusion dans une alhance, à refuser de
permettre l’étabhssement sur le territoire suédois de bases
étrangères et repose sur une défense nationale de niveau
techmque élevé.
LES RÉGLEMENTATIONS 147

La politique de la Finlande est, à certains égards com¬


parable à celle de la Suède et tient compte de la proximité
de l’Union soviétique.

155. — Neutralisme et non-engagement. — De la


neutralité se distinguent et se rapprochent à la fois les
notions actuelles de neutralisme et de non engagement.
On désigne sous ces expressions les politiques pratiquées
par divers États qui appartiennent essentiellement au
Tiers monde mais dont fait partie également la Yougo¬
slavie.
C’est à Belgrade, en septembre 1961, que s’est réunie
la Conférence des États non engagés, représentant près
d’un milliard d’hommes, le tiers de la population mon¬
diale, et vingt-quatre États.
Aucune organisation institutionnelle n’a été établie
et seuls des principes ont été formulés.
La notion commune qui caractérise ces politiques est
celle du « non-engagement » ou du « désengagement ».
Ces États ne font pas partie d’une organisation militaire
ou d’une alliance militaire qui serait étabhe dans le
contexte de la « guerre froide ». Si un État a des bases
étrangères installées sur son territoire il doit manifester
son intention d’abandonner des obhgations héritées du
passé. Le neutrahsme est ainsi essentiellement la volonté
pohtique de se tenir à l’écart des deux blocs de Puissances
Est, Ouest.
Les États représentés à Belgrade sont ainsi moins nom¬
breux que les États et les mouvements représentés à
Bandœng où le dénominateur commun était le caractère
« afro-asiatique » et où se trouvaient les États engagés les
uns vers l’Est, les autres vers l’Ouest.
La volonté commune de non engagement, de non ahgne-
ment, la proclamation par divers Etats de leur droit à
intervenir dans les affaires du monde en raison de la
tension internationale et de l’impuissance des plus grands
États à assurer une coexistence internationale laissent
d’ailleurs subsister des nuances et même des différences
dans les diverses orientations politiques sous la réserve
des principes fondamentaux exposés.

C. — Neutralisation et démilitarisation.

La neutralisation se distingue de la neutralité perma¬


nente par deux traits : i® elle ne s’applique qu’à un terri-
148 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

toire déterminé, à certaines parties d'un État; 2® elle


signifie démilitarisation de ce territoire alors que la
neutralité permanente n’entraîne pas nécessairement
démilitarisation.
La neutralisation constitue un élément d'un système
de sécurité internationale, elle peut tendre à protéger
un État déterminé, à le garantir contre certains risques,
elle peut aussi être établie dans l’intérêt du maintien
de la paix générale.
L’institution de la démilitarisation pratiquée depuis
longtemps puis quelque peu abandonnée retrouve une
certaine actualité dans le cadre des tentatives de désar¬
mement atomique, il s’agit de la dénucléarisation.

156. — Exemples de neutralisation. — Les exemples


de neutralisation sont nombreux. Souvent la neutralisa¬
tion a accompagné certains statuts internationaux,
ainsi les canaux transocéaniques, les détroits, les mandats
B et C, Tanger, le bassin du Congo, mais on rencontre
aussi ce régime pour certaines parties de territoires éta¬
tiques ordinaires. La neutralisation est établie par voie
conventionnelle, elle est parfois imposée à un Etat par
un traité dont il n’est pas signataire. On a quelquefois,
par une regrettable assimilation avec des situations
fort différentes du droit privé interne, voulu fonder les
régimes de neutralisation sur la notion de servitude,
mais cette transposition que rien ne justifiait et qui ne
conduisait à aucune conséquence intéressante a été
abandonnée.
Haute-Savoie, Chablais et Faucigny. — Les provinces
du Chablais et du Faucigny et le territoire de la Haute-
Savoie au nord d’Ugine ont été soumis à un régime
de neutralisation en vertu de l’article 92 de l’Acte final
du Congrès de Vienne et du traité de Paris du 20 novembre
1815. Ce ré^me était une sorte de complément de la
neutralité suisse. Confirmé après 1860 et la réunion de la
Savoie à la France, il fut supprimé par l’article 435, § i®*",
du traité de Versailles prenant acte de l’accord intervenu
entre la France et la Suisse pour l’abandon d’une régle¬
mentation qui ne correspondait plus aux circonstances.
Iles d’Aaland. — Après la guerre de Crimée, les îles
d’Aaland, situées à l’entrée du golfe de Botnie, furent
soumises à im régime de démilitarisation (traité du
30 mars 1856). A la suite d’un différend suédo-finlandais
sur la question de l’appartenance de ces îles, le Conseil
LES RÉGLEMENTATIONS 149

de la S. D. N., dans une recommandation du 25 juin 1921,


attribua la souveraineté des îles à la Finlande mais posa
le principe de la neutralisation de l’archipel, et la conven¬
tion de Genève du 20 octobre 1921 établit tm régime
complexe de neutralisation destiné à éviter que ces îles
ne deviennent jamais un danger au point de vue militaire.
Ce régime a été maintenu dans les traités ultérieurs signés
par la Finlande, traité avec l’U. R. S. S. en 1940 et traité
de paix de 1947.
Rive gauche du Rhin. — Les articles 42 et 44 du traité
de Versailles avaient prévu la déndlitarisation des terri¬
toires allemands situés sur la rive gauche du Rhin et
sur la rive droite à l’ouest d’une ligne tracée à 50 kilo¬
mètres à l’est du fleuve. Ce régime, destiné à garantir la
France contre une invasion brusquée de la part de l’Alle¬
magne, fut dénoncé unilatéralement le 7 mars 1936.
En dehors de ces exemples t5q)iques on peut citer une
série d’autres neutralisations : celle de la mer Noire impo¬
sée à la Russie après la guerre de Crimée par le traité de
Paris du 30 mars 1856 et qui, après une dénonciation uni¬
latérale par la Russie, fut abandonnée par le traité de
Londres du 13 mars 1871 ; celle de la zone neutre entre la
Suède et la Norvège établie après la dissolution de l’Union
suédo-norvégienne par l’une des conventions de Stockholm
du 26 octobre 1907 ; celle de l’archipel du Spitzberg placé
sous l’administration de la Norvège par le traité du
9 février 1920.

157. —Démilîtarisation atomique. — C’est à la solution


traditionnelle de la démilitarisation que font appel diverses
propositions actuelles qui ont été formulées en vue de
réduire les domaines d’utilisation des armements ato¬
miques ou thermo-nucléaires.
Plusieurs tentatives doivent être signalées.
1° Le plan Rapacki. L’une de ces initiatives est connue
sous le nom de plan Rapacki. Elle a été prise par le
ministre des affaires étrangères de Pologne, M. Rapacki,
qui a présenté un plan généralement désigné sous son
nom. La plan Rapacki a comporté des rédactions succes¬
sives, depuis sa présentation le 2 octobre 1957 à l’Assem¬
blée générale des Nations Unies.
Ce plan consiste à créer une zone en Europe, compre¬
nant les territoires de la Pologne, de la Tchécoslovaquie,
de la République démocratique allemande et de la Répu¬
blique fédérale allemande qui serait une zone « désato-
150 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

misée » dans laquelle ne seraient point stockées ou instal¬


lées des armes atomiques. Les forces armées voisines
seraient réduites et progressivement retirées, les alliances
militaires existantes étant maintenues. Des moyens
appropriés de contrôle seraient institués, les quatre
Puissances prenant l’engagement de ne pas user d’armes
nucléaires contre la zone.
Le plan Rapacki n’a pas dépassé le cadre d’une simple
proposition. Au contraire une démilitarisation atomique
a été consacrée par un traité international, celle du
continent antarctique (voir infra, n® i6i).
2® Le traité de Moscou du 5 août içôj. L’interdiction par¬
tielle des essais nucléaires édictée par le traité signé à
Moscou le 5 août 1963 par l’U.R.S.S., les États-Unis, le
Royaume-Uni, demeure distincte des questions de démi¬
litarisation atomique.
Par ce traité les deux grandes Puissances nucléaires
et le Royaume-Uni s’engagent à interdire les expériences
des armes nucléaires dans l’atmosphère, dans l’espace et
sous l’eau. Les essais souterrains demeurent autorisés
mais les Parties déclarent qu’elles s’efforceront de par¬
venir à la conclusion d’un traité tendant à l’arrêt de toutes
les expériences.
On doit noter l’interdiction de « toute explosion expé¬
rimentale d’arme nucléaire ou tout autre explosion
nucléaire » ce qui donc concerne aussi les explosions
effectuées dans un but pacifique.
Le traité n’organise aucun mécanisme de contrôle et
se borne à formùer une interdiction.
L’interdiction formulée ne constitue pas en eUe-méme
une mesure de désarmement et les Puissances nucléaires
conservent leurs stocks de bombes.
Le traité doit être apprécié objectivement. Il traduit
un certain équilibre nucléaire entre les deux Grands et a
certainement une grande valeur symbolique.
La dissémination des armes nucléaires entre une plura¬
lité d’États constitue certainement un très grave danger
pour la paix internationale. Plus de cent États ont
adhéré au traité de Moscou mais quelques gouvernements
ont refusé de le faire ^armi lesquels le gouvernement
français et le gouvernement de Pékin. La France et
la Chine entendent en effet poursuivre leurs essais
atomiques.
Avant le 5 juillet 1963, les États-Unis avaient procédé
à quelque 250 essais équivalant à quelque 150 méga-
LES RÉGLEMENTATIONS 151

tonnes, l’U.R.S.S. avait à son actif quelque 150 essais


mais équivalant à 250 mégatonnes. Le Royaume-Uni
avait procédé à environ 25 essais.
La France pour sa part n’avait effectué que 7 essais et la
bombe la plus puissante était seulement de 50 kilotonnes.
Le traité est entré en vigueur le 10 octobre 1963, il a
une durée illimitée.
30 La dénucléarisation de l’Amérique latine. Le thème
de la dénucléarisation a fait l’objet de plusieurs résolu¬
tions adoptées par l’Assemblée générale de l’O. N. U.
Ainsi la résolution 1652 (XVI) du 24 novembre 1961
pour l’Afrique, ainsi la résolution (XVIII) du
27 novembre 1963 pour l’Amérique latine.
Un traité visant l’interdiction des armes nucléaires
en Amérique latine a été signé à Mexico le 14 février 1^67
par quatorze États. L’art. 7 crée un organisme établi à
Mexico chargé de veiUer au respect des obügations des
Parties. Un système de contrôle est prévu. L’art. 4 définit
la zone d’apphcation du traité.
4° L’utilisation pacifique de l’espace. Le traité sur
l’exploration et l’utihsation de l’espace signé le 27 jan¬
vier 1967 comporte dans son art. 4 l’interdiction de la
mise sur orbite d’objets porteurs d’armes nucléaires ou
de tout autre type d’armes de destruction massive. La
même interdiction vaut pour l’installation de telles armes
sur les corps célestes. L’aménagement de bases, fortifi¬
cations et installations militaires ordinaires est également
interdit.
5° La non-dissémination des armes nucléaires. Dans le
cadre de la Conférence des Nations Unies pour le désar¬
mement (Conférence des 18 ou, en raison du refus du
gouvernement français de siéger dite parfois des 17) un
traité sur la non-dissémination des armes nucléaires a été
préparé sur la base d’un projet commun américano-
soviétique. Il comportera des dispositions relatives au
contrôle des armements confié à l’Agence internationale
de l’énergie atomique. Ce texte constitue un pas impor¬
tant dans la voie du désarmement et du maintien de la
paix. Une ^fficulté réside dans la distinction des activités
atomiques pacifiques par rapport aux activités miütaires.

§ 3. — Les internationalisations.

On désigne sous le nom de régime d’internationalisation,


un système d’administration internationale qui concerne
152 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

certains territoires. Ces territoires ne constituent pas des


Etats au sens international mais sont directement régis
par le droit international, leur statut étant établi par des
traités internationaux. La solution de l’intemationalisa-
tion peut être excellente lorsqu’elle correspond à la réalité
des choses et permet de soustraire un territoire à la domi¬
nation d’une Puissance, d’équilibrer les influences, de
contrebalancer les intérêts en présence, mais elle peut
aussi n’être qu’un palliatif, qu’une solution apparente
inscrite dans des documents diplomatiques mais dépour¬
vue de toute efficacité.

158. — Régimes de Tanger et Dantzig. — Parmi les statuts


de territoires à régime international, le régime de Tanger mérite
une place importante. La situation géographique de Tanger
en faisait l’objet de rivalités internationales. Une solution
d’administration internationale fut adoptée spontanément
dès la fin du xviii® siècle, puis précisée par l’Acte d’Algésiras de
1907 qui établissait à Tanger le corps diplomatique. Le régime
établi par un accord anglo-franco-espagnol de 1923, modifié
en 1928 puis en 1945 et en 1952, était fort complexe, compor¬
tant une véritable assemblée internationale administrant la
ville.
Ce régime a pris fin par la signature le 29 octobre 1956
d’une déclaration émanant du Maroc et des Puissances
intéressées. Des textes de droit interne marocain maintiennent
des réglementations économiques particulières.
D’autres régimes d’internationalisation ont eu des durées
plus brèves ou des aspects plus mouvementés. Ce fut le cas
de Dantzig dont le traité de Versailles avait fait une ville libre
placée sous la protection et la garantie de la S. D. N.
et administrée par un Haut-commissaire. Même avant le
coup de force hitlérien de 1939 le régime n’était point
satisfaisant et les difficultés pohtiques n’étaient pas com¬
pensées par un grand développement économique car la
Pologne avait créé un port proprement polonais, situé à
l’Ouest, Gdynia. Incorporée actuellement à l’État polonais,
la ville de Gdansk (ancienne Dantzig) n’a pas de statut par-
ticuher.

159. — Les statuts de la Sarre. — Les articles 45 à


50 du Traité de Versailles avaient établi un régime parti¬
culier du territoire de la Sarre combinant le principe
juridique des réparations et le principe politique des
nationalités et du droit des peuples à disposer d’eux-
mêmes.
En compensation de la destruction des mines de char-
LES RÉGLEMENTATIONS 153

bon au cours de la guerre, l’Allemagne cédait la propriété


des mines. Mais le territoire était gouverné pendant
quinze ans à dater de l’application du Traité de Versailles
par la S. D. N. et une commission internationale de gou¬
vernement.
Ce régime était transitoire. Un plébiscite devait inter¬
venir dans les quinze ans, les habitants devant choisir
entre trois solutions : le maintien du statu quo, le ratta¬
chement à l’AUemagne, le rattachement à la France.
Le plébiscite qui se déroula le 13 janvier 1935 aboutit à
la solution du rattachement à l’Allemagne voté à une
énorme majorité (477.000 voix, avec 46.000 pour le statu
quo et 2.000 pour le rattachement à la France).
Au lendemain de la seconde guerre mondiale le terri¬
toire de la Sarre a été rattaché économiquement à la
France et une union douanière franco-sarroise étabhe,
les relations franco-sarroises étant définies par des accords-
notamment les conventions du 20 mai 1953.
Les formules françaises tendant à faire de la Sarre une
sorte de protectorat et ultérieurement un territoire écono¬
miquement rattaché à la France se sont heurtées à la thèse
allemande selon laquelle la Sarre ne pouvait être qu’une
partie du territoire allemand. Entre ces thèses opposées
une solution moyenne avait été proposée, celle de l’inter-
nationahsation ou « européanisation » du territoire sarrois.
Il s’agissait de dissocier l’union économique franco-sar¬
roise d’une gestion pohtique du territoire qui se ferait
dans le cadre des institutions européennes en voie de
création.
Lancée en août 1952 par Robert Schuman la formule
européenne devait être reprise par le détail dans le rapport
Van der Goes van Naters qui fut soumis à l’Assemblée
consultative du Conseil de l’Europe en 1953 et adopté en
1954 -
Finalement c’est une formule d’intemationahsation
assez voisine mais différente tout de même qui devait être
retenue dans l’accord franco-allemand du 23 octobre 1954
qui est une des pièces des divers accords de Paris inter¬
venus à la suite de la non-ratification du traité de la
C. E. D. par la France.
Le statut international dit statut européen prévu par
l’accord de 1954 étabhssait entre la France et la Sarre
un régime de coopération économique. Le régime poh¬
tique comportait la représentation du territoire sur le
plan de la pohtique étrangère et de la défense par un
154 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

Haut-commissaire choisi par TUnion européenne occi¬


dentale.
L’accord de 1954 prévoyait que ce projet de statut
européen devait être soumis au peuple sarrois par voie
de referendum.
Le referendum eut lieu le 23 octobre 1955 et le peuple
sarrois, à l’énorme majorité de 67,7 % des 670.000 votants
rejeta le projet de statut européen. Le gouvernement
français décida alors de ne pas maintenir le statu quo.
Les accords de Luxembourg du 27 octobre 1956 ont
consacré le retour de la Sarre à la République fédérale
allemande.

160. — Le statut de Trieste (1947-1954). — Le traité


de paix avec l’Itedie du 10 février 1947 avait adopté la
solution d’un régime international pour la viUe et le
territoire de Trieste, objet de conflit entre la Yougoslavie
et r Italie.
Le régime était fort compliqué et ne put même pas être
établi car le gouverneur du territoire devait être désigné
par le Conseil de Sécurité et on ne put se mettre d’accord.
Seul fonctionna un régime provisoire prévu par le traité
lui-même dans son annexe 7.
A la fin de l'année 1953 un accord italo-yougoslave
diminua la tension internationale en cette zone en pré¬
voyant le retrait des troupes à une certaine distance.
Un accord signé à Londres, le 5 octobre 1954 par les États-
Unis, le Royaume-Uni, la Yougoslavie et ritahe, a mis
fin au régime antérieur et consacré un partage territorial.
Ce plan a été accepté par la France et l’U. R. S. S.

161. — Une internationalisation scientifique : l’Ântarc-


tique. — Un traité signé à Washington le i®*' octobre 1959
a établi un statut particulier du continent antarctique
défini comme une région située au 60° de latitude sud.
Mettant en œuvre des principes déjà contenus dans une
note du gouvernement des États-Unis du 2 mai 1958, ce
traité adopte la solution d’une internationalisation fonc¬
tionnelle dont les deux bases sont la liberté de recherche
scientifique et l’interdiction de toute activité non paci¬
fique. Les douze Puissances signataires reconnaissent
ainsi qu’il est de l’intérêt de l’humanité tout entière que
r Antarctique ne devienne jamais l'enjeu de différends
internationaux, elles interdisent les mesures militaires
(établissements de bases, constructions de fortifications.
LES RÉGLEMENTATIONS 155

manœuvres et essais d'armes de toutes sortes), les explo¬


sions nucléaires et l'élimination dans cette zone de déchets
radioactifs. La liberté de recherche scientifique est l'un
des principes fondamentaux du statut, elle prolonge une
situation d'harmonie internationale qui avait existé au
cours de l'Année géophysique.
Le Traité de Washin^on constitue un modus vivendi
particulier mais il n'aboutit pas à un règlement définitif
en ce sens qu'il n'exige pas des Puissances signataires
l'abandon de leurs revendications territoriales ou la renon¬
ciation à des droits de souveraineté qu'elles auraient anté¬
rieurement afi&rmés. A ce titre il se distingue des statuts
classiques d'internationalisation et donne le pas aux
considérations purement fonctionnelles.

162.— L’administration temporaire de l’Irian occiden-


taL — La Charte de l'O. N. U. n’a pas prévu pour l’Or¬
ganisation la possibüité d'administrer directement des
territoires comme l’avait fait la S. D. N.
Cette formule toutefois a été adoptée à titre très tem¬
poraire pour l’Irian occidental. Cette partie de la Nou¬
velle-Guinée constituant une colonie néerlandaise n’avait
pas été rétrocédée par les Pays-Bas à l’Indonésie en 1946.
Après bien des difficultés et de graves tensions entre les
deux États im accord fut signé le 15 août 1962 à WasWng-
ton par lequel l’Irian occidental deviendrait une partie de
l’Indonésie en 1963.
Pendant une période transitoire l’administration de
la Nouvelle-Guinée fut confiée à « une autorité exécutive
provisoire des Nations-Unies » fonctionnant sous le
contrôle d’un administrateur nommé par le Secrétaire
général en accord avec les Pays-Bas et l’Indonésie et qui
eut à partir du mai 1963 la faculté de transférer tout
ou partie de ses pouvoirs à l’Indonésie. Ce transfert sous
souveraineté indonésienne a eu heu précisément le
mai 1963. Un referendum d’auto-détermination est
prévu qui devra être achevé avant la fin de 1969.

§ 4. — Les Mandats.

163. _ Origine de l’institution. — Tout traité de


paix s’accompagne d’une redistribution de territoires,
qui aboutit donc à des annexions ou à des indépendances.
A la conférence de la paix de 1919 un système fut proposé
156 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

par un homme d’État de l’Afrique du Sud, le général


Smuts, pour s’appliquer à tous les territoires détachés des
empires centraux vaincus, c’était le régime des mandats.
Il consistait à investir la S. D. N. du rôle de trustée à
l’égard de ces collectivités et à confier momentanément
l’administration des territoires, sous le contrôle de la
Société, à certaines grandes Puissances. Dans l’esprit de
son promoteur, le régime devait avoir une portée générale.
Il fut écarté pour les territoires européens tant par les
grandes Puissances victorieuses que par les gouvernements
nouveaux des États ressuscités ; Pologne, Tchécoslovaquie,
etc. Mais l’idée fut au contraire apphquée hors d’Europe
pour les anciennes colonies allemandes et les territoires
détachés de l’Empire ottoman. Toutefois une certaine
place fut faite à la formule de l’annexion qui avait été
abandonnée dans le cadre des principes du Président
Wüson et eUe devait se marquer avec le régime particu-
üer de certains mandats dits mandats C.

164. — Le régime du mandat. — L’article 22 du


Pacte de la S. D. N. posait les principes généraux de
l’institution du mandat. Partant de la constatation que
les colonies et territoires qui avaient cessé,^ à la suite
de la guerre, d’être sous la souveraineté des États qui les
gouvernaient auparavant, étaient habités par des peuples
non encore alors capables « de se diriger eux-mêmes dans
les conditions partieuhèrement difficiles du monde
moderne » et considérant que le bien-être et le développe¬
ment de ces peuples formaient une mission sacrée de civili¬
sation, le texte estimait que la meilleure méthode pour
réahser ce dernier principe était de « confier la tutelle de
ces peuples aux nations développées qui, en raison de
leurs ressources, de leur expérience ou de leur position
géographique sont le mieux à même d’assumer cette
responsabilité et consentent à l’accepter ». Les termes
non dépourvus de grandeur par lesquels sont ainsi définis
les buts mêmes de l’institution font apparaître l’idée pro¬
testante d’une responsabihté morale incombant aux États
les plus évolués.
Ce but désintéressé est exclusif de la notion de la sou¬
veraineté. Soustraits à la souveraineté des États dont ils
faisaient auparavant partie, les territoires qui devaient
être placés sous le régime du mandat ne pouvaient être
considérés comme passant sous la souveraineté du manda¬
taire. Le mandat ne pouvait donc s’analyser en une domi-
LES RÉGLEMENTATIONS 157

nation impérialiste, prendre figure d'annexion ou de


protectorat. L’institution était nouvelle en droit interna¬
tional public. Les expressions empruntées au droit privé
qui étaient utilisées dans l’article 22, celles de mandat,
de mandataire et de tutelle n’avaient évidemment aucune
valeur technique et ne sauraient caractériser l’institution.
Celle-ci s’analyse en une véritable fonction internationale
confiée à certains États, sous le contrôle de la S. D. N.
et en particulier d’un de ses organes, la Commission per¬
manente des mandats.

165. — Les différents mandats. — L’article 22, § 3. du


Pacte indiquait que le caractère du mandat doit différer
suivant le degré de développement du peuple, la situation
géographique du territoire, ses conditions économiques et
toutes autres circonstances analogues. Il distinguait ainsi
trois types de mandats :
— Le premier qui devait, dans la pratique, être appelé
mandat A devait s’appliquer à certaines communautés qui
appartenaient autrefois à l’Empire ottoman et qui ont atteint
un degré de développement tel que leur existence comme
nations indépendantes peut être reconnue provisoirement
à la condition que les conseils et l’aide d’un mandataire
guident leur administration jusqu’au moment où elles seront
capables de se conduire seules. Il était prévu que le vœu
de ces communautés déjà fort évoluées devait être pris en
considération pour le choix du mandataire. Ainsi, dans
le Proche-Orient, la formule du mandat devait-elle être
d’une application assez brève et l’intervention du mandataire
limitée.
— Une seconde catégorie de peuples, notamment ceux
de l’Afrique centrale, ayant atteint un moindre degré de
développement, devait faire l’objet d’un second type de man¬
dat, appelé dans la pratique mandat B. Le rôle du mandataire
était ici plus important. Il devait assumer Vadministration
du territoire. Diverses obligations pesaient sur le manda¬
taire. Il devait établir et respecter la liberté économique
pour les autres membres de la Société, maintenir un régime
de démihtarisation comportant l’interdiction d’établir des
fortifications ou des bases militaires ou navales et de donner
aux indigènes une instruction militaire si ce n’est pour la
police ou la défense du territoire. La Puissance mandataire
devait enfin veiller à la garantie de la liberté de conscience
et de religion et à la prohibition des abus tels que la traite
des esclaves, le trafic des armes et de l’alcool.
— La troisième catégorie de territoires, tels que le Sud-
Ouest africain et certaines îles du Pacifique austral, devait
faire l’objet d’un mandat assez différent, appelé mandat C.
Sans se confondre avec l’annexion, le régime prévu s’en
158 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

rapprochait ici notablement. La faible densité de la popu¬


lation, la superficie parfois restreinte, l'éloignement des
centres de civilisation, parfois la contiguïté géographique
au territoire du mandataire entraînaient, d’après l’article 22,
§ 6, une administration sous les lois du mandataire, comme
une partie intégrante de son territoire, sous la réserve impor¬
tante d’ailleurs que les garanties prévues pour la population
indigène dans le cadre des mandats B fussent respectées,

166. — Établissement des mandats. — Le Pacte n’in¬


diquait pas quel organe de la S. D. N. devait désigner les
Puissances mandataires. En réalité, l’attribution des man¬
dats s’est faite en dehors de la S. D. N. par le Conseil suprême.
La solution était logique, au moins pour les anciennes colo¬
nies allemandes que l’article 119 du traité de Versailles
avait transférées aux principales Puissances alliées et asso¬
ciées. Les mandats B et C furent attribués le 7 mai 1919 et
les mandats A à San-Remo, le 25 août 1920 et les États-
Unis, qui n’avaient pourtant pas ratifié le traité de Versailles,
ont revendiqué un droit d’approbation de ces désignations.
Les mandats A furent confiés à la France (Syrie, Liban) et
à la Grande-Bretagne (Irak, Palestine, Transjordanie), les
mandats B à la France (Togo, Cameroun), à la Grande-Bre¬
tagne (Togo, Cameroun, Tanganyka), à la Belgique (Ruanda-
Urundi), les mandats C à l’Union sud-africaine (Sud-Ouest
africain), à la Nouvelle-Zélande (Samoa occidental), à
l’Empire britannique (Nauru), à l’Austrahe (Nouvelle-
Guinée), au Japon (îles Carolines, Mariannes et Marshall).
L’article 22, § 8, avait prévu la procédure d’élaboration
du régime de chaque mandat en indiquant que si le degré
d’autorité, de contrôle ou d’administration à exercer par le
mandataire n’avait pas fait l’objet d’une convention entre
les membres de la Société, il serait statué par le Conseil.
Les textes particuüers, appelés « chartes » des mandats ont
fait l’objet de résolutions du Conseil intervenues le 17 dé¬
cembre 1920 pour les mandats C, le 20 juillet 1922 pour les
mandats B et le 24 juillet pour les mandats A. Pour l’Irak
il n’y eut d’ailleurs pas de charte, mais untraité conclu entre
le gouvernement du roi Fayçal et la Grande-Bretagne le
10 octobre 1922 et qui fut considéré par le Conseil comme
définissant les termes du mandat.

167. — Le contrôle des mandats. — Les droits du man¬


dataire sont différents selon les mandats, il guide et conseille
dans les mandats A, administre dans les mandats B, admi¬
nistre comme partie intégrante de son territoire dans les
mandats C. Ses obhgations étaient définies dans l’article 22,
tant à l’égard des autres membres de la Société (régime de
hberté économique pour les mandats A et B) qu’à l’égard
des populations du territoire. L’action de la Puissance man-
LES RÉGLEMENTATIONS 159

dataire était soumise à un certain contrôle. Un rapport


annuel devait être fourni et l’article 22 in fine prévoyait
une Commission permanente chargée de recevoir et d’exa¬
miner les rapports et de donner au Conseil son avis sur toutes
questions relatives à l’exécution des mandats.
La Commission des mandats était, avec la Commission
du désarmement, la seule commission permanente de la
S. D. N. Ses membres, au nombre de 9 d’abord, de 10 ensuite,
étaient désignés par le Conseil et choisis à titre individuel,
en raison de leur compétence en matière d’administration
coloniale ou de leur valeur propre. Ils n’étaient point, pour
la majorité d’entre eux, ressortissants des Puissances man¬
dataires. La Commission examinait les rapports annuels,
pouvait demander des explications aux Puissances manda¬
taires, pouvait adresser des questionnaires et était enfin
saisie de pétitions émanant des membres des collectivités
sous mandat ou de toute autre personne. La Commission
était consultative et transmettait ses rapports au Conseil
qui disposait d’un pouvoir de recommandation.
Au contrôle exercé par la Commission, en vertu du Pacte,
s’ajoutait d'ailleurs un contrôle juridictionnel prévu dans
les chartes des mandats qui organisaient la compétence
obhgatoire de la Cour permanente de justice internationale
pour tout différend relatif à l’interprétation ou à l’apphca-
tion des dispositions du mandat (Cf. arrêt n® 2, affaire
Mavrommatis).

168. — La fin des mandats. — L’indépendance irakienne. —


Le régime du mandat est essentiellement temporaire, au
moins pour les mandats A et B. Pour les mandats A, l’étape
du mandat devait être d’ailleurs relativement brève avant
l’indépendance.
Tous les territoires placés jadis sous mandat A sont aujour¬
d’hui des États indépendants, mais les modalités de l’indé¬
pendance ont été différentes. Le « stage « du mandat a été
particulièrement bref pour l’Irak puisqu'était conclu le
30 juin 1930 un traité entre la Grande-Bretagne et l’Irak.
Ce texte proclamait l’indépendance irakienne mais accor¬
dait à la Grande-Bretagne des bases aériennes, prévoyait
des cessions à bail, laissait la disposition des voies ferrées
et des ports à la Grande-Bretagne en cas de guerre étrangère,
organisait une assistance technique en matière militaire,
et l’article i indiquait la tenue de conversations entre les
deux pays en matière de poUtique étrangère concernant leurs
intérêts communs. Une formule de protectorat ou d’amitié
protectrice semblait ainsi succéder au régime du mandat.
Le traité anglo-irakien fut l’occasion pour la Commission
des mandats de poser les conditions qui lui semblaient devoir
être réunies pour qu’il fût mis fin au mandat. Dans une
résolution du 4 septembre 1931 le Conseil fait siennes les
l6o LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

conditions posées par la Commission : 1° être doté d’un gou¬


vernement constitué et d’une administration propre à assu¬
rer le fonctionnement régulier des services essentiels de
l’État; 2° être capable de maintenir son intégrité territoriale
et son indépendance politique ; 3° être en mesure d’assurer la
tranquillité publique ; 4° être assuré de disposer de ressources
financières telles qu’elles puissent régulièrement pourvoir
aux besoins normaux de l’État; 5° posséder une législation
et une organisation judiciaire qui assurent une justice régu¬
lière. Quant au traité anglo-irakien lui même, la Commission
estima que l’extrême limite qui ne peut être dépassée sans
qu’il soit porté atteinte à l’indépendance d’un État y avait
été atteinte, sinon même franchie. Toutefois l’Irak était
admis le 3 octobre 1932 à la S. D. N.

169. — La fin des mandats en Syrie et au Liban. — Deux


traités furent élaborés en 1936 et paraphés, l’un en sep¬
tembre entre la France et la Syrie, le second en novembre
entre la France et le Liban, destinés à mettre fin au
mandat. Ils prévoyaient une alliance perpétuelle entre
l’ancien mandataire et les nouveaux États, une politique
étrangère commune pour ce qui touche aux intérêts communs,
le droit pour la Syrie et le Liban d’assurer leur sécurité tout
en pouvant recourir s’ils le désiraient à l’assistance fran¬
çaise. L’entrée des nouveaux États à la S. D. N. était
prévue. Mais la guerre de 1939 éclata alors que les traités
n’avaient pas été ratifiés par le Parlement français. L’indé¬
pendance de la Syrie et du Liban devait être acquise en
dehors de la S. D. N. et d’une manière troublée. Elle fut
proclamée le 8 juin 1941, au nom du général de Gaulle, et
devait se réaliser progressivement en prenant pour base
les traités de 1936. Les négociations traînèrent en longueur
et un soulèvement éclata au printemps de 1945 à la suite
duquel se produisit une intervention britannique. Deux
accords franco-britanniques du 13 décembre 1945 confir¬
maient l’octroi de l’indépendance et prévoyaient l’évacuation
échelonnée des troupes françaises et britanniques station¬
nées en Syrie et au Liban. Le retrait des troupes françaises
devait s’effectuer en avril 1946 de la Syrie et à la fin de
l’année 1946 du Liban. Aucun traité particulier ne succédait
au mandat français.

170. — Le mandat sur la Palestine. — Parmi les mandats


A figurait un mandat sur la Palestine attribué à la Grande-
Bretagne. Le fonctionnement de ce mandat devait s’avérer
très Æfhcile en raison de la présence sur ce territoire de
deux communautés ethniques très différentes, l’une arabe,
l’autre juive, en raison aussi des promesses contradictoires
faites au cours de la première guerre mondiale par la Grande-
Bretagne. Aux Arabes, à l’émir Hussein, Sir Henri Mac Mahon
LES RÉGLEMENTATIONS l6l

réalisation d’une grande communauté


pontrque arabe établie sur l’ensemble du Proche-Orient; aux
J uifs du Mouvement sioniste avait été faite par la déclaration
Paltour le 2 novembre 1917 la promesse de la création en
Palestine, non pas d’un Etat juif mais d’un Foyer national.
Ea déclaration à laquelle avaient adhéré la France et l’Itahê
devait etre incorporée dans la charte du mandat, notamment
dans son préambule.
!^s difficultés devaient naître de l’immigration juive en
Palestine’ condition de réalisation du Foyer national juif.
A la veille de la Grande Guerre il y avait très peu de Juifs
en Palestine (60.000 environ), moins que de chrétiens de
langue arabe (70.000) et les Arabes étaient dix fois plus nom-
breux (550.000). La Terre promise, dans laquelle les Hébreux
conduits par Abraham s’étaient installés vingt siècles avant
1 ere chrétienne, avait été abandonnée à plusieurs reprises par
les Juifs, au moment de la captivité à Babylone, après la
TOnquete persane, apres la destruction de Jérusalem par
Titus. Le peuple Juif était dispersé par le monde, il avait été
scmmis aux vexations des communautés chrétiennes de
lEurope médiévale, aux pogroms et aux massacres de
1 Est européen. La nostalgie de la terre perdue demeurait
chez ces exilés et le vœu rituel « L’an prochain à Jérusalem »
en perpétuait le regret. Un mouvement de retour des Juifs
dispersés de par le monde en minorités ethniques et natio-
nales se dessina à la fin du xixe siècle. Théodore Herzl
écnyit en 1897 un livre intitulé l’État juif et lors de la réunion
a Baie du premier congrès sioniste^ le mouvement du retour
en Palestine fut lancé avec la formule « Le sionisme a pour
but la création en Palestine, pour le peuple juif, d’une patrie
garantie par le droit pubUc ».

La politique britannique devait tendre à permettre


sinon à favoriser l’immigration juive en Palestine et elle
se trouvait s5anboliquement résumée en 1922 par la
formule de Churchill : « La Palestine ne sera pas trans¬
formée en Foyer national juif, mais le Foyer national
juif sera fondé en Palestine. » L’article 4 de la charte du
mandat prévoyait la reconnaissance d’un organisme juif
de caractère consultatif placé auprès des autorités manda¬
taires, et l’article 6 prévoyait son rôle en matière d’immi-
^ation. L Organisation sioniste créa à cet effet, en 1929,
l’Agence juive, et divers organismes financiers achetèrent
des terres en Palestine pour permettre l’installation des
immigrants. En 1936, il y avait près de 400.000 Juifs.
Tel Aviv qui en 1914 était une bourgade de 2.000 habitants
était devenue une ville de 150.000. Les Arabes ont consi¬
déré les immigrants comme des intrus, et les efforts bri¬
tanniques de création d’organismes bipartites ont échoué.
— msTinmoNS intkbnationales.
102 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

En 1929, à propos du Mur des Lamentations et en I93^>


de graves troubles éclatèrent. Devant l’impossibilité de
création d’un État binational, des plans de partage furent
élaborés par le mandataire dès 1936 et soumis à la
Commission des mandats. A la veille de la guerre, le
Gouvernement britannique prenait des mesures pour limi¬
ter considérablement les immigrations. La période des
hostilités vit régner l’union sacrée mais, à partir de 1945,
les groupes juifs devaient pratiquer ime politique de force
et de terrorisme. Après l’échec de la conférence de Londres,
en janvier 1947, sur im plan de partage, la multipHcation
des attentats, la Grande-Bretagne se lassa et demanda à
l’O. N. U. l’inscription de la question de la Palestine à
l’ordre du jour de la prochaine session de l’assemblée
générale. Le Royaume-Uni décidait en septembre 1947
l’évacuation du territoire et les troupes britanniques
s’embarquaient le 15 mai 1948. L’assemblée générale
de l’O. N. U. avait adopté le 29 novembre I947 plan
de partage de la Palestine. Un État d’Israël était créé
qui devait être admis à l’O. N. U. en mai 1949- man¬
dat avait pris fin dans les troubles et même dans une guerre
véritable entre les pays de la Ligue arabe et les organisa¬
tions juives de Palestine, puis l’État d’Israël. La média¬
tion tentée par l’O. N. U. a été marquée par 1 assassinat
du médiateur, le comte Bernadette, et son successeur
n’a pu aboutir qu’à la formule instable d’armistices con¬
clus au cours de l’année 1949 constituent qu une
suspension temporaire des hostihtés sans permettre
d’entrevoir une paix durable. Le passage du mandat à
l’indépendance s’est donc fait en Palestine d^une manière
violente. La Palestine juive est devenue l’Etat d’Israël.
La Palestine arabe a été annexée en 1950 par la Jordanie.
Le régime d’intemationahsation prévu pour Jérusalem
et les Lieux saints n’a pas été apphqué, l’État d’Israël
ayant proclamé Jérusalem sa capitale.

171. — La fin des mandats B et C. Si les terri¬


toires sous mandat A sont devenus des Etats indépen¬
dants, entre 1945 et 1948 une transformation analogue
s’est produite plus lentement pour les mandats B et C.
L’indépendance n’a pas été ici acquise immédiatement,
la formule du mandat a été transformée dans le cadre de
l'O. N. U. avec la tutelle, sauf en ce qui concerne le
Sud-Ouest africain dont la situation demeure parti¬
culière (V. infra, n® 174).
LES RÉGLEMENTATIONS 163

§ 5- — Les territoires sous tutelle.

, ^72. —^ régime de la tutelle internationale. — Le


chapitre XII de la Charte des Nations Unies a prévu
1 existence d un régime international dit de tutelle pour
un certain nombre de territoires qualifiés de « territoires
sous tutelle ».
L’expression de tutelle internationale ou dans la lan^e
anglaise trusteeship avait été imaginée par le Prési-
dent Roosevelt au cours de la seconde guerre mondiale,
yueües qu aient pu être les conceptions anti-colonialistes
hu Président, le trusteeship n’était pas autre chose à
origine, dai^ sa pensée, qu’une sorte de condominium
des grades Puissances devant être établi sur des zones
stratégiques. Il avait ainsi proposé, au cours même de
la guerre, 1 étabhssement d’un régime de tutelle sur Dakar
sur les des du Pacifique, sur le canal de Kiehl. Par la suite!
1 idée de 1 institution évolua, et on ne trouva plus trace
de la première formule que dans la tuteUe dite stratégique
qui fiit précisément revendiquée par les États-Unis. La
tutelle dont 1 article 76 a posé les principes généraux est
conçue par la Charte comme une solution transitoire
destmée a favoriser l’évolution progressive de certaines
pop^ations vers la capacité à s’administrer eUes-mêmes
ou ^ 1 indépendance, compte tenu des conditions parti-
cuhères à chaque territoire et à ses populations, compte
tenu de leurs aspirations hbrement exprimées. La tutelle
est donc plus nettement et plus généralement que le man¬
dat une solution temporaire, un stage avant l’autonomie
interne ou avant l’indépendance.
Institué en outre pour affermir la paix et la sécurité
internationales et établir sur les territoires sous tutelle
1 égahté de traitement dans le domaine économique
social et commercial à tous les membres de l’Organisation’
le régime comporte pour la Puissance tutélaire l’obhgation
de favonser le progrès poütique, économique et social
amsi que le développement de l’instruction, d’encourager
le respect des droits de l'homme et des hbertés fondamen¬
tales sans distinction de race, de sexe, de langue ou de
rehgion et de développer le sentiment de l’interdépen¬
dance des peuples du monde. On notera la disparition
du régime de démUitarisation qui existait dans les man¬
dats.
164 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

173. — Le* territoire* *ou* tutelle. — Aux termes de


l’article 77 de la Charte, le régime de tutelle peut être
appliqué, en vertu d’accords de tutelle, à trois catégories
de territoires : les territoires sous mandat en 1945, les
territoires qui peuvent être détachés d’États ennemis par
suite de la seconde guerre mondiale, les territoires volon¬
tairement placés sous le régime de tutelle par les États
responsables de leur administration.
La troisième catégorie est demeurée purement vir¬
tuelle. Aucun État n’a proposé la transformation en
territoire sous tutelle d’un territoire qu’il administrait.
Une résolution de l’Assemblée générale du i®' novembre
1947 a confirmé que le régime de la tutelle n’était pas
applicable de plein droit aux territoires non autonomes.
Des dispositions particuHères de la Charte, contenues dans
les articles 73 et 74 qui forment le chapitre XI, concernent
ces territoires et posent les principes généraux qui doivent
guider la Puissance administrante, et un régime de
contrôle était prévu qui n’a cessé progressivement de se
renforcer. La deuxième catégorie ne comporte qu’un seul
territoire, la Somahe, ci-devant colonie italienne dont
la tutelle a été confiée pour dix ans à l’Itaüe par un accord
de tutelle du 2 décembre 1950, bien que l’Italie ne soit
pas encore membre de l’Organisation. Les autres terri¬
toires jadis colonies itahennes ont eu un sort différent :
La Libye est devenue indépendante. L’Érythrée a été
rattachée à l’Éthiopie avec le statut de collectivité auto¬
nome au sein d’un ensemble fédéral.
C’est essentiellement aux territoires placés jadis sous
mandat B et C que s’apphque le régime de la tutelle. Le
tableau initial s’en présentait ainsi : Togo et Cameroun
(France), Togo et Cameroun (Royaume-Uni); Ruanda-
Urundi (Belgique), Tanganyka (Royaume-Uni), Nouvelle-
Guinée (Austrahe), Samoa (Nouvelle-Zélande), Nauru
(Royaume-Uni, Australie et Nouvelle-Zélande). Les îles
du Pacifique jadis sous mandat japonais sont placées sous
le régime de la tutelle stratégique des États-Unis.

174. — Le Sud-Ouest africain. — Le seul mandat


qui n’ait pas été converti en tutelle est celui de l’Afrique
du Sud sur le Sud-Ouest africain. Le maintien du statu quo
du mandat n’a cessé d’être demandé par l’Union sud-
africaine et le maréchal Smuts, dès la conférence de San-
Francisco, avait fait de ce statu quo une condition véri¬
table de l’entrée de l’Union dans l’Organisation des
LES RÉGLEMENTATIONS 165

Nations Unies. Invitée à plusieurs reprises à élaborer un


projet d’accord de tutelle pour le Sud-Ouest africain,
l’Union s’y est toujours refusée. Appelée à statuer sur le
problème, la Cour internationale de justice, par un avis
consultatif du ii juillet 1950, a affirmé que le chapitre XII
de la Charte, c’est-à-dire le régime de la tutelle ne
s’applique pas obhgatoirement au Sud-Ouest africain,
que ce territoire se trouve toujours sous le régime du
mandat et que les obhgations du mandataire pèsent tou¬
jours sur l’Union sud-africaine. La Cour a ainsi reconnu
que ne pesait sur l’Union aucune obligation juridique de
transformer le mandat en tutelle, mais le maintien du
mandat pose un problème particuher, celui du contrôle
international. Le mandat comportait en effet le contrôle
de la Commission des mandats et du Conseil de la S. D. N.
Ces organismes ayant disparu, il convient de reconstituer
im contrôle; une commission spéciale a été instituée à
cet effet par l’Assemblée générale et elle est distincte
du Conseil de tutelle. On assiste donc à une sorte de survie
du mandat, parallèlement au régime de la tutelle.
Par deux autres avis consultatifs la Cour a estimé
que l’Assemblée pouvait voter au sujet du Sud-Ouest
africain à la majorité des deux tiers et non d’une manière
unanime comme l’exigeait la procédure de la S. D. N.
(7 juin 1955) ensuite que le Conseü de tutelle avait le
droit d’entendre des pétitionnaires du Sud-Ouest africain.
La pohtique de l’Union se trouve en réahté dominée
par la contiguïté entre le Sud-Ouest africain et son propre
territoire et le jeu de la politique de ségrégation raciale.
Deux États africains, l’Éthiopie et le Libéria ont saisi
la Cour internationale de la violation par l’Union de ses
obhgations en tant que Puissance mandataire aux termes
de la Charte du Mandat du 17 décembre 1920. La requête
a été déclarée recevable par arrêt du 21 décembre 1962.
Dans un arrêt rendu le 18 juiUet 1966, par 7 voix
contre 7, avec la voix prépondérante du président, la
Cour a finalement rejeté la thèse des États demandeurs
en considérant qu’ils n’avaient pas un droit ou un intérêt
juridique au regard de leurs demandes.
Cette solution a été l’objet de vives critiques. L’Assem¬
blée générale de l’O. N. U. dans sa résolution 2145 (XXI)
du 27 octobre 1966 a déclaré que l’Afrique du Sud avait
faiUi à ses obhgations et décidé que le mandat était ter¬
miné, affirmant que désormais le Sud-Ouest africain
relève directement de la responsabihté de l’O. N. U.
l66 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

Cette résolution est évidemment difficilement applicable.

175. — Les accords de tutelle. — Les termes du


régime de tutelle, pour chacun des territoires, comme les
amendements et modifications qui peuvent y être appor¬
tés, font 1 objet d accords de tutelle. L’accord indique les
conditions dans lesquelles le territoire sera administré et
désigne « l’autorité chargée de l’administration ». A la
différence du régime du mandat qui ne comportait qu’un
seul mandataire qui devait être un État, ici l’adminis¬
tration peut être confiée à plusieurs États (c’est le cas de
la tutelle collective du Royaume-Uni, de la Nouvelle-
Zélande et de l’Austrahe sur Nauru), ou à l’Organisation
elle-même, mais cette hypothèse ne s’est pas encore réa¬
lisée. L’article 79 prévoit que l’accord de tutelle doit inter¬
venir entre les États directement intéressés, y compris la
Puissance mandataire dans le cas des territoires sous
mandat. L’approbation des accords de tutelle, pour les
zones qui ne sont pas désignées comme stratégiques,
appartient à l’Assemblée générale. Les approbations ont
été données le 13 décembre 1946 pour les territoires autre¬
fois sous mandat B ou C, du Togo, Cameroun, Ruanda-
Urundi, Tanganyka, Samoa, Nouvelle-Guinée, le ler no¬
vembre 1947 pour l’île de Nauru, le 2 décembre 1950
pour la Somalie.

176. — La tutelle des zones stratégiques. — A côté


du régime ordinaire de la tutelle, la Charte des Nations
Unies a réservé une place à un régime spécial concernant
les zones stratégiques. Le Conseil de sécurité se substitue
dans ce cas à l’Assemblée générale pour l’approbation
de l’accord de tutelle. Ce régime a été apphqué à l’ensemble
des îles et des archipels peuplés de quelque 50.000 indi¬
gènes qui, jadis possessions allemandes, avaient fait
l’objet d’un mandat japonais. Fortifiées par le Japon,
malgré les interdictions dues au régime du mandat, ces
îles du Pacifique central avaient joué un rôle considé¬
rable au cours de la seconde guerre mondiale. C’est en
insistant sur leur importance dans la stratégie navale et
aérienne que les États-Unis ont obtenu une tutelle straté¬
gique dans une zone de plusieurs milhers de milles.
L’accord de tutelle a été approuvé par une résolution du
Conseil de sécurité en date du 2 avril 1947, et le Japon
a reconnu ce régime dans le traité de paix. Les termes
de l’accord de tutelle aboutissent pratiquement à une
LES RÉGLEMENTATIONS 167

anne^on. Les États-Unis peuvent fortifier les îles, y


établir des bases navales, militaires, aériennes, y main¬
tenir des garnisons, ce qui est naturel puisqu’il s’agit
d’une zone stratégique. Mais en outre l’accès peut être
interdit aux ressortissants étrangers. Le contrôle inter-
nationd, essence même du régime de la tutelle, s’émousse
car les États-Unis, s’ils acceptent de présenter des rapports
périodiques sur l’amélioration de la situation des indigènes,
peuvent interdire l’accès des îles aux missions de visite
du Conseil de tutelle.

_ 177. — Le contrôle : le Conseil de tutelle. — L’admi¬


nistration de la Puissance tutélaire est soumise à un
contrôle qu’exerce pour les tutelles non stratégiques
l’Assemblée générale assistée du Conseil de tutelle.
Le Conseil de tutelle représente, dans l’O. N. U., une
institution symétrique de celle de la Commission des
mandats dans la S. D. N. Mais il en diffère profondément
dans sa stmcture. Il est composé en effet de représen¬
tants des Etats membres selon une formule de commis¬
sion paritaire. Il comprend trois catégories de membres :
— tout d’abord les Puissances administrantes; — en
second lieu les membres permanents du Conseil de sécurité
qui n’administrent pas de territoires sous tutelle; —
enfin autant de membres, élus pour trois ans par l’Assem¬
blée générale, qu’il est nécessaire pour que le nombre
total des membres du Conseil se partage également entre les
membres des Nations unies qui administrent des terri¬
toires sous tutelle et ceux qui n’en administrent pas
(art. 86). L’action du Conseil, sous l’autorité de l’Assem¬
blée générale, s’exerce essentiellement de trois manières :
— l’examen des rapports annuels fournis par les autorités
chargées de l’administration; — l’examen des pétitions;
— les visites périodiques dans les territoires administrés
à des dates convenues avec l’autorité administrante.
Pour rendre plus efficace le contrôle résultant de l’examen
des rapports, ceux-ci sont établis par l’autorité chargée
de l’administration sur la base d’un questionnaire établi
par le Conseil de tutelle portant sur les progrès des habi¬
tants de chaque territoire sous tutelle dans les domaines
poHtique, économique et social et dans celui de l’instruc¬
tion (art. 88).

178. — La fin des tutelles. — A l’exception de l’accord


de tutelle sur la Somalie, les accords ne fixcdent pas de
i68 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

date terminale pour l’exercice de la tutelle. Une résolu¬


tion de l’Assemblée de l’O. N. U. du 27 janvier 1957 avait
d’ailleurs demandé aux États administrants de prévoir
de telles dates.
Le premier territoire dont la tutelle a été levée est le
Togo sous tutelle britannique qui fut incorporé à la Gold
Coast pour former le Ghana le 6 mars 1957.
Depuis i960 diverses tutelles ont pris fin. Le Togo, sous
administration française est devenu indépendant (27 avril
i960). Dans le Cameroun sous administration britannique
des plébiscites ont été organisés en février 1961 sous la
surveillance des Nations unies afin de permettre aux habi¬
tants de manifester leur préférence pour une union avec le
Nigeria ou avec la république du Cameroun. Le Cameroun
septentrional opta en faveur du Nigeria (147.296 voix
contre 97.649 pour la répubhque du Cameroun), le Came¬
roun méridional pour la répubhque du Cameroun
(233.571 voix contre 97.741 pour l’union au Nigeria).
L’accord de tuteUe prit fin respectivement le i®^ septembre
(Cameroun septentrional) et le i®^ octobre (Cameroim
méridional) 1961.
La Cour internationale de justice saisie par la Répu¬
bhque du Cameroun d’une requête tendant à lui faire
déclarer que le Royaume-Uni avait violé l’accord de
tutehe en administrant le Cameroun septentrional moins
comme une entité séparée que comme une partie du
protectorat du Nigéria s’est déclarée incompétente en
considérant que sa fonction judiciaire ne lui permettait pas
d’intervenir au sujet d’une situation politique réahsée
d’une manière définitive (arrêt du 2 décembre 1963).
La Somahe sous administration itahenne est devenue
indépendante en juihet i960 et la Somahe, colonie bri¬
tannique, y a été jointe.
Le Tanganyika sous administration britannique est
devenu indépendant le 9 décembre 1961 ; il forme depuis
le 22 avrü 1964 par l’union avec Zanzibar la Tanzanie.
Le Ruanda-Urundi, sous administration belge a accédé à
l’indépendance le i®r juihet 1962 et donné naissance à
deux États le Rwanda et le Burundi.
Hors d’Afrique un État polynésien, d’aiheurs minus¬
cule, a été créé le i®*’ janvier 1962, à la suite d’un plébiscite
du 9 mai 1961 : le Samoa occidental (108.000 habitants,
34.055 votants, 26.766 voix pour l’indépendance), mais
à la différence des autres il n’est pas devenu membre de
l’O. N. U.
BIBLIOGRAPHIE 169

La levée de ces diverses tutelles tend à détruire l’équi¬


libre établi pour le fonctionnement du Conseil de tutelle
par l’art. 86 de la Charte qui dans une rédaction mala¬
droite n’a pas prévu une évolution pourtant normale.
Alors qu’il y a eu onze territoires sous tutelle (dix tutelles
ordinaires, une tutelle stratégique) ü ne subsiste plus
actuellement que trois tutelles, la tutelle stratégique des
Etats-Unis sur les îles du Pacifique, la tutelle de l’Australie
sur une partie de la NouveUe-Guinée et la tutelle exercée
par l’Australie au nom d’elle-même, de la Nouvelle-Zélande
et du Royaume-Uni sur Nauru.
La résolution 2226 (XXI) adoptée le 20 décembre 1966
par l’Assemblée générale a recommandé la fin de la tutelle
sur Nauru pour une date ne pouvant dépasser le 31 jan¬
vier 1968.
Le Conseil de tutelle ne comporte plus que huit membres,
on y fait siéger en tant que Puissances administrantes,
outre les États-Unis et l’Australie, le Royaume-Uni et la
Nouvelle-Zélande (tutelle indirecte sur Nauru exercée
par l’Austrahe), et en tant que Puissances non adminis¬
trantes trois membres permanents du Conseil de sécurité
(France, U. R. S. S., Chine) et un membre élu par l’Assem¬
blée générale.

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172 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

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CHAPITRE V

LE COMMONWEALTH

179. — La singularité du Commonwealth. — Dans


l’étude de la société internationale une place à part doit
être faite au Commonwealth qui constitue, à lui seul, une
véritable société internationale. L’étude particulière se
justifie en raison de la très grande importance que revêt
ici l’évolution historique, en raison du pragmatisme qui
l’a dominée. Ces caractères avaient déjà été mis en lumière
à un stade antérieur de l’évolution, en 1926, dans le
célèbre rapport de lord Balfour qui déclarait à propos
de l’Empire britannique : « Considéré comme un ensemble
il défie la classification et ne comporte aucune ressem¬
blance véritable avec aucune autre organisation pohtique
qui existe actuellement ou dont la réahsation ait jamais
été tentée. »
Au stade actuel le Commonwealth peut être considéré
comme une société internationale particuHère constituée
par une série d’États étabhs sur des territoires sur lesquels
s’est exercée jadis la domination et la colonisation britan¬
niques. On ne peut ainsi séparer l’étude du Common¬
wealth de celle de l’évolution de ce qui fut jadis et demeure
aujourd’hui pour certaines des parties composantes un
empire colonial.
LE COMMONWEALTH 175

§ ier_ — L'évolution du Commonwealth.

A. — La période 1776-1914.

Le self-government.

180. — Empire colonial et self-govemment. — Le premier


empire colonial britannique disparaît en partie en 1776 avec
la révolte des colons des Treize colonies d’Amérique du Nord.
Mais un empire colonial subsiste de par le monde, notam¬
ment en Amérique du Nord, au Canada demeuré loyaliste
bien que l’annexion y fût de fraîche date, le traité de Paris
étant de 1763. L’indépendance américaine avait eu pour
motif la non-participation des colons au pouvoir fiscal. Il
était donc naturel que le gouvernement de Londres demeurât,
à l’avenir, attentif. L’évolution ultérieure d’une partie des
possessions coloniales britanniques devait être axée sur la
notion de self-govsi'n'ynent. Le Canada allait apparaître préci¬
sément comme à l’avant-garde de ce mouvement et on a pu
voir en lui le « laboratoire constitutionnel de l’Empire ».
Après une période où existait au Canada, dans les deux pro¬
vinces du Haut et du Bas Canada, un régime représentatif,
l’insurrection canadienne de 1837 fut très cruellement répri¬
mée. Lord Durham envoyé en 1839 par la reine pour pacifier
le pays proposa comme solution l’institution d’un gouverne¬
ment responsable devant un parlement local doté de larges
compétences, sauf en matière extérieure. Le Parlement bri¬
tannique adopta en 1840 une nouvelle constitution du Canada
et, le 3 septembre 1841, l’Assemblée législative du Canada
vota trois résolutions créant la responsabihté du gouverne¬
ment. A partir de 1864, un mouvement fédéraliste devait se
dessiner pour grouper avec les deux provinces du Canada les
provinces maritimes, le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-
Ecosse. Le British North America Act du 29 mars 1867
adopté par le Parlement de Westminster devait établir la
constitution fédérale du Canada appelé Dominion.
Le mouvement vers le self-government a abouti, de la
même manière, dans d’autres parties de l’Empire, en Nou¬
velle-Zélande en 1852; en Austrahe un dominion fédéral fut
constitué en zçooi le gouvernement responsable avait été
accordé à l’Australie méridionale en 1850, à l’Austrahe occi¬
dentale en 1890. La formule du parlementarisme fédéral
utilisée pour le Canada et l’Australie a été apphquée en 1909
à l’Union sud-africaine constituée par la réunion aux deux
anciennes colonies britanniques du Natal et du Cap des
deux États boers du Transvaal et de l’Orange. La colonie
de Terre-Neuve qui avait refusé d’entrer dans le système
176 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

fédéral canadien en 1867 possédait aussi, depuis 1855, un


gouvernement responsable.
On voit donc qu’avant 1914, il existe, parmi les possessions
coloniales britanniques, cinq territoires appelés Dominions,
deux unitaires (la Nouvelle-Zélande et Terre-Neuve)
trois fédéraux (le Canada, l’Australie, l’Afrique du Sud),
Ils sont dotés de gouvernement responsable.
A côté de ces territoires existent les colonies de la Couronne
dont la structure législative est extrêmement variée, depuis
un pouvoir législatif directement exercé par le gouvernement
de Londres jusqu’à un pouvoir législatif exercé par un parle¬
ment local élu, le cabinet de Londres ne conservant qu’un
droit de veto législatif.
La domination britannique s’étend d’ailleurs encore sur
d’autres territoires, notamment des protectorats et sur
l’Inde, la Compagnie des Indes ayant été supprimée en 1858
à la suite de la terrible insurrection des Cipayes.

181. — La compétence des Dominions. — Dotés d’un


gouvernement responsable devant le Parlement local, les
Dominions avaient des institutions politiques établies
sur le modèle britannique. Mais ils demeuraient soumis à
l’action de la métropole tant dans le domaine interne que
dans le domaine international.
Sur le plan intérieur, le gouvernement de Londres
conservait un certain pouvoir dans le Dominion, car il
nommait le gouverneur général représentant ainsi le
Gouvernement britannique et investi du droit de nomi¬
nation des fonctionnaires et de dissolution du Parlement.
Ses pouvoirs se trouvaient toutefois limités par le méca¬
nisme même du gouvernement parlementaire confié à
un cabinet responsable devant le Parlement local.
Sur le plan législatif, les lois du Dominion se trouvaient
hiérarchiquement subordonnées aux lois britanniques.
Si le Parlement de Westminster adoptait des dispositions
contraires à des lois des Dominions, c’étaient les dispo¬
sitions britanniques qui devaient s’apphquer. Sur le plan
judiciaire enfin, les arrêts des Cours suprêmes des Domi¬
nions pouvaient être réformés par la voie de l’appel au
Comité judiciaire du Conseil privé.
Dans le domaine international, la compétence des
Dominions était réduite, mais il faut distinguer les affaires
pohtiques et les traités de commerce. Sur le plan poh-
tique, les Dominions n’interviennent pas. Ils ne sont pas
représentés dans les grandes conférences internationales
de la fin du xix® ou du début du xx® siècle. Mais sur le
terrain des traités de commerce une évolution très curieuse
LE COMMONWEALTH 177

se marque. Elle apparaît dans la procédure de conclusion


des traités de commerce concernant le Canada. A l’origine,
le Dominion a de simples représentants consultatifs
assistant, à titre de conseillers ou d’experts, les plénipo¬
tentiaires britanniques (traité avec l’Espagne de 1879).
Dans une seconde phase, les négociations sont effective¬
ment conduites par le représentant canadien, le diplomate
britannique intervenant à l’ouverture et surtout à la
signature (traité avec la France de 1893). Dans une der¬
nière étape enfin, avant 1914, ce sont les représentants
du Dominion qui interviennent seuls. Ils disposent de
pleins pouvoirs qui leur ont été conférés par le Gouverne¬
ment britannique sur le conseil (with the advice) et pour
le compte du gouvernement du Dominion (négociations
commerciales avec la France de 1907-1909, traité de 1912).
Dans le domaine des conventions techniques les Domi¬
nions interviennent, avec leurs propres représentants
nommés par les gouvernements locaux.

182. — Les institutions impériales. — Des tentatives


ont été faites avant 1914 pour constituer une fédération
impériale de caractère politique groupant la Grande-Bre¬
tagne et les cinq colonies largement décentrahsées que
sont les Dominions. Ces tentatives ont échoué. Mais, à
la place d’une fédération qui n’existe pas, on trouve des
institutions de coopération.
L’une des plus curieuses est la Conférence impériale.
Comme beaucoup d’institutions du monde anglo-saxon elle
s’est étabhe progressivement, à partir de la pratique. Sa
première réunion a heu en 1887, lors du jubilé de la reine
et de la célébration du cinquantième anniversaire de son
avènement. EUe comporte, au moins à la séance inau¬
gurale, des représentants non seulement des Dominions
mais aussi des colonies de la Couronne. Les réunions
suivantes ne comprennent plus que la Grande-Bretagne
et les Dominions. La périodicité n’est pas assurée. La
Conférence se réunit à certaines occasions, la seconde n’a
heu qu’en 1897, lors du jubilé de diamant de la reine, la
troisième se tient au contraire en 1902 à l’occasion du
couronnement d’Edouard VIL C’est au cours de celle-ci
qu’il est décidé de les rendre périodiques. La Conférence
de 1907 apporte quelques innovations. Il est désormais
admis que c’est une conférence de Premiers ministres.
Ehe n’est plus présidée par le ministre britannique des
colonies mais par le Premier anglais. C’est une conférence
178 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

de gouvernements groupant la Grande-Bretagne et les


Dominions. C’est précisément en 1907 que la formule de
Dominion est employée pour désigner désormais non seu¬
lement le Canada mais la Nouvelle-Zélande, Terre-Neuve,
l’Australie et, à partir de 1909, l’Union sud-africaine.

183. — Le refus de la structure fédérale. — La der¬


nière conférence qui se tient avant la Grande Guerre,
celle de 1911, porte le nom désormais classique de Confé¬
rence impériale. Devant eUe se développe un important
débat constitutionnel sur la proposition formulée par le
Premier ministre de Nouvelle-Zélande, qui présente un
plan de fédération impériale avec un exécutif impérial
et deux Chambres, dont l’une élue sur la base de la popu¬
lation comprendrait un député pour 200.000 habitemts.
Une opposition générale accueille un tel projet. Les Domi¬
nions critiquent une formule qui, sur les 297 membres
que compterait cette chambre, aboutirait à en donner
220 à la Grande-Bretagne, 37 au Canada, 25 à l’Australie,
7 à l’Afrique du Sud, 6 à la Nouvelle-Zélande et 2 à Terre-
Neuve, soit une énorme majorité à la métropole. Quant au
Premier britannique, ü critique aussi le projet qui abou¬
tirait à faire passer les institutions proprement britan¬
niques en second plan derrière les institutions fédérales.
Formellement rejetée, la formule d’un État fédéral ne
peut donc être utüisée pour caractériser l’Empire ou une
partie de l’Empire colonial de 1914. A la place de la forme
fédérale existent des formules de coopération. La Confé¬
rence impériale en est une mais discontinue. D’autres*
organismes sont créés, ce sont les comités impériaux.
L’un d’eux est le comité de la défense impériale, il a des
ramifications dans chaque Dominion. Il permet, en conser¬
vant l’autonomie des forces militaires de chaque Dominion
et de la Grande-Bretagne, de se préparer contre un péril
extérieur commun par l’uniformisation des équipements,
des règlements militaires.

B. — La période 1914-1939.

L’égalité de statut.

184. — La Grande Guerre. — Le 4 août 1914, la


Grande-Bretagne déclare la guerre à l’Allemagne qui
vient de violer la neutralité belge. Les Dominions, comme
LE COMMONWEALTH 179

l’ensemble des territoires britanniques sont juridiquement


en état de guerre mais chaque gouvernement de Dominion
demeure maître de sa participation aux opérations. Les
Dominions prennent volontairement une part importante
à la guerre. Les troupes canadiennes sur le front d’Occi-
dent, le co^s australien et néo-zélandais sur le front
d’Orient écrivent des pages de gloire au prix de sanglants
sacrifices. L Afrique du Sud demeure loyale et ses troupes
participent aux opérations contre les colonies allemandes
d'Afrique.
Prenant ainsi leur part des charges de la guerre, il est
naturel que les Dominions participent à la conduite de la
pohtique générale. Un télégramme de Lloyd Georges
du 14 décembre 1916 appelle les Premiers ministres à
siéger à VImpérial War Cabinet, composé du War Cabinet
britannique, du secrétaire d’État aux colonies qui repré¬
sente les colonies et protectorats, des cinq Premiers
ministres des Dominions, du secrétaire d’État à l’Inde
assisté d’un représentant de l’Inde et, en 1918, en outre
d’un représentant des princes indiens. L’organe est consul¬
tatif puisque les Premiers des Dominions ne sont respon¬
sables que devant leur propre Parlement, mais on discute
de la conduite de la guerre à l’échelon le plus élevé. L’insti¬
tution de la Conférence impériale est par ailleurs main¬
tenue. Celle de 1917 pose pour l’avenir un principe de
capitale importance, celui « de la pleine reconnaissance
des Dominions comme nations autonomes d’un Common-
wealth impérial et de l’Inde comme une partie importante »,
celui aussi « du droit des Dominions et de l’Inde à une
voix adéquate (adéquate voice) dans la pohtique étrangère
et les relations internationales ».

185. — Les traités de paix et la S. D. N. — La


première apparition des Dominions sur la scène de la
grande pohtique internationale se produit lors de la Confé¬
rence de la paix et de la signature des traités de 1919. A la
Conférence de la paix, les Dominions vont siéger, et même
de deux manières, d'une part parce que l’une des princi-
pdes Puissances alhées et associées est l’Empire britan¬
nique et que sa délégation comporte à côté de cinq repré¬
sentante de l’Empire im représentant de chacun des
Dominions (sauf Terre-Neuve) et de l’Inde, d’autre part
parce que les principaux Dominions peirticipent à la Con¬
férence comme les Puissances à intérêts limités, En
l’absence du Premier britannique parfois retenu en
l80 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

Grande-Bretagne, on vit le Premier Canadien présider


la délégation de l’Empire britannique. Quant au traité de
paix il fut signé à son ordre alphabétique par une entité
nouvelle : L’Empire britannique (alors que la Grande-
Bretagne avait déclaré la guerre) et par les Dominions
(sauf Terre-Neuve) et l’Inde, mais en retrait et sans qu’ils
figurent parmi les listes des Hautes Parties contractantes.
Les Dominions et l’Inde deviennent membres originaires
de la S. D. N., le paragraphe 2 de l’article du Pacte
contenant d’ailleurs une expresse référence à la termino¬
logie de Dominion, et les Dominions siégeront une fois
chacun, avant 1939, comme membres non permanents du
Conseil. Des mandats leur sont attribués.

186. — L’Irlande. — Le développement de la compé¬


tence internationale. — La compétence internationale
des Dominions devait se développer rapidement. Il
fut décidé dès 1920 que le Canada aurait une légation
à Washington, mais elle ne fut créée qu’en 1926, et
le premier Dominion représenté fut le nouveau Domi¬
nion d’Irlande. Depuis l’Acte d’Union de 1800, l’Irlande
n’avait cessé de réclamer son indépendance. Ce fut avant
la Grande Guerre la campagne du Home rule et en 1917
l’insurrection qui ne devait se terminer qu’après une
longue et sanglante lutte à laquelle mettait fin le traité
anglo-irlandais du 6 novembre 1921 octroyant à l’État
fibre d’Irlande le statut de Dominion que reconnaissait la
constitution irlandaise de 1922, définissant l’Irlande un
membre co-égal de la Communauté des Nations formant
le Commonwealth britannique.
L’indépendance des Dominions dans le domaine inter¬
national s’est affirmée au lendemain même de la Grande
Guerre avec l’échec d’une politique centralisatrice tentée
par le Foreign Office. Lorsque, lors des incidents de Tcha-
nak en 1922, entre Turcs et Grecs, on peut craindre l’ou¬
verture d’hostilités générales, le Canada répond à Lloyd
George que l’envoi de contingents canadiens dans le
Proche-Orient est une affaire purement canadienne. La
conclusion par le Canada, le 2 mars 1923, d’un traité avec
les États-Unis réglementant la pêche du flétan (Halibut
treaty), signé par le ministre canadien seul, sans inter¬
vention de l’ambassadeur britannique, symbolise, sur un
plan d’ailleurs mineur, le droit des Dominions à conclure
des traités internationaux. La même année, le Canada,
qui n’avait pas participé à la conférence de Lausanne et
LE COMMONWEALTH l8l

aux négociations du traité de paix avec la Turquie, refusa


de ratifier traité à l’élaboration duquel il n’avait pas
participé et se déclara non lié par la ratification britan¬
nique. Lorsque la Grande-Bretagne reconnut le Gouver¬
nement soviétique, le Canada attendit quelque temps
pour le reconnaître à son tour, marquant ainsi qu’il n’était
pas lié par la reconnaissance britannique. La situation
indépendante des Dominions devait être d’ailleurs
formellement précisée à l’égard du traité de garantie de
Locamo du i6 octobre 1925 dont l’article 9 stipulait :
« Le présent traité n’imposera aucune obligation à aucun
des Dominions britanniques ou à l’Inde, à moins que le
gouvernement de ce Dominion ou de l’Inde ne signifie
qu’ü accepte ces obligations. »

187. — L’égalité de statut. — La compétence interna¬


tionale acquise par les Dominions conduit nécessairement
à l’égalité de statut. Préparée par la Conférence impériale
de 1923, eUe est formulée par la Conférence impériale de
1926 dans le rapport Balfour et précisée sur le plan interne
par le Statut de Westminster.
Le rapport Balfour a donné de l’égalité de statut une
description précise en des termes quasi religieux, en défi¬
nissant ainsi les Dominions : « Ce sont des communautés
autonomes dans le cadre de l’Empire britannique, égales
en statut, en aucune manière subordonnées les unes aux
autres sous un quelconque aspect de leurs affaires intérieures
ou extérieures, unies toutefois par une commune allégeance
envers la Couronne et librement associées comme membres
du Commonwealth britannique des Nations ».
La conférence posait le principe que le gouverneur
devait être le représentant exclusif de la Couronne et
non du Cabinet, le gouvernement de Londres n’était
qu’un des gouvernements, comme il existait le gouver¬
nement de Sa Majesté au Canada ou dans un autre
Dominion.
Le Statut de Westminster de 1931 est une loi votée par
le Parlement britannique qui consacre l’égalité de statut.
Elle abolit la solution du Colonial Laws Validity Act
de 1865 selon laquelle, en cas ce conflit entre une loi colo¬
niale et une loi britannique, celle-ci l’emportait nécessai¬
rement. Elle admet que les Dominions peuvent faire des
lois d’une application exterritoriale et afiirme au contraire
que le Parlement du Royaume-Uni ne pourra légiférer
i82 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

pour un Dominion que sur la demande ou avec le consen¬


tement de ce Dominion.

188. — Le mécwisme de coopération internationale.


— La compétence internationale reconnue aux Dominions
par la Conférence de 1926 fait disparaître l’idée d’une
diplomatie impériale, mais maintient ouverte une coopé¬
ration. Chaque Dominion aura désormais ses propres
plénipotentiaires et les pleins pouvoirs seront délivrés,
au nom du souverain, sur l’avis de chaque gouvernement
intéressé, grâce à l’intervention purement formelle du
secrétaire d’État au Foreign Office. Chaque plénipoten¬
tiaire agira « pour le compte » (on behalf) de son gouverne¬
ment. La ratification s’opérera de même pour chaque
Dominion.
Dans les conférences internationales, plusieurs formules
peuvent être adoptées. Les membres du Commonwealth
ou certains d’entre eux peuvent, s’ils le désirent, être
représentés par un ou plusieurs plénipotentiaires communs
dotés de pouvoirs distincts. Il peut y avoir au contraire
une délégation commune de l’ensemble du Commonwealth,
constituée par des représentants des divers membres.
Il peut y avoir enfin une série de délégations purement
distinctes les unes des autres.

189. — La seconde gueire mondiale. — L’indépen¬


dance croissante des Dominions s’est nettement marquée
lors de la seconde guerre mondiale. Alors qu’en 1914
seule la Grande-Bretagne avait déclaré la guerre, chaque
Dominion définit en 1939 sa pohtique. Le 3 septembre,
la Grande-Bretagne déclare la guerre à l’AUemagne,
et le même jour sont faites les déclarations de la Nouvelle-
Zélande et de l’Austrahe. L’Afrique du Sud déclare à
son tour la guerre le 5 septembre et le Canada le 9.
L’Irlande proclame au contraire sa neutrahté. Le ii juin
1940, les Dominions réagissent à la déclaration de guerre
de l’Itahe et le Japon déclare ultérieurement la guerre
à chaque Dominion (sauf l’Irlande) séparément.
La rupture des relations diplomatiques avec le gou¬
vernement de Vichy illustre aussi une pohtique indépen¬
dante; la rupture a heu le 4 juiUet 1940 avec la Grande-
Bretagne, mais seulement le 23 avril 1942 avec l’Union
sud-africaine et plus tard encore avec le Canada, le
10 novembre 1942.
Au cours de la guerre, l’activité diplomatique des
LE COMMONWEALTH 183

Dominions s’intensifie avec l’exercice accru du droit de


légation et des échanges entre Dominions de représentants
diplomatiques portant le nom de hauts commissaires.
Les Dominions beUigérants participent aux conférences
interalliées, üs concluent entje eux ou avec les Puissances
étrangères, notamment les États-Unis, des traités bilaté¬
raux. Ils signent, comme États indépendants, à leur lettre
alphabétique, les divers traités de paix, sont membres de
l’O. N. U. et des institutions spéciaüsées. La Conférence
de Moscou de décembre 1945 prévoit la participation à
la Commission pour le contrôle de l’énergie atomique, du
Canada, devenue une Puissance possédant les « secrets
atomiques ».

§ 2. —^ La structure actuelle
du Gommonwealth.

190. — La composition du Commonwealth. — L’Em¬


pire britannique de 1919 comprenait, outre la Grande-
Bretagne et ses possessions coloniales, cinq Dominions
(Canada, Austrahe, Afrique du Sud, Nouvelle-Zélande,
Terre-Neuve) et l’Empire des Indes. Un nouveau
Dominion était créé en 1921 par le traité anglo-irlan¬
dais, l’Irlande du Sud ou État libre d’Irlande, mais
Terre-Neuve perdait le statut de Dominion le i®*" dé¬
cembre 1933 et, après avoir été une colonie décentra-
hsée sans compétence internationale, devait former une
province membre de l’État fédéral canadien à dater du
avril 1949.
Le statut du Dominion convenait mal à l’État fibre
d’Irlande. L’arrivée au pouvoir de M. de Valéra allait
permettre l’utilisation du statut de Westminster dans un
sens sécessionniste, la législation interne irlandaise tran¬
chant successivement une série de liens avec la Grande-
Bretagne, ainsi dès 1933 le serment d’allégeance au roi,
l’appel au Comité judiciaire, ainsi en 1935 la suppression
du poste de gouverneur général.. L’année 1937 marquait
nettement l’attitude du nouvel État qui, par une consti¬
tution du mai, adoptait le vieux nom gaélique d’Eire,
proclamait la République et refusait de participer aux
fêtes de couronnement de George VI, et désormais aux
conférences impériales. Pendant la seconde guerre mon¬
diale, l’Eire montrait le paradoxe d’un État théorique¬
ment membre encore du Commonwealth, proche de la
184 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

Grande-Bretagne et maintenant une politique de neutra¬


lité bien que ses ressortissants ne fussent point traités
comme étrangers en Grande-Bretagne. La séparation
devait être consommée en 1949. La République irlan¬
daise affirmait sa souveraineté, abandonnait même la
formule de l’association externe longtemps préconisée
par M. de Valéra et qui permettait à l’Eire d’emprunter
pour les relations internationales certains organes britan¬
niques, y compris le roi. Une loi du Parlement de West¬
minster du 2 juin 1949, rireland Act, devait reconnaître
la situation. Son article déclare que la partie de l’Ir¬
lande connue sous le nom d’Eire cesse, à partir du
18 avril 1949, de faire partie des Dominions de Sa Majesté.
Cette date était d’ailleurs celle de l’entrée en application
d'une loi irlandaise du 21 décembre 1948.

191. — Les nouveaux Dominions. — Si l’Irlande aban¬


donnait le statut de Dominion et sortait du Commonwealth,
trois nouveaux Dominions devaient être constitués, après
la guerre. Deux d’entre eux proviennent de la division de
l’ancien Empire des Indes qui avait été proclamé le
27 avril 1876 au profit de la reine Victoria. Cet empire
« interne » était composé d’une multitude d’États prin¬
ciers au nombre de près de 600 et de 14 provinces soumises
plus directement à l’administration britannique. Promis
en 1917, comme prix de la participation de l’Inde à la
première guerre mondiale aux côtés de la Grande-Bre¬
tagne, le développement des institutions représentatives
s’est manifesté depuis la fin de la guerre. L’organisation
de l’Inde a varié et s’est exprimée dans plusieurs lois
successivement votées par le Parlement britannique,
en 1919 puis en 1935. L’India Bill du 4 août 1935 qui
devait entrer en vigueur le i®' avril 1937 ne conférait pas
à l’Inde le statut de Dominion mais la dotait d’un régime
fédéral et parlementaire. Le système britannique se
heurtait dès 1937 à l’opposition du parti du Congrès
(Gandhi) et au refus des princes d’entrer dans la fédéra¬
tion. Le 8 août 1940, le vice-roi faisait l’offre solennelle
(august offer) de l’octroi du statut de Dominion après la
guerre et la promesse était renouvelée en 1942. Après
bien des difficultés et des échecs, et pour tenir compte
de la présence des Musulmans, ce statut de Dominion
était reconnu le 15 août 1947 au Pakistan et à l’Inde
{Indian indépendance Bill du 18 juillet 1947).
Le même statut est accordé à Ceylan le 4 février 1948.
LE COMMONWEALTH 185

L'Inde adoptait tine constitution républicaine et deve¬


nait la République indienne mais restait dans le Common-
wealth dont le nom se transformait.

192. — Du British Commonwealth au Commonwealth.


— La formule de British Commonwealth of Nations avait
été employée en 1921-1922 pour caractériser la commu¬
nauté internationale à laquelle allait appartenir, avec le
statut de Dominion, l’État libre d’Irlande. Cette formule
est reprise dans les conférences impériales de 1923 et de
1926 et notamment dans le rapport Balfour. EUe devait
subsister d’une manière un peu paradoxale après l’intro¬
duction en Irlande, en 1937, d’une constitution répu¬
blicaine. Elle a été au contraire abandonnée par la décla¬
ration des Premiers ministres réunis le 28 avril 1949.
A la formule du British Commonwealth se substitue
celle du Commonwealth of Nations. La déclaration de 1949
étabht que le gouvernement de l’Inde a informé les autres
gouvernements du Commonwealth de l’intention du peuple
indien de voir l’Inde devenir une répubhque indépendante
souveraine, mais qu’il a indiqué et affirmé le désir de l’Inde
de continuer à être pleinement membre du Common¬
wealth des Nations et à reconnaître le roi comme le
symbole de la libre association des Nations indépendantes
qui le composent, et en cette quahté comme le chef du
Commonwealth.
Les gouvernements des autres pays du Commonwealth
ont accepté et reconnu l’appartenance de l’Inde à l’asso¬
ciation. Le Commonwealth des Nations s’est trouvé
ainsi, en 1949, composé du Royaume-Uni, du Canada, de
l’Australie, de la Nouvelle-Zélande, de l’Afrique du Sud,
de l’Inde, du Pakistan et de Ceylan « unis comme membres
hbres et égaux du Commonwealth des Nations, coopé¬
rant librement dans la recherche de la paix, de la liberté
et du progrès ».
Depuis 1949 le nombre des membres du Commonwealth
s’est considérablement accru car la plupart des territoires
qui, à la suite de la décolonisation, cessaient d’être sous
domination britannique sont devenus des États membres
du Commonwealth.
On doit remarquer toutefois que l’Union sud-africaine
ne fait plus partie du Commonwealth depuis le 31 mai 1961
date à laquelle eUe est devenue une Répubhque. En effet,
après avoir adopté, par une transformation constitution¬
nelle interne la forme répubhcaine, l’Afrique du Sud devait
i86 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

demander sa réadmission au sein du Commonwealth en


qualité de République, comme l’Inde l’avait fait en 1949.
La politique d’apartheid ayant été critiquée par divers
membres du Commonwealth le Premier ministre d’Afrique
du Sud décida de retirer la candidature de l’Union en vue
d’une réadmission postérieurement au 31 mai, date de pro¬
clamation de la Répubhque.
A la fin de 1966 le Commonwealth compte, outre le
Royaume-Uni, 25 autres États membres : deux en Europe
(Malte-Chypre), cinq en Asie (Inde-Pakistan-Ceylan-
Malaisie-Singapour), deux en Océanie (Austrahe-NouveUe
Zélande), cinq en Amérique (Canada-Jamaïque-Trinité
et Tobago-Guyane-Barbades), onze en Afrique (Ghana-
Nigeria-Sierra Léone-Tanzanie-Ouganda-Kenya Malawi-
Zambie-Gambie-Botswana-Lesotho) .

193. — Aspect international du Conunonwealth.


— Le Commonwealth apparaît ainsi comme une société
internationale groupant des nations égales entre elles sur
le plan juridique. Chacun des membres du Commonwealth
est un État indépendant. Certains des membres cons¬
tituent des collectivités étatiques fort complexes. C’est le
cas du Royaume-Uni, ci-devant métropole, qui en dehors
de l’Angleterre elle-même, de l’Écosse et de l’Irlande du
Nord, comprend des colonies, les unes autonomes et
dotées d’une législature élue (Aden, Petites Antilles,
Rhodésie du Sud), les autres appelées colonies de la
Couronne et soumises à l’administration du gouverneur
(Bornéo, Gibraltar, Honduras, Hong-Kong). Le Royaume-
Uni exerce son protectorat sur certains territoires (îles
Salomon et Tonga). L’administration de territoires sous
tutelle a été confiée au Royaume-Uni et à d’autres
membres du Commonwealth.
Chaque membre du Commonwealth conduit hbrement
ses relations internationales, tant du point de vue de
l’exercice du droit de légation que du point de vue de la
signature des traités. Le traité de sécurité mutuelle dit
A. N. Z. U. S. du ler septembre 1951 fournit l’exemple
d’un traité d’aUiance conclu entre l’Austrahe et la Nou¬
velle-Zélande d’une part et les États-Unis de l’autre, et
les autres membres du Commonwealth n’y sont pas partie.
La politique de l’Inde est très différente de celle d’autres
membres. Entre les membres du Commonwealth, des
relations diplomatiques ordinaires s’établissent, comme il
est normal entre les États de la Société internationale.
LE COMMONWEALTH 187

Les différends qui peuvent surgir sont des différends inter¬


nationaux pour la solution desquels il n’existe aucune
procédure spéciale. Le recours à l’O. N. U. pour la question
du Cachemire entre l’Inde et le Pakistan ou pour le pro¬
blème du traitement des Indiens en Afrique du Sud illustre
le caractère spécifiquement international de ces rap¬
ports.
Dans l’affaire de Rhodésie le Royaume-Uni après
avoir tenté de régler directement une affaire intérieure
a fait appel au Conseil de Sécurité, préférant le cadre
O. N. U. au cadre Commonwealth.

194. — La notion d’association. — Le Commonwealth


est ainsi une société internationale. La déclaration de
1949 fait allusion à une libre association de Nations indé¬
pendantes dont le roi est le symbole et se trouve reconnu,
en cette quahté, comme chef du Commonwealth.
Ce titre de chef du Commonwealth est porté par le
souverain britannique dans tous les États du Common¬
wealth. Dans ceux d’entre eux qui sont des Républiques
il ne s’accompagne d’aucun titre. Mais dans certains États
qui n’ont pas d’autre chef d’État le titre de chef du Com¬
monwealth s’ajoute au titre royal de l’État considéré et
se combine avec le titre royal dans les autres royaumes,
membres eux-mêmes du Commonwealth. Ainsi la titu-
lature de la reine est celle en Austrahe par exemple :
« Éhsabeth II, par la grâce de Dieu, Reine du Royaume-
Uni, d’Austrahe, de ses autres Royaumes et territoires,
chef du Commonwealth, Défenseur de la Foi » tandis
qu’en Inde ou au Pakistan il est simplement « Chef du
Commonwealth ». Ainsi apparaît-il qu’à l’intérieur du
Commonwealth, et entre les États membres qui ne sont
pas des Répubhques et qui n’ont pas de chef d’État
distinct il existe une Union personneUe sous la forme d’une
communauté de souverain.
Mais pour l’ensemble du Commonwealth on ne peut pas
dire que le chef du Commonwealth assure, à titre d’organe
particuHer, une unité de pohtique extérieure car cette
unité n’existe pas nécessairement.
L’association internationale connaît quelques organes
qui permettent l’information et la consultation réci¬
proques.
L’ancienne conférence impériale est dénommée depuis
1947 Conférence du Commonwealth. Elle groupe les pre-
i88 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

rniers ministres, se déroule en privé, sans aucun forma¬


lisme, avec une fréquence de l’ordre de i8 mois.
Les États membres sont représentés dans les autres
membres par des ambassadeurs dénommés « Hauts
commissaires » qui ont un statut privilégié.
L’ancien Dominion office créé en 1925 pour constituer
« un ministère des affaires étrangères avec un sentiment
familial » (Foreign ofdce, with a family feeling) a été
transformé en 1948 en Commonwealth Relations office.
Il est devenu en 1966 le Commonwealth office. Il constitue
un véritable Ministère des Affaires étrangères dans les
attributions duquel entrent les relations avec les États
indépendants membres du Commonwealth ainsi que les
questions concernant les territoires dépendant des Etats
membres.
Un institution récente apparaît pleine d’intérêt, celle
d’un « Commonwealth Secrétariat ». Sa création a été
décidée à la conférence des Premiers Ministres de 1964 ;
le premier Secrétaire général du Commonwealth a été
élu par la conférence des premiers ministres en juin 1965.
C’est un diplomate canadien. Le siège du secrétariat est
à Londres, le personnel est recruté dans^ les Etats
membres. Cet organisme prépare les conférences des
premiers ministres et les conférences ministérielles, il
diffuse des renseignements et des informations.

195. — Les problèmes économiques. — Le Common¬


wealth est caractérisé sur le plan économique par des
rapports particuhers entre les États membres. Les rap¬
ports actuels trouvent leur origine dans d’anciennes
solutions. Un texte douanier britannique Import duties act
de 1932 qui frappait d’un droit de douane de 10 % les
importations en provenance des pays étrangers en
exemptait les produits originaires des territoires de
l’Empire britannique. La même année la Conférence
d’Ottowa institua pour les rapports commerciaux entre
la Grande Bretagne, ses dominions et colonies, le régime
dit de la « préférence impériale » selon lequel les produits
originaires des pays de l’Empire entraient en franchise sur
le territoire de la métropole, en échange de quoi les pro¬
duits de celle-ci bénéficiaient en matière d’importation
dans ces pays d’un régime préférentiel.
La préférence impériale s’est progressivement estompée
mais entre le Royaume-Uni et ses anciens dominions et
colonies continuent à exister des relations commerciales
LE COMMONWEALTH 189

privilégiées qui ont posé de délicats problèmes lorsque


fut envisagée l’adhésion du Royaume-Uni au Marché
commun (v. infra).
Sur le plan monétaire la notion de Commonwealth ne se
confond pas avec la notion de zone sterling. En effet certains
États membres du Commonwealth ne font pas partie de
la zone sterhng,,ainsi le Canada rattaché à la zone doUar.
A l’inverse des États membres de la zone sterhng ne font
pas partie du Commonwealth, ainsi divers États du Proche-
Orient.
*
* ♦

Pour les auteurs qui ont voulu voir dans l’évolution


de l’Empire britannique un processus de ségrégation
fédérale, les hmites extrêmes sont atteintes de cette désin¬
tégration. Mais aujourd’hui, plus encore qu autrefois,
toute formule juridique, toute recherche artificielle de
classification s’avèrent vaines. Le Commonwealth est
un fragment de la société internationale globale. Il est a
lui seul une société internationale à 1 intérieur de laquelle
vit le quart de la population du globe. La superficie des
pays indépendants membres du Commonwealth est de
l’ordre de 27 miUions de km" et la population dépasse
730 milhons d’habitants. Entre les Etats du Common¬
wealth des hens existent, ils sont à la fois sohdes, ténus
et impalpables impropres en tout cas à l’analyse juridique.
La construction pohtique est extraordinaire. Le Pre¬
mier secrétaire du Commonwealth a pu déclarer ; «Le
Commonwealth, en allant à 1 encontre des associations
fondées sur la géographie, la race, la rehgion, l’idéologie
ou l’analogie économique, est une institution qui accroît
la compréhension entre les peuples. » La tentative est
marquée de grandeur, le temps n’est plus de la dornina-
tion impériale et de la chanson des Anglais qu écrivait
Kiphng en 1890.

BIBLIOGRAPHIE

Baker (P.-N.), Le statut juridique des Dominions.


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Stevens, Londres 1966 ; sur l’aspect très actuel voir :
N. E. D. n° 3357 « Le Commonwealth ».
CHAPITRE VI

LE SAINT-SIÈGE

196. — Églises et État. — Envisagée comme l’en¬


semble des fidèles qui partagent une même croyance,
une Église peut ou non coïncider avec une collectivité
étatique. L’Antiquité a connu la confusion de la structure
politique et de la structure religieuse. A propos de la
Cité antique, Fustel de Coulanges a pu écrire ; « Dans les
vieux âges, la religion et l’État ne faisaient qu’un; chaque
peuple adorait son Dieu et chaque Dieu gouvernait
son peuple ».
De nos jours encore il existe des églises nationales qui
comportent \m hen étroit entre la société religieuse et
la société étatique, ainsi les éghses luthériennes de Suède
ou de Norvège, l’éghse anghcane, ainsi les éghses ortho¬
doxes dites autocéphales, comme elles existaient au début
du XX® siècle en Russie, en Serbie, en Roumanie, en
Grèce, en Bulgarie.
Mais à l’inverse il peut y avoir non-coexistence entre
la société rehgieuse et la société étatique. Le christia¬
nisme, dans ses enseignements de fraternité comme dans
sa vocation missionnaire (Allez, enseignez toutes les
nations) et dans sa proclamation de l’égahté de tous les
hommes (formule de saint Paul ; Il n’y a plus ni Juifs ni
Gentils) semblait imphquer l’indépendance des deux
sociétés. Une Éghse dont le royaume n’était pas de ce
monde ne semblait pas pouvoir se hmiter aux frontières
étroites d’un État.

197. — L’Église catholique. — Précisément, l’Égüse


cathoüque apparaît, de nos jours comme autrefois, une
192 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

église internationale, et ses 400 millions de fidèles n’appar¬


tiennent pas à un seul État. D’autres Églises d’ailleurs
sont également internationales. La communauté reli¬
gieuse de l’Islam n’est point située à l’intérieur des fron¬
tières d’un seul État. Les communautés orthodoxes et
protestantes se groupent également à l’intérieur d’un
Conseil œcuménique de caractère international.
L'étude la plus curieuse est certainement celle de
l’ÉgUse catholique, institution existant à l’intérieur
d'une collectivité internationale, qui s’étend donc bien
au delà d’un État mais qui a tenté de revêtir pendant des
siècles la forme étatique et de fier la souveraineté spiri¬
tuelle et la souveraineté temporelle.
Trois solutions successives sont apparues : le pouvoir
temporel, le régime de la loi de garanties, le régime des
accords du Latran.

§ i®r. — La papauté
et le pouvoir temporel jusqu'en 1870.

198. — Origine du pouvoir temporel. — Lorsque le chris¬


tianisme ne fut plus en butte aux persécutions dans
l’Empire romain, aucun pouvoir temporel ne fut donné à
l’évêque de Rome, le Pape. Mais plus tard, avec la chute de
l’Empire d’Occident et l’installation des Lombards en Italie
du Nord, l’évêque de Rome resté sur place exerça un pou¬
voir de fait, les Barbares ayant pillé Rome mais ne s’y étant
pas installés et l’empereur d’Orient se trouvant dans l’impos¬
sibilité de l’administrer. Plus tard, dans le désir de faire
remonter le pouvoir temporel à une époque ancienne, les
légistes de la papauté voudront placer son origine à une dona¬
tion faite par Constantin en 313. Le pouvoir temporel de
l’évêque de Rome, qui se manifeste au vi® siècle avec Gré¬
goire le Grand, est fortifié au vm® siècle à la suite de l’alliance
véritable entre la maison des Carolingiens et les papes. Pépin
le Bref sacré à Saint-Denis par le Pape Étienne II lui promet
l’exarchat de Ravenne qu’il conquiert sur les Lombards.
Charlemagne confirmera cette promesse en 774, puis en 800,
lors de son couronnement comme empereur. Dans le duché
de Rome, fort agrandi, sur d’autres territoires de l’Italie
moyenne s’exerce désormais le pouvoir temporel du Pape qui
va exister pendant plus d’un millénaire.
Souverains temporels italiens, les papes auront des difiâ-
cultés pour gouverner Rome où s’agite une populace tur¬
bulente. Ils entrent en lutte avec les empereurs allemands
qui considèrent Rome comme une ville de l’Empire, et les
conflits de souverainetés temporelles s’ajoutent ainsi au
LE SAINT-SIÈGE 193

conflit du Dominium Mundi, qui se termine à la fin du


xiii® siècle par le triomphe de la papauté.
Les deux siècles suivants devaient se marquer par des
crises. Après un séjour de soixante-dix ans à Avignon, dans
le Comtat Venaissin, la papauté reident à Rome en 1377.
Après les difficultés purement ecclésiastiques que marque
le grand Schisme (1378-1417) auquel met fin le concile de
Constance, et un nouveau schisme terminé en 1449, la papauté
allait s’engager de plus en plus dans la voie de la puissance
temporelle. Elle entre dans le jeu subtil des alliances italiennes
pratiquant la politique de l’équilibre, entre les États de
l’Itafie du Nord, et la tentation des royaumes du monde
l’emporte. Par une étrange coïncidence c’est au moment
où le pouvoir spirituel des papes diminue notablement avec
la Réforme que le pouvoir temporel s’étend.

199. — Le déclin du pouvoir temporel. — Ce pouvoir


temporel de la papauté, matérialisé par les États de l’Église,
n’était pas pourtant une garantie absolue d’indépendance.
La fin du xviii® siècle, après une longue période calme,
marque cette décadence. Le traité de Tolentino, imposé
le ig février 1797 par le général Bonaparte, comporte des
pertes territoriales dont le plébiscite de rattachement à la
France du Comtat Venaissin a été le début de 1790. L’Empe¬
reur tente de faire du Pape son propre chapelain. En 1809,
par le décret de Schoenbrünn, il annexe les Etats de l’Église,
mais le décret prévoit un régime particulier pour les proprié¬
tés et les palais du Pape et un statut juridique spécial pour
la ville de Rome, « premier siège du christianisme ».
L’histoire du pouvoir temporel au xix® siècle est celle de
sa chute. Le Congrès de Vienne de 1815 avait rétabh la sou¬
veraineté pontificale mais avec des limites. La perte d’Avi¬
gnon avait été définitive. En outre, des garnisons autri¬
chiennes avaient été établies en plusieurs villes des États
de l’Église, et le Pape qui n’avait pas été invité à envoyer
un légat au Congrès de Vienne protesta. Administrés très
durement, les États de l’Église sont le théâtre d’une série
de révolutions. En 1831, la France et l’Autriche doivent inter¬
venir. Lors des Révolutions de 1848, la République romaine
est proclamée. Par un décret fondamental du 9 février 1849
elle proclame la déchéance du Pape en tant que souverain
temporel, mais lui reconnaît des pouvoirs spéciaux dans
l’article 2 qui dispose : « Le pontife romain aura toutes les
garanties nécessaires à son indépendance dans l’exercice de
son pouvoir spirituel. »
L’entrée à Rome des troupes françaises, le 3 juillet 1849,
rétablissait le pouvoir temporel pontifical qui posait le déli¬
cat problème de la Question romaine en constituant un
obstacle à l’unité italienne. Pour tenter de résoudre le pro¬
blème, Napoléon III essaie en 1860 de faire admettre la
7. — INSTITUTIONS INTERNATIONALES.
194 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

formule du maintien, en faveur du pape, d’un territoire réduit


de 12.000 km*. Mais le Souverain Pontife ne facilite pas les
négociations, se bornant à jeter l’anathème contre les ten¬
dances du monde moderne. En 1867, les volontaires de Gari-
baldi tentent un coup de force que des troupes françaises
envoyées en hâte pour aider les zouaves pontificaux
empêchent de réussir. Mais ces troupes maintenues quelque
temps sont rappelées lors de la guerre franco-prussienne.
Le Pape refuse, le 29 août 1870, les propositions de Victor-
Emmanuel du maintien d’une domination temporelle sur un
territoire urbain symbolique, puis le 9 septembre les offres
de garantie personnelle et déclare qu’il ne cédera qu’à la
force. Le 20 septembre, les troupes italiennes s’emparent
de Rome après un simulacre de résistance. La convention
de capitulation du 20 septembre excepte de l’occupation
la Cité léonine, mais celle-ci est à son tour occupée quelques
jours plus tard. Le décret d’annexion de Rome au jeune
royaume d’Italie est pris le 9 octobre, sanctionné par une
loi du 31 décembre. Un plébiscite ratifie à une majorité
énorme cette annexion de la capitale de la catholicité devenue
celle du royaume d’Italie. Il montre que, malgré l’obstina¬
tion de Pie IX, l’époque du pouvoir temporel était révolue.
Les Puissances étrangères ne manifestent d’ailleurs aucune
réaction devant l’événement.

§2. — Le régime de la loi des garanties


(1871-1929).

200. —■ La loi des garanties. — La disparition de


l’État pontifical en tant qu’État à la suite du plébiscite
du 20 octobre 1870 laissait évidemment subsister le pou¬
voir spirituel. L’année 1870 sur ce terrain était d’aiUeurs
marquée par la proclamation du principe de l’infaïUibilité
pontificale qui renforçait très nettement le pouvoir spiri¬
tuel du Pape. Il fallait donc consacrer, par une formule
juridique, la position particulière du Chef de l’Église catho¬
lique appelé à exercer son gouvernement spirituel sur
une masse de fidèles appartenant à diverses sociétés
étatiques. Les sujets temporels avaient disparu mais les
sujets spirituels, les fidèles demeuraient.
Dans une circulaire adressée aux chancelleries, le
Gouvernement itahen, le 18 octobre 1870, s’engageait à
reconnaître le caractère international de la papauté, la
liberté de ses communications et de ses relations diplo¬
matiques. Ce sont ces principes que consacre unilatérale¬
ment la loi italienne du 13 mai 1871 appelée loi des garan¬
ties. Elle organise précisément les garanties accordées
LE SAINT-SIÈGE
195

au Souverain Pontife pour lui permettre de gouverner


1 Eglise. Le problème n’était d’ailleurs pas nouveau, il
avait été posé déjà par le décret de Schoenbrünn et plus
explicitement encore par le décret de la Républiaue
romaine en 1849. ^
Si les Puissances étrangères ont en quelque sorte
accepté la loi des garanties et utilisé les mécanismes qu'eUe
prévoyait, le Pape, tout en bénéficiant des facilités que
lui offrait le Gouvernement italien, n’a point reconnu
cette loi et s est longtemps considéré comme prisonnier
de guerre, souverain légitime et captif de la Ville de Rome.
Le Pape devait, pendant longtemps, ressentir comme une
offense la visite faite au Quirinal par un chef d’État catho¬
lique. Il protesta ainsi lorsque le Président Loubet vint
rendre visite au roi d’Itahe, p Quirinal, en avril 1904.
La note rédigée à cette occasion et envoyée à toutes les
Puissances sans avoir été communiquée préalablement à
la France, au mépris de tous les usages internationaux
devait être l’une des causes principales de la rupture des
relations entre la France et le Saint-Siège. A partir du
pontificat de Benoit XV une attitude aussi intransigeante
fut abandonnée.

201. — Le ministère spirituel. — La loi des garanties


contient deux séries de dispositions. Celles qui figurent
dans les derniers articles sont destinées à remplacer un
concordat. Les 12 premiers articles au contraire étabhssent
une série de règles destinées à permettre et à faciliter
l’exercice de sa mission au Chef de l’Éghse cathohque.
Le Pape est assimilé à un souverain. Le Gouvernement
itahen lui reconnaît les honneurs souverains et la préémi¬
nence d’honneur qui lui est accordée par les souverains
cathoHques. Sa personne est sacrée et inviolable. Il est
protégé par la loi pénale à l’instar du roi d’Itahe. L’article
4 de la loi prévoyait en outre en faveur du Saint-Siège
une dotation de 3.225.000 hres que le Pape refusa.
L article 5 précisait que le Souverain Pontife continuerait
à jouir des palais apostohques du Vatican et de Latran
avec tous les édifices, jardins et terrasses qui en dépendent,
ainsi que la villa de Castel-Gandolfo, et tous ces bâtiments
étaient déclarés inahénables en raison de leur affecta¬
tion.
Pour mieux assurer l’accomphssement des fonctions
du ministère spirituel du Pape, la loi assure la fibre publi¬
cation de ses actes à la porte des basiliques et des églises.
ig6 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

Elle fait bénéficier les palais et lieux de résidence du


Pape ou de réunion des conclaves et conciles d'une
immunité totale à l’égard de l’intervention des agents
italiens de la force publique. EUe interdit les visites, per¬
quisitions ou séquestres de papiers, documents, üvres
ou registres dans les congrégations pontificales investies
d’attributions purement spirituelles. EUe garantit enfin,
lors des conclaves, la Uberté personneUe des cardinaux.

202. —Les relations diplomatiques. —L’article ii de la


loi des garanties reconnaît au Pape le droit de légation,
actif et passif. Il prévoit que les envoyés des gouverne¬
ments étrangers près Sa Sainteté jouissent dans le royaume
de toutes les prérogatives et immunités accordées aux
agents diplomatiques selon le droit international et
accorde le même traitement aux envoyés du Pape près
des gouvernements étrangers.
Un problème particuUer devait se poser au cours de la
Grande Guerre, après l’entrée en guerre de l’Italie, celui
de la possibilité pour les empires centraux de maintenir
des diplomates accrédités auprès du Saint-Siège. Le
Gouvernement italien les autorisa à demeurer à Rome
sous la réserve que serait contrôlée leur correspondance.
Ils n’usèrent point de cette tolérance et, d’ordre de leurs
gouvernements, se retirèrent en Suisse. L’article 12 de la
loi garantissait enfin la liberté de correspondance du
Pape avec l’épiscopat et tout le monde catholique, sans
aucune ingérence du Gouvernement italien. Faculté
était ainsi donnée d’établir au Vatican ou dans d’autres
résidences des bureaux de poste et de télégraphe. L’ache¬
minement de ces correspondances était gratuit, les cour¬
riers assimilés dans le royaume aux courriers de cabinet
des gouvernements étrangers, les télégrammes traités
comme des télégrammes d’État.

203. — La situation juridique. — La loi des garanties


assurait d’une manière satisfaisante les moyens néces¬
saires^ à l’accomplissement du ministère spirituel du Chef
de l’Église catholique. Le Pape était soustrait à l’apph-
cation des lois italiennes et bénéficiait dans ses palais et
résidences d’une sorte d’exterritoriahté, mais purement
fictive. Il était privé d’un territoire propre. Il n’était pas
souverain mais assimilé, sur le plan honorifique, à un sou¬
verain. La cour d’appel de Rome, par un arrêt de 1899,
lui déniait le droit d’asile, faisant application normale
LE SAINT-SIÈGE 197

de la loi des garanties qui ne lui reconnaissait aucun ter¬


ritoire propre. La Cour de cassation française jugeait
en 1911 que le drapeau pontifical n’était pas celui d’un
souverain.
Non acceptée par le Saint-Siège mais utüisée par lui,
la loi des garanties présentait un inconvénient inhérent
à cette formule juridique, la précarité. Encore celle-ci
était-elle plus apparente que réelle car la loi des garanties
n’a pas créé une situation internationale mais l’a reconnue,
se bornant à instituer les mécanismes juridiques néces¬
saires.

§ 3. — Le régime des accords du Latran


depuis 1929.

204. — Les accords. — On désigne sous le nom d’ac¬


cords du Latran les accords diplomatiques qui ont été
conclus le ii février 1929 entre le Saint-Siège et l’Italie.
Ces accords ont mis fin à une situation qui se prolongeait
depuis près de soixante ans et q^i s’analysait en une
rupture entre le Saint-Siège et l’Etat italien, Puissance
catholique sur le territoire de laquelle se trouvait installé, -
avec l’évêque de Rome, le gouvernement même de la
cathohcité. Ces accords permettent de considérer comme
définitivement résolue la Question romaine née en 1870
de l’annexion de Rome. Préparés au cours de longues
négociations dont certaines furent commencées dès 1926,
ils ont été considérés comme un important succès du
régime fasciste et de Mussohni.
Ces accords, en dehors d’une convention financière qui
réglait les arrérages des stipulations financières de la loi
des garanties, comprennent deux traités différents. L’un
est un concordat, c’est-à-dire un traité réglementant
l’exercice du culte cathohque en Itahe, l’autre est le
véritable traité du Latran qui réglemente en 27 articles
la situation internationale du Saint-Siège. Le traité du
Latran a survécu à la disparition de la monarchie itahenne.
Il est toujours en vigueur et a été confirmé par l’article
7 de la constitution de 1947.

205. — La Cité du Vatican. — L’article 3 du traité


crée une Cité du Vatican constituée par le Vatican avec
toutes ses dépendances et dotations. Sur ce territoire
urbain n’existe d’autre autorité que celle du Saint-Siège
igS LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

et il ne peut se manifester aucune ingérence de la part


du Gouvernement italien. Toutefois, l’article 22 prévoit
qu’à la demande du Saint-Siège et par une délégation,
soit spéciale soit permanente, l’Italie veillera sur son
territoire à la punition des délits commis dans la Cité
du Vatican. Quand l’auteur du délit s’est réfugié en terri¬
toire italien on procède sans formalité contre lui d’après les
règles des lois italiennes. Le Saint-Siège est tenu de livrer
à l’État italien les auteurs de délits réfugiés dans la Cité
du Vatican.
En dehors de la Cité elle-même, une série d’immeubles,
les basiliques patriarcales, le palais de Castel-Gandolfo
sont cédés en pleine propriété au Saint-Siège et jouissent
des immunités reconnues par le droit international aux
résidences des agents diplomatiques étrangers.

206. — Les relations diplomatiques. — Les articles


12 et 19 organisent le droit de légation actif et passif.
Le régime est semblable à celui de la loi des garanties
à deux différences importantes près. D’une part, l’article 19
prévoit le rétablissement des relations diplomatiques
entre le Quirinal et le Vatican, le nonce apostolique
près l’Italie devant être le doyen du corps diplomatique.
La seconde différence est que, même en temps de guerre
et même si leur résidence est en dehors de la Cité du Vati¬
can, les agents diplomatiques accrédités auprès du Saint-
Siège ne subiront aucune hmitation dans l’exercice Je
leur mission de la part de l’Itahe.

207. — La souveraineté du Saint-Siège. — Le préam¬


bule du traité indique « qu’il faut, pour assurer au Saint-
Siège l’indépendance absolue et visible, lui garantir une
souveraineté indiscutable même dans le domaine interna¬
tional ». L’article 2 du traité précise cette notion dans
des termes très nets. Selon ce texte, « l’Italie reconnaît
la souveraineté du Saint-Siège dans le domaine international
comme un attribut inhérent à sa nature, en conformité avec
sa tradition et avec les exigences de sa mission dans le
monde ».
Cette souveraineté est définie aüleurs comme une
juridiction souveraine sur le Vatican et les immeubles,
formule à contenu négatif signifiant l’absence d’ingérence
de l’État itahen.
Quant à la souveraineté dans le domaine international,
à laquelle fait allusion le préambule, elle est précisée par
LE SAINT-SIÈGE 199

l’ailicle 24, selon lequel le Saint-Siège déclare qu’il veut


demeurer et demeurera étranger aux compétitions tem¬
porelles entre les autres États et aux réunions interna¬
tionales convoquées pour cet objet, à moins que les parties
en litige ne fassent un appel unanime à sa mission de paix,
se réservant seulement, en chaque cas, de faire valoir sa
puissance morale et spirituelle. C’est donc un engagement
de non-participation à l’activité politique internationale
que contient l’article 24. Il en tire, in fine, la conséquence
que la Cité du Vatican sera toujours considérée comme
neutre et inviolable et ce fut, en effet, la situation du
Vatican au cours de la seconde guerre mondiale.

208. — La Cité du Vatican n’est pas un Etat. — La ques¬


tion a été débattue en doctrine de savoir si la Cité du
Vatican peut être considérée comme un État. Selon cer¬
tains, la réponse est affirmative. Un pouvoir temporel
aurait été ainsi restitué au Pape par le traité du Latran.
Cette opinion ne peut être valablement soutenue. Une
seule disposition du traité peut constituer un argument
de texte, le paragraphe 2 de l’article 26 par lequel, contre¬
partie de la reconnaissance par le Saint-Siège du royaume
d’Italie, sous la dynastie de la Maison de Savoie, avec
Rome pour capitale, l’État italien « reconnaît l’État de
la Cité du Vatican, sous la souveraineté du Souverain
Pontife ».
Mais cette formule, destinée à atténuer l’importance
de la concession pohtique consentie par la reconnaissance
de l’annexion des États pontificaux, ne saurait être consi¬
dérée comme rendant compte de la réalité. On a fait
remarquer, et les faits sont évidents, que^tout manque
à la Cité du Vatican pour constituer un État. Le terri¬
toire est d’une superficie qui correspond à une propriété
privée, 44 hectares. La population, inférieure numéri¬
quement à un millier de personnes, est dotée d’une étrange
nationaüté qui apparaît avec l’exercice de fonctions dans
la Cité pour disparaître ensuite, quitte à réapparaître ulté¬
rieurement dans les mêmes conditions et qui laisse subsis¬
ter la nationalité véritable d’un caractère plus indélé¬
bile. Quant au pouvoir politique il ne s’exerce pas, mais
existe au contraire un pouvoir spirituel dont les frontières
ne s’arrêtent pas aux portes de la Cité. On ne peut même
parler d’une gestion administrative puisque les services
publics sont gérés par l’État italien, à la suite de diverses
conventions.
200 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

La notion de souveraineté reconnue par le traité n’est


pas une souveraineté étatique mais une souveraineté
de mission. L’article 3 du traité précise d’aüleurs la notion
de Cité du Vatican. Comme l’indique le préambule, on
a recherché un signe « visible » de l’indépendance du Saint-
Siège, d’où « la nécessité de constituer avec des modahtés
particuhères la Cité du Vatican ». L’article 3 indique que
î’Itahe a agi ainsi créant de la sorte la Cité du Vatican
pour les fins spéciales et avec les modalités que contient le
présent traité.
Il suffit de hre les articles relatifs à la Cité du Vatican
pour relever aussitôt qu’il est constamment fait allusion
à « la pleine propriété » du Saint-Siège. L'article 5 indique
que la Cité sera rendue fibre de toute servitude et de ses
occupants éventuels. Le pseudo-État n’est qu’un pro¬
priétaire. L’obligation de se clore pèse sur lui, aux termes
de l’article 5, sauf sur la place Saint-Pierre.
La Cité du Vatican n’est pas un État mais un ensemble
immobilier dont la propriété est cédée au Saint-Siège,
comme la propriété des basiliques, de Castel-Gandolfo, etc.
On note ainsi la différence de régime juridique avec le
système de la loi des garanties. Ce n’est plus l’affectation
au gouvernement de l’Église catholique d’immeubles
appartenant au Gouvernement italien,, c’est la cession au
Saint-Siège de ces immeubles. Un État n’est pas pro¬
priétaire de son territoire et le Saint-Siège est proprié¬
taire de la Cité du Vatican, comme des autres bâtiments
qu’il utilise. La Cité du Vatican bénéficie d’une immunité
par rapport à l’État italien, mais c’est là une fiction qui
n’est nullement incompatible avec la notion de propriété
et que l’on voit jouer pour l’hôtel de l’ambassade en droit
international général.
Le pape Paul VI, lors de sa visite à l’O. N. U. en
octobre 1965 a précisé le sens même du statut actuel de
la Cité du Vatican en déclarant que si on voulait le
considérer de ce point de vue il n’était investi « que d’une
minuscule et symbolique souveraineté temporelle : le
minimum nécessaire pour être fibre d’exercer sa mission
spirituelle et assurer ceux qui traitent avec lui qu’il est
indépendant de toute souveraineté de ce monde ».
Ces formules constituent une paraphrase fort explicite
de l’art. 2 du traité de Latran. EUes font apparaître que
la souveraineté reconnue au Saint-Siège a une finalité
fonctionnelle, qu’elle est destinée à mieux assurer la
LE SAINT-SIÈGE 201

mission d’une Église. Il ne s’agit pas d’un État véritable


mais d’une forme pseudo-étatique.

209. — Les activités internationales du Saint-Siège.


— Le Saint-Siège n’avait pas été membre de la S. D. N.,
il n’est pas davantage membre de l’O. N. U., mais il a
établi certains liens avec cette organisation et avec les
institutions spécialisées.
Le Saint-Siège s’est ainsi intéressé aux problèmes des
exilés et des émigrants par exemple à l’Administration
des Nations Unies pour le secours et le relèvement, puis
à l’Organisation internationale pour les réfugiés. Il est
actuellement membre du Comité exécutif du Haut-
Commissariat de rO. N. U. pour les réfugiés. Le Saint-
Siège envoie àl’Unesco et à la F. A. O. deux observateurs
permanents et il envoie généralement une délégation aux
conférences générales. Ses observateurs participent aux
réunions de l’O. M. S. et du Comité intergouvememental
pour les migrations européennes.
Le Saint-Siège fait partie de l’Agence internationale
pour l’énergie atomique, il a participé aux conférences
diplomatiques de Vienne en 1961 sur les relations diplo¬
matiques, de droit maritime de BmxeUes en mai 1962
sur la responsabilité de l’exploitant de navires nucléaires,
de Genève sur le droit de la mer (1958).
La papauté au xx® siècle a respecté les formules d’effa¬
cement international.
En dehors de toute compétition temporelle les souve¬
rains pontifes actuels ont seulement poursuivi une mis¬
sion de paix. Les discours de Paul VI à Bombay
(5 décembre 1964), puis au siège des Nations Unies
(5 octobre 1965), ont marqué cette nouvelle attitude.

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Le Fur, Le Saint-Siège et le droit des gens. Paris, 1930;
Corda (A.), Statut juridique du Saint Siège dans le droit
public contemporain. Thèse Nancy, 1933; Brière (Y. de
la), L’Église et son gouvernement. Paris, I935;Pichon
(Ch.), Histoire du Vatican. Paris, 1946; Marc-Bonnet (H.),
202 LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

La Papauté contemporaine. Paris, 1947; Lucien-Brun (J.),


La politique concordataire de Pie XII. A. F. D. I., 1955,
p. 218-223; Duclos (P.), Le Vatican et la seconde guerre
mondiale, action doctrinale et diplomatique en faveur de la
paix. Paris, Pédone, 1955; Nuccitelli (N.), Le fonde¬
ment juridique des rapports diplomatiques entre le Saint-
Siège et les Nations-Unies. Paris, Pédone, 1956; Gra-
HAM (A.), Vatican diplomacy : a study of Church and State
on the international plane, Princeton, 1959; Alix (C.), Le
Saint-Siège et les nationalismes européens à l’époque
contemporaine. Thèse Paris, i960; Chevallier (L.), La
représentation diplomatique du Saint-Siège. Dictionnaire
de droit canonique, fasc. XL, Librairie Letouzey, 1961;
VoissET (M.), L’Église catholique et les relations interna¬
tionales sous Jean XXIII. Mémoire de la Faculté de droit
de Paris, 1964; Lucien-Brun (R. P. J.), Le Saint-Siège
et les instihitions internationales. A. F. D. I., 1964, p. 536-
542; Lucien-Brun (R. P. J.), Une nouvelle étape dans le
droit concordataire. A. F. D. L, 1965, p. 113-121.

b) Sur le Vatican (Cité).


Brière (Y. de la), La condition juridique de la Cité du
Vatican. R. C. A. D. I., 1930, t. IV; Govella, La Cité du
Vatican et la notion d’État. Paris, 1933; Puente Egido
(J.), Personalidad internacional delà Ciudad del Vaticano,
Madrid, 1965.

c) Sur les accords du Latran.


Duclos, Le traité du Latran et la situation générale de la
Papauté. R. G. D. I. P., 1929, p. 452 et s. ; Dilhac (P.), Les
accords du Latran. Paris, Sirey, 1932; Barbey (M.),
Application du Traité du Latran entre l’Italie et le Saint-
Siège. Thèse Paris, 1964.
TITRE II

LA VIE INTERNATIONALE

210. — Les rapports internationaux. — Le titre pré¬


cédent a été consacré à la description de la société inter¬
nationale, c’est-à-dire des diverses collectivités humaines
plus étroites qui la composent. A cette description néces¬
sairement analytique doit s’ajouter l’étude de la vie inter¬
nationale, car la société internationale est essentiellement
vivante. Cette vie s’exprime par l’existence de rapports
internationaux. La description des rapports internatio¬
naux, présentée dans les développements qui suivent,
comporte deux remarques préalables.
La première est que les rapports dont il s’agit concernent
les relations internationales du temps de paix. Il ne sera
donc pas étudié ici les rapports dérivant de l’état de
guerre, ni la neutralité occasionnelle.
La seconde remarque est relative à la notion même de
société internationale. Les rapports décrits sont les plus
généraux que connaisse la société internationale. Les insti¬
tutions décrites ne sont donc pas limitées à certaines
portions de la société internationale, elles ont une valeur
d’universalité. Mais, à l’inverse, les rapports concernent
une société internationale non organisée et dont on a
même pu dire qu’elle était anarchique. Il s’agit en prin¬
cipe de la société internationale générale, en dehors des
tentatives d’organisation qui ont pu être faites et qui
constituent un mode particuher d’aménagement des
rapports internationaux aboutissant précisément à l’exis-
204 LA VIE INTERNATIONALE

tence des Organisations internationales qui seront décrites


dans la deuxième partie.

Plan.

^ Les rapports internationaux exigent d’abord une sorte


d’admission de la collectivité considérée dans la société
internationale. Un premier chapitre sera ainsi consacré
à la reconnaissance.
Les rapports internationaux sont mis en œuvre par des
organes particuliers : un second chapitre traitera de ceux-ci.
^ Les relations internationales sont déterminées par des
règles de droit et par des principes politiques. Deux cha¬
pitres successifs devront les présenter.
Il conviendra enfin de noter que la société internatio¬
nale fort complexe se présente, en dernière analyse, comme
ime masse considérable d’êtres humains. Il sera donc traité
de l’individu dans un dernier chapitre sous le titre : « I.es
relations internationales et l’individu. »
CHAPITRE PREMIER

LA RECONNAISSANCE

211. — La notion de reconnaissance. — Il a été


dégagé plus haut la notion d’État (v. supra, n®® 67 et s.)
et précisé que l’État, au sens international, reposait
sur des notions de fait. L’existence même de l’État
ne suffit pas, lorsqu’il s’agit d’un État nouveau,_ à
lui assurer une place dans les relations internatio¬
nales.
Les relations interétatiques, marquées par exemple
par le droit de légation actif et passif et la mise en œuvre
éventuelle de la resppnsabilité internationale, supposent
non seulement que l’État existe, mais encore qu’il ait été
reconnu par les autres États.
La reconnaissance apparaît ainsi comme l’acte juri¬
dique par lequel des Etats prennent en quelque sorte
acte de l’existence d’un autre État. La reconnaissance,
qui est une institution fondamentale parmi les institu¬
tions internationales, pose divers problèmes. On doit se
demander tout d’abord si les États qui existent et qui
sont appelés à accueillir dans la société interétatique un
nouvel Etat sont libres de leur décision ou si, au contraire,
leur compétence est, en la matière, hée.
Un second problème tient non ^ plus à l’État ancien,
appelé à reconnaître, mais à l’État nouveau. Doit-il
remplir des conditions particulières, quant à son exis¬
tence propre, ou doit-il seulement se borner à exister?
En d’autres termes, la reconnaissance étant un acte juri¬
dique, doit-elle se borner à constater un fait ou un faisceau
de faits ou doit-elle comporter un contrôle de caractère
3o6 LA VIE INTERNATIONALE

j urique tendant à analyser la régularité de la création


de l'Etat nouveau?
On passe alors à un troisième problème. Que faut-
il entendre par État nouveau? L’État s’identifie-t-il
avec le gouvernement lui-même ou en est-il distinct?
Lorsqu un gouvernement succède à un autre, au sein
d un Etat, convient-il pour les autres gouvernements de
reconnaître ce changement ou bien celui-ci est-il considéré
comme un phénomène intérieur dont les États membres
de la communauté internationale n’ont pas à connaître?
Ces divers problèmes comportent des solutions qui
sont variables et qui doivent être distinguées en exposant
successivement la théorie classique de la reconnaissance,
les hypothèses surgies au cours des deux dernières guerres
mondiales et enfin les tentatives faites en vue de fier la
reconnaissance à la légitimité ou à la légahté de la créa¬
tion étatique.

§ 1®*’. — La théorie classique


de la reconnaissance.

^ 212. — L’aspect déclaratif de la reconnussance éta¬


tique. — La reconnaissance classique peut être définie :
l’acte juridique par lequel un État existant déclare qu’il
considérera désormais que tel groupement humain pos¬
sède la quaüté d’État, au sens international. Ce qui
caractérise la reconnaissance, au sens classique, c’est
donc que l’État qui accorde la reconnaissance se borne
à constater un faisceau de faits, ceux-là mêmes qui sont
les conditions de l’existence d’un État.
La reconnaissance de l’État suppose donc l’existence
de 1 Etat, mais elle en est distincte dans la mesure où la
doctrine classique n’attribue à la reconnaissance qu’une
valeur dédarative, l’État nouveau peut être reconnu par
certains États et ne pas l’être par d’autres.
Ainsi ru. R.S.S. a été reconnue en 1924 par un certain
nombre d États, notamment l’Itahe, la Grande-Bretagne
et la France mais elle n’a été reconnue par les États-Unis
qu’en 1933. La reconnaissance est un acte juridique que
l’État a.ncien peut faire ou ne pas faire. En outre, la
reconnaissance opérée par un État ne signifie pas autre
chose que la constatation que les éléments habituels de
l’État, une collectivité humaine installée sur un territoire
et soumise à tm pouvoir pohtique, se trouvent réunis.
LA RECONNAISSAKCE 207

L’État qui reconnaît se borne à constater l’existence de


ces faits. Il n’en tire pas d’autres conséquences. Il ne
pousse pas plus loin ses investigations. Aucun jugement
de valeur, aucune prise de position sur les conditions dans
lesquelles s’est établi ce pouvoir politique n’apparaîtront.
La reconnaissance au sens classique apparaît encore
très fréquemment de nos jours. On peut en trouver un
exemple très net dans la reconnaissance, opérée le 6 jan¬
vier 1950, par le Gouvernement britannique de la Répu¬
blique populaire démocratique de Chine.
« Le Gouvernement de Sa Majesté, ayant terminé l’exa-
ment de la situation résultant de la formation du gouverne¬
ment central du peuple de la République populaire de Chine
et observant qu’il a maintenant, et de beaucoup, le contrôle
effectif de la plus grande partie du territoire de la Chine, a,
ce jour, reconnu ledit gouvernement comme le gouvernement
de jure de la Chine. »
Que la reconnaissance classique soit génératrice de
conséquences juridiques est certain, mais qu’elle soit pro¬
noncée sur la base de purs éléments de fait est égale¬
ment certain. Le Royaume-Uni, en même temps qu’il
reconnaît la République populaire chinoise, ne soulève
pas d’objection sur la présence à l’O. N. U., en tant que
membre du Conseil de sécurité, d’une autre Chine.

213. — Reconnaissance et nouvel État. — On dit de


la reconnaissance qu’eUe concerne un nouvel État. Mais
l’existence même d’un nouvel État pose différents pro¬
blèmes. Il peut y avoir un nouvel État par l’accession à
la quahté d’État d’une collectivité humaine qui n’avait
pas, auparavant, ce caractère. L’État nouveau peut
être créé à partir d’une collectivité qui antérieurement
n’était pas un État, mais ne se trouve pas modifiée dans
son assiette territoriale ou dans sa contexture hurnaine.
L’hypothèse est assez rare, eUe supposerait une création de
toutes pièces, et on peut songer par exemple au Libéria.
Plus fréquemment l’État nouveau se crée par démem¬
brement d’un État existant. La collectivité territoriale
devient alors indépendante, et c’est l’hypothèse très
fréquente des États nouveaux créés à partir d’anciennes
colonies. L’exemple est classique, que les nouvelles
collectivités procèdent d’un mouvement sécessionniste
de colons, comme la Révolution nord-américaine de
1776, ou d’un mouvement d’indépendance des autochtones
révoltés ou des deux mouvements à la fois. Le démem-
208 LA VIE INTERNATIONALE

brement peut aussi apparaître sur le territoire lui-même de


l’État, et c’est toute la série d’exemples des principautés
chrétiennes qui se sont détachées de l’Empire ottoman
au cours du xix® siècle.
Dans toutes ces hypothèses un nouvel État apparaît,
parfois plusieurs, de telle sorte que là où existait aupara¬
vant un seul État, deux ou un plus grand nombre vont
exister et la reconnaissance va enregistrer, en quelque
sorte, ce fait.
Mais un troisième exemple peut être donné : celui
d’un État ancien, qui tout en étant maintenu dans ses
frontières et dans sa population, voit son gouvernement
disparaître pour être remplacé par un autre. On ne se
trouve plus exactement en face d’un État nouveau, mais
bien d’un gouvernement nouveau.
Lorsque le changement se fait selon les règles consti¬
tutionnelles en vigueur et par application même de celles-
ci, il n’y a pas heu à reconnaissance et c’est le principe
de la continuité de l’État. I.es changements de gouver¬
nements qui peuvent ainsi apparaître dans le cas du régime
parlementaire, notamment avec l’instabilité qu’a connue
la France avant 1958, n’entraînent aucun problème sur
le plan même de la reconnaissance internationale. Au
contraire, le problème se pose lorsque le changement de
gouvernement est lui-même le résultat d’un changement
brutal d’institutions pohtiques, à la suite, par exemple,
d’une révolution.

214. — Reconnaissance et révolution. — Lorsqu’une


révolution éclate sur le territoire d’un État supposé
reconnu par les autres Puissances, le problème de la recon¬
naissance peut se trouver posé.
Tout d’abord on peut imaginer qu’éclate sur le terri¬
toire de l’État une émeute. Le gouvernement au pouvoir
s’efforce de la réprimer et, s’il y réussit, le problème
n’apparaîtra pas sur le plan international. Les émeutiers
seront jugés par les tribunaux de l’État, et s’ils ont causé
des dommages à des ressortissants d’autres États, c’est
l’État reconnu qui sera internationalement responsable.

215. — Reconnaissance d’insurgés. — Si l’émeute qui


a éclaté n’est^pas immédiatement réprimée par le gouver¬
nement de l’État, si les forces insurrectionneUes arrivent
à se maintenir sur une partie du territoire, le problème de
la reconnaissance peut se ^^oser. Il s’agit de la reconnais-
LA RECONNAISSANCE 209

sance d’insurgés. C’est généralement l’État sur le terri¬


toire duquel a éclaté l’insurrection qui prendra l’initia¬
tive de cette reconnaissance particulière. EUe comporte
deux conséquences ; la première, que les insurgés seront
désormais traités selon les lois de la guerre et que, par
voie de réciprocité, la lutte entre forces gouvernementales
et forces insurrectionnelles sera conduite avec moins de
cruauté; la seconde, que par la reconnaissance d’insurgés
le gouvernement au pouvoir, formellement régulier, ne
pourra voir sa responsabilité internationale être juridi¬
quement engagée par les actes dommageables causés par
les insurgés aux biens ou aux personnes des ressortissants
étrangers. Par ailleurs, dans le cas où les insurgés dispo¬
seraient de forces navales, la reconnaissance a pour
conséquence qu’ils ne seront plus considérés comme pirates
et disposeront d’un pavillon Hcite.

216. — Reconnaissance de belligérance. — Si l’on se


trouve en présence d’une insurrection qui remporte des
succès et qui aboutit à permettre aux insurgés de donainer
une partie du territoire, depuis un temps assez long, on
peut alors voir jouer une institution particulière, la
reconnaissance de helligérance.
Alors que la reconnaissance d’insurgés émane du gou¬
vernement contre lequel luttent les insurgés, la recon¬
naissance de belligérance émane d’États tiers.
Cette reconnaissance de belligérance est inférieure à
la reconnaissance comme État. Elle se borne à enregis¬
trer l’existence du fait que l’insurrection n’a pas échoué
et aboutit à l’exercice, sur une certaine portion du terri¬
toire, d’un pouvoir de fait. Cette formule de la reconnais¬
sance de belligérance a été utilisée à ^verses reprises
dans l’histoire, notamment par les États-Unis, puis
l’Angleterre, successivement en 1817 et en 1819 à propos
des colonies espagnoles d’Amérique, ensuite en Europe
lors de l’insurrection grecque, par l’Angleterre. L’exemple
le plus net est celui de la reconnaissance comme belhgé-
rants des Sudistes, au cours de la guerre de Sécession,
par la Grande-Bretagne, la France et d’autres Puissances
européennes.

217. — Reconnaissance de juré et reconnaissance de


facto. — On utüise souvent la formule de reconnaissance de
jure pour l’opposer à la reconnaissance de facto. En réahté,
ces expressions sont des formtdes abrégées qui corres-
210 LA VIE INTERNATIONALE

pondent à reconnaissance de gouvernement de jure et


reconnaissance de gouvernement de facto.
Prises littéralement, ces formules semblent opposer
un gouvernement de fait et un gouvernement de droit.
La reconnaissance d’un gouvernement de jure implique¬
rait donc que ce gouvernement est considéré comme
régulièrement investi, alors que la reconnaissance de
gouvernement de facto se bornerait à constater que le
gouvernement dispose d’un pouvoir de fait.
En fait, la pratique internationale ne peut être inter¬
prétée en ce sens. On remarque simplement que souvent,
mais non pas toujours, la reconnaissance du gouvernement
a lieu d’abord en tant que gouvernement de facto puis
ultérieurement comme gouvernement de jure. On ne peut
non plus opposer l’un à l’autre les deux modes de recon¬
naissance pour qualifier de provisoire la reconnaissance
de gouvernement de facto et de définitive la reconnaissance
de gouvernement de jure. La pratique internationale
montre que, lors de la reconnaissance du Gouvernement
soviétique, tantôt une reconnaissance de facto a précédé
une reconnaissance de gouvernement de jure, ainsi pour
la Grande-Bretagne, l’Italie, la Suisse, tantôt au contraire
qu’il y a eu seulement une reconnaissance de gouverne¬
ment de jure.
La reconnaissance de gouvernement de jure n’implique
pas nécessairement le contrôle de la régularité de l’inves¬
titure du gouvernement dont il s’agit.

218. — La reconnaissance tacite. — Une pratique tend


à s’établir selon laquelle en cas de changement de gouver¬
nement à la suite d’une révolution par exemple un gouver¬
nement étranger manifeste son intention d’établir des
relations diplomatiques avec le nouveau gouvernement.
Ceci équivaut à une reconnaissance sans que le gouverne¬
ment en que.stion se prononce expressément au sujet de
celle-ci.
Ainsi, le 27 janvier 1964, le gouvernement français
reconnaissait indirectement le gouvernement de Pékin,
un communiqué commun indiquant que les deux gouver¬
nements avaient décidé d’établir des relations diploma¬
tiques et convenu de désigner des ambassadeurs dans un
délai de trois mois.
LA RECONNAISSANCE 2II

§ 2. —- La pratique internationale
de la reconnaissance au cours
des deux dernières guerres mondiales.

219. — La crise de la notion d’e£Eectivité. — La notion


classique de reconnaissance porte sur l'État ou le gouver¬
nement. Elle suppose comme conditions de la reconnais¬
sance l'existence des éléments de fait de l'État, un terri¬
toire, ime population, un pouvoir politique.
Comme la reconnaissance est accordée par un État d'une
manière discrétionnaire, celui-ci peut se hâter de recon¬
naître comme État un mouvement insurrectionnel qui n'a
pas encore montré qu'il était victorieux : ainsi, dès le début
de la guerre civile d'Espagne, l'Italie et l'Allemagne se
sont hâtées de reconnaître le gouvernement du général
Franco comme gouvernement de jure de l'Espagne. Plu¬
sieurs années de guerre devaient se dérouler encore avant
que l'effectivité du gouvernement insurgé se confirme.
On comprend donc que, dans la mesure où la reconnais¬
sance est un acte discrétionnaire, l'appréciation de l'effec¬
tivité soit variable et qu'il y ait des reconnaissances de
gouvernement qui soient hâtives ou prématurées.
Dans cette voie de la reconnaissance anticipée une insti¬
tution est née au cours de la première guerre mondiale,
la reconnaissance comme Nation.

220. — La reconnaissance comme Nation. — Elle a


été utihsée pour favoriser les efforts sécessionnistes des
Tchèques et des Polonais et pratiquée à cet effet par les
Puissances occidentales, cependant que l'Allemagne
tentait d'utüiser la même formule pour les Finlandais.
Les éléments classiques de la reconnaissance d'État ou
de gouvernement manquent. Il n'y a pas de territoire,
pas de population très importante, et le pouvoir politique
est constitué par un comité d'émigrés.
Mais sur le plan symbohque, et en tant qu'élément d'une
résurrection nationede, la reconnaissance comme Nation
fut importante. Les comités polonais et tchèque eurent
des représentants assimilés à des représentants diplo¬
matiques. Des troupes composées de volontaires furent
équipées et, constituées en légions tchèque et polonaise,
combattirent sous leur propre drapeau.
L'institution de la reconnaissance comme Nation a
été également utihsée au début de la seconde guerre
212 LA VIE INTERNATIONALE

mondiale à l’égard du Comité tchécoslovaque créé en


novembre 1939. Mais la technique juridique devait, ici,
se transformer, et en juillet 1941 les États-Unis, la Grande-
Bretagne et ru. R. S. S. procédaient à la reconnaissance
d’un gouvernement tchécoslovaque, bien que dans le
cadre de la reconnaissance classique les éléments habituels
de la reconnaissance fissent défaut.

221. — Le problème des gouvernements en exiL


— Il convient de distinguer de la question de la recon¬
naissance celle du statut des gouvernements en exil.
Lorsque le territoire d’un État se trouve, au cours d’une
guerre, envahi par les troupes ennemies, la question se
pose de savoir si le gouvernement qui était au pouvoir
avant l’invasion ou celui qui a été réguhèrement étabh
peut continuer à être considéré comme le gouvernement
véritable.
On peut considérer que, tant que subsiste un lambeau
au moins du territoire national, la règle classique de l’effec¬
tivité du pouvoir se trouve, symboliquement au moins,
respectée. Au cours de la première guerre mondiale,
par exemple, les troupes belges s’accrochèrent farouche¬
ment à une partie du territoire belge, justifiant ainsi,
s’il en était besoin, l’existence même du Gouvernement
et de l’État belges.
Mais la question devient plus délicate si le territoire
est envahi dans sa totahté et si, pour échapper à l’étreinte
de l’ennemi, le gouvernement a cherché refuge à l’étran¬
ger.
La situation peut se présenter d’ailleurs avec de mul¬
tiples variantes. Le gouvernement exilé peut être le gou¬
vernement en fonction au moment de l’occupation
ennemie et qui s’est enfui. Il peut être un nouveau gouver¬
nement qui s’est constitué à l’étranger, cependant que
sur le territoire envahi peut continuer à exister ou, au
contraire, avoir disparu le gouvernement antérieur ou
que peut avoir été créé, d’une manière constitutionnelle¬
ment réguhère ou irrégulière, un autre nouveau gouver¬
nement.
Du point de vue même de l’effectivité apparaissent
aussi une série de distinctions. Le gouvernement en exil
peut disposer encore d’une armée, d’une flotte, d’un
personnel diplomatique en fonctions. La situation du
gouvernement en exü sera évidemment plus forte si des
territoires sur lesquels il ne s’est pas installé pour des
LA RECONNAISSANCE 213

raisons de commodité reconnaissent son autorité, et c’est le


cas des possessions coloniales. La période de la seconde
guerre mondiale a fourni des exemples des diverses hypo¬
thèses de gouvernement en exil.

222. — La France libre. — Les revers militaires français


de 1940 avaient entraîné la conclusion d’armistices conclus
par le gouvernement présidé par le Maréchal Pétain, qui fut
d’abord un gouvernement régulièrement constitué dans le
cadre de la III® République, puis un gouvernement d’un
nouveau régime politique, l’État français. Ce gouvernement
était reconnu en 1940 par presque tous les États.
Le général de Gaulle, installé à Londres d’où il lança le
célèbre appel du 18 juin 1940, fut reconnu dès le 28 juin
par le Gouvernement britannique « comme chef de tous les
Français übres » et un accord fut conclu le 7 août entre lui,
agissant en cette qualité, et M. Churchill agissant au nom du
Gouvernement britannique. Les relations diplomatiques
entre la France et la Grande-Bretagne ont été rompues le
5 juillet, après l’attaque de Mers-El-Kébir.
Le général de Gaulle institua en octobre 1940 un Conseil
de défense de l’Empire, les territoires des Nouvelles-Hébrides,
de la Côte d’ivoire, du Tchad, du Cameroun, de Tahiti,
du Gabon, de la Nouvelle-Calédonie et les Étabhssements
français de l’Inde s’étant ralHés à lui. Un comité national
français est constitué à Londres le 23 septembre comme une
« sorte de délégation intérimaire de la Nation ». Il est reconnu
le 26 septembre par le Gouvernement soviétique, le 24 oc¬
tobre par les Gouvernements polonais, belge et tchécoslo¬
vaque, et le 26 novembre par le Gouvernement britannique.
Le 13 juillet 1942 le Comité français change de nom pour
devenir le Comité national de la France combattante. Il
est reconnu par la Grande-Bretagne le jour même et par
ru. R. S. S. le 28 septembre.
223. — Le Comité français de la Libération Nationale.
— Les débarquements alliés en Afrique du Nord en
novembre 1942 permettent l’installation d’une autorité fran¬
çaise continuant la lutte, à Alger, donc en terre française.
Le 3 juin 1943 est constitué le C. É. L. N., « pouvoir central
français unique », qui dirige l’effort français dans la guerre.
Divers gouvernements reconnaissent le C. F. L. N. Les trois
grandes Puissances opèrent cette reconnaissance le même
jour, le 26 août 1943, mais les modaUtés sont diverses. Pour
la Grande-Bretagne le C. F. L. N. est reconnu « comme admi¬
nistrant les territoires français d’outre-mer qui reconnaissent
son autorité et comme l’organisme qualifié pour assurer la
conduite de l’effort français dans la guerre ». La reconnais¬
sance nord-américaine est assez voisine, du point de vue
214 LA VIE INTERNATIONALE

de l’admimstration des territoires, mais elle précise en outre


qu’il ne s’agit paa d’une reconnaissance par le Gouverne¬
ment des États-Unis d’un gouvernement de la France ou
de l’Empire français. La reconnaissance soviétique est la
plus large qui voit dans le Comité « le représentant des inté¬
rêts d’État de la République française ».

224 — Le Gouvernement provisoire. — Déférant au


vœu unanime de l’Assemblée consultative le 3 juin 1944,
le C. F. L. N. se transforme en gouvernement provisoire de
la République française. Il est reconnu rapidement par la
Belgique, la Pologne, la Tchécoslovaquie, la Norvège. Le
Il juillet les États-Unis le reconnaissent comme l’autorité
de fait compétente pour assurer l’administration civile des
régions libérées de la France, en attendant qu’il soit possible
de procéder à des élections. Le gouvernement s’installe à
Paris le 2 septembre, il est reconnu le 23 octobre par une
série de gouvernements alliés, dont ceux des trois grandes
Puissances. La reconnaissance par l’Espagne date du 16 no¬
vembre, celle de jure par la Suisse du 25 et enfin le Saint-
Siège reconnaît le gouvernement le 9 décembre.

§ 3. — Reconnaissance et contrôle
de légalité ou de légitimité.

225. — La,notion de légitimité. — La reconnais¬


sance d’un État ou d'un gouvernement est un acte de
caractère politique accompli par les gouvernements des
autres États qui sont libres de procéder ou non à cette
reconnaissance. Doté d’un pouvoir discrétionnaire, chaque
gouvernement apprécie donc librement la situation inter¬
nationale de l’État ou du gouvernement qu’il s'agit de
reconnaître.
Le contrôle ainsi exercé par chaque État demeure
normalement un contrôle portant sur des éléments de
fait. Mais une tendance s’est manifestée à ajouter aux
éléments de fait des éléments de droit et à substituer
ainsi un contrôle de légitimité ou de légahté au simple
contrôle d’existence effective.
La mise en œuvre de ce contrôle particuher peut se
faire dans le cadre normal de la reconnaissance, c’est-à-
dire l’intervention de chaque État, ou dans un cadre
collectif.

226. — La légitimité « interne ». — On constate


l’existence de diverses pratiques internationales tendant
LA RECONNAISSANCE 215

à refuser la reconnaissance à des gouvernements qui ne


remplissent pas certaines conditions de légalité interne
et qui, par exemple, établis par un coup de force, n’ont
pas été légitimés, a posteriori, par le vote d’une assemblée
constituante ou législative régulièrement élue.
Cette pratique du refus de la reconnaissance, lorsque la
légitimité n’est pas acquise, est apparue en Amérique
centrale. Cette solution a été formulée le 15 mars 1907
dans une lettre écrite par le Docteur Tobar, alors Ministre
des Affaires étrangères de la république de l’Équateur.
Elle est connue sous le nom de doctrine Tohar. Cette solu¬
tion a revêtu à deux reprises la forme d’une obligation
juridique de refus de reconnaissance des gouvernements
établis par la force, cette obligation étant contenue dans
des traités diplomaüques. L’un de ces textes est la conven¬
tion de Washington signée en 1907 par les cinq petites
répubhques de l’Amérique centrale (Costa-Rica, Guaté-
mala, Honduras, Nicaragua, Salvador) et qui demeura
en vigueur dix ans. Le second texte est une convention
signée à Washington en 1923 par les mêmes États et qui
fut dénoncée par plusieurs signataires en 1932.
La doctrine Tobar n’a pas d’effet juridique de portée
générale. Elle ne s’est appliquée qu’à l’Amérique centrale
et dans le cadre des États signataires.
Toutefois une solution analogue a pu être adoptée,
par un hbre choix unilatéral, par les États-Unis. Cette
pratique nord-américaine a été appelée parfois doctrine
Wilson et apphquée entre 1913 et 1920, notamment à
propos de changements de gouvernements intervenus au
Mexique et au Costa-Rica.

227. — La légalité internationale. — Il ne faut pas


confondre avec le contrôle d’une légahté constitutionnelle
interne le contrôle d’une légitimité internationale. La con¬
dition que doit, ici, remphr l’État à reconnaître, consiste
en ce que son étabüssement ne doit pas être contraire
au droit international et ne doit pas, en particuher, résul¬
ter de la violation d’un traité international existant.
Cette règle particuhère est généralement désignée sous
le nom de doctrine Stimson. EUe a été formulée dans une
note adressée le 7 janvier 1932 à la Chine et au Japon
par le secrétaire d’État nord-américain Stimson, à la
suite de la création par le Japon, après les interventions
japonaises en Chine et en Mandchourie, de l’État dit du
Mandchoukouo.
2i6 LA VIE INTERNATIONALE

La note améncame rappelait les engagements découlant


du Facte de Paris du 27 août 1928 par lequel les États
signataires renonçaient à la guerre en tant qu’instrument
de politique nationale, elle refusait en conséquence la
reconnaissance du Mandchoukouo.
Le refus de reconnaissance devait être opposé de la
meme manière par les membres de la Société des Nations
dans une résolution de 1 Assemblée du mois de mars 1932.
La doctrine Stimson a été appliquée à diverses reprises
a partir de 1932, aussi bien en Amérique (conflits du
Chaco boréal, conflit de Léticia) que dans d* autres conti-
nents en Afrique, à propos de l’annexion de l’Éthiopie
par 1 Itahe, qu’en Europe lors des divers coups de force
hitlénens ou plus tard lors de l’annexion par l’U R S S
des Etats baltes.
Mais, sauf lorsqu’elle s’intégre dans un traité diplo¬
matique, comme par exemple le pacte inter-américain
mt Saavedra Lamas du 10 octobre 1933, la doctrine
de refus de reconnaissance n’est pas une règle impérative
du droit international.

228. La non»reconnaissance « qualifia ». — Les


doctrines de non-reconnaissance exposées plus haut
doctrines Tobar, Wilsm ou Stimson sont l’expression d’un
comportement d un État qui refuse la reconnaissance
dans certaines conditions de fait ou de droit. Mais ces
doctrines demeurent propres à l’État par le gouvernement
duquel elles sont formulées. Il convient de les distinguer
d une attitude différente selon laquelle le Gouvernement
qui refuse la reconnaissance, complète cette première
pohtique par le refus d’entretenir des relations diploma¬
tiques avec des Etats qui ont reconnu l’État ou le Gouver¬
nement en question.
Cette non-reconnaissance « renforcée » a été récemment
formulée par le gouvernement de la Répubhque fédérale
allemande. Cette attitude est connue sous le nom de
(( doctrine Hallstein ». Elle a été formulée en 1955 et se pré-
sente comme 1 affirmation que la Répubhque fédérale
entend rompre les relations diplomatiques avec tout État
qm a reconnu ou reconnaîtrait la Répubhque démocra¬
tique allemande considérée par le Gouvernement de Bonn
comme une « zone soviétique ». La « doctrine » comporte
une exception à l’égard de l’U. R. S. S. mais eUe aboutit à
relations diplomatiques entre la République
fédérale et les Etats de l’Europe orientale qui ont des
LA RECONNAISSANCE 217

relations avec la République démocratique. Le gouverne¬


ment de Bonn qui avait établi des relations diplomatiques
avec la Yougoslavie les a rompues le 19 octobre 1957
après que cet État ait rétabli le ii octobre des relations
avec le gouvernement de Pankow. Il a de même rompu
les relations avec Cuba le 14 janvier 1963 après l’établis¬
sement des relations avec Pankow le 12 janvier.
Cette attitude a fait l’objet de critiques comme entraî¬
nant un état d’incertitude et d’insécurité juridiques et
comme s’imposant aux petits États.
La doctrine Hallstein est actuellement en voir d’aban¬
don. Le gouvernement de Bonn a en effet établi en
février 1967 des relations diplomatiques avec la Rouma¬
nie qui, comme les autres Etats socialistes a reconnu le
gouvernement de Pankow.
Une « doctrine » analogue a été proclamée le 30 avril 1959
par le président de la République française et le Premier
ministre qui ont déclaré que la France romprait sur
l’heure avec tout État « responsable » qui reconnaîtrait le
Gouvernement provisoire de la République algérienne.
Ces menaces sont demeurées pratiquement sans effet.
De 1958 à 1961, le G. P. R. A. a été reconnu par 29 États
parmi lesquels ceux de la Ligue arabe et des États socia¬
listes. Ces reconnaissances ont été tantôt des reconnais¬
sances de jure, tantôt des reconnaissances de facto, comme
celle de l’tJ. R. S. S. en i960.
A l’égard de ces gouvernements, l’attitude française
fut, contrairement aux déclarations, ambiguë. Le Gouver¬
nement français n’a pas rompu les relations avec Moscou
malgré la reconnaissance de facto du G. P. R. A. en
octobre i960 et se borna en février 1962 à ne pas envoyer
de nouvel ambassadeur à Belgrade et à demander le rappel
de l’ambassadeur de Yougoslavie à Paris.
Le gouvernement français par ailleurs a refusé de
reconnaître la qualité de représentants diplomatiques aux
représentants du G. P. R. A. jusqu’à la consultation de
juillet 1962. Après le scrutin d’autodétermination, la
reconnaissance de l’indépendance algérienne eut lieu
solennellement le 3 juület par une déclaration unilatérale
du président de la République française.

229. — Reconnaissance et admission dans une organisa¬


tion internationale. — Que la reconnaissance émane
de chaque État, selon la théorie classique, n’empêche pas
cette reconnaissance d’être formulée parfois d’une manière
2i8 LA VIE INTERNATIONALE

collective, par exemple par la si^ature par un État nou¬


veau d’un traité multilatéral qui implique alors sa recon¬
naissance par chacun des autres si^ataires. Mais cette
solution des reconnaissances multiples juxtaposées ne
doit pas être confondue avec le problème de la reconnais¬
sance dite collective qui découlerait, par exemple, de
l’admission d’un Etat dans une organisation internatio¬
nale.
Les deux questions sont-eUes liées? Certains auteurs
l’ont soutenu, en pensant que la procédure d’admission
permettrait de résoudre le problème de la reconnaissance
dans un sens institutionnel. Pourtant il apparaît que la
reconnaissance d’Etat ou de gouvernement doit être
soigneusement distinguée de l’admission dans une orga¬
nisation internationale. La qualité de membre d’une orga¬
nisation internationale ne sig^nifie pas nécessairement
l’existence de la notion d’État. La Société des Nations
comportait des membres qui n’étaient pas des États.
Il en était ainsi en 1919 des Dominions, et cette situation
subsista ultérieurement pour l’Inde. L’Organisation
des Natmns Unies comporte des membres qui ne sont
pas des États, comme l’Ukraine ou la Russie Blanche.
En réalité, l’admission ou l’appartenance à une orga¬
nisation internationale, même de caractère pohtique
ou à tendance universelle, demeure distincte de la recon¬
naissance internationale qui est une institution qui pré¬
lude à l’existence de relations diplomatiques. Or l’éta-
bhssement de relations diplomatiques ne peut se fonder
que sur la libre décision, juridiquement discrétionnaire,
de chaque État, et il est évident que des États peuvent
appartenir à la même organisation internationale sans
entretenir entre eux des relations diplomatiques.

BIBLIOGRAPHIE

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220 LA VIE INTERNATIONALE

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Mandchoukouo. R. G. D. I. P., 1935, p. 6 et s.
CHAPITRE II

LES ORGANES DES RELATIONS


INTERNATIONALES

230o — Relations internationales et gouvernants. —


Les gouvernants des divers États jouent un rôle important
dans les relations internationales. Ces gouvernants sont
essentiellement le chef de l’État, le ministre des Affaires
étrangères et parfois d’autres ministres ou le chef du
gouvernement lui-même, premier ministre, ou prési¬
dent du Conseil.
C’est en quahté de gouvernants de l’État considéré
qu’interviennent ces personnages. Pour eux joue d’une
manière générale la notion de dédoublement fonctionnel
dégagée par Georges Scelle.
Diverses institutions internationales garantissent au
chef de l’État des privilèges et des immunités^ fondées
sur la notion de courtoisie et de respect de l’Etat lui-
même qu'il incarne ou représente. Il convient toutefois
de noter que l’immunité de juridiction traditionnelle¬
ment reconnue au chef de l’État peut disparaître de nos
jours, en vertu de textes de caractère exceptionnel. Le
traité de Versailles a consacré la responsabihté morale de
l’Empereur allemand, et plus récemment la convention
sur le génocide a adopté une même attitude, dans la
ligne du traité de 1945 qui a institué la juridiction crimi¬
nelle internationale dite de Nuremberg.
Mais, au delà des gouvernants, les relations interna¬
tionales sont assurées dans chaque pays par des fonction¬
naires spéciahsés, les agents diplomatiques et les agents
consulaires, il convient de les étudier.
222 LA VIE INTERNATIONALE

§ I®'’. — Les agents diplomatiques.

231. — Origines de l’institution. — L'existence


d'agents diplomatiques de caractère permanent, installés
dans un pays étranger pour une mission durable, nous
est familière. Cette institution n'a pas toujours existé.
Si des relations de caractère temporaire, accidentel se
retrouvent dans l’histoire des rapports entre elles des
différentes sociétés, depuis la plus haute antiquité, la
diplomatie permanente est beaucoup plus récente.
Cette institution est apparue en Europe au xv® siècle,
plus spécialement dans ce microcosme international
que constituait l'Itahe des xiv® et xv® siècles. Entre les
villes-États s'exerce le jeu subtil des combinaisons
pohtiques, des alliances. En outre Rome est le centre
rehgieux de la Chrétienté et entretient nécessairement
des relations internationales avec les États itahens et les
royaumes chrétiens d’Europe. Venise avait des agents
dans divers États avec lesquels elle entretenait des rela¬
tions politiques ou commerciales. Les ambassadeurs de
la Sérénissime République ont joué un rôle fort impor¬
tant. Le mode d’exercice de leurs fonctions était stric¬
tement défini, ils adressaient en un langage souvent
déguisé des renseignements précis et détaillés sur la
situation pohtique et économique des pays où ils se trou¬
vaient.
C’est Venise qui a été véritablement l’école des agents
diplomatiques modernes. C’est à son imitation que les
divers États de l’Europe adoptèrent la formule des ambas¬
sadeurs permanents qui devint définitive au xvii® siècle.

232. — La réglementation internationale. — Pen¬


dant longtemps, la matière des relations diplomatiques
entre les États et du statut des agents diplomatiques fut
régie par des règles coutumières.
Bien des problèmes apparaissaient d’ailleurs comme
difficiles à résoudre, notamment celui des préséances
entre agents diplomatiques.
Cette question fut toutefois résolue dans le cadre du
Congrès de Vienne qui adopta, le 19 mars 1815, un règle¬
ment qui devait être complété trois ans plus tard par le
Protocole d’Aix-la-Chapelle du 21 novembre 1818.
En dehors de ces textes, de portée importante mais
limitée quant à l’objet, acceptés par les différents États
LES ORGANES DES RELATIONS INTERNATIONALES 223

créés postérieurement à 1815, il existait la convention du


20 février 1928, signée à la Havane et intervenue entre
les États membres de l’Union panaméricaine.
Une convention sur les relations diplomatiques a été
signée à Vienne le 18 avril 1961, l’avant-projet en avait été
élaboré par la Commission de droit international dans le
cadre de son œuvre de codification.
La Conférence de Vienne de 1961, réunie sous l’égide des
Nations-Unies a groupé 81 États dont 37 signèrent la
convention à Vienne. Le texte est entré en vigueur en
avril 1964.
Il est d’vme portée beaucoup plus large que le ^gle-
ment de 1815 d’une part parce que le nombre d’États
parties à la Convention est beaucoup plus considérable,
avec beaucoup d’États non européens, d’autre part parce
que la Convention ne se borne pas, comme en 1815, à
traiter du classement des agents diplomatiques. Elle a pour
objet les relations diplomatiques et concerne l’organisa¬
tion des missions et les immunités diplornatiques.
La convention de 1961 conserve certaines solutions cou¬
tumières et leur donne valeur générale dans la commu¬
nauté internationale élargie. Parfois eUe modifie ces
solutions et tient compte des aspects récents des pro¬
blèmes.
A partir d’une base sociologique sur laquelle s’établit
dppniq une date fort ancienne le statut même des agents
diplomatiques la convention repose sur le prin(ÿ»e juri¬
dique fondamental de l’égalité souveraine des États et
p>oursuit une finalité politique constituée par le maintien
de la paix et de la sécurité internationales, le dévelop¬
pement de relations amicales entre les Nations, quelle que
soit la diversité de leurs régimes constitutionnels et
sociaux.

A. — Les missions diplomatiques.

La Convention de Vienne de 1961 donne pour base aux


relations diplomatiques et à l’envoi des missions, l’accord
mutuel des États (art. 2). Elle rejette ainsi la formule
souvent invoquée d’un droit de légation considéré comme
un attribut de l’État qui avait été retenue par l’art.
de la Convention de la Havane.
La mission diplomatique elle-même peut être déMie
comme un ensemble de personnes nommées par un État
dit accréditant pour exercer, sous l’autorité d’un chef de
224 LA VIE INTERNATIONALE

mission, des fonctions de caractère diplomatique sur le


territoire d’un État étranger, dit accréditaire.

233. — Les fonctions des missions diplomatiques.


— L’art. 3 de la Convention de Vienne de 1961 précise
les fonctions normales d’une mission diplomatique :
— la représentation de l’État accréditant — la protec¬
tion des intérêts de cet État et de ses ressortissants
— la négociation avec l’État accréditaire — l’informa¬
tion par tous les moyens licites des conditions et de l’évo¬
lution des événements dans l’État accréditaire avec
rapport à ces sujets à l’État accréditant — le dévelop¬
pement des relations amicales sur le plan économique,
culturel et scientifique.
Les fonctions consulaires demeurent distinctes mais il
est possible à une mission diplomatique d’exercer des
fonctions consulaires.
Une mission diplomatique peut être amenée à exercer
des fonctions exceptionnelles comme par exemple la
protection des intérêts d’une tierce Puissance, notamment
en cas de rupture des relations diplomatiques entre ceUe-ci
et l’État accréditaire.

234. — Les chefs de mission et leur classement. —


Pendant longtemps le problème des préséances entre
les agents diplomatiques se posa avec âpreté. Les ambas¬
sadeurs exigeaient tous un traitement privilégié en raison
de la considération particulière qu’üs réclamaient pour
leur souverain. Très pointilleux sur tous les points d’éti¬
quette, ils saisissaient le moindre prétexte pour créer des
incidents. Il n’était pas rare que le personnel d’une
ambassade fît organiser quelque attentat contre le per¬
sonnel d’une autre. Lors de la conclusion des traités, on
utilisait parfois de véritables subterfuges pour éviter des
difficultés.
Des solutions devaient être apportées à ces délicats
problèmes par le Règlement de Vienne du ig mars 1815,
complété par le Protocole d’Aix-la-ChapeUe du
21 novembre 1818. Acceptés postérieurement par les
États qui n’avaient pas été partie, ces textes ont eu une
large portée, les solutions qu’ils ont adoptées ont été
d’ailleurs reprises dans l’art. 14 de la Convention de
1961.
L’idée générale est qu’on distingue entre eux les chefs
de mission selon leur classe et que dans une même classe
LES ORGANES DES RELATIONS INTERNATIONALES 225

on distingue selon l’ancienneté de nomination dans le


pays accréditaire.
La répartition se fait en trois classes ;
la première est celle des ambassadeurs ou nonces
accrédités auprès des chefs d’État et des autres chefs de
mission ayant un rang équivalent;
— la seconde celle des envoyés, ministres ou inter¬
nonces également accrédités auprès des chefs d’État;
— la troisième enfin est celle des chargés d’affaires
accrédités auprès des ministres des affaires étrangères.
Le texte de 1961 reprend les formules de Vienne 1815,
seule ayant été abandonnée la classe dite des ministres rési¬
dents prévue par le Protocole d’Aix-la-Chapelle de 1818.
Le classement des chefs de mission entre deux États
est décidé par ceux-ci (art. 15). Il n’a de portée qu’en ce
qui touche la préséance et l’étiquette. En dehors de celles-
ci, aucune différence n’est faite entre les chefs de mission
en raison de leur classe.
Le classement opéré à Vienne en 1961 et qui maintient
celui de 1815 demeure en réahté factice. Il se trouve en
effet qu’actueUement, la quasi totalité des chefs de mission
est constituée par des ambassadeurs. Alors qu’en 1914,
par exemple, la Grande-Bretagne, la France, les États-
Unis avaient une dizaine d’ambassades et une trentaine de
légations, ces États ont maintenant une centaine d’am¬
bassadeurs et très peu de chefs de mission qui n’ont pas
ce rang. La création de nouveaux États dans le cadre
d un processus de décolonisation a accru le nombre des
ambassades entretenues par les États qui ont été autrefois
des Puissances coloniales.
La multiphcation des chefs de mission peut constituer
une lourde charge pour certains États en voie de dévelop¬
pement. La Convention de Vienne de 1961 prévoit à ce
sujet, la possibilité pour un État d’accréditer un chef de
mission diplomatique auprès de plusieurs États, avec
l’accord des É^ts accréditaires et réciproquement celle
pour plusieurs États d’accréditer un même chef de mis¬
sion auprès d’un autre État.

235. — Les missions et le corps diplomatique. —


Chaque mission diplomatique comprend, sous l’autorité
du chef de mission, un ensemble d’agents diplomatiques :
conseillers, secrétaires des affaires étrangères, ainsi que le
personnel administratif et technique et un personnel de
service.
8. - INSTITUTIONS INTERNATIONALES.
226 LA VIE INTERNATIONALE

Les effectifs de la mission sont établis normalement par


un accord entre l’État accréditaire et l’État accréditant ;
ils ne doivent pas dépasser ce que l’État accréditaire
considère « comme raisonnable et normal eu égard aux
circonstances et conditions régnant dans l’État et aux
besoins de la mission en cause ». (Art. II, Vienne, 1961).
L’ensemble des agents diplomatiques des diverses
missions, accrédités dans le pays, constitue le corps
diplomatique.
Selon les règles coutumières, le corps diplomatique a à sa
tête un doyen qui est l’ambassadeur le plus ancien par la
date de nomination, mais dans les pays catholiques le
nonce est traditionnellement le doyen du corps diplo¬
matique. L’art. 16 de la Convention de 1961, dans son
§ 3, a maintenu cette solution lorsqu’elle correspond à un
usage. Mais la Conférence de 1961 n’a pas adopté de dispo¬
sition formelle sur le corps diplomatique lui-même. Dans
certains États des conventions particulières peuvent
donner à certains chefs de mission une situation privilé¬
giée. On rencontre ces formules dans les relations diplo¬
matiques entre certains nouveaux États et l’ancienne
métropole. Ainsi trouve-t-on le titre de Haut-commissaire
ou celui de Haut-représentant qui peuvent accompagner
celui d’Ambassadeur.
Le corps diplomatique a pu quelquefois, dans le passé,
être appelé à jouer certains rôles internationaux. Ce fut
autrefois le cas en Chine où l’organisation de la sécurité
des envoyés des Puissances étrangères posait certains
problèmes et le quartier des ambassades, à Pékin, avait
un statut très particuher. Ces formules sont aujourd’hui
caduques.

236. — Rôle des agents diplomatiques. — L’^ent


diplomatique est un fonctionnaire au service de son État.
Il obéit aux instructions qu’il reçoit de son gouvernement.
Il est tout à la fois un intermédiaire, un représentant et
un observateur. En tant qu’intermédiaire il porte à la
connaissance du gouvernement étranger les notes et
communications de son gouvernement et réciproquement.
En tant que représentant il est appelé à orienter une
certaine action pohtique, à préparer et à signer des
conventions internationales. Ces dernières fonctions vont
nécessairement diminuant en raison de la rapidité des
communications modernes qui permettent aux ministres
eux-mêmes de se déplacer personnellement pour régler
LES ORGANES DES RELATIONS INTERNATIONALES 227

directement certaines questions, signer des traités. Cet


effacement est d’ailleurs conforme à la démocratisation
de la conduite des relations internationales. Bien que
dans tous les pays on constate que très fréquemment les
ambassadeurs, ou les plus importants des agents diplo¬
matiques, ne sont pas nécessairement des fonctionnaires
de la camère diplomatique mais des personnages poli¬
tiques, l’intervention directe des ministres s’exerce sou¬
vent. Mais on peut citer l’influence dominante qu’ont
exercée sur la politique internationale certains ambassa¬
deurs en poste du xix® siècle, par exemple des person¬
nages comme Barrère, ambassadeur de France auprès
du Quirinal, ou comme les frères Cambon, à Londres et
à Berlin.
L’agent diplomatique enfin est un observateur. Au xv®
siècle on le qualifiait souvent, d’une manière déplaisante,
d’espion privilégié. Par ses dépêches, ses télégrammes, ses
rapports, ses comptes rendus, l’agent diplomatique
informe le département de tout ce qui peut l’intéresser
dans la vie politique, économique, sociale, voire mondaine
du pays où ü se trouve.

B. — Les immunités diplomatiques.

237. — Le fondement des immunités. — On a discuté


souvent sur le fondement des immunités. On a voulu parfois
y voir non des règles de caractère juridique mais de simples
formules de courtoisie internationale. Si on leur reconnaît
au contraire le caractère de règles de droit, on a quelquefois
soutenu que la base des immunités était une fiction juri¬
dique, celle de l’exterritorialité selon laquelle l’agent
diplomatique était censé ne jamais avoir quitté son pays,
l’hôtel de l’ambassade apparaissant en outre comme un
fragment du territoire de l’État. En réalité les immunités
dont bénéficie l’agent participent d’une double nature.
Certaines sont fondées en droit et reposent sur la nécessité
de garantir à l’agent toutes les facihtés qui lui permettent
de bien remphr sa fonction. Au contraire, les immunités
de caractère fiscal reposent sur la courtoisie.
Le préambule de la Convention de 1961 a pris parti sur
ces problèmes en précisant, dans son § 4, à propos des
imrnunités : leur but n’est pas d’avantager des individus
mais d’assurer l’accomplissement efficace des fonctions des
missions diplomatiques en tant que représentants des États.
228 LA VIE INTERNATIONALE

Ce principe toutefois ne saurait être appliqué trop


strictement et les immunités ne sont pas très étroitement
liées à des hypothèses fonctionnelles ou au cadre de
locaux officiels.

238. — La liberté des communications. — La Conven¬


tion de 1961 a repris les solutions traditionnelles et
tenu compte des instruments techniques modernes.
La mission doit pouvoir envoyer des informations et
recevoir des instructions en toute hberté, d’où l’envoi de
télégrammes selon des messages chiffrés.
L’installation et l’utihsation d’un poste émetteur de
radio sont subordonnées à l’assentiment de l’État accrédi¬
taire (art. 27).
La valise diplomatique constituée par des colis ou des
sacs qui doivent porter des marques extérieures visibles
de leur caractère et ne doivent contenir que des docu¬
ments diplomatiques ou des objets à caractère officiel
ne doit être ni ouverte ni retenue.
Elle peut être convoyée par un courrier ou être confiée
au commandant d’un aéronef commercial.

239. — L’inviolabilité. — L’agent diplomatique est


inviolable. Il ne peut être molesté, arrêté. Les atteintes
à l’inviolabifité ont toujours été considérées comme
devant être réprouvées. On stigmatise ainsi, dans l’his¬
toire, l’incarcération par certains sultans d’ambassadeurs
étrangers au château des Sept Tours. L’assassinat des
plénipotentiaires français envoyés au congrès de Radstadt
a soulevé l’indignation.
L’inviolabilité joue non seulement pour l’ambassadeur
ou le chef de poste mais sa famiUe, l’ensemble du person¬
nel diplomatique, les familles de ce personnel et même
les domestiques.
L’inviolabüité concerne non seulement les personnes
mais l’hôtel de l’ambassade ou de la légation, les bureaux,
les domiciles privés. EUe vaut pour le courrier, permet
l’envoi de télégrammes selon des messages chiffrés, per¬
met d’éviter aux sacs de courrier de subir les formahtés
douanières, il s’agit alors de la valise diplomatique. Un
problème particulier est celui de l’asile. L’hôtel de l’am¬
bassade échappe normalement à l’intervention de la
pohce locale. Mais si un criminel se réfugie dans l’ambas¬
sade, normalement l’agent doit le hvrer ou autoriser la
police à pénétrer pour s’assurer de sa personne. La question
LES ORGANES DES RELATIONS INTERNATIONALES 229

est toutefois beaucoup plus délicate lorsqu’il s’agit d’un


réfugié politique. On rencontre à ce propos beaucoup de
flottement dans la pratique internationale. La Cour inter¬
nationale de justice, à propos d’un conflit sur la portée
exacte du droit d’asile survenu entre la Colombie et le
Pérou, a marqué l’enchevêtrement des règles juridiques
^lles qu’elles existent sur ce point particulier entre divers
États de l’Amérique latine (Affaire Haya de la Torre,
arrêts des 20 novembre 1950, 27 novembre 1950,
13 juin 1951).

2^. — L’immunité juridictionnelle. — L’agent diplo¬


matique ne peut être poursuivi devant une juridiction
de l’Etat où il exerce ses fonctions, qu’il s’agisse d’une
juridiction civile ou d’une juridiction pénale. Cette immu¬
nité concerne le chef de poste et sa famille, ses subordon¬
nés et leurs familles. Elle demeure discutée et discutable
pour le personnel domestique attaché à son service et
qui n'est pas nécessairement étranger d’ailleurs.
Cette immunité juridictionnelle concerne tous les actes
accomphs par l’agent, et non pas seulement les actes de
de sa fonction. En d'autres termes il n’y a pas heu, selon
les règles traditionneUes, de distinguer entre des actes
privés qui entraîneraient la possibilité d’une action juri-
dictionneUe et des actes pubhcs qui l’exclueraient. Cer¬
taines décisions de juridictions ont statué en sens inverse,
mais ces solutions sont erronées et ont parfois entraîné
des protestations de la part des États.

241. — Les privilèges fiscaux. — L’agent diploma¬


tique est traditionnellement exempt du paiement de
l’impôt. Cette formule ne concerne pas seulement l’impôt
direct mais aussi l’impôt indirect. Les droits sur l’essence,
les alcools, les tabacs, etc., les droits de douane ne sont
pas acquittés par l’agent diplomatique.
Cette solution repose sur le plan formel généralement
sur des conventions, en tout cas sur le principe de la réci¬
procité. Ehe a été parfois critiquée comme susceptible
d’engendrer beaucoup d’abus.
En matière de sécurité sociale l’agent diplomatique
demeure soumis aux règles de sécurité sociale existant
dans l’État accréditant et échappe aux règles de sécurité
sociale de l’État accréditaire, ce qui est une formule
d’immunité.
230 LA VIE INTERNATIONALE

§ 2. — Les relations et les fonctionnaires consulaires.

242. — Les relations consulaires. — Les relations


consulaires entre les peuples sont très anciennes, elles sont
étroitement liées au commerce international, à l’existence
de rapports économiques entre des étrangers et des
ressortissants d’un État, au développement du commerce
maritime.
L’origine de ces relations remonte aussi aux républiques
marchandes italiennes qui entretenaient un important
commerce, dès le xiii® siècle, avec les pays du Levant et
qui faisaient protéger les intérêts de leurs commerçants,
notamment des capitaines des navires, par les magistrats
installés dans ces pays et chargés de faciHter l’exercice de
leur commerce. Elles en eurent aussi dans des viUes et
ports européens.
Les relations consulaires ont été très importantes dans
le cadre des rapports internationaux établis entre les États
européens commerçants d’une part et les États extra¬
européens du pourtour de la Méditerranée, du Moyen ou
de l’Extrême-Orient. Les institutions consulaires ont été
ainsi hées au Régime des Capitulations, les consuls euro¬
péens apportant leur aide à leurs compatriotes et jouant
un rôle juridictionnel dans certains htiges où ceux-ci
étaient parties.
Le régime capitulaire, forme particulière de l’impéria-
hsme colonial a aujourd’hui disparu (v. supra) et tout
l’aspect de l’institution qui lui était hé n’existe donc plus.
Mais les relations consulaires présentent encore de nos
jours une grande importance sur un plan différent en
raison de la multiphcité des liens du commerce interna¬
tional.
Le droit consulaire trouve son expression dans de
multiples conventions consulaires qui sont conclues par les
différents États entre eux, sur une base bilatérale, et aussi
dans de nombreux traités dits de commerce, d’amitié,
d’étabhssement. Le nombre de tels instruments est très
considérable.
La codification des règles régissant les relations consu¬
laires a fait l’objet des travaux de la Commission du droit
international de l’O. N. U. (v. infra) et a abouti à la signa¬
ture d’une Convention sur les relations consulaires signée
à Vienne le 24 avril 1963 à l’issue d’une conférence à
laqueUe ont participé 95 États. Signée par 43 États
cette convention est entrée en vigueur en mars 1967,
LES ORGANES DES RELATIONS INTERNATIONALES 23I

22 États signataires l’ayant ratifiée et ayant déposé


leurs instruments de ratification.

243. — Les fonctions consulaires. — Les fonctions


consulaires sont distinctes des fonctions diplomatiques en
ce sens qu’eUes ne comportent pas la représentation de
l’Etat. Des États qui entretiennent entre eux des relations
consulaires n’entretiennent pas nécessairement des rela-
tions diplomatiques et des relations consulaires peuvent
mnsi exister alors que l’un des États n’a pas reconnu
l’autre.
Les fonctions consulaires sont fort nombreuses. L’art. 5
de la Convention de Vienne de 1963 en énumère 12 et
ajoute même une formule plus générale permettant d’en
ajouter par accord entre États. Les fonctions principales
existant actuellement peuvent être classées en quelques
catégories.
Il y a des fonctions relatives aux navires, bateaux, aéro¬
nefs et lems équipages. Il y a des fonctions en matière
d état civil, d’assistance judiciaire et parajudiciaire des
ressortissants. Les postes consulaires délivrent les passe¬
ports et les visas. Par-delà ces diverses fonctions spécialisées
d’autres ont ^ un caractère plus général. Il s’agit de pro¬
téger dans l’Etat de résidence les intérêts de l’État d’envoi
et de ses ressortissants. Les postes consulaires doivent
favoriser le développement des relations commerciales,
économiques et scientifiques entre l’État de résidence et
l’Etat d’envoi. Les postes consulaires ont également une
mission d’information, touchant les conditions et l’évolu¬
tion de la vie commerciale, économique, culturelle et
scientifique de l’État de résidence, ce qui permet de
fournir des renseignements aux personnes intéressées et de
préparer des rapports pour l’État d’envoi. Ce rôle d’infor¬
mation s’exerce essentiellement à l’échelon local et doit
être coordonné dans chaque poste avec celui des conseillers
commerciaux de l’ambassade.

244. — Les postes et agents consulaires. — L’art. 9


de la Convention de Vienne classe les chefs de poste consu¬
laire en distinguant : les consuls généraux, les consuls, les
vice-consuls, les agents consulaires
Les agents consulaires au sens général sont normale¬
ment des fonctionnaires de l’État d’envoi, il s’agit des
fonctionnaires consulaires de carrière mais il existe égale¬
ment des agents consulaires qui peuvent avoir la nationahté
232 LA VIE INTERNATIONALE

de l’État de résidence et qui ont été nommés par l’État d’en¬


voi. On appelle traditionnellement ces derniers person¬
nages des consuls marchands, la Convention de Vienne de
1963 utilise l’expression de fonctionnaires consulaires
honoraires.
Les chefs de poste consulaire ont une compétence terri¬
torialement définie, la circonscription consulaire, la pra¬
tique française emploie le mot « arrondissement ». Le chef
de poste consulaire est désigné par l’État d’envoi par un
document appelé lettre de provision. Il est admis par l’État
de résidence à exercer ses compétences en vertu d’une
autorisation de l’État de résidence appelée exequatur.

245. — Immunités consulaires. — La question se pose


de savoir si les agents consulaires, comme les agents
diplomatiques jouissent de diverses immunités. Norma¬
lement tout dépend des conventions qui sont intervenues.
La Convention de Vienne a posé quelques principes,
faisant reposer les immunités sur une base fonctionnelle.
Elle affirme ainsi l’inviolabihté des locaux consulaires
(art. 31), des archives et documents (art. 33), la hberté
de communication comportant l’emploi de tous moyens,
les courriers, les messages en code et chiffre, l’utihsation
de la vahse consulaire est également garantie (art. 35).
Toutefois l’assentiment de l’État de résidence est néces¬
saire pour l’installation et l’utihsation d’un poste émetteur.
A l’égard des agents consulaires eux-mêmes il existe
traditionnellement des règles de protection que reprend
la Convention. L’inviolabihté des personnes ne disparaît
qu’en cas de crime grave et il existe une immunité de
juridiction mais hmitée aux actes accomphs dans l’exer¬
cice des fonctions.
Les immunités fiscales existent mais sont relativement
réduites. Cette solution traditionnelle est reprise par
l’art. 49 de la Convention qui pose un principe d’immu¬
nité mais le tempère par une énumération assez longue
d’hypothèses dans lesquelles le fonctionnaire consulaire
doit payer certains impôts En matière de sécurité sociale
le régime est celui de l’immunité.
BIBLIOGRAPHIE 233

BIBLIOGRAPHIE

Sur les agents diplomatiques et consulaires.


Stuart (G.), Le droit et la pratique diplomatiques et
consulaires. R. C. A. D. I., 1934, t. II; Chrétien (M.), Note
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234 LA VIE INTERNATIONALE

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consulaires. A. F. D. I., 1963, p. 78-118.
CHAPITRE III

LES RÈGLES DE DROIT


RÉGISSANT LA VIE INTERNATIONALE

246. — Idées générales. — Les rapports internatio¬


naux sont évidemment des rapports sociaux. A ce titre,
comrne l’ensemble des rapports sociaux, ils sont régis par
des règles juridiques. Ces règles juridiques présentent en
la matière im caractère particuHer en raison de ce que
pendant longtemps la vie internationale n’a pas été très
dense, et donc une grande partie des rapports interna¬
tionaux n’a pas été réglementée juridiquement. On ne
saurait pourtant minimiser le rôle très important joué
par les règles juridiques dans les rapports internatio¬
naux.
Ces règles constituent ce qu’on appelle les sources for-
rnelles du droit international. Toutes les fois que dans
1 histoire des institutions internationales on a voulu créer
une juridiction internationale, le problème s’est posé
d’indiquer les règles juridiques qui seraient appli¬
cables.
Une telle énumération des diverses règles juridiques
peut être actuellement trouvée dans un texte de droit
positif régissant une juridiction internationale, la Cour
internationale de justice.
L article 38 du statut de la Cour distingue plusieurs
catégories de règles juridiques ; les conventions interna¬
tionales ou traités internationaux, la coutume, les prin¬
cipes généraux et d’autres sources auxiliaires. On peut
adopter cette classification pour une présentation géné-
236 LA VIE INTERNATIONALE

raie et schématique des règles de droit régissant les rap¬


ports internationaux

Section I. — Le traité international.

247. — Acte pluzilatéral et acte unilatéral. —


Le traité international est une des sources de droit les
plus importantes. Il s’analyse en un accord par lequel
deux ou plusieurs États fixent la règle par laquelle ils
entendent résoudre un problème qui se pose dans le cadre
des relations internationales.
Le traité s’oppose ainsi de toute évidence à l’acte uni¬
latéral par lequel un seul État, dans le seul cadre de sa
propre compétence, indique une solution. On remarquera
d’aüleurs qu’une loi nationale est, au regard du droit
international, un acte unilatéral alors qu’au regard du
droit interne eUe constitue un acte plurilatéral.
Si le traité s’oppose ainsi nettement à l’acte unilatéral,
il est plus difficile d’analyser juridiquement le traité.
Pendant des siècles on a considéré que le traité^inter-
national était un contrat conclu entre deux ou plusieurs
États. Une analyse plus récente et plus exacte a distingué
deux catégories de traités, les traités contrats et les traités
lois. Le traité contrat, normalement bilatéral, stipule des
avantages symétriques au profit de chaque contractant.
Le traité loi, qui peut être bilatéral mais est généralement
plurilatéral, consacre l’accord des signataires sur un mode
d’organisation de la société internationale, le fonctionne¬
ment d’un service pubhc, le statut territorial d’une partie
du monde, etc. Le traité loi supplée à l’institution encore
inexistante d’une véritable loi internationale.

248. — Terminologie. — Le mot traité, ou en anglais


treaty, en allemand Vertrag, a un sens fort général, mais
le mot convention est plus général encore. Certains traités
portent des noms particuliers. Le traité constitutif de
l’Organisation des Nations Unies est désigné sous le nom
de Charte. Le traité de l’Atlantique Nord est souvent
quahfié de Pacte atlantique et les textes du traité de Ver¬
sailles créant la Société des Nations portaient aussi ce

* La théorie générale des sources du droit international fait partie du pro¬


gramme de droit international approfondi en 8* année, on se borne ici, donc,
à des notions très sommaires.
LES RÈGLES DE DROIT 237
nom de Pacte, et en anglais celui de Covenant qui évoquait
les soldats de Cromwell.
La terminologie juridique désigne sçus le nom de
concordats des traités conclus entre im État et le Saint-
Siège et organisant le culte catholique dans le pays.
L’expression de Capitulations, tirée du latin capitula,
chapitres, est réservée soit à des traités instituant le
régime dit capitulaire (v. supra, n» 96), soit à des textes
particuüers au droit de la guerre et concernant la cessa¬
tion d’une défense ou d’une résistance par une troupe.
Sur le plan technique on oppose le traité proprement
dit et le protocole, texte moins important ou plus bref et
qui généralement se borne à apporter une précision ou
à exprimer une réserve.
La Commission du droit international de l’O. N. U.
dans son œuvre de codification a préparé et adopté un
projet d’articles sur le droit des traités. Dans l’art. I®’',
eUe a proposé une définition selon laquelle « L’expression
traité s’entend de tout accord international en forme
écrite, qu’il soit consigné dans un instrument unique ou
dans deux ou plusieurs instruments connexes, et quelle
que soit sa dénomination particulière (traité, convention,
protocole, pacte, charte, statut, acte, déclaration, concor¬
dat, échange de notes, procès verbal approuvé, mémoran¬
dum d’accord, modus vivendi, etc.,) conclu entre deux ou
plusieurs États ou autres sujets du droit international et
régi par le droit international.

249. — Les accords en forme simplifiée. — Le traité


proprement dit est un acte solennel comportant un certain
formahsme. Il s’oppose, ainsi, aux accords en forme
simphfiée.
Ces accords sont actuellement très nombreux et la
pratique diplomatique montre que les États concluent
beaucoup plus d’accords en forme simphfiée que de véri¬
tables traités.
De tels accords peuvent avoir une portée pohtique
importante. Les accords de Genève de 1954 sur la cessation
des hostihtés en Indochine, les accords franco-marocains
du 2 mars 1956, les accords franco-tunisiens du
20 mars 1956, les accords de Genève du 23 juillet 1962
sur la neutrahté du Laos ont été ainsi conclus sous forme
simphfiée.
Dans le projet d’articles, la Commission du Droit
International n’a pas donné de ces accords une définition
238 LA VIE INTERNATIONALE

très précise, et en a fait une catégorie de traités en propo¬


sant la formule suivante : « L’expression accord en forme
simplifiée s’entend d’un traité conclu par un échange de
notes, un échange de lettres, un procès-verbal approuvé,
un mémorandum d’accord, une déclaration commune ou
tout autre instrument conclu par une procédure analogue ».
On notera que cette analyse recoupe sur plusieurs points,
comme échange de notes, procès-verb^ approuvé,
mémorandum d’accord, des formules utüisées pour les
traités proprement dits. Il conviendra d’opérer une disso¬
ciation plus nette.
Ce qui est essentiel c’est que l’accord en forme simphfiée
n’est pas soumis à ratification.

§ ler. — La procédure du traité.

250. — L’instrumentum. — La conclusion d’un traité


international suppose généralement des négociations qui
se déroulent pendant un certain temps, aboutissant à
la rédaction d’un texte qui est signé et qui sera ultérieu¬
rement soumis à la ratification. Ce processus normal
soulève divers problèmes.
On doit remarquer tout d’abord que le traité interna¬
tional n’est pas nécessairement écrit. La Cour permanente
de Justice internationale a pu, en 1933, à propos de l’af¬
faire dite du Groenland oriental, reconnaître la possi¬
bilité d’accords internationaux de caractère verbal. Mais
très généralement l’accord sera écrit.
Ainsi se,pose la question de la langue dans laquelle le
traité sera rédigé. Le Moyen Age européen utihsait le
latin, les traités de Westphaüe sont écrits en latin et il
en va de même de divers traités du xvii® et xviii® siècles.
Mais plus tard on utilisa très généralement le français
devenu une véritable langue internationale, la langue
diplomatique. Au lendemain de la seconde ^erre mon¬
diale on a vu apparaître l’anglais, et pratiquement, à
l’heure actuelle, il n’y a plus de langue dominante. Lors¬
qu’on utihse plusieurs langues le problème se pose de
l’interprétation. Tantôt une des langues utihsées sera la
langue de référence, en ce sens que l’exemplaire rédigé
dans cette langue sera le seul à faire foi. Tantôt chaque
texte fait également foi, ce qui peut entraîner des diffi¬
cultés d’interprétation.
LES RÈGLES DE DROIT 239

La signature du traité est un acte solennel, elle est par¬


fois précédée de l’opération dite du paraphe. La signature
du texte est le point terminal de la procédure de négo¬
ciations au cours de laquelle sont intervenus les plénipo¬
tentiaires munis des pouvoirs nécessaires pour négocier
et pour éventuellement signer le document,

251. — La ratification. — Le traité signé n’a pas, de ce


fait, valeur juridique. Il ne devient obligatoire pour les
États que s’il est ratifié. Mais il convient de remarquer
que les accords diplomatiques en forme simplifiée
deviennent obligatoires du fait de la signature et de
l’échange de documents, s’il y a lieu, sans ratification.
Il est difficile de préciser exactement la nature, la portée
et le domaine de ces accords.
L’article 52 de la Constitution française de 1958 pré¬
voit ainsi l’existence des accords internationaux non
soumis à ratification.
Pour tous les traités au sens propre, autres que les
accords simpHfiés, le droit international exige, comme
condition de vahdité, l’accomphssement de la procédure
de ratification. Mais les mod^tés mêmes de cette pro¬
cédure ne sont pas définies par le droit international, elles
sont fixées par le droit interne de chaque État.

252. — Les procédures de ratîficatioii. — On comprend


que les procédures de ratification varient selon les États,
selon les régimes politiques et selon les époques.
Si l’on se hvre à une étude de droit comparé et^si l’on
s’efforce de classer les diverses procédures de ratification,
on peut arriver à dégager plusieurs t5q)es de solution.
La compétence exclusive de l’exécutif. — Ce système est
celui des États autoritaires à pouvoir exécutif fort. C’était
celui du Japon dans la constitution du ii février 1889
(art. 13) et celui du III® Reich (article 4 de la loi du
24 mars 1933).
La compétence exclusive du législatif. — Ce système
repose sur l’idée démocratique du contrôle de la pohtique
internationale par le pouvoir législatif et réduit donc le
pouvoir exécutif au rôle préhminaire de simple négocia¬
teur du traité.
Il est mis en œuvre de différentes manières. Parfois
la ratification est confiée à l’organe législatif ordinaire,
intervenant selon les règles habituelles de la procédure
240 LA VIE INTERNATIONALE

d’élaboration de la loi, et c’est essentiellement la solution


de l’Amérique latine. Parfois, au contraire, la ratification
tout en étant donnée par le pouvoir législatif exige une
intervention particulière des organes législatifs, par
exemple l’intervention simultanée des deux chambres
siégeant en congrès. Le système soviétique, emprunté
fréquemment par les démocraties populaires, fait inter¬
venir non pas les chambres législatives mais une émana¬
tion de celles-ci, le præsidium.
Une curieuse variante de l’intervention législative
est fournie par la Suisse. Si l’article 85 de la constitution
fédérale de 1874 prévoit la compétence de l’Assemblée
fédérale, l’ahnéa 3 de l’article 89 adopté par votation
populaire du 30 janvier 1921 dispose que les traités
internationaux conclus pour une durée indéterminée,
ou pour plus de quinze ans, sont soumis à l’adoption ou
au rejet du peuple si la demande en est faite par 30.000
citoyens ou par 8 cantons.

Les systèmes mixtes. — Ils s’analysent en une collabo¬


ration et un partage de compétence entre le pouvoir
législatif et le pouvoir exécutif. Ces systèmes mixtes
sont nombreux et comportent bien des solutions.
Parfois l’assentiment du pouvoir législatif est toujours
requis et le pouvoir exécutif ne peut ratifier qu’après
avoir été spécialement habihté à cet effet par le pouvoir
législatif.
Parfois les traités sont classés en deux catégories.
Dans l’une le pouvoir exécutif ratifie hbrement, dans
l’autre il ne peut ratifier qu’en vertu d’une habihtation
législative préalable. Cette solution, qui distingue selon les
traités, est parfois quahfiée de solution franco-belge. Elle
est pratiquée aussi par la Grande-Bretagne sous la
réserve que normalement le roi est compétent pour ratifier
et que l’intervention législative se trouve, en droit sinon
en fait, limitée aux h5q)othèses où le traité contient des
dispositions dérogeant aux lois en vigueur ou nécessi¬
tant des ressources financières.
La solution française, formulée actuellement dans
l’article 53 de la constitution de 1958 demeure voisine
de celles des constitutions de 1875 et 1946. Le traité est
toujours ratifié par le pouvoir exécutif, donc par un décret.
Mais une loi d’habihtation préalable autorise la ratifi¬
cation par l’exécutif pour les traités relatifs à l’organisa¬
tion internationale, les traités de paix, de commerce, les
LES RÈGLES DE DROIT 241

traités qui engagent les finances de l’État, ceux qui sont


relatifs à l’état des personnes, ceux qui modifient les
dispositions de nature législative ainsi que ceux qui
comportent cession, échange, adjonction de territoires.
Une exigence supplémentaire est formulée par le § 3
qui prévoit que nulle cession, nul échange, nulle adjonc¬
tion de territoires n’est valable sans le consentement des
populations intéressées.
L’article 54 prévoit une h5q)othèse particulière dans
laquelle l’autorisation de ratification ne peut intervenir
qu’après révision de la Constitution. Cette exigence doit
être satisfaite si le Conseil constitutionnel a déclaré qu’un
engagement international comporte une clause contraire
à la Constitution.

Le système des États-Unis. — Les systèmes mixtes


comportant collaboration des deux pouvoirs se ren¬
contrent très généralement dans les régimes parlemen¬
taires. On peut trouver un autre exemple du système
mixte dans un pays à régime de séparation des pouvoirs,
les États-Unis et, à leur imitation, divers États du conti¬
nent américain.
Le système des États-Unis comporte l’intervention
non pas de l’ensemble des chambres législatives, mais
du seul Sénat. Il s’agit d’un véritable contrôle du Sénat
sur la politique extérieure, le Sénat ayant pu apparaître,
au moins à l’origine, en 1787, comme représentatif des
États menibres. L’article 2 de la section II de la constitu¬
tion des États-LTnis prévoit la nécessité d’un vote des
deux tiers des sénateurs présents. On sait que cette dis-
josition entraîna la non-ratification du traité de Versailles
oar les États-Unis, le projet de traité n’ayant pas obtenu
a majorité constitutionnelle requise. La Chambre des
représentants n’intervient pas normalement dans la pro¬
cédure de ratification, sauf lorsque le traité dont il s’agit
comporte des incidences financières.
La procédure nord-américaine en matière de ratifica¬
tion des traités, avec l’intervention du Sénat et la néces¬
sité d’une majorité des 2/3 est lourde. Pour s’en dégager
la pratique gouvernementale recourt très largement à la
formule des « executive agreements » qui permet au
Président d’agir seul ou grâce à une résolution adoptée
à la majorité simple par le Congrès.
Des tentatives ont été faites pour hmiter le droit du
Président et exiger la résolution conjointe, mais l’amen-
242 LA VIE INTERNATIONALE

dement à apporter à la Constitution, proposé par le


sénateur Bricker, n’a pas été adopté.

253. — L’enregistrement des traités. — Les traités


ratifiés sont normalement publiés dans les textes officiels
des États signataires. Cette publication est nécessaire
pour invoquer les traités devant les tribunaux. Mais cer¬
tains traités ne sont pas publiés et notamment les traités
de caractère militaire, les alliances classiques, etc.
La formule de la diplomatie secrète a été condamnée
par le premier point de la déclaration du Président Wilson,
connue sous le nom de « Quatorze points ».
Le Pacte de la S. D. N. disposait dans son article i8,
que tout traité ou engagement international conclu à
l’avenir par un Membre de la Société devait être immédia¬
tement enregistré par le Secrétariat et publié par lui aussi¬
tôt que possible. Aucun de ces traités ou engagements
n’était obligatoire avant d’avoir été enregistré. La pra¬
tique montra la survivance des formules anciennes, avec
par exemple la simple mention de l’existence d’une
alliance, sans donner le texte de celle-ci.
La Charte de l’O. N. U. contient dans son article 102
des dispositions analogues. Toutefois le texte semble
prévoir une sanction un peu différente du défaut d’enre¬
gistrement : l’impossibilité d’invoquer le traité devant
un organe de l’O. N. U.
Ces deux articles sont à l’origine des publications des
traités sous forme de recueils plurilingues d’un usage fort
commode (v. supra, no 6).

254. — La date des traités. — Les traités portent


la date de leur signature et non pas celle de la ratifica¬
tion. L'entrée en vigueur des traités ne se fait pas le jour
de la ratification. Car cette date peut être différente selon
les États. L’entrée en vigueur peut être fixée au jour de
l’échange des instruments de ratification ou encore, et
c’est la solution la plus fréquente pour les traités collectifs,
au jour où sont déposés un certain nombre d’instruments
de ratification. Par exemple l’article iio, § 3, de la Charte
de l’O. N. U. prévoit que ce texte entrera en vigueur
après le dépôt des ratifications des cinq grandes Puis¬
sances et de la majorité des autres signataires.
LES RÈGLES DE DROIT 243

§ 2. — Les effets des traités.

2M. — Le principe. — C’est un principe essentiel du


droit des gens que le traité régulièrement ratifié doit être
respecté et doit produire ses effets juridiques.
Le professeur Kelsen a vu dans le principe Pacta suni
servanda la norme fondamentale d’où découle tout le droit,
non seulement le droit international mais aussi le droit
interne.
Le principe, surtout présenté comme un postulat, ne
soulève pas de difficulté particulière, mais il s’agit de
déterminer la portée exacte de ce principe. Trois questions
particulières se présentent ; les réserves, les effets du
traité entre les signataires, les effets en dehors des signa¬
taires.

A. — Le problème des réserves.

256. — La notion de réserves. — On désigne sous ce


nom une manifestation de la volonté du gouvernant, au
cours de la procédure internationade d’âaboration du
traité, par laquelle la portée des dispositions convention¬
nelles se trouve modifiée.
La réserve est donc un acte unilatéral qui peut d’ailleurs
changer de nature juridique dans la mesure où elle fait
l’objet d’une acceptation de la part des autres États.

257. — Les types de réserves. — La réserve peut


intervenir à différents stades de la procédure d’élabora¬
tion du traité .
Elle peut intervenir tout d’abord lors de la signature.
On remarquera qu’avant la signature il ne peut exister
de réserve, car on est dans la phase des négociations et
de la discussion et que le point de vue de chaque État
sera exposé.
La réserve lors de la signature équivaut à indiquer que
le signataire, qui signe avec réserve, limite la portée qu’il
entend donner au traité. Les contractants sont informés
de cette réserve qui ne comporte donc aucun élément de
surprise.
La réserve lors de la ratification présente plus d’incon¬
vénients, car la procédure de ratification se déroule sur
le plan interne et on se trouve au stade terminal du traité.
244 LA VIE INTERNATIONALE

Les autres États contractants se trouvent placés devant


une décision définitive.
Les réserves lors de la ratification peuvent prendre
parfois la forme d’une résolution interprétative par
laquelle un organe législatif interne indique le sens et la
portée qu’il entend donner du traité. La dernière variante
est celle des réserves formulées lors de l’adhésion d’un
État à un traité déjà existant.

258. — Valeur des réserves. — Dans un traité bila¬


téral la réserve ne peut se concevoir, car elle aboutit à une
transformation du traité de manière purement unilaté¬
rale.
Au contraire, dans le cas de traités plurilatéraux les
réserves sont admissibles dans la mesure où, malgré les
inconvénients qu’eUes présentent, elles permettent d’as¬
surer une grande souplesse au système conventionnel.
La Cour internationale de justice a été appelée à émettre
un avis consultatif au sujet des réserves dans les traités
multilatéraux. L’U. R. S.S., signataire de la convention sur
le génocide du 9 décembre 1948 a formulé une réserve en
se refusant à accepter la clause de juridiction obligatoire.
C’est le problème de la validité de cette réserve qu’a
résolu la Cour estimant qu’un État peut toujours for¬
muler une réserve pourvu que la réserve demeure compa¬
tible avec le but de la convention. L’État qui fait objec¬
tion à la formulation d’une réserve ne se trouvera pas lié
avec l’État qui a formulé la réserve (avis du 28 mai 1951).
L’art. 18 du projet d’articles élaboré par la Commission
du droit international adopte une solution analogue à
l’avis de la Cour en admettant en principe la liberté des
réserves dans les traités multilatéraux sauf lorsqu’existent
formellement des interdictions formulées par le traité en
question ou découlant des règles en vigueur dans une
organisation internationale. Les réserves ne peuvent non
plus être formulées si le traité les limite à une catégorie à
laquelle elles seraient extérieures ou si elles sont, d’une
manière générale, incompatibles avec l’objet et le but du
traité.
La réserve a pour effet, par voie de réciprocité de per¬
mettre à tout autre État partie au traité de se prévaloir,
dans ses relations avec l’État qui a formulé la réserve, de
cette modification. La réserve demeure sans effet sur. les
droits et obligations des autres parties au traité dans les
rapports qu’elles ont entre elles (art. 21). L’objection d’un
LES RÈGLES DE DROIT 245

État à une réserve formulée par un autre empêche le


traité d’entrer en vigueur entre l’État qui a fait objec¬
tion et l’État qui a formulé la réserve sauf intention
contraire exprimée par l’État qui a fait objection (art. 20).

B. — Les effets du traité a l’intérieur


DE LA COMMUNAUTÉ DES ÉTATS SIGNATAIRES.

259. — Les rapports du traité et de la loi. — Le


problème se pose de savoir si le traité international s’ap¬
plique, une fois accomplies les formalités de la ratifi¬
cation, ou si le texte doit en outre être promulgué comme
l’est une loi interne.
La solution de ce problème varie selon les conceptions
doctrinales relatives au droit international dans ses
rapports avec le droit interne. Les théoriciens des doc¬
trines dualistes considèrent que le traité n’est applicable,
à l’intérieur d’un État donné, qu’après une sorte de récep¬
tion en droit interne. Au contraire la théorie du monisme
juridique, qui gagne de plus en plus, ne distingue pas le
droit interne du droit international et affirme la supré¬
matie du traité sur le droit interne. Cette solution de la
hiérarchie des normes juridiques, qui subordonne la loi
interne au traité, a été affirmée dans un certain nombre
de constitutions récentes.
C’est celle que consacrait l’art. 28 de la Constitution
française du 27 octobre 1946. L’art. 55 de la Constitution
du 4 octobre 1958 reprend la même solution : « Les traités
ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès
leur pubhcation, une autorité supérieure à celle des lois »
mais l’atténue par une addition : « sous réserve, pour
chaque accord ou traité de son application par l’autre
partie ».
Si le principe de la supériorité du traité sur la loi interne
ordinaire apparaît ainsi comme admis dans les droits
positifs de certains États, la question est plus délicate
pour les lois constitutionnelles. En effet, l’élaboration
de la loi constitutionnelle suppose des procédures qui,
sauf rh5q)othèse des constitutions souples, est différente
de la procédure législative ordinaire. Le principe de la
correspondance des formes semble entraîner comme
conséquence que le traité ne peut être supérieur à la loi
constitutionnelle, à moins qu’aient été respectées les
procédures particulières concernant la modification de
246 LA VIE INTERNATIONALE

la constitution qu’entraînerait alors ce traité. Une partie


de la doctrine française a fait application de ces principes
lors des débats relatifs à la ratification du traité dit de la
Communauté eiuropéenne de défense.
L’art. 54 de l’actuelle constitution française semble
poser le principe de la supériorité de la constitution sur les
traités puisque si le Conseil constitutionnel dûment saisi a
déclaré qu un engagement international comporte une
clause contraire à la Constitution, l’autorisation de la
ratifier ou de 1 approuver ne peut intervenir qu’après la
révision de la Constitution.

260. — L’interprétation du traité. — Le traité consti¬


tuant une règle juridique incorporée au droit interne, le
problème se pose de l’application du traité par les tri¬
bunaux de l’État.
Cette application suj)pose la connaissance par les tri¬
bunaux du texte du traité, elle est donc subordonnée non
seulement à la ratification, qui est une condition de la
validité du traité, mais aussi à la publication du traité,
faute de laquelle les tribunaux ignorent le traité. C’est
bien en ce sens que cfispose l’article 55 de la Constitution
française de 1958 qui fait allusion à des traités régulière¬
ment ratifiés et à leur publication. A l’égard d’un texte
de droit interne, les tribunaux disposent d’un pouvoir
d’interprétation.
En rnatière de traité international, on peut se demander
si les tribunaux internes disposent d’une telle compétence.
En général la réponse à cette question est positive. Il
convient toutefois de signaler que la solution française
est traditionnellement en sens contraire. Les tribunaux
français se refusent à interpréter les traités. Les solutions
ne sont d’ailleurs pas identiques selon les ordres de juridic¬
tions dont il s’agit.
_ Le Conseil d’État considère que le principe selon lequel
1 interprétation des traités internationaux appartient au
Gouvernement a une portée absolue, il n’interprète jamais
un traité, surseoit à statuer jusqu’à l’interprétation par le
ministre des affaires étrangères ou se conforme à l’inter¬
prétation déjà donnée.
La Cour de cassation se reconnaît le droit d’interpréter
les traités pour autant que l’interprétation concerne des
intérêts privés et non des questions d’ordi'e public inter¬
national.
Les problèmes d interprétation des traités se posent
LES RÈGLES DE DROIT 247

aussi devant les juridictions internationales, il s’agit alors


des méthodes d’interprétation. Les sentences des tribu¬
naux arbitraux, les arrêts des cours fournissent des
exemples de méthode. Quelques principes sont posés
dans le projet d’articles de la Commission du Droit
international. L’article 69 indique qu’un traité doit être
interprété de bonne foi suivant le sens ordinaire à attribuer
à chaque terme, dans le contexte du traité, compte tenu
de son objet et de son but, et à la lumière des règles du
droit international général en vigueur à l’époque de sa
conclusion. On doit tenir compte de toute pratique ulté¬
rieurement suivie dans l’apphcation du traité qui révélerait
l’accord des parties quant à son interprétation.
L’article 70 prévoit dans certains cas qu’il convient
d’avoir recours à des moyens complémentaires d’interpré¬
tation et notamment aux travaux préparatoires.

C. — Les effets du traité


EN DEHORS DE LA COMMUNAUTÉ DES ÉtATS SIGNATAIRES.

La signature et la ratification d’un traité font apparaître


pour l’apphcation de ce traité une communauté interna¬
tionale particuhère. Il s’agit de savoir si le traité dont les
efiets existent évidemment à l’intérieur même de ladite
communauté, peut aussi produire des effets au delà d’eUe.
Une première réponse de caractère absolument négatif
pourrait, en théorie, être donnée, se fondant sur le carac¬
tère relatif du traité et l’assimilant par exemple à un con¬
trat. Cette solution de la relativité absolue, bien que sou¬
tenue par quelques auteurs, ne saurait être retenue. Les
traités peuvent, dans certains cas, produire des effets en
dehors de la communauté des États signataires.

261. — E^ension de la notion de conununauté des


États signataires. — La communauté des États signa¬
taires n’est pas véritablement immuable. Il est des traités
qui peuvent être ultérieurement étendus à divers États.
La pratique internationale distingue des procédés diffé¬
rents d’extension. Ces procédés sont Vadhésion ou Vacces¬
sion. Ds se caractérisent par leur caractère unilatéral.
Un État non signataire original d’un traité déclare en
étendre les effets à son ordre juridique propre.
Le traité considéré peut apparaître tantôt comme
ouvert par des signataires eux-mêmes à des adhésions
248 LA VIE INTERNATIONALE

extérieures, il s’agit d’un traité ouvert. Dans le cas


contraire on est en présence d’un traité fermé.
L’acte d’adhésion ou d’accession suppose que la conven¬
tion existe et qu’elle a valeur juridique. Il ne s’analyse
pas en une participation quelconque à son élaboration
qui est déjà acquise. L’adhésion à un traité fermé exige
de l’adhérent des négociations distinctes avec les signa¬
taires. L’adhésion à un traité ouvert ne suppose pas de
négociations.
L’adhérent nouveau peut adhérer sans réserve, il peut
au contraire adhérer avec réserves, et l’on voit alors
réapparaître un procédé d’élaboration d’une règle de
droit différente de l’ancienne, au moins dans les rapports
entre les signataires originaux et l’adhérent.

262. -y La clause de la nation la plus favorisée. —


On désigne sous ce nom une stipulation convention¬
nelle qui se rencontre fréquemment dans les traités de
commerce (traités-contrats) et par laquelle les deux par¬
ties contractantes A et B conviennent que si, ultérieure¬
ment, l’une d’elles conclut avec un État tiers C un traité
de commerce accordant à C des avantages commerciaux
particuliers, ces avantages seront accordés ipso facto au
contractant initial.
Cette clause aboutit donc à étendre automatiquement
au premier contractant le bénéfice du traité futur.

263. — La stipulation pour autrui. — On peut se


demander si l’institution juridique, connue en droit
privé interne sous le nom de stipulation pour autrui, se
retrouve en matière de traité international, permettant à
des Etats si^ataires d’un traité de créer un droit au
profit d’un Etat non signataire.
La question est importante car si un tel droit peut être
créé, l’Etat au profit duquel il est étabh ne pourra, par
la suite, être privé de ce droit que s’il y consent.
Le droit international ne connaît pas, en général, une
telle institution. Toutefois la Cour permanente de Justice
internationale a reconnu dans un arrêt de 1932, connu
sous le nom d’arrêt des zones franches de Gex et de Haute-
Savoie, que les traités de 1815, auxquels la Suisse n’était
pas partie, avaient créé à son profit, dans les circonstances
particuhères dans lesquelles ils étaient intervenus, un
droit véritable. On peut en conclure donc que la stipula¬
tion pour autrui a été admise, à titre exceptionnel.
LES RÈGLES DE DROIT 249

Le projet d’articles étudie les problèmes des traités


prévoyant des obligations ou des droits pour les États
tiers. La création d’une telle obligation ou d’un tel droit
est possible si les parties ont entendu agir ainsi et si
l’État non partie consent expressément à être lié par
l’obligation ou consent expressément ou implicitement
à ce qu’un droit lui soit conféré (art. 59-art. 60).
Si une obligation ou un droit sont nés pour un État
d’une disposition d’un traité auquel il n’est pas partie,
cette disposition ne peut être abrogée ni modifiée sans le
consentement de l’État à moins que le traité ne lui ait
donné un caractère révocable (art. 61).

264. — Les traités créateurs de situations objectives. —


Les hypothèses normales d’effets de traités en dehors de
la communauté des États signataires se rencontrent, en
droit international, dans un domaine différent de celui
de la technique contractuelle. Ce sont les hypothèses de
traités-lois étabhssant un statut juridique particuher. Les
États non signataires doivent respecter cette réglemen¬
tation internationale. Ils n’ont pas droit à son maintien,
ce qui marque la différence avec la stipulation pour autrui,
mais ils ont droit à son apphcation, ou peuvent se voir
opposer cette réglementation.
Les traités qui possèdent de tels effets peuvent être
classés en deux grandes catégories, ainsi que le souhgne
le professeur Rousseau : d’une part les traités relatifs
aux communications, d’autre part les traités créant un
statut pohtique et international.
Les exemples de réglementation internationale en
matière de communication sont nombreux. Parmi les
plus nets on peut retenir celui du statut des canaux
transocéaniques. Les traités intervenus posent le prin¬
cipe de la hberté de la navigation dans ces canaux. Il en
résulte que le principe jçue à l’égard de tout État, de
tout ressortissant d’un État, même si l’État n’est pas
signataire du traité étabhssant le régime juridique du
canal. Or la communauté des États signataires peut être
plus ou moins étendue. Si la convention de Constanti¬
nople du 29 novembre 1888 est signée par 9 États, le
traité Hay Pauncefote du 18 novembre 1901 fixant,
d’ailleurs par analogie, le régime du canal de Panama
n’est signé que par deux États. Tous les autres États
membres de la communauté internationale ont pourtant
droit à l’apphcation de ces statuts.
250 LA VIE INTERNATIONALE

On peut se demander la raison pour laquelle de tels


traités ont effet en dehors de la communauté des signa¬
taires. L’explication est simple : il s’agit d’une réglemen¬
tation de caractère intematipnal, qui a été établie à un
moment donné par certains États jouant le rôle de légis¬
lateur international de fait. Cette compétence de fait
est reconnue et la réglementation posée est valable dans
la mesure où elle est conforme au but propre du droit
international. Or, ouvrir une voie d’eau au commerce
de toutes les nations est précisément donner satisfaction
à un des impératifs de la vie internationale. Cette « légis¬
lation » est donc valable, et le fait qu’eUe n’ait pas été
établie sous la forme d’une convention de caractère uni¬
versel ne saurait constituer un vice de ce statut. C’est donc
la conformité même de la réglementation établie, avec un
droit international objectif, qui permet d’expliquer que
ce traité puisse produire ses effets en dehors de la commu¬
nauté des signataires.
Un raisonnement analogue peut être fait à propos des
traités étabhssant un statut pohtique et territorial. Un
net exemple a été fourni par la convention de Paris, du
30 mars 1856, relative à la démüitarisation des îles d’A-
land. Ce traité avait été signé par la France, la Grande-
Bretagne et la Russie. Il a été considéré comme opposable
à la Suède et à la Finlande, avant d’être d’ailleurs remplacé
en 1921 par une convention plus large.
On remarquera que quelquefois le législateur interna¬
tional de fait, les États par exemple qui, au lendemain
d’une guerre, et en raison de leur qualité de Puissances
victorieuses élaborent des statuts pohtiques, ne le font
pas toujours d’une manière conforme au droit interna¬
tional objectif. On songe par exemple aux partages de
territoires, notamment aux divers partages de la Pologne.
Théoriquement de tels traités, dans la mesure où le but
poursuivi est contraire aux principes du droit interna¬
tional — respect de l’indépendance par exemple — ne
devraient pas être considérés comipe valables et donc
ne pas avoir d’autres effets à l’égard des États non signa¬
taires que des réactions de pur fait.

§ 3. — Transformation et fin des traités.

265. — Aspect général du problème. — Le traité


international produit normalement ses effets dans le
LES RÈGLES DE DROIT 251

cadre de temps qu’il définit lui-même ou pour une période


indéterminée, si la période d’application n'est pas fixée.
La durée du traité résulte ainsi de l’accord conventionnel
initial ou du commun accord ultérieur des États signa¬
taires désireux de mettre fin au traité par la procédure
de l’abrogation.
Mais, en dehors de ces hypothèses d’extinction du traité
par voie conventionnelle, la question se pose de savoir
si le traité ne cesse pas d’exister dans d’autres cas.
Une chose est certaine : un traité n’a pas de valeur
éternelle. Il exprime, à un moment donné, la règle de
droit qui convient à une certaine situation internationale.
Cette règle peut ne plus correspondre, à d’autre époques,
aux nécessités pohtiques, économiques et sociales et
apparaître donc comme démodée ou dépassée. La question
se pose ainsi de l’extinction éventuelle du traité, en
dehors de la volonté commune des États signataires. Il
faut envisager de même la question de la transformation
du traité, de sa révision.
La solution de ces problèmes est dominée par deux
principes qui peuvent agir en sens inverse. Le premier
est que le traité étant un acte à procédure, cette procédure
doit être respectée. Ce principe entraîne donc une certaine
stabihté du traité. Mais un second principe ne doit pas
être néghgé, celui que le traité est une règle de droit et
qu’il ne peut se mettre en contradiction avec une réahté
sociale qui change. Ce second principe conduit à la trans¬
formation et à la plasticité du traité.
La combinaison harmonieuse de ces deux principes
domine les problèmes posés par la transformation et la
fin des traités. On étudiera successivement la dénoncia¬
tion unilatérale, l’effet de la guerre sur les traités, la clause
rebus sic stantibus, la révision.

A. — La dénonciation unilatérale.

266. — Dénonciation et abrogation. — Reposant sur


un accord de volonté, le traité peut être abrogé d’un
commun accord. Mais la dénonciation unilatérale, éma¬
nant d’un seul des États signataires, ne peut juridique¬
ment à elle seule avoir les mêmes conséquences.
L’histoire du droit, international montre qu’à de mul¬
tiples reprises des États ont dénoncé unilatéralement
des traités. La Russie a ainsi dénoncé en 1871 les clauses
252 LA VIE INTERNATIONALE

des traités de Paris de 1856 relatives à la démilitarisation


de la mer Noire. L’Allemagne hitlérienne a dénoncé en
1935 les clauses de démilitarisation du traité de Ver¬
sailles et, en 1936, le traité de Locamo. L’Égypte a dénoncé
en 1953 le traité anglo-égyptien de 1936. On pourrait
donner d’autres exemples.

267. — Aspect non juridique de la dénonciation. —


Les dénonciations unilatérales des traités constituent des
violations de la règle de droit. Cette solution a été affirmée
solennellement, notamment dans les trois premières des
hypothèses ci-dessus rappelées. Un protocole signé à
Londres le 17 janvier 1871, et qui donnait satisfaction
à la Russie quant à la démihtarisation de la mer Noire,
condamnait la dénonciation unilatérale en des termes qui
méritent d’être reproduits : « les Puissances reconnaissent
que c’est un principe essentiel du droit des gens qu’aucune
d’elles ne peut se délier des engagements d’un traité, ni en
modifier les stipulations qu’à la suite de l’assentiment des
Parties contractantes. »
C’est la même solution, mais en la formulant d’une
manière infiniment moins solennelle, qu’adopte l’article 39
du projet d’articles selon lequel un traité qui ne contient
pas de disposition relative à sa terminaison et qui ne pré¬
voit pas qu’on puisse le dénoncer ou s’en retirer n’est pas
susceptible de renonciation ou de retrait à moins que le
caractère du traité, les circonstances dans lesquelles il a
été conclu ou les déclarations des parties n’indiquent que
la possibihté d’une dénonciation ou d’un retrait n’était
pas écartée.
Les travaux de la Commission du droit international ont
montré au sujet de cet article que les traités de caractère
normatif, véritables traités lois ne pouvaient pas être
dénoncés.

B. — Effets de la guerre sur les traités.

268. — Évolution des solutions. —^,On peut se deman¬


der si la guerre survenant entre des États hés entre eux
par un traité, celui-ci est ipso facto abrogé. Ce problème
est connu sous le nom d’effet abrogatoire de la guerre sur
les traités.
Trois types de solutions peuvent être apportés. La pre¬
mière est négative et consiste à dire que la guerre n’abroge
LES RÈGLES DE DROIT 253

rien. La seconde est positive et aboutit à reconnaître


un effet abrogatoire absolu. La troisième solution est de
caractère mixte, elle distingue suivant les traités.
Pendant de longues années la première solution a été
admise par la pratique internationale.
Ensuite une distinction a été opérée, apparue dans la
jurisprudence des tribunaux américains, qui limitait
l’effet abrogatoire à celles des conventions ou des dispo¬
sitions qui concernaient autre chose que les intérêts pri¬
vés.
Une tentative de renversement même de la règle a été
faite au début du xx® siècle, sous l’impulsion de N. Politis.
Mais elle a échoué et, au lendemain de la première guerre
mondiale, la règle de l’effet abrogatoire a été reconnue
par les traités de paix de 1919. Elle devait être reprise
par les traités de 1947.
Les jurisprudences nationales, en dehors des tribunaux
américains, conservent la solution de l’abrogation.

269. — Hypothèses de maintien des traités. — Dans


un certain nombre de cas toutefois la pratique internatio¬
nale maintient, malgré la survenance de l’état de guerre,
les effets des traités.
C’est le cas tout d’abord des traités conclus en vue de
l’état de guerre lui-même : conduite des hostilités, situa¬
tion des prisonniers, fonctionnement de la Croix-rouge, etc.
Il en va de même des traités dans lesquels existe une
disposition foiTneUe prévoyant que la guerre ne les abro¬
gera pas.
On admet de même que les traités qui consacrent des
cessions territoriales ne sont pas abrogés par la guerre
et doivent être ultérieurement modifiés.
Enfin un problème particulier est posé par les traités
multilatéraux. Les effets sont maintenus entre les Etats
qui ne sont pas en guerre. Pour ceux qui sont en guerre
les effets sont simplement suspendus, et ils reprennent
ensuite.

270. — Attitude des tribunaux. — Les jurispru¬


dences nationales, en dehors des tribunaux américains,
conservent la solution de l’abrogation. La jurisprudence
française a, pendant quelques années, entre 1943 et 1948,
admis une distinction. Les dispositions relatives au droit
privé auraient échappé à l’effet abrogatoire. Mais cette
solution a été abandonnée en France par un arrêt de la
254 LA VIE INTERNATIONALE

Cour de cassation de 1949 {Rec. Sirey, I, 161, note


Niboyet).

C. — La clause « rébus sic stantibus ».

271. — Définition. — Partant de l’idée que le traité


international formule une règle de droit à partir d’une
réalité sociale déterminée, certains théoriciens soutiennent
que lorsque la réalité sociale se modifie, le traité devient
caduc.
Pour justifier de cette concordance du traité avec la
réalité sociale, ils ont imaginé qu’une clause intitulée
« clause rebus sic stantibus » serait sous-entendue dans
tous les traités, et permettrait donc la dénonciation du
traité en cas de changement de circonstances. On remar¬
quera combien cette formule est dangereuse, car les
circonstances changent nécessairement. La prétendue
existence de la clause, loin de se borner à assurer la plas¬
ticité du traité, contribue à affaibhr la portée de toute
réglementation internationale et à introduire une incer¬
titude juridique dangereuse. La théorie précitée pour¬
rait fournir d’ailleurs une base à la dénonciation unila¬
térale des traités. Une telle solution ne peut être
admise.
La Commission du Droit international, dans son projet
d’articles a abordé le problème et prévu des dispositions
extrêmement prudentes, dans l’article 44 intitrdé change¬
ment fondamental de circonstances.
Selon ce texte, un changement des circonstances qui
existaient lors de la conclusion du traité ne saurait être
invoqué comme raison pour mettre fin au traité ou cesser
d’y être partie que dans les conditions mêmes prévues par
le texte.
La théorie du changement de circonstances ne peut être
invoquée à l’égard d’un traité qui fixe une frontière, ce
qui exclut donc le « révisionnisme ».
Le changement que l’on pourrait invoquer doit être
fondamental et il ne peut être avancé que si l’existence du
fait ou de la situation qui ont changé constituait une base
essentielle du consentement des parties au traité ou encore
si ce changement est de nature à modifier, sous un rap¬
port essentiel, le caractère des obhgations assumées dans
le traité.
On voit ainsi que la clause rebus sic stantibus n’est aucu-
LES RÈGLES DE DROIT 255

nement admise comme principe général en matière de


traité et que, dans les cas très particuliers où elle pourrait
être invoquée, eUe comporte une série de limites

272. — Pratique internationale et changement de cir¬


constances. — Il demeure évident que si la réalité sociale
a changé très nettement, le traité sera difficilement
applicable et revêtira un caractère artificiel. C’est dire
donc que les Parties contractantes devront tenir compte
de ces changements sociaux et tenter de modifier, par
voie conventionnelle, le traité antérieur.
Le changement des circonstances peut être ainsi légi¬
timement invoqué pour mettre fin à un traité, avec l’accord
des autres parties.
Les exemples récents concernant l’abrogation des
traités de protectorat français en Afrique du Nord con¬
sacrent cette formule.
La déclaration commune franco-marocaine du 2 mars
1956 indique par exemple : « Le traité de Fès du 30 mars
1912 ne correspond plus désormais aux nécessités de la
vie moderne et ne peut plus régir les rapports franco-
marocains. » De la même manière le protocole franco-
tunisien du 22 mars 1956 déclare : « Le traité du
12 mai 1881 ne peut plus régir les rapports franco-tuni¬
siens. »
Il convient de remarquer qu’on se trouve ici sur le
terrain de la révision des traités et que le changement
de circonstances est tout simplement la cause matérielle
d’une transformation de la règle de droit.

D. — La révision des traités.

273. — Les données du problème. — La question de


la révision des traités se pose d’une manière très fréquente
sur le plan politique. Dans la mesure où, pendant des
siècles, l’ordre pohtique international a été la résultante
de traités conclus au lendemain de guerres, tout change¬
ment dans l’équihbre des forces en présence posait la
question de la révision des traités.
Les États vaincus, quelques années après leur défaite,
demandaient la révision des traités, adoptaient au moins
une attitude révisionniste. La France, après 1815,
demanda la révision, et le futur Napoléon III utilisa le
révisionnisme dans sa campagne électorale pour la prési-
256 LA VIE INTERNATIONALE

dence de la Seconde République. L’Allemagne après 1919,


et à sa suite la Hongrie, la Bulgarie demandèrent la révi¬
sion des traités.
La difficulté de la révision se pose sur le plan de la tech¬
nique juridique. En effet, si les Etats signataires acceptent
la formule de la révision, il suffira de réunir une confé¬
rence et d’élaborer un nouveau traité remplaçant le
premier.
Mais si les États signataires n’acceptent pas la révision
par voie conventionnelle, on aboutit à une impasse.
Il convient de se demander alors si, à défaut de l’accord
des signataires, on ne pourrait réaliser en dehors d’eux
l’adaptation du traité à des conditions nouvelles par une
élaboration particulière de la règle de droit, en faisant
intervenir un juge, un arbitre ou un corps politique.
Une telle intervention paraît nécessaire si l’on veut éviter
le recours à la force.

274. — L’article 19 du Pacte de la S. D. N. — La


nécessité d’une révision pacifique des traités se fait
particulièrement sentir dans un monde international
organisé comme celui de la Société des Nations, par
exemple. Ce problème n’avait pas échappé aux rédac¬
teurs du Pacte. Mais la solution qu’ils ont donnée n’a
pas été très heureuse.
La vie internationale, à l’intérieur de la S. D. N., repo¬
sait sur deux principes opposés formulés par le Pacte.
Le premier, contenu dans l’article 10, était un principe
de stabilité politique, une reconnaissance du statu quo.
Les membres de la Société s’engageaient, aux termes de
ce texte, à respecter et maintenir contre toute agression
extérieure l’intégrité territoriale et l’indépendance poli¬
tique de tous les membres. L’article 19 au contraire
apparaissait comme une sorte de soupape de sûreté. Il
disposait : « L’Assemblée peut, de temps à autre, inviter
les membres de la Société à procéder à un nouvel examen
des traités devenus inapplicables, ainsi que des situa¬
tions internationales dont le maintien pourrait mettre
en péril la paix du monde. »
Cet article est demeuré en fait dépourvu d’appüca-
tion dans l’histoire même de la Société des Nations. On
notera qu’il concerne deux problèmes fort différents, celui
de la révision proprement dite, celui de l’examen des
situations internationales dangereuses pour la paix du
monde. La révision des traités est le problème de l’adap-
LES RÈGLES DE DROIT
257

tation de la règle de droit à la réalité sociale nouvelle.


Mais le problème des situations pouvant conduire à la
guerre ne se situe pas nécessairement sur le plan de la
révision. Il peut être un problème purement politique,
ou démographique, ou économique et n’être prévu ou
résolu par aucune règle de droit.
Sur le plan de la procédure, l’article 19 comportait des
lacunes importantes. En effet l’Assemblée n’avait d’autre
pouvoir que de signaler en quelque sorte un danger, un
état d’alerte. C’est aux États eux-mêmes que l’article 19
laissait le soin de résoudre le problème. La question n’était
pas d ailleurs résolue de savoir selon quelles règles pra¬
tiques de majorité ou d’unanimité l’Assemblée devait
statuer pour inviter les États à se saisir de l’un ou l’autre
des problèmes visés par l’article lui-même.

275. — Le silence de la Charte des Nations Unies.


— Le problème de la révision des traités n’est pas envi¬
sagé dans la Charte elle-même. Au contraire, la question
de situations menaçant le maintien de la paix et de la
sécimté internationale est posée dans les articles 34,35,36.
L’intervention prévue est celle du Conseil de sécurité,
gardien, aux termes de la Charte, de la paix du monde.
Les situations à propos desquelles le Conseil peut inter¬
venir sont visées à l’article 34, il s’agit de situations qui
pourraient entraîner un désaccord entre nations ou engen¬
drer un différend.
Mais le problème même de la révision des traités n’est
pas abordé. Cette lacune est d’autant plus regrettable
que l’Organisation condamne formellement le recours à
la guerre (article 2, § 4), à la différence de la S. D. N., et
que donc la révision doit juridiquement s’opérer selon
des procédures pacifiques qu’il eût été sage et utile d’orga¬
niser malgré la difficulté de la solution à trouver.

Section IL — La coutume internationale.

276. ~ Définition. — L’article 38 du Statut de la Cour


internationale de justice, reprenant exactement le texte
correspondant du Statut de la Cour permanente de
justice internationale, déclare que cette juridiction
applique « la coutume internationale comme preuve d’une
pratique générale acceptée comme étant le droit ».
9. - INSTITUTIONS INTERNATIONALES.
258 LA VIE INTERNATIONALE

On trouve là les éléments d’une définition de la coutume.


Il s’agit d’une source du droit d’un caractère particulier,
et qui est la conséquence directe de la vie sociale.
La coutume peut être définie comme un ensemble
d'usages ou de pratiques reconnu par les États comme
constituant à un moment donné une règle juridique.
EUe apparaît alors comme pouvant s’analyser en deux
séries d’éléments ; des éléments matériels, des éléments
psychologiques.

277. — Les éléments matériels. — La coutume coni-


porte la répétition d’un certain nombre d’actes accomplis
par l’État. Ces actes peuvent appartenir au domaine
interne. A ce titre apparaissent comme actes générateurs
d’une coutume des actes accomplis par le pouvoir exécutif,
ainsi des instructions gouvernementales diplomatiques
ou militaires; par le pouvoir législatif, ainsi les lois
internes; par le pouvoir juridictionnel, ainsi les décisions
des divers tribunaux. Ces divers actes sont de simples
faits, mais qui peuvent traduire l’attitude coutumière
de l’État. On peut également trouver comme actes
constitutifs d’une coutume internationale des actes
interétatiques, en particulier des traités qui apparaissent
comme constatant une règle juridique préexistante.

278. — L’élément psychologique. — La répétition


d’actes matériels ne suffit pas à créer une coutume. Il
faut que cette attitude de l’État apparaisse comme dictée
par la soumission à une règle juricüque.
Il faut, pour reprendre la formule de l’article 38 du
statut de la Cour internationale, qu’ü s’agisse d’une pra¬
tique acceptée comme étant le droit. On désigne parfois
cette acceptation par l’expression « opinio juris ». Dans
l’arrêt du Lotus, la Cour permanente a eu précisément à
montrer l’importance de cet élément psychologique. A
propos d’une attitude particuhère d’un État, d’une atti¬
tude d’abstention, elle a bien précisé : « C’est seulement si
l’abstention était motivée par la conscience d’un devoir de
s’abstenir que l’on pourrait parler de coutume internationale.y>
Plus récemment un arrêt du 20 novembre 1950, rendu
par la Cour internationale de justice dans une affaire de
droit d’asile, (Haya de la Torre) a insisté également sur ce
caractère particuHer et déclaré : « La partie qui invoque
une coutume doit prouver qu’elle s’est constituée de telle
manière qu’elle est devenue obligatoire pour l’autre partie. »
LES RÈGLES DE DROIT
259

L’usage invoqué doit traduire l’existence d’un droit


pour un État, l’existence d’un devoir pour un autre.
Dans l’affaire du droit de passage sur le territoire
indien la Cour, dans son arrêt du 12 avril i960, a relevé
une « pratique constante et uniforme de libre passage entre
Damao et les enclaves » et elle a considéré « que cette pra¬
tique a été acceptée par les Parties comme étant le droit et a
donné naissance à un droit et à une obligation correspon¬
dants ». Elle a également, dans le même arrêt déclaré
« La Cour ne voit pas de raison pour qu’une pratique pro¬
longée et continue entre deux États, pratique acceptée par
eux comme régissant leurs rapports, ne soit pas à la base de
droits et d’obligations réciproques entre ces deux États ».
Ainsi, cette notion d’élément psychologique, qui est
une condition nécessaire de la coutume, n’est pas sans
lien avec le consentement des États, comme fondement de
la coutume internationale.

279. — Le fondement de la coutume internationale.


— On peut donner deux solutions opposées au problème
du fondement de la coutume internationale. La première
dégage un fondement objectiviste. Selon elle la coutume
puise sa force dans les nécessités de la vie sociale, elle
naît des exigences de la vie en commun des États. C’est
une théorie sociologique et presque biologique.
La seconde évolution invoque au contraire un fonde¬
ment volontariste. Elle est la plus ancienne et a été pré¬
sentée par Grotius au xvii® siècle, mais elle a été reprise
par une série d’auteurs plus modernes, en particulier
les positivistes et notamment l’Allemand Triepel. Cette
solution est celle adoptée par la Cour permanente dans
l’affaire du Lotus dans une formule célèbre : « Les règles de
droit liant les États procèdent de la volonté de ceux-ci mani¬
festée dans des conventions ou dans des usages acceptés
généralement comme des principes de droit. »
Il convient de remarquer que la formule volontariste
ne permet pas d’expliquer comment une coutume inter¬
nationale s'oppose à un État nouvellement créé. Par
ailleurs elle tendrait à conférer un caractère statique à
la coutume, alors que son caractère évolutif et sa plasti¬
cité sont certains.

280. — Généralité de la coutume. — L’article 38 du


statut de la Cour qualifie la coutume de pratique générale.
200 LA VIE INTERNATIONALE

Le problème de la généralité de coutume se trouve ainsi


soulevé,
La notion de coutume générale se présente à deux
points de vue. Une première notion est celle de pratique
générale. La coutume générale est une pratique constante
et uniforme. Mais cette exigence de la constance de l’usage,
invoquée parfois dans les décisions juridictionnelles, ne
doit pas être entendue trop rigoureusement car les cou¬
tumes peuvent parfois changer et une nouvelle coutume,
contraire à une ancienne, ne pourrait autrement jamais
apparaître.
Une seconde conception de la généralité est d’ordre
géographique. De ce point de vue on oppose les coutumes
universelles et les coutumes régionales ou locales. La Cour
internationale de justice a étudié ce problème de la cou¬
tume régionale ou locale dans deux arrêts récents. Dans
l’affaire Haya de la Torre, en 1950, il s’agissait de l’Amé¬
rique latine et d’une prétendue coutume en matière de
droit d’asile. L’autre exemple est celui d’une coutume
régionale quant à la déhmitation de la mer territoriale
dans les pays Scandinaves. La Cour a estimé que la règle
d’une largeur de 10 milles marins a été adoptée par cer¬
tains États mais que d’autres ont adopté une limite difié-
rente, et l’arrêt du 18 décembre 1951 dans l’affaire des
pêcheries norvégiennes a estimé que la règle des 10 milles
n’avait pas acquis l’autorité d'une règle générale de droit
international.

281. — Rapports de la coutume et du traité. — On


a quelquefois considéré que la coutume étant présentée
dans l’article 38 du statut de la Cour permanente, puis
de la Cour internationale, comme la seconde source du
droit après le traité, cette présentation devait s’interpré¬
ter comme signifiant le caractère second de la coutume
par rapport au traité. On ne saurait tirer pareille déduc¬
tion. Le traité et la coutume sont indépendants l’un par
rapport à l’autre.
Il est des traités internationaux qui abrogent des cou¬
tumes. La déclaration de Vienne de 1815 a abrogé la cou¬
tume de la tolérance de la traite négrière. Le Pacte de
Paris du 27 août 1928 a abrogé la règle coutumière de la
compétence de guerre reconnue antérieurement au profit
de l’État souverain.
Mais, très symétriquement, on peut citer des exemples
de coutumes abrogeant des traités. Le droit de la guerre
LES RÈGLES DE DROIT 261

fournit des hypothèses d’apphcation. Le bombardement


aérien est en contradiction avec certaines dispositions des
conventions de La Haye. La guerre sous-marine a été
conduite au cours de la seconde ^erre mondiale en contra¬
diction avec la réglementation internationale étabhe par
le traité naval de Londres du 22 avril 1930 (partie IV)
et le Protocole de Londres du 6 novembre 1936.
Souvent d’ailleurs les rapports de la coutume et du
traité ne font pas apparaître entre ces deux sources du
droit international une hiérarchie ou un conflit de règles
juridiques, mais au contraire une convergence. De nom¬
breux traités se bornent à fixer d’une manière précise
des coutumes existantes. Le traité n’a alors qu’un effet en
quelque sorte déclaratif, il constate une coutume. Ce
mécanisme prend place dans ce qu’on appelle la codifica¬
tion du droit international.

282. — La codification. — Les droits internes qui ne


sont pas essentiellement coutumiers ont tous connu, à
un stade de leur évolution, une codification des coutumes.
Le Code civil français de 1804, que l’on peut considérer
comme un exemple très pertinent de droit écrit, a, sur
divers points, seulement codifié des coutumes antérieures.
Un tel phénomène se constate aussi en droit interna¬
tional. Les conférences de La Haye de 1899 et de 1907
(v. supra, n® 41) ont, dans le domaine de la guerre,
essentiellement codifié des coutumes. Auparavant, le
traité de Paris de 1856, qui a aboh la course maritime, a
codifié une règle coutumière préexistante.
L’œuvre de codification internationale demeure très
fragmentaire. Les tentatives faites dans le cadre de la
S. D. N., marquées essentiellement par la réunion d’une
conférence de codification à La Haye en 1930, ont échoué.
L’œuvre a été reprise dans le cadre de l’O. N. U.

283. — L’O. N. U. et la codification. — L’article 13,


§ I, de la Charte dans son sous-ahnéa prévoit que l’Assem¬
blée générale provoque des études et fait des recomman¬
dations en vue d’encourager le développement progressif
du droit international et sa codification.
jo Pour donner effet à ces dispositions, l’Assemblée géné¬
rale a créé par sa résolution n^ 174 du 21 novembre 1947
une Commission du droit international, composée de
jurisconsultes possédant une compétence reconnue et
dont l’ensemble assure la représentation des formes prin-
202 LA VIE INTERNATIONALE

cipales de civilisation et des principaux systèmes de


droit. Le nombre des membres de la Commission, initiale¬
ment fixé à 15 a été porté à 25 par ime résolution de
l'Assemblée du 6 novembre 1961 (1647, XVI).
La codification est préparée par la commission sur des
sujets qui lui paraissent appropriés. La commission élabore
un projet et le soumet aux gouvernements pour qu’Us
lui fassent connaître leurs observations, elle adresse ensuite
un rapport à l’Assemblée générale et peut lui proposer
tantôt d’adopter son rapport dans une résolution, tantôt
de recommander le projet aux membres en vue de la
conclusion d’une convention, tantôt de convoquer ime
conférence pour conclure une convention. La Commission
du droit international a accompli depuis plusieurs années
une œuvre considérable.
Ses travaux ont ainsi abouti à la signature des diverses
conventions relatives au droit de la mer, signées à Genève
en 1958 et en 1961. Ces conventions sont entrées en
vigueur plus ou moins rapidement : haute mer 30 sep¬
tembre 1962 — plateau continental 30 juin 1964 — mer
territoriale et zone contiguë 10 septembre 1964 — res¬
sources biologiques de la mer 20 mars 1966.
Dans un autre domaine les travaux de la Commission
ont abouti à la signature de la Convention de Vienne
sur les immunités diplomatiques, entrée en vigueur en
avril 1964 et à la signature d’une autre Convention de
Vienne, en 1962, sur les relations consulaires, entrée en
vigueur en mars 1967.
Son activité générale a été présentée par le Professeur
Ago, son président en 1964, de la manière suivante :
La Commission s’attache à la révision, à la clarification et
à la codification des aspects principaux du droit interna¬
tional, où les principes doivent être reformulés sur la hase de
l’accord le plus étendu entre les États et reposer sur des fon¬
dements rationnels et scientifiques.
2° Plus récemment, par une résolution 2205 (XXI) du
28 décembre 1966 l’Assemblée générale a créé une
Commission des Nations Unies pour le droit commercial
international composée de 29 membres. Cet organisme
est destiné à favoriser le développement du commerce
international et a pour but lointain l’unification progres¬
sive du droit commercial international en facilitant l’adop¬
tion de conventions internationales, de lois uniformes,
de contrats types, de conditions générales de vente,
d’une terminologie commerciale uniforme...
LES RÈGLES DE DROIT 263

Section III, Les principes généraux du droit,


les sources subsidiaires.

— Définition. — Le même article 38 du statut de


la Cour indique que cette juridiction applique, comme
celle qm 1 a précédée, « les principes généraux de droit
reconnus par les nations civilisées ».
On a beaucoup discuté sur le sens de cette formule.
Il est certain qu’il s’agit de principes de droit. Cette
remarque conduit à exclure d’une part les principes de
caractère politique, tels que le principe des nationalités,
la doctrme de Monroe, etc., (v. infra, n^s 308 et s.), d’autre
part les principes dits de l’équité, encore que celle-ci
pmsse avoir sa place parfois dans les sentences interna¬
tionales.
si les principes dont ü s’agit sont des principes
juridiques, la question du moins se pose de savoir si ce
sont des principes de droit international ou des principes
de droit en général.

^*.,"7 de ces principes. — Les principes


dont ü s agit sont des principes de droit positif. Le droit
positif nest pas nécessairement le droit international,
ü peut s agir de principes de droit interne.
On peut citer comme principes généraux de droit recon¬
nus par les nations civilisées toute une série de règles,
j^nsi : le principe de la réparation du dommage c^sé]
le prmcipe de la bonne foi, le principe de l’interdiction dé
1 abus de droit, le principe du recours aux travaux pré-
paratoires pour éclairer un texte obscur.

^6* — Autres sources. — Il convient d’indiquer qu’à


côté des trois sources examinées ci-dessus, le dernier para-
graphe de l’article 38 place encore, mais cette fois comme
moyen auxiliaire de détermination de la règle de droit,
les décisions judiciaires, sous réserve de l’autorité de la
chose jugée, et la doctrine des pubhcistes les plus quahfiés.
Les décisions judiciaires dont il s’agit sont des déci¬
sions de juridictions internationales, car les décisions
nationales apparaissent comme des éléments de pur fait
qui peuvent intervenir dans le cadre de l’élaboration de
la règle coutumière.
Quant aux doctrines des pubhcistes, elles présentent
un aspect très particuher. La doctrine ne saurait appa-
264 LA VIE INTERNATIONALE

raître comme une véritable source créatrice du droit inter¬


national. L’indépendance intellectuelle de la doctrine
lui confère surtout un rôle critique. La doctrine ne saurait
être définie dans la mesure où chaque spéciahste du droit
international peut avoir sa propre conception du droit
international.
Depuis les moines espagnols du xiv® et du xv® siècle
en lesquels on veut voir quelquefois les pères du droit
des gens, les auteurs ont été très nombreux et une atti¬
tude d’ensemble ne saurait être dégagée.
Il convient toutefois de citer des travaux collectifs,
ceux des grandes sociétés scientifiques internationales,
comme par exemple l’Institut de droit international créé
à Gand en 1873, l’International Law Association créée
aussi en 1873 à Londres, et plus récemment l’American
Society of International Law créée à Washington en 1906,
ainsi que l’Institut américain de droit international créé
à Washington également en 1912. Il existe enfin depuis
1923 une Académie de droit international créée à La Haye
et qui organise chaque année une série de cours de droit
international.

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266 LA VIE INTERNATIONALE

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coutume en droit des gens d’après la jurisprudence de la
268 LA VIE INTERKATIONALE

C. P. J. I. Thèse Nancy, 1935; Basdevant (J.), Règles


générales du droit de la paix. R. C. A. D. I., 1936, t. IV,
p. 504-520; Kopelmanas (L.), Custom as a mean of the
création of international law. British Yearbook of interna¬
tional law, 1937; Guggenheim (P.), Les deux éléments de
la coutume en droit international. Mél. Scelle, p. 275 et s. ;
Kopelmanas (L.), La codification des coutumes du com¬
merce international dans le cadre des commissions régio¬
nales des Nations unies. A. F. D. L, 1955, p. 370-375;
Spiropoulos (J.), La codification du droit international par
l’O. N. U. Annuaire de l’A. A. A., 1958, p. 156-165; Gug¬
genheim (P.), L’origine de la notion de l’opinion juris sive
necessitatis comme deuxième élément de la coutume dans
l’histoire du droit des gens. Mél. Basdevant, p. 258-262;
Krylov (S.), Codification du droit international. Mél.
Basdevant, p. 300-314; Benar (G.) et Dehaussy (J.),
Sources du droit international : la coutume (Fasc. 13 a et
13 c). Jurisclasseur de droit international; Cohen-Jona¬
than (G.), La coutume locale. A. F. D. I., 1961, p. 119-140;
Su Y (E.), La coutume internationale comme fait de pro¬
duction juridique. Cours I. H. E. I., 1965.

III. — Les principes généraux du droit.

Scott (J.-B.), Le principe de l’égalité juridique dans


les rapports internationaux. R. C. A. D. L, 1932, vol. 42;
Ripert (G.), Les règles du droit civil applicables aux rap¬
ports internationaux. R. C. A. D. I., 1933, t. II;Ver-
DROSS (A. von). Les principes généraux du droit dans la
jurisprudence internationale. R. C. A. D. L, 1935, vol. 52;
Berlia (G.), Essai sur la clause de jugement en équité en
droit des gens. Thèse Paris, 1937; Bastid (S.), La jurispru¬
dence de la C. I. J. R. C. A. D. I., 1951 ; Bin Cheng,
General principles of law as applied hy international courts
and trihunals. Stevens, Londres, 1953; Schwarzen-
BERGER (G.), The fundamental principles of international
law. R. C. A. D. I., 1955, vol. 87; Reuter (P.), Le recours
de la Cour de Justice des Communautés européennes à des
principes généraux du droit. Mélanges Rohn, 1964;
SuY (E.), Contribution de la jurisprudence internationale
récente au développement du droit des gens. Rev. belge de
D. L, 1966, p. 68-93.
CHAPITRE IV

LES PRINCIPES POLITIQUES


RÉGISSANT LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

287. — Société internationale et principes politiques.


— La société internationale apparaît, on l’a vu, comme
une société constituée par l’ensemble des êtres humains
répartis en diverses collectivités composantes, générale¬
ment étatiques.
Les relations existant entre ces diverses sociétés sont
dominées par des règles juridiques et par des principes
politiques.
Le caractère politique des relations internationales
ne saurait être sous-estimé, surtout dans la mesure où
la société internationale dont il s’agit est considérée dans
son ensemble, en dehors de toute idée préalable d’organi¬
sation méthodique. Cette idée est apparue très récemment
en droit positif, et les tentatives doctrinales en ce domaine
ont été généralement dépourvues de tout caractère concret
et ne présentent qu’un intérêt très relatif sauf pour
l’histoire, intéressante certes, mais très particuüère, des
idées.
La politique internationale, comme toute action poh-
tique, est dominée par les faits et les contingences. Elle est
exposée après coup dans les essais historiques qui la
présentent, la schématisent, s’efforcent d’en reconstituer,
d’une manière parfois contestable, inexacte ou simpliste,
les ressorts et les aspects. Mais malgré ses à-coups, sa
discontinuité, son empirisme et le rôle qu’y jouent les
circonstances ou les hasards, on peut considérer que la
270 LA VIE iNTERNAtlONALE

politique internationale doit tenir compte d’un certain


nombre de principes qui ont été proclamés à plusieurs
reprises et qui, pour n’être pas toujours respectés, n’en
ont pas moins joué un certain rôle.
On peut ramener ces divers principes à trois, qui sont
d|une importance particulière et qui ont fourni les lignes
directrices de l’action politique des différents États.
On examinera ainsi successivement : le principe de
l’égalité des États, son corollaire ou principe de non-
intervention, enfin un troisième principe, celui de l’indé¬
pendance.

Section I. — Le principe d’égalité des États.

288, — Définition. — Bien que l’égalité des États se


manifeste essentiellement par des applications sur le plan
juridique, le principe de l’égalité des États est aussi un
principe politique. Il est indépendant en effet de toute
organisation juridique de la communauté internationale
et joue dans le cadre d’une société internationale généra¬
lement qualifiée de société interétatique et considérée
souvent comme une société anarchique.
Cette dernière formule est exagérée dans la mesure où,
en dehors d’une organisation systématique supposant
des organes juridiques pourvus d’une compétence propre,
la société internationale n’a pas toujours et sans cesse
été en proie au fléau de la guerre générale et où des insti¬
tutions internationales ont existé depuis des siècles.
Mais les relations internationales ont été, dans cette
société, en général peu denses. Précisément le principe
de l’égalité des États semblait aboutir à laisser à ces col¬
lectivités particulières la compétence la plus étendue.
Le principe de l’égahté des États a été mis en œuvre
sur le plan juridique. Il s’est manifesté tant sur le plan
diplomatique lui-même que sur le plan économique.
Ce sont ces deux aspects particuliers qui seront ici retenus.

§ I®'. — L’égsilité diplomatiqpie.

L’égalité diplomatique doit être examinée sous deux


traits : d’abord la manifestation du principe, ensuite ses
violations qui seront présentées sous la rubrique : Grands
et Petits États.
LES PRINCIPES POLITIQUES 271

A. — Les manifestations du principe.

On peut les dégager essentiellement dans deux


domaines :

a) Conférences et traités.

289. — La participation aux conférences internatio¬


nales. — La conférence internationale est une des insti¬
tutions les plus importantes du droit des gens à l’époque
où n’existent pas encore d’organisations internationales
de caractère permanent. Même aujourd’hui il arrive
fréquemment que des problèmes fondamentaux des rela¬
tions intemationedes soient réglés par des conférences
internationales ordinaires et non pas par les organes des
administrations internationales, mêmes ceux qui disposent
d’une compétence politique. On constate par exemple
que, malgré l’existence de l’O. N. U., de grands conflits
politiques actuels ont été confiés à des conférences
internationales, sans être, pour autant, toujours résolus.
La règle essentielle en matière de participation aux
conférences internationales est celle de l’égalité. Elle se
traduit par la formule : un État, une voix. En d’autres
termes, les États qui participent à la conférence le font
sur un pied d’égahté. Cela ne veut pas dire que dans les
débats tel État ne jouera pas un rôle plus important qu’un
autre en raison de sa position politique, de ses intérêts
particuliers ou du talent de ses représentants, mais le
moment du vote venu chaque État votera, chacun ayant
une voix. En outre la décision de la conférence, sous
réserve d’ailleurs de la ratification à intervenir, ne pourra
être prise qu’à l’unanimité.
C’est cette règle de l’égalité des États qui a fait échouer,
pendant longtemps, les tentatives d’organisation d’une
juridiction internationale de caractère permanent.
A la Conférence de La Haye de 1907 participaient
44 États. Le problème se posait de la composition de
la juridiction portant le nom de Cour permanente de
justice arbitrale. Il apparaissait impossible de la constituer
avec un juge par État, car le nombre de 44 était trop élevé.
Mais on ne put se mettre d’accord sur un principe de choix
d’un nombre moindre de juges. En vain imagina-t-on
des solutions ingénieuses de tirage au sort ou de membres
272 LA VIE INTERNATIONALE

permanents et de membres temporaires. Les petits États,


au nom desquels plaida avec éloquence le représentant
du Brésil M. Ruy Barbosa, s’opposèrent à toute formule
qui ne respecterait pas de la manière la plus stricte et la
plus formelle l’égalité absolue des États. Le projet de
Cour échoua ainsi.
Le même problème devait se présenter à nouveau
deux années plus tard, avec la Cour internationale des
Prises, en 1909.
La solution d’une juridiction permanente comportant
moins de juges que d’Ètats membres ne devait être acquise
que dans le cadre de la S. D. N., et d’ailleurs la présence
sur le siège d’un juge de la nationalité de l’État en cause
devait malgré tout être assurée.

290. — La signature au rang alphabétique. — La


règle de l’égalité des États apparaît aussi dans la pratique
internationale à propos du problème de la signature des
traités et conventions.
Lorsqu’il s’agit de traités bilatéraux on utilise la règle
de l’alternat, selon laquelle l’instrument remis par un
État au contractant nomme celui-ci le premier par cour¬
toisie. Mais lorsqu’il s’agit de traités plurilatéraux, les
États le signent successivement dans l’ordre alphabé¬
tique qui respecte le principe de l’égalité.
^ Il n’est dérogé à cette règle que pour les territoires qui
n'ont pas le statut d’État. Ainsi les Dominions britan¬
niques et l’Inde ont signé le traité de Versailles, mais
l’ont signé non pas à leur rang alphabétique mais en retrait
et à la suite de l’Empire britannique qui signa à leur
place.
L’usage alphabétique n’est pas retenu pour les repré¬
sentants diplomatiques. On sait que l’égahté des États
est ici respectée par la convention de Vienne et le Proto¬
cole d’Aix-la-Chapelle au moyen de la répartition des
agents en plusieurs classes.
L’usage alphabétique pose évidemment un problème
préalable, celui du choix de la langue utilisée.

291. — La langue diplomatique. — Ce problème a


déjà été évoqué à propos des traités (v. supra, n® 250).
L’égahté tend de nos jours à s’affirmer très nettement
par la multiplication des langues utihsées et surtout par
la règle que tous les textes, en diverses langues, font
également foi.
LES PRINCIPES POLITIQUES
273
b) Le problème du respect réciproque.

292. — L’État et son honneur. — Dans le cadre des


relations internationales générales, les États placent sur
le même plan que la notion d’intérêts vitaux la notion de
l’honneur national. Des navires de guerre qui se ren¬
contrent en haute mer échangent le salut, et des incidents
sanglants ont pu éclater aux xvii® et xviiie siècles au
sujet du salut à la mer.
Les insultes commises à l’encontre d’un État entraînent
une réparation. L’offense au drapeau allemand commise
en Chine lors de la révolte des Boxers a été réparée par
l’érection d’un monument expiatoire à Pékin et par l’envoi
d une mission^ à Berhn. La France a obtenu de la Cour
permanente d’arbitrage une réparation morale et symbo-
hque a propos des affaires de la Manouba et de la Carthage
au cours de la guerre italo-turque de 1912.
La conception moderne d’une responsabihté pénale
pouvant être encourue en cas de violation de la règle de
droit international, non seulement par les gouvernants
mais par l’Etat lui-même, constitue un abandon ou au
moins une hmite de la notion traditionnelle en matière
d’égahté.

B. — Grands et petits États.

293. —' Inégalité de fait des États. — Le principe


diplomatique de l’égalité des États est parfois apparu
comme contraire à la réalité sociale. En effet, on utilise
fréquemment dans les relations internationales la distinc¬
tif entre « petits États », « grandes Puissances » et
« États de moyenne importance ».
Le problème du « petit État » est particuhèrement
important à étudier. On doit remarquer tout d’abord que
la société internationale tend de plus en plus à se morceler.
Le phénomène de dislocation de la communauté interna¬
tionale en un nombre toujours plus élevé de collectivités
étatiques n’a cessé de s’amphfier depuis le début du
xix® siècle.
L’émiettement des ^ands empires, notamment par le
jeu du principe des nationahtés, a marqué le xix^ siècle et,
sur les ruines des Empires coloniaux disloqués ou transfor¬
més, le xx® siècle voit s’élever des États nouveaux ou
réapparaître des États qui retrouvent une souveraineté
274 LA VIE INTERNATIONALE

perdue. Il suffit de dresser la liste des États du monde en


1815, en 1856, en 1919 et actuellement pour s’apercevoir
de cet accroissement numérique. On peut dire que chaque
grand congrès international, depuis 1815 par exemple, a
créé de nouveaux États. Le phénomène apparu en Europe
s'étend actuellement au monde entier. Ces nouveaux États
sont généralement de petits États, au moins pendant la
période de début de leur création ou de leur résurrection.
Leur présence dans la communauté internationale donne
donc une actualité au problème du petit « État ».

294. — La notion de « petit État ». — Dans la société


internationale classique, la notion de « petit État » est
très vague et très imprécise. Dans la société internationale
dite anarchique, caractérisée par l’octroi à l’État souve¬
rain du droit de faire la guerre, on établissait un üen étroit
entre « petit État » et faibles forces mihtaires. Tenant
compte de l’existence des armées permanentes on pouvait
même dresser une sorte de tableau des États classés dans
l’ordre de leurs forces mihtaires. Mais ce classement est
simpliste. Si on veut tenir compte des inégahtés de fait
qui existent évidemment entre les États et faire tout de
même abstraction de l’aspect purement, mihtaire, on
s’aperçoit que la détermination du « petit État » est déli¬
cate et peut être même impossible. Le critère müitaire
ne peut plus, en tout cas, être retenu. Sur le plan juridique
d’abord, la notion de guerre tend à disparaître. Le Pacte
de Paris du 27 août 1928 contenait la renonciation des
États signataires à la guerre, en tant qu’instrument de
pohtique nationale. L’Organisation des Nations Unies,
qui groupe actuellement 122 membres, repose sur l’inter¬
diction du recours à la guerre. Enfin sur le plan technique
de l’armement on pourrait quahfier actuellement de
« petits États » tous ceux qui ne disposent pas d’armes
thermo-nucléaires et en particuher des diverses bombes
de ce type d’armement. Le problème se poserait à nou¬
veau du classement entre eux de ces divers États.

295. — Civilisation et « petit État ». — En abandon¬


nant le critère miütaire, on s’aperçoit combien il est diffi¬
cile de préciser la notion de « petit État ». Bien des États
quahfiés souvent de « petits » jouent au contraire un très
grand rôle dans la vie économique internationale, dans la
vie intellectueUe. Il existe d’ailleurs des domaines mul¬
tiples d’activité internationale, et tel État qui occupe
LES PRINCIPES POLITIQUES
275

une place prééminente dans l’un d’eux peut, au contraire,


occuper une place fort inférieure dans un autre domaine.
Cette « spécialisation internationale » n’est pas nouvelle.
Elle ^ est, par exemple, traditionnelle dans le domaine
de l’activité maritime, et il existe depuis longtemps
de grandes pmssances maritimes qui peuvent apparaître,
à d’autres points de vue, comme de petits États.
La notion couramment admise et reçue de « petit État »
est vague et inexacte. Il conviendrait de lui substituer
une notion tout à fait différente de poids ou plutôt de
a densité de civilisation ». Elle permettrait de dégager
une sorte de participation des divers États à la civilisa¬
tion humaine. On pourrait, pour dresser le tableau des
divers Etats, tenir compte d’éléments matériels tels que
le niveau de vie, les consommations diverses et d'éléments
intellectuels ou culturels ou de bien-être social. On s’aper¬
cevrait alors combien est fausse la notion de petit Etat
entendue selon les habitudes traditionnelles. Une série
de démocraties de l’Europe occidentale, qualifiées souvent
de petits Etats, occupent en réahté une place de tout pre¬
mier rang dans l’activité et la civüisation humaines.
On s’aperçoit, au bénéfice de ces remarques, que la
notion de « petit État » ne coïncide pas fatalement avec
la notion de « pays s^ous-développé », que souvent au con¬
traire de grands États peuvent être sous-développés.
Il est vrai qu’il existe dans certaines parties du monde
une identité entre « petit État » et « pays sous-développé »,
mais c’est un cas particulier.

296. — Politique intemationale et « petits États ».


— Il convient d’indiquer que pendant longtemps il n’a été
fait aux « petits États », dans le domaine de la politique
intemationale, qu’une place mineure. Ceci mérite d’être
souligné parce que le principe de l’égalité des États
semble proscrire la prise en considération d’une distinc¬
tion fondée sur une opposition entre « petits États » et
« grandes Puissances ».
La règle de l’unanimité qui existe dans les conférences
internationales semble précisément condamner cette dis¬
tinction et aboutir à faire jouer aux petits États exacte-
tement le même rôle qu’aux grandes Puissances. Mais
ces solennelles formules n’ont été, pendant longtemps,
qu’une trompeuse apparence.
Au XIX® siècle, siècle des congés et des conférences, le
rôle des « petits États » est mineur.
276 LA VIE INTERNATIONALE

Au congrès de Vienne, par exemple, l’acte final n’est


signé que par huit Puissances, soit les quatre grandes
Puissances coalisées victorieuses : Autriche, Grande-
Bretagne, Prusse, Russie, auxquelles s’ajoutent la France,
l’Espagne, la Suède et le Portugal. Mais le rôle principal
revient aux quatre Puissances, puis, sur l’insistance de
TaUeyrand, au collège des cinq constitué par l’addition
de la France. Si les huit Puissances signent l’acte final,
ce sont les Cinq qui ont réglé les questions territoriales
et constitué le comité de rédaction de l’acte final. Dans
le protocole du 22 septembre, les « quatre Grands » avaient
primitivement décidé de régler entre eux les questions
territoriales sous la seule réserve que les représentants
de la France et de l’Espagne seraient invités « à faire
connaître leurs opinions et leurs vœux ».
Au congrès de Berhn de 1878, seules apparaissent les
grandes Puissances. Évidemment la Roumanie, la Serbie,
le Monténégro ne sont pas, à la veille du congrès lui-même,
de véritables États, mais l’exclusion de la Grèce est
symptomatique.
Les solutions du xix® siècle se retrouvent au lendemain
de la première guerre mondiale. La Conférence de la
paix réserve un rôle majeur aux principales Puissances
alüées et associées qui vont intervenir au Conseil des Cinq,
à son multiple le Conseil des Dix, parfois même au Conseil
des Quatre, alors qu’un rôle moins important est dévolu
aux Puissances à intérêts limités.
Des formules analogues jouent pour l’élaboration des
traités de paix après la seconde guerre mondiale.
Quelquefois, pourtant, des États autres que les grandes
Puissances participent directement à l’élaboration des
grandes décisions internationales, ainsi au congrès de
Berhn de 1885 sur les questions africaines, ainsi en 1907
à la conférence d’Algésiras. Mais leur invitation s’exphque
pour des raisons particulières. Leur présence est néces¬
saire en raison des rivahtés mêmes des grandes Puis¬
sances entre ehes.
Cette solution d’un rôle en général mineur des « petits
États » tend aujourd’hui, en dehors de la hquidation
même de la seconde guerre mondiale, à être abandonnée.
Les organisations internationales actuelles, tout en lais¬
sant un rôle particuher à certaines Puissances, réservent
un rôle important à d’autres États. On constate donc une
différence sensible avec les formules du Concert européen.
Elle est rendue possible par l’existence d’un double col-
LES PRINCIPES POLITIQUES 277

lège : assemblée et conseil de la S. D. N., Assemblée géné¬


rale et Conseil de sécurité dans l’O. N. U.

§ 2. — L’égalité économique.

Une des applications du principe de l’égalité des États


peut être trouvée sur le plan économique, mais il convient
ici encore de distinguer les manifestations mêmes du
principe et ses violations de fait.

297. — L’ég^té de traitement. — Le principe de


l’égalité des États, et par conséquent de l’égalité de
traitement de leurs ressortissants, joue dans une série
d’espaces réglementés par le droit international et appe¬
lés parfois domaine international.
Le domaine d’élection de cette égalité est le domaine
maritime et le domaine fluvial international. Le régime
de la mer est un régime libéral du point de vue écono¬
mique, au moins en ce qui concerne la navigation sinon
la pêche. Les ports maritimes eux-mêmes obéissent à la
règle de l’égalité et les taxes perçues sont indépendantes
de la nationalité.
Les péages qui ont été perçus autrefois pour le passage
de certains détroits, par exemple ceux de la Baltique, ont
disparu et le traité de Copenhague du 14 mars 1857 ^
consacré cette abohtion.
En matière de fleuve international, l’égahté a été pro¬
gressivement proclamée et étabhe. Si la formule de l’acte
final du congrès de Vienne à propos du Rhin, relative à
la hberté « sous le rapport du commerce », réserve la navi¬
gation elle-même aux États riverains, l’égahté de traite¬
ment même sous l’angle de la navigation sera obtenue par
la suite. La navigation est libre sur le fleuve international.
L’égahté de traitement règne sous la seule exception de
la réserve du cabotage et peut-être celle du remorquage
(arrêt de la Cour permanente du 12 décembre 1934,
affaire Oscar Chinn).
En dehors des domaines maritimes et des fleuves inter¬
nationaux, sur la terre ferme en particuher, l’égahté de
traitement toutefois n’existe pas, sauf disposition conven¬
tionnelle contraire.
Les conventions étabhssant l’égahté de traitement,
instituant donc un régime de hbre concurrence écono¬
mique, sont assez rares. On peut en citer quelques
278 LA VIE INTERNATIONALE

exemples : la conférence de Berlin de 1885 a établi le prin¬


cipe de la liberté économique dans le bassin du Congo;
la conférence d'Algésiras de 1906 a proclamé un principe
analogue pour le Maroc; enfin l’archipel du Spitzberg est
dominé par le principe de la liberté économique depuis
la convention du 9 février 1920.
Le régime des mandats, tel qu’il avait été établi par
le Pacte de la S. D. N., assurait aux divers membres de la
Société des conditions d’égalité pour les échanges et le
commerce, au moins pour les mandats A et B (v. supra,
n° 165). L’article 76 de la Charte des Nations unies, à
propos du régime international de tutelle, indique que
l’une des fins de ce régime est d’assurer l’égahté de traite¬
ment dans le domaine social, économique et commercial,
à tous les membres de l’organisation et à leurs ressortis¬
sants (v. supra, n® 172).

298. — La théorie du droit au commerce. — Le prin¬


cipe de l’égalité économique peut aboutir à des consé¬
quences inégahtaires. Cette situation, d’apparence para¬
doxale, a existé dans le cadre de ce qu’on a pu appeler
les traités inégaux.
Les États occidentaux ont proclamé au cours du xix®
siècle le principe de l’ouverture de tous les pays au com¬
merce international. Cette formule était destinée à pro¬
curer aux Puissances industrielles de l’Europe et ensuite
aux États-Unis des débouchés.
Le champ d’application de ce principe a été, au cours du
XIX® siècle, l’Asie. Les Puissances ont exigé l’ouverture des
pays asiatiques au commerce international, c’est-à-dire
occidental. Une règle du droit international de l’époque
industrielle du xix® siècle a été ainsi posée, selon laquelle un
État ne pouvait se fermer au commerce. C’est sous la pres¬
sion politique et parfois militaire qu’un tel principe, d’appa¬
rence égalitaire et libérale, a été imposé à la Chine et au
Japon. Si l’ouverture du Japon au commerce occidental s’est
faite sans grands heurts au lendemain de la démonstration
navale du commodore Perry dans la baie de Yokohama en
1853, l’ouverture de la Chine a soulevé plus de difi&cultés. La
Grande-Bretagne, au lendemain de la guerre dite de l’opium,
a obtenu le traité de Nankin de 1842 qui ouvrait quelques
ports au commerce britannique et, par la suite, les fleuves
chinois ont été ouverts au commerce. D’autres traités ana¬
logues ont été conclus, ainsi en 1844 le traité de Wanghia
avec les États-Unis, le traité de Whampoa avec la France,
ainsi en 1847 avec la Suède-Norvège.
Le principe de l’égalité économique, avec son apparence
LES PRINCIPES POLITIQUES 279

bilatérale, a été utilisé en Asie comme un instrument de


domination économique. Il a permis, après l’ouverture
des États asiatiques, l’installation d’entreprises privées,
l’octroi de concessions. Ce régime a pris parfois l’aspect
d'une exploitation économique assez lourde. Il s’est de
nos jours transformé avec la notion d’assistance écono¬
mique et technique (v. infra).

^ 299. — Le principe de l’égalité relative ou de l’inéga"


lité compensatrice. — Le principe de l’égalité n’est pas,
malgré les apparences, nécessairement protecteur pour
les Etats dont les économies sont fragiles. Ce danger est
apparu nettement aux représentants des pays en voie de
développement lors de la réunion de la Conférence des
Nations unies sur le commerce et le développement qui
s’est tenue à Genève du 23 mars au 16 juin 1964.
Ainsi le problème de l’égalité a été traité d’une manière
particulière dans l’acte final de la conférence qui comporte
l’adoption de quinze principes généraux et de divers prin¬
cipes particuliers.
Si le premier principe affirme d’une manière classique
« le principe de l’égaJité souveraine entre les États », le
huitième principe est plus réaliste. Il indique en effet que
les échanges commerciaux devraient se faire dans l’intérêt
réciproque des co-échangistes, sur la base de la clause de la
nation la plus favorisée et ne comporter aucune mesure
nuisible aux intérêts commerciaux des autres pays.
Mais les formules suivantes constituent une véritable
théorie de l’inégalité protectrice ou compensatrice : Les
pays développés devraient toutefois accorder des concessions
à tous les pays en voie de développement, faire bénéficier ces
pays de toutes les concessions qu’ils s’accordent entre eux et
lorsqu’ils leur accordent ces concessions ou d’autres ne pas
exiger d’eux la réciprocité. De nouvelles préférences tant
tarifaires que non tarifaires devraient être accordées à
l’ensemble des pays en voie de développement et ces préférences
ne devraient pas être étendues aux pays développés. Les pays
en voie de développement ne seront pas tenus d’étendre aux
pays développés les préférences qu’ils s’accordent entre eux.
Ces formulations de l’Acte final ont une importance
particulière, elles correspondent à des préoccupations qui
étaient apparues dans les réunions préparatoires et les
conférences tenues avant Genève par les pays en voie de
développement.
28o LA VIE INTERNATIONALE

Section II. — Le principe de non-intervention.

300. — Généralités. — Le principe de non-intervention


est un corollaire du principe d’égalité. Les collectivités
étatiques étant égales entre elles, il existe un principe
de respect réciproque des pouvoirs de chaque État.
Mais ce principe est essentiellement d'ordre politique.
ce titre il est d’une application pratique fort difficile.
L’histoire des relations internationales montre que les
h5q)othèses d’intervention sont beaucoup plus fréquentes
que les hypothèses de non-intervention.
Parfois le principe se renverse lui-même et est appliqué
comme signifiant tout à la fois la non-intervention de
certains Etats et l’intervention d’autres.
Un exemple de cette confusion est apparu avec la der¬
nière guerre civile d’Espagne (1935-1939). On assista
dès le début à une intervention de l’Allemagne et de l’Italie
en faveur des insurgés nationalistes et, au contraire,
L’U. R. S. S. intervint en faveur du gouvernement
répubhcain. Pour éviter une extension et une intemationa-
hsation du conflit, le Gouvernement français fit adopter
un régime de non-intervention auquel adhérèrent de nom¬
breux États et qui commença à fonctionner à partir de
septembre 1936. Les obhgations qui pesaient sur les États
ou leurs ressortissants ne furent pas toujours respectées
d’ailleurs.
Un autre exemple de confusion apparaît avec la doctrine
de Monroe, il sera examiné plus loin (v. infra, nos 308 à
311).

§ — Les h3rpotlièses d’intervention.

On peut, pour la commodité de l’exposition, les classer


schématiquement en trois catégories : les interventions
idéologiques, les interventions financières, les interven¬
tions de police internationale.

301. — Les interventions idéologiques. — Il est des


régimes pohtiques qui reposent sur des conceptions idéo-
logiques dont la portée peut dépasser les frontières d’un
État. Il y a intervention de caractère poütique, ou plus
exactement idéologique, lorsqu’un État ou plusieurs
tendent à imposer à d’autres collectivités un régime poli-
LES PRINCIPES POLITIQUES 28l

tique propre ou une forme de gouvernement ou une


conception du monde.
Les exemples de telles interventions sont nombreux.
Une première série d’exemples est fournie par les gouverne¬
ments institués au lendemain d’une révolution. Un gouver¬
nement révolutionnaire, doté d’une grande vitalité, peut
tendre à entraîner d'autres peuples dans la voie de la
Révolution.
Cet aspect apparaît très nettement dans la politique de
la Révolution française telle qu’elle est proclamée dans le
décret du 19 novembre 1792 par lequel « La Convention
Nationale déclare, au nom de la Nation française, qu’elle
accordera fraternité et secours à tous les peuples qui vou¬
dront recouvrer leur liberté ». Cette déclaration était à
vrai dire une riposte au manifeste de Brunswick du 25 juil¬
let 1792, qui lui-même constituait une intervention des
princes allemands dans les affaires intérieures de la
France.
D’autres formules d’intervention de caractère révolu¬
tionnaire sont apparues après la Révolution soviétique
de 1917. L’activité du Komintem, puis après 1947 du
Kominform, les directives données aux divers partis
communistes constitués dans d’autres États constituent
des hypothèses d’intervention qui ont entraîné parfois
des crises dans les relations internationales.
L’Allemagne nationale-sociaüste, dans un domaine
tout différent, a pratiqué des pohtiques d’intervention
particuhèrement brutales, notamment à l’égard de
l’Autriche et poussée jusqu'au terme de l’annexion en
1938, et à l’égard de la Tchécoslovaquie par le soutien
accordé aux Allemands de la région des monts Sudètes,
qui aboutit à créer une dangereuse situation internatio¬
nale à laquelle le compromis de Munich devait apporter
en octobre 1938 une lamentable solution.
Aux interventions subversives tendant à changer les
gouvernements peuvent être opposées les interventions
tendant au contraire à maintenir le statu quo.
L’exemple le plus net est celui fourni par la Sainte-
AUiance, fondée sur le principe de la légitimité monar¬
chique. Dans la péninsule itahenne en 1822, l’année
suivante en Espagne, la Sainte-AUiance pratique l’inter¬
vention pour consohder le pouvoir chancelant de certains
monarques. L’expédition française en Espagne en 1823
apparaît, à ce titre, comme une sorte d’opération de
maintien de l’ordre monarchique dans laquelle l’armée
282 LA VIE INTERNATIONALE

française agit comme un corps de gendarmerie de la Sainte-


Alliance.

302. — Les interventions financières. — Les interven¬


tions financières sont apparues dans les relations inter¬
nationales à partir de la deuxième moitié du xix® siècle.
Elles ont trouvé leur fondement dans la protection que
les Etats ont accordée à certains de leurs ressortissants
qui se heurtaient à l’insolvabilité ou au mauvais vouloir
d autres Etats à qui ils avaient prêté des capitaux.
L’intervention financière trouve donc sa cause Hans
le développement de l’épargne dans les pays industriels,
notamment de l’Europe occidentale, et dans les pla¬
cements massifs effectués à l’étranger en raison des inté¬
rêts élevés consentis par certains gouvernements et qui
sont très largement supérieurs au taux moyen de l’Eu¬
rope, qui n’est que de l’ordre de 3 %.
Mais ces prêteurs attirés par le taux élevé de l’intérêt
ont vu souvent les gouvernements débiteurs ne plus pou¬
voir payer les intérêts. Ils ont alors sollicité l’intervention
et l’appui de leurs gouvernements. L’expansion financière
de caractère privé pouvait ainsi, mais non nécessairement,
conduire sur le plan de la politique internationale à l’inter¬
vention ou immixtion financière.
, Ces interventions ont abouti à l’institution dans les
États débiteurs de contrôles financiers internationaux.
Mais ces contrôles n’ont pas été établis partout de la
même manière. Les uns sont demeurés purement finan¬
ciers et de caractère parfois privé. D’autres se sont rapi¬
dement transformés en contrôles politiques. Certains
ont été immédiatement politiques et des problèmes
particuliers ont été posés par quelques petits États de
l’Amérique centrale.

303. — Les contrôles financiers dans le inonde méditer»


ranéen. — Si l’on excepte la Tunisie pour laquelle le
contrôle financier ne fut qu’une étape vers le contrôle
politique du protectorat français établi en 1881, trois pays
méditerranéens ont été soumis à des contrôles financiers
à la suite de leur impossibilité à payer les intérêts des
porteurs étrangers de leurs emprunts d’Êtat, ce sont la
Grèce, la Turquie et rÉg5q)te.
Les modalités des solutions de ces contrôles ont été
fort différentes.
Pour la Grèce la solution adoptée fut celle d’une Com-
LES PRINCIPES POLITIQUES 283

mission internationale de caractère intergouvememental,


composée des représentants de six Puissances (Allemagne,
Autriche-Hongrie, France, Italie, Grande-Bretagne, Rus¬
sie!, chargée d’établir les règles de gestion de la dette
hellénique et qui fonctionna à partir de 1897.
En ce qui concerne la Turquie, au contraire, l’interven¬
tion des Puissances qui se manifeste au congrès de Berlin
de 1878 demeure très indirecte. L’administration de la
dette pubhque ottomane, la remise en ordre de la gestion
financière de la Turquie est confiée aux représentants
des porteurs de titres. Elle conserve donc un caractère
capitaliste privé.
Pour l’Égypte, les prodigalités du Khédive Ismaïï
acculent le pays à la banqueroute. Il est institué ulté¬
rieurement une Commission internationale de la dette
dont les membres sont nommés par le Khédive sur pro¬
position des Puissances qui, à partir de 1885, sont au
nombre de six, comme pour la dette hellénique. D’autres
organisations internationales gèrent d’ailleurs les chemins
de fer, le port d’Alexandrie, les télégraphes. Des rivalités
devaient se faire jour dans le cadre de cette intervention
financière, entre la France et la Grande-Bretagne, et durer
jusqu’à l’Entente cordiale de 1904 qui consacrait une
transformation du contrôle antérieur en raison de la
main-mise politique britannique.

304. — L’Amérique centrale. — Les emprunts con¬


tractés par plusieurs États de l’Amérique centrale comme
la République dominicaine, le Honduras, le Nicaragua
et Haïti ont donné naissance, à la suite de difficultés
financières, à des contrôles exercés par le Gouvernement
des États-Unis. Les conventions du 7 février 1907 pour
Saint-Domingue, du 10 janvier 1911 pour le Honduras,
du 6 juin 1911 pour le Nicaragua et du 16 septembre 1915
pour Haïti ont établi des contrôles financiers exercés par
le Gouvernement des États-Unis. Le traité relatif à
Haïti constituait d’aiUeurs un véritable protectorat (v.
supra, n® 84). Tous ces contrôles ont aujourd’hui dis¬
paru.

305. — L’affaire du Venezuela et la doctrine Drago. —


L’aspect le plus aigu de l’intervention des Puissances étran¬
gères en matière financière est apparu par les opérations
de démonstration navale faites par l’Allemagne, la Grande-
Bretagne et l’Italie le 20 décembre 1902 à l’encontre du
Venezuela. Cette intervention brutale, à laquelle la France
284 LA VIE INTERNATIONALE

avait refusé de s’associer, reposait sur des griefs divers des


Puissances à l’égard du Venezuela qui négligeait de payer des
indemnités dues à des ressortissants européens à la suite de
sévices et dommages causés au cours de guerres civiles.
L’Allemagne reprochait aussi le mauvais traitement financier
réservé à des capitalistes allemands qui avaient rendu de
grands services dans le développement du pays. L’Angle¬
terre se plaignait en outre de saisies et destructions de
navires. A la suite de l’intervention, et en raison du refus
opposé par le Président Roosevelt à une demande d’arbi¬
trage formulée par les Puissances, le Venezuela s’exécute et
c’est seulement le problème du traitement préférentiel des
Puissances intervenantes qui fut finalement soumis à l’arbi¬
trage.
La doctrine Drago est née à propos des interventions
européennes au Venezuela en 1902. Elle est formulée dans
une note adressée le 29 décembre 1902 au Département
d'État, à Washington, par le ministre des Affaires étran¬
gères de la République argentine, M. Drago. Cette doctrine
tend à interdire le recours à la force pour le recouvrement
des dettes contractuelles des États.
Cette théorie entra dans le droit positif à la Conférence
de La Haye, où fut adoptée une convention appelée
convention Porter, du nom du général qui présidait la
délégation américaine à la conférence. Cette convention
ümite l’emploi de la force pour le recouvrement des
dettes contractuelles aux deux seuls cas où l’État débiteur
refuse l’arbitrage ou bien, l’ayant accepté, se refuse à
exécuter la sentence arbitrale intervenue.

306. — Les interventions de police internationale.


— On désigne sous ce nom des interventions accompües
par un État pour protéger ses nationaux ou d’autres per¬
sonnes qui risquent d’être molestées ou le sont effective¬
ment par un autre État.
L’intervention de l’État pour protéger un de ses natio¬
naux ou pour défendre ses intérêts est généralement
appelée protection diplomatique. Elle peut donner heu
parfois à certains abus, et l’on cite à ce propos la célèbre
affaire Pacifico entre la^ Grande-Bretagne et la Grèce.
L’intervention par un État au profit,d’autres que ses
ressortissants, parfois au profit de l’État à l’encontre
duquel l’intervention a lieu, constitue ce qu’on appelle
l’intervention d’humanité. Elle a été largement pratiquée
par les Puissances à l’égard de l’Empire ottoman lors
des massacres des sujets chrétiens, qu’il s’agisse des Grecs
LES PRINCIPES POLITIQUES 285

au moment de l’insurrection de 1825, ultérieurement des


Crétois, à propos desquels une administration de l’île
elle-même fut exercée par les Puissances et leurs armées
navales, puis des Arméniens. C’est également l’interven¬
tion d’humanité qui sert de fondement à l’expédition
internationale qui se déroula contre le mouvement
xénophobe des Chinois connu sous le nom de guerre des
Boxers (août-septembre 1900).
En avril 1965 le gouvernement de Washington présente
le ■ débarquement à Saint-Domingue de contingents de
fusihers marins comme « une nécessité afin de protéger
la vie et les biens des ressortissants américains de Saint-
Domingue » mais l’intervention se prolonge après le
départ des civils et est conduite avec trente mille hommes.

307. — Caractère de ces diverses interventions. —


Il est très difficile de déterminer dans quelle mesure ces
diverses interventions sont ou non hcites. La protection
d’humanité peut l’être à condition de ne pas être un
simple prétexte. L’intervention financière n’apparaît
comme légitime qu’à la condition que l’État débiteur
apparaisse comme d’une particuhère mauvaise foi, car le
créancier en concluant un contrat aléatoire savait bien
qu’ü s’exposait à certains risques et le taux élevé d’intérêt
qui lui était promis montrait précisément le caractère
risqué de l’opération. Quant à l’intervention idéologique,
il est certain qu’eUe ne peut être considérée autrement que
comme une violation condamnable du principe d’absten¬
tion et de respect réciproques que constitue le principe
de non-intervention.

§ 2. — La doctrine de Monroe
et son abandon

308. — La fonnule. — On désigne sous le nom de doc¬


trine de Monroe des principes de politique étrangère
formulés par le Président des États-Unis, James Monroe,
dans un message au Congrès du 2 décembre 1823. L’occa¬
sion essentielle de ce message est le problème du sort des
anciennes colonies espagnoles d’Amérique et les tentatives
de l’Espagne pour les reconquérir.
Ce qu'on a appelé, par la suite, la doctrine de Monroe
est constitué par trois paragraphes du message, le para¬
graphe 7 et les paragraphes 48 et 49.
286 LA VIE INTERNATIONALE

Dans le paragraphe 7 se trouve exprimée la théorie


selon laquelle le continent américain doit échapper désor¬
mais aux entreprises coloniales eiu*opéennes : l’occasion
a été jugée comme opportune d’affirmer comme un principe
dans lequel le droit et les intérêts des États-Unis sont
impliqués que les continents américains, en raison de la
liberté et de l’indépendance qu’ils ont acquises et qu’ils
maintiennent, ne peuvent plus être considérés désormais
comme susceptibles d’une colonisation future par aucune
Puissance européenne.
Dans les paragraphes 48-49 du message, le Président
affirme un principe de non-intervention, mais en précise
les contours et les hmites. La non-intervention des États-
Unis concerne les colonies européennes en Amérique, mais
le problème des jeunes répubhques est différent. Cette
opposition apparaît dans le message selon les termes
suivants ; A l’égard des colonies ou dépendances actuelles
des Puissances européennes, nous ne sommes pas intervenus
et n’interviendrons pas. Mats à l’égard des gouvernements
qui ont déclaré leur indépendance et qui l’ont maintenue, et
dont nous avons reconnu l’indépendance après sérieux
examen et sur la base de la justice, nous ne pourrions
considérer aucune intervention d’une Puissance européenne
ayant pour but de les opprimer ou de contrôler d’une manière
quelconque leur destinée autrement que comme la manifes¬
tation d’une disposition inamicale à l’égard des États-Unis.
Il convient de remarquer que la reconnaissance à laquelle
fffit allusion le message remonte à 1822 et que, donc,
l'attitude du Président s’exphque parfaitement.
Enfin un dernier passage du message doit être cité,
qui concerne les affaires européennes et qui exprime
la pohtique dite de désintéressement ou d’indifférence :
En ce qui concerne l’Europe, notre politique, qui a été
adoptée au début des guerres qui ont si longtemps agité cette
partie du globe, demeure néanmoins la même, c’est-à-dire
ne pas intervenir dans les affaires intérieures d’aucune de
ces Puissances...

309. — Les applications de la doctrine.—Considérée


sous 1 un de ses aspects, la doctrine de Monroe signifie
l’interdiction des interventions européennes en Amérique.
A ce point de vue elle a été fidèlement suivie. Ce qui sou¬
lève éventuellement les protestations des États-Unis,
c’est l’établissement territorial et aussi l’instauration
d’un contrôle pohtique. A ce titre les États-Unis vont
LES PRINCIPES POLITIQUES 287

appliquer la doctrine de Monroe à toutes les acquisitions


territoriales. Le Président Polk (1845-1848) va interdire
non seulement la colonisation mais l’acquisition d'im
territoire, même sous forme d’une cession régulièrement
consentie. En 1895 le Président Cleveland pose le prin¬
cipe de l’interdiction de l’extension des colonies exis¬
tantes. Toutefois en 1902, à propos du Venezuela, les
États-Unis ne protestent pas, dans la mesure où il appa¬
raît qu’aucun établissement territorial n’est poursuivi.
L’intervention de la France au Mexique amène en 1865
des critiques de la part du gouvernement nord-américain,
bien qu’ü ne s’agisse pas d’un établissement colonial.
La doctrine de Monroe apparaît dans ce domaine comme
devant signifier un statu quo européen qui ne saurait être
modifié par extension des établissements européens.
Ainsi au lendemain de la défaite momentanée de la
France en 1940, le principe a été proclamé de l'interdic¬
tion du changement de souveraineté des colonies fran¬
çaises. Le problème de l’interdiction du maintien de
colonies européennes a été posé à la conférence de La
Havane en 1949 et plus récemment encore en 1954. A
vrai dire un certain nombre de colonies européennes ont
actuellement disparu, les anciennes colonies françaises de
la Guyane et des Antilles sont devenues des départements
d’outre-mer.

310. — Les transformations de la doctrine. — Fidè¬


lement appliquée sous sa forme négative, l’interdiction
des établissements européens en Amérique, la doctrine
de Monroe a subi, au contraire, de grandes transformations
sous d’autres aspects.
Ces transformations n’ont rien de surprenant car la
doctrine de Monroe a été proclamée en raison des circons¬
tances de 1823, c’est-à-dire essentiellement l’indépen¬
dance des républiques de l’Amérique latine, la politique
d’intervention de la Sainte-Alliance mais aussi des visées
coloniales de la Russie qui domine en Alaska, qu’eUe ne
cédera qu’en 1867, et qui cherche à étendre ses possessions,
et de l’attitude de la Grande-Bretagne qui pose le problème
des frontières.
Doctrine politique contingente, la doctrine était donc
susceptible de modifications ultérieures.
Ces transformations ont joué dans deux domaines,
dans le continent américain et à l’égard de l’Europe et
du reste du monde.
288 LA VIE INTERNATIONALE

Dans le continent américain lui-même, la doctrine de


1823 a une portée purement négative, elle soustrait le
continent aux futures entreprises coloniales européennes.
Elle s’est développée de manière à signifier une prédo¬
minance des Etats-Unis. Le continent américain est ainsi
appam comme le champ d’expansion de l’impérialisme
des Etats-Unis. Cette transformation profonde de la
doctrine est apparue avec la guerre contre l’Espagne et
la main-mise sur les colonies espagnoles. Elle s’est ensuite
développée par la domination stratégique, territoriale
ou économique dans l’Amérique centrale. Les dernières
années du xix® siècle et les dix premières du xx® marquent
ce tournant. Les États-Unis établissent leur main-mise
sur Cuba, interviennent dans la création de la République
de Panama, ce qui leur assure la domination du canal
transocéanique avec la zone du canal, üs dominent finan¬
cièrement le Honduras, le Nicaragua, la République
dominicaine puis Haïti. Cette politique de la « chasse
gardée », qualifiée souvent de politique du bâton ou du
dollar selon les cas, dure jusque vers 1930 et se modifie
à son tour avec Franklin Roosevelt.
Mais la transformation la plus curieuse est celle qui
consiste à renverser à peu près exactement la pohtique
d’indifférence à l’égard de l’Europe, proclamée dans le
message de 1823 et à intervenir dans les affaires du monde.

311* — Les doctrines américaines d’intervention.


— Le tournant du changement d’attitude peut se situer
en 1885. Les États-Unis participent en effet au congrès
de Berlin sur les problèmes africains, alors qu’ils ont refusé
de participer au congrès de Berlin de 1878. Ils seront pré¬
sents désormais dans les grandes conférences internatio¬
nales, celles de La Haye de 1899 et de 1907, celle d’Algésiras
en 1906. Ils interviennent dans les affaires européennes
en participant à la première guerre mondiale, jouent,
en la personne du Président Wilson, un rôle important
dans la conclusion du traité de Versailles et la création
de la S. D. N. puis, refusant de ratifier le traité, semblent
reprendre une politique d’isolement, tout en intervenant
en Europe sur le plan financier. Ils participent à la seconde
guerre mondiale, mais seulement à la suite de Pearl Har-
bour (8 décembre 1941). Au lendemain des hostihtés le
revirement de la politique est complet. Les États-Unis
interviennent partout dans le monde. Le rôle prédestiné
qu’ils ont invoqué jadis sur le continent américain appa-
LES PRINCIPES POLITIQUES 289

n désormais sur la scène mon-


male. Dans le domaine économique comme dans le
domaine inilitaire en Europe comme dans le Proche-
Orient ou dans 1 Asie du Sud-Est, sans distinguer alliés
ou adversaires de la veiUe, les États-Unis proclament par¬
tout la nécessité de leur présence en tant que « champions
du monde hbre ». La doctrine Truman formulée à l’égard
de la Grèce ou en matière de pays sous-développés est une
doctnne d intervention. Le Président Truman k formule
exphcitement le 12 mars 1947 devant le Congrès : « Je
crois que les Etats-Unis doivent avoir pour politique de sou¬
tenir les peuples libres qui résistent aux tentatives d’asser-
vissernent exercees contre eux par des minorités armées ou
par des pressions extérieures. » Ce rôle de champion est
assumé au sens propre et au prix de lourds sacrifices
^ expédition de Corée à laquelle l’O. N. U.
prMe 1 apparence d’une intervention internationale.
Dix ans plus tard une autre doctrine d’intervention
devait être proclamée aux États-Unis. Il s’agit de la
doctrine Eisenhower exprimée dans la loi du 9 mars iq=;7
par laquelle « le Président est autorisé à mettre en œuvre
dans la rémon du Proche-Orient, des programmes d’assis¬
tance mihtaire avec toute nation ou tout groupe de
nations ÿsirant une telle assistance ». L’article 2 précise
que les Etats-Unis considèrent la sauvegarde de l’indé¬
pendance et de l’intégrité des nations du Proche-Orient
cornme étant d une importance vitale pour leur intérêt
national et pour la paix du monde. En conséquence, il
est prévu que le Président pourra employer les forces
aimees pour assister « une nation qui réclamerait cette
aide contre une agression armée provenant de tout pays
dominé par le communisme international », la condition
supplémentaire devant être remplie que l’emploi de ces
forces soit en accord avec les traités conclus par les États-
Unis et la Constitution.
Bien que formulée dans un texte de droit interne, la
doctnne Eisenhower est évidemment un acte de politique
internationale mais il a été habile d’éviter une déclara¬
tion unilatérale qui aurait pu être considérée comme une
revendication d’une sphère d’influence et de ne pas recou¬
rir à la formule de traités internationaux dont la conclu¬
sion n eut point été opportune.
On doit remarquer que si le Proche-Orient a été depuis
la cnse jordanienne d’avril 1957 jusqu’à la révolution
irakienne de juillet 1958 le théâtre d’événements impor-
10. - INSTITUTIONS INTERNATIONALES.
290 LA VIE INTERNATIONALE

tants au cours desquels les États-Unis procédèrent à


diverses prises de position, les allusions à la « doctrine
Eisenhower » furent fort discrètes.

§ 3. — La coexistence pacifique.

On désigne sous le nom de coexistence pacifique une


doctrine internationale formulée depuis 1954-

312. — Le traité sino^indien. — Un traité signé entre


l’Inde et la Chine, le 29 avril 1954, relatif au Tibet a
présenté d’une manière systématique les principes sur
lesquels devaient s’établir les rapports entre les deux
États et qui étaient au nombre de cinq : 1° respect mutuel
de l’intégrité territoriale et de la souveraineté; 2° non
agression mutuelle; 3° non immixtion mutuelle dans les
affaires intérieures; 4° égalité et avantages mutuels;
50 coexistence pacifique.
Ces bases n’étaient point particulièrement nouvelles
pour la plupart et plusieurs de ces principes avaient déjà
été formulés dans un traité conclu entre l’U. R. S. S.
et la Chine de Tchang Kaï-Chek le 14 février 1950.
Mais les « Cinq principes », présentés parfois sous leur
désignation indienne de « Panch Shila » ont eu une large
audience et bénéficié d’une véritable pubhcité.

313. — Les formulations internationales. —En dehors


du traité sino-indien, on retrouve les Cinq principes for¬
mulés dans divers traités internationaux conclus entre
États sociahstes, dans une cinquantaine de déclarations
bilatérales ou plurilatérales et de communiqués conjoints,
dans un grand nombre de déclarations unilatérales.
Les Cinq principes sont présentés quelquefois dans un
ordre différent, leur formulation n’est pas toujours iden¬
tique, le nombre même des principes peut varier.
A la conférence de Bandoeng en 1955, le Pakistan
proposa l’adoption d’une Déclaration internationale por¬
tant sur « sept piliers de la paix » et qui eût ajouté aux
quatre premiers principes du traité sino-indien : le droit
de légitime défense individuelle et collective — le droit
des peuples à disposer d’eux-mêmes et la condamnation
du coloniahsme — le règlement pacifique des différends
internationaux.
La Conférence de Bandoeng devait en réalité adopter
LES PRINCIPES POLITIQUES 291

une Déclaration portant sur Dix principes qui aboutissait


à intégrer les Cinq principes dans un ensemble plus étendu
comprenant le respect des droits fondamentaux de
l’homme, la reconnaissance de l’égalité des races, le refus
de recourir à des arrangements destinés à servir les inté¬
rêts des grandes puissances quelles qu’elles soient, le règle¬
ment de tous les conflits internationaux par des moyens
pacifiques, enfin le respect de la justice et des obligations
internationales.

314. — Le sens international des principes de coexis»


tence. — Les trois premiers principes selon l’énumération
de 1954 sont des principes fondamentaux et classiques du
droit international qui ont été formulés à diverses reprises
dans de nombreux traités et en particulier dans le Pacte
de la S. D. N. et la Charte de l’O. N. U. Le quatrième
principe sous la forme concise « égahté et avantages mu¬
tuels » exprime en réalité la condamnation des traités
inégaux et des traités par lesquels un État obtient des
avantages économiques particuliers. Le cinquième prin¬
cipe a eu une fortune singulière puisqu’il sert générale¬
ment à désigner tout l’ensemble de ces règles diverses.
On doit remarquer que les Cinq principes rappellent
ainsi des principes formulés dans d’autres documents,
mais, à l’inverse écartent d’autres principes. Ainsi le
principe de la légitime défense, selon les articles 51 et 52 de
la Charte n’est pas inclus parmi les Cinq principes de
1954-
Présentés parfois comme l’expression d’une doctrine
léniniste ou comme conformes aux enseignements du
Boudha, exprimés tout d’abord dans un traité entre deux
États asiatiques les Cinq principes, souvent condensés
dans le cinquième qui semble tout résumer, n’ont pas
toujours été respectés et l’intervention chinoise en Inde
en 1962 le démontre.

315. — La coexistence pacifique en tant que principe


général de droit international. — L’idée d’une formula-
î tion générale des principes de la coexistence pacifique a été
I évoquée depuis quelques années à la sixième Commission
i (commission juridique) de l’Assemblée générale des
I Nations unies.
Un projet de résolution, relatif à une « Déclaration sur
I les principes du droit international concernant les rela-
■ tions amicales et la coopération entre les États » a été
292 LA VIE INTERNATIONALE

présenté à la XVII® session en 1962, il comportait


l’énumération de dix neuf principes dont un grand
nombre d’ailleurs sont des principes traditionnels du
droit international général ou de l’Organisation des
Nations unies.
Le dépôt du projet, à une époque où l’affrontement des
États-Unis et de l’U. R. S. S. au sujet de Cuba pouvait
laisser craindre une guerre thermo-nucléaire détruisant le
monde conférait à cette initiative une importance parti¬
culière.
Toutefois l’accord ne put se réaliser pour assurer la
transformation du principe de la coexistence pacifique
en un principe juridique véritable.
L’Assemblée a poursuivi, dans ses sessions ultérieures,
l’étude du développement progressif et de la codifica¬
tion des principes du droit international touchant les
relations amicales et la coopération entre les États. Un
Comité spécial a été créé à cet effet.
Le nombre des principes retenus a été sensiblement
réduit. La Résolution 2181 (XXI) du 12 décembre 1966
a retenu essentiellement quatre principes : l’abstention
du recours à la force — le devoir de coopération des
États entre eux — l’égahté de droits et l’autodétermina¬
tion des peuples — l’accomplissement de bonne foi des
obligations de la Charte.
Le principe de non intervention a été par ailleurs for¬
mulé par la Résolution 2131 (XX) du 21 décembre 1065.

Section III. — Le principe d’indépendance.

316. — Définition. — La notion d’indépendance poh-


tique est fréquemment invoquée dans les relations inter¬
nationales, mais elle est malaisée à définir. Elle est voisine
de celle de souveraineté qui est elle-même imprécise. Il
apparaît qu’il s’agit d’une notion de caractère négatif.
L’indépendance est la situation d’une collectivité humaine
dont les organes ne sont point subordonnés par rapport
aux organes d’une autre collectivité.
En principe les collectivités étatiques qui composent
la société internationale sont indépendantes et donc non
subordonnées les unes aux autres.
Le problème qui se pose sur le plan politique n’est pas
celui des conséquences mêmes de l’indépendance, car
LES PRINCIPES POLITIQUES 293

celles-ci relèvent de la technique juridique, il est celui


de savoir si le principe de l’indépendance doit s’appliquer
à telle ou telle collectivité.
En effet, le principe de l’indépendance peut apparaître
selon les cas comme protecteur ou destructeur de l’Etat.
Il est protecteur de l’État dans la mesure où, s’appliquant
à une collectivité étatique considérée globalement, il
s’analyse en une interdiction pour les autres collectivités
étatiques de porter atteinte à celle-ci. Mais il peut appa¬
raître comme destructeur de la collectivité étatique eUe-
même si on l’applique, à l’intérieur de cette collectivité,
à des groupes humains qui la composent. Il devient alors
un principe de démembrement.
Sur le plan pohtique la portée du principe d’indépen¬
dance et ses conséquences varient donc selon qu’on
l’appHque à tel ou tel groupe humain, et il convient
d’étudier successivement les rapports interétatiques et,
d’autre part, le problème à l’intérieur de l’État lui-même.

§ i»r. — Relations interétatique»


et principe de l’indépendance.

317. — L’affirmation du principe. — Les relations inter¬


nationales exigent une certaine sécurité. Le principe du
respect des indépendances nationales accorde précisément
cette sécurité.
Ce principe de l’indépendance se transforme en un
principe juridique dans les sociétés internationales en
voie d’organisation. Ainsi l’article 10 du Pacte de la
S. D. N. posait le principe du statu quo et faisait obhga-
tion aux membres de la Société de respecter l’inté¬
grité territoriale et l’indépendance pohtique des autres
membres. La Charte de l’O. N. U., dans son article 2 § 4,
contient une obligation analogue, car aux termes de ce
I texte les membres de l’Organisation doivent s’abstenir,
! dans leurs relations internationales, de recourir à la menace
I ou à l’emploi de la force notamment contre l’intégrité
I territoriale ou l’indépendance politique de tout Etat,
i On remarquera que l’obhgation s’étend au delà même du
1 cadre des membres de l’Organisation et concerne tout
j État, même non membre.

( 318. — La négation du principe. — La notion de


I respect de l’indépendance pohtique a été niée dans des
ji
II
294 LA VIE INTERNATIONALE

textes de portée internationale par les États fascistes au


cours de la période d’entre les deux guerres mondiales,
qui ont affirmé la notion d’espace vital et parfois de pré¬
tendus droits historiques.
Le préambule de l’ordonnance allemande du i6 mars
1939 portant création du Protectorat de Bohême-Moravie
est symptomatique à cet égard. Il proclame que pendant
un millénaire les pays de Bohême-Moravie ont appartenu
à l’espace vital du peuple allemand et affirme que c’est
à ce peuple seul qu’il appartient, conformément au prin¬
cipe de conservation, d’assurer le maintien de l’ordre dans
cette région de l’Europe centrale. La notion d’espace
vital, destructrice de toute indépendance, est également
affirmée dans l’accord germano-itahen du 27 mai 1939,
connu sous le nom de pacte d’Acier, dont le préambule
indique que les deux Etats interviendront pour assurer
leur espace vital. De même le Pacte tripartite du
27 septembre 1940 entre l’Allemagne, l’Italie et le Japon
reconnaît le principe de l’espace vital et affecte au
Japon les espaces de la Grande Asie extrême-orien¬
tale.
La théorie de l’espace^ vital, qui ne joue évidemment
qu’au profit de quelques États, constitue la négation abso¬
lue du principe de l’indépendance politique.

§ 2. — Le principe d’indépendance
dans le cadre étatique.
Le problème « colonial ».

319. — Indépendance et droit des peuples. — Le


principe d’indépendance pohtique, si on le fait jouer
à l’intérieur d’un État déterminé, peut prendre divers
aspects. Il devient le principe des nationalités ou le prin¬
cipe du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.
Il signifie alors le droit pour un groupement humain
de se constituer en unité étatique propre pour laquelle
jouera de nouveau le principe d’indépendance.
On notera que le principe d’indépendance s’apphque
donc, dans cette hypothèse, par échelons successifs. Il
contient une vertu dissolvante dont le drame de la Tché¬
coslovaquie entre 1919 et 1940 fournit un exemple. Le'
principe d’indépendance, sous les traits du principe desi
nationalités, a détruit l’État multi-national austro-hon¬
grois. Sur ses ruines ont été créés ou reconstitués de nou- ■
LES PRINCIPES POLITIQUES 295

veaux États. L’un d’eux, la Tchécoslovaquie, n’était pas


lui-même un État national mais comportait d’impor¬
tantes minorités. Le principe de l’indépendance natio¬
nale mis de nouveau en mouvement a détruit l’État
tchécoslovaque avec la formule du rattachement de la
région des Sudètes à l’Allemagne et la constitution de la
Slovaquie en entité autonome. La seconde guerre mondiale
a permis la reconstitution d’un État tchécoslovaque dans
lequel coexistent plusieurs nationahtés.
Les origines du principe des nationalités, le jeu du
principe et de sa variante, le droit des peuples à disposer
d’eux-mêmes ont été exposés plus haut (v. supra, n® 73).
Il est certain qu’un grand nombre d’États ont été créés
par suppression de l’indépendance d’entités pohtiques
plus petites. La valeur de la construction politique dont il
s’agit, sa sohdité sont des situations de fait qui résistent à
l’analyse juridique. Il s’agit de créations de caractère histo¬
rique qui sont ou non artificielles, suivant qu’elles corres¬
pondent aux habitudes et à la volonté des populations.
L’habitude et le désir de vivre en commun peuvent être,
à la longue, devenus très forts et cimenter entre eux des
groupes humains qui jadis furent différents et parfois
en lutte les uns contre les autres. Les États de l’Èurope
par exemple offrent souvent le spectacle d’entités poli¬
tiques aujourd’hui parfaitement unifiées, en lesquelles
se sont fondues des entités plus petites jadis indépen¬
dantes. L’exemple français, l’exemple britannique sont à
cet égard très nets.
Le problème de l’indépendance à l’intérieur même
d’un État se pose aujourd’hui sur un plan particuher,
en raison de la différence profonde des groupes ethniques,
des modes de vie, des habitudes, de l’éloignement géo¬
graphique aussi et il s’agit du problème dit « colonial »
qui mérite une étude particuhère.

320. — La colonisation et le droit international. —


Le problème de la colonisation s’est posé dès les débuts
mêmes du droit international européen. Les moines espa¬
gnols, en qui l’on voit les fondateurs du droit des gens,
et en particuher Francisco de Vitoria, ont ainsi posé le
problème des rapports des Espagnols en Amérique avec
les tribus indiennes. La colonisation est apparue pendant
de longs siècles comme une variante de la conquête. On
doit remarquer que le droit international classique com¬
portait pour les États le droit de faire la guerre, et
296 LA VIE INTERNATIONALE

que la conquête coloniale apparaissait, à ce stade des


relations internationales, comme un cas particulier d’un
principe général.
On comprend donc que sur le plan juridique la conquête
de territoires outre-mer, la constitution d’empires colo¬
niaux apparaissaient comme naturelles dans une société
internationale reposant essentiellement sur des données
de force.
C’est ce qui explique que pendant longtemps de tels
problèmes n’aient pas été posés d’une manière particu¬
lière. Le droit international n’a point réglementé la colo¬
nisation. Il s’est borné à établir quelques réglementations
spéciales. Le xix® siècle a interdit progressivement l’ins¬
titution de l’esclavage, depuis 1815. La conférence de
Berlin de 1885, et pour le continent africain seulement
d’ailleurs, a réglementé les modalités mêmes de l’instal¬
lation des Puissances européennes dans divers territoires
sans discuter du problème en général de la colonisation.
Ce problème ne devait apparaître que par la suite.

321. — Colonisation et Pacte de la S. D. N. — Le


Pacte de la S. D. N. constitue une première réglemen¬
tation, d’une portée très particulière d’aiUeurs. La redis¬
tribution des colonies des États vaincus ne s’opère pas sui¬
vant les règles classiques antérieures. Ces territoires ne
passent pas sous la souveraineté des vainqueurs, iis
deviennent des mandats (v. supra, n° 164). Ainsi apparaît
pour la première fois une réglementation internationale
qui tient compte des stades de civilisation atteints par
divers peuples du monde et proclame que le bien-être et
le développement des peuples retardés est une mission
sacrée de civibsation qui incombe aux nations dévelop¬
pées. Mais le Pacte ne contient aucune disposition spé¬
ciale pour les colonies des États autres que les États
vaincus.

322. — Le problème colonial et la Charte de l’O. N. U.


— Le chapitre XI de la Charte intitulé « déclaration
relative aux territoires non autonomes » apparaît comme
un texte international de portée générale qui prévoit
l'application de la notion de « mission sacrée de civihsa-
tion » non pas à des territoires placés sous un régime
international mais aux colonies des États membres de
l’Organisation.
Ces colonies sont qualifiées de territoires non autonomes
LES PRINCIPES POLITIQUES 297

OU encore de territoires dont les populations ne s’admi¬


nistrent pas encore complètement elles-mêmes.
Le texte définit en quelque sorte les principes d’une
politique coloniale consistant à assurer le progrès écono¬
mique, social, culturel des populations et, sur le plan
administratif et politique, à développer leur capacité
à s’administrer elles-mêmes en vue de l’instauration de
libres institutions politiques.

323. — La pratique de l’Organisation. — L’article 73


de la Charte, dans son paragraphe e, prévoyait comme
obhgation supplémentaire des États, qui assument la
responsabüité d’administrer des territoires non autonomes,
la communication réguhère au Secrétaire général de divers
renseignements concernant le développement des popu-
i lations dans les domaines précités.
I L’Assemblée générale, dans des résolutions successives,
devait donner une portée particuhère à cette obligation.
La Charte en effet ne prévoyait pas d’organe propre
devant lequel seraient étudiés ces renseignements. Il
fut créé dès 1946 un Comité ad hoc, puis en 1948 un Comité
spécial pour des renseignements transmis en vertu de
l'article 73, alinéa e de la Charte. Cet organisme devint
une véritable institution et porta à partir de 1952 le nom
de « Comité des renseignements relatifs aux territoires non
autonomes ». Composé pour moitié de représentants des
Puissances qui adrninistrent des territoires non autonomes
et pour moitié d’autres membres de l’Organisation, ce
comité fonctionne comme une instance internationale de
contrôle des administrations coloniales. Il apparaît, avec
une compétence différente, comme une sorte de doublet
du Conseil de tutelle pour les territoires sous tutelle. Il
exprime la méfiance profonde qui existe dans l’Organisa¬
tion à l’égard des poütiques dites coloniales. Une résolu¬
tion 2334 (XXI) du 20 décembre 1966 confirme récem¬
ment l’attitude de l’Assemblée générale.

324. — Le territoire non autonome. — Le contrôle


international précité s’exerce sur l’administration des
territoires non autonomes. Il constitue évidemment une
limitation de la compétence de l’État administrant, une
immixtion dans ses affaires intérieures, qui trouve sa
justification dans l’intérêt des populations administrées.
Ainsi apparaît une notion nouvelle du droit international :
le territoire non autonome. Mais le problème se pose de
298 LA VIE INTERNATIONALE

savoir quand un territoire cesse d’être non autonome, car


le contrôle international cessera alors par voie de consé¬
quence. Or deux voies différentes d’évolution se présentent
pour le territoire non autonome : l’une est l’indépendance,
l’autre est une intégration plus poussée dans la commu¬
nauté étatique administrante au point d’en devenir partie
intégrante.
Le problème de la définition du territoire non auto¬
nome a été examiné dans le cadre même de l’Organisa¬
tion des Nations Unies à propos de la question de la
cessation de transmission des renseignements. Cette étude,
après avoir été abordée en 1951 par le Comité des rensei¬
gnements lui-même, a été confiée à un Comité ad hoc
institué par une résolution de l’Assemblée générale du
18 janvier 1952 (VI-567) et à un second comité institué
par la résolution du 10 décembre 1952 (VII-648). Ainsi
a été établie une liste de facteurs déterminant si un terri¬
toire est ou non un territoire non autonome. Trois types
de structure politique ont été ainsi dégagés.

1° L’indépendance ou autonomie séparée. —Les travaux du


comité aboutissent à considérer qu’une population accède à
l’indépendance lorsque sont réalisées diverses conditions,
sur le plan international et sur le plan interne. L’indépen¬
dance suppose, sur le plan international, la responsabilité
internationale entière pour les actes inhérents à la souve¬
raineté externe et pour les actes relatifs à l’administration
interne. Elle comporte l’aptitude à devenir membre de
l’O. N. U., la capacité d’étabhr des relations directes de
toute nature avec d’autres gouvernements et avec des
institutions internationales, de négocier, signer et ratifier
des traités, la liberté enfin pour le territoire considéré de
conclure des accords relatifs à sa défense nationale.
Sur le plan interne, le territoire dispose de l’autonomie, ce
qui signifie la liberté de choix de la forme de gouvernement,
l’absence de contrôle ou d’intervention de la part d’un autre
gouvernement sur le pouvoir législatif, exécutif ou judiciaire,
la pleine compétence du gouvernement du territoire en
matière économique, sociale et culturelle.

2° Autonomie par association permanente avec la métropole.


— Cette forme d’autonomie comporte, sur le plan interna¬
tional, l’aptitude à devenir membre de l’O. N. U. et une
compétence plus ou moins large du territoire pour établir des
relations avec les autres gouvernements et les institutions
internationales.
Sur le plan interne, le territoire doit jouir d’une autonomie
interne caractérisée par un pouvoir législatif confié à une
LES PRINCIPES POLITIQUES 299

assemblée autochtone, élue ou au moins constituée d’une


manière librement approuvée par la population amenée à
exprimer son opinion en connaissance de cause, par un pou¬
voir exécutif choisi par une autorité ayant dans le territoire
l’agrément de la population autochtone, enfin par un pou¬
voir judiciaire indépendant.

3° Libre association et intégration. — Un territoire peut


cesser d’être non autonome, non pas en accédant à l’indépen¬
dance ou à l’autonomie comme dans les cas précédents, mais
en devenant hbrement associé à la ci-devant métropole et en
constituant désormais une partie intégrante.
Cette formule exige l’identité absolue de droits et de
devoirs entre les différents groupes de la collectivité complexe
considérée. Le territoire doit être représenté, sans discrimi¬
nation, au sein des organes législatifs centraux, le droit de
citoyenneté est commun et identique, l’égal accès aux fonc¬
tions pubhques est proclamé. Il existe dans le territoire un
sufirage universel égal sans interdiction d’aucun parti
politique. Les fonctionnaires du territoire sont nommés ou
élus dans les mêmes conditions que dans les autres parties du
pays considéré dans son ensemble. La compétence législative
ou réglementaire locale est définie par les mêmes règles que
dans les autres parties du pays.
Ces conditions de fond étant remplies, il n’y a pas lieu de
s’attacher au mode formel d’établissement du lien d’inté¬
gration ou d’association, qui peut être la constitution de la
métropole ou un traité bilatéral ou un accord de droit
interne ou tout autre formule.

325. — L’évolution des territoires non autonomes.


— L’article 73 confère au statut des territoires non auto¬
nomes un caractère évolutif et provisoire, ces territoires
devaient, selon la Charte, devenir graduellement auto¬
nomes par le développement de « leur capacité de s’admi¬
nistrer eux-mêmes » et de « leurs libres institutions poli¬
tiques ».
Effectivement depuis 1945 la transformation de statut
a concerné un grand nombre de territoires qui, lors de
l’entrée en vigueur de la Charte étaient « non autonomes ».
Mais alors que juridiquement l’obtention de l’autonomie
pouvait se réahser de plusieurs manières, en particulier
sous la forme de l’autonomie interne aussi bien que sous
; la forme de l’indépendance elle-même, le changement qui
1 est intervenu, dans la réahté pohtique et historique, a
; pris très généralement la forme de l’indépendance et rare-
I ment celui de l’autonomie interne.
{ L’autonomie interne a concerné peu de territoires :
300 LA VIE INTERNATIONALE

Porto Rico, Surinam, les Antilles jadis néerlandaises, le


Groenland, les anciennes colonies françaises devenues des
départements d’outre-mer.
C’est au contraire la solution de l’indépendance qui a
été le plus largement consacrée, en elle s’est incarné l’un
des phénomènes les plus importants du milieu du xx®
siècle : la décolonisation.
L’évolution apparaît dans toute son ampleur avec la
grande transformation politique du continent africain
qui en 1945 ne comptait, en dehors de l’Afrique du Sud
que quelques États indépendants, comme rÉg5q)te,
l’Éthiopie, le Libéria et ne compte plus maintenant, au
contraire, que quelques territoires non autonomes, les
indépendances nationales s’étant multiphées depuis
l’indépendance du Ghana en 1957 et celles des années
1958 et i960 et suivantes.
Les statuts coloniaux, aussi bien sous la forme des pro¬
tectorats que sous celle des colonies proprement dites
ont ainsi partout disparu pour la plupart. Ceux qui sub¬
sistent ne sont d’aUleurs pas seulement réduits en nombre
et en population, leur statut même se trouve aujourd’hui
mis en cause.

326. — La résolution du 14 décembre 1960. — La


Charte de l’O. N. U. a réglementé dans son chapitre XI
les régimes coloniaux mais elle ne les a pas interdits. Au
contraire, l’Assemblée générale de l’O. N. U. a adopté
le 14 décembre i960, par 89 voix contre zéro, avec 9
abstentions, une résolution (1514. XV) par laquelle elle
proclame solennellement la nécessité de mettre rapidement
et inconditionnellement fin au colonialisme sous toutes ses
formes et dans toutes ses manifestations.
La disposition de cette longue résolution contient un
§ 5 par lequel l’Assemblée déclare que des mesures immé¬
diates seront frises dans les territoires sous tutelle, les
territoires non atttonomes et tous autres territoires qui n'ont
fias encore accédé à l’indépendance pour transférer tous
pouvoirs aux peuples de ces territoires sans aucune condition
ni réserve... afin de leur permettre de jouir d’une indépen¬
dance et d’une liberté complètes.
Une résolution de l’Assemblée n’est évidemment pas
un texte de droit international positif et ne possède pas
de valeur juridique, mais cette déclaration sur l’octroi de
l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux n’en
possède pas moins une grande portée politique, et traduit
LES PRINCIPES POLITIQUES 301

un changement très profond. Elle fournit un support aux


mouvements d’indépendance qui se développent dans
certains territoires, ainsi dans la « province » portugaise de
l’Angola ou à certaines interventions comportant emploi
de la force comme l’entrée des troupes indiennes à Goa
en décembre 1961.
L’Assemblée a institué un Comité chargé d’étudier les
problèmes touchant aux questions visées dans la réso¬
lution.
L’Assemblée a confirmé et développé la résolution 1514
en votant, à diverses reprises, des résolutions, ainsi en
1961 (1654. XVI), en 1962 (1810. XVII), en 1963 (1956.
XVIII), 1965 (2105. XX). La résolution 2189 (XXI) du
13 décembre 1966 aboutit à déclarer que la persistance
du régime colonial met en danger la paix et la sécurité
internationales. Elle condamne l’apartheid et la discri¬
mination raciale comme un crime contre l’humanité.
Elle « réaffirme la légitimité de la lutte que les peuples
sous domination coloniale mènent pour l’exercice de
leur droit à l’autodétermination et à l’indépendance ».
Elle appelle enfin à l’intervention car elle « prie tous les
États d’apporter une aide matérielle et morale aux mou¬
vements de hbération nationale dans les territoires
coloniaux ».

§ 3. — L’indépendance économique.

327. — La souveraineté sur les ressources naturelles.


— Il est apparu depuis quelques années que le principe
de l’indépendance se bornerait à une formulation incom¬
plète si on se bornait à une proclamation de caractère
politique.
L’analyse de la situation « coloniale » fait, en effet,
apparaître que l’exploitation des richesses naturelles
d’un territoire est souvent entre les mains non seulement
de puissances étrangères mais fort généralement de
sociétés étrangères. Ainsi apparaît une domination.
Les États nouvellement indépendants sur le plan poh-
tique sont donc naturellement désireux d’obtenir des
garanties sur le plan économique.
Dans le cadre des Nations unies les projets de pactes
relatifs aux droits de l’Homme ont ainsi prévu : « Le droit
des peuples à disposer d’eux-mêmes comprend en outre
un droit de souveraineté permanent sur leurs richesses
et leurs ressources naturelles... »
302 LA VIE INTERNATIONALE

A côté de ces projets il convient de citer diverses réso¬


lutions adoptées par l’Assemblée générale et portant sur
la souveraineté permanente des peuples sur leurs richesses
et ressources naturelles.
Cinq résolutions peuvent être citées, l’une du 12 jan¬
vier 1952 (523.VI), la seconde du 21 décembre 1952
(626.VII) ont posé le principe. Une troisième résolution du
12 décembre 1958 (1314.XIII) a créé la Commission pour
la souveraineté permanente sur les ressources naturelles
et l’a chargée de procéder à une enquête approfondie
concernant la situation du droit de souveraineté perma¬
nente sur les richesses et ressources naturelles, élément
fondamental du droit des peuples et des nations à dis¬
poser d’eux-mêmes.
De nouveau, par une résolution (1515.XV) du
15 décembre i960 l’Assemblée a recommandé le respect
du droit souverain de chaque État de disposer de ses
richesses et de ses ressources naturelles.
Enfin, et plus récemment la résolution (1803.XVII) du
14 décembre 1962 contient une longue déclaration sur ce
droit de souveraineté.

328. — La déclaration de 1962. — Contenue dans une


résolution de l’Assemblée générale, la déclaration s’analyse
en une formulation d’un principe qui ne saurait avoir la
valeur obhgatoire d’une règle juridique. Mais sa portée
éthique est considérable.
La déclaration constitue en quelque sorte un compromis
entre deux tendances contradictoires. L’une est celle des
pays en voie de développement qui entendent pouvoir
exploiter leurs ressources naturelles, l’autre est celle des
pays développés dont souvent les ressortissants pros¬
pectent et mettent en valeur ces ressources, et qui
demandent leur protection.
C’est par rapport à ces deux idées que l’on peut tenter
de classer les dispositions de la déclaration qui ne sont
pas d’une rigoureuse précision.
Il y a tout d’abord proclamation d’un droit de souve¬
raineté permanent des peuples et des nations sur leurs
richesses et leurs ressources naturelles qui doit s’exercer
dans l’intérêt du développement national et du bien-être
de la population de l’État intéressé. Cet exercice hbre et
profitable doit être encouragé par le respect mutuel des
États fondé sur leur égahté souveraine. La violation des
droits souverains des peuples et des nations sur leurs
LES PRINCIPES POLITIQUES 303

richesses et leurs ressources naturelles est considérée


comme allant à l’encontre de l’esprit et des principes de la
Charte des Nations unies et gênant le développement de
la coopération internationale et le maintien de la paix.
Mais, en contre-partie de la reconnaissance de ce prin¬
cipe, diverses garanties ont été à leur tour formulées,
concernant les investissements de capitaux étrangers
destinés à la mise en valeur de ces ressources.
L’État territorial peut interdire ou hmiter de telles
activités, il peut les autoriser. En ce cas les capitaux
importés et les revenus qui en proviennent sont régis
par les termes de l’autorisation et le droit international
lui-même.
Le point 4 de la Déclaration, fort important prévoit
que la nationahsation, l’expropriation ou la réquisition
devront se fonder sur des motifs d’utihté publique de
sécurité ou d’intérêt national supérieurs aux intérêts
privés. Il est prévu que l’indemnisation doit être adé¬
quate, en conformité avec le droit international. En cas de
contestation les voies de recours interne doivent être
épuisées mais sur l’accord des États souverains et des
parties intéressés on peut recourir à l’arbitrage ou à un
règlement judiciaire international. Le point 8 et dernier
de la Déclaration pose l’important principe que les
accords relatifs aux investissements étrangers hbrement
conclus par des États souverains ou entre de tels États
seront respectés de bonne foi.
La Déclaration de 1962 constitue ainsi un ensemble
comp>osite qui fait apparaître une sorte de coopération
internationale fondée sur le respect de la souveraineté des
peuples et nations sur leurs richesses naturelles et sur le
respect dû corrélativement aux investissements de mise
en valeur dûment autorisés. Cette « symétrie » peut être
considérée comme un signe de détente dans un domaine
où sont apparus depuis plusieurs années divers affronte¬
ments.
Une résolution 2158 (XXI) du 28 novembre 1966
confirme la résolution de 1962, apporte quelques préci¬
sions en reconnaissant le droit de tous les pays, en parti-
cuher des pays en voie de développement, de s’assurer
une participation accrue à la gestion des entreprises dont
l’exploitation est assurée par des capitaux étrangers. Elle
engage les pays dont les capitaux sont originaires à
s’abstenir de toute action qui pourrait faire obstruction
à l’exercice de ce droit.
304 LA VIE INTERNATIONALE

On voit ainsi apparaître le principe d’une exploitation


publique et nationale des richesses naturelles d’un pays,
ce qui est un principe nouveau.
Parmi les droits que reconnaissent les Pactes interna¬
tionaux des droits de l’Homme (voir infra n° 345) figure
le droit de tous les peuples de disposer librement de leurs
richesses et ressources naturelles (art. i § 2 du Pacte
relatif aux droits économiques et sociaux et art. 25 de
ce Pacte — art. i. § 2 du Pacte relatif aux droits civils
et politiques).

BIBLIOGRAPHIE

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BIBLIOGRAPHIE 305

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de Droit Contemporain consacré à l’analyse de la Coexis¬
tence pacifique.
3o6 LA VIE INTERNATIONALE

Sur la notion d’indépendance.


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de la question de la souveraineté permanente sur les richesses
et les ressources naturelles. Nations unies. New York, 1962.
CHAPITRE V

LE RÈGLEMENT DES CONFLITS ^

Dans le cadre du droit interne le mode de règlement des


litiges a subi une évolution au cours des siècles marquée
par la substitution progressive aux solutions brutales
primitives de solutions pacifiques avec l'intervention
d’abord d’arbitres choisis par les parties, ensuite le
recours à des tribunaux préétablis.
Le monde interétatique a connu une évolution analogue
mais qui n’est pas absolument achevée.
Les sociétés interétatiques modernes, dans la mesure
où elles sont en voie d’organisation condamnent le recours
à la force comme mode de règlement des litiges interna¬
tionaux. Le Pacte de la S. D. N. ne condanmait pas le
recours à la guerre et se bornait à prévoir certaines pro¬
cédures particuhères, mais le Pacte Briand-Kellogg
du 27 août 1928 condamnait le recours à la guerre « en
tant qu’instrument de politique nationale ». La Charte
de l’O.N.U. dans son article 2 § 4 prohibe le recours à la
menace ou à l’emploi de la force. Le traité de sécurité
collective interaméricain, du 2 septembre 1947, connu
sous le nom de Pacte de Rio, contient un article i®*' selon
lequel « Les hautes parties contractantes condamnent
formellement la guerre et s’engagent à ne jamais recourir
à la menace ni à l’usage de la force dans leurs relations
entre elles ».

^ II n’est présenté ici que des notions sommaires, l’étude détaillée du règle¬
ment des conflits fait partie du programme de la 8* année.
3o8 LA VIE INTERNATIONALE

329. — Les modes pacifiques de règlement des conflits.


— On peut classer les modes pacifiques de réglement des
conflits en diverses catégories. Des solutions diverses
peuvent être utilisées lorsque le différend n’a pu être réglé
par des négociations directes entre les deux États inté¬
ressés.
Les procédures peuvent alors être classées en deux
grandes catégories. Dans un premier type de procédures
U est simplement proposé une solution aux Parties qui ne
sont pas tenues de l’accepter : ce sont les solutions du
type médiation, concüiation ou bons offices.
Un second type de procédures est caractérisé par le
caractère obligatoire de la solution élaborée : deux modes
de règlement appartiennent à cette catégorie : l’arbitrage
et le règlement judiciaire.
1° L’utilisation de tel ou tel mode de règlement paci¬
fique dépend non seulement des conventions en vigueur
entre les États mais aussi du litige qui existe. Les diffé¬
rends ou litiges entre les États peuvent en effet présenter
ou non un caractère juridique. On oppose les litiges juri¬
diques et les litiges politiques. Les litiges juridiques sont
plus facilement que les autres susceptibles de faire
l’objet d’un règlement par le moyen d’une solution obli¬
gatoire pour les États, revêtant la forme d’un règlement
arbitral ou d’un règlement judiciaire. Les litiges poli¬
tiques ou conflits d’intérêts se prêtent plus difficilement à
une solution de caractère obligatoire, ils peuvent être
traités par le moyen des procédures de médiation, conci¬
liation ou bons offices.
2° L’adoption d’un mode particulier de règlement ne
dépend pas simplement de la nature du Utiçe opposant
deux États, il dépend également d’une évolution générale
lentement orientée vers l’adoption de l’arbitrage obli¬
gatoire ou du règlement judiciaire. Une telle tendance
s’est manifestée d’abord dans le cadre général de la
société inorganisée des États et on la voit apparaître à
la fin du XIX* et au début du xx* siècle avec les confé¬
rences de La Haye de 1899 et de 1907. Elle s’est mani¬
festée ensuite dans le cadre d’une société interétatique
organisée, la Société des Nations, dans le Pacte lui-même
d’abord (art. 12,13,15), ensuite dans les traités de Locamo
de 1925 et surtout dans l’Acte général d’arbitrage de 1928.
La Charte des Nations Unies prévoit les procédures
pacifiques de règlement des différends internationaux
dans son chapitre VI mais les diverses procédures sont
LE RÈGLEMENT DES CONFLITS 309

présentées, notamment dans l’article 33, sous une forme


quelque peu désordonnée. La période actuelle est carac¬
térisée en un certain sens par une régression des procé¬
dures de caractère juridique et l’utüisation assez générale
de procédures de caractère politique.
30 On a opposé, dans les développements précédents,
les procédures qui aboutissent à des solutions obligatoires
(arbitrage-règlement juridictionnel) aux procédures qui
aboutissent simplement à des solutions soumises à l’agré¬
ment des Parties. Mais il existe un autre aspect de la
notion d’obligation qui porte non pas sur la solution elle-
même, dont l’élaboration est le résultat même de la pro¬
cédure utilisée, mais bien sur le recours à une procédure.
On distingue ainsi l’obligation de recourir à une procédure
de la situation toute (üfférente dans laquelle les États
sont libres de recourir ou non à une procédure quelconque.
Le mouvement de l’évolution a été très net, bien que lent,
en faveur de l’obligation de recourir à des procédures
pacifiques. Une telle obligation concernant la procédure
devient encore plus impérieuse si eUe porte sur une pro¬
cédure aboutissant elle-même à une solution obligatoire
pour les Parties.

§ ler. — Les solutions à portée non obligatoire.

Parmi les solutions de caractère non obligatoire on


distingue les bons offices, la médiation, l’enquête et la
conciliation.

330. — Bons offices et médiation. — Il s’agit dans


les deux cas de l’intervention d’un ou parfois plusieurs
États tiers tentant de proposer un terrain d’entente ou
d’obtenir un arrangement entre les États en litige.
Les deux procédures se distinguent par une différence
de degré car le rôle de l’État tiers est plus important en
matière de médiation, son intervention étant plus précise
et plus continue.
Ces procédures ont été fort utilisées en pratique dans la
société traditionnelle des États pour éviter des conflits
armés, parfois pour y mettre fin. La médiation a été
réglementée avec précision par la convention numéro i de
La Haye (1907) sur le règlement pacifique des (fifférends
internationaux. Lamédiation suppose la suprématie morale
ou matérielle de l’autorité qui intervient. Pendant long-
310 LA VIE INTERNATIONALE

temps, la Papauté a joué à diverses reprises le rôle de


médiateur et l’on peut citer encore la médiation du
pape Léon XIII dans le différend entre l’Espagne et
l’Allemagne concernant les îles Carolines (1885). Le prési¬
dent Théodore Roosevelt a assuré une médiation pour
mettre fin à la guerre russo-japonaise et aboutir au traité
de Portsmouth (1905).
Le Pacte de la S.D.N. a comporté une procédure parti¬
culière de médiation avec l’intervention du Conseil et les
mécanismes de l’article 15 du Pacte. La procédure prévue
aboutissait à la rédaction d’un rapport sur le difiérend. Si
le rapport était adopté à l’unanimité, les voix des Parties
au différend ne comptant pas, les membres de la Société
s'engageaient à ne pas recourir à la guerre contre la
partie qui se conformait aux conclusions du rapport.
Si le rapport n’était pas adopté à l’unanimité, alors
chaque membre de la société retrouvait une complète
hberté d’action.
La procédure de la médiation prévue, parmi d’autres,
par l’article 33 de la Charte des Nations Unies a été sou¬
vent utüisée. Le Conseil de Sécurité a ainsi désigné
comme médiateur en Palestine, dans le conflit entre
Israël et les États arabes, le comte Bemadotte, puis, après
l’assassinat de celui-ci, M. Bunche (1948). Plusieurs média¬
teurs furent successivement désignés pour tenter de
résoudre, sans succès d’ailleurs, le conflit entre l’Inde et le
Pakistan au sujet du Cachemire.

331. — L’enquête. — La procédure d’enquête consiste à


faire étabhr par des commissaires désignés à cet effet,
selon un rapport objectif qu’ils préparent, la matérialité
exacte des faits qui ont donné Heu à l’existence d’un
différend. Instituée par une convention spéciale inter¬
venue entre les États en Htige, la Commission interna¬
tionale d’enquête se borne à préparer et présenter ce
rapport.
Le procédé de la Commission d’enquête semble parti-
cuHèrement timide, mais il comporte une certaine efficacité
car ü contribue à permettre l’examen du problème, par
les États en Htige, d’une manière qui est moins passionnée
dans la mesure où les faits eux-mêmes sont appréciés
objectivement.
Imaginée à la première conférence de La Haye en 1899,
la procédure fut utüisée avec succès en 1904-1905 à
propos de l’incident dit du Dogger Bank au cours duquel
LE RÈGLEMENT DES CONFLITS 3II

la flotte russe coula d’innocents chalutiers britanniques


pris par erreur pour des torpilleurs japonais. La deuxième
conférence de La Haye en 1907 a réglementé avec pré¬
cision cette procédure qui a été utilisée dans diverses
affaires.
Cette enquête ne doit pas être confondue avec l’enquête
prévue par l’article 34 de la Charte et qui est effectuée
par le Conseil de sécurité ou à sa demande, et qui porte sur
tout différend ou situation pouvant entraîner un désac¬
cord ou engendrer un différend. L’enquête de l’article 34
a pour but non de fournir aux parties une version objec¬
tive des faits mais de déterminer si la prolongation de ce
différend ou de cette situation semble devoir menacer le
maintien de la paix et de la sécurité internationales.
Dans le système de La Haye la commission d’enquête
devait être constituée à l’initiative des États en htige, le
recours à cette procédure était donc facultatif. Dans le
cadre d’accords bilatéraux on a parfois prévu l’institu¬
tionnalisation de telles commissions qui étaient « pré¬
constituées » et existaient donc antérieurement à tout
htige, c’est la formule retenue par les traités Bryan
signés par les États-Unis à la veüle de la première guerre
mondi^e avec divers États. On a vu dans ces traités
l’origine de la procédure de concüiation.

332. — La conciliation. — H s’agit d’un mode paci¬


fique de règlement comportant l’examen du htige par des
personnahtés compétentes constituant une commission
instituée préalablement au différend et chargée de
rédiger un rapport contenant toute proposition utile.
Ce mode est particuhèrement souple, il ménage les
susceptibihtés des États et se distingue de la médiation
par l’intervention de personnes dont le caractère prin¬
cipal n’est pas d’ordre pohtique.
Un grand nombre de traités coUectifs ou bilatéraux ont
prévu depuis 1919 une tehe procédure. La concihation
peut apparaître d’aüleurs sous des formes diverses,
car les combinaisons sont multiples qui permettent de
l’associer souvent à d’autres procédures (Afférentes.
On peut ainsi classer les traités prévoyant la conci¬
hation en (hvers t5q)es. Parfois la concüiation s’apphque
à tous les htiges, parfois eüe constitue la première phase
dans un ensemble de procédures pacifiques et si eüe
échoue, on passe à l’arbitrage. D’autres conventions
réservent la solution de la concihation aux htiges poh-
312 LA VIE INTERNATIONALE

tiques et instituent l’arbitrage pour les litiges juridiques.


Quelquefois, et selon la même distinction entre litiges
politiques et juridiques, la conciliation se combine avec
le règlement judiciaire. Le système des traités de
Locarno de 1925 était complexe, il soumettait tous les
litiges de caractère juridique à la procédure préalable
de la conciliation avec éventueUement, en cas d’échec,
un second stade constitué par un règlement arbitral ou
judiciaire. Le mécanisme de l’Acte général d’arbitrage de
1928 était un peu différent. Les différends de toute nature
étaient en principe soumis d’abord à la procédure de la
conciliation et ensuite, en cas d’échec, on utilisait tantôt
la procédure d’arbitrage (htiges pohtiques), tantôt la
procédure du règlement judiciaire (htiges juridiques).
La Commission de concihation est généralement pré¬
établie, composée de cinq membres avec souvent une
majorité de ressortissants d’États tiers; elle établit un
rapport qui est soumis aux parties.
La procédure de la conciliation est très souple et a été
prévue dans un très grand nombre de traités. Toutefois le
recours à cette procédure est demeuré relativement hmité.
Depuis 1945 diverses commissions de concihation ont
été saisies de htiges. Dans le cadre des traités de paix a
fonctionné par exemple une commission franco-itahenne
(avec des règles particuhères d’aiheurs). Une commission
de concihation a également résolu un différend terri¬
torial entre le Siam et la France.

§ 2. — Les solutions à portée obligatoire.

Les solutions à portée obhgatoire comprennent l’arbi¬


trage et le règlement judiciaire.

A. — L'arbitrage.

La conférence de La Haye de 1907 a défini l’arbitrage


comme un mode de « règlement des litiges entre les États
par des juges de leur choix et sur la base du respect du
droit ».
Deux éléments apparaissent dans cette définition : le
choix des arbitres, l’aspect juridique de la solution
adoptée, de la sentence arbitrale.
L’arbitrage a une longue histoire, il a été l’objet d’une
évolution qui a conduit de l’arbitrage isolé à l’arbitrage
obhgatoire.
LE RÈGLEMENT DES CONFLITS 3I3

333. — L’arbitrage isolé et son évolution. — L’arbi¬


trage isolé intervient après la survenance d’un litige. Le
recours à cette procédure signifie la volonté pacifique des
États intéressés qui, par une convention particulière
appelée compromis, déterminent la question qui doit être
tranchée et désignent les arbitres appelés à statuer.
Une évolution a caractérisé le choix des arbitres. Au
Moyen Age apparaissent des arbitres naturels, le Pape ou
l’Empereur, plus tard on a recours à l’arbitrage par sou¬
verain, ensuite on voit apparaître le procédé de la commis¬
sion mixte composée en nombre égal de membres désignés
par les deux parties, à cette formule paritaire est enfin
substituée celle de la commission arbitrale comportant
un tiers départageant et composée de trois ou cinq mem¬
bres.
Le recours à l’arbitrage, fréquent avant le xvi® siècle,
subit une longue écüpse et se manifeste à nouveau à la fin
du XVIII® et surtout au xix® siècle. Les plus célèbres
affaires d’arbitrage isolé datent de la fin du xix® siècle,
avec la question de l’Alabama, entre les États Unis et la
Grande Bretagne (arbitrage de 1872) ou la question des
phoques à fourrure de la mer de Behring (1893).

334. — L’arbitrage obligatoire. — L’expression « arbi¬


trage obhgatoire » caractérise une institutionnahsation de
la procédure de l’arbitrage. Il s’agit toujours d’une base
conventionnelle mais elle est préalable au htige.
La première conférence de La Haye avait exprimé le
souhait que la procédure de l’arbitrage fût largement
utihsée, la seconde (1907) a posé, dans l’article 38 de la
première convention, le principe de l’arbitrage obh¬
gatoire pour toute difficulté née de l’interprétation d’un
traité, ce principe étant d’ailleurs tempéré par des for¬
mules prudentes telles que « le cas échéant » ou encore
« en tant que les circonstances le permettront » et en
excluant d’ailleurs divers htiges d’une particuüère impor¬
tance pour les États.
Pour faciliter le recours à la procédure de l’arbitrage
la Conférence de La Haye de 1899 crée une Cour perma¬
nente d’arbitrage par l’une des conventions qu’elle
adopte et qui devait être complétée et révisée en 1907.
La Cour permanente d’arbitrage n’est pas véritable¬
ment une Cour. Il n’y a de permanent qu’un bureau et il
s’agit pour le reste d’une hste d’arbitres choisis par les
États. La Cour apparaît ainsi selon la formule du juris-
314 LA VIE INTERNATIONALE

consulte Louis Renault : un cadre permanent de tribunaux


éphémères.
Dans le cadre de cette procédure diverses affaires
furent réglées avec bonheur, notamment l’affaire dite des
Déserteurs de Casablanca entre la France et l’Allemagne
(1909), l’affaire des pêcheries de l’Atlantique nord (1910)
entre les États-Unis et la Grande -Bretagne. Après 1919
les affaires furent moins nombreuses et l’activité de la
« Cour » s’est ralentie.

335. — Transformation de l’arbitrage. — Dans le


cadre inorganisé de la Société des États l’arbitrage
concerne les litiges juridiques, mais avec la Société des
Nations est créée une Cour de justice. L’arbitrage se trouve
donc désormais en concurrence avec la procédure juridic¬
tionnelle qui comporte un tribunal véritablement perma¬
nent. Mais un champ nouveau peut s’ouvrir pour l’arbi¬
trage, celui des htiges non juridiques puisque pour ceux-ci
ne peut jouer la procédure juridictionneUe. Le Protocole
de Genève de 1924, qui n’est d’aüleurs pas ratifié, intro¬
duit cette formule nouvelle, la solution des traités d’arbi¬
trage annexés au traité de Locamo demeure plus classique,
s’apphquant aux litiges juridiques, mais l’Acte général
d’arbitrage de 1928 prévoit le règlement arbitral des
litiges non juridiques, le tribunal pouvant statuer « ex
aequo et bono ». La portée de l’évolution serait considé¬
rable mais en réalité l’arbitrage comportant une sentence
de caractère obligatoire établie par des personnahtés qui
demeurent influencées par l’aspect juridique des problèmes
ne rencontre pas, en dehors des litiges juridiques, un très
bon accueil de la part des États. L’arbitrage est encore
utilisé dans la pratique internationale mais il porte en
général sur des affaires dont l’importance est limitée et qui
demeurent des htiges de caractère juridique (voir par
exemple l’affaire du lac Lanoux entre la France et l’Espa¬
gne).

B. — Le règlement judiciaire.

336. — Les difficultés. — Le règlement judiciaire se


distingue de l’arbitrage par l’existence d’un tribunal
préétabü, de caractère permanent et dont la composition
ne dépend pas du choix des États en htige. L’idée de
créer une Cour internationale a été lancée depuis long-
LE RÈGLEMENT DES CONFLITS 315

temps mais elle se heurta, sur la plan de la réalisation, à un


obstacle qui provenait de l’existence du principe de
l’égalité et de la souveraineté des États.
La deuxième conférence de La Haye, en 1907, adopta un
projet de convention relatif à l’établissement d’une Cour
de justice arbitrale mais on ne put se mettre d’accord sur la
désignation des juges. L’égalité ^des États strictement
entendue eût exigé un juge par État, ce qui aboutissait
alors à 44, et des formules diverses de rotation ou de
distinction entre des membres permanents et des membres
temporaires ne furent pas retenues. Avant la première
guerre mondiale on ne peut mentionner que l’expérience
brève d’ailleurs de la Cour de justice centraméricaine
(1907-1917) dans le cadre spatial limité des cinq petits
États de l’Amérique centrale : Costa Rica, Guatemala,
Honduras, Nicaragua, Salvador.
La création d’une cour de justice prévue dans le cadre
de la Société des Nations par l’article 14 du Pacte fut
rendue possible grâce à la structure même de l’organisa¬
tion avec la double représentation d’une part de l’ensemble
des États à l’assemblée, d’autre part de certains d’entre
eux, notamment les grands États au Conseil, ce qui per¬
mettait de faire désigner les juges par les votes concor¬
dants de ces deux « collèges ».

337. — La Cour internationale de justice. — Confor¬


mément à l’article 14 du Pacte un comité de juristes éla¬
bora en 1920 le statut de la Cour internationale qui fut
adopté par l’Assemblée en 1920 et auquel adhérèrent la
plupart des États. La nouvelle institution fut dénommée
Cour permanente de justice internationale. Elle fut
remplacée en 1946 par une juridiction qui est à peu près
identique, sous le nom de « Cour internationale de jus¬
tice », qui selon l’article 92 de la Charte constitue « l’organe
judiciaire principal des Nations Unies. » Tous les membres
de l’Organisation sont ipso facto parties au statut de la
Cour internationale de justice et des membres extérieurs
à rO, N. U. peuvent en outre être parties au statut, ainsi
se trouve atteint actuellement un très grand nombre de
justiciables, 117 puisqu’aux membres de l’O. N. U.
s’ajoutent la Suisse, le Liechtenstein et Saint Marin. Les
quinze membres de la Cour sont élus pour neuf ans par le
Conseil de sécurité et l’Assemblée générale. On constate
toutefois l’existence d’un vestige de la formule arbitrale
avec l’institution du juge ad hoc que tout État, partie à
3i6 LA VIE INTERNATIONALE

un litige porté devant la Cour, peut désigner pour siéger


dans l’affaire si la Cour ne comprend pas un juge ressor¬
tissant dudit État.

338. — Compétence de la Cour. — La Cour interna¬


tionale de justice a une double compétence, contentieuse
et consultative.
Sur le plan contentieux la compétence de la Cour
demeure, comme celle de sa devancière, facultative.
La Cour ne peut être saisie que sur la base de l'accord
des Parties. Toutefois cet accord peut prendre deux
formes tout à fait différentes.
La Cour tout d’abord peut être saisie par voie de
compromis selon des formules analogues à celles du
compromis d’arbitrage. Elle peut également être saisie
par voie de requête unilatérale émanant de l’un des
États lorsque les parties au litige ont antérieurement
reconnu la juridiction de la Cour en acceptant la clause
facultative de compétence obligatoire prévue par l’article
36, § 2 du Statut. Cette clause est facultative en ce sens
que nul État n’est tenu d’y souscrire, mais sa souscrip¬
tion a pour conséquence de rendre la juridiction de la
Cour obligatoire et de permettre donc une saisine par voie
de requête en dehors de tout compromis, par un État
ayant également accepté la même obligation. Dans la
réalité, comme l’engagement de chaque État est déter¬
miné par celui-ci et que la rédaction de la clause est
libre, il s’ensuit que la portée de l’obhgation est variable
et qu’il existe une infinité de systèmes d’acceptation
variant selon les États dont il s’agit pris deux à deux.
La Cour est une cour de justice qui rend des arrêts mais
il existe également une compétence consultative, la Cour
pouvant, aux termes de l’article 96 de la Charte, donner
des avis consultatifs sur toute question juridique. La
Cour ne fournit pas des avis d’une manière spontanée,
l’avis doit lui être demandé. Le Conseil de sécurité,
l’Assemblée peuvent demander des avis ainsi que d’autres
organes de l’O.N.U. et les institutions spéciahsées s’ils
sont autorisés à le faire par l’Assemblée générale.

339. — Problèmes actuels de la juridiction interna¬


tionale. — Il convient de reconnaître que les espoirs mis
en la juridiction internationale n’ont pas été totalement
réalisés. Certes les deux Cours ont fonctionné, la Cour
permanente a rendu entre 1922 et 1939 31 arrêts et 27 avis
BIBLIOGRAPHIE 317

consultatifs, la Cour internationale de justice dans une


période de vingt années a rendu 28 arrêts et avis. Mais les
affaires portées devant la Cour ne sont pas nécessairement
les plus importantes. Par ailleurs il existe une sorte de
« concurrence ». Elle provient de l’existence de 1 arbi¬
trage qui est maintenu et auquel les Etats peuvent
préférer avoir recours. Une autre forme de concurrence
provient de l’existence d’autres juridictions a compé¬
tence plus limitée sur le plan matériel ou sur le plan
territorial. Dans le cadre du Conseil de l’Europe, la pro¬
tection des droits de l’homme est confiée à une juridiction
spéciale, la Cour européenne des droits de 1 homme créee
par la Convention de Rome du 3 novembre 1950. Dans les
communautés européeimes existe une autre Juridiction,
la Cour de justice des Communautés créée d’abord dans
le cadre de la C. E. C. A. en 1952 et ensuite dans le cadre
des institutions créées par le traité de Rome du 25 rnars
1957-
BIBLIOGRAPHIE

(La bibhographie donnée ci-dessous est très succinte,


la matière concernant la 3® année de hcence.)

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C. P J.I. Paris, 1936; Verzijl, The Jurisprudence of
the World Court, The Permanent Court of Justice. Leyden,
1966.

3. La Cour Internationale de Justice.


Hambro (E.), The jurisdiction of the International Court
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jurisprudence de la C.I.J., R. C. A . D. I., 1951, t. I;
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jurisdiction of the I. C. J. R. C. A. D. L, 1958 J t- Lau¬
terpacht (H.), The development of international law by the
International Court. Stevens, Londres, 1958; Tuncel (E.),
L’exécution des décisions de la C. I. J. selon la charte des
Nations unies. Thèse Neuchâtel, i960; François (J.),
L’avenir de la C. I. J. Mél. van der Molen, 1961, p. 73-76;
Hambro (E.), Quelques problèmes touchant la C. I. J.,
Revue hellénique, 1962, n® i, p. 1-9; Rosenne (S.), The
International Court of Justice. Leyden, 1962 (2® éd.) ;
Dubisson (M.), La Cour Internationale de Justice. Librairie
générale de droit et de jurisprudence, Paris, 1964;
Chehab (M.), Le rôle de la C. I. J. dans l’interprétation
et la création du droit international. Thèse Pans, 1963;
Rosenne (S.), The law and practice of the International
Court. Leyden, 1966 ; Visscher (Ch.), Aspects récents
du droit procédural de la Cour Internationale de Justice.
Paris, Pedone, 1966.
CHAPITRE VI

L’INDIVIDU DANS LA SOCIÉTÉ INTERÉTATIQUE

L’individu et le droit international

Le problème est fréquemment posé de savoir si l’indi¬


vidu peut être considéré comme un sujet du droit inter¬
national. La doctrine a donné à cette question deux
réponses opposées. Certains auteurs, invoquant la pra¬
tique internationale et le droit positif, considèrent que le
droit international ne régit que les relations entre États
et qu’à ce titre l’individu ne saurait être considéré comme
un sujet du droit international, seuls les États étant les
sujets de cette règle de droit. D’autres auteurs moins
nombreux, parmi lesquels le professeur Georges SceUe,
affirment au contraire que l’individu est sujet du droit
international, et même que seuls les individus sont sujets
du droit international comme plus généralement de toute
règle juridique.
Si la question de savoir si l’individu est ou non un sujet de
droit international est délicate et comporte des réponses
opposées, du moins peut-on constater ce fait d’évidence
que les réglementations internationales aboutissent fina¬
lement à un domaine d’autonomie pour son activité et
parfois à lui accorder une protection.
Proclamer par exemple dans une convention interna¬
tionale, signée par des États, que la navigation est libre
sur un fleuve international ou dans un canal transocéa-
nicjue ne signifie pas autre chose c^u’établir le statut d’une
voie d’eau qui permettra à des individus, commerçants
ou armateurs, personnes physiques ou personnes morales
DANS LA SOCIÉTÉ INTERÉTATIQUE 321

d’exercer librement leur commerce. L'ensemble du droit


international des communications concerne les individus.
Les traités de caractère politique relatifs à des trans¬
ferts de territoire affectent également les individus, que
ceux-ci soient autorisés à s’expatrier ou que, demeurant
sur place, ils changent de nationalité et de statut poli¬
tique.
D’autres textes réglementent directement la situation
de l’individu : les conventions sur les prisonniers de
guerre, les conventions de La Haye réglementant la
guerre, les conventions de la Croix-Rouge ont toutes pour
thème commun la protection de l’individu faible, désarmé,
souffrant, malade.
Il est donc impossible de contester que l’autonomie ou la
protection de l’individu sont des thèmes communs des
réglementations internationales et d’un ensemble de
règles juridiques, auxquelles on a pu donner précisément
pour nom quelquefois celui de Droit des Gens.

340. — L’individu et les groupes. — Le droit inter¬


national ne se préoccupe pas uniquement du sort de
l’individu isolé, mais aussi des groupes d’individus
lorsque ces groupes ne coïncident pas avec les collectivités
normales que constituent par exemple les États.
Les diverses réglementations ont été exposées plus haut,
qui concernent par exemple les minorités, les populations
des territoires sous mandat, les populations des territoires
sous tutelle, les populations des territoires non-autonomes,
et même les peuples.
Une protection particulière du groupe mérite d’être
mentionnée, celle qui concerne sa vie elle-même.
La barbarie nazie avait montré, au cours de la seconde
guerre mondiale, de quelle atroce manière des groupes
humains entiers peuvent être détruits, avec les dépor¬
tations des juifs des divers pays occupés, la création des
camps de la mort, les exterminations systématiques. Les
responsables furent poursuivis après la guerre.
Les plus grands criminels de guerre dont les crimes
n’avaient pas de locahsation géographique possible
furent poursuivis en tant que coupables de crimes de
guerre et de crimes contre l’Humanité devant un Tribunal
mihtaire international institué par l’accord de Londres du
8 août 1945 (procès de Nuremberg). Pour éviter le retour
de pareilles horreurs une convention internationale du
9 décembre 1948 a fait ainsi du génocide un crime du droit
11. INSTITUTIONS INTERNATIONALES.
322 LA VIE INTERNATIONALE

des gens que les États signataires s’engagent à prévenir et


à punir. Le génocide est défini comme un acte commis
dans l’intention de détruire en tout ou en partie un
groupe national, ethnique, racial ou religieux. De tels
actes peuvent être des massacres, des atteintes à l’inté¬
grité physique ou mentale, des mesures entravant les
naissances, la soumission du groupe à des conditions de
vie devant entraîner sa destruction, enfin les transferts
forcés d’enfants. La convention prévoit la répression de
ce crime mais, à défaut de l’existence d’une juridiction
criminelle internationale, confie aux signataires le soin
d’organiser la répression.

341. — Le réfugié. — Il est des êtres humains dont le


sort mérite une protection particuhère, ce sont les
réfugiés dont le lamentable cortège s’est considérablement
accru au cours et au lendemain de la seconde guerre mon¬
diale. Il s’agit en particuher des personnes déplacées
( displaced per sons ) qui ont fui devant les armées au cours
d’opérations miütaires et ne sont pas rentrées ensuite
dans les territoires où elles vivaient auparavant. Une
Organisation internationale particuhère s’est efforcée
d’adoucir leurs souffrances, d’organiser leur réadaptation
dans des territoires d’accueil. Actuellement et depuis
février 1952, l’Organisation internationale qui était l’une
des institutions spécialisées (v. infra) a disparu et il a
été créé un Haut-commissariat des Nations unies chargé
des réfugiés. L’Office de secours et de travaux des
Nations unies pour les réfugiés de Palestine, l’Agence des
Nations unies pour le relèvement de la Corée s’efforcent
aussi, en Moyen-Orient et en Corée, de protéger les réfugiés.

342. — Valeur et portée des réglementations interna¬


tionales. — Les textes internationaux qui concernent les
individus sont de valeur et de portée très inégales.
La technique traditionnelle, normale en droit inter¬
national, est celle des réglementations conventionnelles,
mais elle est généralement affaibhe par l’absence de sanc¬
tion et surtout par l’impossibilité dans laquelle se trouve
l’individu de saisir lui-même les juridictions internationales
en cas de la violation de la réglementation par un État.
La formule des déclarations de caractère international,
transposition sur un plan plus général des déclarations
qui précèdent souvent les constitutions des États, a été
aussi utihsée.
DANS LA SOCIÉTÉ INTERÉTATIQUE 323

Enfin, quelquefois le contentieux international laisse


une possibilité à l’individu d’intervenir lui-même directe¬
ment pour la défense de ses droits.

— Les réglementations classiques protégeant les


individus. — Dans le cadre général de la société interna¬
tionale, diverses conventions ont été conclues qui lient les
signataims, en nombre plus ou moins grand selon les
conventions dont il s’agit, et qui protègent l’indi¬
vidu.
Si l’on fait abstraction des conventions concernant le
droit de la guerre, la protection la plus essentielle que l’on
peut évoquer est celle de la liberté corporelle.
Elle se manifeste en particulier par l’interdiction de
l’esclavage, son abolition successive. Cette interdiction
est apparue d’abord dans les législations nationales, ainsi
en France en 1791, mais elle n’est devenue effective que
beaucoup plus tard. Sur le plan international la lutte contre
l’esclavage fut d’abord entreprise sur le terrain de la
répression de la traite négrière. Le principe de cette
répression fut posé dans le traité de Paris de 1814 et dans
l’Acte final du congrès de Vienne en 1815, il fut repris aux
conférences d’Aix-la-Chapelle et de Vérone.
La répression de la traite ne pouvait être efficace qu’à
la condition de reconnaître aux navires de guerre des
États un droit de visite pouvant être exercé en temps de
paix, en haute mer, à l’encontre d’un navire de commerce
battant un pavillon quelconque. La supériorité des flottes
britanniques entraîna une grande réticence des autres
États, et notamment de la France et des États-Unis, mais
de multiples conventions bilatérales furent conclues par
la Grande-Bretagne au cours du xix® siècle avec des
succès divers.
Au delà du problème purement maritime, la répression
de l’esclavage fut organisée par plusieurs conventions.
Réunie à Bruxelles, une conférence dite anti-esclavagiste
aboutit à une convention du 2 juillet 1890, dont la France
ne ratifia que la partie non maritime. Après la première
guerre mondiale, le traité de Saint-Germain du 10 sep¬
tembre 1919 organise la protection des populations afri¬
caines tant contre l’esclavage que contre d’autres fléaux,
le commerce des spiritueux, le commerce des armes et des
munitions. Enfin la convention de Genève du 25 sep¬
tembre 1926 constitue le texte le plus récent.
D'autres trafics odieux concernent non plus la traite
324 LA VIE INTERNATIONALE

des esclaves, mais la traite des femmes et des enfants, ils


sont désignés généralement sous le nom de traite des
blanches. Ce commerce est prohibé aux termes de trois
conventions successives dont la plus récente date du
2 décembre 1949.

344. — La Déclaration universelle des droits de


l’homme. — La Charte de l’O. N. U. se préoccupe à
diverses reprises des droits de l’homme (articles i, 13,
55, 62, 68, 76). Le préambule proclame la foi des signa¬
taires dans les droits fondamentaux de l’homme. L’article
premier, en son paragraphe trois, place parmi les buts de
l’Organisation le respect des droits de l’homme et des
hbertés fondamentales pour tous, sans distinction de
race, de sexe, de langue ou de rehgion. L’article 62,
paragraphe 2 indique que le Conseil économique et
social peut faire des recommandations en vue d’assurer le
respect effectif des droits de l’homme et des hbertés
fondamentales pour tous. C’est dans le cadre de ces
formules que l’Assemblée générale a voté le 10 décem¬
bre 1948, par 48 voix contre o avec 8 abstentions, un
texte solennel intitulé Déclaration universelle des Droits
de l’homme. Il s’agit d’une déclaration comportant
trente articles précédés d’un préambule.
Toutes les hbertés pubhques proclamées ou garanties
dans divers textes constitutionnels de droit interne y sont
énumérées et la déclaration est présentée comme l’idéal
commun à atteindre par tous les peuples et toutes les
nations.
Du point de vue de la technique juridique, la décla¬
ration n’a évidemment pas la valeur d’une convention
internationale qui, ratifiée par eux, obhgerait les États.
Le problème de savoir s’il s’agit d’un texte de portée pure¬
ment philosophique ou d’un texte ayant valeur positive
s’est posé devant les tribunaux de certains États. Il a été
résolu en des sens différents. Il paraît difficile, sur le plan
de la technique, et en exprimant le regret qu’il en soit
ainsi, qu’on puisse considérer comme une règle positive
de droit un texte qui n’est pas autre chose qu’une recom¬
mandation de l’Assemblée générale de l’O. N. U.

345. — Les Pactes internationaux des droits de


l’homme. — Depuis 1954 l’Assemblée a poursuivi l’éla¬
boration de pactes internationaux relatifs aux droits de
l’homme devant constituer le droit positif revêtant la
DANS LA SOCIÉTÉ INTERÉTATIQUE 325

forme de conventions internationales ouvertes à la signa¬


ture, la ratification et l’adhésion.
Dans sa résolution 2200 (XXI) du 16 décembre 1966
l’Assemblée a adopté, pour les soumettre à la signature,
la ratification ou l’adhésion : un Pacte international relatif
aux droits économiques, sociaux et culturels, un Pacte
international relatif aux droits civils et politiques, enfin
un Protocole facultatif se rapportant au Pacte interna¬
tional relatif aux droits civils et politiques.
Les droits reconnus par ces divers textes sont très
nombreux, ils varient selon les documents dont il s’agit.
Les deux Pactes dépassent dans leur première partie
les droits de l’individu. Ils proclament en effet : « Tous les
peuples ont le droit de disposer d’eux-mêmes, ils déter¬
minent librement leur statut politique et assurent libre¬
ment leur développement économique, social et culturel. »
Le § 2 du même article premier précise que tous les
peuples peuvent disposer librement de leurs richesses et
de lems ressources naturelles.
Le Pacte relatif aux droits civüs et politiques ne se
borne pas à proclamer de tels droits et à les définir. Il
prévoit dans sa quatrième partie (art. 28 à 45), la création
d’un Comité des droits de l’homme de 18 membres chargé
d’examiner les rapports présentés régulièrement par les
États membres sur les mesures qu’üs ont arrêtées et qui
donnent effet aux droits reconnus dans le Pacte.
Par une déclaration spéciale, de caractère facultatif,
les États membres peuvent en outre (art. 41) reconnaître
la compétence du Comité pour recevoir et examiner des
communications dans lesquelles un État partie prétend
qu’xm autre État partie ne s’acquitte pas de ses obliga¬
tions au titre du Pacte.
Un développement plus poussé du système apparaît
avec le Protocole facultatif se rapportant au Pacte inter¬
national relatif aux droits civils et politiques. Par la
signature et la ratification de ce Protocole les États
habilitent le Comité des Droits de l’Homme à recevoir
et à examiner des communications émanant de particuliers
qui prétendent être victimes de la violation d’un des
droits énoncés dans le Pacte. Tout particulier, même
relevant de la juridiction de l’État dont il s’agit, peut
présenter une telle communication après avoir épuisé les
recours internes disponibles. Les communications sont
instruites par le Comité, portées à la connaissance de
l’État en cause qui, dans un délai de six mois, doit présenter
326 LA VIE INTERNATIONALE

au Comité des explications ou déclarations précisant le


problème et exposant les mesures qui pourraient avoir
été éventuellement adoptées.

346. — La Convention européenne des droits de


l’honune. — L’organisation internationale connue sous
le nom de Conseil de l’Europe (v. infra,) groupe des
États qui, aux termes de l’article 3 du Statut, recon¬
naissent le principe en vertu duquel toute personne placée
sous leur juridiction doit jouir des droits de l’homme et
des libertés fondamentales. Il apparaît donc comme
naturel que, dès la réunion de l’Assemblée consultative, la
question ait été inscrite à l’ordre du jour des mesures à
prendre en vue de l’accomplissement d’un des buts
déclarés du Conseil de l’Europe pour le maintien et le
progrès ultérieur des droits de l’homme et des hbertés
fondamentales.
Une convention dite Convention européenne des
Droits de l’homme fut signée à Rome le 4 novembre 1950.
Elle a été ultérieurement complétée par un protocole
additionnel signé à Paris le 20 mars 1952, qui en est
devenu partie intégrante et est entrée en vigueur le
3 septembre 1953, date à laquelle avaient été déposés les
dix premiers instruments de ratification.
Cette convention est, d’un point de vue technique, un
texte très supérieur à la Déclaration universelle du
10 décembre 1948. Elle garantit quinze droits fonda¬
mentaux dans des conditions analogues à celles prévues
par la Déclaration universelle, avec souvent pourtant des
différences dans la portée des formules, leur hbellé, leur
degré de précision.
Mais les différences essentielles entre les deux textes
sont au nombre de deux
Il s’agit, tout d’abord, d’un texte de droit positif,
d’une convention internationale et non d’une déclaration
même solennelle.
Ensuite les droits énumérés sont garantis par le jeu de
deux organes : la Commission européenne des droits de
l’homme, la Cour européenne des droits de l’homme.
La Commission, composée d’autant de membres qu’il
y a de Parties à la convention, peut être saisie de tout
manquement à la convention imputable à une Partie
contractante. Elle tente d’abord un règlement amiable et,
si elle échoue, transmet l’affaire au Comité des ministres
DANS LA SOCIÉTÉ INTERÉTATIQUE 327

qui, sauf intervention de la Cour, décide à la majorité des


deux tiers s’il y a eu ou non violation et, dans l’affirmative,
détermine les mesures à prendre. Les États considèrent
comme obligatoires pour eux ces diverses décisions du
Comité des ministres.
La Cour européenne des droits de l’homme est composée
d’autant de juges qu’ü y a de membres du Conseil de
l’Europe. Si elle est saisie, elle rend un arrêt motivé de
caractère définitif et obligatoire pour les États membres.
Il faut noter que la juridiction de la Cour n’a pas un
caractère obligatoire absolu. Ce caractère doit lui être
formellement reconnu par une déclaration particulière
souscrite par les États et cette déclaration a un caractère
facultatif, huit déclarations devaient être souscrites au
moins pour procéder à une première élection de juges. Cette
condition a été rempUe le 3 septembre 1958, la Cour a donc
pu être constituée, elle a rendu son premier arrêt le
i®*" juillet 1961.
La Cour ne peut être saisie que par les États ou la
Commission elle-même.
La Commission est normalement saisie également par
les États mais il existe sous certaines conditions un droit
de recours individuel devant la Commission. Les États
peuvent, en effet, souscrire une déclaration facultative
selon laquelle ils s’engagent à reconnaître la compétence
de la Commission si celle-ci est saisie d’une requête éma¬
nant d’une personne physique, d’une organisation non
gouvernementale ou d’un groupe de particuliers se pré¬
tendant victime d’une violation par l’un des États signa¬
taires des droits reconnus dans la Convention. Cette
clause facultative relative au recours individuel est
entrée en vigueur, entre les signataires le 5 juillet 1955,
date à laquelle six États avaient souscrit la déclaration.

347. — L’accès des particuliers aux juridictions inter»


nationales. — La meilleure garantie des particuliers,
notamment pour la protection des droits individuels,
réside évidemment dans la possibihté à eux reconnue de
saisir un tribunal international.
Ce droit, dans la Convention européenne des droits de
l’homme, n’existe qu’à l’égard de la commission, et sous
certaines réserves. Dans le cadre du droit international
commun, il n’est en général pas reconnu. Seuls les Etats
ont quahté pour saisir la Cour internationale, comme
seuls ils avaient qualité pour saisir la Cour permanente.
328 LA VIE INTERNATIONALE

mais ils peuvent plaider pour la défense de leurs nationaux


et l’ont fait effectivement dans diverses affaires.
On peut citer des cas exceptionnels dans lesquels le
droit de plaider devant une juridiction internationale a
été reconnu à des particuliers. Un premier exemple fut
celui de la Cour de justice centre-américaine instituée
entre les cinq États de l’Amérique centrale par la conven¬
tion de Washington du 20 décembre 1907 et qui exista
durant une dizaine d’années.
Un autre exemple est fourni par les tribunaux arbi¬
traux mixtes qui furent institués par les divers traités de
paix après la première guerre mondiale et qui étaient
compétents pour juger des litiges patrimoniaux entre
ressortissants des Puissances victorieuses et États ex¬
ennemis ou ressortissants de ceux-ci. D’une manière ana-
lo^e, après la deuxième guerre mondiale, la Commission
arbitrale sur les biens, droits et intérêts en Allemagne, est
compétente en matière de différends opposant la Répu¬
blique fédérale allemande à de simples particuliers ou à
des gouvernements agissant pour ceux-ci (Convention de
Bonn du 26 mai 1952 et Protocole du 23 octobre 1954).
L'article 33 du traité de la C. E. C. A. a permis aux
personnes privées de saisir directement la Cour de justice
de la Communauté lorsqu’il s’agit de recours contre les
décisions individuelles prises par les organes suprana¬
tionaux ou lorsqu’est invoqué à l’encontre d’une décision
générale le grief particulier du détournement de pouvoir.
Dans le cadre des traités de Rome les personnes privées
peuvent former des recours devant la Cour de justice mais
uniquement contre « les décisions dont elles sont les desti¬
nataires ou contre les décisions qui, bien que prises sous
l’apparence d’un règlement ou d’une décision adressée à
d’autres personnes les concernent directement et indivi¬
duellement » ( Traité C. E. E. article 173, § 2-Traité Eura¬
tom article 146, § 2).
A côté de ces recours juridictionnels divers on peut
mentionner, en le distinguant, le droit de pétition mdi-
viduel ou collectif qui a existé dans les régimes de mandat
ou de tutelle. Il s’agit non plus d’une juridiction mais
d’une instance administrative ou politique. Commission
des mandats. Conseil de tutelle.
BIBLIOGRAPHIE 329

BIBLIOGRAPHIE

(Voir aussi la bibliographie relative au Conseil de l’Eu¬


rope).
Spiropoulos (J.), L’individu et le droit international.
R. C. A. D. I., 1929, t. IV; Tenekides (G.), L’individu
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Seferiades (S.), Le problème de l’accès des particuliers à
des juridictions internationales. R. C. A. D. I., 1935, t. I;
Gassin (R.), L’homme sujet de droit international et la
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selle. Mél. Scelle, 1950,1.1, p. 67 et s. ; Lauterpacht (H.),
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Reuter (P.), Quelques remarques sur la situation juridique
des particuliers en droit international public. Mél. Scelle,
t. II, p. 535 et s. ; de Soto, L’individu comme sujet du droit
des gens. Mél. Scelle, t. II, p. 687 et s. ; Gassin (R.), La
déclaration universelle et la mise en œuvre des droits de
l’homme. R. G. A. D. I., 1951, vol. 79: Drost (P.), Human
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droit pubhc, 1951, p. 705 et s. ; Rochette (J.), L’individu
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Some considérations upon the protection of individuals in
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1956, t. II; Dupuy (R.-J.), La Commission européenne
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Paris, 1959; Eissen (M.-A.), Le premier arrêt de la Cour
européenne des droits de l’homme. A. F. D. L, i960, p. 447-
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de l’homme dans l’affaire Lawless (fond). A. F D. I., 1961,
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les tribunaux internationaux. R. G. A. D. L, 1962, t. III;
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péenne des droits de l’homme relative à sa compétence ratione
330 LA VIE INTERNATIONALE

temporis. A. F. D. I., 1963, p. 722-734; Guyomar (G.),


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1964, p. 127-224; ScHNYDER (F.), Les aspects juridiques
actuels du problème des réfugiés. R. C. A. D. I., t. 114.
DEUXIÈME PARTIE

LA SOUDARITÉ INTERNATIONALE

La société interétatique a été décrite dans la première


partie de cet ouvrage.
Les institutions internationales de cette société et qui
seules existaient pendant longtemps ont été caractéri¬
sées par une double limitation.
D’une part, du point de vue de la finalité, ces institu¬
tions se bornaient à assurer entre les Etats des relations
pacifiques élémentaires. Elles n’excluaient pas, d’aiUeurs,
les affrontements armés. La société interétatique clas¬
sique non seulement connaît la guerre mais voit en elle
une institution véritable, une limite en quelque sorte du
jeu politique, une entreprise licite en eUe-même, qui doit
être réglementée seulement dans ses modalités d’exercice.
Même lorsqu’elles se limitent aux relations pacifiques
les institutions internationales traditionnelles ont simple¬
ment pour but de fournir un cadre à des relations entre
États à l’intérieur desquelles ceux-ci poursuivent une fina¬
lité qui est propre à chacun d’eux. Il s’agit véritablement
d’une société d’États dans laquelle la finalité poursuivie
ne dépasse pas ce qu’on pourrait appeler le non affron¬
tement.
Dans cette société d’États n’existent que des buts éta¬
tiques poursuivis par chacun des membres collectifs de
cette société en lesquels les juristes traditionnels
voyaient les seuls sujets du droit international. D’autre
part ces institutions se plaçaient dans un cadre purement
juridique ce qui posait d’ailleurs de déhcats problèmes car
332 LA SOLIDARITÉ INTERNATIONALE

la réalité sociale étant de caractère politique le droit inter¬


national demeurait impuissant à l’encadrer efficacement
et les institutions apparaissaient comme particulièrement
imparfmtes et inachevées en comparaison des réalisations
du droit interne dans lequel existait un pouvoir étatiaue
effectif.
Les transformations qui sont intervenues au xx® siècle
montrent, à l’analyse, qu’à côté de cette société tradition¬
nelle d’Etats existe et se développe une véritable société
internationale.
Les règles qui régissent une telle société sont des règles
de solidarité fondées sur l’interdépendance sociale telle
que l’ont dégagée le Doyen Duguit et Georges Scelle.
La seconde partie du présent ouvrage se propose de
présenter les problèmes de la solidarité internationale.
Ces problèmes se subdivisent, du point de vue de l’étude,
en deux séries distinctes de questions.
Tout d’abord il faut présenter et décrire les méca¬
nismes de solidarité, c’est-à-dire les Organisations inter¬
nationales qui se développent sans cesse depuis im siècle,
avec une extraordinaire accélération depuis le lendemain
de la seconde guerre mondiale. L’importance de ce phé¬
nomène ne saurait être trop souhgnée. Il s’agit d’une
« dimension » internationale nouvelle qui s’ajoute à la
« dimension étatique » qui n’a évidemment pas ispani
mais qui demeure très hmitée par son traditionnalisme.
L’étude des Organisations internationales multiples
qui existent de par le monde constituera la première divi¬
sion (sous partie) de cette seconde partie de l’ouvrage.
Mais en second heu ce qui caractérise le monde inter¬
national actuel ce n’est pas seulement l’existence à côté
des Etats des multiples Organisations internationales dont
ils sont membres, c’est surtout le rôle que ces Organisa¬
tions jouent dans l'agencement économique et social du
monde.
Les relations poütiques traditionnelles, qui ont été
d’ailleurs mal dominées par les règles juridiques, ne cons¬
tituent qu’un aspect particuher de la vie internationale.
Celle-ci dans sa réahté profonde se construit à partir de
données économiques et sociales; les relations de caractère
économique, technique et financier, deviennent fonda¬
mentales.
Cette transformation a une signification très profonde
dans laquelle apparaissent deux éléments.
On voit, d’une part, se vérifier dans le domaine interna-
LA SOLIDARITÉ INTERNATIONALE 333

tional une constatation qui avait été faite dans le cadre


du droit interne par le Doyen Duguit lorsqu’il remarquait,
en dégageant la théorie dite du service public : « Ce qui
apparaît alors au premier plan ce n’est plus le pouvoir
de commander, c’est l’obligation d’agir pratiquement »
{Transformations du Droit public, 1927).
Toute une série d'organisations internationales sont,
en effet, de nos jours, caractérisées par le fait qu’elles sont
des organisations de gestion financière ou technique, des
banques de développement, des laboratoires internatio¬
naux, parfois des usines gérées en commun. Leur rôle
n’est pas d’édicter des règles de droit, mais d’intervenir
dans la vie économique internationale^ d’une communauté
élargie par-delà le cercle étroit de l’Etat.
Et l’on voit, d’autre part, ces relations économiques et
financières, et ces entreprises internationales s’orienter
vers ime sorte de bien commun valable pour l’humardté
tout entière, dans laquelle, à la suite d’extraordinaires
progrès techniques qui marquent le xx® siècle, s’affirme
plus étroite et plus puissante la solidarité internationale.
L’étude des relations et entreprises internationales de
caractère économique, technique et financier, constituera
la seconde sous-partie.
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PREMIÈRE SOUS-PARTIE

LES ORGANISATIONS INTERNATIONALES

Les tentatives d’organisation internationale.

348. — Les aspects doctrinaux. — Le rêve d’une orga¬


nisation internationale de caractère universel, permettant
d’assurer la paix du monde, a hanté depuis des siècles
l’esprit des hommes.
Mais l’importance de ces tentatives doctrinales demeure
mineure. Elle a été souvent fort exagérée, par exemple
lorsqu’on fait remonter au xiv® siècle et au De recuperatione
Terræ Sanctæ de Pierre Dubois, un des légistes de Phi¬
lippe le Bel, le premier plan d’une organisation inter¬
nationale.
Plus proche des conceptions , modernes apparaît le
projet du Roi de Bohême, George de Podiebrad, présenté
en 1464 et tendant à l’organisation de la paix et de la
sécurité à l’échelle européenne. Plus tard, aux xvii® et
XVIII® siècles divers ouvrages ont été consacrés à des pro¬
jets d’organisations internationales.
Après le Nouveau Cynée du gentilhomme français
Émeric de Crucé, écrit en 1623, est pubhé en 1641 le
Grand Dessein d’Henri IV dans les papiers de Sully,
duc de Béthune. Le xviii® siècle voit paraître de mul¬
tiples projets, dus à d’Argenson, à Fénelon, au quaker
William Penn, à Bentham, à Jean-Jacques Rousseau, à
l’abbé de Saint-Pierre, au philosophe prussien Kant et à
l’abbé Grégoire. On peut voir en ces personnages des
336 ORGANISATIONS INTERNATIONALES

précurseurs de l’organisation internationale, mais leurs


ouvrages, qui peuvent présenter quelque intérêt du point
de vue des idées politiques, n’ont exercé en réalité qu’une
très faible influence sur les solutions qui devaient être
adoptées par la suite.

349. — Les tentatives véritables. — C’est au xix® siècle


qu’apparaissent les premières tentatives d’organisation
internationale qui méritent d’être retenues. Elles se
situent sur le plan des réalités et même sur le plan des
réalités techniques et terre à terre. La vie de tous les
jours montre l’existence d’une solidarité internationale
entre les individus ressortissants d’Etats différents. Le
développement technique, les exigences du commerce
international renforcent cette solidarité et l’on voit
apparaître les premières organisations internationales, les
Unions administratives : en 1865 l’Union télégraphique
internationale, en 1874 l’Union générale des Postes
devenue en 1878 l’Union postale universelle. Sortie de
ces réalisations administratives, l’idée d’une organisation
internationale est en marche et l’on peut souscrire à la
formule du grand internationaliste français Louis Renault
lorsqu’il écrivait : « Les administrateurs des postes et des
télégraphes qui ont créé l’Union postale et l’Union télé¬
graphique, et dont les noms sont ignorés du pubhc, ont fait
plus pour la civüisation et l’entente entre les peuples que
bien des diplomates célèbres. »

350. — Les aspects actuels. — Les improvisateurs des


organisations internationales sur le papier ne s’étaient en
général souciés que de problèmes politiques. L’organisa¬
tion internationale de caractère pohtique est apparue
seulement au xx® siècle, au lendemain de la première
guerre mondiale, avec la Société des Nations.
De telles tentatives devaient par la suite se multipher,
et le XX® siècle en connaît ainsi un grand nombre.
Mais particuhèrement nombreuses aussi apparaissent
les organisations internationales de caractère technique
ou administratif, auxquelles on donne généralement de
nos jours le nom à!Institutions spécialisées.

351. — Organisations internationales et organisations


supra-nationales. — La technique juridique habituelle
utüisée dans les tentatives d’organisation de la société
internationale repose sur la notion d’Etat, et même
ORGANISATIONS INTERNATIONALES 337

d’État souverain, sous la seule réserve des limitations de


souveraineté découlant de l’appartenance à l’organisation
créée. On peut ainsi dire que les organisations interna¬
tionales de caractère politique sont du type confédéral et
réalisent des confédérations de caractère généralement
assez lâche et ténu.
Mais l’expérience a été tentée plus récemment des orga¬
nisations dites supra-nationales, ou encore des solutions
dites d’intégration. Ces formules sont obscures et compli¬
quées. Elles recouvrent une réalité bien définie, la réalité
fédérale. Les organisations dites supra-nationales sont des
organisations de type fédéral. Jusqu’à présent ces tenta¬
tives sont demeurées assez isolées et ne concernent qu’une
petite partie du continent européen. Si elles devaient se
générahser un jour, elles aboutiraient à une construction
fédérale dont l’étude détaillée n’appartiendrait plus au
domaine des institutions internationales.
Plan de l’étude. — Les diverses organisations qui
existent actuellement ou qui ont fait l’objet de projets
fort avancés sont difficiles à classer entre elles, et l’on
peut hésiter sur le plan qu’ü convient d’adopter pour les
présenter.
Si on veut mettre l’accent sur la technique juridique,
il faudrait les classer en organisations internationales et
organisations supra-nationales. Si on veut insister au
contraire sur leur domaine propre d’activité, on opposerait
les organisations à but pohtique et les organisations à but
technique, par exemple les institutions spécialisées. Mais
il convient de remarquer qu’il est peut-être plus simple de
les présenter aussi dans leur domaine géographique
d’action. Cette méthode d’approche et d’étude a l’avan¬
tage de mieux respecter, sinon l’ordre chronologique
d’apparition des institutions, du moins le processus de
formation. C’est celle qui sera adoptée ici.
Un premier titre traitera des organisations internatio¬
nales à compétence étendue et à vocation universelle.
Un second titre sera consacré aux organisations de
caractère continental ou régional.
L’étude des organisations spécialisées ou des plus
typiques d’entre elles formera un titre III.
Enfin un titre IV sera consacré à l’examen de quelques
problèmes généraux posés par les organisations interna¬
tionales.
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TITRE PREMIER

LES ORGANISATIONS UNIVERSELLES


A COMPÉTENCE ÉTENDUE

Définition. — Les organisations internationales les plus


audacieuses sont celles qui affirment leur vocation uni¬
verselle, tendent à grouper l’ensemble des États du monde
et disposent, dans ce domaine géographique, d’une com¬
pétence étendue, c’est-à-dire non spécialisée. A ce titre
elles s’opposent tant aux organisations à vocation égale¬
ment universelle, mais à compétence spécialisée.
Ces organisations universelles à compétence étendue
comportent deux types : la Société des Nations qui a
disparu, l’Organisation des Nations unies qui lui a succédé.
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CHAPITIΠPREMIER

LA SOCIÉTÉ DES NATIONS

352. — Histoire. — Le quatorzième point du message du


Président Wilson au Congrès des États-Unis, en date du
8 janvier 1918, indiquait : « Une Société générale des Nations
devrait être formée en vertu des conventions formelles ayant
pour objet de fournir des garanties réciproques d’indépen¬
dance politique et territoriale aux petits comme aux grands
États. »
Un projet de Société des Nations fut mis en œuvre par les
conseillers du Président à partir d’idées doctrinales apparues
aux États-Unis dès 1915 dans le cadre de la League to enforce
peace. Les projets nord-américains rencontrèrent un accueil
très favorable en Grande-Bretagne, car ils correspondaient
à une conception anglo-saxonne de l’organisation de la
paix. La conception française était différente, reposant
essentiellement sur l’existence de procédures et d’organes.
Les projets américains l’emportèrent sans difficulté devant
la commission pour l’élaboration d’un projet de pacte, créée
le 27 janvier 1919 par la Conférence de la paix. Le projet
de la commission fut adopté sur la proposition du Prési¬
dent Wilson, à l’unanimité, par la Conférence de la paix le
28 avril 1919.
Les divers traités de paix devaient contenir dans leurs
premiers articles le texte du Pacte.
La Société des Nations, créée ainsi en 1919, présente
trois caractéristiques essentielles : elle est une association
de gouvernements, eUe est un organisme international, elle
est un mode d’organisation de la vie internationale.

§ ler. — L’association de gouvernements.

La Société des Nations est une association de gouverne¬


ments, à tendance universaliste et de caractère égalitaire.
342 LES ORGANISATIONS UNIVERSELLES

A. — Association de gouvernements.

353. — La notion de Membre. — La S. D. N. est une asso¬


ciation de gouvernements, mais on ne pourrait la qualifier
d’association d’États avec une rigueur absolue, car il n’y a
pas coïncidence parfaite entre la notion de membre de la
Société et la notion d’État.
La notion de membre de la Société est, dans certains cas,
plus large que la notion d’État. Aux termes de l’article i®^',
§ 2, du Pacte, « Tout État, Dominion, colonie qui se gou¬
verne librement peut devenir membre de la Société ». Il
résulte de cette formule qu’en dehors des États d’autres
collectivités pouvaient être membres de la Société des
Nations. Les dominions qui, en 1919, n’étaient pas des États
au sens international, étaient membres originaires en tant
que signataires du Pacte. L’Inde ne fut pas un État pendant
toute la durée d’existence de la S. D. N., et elle était membre
originaire.
L’État libre d’Irlande, qui avait le statut de dominion,
fut admis dans la Société le 10 septembre 1923 après avoir
auparavant fait enregistrer au secrétariat le traité de Londres
du 6 décembre 1921, ce qui souleva des protestations britan¬
niques, ce traité étant considéré en Grande-Bretagne comme
un traité de droit interne.
L’Irak fut admis comme membre le 3 octobre 1932, et ü
apparaissait comme un mandat britannique, peut-être un
protectorat (V. supra, n® 166).
Mais, à l’inverse, la notion de membre de la Société est,
dans plus d’un cas, plus étroite que la notion d’État. L’ar¬
ticle I®'' exige en effet des collectivités qui demandent leur
admission dans la Société des engagements précis de leur
intention sincère d’observer les conventions internationales
et d’accepter le règlement établi par la Société en ce qui
concerne les forces et armements militaires, navals et aériens.
Surtout la pratique de l’Assemblée et de sa sixième commis¬
sion est rigoureuse, un véritable contrôle s’exerce sur les
candidatures. Une proposition de l’Argentine, formulée en
1920 et selon laquelle tout État reconnu devait être ipso facto
membre de la Société, est repoussée. Divers engagements sont
exigés des collectivités « candidates ». Les Etats baltes et
l’Albanie durent souscrire à des déclarations concernant le
sort des minorités, la Hongrie s’engager à la non-restauration
de la maison des Habsbourg; l’Éthiopie, admise en sep¬
tembre 1923, prit des engagements concernant l’abohtion
de l’esclavage et l’interdiction du commerce des armes.
L’Irak dut faire la preuve de l’existence d’une administra¬
tion propre. Certains États n’ont pas été admis en raison de
la petitesse de leur territoire, ainsi les principautés de Monaco
et de Liechtenstein.
LA SOCIÉTÉ DES NATIONS 343

354. — La représentation gouvernementale. — Les repré¬


sentants des membres de la Société, dans les divers organes
de la Société des Nations, sont nommés par les gouverne¬
ments et obéissent aux instructions qu’ils en reçoivent. Le
projet du général Smuts comportait une assemblée compo¬
sée des représentants des Nations elles-mêmes, mais il ne
fut pas retenu. Aussi bien à l’Assemblée qu’au Conseil, les
membres seuls sont représentés et la représentation concerne
non pas les Peuples ou les Nations mais seulement les gou¬
vernements. C’est la formule de la conférence diplomatique
qui est maintenue. On s’en écarte à la Conférence générale
de l’Organisation internationale du Travail (V. infra), mais
pas à la S. D. N. elle-même.

B. — L’aspect volontaire
ET LA TENDANCE UNIVERSALISTE.

355. — La tendance universaliste. — La S. D. N. a été créée


par quelques Etats et autres collectivités de caractère
international. Elle est, en principe, ouverte à d’autres col¬
lectivités qui feront acte de candidature et qui seront
acceptées. Ainsi les membres de la Société peuvent être
classés en trois catégories.
Les membres originaires, au sens de l’article premier,
comprenaient deux catégories. L’une était celle des signa¬
taires du Pacte. Énumérés dans une annexe, ils étaient au
nombre de 27 dont certains d’ailleurs ne ratifièrent pas le
traité et ne devinrent jamais membres comme les États-
Unis ou le devinrent plus tard comme la Chine (16 juil¬
let 1920) ou l’Équateur (28 septembre 1934). Parmi les
membres signataires figuraient les dominions britanniques
(Canada, Australie, Afrique du Sud, Nouvelle-Zélande) et
l’Inde.
Une seconde catégorie de membres originaires était com¬
posée par les États invités à accéder au Pacte. Leur liste
figurait aussi en annexe, mais distincte de la précédente. Il
s’agissait d’États neutres au cours de la guerre, européens
comme les Pays-Bas, l’Espagne, la Norvège, le Danemark,
la Suède, la Suisse; américains comme l’Argentine, le Chili,
le Paraguay, la Colombie, le Salvador, le Venezuela; asia¬
tique e^n comme la Perse.
Les membres originaires étaient donc ou des États alliés
et associés au cours de la guerre ou des neutres. Les États
ex-ennemis ne figuraient pas parmi les membres originaires.
Les États invités à accéder acceptèrent l’invitation mais par¬
fois à des conditions particulières, comme la Suisse, ou sans
y donner effet pendant longtemps comme l’Argentine qui
ne reprit une participation effective qu’en 1933.
Pour les membres autres que les membres originaires.
344 LES ORGANISATIONS UNIVERSELLES

apparaissait la catégorie des membres admis, fondée sur le


caractère volontaire de l'appartenance à la Société.

356. — Le caractère volontaire. — Le caractère volon¬


taire de l’appartenance à la S. D. N. se marque dans la
procédure d’admission et dans la procédure de retrait.
L’entrée dans la S. D. N. est volontaire, tant du point de
vue de la collectivité qui sollicite son admission que du point
de vue des membres qui décident de l’admission, après le
contrôle ci-dessus indiqué, en statuant par une délibération
de l’Assemblée acquise à la majorité des deux tiers des
membres qui la composent. Vingt États furent admis, parmi
lesquels l’Allemagne en 1926, l’U. R. S. S. en 1934, l’Égypte
en 1937.
Le caractère volontaire de la S. D. N. apparaissait aussi
très symétriquement dans le § 3 de l’article ler qui prévoyait
que tout membre pouvait se retirer après un préavis de
deux ans et l’accomplissement de toutes ses obligations
internationales. Ce texte consacrait en quelque sorte le droit
de sécession. Il fut plus largement utilisé qu’on ne l’avait
pensé. Le premier État qui quitta la Société fut le Brésil
en 1928, Le Japon notifia son retrait le 27 mars 1933,
l’AUemagne hitlérienne le 19 octobre 1933, l’Italie fasciste
le II décembre 1937. En tout seize États démissionnèrent de
la S. D. N.

357. — Les limites de l’aspect volontaire : l’exclusion. —


Par exception au principe de l’appartenance et de la démis¬
sion volontaires, l’article 16, § 4, du Pacte organisait une
procédure d’exclusion de la Société du membre qui s’était
rendu coupable de la violation d’un des engagements résul¬
tant du Pacte. Cette exclusion était prononcée par le vote
de tous les membres du Conseil, sauf l’État intéressé s’il
faisait, à ce moment, partie du Conseil. Une seule décision
d’exclusion fut prononcée pendant la durée de la S. D. N.
le 14 décembre 1939, eUe concernait l’U. R. S. S. qui avait
attaqué la Finlande.

C. — Association de caractère égalitaire.

358. — Égalité des obligations. — Le principe de l’égalité


des obligations des membres de la Société, bien que non
proclamé d’une manière formelle, constitue une des bases
essentielles de la S. D. N. C’est précisément dans la mesure
où certains États ne semblaient pas pouvoir assumer les
mêmes obligations internationales que les autres qu’ils ne
furent pas admis et que fut rejetée la formule d’une partici¬
pation limitée.
Sur le plan militaire, toutefois, l’un des États membres
LA SOCIÉTÉ DES NATIONS 345

fut dispensé des obligations prévues par l’article i6, § 3, du


Pacte. La Suisse fit reconnaître dès le début sa situation
particulière d’État perpétuellement neutre et une déclara¬
tion du Conseil de la S. D. N. du 13 février 1920, la dispensa
de participer à une action militaire et aussi d’admettre le
passage sur son territoire de troupes étrangères, même parti¬
cipant à une action commune régulièrement décidée par la
Société. La Suisse refusa ainsi en 1921 de permettre le pas¬
sage d’un corps international destiné à se rendre à Vilna.
La politique helvétique aboutit en 1935 à ne pas appliquer
le régime, pourtant anodin, des sanctions économiques contre
l’Itahe fasciste coupable d’agression à l’encontre de l’Éthio¬
pie, et une résolution du Conseil de la S. D. N. du 14 mai 1938
accentua la situation particulière de la Suisse au sein de la
Société en la dispensant d’appliquer à l’avenir les sanctions
économiques elles-mêmes.

359. — Les obligations financières. — Le principe de l’éga-


hté des obligations se présente sur le plan des contributions
financières sous la forme d’une égalité proportionnelle.
Dans sa version primitive, l’article 6, § 5, du Pacte pré¬
voyait que les dépenses seraient supportées par les membres
dans la proportion établie pour le Bureau international de
l’Union postale universelle. Un amendement entré en vigueur
le 13 août 1924 substitua à cette formule le principe de la
libre fixation par l’Assemblée des contributions respectives
des divers membres.

360. — Égalité des droits. — L’égalité des droits des


membres est un principe fondamental, bien que non formulé
expressément, de la S. D. N. Il découle de l’article 5, § i®'^,
selon lequel, en principe et sauf disposition contraire du
Pacte, « les décisions sont prises à l’unanimité des membres
de la Société représentés à la réunion ».
La règle de l’unanimité aboutit donc à consacrer le prin¬
cipe diplomatique de l’égalité des droits des membres.
Toutefois la structure même de la Société aboutissait à
faire jouer cette règle de l’unanimité au sein de deux orga¬
nismes différents, l’Assemblée et le Conseil, et faisait ainsi
une part à l’inégalité de fait des membres.

§ 2. — La Société des Nations,


organisme international.

La S. D. N. considérée comme un organisme international


comporte une structure tripartite, une Assemblée, un Conseil,
un Secrétariat.

361. — L’Assemblée. — L’Assemblée de la S. D. N. était


composée des représentants de l’ensemble des membres.
346 LES ORGANISATIONS UNIVERSELLES

Chaque membre pouvait envoyer trois représentants au plus


mais ne disposait que d’une voix.
Les réunions de l’Assemblée se tenaient en principe au
siège de la Société, c’est-à-dire à Genève, aux termes de
l’article 7, § i®*’. Les sessions ordinaires avaient Heu chaque
année au mois de septembre. Des sessions extraordinaires
pouvaient être tenues.
L’Assemblée était aidée dans sa tâche par diverses com¬
missions. Elle élisait chaque année son président et ses
6 vice-présidents.

362. — Le Conseil. — Pour concilier le principe juridique


de l’égalité des membres entre eux et l’existence, au sein de
la Société, d’États dont les responsabilités internationales
étaient considérables, le Pacte prévoyait à côté de l’Assem¬
blée, où siégaient tous les membres, un collège plus restreint
dénommé le Conseil.
Le projet français de S. D. N. et le projet initial du géné¬
ral Smuts prévoyaient que le Conseil ne serait composé que
des grandes Puissances. La solution finalement prévue par le
Pacte fut celle d’un organe dans lequel se trouvaient repré¬
sentées les 5 grandes Puissances mais aussi, à titre en quelque
sorte de témoins, des Puissances moins importantes. A l’ori¬
gine, et selon l’article 4 du Pacte, le, Conseil devait être
composé des 5 grandes Puissances (Empire britannique,
États-Unis, France, Italie, Japon) et de 4 autres membres
de la Société, désignés par l’Assemblée elle-même. Toutefois
à titre temporaire et jusqu’à la première désignation, le
Pacte désignait pour siéger au Conseil la Belgique, le Brésil,
l’Espagne et la Grèce.
Le § 2 de l’article 4 donnait une grande souplesse au sys¬
tème en prévoyant que le Conseil lui-même, avec l’approba¬
tion de la majorité de l’Assemblée, pouvait augmenter le
nombre des membres permanents et aussi celui de ses autres
membres.
La pratique devait largement jouer dans le sens de cette
augmentation et aboutir à ce qu’on a appelé parfois la
« démocratisation » du Conseil.

363. — Les transformations du Conseil. — Le caractère ini¬


tial du Conseil où les 5 grandes Puissances victorieuses étaient
représentées à titre permanent s’altéra rapidement. Les
États-Unis ne siégèrent pas, n’ayant pas ratifié le traité
de Versailles. L’Allemagne entra dans la Société le 8 sep¬
tembre 1926 et bénéficia d’un siège permanent. Le nombre
des sièges non permanents porté de 4 à 6 en 1922 fut fixé
à 9 par une résolution du 15 septembre 1926 qui créait aussi
la catégorie des sièges semi-permanents.
Cette formule était destinée à permettre à des États d’être
réélus successivement au Conseil. A la différence des membres
LA SOCIÉTÉ DES NATIONS 347

permanents, ils étaient soumis à réélection tous les trois ans


mais, à la différence des membres non permanents ordinaires,
ils pouvaient être réélus et bénéficier ainsi d’une permanence
de fait. La solution avait été imaginée au profit de la Pologne
et de l’Espagne déçues de voir l’Allemagne entrer au Conseil
en septembre 1926 avec la qualité de membre permanent.
Ces deux Puissances furent donc membres semi-permanents,
ainsi que la Chine ultérieurement. L’Allemagne quitta la
Société en 1935, après avoir démissionné en octobre 1933,
et ru. R. S. S. entra comme membre permanent au Conseil,
en 1936. Composé primitivement de 9 membres, dont 5 per¬
manents, le Conseil se transforma donc considérablement.
En 1936 il comportait ii membres non permanents, le Por¬
tugal ayant obtenu en sa faveur, en qualité de membre non
permanent, la création d’un dixième siège en 1933 et
un onzième ayant été créé en 1936.
La « démocratisation » du Conseil lui a enlevé son aspect
de concert des grandes Puissances. Le départ de l’Italie,
celui de l’Allemagne ayant été compensé par l’entrée de
l’U. R. S. S., réduisait le Conseil, à la veille de la seconde
guerre mondiale, à 3 membres permanents contre 11 non per¬
manents.
Avant 1935 certaines des grandes Puissances tentèrent de
créer, au moins d’une manière officieuse, une sorte de conseil
restreint, super-conseil des grandes Puissances. Le Pacte de
Rome du 7 juin 1933, dit Pacte à Quatre, s’inscrit dans le
cadre de cette tentative, mais l’opposition des politiques
était trop nette entre les Puissances fascistes et la France
et la Grande-Bretagne pour que cette tentative fut de
quelque portée. La « démocratisation » du Conseil contribua
dans une certaine mesure à l’affaiblissement de la S. D. N.

364. — Le Secrétariat. — L’article 6 du Pacte prévoyait


l’institution d’un Secrétariat établi à Genève sous la forme
d’une administration internationale permanente.
Ce Secrétariat comprenait un personnel de fonction¬
naires internationaux placés sous l’autorité d’un secrétaire
général dont le premier était désigné dans le Pacte lui-
même. Ce secrétaire général de la Société était en même
temps le secrétaire général de l’Assemblée et du Conseil.

365. “ Autres organismes. — A côté du Secrétariat au


service de la Société elle-même, existaient d’autres organes
de caractère technique, simplement soumis au contrôle du
Conseil et dotés d’une compétence spécialisée dans certains
domaines, économique et financier, d’hygiène, des communi¬
cations et du transit. En matière culturelle, l’organisation
était quelque peu différente, au moins après la création de
l’Institut international de coopération intellectuelle qui
exista à Paris à partir de 1924.
348 LES ORGANISATIONS UNIVERSELLES

Une place à part doit être faite également à la Cour perma¬


nente de justice internationale organisée en 1920 et fonc¬
tionnant comme cour de justice.

§ 3. — La Société des Nations,


mode d’organisation de la société internationale.

La Société des Nations n’est pas un Super-État, elle est


un mode d'organisation de la société internationale.

A. — La Société des Nations


n’est pas un super-État.

366. — Les délibérations. — A la première séance du Conseil


de la S. D. N., le représentant de l’Empire britannique,
lord Curzon, indiqua clairement que la Société n’était pas
un super-État. Cette thèse est parfaitement exacte. On peut
en trouver diverses démonstrations en examinant le méca¬
nisme des délibérations des organes de la Société. On sait,
qu’en principe, les délibérations du Conseil ou de l’Assem¬
blée ont lieu selon la règle de l’unanimité. ExceptioimeUe-
ment peut jouer au contraire la règle de la majorité ; il en va
ainsi par exemple pour l’admission d’un nouveau membre
(art. i®"", § 2 du Pacte) et l’article 5, § 2, prévoit, d’une
manière plus générale, que les questions de procédure, y
compris la désignation des Commissions chargées d’enquêter
sur des points particuliers, sont réglées par l’Assemblée ou
par le Conseil et décidées à la majorité des membres de la
Société représentés à la réunion.

367. — Portée des délibérations. — En dehors de la ques¬


tion de procédure de vote, la question se pose de la portée
même des délibérations des organes de la Société, de l’As¬
semblée ou du Conseil.
La règle générale est qu’il n’y a de pouvoir véritable de
décision que lorsqu’il s’agit de la vie administrative elle-
même de la Société. Ainsi l’Assemblée vote le budget par
une décision exécutoire, ainsi l’Assemblée prononce, à la
majorité des deux tiers, l’admission d’un nouveau membre.
De même, le Conseü, à l’unanimité, prononce l’exclusion
(art. 15, § 4). Le Conseil peut de même régler certaines ques¬
tions de la vie intérieure de la Société, par exemple nom¬
mer, avec l’approbation de la majorité de l’Assemblée, le
secrétaire général (art. 6, § 2), décider d’établir le siège de
la Société ailleurs qu’à Genève (art. 7, § 2), décider aussi de
faire rentrer dans les dépenses du Secrétariat celles de tout
bureau ou commission placés sous l’autorité de la Société.
LA SOCIÉTÉ DES NATIONS 349

Le Conseil dispose aussi d’un pouvoir de décision en matière


de protection des minorités et en matière d’administration
du territoire de la Sarre.
Mais d’une manière générale l’Assemblée, tout comme le
Conseil, ne dispose que d’un pouvoir de recommandation.
C’est à tort que certains textes font allusion à des décisions.
Les délibérations n’ont pas de portée exécutoire. Les délibé¬
rations ne sont que des recommandations, même lorsqu’il
s’agit de la compétence du Conseil intervenant pour la
garantie de la paix mondiale.

368. — Le problème des ratifications. — Les délibéra¬


tions de l’Assemblée ou du Conseil n’ayant jamais la valeur
d’une décision, sauf en matière de vie administrative inté¬
rieure de la Société, le problème des ratifications ne se pose
pas d’une manière générale.
On rencontre toutefois ce problème à propos des amende¬
ments au Pacte. L’article 26 prévoit que les amendements
au Pacte, qui sont adoptés par l’Assemblée, n’entrent en
vigueur que s’ils sont ratifiés par les membres de la Société
dont les représentants composent le Conseil et par la majo¬
rité de ceux dont les représentants forment l’Assemblée. Le
second paragraphe de l’article 26 permet à tout membre de
la Société de ne pas accepter les amendements apportés au
Pacte, auquel cas il cesse de faire partie de la Société. Cette
solution est conforme à l’existence du droit de sécession
recormu par l’article i®^', § 3.

369. — La compétence exclusive. — Les développements


qui précèdent montrent que la compétence propre des Etats
n’est point mise en danger par les organes de la S. D. N.
Une mention particulière doit être faite en matière de
règlement pacifique des litiges. Dans l’hypothèse d’un dif¬
férend international, et s’il s’agit d’un différend susceptible
d’entraîner une rupture et qui ne soit pas soumis à la procé¬
dure du règlement arbitral ou judiciaire, l’article 15 prévoit
son examen par le Conseil.
Bien que, dans aucun cas, l’examen par le Conseil ne
puisse aboutir à l’adoption d’une résolution de caractère
exécutoire, le § 8 de l’article 15 prévoit expressément le
maintien de la compétence exclusive de l’État. Ce maintien
est subordonné à un vote du Conseil. Le texte dispose en
effet : « Si l’une des Parties prétend et si le Conseil reconnaît
que le différend porte sur une question que le Droit interna¬
tional laisse à la compétence exclusive de cette Partie, le
Conseil le constatera dans un rapport, mais sans recomman¬
der aucune solution. » En d’autres termes, le Conseil dans
sa recommandation se borner à donner satisfaction éven¬
tuellement à la requête d’une des Parties au différend qui
prétend que l’affaire relève de sa compétence exclusive et
350 LES ORGANISATIONS UNIVERSELLES

échappe à toute procédure internationale, même au simple


examen par le Conseil, instance politique.

B. — La Société dks Nations, mode d’organisation


DE LA société INTERNATIONALE.

370. —■ Le système politique de la S. D. N. — La Société


des Nations repose sur le mythe d’une société internatio¬
nale organisée. Cette philosophie particulière trouve sa base
dans la combinaison du principe démocratique et des aspi¬
rations des combattants de la première guerre mondiale.
Cette guerre a pu apparaître comme le triomphe des Puis¬
sances démocratiques liguées contre les visées impérialistes
des Empires centraux. Pour les combattants cette guerre,
qui impliquait, de leur part, les plus lourds sacrifices, a été
considérée comme la dernière des guerres, avant l’instaura¬
tion d’un ordre international définitif.
Ce qu’on a appelé l’esprit de Genève repose sur cette
notion que l’humanité est arrivée, semble-t-il, à un stade
définitif de son développement.
C’est de cette notion que s’inspire l’article lo qui stabilise
les situations politiques et les délimitations territoriales.

371. — La guerre et la S. D. N. — La Société des Nations


tend à la réalisation d’une société internationale organisée.
Mais il faut noter qu’elle ne prohibe pas le recours à la guerre.
Elle se borne à limiter la procédure de guerre.
L’article 12 n’interdit pas aux membres de la Société de
faire la guerre, il fixe simplement un délai de trois mois après
l’intervention d’une procédure pacifique et interdit de recou¬
rir à la guerre avant l’expiration de ce délai.
L’interdiction de la guerre ne fait pas partie intégrante
du Pacte. Elle a été envisagée dans un texte particulier, le
Protocole de Genève de 1924 qui « bouchait les fissures du
Pacte », mais ne fut pas ratifié. Elle a été réalisée dans un
texte particulier jouant en dehors du Pacte, puisque les
États-Unis furent parmi les signataires, le Pacte de Paris ou
Pacte Briand-Kellog du 27 août 1928.

372. — Les procédures pacifiques. — Si le Pacte n’inter¬


dit pas formellement la guerre, du moins prévoit-il les procé¬
dures pacifiques qui sont destinées à la remplacer.
Les articles 12, 13 et 15 prévoient des engagements de ne
pas recourir à la guerre tant que n’ont pas été utilisées des
procédures pacifiques. Ces procédures sont le recours à l’arbi¬
trage ou à la justice internationale si le différend internatio¬
nal dont ü s’agit est susceptible d’un tel règlement, à défaut
le recours au Conseil de la Société, fonctionnant comme
organe politique.
LA SOCIÉTÉ DES NATIONS 351

373. — Les sanctions. — L’article 16 du Pacte organise des


sanctions contre le membre de la Société qui recourrait à la
guerre en violation des engagements contenus dans les
articles 12, 13 et 15.
Ces sanctions peuvent être de caractère militaire, écono¬
mique et financier, sans préjudice de l’exclusion de la Société.
Toutes les sanctions sont de caractère facultatif puisque
les délibérations du Conseil qui interviennent en la matière
sont de simples recommandations.

374. — L’activité de la S. D. N. — La Société des


Nations a duré du 10 janvier 1920 au 18 avril 1946, date à
laquelle s’est achevée la 21® assemblée ou, si l’on veut, jus¬
qu’au 31 juillet 1947, date de la clôture des comptes, mais
depuis 1940 elle n’a plus vécu que d’une vie ralentie.
Dans la tâche d’organisation de la société internationale
qui était la sienne, on doit convenir qu’elle a échoué.
Elle a réglé d’une manière plus ou moins satisfaisante,
une série de htiges de caractère mineur : affaire de Vilna,
entre la Lithuanie et la Pologne en 1920, affaire des îles
d’Aaland entre la Finlande et la Suède en 1921, conflit bulgaro-
grec en 1925, conflit de Léticia entre la Colombie et le
Pérou {1935). Mais pour les difficultés internationales les plus
graves, son intervention s’est soldée par des échecs : en 1923
à propos de Corfou, entre l’Itahe et la Grèce; en 1932 à pro¬
pos de l’agression japonaise en Chine; en 1936 à propos de
l’agression italienne en Éthiopie. La Société n’a pris aucune
mesure contre les violations du traité de paix par l’Alle¬
magne en 1935 et 1936, lors de la guerre civile espagnole
(i935‘i939). lors du démembrement de la Tchécoslovaquie
(1938), lors de l’Anschluss (1939). La Société n’a rien fait
lorsque l’Allemagne s’empara de Dantzig placé pourtant sous
sa protection.
L’esprit de Genève ne pouvait peut-être rien contre les
Puissances de proie et les gouvernements fascistes qui éle¬
vaient la politique d’agression à la hauteur d’un principe de
politique étrangère, mais on peut déplorer l’attitude de fai¬
blesse des Puissances démocratiques, qu’il s’agisse des grandes
Puissances ou des États d’importance moyenne. Le Gouver¬
nement helvétique lui-même, on l’a vu, refusa d’apphquer
en 1936 les sanctions bien anodines que le Conseil avait
adoptées à propos de l’agression italienne.
De faiblesse en faiblesse, la S. D. N. finit par ne plus rien
représenter au milieu de l’activité diplomatique et interna¬
tionale réelle. La seconde guerre mondiale, qu’elle n’avait
pas su empêcher, devait indirectement emporter la Société
des Nations. Le rêve grandiose n’avait pas réussi à devenir
une réalité.
352 LES ORGANISATIONS UNIVERSELLES

BIBLIOGRAPHIE

La bibliograpliie donnée ci-dessous est volontairement


sommaire, eUe n'est relative qu’aux ouvrages fonda¬
mentaux.

Scelle (G.), Le Pacte de la S. D. N. et sa liaison avec


les traités de paix, Paris, 1919; Redslob (R.), Théorie de
la S. D. N., Paris, 1927; Rousseau (Ch.), La compétence
delà S. D. N. dans le règlement des conflits internationaux,
thèse Paris, 1927; Scelle (G.), Une crise de la S. D. N. :
la réforme du Conseil et l’entrée de l’Allemagne à Genève,
Concihation internationale, 1927, n® i; Schucking (W.),
Le développement du Pacte de la S. D. N., R. C. A. D. I.,
1927, t. V; Whitton (J. B.), La neutralité et la S.D.N.,
R. C. A. D. 1, 1927, t. II; Lefur (L.), La délimitation de
la compétence de la S. D. N., Mél. M. Hauriou, 1929,
p. 527-566; Ray (J.), Commentaire du Pacte de la S. D. N.,
Paris 1930 (supplément jusqu’en 1935) ; Rauchberg (H.),
Les obligations juridiques des membres de la S. D. N. pour
le maintien de la paix, R. C. A. D. I., 1931, t. III; Gug-
GENHEIM (P.), Der Vôlkerbund, Leipzig, 1932 ; Kunz (J. L.),
L’article ii du Pacte de la S. D. N., R. C. A. D. I., 1932,
vol. 39; Andrassy (G.), La souveraineté et la S.D.N.,
R. C. A. D. I., 1937, t. HI; Mandelstam (A. M.), Le
conflit italo-éthiopien devant la S. D. N., Sirey, Paris, 1937;
Rappard (W.), Vues rétrospectives sur la S. D. N.,
R. C. A. D. I., 1947, t. H; Walters (F. P.), A history
of the League of Nations, Londres, 1951, 2 vol.
CHAPITRE II

L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES

375. — Histoire. — Au cours même de la seconde guerre


mondiale, et alors que la S. D. N. se disloquait progressi¬
vement, les Puissances qui luttaient contre les États fas¬
cistes songèrent à une nouvelle organisation interna¬
tionale. Aucune référence précise n'est pourtant faite à
ime telle organisation dans la Charte de l'Atlantique du
14 août 1941, mais plusieurs principes sont proclamés qui
la supposent, par exemple le principe de la sécurité géné¬
rale, celui de la renonciation à l'usage de la force, celui de
l'égal accès aux matières premières, celui du progrès
économique et de la sécurité sociale.
C'est la conférence de Moscou, en octobre 1943, qui pré¬
voit une organisation internationale fondée sur l’égalité
souveraine de tous les Etats pacifiques et ouverte à tous les
Etats grands et petits, formule qui est comme un écho du
quatorzième point du message du Président Wilson.
La mise en œuvre de ces principes devait être confiée
tout d'abord à des juristes qui se réunirent aux États-Unis,
à Dumbarton Oaks, à l'automne de 1944, et qui étaient
ressortissants des États-Unis, de la Grande-Bretagne, de
la Chine et de l'U. R. S. S. Ainsi furent établies, sans
beaucoup d'imagination d'aiUeurs et par une transposition
très fidèle des solutions du Pacte de la S. D. N., les pro¬
positions connues sous le nom de propositions de Dumbar¬
ton Oaks. La conférence pohtique dite de Crimée, tenue
à Yalta en février 1945 entre les chefs des trois gouverne¬
ments, britannique, nord-américain et soviétique, examina
12. - INSTITUTIONS INTERNATIONALES.
354 I-ES ORGANISATIONS UNIVERSELLES

ces projets et les compléta sur divers points, notamment


la procédure de vote au sein du Conseü restreint appelé
Conseil de sécurité.
La conférence de Yalta décida également de convoquer
une conférence des Nations Unies, signataires de la décla¬
ration du janvier 1942, qui se réunirait le 25 avril aux
États-Unis. Aux termes du point i dé la déclaration de
Yalta, les Puissances invitantes devaient être les'États-
Unis, le Royaume-Uni, l’U. R. S. S., la Chine et le Gou¬
vernement provisoire de la République française, mais
ce dernier refusa d’être Puissance invitante, le projet de
Dumbarton Oaks ne lui paraissant pas parfaitement
préparé.

376. — La conférence de San-Francisco. — La confé¬


rence prévue à Yalta a eu lieu à San-Francisco à la date
fixée. Elle avait été précédée d’une réunion préliminaire
tenue au même endroit du 9 au 20 avril, au cours de
laquelle avait été préparé le statut d’une nouvelle cour
de justice. Ce statut fut pratiquement identique à celui
de la Cour permanente de justice internationale qui avait
fonctionné dans le cadre de la S. D. N. La Conférence de
San-Francisco proprement dite commença ses travaux le
25 avrü, donc en pleine guerre. Lorsqu’elle les termina
le 26 juin 1945 avec la signature de la Charte de l’Orga¬
nisation des Nations Unies, la victoire était acquise en
Europe depuis le 8 mai avec la capitulation incondition¬
nelle de l’AUemagne. Lorsque la Charte entra en vigueur
le 24 octobre 1945, avec le dépôt des instruments de rati¬
fication des membres permanents du Conseil de sécurité
et de la majorité des autres Etats signataires, la victoire
était également obtenue en Asie avec la capitulation
japonaise du mois d’août.
Une nouvelle institution internationale était née. Elle
devait succéder à la S. D. N. dont la dissolution allait
être prononcée pour devenir effective le 31 juillet 1947.
La création d’une organisation nouvelle était néces¬
saire pour des raisons politiques. En effet la S. D. N. avait
manifesté son impuissance, d’aUleurs les États-Unis n’en
faisaient pas partie et l’U. R. S. S. avait été exclue de la
Société le 14 décembre 1939.
Mais la Charte se présentait finalement comme un
document qui, tout en comportant certaines analogies
avec le Pacte, demeurait très différent et beaucoup plus
complexe.
l’organisation des nations unies 355

Plan. — On présentera l’O. N. U. en étudiant succes¬


sivement quatre questions : l’association universelle
d’États, la structure elle-même, le fonctionnement de
l’organisation, le maintien de la paix.

Section I. — L’association d’États


à tendance universelle.

§ I®*’. — L’aspect interétatique.

377. — Le caractère intergouvememental. — Comme


la S. D. N., l’O. N. U. est une association internationale
de gouvernements. Le préambule, dans sa première
phrase, semble indiquer au contraire qu’il s’agit d’une
association des peuples, mais le dernier paragraphe dissipe
cette impression et indique bien que ce sont les représen¬
tants des gouvernements qui ont adopté la Charte, texte
de caractère diplomatique.

378. — La notion de membre. — Le chapitre II de la


Charte distingue deux catégories de membres : les membres
originaires et les autres. Sont membres originaires les
États qui remphssent la double condition d’abord d’avoir
participé à la conférence de San-Francisco ou d’avoir
antérieurement signé la déclaration des Nations Unies du
janvier 1942, ensuite d’avoir signé et ratifié la Charte.
L’article 4 prévoit les conditions dans lesquelles les
autres États peuvent être admis dans l’Organisation.
Les membres originaires étaient au nombre de 51. On
doit remarquer que, sur ces 51 membres, plusieurs n’étaient
pas des États, au sens international. L’Inde demeurait
sous contrôle britannique et n’était pas maîtresse, en 1945,
de sa politique extérieure. La situation juridique la plus
curieuse est celle de deux États-membres de l’U. R. S. S.,
l’Ukraine et la Russie Blanche qui sont membres origi¬
naires mais qui ne sont pas des États. On sait qu’à Yalta
le maréchal Stahne avait obtenu du Président Roosevelt
la représentation particulière à l’O. N. U. de ces deux
collectivités qui avaient particulièrement souffert de
l’invasion allemande.
356 LES ORGANISATIONS UNIVERSELLES

§ 2. — La tendance universaliste.

379. — La procédure d’admission. — La qualité de


membre de l’Organisation, sans aucune discrimination
par rapport aux membres originaires, peut être conférée,
aux termes de l’article 4, § i®i', à tous les Etats pacifiques qui
acceptent les obligations de la Charte et, au jugement de
l’Organisation, sont capables de les remplir et disposés à
le faire.
Il y a donc un contrôle de l’admission. Il est exercé par
un double vote, l’Assemblée générale se prononçant
à la majorité des deux tiers, sur recommandation du
Conseil de sécurité avec, dans le sein de cet organisme,
possibilité du jeu de la procédure dite du « veto ».
^ On remarque la différence existant avec la procédure
d’admission à la S. D. N. dans laquelle n’existait pas
l’intervention du Conseil.

380. — La pratique des admissions. — La S. D. N. avait


compté 60 membres en 1932. L’O. N. U. comportait
51 membres à l’origine, ce nombre en 1966 a plus que doublé
puisque l’Organisation compte 122 membres.
Les admissions des nouveaux États se sont faites par
vagues successives et il y a eu à diverses reprises des entrées
massives dues parfois à la politique d’équilibre des deux
blocs Est et Ouest, parfois à la politique de décolonisation.
Aux 51 membres originaires se sont ajoutés d’abord
9 États durant les cinq premières années : 4 en 1946 (Afgha¬
nistan, Islande, Siarn, Suède), 2 en 1947 (Pakistan et Yémen),
I en 1948 (Birmanie), i en 1949 (Israël), i enfin en 1950
(Indonésie).
Mais postérieurement d’autres admissions ont soulevé de
grandes difficultés, l’antagonisme des blocs jouant, l’U.R.S.S.
voulant faire entrer des États appartenant au groupe des
démocraties populaires et les Puissances occidentales voulant
faire entrer une série d’États européens ou asiatiques.
La Cour internationale de justice fut même appelée à
donner à ce propos deux avis consultatifs.
Par l’un du 28 mai 1948, elle condamna implicitement la
^èse soviétique qui liait entre elles les admissions des divers
États en les faisant dépendre les unes des autres, sans qu’on
puisse d’ailleurs tirer une conséquence pratique de cette
solution. Par le second du 3 mars 1950, la Cour a indiqué
qu’il était impossible à l’Assemblée générale de voter pour
l’admission d’un État si le Conseil de sécurité n’avait aupa¬
ravant voté avec faveur sur sa candidature ainsi que le pré¬
voit expressément l’article 4, § 2.
l’organisation des nations unies 357

Les admissions nouvelles furent ainsi longtemps bloquées


par un vote inattendu du 14 décembre 1955, ou vit
1 U. R. S. S. abandonner la pratique du « veto » qu’elle avait
largement utilisée et le Conseil de sécurité se prononça
favorablement pour l’admission de 16 États, l’Assemblée
n eut plus qu a voter dans le même sens.
Par ce vote entraient à l’O. N. U, 16 États, soit 6 États
ouest-européens ^utriche, Espagne, Finlande, Irlande, Ita¬
lie, Portugal), 4 États européens du t5rpe démocraties popu¬
laires : Albanie, Bulgarie, Hongrie, Roumanie, et 6 États afro-
asiatiques, Cambodge, Ceylan, Jordanie, Laos, Libye, Népal.
1 suivante, en 1956 devaient être admis le Japon,
le Maroc, le Soudan, la Tunisie, ces trois derniers pays accé¬
dant a 1 indépendance. Désormais les admissions allaient
etre fort nombreuses puisqu’il s’agit d’une trentaine d’États
qui sont entrés à l’O. N. U. au lendemain de leur indépen¬
dance, 1 admission apparaissant comme le couronnement du
processus de décolonisation. Après le Ghana et la Fédération
de Malai^sie en i957>. Guinée en 1958, quarante États
entrent a 1 Organisation : dix-sept en i960, quatre en 1961,
(dont la Mongolie extérieure), six en 1962, trois en 1963, trois
en 1964, trois encore en 1965, quatre en 1966, anciennement
administrés par le Royaume-Uni : Guyane-Barbade-Bots-
wana (ancien Bechuanaland) —Lesotho (ancien Basutoland).
Dans cet ensemble apparaissent trente États africains.
Certains nouveaux membres sont très exigus. La Barbade
admise en 1966 a 430 km* et 250.000 habitants, les îles Mal¬
dives admises en 1965 seulement 96.000. D’autres ont une
situation territoriale ‘curieuse. Le Botswana n’a aucun
débouché sur la mer, le Lesotho est complètement enclavé
dans le territoire de la Répubhque sud-africaine.
Avec actuellement 122 membres l’O. N. U. semble satis¬
faire à la formule de l’universalisme. Divers États restent
toutefois en dehors d’elle. La Suisse a refusé de faire partie
de 1 Organisation en raison de son statut particuher de neu¬
tralité, alors que l’Autriche en fait partie. Les bi-États ne
font pas partie de l’O. N. U., ainsi les deux États allemands,
les deux Etats coréens, les deux États vietnamiens. Certaines
principautés du Moyen-Orient (Bouthan-Bahrein-Quatar),
de minuscules territoires européens (Monaco-Liechtenstein-
Saint-Marin) ne font pas partie de l’O. N. U.
Mais la breche la plus importante à l’universahsme pro¬
vient de 1 absence à l’O. N. U. de l’État le plus peuplé du
monde : la Chine.

381. — Le problème de la Chine. — Un problème


délicat se trouve posé à l’O. N. U. depuis la fin de l’année
1949 et l’installation en Chine continentale du gouver¬
nement central populaire de la République populaire
démocratique de Chine. Le gouvernement Tchang Kaï
358 LES ORGANISATIONS UNIVERSELLES

Tchek installé dans la petite île de Formose continue à


siéger à l’O. N. U., non seulement à l’Assemblée mais au
Conseil de sécurité.
La question de la représentation de la Chine à l’Assem¬
blée générale se présente depuis 1950. Pendant onze ans,
jusqu’en 1961 l’inscription de la question à l’ordre du jour
a toujours été refusée.
En 1961, le Bureau, au contraire, a inscrit à l’ordre du
jour d’une part « la question de la représentation de la
Chine à l’O. N. U. », d’autre part la question intitulée
« Rétablissement des droits légitimes de la République popu¬
laire de Chine à l’O. N.U. ».
En ce qui concerne le problème lui-même de la repré¬
sentation l’Assemblée a adopté en 1961 la Résolution 1668
(XVI du 15 décembre) qui a rappelé l’existence d’une
grande divergence de vues entre les Etats membres à pro¬
pos de la représentation d’un membre fondateur nommé¬
ment désigné dans la Charte, évoqué la Résolution jgô
(V du 14 décembre 1950) au sujet d’éventuelles contro¬
verses quant à la représentation d’un gouvernement, et
décidé, conformément à l’article 18 de la Charte que toute
proposition tendant à modifier la leprésentation de la
Chine est une question importante. Ainsi cette Résolution
exige la majorité des 2/3 alors que les tenants de la candi¬
dature du Gouvernement de Pékin voient dans cette
question un simple problème de procédure devant être
tranché à la majorité simple.
La solution selon laquelle le problème dont il s’agit est
une question importante a été confirmée depuis 1961.
Adoptée en 1961 par 61 voix pour, 34 contre, 7 absten¬
tions avec 2 absents, elle l’a été de nouveau en 1965
(56 pour, 49 contre, ii abstentions avec i absent) puis en
1966 (68 pour, 48 contre, 7 abstentions), la majorité
s’est donc renforcée en 1966.
Sur le problème des droits de la Répubhque populaire
un projet de résolution présenté par l’U. R. S. S. n’a pas
été adopté en 1961, ni en 1962. Repris en 1963 par l’Alba¬
nie et le Cambodge il a été également rejeté (57 voix
contre, 41 pour, 12 abstentions). Un projet présenté en
1965 par 12 pays a recueilli 47 voix pour, 47 contre avec
20 abstentions; un projet analogue présenté en 1966 a
été rejeté plus nettement, n’obtenant que 46 voix alors
que 57 se prononçaient contre avec 17 abstentions.
l'organisation des nations unies
359
382. — L’aspect universel. — La tendance universa¬
liste de l’Organisation s’est affirmée très nettement. Si
l’on compare la liste des membres avec la liste des membres
de la S. D. N., on s’aperçoit tout de suite du grand nombre
d’Etats non européens. L’ O. N. U. montre l’importance
numérique des Etats non européens dans le monde.
D’ailleurs la représentation graphique utilisée pour
symboliser l’Organiption, une carte du monde entourée
d'un rameau d’olivier, adopte un système de projection
pour l’établissement d’une carte géographique qui n’est
pas le système traditionnel des pays européens, la pro¬
jection de Mercator. Cette « démer calorisation », selon le
mot d’André Siegfried, a une valeur symbolique. Une
série de groupements d’États se rencontrent à l’O. N. U. et
les États européens ne, constituent qu’une minorité.
La répartition des États fait apparaître divers blocs.
Les États dits du groupe soviétique sont 9 en y compre-
nant les deux Républiques membres de l’U. R. S. S. Les
autres États européens sont au nombre de 18 en y compre¬
nant la Yougoslavie qui vote souvent comme les pays de
l’Est ou les pays non engagés. Le groupe latino-américain
compte 20 membres. Le groupe de très loin le plus nom¬
breux qui compte actuellement la moitié des membres de
l’Assemblée est le groupe dit afro-asiatique.

§ 3- — L’aspect volontariste.

383. — L’entrée. — L’aspect volontariste est évident


en ce qui concerne l’entrée dans l’Organisation. Les États
qui désirent faire partie de l’O. N. U. posent en quelque
sorte leur candidature, tout comme autrefois à la S. D. N.,
et la procédure d’admission fait dépendre l’entrée d’un
État de la volonté de chacun des cinq membres perma¬
nents du Conseil de sécurité.
L’U. R. S. S. a ainsi bloqué, jusqu’en décembre 1955
l’entrée d’un grand nombre d’États (voir supra, n® 380).
La Chine nationahste a bloqué l’entrée de la MongoHe
de 1955 à 1961.
Si l’entrée d’États « candidats » a pu être ainsi retardée
ou bloquée, à l’inverse, on peut citer l’exemple d’États qui
n’ont pas voulu faire partie de l’O. N. U., c’est l’exemple,
d’ailleurs isolé, de la Suisse.

384. — Le retrait. — On ne trouve pas dans la Charte


des dispositions analogues à celles de l’article § 3 du
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362 LES ORGANISATIONS UNIVERSELLES

Pacte consacrant un droit de retrait. Mais une déclara¬


tion particulière a été adoptée lors de la conférence de
San-Francisco qui établit un régime analogue.
L’histoire de l’O. N. U. a connu un exemple de retrait,
celui de l’Indonésie qui a motivé son attitude par la dési¬
gnation de la Malaisie comme membre du Conseil de
Sécurité en 1965. Le retrait a pris effet au mars 1965
et a été accepté par le Secrétaire général.
L’Indonésie a décidé de coopérer à nouveau avec
rO. N. U. en 1966 et ses représentants reprenaient place
le 28 septembre.
La Charte, au contraire, continue à prévoir, comme le
Pacte, l’exclusion de l’Organisation. La procédure d’exclu¬
sion, prévue par l’article 6, est très symétrique de celle de
l’admission. Le membre qui enfreint de manière persis¬
tante les principes de la Charte peut être exclu par l’Assem¬
blée générale, sur recommandation du Conseü de sécurité.
L'Assemblée générale doit, aux termes de l’article 18, § 2,
statuer à la majorité des deux tiers. On remarquera que la
procédure d’exclusion faisant intervenir le Conseil de
sécurité, l’exclusion ne peut être prononcée contre un des
membres permanents car il est peu vraisemblable que
celui-ci vote en faveur de sa propre expulsion !

Section II. — La structure interne.

385. — L’organisation générale. — La structure interne


de rO. N. U. est beaucoup plus complexe que celle de la
S. D. N.
Elle comporte une Assemblée générale, homologue de
l’Assemblée, un Conseü dit de sécurité homologue du
Conseil de la S. D. N. mais avec des pouvoirs beaucoup
plus étendus, un Conseü économique et social, un Conseü
de tuteUe et un Secrétariat.
A l’énumération de ces organismes, l’article 7 de la
Charte ajoute la Cour internationale de justice.
La Cour donne des avis consultatifs juridiquement non
obligatoires mais qui sont dotés d’une grande autorité et
rend des arrêts que les États s'engagent à respecter.
L'article 7 prévoit, en outre, que des organes subsidiaires
pourront être créés.
La structure interne de l’O. N. U. a été modifiée et
complétée au cours des dix années de fonctionnement,
l’organisation des nations unies 363

en dehors d'une révision de la Charte qui a porté seule¬


ment, en 1965, sur la composition numérique du Conseil
de Sécurité et du Conseil Economique et Social.

§ i*"". — Organisation prévue


par la Charte elle-même.

386. — L’Assemblée générale. — L’Assemblée générale


se compose de tous les membres des Nations unies.
Chacun d’eux dispose d’une voix et peut avoir cinq repré¬
sentants au plus.
Elle tient une session annuelle réguhère (article 20) et,
lorsque les circonstances l’exigent, des sessions extraordi¬
naires. Les sessions se tiennent généralement au siège
permanent de l’Organisation, c’est-à-dire à New York.
La Charte n’avait pas fixé le siège, à la différence du
Pacte de la S. D. N., mais une résolution de l’Assemblée
du 14 décembre 1946 a choisi New York et de gigan¬
tesques bâtiments ont été édifiés dans cette ville, en bor¬
dure de l’East River. Les sessions de l’Assemblée peuvent
se tenir ailleurs qu’au siège permanent. La première
Assemblée s’est tenue à Londres, la troisième et la
sixième à Paris.
L’Assemblée fixe son règlement intérieur. EUe éht à
chaque session son président et ses vice-présidents. Par un
accord commun il a été décidé que la présidence ne serait
pas confiée à un des membres permanents du Conseil de
sécurité
L’Assemblée est aidée dans sa tâche par sept commis¬
sions : I*'® commission ou commission politique; commis¬
sion ad hoc ou commission poütique spéciale ; 2® commis¬
sion (questions économiques); 3® commission (questions
sociales) ; 4® commission (questions de tutelle) ; 5® commis¬
sion (questions administratives et budgétaires); 6®
commission (commission juridique).
Ces commissions sont composées d'autant de membres
que l’Assemblée elle-même. Elles préparent les projets de
déhbérations de l’Assemblée générale de manière à
écourter les débats de celle-ci.
La commission du Droit international est totalement
distincte, eUe est composée de quelques spécialistes qui
ne siègent pas en tant que représentants des États dont ils
sont ressortissants et qui sont élus par l’Assemblée géné¬
rale elle-même (sur son rôle, voir supra, n® 283).
364 LES ORGANISATIONS UNIVERSELLES

Un Bureau composé du Président, des treize vice-pré¬


sidents de l’Assemblée et des Présidents des sept commis¬
sions orgamse pendant la session la marche des travaux.
Le Président nomme pour chaque session une Commis¬
sion spéciale chargée de la vérification des pouvoirs des
représentants.
L’Assemblée est assistée de deux comités permanents :
le Comité consultatif pour les questions administratives
et financières (12 membres), et le Comité des contribu¬
tions (10 membres) élus pour trois ans.

387. — Le Conseil de sécurité. — Le Conseü de sécu¬


rité est, selon le système de la charte, l’organe le plus
imprtant de l’O. N. U. Il est organisé de manière à pou¬
voir exercer ses fonctions en permanence (article 2, § i®^)
et chaque membre du Conseil a un représentant perma¬
nent au siège de l’Organisation. La présidence est assurée
par roulement, chaque mois. Le Conseil de sécurité s’est
réuni très fréquemment dans les premières années de l’Or¬
ganisation ; par la suite le nombre des séances a très sen¬
siblement baissé.
Le Conseil de Sécurité, comme le Conseil de la S. D. N.
est un collège restreint. L’article 23 fixe le nombre de ses
membres et distingue deux catégories : les membres per¬
manents et les autres.
Cinq États ont été désignés par la Charte en 1945
comme membres permanents. Outre cette stabihté ils
bénéficient d’un privilège de vote pour les déhbérations
du Conseil ne portant pas sur des questions de procédure
(voir infra, n® 403). L’article 23 les énumère : Répubhque
de Chine (voir supra, n® 381), États-Unis d’Amérique
du Nord, Érance, Royaume-Uni, U. R. S. S.
Dans sa version de 1945 l’article 23 fixait à onze le
nombre des membres du Conseil de sécurité, six membres
non permanents s’ajoutant aux permanents. Selon l’ar¬
ticle 23 les membres non permanents sont élus pour
deux ans par l’Assemblée générale. Il n’existe pas de
membres semi-permanents, et au contraire l’article 23 en
son paragraphe 2 précise que les membres sortants ne sont
pas immédiatement rééligibles.
Un Conseil restreint de onze membres pouvait appa¬
raître comme suffisamment représentatif dans une organi¬
sation qui comptait, à l’origine une cinquantaine de
membres, mais le nombre des Etats ayant plus que doublé
en une vingtaine d’années l’augmentation des membres
l'organisation des nations unies 365

du Conseil est devenue une question fréquemment agitée


ces dernières années.
Il est apparu très difficile de modifier le nombre des
membres permanents, aussi la Résolution 1991 (XVIII)
adoptée le 17 décembre 1963 porte de onze à quinze le
nombre des membres du Conseil de sécurité, en maintenant
les cinq membres permanents énumérés par l’article 23
selon sa version initiale et en prévoyant qu’ü y a
dix membres non permanents et non plus six seulement.
La modification de la Charte relative au Conseil de sécu¬
rité est entrée en vigueur en 1965.

388. — L’élection des membres non permanents. —


Selon l’article 23, l’Assemblée générale pour élire les
membres non permanents tient compte en premier lieu de
la contribution des membres de l’Organisation au main¬
tien de la paix et de la sécurité internationales et aux
autres fins de l’Organisation et aussi d’une répartition
géographique équitable.
L’étude des élections successives au Conseil de sécurité
montre que l’élément géographique a été déterminant pour
les choix. Au cours des premières années de fonctionnement
de l’Organisation, un accord s’étabht pour répartir les
six sièges non permanents entre cinq groupes d’États : l’Eu¬
rope occidentale, l’Europe orientale, le Proche-Orient, le
Commonwealth, l’Amérique latine. Dans cette répartition
l’Amérique latine était représentée par deux États, chacun
des autres groupes par un. Malgré le principe d’une rotation
des États à l’intérieur de chacun de ces groupes des difficultés
ont surgi. La notion par exemple de pays de l’Europe orien¬
tale n’est pas claire ; eUe peut signifier tantôt des démocraties
populaires tantôt des États indépendants du bloc soviétique
comme la Yougoslavie, ou rattachés même au monde occi¬
dental, membres par exemple du Pacte atlantique comme la
Grèce ou la Turquie, ce dernier État ayant siégé à plusieurs
reprises tantôt en tant qu’État du Proche-Orient, tantôt en
tant qu’État de l’Europe orientale.
En outre la répartition initiale pouvait convenir à une
Organisation qui groupait une cinquantaine ou une soixan¬
taine d’États parmi lesquels les États latino-américains
étaient au nombre de 20, mais l’accroissement considérable
du nombre des États membres a transformé les données du
problème.
Les élections au Conseil de sécurité sont souvent disputées
et peuvent donner lieu à de nombreux tours de scrutin.
L’Ukraine a été élue en 1947 12® tour, la Turquie en 1950
au 15®, la Grèce en 1951 au 19®, la Yougoslavie en 1955 au
36®. A l’occasion de ce dernier scrutin on imagine d’ailleurs
366 LES ORGANISATIONS UNIVERSELLES

une pratique selon laquelle les deux États en compétition


concluent un accord selon lequel l’un d’eux est élu membre
du Conseil mais ne siégera qu’un an et sera remplacé l’année
suivante par l’autre. Un tel accord est étabU entre les délé¬
gations et ratifié par l’Assemblée générale. Il s’agit en réalité
d’une modification de la Charte puisque le mandat est alors
réduit à un an. Ce système qui a joué en 1955 entre la You¬
goslavie et les Philippines a été appliqué ultérieurement entre
la Pologne et la Turquie acceptant de siéger la première
en i960, la seconde en 1961. A la fin de i960 le Portugal et
le Libéria ont été candidats au siège qu’abandonnait l’Italie.
Après sept scrutins la candidature du Portugal bloquée par
les votes afro-asiatiques fut retirée et un accord de partage
intervint entre le Libéria et l’Irlande devant siéger l’un
en 1961, l’autre en 1962.
En décembre 1961, pour le remplacement de la Turquie,
la Roumanie et les Philippines se partagèrent les voix et, à la
suite d’un accord entre les deux pays, la Roumanie siégea
d’abord, les Philippines ensuite, pour un an. De même pour
le remplacement ultérieur des Philippines un accord ana¬
logue fut conclu entre la Tchécoslovaquie et la Malaisie. Une
procédure analogue intervint en décembre 1964 pour le rem¬
placement du Maroc, la Jordanie devant siéger jusqu’en fin
1965, ensuite le Mali, de 1965 à 1966.
Devant ces difficultés d’élections on a donc, par une pra¬
tique audacieuse, abandonné parfois les règles de la Charte
en acceptant que la durée du mandat soit réduite de deux
à un an.
L’augmentation des membres non permanents devrait per¬
mettre d’abandonner ce palliatif.
La Résolution 1991 (XVIII) du 17 décembre 1963 a non
seulement prévu l’augmentation du nombre des membres
non permanents du Conseil de sécurité mais formulé des
règles de répartition de ces sièges qui doivent donc se
substituer au gentlemen’s agreement de 1946 : cinq mem¬
bres parmi les États d’Afrique et d’Asie, un parmi les
États d’Europe orientale, deux parmi les États d’Améri¬
que latine, deux parmi les États d’Europe occidentale et
autres États (voir tableau).

389. — Le Conseil de tutelle (V. supra, n® 177).

390. — Le Conseil économique et social. — Le


Pacte de la S. D. N. n’avait pas accordé une grande place
aux problèmes économiques, et c’est seulement en 1920
qu’avait été créée, à la suite d’une conférence interna¬
tionale tenue à Londre en février, une organisation éco¬
nomique et financière consistant en plusieurs comités de
l’organisation des nations unies 367

caractère consultatif, tels que le Comité financier, le


Comité économique, le Comité fiscal, organes subsidiaires
du Conseil de la Société.
La Charte, au contraire, a prévu dans son chapitre X
(articles 61 à 72) un Conseil économique et social.
Selon la version initiale de l’article 61 de la Charte, le
Conseil économique et social était composé de 18 membres
élus chaque année par tiers pour une période de trois ans.
Le Conseil économique et social ne comporte pas de
membres permanents mais on peut constater qu’en dehors
de la Chine nation ahste les quatre autres membres per¬
manents du Conseil de sécurité ont toujours été réélus à
chaque renouvellement depuis 1946 et que la Chine natio-
nahste l’a été très fréquemment.
Par la Résolution adoptée le 17 décembre 1963 par
l’Assemblée générale et comportant modification de la
Charte après son entrée en vigueur en 1965, le nombre
des membres du Conseil économique et social a été porté
de 18 à 27.
La même Résolution a prévu que les 9 membres supplé¬
mentaires seront élus d’après les critères suivants : 7 mem¬
bres parmi les États d’Afrique et d’Asie, i parmi les États
d’Amérique latine, i parmi les États d’Éurope occidentale
et les autres États. Ces élections sont intervenues au cours
de la session de septembre 1965 de l’Assemblée générale.
Le Conseil tient plusieurs sessions par an conformément
au règlement intérieur qu’il a élaboré. L’article 68 de la
Charte prévoit que le Conseil institue des commissions
pour l’aider dans sa tâche, notamment pour les ques¬
tions économiques et sociales et le procès des droits de
l’homme, et dans tous autres domaines. Du Conseil
économique et social dépendent quatre Commissions
économiques régionales, pour l’Europe, l'Asie et l’Extrême-
Orient, l’Amérique latine et l’Afrique.

391. — Le Secrétaire général. — Le Secrétariat, prévu


par le chapitre XV, comprend un secrétaire général et le
personnel que peut exiger l’Organisation. Le secrétaire
général est nommé par l’Assemblée générale sur recomman¬
dation du Conseil de sécurité. Il est assisté, en dehors du
personnel lui-même, par des adjoints, secrétaires généraux
adjoints, directeurs, etc. Il est le plus haut fonctionnaire
de l’Organisation. La Charte n’a pas prévu la durée des
fonctions du secrétaire général. L’Assemblée, par une
résolution, a fixé le terme de cinq ans. Des difficultés ont
368 LES ORGANISATIONS UNIVERSELLES

surgi à propos du renouvellement du premier secrétaire


général en raison du « veto » opposé par l’U. R. S. S. La
solution d’une reconduction pour trois ans du premier secré¬
taire général a été adoptée avant qu’un nouveau titulaire
puisse être nommé.
Au premier secrétaire général, M. Trygve Lie, de natio¬
nalité norvégienne a succédé un suédois Dag Hammarsk-
jôld et après la mort tragique de celui-ci, en mission au
Congo, un diplomate birman M. Thant qui, après avoir
assumé des fonctions temporaires, a été désigné à l’unani¬
mité le 30 novembre 1962. Il a été réélu dans les mêmes
conditions en décembre 1966.
Le secrétaire général de l’O. N. U. est amené à jouer un
rôle très important dans la politique internationale. On
a dit quelquefois qu’il était le 12® membre du Conseil de
sécimté. C’est là une simple image, ü ne dispose pa3 de
droit de vote, il n’a derrière lui les forces d’aucun État.
Mais précisément incarnant l’Organisation internationale,
les rêves de paix et de justice qu’eUe symbolise, il peut
avoir une très grande influence.
L’article 99 lui permet d’attirer l’attention du Conseil
de sécurité sur toute affaire qui pourrait mettre en péril
le maintien de la paix et de la sécurité internationales et
en raison du désaccord existant généralement au sein du
Conseil il joue également un grand rôle auprès de l’Assem¬
blée.
L’action du Secrétaire général doit être évidemment
dorninée par le souci de l’impartialité et celui de l’inté¬
rêt international, il ne saurait, sans manquer à ses devoirs,
être inféodé à un groupe de Puissances.
Les dispositions de l’article 100 de la Charte sont d’ail¬
leurs formelles : « Dans l’accomplissement de leurs devoirs
le Secrétaire général et le personnel ne solliciteront ni
n’accepteront d’instructions d’aucun gouvernement ni
d’aucune autorité extérieure à l’Organisation. » Chaque
membre de l’Organisation s’engage par ailleurs à respecter
le caractère international exclusivement des fonctions du
Secrétaire général et du personnel et à ne pas chercher à
les influencer dans l’exécution de leur tâche.

392. — Le caractère du Secrétariat général. — La


conception, pourtant inscrite dans la Charte, d’un secré¬
tariat intemationahsé a été contestée en 1961, par l’Union
soviétique selon laquelle il conviendrait d’étabür à tous
les échelons du secrétariat un mécanisme collégial tri-
l’organisation des nations unies 369

partite, dit de la « troïka » comportant la présence simul¬


tanée de fonctionnaires appartenant l’un au groupe des
pays de l’Est, l’autre au groupe des pays de l’Ouest, le
troisième au groupe des pays non engagés. Dans l’intro¬
duction à son rapport annuel étabü le 17 août 1961
Dag Hammarskjôld a exposé et opposé les deux concep¬
tions possibles de l’Organisation elle-même et aussi de la
structure et du rôle du Secrétariat.
Une première conception « peut se réclamer de l’histoire
et des traditions des politiques nationales du passé », elle
apparaît comme « solidement ancrée dans la doctrine sécu¬
laire d’États nationaux souverains qui se font concurrence
par les armes et dont on peut, tout au plus, attendre sur le
plan international qu’ils parviennent à une coexistence paci-
cifique ». Ainsi Dag Hammarksjôld notait « certains Etats
membres conçoivent l’Organisation comme un méca¬
nisme statique de conférences pour résoudre les conflits
d’intérêts et d’idéologies en vue d’une coexistence paci¬
fique dans le cadre de la Charte et qui serait servi par un
Secrétariat considéré non pas comme pleinement internatio¬
nalisé mais comme représentant, par sa composition, lesdits
intérêts et lesdites idéologies ».
A cette conception traditionnelle tournée vers le passé
s’oppose une conception novatrice qui « peut invoquer les
exigences du présent et de l’avenir dans un monde où
l’interdépendance des nations est sans cesse plus étroit ».
Cette seconde conception « ouvre la voie à des formes plus
évoluées et sans cesse plus efficaces de coopération inter¬
nationale constructive ». Elle conduit à « mettre au point
des formes d’action de caractère exécutif entreprises au nom
de tous les États membres et visant à prévenir les conflits
ou à les résoudre lorsqu’ils ont surgi ».
Les États membres, en fait, ont parfois chargé le Secré¬
taire général de fonctions très importantes en l’invitant à
prendre les mesures d’exécution nécessaires pour mener à
bien l’action décidée.
Dans la pratique les fonctions du Secrétaire général ont
été exercées d’une manière étendue par rapport aux textes.
Ceci a été particulièrement sensible lorsque l’interven¬
tion de rO. N. U. résultait d’une déhbération de l’Assem¬
blée générale, le Conseil de sécurité se trouvant paralysé
par le veto (voir infra, n®® 410 et ss.).
370 LES ORGANISATIONS UNIVERSELLES

§ 2. — Les transformations de structure


depuis 1946.

393. — La Petite Assemblée. — La Charte n’avait prévu


aucun organisme siégeant d’une manière permanente entre
les sessions de l’Assemblée générale. En effet, le Conseil
de sécurité étant un organisme permanent, le besoin d’une
Commission permanente de l’Assemblée ne semblait pas
devoir se faire sentir.
Mais comme l’exercice du droit de « veto » a paralysé
pratiquement le Conseil de sécurité et que, par ailleurs,
la Charte confère dans son article ii, § 2, compétence à
l’Assemblée en matière de maintien de la paix et de la
sécurité internationales, certains États, notamment les
États-Unis, ont proposé la création d’une commission par-
ticuüère de l’Assemblée, destinée à siéger dans l’intervalle
des sessions. Cet organe nouveau a été dé^nommé Commission
intérimaire ou Petite Assemblée. Il a été établi d’abord pour
l’intervalle de deux sessions par une résolution du
13 novembre 1947. L’année suivante, une résolution du
3 décembre 1948 l’a renouvelée. Enfin une résolution du
22 novembre 1949 lui a conféré le caractère institutionnel.
La légahté de la création de cet organe a été contestée,
notamment par l’U. R. S. S. Il est évident qu’elle pouvait
être créée, car l’article 22 de la Charte prévoit que l’Assem¬
blée générale peut créer les organes subsidiaires qu’elle juge
nécessaires à l’exercice de ses fonctions.
La « Petite Assemblée » n’a pas, en réalité, joué un rôle
important.

394. — Le Comité des renseignements. — Parmi les


organes créés par une résolution de l’Assemblée, il faut
citer également le Comité d’examen des renseignements four¬
nis en vertu de l’article 75, delà Charte pour le contrôle
de la gestion de l'administration des territoires non auto¬
nomes (V. supra, n® 323).

395. — Union pour le maintien de la paix. — Dans


le même ordre d’idées, et pour tenter de tourner l’obstacle :
apporté au fonctionnement du Conseil de sécurité par le:
jeu du « veto », une résolution du 3 novembre 1950, connue ■
sous le nom d’Union pour le maintien de la paix, a tenté de
faire jouer un certain rôle en matière de maintien de la.
paix et de la sécurité à l’Assemblée générale (Voir infra i
n® 407). Pour assister ceUe-ci dans cette tâche, l’orga¬
nisation a été prévue de deux commissions particulières;
dénommées l’une Commission d’observation pour la paix,,
l’autre Commission des mesures collectives.
l’organisation des nations unies ‘ 371

396. — Organes subsidiaires. — D’une manière plus


générale, il convient de remarquer que l’article 7, § 2 de la
Charte prévoit que des organes subsidiaires peuvent être
créés par un organe principal de l’O. N. U. ou sous son
éçide, par une résolution de l’organe compétent. L'orga¬
nisme subsidiaire fait partie intégrante de l’organisation.
Les organes subsidiaires qui ont été créés sont fort
nombreux. Parmi les plus connus on peut citer la Commis¬
sion de conciliation pour la Palestine, la Commission des
Nations unies pour la Libye, la Commission spéciale pour
les Balkans, la Commission temporaire pour la Corée.
L’O. N. U. a utilisé très largement le procédé de l’organe
ad hoc chaque fois qu’il s’agissait de résoudre un pro¬
blème particulier. La force d’urgence (F. U. N. U.) après
l’affaire de Suez, la Force des Nations Unies pour le Congo
(O. N. U. C.), la Force pour Chypre (U. N. 1. CYP.),
constituent des organes subsidiaires.
Les organes étudiés ci-dessus correspondent aussi à la
notion d’organes subsidiaires.
Il ne faut pas confondre ces organes avec les institu¬
tions spécialisées créées par accords intergouvememen¬
taux et non par une délibération d’un organe de l’O. N. U.
et rehées à l’organisation par des accords spéciaux conclus
avec elle.
Il ne faut pas non plus les confondre avec des « organes
spéciaux » qui sont des organes existants au sein des
Nations unies, tout comme les organes subsidiaires mais
qui, par ailleurs, sont créés par des traités ou accords
intergouvemementaux. On peut citer comme exemple
d’organes spéciaux le Comité central permanent de
l’opium créé par la convention relative à l’opium du
19 février 1925 et l’organe de contrôle des stupéfiants créés
par la convention sur les stupéfiants du 13 juillet 1931.

Section III. — Le lonetionnement de L’O. N. U.


La Société Internationale Organisée.

Si rO. N. U. apparaît, du point de vue de ses membres,


comme une société interétatique, l’idée essentielle qui la
domine, celle de l’organisation de la société internatio¬
nale, aboutit à doter parfois ses organes de compétences
fort étendues.
372 LES ORGANISATIONS UNIVERSELLES

§ i®'. — Les buts et les principes.

Le chapitre I®*' de la Charte, dans les deux longs articles


qu’il comporte, définit dans le premier les buts des Nations
unies, dans le second les principes conformément aux¬
quels agissent l’Organisation et ses membres dans la pour¬
suite de ces buts. Mais il peut y avoir quelquefois ime
contradiction entre certains buts et certains principes.

397. — Les buts. — Énumérés dans l’article premier,


les buts des Nations unies sont au nombre de quatre.
L’Organisation qui est née en pleine guerre a pour but
principal le maintien de la paix et de la sécurité interna¬
tionales, la prévention des menaces à la paix, la répres¬
sion des actes d’agression, la réalisation par des moyens
pacifiques du règlement des différends internationaux.
Organisation de caractère interétatique, elle tend ensuite
à « développer entre les Nations des relations amicales
fondées sur le respect du principe de l’égalité de droits des
peuples et de leur droit à disposer d’eux-mêmes ».
La coopération intemationde est un autre but pour¬
suivi, qm devra être atteint en résolvant les problèmes
internationaux d’ordre économique, social et culturel, en
développant et encourageant le respect des droits de
l’homme.
Enfin l’Organisation apparaît comme un « centre où
s’harmonisent les efforts des Nations vers ces fins
communes. »

398. — Les principes. — L’article 2 énumère les sept


principes sur lesquels repose l’activité de l’Organisation
et de ses membres.
A vrai dire un certain nombre de principes sont ana¬
logues, sinon identiques, aux buts. Ainsi en va-t-il du
principe du règlement pacifique des différends, du prin¬
cipe de l’abstention du recours à la force. Il convient, à ce
propos, de remarquer que si la S. D. N. se bornait à régle¬
menter la guerre et à prévoir des procédures de rempla¬
cement ou de limitation, la Charte des Nations unies
interdit le recours à la guerre et repose sur le principe d’un
monde d’où la guerre est bannie. Le beau principe d’un
monde pacifique est doté d’ailleurs d’une large portée.
Il ne se limite pas à la société internationale des membres
mêmes de l’Organisation, car le point 6 de l’article 2 pré-
l’organisation des nations unies 373

cise bien que « l’Organisation fait en sorte que les États


qui ne sont pas membres des Nations Unies agissent confor¬
mément à ces principes dans la mesure nécessaire au
maintien de la paix et de la sécurité internationales ». En
dehors de ce premier et fondamental principe du maintien
de la paix et de la sécurité, l’article 2 proclame trois autres
principes. L’un est celui de l’exécution de bonne foi des
obligations contenues dans la Charte et n’appelle pas
d’observations particuüères. Les deux autres principes
sont plus déhcats à mettre en œuvre, l’un est le principe
de l’égalité souveraine des membres, l’autre est le principe
du respect de la compétence nationale. Leurs moda¬
lités d’application exigent des développements particu-
Hers.

399. —- La compétence nationale. — Le paragraphe 7


de l’article 2 déclare qu’aucune disposition de la Charte
n’autorise les Nations Unies à intervenir dans des affaires
qui relèvent essentiellement de la compétence nationale
d’un État ni n’oblige les membres à soumettre des affaires
de ce genre à une procédure de règlement aux termes de
la Charte, sans toutefois porter d’ailleurs atteinte aux dis¬
positions du chapitre VII concernant l’action possible du
Conseil de sécurité pour la protection de la paix du monde.
Ce texte fait songer à l’article 15, § 8 du Pacte qui
prévoyait la possibilité, pour un Etat membre de la
S. D. N., d’invoquer devant le Conseil, appelé à juger un
différend international de caractère politique, que l’affaire
relevait de sa compétence exclusive.
Mais la terminologie de l’article 15, § 8, était assez
précise. Saisi en quelque sorte d’une exception d’incom¬
pétence fondée sur le caractère d’affaire relevant de la
compétence exclusive d’un État, le Conseil examinait
l’objection et pouvait ou non reconnaître sa valeur.
L’article 2 de la Charte, en son § 7, se borne à admettre
une notion qu’ü ne définit pas, celle de compétence natio¬
nale.
A plusieurs reprises cette notion a été invoquée devant
l’Organisation. Les organes de celle-ci, l’Assemblée ou le
Conseil, ont pris des résolutions ou des délibérations qui
ont tantôt reconnu, tantôt rejeté cette notion. On ne
saurait, en les comparant, tenter de délimiter le champ
même d’application de cette compétence. En effet, les
décisions ont toujours été dictées par le seul souci d’une
politique internationale qui n’a jamais été autre chose
374 LES ORGANISATIONS UNIVERSELLES

que la politique d’une majorité d’États siégeant à l’Assem¬


blée générale.
Cette incertitude est fatale si l’on combine l’article 2,
§ 7, avec l’article § 2, qui invoque le principe du droit
des peuples à disposer d’eux-mêmes. Toutes les fois qu’a
été soulevée devant l’Assemblée une question de carac¬
tère «colonial», on a vu s’opposer le principe de la compé¬
tence nationale, défendu par la Puissance administrante,
et le principe du droit des peuples à disposer d’eux-
mêmes, défendu par les Puissances qui intervenaient
dans le débat pour proclamer la compétence de l’Orga¬
nisation.
^ La question ne pouvait être tranchée, évidemment,
d’une manière nécessairement correcte par une instance
politique. Elle ne pouvait l’être qu’au gré des majorités.
A ce titre, des débats de ce type et d’autres sur le même
sujet de la compétence nationale sont parmi les plus
décevants qui se soient déroulés devant l’Organisation.

400. Le principe de l’égalité souveraine. — Pro¬


clamé par l’article 2, § ce principe subit, au sein de
^^O^S^^^jsation, de multiples atteintes dans la mesure où
l’Organisation comporte des règles de vote qui font géné¬
ralement abandon de la notion classique et traditionnelle
de l’unanimité.
L égalité de droits se trouve affirmée mais se combine
avec le principe de 1 existence du Conseil de sécurité où
siègent cinq membres permanents dotés d’un privilège de
vote.
Sur le plan financier l’égalité des membres s’entend
d une manière proportionnelle. Le budget est voté par
1 Assemblée générale qui, aux termes de l’article 17, fixe
le barème des contributions de chacim des membres. Ces ,
contributions varient d’une manière considérable. La
participation des Etats-Unis est la plus forte. Elle a été,
à certaines époques, de 1 ordre de 40 %. Elle est actuel¬
lement de celle des autres membres permanents 1
ffii Conseü de sécurité étant respectivement de 14,92
jU- R-, S. S. qui atteint près de 18 % avec l’Ukraine et
la Biélorussie), 7,21 Royaume-Uni, 6,09 France et 4,57
Chine. La participation la plus faible est 0,04 %, elle
caractérise un grand nombre d’États d’Amérique cen¬
trale et d’Afrique. Les taux de participation des États 1
nouvellement admis sont en général très faibles. Les!
variations des taux de participation financière sont donc
l'organisation des nations unies 375

considérables mais elles n’affectent pas les règles de vote


à l’Assemblée générale, chaque État disposant d’une
voix.
Mais un problème se trouve tout de même posé à
l’Organisation internationale dans la mesure où des
recommandations peuvent être adoptées par une majorité
de 2/3 des membres qui ne représentent, financièrement,
qu’une très faible minorité.
Ainsi 45 États ne contribuent chacun que pour 0,04 %
mais représentent 42 voix qui se combinant avec celles de
12 États contribuant chacun pour 0,05 % à 0,09 % pour¬
raient représenter 59 voix pour un total de contributions
inférieur à 2 % de l’ensemble. Il y a donc une grave « sur
représentation ».
La question est importante dans la mesure où, par-delà
le budget de fonctionnement normal de l’Organisation qui
s’étabUt à plus de 100 millions de dollars, se pose le pro¬
blème du financement des opérations qui sont décidées
par l’Assemblée.
La Cour internationale de justice, dans un avis du
28 juillet 1962, a estimé que les dépenses exposées par
l’Organisation pour le financement de la Force d’urgence
en Eg5q)te et de la Force utihsée au Congo étaient des
dépenses obligatoires pour les États membres, devant
être réparties selon les normes fixées par l’Assemblée
générale sur proposition du Comité des contributions
pour les dépenses de fonctionnement.

§ 2. — Les délibérations
et les mécanismes de vote.

401. — Les délibérations. — Les délibérations des


divers organes de l’O. N. U. peuvent être classées en
deux grandes catégories, les délibérations exécutoires ou
décisions et les déhbérations qui ne sont pas exécutoires,
qualifiées de recommandations.
Il peut être déücat de savoir, en présence d’une déli¬
bération, s’il s’agit d’une décision ou d’une recomman¬
dation. En principe le Conseil de sécurité prend des
décisions, mais il peut exister aussi des recommandations
de ce Conseil. A l’inverse, normalement, l’Assemblée
générale se borne à émettre des recommandations. Mais
elle est dotée du pouvoir de décision dans une série
d’hypothèses qui concernent la vie intérieure de l’Orga¬
nisation.
376 LES ORGANISATIONS UNIVERSELLES

Ainsi l’admission d’un membre ou son exclusion sont


prononcées par une décision de l’Assemblée générale sur
recommandation du Conseü de sécurité. Le budget est
voté par une décision de l’Assemblée générale. L’Assem¬
blée prend aussi des décisions lorsqu’elle élit les membres
non permanents du Conseil de sécurité, les membres du
Conseil de tutelle, les membres du Conseü économique et
social, lorsqu’elle désigne, sur recommandation du Con¬
seü de sécurité, le secrétaire général, lorsqu’eUe éüt les
membres de la commission du Droit international ou les
membres de la Cour internationale de justice.
La terminologie de la Charte n’est pas toujours exacte,
et l’article i8, § 2, appeUe par exemple décisions des
délibérations dont certaines sont de simples recomman¬
dations.
La recommandation n’a pas de portée positive. EUe
peut être suivie ou non par les États. EUe peut, à titre
d’aüleurs exceptionnel, être le prélude à un traité inter¬
national pour lequel eUe aura été une étape préliminaire,
au stade de l’élaboration du texte.
Une série de décisions peuvent intervenir dans le
domaine de la procédure eUe-même, étabUssement
du règlement intérieur de l’Assemblée, nomination
d’un président ou institution d’un organe subsidiaire, etc.

402. — Le vote de l’Assemblée générale. — L'ar¬


ticle 5 du Pacte de la S. D. N. posait le principe de l’una¬
nimité pour les déUbérations de l’Assemblée comme du
Conseü.
La solution de la Charte, article i8, est strictement
inverse. L’Assemblée déübère toujours à la majorité des
voix, tantôt la majorité des deux tiers, tantôt la majorité
simple. Cette majorité se calcule d’après le nombre des
membres présents et votants. C’est dire que les absten¬
tions n’interviennent pas pour le décompte.
La majorité des deux tiers est exigée pour les ques¬
tions importantes. L’article i8 énumère diverses questions
importantes : les recommandations relatives au main¬
tien de la paix et de la sécurité internationales, l’élection
des membres non permanents du Conseil de sécurité,
1 élection des membres du Conseü économique et social,
1 élection des membres du Conseü de tuteUe, l’admission
de nouveaux menabres dans l’Organisation,.la suspension
des droits et privilèges des membres, l’exclusion de
membres, les questions relatives au fonctionnement du
l’organisation des nations unies 377

régime de tutelle et les questions budgétaires. La liste


n'est évidemment pas complète. Lorsque l’on hésite sur
le point de savoir si une question est une question impor¬
tante, la question est réglée par un vote de l’Assemblée.
La question de savoir si une question est importante n’est
pas, en elle-même, une question importante, c’est dire
que, conformément au § 3 de l’article 18, elle est tranchée à
la majorité simple des membres présents et votants.

403. — Le vote au Conseil de sécurité. — L’article 27


de la Charte réglemente les conditions de vote au Conseil
de sécurité. Chaque membre du Conseil dispose d’une
voix. La règle est ici encore celle de la majorité, mais
toutefois l’unanimité des membres permanents est requise
toutes les fois qu’il ne s’agit pas d’ime question de pro¬
cédure.
La distinction pour les règles différentes de vote n’est
pas ici, comme pour l’Assemblée générale, fondée sur
l’opposition des questions importantes et des autres, elle
est fondée sur l’opposition entre les questions de procé¬
dure et les autres.
Pour les questions de procédure, les déhbérations du
Conseil sont prises à la majorité de 7 voix
Pour les autres questions, les déhbérations doivent,
aux termes du § 2 de l’article 27, être « prises par im vote
afi6rmatif de 7 membres dans lequel sont comprises
les voix de tous les membres permanents », étant entendu
que, dans les décisions prises aux termes du chapitre VI
et du § 3 de l’article 52, xme partie à un différend s’abs¬
tient de voter.
Cette exigence du vote afi&rmatif de 7 membres y
comprises les voix de tous les membres permanents, qm
aboutit en faveur de chacun de ces derniers à un privi¬
lège de vote, est désignée dans le langage courant sous le
nom de droit de « veto ».
En présence du texte et de l’expression « vote af&rmatif »,
il semble que l’abstention ou l’absence d’un membre
permanent suffise à paralyser le Conseil. La pratique du
Conseil de sécurité a été, pourtant, en sens inverse. Cette
interprétation est particulièrement contestable. On peut
déplorer l’existence d’un vote privilégié, mais, étant

1 Aux termes de la résolution 1991 (XVIII) entraînant révision de la Charte


le chiffre 7 primitif a été remplacé par le chiffre 9.
378 LES ORGANISATIONS UNIVERSELLES

donné qu'il existe, le Conseil de sécurité doit se conformer


au texte régissant ce mode particulier de votation.
Un membre permanent qui s’abstient n’émet pas un
vote affirmatif et la résolution adoptée demeure juridi¬
quement dépourvue de toute valeur positive.
Il en va de même en ce qui concerne l’absence d’un
membre permanent. On sait que, pour protester contre la
présence au Conseil de sécurité d’un représentant de la
Chine nationaliste, l’U. R. S. S. s’est abstenue de siéger
au Conseil de sécurité du 13 janvier au août 1950.
Or le Conseil, à la suite de l’invasion de la Corée du Sud
le 25 juin 1950, a adopté, le 25 puis le 27 juin, deux réso¬
lutions. La seconde, en date du 27 juin, a servi de base
juridique à l’intervention des Nations Unies en Corée,
encore qu’avant même la délibération, les forces des
États-Unis aient reçu du Président Truman l’ordre
d’intervention.
On ne peut considérer comme juridiquement valable la
délibération du 27 juin 1950 acquise par huit voix avec
deux abstentions, un membre permanent étant absent.
On a présenté quelquefois cette déhbération comme une
simple recommandation qui aurait été acceptée par les
États et qui aurait donc été distincte d’une décision véri¬
table pour laquelle il aurait fallu le vote afl&imatif de
ru. R. S. S. On peut admettre cette interprétation, mais
elle a pour conséquence d’enlever tout caractère d’inter¬
vention des Nations Unies aux opérations militaires qui
ont été entreprises postérieurement au 27 juin 1950 en
Corée. Cette intervention peut se placer sur le plan d’une
riposte à l’attaque déclenchée par les forces de la Corée du
Nord, elle n’en demeure pas moins étrangère à la procé¬
dure régulière de l’Organisation des Nations unies.

404. -L’ exercice du « veto ». — Le droit de vote pri¬


vilégié réservé aux membres permanents leur permet de
bloquer à tout instant la procédure du Conseil de sécurité.
Les divers membres ont utilisé ce droit d’une manière
très variable. Les États-Unis n’en ont jamais fait usage.
La Chine s’en est servi une fois, le Royaume-Uni trois fois,
la France quatre fois. L’U. R. S. S., au contraire, a utilisé
très largement ce droit et l’on compte plus d’une centaine
de «veto» soviétiques qui ont porté en nombre à peu près
égal tant sur les admissions de nouveaux membres que sur
les questions de paix et de sécurité.
On a pensé pouvoir remédier à l’usage du droit de
l’organisation des nations unies 379

« veto ». Plusieurs délibérations de l’Assemblée générale


ont recommandé qu’il ne soit pas fait un usage abusif du
« veto », mais ces formules sont sans portée.
Certains auteurs ont cru devoir trouver un remède
dans la suppression du droit de « veto ». C’est là une pure
vue de l’esprit. Le « veto » est reconnu par la Charte, il ne
peut être supprimé que par une modification de la Charte
qui suppose eUe-même l’intervention des membres per¬
manents du Conseil de sécurité, et on voit mal comment
un État qui utilise le « veto » y renoncerait brusquement
dans une modification.
Le veto est évidemment un germe de paralysie du
fonctionnement de l’organisation internationale, mais il
est en même temps une sorte de garantie pour les États les
plus importants. Le problème qui se pose est celui de
savoir s’il vaut mieux une organisation internationale,
même avec le danger de la paralysie éventuelle, ou pas
d’organisation internationale. Il est vrai que certains
auteurs ou certains États pensent que l’éventuelle sup¬
pression du droit de « veto » avec une révision de la
Charte aboutirait à faire partir de l’Organisation un
certain nombre d’États. Si l’on veut respecter les ten¬
dances universahstes de la Charte, il faut actuellement
s’accommoder du droit de « veto », institution sans doute
regrettable mais qui existe et dont on voit au demeurant
mal comment elle pourrait être supprimée sans ruiner
l’O. N. U. tout entière.
Pour lutter contre les abus du droit de « veto » ont été
imaginées diverses procédures, la constitution de la
Petite Assemblée, c’est-à-dire d’un organisme permanent
comme le Conseil, mais régi par la règle de la majo¬
rité (V. supra, no 393), le développement de la compé¬
tence de l’Assemblée elle-même en matière de maintien
de la paix (V. supra, n® 395), mais l’Assemblée, à^ la
différence du Conseil, ne dispose pas en la matière d’un
pouvoir de décision.

405. — La révision de la Charte.— Le chapitre XVIII


de la Charte, sous le titre « amendements », organise les
procédures de révision.
L’article 108 traite des amendements proprement dits.
Ceux-ci ne peuvent entrer en vigueur qu’à la triple condi¬
tion d'avoir été adoptés à la majorité des deux tiers des
membres de l’Assemblée générale, d’avoir été ensuite
ratifiés par les deux tiers des membres de l’Organisation et
380 LES ORGANISATIONS UNIVERSELLES

enfin que, parmi ces ratifications, figurent celles émanant


de tous les membres permanents du Conseil de sécurité.
C’est par application de cet article qu’ont été opérées
les modifications relatives à la composition du Conseil de
sécurité et du Conseil économique et social (voir supra,
no® 387 et 390).
L’article 109 traite non pas des amendements isolés
mais de la révision même de la Charte.
Cette révision peut, d’après les textes, être l’œuvre
préparée par une conférence générale réunie aux heu et
date qui seront fixés par un vote de l’Assemblée générale,
à la majorité des deux tiers et par un vote de sept quel¬
conques des membres du Conseü de sécurité.
La modification de la Charte recommandée par la
Conférence de révision, à la majorité des deux tiers,
entrera en vigueur comme un amendement ordinaire.
Le dernier paragraphe de l’article 109 prévoit que si
une conférence de révision n’a pas été réunie avant la
dixième session de l’Assemblée générale, une proposition
en vue de la convoquer sera automatiquement inscrite à
l’ordre du jour de cette session, et que la conférence sera
réunie, s’il en est ainsi décidé par un vote de la majorité de
l’Assemblée et un vote de sept quelconques des membres
du Conseü de sécurité.
L’idée d’une révision générale de la Charte a été sou¬
vent exprimée, notamment par les États Unis et certains
États qui appuient leur pohtique. Dans l’état actuel de la
conjoncture politique, et en raison des règles mêmes
d’entrée en vigueur des amendements ou des modifica¬
tions de la Charte, il paraît peu probable que cette réunion
aboutisse à des résultats positifs. On peut craindre qu’ü
ne sorte d’une tentative de révision plus de mal que de
bien dans le domaine des relations internationales au sein
de 1 O. N. U. Une résolution de l’Assemblée, en date du
21 novembre 1955, a décidé qu’une conférence générale
de révision se réunirait lorsque le moment serait opportun
et a prévu quun Comité composé de tous les membres
étudierait avec le Secrétaire général la question de la
date et du Heu de la réunion de la conférence, ainsi que
son organisation et sa procédure.
l’organisation des nations unies 381

Section IV. — L’O. IV. U. et le maintien de la paix.

406. — maintien de la paix. — En matière poli¬


tique, et si l'on excepte le problème « colonial », c’est-
à-dire le contrôle des territoires non autonomes (V. supra,
n® 177) et l’organisation du régime de la tutelle inter¬
nationale (V. supra, no® 172 à 178), la tâche principale de
l’Organisation est le maintien de la paix.
Cette tâche est d’autant plus importante que la guerre
est interdite à l’intérieur de l’Organisation, entre les
États membres.
Le maintien de la paix aboutit à faire intervenir
l’Organisation, et tout particuhèrement le Conseil de
sécurité, d’une part pour régler les différends d’une
manière pacifique, d’autre part pour prendre éventuelle¬
ment des mesures coercitives.
C’est sur le Conseü de sécurité que la Charte faisait
reposer la paix du monde.
Par un curieux paradoxe, les interventions de l’O. N. U.
qui ont maintenu la paix ont été adoptées sur la base de
procédures différentes à la suite de la saisie de l’Assem¬
blée générale et de l’action du Secrétaire général.

§ ler, — Le rôle du Conseil d’après la Charte.

Selon la Charte le rôle du Conseil est double, il inter¬


vient pour régler les différends ou en facüiter le règle¬
ment, il exerce éventuellement une action qui entre dans
le domaine de la pohce internationale

A. — Les procédures de règlement pacifique.

407. — Le.règlement pacifique des différends. — Le


chapitre VI de la Charte pose les règles générales de la
solution pacifique des différends internationaux. Ce
chapitre, qui comprend six articles, vise essentiellement
l’intervention du Conseil de sécurité, mais l’Assemblée
générale peut également intervenir aux termes de l’ar¬
ticle II. Toutefois l’article 12 précise que la compétence
de l’Assemblée ne peut jouer tant que le Conseil demeure
saisi du différend ou examine la situation qui peut
entraîner un désaccord entre Nations ou engendrer un
différend. La compétence de l’Assemblée générale est
donc subsidiaire.
382 LES ORGANISATIONS UNIVERSELLES

Les dispositions du chapitre VI ne sont pas particu¬


lièrement bien ordonnées. Les diverses procédures paci¬
fiques s’y trouvent rappelées. L’article 33 conseille aux
Parties de recourir aux négociations, à la procédure
d’enquête, à la médiation, à la conciliation, à l’arbi¬
trage, au règlement judiciaire, à l’intervention des méca¬
nismes particuliers prévus par les accords régionaux.
L’intervention propre du Conseil de sécurité peut
consister en un examen du litige, une enquête, la recom¬
mandation d’une procédure particulière, la recomman¬
dation enfin de tels termes de règlement qu’il juge appro¬
priés. Ce qui a caractérisé l’intervention du Conseil de
sécurité en ce domaine, conformément d’ailleurs à l’esprit
même du chapitre VI, c’est l’extrême souplesse des pro¬
cédures, le recours dans chaque affaire à des organismes
subsidiaires créés pour la circonstance.
Dans l’ensemble, les interventions du Conseil de sécu¬
rité ont été assez décevantes. Il n’y a eu de réussite que
dans les cas où les Parties ont réussi à s’entendre elles-
mêmes, et parfois sous la simple forme d’une suspension
des opérations militaires.

B. — L’action coercitive.

408. — L’action coercitive du Conseil. — Une des par¬


ticularités les plus remarquables de la Charte est le rôle
dévolu au Conseil de sécurité, et qui justifie son nom, dans
le maintien de la sécurité à l’intérieur de l’Organisation.
Le chapitre VII prévoit d’une manière très précise
l’action du Conseil en cas de menace contre la paix, de
rupture de la paix et d’acte d’agression.
En intervenant dans le cadre de ce chapitre, plus spé¬
cialement aux termes des articles 41 et 42, le Conseil de
sécurité devait agir comme un organisme gouvernemental,
comme un super-gouvernement, chargé du maintien de
l’ordre international et disposant d’une véritable pohce.
Pour maintenir ou rétabhr la paix et la sécurité inter¬
nationales, le Conseil en présence d’un acte d’agression,
d’une rupture de la paix, d’une menace contre la paix
prend des mesures provisoires.
Les mesures que peut prendre le Conseil sont de divers
ordres. Les unes, visées par l’article 41, sont exclusives
de l’emploi de la force armée. Elles peuvent comprendre
l’interruption complète ou partielle des relations écono¬
miques et des communications ferroviaires, maritimes.
l’organisation des nations unies 383

aériennes, postales, télégraphiques, radio-électriques et


des autres moyens de communication ainsi que la rup¬
ture des relations diplomatiques. Ces mesures présentent
deux caractères. Non seulement elles ne sont pas mili¬
taires et s’analysent en des sanctions de caractère éco¬
nomique ou politique, mais si elles sont décidées par le
Conseil, elles sont, en dernière analyse, appliquées par
les États membres de l’Organisation. Elles s’opposent
ainsi aux mesures prévues par l’article 42. Il s’agit là
de mesures de caractère militaire. Elles sont décidées par
le Conseil habilité à entreprendre, au moyen de forces
aériennes, navales ou terrestres, toute action qu’il juge
nécessaire. Cette action peut comprendre des démons¬
trations, des mesures de blocus ou tout autre opération.
Le Conseil ici est non seulement l’organe de décision mais
encore l’organe de commandement suprême de l’opé¬
ration de pohce internationale. L’article 46 prévoit que le
Conseil étabht les plans pour l’emploi de la force armée et
un Comité d’état-major, composé des chefs d’état-major
des membres permanents du Conseü de sécurité ou de
leurs représentants, conseille et assiste le Conseil dans sa
tâche.
Toutefois les forces à la disposition du Conseil sont des
forces nationales fournies par les États membres, plus
particulièrement par les membres permanents, et même
les contingents de forces aériennes immédiatement utih-
sables en vue de l’exécution combinée d’une action coer¬
citive internationale, au sens de l’article 45, demeurent des
contingents nationaux « prêtés » au Conseil de sécurité.

409. — Le caractère de l’action coercitive, -y Le cha¬


pitre VII de la Charte est certainement celui qui a le plus
vieüh. On peut le considérer actuellement comme inap-
pUcable. Dans l’état actuel de coupure du monde en
deux blocs pohtiques rivaux et antagonistes, il est rare
qu’une décision du Conseil de sécurité soit acquise par rm
vote de tous les membres permanents. On ne voit pas
davantage un corps international d’intervention où
combattraient côte à côte des soldats des États-Unis, de
l’U. R. S. S. et de la Chine nationaliste. Le chapitre VII
est une sorte de prolongement de l’alliance militaire qui
a joué au cours de la seconde guerre mondiale institu¬
tionnalisée pour le maintien de la paix du monde.
Cette conception était, en son principe même, fragile
puisqu’elle ne maintenait la paix qu’à la condition
384 LES ORGANISATIONS UNIVERSELLES

qu’aucun des « Grands » ne la troublât, mais l’évolution


politique devait rapidement lui conférer un caractère
purement théorique.
Le chapitre VII est une pièce du musée des institutions
internationales, pourtant l’organisation d’une force de
pohce internationale et son intervention ont pu être
constatées dans le cadre de l’O. N. U. mais par suite du
jeu de procédures différentes de celles du chapitre VIL
Toutefois les sanctions contre la Rhodésie ont été
décidées par le Conseil le 16 décembre 1966 par apphcation
du chapitre VIL

§ 2. — Les opérations de police internationale.

Les opérations de pohce internationale effectuées par


l’O. N. U. depuis 1956 ont été menées alors que le Conseil
de sécurité était paralysé totalement ou partieUement par
l’exercice du droit de « veto ». EUes ont eu pour base des
résolutions de l’Assemblée générale et ont été exécutées
par le Secrétaire général.
Ce transfert de compétence du Conseil à l’Assemblée et
au Secrétaire général a posé de déhcats problèmes.

410. — La résolution 377 (V). — La résolution du


3 novembre 1950, connue sous le nom de « L’union pour
le maintien de la paix », a été adoptée par l’Assemblée
générale afin d’éviter l’inertie de l’Organisation dans le
cas où le Conseil de sécurité se trouvait paralysé par
l’exercice du « veto ».
La résolution s’inscrit d’aüleurs dans le contexte géné¬
ral de la Charte dont l’article 12 pose le principe de la
primauté du Conseil de sécurité en stipulant : « Tant que
le Conseü de sécurité rempht à l’égard d’un différend ou
d’une situation quelconque, les fonctions qui lui sont
attribuées par la présente Charte, l’Assemblée générale ne
doit faire aucune recommandation sur ce différend ou
cette situation, à moins que le Conseil de sécurité ne le lui
demande ». Le Conseil de sécurité n’avait pas été bloqué,
en juin 1950, parle « veto » soviétique dans la mesure où
l’U. R. S. S. était absente, mais les résolutions du Conseil
des 25 et 27 juin ne sauraient être considérées comme des
décisions du Conseil (voir supra, n° 403). Le représentant
de l’U. R. S. S. étant au cours de l’automne 1.950 revenu
siéger au Conseil pouvait bloquer par son vote toute
décision. Aussi M. Dean Acheson réussit-ü à faire voter
L ORGANISATION DES NATIONS UNIES 385

la résolution 377 par l’Assemblée générale qui décida


« que dans tout cas ou paraît exister une menace contre
la p^ une rupture de la paix ou un acte d’agression et
ou, du fait que 1 unanimité n’a pas pu se réaHser parmi ses
membr^ permanents, le Conseü de sécurité nianque à
s acquitter de sa responsabinté principale dans le main-
kiT sécunté internationales, l’Assem¬
blée générale exammera immédiatement la question afin
de fmre aux membres les recommandations appropriées
sur les mesures coUectives à prendre, y compris, s’il
s agit dime rupture de la paix ou d’un acte d’a^ession.
emploi de la force armée, en cas de besoin, pour rétablir
la p^ ou la sécunté internationales. »
Ainsi 1 Assemblée pouvait-elle se substituer au Conseil
paralysé et eUe pouvait être convoquée sur la demande
de la ma]onté de ses membres ou sur la demande de la
majonté de sept membres du Conseü de sécurité, comme
en matière de procédure, c’est-à-dire sans l’unanimité des
membres permanents.
la procédure de la Résolution 377 (Y) a
été uülisée en 1956 à propos de la Hongrie, saL effet
d aiUeurs, de 1 affaire de Suez, plus récemment en iq6i
du Congo, elle a entraîné dans ces deux derniers cas la
constitution de forces mtemationales de poHce mais qui
au lieu d être composées de troupes des Grands, ont
comporté des contingents de certains États seulement

411. — L’affwre de Suez et la force internationale


d urgence. Les forces anglo-françaises ont entrepris
le 31 octobre 1956 des opérations contre l’Égypte en vue
de protéger le canal de Suez à la suite de l’ultimatum que
ces deux Etats avaient adressé à Israël et à l’Égypte
SaiSs^''^''^^^ étaient engagées dans des opérations
Le Conseü de sécurité réuni le 31 octobre adopte un
projet de résolution présenté par les États-Unis et
recoiMiandant l’abstention de tout État dans le diffé¬
rend israëlo-égyptien. Mais ce projet adopté par 7 voix avec
dei^ ^stentions se heurte au double « veto » de la France
et du Royaume-Uni. Un projet de résolution proposé par
la Yougoslavie demandant la convocation de l’Assemblée
générale sur la base de la résolution 377 (V) est alors
adopté par 7 voix. \ /
Réunie le ler novembre, l’Assemblée générale adopte
diverses resolutions, la première concerne un « cessez le feu
13. — INSTITUTIONS INTEBNATIONALES.
386 LES ORGANISATIONS UNIVERSELLES

immédiat », une autre du 4 novembre, d’origine cana¬


dienne, demande la création d’une force internationale
d’urgence, elle est complétée par une troisième résolution
du 5 novembre d’origine norvégienne.
Placée sous le commandement d’un officier général
canadien, la Force internationale d’urgence des Nations
Unies (F. U. N. U.) a été composée de contingents de
diverses Nations ayant accepté de contribuer à sa for¬
mation. Plus de vingt États, appartenant à différents
groupes acceptèrent de fournir des contributions mili¬
taires, d’autres fournirent des facilités de transport. La
force internationale a eu des effectifs qui ont dépassé
5.000 hommes. Elle a été utilisée sur le territoire égyptien
comme garante de l’évacuation avec le plein accord du
gouvernement égyptien.

412. — L’affaire du Congo. — L’indépendance du Congo


belge a été proclamée le 30 juin i960, mais des troubles
s’étant manifestés dans le nouvel État où le gouverne¬
ment belge envoie des troupes pour protéger ses ressor¬
tissants. le gouvernement congolais saisit le Secrétaire
général d’une demande d’assistance militaire. Le Conseil
de sécurité, qui avait voté le 7 juillet en faveur de l’admis¬
sion du Congo dans l’Organisation, adopte le 13 juillet
une résolution demandant à la Belgique de retirer ses
troupes et autorisant le Secrétaire général à fournir au
gouvernement congolais l’assistance militaire dont il a
besoin. Les premières troupes composées de contingents
du Ghana et de Tunisie arrivent le 15 juillet.
Le Conseil de sécurité adopte les 22 juillet et 9 août
d’autres résolutions invitant la Belgique à retirer ses
troupes du Katanga, affirmant la nécessité pour la
Force internationale d’entrer au Katanga et précisant
que cette Force n’interviendra pas dans un conflit
interne, constitutionnel ou autre et ne sera pas utilisée
pour en influencer l’issue.
Mais l’accord qui régnait jusqu’alors au Conseil de
sécurité est rompu le 17 septembre par l’emploi du « veto ».
On utilise alors la résolution Acheson. L’Assemblée géné¬
rale dans sa résolution du 29 septembre i960 reprend des
solutions antérieures du Conseil de sécurité et demande
au Secrétaire général d’assister le gouvernement central
dans le rétablissement et le maintien de l’ordre sur
l’ensemble du territoire du Congo. La Force interna-
l'organisation des nations unies 387

tionale se heurte sur place à de grandes difficultés dans


un climat général d’insécurité et de troubles.
Après l’assassinat du Président Lumumba, le Conseil de
sécurité adopte le 21 février une résolution qui réunit
9 voix, deux membres permanents, la France etl’U. R. S. S.
s’abstenant.
La mission prévue dans cette résolution est beaucoup
plus large que celle fixée antérieurement aux Nations
imies. Il s’agit, en effet, de prendre toutes mesures pour
empêcher la guerre civile, la cessation des opérations mili¬
taires et du « recours à la force si besoin en est, en dernier
ressort ».
Ce recours à la force sera utihsé par les forces interna¬
tionales pour réduire l’opposition des « mercenaires »
étrangers en service au Katanga, les troupes des Nations
unies entrent à Éhsabethville le 13 septembre igôi et
le Secrétaire général de l’O. N. U. trouve la mort dans
un accident aérien le 18 septembre alors qu’ü se rend à la
rencontre du Président katangais. Un accord provisoire
est conclu le 20 septembre et complété en octobre 1961
entre le Katanga et les Nations unies, ü est de caractère
mihtaire. A nouveau saisi de l’affaire, le Conseü de sécu¬
rité a adopté une résolution le 24 novembre 1961, par
neuf voix avec deux abstentions (France, Royaume-Uni),
autorisant l’utilisation de la force « dans la mesure
requise » pour expulser les mercenaires et conseillers poh-
tiques étrangers.
C’est sur la base juridique de cette résolution que
devaient être entreprises diverses opérations qui ont
abouti en 1963 à la réintégration du Katanga dans l'État
du Congo qui avait été adims en i960 à l’O. N. U. en tant
qu'entité.
L'affaire du Congo a été l’occasion de l’intervention
d’une force des Nations unies assez puissante puisqu’elle
a compté environ vingt mUle hommes avec des contin¬
gents fournis par vin^ pays différents, tout particuhè-
rement par des États africains.
L’utUisation au Congo de forces armées des Nations
unies a revêtu une importance considérable. L’Organisa¬
tion a manifesté sa vitahté et a certainement maintenu
au Congo la paix du monde en empêchant toute inter¬
vention étrangère étatique. Si l’on compare le rôle de
l’O. N. U. au Congo avec l’inaction de la S. D. N. à propos
de la guerre d’Espagne, on peut constater une différence
très nette. L’emploi de la Force internationale a été subor-
388 LES ORGANISATIONS UNIVERSELLES

donné à l’accord du gouvernement de Léopold ville selon


des conventions conclues en juillet i960 avec un accord
complémentaire du 27 novembre 1961.

413. — Les difficultés financières et politiques. —


Les résolutions de l’Assemblée sont des recommanda¬
tions dont la mise en œuvre a été opérée par le Secrétaire
général, en quaüté de plus haut fonctionnaire de l’Orga¬
nisation. Contraint à poursuivre une action entreprise ou
recommandée, à interpréter en fonction de la Charte et
de son esprit, des résolutions fragmentaires et nuancées,
le Secrétaire général a pu, parfois, dans l’affaire du Congo
notamment, se trouver en flèche par rapport aux attitudes
de certains États et en particulier de certains d’entre eux
qui, dotés du privilège de vote réservé aux membres du
Conseil de sécurité, voient mal volontiers les résolu¬
tions majoritaires de l’Assemblée, adoptées malgré leur
opposition, servir de fondement à une action effec¬
tive.
L’éventuel désaccord marqué par certains États à
l’égard de la pohtique du Secrétaire général a pu donner
heu de leur part à de vives critiques de l’action de celui-ci.
Elle a pu se projeter aussi sur le plan financier et entraîner
une grave crise de. l’O. N. U.
Les opérations effectuées sont, en effet, coûteuses. Par
exemple l’ensemble des opérations au Congo entre i960
et 1964 a atteint 275 miUions de dollars. L’Assemblée
générale a décidé que ces dépenses constituaient des
dépenses de l’Organisation au sens de l’article 17, § 2 de
la Charte. Ce point de vue contesté par divers États dont
lU. R. S. S. et la France a été retenu pourtant par la
Cour internationale de justice dans son avis consultatif
du 28 juillet 1962. Mais ces États et d’autres ont refusé de
s’inchner. Les a,rriérés concernant l’O. N. U. s’élevaient
encore le 31 décembre 1965 à 46 miUions de dollars.
Le problème financier est donc grave. On n’a pu y faire
face dans la mesure où certains États ont procuré à l’Or¬
ganisation des facilités de trésorerie, c’est le cas des États-
Unis, et ont souscrit largement aux emprunts lancés par
l’Organisation.
Finalement il apparaît que la solution de transfert à
l’Assemblée des compétences appartenant au Conseil en
matière de maintien de la paix mais qu’il ne f)eut exercer
en raison du « veto » n’est pas d’un maniement très com-
l’organisation des nations unies 389

mode. Il ne sufi&t pas qu’une large majorité d’États vote


des résolutions, il faut encore qu’eUe puisse correspondre
à un « support » financier suffisant.

BIBLIOGRAPHIE

Pour tme bibliographie très complète, axée principale¬


ment sur les Nations unies considérées sous l’angle du
fonctionnement et du rôle joué dans les relations inter¬
nationales, voir « Le système des Nations Unies, état des
travaux », de Pierre Gerbet, dans la Revue Française de
Science Politique, 1963, n^ 2, p. 467-494 et n® 3, p. 740-767.
Dans l’ensemble, la documentation publiée par l’Orga¬
nisation eUe-même est considérable. On pourra consulter
particulièrement les rapports du Secrétaire général
(publication annuelle) ainsi que l’introduction à ces rap¬
ports; une référence spéciale doit être faite au dernier
rapport de Mr. Hammarskjoeld en 1961. Le rapport du
Secrétaire général est une source d’information rapide car
il passe en revue tous les événements des Nations unies
de l’année écoulée.
Il existe un Annuaire des Nations Unies depuis 1946.
Il est publié en langue anglaise, sauf une édition française
en 1948, sous le nom de United Nations Yearhook.

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Dupuy (J.), San Francisco et la Charte des Nations Unies,


Paris, Office Français d’édition, 1945; Kopelmanas (L.),
L’Organisation des Nations Unies, Paris, t. I, 1947;
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Stevens, 1949; Bentwich (N.) et Martin (A.), A com-
mentary on the charter of the United Nations, Londres,
Routledge et Kegan, 1951; Kelsen (H.), The law of the
United Nations, Stevens, 1950 (supplément en 1951);
Verdross (A. von). Idées directrices de l’O. N. U.,
R. C. A. D. L, 1953, vol. 83; WiLcox (F.) et Marcy (C.),
Proposais for change in the United Nations, Washington,
1955; Clark (G.) et Sohn (L. B.), World peace through
World law, Cambridge, Harvard University Press,
1958; Giraud (E.), La révision de la Charte des Nations
Unies, R. C. A. D. I., 1958, vol. 90; Robinson (J.), Meta-
morphosis of the United Nations, R. C. A. D. I., 1958,
390 LES ORGANISATIONS UNIVERSELLES

t. 94; Goodrich, The United Nations, Londres, i960;


Les Nations Unies, chantier de l’avenir, t. I : Les Nations
Unies et les pays sous-développés, 1961 ; t. 2 : Les
Nations Unies au service de la paix, 1962, Paris, Presses
Universitaires de France; Virally (M.), L’O. N. U.
d’hier à demain, Paris, 1961; Chaumont (Ch.), L’Organisa¬
tion des Nations Unies, Collection « Que sais-je ? », 3® édi¬
tion, Paris, 1962 ; L’O. N. U. utile ou néfaste? |Préface de
M. Schumann, Paris, 1962; Higgins (R.), The develop¬
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B. — Structure de l’organisation.

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Nations Unies, R. C. A. D. I., 1956, t. 89; Hadwen (J.G.)
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made, Sythofï, 1961; Chaumont (Ch.), L’équilibre des
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tion, A. F. D. I., 1965, p. 428-446 ; Dehousse (F.), Le droit
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p. 8-27; Nizard (L.), Le retrait de l’Indonésie des Nations
Unies, A. F. D. I., 1965, p. 498-528.
Sur l’Assemblée générale.
Lad AME (P. A.), L’Assemblée générale des Nations Unies,
thèse Genève, 1949; Ball (M.), Bloc voting in the General
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P- 3"3i» Brugière (P.), Les pouvoirs de l’Assemblée géné¬
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Paris, 1955: Vallat (F. A.), The compétence of the United
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Londres, Stevens, i960; Queneudec (J.-P.), Le Président
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Sur le Conseil de sécurité.


Brugière (P.), La règle de l’unanimité des membres per¬
manents au Conseil de sécurité, le droit de veto, Paris, 1952 ;
l’organisation des NATIONS-UNIES 39I

Day (G.), Le droit de « veto » aux Nations Unies, Paris,


1952; Jimenez de Arechaga (E.), Le traitement des dif¬
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1954, t. 85; Jalichandra (T.), Les organes subsidiaires
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rends internationaux, thèse Paris, 1962.

Sur le Conseil économique et social.


Vellas (P.) et Inchaupse (L.), Les compétences du
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Sur le Secrétaire général.


ScHWEBEL (S.), The Secretary general of the United
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troïka and future of the United Nations, New York, 1962;
SouBEYROL (J.), Aspects de la fonction interprétative
du Secrétaire Général de l’O. N. U. lors de l’affaire du
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Sur les fonctionnaires du Secrétariat


et son organisation interne.
Bastid(S.) , Statut juridique des fonctionnaires des Nations
Unies, The United Nations Ten Years’ Legal Progress,
La Haye, 1955 ; Langrod (G.), Le Secrétariat del'O. N. U.,
Archiv des Vôlkerrechts, nov. 1956, p. 1-40.

C. — Fonctionnement de l’organisation.

On trouve chaque année dans l’A. F. D. L une analyse


des événements et des principales résolutions.

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Généralités.
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l’organisation internationale, Mél. Wehberg, 1956, p. 395-
403; Goodrich (L.) et Simons (A.), The United Nations
and the maintenance of international peace and security,
Washington, 1957; Langenhove (E. van), La crise du
392 LES ORGANISATIONS UNIVERSELLES

système de sécurité collective des Nations Unies, La Haye,


1958; Bowett (D. W.), United Nations Forces, Londres,
Stevens, 1964.

Sur l’affaire de Corée.


Lavau (G. E.), L’O. N. U. et l’affaire de Corée, Revue
égypt. de droit international, 1951, p. 27-49; Franken-
STEiN (M.), L’Organisation des Nations Unies devant le
conflit coréen, Paris, 1952; Gordenker (L.), The U. N. and
the peaceful uniflcation of Korea, Nijhoff, La Haye, 1963 ;
Gamal EL DiN ATTiA, Les forces des Nations Unies en
Corée et au Moyen-Orient, Droz, Genève, 1963.

Sur l’affaire de Suez.


, Bastid (S.), L’action militaire franco-britannique en
Egypte et le droit des Nations Unies, Mél. Gidel, p. 49 et s. ;
Chaumont (Ch.), La situation juridique des États membres
à l’égard de la force d’urgence des Nations Unies, A. F. D. I.,
1958, p. 399-439; Lauterpacht (E.), The U. N. Emergency
Force, basic documents, Londres, i960; Poirier, La force
internationale d’urgence, Paris, 1962.

Sur l’affaire du Liban.


Dupuy (R. J.), Agression indirecte et intervention solli¬
citée à propos de l’affaire libanaise, A. F. D. L, 1959,
p. 431-467.

Sur l’affaire du Congo.


XX..., La crise congolaise, janvier 1959-
15 août i960 : Documents et commentaires. Chronique
de^ Politique Étrangère, i960, juill. - nov. ; XX...,
L’évolution de la crise congolaise de septembre iç6o à
avril igôi .‘ Documents et commentaires, Chronique de
Politique Étrangère, sept.-nov. 1961, p. 565-1154;
ViRALLY (M.), Les Nations Unies et l’affaire du Congo,
A. F. D. L, i960, p. 557-597; Hoffmann (S.), In search of
a thread : the U. N. in the Congo labyrinth, International
Organization, 1962, n® 2, p. 331-361; Leclercq (C.),
L’O. N. U. et l’affaire du Congo, Paris, Payot, 1964.
Sur l’affaire de Chypre.
Flory (M.), Force internationale des Nations Unies et
pacification intérieure de Chypre, A. F. D. I. 1964
p. 458-478.
l’organisation des nations unies 393

Sur l’affaire de Saint-Domingue.


Dupuy (R.-J.), Les États-Unis, l’Organisation des États
Américains et l’Organisation des Nations Unies à Saint-
Domingue, A. F. D. I., 1965, p. 71-110.
2. Décolonisation.
Mathiot (A.), Les territoires non autonomes et la Charte
des Nations Unies, R. J. P. U. F., 1948, p. 405-442, 1949,
p. 26-65,1950, p. 50-79,1951, p. 366-399,1953, p. 214-262;
Day (G.), Les affaires de Tunisie et du Maroc devant les
Nations Unies, Paris, Pédone, 1953; Sody (E. J.), The
United Nations and dépendant peoples, New York,
Brookings Institution, 1956; Goret (A.), La déclaration
de l’Assemblée Générale de l’O. N. U. sur l’octroi de l’indé¬
pendance aux pays et peuples coloniaux, R. J. P. O. M.,
oct. 1961, p. 586-599; Flory (M.), Algérie et droit inter¬
national, A. F. D. L, 1959, p. 817-844; Jacobson (N. K.),
The United Nations and colonialism, International Orga-
.nization, n® i, 1962, p. 37-56.
V te’ ^jm. .^-.^

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TITRE II

LES ORGANISATIONS
DE CARACTÈRE CONTINENTAL
OU RÉaONAL

Ces organisations se sont multipliées au cours de la


période qui s’étend depuis la fin de la seconde guerre
mondiïde.
Le continent américain offrait auparavant l’exemple
particulier et curieux de l’Union panaméricaine. Le
continent européen a présenté quelques exemples dans
nn cadre géographique restreint et une tentative avortée
pour la période 1919-1939.
Aujourd’hui, il convient d’ajouter de multiples exemples
sur le continent européen ou au moins une partie de
celui-ci. On rencontre aussi, éparpillés dans le monde,
quelques t5q)es qui méritent d’être cités.
SOUS-TITRE PREMIER

LE CONTINENT AMÉRICAIN

On peut présenter les organisations internationales exis¬


tant sur le continent américain en distinguant le cadre
territorial qu’elles recouvrent.
Une organisation a une vocation véritablement conti¬
nentale, l’Organisation des États américains. D’autres
organisations ont, au contraire, un caractère plus limité.

CHAPITRE PREMIER

L’ORGANISATION DES ÉTATS AMÉRICAINS

Le continent américain a été, par excellence, le champ


d’expérience du fédéralisme étatique et les États fédéraux
sont très nombreux dans cette partie du monde, ainsi le
Canada, les États-Unis d Amérique du Nord, le Mexique,
le Venezuela, le Brésil, l’Argentine.
Des tentatives d’organisation fédérale à l'échelle du
continent ont été faites, c’est l’exemple de l’Union pana¬
méricaine devenue plus récemment l’Organisation des
États américains.
Les tentatives américaines dans le domaine de l’orga¬
nisation intercontinentale doivent être présentées à un
l’organisation des états américains 397

triple point de vue, en étudiant successivement les


origines, l’histoire de l’Union panaméricaine, les institu¬
tions actuelles du Panaméricanisme.

§ ler. — Les origines historiques.

414. — La politique de solidarité continentale. ^— Le Pana¬


méricanisme n’est pas d’origine récente. La politique de soli¬
darité continentale américaine est apparue dans le premier
tiers du xix® siècle. Elle a été pratiquée par les États-Unis
au cours des guerres d’indépendance entreprises par les colo¬
nies espagnoles et portugaises qui durèrent de 1809 à 1826.
Les Américains de l’Amérique latine peuvent rappeler
l’appui que le mouvement d’indépendance rencontra auprès
des hommes d’État des États-Unis.
C’est ainsi qu’Henri Clay milita pour la reconnaissance de
l’Amérique latine comme un ensemble de nations libres
et indépendantes, et il évoquait dans son discours du
10 mai 1820, devant la Chambre des Représentants, le « sys¬
tème américain » fondé sur l’identité des institutions et sur
la hberté. Le rôle du Président Monroe fut plus décisif.
Avant même d’exposer le 2 décembre 1823 sa doctrine, règle
de la politique internationale des États-Unis pendant de
longues années, il avait demandé au Congrès, le 8 mars 1822,
les autorisations nécessaires pour reconnaître internationa¬
lement l’indépendance des nouvelles républiques alors encore
en guerre contre l’ancienne métropole. Le Congrès s’y étant
montré favorable, des missions diplomatiques furent échan¬
gées et le Président Monroe reçut ainsi le 19 juin 1822 le
chargé d’affaires de la Grande-Colombie.

415. — Les tentatives de Bolivar. — La solidarité conti¬


nentale devait être poursuivie non seulement sur le plan
pohtique mais aussi sur le plan institutionnel. Le rôle prin¬
cipal a été joué à ce point de vue par Simon Bohvar, alors
qu’ü se trouvait à la tête du Gouvernement de la Grande-
Colombie qui groupait alors la Colombie, l’Équateur, le
Panama et le Venezuela d’aujourd’hui.
Considéré comme le hbérateur de tout un continent,
Simon Bolivar chercha à établir une confédération des
nations du Nouveau Monde. Après avoir fait conclure une
série de traités bilatéraux entre la Grande-Colombie et
d’autres États, tels que le Pérou, le Mexique, le Chili, le Gou¬
vernement de Buenos-Aires et celui de l’Amérique centrale,
Bolivar lance la formule de la réunion d’un congrès de plé¬
nipotentiaires destiné à organiser une confédération générale.
Le congrès prévu à Panama, centre du monde, en 1826,
échoua. L’Angleterre, inquiète de voir les États-Unis se
398 ORGANISATIONS DE CARACTÈRE CONTINENTAL

mettre à la tête de cette ligue américaine, fit pression sur


quelques États pour qu’ils n’envoient pas de représentants
à Panama, et ainsi furent absents l’Argentine et le Brésil.
Les États-Unis eux-mêmes ne furent pas représentés, car
leum plénipotentiaires arrivèrent trop tard. Simon Bolivar
était un ardent anti-esclavagiste et le Gouvernement de
l’Union observait une certaine prudence.
Le congrès ne groupa donc finalement que la Bolivie, le
Pérou, le Mexique, la Grande-Colombie et l’Amérique cen¬
trale. Il aboutit à la conclusion du traité du 19 juin 1826
que l’on peut considérer comme un ancêtre de la Société des
Nations et d’une organisation internationale à large portée.
Un article proclamait la garantie territoriale accordée aux
signataires, et l’on a voulu voir en ce texte le modèle de
l’article 10 du Pacte de la S. D. N. Une armée confédérale
de 32.000 hommes, composée de contingents des divers États,
était même prévue. Une assemblée générale composée de
plénipotentiaires des États et investie de pouvoirs juridic¬
tionnels et d’une compétence exécutive était l’homologue
d’une diète confédérale.

416. — Les tentatives du Pérou. — Après l’échec du


congres de Panama, l’idée d’une organisation interaméricaine
fut reprise. Les tentatives mexicaines en 1831, 1838 et 1840
n’eurent pas grand succès. Les communications étaient dif¬
ficiles entre les jeunes républiques, elles étaient absorbées
par l’œuvre de reconstruction intérieure et surtout tout dan¬
ger semblait écarté d’une reconquête.
Mais lorsqu’en 1847, 1848, des velléités d’intervention
espagnole furent à craindre, l’idée confédérale fut de nou¬
veau évoquée. Le Pérou devait prendre la tête du mouve¬
ment. A deux reprises des congrès continentaux se réunirent
à Lima. Le premier (ii décembre 1847-ier mars 1848) étabht
un système confédéral comportant d’importantes limita¬
tions de souveraineté de la part des États membres. Il
demeura sans effet.
Le second congrès de Lima se tint en 1864. Il aboutit à
un traité pour le maintien de la paix et à un traité d’union
et d alhance. Il s agit d’un système de sécurité mutuelle à
1 intérieur duquel se développent des procédures de règle¬
ment pacifique. Ces formules demeurèrent lettre morte.

417. Les réalisations des États-Unis. — Le grand des¬


sein de Bohvar fut repris dans les dernières années du
XIX® siècle par un homme d’État nord - américain,
James Blaine, qui fut secrétaire d’État pendant plusieurs
années, en 1881 et entre 1889 et 1892. Il réussit à réunir à
Washington une grande assemblée continentale composée des
représentants des diverses républiques américaines. La pre¬
mière conférence panaméricaine se tint du 2 octobre 1889
l’organisation des états américains 399
au 19 avril 1890. Elle devait être suivie d’une série d’autres;
la plus récente, la dixième, s’est tenue à Caracas (Venezuela)
du i«r au 28 mars 1954.
La conférence de Washington de 1889 a véritablement
fondé l’actuel système panaméricain.

§ 2. — L’histoire de l'Union panaméricaine.

418. — Les débuts de l’Union panaméricaine. — L’Union


panaméricaine s’est formée progressivement. Ses débuts
furent très modestes. La première conférence tenue à
Washington décida la création d’un Bureau commercial
des répubhques américaines. Son rôle était mineur, consistant
à réunir et distribuer des informations sur le commerce, la
production, les lois et les régimes douaniers des divers pays
représentés. La structure de l’organisme n’était pas interna¬
tionale puisque le bureau, installé à Washington, fonction¬
nait comme un rouage du département d’État et était placé
sous le contrôle direct du secrétaire d’État des États-Unis.
Pourtant la fondation de ce bureau marque une date
dans l’histoire du Panaméricanisme et l’anniversaire de sa
création, le 14 avril, est aujourd’hui célébré sur tout le conti¬
nent américain comme le « panamerican day ».
Le bureau devait progressivement devenir un organe
international. Dès 1898, il est placé non plus sous la seule
autorité du secrétaire d’État mais sous celle d’un Comité
exécutif qu’il préside, assisté de quatre membres représentant
les États de l’Amérique latine.

419. — L’évolution de l’Union — La deuxième conférence


tenue à Mexico (2 octobre 1901-31 janvier 1902) accen¬
tue le caractère international du Bureau. Il change de nom
et devient le Bureau international des républiques améri¬
caines. Il est placé sous la surveillance d’un conseil directeur
composé de l’ensemble des représentants diplomatiques à
Washington des répubhques latino-américaines, le secré¬
taire d’État des États-Unis étant président. La troisième
conférence tenue à Rio-de-Janeiro (21 juillet-26 août 1906)
étend encore le rôle du Bureau érigé désormais en « Commis¬
sion permanente des conférences internationales américaines »
et chargé d’un rôle diplomatique et notamment de la prépa¬
ration des conférences. A la quatrième conférence qui siège
à Buenos-Aires (12 juillet-30 août 1910), le nom de l’organisme
change, les préoccupations commerciales du début, marque
nord-américaine, s’estompent et le Bureau est désormais
dénommé Union panaméricaine. Il est précisé que les États
représentés ont conféré au secrétaire d’Êtat la présidence du
Conseil directeur.
Une longue période devait séparer la quatrième confé-
400 ORGANISATIONS DE CARACTÈRE CONTINENTAL

rence de la cinquième qui ne put se réunir qu’après la Grande


Guerre, à Santiago du Chili (25 mars-3 mai 1923), et dont les
travaux furent en partie consacrés à l’élaboration de la
convention qui devait porter le nom de traité Gondra et
organisait diverses procédures pacifiques pour empêcher la
guerre d’éclater entre deux ou plusieurs des républiques.
La cinquième conférence devait apporter, sur le plan ins¬
titutionnel, deux innovations importantes. L’une concerne
le Conseil directeur. Il était jusqu’alors composé des repré¬
sentants diplomatiques à Washington, réunis autour du
secrétaire d’État. Il en résultait que si un État avait rompu
les relations diplomatiques avec Washington, il se trouvait
privé de représentation au Conseil directeur de l’Union
panaméricaine. La conférence de 1923 décida que, si norma¬
lement le représentant d’un État américain au Conseil
directeur est son représentant diplomatique à Washington,
tout État qui n’aura pas de représentant pourra désigner un
agent spécial qui jouira des immunités diplomatiques et
siégera au Conseil comme son représentant.
En ce qui concerne la présidence du Conseil directeur, il
fut désormais décidé, qu’au heu d’être attribuée ex o^cio
au secrétaire d’État des États-Unis, le Président serait élu
et assisté d’un vice-président également élu. On devait,
en fait, élire chaque fois le secrétaire d’État, mais du point
de vue juridique il s’agissait d’une élection et non d’une dési¬
gnation préétabhe.

420. — La conférence de La Havane. — La sixième confé¬


rence panaméricaine qui se tint à La Havane, du 16 jan¬
vier au 20 février 1928, fut sans doute la plus importante des
conférences. Elle adopta la convention sur l’Union panamé¬
ricaine qui est le véritable texte constitutionnel de l’Union.
En réalité, et par suite du défaut de ratification par tous les
Etats, ce texte n’est pas entré en vigueur.
Il décrivait les organes de l’Union : la conférence pana¬
méricaine se réunissant en principe tous les quatre ans,
le Conseil directeur siégeant à Washington, composé d’un
représentant de chacun des États, et présidé par un Président
élu qui fut en fait le secrétaire d’État des Etats-Unis, enfin
1 Union panaméricaine au sens étroit, sorte de secrétariat de
l’Organisation.

421. — Les conférences postérieures. — Avant la seconde


guerre mondiale devaient encore se réunir la septième confé¬
rence, à Montevideo (3"26 décembre 1933), élabora
diverses conventions et la huitième qui siégea à Lima du 9 au
27 décembre i93^‘ Cette derniere conférence a approuvé plus
de cent déclarations, résolutions et recommandations. L’une
d elles prévoyait la réunion des ministres des Affaires étran¬
gères des répubhques américaines toutes les fois que cela
l’organisation des états américains 401
serait souhaitable. Cette déclaration de Lima devait ainsi
donner naissance à un nouvel organe de l’Union, la conférence
consultative des ministres des Affaires étrangères.
La tenue de la neuvième conférence avait été fixée à
Bogota, en Colombie, pour l’année 1943, mais elle fut reportée
en raison de la seconde guerre mondiale.

422. — La procédure particulière des conférences consul-


tatives. — Une déclaration adoptée à Lima en 1938 avait
prévu la possibilité d’une réunion des ministres des Affaires
étrangères.
La première de ces réunions eut heu à Panama du 23 sep¬
tembre au 3 octobre 1939. Cette consultation était rendue
nécessaire par l’ouverture des hostilités en Europe. La confé¬
rence adopta une déclaration dite de Panama, créant autour
du continent américain une zone dite de sécurité de 300 milles
marins destinée à assurer la neutrahté américaine.
Du 21 au 30 juillet 1940 siégea à La Havane une seconde
conférence consultative. Elle adopta un projet de convention
concernant l’administration provisoire des colonies et posses¬
sions européennes en Amérique, sorte de prolongement de la
doctrine de Monroe (V. supra, n° 308 et suiv.).
La troisième réunion eut lieu à Rio-de-Janeiro du 15 au
28 janvier 1942, c’est-à-dire après Pearl Harbour (7décembre)
et les déclarations de guerre de l’Allemagne et de l’Itahe aux
États-Unis (ii décembre). Elle proclamait la solidarité des
répubhques américaines et leur adhésion à la Charte de
l’Atlantique.
La quatrième conférence s’est déroulée à Mexico du
21 février au 9 mars 1945. Elle fut plus restreinte que les précé¬
dentes et n’est pas à proprement parler une conférence tenue
dans le cadre panaméricain, car la Répubhque Argentine,
qui ne s’était pas conformée aux résolutions votées à Rio-de-
Janeiro, n’y fut pas invitée. Cette conférence, qui groupait les
répubhques américaines faisant partie des Nations Unies,
adopta le 6 mars une convention appelée Acte de Chapulte-
pec qui, d’une part, prévoyait la convocation annuelle de la
conférence consultative, d’autre part, renforçait la structure
du Conseil directeur. Ainsi se dessinait une réforme de l’Union
qu’allait réahser la prochaine conférence panaméricaine qui
devait se tenir en 1948.

§ 3. — L’Orgeinisation des États américains.

L’Organisation des États américains pose actuellement


divers problèmes. On peut distinguer les questions de
structure institutionnelle, les questions politiques et les
questions économiques.
A partir d’un système institutionnel établi en 1948
402 ORGANISATIONS DE CARACTÈRE CONTINENTAL

et entré en vigueur en 1951 une évolution considérable


s’est produite, elle s’est accélérée avec la Conférence de
Rio de Janeiro de novembre 1965 et la rencontre des chefs
de gouvernements de Punta del Este des 13-15 avril 1967.
Le système et ses transformations, réalisées ou projetées
sera exposé en distinguant les trois plans précités.

A. —■ Le PLAN INSTITUTIONNEL.

On présentera successivement le système de Bogota


puis le système dit de Rio.

Le système de Bogota.

La neuvième conférence panaméricaine s’est réunie à


Bogota en 1948. Cette conférence devait adopter le 30 avril
une convention connue sous le nom de Charte de Bogota,
qui transforme l’Union panaméricaine et crée l’Organi¬
sation des États américains. Ce texte est entré en vigueur
le 13 décembre 1951. Il comporte 112 articles précédés d’un
préambule. L’adoption de cette charte par la neuvième
conférence panaméricaine prouve la continuité par rapport
aux tentatives et réalisations antérieures, mais l’étude
du texte montre que les transformations intervenues
sont importantes.

423. — L’Organisation des États américains. —


L’organisation internationale créée à Bogota se diffé¬
rencie de celle à laquelle elle succède par le nom et par la
structure interne.
L’expression antérieurement utilisée d’Union panamé¬
ricaine était ambigüe dans la mesure où eUe désignait à
la fois l’organisation interaméricaine elle-même et son
secrétariat. Avec la Charte de Bogota l’organisation
change de nom, eUe devient tout simplement l’Organi¬
sation des États américains (O. E. A.) et l’Union pana¬
méricaine demeure l’organe permanent et le secrétariat
de l’Organisation.
La Charte de Bogota conserve les traits essentiels de la
structure antérieure de l’Union panaméricaine, mais eUe
la complète et la dote d’organes nouveaux.
Les organes principaux sont au nombre de huit.
— La Conférence interaméricaine, organe suprême de
l’Organisation, se réunit tous les cinq ans mais peut excep-
l’organisation des états américains 403

tionnellement être convoquée à titre extraordinaire avec


l’approbation des deux tiers des membres (article 36).
— La réunion de consultation des ministres des relations
extérieures se tient quand le besoin s’en fait sentir. Elle est
assistée d’un Comité consultatif de défense composé
des plus hautes autorités militaires des pays américains.
— Le Conseil de l’Organisation est un organe d’une
particulière importance. Il est composé d’un représentaxit
de chaque État membre de l’Organisation, désigné spécia¬
lement par son gouvernement, avec le rang d’ambassa¬
deur. Le représentant diplomatique accrédité auprès du
gouvernement du pays où le Conseü a son siège peut
également être désigné.
Le Conseil éht son Président et son vice-Président,
pour un an, et üs ne peuvent être réélus pour aucun de ces
postes pour la période suivante. On notera la transfor¬
mation profonde par rapport à la solution antérieure de
1923 qui posait le principe électif mais ne faisait pas
obstacle à la réélection de fait du secrétaire d’État des
États-Unis. Le Conseil comporte trois organes particu-
üers qui l’assistent ; Conseil économique et social intera-
méricain. Conseil interaméricain de jurisconsultes. Conseil
culturel interaméricain.
Le Conseil est, aux termes de l’article 54, l’organe
budgétaire, il fixe le barème des contributions.
— L’Union panaméricaine enfin est quahfiée d'organe
central et permanent, elle constitue le secrétariat général
de l’Organisation. Son siège est étabh dans la ville de
Washington. Le secrétaire général est élu pour une
période de dix ans par le Conseil. Il ne peut être réélu ni
remplacé par une personne de même nationalité.
Ce qui caractérise l’Organisation des États améri^ns,
c’est son aspect international égalitaire. Tous les États
semblent y jouer le même rôle. Il n’y a pas de double
collège du t3q)e retenu par la S. D. N. ou l’O. N. U. Tous
les Etats participent également au Conseü, aux diverses
conférences. Les organes subsidiaires s(mt également
composés des représentants de tous les États, sauf le
Conseü interaméricain de jurisconsvütes qui ne comporte
que 9 membres, aux termes de l’article 69.
Le principe de la rotation des fonctions présidentieües
au Conseü et de la fonction de secrétaire général accentue
cet aspect égalitaire du point de vue juridique; sur le
plan pohtique toutefois les États Unis s’efforcent d’orien¬
ter l’attitude de l’Organisation.
404 ORGANISATIONS DE CARACTÈRE CONTINENTAL

Le système de Rio.

Une conférence extraordinaire interaméricaine s’est


tenue à Rio de Janeiro en 1965 (17-30 novembre) groupant
les États de l’O. E. A. sauf le Venezuela.
Elle a adopté dans la première partie de l’Acte final
les grandes lignes d’un projet de réformes à apporter à
rO. E. A. sur le plan des structures institutionnelles.
La préparation du projet lui-même a été confiée non au
Conseil mais à une commission spéciale dont les membres
sont nommés par chaque gouvernement.

424. — La réforme de l’Organisation des États


américains. — La refonte projetée a pour but le renfor¬
cement des structures institutionnelles. La Conférence
interaméricaine devra se réunir désormais tous les ans et
non plus tous les cinq ans. Le Conseil se trouve placé sur
le même plan que les organismes spécialisés, le Conseil
économique et social, le Conseil pour l’éducation, la science
et la culture, ce qui constitue trois conseils particuliers.
L’Union panaméricaine, organisme central permanent est
maintenu comme secrétariat général, le mandat du Secré¬
taire général est ramené de 10 à 5 ans.
La Réunion de consultation des ministres des relations
extérieures se tiendra tous les ans dans un pays différent
et pourra en outre avoir lieu à la demande de tout État
membre. Le Comité juridique interaméricain doit garder
son caractère d’organe consultatif.
L’élargissement des attributions de la Commission
interaméricaine des Droits de l’Homme a été prévu.
L’étude d’une coopération parlementaire interaméri¬
caine doit être entreprise, ce qui constitue une première
approche vers un « Parlement des Amériques ».
Une nouvelle conférence interaméricaine a été convo¬
quée le 15 février 1967 à Buenos-Aires, elle a approuvé les
modifications précédentes précisées par la conférence anté¬
rieure de Panama.

B. — Le PLAN POLITIQUE.

425. — Les prises de positions politiques. — Aujour¬


d’hui l’Organisation des Etats américains, en tant que
continuatnce de l’Union panaméricaine, se situe dans la
ligne d’une évolution institutionnelle de plus de
soixante ans. La transformation essentielle est l’apparition
l'organisation des états américains 405

progressive d’une compétence politique qui n’existait pas


à l’origine. La dixième conférence panaméricaine, qui
s’est tenue à Caracas du au 28 mars i954> ®st comme
le symbole même de cette transformation. Ce sont les
questions politiques qui ont eu lefplus d’importance.
Une déclaration a été votée sur les territoires non auto¬
nomes en Amérique et le secrétaire d’Etat américain a
réussi à faire adopter une « déclaration de solidarité pour
la préservation de l’intégrité politique des États améri¬
cains contre une ingérence du communisme international ».
La Conférence de Caracas demeure la plus récente
conférence interaméricaine car la onzième qui devmt se
tenir à Quito a été différée à plusieurs reprises. Mais des
résolutions politiques importantes ont été, depuis la
conférence de Caracas, adoptées par la réunion des
Ministres des Affaires étrangères.
La déclaration de Santiago, adoptée en août 1959
de la cinquième réunion de ces ministres, traite des pro¬
blèmes des Caraïbes où se marque le conflit entre les
régimes populaires et les régimes dictatoriaux du Nica¬
ragua, de la République dommicaine et de Haïti. La décla¬
ration condamne les systèmes tendant à supprimer les
libertés publiques et définit les conditions de la démo¬
cratie représentative. Une autre résolution renforce les
pouvoirs de la Commission interaméricaine de la paix
chargée d’enquêter sur la situation aux Caraïbes.
La septième réunion, tenue à San José en août i960,
adopte des sanctions contre le gouvernement Trujillo
accusé d’avoir monté un complot contre le gouvernement
du Venezuela et adopte une déclaration q^ui, sans viser
expressément Cuba, concerne cet État à qui le gouverne¬
ment soviétique avait promis l’appui éventuel de fusées.
Le texte condamne toute ingérence ou menace d’ingé¬
rence dans les affaires des Républiques américaines, il
déclare : « l’acceptation d’une menace d’intervention
extra-continentale met en danger la solidarité et la
sécurité américaines... »
Cuba est précisément au centre des préoccupations de
la huitième réunion tenue à Punta del Este. La résolution
du 31 janvier 1962 est votée par 14 voix contre i (Cuba),
avec 6 abstentions (Argentine, Bolivie, Brésil, Chih,
Équateur, Mexique). Elle déclare : « l’actuel gouverne¬
ment de Cuba, qui s’est lui-même quahfié de marxiste-
léniniste, ne répond pas aux principes ni aux objectifs
du système interaméricain » (art. 2).
4o6 organisations de caractère continental

La conférence pose le problème de la compatibilité de


la participation de Cuba aux organismes du système
interaméricain et invite le Conseil de l’Organisation à se
prononcer. Exclu du Conseü interaméricatn de défense,
Cuba devait être ultérieurement écarté de l’Organisation
qui ne compte donc plus que 20 membres (14 février 1962).

426. — Les procéduires pacifiques. — La conférence


de Chapultepec de 1945 avait établi les principes de la
solution pacifique des conflits pouvant survenir entre les
États américains et de l’assistance réciproque en cas
d’agression. La Résolution VIII de la conférence recom¬
mandait la conclusion d’un traité destiné à prévenir et
réprimer les menaces et les actes d’agression contre tout
pays d’Amérique.
Ce traité de sécurité collective, « pierre angulaire de
l’Organisation interaméricaine », a été signé le 2 sep¬
tembre 1947. Il est connu sous le nom de pacte de Rio.
Selon l’article les États signataires « condamnent
formellement la guerre et s’engagent à ne jamais recourir
à la menace ni à l’usage de la force dans une forme qui
ne soit pas compatible avec les dispositions de la Charte
des Nations Unies » ou du traité lui-même. Le traité pré¬
voit que toute attaque armée contre l’un des États sera
considérée comme une attaque contre tous les autres
(art. 3). Lorsque l’intégrité territoriale ou la souveraineté
ou l’indépendance politique est affectée par une agression,
l’organisme de consultation, c’est-à-dire le Conseü direc¬
teur de l’Union panaméricaine ou la réunion des ministres
des Affaires Étrangères, se réunit pour assister la victime
ou prendre les mesures nécessaires à la défense commime
et au maintien de la paix.
Divers conflits ont surgi depuis 1947, l’affaire de Cuba
de i960 à 1962, l’affaire du différend entre Haïti et
Saint-Domingue en 1963, l’affaire enfin de Saint-Domingue
en 1965. Un projet de force armée permanente, force inter¬
américaine d’intervention, destinée à lutter contre la
subversion intérieure avait été envisagé à la conférence
de Rio de novembre 1965. Les États-Unis se montraient
favorables à des contributions volontaires à des actions
internationales de maintien de la paix devant être utilisées
dans le cadre de l’O. E. A. et de l’O. N. U. Cette thèse,
très nuancée fut bien accueillie par le Brésil et les pays de
l’Amérique centrale mais rencontra les résistances du
l’organisation des états américains 407

Chili, du Mexique, dans une moindre mesure de l’Argen¬


tine, qui rappelèrent les principes de non-intervention.
A la conférence de Buenos-Aires en février 1967 le
projet de force armée permanente était écarté par onze
États (Ctiili-CostaRica-Répubhque dominicaine-Colombie-
Équateur - Guatémala - Haïti - Mexique - Pérou - Uruguay-
Vénézuéla), six États étant favorables (Argentine-
Brésil- Honduras- Nicaragua- Paraguay- Salvador), trois
États, Bolivie, Panama et États Unis s’abstenant.
Des problèmes de compétence peuvent exister entre
rO. N. U. et rO. E. A., celle-ci apparaissant comme un
accord régional au sens de l’article 52 de la Charte.
Une résolution de l’Assemblée générale du 21 avril 1961
a reconnu la possibilité pour les États inembres des
deux organisations de recourir à l’une ou à 1 autre mais a
précisé que l’O. E. A. constitue l’organe le plus approprié
pour résoudre le conflit surgissant entre ses membres.

C. — Le plan économique.

L’action interaméricaine sur le plan économique s’est


développée progressivement depuis 1958, dans ce domaine
encore la conférence de Rio de 1965 a- été importante.

Avant la conférence de Rio (1965).

427. — L’Alliance pour le progrès. — Pendant long¬


temps l’Organisation des États américains a négligé de
donner un contenu économique réel au mouvement pana¬
méricain. Une impulsion nouvelle est apparue en 1958 à
la suite du voyage du Vice-Président Nixon en Amé¬
rique latine et avec l’appel du Président Kubitschek
pour la lutte contre le sous-développement latino-amé¬
ricain. J. -, f ■
Un aide-mémoire présenté par le gouvernement bresi-
Hen (9 août 1958) formulait les grandes Agnes d’un pro¬
gramme dit « Opération panaméricaine » et proposait la
création d’un Comité constitué par les représentants des
21 pays chargés de « l’élaboration d un programme pro¬
gressif visant à la lutte contre le sous-développement ».
Le Président brésihen proposait un plan de 20 ans compor¬
tant l’obtention d’un revenu moyen de 500 dollars par an
grâce à la fourniture de capitaux privés et pubhcs de
l’ordre de 10 milliards de dollars.
La participation nord-américaine est d’une importance
4o8 organisations de caractère continental

capitale pour la réalisation du projet mais le gouverne¬


ment des États-Unis demeure tout d’abord fort réservé.
Son attitude change en i960, au moment où l’U. R. S. S.
promet à Cuba une aide économique. A la conférence de
Bogota, en septembre i960, les États-Unis donnent leur
accord aux projets brésiliens. Ils proposent la création
d’un « fonds interaméricain de développement social »
dont ils assureraient largement le financement et par lequel
ils entendaient supprimer la pauvreté, l’ignorance et l’in¬
justice sociale en Amérique latine.
La nouvelle politique complète ainsi la tentative qui
avait eu fieu en 1959 et qui avait été marquée par la
création d’une Banque interaméricaine de développement
(8 avril 1959), dans le cadre d’une réunion du Comité
des 21, au capital de laquelle les États-Unis devaient sous¬
crire pour plus de 41 %, l’Argentine et le Brésil, chacun
pour 12 %.
Mais l’initiative de la plus large portée est celle lancée
le 13 ma.rs 1961 par le Président Kennedy avec la formule
de VAlliance pour le Progrès.
Il s agissait là d’un plan décennal pour le développe¬
ment de l’Amérique latine, le Président des États-Unis
s’engageant à fournir 20 milfiards de dollars pour le finan-
cernent public et privé d’une « décennie de progrès ».
Insistant sur le caractère coopératif de l’œuvre à entre¬
prendre, il estimait que l’assistance nord-américaine devait
être assortie de réformes sociales et de plans à long terme
élaborés par les Républiques latino-américaines.

428. — La Charte de Punta del Este. — Les projets


du Président Kennedy furent discutés dans le cadre d’une
conférence ouverte le 5 août 1961 et groupant tous les
États de l’O. E. A.
Le 17 août la conférence adoptait, à l’unanimité moins
une voix, celle de Cuba qui s’était abstenu, deux textes,
d une part, une « Déclaration aux peuples d’Amérique »,
d’autre part, la « Charte de Punta del Este ».
La déclaration décide l’établissement d’une alliance
pour le progrès définie comme un vaste effort pour appor¬
ter une vie meilleure à tous les peuples du continent.
Ayant rappelé et proclamé les principes de la démo¬
cratie représentative, affirmé la dignité de l’individu, la
déclaration résume les objectifs poursuivis : accélération
du développement économique et social, lutte contre
l’analphabétisme, réformes agraires, réformes fiscales et
l’organisation des états américains 409

redistribution des revenus, conditions équitables de tra¬


vail et de salaires, stimulation des entreprises privées,
stabüité des prix et notamment lutte contre les fluctua¬
tions du prix des produits d’exportation de base des pays
latino-américains.
Ces objectifs doivent être atteints par des efforts natio¬
naux des pays intéressés qui établiront leurs propres pro¬
grammes mais à ces efforts s’ajoutent des contributions
d’assistance extérieure, les États-Unis s’engageant à four¬
nir l’essentiel des 20 milliards de dollars qui constituent
le minimum que l’Amérique latine devra recevoir de 1 ex¬
térieur pendant la décennie suivante, les Etats-Unis
entendant fournir des prêts de développenaent sur une
base d’engagements à long terme — jusqu’à 50
avec des taux d’intérêt très bas ou même nuis.
La Charte eUe-même est un document beaucoup plus
long, développant les mêmes principes, fixant un taux de
croissance économique dans chaque pays d un minimum
de 2 %. Les programmes nationaux de développement
sont prévus. Le financement extérieur des plans de
développement nationaux comporte la collaboration du
Conseil inter américain économique et social et de la Banque
interaméricaine de développement et 1 intervention d ex¬
perts désignés par des organismes internationaux et les
intéressés.
L’importance de la tentative faite en 1961 ne saurait
être sons-estimée.
Toutefois on ne peut non plus considérer qu’il s’agit là
d’un succès décisif.
Par-delà les difficultés économiques proprement dites,
il existe des difficultés pohtiques qui tiennent à certains
mouvements en Amérique latine, par-dela éviderninent
les événements de Cuba et la condamnation de la politique
de ce pays en 1962.
Sur le plan juridique lui-même, l’Alhance ne constitue
pas un traité, ce qu’aurait souhaité en 1963 le gouverne¬
ment brésüien en particulier, mais une simple déclaration
qui ne comporte pas véritablement d engagement inter¬
national, notamment quant aux obhgations financières
des États-Unis. . . , ,
L’Amérique latine est demeuree ainsi très exposée aux
difiicultés économiques et le revenu moyen par tête d’ha¬
bitant parfois inférieur à 200 dollars ne dépasse 400 que
dans très peu de pays.
Après quelques années on peut constater que la réparti-
410 ORGANISATIONS DE CARACTÈRE CONTINENTAL

tion des crédits a été assez arbitraire. Le Comité inter¬


américain de l’Alliance signale le grave danger que
constitue la faiblesse des prix des produits de base latino-
américains et les spécialistes latino-américains estiment
qu’une réelle intégration économique de l’Amérique latine
constitue la solution la plus valable des problèmes qui
se posent.

La conférence de Rio (1965) et l’évolution postérieure.

429. L’Acte économique et social. — Les questions


économiques et sociales ont constitué un thème important
de la Conférence de Rio. Elles ont fait l’objet de la
deuxième partie de l’Acte final intitulé « Acte économique
et social de Rio de Janeiro» comportant un préambule et
cinq chapitres.
Le Préambule rappelle le rôle de l’Alliance pour le
progrès, évoque la proposition nord - américaine d’une
prolongation de l’AUiance après 1971 et affirme que les
principes de sohdarité et de coopération, dans le domaine
économique et social ont une valeur d’obhgation juri¬
dique.
Les divers chapitres développent les principes de soh¬
darité, fiant le développement économique et social à la
sécurité politique, proclamant la nécessité d’un effort
économique et social, posant le principe de l’assistance
économique et sociale devant être apportée aux États les
moins développés du continent dans les conditions les plus
favorables, définissant les actions à entreprendre pour
développer le commerce extérieur et les exportations,
feant enfin comme objectif principal à l’Organisation
interaméricaine l’intégration économique et sociale dont
sont seulement définis les principes directeurs.
Repris dans des réunions ultérieures le thème de l’inté¬
gration fut l’une des préoccupations majeures de la confé¬
rence de Punta del Este (13-15 avril 1967). Réunissant les
chefs d’États membres de l’O. E. A. la conférence a adopté
une importante déclaration de caractère économique et
social.
Celle-ci définit quelques thèmes prioritaires : l’intensi¬
fication des efforts en vue d’accroître les rentrées en
devises — la modernisation des conditions de la vie
rurale — la mise de la science et de la technologie au service
des peuples — l’amélioration des programmes de santé —
l’organisation des états américains 411

la substitution des investissements productifs aux dépenses


militaires non nécessaires.
Mais le point fondamental est celui de la création d’un
Marché commun latino-américain à partir de 1970 dont
les fondements seront établis grâce à des projets multina¬
tionaux et qui doit atteindre sa pleine efficacité quinze ans
plus tard.
Cette décision, si elle est suivie d’effet, est d’une très
grande importance car un Marché commun efficace et
dynamique pourrait se substituer aux solutions duahstes,
dont la plus vaste du point de vue territorial est fort impar¬
faite, qui existent actuellement et qui sont présentées ci-
après.
CHAPITRE II

LES ORGANISATIONS
INTERAMÉRICAINES PARTICULIÈRES

^ Le continent américain connaît depnis quelques années


d’autres organisations internationales que l’O. E. A. Ces
organisations présentent un caractère particulier. Le but
poursuivi est un but économique. Les cadres territoriaux
sont cbfférents, il s’agit d’une part de l’Amérique centrale,
il s agit d autre part de certains États de l’Amérique latine
groupés dans l’Association latino-américaine de libre
commerce (A. L. A. L. C.).

Section I. — L’Organisation des États


centre-américains.

Jusqu en 1821 les territoires qui constituent actuellement


les Etats du Costa-Rica, du Guatémala, du Honduras, du
Nicaragua et du Salvador formaient une seule entité dépen¬
dante, une colonie espagnole, la capitainerie générale du
Guatémala. Ces provinces se sont formées en Etat fédéral
souverain le 24 juin 1823 sous le nom de « Provinces Unies du
Centre de 1 Amérique ». Mais cette formule politique demeurait
fragile et, en 1838, chacun des États membres devenait
indépendant. Des regroupements ont été tentés depuis,
à diverses reprises, notamment en 1907 avec la conclusion
à Washington de diverses conventions créant une sorte de
confédération de l’Amérique centrale et instaurant une Cour
de justice. Mais l’expérience ne dura que moins de dix ans.
ORGANISATIONS INTERAMÉRICAINES PARTICULIÈRES 413

La Charte de San-Salvador, signée le 14 octobre 1951


et entrée en vigueur le 14 décembre, marque une nouvelle
tentative de rapprochement.

430. —,Stiructure de l’Organisation. — L’Organisa¬


tion des États de l’Amérique centrale (O. D. E. C. A.),
prévue par la Charte de San-Salvador, est constituée sur le
modèle de l’Organisation des États américains telle
qu’eUe résulte de la Charte de Bogota de 1948, et les
Répubhques de l’Amérique centrale participent d’ailleurs
aux deux organisations.
L’Organisation comporte cinq rouages principaux.
La réunion des cinq Présidents des Répubhques est
considérée comme l’organisme suprême, rnais l’orga¬
nisme principal est la Conférence des ministres des
Affaires étrangères qui se réunit une fois au moins tous
les deux ans et statue à l’unanimité sur les questions
importantes. Un Conseil économique assiste la confé¬
rence, il se réunit tous les ans. Des conférences d’autres
ministres peuvent être convoquées lorsque le besoin s’en
fera sentir.
Enfin un Bureau Centre-américain joue le rôle de
secrétariat général de l’Organisation. Il a son siège dans
la capitale du Salvador, il sert de secrétariat général des
conférences ministérielles, il coordonne le travail des
divers organismes, il prépare la documentation néces¬
saire.

431. — L’unification économique. — Au cours d’une


réunion du Comité économique de l’O. D. E. C. A. a été
signé à Tégulcigalpa, le 10 juin 1958, un traité de fibre
échange et d’intégration économique.
Il tend à l’union progressive des économies nationales,
l’élargissement des marchés, le développement de la pro¬
duction et des échanges, l’élévation des niveaux de vie.
A ces fins le traité prévoit la convertibilité et la stabilité
des monnaies, la liberté de transit des marchandises, l’éga¬
lité dans les investissements. Des dispositions intéres¬
santes concernent l’implantation d’industries dites à
marché régional ou d’intégration destinées à permettre
d’utiliser les possibilités d’un marché d’une dizaine de mil¬
lions d’habitants et de mieux résister devant la concur¬
rence internationale.
Le « marché commun » centraméricain bénéficie de
l’appui de la Commission des Nations Unies pour l’Amé-
414 ORGANISATIONS DE CARACTÈRE CONTINENTAL

rique latine (C. E. P. A. L.). Il a été également créé une


Banque centraméricaine d’intégration économique.

432. — La Convention du 12 décembre 1962. — Une


nouvelle convention qui, comme celle de 1951, porte
le nom de « Charte de San Salvador » a été signée le
12 décembre 1962 par le Costa Rica, le Guatemala, le
Honduras, le Nicaragua et le Salvador. Elle est entrée en
vigueur le 30 mars 1965.
Elle prévoit des organes nouveaux en établissant : une
conférence de chefs d’État — des conférences de ministres
des Affaires étrangères — un Conseil exécutif — un
Conseil législatif — un centre culturel et éducatif — un
Conseil de défense müitaire centraméricain — ime
Cour de justice internationale centraméricaine.
^ Cette dernière institution ressuscite, sous une forme
d’ailleurs différente, la Cour de justice centraméricaine
qui avait existé de 1907 à 1917 et qui a été le premier
exemple d’une cour permanente internationale. La nou¬
velle Cour constituée par les Présidents de l’organe judi¬
ciaire suprême de chacun des États membres n’est pas
prévue comme organisme permanent, car elle doit se
réunir sur convocation du Conseil exécutif.
Celui-ci est le seul organisme permanent et son siège est
fixé à San-Salvador.
Le conseil de défense mihtaire centraméricaine com¬
posé des ministres de la défense de chaque État constitue
une innovation. Il doit agir comme organisme consultatif
en matière de défense régionale et veiller à la sécurité col¬
lective des États membres.
Les États membres de l’Organisation de 1951 ont émis
le souhait que Panama devienne le sixième membre de la
nouvelle institution mais le problème de cette adhésion
demeure complexe en raison de relations particuhères
existant entre Panama et les États-Unis.

Section II. — L’Association latino-américaine


de libre commerce.

traité de Montevideo. — L’étude de la pos-


sibihté de création d’une zone de libre échange en
Amérique latine a été abordée en 1959 sur l’impulsion de
la Commission des Nations Unies pour l’Amérique latine ;
un groupe d experts, spécialistes du commerce extérieur,
étabht un projet d’accord.
ORGANISATIONS INTERAMÉRICAINES PARTICULIÈRES 4^5

Le i8 février i960 fut signé à Montevideo un traité


constitutif d’une Association latino-américaine de libm
commerce (A. L. A. L. C.). L Association ne groupait
alors que 7 pays : Argentine, Brésil, Chili, Mexique, Para¬
guay, Pérou, Uruguay. , . , • . +
Les mécanismes institutionnels sont simples, consistant
essentiellement en un Comité permanent dont le siège est
à Montevideo et qui groupe les représentants des gouver¬
nements membres.
La mise en place du traité est de caractère progressif,
l’abolition des droits de douane et des restrictions quan¬
titatives entre les pays membres doit s’opérer dans un
délai de douze années. Pour les relations avec 1 extérieur
une uniformisation des réglementations doit etre atteinte.
Il est prévu que tout pays d’Amérique latine peut être
admis, à tout moment, dans l’Association pour étendre la
zone d’application du traité.
La Colombie et l’Équateur ont adhéré d’aiUeurs en 1962,
le Vénézuéla en août 1966, la Bohvie au début de 1967.
De grandes disparités économiques existent actuelle¬
ment entre les Etats membres, l’Argentine, _ le Brésil
et le Mexique étant déjà industriahsés; aussi le traité
comporte des clauses de sauvegarde. Un Etat membre en
proie à des difficultés économiques, notamment avec une
balance de paiements déficitaire peut, avec 1 accord des
autres États, abandonner temporairement les mesures de
libéralisation. . ^ ^4. t. a
Cette extension demeure problématique, les Etats ae
l’Amérique centrale ont étabh leur propre marché ^orn-
mun et la Charte de Quito du 8 août 1948 avait tenté la
réahsation d’une organisation économique regroupant les
États qui avaient constitué jadis, de 1824 à 1830, un seul
État, la Grande Colombie. L’organisation regroupait le
Venezuela, la Colombie, l’Équateur, mais le Venezuela
s’en est retiré. . , x- x
La formule d’une intégration économique latino-amé¬
ricaine n’est pas sans soulever quelques réticences de la
part de certains miheux pohtiques et économiques nord-
américains qui songent à développer au contraire les
mécanismes de l’Alhance pour le Progrès. La conférence
de Punta del Este d’avril 1967 a adopté le principe d une
intégration économique à instituer à partir de 1970 et
devant être réalisée en 1985-
4i6 organisations de caractère continental

BIBLIOGRAPHIE

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américaines, thèse Paris, 1966.
On pourra consulter utilement les Notes et Études de
la Documentation française nos 2724 et 2725 : L’évolu¬
tion du panaméricanisme depuis ig^i, compléments au
no 2150; no 2ggy : Le panaméricanisme et les institutions
interamericaines; Problèmes politiques d’Amérique latine
3247. 3300, 3317, 3360.

Les organisations régionales américaines.


Urquidi (V. L.), Free trade and économie intégration in
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SOUS-TITRE II

LE CONTINENT EUROPÉEN

434. — Le particularisme européen. — Le phéno¬


mène politique qui a dominé pendant des siècles le
continent européen est celui de l’apparition et du déve¬
loppement des États.
Les circonstances historiques ont donné une importance
exceptionnelles aux grandes monarchies bureaucratiques
étabhes à la fin du xv® siècle, et les transformations
démocratiques ultérieures se sont greffées sur ces organi¬
sations politiques.
On rencontre donc, en Europe, un très grand morcel¬
lement pohtique et les organisations internationales n’ont
pendant longtemps pas eu une grande importance dans ce
continent.
La constitution d’États puissants est apparue comme
la dominante de tout système politique et ü en est résulté
un morcellement de l’Europe entre des États souverains.
Le mouvement vers des unités étatiques, généralement
mais non toujours nationales, est apparu très tôt en
Europe occidentale. Il ne s’est toutefois manifesté en
Allemagne et en Itahe que dans la deuxième moitié du
XIX® siècle.
Toutefois les organisations internationales ne sont pas
inconnues dans le système pohtique européen.
Des exemples anciens sont fournis par des Unions
d’États, dont le caractère intemationd est d’ailleurs
peu marqué, et par diverses confédérations, comme les
Provinces Unies, la Confédération du Rhin de 1805, la
14. - INSTITUTIONS INTERNATIONALES
418 LE CONTINENT EUROPÉEN

Confédération helvétique et la Confédération germanique


de 1815 (V. supra, n°® 121 et 124).
Le XX® siècle semble marquer pour l’Europe un ren¬
versement de la tendance antérieure et de multiples
organisations internationales ont été constituées ou envi¬
sagées. Mais ce mouvement s’est manifesté d’une manière
très différente dans le temps. Avant 1939 on trouve très
peu de tentatives et les réalisations sont très modestes.
A partir de 1946 au contraire, les tentatives et les réalisa¬
tions sont multiples.

LES TENTATIVES ANTÉRIEURES A I939

On peut distinguer l’échec d’une tentative sur le plan


continental lui-même et quelques réaüsations de carac¬
tère régional.

435. — L’Union européenne. — On^ désigne sous le


nom d’Union européenne un projet d’organisation des
États européens qui eut pour origine un discours pro¬
noncé à Genève, le 5 septembre 1929, par le ministre
français des Afiaires étrangères, Aristide Briand, au
cours d’une session de l’Assemblée de la Société des
Nations.
Dans ce discours, l’homme d’État français estimait
le moment venu d’unir entre eux les États européens
« par une sorte de hen fédératif ». Un projet concret
fut élaboré et, sous le nom de mémorandum français,
en date du i®*' mai 1930, communiqué aux divers États
européens membres de la Société des Nations.
Le projet français aboutissait à prévoir la création
d’une sorte de société des États européens et la structure
de l’organisation projetée était calquée sur ceEe de la
S. D. N.
Le mémorandum français fut étudié dans les chancel¬
leries et accueilli finalement avec beaucoup de réserves.
Une résolution de l’Assemblée de la S. D. N. créa le
16 septembre 1930 une Commission européenne dans le
cadre des divers rouages consultatifs de la S. D. N. Les
travaux de cette Commission traînèrent. La mort d’Aris¬
tide Briand en mars 1932 et surtout, l’année suivante,
la prise du pouvoir en Allemagne par le parti national-
sociaUste firent que la Commission ne se réunit même plus
à dater de 1933. C’est donc un échec total qu’a rencontré
le projet français de 1930.
LE CONTINENT EUROPÉEN 419

436. — Les ententes régionales. — Trois organisa¬


tions internationales de caractère très limité d’ailleurs,
tant sur le plan de la technique institutionnelle que sur
le plan géographique, ont été créées en Europe avant
1939.
La Petite Entente groupait la Roumanie, la Tchécos¬
lovaquie et la Yougoslavie. Elle résultait de la combinai¬
son de traités bilatéraux d’alliance entre la Roumanie
et la Tchécoslovaquie en date du 23 avril 1921, entre la
Roumanie et la Yougoslavie en date du 7 juin 1921,
entre la Tchécoslovaquie et la Yougoslavie en date du
31 août 1922. Ces conventions furent prolongées le
21 mai 1929. Le pacte d’organisation lui-même fut signé
à Genève le 16 février 1933. Fondée sur le principe de
l’égahté absolue entre les trois États membres, l’Or¬
ganisation comportait un Conseil permanent des ministres
des Affaires étrangères ou des délégués spéciaux nom¬
més à cet effet. Ce Conseil permanent, à présidence
annuelle alternative, prenait ses décisions à l’unanimité ;
11 était l’organe directeur de la pohtique commune des
trois États.
L’Entente balkanique, créée par le Pacte d’Athènes
du 9 février 1934, présentait un caractère analogue et
groupait la Grèce, la Roumanie, la Turquie et la. You¬
goslavie. Elle comportait donc deux États qui faisaient
également partie de la Petite Entente.
L’Entente haltique résultait du traité de Genè\^ du
12 septembre 1934. EUe groupait les trois petits États
baltes constitués après 1919, l’Esthonie, la Lettonie, la
Lithuanie.
Ces trois ententes ne durèrent que quelques années et
ne survécurent pas aux graves crises pohtiques euro¬
péennes. La Petite Entente disparut en octobre 1938,
après l’affaire de Munich; l’Entente baltique n’eut plus
de raison d’être après l’incorporation de chacun de ses
membres dans l’U. R. S. S. en juillet 1940. L’Entente
balkanique se disloqua à son tour en octobre 1940 après
que la Grèce eut été victime de l’agression fasciste.

LES ORGANISATIONS EUROPÉENNES


APRÈS 1946

437. ■— Perspective d’ensemble. — Au lendemain de


la seconde guerre mondiale les plans d’organisations
européennes se sont multipliés. Ils sont caractérisés par
420 LE CONTINENT EUROPÉEN

leur grand nombre, par les espoirs aussi qui ont été fondés
en eux.
On peut dire que pour la première fois dans l’histoire
européenne les opinions publiques se sont, un moment
au moins, émues et passionnées pour la réalisation de
ce qu’on a appelé fort improprement le « fédéralisme euro¬
péen ».
Sur le plan de la technique juridique, les diverses orga¬
nisations tentées ou réahsées peuvent être classées en
deux grandes catégories, celles qui conservent le carac¬
tère international et interétatique, celles qui, sous le
nom de solutions d’intégration, vont plus loin et tendent
à réahser des constructions de caractère typiquement
fédéral, dont les membres perdraient la qualité même
d’État au sens international. Sur le plan géographique,
ces tentatives ou ces réalisations présentent la caracté¬
ristique de ne jamais avoir pour domaine territorial
l’Europe, au sens géographique habituel. Elles sont en
général plus restreintes, hmitées à ime partie de l’Europe
occidentale ou centrale, mais parfois, au contraire, et
pour des raisons mihtaires, l’Europe dont il s’agit s’ac¬
croît démesurément par delà les mers pour englober des
États non européens. Le critère géographique est donc
imprécis pour caractériser les organisations internatio¬
nales dites « européennes ».
Sous l’angle de la compétence, les tentatives d’organi¬
sations européennes se situent sur plusieurs plans, tantôt
mihtaire, tantôt économique, tantôt pohtique.
L’étude des organisations européennes apparaît donc
comme singuhèrement complexe.
Sous l’angle historique, enfin, on doit noter le rôle
joué par divers hommes d’État dans l’adoption de telle
ou telle formule. Peut-être faut-il évoquer comme pre¬
mier exemple la déclaration d’Union franco-britannique,
Hmitée à la France et à la Grande-Bretagne et à leurs
possessions d’outre-mer, qui fut proposée le 17 juin 1940
par le Gouvernement britannique à la France et que les
circonstances devaient laisser sans effet. Puis, après la
guerre et la victoire, on doit signaler le discours de
Sir Winston Churchill à Zurich en septembre 1946, évo¬
quant une fédération européenne reposant sur une
entente franco-allemande. Le Maréchal Smuts devait y
faire écho dans deux discours prononcés à La Haye et
à Bruxelles en octobre 1946. Toutes ces formules étaient
vagues et aucune organisation n’est résultée directement
LE CONTINENT EUROPÉEN 421

d’elles. Il en va autrement de la déclaration de M. Robert


Schuman qui, en qualité de ministre des Affaires étran¬
gères de France, devait lancer la proposition du 9 mai 1950
sur l’organisation en commun, par la France et l’AUe-
magne, de la production du charbon et d’acier. De cette
déclaration devaient résulter en effet la Communauté euro¬
péenne du Charbon et de l’Acier et les tentatives d’orga¬
nisation d’une Europe occidentale limitée d’ailleurs à
six États, qui est une véritable tentative fédérahste au
sens technique de l’adjectif.
PLAN
Les organisations européennes seront présentées en
distinguant les organisations véritablement internatio¬
nales et les organisations particuhères à l’Europe des Six,
les Communautés

BIBLIOGRAPHIE

Organisations européennes.

Aspects historiques et généraux.


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péenne, Paris, 1931: Castagné (A.), L’organisation de
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péennes, tome I, édit. Bruylant, Bruxelles, 1966.

‘ Certaines organisations internationales européennes qui ont un caractère


technique très poussé et qui constituent tantôt des laboratoires de recherches,
tantôt des usines de caractère international seront étudiées dans la seconde
sous partie, dans le cadre de la collaboration technique.
H'yM’l -è iîu liraisfruiîftiï tA ^ ■Vf'
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raBfîfiiît><MtiMT («àNij-jr
L —LES ORGANISATIONS INTERNATIONALES

Elles apparaissent sur le plan économique, le plan


politique, le plan politico-militaire. Un bref chapitre
sera consacré en outre à des ententes étroitement régio¬
nales.

CHAPITRE PREMIER

LES ORGANISATIONS EUROPÉENNES


DE CARACTÈRE ÉCONOMIQUE

Il existe trois organisations économiques européennes,


mais l’une d’elles, l’Organisation de coopération et déve¬
loppement économiques a succédé elle-même à une
autre organisation, l’Organisation européenne de coopé¬
ration économique.
Du point de vue territorial ces organisations concernent
des aires géographiques très variables.
L’une est plus qu’européenne puisqu’elle comprend
aussi le Canada, les États-Unis et le Japon (O.C.D.E.),
une autre, le Conseil d’assistance économique mutuelle
déborde largement sur le continent asiatique puisqu’elle
comprend l’U. R. S. S., enfin l’Association européenne de
libre échange s’étend sur une partie de l’Europe.
424 LE CONTINENT EUROPÉEN

Section I. — L’Organisation européenne de coopé¬


ration économique et l’Organisation de coopé¬
ration et développement économiques.

§ ler. —L'O.E.G.E.

438. — Les origines. — L’Organisation européenne de coo¬


pération économique trouve son origine dans le plan d’assis¬
tance économique et politique nord-américain connu sous
le nom de plan Marshall.
Il est rapidement apparu comme évident, au lendemain
de la seconde guerre mondiale, que le relèvement de l’Europe
ne pourrait être obtenu sans une aide très importante
fournie par les États-Unis et consistant non seulement en
machines et outillage, mais aussi en matières premières,
coton, caoutchouc et aussi, pour un temps au moins, en
denrées alimentaires. Les divers pays européens n’ont pu
que très difficilement assurer le financement de ces importa¬
tions. Le problème du paiement des marchandises améri¬
caines s’est posé un peu comme celui du paiement des arme¬
ments, au cours même de la guerre et avant l’institution du
prêt-bail. Les pays européens, dépourvus d’or et de devises,
semblaient devoir renoncer à se procurer les biens dont ils
avaient besoin. C’est dans ces conditions que le général Mar¬
shall a prononcé, le 5 juin 1947, le célèbre discours de l’Uni¬
versité de Harvard, affirmant le désir des États-Unis d’ap¬
porter une aide aux pays européens, mais les invitant à
rendre cette action plus efficace en élaborant eux-mêmes en
commun un programme de relèvement économique.
Le 16 juin, les Gouvernements français et britannique
décident de s’efforcer d’associer le Gouvernement soviétique
à l’élaboration d’une réponse à la proposition américaine.
Une conférence tripartite tenue à Paris le 27 juin montre
l’impossibilité d’une participation soviétique. Une cohé¬
rence, dite de coopération économique européenne, se tient
alors à Paris le 12 juillet et aboutit à la constitution d’un
Comité de coopération chargé d’élaborer un rapport, sorte
de programme d’importations américaines pour les divers
pays participants. En attendant la création d’une organisa¬
tion internationale européenne à l’étude, l’aide américaine
se manifeste sous la forme dite de l’aide intérimaire accordée
notamment à la France, à l’Italie et à l’Autriche dès le
17 décembre 1947.
A Paris est signée le 16 avril 1948 la Convention de coo¬
pération économique européenne qui créait une organisa¬
tion du même nom, sorte de bureau central européen pour
LES ORGANISATIONS EUROPÉENNES 425

l’application de l’aide américaine en premier lieu, et chargée


ensuite de la réalisation d’une économie européenne saine.

439. — Composition. — A l’origine, l’Organisation grou¬


pait 16 États, les zones d’occupation des Puissances occideii-
tales en Allemagne et le territoire de Trieste. Il s’agissait
donc d’une partie seulement de l’Europe qualifiée quelque¬
fois d’Europe « Marshall ». Elle ne s’étendait point vers l’Est
car ru. R. S. S. et les démocraties populaires n’en faisaient
point partie, la Tchécoslovaquie avait accepté pendaiit
trois jours la proposition américaine en 1947 niais s’était
ensuite récusée. On doit remarquer que parmi les États euro¬
péens figure la Turquie dont le caractère européen est hmité.
La Suisse, bien qu’eUe n’ait pas voulu bénéficier de l’aide
américaine, a fait partie de l’O. E. C. E. L’Allemagne fédé¬
rale devait y entrer ultérieurement, l’Espagne longtemps
écartée pour des raisons pohtiques a été admise en juil¬
let 1959, l’Organisation a compté alors 18 États, Allemagne
occidentale, Autriche, Belgique, Danemark, Espagne, France,
Grèce, Irlande, Islande, Itahe, Luxembourg, Norvège, Pays-
Bas, Portugal, Royaume-Uni, Suède, Suisse, Turquie.
Les États-Unis et le Canada ne faisaient point partie de
l’Organisation mais üs étaient représentés à ses travaux par
des observateurs.
L’appartenance à l’O. E. C. E. pouvait prendre fin par le
retrait volontaire (art. 27) ou l’exclusion prononcée à l’una¬
nimité des autres membres (art. 26).

440. — Structure et évolution. — Telle qu’elle était prévue


dans la convention, la structure de l’O. E. C. E. était tripar-
tite. L’organe principal était le Conseil, composé de tous les
membres et statuant à l’unanimité. Le Comité exécutif
était composé de sept membres désignés chaque année par
le Conseil. Enfin le secrétariat général était dirigé par un
secrétaire général et deux secrétaires généraux adjoints.
L’article 15, § c de la convention prévoyait la possibilité
pour le Conseü de créer tout comité ou organisme dont la
nécessité lui apparaîtrait.
Usant de cette faculté le Conseil a créé un nombre impor¬
tant d’organismes subsidiaires, notamment des comités tech¬
niques chargés de l’étude des mécanismes économiques et
composés non pas de fonctionnaires internationaux mais de
représentants des États membres et une commission du
budget.
D’autres organes ont été ajoutés par la suite aux organes
primitifs.
L’institution par un accord du 19 septembre 1950 de
V Union européenne des paiements, qui n’était pas une orga¬
nisation internationale distincte a eu pour conséquence la
création d’un comité de direction de cette union sous forme
426 LE CONTINENT EUROPÉEN

d’un comité responsable devant le Conseil et composé de


sept membres nommés pour un an par le Conseil. L’Union
européenne des paiements était un organe de caractère tem¬
poraire destiné à remplir deux fonctions ; permettre la com¬
pensation multilatérale des créances et dettes des États
membres -— assurer l’octroi automatique de crédits aux pays
déficitaires. L’Union fut remplacée le 27 décembre 1958 par
l’Accord monétaire européen qui avait été signé le 5 août 1955
mais dont l’entrée en vigueur était subordonnée à diverses
conditions. L’accord maintient un comité directeur analogue
au précédent, subordonné au Conseil mais, du point de vue
de la politique économique, il existe une grande différence
car l’octroi automatique des crédits est supprimé.
D’autres organismes ont été créés dans le cadre de
l’O. E. C. E., l’Agence européenne de productivité et
l’Agence européenne pour l’énergie nucléaire (convention du
17 décembre 1957, voir infra).

441. — Œuvre de l’Organisation. — L’O. E. C. E. a eu une


utilité certaine, et par-delà le problème de la distribution
de l’aide américaine il est apparu nécessaire de la conserver.
Son activité principale s’est orientée alors vers le dévelop¬
pement des relations économiques européennes, la libération
des échanges, l’augmentation de la productivité, la coordi¬
nation des plans et programmes économiques nationaux. La
disparité des régimes politiques, les diversités des niveaux
économiques, les antagonismes des intérêts en cause n’ont
point facilité la solution des problèmes. L’O. E. C. E. tenta
de créer entre ses membres une zone de libre échange mais
l’existence, à partir de 1958 d’une Communauté économique
européenne groupant six États parmi les membres de
l’O. È. C. E., a rendu vaine cette tentative. Il fallait opérer
une reconversion plus profonde.

§ 2. — L’O.G.D.E.

442. — La ciréation de l’O.C.D£. — A la base de la


création de l’O.C.D.E. on trouve une décision des chefs
d'État et de Gouvernement de la France, des États-Unis,
de la République fédérale et du Royaume-Uni exprimée
dans un communiqué du 21 décembre 1959. Ce texte
constate que les pays industrialisés de l’Occident peuvent
consacrer leurs énergies à deux séries de tâches : favoriser
le développement des pays moins développés, développer
les relations commerciales internationales. Réuni à Paris
en janvier i960, un Comité économique spécial groupant
treize membres de l’O.E.C.E. décide la réforme de cette
organisation et désigne un groupe de travail. Les
13-14 décembre i960 la Convention de l’O.C.D.E. est
LES ORGANISATIONS EUROPÉENNES 427

signée à Paris. La nouvelle organisation entre en vigueur


le 30 septembre 1961.
Elle est dénommée : Organisation de coopération et déve¬
loppement économiques. Ce titre caractérise non seulement
l’orientation nouvelle mais marque aussi que l’Organi¬
sation n’est plus exactement européenne, elle comprend
outre les 18 membres de l’ancienne O.E.C.E. les Etats-
Unis et le Canada.
Le Japon est devenu eu 1964 le vingt et unième membre
de rO. C. D. E. après avoir été invité à adhérer par le
Conseil en juillet 1963.
La Yougoslavie a, depuis 1961, le statut de pays obser¬
vateur et est représentée en cette qualité au Conseil et
dans les organes subsidiaires. La Finlande est associée en
fait à certaines activités déterminées de l’Orgamsation.

443. — Structure et fonctionnement. — Le traité du


14 décembre i960 prévoit une structure simple. L’organe
principal est le Conseil composé de tous les membres.
Un secrétaire général assisté d’adjoints ou de suppléants
est nommé par le Conseil. Le Conseil peut se réunir à
l’échelon ministériel ou à celui de représentants perma¬
nents. Dans ce dernier cas il est présidé par le Secrétaire
général.
Il existe un Comité exécutif composé des représentais
de dix membres désignés chaque année par le Conseil et
parmi lesquels celui-ci désigne un Président et tm Vice-
Président.
La création de l’O.C.D.E. s’est faite par la voie d’une
révision de la convention de l’O.E.C.E. à laquelle la nou¬
velle convention est substituée. Mais certains organes
subsidiaires qui existaient dans le cadre de l’O.E.C.E. ont
disparu, il s’agit de l’Agence de productivité par exemple,
au contraire l’Agence européenne pour l’énergie nucléaire
est maintenue ainsi que l’Accord monétaire européen.
Les décisions et les recommandations que prend le
Conseil résultent de l’accord mutuel de tous les membres.
La règle est donc celle de l’unanimité mais eUe est tempérée
par le mécanisme de l’abstention d’un ou plusieurs
membres visant à ce que la mesure soit applicable aux
autres membres mais pas au membre qui s’abstient
(art. 6, § 2).

444. — Le Comité d’aide au développement. — Parmi


les divers Comités intergouvemementaux qui existent
428 LE CONTINENT EUROPÉEN

dans le cadre de l’O. C. D. E., l’un des principaux est le


Comité d’aide au développement (C.A.D.).
Il se compose des représentants de quatorze pays
membres (Autriche, Répubhque fédérée, Belgique,
Canada, Danemark, États-Unis, France, Italie, Japon,
Norvège, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni, Suède)
et de la Communauté économique européenne.
Ce Comité a pour but d’augmenter le volume des res¬
sources mises à la disposition des pays moins développés.
Il procède régulièrement à l’examen du montant et de
la nature des contributions de ses membres aux pro¬
grammes bilatéraux et multilatéraux d’aide. Un centre
de développement chargé d’un rôle de formation d’ex¬
perts et de spéciahstes a été créé.
Le C. A. D. est assisté par un Comité dit de coopéra¬
tion technique qui est chargé de l’élaboration et du
contrôle des programmes d’assistance technique organisés
pour les États en voie de développement.
Les États membres du C. A. D. sont ceux qui, dans le
monde, en dehors des États sociahstes, fournissent les
contributions les plus importantes aux États en voie de
développement.

Section II. — L’Association européenne


de libre échange.

445. — Olives de l’Association. — Primitivement


créée pour facihter l’exécution du plan d’aide nord-amé¬
ricaine à l’Europe, l’O.E.C.E. s’est, après la fin de cette
aide, préoccupé d’autres objectifs et a recherché des
formules permettant le développement des relations éco¬
nomiques et commerciales entre les membres. Cette
hbération des échanges a^ été envisagée sous la forme de
la création entre les 17 États (l’Espagne n’a été admise
dans l’O.E.C.E. qu’en 1959) d’un vaste marché dénommé
« zone de hbre échange ».
Mais au cours de l’année 1955 se produit ce qu’on
appelle la « relance européenne » avec la conférence de
Messine (i®’'-3 juin), qui groupe les représentants des
Six États constituant la C.E.C.A. et met à l’étude, sous
la direction de M. Spaak, la création d’une communauté
économique. Les autres membres de l’O.E.C.E. ont adopté
ime attitude très réservée à l’égard des projets des Six
et devant leur progrès le Conseil des Ministres de
LES ORGANISATIONS EUROPÉENNES 429

i’O.E.C.E. en juillet 1956 charge un groupe de travail


d’étudier la possibilité de la création d’une association
sur une base multilatérale entre le Marché commun des
Six et les autres membres de l’O.E.C.E., sous la forme
d’une zone de hbre échange.
Au cours de l’année 1957, après la signature du traité
de Rome le 25 mars, le Conseil, selon une décision qu’il
avait adoptée en février, entame le 16 octobre des négo¬
ciations officielles pour l’étabhssement de la zone de
hbre échange en Europe et crée un Comité intergouyor¬
nemental pour poursuivre les pou^arlers. Les discussions
se poursuivent au sein de ce comité sans succès pendant
l’année 1958, marquées par une vive opposition entre les
points de vue français et britannique, le Marché commun
étant entré en vigueur le janvier. Il apparaît alors
que tout accord est impossible sur la création d’une zone
de hbre échange s’étendant à tous les pays de l’O.E.C.E.
Dès lors sept États membres de l’O.E.C.E. qui avaient
maintenu entre eux une grande cohésion au cours des
négociations se réunissent les 20 et 21 juihet 1959
de Stockholm et décident de créer entre eux une Asso¬
ciation européenne de hbre échange. Mise au point ulté¬
rieurement, la convention constitutive est paraphée le
20 novembre 1959, signée le 4 janvier i960 ehe entre en
vigueur le 3 mai.

446. — La zone de libfe échange. ;— La convention


de Stockholm institue une zone de hbre échange. Une
teUe zone peut être définie comme le groupement de ter¬
ritoires douaniers entre lesquels les droits de douane et
les autres réglementations restrictives du commerce
international sont éhminés en ce qui touche les échanges
commerciaux portant sur des produits originaires des
territoires constitutifs de la zone.
L’ensemble territorial de la zone européenne de hbre
échange n’est pas d’un seul tenant car tous les territoires
des États membres (Autriche, Danemark, Norvège, Por¬
tugal, Royaume-Uni, Suède, Suisse) ne sont pas contigus.
La zone de hbre échange se caractérise par deux traits
d’aspect d'aüleurs négatif.
i» Ehe constitue un marché hbre pour certains produits
mais ne comporte aucunement un tarif douanier commun
vers l’extérieur, chaque État demeure hbre de son tarif
vis-à-vis des États tiers. Pour éviter le risque d’un détour¬
nement de trafic, la hberté commerciale entre les Membres
430 LE CONTINENT EUROPÉEN

ne concerne que les produits originaires de ces États.


C’est là une notion qui n’est pas toujours simple et le
Traité ou ses annexes posent des règles ou dressent des
listes permettant de considérer comme originaires d’un
État membre des produits qui y ont été fabriqués et
dans l'élaboration desquels sont entrés, selon certains
pourcentages, des produits importés de pays tiers,
2° La zone de fibre échange est une zone de liberté
économique dans laquelle, pour certains produits, sont
supprimées les restrictions et entraves mais ce n’est
aucunement un espace économique organisé, il n’existe
pas de politique économique commime, ü s’agit d’un
simple champ de concurrence internationale.
La disparition des droits de douane à l’importation
entre les États membres doit être réalisée par étapes
successives, l'article 3 du traité en a prévu huit avec
abandon de tout droit à l'intérieur de la zone pour le
juillet 1970 mais ce calendrier a été accéléré.
Les droits de douane ont disparu entre les Membres le
janvier 1967.

447. — Les institutions. — L’A.E.L.E. a une structure


institutionnelle extrêmement simplifiée. Il n'existe qu'un
seul organe, le Conseil auquel sont représentés tous les
États membres. Il adopte ses décisions et ses recomman¬
dations selon la règle de l’unanimité mais celle-ci est
assouphe car elle est considérée comme acquise si aucun
État n’a émis de vote négatif. Le Conseil peut instituer
des organes subsidiaires dont le concours lui paraîtrait
nécessaire.
Le Conseil, outre son rôle normal d’assemblée délibé¬
rante d’une organisation internationale, exerce une fonc¬
tion de médiation entre les États membres si l’un estime
qu’un bénéfice que lui confère la convention est compro¬
mis. Au cours de cette procédure dite de « consultation
et de plainte », le Conseil peut désigner pour l’assister un
Comité d’examen.
Le Conseil peut négocier un accord entre les États
membres et tout autre État, union d’États ou organi¬
sation internationale pour créer une association (art. 41).
Il a été fait usage de cette disposition à l’égard de la
Finlande qui est associée à l’A.E.L.E. par un accord
du 27 mars 1961. Un accord entre l’A.E.L.E. et la Com¬
munauté économique européenne pourrait être conclu
sur la base de ce texte, mais il ne semble pas que les
LES ORGANISATIONS EUROPÉENNES 431

tendances politiques soient en ce sens, 1 A.E.L.E. est, au


contraire, menacée d*une dislocation dans la mesure ou
ses membres tendent à adhérer pour les uns (Royaume-
Uni, Danemark), ou à s’associer pour les autres (Suède,
Suisse, Autriche) à la Communauté économique euro¬
péenne.

Section III. — Le Conseil d’assistance


économique mutuelle (Comecon).

Au lendemain de 1945 de multiples conventions éco¬


nomiques ont déterminé les relations^ commerciales et
économiques des pays de l’Europe orientale entre eux
et avec l’U.R.S.S. Certains accords ont sohdement orga¬
nisé la sohdarité économique en créant des organes pari¬
taires permanents veillant à l’application du traité, ainsi
l’accord entre la Pologne et la Tchécoslovaquie ^ du
4 juillet 1947. Une organisation plus générale devait être
créée ultérieurement.

443 — Historique. — En réphque à la constitution en


1948 ’de rO.E.C.E. dont le rôle primitif concernait la
mise en œuvre de l’aide Marshall, lU.R.S.S. a conclu
avec les démocraties populaires européennes, le jan¬
vier 1949, un traité international constituant un Conseü
d’assistance économique mutuelle, organisme de coopé¬
ration dans le domaine économique des divers Etats du
monde sociahste.
Cette coopération initialement limitée essentiellement
au secteur du commerce et exprimée dans des accords
bilatéraux a revêtu ultérieurement une forme différente,
comportant une coordination des planifications écono¬
miques, tout particulièrement dans le domaine des
industries mécaniques, et tendant dans certains secteurs
à une véritable division internationale du travail.
Sur le plan pohtique une évolution s’est aussi mani¬
festée, notamment après 1953 et la mort de Staline et
aussi après les événements de Pologne et de Hongrie de
1956, une certaine décentrahsation est apparue.
La structure initiale de l’organisation développée par
la pratique au cours des années a été transformée par
une nouvelle convention dite de Sofia, signée le 14 dé¬
cembre 1959 et entrée en vigueur le 13 avril i960, que
complètent divers textes annexes, parfois de simples réso¬
lutions.
432 LE CONTINENT EUROPÉEN

L’organisation groupait en janvier 1949 autour de


ru. R. S. S., la Bulgarie, la Hongrie, la Pologne, la Rou¬
manie, la Tchécoslovaquie. L’Albanie devenait membre
en février 1949 et la République démocratique allemande
en 1950. Bien que l’Organisation soit européenne, la Mon¬
golie extérieure en fait partie depuis 1962.

449. — Structure. — La structure du Conseil est


complexe, eUe a varié dans le temps.
Théoriquement le Conseil comporte quatre séries d’or¬
ganes : la session du Conseil —• la conférence des représen¬
tants des pays membres — les Commissions permanentes
— le Secrétariat.
La compétence de certains de ces organes a diminué,
cependant que d’autres organismes étaient créés.
La session du Conseil est quahfié d’organe suprême mais
a perdu de ses compétences depuis 1962 ; il s’agit de délé¬
gations gouvernementales des pays membres, se réunis¬
sant selon la formule des conférences diplomatiques.
Le véritable organe déhbérant est depuis 1962 la Confé¬
rence des premiers secrétaires des Comités centraux des
partis communistes et chefs de gouvernement, dont l’impor¬
tance pohtique est considérable.
Le Conseil exécutifs, été créé en juin 1962. Second organe
par ordre d’importance, il se compose des chefs adjoints
des gouvernements des pays membres de l’organisation,
sa présidence est alternative.
La conférence des représentants des pays membres a cons¬
titué longtemps un organisme de caractère permanent
dont le siège était à Moscou, elle était constituée d’un
représentant par État membre. Depuis 1963 il existe tou¬
jours des représentants des États membres mais il ne
semble pas qu'ils se réunissent sous la forme d’une confé¬
rence.
Le Secrétariat groupe les fonctionnaires de l’organisa¬
tion qui sont au nombre de plusieurs milliers; l’installation
dans des bâtiments construits à Moscou a été prévue pour
1965. Un secrétaire a autorité sur l’ensemble du personnel
du Secrétariat.

450. — Les organes et activités techniques. — L’acti¬


vité du C. A. E. M. est multiforme et il a été nécessaire de
créer divers organes spécialisés pour faire face à tous les
problèmes.
Parmi les principes fondamentaux sur lesquels elle
LES ORGANISATIONS EUROPÉENNES 433

repose, l’iin des plus importants est celui de la division


internationale socialiste du travail dans l’intérêt de la cons¬
truction du socialisme et du communisme. EUe met en
œuvre une collaboration économique qui contribue au
développement le plus rationnel de l’économie nationale, à
l’augmentation du niveau de vie de la population et au
renforcement de l’unité et de la cohésion des pays membres.
EUe tend à réaUser, tout particulièrement par les Commis¬
sions permanentes, une coordination des plans économiques
nationaux. EUe permet également d’aboutir à des aménage¬
ments économiques à un échelon coUectif, comme la cons¬
truction et l’achèvement en 1963 des pipe-Unes U. R. S. S.,
Hongrie, Tchécoslovaquie d’une part, Pologne, Répu-
bUque démocratique allemande d’autre part.
Sur le plan commercial a été conclu un accord de com¬
pensation multüatéral utUisant le système des roubles
transférables et la Banque internationale pour la coUa-
boration économique, dont le principe avait été adopté en
1962, a été créée en 1964.
Parmi les organes à compétence spéciaUsée il convient
d’en distinguer trois sortes :
1° Les Commissions permanentes. — Selon l’article 8,
§ ler des Statuts, les commissions permanentes sont créées
pour promouvoir un développement plus poussé des Uens
économiques entre les pays membres du Conseil et organi¬
ser une coUaboration multiple, économique, scientifique
et technique dans les branches de l'économie. La création
de diverses commissions permanentes s’est échelonnée
depuis 1950 et à la fin de l’année 1963 on en comptait 21
(p. ex. énergie électrique, agriculture, énergie nucléaire
construction de machines, industries du charbon, indus¬
tries chimiques, etc.).
2° La Banque internationale de coopération économique.
— Cette Banque est distincte du C. A. E. M. et n’a i)as
été créée par une déhbération de l’organisation. Sa créa¬
tion décidée en principe en juin 1962 a fait l’objet d’un
accord d’octobre 1963 entré en vigueur le le*'janvier 1964.
La Banque est destinée à assurer le développement de la
coopération, l’expansion de l’économie des pays mem¬
bres, l’accroissement de leurs relations avec les pays
tiers. La technique utihsée est celle du décompte rnul-
tilatéral entre les pays membres avec utihsation d’un
rouble transférable ou rouble de change (0,987412 gramrnes
d’or pur), elle n’est pas sans analogie avec la solution
employée antérieurement dans l’O. E. C. E.
LE CONTINENT EUROPÉEN
434

La Banque dont le capital est de 300 millions de roubles


transférables comporte deux organes, un Conseil où sont
représentés tous les États membres, chacun ,disposa.nt
d’une voix, quels que soient ses apports et un Comité
exécutif composé de fonctionnaires internationaux.
3° Les organismes de collaboration technique. Divers
organismes techniques ont été créés depuis 1962, ils
établissent une collaboration technique entre les membres
du C. A. E. M. mais n’ont pas été créés à l’intérieur de
l’organisation. On peut citer le protocole sur le centre de
dispatching de l’énergie électrique (25 juillet 1962),
l’Organisation pour la coopération dans l’industrie des
roulements à biUe {25 juillet 1964), l’Organisation pour la
coordination de la production sidérurgique des laminés et
profilés (15 juillet 1964), le Pool commun des wagons de
chemins de fer (juillet 1964).
Ces organisations groupent divers États membres du
C. A. E. M. mais pas nécessairement les mêmes États ni
tous les États.

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436 LE CONTINENT EUROPÉEN

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CHAPITRE II

L’ORGANISATION POLITIQUE :
LE CONSEIL DE L’EUROPE

451. — Les origines historiques. — Les divers mou¬


vements dits « fédéralistes », qui ont été créés dans la
plupart des pays de l’Europe après 194^» oiil tenu à
La Haye du 7 au 10 mai 1948 une conférence de carac¬
tère non intergouvememental appelée Congrès de l’Eu¬
rope. A cette session le projet de réunion d’une assemblée
constituante européenne, qui avait été soutenu par plu¬
sieurs hommes politiques français, sur la base d’un député
pour I million d’habitants, les États servant de circons¬
criptions territoriales, ne fut pas accepté, mais la convo¬
cation d’une Assemblée parlementaire destinée à exprimer
une opinion européenne fut réclamée.
En écho à cette proposition^ le Gouvernement français
proposa en août 1948 aux États membres de l’Union
occidentale, c’est-à-dire les trois pays du Bénélux et la
Grande-Bretagne, la réunion d’une conférence prépara¬
toire. La proposition française fut soutenue par la Bel¬
gique et acceptée sans enthousiasme par le Gouvernement
britannique, et le 26 octobre fut décidée la création d’un
Comité permanent pour l’étude et le développement de
la fédération européenne, composé de dix-huit membres,
soit cinq pour le Royaume-Uni et la France, trois pour
la Belgique et les Pays-Bas, deux pour le Luxembourg.

452, — L’opposition des thèses. — Devant ce comité,


qui se réunit à Paris à dater du 26 novembre 1948, deux
thèses principales s’affrontent.
La thèse franco-belge est celle d’une union européenne
438 LE CONTINENT EUROPÉEN

dont l’organe principal aurait été une assemblée formée


de parlementaires des pays européens et délibérant à la
majorité des voix. La thèse britannique est celle d’une
assemblée diplomatique composée de représentants des
gouvernements.
La conciliation s’avéra difficile entre les deux projets
dont l’un lançait la formule nouvelle d’une sorte de
Parlement européen, au moins de son embryon, et dont
l’autre était la solution traditionnelle de la diète diplo¬
matique telle que l’avait connue par exemple la Confé¬
dération germanique au xix® siècle. Progressivement
pourtant une transaction s’opéra. Un contre-projet bri¬
tannique accepta la présence, à côté du comité inter¬
gouvememental des ministres, d’une assemblée de carac¬
tère consultatif et dont les membres seraient nommés
par les gouvernements. Finalement au cours de la réunion
à Londres des cinq ministres de l’Union occidentale, les
27 et 28 janvier 1949, le compromis auquel n’était point
parvenu le Comité d’études fut atteint.
Les cinq ministres décidèrent la création d'une orga¬
nisation européenne qui ne portait pas le nom d’Union
européenne mais celui de Conseil de l’Europe et qui
serait constituée par un Comité des ministres et une
Assemblée consultative. Le Secrétariat permanent serait
à Strasbourg, siège de l’Organisation.
L’Assemblée consacrait la thèse franco-belge, édul¬
corée d’ailleurs. Le Comité des ministres marquait le
succès de la thèse britannique, ainsi que le nom de l’orga¬
nisation eUe-même.
L’accord étant ainsi atteint entre les cinq États, la
décision fut prise d’inviter immédiatement l’Itahe et
d’autres Puissances faisant partie de l’O.E.C.E. à par¬
ticiper à une conférence pour l’élaboration du traité
constitutif de la nouvelle organisation. La conférence
qui s’ouvre à Londres le 28 mars groupe ainsi, à côté des
Cinq, les représentants de l’Irlande, de l’Italie et des
trois pays Scandinaves, le Danemark, la Norvège, la
Suède. Préparé par cette réunion, le statut du Conseil de
l’Europe est signé à Londres le 5 mai 1949.

453. — Le statut. — Le statut est entré en vigueur


le 3 août 1949 et la première réunion de l’Assemblée
consultative s’est tenue à Strasbourg, siège de l’Organi¬
sation, le 10 août. ^
Le nombre des États membres du Conseil de l’Europe
l’organisation politique 439

s’est accru depuis 1949. Aux dix membres originaires,


premiers signataires du Statut se sont ajoutés succes¬
sivement en 1949 la Grèce et la Turquie, en 195® l’Islande.
La Sarre et la République fédérale sont adinises en 1950
comme membres associés, la République fédérale devient
membre ordinaire en 1951 6t la Sarre cesse son apparte¬
nance le i®!" janvier 1957. L’Autriche a été adinise en
avril 1956, Chypre en mai 1961 et la Suisse a adhéré
en 1963 après avoir été représentée longtemps par des
observateurs. Après l’admission de Malte (3 mai 1965),
le Conseil est ainsi passé de 10 à 18 membres. Le Portugal
et l’Espagne ne peuvent adhérer pour des raisons de
caractère idéologique.
Le statut comprend quarante-deux articles précédés
d’un préambule ; selon ses dispositions, le Conseil conaporte
trois organes fondamentaux, un Comité des ministres,
une Assemblée consultative, un Secrétariat.
Mais cette formule tripartite ne doit pas faire illusion.
Elle se distingue totalement, en effet, des formules
également tripartites que l’on rencontre généralement
dans les organisations internationales et qui prévoient,
en dehors d’un secrétariat permanent commun à toutes
les organisations, une assemblée groupant l’ensemble
des membres et un conseil n’en groupant qu un certain
nombre. Dans les diverses organisations internationales,
assemblée et conseil comportent le inênie caractère : ce
sont des conférences diplomatiques où siègent les repré¬
sentants des gouvernements obéissant aux instructions.
Au Conseil de l’Europe, l’Assemblée et le Comité des
ministres diffèrent profondément, car seul le Comité des
ministres a la structure habituelle, l’Assemblée n’èst
pas composée de représentants des gouvernements.

454. — Le Comité des ministres. — Aux termes de


l’article 13 du Statut, le Comité des ministres, coinposé
des ministres des Affaires étrangères des divers Etats
membres, est l’organe compétent pour agir au nonti du
Conseil de l’Europe. Le Comité, instance diplomatique
classique, se réunit en principe a huis clos, il siè^e à
Strasbourg ou dans toute autre ville de son choix et s’est,
en fait, réuni souvent ailleurs.
L’article 20 réglemente avec minutie la procédure de
vote. Les déhbérations portant sur des matières de pure
procédure sont prises à la majorité simple, d’autres
délibérations exigent la majorité des deux tiers, tantôt
440 LE CONTINENT EUROPÉEN

la majorité des deux tiers des membres du Comité


(admission de nouveaux membres), tantôt la majorité des
deux tiers des voix exprimées et la majorité simple des
membres du Comité (budget). Pour les questions impor¬
tantes qui sont énumérées dans l’article 20, § a, la règle
est celle de Tunanimité, mais avec un tempérament
important car il s’agit de l’unanimité des voix exprimées,
ce qui signifie que l’abstention ne fait pas obstacle à
l’adoption d’une recommandation. Ces recommandations
sont d’ailleurs dépourvues de tout caractère exécutoire
et sont soumises à la ratification par les gouvernements,
ce qui rétablit totalement la règle de l’unanimité au sens
diplomatique classique.

455. — L’Assemblée consultative, sa composition. —


Si le Comité des ministres demeure l’instance intergou¬
vemementale de type classique, l’Assemblée consultative
symbolise au contraire une formule nouvelle, celle de la
représentation des peuples. Mais cette formule que pré¬
conisait le projet franco-belge de 1948, reprenant d’aü-
leurs les opinions exprimées au congrès de La Haye, n’a
pas été véritablement réalisée.
Non seulement l’Assemblée n’a qu’un rôle consultatif,
mais elle n’est pas au sens propre représentative.
Elle n’est pas composée de représentants des Etats,
mais elle n’est pas davantage composée de représentants
élus des populations et désignés ainsi par les peuples des
États membres pour siéger, en cette qualité, dans un
Parlement européen. La formule adoptée est celle d’une
assemblée constituée par des parlementaires des divers
États membres, désignés généralement mais non néces¬
sairement d’ailleurs par les parlements respectifs.
Les sièges de l’Assemblée ont été répartis entre les
États suivant une formule numérique distincte de l’éga¬
lité diplomatique mais qui n’est pas non plus une formule
proportionnelle. Sur l’ensemble de 147 sièges ü en a été
ainsi attribué 18 aux parlementaires de chacun des plus
grands États (Allemagne fédérale, France, Italie, Royaume-
Uni), 10 pour la Turquie, 7 pour la Belgique, la Grèce, les
Pays-Bas, 6 pour l’Autriche, la Suède et la Suisse, 5 pour
le Danemark et la Norvège, 4 pour l’Irlande, 3 enfin
pour l’Islande, le Luxembourg, Chypre et Malte.
Pour assurer le maintien de cette formule de réparti¬
tion et bien que les parlementaires membres de l’As¬
semblée ne puissent jamais être considérés comme faisant
l’organisation politique 441

partie d’une délégation nationale, ü existe une formule


assez curieuse, prévue par l’article 25, § c, celle de la
suppléance qui fait que chaque représentant peut être,
en cas d’absence, remplacé par un suppléant ayant qua-
hté pour siéger, prendre la parole et voter à sa place.
Les membres de l’Assemblée votent librement et ne
sont soumis à aucun mandat impératif. Ils siègent par
ordre alphabétique et non par nationalité, et on a pu
constater, lors des votes, des regroupements par appar¬
tenance pohtique. Les partis pohtiques des États membres
sont représentés à l’Assemblée à l’exception du parti
communiste et des partis apparentés, ce qui donne ainsi
une couleur pohtique particuhère à l’ensemble. On dis¬
tingue trois groupes : les sociahstes, les hbéraux, les chré¬
tiens démocrates.

456. — L’Assemblée consultative, son rôle. — L’Assem¬


blée est dépourvue en principe de tout pouvoir de décision.
Toutefois eUe éht son président et adopte son règlement inté¬
rieur (article 28, § a), eUe peut créer des Commissions et fixe
la date d’ouverture de ses sessions ordinaires (article 32).
L’article 34 du Statut laissait au seul Comité des
ministres la compétence pour prévoir une session extra¬
ordinaire. Un amendement au Statut, en date du 22 md
1951, a prévu que le président de l’Assemblée pourrait
convoquer l’Assemblée en session extraordinaire avec
l’accord du Comité des ministres. Une assemblée parle¬
mentaire est maîtresse de son ordre du jour, mais le
Statut de 1949 la privait de cette faculté et faisait établir
l’ordre du jour par le Comité des ministres. L’amende¬
ment au Statut de mai 1951 permet à l’Assemblée de
disposer d’une pleine compétence en matière d’ordre du
jour. Les déhbérations de l’Assemblée sont adoptées à
la majorité simple en matière de questions intérieures
ou de questions de procédure. Pour les questions impor¬
tantes, les déhbérations sont acquises à la majorité des
deux tiers des voix exprimées (article 29 in fine).
L’Assemblée étant consultative, les recommandations
qu’ehe adopte, en dehors des questions intérieures ou
de procédure, ne sont pas des décisions mais de simples
projets qui sont transmis au Comité des ministres.

457. — Évolution du Conseil de l’Europe. — Comme


tout organisme vivant, le Conseil de l’Europe a évolué
depuis 1949.
442 LE CONTINENT EUROPÉEN

L’Assemblée a ainsi constitué un grand nombre de


commissions générales ou spéciales et une commission dite
permanente destinée à siéger entre les sessions et à
assurer ainsi à l’Assemblée une continuité qui lui faisait
défaut à l’origine.
Une mention particulière doit être faite de la création
d’un Comité mixte qui a commencé à fonctionner à
partir du mois d’août 1950. Composé de cinq membres
du Comité des ministres, de six membres de la commis¬
sion permanente de l’Assemblée et du président de celle-
ci, ce comité est un organe de liaison entre l’Assemblée et
le Comité des ministres qui, dans le statut de 1949, sont
complètement séparés et isolés l’un de l’autre.

458. — Le Secrétariat. — Le Secrétariat du Conseil


de l’Europe se compose d’un secrétaire général, de deux
secrétaires généraux adjoints et d’un personnel de fonc¬
tionnaires internationaux. Les secrétaires généraux sont
assistés d’un cabinet et de diverses directions et ser¬
vices. Le Secrétariat a pris progressivement une grande
importance et joué un rôle de premier plan dans
l’œuvre même du Conseil.

459. — L’œuvre du Conseil. — Les travaux du Conseü


de l’Europe depuis 1949 ont été empreints d’une grande
activité et marquent d’incontestables qualités de sérieux,
de compétence. On minimise, souvent à tort, l’œuvre
réelle du Conseil et on marque son impuissance.
Cela provient de ce que d’autres organismes européens
sont plus à même d’agir que le Conseil de l’Europe lui-
même condamné ainsi à un rôle intermédiaire. Aucun
grand problème européen n’a échappé depuis 1949 au
Conseil de l’Europe. Il a ainsi, en matière culturelle,
favorisé les rapports culturels et aidé à la création à
Bruges du Collège d’Europe. Il a proposé l’établissement
d’un Office européen des brevets et d’un Office européen
de la main-d’œuvre, chargé d’assurer le plein emploi.
Il a élaboré un code europ&n de la sécurité sociale, pré¬
conisé sur le plan administratif l’uniformisation des pas¬
seports, adopté un projet d’abaissement des tarifs doua¬
niers dû au ministre suédois M. Berthil Ohhn.
Sortant même du cadre étroit que le Statut de 1949
assignait à sa compétence, le Conseil de l’Europe ou
plutôt l’Assemblée s’est préoccupée des problèmes géné¬
raux de l’organisation de l’Europe. C’est à Strasbourg,
l’organisation politique 443

le II août 1950, qu'a été votée la motion de M. Winston


Churchill demandant la création immédiate d’une armée
européenne unifiée, sous l’autorité d’un ministre européen
de la Défense, soumis à im contrôle démocratique euro¬
péen. A Strasbourg encore, sont successivement lancés les
projets de diverses communautés européennes, ainsi le
26 août 1950 sur la proposition d’un Français, M. Édouard
Bonnefous, celui d’une autorité européenne des trans¬
ports; ainsi le décembre 1951 celui de M. Cha.rpentier
relatif à une communauté européenne de l’agriculture.
C’est à Strasbourg aussi qu’a été adopté le 10 mars 1953
l’avant-projet de communauté poHtique européenne qui
concernait un État fédéral Hmité à l’Europe des Six.
Enfin ü ne faut pas oubher que l’article 3 du Statut,
tout comme le préambule, met l’accent sur le patrimoine
commun des peuples européens, la protection des droits
de l’homme et des libertés fondamentales. Dans ce
domaine particuher, le Conseil de l’Europe a accompli
une oeuvre que l’on ne saurait méconnaître, la seule d'ail¬
leurs qui puisse entrer, en partie au moins, dans le droit
positif. La conclusion de la Convention européenne des
droits de l’homme le 4 novembre 1950» a couronné les
travaux accomphs à ce sujet par l’Assemblée dès sa pre¬
mière session. Diverses décisions ont été rendues (V. supra,
n® 346).
Plus de trente conventions ont été signées et la plupart
d’entre elles sont en vigueur entre un nombre variable
de membres du Conseil. En dehors de la protection des
droits de l’homme où l’œuvre a été fort importante, il
faut citer les conventions culturelles, la convention sur
le règlement pacifique des différends du 29 avril 1957»
diverses conventions en matière de santé publique et
dans le domaine sociale la Charte sociale européenne
signée à Turin le 18 octobre 1961, qui est une convention
internationale protégeant les droits des travailleurs et
qui, pour la première fois dans le droit international,
reconnaît le droit de grève.
Manifestation de sohdarités européennes et expression
d’une éthique occidentale fondée sur le règne de la loi
et le respect des valeurs indi\ddueUes, le Conseil de l’Eu¬
rope tend à l’établissement progressif d’une Communauté
juridique européenne assez large et son assemblée consul¬
tative exprime sur les grands problèmes pohtiques
l’opinion des Parlements et donc indirectement des
peuples.
444 LE CONTINENT EUROPÉEN

BIBLIOGRAPHIE

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la structure politique européenne, thèse Montpellier, 1950 ;
Bruyas (J.), Le Conseil de l’Europe, R. G. D. I. P., 1951,
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R. C. A. D. I., 1952, t. II; Carstens (K.), Das Recht
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du Secrétaire général du Conseil de l’Europe comme dépo¬
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p. 680-695; Rencki (G.), L’Assemblée Consultative du
Conseil de l’Europe, essai de définition de sa nature juri¬
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du Conseil de l’Europe, Paris, 1958; Lindsay (K.), Vers
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différends, R. G. D. I. P., 1959, p. 21-64; Haas (E.),
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i960; Kiss (A. C.), Les actes du Comité des ministres du
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de l’Europe, A. F_. D. I., 1962, p. 726-740; Kiss (A. C.),
L’admission des États comme membres du Conseil de l’Eu¬
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accomplie en igôj par le Conseil de l’Europe dans le
domaine du droit. Revue internationale de droit comparé,
1964, p, 125-165; Van Asbeck, La Charte sociale euro¬
péenne, sa portée juridique, sa mise en oeuvre, mél. RoHn;
Vasak (K.), Le Conseil de l’Europe, Paris, 1965; Kiss
(A.-C.), Le Conseil de l’Europe et le règlement pacifique des
différends, A. F. D. L, 1965, p. 668-686.
Voir aussi les diverses pubhcations du Conseil, notam¬
ment Dix années de vie du Conseil de l’Europe et les publi¬
cations périodiques.
CHAPITRE III

T FS ORGANISATIONS EUROPÉENNES
A COMPÉTENCE POLITICO-MILITAIRE

Quatre organisations politiques internationales euro¬


péennes, de compétence politico-militaire, sont apparues
successivement en 1948, 1949, I954- La première d’entre
elles, l’Union occidentale, a servi de noyau aux deux
autres, l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord et
l’Union européenne occidentale.
S3miétriquement une Organisation internationale grou¬
pant les « pays de l’Est » a été constituée en 1955-

Section I. — L’Union occidentale.

460. — Origines historiques. — L’Union occidentale a


pour origine l’alliance franco-britannique établie le 4 mars
1947 à Dunkerque. Bien qu’à deux reprises et au cours des
deux dernières guerres mondiales la France et le Royaume-
Uni aient lutté ensemble, il n’existait entre eux aucun traité
d’alliance au sens formel. Un tel traité fut seulement conclu
le 4 mars 1947 en la ville de Dunkerque à laquelle s’atta¬
chaient les souvenirs de la lutte de 194m L’extension de
l’alliance fut préconisée par l’homme d’Etat britannique,
M. Ernest Bevin, dans un discours à la Chambre des Communes
le 22 janvier 1948, dans lequel il proclamait la nécessité de créer
une Union des Pays de l’Europe occidentale, qui engloberait
outre la France et le Royaume-Uni les trois Etats du Bénélux.
Ainsi, et il convient de le souhgner, car la pohtique du
Royaume-Uni est généralement réticente en matière d’or¬
ganisation internationale européenne, l’Union occidentale
devait naître d’une initiative britannique, puisque l’appel
446 LE CONTINENT EUROPÉEN

de M. Bevin fut entendu et sa proposition acceptée très


rapidement. Un projet franco-britannique fut soumis aux
États du Bénélux le 19 février, un contre-projet présenté le
29 et après une brève conférence qui se tint à Bruxelles du
4 au 12 mars le traité constitutif de l’Union occidentale, dit
traité de Bruxelles, fut signé le 17 mars.

461. — Le» principes directeurs. — Composé de dix


articles précédés d’un préambule, le traité de Bruxelles
établit entre les cinq États de l’Europe occidentale une com¬
munauté internationale de caractère politique et militaire.
Le préambule met l’accent sur les principes essentiels de cette
organisation. On peut les classer en quatre catégories diffé¬
rentes.
La première est d’ordre philosophique et éthique. Les
pays de l’Europe occidentale proclament leur attachement
à une philosophie individuahste, aux droits fondamentaux
de l’homme, à la dignité et à la valeur de la personne humaine,
à la défense des hbertés civiques et individuelles, aux tradi¬
tions constitutionnelles et au respect de la loi, tous principes
en lesquels ils trouvent un « patrimoine commun ».
Le second groupe de principes est celui de l’attachement
aux procédures pacifiques, au maintien de la paix et de la
sécurité internationales, à l’interdiction du recours à la
guerre pour le règlement des htiges internationaux.
Mais il est un autre aspect de la sécurité collective, c’est
celui de la résistance à la politique d’agression et une des
pierres angulaires du Pacte de Bruxelles apparaît avec un
troisième principe, celui de la défense à l’égard d’une reprise
de la politique d’agression de la part de l’Allemagne.
Enfin, et c’est là la quatrième catégorie de principes direc¬
teurs, les États signataires reconnaissent l’importance des
problèmes économiques et décident de coopérer et d’unir leurs
efforts pour constituer en Europe occidentale une base soUde
pour la reconstruction de l’économie européenne.

462. — La structure. — Le traité de Bruxelles prévoyait


un organisme constitué, aux termes de l’article 7, de manière
à pouvoir exercer ses fonctions en permanence et dénommé
Conseil consultatif. Composé des ministres des Affaires
étrangères des pays membres, il a siégé assez fréquemment,
surtout dans les quatre premières années et s’est réuni alter¬
nativement dans les capitales des divers États. Ce Conseil,
qui rappelait les comités de ministres des Affaires étrangères
des ententes régionales européennes d’avant la seconde guerre
mondiale, prenait ses décisions d’un commun accord, donc à
l’unanimité.
Le Conseil était doublé d’un organe véritablement per¬
manent, non prévu explicitement par le Pacte et appelé
Commission permanente. Elle est installée à Londres et
LES ORGANISATIONS EUROPÉENNES 447

composée des ambassadeurs des États membres accrédités à


Londres ainsi que d’un représentant du Foreign Oifice. Le
secrétariat de la commission sert de secrétariat à l’Organisa¬
tion elle-même.

463. — Les organismes militaires. —Bien que^ pour¬


suivant d’autres buts, notamment en matière économique et
culturelle, le Pacte de Bruxelles constitue essentiellement un
système de sécurité collective et comporte donc des institu¬
tions militaires.
La constitution de forces militaires communes, composées
d’un certain nombre de divisions placées en cas de guerre
sous un commandement commun, qui avait été prévue a été
réalisée. Un comité de commandants en chef était prévu pour
assurer ce commandement. Il était placé sous la présidence
d’un of&cier général britannique, le Maréchal Montgomery,
assisté de commandants en chef des forces terrestres,
aériennes et navales de nationalité britannique et française.
Le siège du comité était fixé à Fontainebleau, en France.
La poUtique de défense elle-meme était arretée par un
Comité de défense groupant les ministres de la Défense
nationale de chacun des États, il était assisté de plusieurs
comités subordonnés, le Comité des chefs d état-major,
le Comité mihtaire qui élaborait les plans, le Comité de 1 arme¬
ment et le Comité exécutif. Ces organismes subordonnés
siégeaient à Londres et le Comité de défense se réunissait
périodiquement dans les diverses capitales.

464. — Évolution de l’union. — L’Union occidentale


s’est progressivement transformée. Sur le plan institutionnel,
elle a été pratiquement vidée de son contenu par la création
du Pacte Atlantique qui a absorbé en quelque sorte les orga¬
nismes de caractère militaire. Mais le traité a subsisté avec
son système particuher de sécurité collective de type auto¬
matique jusqu’en 1954- mois d octobre i954> ^ Union
occidciita-le a. été modifiéG d^une manière radicale, dans la
mesure où elle a été élargie pour constituer la solution dite de
remplacement à la Communauté européenne de défense et
permettre l’entrée de l’Allemagne et de l’Italie dans le système
défensif. (V. infra, n® 473).

Section II. — L’Organisation


du Traité de l’Atlantique Nord (O.T.A.N.).

L’idée de constituer un système de défense entre les signa¬


taires de l’Union occidentale et les États-Unis est apparue dès
la signature même du Pacte de Bruxelles. Elle a peut-etre
même été antérieure si l’on remarque que, dans le discours de
M. Bevin du 22 janvier 1948, ü était précisé que l’Union
PRINCIPAUX ACCORDS ET CONVENTIONS DU CONSEIL DE L’EUROPE
EN VIGUEUR AU 31 JANVIER 1967.
LES ORGANISATIONS EUROPÉENNES 449

projetée « n’était pas géographiquement limitée à l’Europe »,


formule en laquelle on voulut voir une sorte d’invitation
adressée aux Etats-Unis.
Précisément les circonstances politiques devaient s’aggra¬
ver rapidement après la signature du Pacte de Bruxelles.
Le blocus de Berlin par l’U. R. S. S. commença au mois
d’avril pour se resserrer progressivement au cours du mois de
juin.
C’est à cette époque, le ii juin, que sur la proposition du
sénateur Vandenberg le Sénat des Etats-Unis vota la résolu¬
tion n° 239 par laquelle il précisait les principes fondamen¬
taux qui devaient régir la politique internationale des États-
Unis et préconisait notamment, dans un point 3, « l’association
des États-Unis, selon la règle constitutionnelle, à celles
des ententes collectives régionales et autres qui sont fondées
sur une auto-assistance et une aide mutuelle continues et
efficaces, dans la mesure où ces ententes concernent leur
sécurité nationale ».
Deux jours plus tard des pourparlers se nouaient à Washing¬
ton entre le Département d’État, les ambassadeurs des Cinq
et l’ambassadeur du Canada, ils devaient se poursuivre au
cours de l’été. Le principe d’un traité défensif dit de l’Atlan¬
tique Nord fut admis en octobre et, après avoir été approuvé
à Londres en novembre 1948, un projet précis fut communiqué
au Gouvernement des États-Unis. Commencées à Washing¬
ton le 10 décembre, les négociations entre les Sept aboutirent
à la rédaction d’un texte et furent reprises en mars 1949
avec la participation d’autres États, la Norvège d’abord,
ensuite le Danemark, l’Islande, l’Itahe et le Portugal, mais la
Suède et l’Eire décHnèrent l’invitation. Le Pacte fut publié
le 18 mars, avant même d’avoir été signé, contrairement
à tous les usages, de manière à frapper les opinions pubüques.
La cérémonie solennelle de signature se déroula le 4 avril
1949 et le traité entra en vigueur le 24 août 1949. On peut
remarquer la concordance assez fidèle, à quelques jours près,
de ces dates avec celles de la signature et de l’entrée en
vigueur du Statut du Conseil de l’Europe.

465. — Composition. — A la date de sa signature, le


Pacte de l'Atlantique liait dans une organisation interna¬
tionale douze États, soit outre les Sept, le Danemark,
l’Islande, l'Italie, la Norvège et le Portugal. Malgré la
dénomination de Pacte Atlantique, l’Italie qui n’a aucun
littoral atlantique apparaissait comme signataire. Deux
autres États non « atlantiques » devaient ultérieurement
accéder au traité, la Grèce et la Turquie qui signèrent
le 22 octobre 1951 un protocole d’adh&ion accepté ulté¬
rieurement par les membres originaires et entré en vigueur
le 18 février 1952.
16. — INSTITUTIONS INTERNATIONALES.
450 LE CONTINENT EUROPÉEN

Enfin, après l’échec de la Communauté européenne


de défense, l’AUemagne occidentale devait adhérer à son
tour dans le cadre des accords de Paris du 23 octobre 1954.
ce qui porte à quinze le nombre des États membres, soit
treize États européens et deux États américains.

466. — Les principes directeurs du traité. — Le Pacte


de l’Atlantique est très bref, il comporte quatorze articles
et un court préambule. Il est présenté par ses signataires
comme un pacte de défense régionale, compatible à ce
titre d’accord régional avec la Charte des Nations Unies.
L’examen des articles 5 et 6 montre combien la notion
de « région Atlantique » s’estompe et même disparaît
puisque le système de garantie territoriale joue pour
tous les territoires des États membres et plusieurs d’entre
eux sont sans rivages atlantiques. L’article 6 incluait en
outre les départements français d’Algérie parmi les terri¬
toires protégés.
Le Conseü atlantique a constaté en janvier 1963 que,
depuis le 3 juillet 1962, les dispositions relatives aux
anciens territoires français d’Algérie étaient sans objet.
La garantie que procure le Pacte n’est d’ailleurs pas
de caractère automatique; l’article 5 précise que si une
attaque armée se produit, chacune des autres assistera
la partie ou les parties ainsi attaquées en prenant aus¬
sitôt, individuellement et d’accord avec les autres parties,
telle action qu’eUe jugera nécessaire, y compris l’emploi
de la force armée, pour rétabhr et assurer la sécurité.
Le Pacte de l’Atlantique comporte, aux termes de
son article 2, des aspects économiques mais son aspect
principal est militaire. Ses promoteurs l’ont présenté
comme un pacte défensif, ses adversaires y ont vu un
instrument de pohtique belliciste et l’U. R. S. S. a émis,
dès le 10 avril 1949, diverses protestations. Le Pacte est
certainement un pacte mihtaire et un instrument de
guerre, mais de guerre défensive. Il s’apphque à une
série de territoires qui peuvent apparaître comme le
glacis défensif du continent américain, en même temps
qu’il transforme les États-Unis et le Canada en un réduit
suprême de la défense de certains pays de l’Europe par
hypothèse sacrifiés. Le Pacte repose sur un postulat
stratégique et mihtaire qui est celui de la défense contre
une attaque venant de l’Est, ce qui présuppose une
telle attaque. Ce postulat est contestable. Il n’est pas
un élément d’apaisement dans les relations internationales.
LES ORGANISATIONS EUROPÉENNES 45I

467. — La structure. — Le Pacte de l’Atlantique


comporte une organisation qui est prévue par l’article 9.
Le texte initial se bornait à indiquer que les Parties
établissaient un Conseil auquel chacune d’elles serait
représentée pour connaître des questions relatives au
traité, ce Conseil devant être organisé de façon à pouvoir
se réunir rapidement et à tout moment. Le même article
précisait que le Conseü constituerait les organismes sub¬
sidiaires qui pourraient être nécessaires, en particulier
un comité de défense qui recommanderait les mesures
à prendre pour l’organisation des mesures collectives de
résistance à une attaque armée.
Ces formules étaient très souples, en particulier quant
à la création de divers organismes. Elles furent très lar¬
gement interprétées et l’Organisation du traité de l’Atlan¬
tique Nord, en abrégé l’O. T. A. N., est devenue progres¬
sivement particulièrement complexe. EUe comporte des
organismes civils et des organismes militaires.

468. — Les organismes civils. — Le Conseil prévu


à l’article 9 a pris le nom de Conseil de l’Atlantique Nord.
Il est apparu d’abord comme une conférence diplomatique
se réunissant chaque année en session ordinaire et en
outre chaque fois que la majorité des membres l’estimait
nécessaire. Un conseil des suppléants, créé le 18 mai 1950,
permettait des contacts plus fréquents. Enfin le Conseil
pouvait comporter, sous le nom de comité de défense,
une formation différente avec comme représentants des
États les ministres des Finances et des Affaires écono¬
miques.
Mais cette structure fut totalement remaniée à la
conférence de Lisbonne des 20 et 21 février 1952.
Depuis cette date, le Conseil est un organisme interna¬
tional permanent. Il demeure un Conseü de gouverne¬
ments représentés par leurs ministres des Affaires étran¬
gères et, selon les exigences de l’ordre du jour, par leurs
ministres de la Défense et par d’autres ministres compé¬
tents. Le Conseil tient au moins trois sessions annuelles à
l’échelon ministériel.
Pour permettre au Conseil de siéger en permanence et
de disposer d’un pouvoir effectif de décision, chaque
État membre nomme un représentant permanent au
Conseil, qui est assisté d’une délégation nationale.
L’organisation de la présidence du Conseil de l’O.T.A.N.
a subi des modifications importantes depuis l’origine
452 LE CONTINENT EUROPÉEN

de l’organisation. Initialement, le Conseil était présidé


par rotation par un Ministre. Après la réunion de Lis¬
bonne de 1952 fut créée la fonction de Secrétaire général
de rO.T.A.N. Celui-ci devait assumer la présidence du
Conseil lorsque ce dernier se réunissait à l’échelon des
représentants permanents, tandis que la présidence des
réunions ministérielles continuait à être assurée pour
un an aux Ministres des affaires étrangères des Etats
membres. Plus tard, sur le rapport du Comité dit des
Trois adopté par le Conseil le 14 décembre 1956, il fut
décidé que le rôle du Secrétaire général devait être ren¬
forcé, qu’il devait présider les sessions du Conseü même
ministérielles et c’est seulement une présidence d’hon¬
neur qui est attribuée par roulement aux Ministres des
divers États.
Le Secrétaire général, outre ces fonctions particulières,
est évidemment placé à la tête d’un important secrétariat
international.

469. — Les organismes militaires. — Machine de


guerre défensive, l’Organisation du traité de l’Atlantique
Nord comporte une série d’organismes mihtaires.
L’organe mihtaire suprême est le Comité militaire
composé d’un chef d’état-major par pays membre, sauf
l’Islande représentée par un civil ; sa présidence alterne.
La permanence est assurée par un organisme mih¬
taire exécutif, appelé Groupe permanent, qui siège à
Washington et se compose des chefs d’état-major ou
de leurs représentants des États-Unis, de la France et du
Royaume-Uni. Un comité des représentants mihtaires,
composé du groupe permanent et d’un représentant de
chacun des autres pays, siège également à Washington
et travaüle avec le Groupe permanent par qui ü est
informé et que celui-ci peut consulter. Un officier assure
la haison entre le Groupe permanent instahé à Washington
et le Conseil instahé à Paris.
Au-dessous des organismes mihtaires de direction,
apparaissent les commandements (Europe, Atlantique
Manche) avec chacun des commandements subordonnés,
par exemple pour l’Europe les commandements subordon¬
nés Centre Europe, Nord Europe, Sud Europe, Méditerra¬
née. Enfin existent certains organismes mihtaires destinés
à promouvoir l’unité des forces armées et à accroître leur
efficacité, comme par exemple le collège de Défense,
sorte d’École de guerre atlantique, le Bureau mihtaire
LES ORGANISATIONS EUROPÉENNES 453

de standardisation, les Groupes consultatifs pour la


recherche aéronautique et l’instruction aérienne.

470. — La coopération non militaire. — La coopéra¬


tion entre les membres de l’O. T. A. N. ne se hmite pas au
seul domaine mihtaire. Le Conseil a, en effet, le 14 dé¬
cembre 1956 adopté des résolutions qui étendent la
coopération à d’autres domaines. Il s’agit en particuher
d'une coopération économique tournée aussi bien vers la
Communauté économique européenne que vers la zone
de libre échange et tenant compte des intérêts écono¬
miques des pays sous-développés. Il s’ajoute une coopé¬
ration scientifique et technique destinée à accroître le
potentiel économique et aussi la puissance militaire de
l’Organisation.
Enfin la coopération militaire suppose évidemment
ime coopération pohtique préalable et un accord entre
les États. L’une des résolutions du Conseil du 14 dé¬
cembre 1956 est relative au règlement pacifique des
litiges et différends entre les pays membres. Elle prévoit
pour les htiges autres que juridiques ou économiques,
c'est-à-dire pour les htiges politiques, une procédure de
bons offices et invite le Secrétaire général à tenter d’ob¬
tenir des parties l’acceptation d’une procédure d’enquête,
de médiation, de conciliation ou d’arbitrage. Ces formules
n’ont guère été suivies d’effet et bien des oppositions
sont apparues au sein de l’O. T. A. N., qui n’ont pu être
réglées par ces mécanismes, à propos de Chypre entre le
Royaume-Uni, la Grèce, la Turquie, à propos de l’affaire
de Suez, de celle de Bizerte, ou de Goa ou encore dans le
différend opposant le Royaume-Uni et l’Islande en matière
de pêche et d’étendue de la mer territoriale.

471. — Le retrait de la France de l’Organisation.


— Le Gouvernement français a adressé le 10 mars 1966
un aide-mémoire aux autres gouvernements des États
membres de l’O. T. A. N. pour indiquer que tout en res¬
tant membre de l’Alhance atlantique il entendait se reti¬
rer de l’Organisation.
La distinction entre l’Alhance, en tant que traité,
et l’Organisation elle-même n’est pas inexacte d’un strict
point de vue juridique mais est extrêmement subtile.
Le retrait de l’Organisation a été fondé par l’aide-mémoire
gouvernemental sur le motif que l’Organisation ne cor¬
respond plus aux conditions actuelles de la vie intematio-
454 LE CONTINENT EUROPÉEN

nale, fondamentalement différentes de celles de 1949.


Par-delà cette affirmation apparaît une réalité politique :
les propositions présentées dès 1958 par le Président de la
République française et tendant à assurer à la France une
place privilégiée dans l’Organisation et particulièrement
dans les questions « atomiques » n’ont pas été retenues,
le gouvernement a donc amorcé des manœuvres de retrait,
d’abord pour les forces navales en Méditerranée initia¬
lement, plus généralement ensuite, en 1966 le retrait
s’étend aux forces terrestres et aériennes françaises,
d’ailleurs particulièrement faibles. Le retrait concerne
aussi les commandements dits intégrés, il signifie aussi le
refus par le gouvernement français que des unités, instal¬
lations ou bases étrangères en France relèvent d’autres
autorités que des autorités françaises.
Le gouvernement français a dénoncé divers accords
conclus avec le gouvernement des États-Unis, notam¬
ment quatre accords bilatéraux (25 février 1951 : dépôt
de matériel de Châteauroux ; 4 octobre 1952 : bases
aériennes; 17 juin 1953 : quartier général des forces U. S.
en France; 30 juin 1953 : oléoduc de l’O. T. A. N.),
mais il n’a pas dénoncé la convention générale du 19 juin
1951 sur le statut des forces de l’O. T. A. N. A été, au
contraire, dénoncé, le protocole du 28 août 1952 sur le sta¬
tut des quartiers généraux internationaux.
Les organismes militaires et les troupes O. T. A. N.
ont quitté le territoire français le avril 1967, selon la
demande du gouvernement.
On notera d’aiUeurs que les États-majors n’étaient pas
intégrés mais internationalisés et que les troupes françaises
n’ont jamais été intégrées, pas plus que les autres d’ail¬
leurs, à la très petite exception de quelques forces aériennes
françaises qui étaient dotées d’engins thermo-nucléaires
nord-américains et placées sous commandement nord-
américain.
Un problème particulier dérive du retrait de la France
de l’Organisation, celui du stationnement sur le territoire
de la République fédérale de forces françaises qui ne sont
plus désormais des troupes mises à la disposition de
l’O. T. A. N. Il a été résolu par accord entre les deux gou¬
vernements.
LES ORGANISATIONS EUROPÉENNES 455

Section III. — L’Union européenne


occidentale.

472. — Les accords de Paris. — Après le vote de


l’Assemblée nationale française, du 30 août 1954, qui
équivalait au rejet de la Communauté européenne de
défense, ime solution dite de remplacement fut recherchée
pour tenter de réahser le réarmement allemand demandé
par les États-Unis, sans sacrifier pour autant la souve¬
raineté française. Le président du Conseil français déve¬
loppa ainsi le 20 septembre, devant le Conseil de l’Europe,
les grandes hgnes de ses nouvelles propositions. Quelques
jours plus tard s’ouvrait à Londres la conférence dite
des Neuf, chargée d’élaborer le texte de remplacement.
Le 30 septembre, un accord intervient sur les modifica¬
tions à apporter au traité de Bruxelles pour permettre
l’adhésion à ce Pacte de l’Italie et de l’Allemagne. D’autres
documents sont mis au point, ils sont au nombre de
onze et constituent ce qu’on appelle les accords de
Londres, ils ont été signés à Paris le 23 octobre 1954,
sous le nom d’accords de Paris. L’ensemble est complexe,
comportant en des instruments diplomatiques successifs
le rétabhssement de la souveraineté allemande, l’exten¬
sion du traité de Bruxelles, la création d’une agence de
contrôle des armements en Europe, l’attribution à l’Or¬
ganisation du traité de Bruxelles de pouvoirs nouveaux,
l’engagement de l’Allemagne occidentale de ne pas fabri¬
quer certains armements, l’engagement pris par les
États-Unis de continuer à prêter leur appui à l’unité
européenne, l’engagement pris par le Royaume-Uni de
maintenir sur le continent européen quatre divisions et la
deuxième force aérienne tactique, la recommandation
de l’admission de l’AUemagne occidentale à l’O. T. A.N.,
les dispositions nécessaires pour l’implantation des
troupes allemandes dans la défense européenne, une décla¬
ration par laquelle l’AUemagne s’engage à ne pas recourir
à la force pour assurer sa réunification ou modifier ses
frontières, une déclaration enfin de conformité avec la
Charte des Nations Unies.

473. — La transformation du traité de Bruxelles. —


L’article 9 du traité de Bruxelles du 17 mars 1948 pré¬
voyait la possibihté pour les États membres de décider
d’un commun accord d’inviter tout autre État à adhérer
456 LE CONTINENT EUROPÉEN

au traité dans les conditions convenues entre eux et l’État


invité. C’est sur la base de ce texte que les cinq États
signataires du traité de Bruxelles décidèrent d’inviter
rAllemagne et l’Italie à adhérer au traité. Le texte avait
été, à cet effet, modifié.
En effet, le traité de Bruxelles était un pacte de sécu¬
rité mutuelle et le préambule affirmait la résolution des
signataires de « prendre les mesures jugées nécessaires en
cas de reprise d’une politique d’agression de la part de
l’Allemagne ». On modifia ce texte pour le mettre en
harmonie avec le changement de l’opinion et, par une
nouvelle formule, les chefs d’État affirmèrent que, dési¬
reux de promouvoir l’unité et d’encourager l’intégration
progressive de l’Europe, ils étaient « convaincus que
l’adhésion de la Répubhque fédérale d’Allemagne et de la
Répubhque itahenne au traité représente un nouveau et
substantiel progrès dans cette voie ».
Le traité de Bruxelles n’était d’ailleurs pas seulement
modifié, il était encore complété, et certains de ses
articles nouveaux sont relatifs à une organisation parti¬
culière de la nouvelle union internationale dite Union de
l'Europe occidentale.

474. — L’Organisation de l’Union de l’Europe occiden»


taie. — L’article 7 du traité, dans sa version de 1948,
se bornait à prévoir l’existence d’un comité consultatif,
et il fut ensuite organisé une Commission permanente
d’ambassadeurs siégeant à Londres.
L’Organisation de l’Union européenne occidentale est
un peu plus complexe. EUe dépasse l’alhance et prend
nettement une allure institutionnelle. Elle comporte
trois organes auxquels s’ajoute une Agence pour le
contrôle des armements.
Le premier organe est le Conseü de l’Union de l’Eu¬
rope occidentale. Il succède au Conseil consultatif et
est organisé de manière à pouvoir exercer ses fonctions
en permanence. Il peut être immédiatement convoqué
en vue de permettre aux hautes Parties contractantes de
se concerter sur toute situation pouvant constituer une
menace contre la paix, en quelque endroit qu’elle se
produise, ou mettant en danger la stabilité économique.
Ce Conseil est évidemment une assemblée diplomatique
où siègent les ministres ou les représentants des États
membres. Il prend en principe ses décisions à l’unanimité,
mais toutefois il peut, dans certains cas, prévus notam-
LES ORGANISATIONS EUROPÉENNES 457

ment dans les protocoles relatifs aux forces de l'Union,


au contrôle des armements et à l’Agence pour le contrôle
des armements, statuer à la majorité des deux tiers ou
même à la majorité simple.
Un second organe est prévu, d’une manière timide
d’ailleurs, dans l’article 9 nouveau, c’est une assemblée
consultative. Le nouveau traité utüise l’existence de
l’Assemblée consultative du Conseil de l’Europe, il en
tire une « assemblée composée des représentants des
Puissances du traité de Bruxelles à l’Assemblée consul¬
tative du Conseil de l’Europe ». Cette formule est inexacte
dans la mesure où il s’agit de représentants des Parle¬
ments et non des représentants des Puissances. Mais on
voit apparaître ainsi une assemblée particulière dont le
rôle d’aüleurs est mineur, puisque le Conseil se borne à
lui soumettre un rapport annuel sur ses activités, notam¬
ment dans le domaine du contrôle des armements. Cette
formule ne rappelle que de très loin celle qui existait
dans la C. E. D. qui instituait la responsabilité du Com¬
missariat à la défense devant l’Assemblée de la commu¬
nauté.
Enfin il existe un secrétaire général, à la tête d’un
secrétariat. Ce secrétaire général de l’Union occidentale
est prévu non par le traité lui-même mais par le protocole
n® 4 relatif à l’Agence de contrôle des armements.
Des organismes subsidiaires peuvent être d’ailleurs
créés par le Conseil lorsqu’il le jugera utile.

475. — L’Agence de contrôle des armements. —


Parmi les organismes que peut créer le Conseil, une place
particulière est à faire à l’Agence pour le contrôle des
armements, créée immédiatement par le protocole n® 4
pour assurer l’exécution du protocole n» 3 relatif au
contrôle.
L’Agence est composée d’rm directeur assisté d’un
directeur adjoint et d’un personnel de fonctionnaires. Le
directeur est noiiuné pour 5 ans par décision unanime du
Conseü et n’est pas rééligible.
Le Conseil approuve l’organisation de l’Agence, le
directeur et le personnel sont soumis au contrôle admi¬
nistratif du secrétaire général de l’Union occidentale.
L’Agence veüle au respect des règles de contrôle des
armements. Elle fait rapport au Conseil, possède des
pouvoirs d’investigation. En cas d’infraction le Conseil
prend, à la majorité, les décisions nécessaires.
458 LE CONTINENT EUROPÉEN

Section IV. — Le système du Bloc oriental.

Pendant de longues années le système politico-militaire


de sécurité concernant l’Europe orientée a reposé sur
la seule base de multiples traités bilatéraux conclus par
l’U. R. S. S. avec les démocraties populaires et par
celles-ci entre elles. Ces formules bilatérales avaient été
établies dès avant la capitulation de l’Allemagne, par
exemple par le traité du 12 décembre 1943 avec la Tché¬
coslovaquie, le traité du ii avril 1945 avec la Yougosla¬
vie, celui du 21 avril 1945 avec la Pologne. D’autres
conventions avaient été conclues par la suite. Le nombre
total de ces pactes d'assistance mutuelle destinés à pro¬
téger les signataires contre la résurrection de l’impéria¬
lisme allemand, parfois contre l’action d’un autre agres¬
seur éventuel, a été de 24 mais 7 d’entre eux, dont la
Yougoslavie était signataire, ont été dénoncés après
la rupture de juin 1948.

476. — Le traité de Varsovie. —• L’U. R. S. S. a


poursuivi depuis plusieurs années le projet d’organisation
de la sécurité européenne. Le plan Molotov formulé à la
conférence de Berlin au printemps de 1954 ayant été
rejeté par les Puissances occidentales le 7 mai, l’U. R. S. S.
a proposé à nouveau la réunion d’une conférence, notam¬
ment par une note du 13 novembre 1954 adressée aux
23 États européens avec lesquels elle entretient des
relations diplomatiques. La conférence devait se dérouler
avec la participation des États-Unis et se tenir à Paris
ou à Moscou. La proposition soviétique était faite à un
moment où les Accords de Paris du 23 octobre 1954
avaient été signés et où les débats de ratification se dérou¬
laient devant divers Parlements, notamment en France.
Seules les démocraties populaires acceptèrent de parti¬
ciper à la conférence qui s’ouvrit à Moscou le 29 no¬
vembre 1954 en présence d’un observateur chinois. Le
2 décembre fut adoptée une déclaration commune et la
décision fut prise d’organiser les forces armées des diffé¬
rentes républiques sous un commandement unique.
La ratification des Accords de Paris devait entraîner
la mise sur pied d’un système müitaire de l’Europe orien¬
tale très symétrique du Pacte Atlantique et qui repose
sur le traité de Varsovie du 14 mai 1955, signé au cours
d’une conférence tenue du ii au 14 mai. Ce texte, dé-
LES ORGANISATIONS EUROPÉENNES 459

nommé « traité d’amitié, de coopération et d’assistance


mutuelle », est tme véritable réplique du traité de l’Atlan¬
tique Nord. La plupart de ses articles sont calqués sur
ceux du texte occidental. Il est également condu pour
une durée de vingt ans mais l’article ii prévoit la dis¬
parition du traité en cas d’accord général sur la sécurité
collective.
Une différence importante apparaît toutefois avec un
artide sur l’organisation du commandement unifié qui
à l’Ouest a été établi postérieurement au Pacte.
L’article 6 créait un comité consultatif politique au
sein duquel chaque État signataire serait représenté par
un membre du gouvernement, il précisait que le comité
pouvait créer les organismes subsidiaires jugés néces¬
saires.
Le Comité consultatif s’est réuni, pour la première
fois, le 27 janvier 1956, à Prague, groupant des ministres
et de hautes personnahtés mihtaires, en présence d’un
observateur chinois. L’incorporation des forces armées
de l’Allemagne orientale dans le dispositif commun a été
décidée. Il a été en outre prévu que le Comité consultatif
se réunirait au moins deux fois par an et chaque fois
qu’il serait nécessaire. Des organismes subsidiaires sont
étabhs, qui ont leur siège à Moscou. L’un est une commis¬
sion permanente chargée de l’élaboration de recomman¬
dations en matière de poUtique étrangère. Le second est
un secrétariat composé de représentants de tous les
membres du traité de Varsovie.
On constate donc qu’aujourd’hui, sur le plan pohtico-
mihtaire, existe un système oriental voisin du type du
système atlantique quant à la structure même de l’orga¬
nisation intergouvemementale constituée.

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II. — L’Union occidentale et l’Union


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LES ORGANISATIONS EUROPÉENNES 461

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III, — Le système du bloc oriental.

Erven (L.), Le traité de Varsovie, Revue politique intem.,


lerjuin 1955, p. 9-11; Lachs (M.), Le traité de Varsovie
du 4 mars 1955, A. F. D. I., 1955. P- 120-123; Meiss-
NER (B.), Der Warschauer Pakt, Dokumentensammlung,
Cologne, 1962,
CHAPITRE IV

LES ENTENTES RÉaONALES

Les organisations internationales européennes qui ont


été décrites plus haut s’apphquent à une aire géogra¬
phique variable et déterminent ainsi une Europe géo¬
graphiquement plus ou moins étendue mais, à l’exception
de l’Union occidentale, aucune d’elles n’a présenté un
caractère strictement régional et, l’Union occidentale
ayant été transformée en Union européenne occidentale,
on ne peut plus parler de régionalisme d’une manière
précise.
D’autres tentatives régionales ont échoué très vite
comme celle concernant la France et l’Itahe dont le
protocole de Turin du 20 mars 1948 avait posé le principe.
La construction dite Francital n’a pas vu le jour et de
diverses recommandations formulées par une commission
mixte concernant l’harmonisation des pohtiques commer¬
ciales et le développement des échanges seul subsiste
un régime postal particuher entre les deux pays (tarif
intérieur).
Trois ententes régionales ont été tentées, deux existent
réellement, le Bénélux et le Conseil nordique, une troi¬
sième, l’Entente balkanique a perdu toute réalité.

§ ler. — Le Bénélux.

477. — Évolution du Bénélux. — On désigne sous ce


nom une tentative d’union économique entre la Bel¬
gique, les Pays Bas et le Luxembourg.
LES ENTENTES RÉGIONALES 463

L’idée d’une telle union n’est pas nouvelle. Elle remonte


à 1851, les Pays Bas et le Luxembourg constituant alors
une Union personnelle. D’autres tentatives ont été faites
en i86g, 1886, 1907. Une union économique belgo-
luxembourgeoise a d’ailleurs été conclue le 2 juillet 1921
et est entrée en vigueur le mai 1922.
Sous sa forme actuelle le Bénélux trouve son origine
directe dans la signature le 5 septembre 1944, à Londres,
par les gouvernements en exil de la Belgique, des Pays Bas
et du Luxembourg, d’une convention douanière. Elle a
été approuvée ultérieurement par les Parlements en 1947
et complétée par un protocole du 14 mars 1947 et deux
conventions des 5 novembre 1947 et 3 février 1958. C’est
par étapes que s’opère la réalisation progressive de
l’union économique des trois États suivant les degrés
successifs d’une communauté tarifaire, d’une comrnu-
nauté douanière, d’une union fiscale et enfin d’une union
économique. Une politique commerciale commune vis-à-
vis de l’extérieur a été établie le 1®^ mars 1954 et le
traité de 1958 entré en vigueur le i®^ novembre i960
détermine cette politique commune et prévoit la recherche
de la coordination des poHtiques sur le plan des inves¬
tissements, de l’agnculture et des affaires sociales. La
disparité des structures économiques et des dynamismes
industriels ou agricoles a entraîné de grandes difficul¬
tés.

478. — Les institutions du Bénélux. — Le Bénélux


du point de vue institutionnel n’est pas constitué sous la
forme d’un ZoUverein comportant pouvoir de décision
conféré à un organe. Il s’agit au contraire d’une coopéra¬
tion internationale reposant sur le principe de l’accord
mutuel.
Les institutions de l’Union sont assez complexes. Le
Comité des Ministtes veille à 1 application du Traite.
Chaque État y dispose d’une voix mais l’abstention d’une
partie ne fait pas obstacle à l’adoption d’une décision
(art. 18). .
Le Conseil consultatif interparlementaire est une émana¬
tion des Parlements nationaux, les gouvernements entre¬
tiennent des relations avec lui par l’intermédiaire du
Comité des Ministres.
Le Conseil de l’Union économique assure 1 exécution des
délibérations du Comité des Ministres et lui soumet les
propositions qu’il juge utiles (art. 25). U coordonne 1 acti-
464 LE CONTINENT EUROPÉEN

vité de multiples commissions de caractère général ou


spécial.
Le Conseil consultatif économique et social composé au
maximum de 27 membres (et 27 suppléants) dont un tiers
peut être désigné par chaque pays élabore, à la demande
du Comité des Ministres, des avis au sujet des problèmes
intéressant directement le fonctionnement de l’Union.
Le Collège arbitral a pour mission de régler les différends
qui pourraient s’élever en ce qui concerne l’application
du traité et des dispositions conventionnelles relatives à
son objet (art. 41). Les sentences et propositions de règle¬
ment sont adoptées à la majorité des voix. Les sentences
sont définitives et sans recours.
Un Secrétariat général est installé à Bruxelles avec un
Secrétaire général néerlandais et deux secrétaires géné¬
raux adjoints, l’un belge, l’autre luxembourgeois.
Une Cour de justice Bénélux a été créée par un traité du
31 mars 1965, en vue d’assurer l’unité de jurisprudence
dans l’application des règles communes, la détermination
du domaine commun étant définie par les États membres.
La Cour est composée de 9 membres appartenant aux
trois cours suprêmes avec trois avocats généraux. La Cour
statue à titre préjudiciel lorsqu’il apparaît qu’une décision
pendante devant l’une des juridictions nationales implique
la solution d’une difficulté d’interprétation d’une règle
juridique désignée comme commune. Le Comité des
ministres peut, s’il le juge bon, et en dehors de tout procès
demander à la Cour un avis consultatif sur un point.

479. — Dispositions générales. — Le traité du


3 février 1958 est entré en vigueur en novembre i960,
sauf pour les produits agricoles, l’harmonisation des poli¬
tiques en ce domaine devant être réahsée dans un délai
de 5 ans.
Conclu pour une durée de cinquante ans le traité reste
en vigueur sans dénonciation pour des périodes successives
de dix ans.
Les trois États adoptent, dans leurs relations avec les
États tiers, une pohtique commune en matière de com¬
merce extérieur et de paiements. Ils concluent en commun
les accords relatifs au commerce extérieur et au tarif
douanier. Ils ne peuvent procéder à une modification du
taux de change que d’un commun accord.
Les ressortissants des trois pays jouissent de l’égalité
de traitement. Les marchandises originaires d’un des pays
LES ENTENTES RÉGIONALES 465

jouissent du traitement accordé aux marchandises natio-


nales.
L'Union économique ainsi créée s’insère dans l’ensemble
plus large des Communautés européennes.

§ 2. — Le Conseil nordique.

480. Les origines. — Bien que constituant des enti¬


tés politiques séparées, les divers pays du nord de l’Eu¬
rope ont conservé entre eux des liens étroits sur le plan
de la culture, des régimes juridiques et de la civilisation.
Il est apparu en 1951 à certains parlementaires de ces
États qu’il serait opportun de créer un organisme consul¬
tatif dénommé Conseil nordique, dont la compétence
s’étendrait à toutes les questions concernant la coopéra¬
tion de ces pays.
Préparé par des parlementaires, le projet fut soumis
aux divers gouvernements et amendé par une conférence
des ministres des Affaires étrangères puis adopté par les
Parlements du Danemark, de la Norvège, de la Suède
et de l’Islande au cours de l’année 1952.
Sur le plan juridique, on doit noter que le Conseil
nordique n’est pas établi par un traité international
mais par des résolutions parallèles des divers Parlements.
Au Danemark toutefois cette résolution a été transformée
en loi interne, de sorte que le Conseil trouve sa base
dans trois résolutions parlementaires et une loi interne.
Les statuts du Conseil nordique contenaient à l’origine
des dispositions qui, sans faire de la Finlande un Etat
membre, lui permettaient d’envoyer des représentants
pour participer aux réunions si elle le souhaitait. Ces
formules n’ont pas été utüisées mais en octobre 1955
la détente internationale permit à la Finlande de devenir
membre ordinaire du Conseil nordique et les statuts
furent modifiés en conséquence. Les représentants de la
Finlande ont participé aux travaux du Conseil à partir
de sa 4® session en janvier 1956.

481. — Structure et compétence du Conseil. — Le


Conseil nordique a une structure qui, pour partie au
moins, est analogue à celle de l’Assemblée consultative
du Conseil de l’Europe. Mais, alors que le Conseil de l’Eu¬
rope comporte deux organes distincts, l’Assemblée, de
466 LE CONTINENT EUROPÉEN

caractère parlementaire et le Comité des ministres, de


caractère intergouvememental, le Conseil nordique ne
comporte qu’un seul organe où siègent à la fois des
représentants des Parlements et des représentants des
gouvernements. La structure est donc curieuse. On a
voulu éviter la séparation absolue qui existait, à l'origine
au moins, dans le Statut du Conseil de l’Europe et qu’a
tempérée quelque peu, par la suite, la création du Comité
mixte (V. supra, n° 457).
Mais la présence, au sein du Conseil des ministres,
des divers pays, en nombre d’ailleurs variable car le
statut ne fixe, à cet égard, aucune limitation, ne sufi&t
pas, par eUe-même, à transformer le Conseil nordique
en un organe intergouvememental. En effet, si les repré¬
sentants des gouvernements assistent aux délibérations
du Conseü, ils n’ont pas le droit de vote. Ainsi le Conseil
garde son caractère essentiel : celui d’une assemblée
de type parlementaire où siègent avec droit de vote des
délégués élus par les Parlements des pays participants.
Il est attribué un nombre égal de sièges au Danemark,
à la Finlande, à la Norvège et à la Suède, soit seize pour
chaque État et cinq sièges à l’Islande. Les délégués sont
élus par chaque Parlement et on a vu apparaître une
représentation des divers partis pohtiques. Les délégués
ne siègent pas par pays mais par ordre alphabétique, de
telle sorte que le Conseil apparaît bien comme une confé¬
rence interparlementaire.
Le statut accorde au Conseil une très large compé¬
tence. Il déhbère sur les questions d’intérêt commun
pour les pays membres ou certains d’entre eux et se
trouve compétent pour toute question relative à la coopé¬
ration des quatre pays.
Cette large compétence est compensée par l’absence
totale d’un pouvoir de décision. Le Conseü ne peut faire
plus qu’adresser des recommandations aux gouverne¬
ments sur des questions d’intérêt commun. Ces recom¬
mandations sont adressées aux divers gouvernements
qui possèdent évidemment à leur égard une complète
liberté d’action.
Un traité de coopération a été conclu le juiUet 1962
entre les cinq membres du Conseil. Il a conservé les prin¬
cipes fondamentaux sans apporter de changements à la
structure antérieure.
LES ENTENTES RÉGIONALES 467

§ 3. — Li'Entente balkanique.

Une entente régionale, dite Entente balkanique, avait


existé entre 1934 et 1940 (V. supra, n» 436) ; eUe groupait
la Roumanie, la Grèce, la Turquie et la Yougoslavie.
Ces trois derniers États ont créé à nouveau une entente
balkanique et institué entre eux une coopération qui
repose sur le traité d’Ankara du 28 février 1953 et le
traité de Bled du 9 août 1954. Le premier traité, dit
d’amitié et de coopération, a été renforcé par le second
qui l’élargit et le renforce pour en faire un traité d’al¬
liance, de coopération politique et d’assistance mutuelle.
Les événements de Chypre ont amené toutefois entre la
Grèce et la Turquie une tension politique peu favorable
au resserrement des liens entre ces deux pays.
L’Entente balkanique a ainsi peu à peu perdu toute
réalité politique.

482. — Le traité de Bled. — Les institutions de


l’Entente balkanique ont présenté un certain intérêt sur
le plan des structures.
En effet, le traité d’Ankara de 1953 s^omait à prévoir
pour assurer la collaboration des trois États des consul¬
tations intergouvemementales, en particulier une réunion
des ministres des Affaires étrangères.
Le traité de Bled en 1954 a transformé ces structures
en prévoyant à la place de cette réunion un Conseil
permanent composé des ministres des Affaires étrangères
et des autres membres des trois gouvernements dont la
présence s’avérerait nécessaire. La permanence institu¬
tionnelle était d'ailleurs assurée non pas par ce Conseil
qui, malgré son nom ne se réunissait qu’en cas de besoin,
sauf deux réunions annuelles obligatoires, mais par un
Secrétariat qui lui était véritablement permanent.
Mais en outre, un texte, distinct du traité lui-même,
était signé à Bled, un mémorandum concernant la créa¬
tion d'une Assemblée consultative composée d'un nombre
égal de délégués désignés en leur sein par les assemblées
nationales respectives. Cette formule était intéressante,
elle demeurait toutefois en deçà de la formule de l'As¬
semblée consultative du Conseil de l'Europe car les
suggestions et recommandations devaient etre^ adoptées
à la majorité des voix de chaque représentation natio¬
nale. Au vote par tête se substituait ainsi le vote par
468 LE CONTINENT EUROPÉEN

délégation, c’est seulement à l’intérieur de chaque délé¬


gation qu’existait le vote par tête intervenant d’ailleurs
en dehors de toute instruction gouvernementale.

BIBLIOGRAPHIE

Les ententes régionales.

Bénélux.
Gay (F.) et Wagret (P.), Le Bénélux, Collection « Que
sais-je? », Paris, i960; Situation et problème de l’éco¬
nomie du Bénélux, pubhcation de l’O. C. D. E., 1961;
Meade (J. F.), Case studies in european économie union :
the mechanics of intégration. Oxford University Press, 1962.

Conseil Nordique.
Wendt (F.), The nordic Council and coopération in Scan-
dinavia, Copenhague, 1959: Walden (L. J.), Nationa¬
lisme et coopération dans les pays nordiques, mémoire
Strasbourg, 1957; Petren (G.), Les résultats de dix ans
de coopération nordique. Annuaire européen, vol. XI,
p. 27-50.
n. - LES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Les organisations qui ont été étudiées ci-dessus sont


généralement qualifiées d’organisations internationales.
L’expression inter-étatiques les caractéi^erait mieux, car
ces organisations laissent subsister les États qui en sont
membres et font jouer à ceux-ci un rôle important dans
le fonctionnement même des organes communs. Lorsque
l’organe commun n’a qu’un rôle consultatif et que la
décision appartient à chaque gouvernement étatique, ou
lorsque les délibérations de l’organe commun meme à
portée exécutoire sont prises selon la règle de l’unaniimté,
on s’aperçoit que c’est finalement la collectivité étatique
et elle seule qui demeure investie du pouvoir véritable
de décision.
Mais si l’organe commun est doté d’un pouvoir de
décision propre qui aboutit à supprimer l’intervention
des gouvernements membres ou plus encore si l’organe
commun échappe, une fois créé, à 1 intervention des
gouvernements, on se trouve alors en présence non plus
d’une organisation internationale, c’est-à-dire interéta¬
tique, mais d’une organisation dite supranationale ou
encore superétatique. Ces formules sont inutilement
comphquées. Les organisations dites supranationales sont
en réahté bien connues et depuis longtemps, ce sont les
institutions fédérales. L’organe ou les organes conununs
sont des organes de superposition obéissant à la loi de
superposition telle qu’elle existe dans le fédérahsme.
Le continent européen, qui a manifesté pendant si
longtemps une grande opposition aux formules fédérales,
au moins à une certaine échelle géographique, fournit
aujourd’hui l’exemple de tentatives fédérales dont l’une
470 les communautés européennes

a abouti actuellement à la réalisation d’une construction


fédérale sur un plan particulier. Comme ces institutions
fédérales sont actuellement encore très limitées, non
seulement dans l'espace, car elles ne concernent qu’une
partie de l’Europe occidentale, celle qui comprend les
territoires des trois pays du Bénélux, de l’AUemagne
occidentale, de la France et de l’Italie, mais encore dans
le cadre de la compétence, on les a parfois désignées sous
le nom de solutions d’intégration. Cette expression signifie
précisément que les parties composantes perdent ici leur
individualité propre pour se fondre dans l’ensemble.
Ces tentatives d’organisations fédérales ont résulté des
circonstances et il ne convient pas de les systématiser
d’une manière trop rigoureuse. Il semble préférable de
les exposer dans les domaines différents où elles ont été
réalisées ou tentées. On distinguera les communautés exis¬
tantes et les projets d’union politique.
CHAPITRE PREMIER

LES COMMUNAUTÉS

Les Communautés seront étudiées à trois points de


vue ; ceux de leur développement historique, de leur aspect
institutionnel, de leurs mécanismes d’extension.

Section I. — Histoire des Communautés.

Les Communautés européennes existant actuellement


ont été créées en deux phases séparées par un intervalle
de six ans, en 1951 et 1957, elles sont entrées en vigueur
respectivement en 1953 et 1958. Dans cet intervalle, un
projet de Communauté de caractère mihtaire a été établi
mais le traité qui a été signé en 1952 n’est pas entré en
vigueur, n’ayant pas été ratifié par tous les États.

§ jer. — La Communauté européenne


du Charbon et de l’Acier.

483. — Les circonstances. — L’organisation fédérale


désignée sous le nom de Communauté européenne du
Charbon et de l’Acier, parfois par l’expression peu heu¬
reuse de « pool charbon-acier », est qualifiée aussi de
« plan Schuman » et cette dernière expression rend compte
de la réalité historique. L’origine de cette institution doit
en effet être trouvée dans une déclaration faite à Paris,
le 9 mai 1950, par M. Robert Schuman, alors ministre des
Affaires étrangères de France. Cette longue déclaration
472 LES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

affirmait : « L’Europe ne se fera pas d’un seul coup ni


dans une construction d’ensemble : elle se fera par des réali¬
sations concrètes créant d’abord une solidarité de fait »...
Le Gouvernement français propose de porter immé¬
diatement l’action sur un point limité mais décisif :
placer l’ensemble de la production franco-allemande de
charbon et d’acier, sous une Haute Autorité commune,
dans une organisation ouverte à la participation des
autres pays d’Europe.
La proposition Schuman, formulée le 9 mai 1950,
montrait la participation que la France entendait appor¬
ter à la réconcihation franco-allemande et à la construc¬
tion de l’Europe.
Il apparut tout de suite à divers gouvernements euro¬
péens que la proposition méritait d’être étudiée, et ime
conférence internationale s’ouvrit à Paris le 20 juin à
cet effet. Elle réunissait six États, les trois États du
Bénélux, l’Allemagne occidentale, la France, l’Italie. Le
Royaume-Uni envisageait le projet avec sympathie mais
entendait, dès le début, ne point participer à la construc¬
tion projetée.
Présidée par M. Jean Monnet, Commissaire général
au plan, la conférence prolongea ses travaux pendant
dix mois. Le projet de traité constituant l’organisation
fédérale fut paraphé le 19 mars. Le traité fut signé le
18 avril 1951, par le jeu des ratifications successives il
entra en vigueur le 25 juillet 1952.

484. — Le Marché commun. — La Communauté euro¬


péenne du Charbon et de l’Acier a pour objet, sur le
plan économique, la création d’un marché commun
groupant les consommateurs de l’ensemble des pays
membres et de réaliser ainsi l’expansion économique,
le développement de l’emploi, le relèvement du niveau
de vie.
L’étabhssement du marché commun doit se faire en
évitant de provoquer des troubles dans les économies
des États membres, et c’est à cet effet que la réahsation
du marché s’est faite d’une manière progressive. Le
marché commun a commencé à exister après une période
préparatoire au cours de laquelle les institutions ont
été mises en place, il a été ouvert le 10 février 1953 pour
le charbon, le minerai de fer et la ferraille, le i®' mai
pour l’acier.
A partir de ces dates a pris fin la période préparatoire
LES COMMUNAUTÉS 473

et s’est ouverte la période de transition qui devait durer


cinq ans et permettre l’adaptation progressive des
industries nationales aux conditions nouvelles du marché
unique.
Le marché commun repose sur divers principes éco¬
nomiques, la suppression des droits de douane, des res¬
trictions quantitatives à la hbre circulation des produits,
l’interdiction des mesures discriminatoires, et des subven¬
tions ou aides accordées par les États. Si est ainsi instauré
sur le marché commun, défini territorialement d’ailleurs
comme hmité aux territoires européens des États membres
à l’exclusion des territoires d’outre-mer, un principe de
hbre concurrence, la Communauté connaît aussi un prin¬
cipe d’autorité économique et contrôle à cet égard l’ap¬
provisionnement réguher du marché et la fixation des
prix au plus bas niveau.

485. — L’exemple de la C.E.C. A. — La Communauté


est im ensemble institutionnel dont on s’est plu à marquer
le caractère révolutionnaire. Elle est caractérisée par
l’emploi de la technique du fédérahsme combinée avec la
technique du régime parlementaire. L’organe principal
de la C. E. C. A., la Haute Autorité, dispose de compétences
qui lui ont été attribuées par le Traité et qui diminuent
évidemment les compétences étatiques. On se trouve en
présence d’un phénomène de transfert en lequel certains
veulent voir déjà un processus de démantèlement des
États.
On peut en effet penser que des transferts successifs
de compétence étatique à des organes dits supranatio¬
naux aboutiront à la construction par pièces détachées
d’un ensemble fédéral européen.
La C. E. C. A. a ainsi valeur d’exemple et apparaît
comme le premier chaînon d’un ensemble fédéral. Divers
projets ont été envisagés concernant une Communauté
européenne de l’agriculture, une Autorité européenne des
transports, une Communauté européenne de la santé.
Mais la tentative la plus audacieuse concerne la créa¬
tion d’une Communauté de défense et celle d’une Com¬
munauté pohtique (voir infra, n°® 509 et s.).

§ 2. — La communauté européenne de défense.

486. — Le problème du réarmement allemand. —


Le réarmement de l’Allemagne occidentale, envisagé dès
474 les communautés européennes

mai 1950 par le général Clay dans son discours de New


York, est apparu comme une impérieuse nécessité au
Gouvernement des États-Unis après le déclenchement de
la guerre de Corée en juin. Le 26 septembre le Conseil
atlantique adoptait le principe de ce réarmement dont les
modalités restaient à préciser.
Le Gouvernement français imagina alors de proposer
que ce réannement se réalise, non pas sous la forme d’une
îmnée nationale allemande qui prendrait place dans l’al¬
liance du Pacte atlantique, mais dans le cadre d’une
armée européenne composée de petites unités nationales
amalgamées les unes avec les autres. Un projet qui
s’inspirait de la formule de la Communauté européenne
du Charbon et de l’Acier. Cette armée européenne devait
être placée sous la direction d’un ministère européen de
la Défense, responsable devant une assemblée européenne,
sous le contrôle d’un Conseil des ministres des États
membres. La formule n’était point fort originale, elle
s’inspirait des solutions envisagées pour la réalisation
du plan Schuman, alors en discussion, et d’une suggestion
faite le II août 1950 à l’Assemblée consultative du ConseU
de l’Europe par M. Winston Churchill et qui avait été
adoptée.
Approuvée par l’Assemblée nationale française dans
la mesure où les contingents nationaux étaient à l’échelon
du bataillon, puis par l’Assemblée consultative de Stras¬
bourg, la proposition du Gouvernement français ne fut
point repoussée par le Conseil atlantique lors de sa réu¬
nion de Bruxelles en décembre 1950.
Une conférence sur l’armée européenne s’ouvrit à
Paris le 15 février 1951. Elle ne groupa finalement que
les six États déjà en pourparlers pour la création de la
Communauté charbon-acier. Après de longues négocia¬
tions, le trpté fut paraphé le 9 mai 1952 et signé le 27 mai.
Il fut ratifié successivement par les signataires autres
que la France et l’Italie. L’Assemblée nationale française
a refusé d’étudier ce traité le 30 août 1954 et ce vote a
signifié le refus de ratification.
Le traité n’est donc pas entré en vigueur et ne présente
qu’un intérêt rétrospectif sur le plan de la technique juri¬
dique. Le problème qu’il se proposait de résoudre a fait
l’objet d’une autre solution avec les accords de Paris
d’octobre 1954, créant l’Union européenne occidentale
(V. supra, n°s 472 et s.).
LES COMMUNAUTÉS 475

§ 3. — Les traités de Rome (1957).

Les traités de Rome ont organisé deux communautés


distinctes, l’une économique, l’autre concernant l’énergie
atomique.

A. — La Communauté économique européenne

487. — La « relance européenne ». — Les tentatives


d’une organisation fédérale de l’Europe des six Pays de
la Communauté européenne du Charbon et de l’Acier
avaient été interrompues pendant quelque temps après
l’échec de la conférence de Bruxelles du mois d’août
1954, au cours de laquelle avait été discutée la question
de modifications à apporter, sur la proposition du Gou¬
vernement français, au traité constitutif de la C.E.D. et le
rejet de celui-ci par l’Assemblée nationale française. Une
« relance européenne » est apparue à la Conférence de
Messine (i®^-3 juin 1955), consacrée à l’examen d’un
mémorandum commun des pays du Bénélux relatif à
l’intégration européenne. Une résolution, dite de Messine,
marque le renouveau des tentatives antérieures. EUe
affirme « qu’il faut poursuivre l’étabhssement d’une
Europe unie, par le développement d’institutions com¬
munes, la fusion progressive des économies nationales,
la création d’un marché commun et l’harmonisation
progressive des pohtiques sociales ». Il est décidé de
poursuivre d’une manière progressive et méthodique
l’étude de l’intégration par la réunion d’une ou plusieurs
conférences appelées à élaborer les traités et arrange¬
ments nécessaires, un comité d’experts devant être chargé
de les préparer.
Réuni à Bruxelles en juillet 1956 et placé sous l’active
présidence de M. Spaak, le Comité intergouvememental
se subdivise en quatre commissions chargées plus spécia¬
lement d’étudier les problèmes de l’énergie traditionnelle,
de l’énergie nucléaire, des transports et travaux pubhcs,
enfin du marché commun. Le rapport de M. Spaak est
présenté à la conférence de Noordwyk le 6 septembre
aux six ministres des affaires étrangères, qui affirment
à nouveau leur foi dans la relance européenne et décident
la poursuite des travaux, La mise au point des divers
476 LES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

traités, conventions et protocoles se poursuit lentement


au cours de sept conférences internationales tenues suc¬
cessivement à Bruxelles (11-12 février 1956), à Venise
(29-30 mai 1956), à Bruxelles de nouveau (26 juin), à
la Celle-Saint-Cloud en octobre, à Bruxelles encore le
26 janvier 1957, à Paris le 19 février où un accord est
enfin obtenu le 21. Après une ultime rencontre à Bruxelles
le 10 mars, les deux traités principaux et les textes qui
les accompagnent sont signés à Rome le 25, mars. Ils
sont ensuite soumis à la ratification des États inté¬
ressés.

Le Marché Commun.

488. — L’Union douanière. — Le traité instituant


la Conununauté économique européenne se propose d’éta¬
blir un marché commun entre les six pays de l’Europe
occidentale, afin de mieux assurer la réalisation d’un
Welfare state, de promouvoir le développement écono¬
mique, d’assurer l’expansion et le relèvement des niveaux
de vie.
Le marché commun signifie l’existence entre les États
membres d’une Union douanière comportant, d’une part
l’éhmination des droits de douane entre les États membres
et des restrictions quantitatives à l’importation dans leurs
rapports commerciaux, d’autre part l’instauration d’un
tarif douanier commun. Sous une forme plus imagée, on
peut dire que dans le marché commun le cordon douanier
est reporté aux frontières qui délimitent, vis-à-vis des
États extérieurs à la Communauté, les territoires des
États membres de ceUe-ci. Le marché commun est établi
progressivement au cours d’une période de transition de
douze années divisée elle-même en trois étapes dont la
durée est en principe de quatre ans chacune mais peut
être modifiée selon certaines procédures.
On peut constater que l’éhmination des droits de
douane s'est réahsé selon un rythme plus rapide que celui
prévu par le Traité. A la suite de deux décisions du
Conseil (12 mai 1960-15 mai 1962) la réduction des droits
de douane a atteint 50 % le janvier 1963 au heu du
I®*’ janvier 1965. La Commission a proposé, dans le cadre
d’un Programme d’action pour la deuxième étape, l’éhmi-
nation complète des droits de douane pour le jan¬
vier 1967, ce qui aurait signifié trois ans d’avance sur le
rythme prévu par le Traité.
LES COMMUNAUTÉS 477

Par la décision qu’il a adoptée le ii mai 1966 le Conseü


a fixé au juillet 1967 la date à laquelle seront suppri¬
més les droits de douane entre les Etats membres, soit
une avance de 18 mois sur le calendrier normal initiale¬
ment prévu.
La suppression des restrictions quantitatives s’opère
également selon le même principe d’un rythme et d’un
échelonnement (art. 33).
L’étabhssement du tarif extérieur commun obéit aux
mêmes principes, il a été accéléré exactement comme dans
le domaine de Téfimination des droits intra-communau-
taires. Le Marché Commun signifie égalernent l’abolition
entre les États membres des obstacles à la libre circulation
des personnes, des services, des capitaux.
Le marché étant fondé sur le principe de la fibre concur¬
rence, des dispositions prévoient la lutte contre certaines
ententes d’entreprises (art. 85 et 86) ou réglementent
d’une manière particulière les entreprises publiques et les
monopoles (art. 37 et art. 90).

Les politiques communes.

489. —” La politique agricole. — Le Marché Com¬


mun s’étend, selon certaines modalités, à l’agriculture et
au commerce des produits agricoles (art. 38). Le fonc¬
tionnement du Marché Commun agricole doit s’accom¬
pagner de l’établissement d’ime politique agricole com¬
mune des États membres dont le Traité se borne à poser
les principes (notamment art. 39).
La mise en œuvre du Marché Commun agricole et 1 éta¬
blissement de la politique commune a été l’œuvre des
organes communautaires.
Les principes directeurs ont été élaborés par la Commis¬
sion, sous l’impulsion de M. Mansholt, après la tenue
d’une conférence agricole à Stresa (3-12 juillet 1958) et
ont fait l’objet, après diverses discussions au sein du
Conseil des Ministres, de plusieurs règlements et décisions
adoptés par le Conseil. _ _
Trois réunions du Conseil où siégeaient les 6 ministres
de l’agriculture ont, après d’âpres discussions qualifiées
dans le langage courant de marathons agricoles, adopté et
défini, à partir de projets élaborés par la Commission, les
grandes lignes de la politique agricole commune.
Sur la base de ces accords intervenus entre les gouver-
478 les communautés européennes

nements ont été mis au point ultérieurement des règle¬


ments et décisions.
Le premier accord, en date du 14 janvier 1962, est à
l’origine des règlements portant sur les céréales, la viande
de porc, les œufs, les fruits et légumes, le marché vino-
viticole, le financement de la politique agricole commune.
Le second, en date du 23 décembre 1963, a fixé les prin¬
cipes des règlements concernant les produits laitiers, la
viande de bœuf et de nouveau le financement de la poli¬
tique agricole commune. Le troisième accord du 15 dé¬
cembre 1964 a décidé l’unification du prix des céréales
et a avancé celle-ci au juillet 1967.
La crise du 30 juin 1965 résultant de l’attitude du
gouvernement français à l’égard des propositions de la
Commission relatives au financement définitif de la poli¬
tique^ agricole commune paralysa pour quelques mois
l’achèvement de la réglementation. Les obstacles furent
levés le ii mai 1966, le Conseil adoptant un nouveau sys¬
tème de financement et décidant l’abandon des droits de
douane à partir du i®!" juillet 1967.
Un dernier accord devait être obtenu en matière agri¬
cole le 24 juillet 1966. Il a prévu trois organisations de
marchés (lait, sucre, matières grasses) et étabH six prix
communs (lait, sucre, riz, viande bovine, graines oléa¬
gineuses et huile d’ohve). Ainsi 90 % de la production
agricole des Six sont réglementés. Certains secteurs toute¬
fois demeurent à organiser : tabac, pommes de terre,
fleurs et plantes vertes, houblon, plantes textiles, vin de
qualité courante, viande de mouton, produits de la pêche.
Les diverses réglementations des marchés agricoles cons¬
tituent des apphcations de principes de dirigisme agri¬
cole. Les marchés organisés comportent des mécanismes
complexes tendant à la fixation de prix, parfois de prix
garantis, parfois de « fourchettes » de prix et prévoyant les
modalités de protection des agriculteurs européens contre
la concurrence extérieure favorisée par des cours mondiaux
inférieurs (notion de prix de seuil ou notion de prix
d’écluse). Le système dit des prélèvements assure la préfé¬
rence communautaire en ramenant les prix des produits
agricoles importés au niveau des prix européens plus élevés
et en assurant aux agriculteurs européens qui exportent
de véritables subventions (technique du Fonds européen
d’orientation et de garantie agricole, voir infra, n® 503).
LES COMMUNAUTÉS 479

490. — Les autres politiques communes. — Le


Traité a prévu d’autres politiques communes que la poli¬
tique agricole. Ainsi en va-t-il en matière de transports.
Les dispositions du Traité (art. 74-84) dégagent quelques
principes, des propositions de la Commission (21 mai 1963)
ont prévu diverses modalités de réglementation dont une
partie a été adoptée par le Conseil en mars 1965 qui a
décidé une mise en œuvre processive.
En matière d’énergie, la politique commune n’est pas
encore parvenue à la phase de l’élaboration. Un protocole
d’accord du 21 avril 1964 a posé le principe d’une harmo¬
nisation des politiques nationales.
Sur le plan fiscal, l’unification progressive des systèmes
de taxation indirecte a été proposée par la Commission
comportant le remplacement par une taxe unique du type
de la T. V. A. française des taxes sur le chiffre d’affaires
perçues « en cascade » par divers États (propositions de
directives du ii avril 1967).
Divers éléments d’une politique économique européenne
ont été adoptés en 1964.
La réalisation d’une union monétaire conduisant à la
création d’une monnaire de réserve commune apparaît
comme un objectif relativement lointain, mais des déci¬
sions du Conseil du 8 mai 1964 ont posé quelques prin¬
cipes de coopération monétaire et créé un Comité des
gouverneurs des banques centrales de la C. E. E. composé
des gouverneurs des Instituts d’émission nationaux.
L’article 103 du Traité prévoit que les États membres
considèrent leur pohtique de conjoncture comme une ques¬
tion d’intérêt commun et qu’ils se consultent mutuelle¬
ment et avec la Commission sur les mesures à prendre.
Le principe d’vme « programmation européenne » de
type indicatif portant sur plusieurs années a été adopté en
1964 et une décision du 15 avril 1964 a institué un orga¬
nisme consultatif, le Comité de pohtique économique à
moyen terme, chargé d’établir un avant projet de pro¬
gramme pour rme période d’environ cinq années.

B. — La Communauté européenne atomique

491. — L’Euratom. — La résolution de la conférence


de Messine du 3 juin 1955 sur la « relance européenne »
avait prévu l’étude de la création d’une organisation
commune à laquelle devait être attribuée la responsa-
biüté d’assurer le développement pacifique de l'énergie
480 LES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

atomique. Le projet d’une Commimauté européenne ato¬


mique, élaboré par la Commission « énergie atomique »
du Comité intergouvememental chargé de mettre en
œuvre le plan européen de Messine, a pris corps sous le
nom de Communauté européenne de l’énergie atomique,
plus familièrement appelée Euratom, et a fait l’objet d’un
traité signé à Rome le 25 mars 1957 en même temps
que le traité constitutif de la Communauté économique
européenne ou Marché commun.
L’Euratom a pour but de contribuer à la formation
et à la croissance rapide des industries nucléaires en
Europe et d’aider ainsi à l’élévation du niveau de vie
dans les États membres.
Les tâches ainsi confiées à la Communauté sont mul¬
tiples. Il s’agit tout à la fois d’une mission de dévelop¬
pement des recherches et d’une diffusion des connais¬
sances techniques, d’un rôle régulateur dans l’approvi¬
sionnement des membres de la Communauté en minerais
et combustibles nucléaires, d’une excitation des investis¬
sements et d’un encouragement à la réahsation des ins¬
tallations nucléaires nécessaires au développement des
industries nucléaires, de l’exercice d’un droit de propriété
dans le domaine des matières fissiles. Parmi d’autres fins
de la Communauté on doit noter l’instauration de méca¬
nismes de contrôle destinés à garantir que les matières
nucléaires ne sont pas détournées à des fins autres que
pacifiques, la création d’un marché commun des matériels
et des personnels spéciahsés à l’intérieur de la Commu¬
nauté ainsi que l’étabhssement, dans le domcdne de l’uti¬
lisation pacifique de l’énergie atomique, de haisons avec
d’autres pays ou d’autres organisations internationales
(voir infra, 2® sous-partie).

Section II. — Les structures institutîonneUes.

Les structures institutionnelles sont complexes, cette


complexité dérive d’une part des circonstances historiques
et de la création des communautés en deux temps,
d’autre part du caractère nouveau de certains organes,
enfin de ce qu’on se trouve dans un domaine écono¬
mique et même technico-scientifique. Les communautés
demeurent distinctes mais certains organes sont communs.
On est ainsi amené pour plus de clarté à distinguer des
organes d’action, des organes de contrôle, enfin des orga¬
nismes de gestion particuliers.
LES COMMUNAUTÉS 481

§ i®”". — Les organes d’action.

La structure et le fonctionnement des organes d’action


ont fait l’objet de deux régimes différents qui se sont suc¬
cédés dans le temps.
Dans le régime primitif qui est celui de chacun des
trois traités les organes d’action étaient particuliers à
chaque Commimauté.
Un accord signé le 8 avril 1965 entre les Six et qui doit
entrer en vigueur en 1967 réahse, au contraire, ime fusion.
Les deux régimes seront successivement présentés.

• Le régime primitif des traités.

Dans chacime des communautés il existe deux organes


moteurs, on les dénomme généralement organes exécutifs
mais ils n’exercent pas simplement une fonction exécutive
et ont aussi un rôle législatif.
Le partage des compétences entre chacun des deux
organes moteurs ne se fait pas de la même manière dans
les trois communautés, il existe deux types de solution,
la solution C.E.C.A., la solution traités de Rome.
L’un des organes présente la particularité d’être, une
fois institué par les États, totalement indépendant en
principe de ceux-ci, il constitue une construction originale
de type fédéral; l’autre organe est de caractère inter¬
gouvememental, il est constitué par une réunion de
ministres compétents des États membres et apparaît
donc comme de type plus classique. Dans la C.Ê.C.A.
l’organisme nouveau joue le rôle principal, dans les deux
autres Communautés le rôle de l’organisme classique est
beaucoup plus important.

A. — Les organes « nouveaux »

492. — La Haute Autorité. — Principal organe de la


C.E.C.A., la Haute Autorité est composée de neuf membres
dont huit sont nommés par les gouvernements d’un
commun accord et le neuvième est coopté par les huit
premiers. Si les gouvernements participent ainsi à la
désignation de huit membres de la Haute Autorité, du
moins leur intervention est-elle hmitée par plusieurs
dispositions et les membres, une fois désignés, demeurent
16. — INSTITUTIONS INTERNATIONALES.
482 LES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

pour une période de six ans hors de toute atteinte de


l’intervention étatique. Ils ne sont pas les représentants
des gouvernements et ils ne sont pas révocables à aucun
degré par les gouvernements. Une fois passée la phase
de désignation d’un commun accord, l’exécutif coUégial
se trouve en place et se substitue dans le domaine de sa
compétence aux gouvernements étatiques.
Le président et le vice-président sont désignés égale¬
ment d’un commun accord par les gouvernements, pour
une période de six ans.
La Haute Autorité déhbère à la majorité des membres,
le quorum étant de cinq. Les déhbérations de la Haute
Autorité peuvent concerner directement les personnes
ou entreprises, il y a donc compétence directe sans
intermédiaire gouvernemental.
Assistée d’un secrétariat, la Haute Autorité a constitué
une série de commissions de travail et a institué diverses
divisions analogues à des directions de ministères.
Auprès d’elle existe en outre un Comité consultatif
qui peut apparaître comme une sorte de conseil écono¬
mique et qui comprend des représentants des producteurs,
des travaüleurs et utihsateurs et des négociants, choisis
par le Comité des ministres sur des hstes étabhes par les
organisations représentatives de ces diverses catégories.

493. — Les Commissions. — Dans la C.E.E. la Com¬


mission est composée de neuf membres nommés pour
quatre ans par les gouvernements, d’un commun accord
et choisis en raison de leur compétence générale. La
Commission ne peut comprendre plus de deux membres
ayant la nationahté d’un même État. Le président et
le vice-président sont nommés d’un commun accord par
les États membres pour une durée de deux ans. Ils
peuvent être renouvelés. La Commission déhbère à la
majorité des voix.
Les mêmes règles valent pour la Commission de la
C.E.E.A. qui ne comprend que cinq membres. EUe est
assistée d’un Comité scientifique et technique de caractère
consultatif.

B. — Les organes « classiques »

494. — Le Conseil spécial des ministres. — C’est, à la


différence de la Haute Autorité, un organe de type classique
LES COMMUNAUTÉS 483

car il a le caractère diplomatique et intergouvememental.


Il est fonné des représentants des États membres, à l’éche¬
lon ministériel, et la présidence est exercée par roiilement
par chaque ministre. Le Conseil a pour rôle essentiel
« d’harmoniser l’action de la Haute Autorité et celle des
gouvernements responsables de la pohtique économique
générale de leur pays ». Le Conseil participe dans certains
cas à la fonction législative exercée par la Haute Autorité,
par exemple dans les cas où le traité requiert de sa part
un avis conforme. D’une manière générale, il existe entre
le Conseil et la Haute Autorité un régime d’informations
et de consultations réciproques. Le Conseil enfin fixe les
traitements des membres de la Haute Autorité et de la
Cour de justice.
Bien que le Conseil soit un organisme intergouveme¬
mental, la règle de l’unanimité ne domine pas nécessai¬
rement ses délibérations. Il n’en va ainsi que si le traité le
prévoit formellement. Lorsque l'unanimité n’est point
requise, les décisions peuvent être prises à la majorité.
L’article 28 .distingue les cas où la majorité requise est
une majorité qualifiée et ceux où il s’agit d’une majorité
simple, mais, même dans ce dernier^ cas, la majorité
exigée est la majorité absolue des États membres y
compris la voix du représentant d’un des États qui
assurent au moins 20 % de la valeur totale des produc¬
tions de charbon et d’acier de la Communauté.

495. — Le Conseil de la C.E.E. — C’est l’homologue


du Conseil spécial de Ministres de la C.E.C.A. mais il
possède plus de pouvoirs. Il est formé par les représen¬
tants des États membres et chaque gouvernement y
délègue un de ses membres. Il établit le projet de budget
et l’arrête définitivement après que l’Assemblée ait
donné son avis et formulé, le cas échéant, des propositions
des modifications.
Les délibérations du Conseil sont régies par des disposi¬
tions du traité (art. 148, 14g, 150) mais quelques dispo¬
sitions particulières ont été introduites par les Accords de
Luxembourg de janvier 1966.
1° Le système du traité. — Selon le traité le Conseil déhbère
normalement à la majorité, il peut exceptionnellement
déhbérer à l’unanimité, enfin certaines délibérations
requièrent une majorité qualifiée. Dans ce cas une pondé¬
ration des voix est prévue, les voix des trois plus grands
États sont affectées du coefficient 4, celles de la Belgique et
484 LES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

des Pays-Bas du coefficient 2, celle du Luxembourg du


coefficient i. Les délibérations sont alors acquises si elles
ont recueilli au moins 12 voix lorsqu’elles ont été prises
sur proposition de la Commission, ou au moins 12 voix
représentant 4 États dans le cas contraire. Par ailleurs
lorsque selon les dispositions formelles du traité uii acte
du Conseil est pris sur proposition de la Commission le
Conseil ne peut amender la proposition qu’en statuant à
l’unanimité.
2° Les Accords de Luxembourg. — Le gouvernement
français, au lendemain de la crise ouverte le 30 juin 1965,
a tenté d’obtenir une transformation des règles de déli¬
bération et de faire établir la formule de l’unanimité,
craignant en particulier que certaines solutions concernant
la politique agricole, arrêtées à l’unanimité au cours des
deux premières étapes de la période transitoire, ne soient
remises en question çu modifiées ensuite par le jeu de la
règle majoritaire. Évidemment l’établissement de la
règle de l’unanimité signifiait un retour à des procédures
anciennes dans les organisations internationales et ü
nécessitait une modification du traité à laquelle s’oppo¬
saient les cinq autres gouvernements. Les règles du traité
furent donc maintenues.
Toutefois lors de la conférence tenue à Luxembourg, à
la fin de janvier 1966 entre les six ministres des affaires
étrangères, on se borna à apporter quelques précisions
concernant la procédure de vote au sein du Conseil.
Il fut convenu entre les Six : « lorsque dans le cas de déci¬
sions susceptibles d’être prises à la majorité, sur proposi¬
tion de la Commission, des intérêts très importants d’un ou
plusieurs partenaires sont en jeu, les membres du Conseil
s’efforceront dans un délai raisonnable d’arriver à des
solutions qui pourront être adoptées par tous les membres
du Conseil dans le respect de leurs intérêts mutuels et de
ceux de la Communauté ».
Le gouvernement français avait demandé que la dis¬
cussion se poursuive jusqu’à ce qu’on soit parvenu à
un accord unanime, mais les autres gouvernements n’ont
pas accepté cette formule à titre général.
Il fut convenu toutefois que les membres du Conseil
adopteraient d’un commun accord quelques règlements
agricoles (complément sur l’organisation du marché des
fruits et légumes, marché du sucre, marché des rnatières
grasses) le règlement financier agricole, la fixation des
LES COMMUNAUTÉS 485

prix communs (lait, viande bovine, riz, sucre, huile


d’olive et graines oléagineuses).

C. — L’élaboration des règles de droit

496. — Les diverses règles. — Dans le traité de la


C.E.C.A. l’élaboration des règles de droit est essentiel¬
lement confiée à la Haute Autorité. L’article 14 établit
des distinctions entre les décisions, les recommandations,
les avis. Les décisions sont obligatoires en tous leurs
éléments, les recommandations comportent obligation
quant au but assigné mais laissent libre le choix des
moyens, les avis ne lient pas.
Dans le traité Euratom (art. 161-164) et le traité
C.E.E. (art. 189-192) les règles de droit sont classées
d’une manière différente car on en distingue (quatre
types. Le règlement a xme portée générale, obligatoire en
tous ses éléments, il est directement apphcable dans tout
État membre. La directive lie tout État membre desti¬
nataire quant au résultat mais laisse aux instances natio-
i nales la compétence quant aux formes et aux moyens,
t La décision est obhgatoire en tous ses éléments mais seu-
; lement pour les destinataires qu’elle désigne. Les recom-
I mandations et les avis ne fient pas. On doit noter que dans
1 le cadre des traités de Rome le Conseil et la Commission
i ont compétence pour élaborer les règles de droit précitées,
il y a donc un partage de compétence ou une collabora¬
tion des deux organes.

497. — La coUaboiration. — L’expérience des traités


de Rome montre qu’une étroite collaboration s’est ins¬
tituée entre les deux organes d’action. Le Conseil n’est pas
un organe permanent, les Ministres ayant essentiellement
des fonctions nationales, mais dans le cadre des disposi¬
tions de l’article 151 § 2 du traité C. E. E., jl a été consti¬
tué un Comité formé des représentants des États membres
(C. O. P. E. R. E. R.) qui groupe les ambassadeurs des
Six à Bruxelles. Il existe, sous l’autorité de ces représen¬
tants des délégations permanentes composées de hauts
fonctionnaires nationaux. Les représentants permanents se
réunissent régulièrement entre eux, généralement assistés
de leurs fonctionnaires. Les membres des délégations tra¬
vaillent souvent entre eux et sont sans cesse en rapport
avec les fonctionnaires de la Commission. Les projets qui
sont soumis au Conseil ont été ainsi étudiés et préparés en
486 LES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

commun par les fonctionnaires de la Commission et les


personnels des délégations permanentes. C'est une formule
de collaboration.
La collaboration se trouve renforcée par l’existence d’un
Secrétariat des Conseils commun aux conseils des diverses
Communautés et qui assure une liaison avec la Haute
Autorité et les Commissions.
En réalité la formule de la négociation diplomatique
souple n’est pas abandonnée et il serait inexact de consi¬
dérer le Conseil et la Commission comme deux organes
totalement séparés, dressés l’un en face de l’autre et de
caractère antagoniste.
Cette collaboration s’affirme encore sur le plan spécial
des comités de gestion institués dans le domaine de l’agri¬
culture qui comprennent des représentants des six États
déUbérant sous la présidence d’un représentant de la
Commission qui dirige les débats et les oriente mais n’a
pas droit de vote.

Le traité du 8 avril 1965.

498. — La fusion. — Les ministres des Affaires étran¬


gères des Six ont signé le 8 avril 1965 un « Traité instituant
un Conseil unique et ime Commission unique des Commu¬
nautés européennes » accompagné d’un « Protocole sur les
privilèges et les immunités des Communautés euro¬
péennes » qui reprend d’ailleurs le texte des protocoles
concernant la C. E. E. et l’Euratom signés à Rome
en 1957.
Ce traité est considéré, dans le langage courant, comme
réalisant la fusion des exécutifs. Mais, comme il a déjà
été indiqué les organes devenus commtms ne sont pas
exactement des exécutifs puisqu’ils détiennent le pouvoir
législatif.
Avec la mise en vigueur du Traité qui, après ratifica¬
tion par les États membres, doit entrer en vigueur le
janvier 1966, il y aura un Conseil des Ministres et
ime Commission pour l’ensemble des trois Communautés
qui demeurent, elles, encore distinctes, tant que ne sera
pas réalisée la fusion des Communautés elles-mêmes.
En ce qui concerne le Conseil, le principe de l’unité n’a
qu’une portée fort relative car selon les questions, le
Conseil des Ministres sera composé de ministres différents,
tantôt ceux des Affaires étrangères, tantôt ceux chargés
de l’Industrie ou de l’Agriculture, etc.
LES COMMUNAUTÉS 487

En ce qui concerne la Commission, au contraire, la


fusion sigmfie qu'à la place de la Haute Autorité de la
C. E. C. A. et des deux Commissions de la C. E. E. et de
la C. E. E. A. il n’existera plus qu’une seule Commission.
Le nombre des Commissaires a fait l’objet de diverses
discussions. Un compromis a été adopté selon lequel il sera
de quatorze jusqu’à ce que la fusion des Communautés
ait été réalisée et pour une période d’au plus trois ans
après que cette fusion soit devenue effective. Il sera alors
ramené à neuf.
Les règles de fonctionnement des nouveaux organismes
sont celles en vigueur dans le Marché Commun. Ainsi le
Comité des représentants permanents de la C. E. E. est
maintenu et sa compétence étendue à toutes les Commu¬
nautés.
La fusion prévue par le Traité de 1965 doit entraîner
la mise en place d’une administration unique et une réor¬
ganisation des services.
La procédure budgétaire eUe-même doit être modifiée
dans le sens de l’unification pour le budget de fonction¬
nement. Les budgets fonctionnels de la C. E. C. A. et de
l’Euratom subsistent et le mode particulier de finance¬
ment de la C. E. C. A., avec le prélèvement sur la pro¬
duction de charbon et d’acier est maintenu, le budget des
Communautés étant doté forfaitairement de 18 mil¬
lions d’unités de compte provenant de ce prélèvement.
La réorganisation administrative découlant de la fusion
organique aboutit à la disparition de la Haute Autorité
et le regroupement géographique des fonctionnaires prive
le Luxembourg de divers avantages tant moraux que
matériels. Une formule de compromis a été imaginée.
Le Conseil des Ministres doit siéger trois mois par an à
Luxembourg où demeure le Secrétariat du Parlement
européen et où s’installeront la Banque européenne d’in¬
vestissement et les organismes à créer sur la base de
l’article 130 du traité C. E. E.
La fusion n’a pas abouti à résoudre le déhcat problème
du siège définitif des institutions européennes et selon
l’article i®*" du Traité de 1965 « les heux de travail pro¬
visoires des institutions des Communautés sont Luxem¬
bourg, Bruxelles, Strasbourg ».
488 LES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

§ 2. — Les organes de contrôle.

L’une des conventions signées à Rome le 25 mars 1957


crée, dans le souci « d’éviter la multiplicité des institu¬
tions destinées à accomplir des missions analogues dans
les Communautés européennes » des organes conamuns :
deux d’entre eux l’Assemblée et la Cour de justice sont
communs aux trois Communautés, le troisième, le Comité
économique et social n’existe que pour deux Commu¬
nautés, l’Euratom et le Marché commun. Il est composé
de représentants des différentes catégories de la vie éco¬
nomique et sociale.
Il existe un contrôle de caractère politique constitué
par l’Assemblée commune et un organe de contrôle juri¬
dictionnel, la Cour de justice, véritable organe régulateur
des traités.
Les institutions communes, pas plus que les organes
moteurs ne siègent d’ailleurs dans le même lieu. La Haute
Autorité est à Luxembourg, les Commissions et Conseils
des traités de Rome à Bruxelles, l’Assemblée commune
se réunit à Strasbourg et la Cour de justice siège à Luxem¬
bourg.
A. — L’Assemblée

499. — Structure de l’Assemblée. — L existence


d’une assemblée est prévue par le traité de la C.E.C.A.
(art. 20-25), le traité de la C.E.E. (art. 137-145). le traité
de la C.E.E.A. (art. 107-115) et l’article 2 de la convention
de Rome relative aux institutions communes.
Selon ce dernier texte l’article 21 du traité de la
C.E.C.A. est modifié et le nombre des membres de l’As¬
semblée passe de 78 à 142 répartis en 36 membres pour
chacun des trois plus grands États (Répubhque fédérale,
France, Itahe), 14 membres pour la Belgique et les Pays-
Bas, 6 pour le Luxembourg.
Les traités n’ont pas prévu de nom particulier pour
l’Assemblée, elle a adopté d’abord celui d’Assemblée
parlementaire européenne ensuite celui de Parlement
européen.
Le titre ne correspond pas exactement à la réalité
dans la mesure où il ne s’agit pas d’un Parlement véri¬
table. L’Assemblée n’est point, ou pas encore, représen¬
tative au sens strict. Elle est formée de délégués que les
LES COMMUNAUTÉS 489

Parlements sont appelés à désigner en leur sein selon


une procédure laissée à la compétence de chaque État.
Il est toutefois prévu que l’Assemblée élaborera des
projets en vue de permettre l’élection au suffrage univer¬
sel direct, selon une procédure uniforme dans tous les
États membres.
Les membres de l’Assemblée désignés par les Parle¬
ments nationaux constituent des groupes qu’unissent
des affinités pobtiques^ et qm correspondent à certains
partis pobtiques des États : bbéraux, démocrates-chré¬
tiens, sociahstes... Ces groupes parlementaires sont de
caractère international, à l’exception de l’un d’entre eux,
V Union Démocratique Européenne, qui est constitué par des
parlementaires français U. N. R.

500. — Rôle de l’Assemblée. — L’Assemblée ne cor¬


respond pas à un Parlement en ce sens qu’eUe n’exerce
pas normalement le pouvoir législatif qui appartient, sauf
quelques exceptions, aux organes d’action, elle ne dispose
pas non plus d’un pouvoir de caractère budgétaire.
Mais elle joue le même rôle qu’un Parlement dans un
régime parlementaire en ce sens que l’organe d’action
« supra national » ou « extra national », Haute Autorité
ou Commission, est responsable devant elle. Cette res-
ponsabihté est mise en jeu au moment de la discussion
du rapport annuel qui lui est soumis par ces organes.
Une motion de censure peut être déposée, eUe fait l’objet
trois jours au moins après son dépôt d’un vote pubbc
et si l’Assemblée à la double majorité des deux tiers
des voix exprimées et à la majorité des membres qui la
composent adopte la motion, les membres de la Haute
Autorité ou des Commissions doivent abandonner collec¬
tivement leurs fonctions.
L’Assemblée ne peut rien à l’encontre du Conseil
spécial de la C.E.C.A. ou des Conseils des deux autres
Communautés, mais les débats qui s’y déroulent per¬
mettent de dégager une opinion, des critiques sont
quelquefois formulées, ce fut le cas notamment après le
blocage par le gouvernement français de la procédure
d’adhésion au Marché commun du Royaume-Uni en 1963.

B. — La Cour de justice

501. — La Cour de justice. — Les États fédéraux con¬


naissent l’institution d’une Cour suprême fédérale. Les
490 LES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Communautés européennes comportent elles aussi une


Cour de justice qui assure le respect du droit dans l’in¬
terprétation et l’application du traité et des règlements
d’exécution.
La Cour est composée de sept juges nommés d’un
commun accord par les États membres pour une durée
de six ans et rééHgibles. La compétence est purement
contentieuse mais elle n’est pas absolument identique
selon qu’il s’agit de la C.E.C.A. ou des deux autres
Communautés. Cette compétence est complexe, la Cour
apparaît tantôt comme une juridiction administrative,
tantôt comme une juridiction internationale.
En tant que juridiction administrative, la Cour peut
être saisie de recours en annulation du t^pe du recours
pour excès de pouvoir devant le Conseil d’Êtat en France
ou de recours de pleine juridiction. En tant que juridiction
internationale, la Cour est un organe régulateur qui se
prononce sur les différends pouvant surgir entre États
membres ou entre un État membre et la Haute Autorité.
La Cour peut être saisie, selon les cas, par les États
membres, la Haute Autorité ou les Commissions, les
Conseils et aussi, dans certaines hypothèses, par les
entreprises et les associations d’entreprises et l’on voit
ainsi apparaître des hypothèses de recours formés par
des personnes juridiques privées (voir supra, n® 397).

§ 3. — Les organes de gestion.

Divers organes de gestion sont prévus par les traités


ou ont été créés par le Conseil.

502. — Agence de l’Euratom. — Un organisme subsi¬


diaire de l’Euratom, l’Agence atomique européenne, a
été prévu aux articles 52 à 56 du traité. L’Agence doit
disposer d’un droit d’option sur les minerais, matières
brutes et matières fissiles spéciales produits sur les ter¬
ritoires des États membres et du droit exclusif de conclure
des contrats portant sur les fournitures de ces diverses
substances en provenance de l’intérieur ou de l’extérieur
de la Communauté. Elle est dotée de la personnalité juri¬
dique et de l’autonomie financière.

503. — Les organismes de gestion du Marché commun.


— Dans le cadre du traité du Marché commun existent
LES COMMUNAUTÉS 491

plusieurs organismes de gestion, ils sont destinés à assurer


la réalisation des politiques communes.
Le Fonds soci<ü européen est destiné à assurer une
adaptation de la main-d’œuvre aux nouvelles conditions
dérivant de l’existence du marché commun, à faciliter la
libre circulation des travailleurs, à assurer aussi le réem¬
ploi par l'éducation professionnelle. Le Fonds social
intervient d’une manière indirecte en participant aux
dépenses supportées par un État membre ou un organisme
de droit pubhc en dépendant.
La Banque européenne d’investissement créée par l’ar¬
ticle 129 a pour mission, selon l’article 130 de contribuer
en faisant appel au marché des capitaux et à ses ressources
propres au développement équüibré du Marché commun,
notamment par la mise en valeur des régions moins
développées, par la modernisation, la conversion ou la
création d’entreprises, par la réahsation de projets d’in¬
térêt commun pour plusieurs États membres et d’une
particuhère ampleur.
Un protocole spécial annexé au traité fixe les statuts de
la Banque. Seiils en sont membres les six États. Ils sous¬
crivent le capital social suivant des proportions définies
par le protocole.
Dans le domaine agricole les décisions arrêtées le
14 janvier 1962 ont créé un Fonds européen d’orientation
et de garantie. Il est destiné à financer les interventions
sur le marché effectuées en vertu des règles commu¬
nautaires, à permettre l’exportation des surplus agricoles
écoulés au cours mondial vers les pays tiers en subven¬
tionnant les déficits dus aux prix agricoles élevés existant
dans le Marché.
Pour réahser ces pohtiques le Fonds dispose de res¬
sources qui lui sont affectées. Le Règlement n» 25 du
Conseil, valablejusqu’au 30 juin 1965, prévoyait un finan¬
cement par les Etats pour la période transitoire, une par¬
tie de ces ressources étant à la charge des budgets natio¬
naux, une autre partie provenant des prélèvements perçus
sur les importations de l’extérieur de la Communauté
à destination de chaque État membre. D’autres modahtés
de financement devaient être étudiées pour la période
postérieure au 30 juin 1965.
Le Conseil, le 15 décembre 1964, a invité la Commis¬
sion à présenter des propositions. La Commission les a
présentées le 31 mars. Elles tendaient à instaurer à dater
du juillet 1967 (une période intermédiaire étant main-
492 LES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

tenue entre le le»' juillet 1965 et le juillet 1967) un


financement du F. E. O. G. A. par des recettes propres
provenant des prélèvements agricoles et des droits de
douane perçus sur les produits industriels.
Il s’agissait donc d’un véritable budget fédéral du
F. E. O. G. A. et d’une affectation communautaire de
ressources, aboutissant à priver les États de toute recette
douanière. Parallèlement les propositions de la Commis¬
sion prévoyaient le contrôle de ce budget par le Parlement
européen doté à cet effet de pouvoirs particuliers.
Le Gouvernement français a manifesté son opposition
à ces formules et refusé la poursuite de discussions sur
ces problèmes (30 jtdn 1965).

Section III. — L’extension des Commnnautés.

Les traités instituant les Communautés établissent


un régime particulier entre les six États mais il existe
des possibilités d’extension des mécanismes des traités.
Ils peuvent être classés en deux séries différentes d’ins¬
titutions : les formules d’association, la formule de l’ad¬
hésion.

§ ler. — Les formules d’association.

Les traités adoptent en matière d’association des


solutions différentes, le traité de la C.E.C.A. est muet
sur le problème mais une association a été créée, le traité
du Marché commun prévoit deux types d’association,
le traité de l’Euratom prévoit formellement la possibilité
de l’association, le traité du Marché commun adopte la
même solution mais organise en outre une association
d’un type particulier.

504. — L’association C.E.C.A.-Royaume-Uni. — Mal¬


gré le silence du traité une association a été instituée
entre la C.E.C.A. et le Royaume-Uni par un accord du
21 décembre 1954. Cet accord crée un Conseil permanent
d’association de caractère paritaire comprenant au plus
quatre personnes représentant la Haute Autorité et au
plus quatre personnes représentant le Royaume-Uni, avec
un secrétariat conjoint. Il constitue un instrument
d’échange permanent d’informations et de consultations
LES COMMUNAUTÉS 493

sur les questions d’intérêt commun concernant le charbon


et l'acier et éventuellement la coordination de l’action
relative à ces questions. Aucune procédure spéciale n’est
organisée en cas de difficulté.

505. — L’association au Marché commun. — L’ar¬


ticle 238 du traité C.E.E. stipule que la Communauté
peut conclure avec un État tiers, une union d’États ou
une organisation internationale, des accords créant une
association caractérisée par des droits et obligations
réciproques, des actions en commun et des procédures
particulières. Ces accords sont conclus par le Conseil
agissant à l’unanimité et après consultation de l’Assem¬
blée.
Un premier accord d’association a été conclu entre la
C. E. E. et la Grèce. Paraphé le 30 mars 1961, signé le
ler juillet, il est entré en vigueur le i®' novembre 1962.
Il institue une union douanière entre les Six et la Grèce
mais tient compte de la situation particuhère de Pécono-
mie hellénique. La période de transition a été ainsi allon¬
gée pour certains produits, la Grèce conserve la possibihté
de protéger ses industries nouvelles et bénéficie de mesures
particuhères pour lui ouvrir des débouchés à l’intérieur
de la C. E. E. Une aide financière fait l’objet d’un proto¬
cole spécial. Un conseil d’association est institué, sur base
paritaire entre d’une part la Grèce et d’autre part à la
fois le Conseil, la Commission et aussi les États membres
de la Communauté. Les différends peuvent être réglés
sur décision du Conseil d’association, par la Cour de jus¬
tice des communautés ou bien par une instance arbitrale
particuhère (art. 65).
Un second accord entre la C. E. E. et la Turquie a été
signé le 12 septembre 1963, après plus de quatre années de
négociations. Sur le plan institutionnel il est très voisin
de celui conclu avec la Grèce et il existe également une
aide financière. L’accord comporte trois périodes dis¬
tinctes : une période préparatoire d’une durée minimum
de cinq ans, une période préparatoire d’une durée mini¬
mum de douze ans et enfin une période définitive lorsque
la Turquie et la C. E. E, constitueront une union doua¬
nière.
Un troisième accord d’association a été signé entre la
C. E. E. et le Nigeria le 16 juillet 1966. Il prévoit l’éhmi-
nation des droits de douane sans que d’ailleurs la réci¬
procité soit absolue, le Nigeria pouvant maintenir cer-
494 LÈS COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

tains droits de douane sur les produits importés de la


C. E. E. Il n’est pas prévu d’aide financière.
Des négociations ont été ouvertes entre la C. E. E. et
d’autres^ pays pour établir un accord d’association, ainsi
divers États membres de l’A. E. L. E. dont l’Autriche.
L’U. R. S. S. à propos de ces dernières négociations a
soulevé des objections fondées sur la neutralité de l’Au¬
triche.
La C. E. E. a par aüleurs entamé des négociations ten¬
dant à la conclusion de simples accords commerciaux
avec divers États qui l’ont sollicitée, notamment l’Iran,
Israël, certains États d’Afrique, Algérie, Maroc, Tunisie,
Kenya, Tanzanie, Ouganda.

506. — L’association des États africains. — Le traité


de C.E.E. prévoyait dans sa quatrième partie une asso¬
ciation à la Communauté des pays et territoires non
européens entretenant avec la Belgique, la France, l’Italie
et les Pays-Bas des relations particulières. Cette associa¬
tion régie par les articles 131 à 136 du Traité et par une
convention spéciale annexée est différente de celle prévue
par l’article 238. En effet en 1957, date de la signature
des traités de Rome, le grand mouvement de décoloni¬
sation n’a pas encore beaucoup d’ampleur, au moins en
Afrique et il ne s’agit pas ici d’États à associer mais de
pays et territoires administrés par certains États euro¬
péens.
Les modahtés et la procédure d’association étaient
fixées par la convention annexée et cela pour une période
de cinq ans, de nouvelles dispositions devaient être
élaborées ensuite par le Conseü statuant à l’unanimité.
L’accession à l’indépendance de la plupart des pays et
territoires concernés a amené l’ouverture de négociations
de caractère international pour l’établissement d’une
nouvelle convention. Les négociations ont duré environ
un an et une convention a été paraphée le 20 décembre
1962 entre la Communauté européenne et dix-huit États
africains et malgache comprenant douze anciens terri¬
toires français d’outre-mer (République centrafricaine,
Congo, Côte-d’Ivoire, Dahomey, Gabon, Haute-Volta,
Madagascar, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal, Tchad),
une ancienne colonie belge (Congo-LéopoldviUe) et cinq
anciens territoires sous tutelle (Burundi, Cameroun,
Ruanda, Somalie, Togo). Le traité signé en juillet 1963
à Yaoundé est entré en vigueur le juillet 1964 com-
LES COMMUNAUTÉS 495

piété par divers accords et protocoles ; il établit entre les


Six et les Dix-Huit une association qui a pour objectif
de faciliter la diversification de l’économie et l’industria¬
lisation des États associés en vue de leur permettre de
renforcer leur équilibre et leur indépendance économique.
Le traité n’institue pas une union douanière propre¬
ment dite mais prévoit des régimes particuliers. Il tend
vers la réalisation d’une zone de libre échange et contient
des dispositions relatives à l’octroi aux Dix-huit d’une
aide financière d’un montant global de 730 millions de
doUars dont 620 à titre de dons.
L’organisation de l’association repose sur des méca¬
nismes juridiques assez complexes avec un Conseil d'as¬
sociation de caractère paritaire entre les Dix-huit d’une
part, les représentants de la Commission et du Conseil
d’autre part. Ce conseil est assisté d’un Comité d’associa¬
tion composé d’un représentant de chacun des Six et de
la Commission et d’un représentant de chaque État
associé. Une conférence parlementaire est également pré¬
vue, sur base paritaire entre membres de l’Assemblée
européenne et membres des Parlements des États asso¬
ciés, le Conseil présente un rapport devant cette confé¬
rence. Le mode de règlement des différends est prévu,
une Coiir arbitrale spéciale est instituée dans le cas où
le Conseil ne parvient pas à régler le différend et la Cour
de justice des communautés n’a pas ici de compétence.
Le traité paraphé en décembre 1962 n’a pas été signé
comme il était attendu en février 1963, certains États
européens ayant voulu exprimer ainsi leur désapproba¬
tion de l’attitude du gouvernement français à l’égard de
l’adhésion du Royaume-Uni au Marché commun. Des
dispositions particuHères ont été adoptées pour que les
États africains puissent continuer à bénéficier de mesures
analogues à celles du traité antérieur venu à expiration.

§ 2. — L'adhésion.

Les trois traités (art. 98 C.E.C.A.-art. 237 C.!^E.-


art. 205 C. E. E. A.) prévoient la possibihté pour un État
européen de devenir membre de la Communauté par voie
d’adhésion.

507. — La demande d’admission du Royaume-Uni.


— Le Royaume-Uni, qui avait longtemps manifesté un
496 LES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

certain éloignement à l’égard du Marché commun et


constitué l’Association européenne de libre-échange, a
demandé le 9 août 1961 à engager des négociations en
vue d’une adhésion au titre de l’article 237 du traité de
Rome. De telles négociations apparaissent difficiles en
raison de problèmes particuhers posés d’une part par
l’appartenance du Royaume-Uni au Commonwealth et
l’existence de la « préférence impériale » instituée en
1932 à la conférence d’Ottawa, d’autre part par l’appar¬
tenance du Royaume-Uni à l’A.E.L.E., enfin par la
situation particuHère de l’agriculture britannique dans
laquelle existe un régime spécial de subventions gouver¬
nementales. Mais les Six n’ayant point rejetéa^nonl’étude
d’aménagements possibles, compatibles toutefois avec
l’esprit du traité de Rome, ces négociations ont été entre¬
prises et ont duré plus de quinze mois.

508. — Les négociations. — Au cours des discussions


divers problèmes ont été définitivement réglés, ceux des
produits manufacturés des anciens « dominions blancs »,
Canada, Australie, Nouvelle Zélande notamment. Un
large accord a été atteint concernant les produits manu¬
facturés des États du Commonwealth à bas salaires tels
que Ceylan, l’Inde, le Pakistan ainsi qu’à l’égard du
problème de l’utüisation de la procédure de l’association
de type africain à toute une série de territoires coloniaux
britanniques, enfin en ce qui concerne les produits
agricoles de la zone tempérée, pour certains produits
au moins. Diverses difficultés demeuraient encore au
début de l’année 1963, elles portaient notamment sur
l’aluminium canadien, le papier ou la pâte à papier et
enfin les subventions à l’agriculture britannique.
Mais dans une conférence de presse donnée le 14 jan¬
vier 1963 le général de Gaulle a clairement indiqué que
le gouvernement français s’opposerait à l’adhésion du
Royaume-Uni au Marché commun et d’ultimes tentatives
de sauvetage des négociations en cours devaient échouer
à la fin de janvier. Le Royaume-Uni se trouve donc
écarté, temporairement sans doute, du Marché commun.
Aux difficultés ci-dessus rappelées s’ajoutait d’ailleurs
avec l’adhésion du Royaume-Uni un autre problème,
celui d’une coopération atlantique plus étroite et des
relations économiques plus étendues avec les États-
Unis.
En effet une loi américaine d’octobre 1962 sur l’expan-
LES COMMUNAUTÉS 497

sion commerciale donne au Président des États-Unis


l’autorisation de négocier de très larges concessions tari¬
faires avec le Marché commun pouvant aller jusqu’à
100 % sur les marchandises dans les échanges entre
États-Unis et Marché commun représentant 8o % ou
plus du commerce mondial et 50 % dans les autres cas.
Les relations entre la Communauté et les États-Unis
apparaissaient, selon la formule nord américaine, devoir
être fondées sur la « partnership ». Mais, a-t-on pu pré¬
tendre, le Marché conunun ne risquait-il pas alors de
se diluer dans un ensemble atlantique et de perdre les
caractéristiques mêmes qui marquaient les traités de
1952 et de 1957 et qui peuvent conduire à l’intégration?
Après quelques années le gouvernement britannique a
envisagé de reprendre une pohtique d’adhésion au Marché
commun, le Premier ministre a exposé ses intentions devant
le Parlement européen le 25 janvier 1967 pour affirmer
que le Royaume-Uni se soumettrait sans réserve au traité
et a sondé les milieux gouvernementaux des autres États.
Une nouvelle demande formelle d’adhésion a été pré¬
sentée le II mai 1967. L’Irlande et le Danemark ont, le
même jour, déposé une demande analogue.

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la jurisprudence relative aux Traités instituant les Commu¬
nautés européennes, 1953-1962, Heymans édit., 1965.
On se reportera au Journal Ojfficiel des Communautés
européennes et au Recueil de jurisprudence de la Cour de
justice. Une bonne information sur cette jurisprudence
est fournie par la chronique publiée chaque année depuis
1955 par le Doyen Boulouis dans l’A. F. D. I.
Voir également les revues spéciahsées :
Revue du Marché Commun, Paris, dirigée par D.
Vignes; Revue trimestrielle de droit européen, Paris, 1965,
fondée par R. Houin et C. A. Colliard; Cahiers de
droit européen, Bruxelles 1965, dirigée par L. Goffin,
M. Taquet, R. O. Dalcq.

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et de l’acier, Paris, 1953; Mason (H. L.), The European
Coal and Steel Community, Experiment in Supranationa-
lism, La Haye, 1955 ; Gerbet (P.), La genèse du Plan Schu¬
man, des origines à la déclaration du g mai igso, R. F. S. P.,
1956, p. 525 et s.; Vignes (D.), La Communauté euro¬
péenne du charbon et de l’acier (un exemple d’administra¬
tion économique internationale), Paris, 1956 ; Congrès inter¬
national d’études sur la C. E. C. A., Müan-Stresa, igsy,
édité par Giuffré, Milan; Lassalle (C.), Aspects institu¬
tionnels de la C.E.C.A., R. D. P., 1958, p. 410-451;
Mathijsen (P.), Le droit de la C. E. C. A., une étude des
sources, La Haye, 1958; Prieur (R.), Les relations
internes et externes de la C.E.C.A., Paris, 1958;
SoTO (J. de), La C. E. C. A., Collection « Que sais-je? »,
PariSj 1958; SoTO (J. de), Les relations internationales de
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de droit public et de droit international dans la vie juridique
de la C. E. C. A., Cours de l’Institut des Hautes Études
Internationales de Paris, 1958-1959; Li^er (L.), Europe’s
coal and steel Community, an experiment in économie
union, New York, i960; Kapteyn (P. J. G.), L’Assem¬
blée commune de la C. E. C. A., Leyde, 1962; Prieur (R.),
La C. E. C. A., activité et évolution, Paris, 1962;
Kovar (R.), Le pouvoir réglementaire de la C. E. C. A.,
Paris, 1964; Kovar (R.), le testament de la C. E.C. A. :
le rapport politique de la Haute Autorité de février igô^,
Rev. trim. dr. eur., 1965, p. 255-259.
On consultera utilement les rapports annuels de la
Haute Autorité.

C.E.E. (Marché Commun).


XX. — Le Marché Commun et l’Euratom, Chronique de
Polit. Étr., juület 1957; XX. — La Communauté éco¬
nomique européenne. Aspects institutionnels, A. F. D. I.,
1957, p. 491-517; Gonidec (P. F.), L’association des
pays d’outre mer au marché commun, A. F. D. I., 1958.
p. 594-621 ; Groeben et Von Boeckl, Kommentar
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p. 25-30; Heraud (G.), Observations sur la nature
juridique de la C.E.E., R. G. D. I. P., 1958, p. 26-56;
Le Page (B.), Le système d’application progressive du
traité instituant la C. E. E., A. F. D. I., 1958, p. 57^-
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aux principes de base d’un marché commtm dans le traité
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l’évolution du marché commun, Rev. trim. dr. eur., 1965.
n° I, p. i-io; Lesguillons (H.), Recherche sur la mise
en œuvre du traité instituant la C. E. E. par les Etats
membres, thèse Paris, 1966; Megret (C.), Le droit de la
C. E. E. et Vordre juridique des États membres, thèse Paris,
1966; Rasquin (G.) et Chevallier (R. M.), L’article 173,
alinéa 2 du Traité C. E. E., Rev. trim. dr. eur., 1966, n° i.
On consultera utilement le Bulletin de la C. E. È.
CHAPITRE II

LES TENTATIVES
D’UNE COMMUNAUTÉ POLITIQUE

A diverses reprises il a été tenté de réaliser une Com¬


munauté politique entre les Six. Deux projets ont été
élaborés selon des procédures fort différentes et aboutis¬
sant aussi à des structures différentes, ils ont échoué
mais leur brève étude présente un intérêt historique
certain.

Section I. —La communauté politique


européenne (1952-53).

509. — Le problème de l’autorité politique. —


La^ déclaration Schuman du g mai 1950 avait affirmé
« l'Europe ne se fera pas d’un coup, ni dans une cons¬
truction d’ensemble ». Cette formule appliquée d’abord
à la C. E. C. A. devait être l’idée directrice des diverses
tentatives de communautés européennes concernant des
secteurs particuliers et connues sous le nom d’autorités
spéciaHsées. Mais les projets d’autorités spéciahsées
n’ont pas finalement rencontré grand succès, que ce soit
dans le domaine de l’agriculture ou des transports, ou que
ce soit sur le plan miütaire avec le traité constitutif de
la C. E. D.
La méthode progressive du montage d’un organisme
fédéral à partir de pièces détachées a pu ainsi apparaître
comme présentant l’inconvénient psychologique et poli¬
tique, particulièrement grave en un domaine où le sup-
LES TENTATIVES D'UNE COMMUNAUTÉ POLITIQUE 503

port de l’opinion publique était nécessaire, de ne pas


aboutir tout de suite à la création d’une autorité poli¬
tique dont l’existence est évidemment nécessaire.
C’est une telle création que réclame précisément
l’Assemblée consultative du Conseil de l’Europe dans
une recommandation du lo décembre 1951, et eUe
exprime à nouveau son opinion dans une résolution du
30 mai 1952 en tenant compte des propositions bri¬
tanniques, dites plan Eden, exposées au Conseil des
ministres du Conseil de l’Europe le 19 mars 1952 et
fondées sur l’articulation d’une Communauté européenne
étroite solidement charpentée, ou communauté des Six,
avec le Conseil de l’Europe lui-même.

510. — L’Assemblée ad hoc. — Les suggestions de


l’Assemblée consultative devaient être suivies d’effet
dans le cadre de la C. E. C. A. Lors de la première réunion
du Conseil spécial des ministres, à Luxembourg, les six
ministres invitèrent en effet l’Assemblée commune de
la Communauté à se compléter par cooptation pour
s’identifier numériquement avec l’Assemblée commune
du projet de communauté européenne de défense et
ensuite à élaborer un projet de communauté politique
européenne. Par l’acceptation de l’invitation qui lui
était adressée, l’Assemblée commune créa une assemblée
dite « ad hoc » considérée comme une assemblée « pré¬
constituante ». Cette assemblée de 87 membres, aux
délibérations de laquelle assistaient en outre des obser¬
vateurs parlementaires provenant de pays membres du
Conseil de l’Europe mais non membres de la C. E. C. A.,
se mit au travail en créant une commission constitution¬
nelle de 26 membres auxquels étaient associés les 13
observateurs. Subdivisée à son tour en sous-commissions,
la commission constitutionnelle mena rapidement la
tâche qui lui avait été confiée et le texte d’un projet de
traité fut soumis à l’Assemblée ad hoc le 10 mars iqSS-
Le 9 mars 1953, au cours d’une séance solennelle du
Conseil de l’Europe, le président de l’Assemblée ad hoc
remettait au président en exercice du Conseil des ministres
de la C. E. C. A., le projet de traité dont le texte devait
être adopté, le lendemain 10 mars, par l’Assemblée
a,d hoc elle-même par 50 voix et 5 abstentions sur 55
votants.
504 LES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

511. — L’échec de la Communauté politique. — Le


projet, sous le nom de Communauté européenne, en
réalité un véritable État fédéral avec un pouvoir législatif
comportant une Chambre des Peuples et un Sénat
européen, un pouvoir exécutif exercé par le Conseü
exécutif européen dont le Président était nommé par le
Sénat et qui était responsable devant les chambres
législatives, un Conseil des ministres nationaux, à rôle
imprécis, harmonisait l’action du Conseil exécutif euro¬
péen et celle des gouvernements des États membres.
Une Cour de justice fédérale était prévue, celle de la
C. E. C. A. Très complet sur le plan institutionnel, ce
projet ne constituait en aucune manière un texte de droit
positif. Il devait être soumis à l’examen des gouverne¬
ments et être éventuellement utüisé ensuite comme
simple document de travaü par une conférence diplo¬
matique. Le projet fut effectivement examiné par les
ministres des Affaires étrangères réxmis en 1953. Une
Commission siégeant à Paris prépara en novembre un
rapport qui devait être remis en mars et servir à une
conférence dont la réunion était fixée au 30 mars 1954
et qui avait à son ordre du jour l’étude du traité. La
Commission transmit effectivement son rapport le 15 mars
mais le 24 les délégués des Six ajournèrent la Conférence
de Bruxelles « en raison des tâches incombant actuelle¬
ment à certains gouvernements des États membres de
la C. E. C. A. et concernant les questions fiées au pro¬
blème de la Communauté politique ». Le projet ne devait
plus jamais être examiné.

Section IL — L’Union d’États (1961).

512. — L’Europe des patries. — Dans diverses ren¬


contres d’hommes d’État des Six à la fin de l’année
1958 après le retour au pouvoir en France du général
de Gaulle et au début de l'année 1959 avait été évoquée
la coopération des Six dans le domaine politique. Le
général de Gaulle, dans une conférence de presse le
5 septembre 1959, devait exprimer sa conception d’une
construction politique de l’Europe reposant sur « des
États, seules entités qui aient le droit d’ordonner et de
pouvoir être obéies ». Il esquissait les traits d’une organi¬
sation comportant un concert régulier des gouverne¬
ments responsables, le travail d’organismes spécialisés
LES TENTATIVES d’UNE COMMUNAUTÉ POLITIQUE 5^5

dans chacun des domaines communs et subordonnés aux


gouvernements, la délibération périodique d’une assem¬
blée formée de délégués nationaux et il concluait en
demandant « un solennel référendum européen de manière
à donner à ce départ de l’Europe le caractère d’adhésion,
d’intervention populaire qui lui est indispensable ».
Cette suggestion, fondée sur ce qu’on appella « VEurope
des patries », devait être mal accueilhe par les hommes
d’État européens, tout particuhèrement le chancelier
Adenauer et des apaisements durent être fournis par le
gouvernement français.

513. — Les plans de 1961. — Une détente est apparue


à la conférence des chefs d’État et de gouvernement
tenue à Paris en février 1961 où est abandonnée l’idée
d’une remise en cause des institutions existantes. L’As¬
semblée parlementaire européenne réunie en juin à
Strasbourg accepte la formule de réunions périodiques de
chefs de gouvernement ou de ministres des Affaires
étrangères pourvu que soient laissés intacts le fonction¬
nement et les compétences des Communautés, et demande
la réalisation progressive d’une union pohtique étroite
fondée sur ces principes. Une nouvelle conférence de chefs
d’État ou de gouvernement tenue à Bonn adopte le
18 juillet 1961 un communiqué qui charge notamment
une commission d’étudier la résolution de l’Assemblée
européenne et de présenter « des propositions sur les
moyens qui permettraient de donner aussitôt que pos¬
sible un caractère statuaire à l’union de leurs peuples ».

514. — L’Union d’États. — La commission d’études


créée à Bonn le 18 juillet 1961 devait aboutir à un projet
souvent appelé plan Fouchet déposé le 10 novembre
1961. Il institue trois organes. Le Conseil, composé des
représentants des États membres à l’écheloii des chefs
d’État ou de gouvernement ou à celui des ministres des
Affaires étrangères, prend ses décisions à l’unanimité et
se réunit périodiquement. Un président est désiré pour
quatre mois. Il préside aussi la Commission politique qui
siège à Paris et se compose de hauts fonctionnaires des
ministères des Affaires étrangères des États membres
chargés de préparer les délibérations du Conseil et de les
mettre en œuvre. L’Assemblée qui est l’Assemblée parle¬
mentaire européenne peut formuler des recommandations
au Conseil et adresser des questions écrites ou orales. Le
5o6 les communautés européennes

traité prévoit également une Commission de défense


et une Commission culturelle.
L’Assemblée parlementaire réunie à Strasbourg en
décembre 1961 a manifesté bien des réticences à l’égard
de ce projet, mais en approuva le principe après l’avoir
complété par des modifications qui rétablissaient un
certain caractère communautaire.
Mais le projet devait surtout se heurter à de vives
critiques formulées par les membres de divers gouverne¬
ments, notamment M. Spaak qui craignait la suprématie
des plus grands États et qui dénonça très vivemenj; le
retour en arrière, du point de vue des institutions com¬
munautaires que constitue l’existence de commissions de
fonctionnaires soumis à leurs gouvernements. Le projet
d’Union d’États sur lequel les ministres des Affaires
étrangères des Six n’ont pu se mettre d’accord en
avril 1962 ne semble donc pas promis à un meilleur
avenir que le projet tout différent d’État fédéral que
constituait la Communauté européenne de 1952.
En avril 1962 les ministres des Six durent constater,
malgré^ quelques progrès et les efforts de conciliation
déployés par M. Cattani, qui succéda comme Président à
M. Fouchet, qu’ils n’étaient pas parvenus à un accord.
Les divergences apparaissaient essentiellement sur deux
plans. Au plan des structures et des principes l’oppo¬
sition se marquait entre les formules françaises purement
intergouvemementales et les formules d’intégration
défendues en particulier par le gouvernement néerlandais.
Mais les divergences se marquaient aussi au sujet de
l’étendue même de l’union politique, le Royaume-Uni
avait demandé le 10 avril 1962 d’être invité à participer
aux négociations et les Pays-Bas, précisément envisa¬
geaient quelques concessions atténuant le principe
d’mtégration moyennant la participation britannique
rejetée par le gouvernement français.
L’échec constaté en 1962 semble durable; le gouver¬
nement itahen avait proposé la réimion à Venise le
10 mai 1965 d’une conférence portant sur l’imion pohtique
mais le gouvernement français a demandé, avant l’ou¬
verture, l’ajournement sine die, les circonstances ne lui
paraissant pas favorables pour l’obtention d’un résul¬
tat.
LES TENTATIVES D’UNE COMMUNAUTÉ POLITIQUE 507

BIBLIOGRAPHIE

Les tentatives d’une communauté politique.

Castarede (J.), La construction économique de l’Eu¬


rope d ses implications politiques, thèse Paris, 1964.
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SOUS-TITRE III

LES AUTRES CONTINENTS

Si le continent européen apparaît aujourd’hui comme


le terrain d’élection de multiples organisations inter¬
nationales, on doit noter qu’il en est d’autres en dehors
de l’Europe et du continent américain.
Depuis 1945 existe la Ligue arabe qui comprend des
États africains et asiatiques.
Les jeunes États africains et Madagascar se regroupent
dans diverses organisations africaines ou africaines et
malgache. . ^ r, 11
D’autres organisations constituent, dans le Faciüque,
le cadre institutionnel de pactes de sécurité mutuelle.
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P :' .\ àJhtD^ 9b fiitaiKj iM^nodutiMui ^TbayOT
CHAPITRE PREMIER

LA UGUE ARABE

515. — Origines et composition de la Ligue. — L’ini¬


tiative de la création d'une organisation internationale
groupant les États arabes fut prise par le Gouvernement
ég5rptien. En septembre-octobre 1944» se tint au Caire
le Comité préparatoire de la Conférence Panarabe. Les
conclusions de ce Comité prirent la forme d’un protocole
dit « Protocole d’Alexandrie » en date du 7 octobre 1944.
Un sous-comité, prévu par ce protocle pour mettre
au point le texte du Pacte, proposa le projet du Pacte
qui fut adopté sans discussion le 22 mars 1945 par le
premier congrès des États arabes qui réunissait l’Arabie
séoudite, l’Égypte, l’Irak, le Liban, la S5nie, le Yémen
et la Transjordanie. Le texte est entré en vigueur le
Il mai 1945. ,
La Ligue des États arabes se compose des Etats
arabes indépendants qui ont signé le pacte, eUe est ouverte
à l’adhésion de tout autre État arabe dont la candidature
doit être soumise au Conseil de la Ligue. Ainsi sont
entrés dans la Ligue, après leur accession à l’indépen¬
dance, la Libye en 1953. le Soudan en 1956, la Tunisie
en 1958, le Maroc en 1958, l’État de Koweït en 1961,
l’Algérie en 1962.
Tout État membre de la Ligue peut se retirer après
tm préavis d’un an. Le Conseil de la Ligue peut exclure
tout membre qui n’a pas rempli les engagements résul¬
tant du Pacte, cette exclusion est prononcée par le Coi^eil,
à l’unanimité des voix, non comprise celle de l’État
considéré.
512 LES AUTRES CONTINENTS

516. — Aspect institutionnel. — La Ligue, dont le siège


permanent est au Caire, comporte trois types d’organes :
un Conseil, des commissions, un Secrétariat général.
Le Conseil est composé des représentants des États
membres, chaque État disposant d’une voix. Le Conseil
se réunit en session ordinaire deux fois par an et en ses¬
sion extraordinaire toutes les fois que les circonstances
l’exigent, sur la demande de deux membres. Les déci¬
sions sont prises à l’unanimité ou à la majorité. Sont
prises à l’unanimité (art. 6) les décisions relatives à
l’agression ou à la menace d’agression contre un État
membre; dans ce cas, si l’agression provient d’un État
membre, le vote de l’État agresseur est exclu du calcul
de l’unanimité. Sont prises à la majorité les décisions
exécutoires relatives aux questions de personnel, à
l’adoption du budget, à l’adoption des règlements inté¬
rieurs, à la clôture des sessions. L’article 7 précise que
les décisions prises à l’unanimité obligent tous les États
membres de la Ligue, les décisions prises à la majorité
n’obligent que les États qui les acceptent. Ce jeu de
l’article 7 a conduit le Conseil, dans la pratique, à recher¬
cher l’obtention de l’unanimité des voix, ce qui a souvent
paralysé son action.
Des commissions spéciales où sont représentés tous
les États membres et aux travaux desquelles peuvent
participer les délégués d’autres États arabes sont char¬
gées d’assurer la collaboration entre les États membres
en matière économique, culturelle, sociale, sanitaire
et dans les domaines des communications, d’exécution,
des jugements, de la pohce, etc. Le Conseil décida,
en 1946, la constitution d’un Comité supplémentaire
non prévu par le Pacte, le Comité pohtique, qui se
révéla le plus important.
Le Secrétariat général permanent est dirigé par un
secrétaire général qui a rang d’ambassadeur, désigné
par le Conseil à la majorité des deux tiers. Le Secrétaire
général désigne les secrétaires adjoints avec l’appro¬
bation du Conseil ainsi que les principaux fonction¬
naires de la Ligue. Le personnel comporte actuellement
une centaine de fonctionnaires, dont la moitié est de
nationahté égyptienne. Depuis 1945, le Secrétaire
général a toujours été de nationahté égyptienne.
Les frais de la Ligue sont couverts à concurrence de
42 % par l’Égypte, 20 % par l’Irak, 16 % par la Syrie
et les 22 % restants par les autres États.
LA LIGUE ARABE 513

517. — Les rapports entre États membres. — La


Ligue a pour objet le resserrrement des rapports entre
les États membres et le développement de la coopé¬
ration dans les domaines ci-dessus indiqués. Elle prévoit
aussi comme but la coordination de l’action politique,
la sauvegarde de l’indépendance et de la souveraineté,
la défense des intérêts des Pays arabes.
D’im point de vue interne la Ligue est une association
d’États souverains dont l’indépendance s’affirme tant
dans leurs rapports réciproques que dans leurs relations
avec la Ligue elle-même. L’article 8 pose le principe que
chaque État membre s’engage à respecter le régime de
gouvernement établi par les autres et s’abstient de toute
intervention. Toutefois la souveraineté des États com¬
porte une limite, le recours à la guerre est interdit à
l’intérieur de la Ligue, comme il est de règle dans une
confédération. Les litiges entre membres, ne touchant pas
à l'indépendance, à la souveraineté, à l’intégrité terri¬
toriale peuvent faire l’objet, si les parties y consentent,^d’un
règlement par le Conseil statuant à la majorité. Les États,
s’ils perdent ainsi la compétence de guerre « intérieure »,
conservent la possibilité de conclure entre eux des
traités qu’autorise l’article 9. Ils peuvent aussi conclure
des traités avec des États extérieurs à la Ligue. La ^ule
obligation en matière de traités consiste pour l’État
membre à déposer un exemplaire de la convention auprès
du Secrétariat général.
La ligue poursuit une coopération économique et cul¬
turelle. Le Conseil a ainsi jeté les bases d’une Banque de
développement arabe, d’une compagnie arabe de naviga¬
tion, d’une compagnie arabe de pipe-lines. Un marché
commun arabe a été envisagé. Une convention du 7 sep¬
tembre 1953 a été signée en vue de faciliter les échanges
commerciaux et les importations réciproques. Le principe
de la coopération pour l’exploitation des ressources natio¬
nales a été posé.
Sur le plan culturel une convention du 27 novembre
1945 a prévu une coopération marquée par l’échange
d’étudiants, de professeurs, l’organisation de conférences,

518. — La politique de la Ligue arabe. ^— La Ligue


est un instrument de défense des intérêts des pays
arabes et son action s’est manifestée sur le plan politique.
L’efficacité lui a d’abord fait défaut en ce domaine et
malgré la disproportion des forces la guerre de Pales-
17, — INSTITUTIONS INTERNATIONALES,
514 LES AUTRES CONTINENTS

tine l’a montré. Pour tenter de remédier à cette faiblesse


une convention de défense du 17 juin 1950 a créé un
comité militaire permanent dont la République arabe
imie, l’Arabie Séoudite, l’Irak, la Jordanie, le Liban, le
Yémen étaient signataires et à laquelle le Maroc a adhéré
en 1963. La Conférence au sommet d’Alexandrie en
1964 a créé tm commandement militaire unifié siégant
au Caire sous les ordres d’im ofÊcier ég5q)tien.
La Ligue arabe s’est efforcée de jouer un grand rôle
dans la vie politique internationale et au sein des organi¬
sations internationales auxquelles participent ses membres.
Elle a ainsi manifesté à l’O. N. U. à partir de 1950 une
très nette tendance anticolonialiste à l’égard de la
politique française à propos du Maroc, de la Tunisie, de
l’Algérie, ensuite à l’égard du Royaume-Uni à propos des
affaires d’Oman et du Yémen. Afi&rmant une politique
de non-alignement la Ligue proclame la solidarité afro-
asiatique et voit dans la coopération afro-arabe un des
fondements de la politique arabe exigée par l’histoire,
la géographie, les intérêts communs.
La sohdarité arabe s’affirme à l’égard du problème
israéhen. Sur le plan économique la Ligue a tenté d’or¬
ganiser le boycott d’Israël et prévu des mesures de rétor¬
sion contre tout État qui ne se conformerait pas à ces
mesures. En ce qui concerne les eaux du Jourdain la
Ligue a envisagé diverses réahsations tendant à empêcher
Israël d’utiliser les eaux du fleuve ou de ses affluents.
Sur le plan pohtico-mihtaire la Conférence d’Alexandrie
de 1964 a décidé de créer une organisation de la Hbéra-
tion palestinienne et approuvé la constitution d’une
armée palestinienne.
Mais la Ligue est loin d’être sans fissures, des tensions
existent entre les États et une certaine inquiétude
est manifestée par divers États à l’égard de l’Égypte,
puissance dominante. La position de la Jordanie à
propos de la Palestine a été, aussi bien en 1950 que plus
récemment, différente de celle des autres États. L’Irak
a été en difficulté avec la Ligue à propos du Pacte de
Bagdad puis à propos de Koweit en 1961. Lors de l’affaire
de Suez en 1956 les États n’ont pas tous adopté la même
poütique. La Tunisie s’est retirée un moment de la Ligue
en 1958.
Pour tenter un renforcement des liens et une harmoni¬
sation des pohtiques la Conférence d’Alexandrie en 1964
a créé un Comité de contrôle comprenant les représen-
LA LIGUE ARABE 515

tants personnels des chefs d’État chargé d’étabhr le


compte rendu mensuel de l’exécution des résolutions.

BIBLIOGRAPHIE

Mouskheli (M.), La Ligue des États arabes, R. G. D. I. P.,


1946, p. 112-158; Boutros-Ghali (B. Y.), The
Arab League, International Concihation, 1954, n0498;
Boutros-Ghali (B. Y.), Essai d’analyse du panara¬
bisme, Revue égyptienne, 1956, vol. 12; Carrere d’An-
causse (H.). La Ligue des États arabes. Cahiers fran¬
çais, 1957, n° 17, p. 35-40; Ghanem (M.), La Ligue des
États arabes, thèse Paris, 1958; L’évolution du panara¬
bisme après la seconde guerre mondiale. Documentation
Française, notes et études documentaires des 12 et
14 juin 1958 (nos 2423 et 2424); Rondot (P.), L’ara¬
bisme nassérien à la recherche de thèmes nouveaux. Études,
janvier 1959, n® i, p. 120 et s.; Documents sur les
origines de la Ligue arabe. Orient, 2® trimestre i960;
Hammadi (S.), Le Pacte de Bagdad et son rôle dans
l’évolution politique des pays arabes, thèse Paris, i960;
Khalil (M.), The Arab States and the Arab League, a
documentary text, 2 vol, i. Constitutional developments ;
2. International afïairs, édité par Khayats, Beyrouth, 1962.
CHAPITRE II

LES ORGANISATIONS AFRICAINES

Le continent africain qui fut pendant longtemps le


théâtre des compétitions coloniales des Puissances
européennes a vu se multiplier depuis 1954 les indépen¬
dances, tout particulièrement en i960 avec la naissance
de quinze États. La situation politique est ainsi aujour¬
d’hui renversée et seuls demeurent non indépendants
quelques territoires africains. (Voir carte page suivante.)
La multiphcation des États indépendants dont cer¬
tains ont une population réduite et dont un certain
nombre ont des économies fragiles reposant sur des
mono-productions a fait redouter les dangers d'une
« balkanisation » de l'Afrique.
Des regroupements sont intervenus, ils marquent des
positions politiques qui sont différentes. Ils sont très
divers. Leur aire géographique est variable, certains ont
un caractère régional étroit, d’autres sont à l’écheUe du
continent et visent à atteindre l’universahté africaine.
Les structures ensuite sont également différentes, les
institutions plus ou moins développées, les compétences
des organisations sont plus ou moins étendues et les
structures enfin sont également variées, les institutions
sont parfois développées mais parfois si embryonnaires
que l’on doit alors parler plutôt d’un regroupement poh-
tique que d’une véritable organisation internationale.
Sous le bénéfice de ces remarques une brève présen¬
tation de ces tentatives apparaît plus clairement en
adoptant une distinction de caractère territorial.
LES ORGANISATIONS AFRICAINES 517

§ l®*". — Les regroupements régionaxix.

519. — Les tentatives de fédération. — Deux tenta¬


tives de fédération ont été faites, elles n’ont pas été cou¬
ronnées de succès.
En 1959, une fédération est tentée sous le nom de
Fédération du Mali entre le Sénégal, le Soudan, le Daho¬
mey et la Haute-Volta qui ne sont pas alors des États au
sens international mais des États de la Communauté. Le
rejet par la Haute-Volta et le Dahomey de la constitu¬
tion du Mali réduit la Fédération à deux États, le Sénégal
et le Soudan. Constituée en mars 1959 la Fédération
accède à l’indépendance le 20 juin i960 mais éclate le
20 août.
En i960, quatre États équatoriaux essaient de cons¬
truire l’Union des Républiques d’Afrique centrale (Congo,
Gabon, Répubhque centrafricaine, Tchad), mais par le
refus ultérieur du Gabon TUnion ne devient pas une
véritable organisation, une union douanière, dite équato¬
riale.

520. — Le Conseil de l’Entente. — On désigne sous


ce nom, qui est celui de son principal organe, une organisa¬
tion extrêmement souple qui groupe depuis la conférence
d’Abidjan du 29 mai 1959 la Côte-d’Ivoire, le Dahomey,
la Haute-Volta et le Niger devenus en i960 des États
indépendants. Cette union dite quelquefois Sahel-Bénin
repose sur le principe de l’unanimité et le Conseil de
l’Êntente réunit les quatre présidents, les présidents des
assemblées et vice présidents ainsi que les ministres
intéressés.
Une étroite coopération économique et technique a été
instituée. Une union douanière totale a été établie portant
sur tous les droits à l’importation et à l’exportation. Il
existe un fonds de solidarité alimenté par un versement de
10 % des recettes budgétaires de chaque État et dont les
ressources sont redistribuées selon une proportion inverse
de la participation de chaque État aux recettes du Fonds.
Sur le plan extérieur le Conseil de l’Entente adopte une
politique commune, la représentation d’un des Membres
à l’étranger peut être assurée par un autre Membre.
Il existe depuis i960 un secrétariat permanent dont le
siège est à Cotonou.
518 LES AUTRES CONTINENTS

521. — Union douanière de l’Afrique de l’Ouest. —


Entre les États dont les territoires étaient groupés autre¬
fois dans l’ensemble colonial de l’Afrique occidentale
française a été établie une union douanière.
Une première convention a été signée le 9 juin 1959
mais elle a été ultérieurement remplacée par la convention
d’Abidjan du 3 juin 1966. La première comportait six
membres, le Sénégal et le Soudan étant groupés alors
dans la Fédération du Mali. La seconde comporte sept
membres. Côte-d’Ivoire, Dahomey, Haute-Volta, Mau¬
ritanie, Niger, Sénégal, Mali. L’union douanière comporte
un tarif extérieur commun, une législation et une régle¬
mentation douanière harmonisées. Les produits originaires
de ru. D. E. A. O. introduits dans un État membre béné¬
ficient d’un droit de douane réduit mais non d’une fran¬
chise douanière. Les institutions sont constituées par le
Conseil des ministres, le Comité des experts et un Secré¬
tariat général dépourvu de pouvoirs de décision.
Un traité du 12 mai 1962 a institué rme Union moné¬
taire ouest africaine comportant une unité monétaire com¬
mune et un institut d’émission commun. Les si^ataires
étaient les sept États de la Convention d’Abidjan de
1961 mais le Mali s’est retiré de l’organisation dès le mois
de juin 1962. La République togolaise a été admise en
novembre 1963.

522. — Union douanière et économique de l’Afrique


centrale. — Par le traité de Brazzaville du 8 décembre 1964
a été créée une Union douanière et économique de
l’Afrique centrale groupant les quatre États de l’an¬
cienne Afrique équatoriale française (A. E. F.) : Gabon,
Tchad, Répubhque centrafricaine, Congo Brazzaville —
et la Répubhque fédérale du Cameroun.
Ce traité apparaît comme l’aboutissement d’une évolu¬
tion qui s’est manifestée au cours d’une période de cinq
années.
Une première convention du 23 juin 1959 avait créé
une Union douanière entre les quatre États, membres
de la Communauté qui constituaient antérieurement
l’Afrique équatoriale française : Congo, Gabon, Tchad,
République centrafricaine. Une seconde convention du
23 juin 1961 était conclue entre ces États, devenus
d’ailleurs indépendants et la République fédérale du
Cameroun et définissait les relations douanières et écono¬
miques entre les cinq signataires.
LES ORGANISATIONS AFRICAINES 519

Le traité du 8 décembre 1964 ouvert à tout État afri¬


cain indépendant et souverain, l’admission se faisant à
l'unanimité constitue un instrument d’intégration écono¬
mique.
Les principes fondamentaux sont ceux de la coor¬
dination des programmes d’industrialisation, de l’har¬
monisation des plans de développement, et des codes
d’investissement. Un régime commercial privilégié doit
exister entre les membres de l’Union et la création est
prévue d’ime Banque de l’Afrique centrale.
Selon le traité l’Union est un seul territoire douanier,
im tarif extérieur commun est mis en place. Sur le plan
fiscal interne existe une taxe unique uniforme dans son
régime juridique et dont le taux devra être identique à
partir de 1972.
Entre les quatre premiers membres de l’Union existe
une coopération transéquatoriale des communications
qui est un organisme interétats sous la forme juridique d’un
établissement public à structure industrielle et commer¬
ciale. Il est chargé de préparer la poütique d’intérêt
commun et d’administrer les organismes assurant les
communications d’intérêt commun : chemin de fer Congo-
Océan, ports de Pointe Noire, Brazzaville et Bangui,
réseau fluvial Congo-Oubangui, axes routiers interétats.

523. — L’Umon des États africains. — L’U. E. A,


créée le 29 avril 1961 constitue une organisation inter¬
nationale groupant trois États, le Ghana, la Guinée, le
Mali (ancien Soudan). Cette institution est très souple et
rep>ose sur le principe de l’unanimité avec une confé¬
rence des chefs d’État qui se réunit tous les trois mois.
L'orientation politique de l’Union est marquée par la
lutte contre le colonialisme sous toutes ses formes et
le désir de créer le noyau d’un futur regroupement
pan africain; elle fut à l’origine du groupe de Casa-
bleinca.

§ 2. — Les regroupements continentaux.

Diverses tentatives ont été faites ayant pour objectif


des regroupements continentaux tendant même à
l’universalité.
Des oppositions se sont marquées provenant tantôt du
style politique des gouvernements africains, ainsi appa-
520 LES AUTRES CONTINENTS

raît l’opposition entre les « modérés » et les « révolu¬


tionnaires », tantôt provenant des anciennes dominations
coloniales comme le montrent certains regroupements
tentés par les États francophones.

524. — Les groupes de Casablanca et Monrovia. —


La conférence de Casablanca, tenue en janvier 1961, a
réuni au niveau des chefs d’États l’Égypte, le Ghana, la
Guinée, la Libye, le Mah, le Maroc et le G. P. R. A. ÉUe
a élaboré une Charte africaine formulant une série de
principes pohtiques dans la ligne des conférences précé¬
dentes d’Accra (1958) et d’Addis-Abeba (i960) et
fidèles à l’esprit de la conférence de Bandœng de 1955.
Divers comités, pohtique, économique, culturel et un
haut commandement assurent la coordination des poli¬
tiques et des attitudes. Le groupe demeure peu homo¬
gène et il n’existe pas de contiguité géographique entre
tous les États membres.
On désigne sous le nom de groupe de Monrovia le
regroupement opéré à Monrovia en mai 1961 de tous les
États africains sauf ceux du groupe de Casablanca et
l’Union sud-africaine. L’institutionnahsation demeure
très embryonnaire puisqu’il n’existe qu’une commission
d’experts destinée à assurer une coopération dans de
multiples domaines.
Entre les deux groupes un rapprochement demeure
possible ouvrant la voie au pan africanisme.

525. — L’union Africaine et Malgache. —■ Il s’agit


ici du regroupement d’États africains francophones : Came¬
roun, Congo-Brazzaville, Côte-d’Ivoire, Dahomey, Gabon,
Haute-Volta, Mauritanie, Niger, Répubhque centrafricaine,
Sénégal et Tchad ainsi que Madagascar. Préparée en
décembre 1959 à Brazzaville, la coopération des douze États
francophones s’affirme à la conférence de Yaoundé en m.ars
1961.
Parmi les textes signés à Yaoundé le plus important est le
traité instituant 1’ « Organisation africaine et malgache de
coopération économique » comportant du point de vue insti¬
tutionnel un Conseil où sont représentés tous les États
membres et qui repose sur le principe de l’unanimité, un
Secrétariat général étabh à Yaoundé et plusieurs comités
techniques.
L’Organisation cherche à rapprocher les politiques écono¬
miques et à coordonner les plans de développement. La confé¬
rence de Tananarive, en septembre 1961, a complété l’œuvre
de Yaoundé.
LES ORGANISATIONS AFRICAINES 521

Une organisation de caractère politique est ainsi créée le


7 septembre 1961. L’Union africaine et malgache groupe ainsi
les douze États francophones, renforce leur sohdarité, assure
leur sécurité collective, organise la coopération dans le
domaine extérieur. La politique est définie par la Conférence
des chefs d’État ou de gouvernement qui se réunit au moins
deux fois par an. Le Secrétariat général est étabh à Coto¬
nou. La coopération pohtique est articulée par deux conven¬
tions particuhères. La convention du 8 septembre 1961
concerne la représentation diplomatique, elle prévoit que les
États membres échangeront des représentants permanents
entre eux, qu’une représentation collective sera possible
auprès des États étrangers, mais non de la France, et qu’un
groupe U. A. M. existera à l’O. N. U.
Le Pacte de défense du 9 septembre 1961 ne crée pas une
armée commune mais prévoit la coordination des moyens
de défense. Il établit un Conseil supérieur de défense dont le
siège est à Ouagadougou.
La coopération économique organisée par l’O. A. M. C. E.
se trouve complétée par des organismes techniques spécia¬
lisés, V Union africaine et malgache des postes et télécommu¬
nications (U. A. M. P. T.) dont le siège est à Brazzaville,
l’Union africaine et malgache de banques pour le développe¬
ment, l’Office africain et malgache de la propriété industrielle
dont les sièges sont à Yaoundé.
Un organisme de gestion a été créé dans le domaine des
transports aériens, sous le nom A’Air Afrique, société d’éco¬
nomie mixte groupant les États africains de l’O. A. M. C. E.
(mais pas Madagascar) avec Air France et l’Union aéro¬
maritime de transport.
526. — L’évolution vers L’U. A. M. C. E. — La coopéra¬
tion interafricaine entre les douze États fondateurs de
l’O. A. M. C. E. et de l’U. A. M. auxquels se sont ajoutés
en 1963 le Ruanda et le Togo s’est avérée efficace et les
travaux des organisations ont montré leur utilité.
Mais la création, en mai 1963, à la conférence d’Addis-
Abeba d’une organisation panafricaine devait entraîner une
adaptation des structures de l’U. A. M. pour ne pas limiter
la portée de l’Organisation de l’Unité africaine.
A la conférence de Dakar (8-10 mars 1964) une transfor¬
mation des anciennes structures fut décidée. La nouvelle
union abandonne les préoccupations et la coopération poli¬
tiques pour s’orienter vers les seules questions écono¬
miques, techniques et culturelles. L’U. A. M. disparaît et
l’O. A. M. C. E. devient l’U. A. M. C. E. {Union africaine et
malgache de coopération économique), le Secrétariat est fixé
à Yaoundé, les institutions de la nouvelle organisation sont la
conférence des chefs d’État et de gouvernement et la confé¬
rence des ministres des Affaires étrangères, les organismes
techniques deviennent des départements de l’Organisation.
522 LES AUTRES CONTINENTS

La Charte de l’U. A. M. C. E. ne fut d’ailleurs pas signée


par la Côte-d’Ivoire, le Niger, la République Centrafricaine
et la Haute-Volta.

527. — L’Orgamsation commune africaine et mal¬


gache. — Si la disparition de l’U. A. M. a marqué une
concession aux tendances universalistes pan africaines et
un abandon d’un relatif particularisme d’États africains
francophones ce mouvement a été compensé, en quelque
sorte, par la création à la conférence de Nouakchott
en février 1965 d’une nouvelle union appelée Organisation
commune africaine et malgache.
Elle a groupé les États membres de l’ancienne U. A. M.
sauf le Ruanda qui n’a pas participé à la conférence de
Nouakchott. Le Congo-Léopold ville a été admis comme
membre en mai 1965, mais la Mauritanie s’est retirée en
juillet 1965 de l’Organisation tout en continuant à être
membre des organisations spécialisées.
L’O. C. A. M. a été définie lors de la conférence de
Nouakchott « un regroupement africain qui a pour but,
dans le cadre de V Organisation de l’unité africaine, de ren¬
forcer la coopération et la sohdarité entre les États afri¬
cains et malgache, afin d’accélérer leur développement dans
les domaines politique, économique, social, technique et
culturel ». La Charte de l’O. C. A. M. a été signée à Tana-
narive le 27 juin 1966.
Cette organisation recoupe diverses organisations
spéciaHsées créées antérieurement dans le cadre de
rO. A. M. C. E. puis de l’U. A. M., telles que l’Union afri¬
caine et malgache des postes et télécommunications,
l’Office africain et malgache de la propriété industrielle,
l’Union africaine et malgache de banque pour le dévelop¬
pement et Air Afrique.

§ 3. — Les tentatives panafricaines.

La constitution d’organisations groupant tous les


États africains a été poursuivie postérieurement aux
conférences de Casablanca et de Monrovia de 1961.
L’une des tentatives s’est soldée par un échec, l’autre
a, au contraire, abouti à la création d’une organisation à
vocation panafricaine.

528. — L’Organisation inter africaine et malgache.


— La réunion de Monrovia (mai 1961) avait groupé 21
LES ORGANISATIONS AFRICAINES 523

États africains comptant ensemble une centaine de


millions d’habitants. La conférence avait décidé de
tenir de nouvelles réunions qui eurent heu à Lagos, au
Nigeria, en janvier 1962 au niveau des chefs d'État, en
juin et décembre 1962 au niveau des ministres des
Affaires étrangères.
Au cours de cette dernière réunion fut adoptée la
Charte constitutive de l’Organisation inter africaine et
malgache. Sur le plan institutionnel l’organe suprême
était la conférence des chefs de gouvernement se réu¬
nissant au moins une fois l’an, les résolutions étant
adoptées à la majorité des 4/5, chaque État ayant
une voix. Un Conseil des ministres se réunit deux fois
au moins par an et prépare les résolutions soumises à la
Conférence, il déhbère à la majorité des 2/3. Un Secré¬
taire général est installé à Lagos.
La Charte de Lagos tendait à l’universahsme africain
mais les États du groupe de Casablanca s’étaient abstenus
de répondre à l’invitation qui leur avait été adressée.
Ainsi la Charte n’est-eUe pas entrée en apphcation.

529. — L’Organisation de l’Unité africaine. —


L’idée d’aboutir, en dehors des groupes existants, à un
rapprochement des États indépendants d’Afrique dans
le cadre de l’Unité africaine a été lancée dans les der¬
niers mois de 1962 par le Président de la Répubhque de
Guinée et obtint le patronage d’un Comité pohtique de
sept chefs d’État africains (Congo-Brazzaville, Côte
d’ivoire, Ethiopie, Liberia, Nigeria, Répubhque arabe
unie, Sénégal).
Préparée par une réunion des ministres des Affaires
étrangères, la Conférence au sommet des chefs d’État
africains se tint à Addis-Abeba du 22 au 25 mai 1963. Le
texte constitutif de l’Organisation de l’Unité africaine
(O. U. A.) fut adopté.
On retrouve dans les structures institutionnehes de
l’O. U. A. les solutions africaines d’une Conférence de
chefs d’État et de gouvernement se réunissant une fois
par an, organisme suprême dont les travaux sont pré¬
parés par un Conseil des ministres des Affaires étrangères
se réunissant deux fois par an. Il existe cinq commissions
spéciahsées (questions économiques et sociales, éducation
et culture, santé, hygiène et nutrition, défense, questions
scientifiques, techniques et de la recherche). Une Com¬
mission particuhère, dite de médiation, de concihation
524 LES AUTRES CONTINENTS

et d’arbitrage dont la structure et le fonctionnement


sont définis par un protocole spécial permet le règlement
des différends entre États africains par des voies paci¬
fiques. Un Secrétariat permanent est dirigé par im Secré¬
taire général administratif.
L’O. U. A. regroupe tous les États africains, c’est-à-
dire tous les États du continent africain à l’exception
de la République sud-africaine. Le Maroc et le Togo qui
n’avaient pas participé à la conférence d’Addis-Abeba
en mai 1963 ont signé et ratifié la Charte.
L’universalisme ainsi atteint par l’O. U. A. ne signifie
pas d’ailleurs une parfaite unité de vues sur les divers
problèmes politiques de l’Afrique. L’Organisation n’a pas
toujours réussi à imposer le respect des résolutions et
décisions relatives au boycott du Portugal et de l’Afrique
du Sud. Elle s’est heurtée à de grandes difîicultés à propos
du règlement du problème du Congo-Léopoldvüle. Elle
a pu, au contraire, intervenir utilement dans le conflit
algéro-marocain (oct. igôs-fév.igôq). EUe a constitué un
Comité de coordination pour la hbération de l’Afrique
chargé d’harmoniser les mesures d’assistance des États
africains.

BIBLIOGRAPHIE

Lattre Q. M. de). Organisation africaine et malgache


de coopération économique, Pol. Étr., n° 6, i960, p. 584-
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Decraene (P.), Le panafricanisme. Collection « Que
sais-je? », Paris, 1961; Feuer (G.), Les conférences
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l’épreuve de l’indépendance, Paris, 1965; Dreux-Brèze
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thèse Paris, 1966; Gam (P.), L’O. U. A., R. J. P. I. C.,
1966, p. 295-334; Remusat (Ph.), Le traité d’union écono¬
mique de l’Afrique centrale, R. J. P. I. C., 1965, p. 120. ■—
EUROPE FRANCE OUTREMER, n® 435, avril 1966, L’Afrique
d’expression française et Madagascar, p. 237-245.
CHAPITRE III

LES ORGANISATIONS
DES PACTES D’ASSISTANCE
DU PACIFIQUE

La politique des États-Unis a tenté d’établir, depuis


quelques années, un véritable réseau de pactes dits
d’assistance mutuelle et de sécurité enserrant le monde.
Ces pactes comportent l’existence d’organisations inter¬
nationales destinées à les mettre en œuvre et à en accroître
l’efficacité. L’exemple le plus net de cette institutionna¬
lisation d’un traité est fournie par le Pacte atlantique.
On retrouve, sous une forme très simplifiée d’aiUeurs, des
tentatives analogues dans deux pactes de sécurité dont
la zone géographique est le Pacifique.

530. — Le traité de l’A. N. Z. U. S. — Le premier


est celui conclu entre l’Australie, la Nouvelle-Zélande
et les États-Unis d’Amérique et signé à la veille de la
paix avec le Japon, le septembre 1951, et désigné
généralement sous le nom de traité de l’A. N. Z. U.S.
L’organisation prévue par l’article 7 est très rudimen¬
taire d’ailleurs, ü s’agit d’un Conseü des ministres des
Affaires étrangères ou de leurs représentants. Il doit
être organisé de manière à pouvoir se réunir à tout
moment. Sa première réunion s’est tenue à Honolulu au
début du mois d’août 1952.

531. — L’Organisation du traité de l’Asie du Sud-Est.


— Le second exemple est celui du traité de Manille du
8 septembre 1954 ou traité de défense collective pour
l’Asie du Sud-Est.
PACTES d’assistance DU PACIFIQUE 527

Il s'inscrit dans le cadre des divers pactes nord-amé¬


ricains et avait été imaginé par la diplomatie du Dépar¬
tement d’État après la conférence de Genève et les
accords de juillet 1954 qui ont mis fin aux hostilités
en Indochine.
La zone de protection du traité est l’Asie du Sud-Est
et la région du Pacifique du sud-ouest au sud du paral¬
lèle 21® 30’ de latitude N.
Selon l’article 4 chaque Partie reconnaît qu’une agres¬
sion dans la zone du traité ou contre un État ou terri¬
toire qui serait désigné ultérieurement d’une manière una¬
nime apparaît comme compromettant sa propre sécurité.
Le traité de Manille a été signé par huit Etats, parmi
lesquels seulement trois États asiatiques, le Pakistan,
les Phihppines, la Thaïlande, les autres signataires
étant l’Australie, les États-Unis, la France, la Nouvelle-
Zélande, le Royaume-Uni.
Par im protocole annexe signé le même jour que le
traité, les États signataires ont inclus dans la zone de
défense les États du Cambodge et du Laos ainsi que le
« territoire placé sous la juridiction de l’État du Viet¬
nam », mais le Cambodge et le Laos ont renoncé ulté¬
rieurement à cette garantie.
Les structures institutionnelles sont relativement peu
complexes.
L’article 5 du traité prévoit un Conseil organisé de
manière à pouvoir se réunir à tout moment et composé des
représentants des États membres. La pratique montre
l’existence de deux formules différentes : celle d’une
part d’un Conseil des Ministres des Affaires étrangères
qui se réimit une fois par an dans l’une des huit capitales
intéressées — celle d’autre part d’un Conseil permanent
ayant son siège à Bangkok réunissant les ambassadeurs
des États membres dans la capitale thaïlandaise.
A la première réunion du Conseil, à Bangkok en
février 1955 il fut décidé de créer un Secrétariat per¬
manent à Bangkok et le poste de Secrétaire général fut
confié à un diplomate thaïlandais.
Le Secrétaire général est assisté par un groupe de
conseillers économiques pour la mise en œuvre des plans
de développement.
L’objet du traité demeure essentiellement militaire.
Un office de planification militaire, étabh à Bangkok,
a la charge d’harmoniser l’effort mihtaire et d’étudier les
plans d’éventuelle intervention, sous le contrôle de
528 LES AUTRES CONTINENTS

conseillers militaires d’un caractère non permanent qui


se réunissent une fois par an.
L’O. T. A. S. E. ne saurait, en aucune manière, être
considérée comme un équivalent asiatique de l’O. T. A. N.
Cette différence apparaît d'une manière évidente sur le
plan militaire car il n'y a pas de commandement unique
institué.
L’Organisation n’a pas correspondu aux projets ambi¬
tieux de la chaîne défensive à laquelle John Foster Dulles
attachait tant d’importance, le pacte de Badgad reliant
l’O. T. A. N. et l’O. T. A. S. E.
Le gouvernement français devait, en 1965, se retirer
pratiquement de l’organisation mais la France ne dispo¬
sait, d’ailleurs, dans cette région du monde d’aucune
force, les réalités militaires étant, en dehors des forces
nationales des trois États asiatiques, les forces navales
(VII® flotte) et aériennes des États Unis, la flotte orientale
britannique basée à Singapour et les réserves straté¬
giques du Commonwealth (Australie, Nouvelle-Zélande,
Royaume-Uni) stationnées en Malaisie.

BIBLIOGRAPHIE

Thevit (P.), L’Organisation du traité de l’Asie du Sud-


Est et la Thaïlande, thèse Toulouse, 1959; Muller (G.),
Traité de défense collective pour l’Asie du Sud-Est,
thèse Paris, 1961; XX. —, Ce qu’est l’Organisation de
l’Asie du Sud-Est, Pubhcation de la Documentation
Française, 1963; Evenou, L’O. T. A. S. E. en içôj.
Revue de la défense nationale, juillet 1963, p. 1099-1109;
Tran Tram, Le problème de l’O. T. A. S. E., Revue de
droit international et de science diplomatique, 1964,
n« 2, p. 134-165.
TITRE III

LES ORGANISATIONS SPÉCIAUSÉES

532. — La tendance organisatrice. — Pendant long¬


temps les institutions internationales ont été caracté¬
risées par un double trait ; leur discontinuité, leur carac¬
tère politique. ....
Les organes essentiels des relations internationales
n’avaient ainsi aucun caractère de permanence. Il s’agis¬
sait d’une conférence diplomatique, d’un congrès qui
posait les bases et les principes d’une réglementation
internationale et se dispersait ensuite. Par ailleurs l’objet
des conventions internationales était essentieUement
politique, il concernait l’attribution de territoires, la
fixation des frontières et même les clauses économiques
qui figuraient dans les traités étaient dominées par
l’aspect politique général. ,
Au cours du xix® siècle une transformation se produit.
Les institutions internationales se développent à la suite
de l’évolution technique et du développement économique
des Puissances industrielles. Le monde de la deuxième
moitié du xix® siècle voit ainsi apparaître des institutions
internationales nombreuses qui sont permanentes, dotées
d’organes qui leur sont parfois propres, parfois empruntés
aux États, et leur compétence est d’ordre technique,
scientifique, économique, mais non poHtique.
Ces institutions caractérisent « le temps de 1 adminis¬
tration internationale ». Elles sont créées dans plusieurs
domaines que la science du xix® siècle ou le capitahsme
hbéral ouvre à l’activité de l’homme. Un premier groupe
concerne les communications, ainsi ont leur siège à Berne
l’Union télégraphique internationale (1865), 1 Union
postale universelle (1878), l’Union internationale pour le
transport des marchandises par chemin de fer. D autres
protègent directement l’homme, dans sa santé, comme
rOfiice international de la santé pubhque (1904), l’Office
international d’hygiène (1907), dans son activité intel¬
lectuelle comme l’Union internationale pour la protec-
530 LES ORGANISATIONS SPÉCIALISÉES

tion de la propriété littéraire et artistique (1884). L’acti¬


vité industrielle, qui marque le siècle, entraîne la création
d’autres Unions, ainsi l’Union pour le système métrique
(1875). l’Union pour la protection de la propriété indus¬
trielle (1883). Enfin sur le plan économique les organismes
sont nombreux, relatifs au commerce, ainsi l’Office inter¬
national pour la publication des tarifs douaniers {1890),
1 Office international de statistiques internationales (1913),
ou à l’agriculture comme l’Office international de l’agri¬
culture (1905).
Ces diverses institutions sont appelées Unions adminis¬
tratives. Elles constituent des associations d’États, sont
créées par une convention internationale multilatérale et
généralement ouverte à l’adhésion d’autres Puissances,
eUes sont caractérisées en outre par le fait que leur objet
n’est pas d’ordre politique et par l’existence d’organes
qui leur sont propres. L’un de ces organes joue un rôle
important, car en lui se manifeste la permanence, c’est le
Bureau. Analysant le fonctionnement du Bureau, la
doctrine distingue deux types : dans le type dépendant
le. Bureau est placé sous la direction et le contrôle de
l’Etat sur le territoire duquel il est installé; dans le type
non dépendant le Bureau se trouve entièrement détaché
de l’influence des autorités de l’État où il se trouve
établi.

533. La S. D. N. et les bureaux internationaux.


— Les Unions administratives étaient nombreuses à la
veille de la première guerre mondiale. Le Pacte de la
S. D. N. prévoyait, dans son article 24, une sorte de
remise en ordre des diverses Unions, en décidant que les
bureaux internationaux étabhs par des traités collectifs
devaient être placés sous l’autorité de la Société. Cet
assujettissement jouait complètement pour les bureaux
à créer, mais pour ceux qui existaient déjà il était subor¬
donné à l’assentiment des Parties.
L’article 24 en pratique ne joua presque pas pour les
bureaux existants. Les Unions entendaient garder leur
autonomie et leur aspect particulariste. Par ailleurs, les
Etats-Unis faisaient partie de diverses Unions, notam¬
ment de l’Union postale universelle et, ne faisant pas
partie de la S. D. N., ils étaient opposés à l’intégration des
bureaux dans la S. D. N. Même pour les bureaux d’orga¬
nisations qui furent créées postérieurement, tous ne
relevèrent point de la Société.
LES ORGANISATIONS SPÉCIALISÉES 531

534. — L’O. N. U. et les institutions spécialisées. —


La tendance centralisatrice qu’exprimait l’article 24 du
Pacte se trouve affirmée plus nettement encore dans
l’article 57 de la Charte des Nations Unies. Ce texte
dispose en effet que les diverses institutions spécialisées
créées par accords intergouvemementaux et pourvues,
aux termes de leurs statuts, d’attributions internationales
étendues dans les domaines économique, social, de la
culture intellectuelle et de l’éducation, de la santé
publique et dans d’autres domaines connexes sont reliées
à l’Organisation.
L’article 57 réserve l’appellation d’« Institutions spécia¬
lisées » à ces organisations internationales qui sont reliées
à l’Organisation. On doit noter que les organisations dont
il s’agit sont des organisations intergouvemementales
et les organisations de caractère privé, groupant des
personnes privées, dites organisations non gouvernemen¬
tales (O. N. G.), n’entrent donc pas dans cette catégorie.
L’article 57 pose une autre condition, que les attributions
internationales reconnues à ces organisations intergouver¬
nementales soient étendues. Cette condition a été inter¬
prétée très largement et l’Union postale universelle,
par exemple, est devenue depuis le juillet 1948
une institution spécialisée alors que la coopération
administrative qu’elle établit depuis 1878 se déve¬
loppe sur le plan technique des communications pos-
t3.1cS«
Les conditions dans lesquelles les institutions spéciali¬
sées sont rehées à. l’Organisation sont fixées par des
accords que prévoit l’article 63 de la Charte. Les signa¬
taires de ces accords entre organisations internationales
sont d’une part l’O. N. U., d’autre part l’institution
spécialisée elle-même. Ces accords, dont 1 initiative peut
être prise par l’Institution ou par le Conseil économique
et social, sont approuvés par la conférence générale de
l’institution et par l’Assemblée générale de l’O. N. U.,
sur proposition du Conseil économique et social. Les
accords conclus portent sur divers points, ils instituent
en général une représentation réciproque des deux orga¬
nisations, une reconnaissance réciproque du droit de
proposer des questions à 1 ordre du jour, des échanges de
renseignements, de documents et de rapports, une coordi¬
nation des services statistiques, une obhgation réciproque
de coopération, l’étabUssement déréglés communes concer¬
nant le personnel. Les institutions spécialisées participent
532 LES ORGANISATIONS SPÉCIALISÉES

avec ro. N. U. elle-même à l’administration de l’assis¬


tance technique (V. infra).

535. — L’autonomie des institutions spécialisées.


— Rattachées à l’O. N. U., les institutions spécialisées
en demeurent toutefois distinctes. Elles ne doivent pas
être confondues avec les organes spéciaux de l’O. N. U.
et les organes subsidiaires.
Elles ne groupent pas nécessairement les mêmes États
que les Etats membres de l’O. N. U. et sont tantôt plus
étroites et tantôt plus larges. Le siège des institutions
spéciahsées ne coïncide pas avec le siège de l’O. N. U.
et la proposition formulée par les États-Unis en 1946
de centrahser tous les sièges à New York n’a pas été
retenue devant l’opposition de la France.
Les institutions spéciahsées ont en général une structure
tripartite, du type de celle de l’ancienne Société des
Nations, avec une assemblée ou conférence générale, un
conseil ou comité exécutif qui comporte un nombre
moindre de membres et qui est composé tantôt de repré¬
sentants des États tantôt, moins fréquemment, de per-
sonnahtés choisies pour leur compétence et indépendantes
de leurs gouvernements, enfin un secrétariat ou bureau
permanent composé d’un certain nombre de fonction¬
naires internationaux dirigés par un directeur ou un
secrétaire général.
Les institutions ont leur budget propre voté par leur
assemblée, mais l’article 17, § 3, de la Charte donne com¬
pétence à l’Assemblée générale de l’O. N. U. d’examiner
es budgets administratifs des institutions en vue de
eur adresser des recommandations. De même, sur le
plan de leur activité propre, aux termes de l’article 63,
§ 2, de la Charte, le Conseil économique et social peut
adresser des recommandations aux institutions spéciahsées
et coordonner leurs activités. Sur la base de ce texte le
Conseil économique et social, par une résolution adoptée
à sa troisième session, a créé un Comité administratif de
coordination qui est une conférence des directeurs des
institutions spéciahsées, sous la présidence du secrétaire
général de l’O. N. U. Le Conseil de sécurité, le Conseü
de tutehe (article 91) peuvent recourir à l’assistance des
institutions spéciahsées pour les questions qui relèvent
de leur compétence respective.
L institution spéciahsée peut, à la condition d’y avoir
été préalablement autorisée par l’Assemblée générale
LES ORGANISATIONS SPÉCIALISÉES 533

(article 96, § 2), demander un avis consultatif à la Cour


internationale de justice.
Les institutions spécialisées jouissent de divers privi¬
lèges et immunités octroyées par l’État sur le territoire
duquel elles sont installées, leurs rapports avec cet Etat
sont précisés dans des accords internationaux appelés
accords de siège, dont le plus libéral est l’accord conclu
entre la France et l’U. N. E. S. C. O. le 2 juillet I954-.
L’Assemblée générale depuis 1964 a créé des organisa¬
tions différentes des institutions spécialisées proprement
dites et définies comme des organes de l’Assemblée géné¬
rale fonctionnant comme organisations autonomes dans le
cadre des Nations Unies. C’est le cas de la Conférence des
Nations Unies sur le commerce et le développement (réso¬
lution 1995 XIX du 30 décembre 1964), de l’Organisation
des Nations Unies pour le développement industriel
(résolution 2152 XXI du 22 novembre 1966), du Fonds
d’équipement des Nations Unies (résolution 2186 XXI
du 15 décembre 1966). La construction juridique est
curieuse, ces organismes sont rattachés à l’Assemblée
générale et définis comme des « organes » de celle-ci
mais ne groupent pas nécessairement les seuls membres de
l’O. N. U.

536. — Institutions et organisations spécialisées.


— Les institutions spécialisées, au sens que l’article 57
de la Charte donne à cette expression, ne recouvrent donc
pas l’ensemble des organisations internationales spéciali¬
sées, c’est-à-dire dont la compétence n’est pas pohtique
et qui sont étabhes par une convention internationale.
Le nombre des organisations et des institutions spé¬
cialisées qui exercent actuellement leur activité sur le
plan de l’administration internationale est considérable
et seul un catalogue pourrait en fournir une liste com¬
plète. Il n’entre pas dans le cadre du présent ouvrage de
décrire successivement toutes ces organisations ou insti¬
tutions b Quelques-unes de ces institutions seront pré-

‘ Les Institutions spécialisées, entendues au sens strict du droit des Nations


Unies sont au nombre de treize :
Organisation internationale du Travaii.
Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture.
Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture.
Organisation de l’aviation civile internationale.
Banque internationale pour la reconstruction et le développement.
Fonds monétaire international.
Union postale universelle.
Organisation mondiale de la Santé.
534 LES ORGANISATIONS SPÉCIALISÉES

sentées, en raison de leur importance. On se bornera à


décrire succinctement celles qui concernent le domaine
des communications internationales, base essentielle de
toute coopération, et celles qui concernent directement
l’homme et sa vie.

BIBLIOGRAPHIE

Labeyrie-Menahem (C.), Des institutions spécialisées,


Paris, Pédone, 1953; Beckel (G.), Workshops for the.
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lisées, R. C. A. D. L, 1964.

Union internationale des télécommunications.


Organisation météorologique mondiale.
Société financière internationale.
Organisation intergouvemementale consultative de la navigation maritime.
Association internationale de développement.
L’Agence internationale pour l’énergie atomique bien que reliée à l’O. N. U.
n’a pas exactement le statut d’institution spécialisée.
Une institution spécialisée a disparu, l’Organisation internationale pour les
réfugiés, remplacée en 1959 par le Haut Commissariat des Nations Unies pour
les réfugiés.
L’organisation internationale du commerce prévue par la Charte de la Havane
(non entrée en vigueur) n’a pas été créée.
CHAPITRE PREMIER

LES INSTITUnONS SPÉCIAUSÉES


DU DOMAINE DES COMMUNICATIONS

Dans le domaine des communications internationales


qui permettent aux hommes d’établir entre eux des
relations, s’exerce l’activité de trois institutions spéciali¬
sées particulièrement importantes, TUnion postale uni¬
verselle, l’Union internationale des télécommunications,
l’Organisation de l’aviation civile internationale.

Section I. — L’Union postale universelle.

537. — La poste au point de vue international. — Définie


comme un service de transports des correspondances, la
poste a existé depuis très longtemps, elle est aussi vieille
que l’écriture et même antérieure parce que les messages
oraux peuvent être transmis. Mais l’organisation régulière
d’un service postal tel que nous le connaissons, meme à
l’intérieur des États, ne remonte pas au delà du xix® siècle.
Sur le plan international des échanges postaux ont existé,
à titre sporadique, par exemple en Europe au xvii® siècle,
mais c’est avec le développement des voies et des moyens
de communication qu’est apparue, au xix® siecle, pour les
États la nécessité de conclure des conventions pour régler
les relations de leurs administrations postales.
Ces conventions réglaient le problème de la fixation de la
taxe, la question de savoir qui l’acquitterait, de l’expéditeur
ou du destinataire, et fixaient dans quelle proportion la
taxe serait attribuée aux deux offices qui coopéraient au
transport. Elles ont été d’abord bilatérales et établissaient
des systèmes multiples et différents. L’utilisation en Angle-
536 LES ORGANISATIONS SPÉCIALISÉES

terre, à partir de 1840, du timbre-poste, qui devait être


adopté par les autres pays successivement (en France en
1848), a fourni un moyen très pratique pour le paiement
de l’affranchissement de la correspondance et entraîné un
accroissement considérable du volume du courrier national
et international. Les conventions bilatérales sont apparues
insuffisantes et aboutissant à des systèmes compliqués et
différents, une solution plus générale fut envisagée.

538. — Vers l’organisatioD internationale. — En 1863 se


réunit à Paris (ii mai-8 juin), sur la proposition du direc¬
teur général des Postes des États-Unis, la première conférence
internationale postale qui groupait 15 États et qui aboutit
à énoncer des principes généraux « de nature à facüiter les
relations de peuple à peuple par la voie de la poste et pou¬
vant servir de base aux conventions internationales destinées
à régler ces relations ». Ces principes toutefois demeuraient
non obligatoires et étaient simplement destinés à fournir
des éléments pour une réglementation générale à inter¬
venir.
Dans le cadre des États allemands une telle réglementa¬
tion avait été adoptée dès 1850 et réunissait 16 administra¬
tions différentes, et la Prusse, au nom du Norddeutscher Bund,
des négociations avec d’autres États européens
en 1869. Interrompue par la guerre de 1870, la tentative
allemande fut reprise en 1873 mais, pour éviter au départ
diverses difficultés internationales, c’est le Gouvernement
helvétique qui convoqua une conférence internationale à
Berne. Primitivement fixée en 1873, la conférence se réunit
le I s septembre 1874, elle comprenait les délégués de tous
les États de l’Europe, de l’Égjqite, et des États-Unis. Le
9 octobre 1874, les 22 plénipotentiaires signaient un «Traité
concernant la création d’une Union générale des postes »
dont l’entrée en vigueur, après ratification, était fixée au
1” juillet 1875. Au congrès de Paris de 1878 le nom de
l’organisation fut changé et on adopta la terminologie
d’Union postale universelle, qui a été conservée.
Depuis 10 congrès postaux ont été tenus, dont le dernier
en date est le congrès de Paris (7 mai-7 juillet 1947). Alors
que 33 États avaient signé l’acte de 1878 constituant l’Union
postale universelle, 88 offices postaux ont adhéré à l’acte
de Paris en 1947. L’Union groupe la quasi-totalité des
États du globe.
Devenue à partir du ler juillet 1948 une institution spé¬
cialisée de l’O. N. U., l’Union postale universelle (U. P. U.)
a célébré en 1949 son soixante-quinzième anniversaire.

539. — Structure de l’Union. — La structure de


rUnion postale universelle a été jusqu’au Congrès de
Paris de 1947 particulièrement simple, comportant
DOMAINE DES COMMUNICATIONS 537

seulement deux organes, le Congrès postal, assemblée


générale des Membres qui se réunissait à d’assez longs
intervalles, quatre, cinq ou six ans, disposant d’un pou¬
voir « législatif » et le Bureau. Le Bureau international
de l’Union postale universelle constituait un office central,
placé sous la haute surveillance de l’Administration des
postes suisses et installé à Berne. Ce Bureau servait d’or¬
gane de liaison, d’information et de consultation aux
pays de l’Union. Il est chargé d’un rôle préparatoire
en matière de modification des actes du Congrès, de
diffuser des renseignements et éventuellement d’émettre,
à la demande des Parties, un avis sur des questions hti-
gieuses. Il sert d’office de compensation dans la liqui¬
dation des comptes relatifs au service postal international.
Ces deux organismes, le Congrès postal universel et le
Bureau, ont été maintenus par la Convention de Paris de
1947 et les conventions suivantes (Ottawa 1957» Vienne
1964), mais d’autres organes ont été institués. Le Congrès
de 1947 a ainsi créé une commission chargée de contrôler
le Bureau, de donner des avis consultatifs et de pré¬
senter des recommandations au Congrès. Institué sous
le nom de Commission exécutive et de haison cet organe
est devenu ultérieurement le Conseil exécutif, dont le
nombre des membres qui sont élus pour la période qui
sépare deux Congrès, avec un principe très strict de rota¬
tion, sur la base d’une représentation géographique est,
depuis 1964, de 27.
L’U. P. U. comporte également un autre conseil, la
Commission consultative des études postales qui effectue
des études sur les questions techniques et économiques du
service postal et dont les travaux sont dirigés par un
Conseil de gestion de 26 membres.
Les dépenses de l’Organisation sont supportées par
les États membres qui sont répartis à cet effet en
7 classes déterminant une proportion contributive.
L’U. P. U. est une organisation qui groupe vérita¬
blement tous les États, elle comporte actuellement
129 membres.

Section IL — L’Union internationale


des télécommnnications.

540. — L’Union télégraphique internationale. — La télé-


graphie électrique se substituant à la télégraphie aérienne
538 LES ORGANISATIONS SPÉCIALISÉES

optique vers 1840, il apparut tout de suite que le nouvel


instrument de cominunication ne tenant pas compte de
la distance, il n’y avait pas Heu d’en restreindre l’appUcation
dans les Umites d un Etat déterminé. Les caractéristiques
techniques favorisaient ainsi l’étahMssement d’un régime
international. Ainsi doit-on expHquer la rapidité avec
laquelle la télégraphie électrique, à peine utiUsée en pratique,
fait l’objet de conventions internationales.
Dès le 20 juillet 1850 la Prusse forme avec l’Autriche,
la Bavière et la Saxe une Union télégraphique austro-
allemande à laquelle se joignent les autres États allemands
et les Pays-Bas. Cinq ans plus tard, par une convention
du 29 décembre 1855, les États de l’Europe occidentale, la
Belgique, l’Espagne, la France, le Portugal et la Suisse,
établirent une Union télégraphique de TEurope occidentale,
et déjà des conventions bilatérales lient entre elles la France,
la Belgique, la Prusse, d’autres sont conclues entre divers
Etats. Pour assurer une unification des diverses règles et
améliorer ainsi les conditions de fonctionnement du ser¬
vice télégraphique international, le Gouvernement français
invita les gouvernements européens à se faire représenter
à une conféréence télégraphique. Elle se réunit à Paris le
ler mars 1865 et groupe 20 États. Elle aboutit à la signature,
le 17 mai 1865, d’une convention télégraphique portant
création de l’Union télégraphique internationale qu’a pré-
cédée un règlement de service international signé le ii avril.
A la première conférence de l’Union, tenue à Vienne eii
1868, la convention fut modifiée et l’innovation la plus
marquante fut 1 étabüssement d’un Bureau international
qui servirait d’organe central et assurerait l’unité du ser¬
vice. Le Bureau fonctionne depuis le i^r janvier 1869, il
est installé à Berne. Il est chargé de réunir, coordonner et
publier les renseignements, d’instruire les demandes de
modifications aux règlements de service et aux tarifs de
faire promulguer les changements adoptés.
Dans le cadre de 1 Union se tinrent des conférences suc¬
cessives, à Rome en 1871 où siège la Grande-Bretagne, à
Saint-Pétersbourg en 1875, à Londres en 1879, à BerHn
en 1885 où l’on incorpore dans le traité des dispositions
concernant le service téléphonique international.

■ L’Union radiotélégraphique internationale. — Le


progrès technique se manifestait à la fin du xix® siècle par
la découverte et 1 utilisation des ondes hertziennes, l’emploi
de l’antenne permettant des communications à très grande
distance. La télégraphie sans fil était née. Elle pouvait être
utilisée pour relier entre elles des stations fort lointaines
ou une station fixe à une station mobile comme un navire
en mer. La radiotélégraphie était donc, de sa nature, des¬
tinée à une utilisation internationale.
Dès l’année 1903 le Gouvernement aUemand réunit une
DOMAINE DES COMMUNICATIONS 539
conférence internationale préparatoire qui se tint à Berlin
du 4 au 13 août et groupa l'Allemagne, l’Autriche, l’Espagne,
les États-Unis, la France, la Grande-Bretagne, la Hongrie,
l’Italie et la Russie. Cette réunion ne fut qu’une réunion
d’études qui se borna essentiellement à poser les divers pro¬
blèmes.
Une deuxième conférence se réunit à nouveau à Berlin le
30 octobre 1906; 27 nations y prenaient part.
Elle créa une Union radiotélégraphique internationale dont
le bureau fut commun avec celui de l’Union télégraphique
internationale établi à Berne.

542. — L’Union internationale des télécommunica¬


tions. — Le développement des communications télé-
grapWques et téléphoniques, tant par fil que sans fil,
entraîna une fusion entre les deux Unions administra¬
tives internationales créées en 1865 et en 1906. A la
conférence de Madrid de 1932 fut créée, par une conven¬
tion du 9 décembre, l’Union internationale des télécom¬
munications avec un bureau centréd à Berne et la nouvelle
formule entra en vigueur le i®’' janvier 1934. La conférence
du Caire a établi en 1938 un règlement international des
radiocommunications.
Après la seconde guerre mondiale, les perfectionne¬
ments techniques et les changements de caractère poli¬
tique entraînèrent des modifications qui furent adoptées
à la conférence d’Atlantic City en 1947.
Une nouvelle convention internationale fut adoptée
par les plénipotentiaires, elle transforma profondément
l’Union en créant de nouveaux organes permanents.
L’Union internationale des télécommunications ainsi réor¬
ganisée est devenue une institution spéciahsée. En mênie
temps que la conférence pohtique se tenait à Atlantic
City, une conférence de caractère purement technique
dite Conférence des radiocommunications était chargée
d’établir une nouvelle répartition des fréquences. Deux
ans plus tard, à Paris, une autre conférence télégraphique
et téléphonique adaptait le règlement du Caire aux per¬
fectionnements techniques modernes.
Sur le plan général une nouvelle conférence s’est tenue
à Buenos-Aires et a adopté le 22 décembre 1952 une
nouvelle convention internationale des télécommunica¬
tions qui constitue le droit positif actuel de l’Union.
Celle-ci groupe 129 membres, mais on distingue, les
membres ordinaires et les membres associés. Tout Etat
non membre de l’U. I. T. peut être admis comme membre
540 LES ORGANISATIONS SPÉCIALISÉES

associé, de même que tout territoire sous tutelle, tout


territoire ou groupe de territoires n’ayant pas l’entière
responsabilité de ses relations internationales. Le membre
associé a les mêmes droits et obligations que les autres
membres, sous réserve qu’il ne dispose pas du droit de
vote dans les conférences et autres organismes de l’Union
et ne peut non plus être élu dans les organismes dont les
membres sont désignés par les conférences.

543. — Structure de l’Union. — Avant 1947 les


organes de l’U. I. T. étaient peu nombreux. Il y avait
une Conférence de plénipotentiaires se réunissant généra¬
lement tous les cinq ans et pouvant réviser la convention,
un Bureau qui était l’organe administratif, enfin des
conférences administratives de caractère technique révi¬
saient les règlements relatifs aux télécommunications.
La structure est devenue plus complexe avec la conven¬
tion de 1947 et celle de 1952. L’organisation de l’Union
repose sur deux séries de conférences et 6 organismes
permanents, installés à Genève, nouveau siège de l’Union.
La Conférence de plénipotentiaires est l’organe suprême.
Elle se réunit normalement tous les cinq ans. Elle est
cornposée de tous les membres, vote le budget, fixe le
traitement de tous les fonctionnaires, élit les membres
du Conseil d’administration, examine le rapport d’activité
présenté par celui-ci, conclut ou révise les accords avec
les autres organisations internationales, révise éventuelle¬
ment la convention et traite toutes les questions de télé¬
communications jugées nécessaires.
Les Conférences administratives se réunissent en même
ternps que la Conférence de plénipotentiaires. Elles
révisent les règlements des télécommunications, télégra¬
phique, téléphonique, des radiocommunications. La
conférence administrative ordinaire des radiocommuni¬
cations élit les membres du Comité international des
fréquences et apprécie les activités de cet organisme.
Des conférences administratives extraordinaires et des
conférences spéciales peuvent être convoquées.
Le Conseil d‘administration est un organe permanent
qui a été créé en 1947- U est composé de 29 membres de
1 Union élus par la Conférence de plénipotentiaires en
tenant compte de la nécessité d’une représentation équi¬
table de toutes les parties du monde. Ils sont en fonction
entre la conférence qui les a élus et la suivante, ils sont
rééligibles. Le Conseil se réunit une fois par an, il peut
DOMAINE DES COMMUNICATIONS 54I

être convoqué en session extraordinaire. Il assure une


coordination efi&cace de toutes les activités de TUnion,
nomme le secrétaire général et les deux secrétaires géné¬
raux adjoints, établit tous les règlements administratifs,
examine et arrête le budget annuel, fixe les traitements et
indemnités du personnel, convoque les conférences.
Le Secrétariat général installé à Genève a succédé
à l’ancien Bureau é^tabli à Berne, il a un caractère essen¬
tiellement international.

544. — Les comités. — L’Union internationale des


télécommunications comporte en outre 3 comités.
Le Comité international d’enregistrement des fré¬
quences est un organisme composé de techniciens des
radiocommunications, tous ressortissants de pays dif¬
férents membres de l’Union, élus par la Conférence
administrative ordinaire des radiocommunications et
désignant chacun un de leurs ressortissants pour siéger.
Les membres du Comité s’acquittent de leur tâche non
comme des représentants de leurs pays respectifs ou
d’une région, mais comme des agents impartiaux investis
d’un mandat international. Ce Comité effectue l’inscrip¬
tion des assignations de fréquence, il fournit des avis aux
membres de l’Union en vue de l’exploitation d’un nombre
aussi grand que possible de voies radioélectriques dans
les régions du spectre des fréquences où des brouillages
nuisibles peuvent se produire. Le Comité apparaît ainsi
comme un organe dont le rôle est particuhèrement impor¬
tant et sa structure est curieuse par la présence de
techniciens indépendants de leurs gouvernements, véri¬
tables agents internationaux.
Il existe enfin deux comités consultatifs internationaux,
l’un dit télégraphique et téléphonique, le second des
radiocommunications. Ils sont chargés d’émettre des
avis sur des questions techniques, d’exploitation et de
tarification concernant chacun de ces domaines. Ils ont
pour membres les administrations de tous les Membres
et Membres associés de l’Union et, sous réserve de l’appro¬
bation des États membres, toute exploitation privée
reconnue qui demande à participer. Chaque comité com¬
porte, à son tour, plusieurs organes : une conférence plé¬
nière, un directeur, un secrétariat spéciahsé, des commis¬
sions d’études, des laboratoires techniques. Leur structure
est donc également fort remarquable et la présence de
représentants d’entreprises purement privées, comme le
542 LES ORGANISATIONS SPÉCIALISÉES

caractère technique et l’existence possible de laboratoires


leur confèrent un aspect particulier parmi les organismes
internationaux.

Section III. — L’Organisation de l’aviation


civile internationale.

545. — La Convention de 1919, — L’avion, par sa vitesse,


pose immédiatement le problème de l’utüisation de l’espace
aérien s’étendant au-dessus du sol de plusieurs États et
d'une réglementation dépourvue d’entraves établie par une
organisation internationale. La nécessité apparaît donc d’une
réglementation juridique qui ne paralyse pas le transport
aérien. Elle ne saurait être établie que par une organisation
internationale. La première conférence internationale rela¬
tive à l’aviation se tint à Paris aux mois de mai et juin 1910.
Elle groupait 19 États mais ne put aboutir.
Au cours de la guerre, l’aviation fit des progrès considé¬
rables sur le plan technique, et la nécessité d’une organisa¬
tion internationale apparut comme absolument impérative
une fois les hostilités suspendues. Lors de la Conférence
de la paix, une commission particulière, dite de l’aéronau¬
tique, fut chargée d’étudier le problème. Cette commission
qui comprenait deux représentants de chacune des princi¬
pales Puissances et un pour la Belgique, le Brésil, Cuba,
la Grèce, le Portugal, la Roumanie, la Serbie, la Croatie-
Slovénie, adopta divers principes et élabora un projet de
convention internationale qui fut signée à Paris le 13 oc¬
tobre 1919 et porta le nom de Convention de Paris. Elle
étabhssait entre les signataires une « Union aérienne ».
L’organe caractéristique de cette Union était la Commis¬
sion internationale de la navigation aérienne ou C. I. N. A.
Dotée du pouvoir législatif dans le domaine de la réglemen¬
tation technique contenue dans les annexes à la convention,
chargée de proposer aux États des projets de modification
de la convention elle-même, la C. I. N. A. était une institu¬
tion internationale particulièrement évoluée, statuant non
pas selon la règle de l’unanimité mais à la majorité. Elle était
composée des représentants des États signataires mais,
dans la version de 1919 de l’article 34 de la convention, les
grandes Puissances y avaient la majorité par suite de l’exis¬
tence d’un vote pondéré en leur faveur. Un protocole du
27 juin 1923 établit l’égahté des voix en conservant simple¬
ment un privilège pour les grandes Puissances en matière
de modification. Un second protocole du ii décembre 1929,
entré en vigueur le 17 mai 1933, étabüt une égalité absolue
des membres dans tous les domaines.
D’autres conventions aériennes furent signées, ainsi la
convention ibéro-américaine de 1926 et la convention pana-
DOMAINE DES COMMUNICATIONS 543
méricaine de navigation aérienne qui, après la conférence
de La Havane de 1928, liait les États-Unis, non signataires
de la Convention de Paris, à 10 États américains. Cette
convention ne comportait pas d’organisme comparable à la
C. I. N. A. Mais l’existence de trois régimes juridiques dif¬
férents demeurait un obstacle au développement de l’avia¬
tion civile malgré des tentatives de coordination.

546. — La conférence de Chicago. — La seconde


guerre mondiale entraîna un développement extraordi¬
naire des moyens de transport aérien. Les vols transocéa¬
niques devinrent courants et cessèrent d’être des exploits
sportifs. Pour permettre l’utilisation en temps de paix
des progrès techniques que la guerre avait favorisés et
accélérés, une conférence a siégé à Chicago, du novembre
au 7 décembre 1944, au cours même de la guerre, réunis¬
sant 52 États, mais l’U. R. S. S. n’y assista pas.
La Convention de Chicago qui a posé le principe de la
reconnaissance, sous diverses conditions d’ailleurs, des
Hbertés de l’air, a créé une organisation internationale
destinée à stimuler le développement des transports
aériens.
Cette organisation entra en fonctionnement le 4 avril
1947. Elle avait été précédée par une organisation tem¬
poraire dite Organisation provisoire de l’aviation civile
internationale en service dès le mois d’août 1945.
L’Organisation de l'aviation civile internationale
(O. A. C. I.), en vertu d’un accord ratifié le 14 décembre
1946 par l'Assemblée générale de l’O. N. U. et le 13 mai
1947 par l’Assemblée de l’O. A. C. I., est devenue une
institution spécialisée. Elle a son siège à Montréal.

547. — Structure de l’O.A.C.I. — Les organes prin¬


cipaux de l’Organisation sont l'Assemblée, le Conseil,
le Secrétariat général et la Commission de la navigation
aérienne.
L'Assemblée se cçmpose des représentants des États
membres, chaque État disposant d’une voix. Elle se
réunit au moins une fois tous les trois ans mais peut être
convoquée en session extraordinaire. Sauf stipulation
expresse contraire, elle prend ses décisions à la majo¬
rité des voix exprimées.
L’Assemblée détermine ses propres règles de procédure,
éht à chaque session son Président, éht les États qui sont
représentés au Conseil. En matière financière elle vote le
budget, vérifie les dépenses, approuve les comptes de
544 les organisations spécialisées

l’Organisation. Elle peut proposer à la ratification des


États des amendements à la convention qu’elle a adoptés
à la majorité des deux tiers.
Le Conseil est un organisme permanent relevant de
l’Assemblée, ses membres sont élus par elle pour trois ans.
Il était composé initialement de 21 membres alors que
l’Organisation comptait 39 membres, ü a été porté à
27 membres en 1961, le nombre des États faisant partie
de l’Organisation étant alors de 90 (il est de ni au
mars 1967 et l’U. R. S. S. a demandé son admission).
En élisant les membres du Conseil l’Assemblée donnera
une représentation appropriée : 1° aux États d’impor¬
tance majeure en matière de transport aérien; 2° aux
États non représentés par ailleurs qui contribuent le plus
aux facilités pour la navigation aérienne internationale;
30 aux États non représentés par ailleurs dont la nomina¬
tion assurera la représentation au Conseil de toutes les
principales régions géographiques du monde.
Le Conseil est composé de représentants des États,
aucun des délégués au Conseil ne peut avoir une part
active ou des intérêts financiers dans l’exploitation d’un
service aérien international. Le Conseil élit son Président,
il ne le choisit pas nécessairement parmi ses membres.
Si l’un des membres du Conseil est désigné cçmme prési¬
dent, sa place en tant que représentant d’un État devient
vacante et il est remplacé en cette qualité. Le président
du Conseil apparaît donc comme un agent international,
il n’a pas le droit de vote, il est élu pour trois ans et
rééligible.
Le Conseil prend ses décisions à la majorité, il nomme le
secrétaire général, administre les finances, exécute les
décisions de l’assemblée, il dispose d’un pouvoir légis¬
latif en ce qui concerne les annexes techniques de la
convention, publie tous renseignements relatifs aux
progrès des services aériens internationaux. Il nomme un
comité du Transport aérien composé de représentants des
membres du Conseil, il institue une Commission de la
navigation aérienne.
Le Conseil est doté également de la compétence juri¬
dictionnelle. Dans le cas où un désaccord apparaît entre
deux ou plusieurs États contractants relatif à l’interpré¬
tation ou à l’application de la convention ou de ses
annexes et ne peut être réglé par voie de négociations, le
Conseil peut statuer à la demande de l’un des États
impliqués dans l’affaire. Appel de sa décision pourra être
DOMAINE DES COMMUNICATIONS 545

porté devant un tribunal arbitral ad hoc ou devant la


Cour internationale de justice.

548. — La Commission de la navigation aérienne.


— Nombreux sont les problèmes relatifs à l’organisation
de l'aviation civile internationale qui ont un caractère
essentiellement technique. C’est pour traiter de ces pro¬
blèmes que la Convention de Chicago a institué une Com¬
mission de la navigation aérienne. Elle est composée de
douze membres nommés par le Conseil parmi les personnes
désignées par les États contractants. Elles doivent possé¬
der la compétence et l’expérience convenables en ce qui
concerne la science et la pratique des questions aéronau¬
tiques. Le président de la Commission est nommé par le
Conseil. La Commission est chargée de préparer les
modifications à apporter aux annexes techniques de la
convention et d’en recommander l’adoption au Conseil,
d’instituer éventuellement des sous-commissions tech¬
niques auxquelles tout État membre pourra être repré¬
senté, enfin de donner au Conseü des avis sur la centrali¬
sation et la communication aux États des renseignements
utiles au progrès de la navigation aérienne.

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Postale Universelle, thèse Paris, 1959; El Rahi (M.),
La poste aérienne dans le cadre de l’Union Postale Uni¬
verselle, thèse Paris, 1964.

II. — L’Union Internationale des Télécommunications.

Tomlinson (J.D.), The international control of radiocom¬


munications, thèse Genève, 1938; Codding (G. A.), The
18. — rNSTITÜTIONS INTERNATIONALES.
546 LES ORGANISATIONS SPÉCIALISÉES

International Télécommunications Union, an experiment in


international coopération, Leyde, 1952 J Krause (G. B.),
Der internationale Fernmeldeverein, Berlin, éditions Metz-
ner, i960.
Voir le Journal des Télécommunications.

III. — L’Organisation de l’Aviation Civile Internationale.

Jennings (R. Y.), Some aspects of the international law


of the air, R. C. A. D. I., 1949, vol. 75; Haguenau (D.),
Les formes de la collaboration internationale dans le trans¬
port aérien. Revue française de droit aérien, 1954, p. 345-
379; Mankiewicz (R. H.), Le rôle du Conseil de l’Ù.A.C.I.
comme administrateur des services de navigation
aérienne. Revue française de droit aérien, I954. P; 223
et s.; ScHENKMANN (J.), International Civil Aviation
Organization, Genève, 1955; Mankiewicz (R. H.), L’Or¬
ganisation de l’Aviation Civile Internationale, A. F. D. I.,
1956, p. 643-666; Mankiewicz (R. H.), L’Organisation
de l’Aviation Civile Internationale, pouvoirs judiciaires
du Conseil, A. F. D. I., 1957, p. 383-417; Sheffy, La
Commission de navigation aérienne de l’O. A. C. /., Jour¬
nal of air law and commerce, 1958, p. 281-328 et 428-443;
Mankiewicz (R. H.), Mode d’élection et composition du
Conseil, interprétation de l’article 50 de la Convention
de Chicago, A. F. D. I., 1959, p. 549-568; Pépin, L’Or¬
ganisation de l’Aviation Civile Internationale, Cours de
l’Institut des Hautes Études Internationales de Paris,
1959-1960; Bin Cheng, The law of international air
transport, Stevens, Londres, 1962. (Toute la première
partie de cet ouvrage contient d’excédents commentaires
sur la convention de Chicago.); Pépin (G.), Le Conseille
l’O.A.C.I., thèse Bordeaux, 1962; Mankiewicz (R. H.),
O. A. C. I. Questions constitutionnelles, A. F. D. I., 1962,
p. 675-684; Mankiewicz (R. H.), L’O. A. C. travaux
de la quinzième session de VAssemblée, A. F. D. I., 1965,
p. 630-648; Manin (Aleth) Le pouvoir de décision
de l’O. A. C. I., thèse Paris, 1967.
CHAPITRE II

LES INSTITUnONS SPÉCIAUSÉES


CONCERNANT LA PROTECTION
DE L’ÊTRE HUMAIN

Trois institutions spécialisées sont destinées à assurer


la protection des êtres humains. Il s’agit de l’Organisation
internationale du Travail, de l’Organisation mondiale
de la Santé, de l’Organisation des Nations unies pour
l’éducation, la science et la culture.

Section I. — L’Organisation internationale


du travail (O. I. T.).

549. — La protection des travailleurs. — Le problème


d'une protection légale des travailleurs s’est posé dès les
origines de la grande industrie et l’apparition de la phase
dite de la « fabrique », en raison des déplorables conditions
de travail et d’hygiène. L’exploitation humaine révolte la
conscience des hommes justes, et dans les pays industriels
des lois internes souvent timides, parfois d’ailleurs mal
appHquées, sont adoptées. En raison de l’âpreté de la concur¬
rence entre les diverses industries et les pays, il apparaît
qu,une protection véritablement efficace ne peut être atteinte
que sur le plan d’une réglementation internationale.
Cette protection avait déjà été réclamée par Robert Owen,
le grand réformateur social britannique et formulée par lui
dans deux mémoires très courts présentés l’un à la diète
germanique, l’autre au congrès d’Aix-la-Chapelle en i8i8,
par l’intermédiaire de Lord Castlereagh. Considérée par les
diplomates comme émanant d’un illuminé, cette tentative
548 LES ORGANISATIONS SPÉCIALISÉES

n’eut aucune suite. L’idée de la protection internationale fut


reprise ultérieurement par un industriel français, l’Alsacien
Daniel Le Grand, à propos de la discussion de la loi du
22 mars 1841 et il multiplia ensuite les lettres, mémoires,
requêtes aux gouvernements, aux chefs d’État, aux congrès
internationaux. Sans avoir été adoptée, l’idée du moins ne
devait plus être abandonnée.
Près de quarante ans plus tard une motion présentée au
Conseil national suisse par un de ses membres, le colo¬
nel Frey, devait être prise en considération le 20 avril 1881,
et le Conseil fédéral entama des négociations avec divers
gouvernements pour la réunion d’une conférence internatio¬
nale. Cette tentative échoua, mais elle fut reprise par une
invitation formelle du 15 mars 1889 et une conférence devait
se réunir en Suisse le 5 mai 1890.
Mais auparavant, le 5 février 1890, l’empereur Guil¬
laume II confisquait en quelque sorte l’idée et proposait la
réunion d’une conférence. La Suisse renonça à son projet et
la première conférence internationale sur ces problèmes se
tint à Berlin à partir du 15 mars 1890. Elle groupait
douze États européens représentés non seulement par des
diplomates et des hommes d’État mais aussi des techniciens,
un ouvrier, un industriel. La conférence se borna à émettre
des vœux et à formuler ainsi une sorte d’éthique pour les
législateurs des divers pays, formulant des recommandations
sur le repos hebdomadaire, le travail des enfants, le travail
des adolescents, le travail des femmes, le travail dans les
mines, l’inspection du travail.

550. — L’Association internationale. — Parallèlement se


poursuivit l’action des associations privées. En 1897 se
tiennent à Zurich au mois d’août et à Bruxelles au mois de
septembre deux congrès internationaux groupant des délé¬
gués d’associations ouvrières et des économistes. A l’issue
du congrès de Bruxelles il est décidé de créer une association
qui est fondée en 1900 au congrès de législation du travail
de Paris et définitivement constituée à Bâle en 1901 sous le
nom à.’Association internationale pour la protection légale des
travailleurs. Groupant quatorze sections nationales, elle avait
pour but de faire étudier certains problèmes de la protection
des travailleurs par ses sections et de préparer des projets
de convention sur lesquels l’assentiment général était acquis.
Elle jouait donc le rôle d’organisme de préparation de
conventions internationales. L’avant-projet mis au point par
l’Association devait être adressé au Conseil fédéral suisse qui
convoquait alors une conférence intergouvemementale.
Cette procédure fut appüquée pour la première fois en 1905
avec la convocation d’une conférence préparatoire composée
d’experts et de techniciens, et qui adopta des projets de
convention sur l’emploi du phosphore blanc dans l’industrie
LA PROTECTION DE l’ÊTRE HUMAIN 549

des allumettes et l’interdiction du travail de nuit des femmes


dans l’industrie. Une seconde conférence, diplomatique cette
fois, fut réunie à Berne du 17 au 26 septembre 1906, elle
adopta les deux conventions qui furent ratifiées successi¬
vement par les États signataires, à peu près immédiatement
pour la seconde, au bout de quelques années pour la pre¬
mière. Deux autres conventions furent préparées de la même
manière en 1913 et devaient faire l’objet, en septembre 1914,
d’une conférence diplomatique qui ne put se réunir à cause
de la guerre européenne.

551. — La Conférence de la paix. — L’idée que la


future Conférence de la paix devait se préoccuper de
la protection des travailleurs fut émise au cours même
de la guerre par diverses organisations ouvrières, ainsi la
Fédération américaine du Travail en septembre 1914. la
C. G. T. française en 1915, la Conférence syndicaliste
interalliée de Leeds de juillet 1916. Le 25 janvier 1919, la
Conférence des préliminaires de paix décida de nommer
une « Commission de législation internationale du tra¬
vail » qui avait pour mission d’étudier la protection du
travail et la création d’une institution permanente rat¬
tachée à la S. D. N.
Composée de 15 membres, à raison de 2 délégués
pour chacune des 5 principales Puissances alhées et asso¬
ciées et de 5 pour l’ensemble des 21 Puissances à intérêts
limités, qui éhrent 2 délégués belges, i cubain, i polo¬
nais, I tchécoslovaque, la Commission présenta à la
Conférence de la paix un projet de création d’un organisme
permanent et une série de clauses relatives à la pohtique
à suivre en matière de travail par les États contrac¬
tants.
L’ensemble des textes fut adopté, sans grand change¬
ment, et devint la partie XIII du traité de Versailles,
articles 387 à 427, sous le simple titre de Travail. La
première section était intitulée Organisation permanente
du Travail, articles 387 à 426, précédés d’un préambule;
la seconde limitée à l’article 427 était intitulée Principes
généraux.

552. “ L’Organisation internationale du Travail et la


S.D.N. — L’Organisation internationale du Travail était
une institution internationale étroitement rattachée à
la S. D. N. Dans l’ordre financier par exemple le budget
de l’Organisation, préparé par le Conseil d’administra¬
tion, était incorporé dans le budget général voté par
550 LES ORGANISATIONS SPÉCIALISÉES

l’Assemblée de la S. D. N. Dans l’ordre administratif il


existait aussi une liaison très serrée.
Toutefois la qualité de membre de la S. D. N. n’était
pas re(juise pour être membre de l’0.1. T, Certains États
qui quittèrent la S. D. N. continuèrent à faire partie de
rO. I. T., ainsi le Brésil, Haïti, le Pérou, la Chine, le
Venezuela et la Hongrie. Les États-Unis sont entrés à
rO. I. T. en 1934.
L’Organisation mtemationale du Travail avait montré,
en 1939, sa \dtalité et son importance puisqu’elle avait
élaboré en 20 ans plus de 50 conventions internationales
entrées en vigueur. Elle devait survivre à l’éclipse de la
S. D. N. Le Bureau international du Travaü quittait
l’Europe en 1940 et ses installations de Genève pour se
réfugier à Montréal. La tenue à Philadelphie, en avril et
mai 1944, de la 26® session de la Conférence générale
marquait la continuité avec les 25 premières tenues en
Europe et posait le principe d’une révision des textes
constitutifs. A Paris en 1945, à Montréal en 1946, au
cours des 27® et 28® sessions la révision devait être adop¬
tée. L’Organisation internationale du Travail est main¬
tenue. Son statut est une « Constitution » internationale
qui reproduit, avec parfois quelques amendements impor¬
tants, les anciens articles du traité de Versailles. Une
déclaration, concernant les buts et les objectifs de l’O. I. T.,
signée à Philadelphie le 10 mai 1944, définit les tendances
de l’Organisation, ainsi que les principes dont devrait
s’inspirer la pohtique de ses membres et s’ajoute à cette
« constitution ». L’Organisation internationale du Travail
est rattachée à l’O. N. U. en quahté d’institution spé-
ciahsée. Ainsi s’affirment à la fois la continuité et la per¬
manence de l’institution et aussi son adaptation à l’évo¬
lution des relations internationales.

553. — Structure de l’0.1. T. — L’Organisation com¬


porte les organes habituels des institutions spécialisées,
une Assemblée générale, un Conseil d’administration, un
Bureau international qui constitue un secrétariat fort
important.
Mais cette symétrie des rouages ne doit pas masquer
l’aspect très particuher de l’organisation internationale
dont il s’agit, car les organes ne sont pas tous de carac¬
tère interétatique et font place à une représentation
véritable des intéressés.
LA PROTECTION DE L’ÊTRE HUMAIN 551
554. — La Conférence générale. — La Conférence
générale tient des sessions chaque fois que le besoin s’en
fait sentir, et au moins une fois par an. EUe n'est point
une conférence intergouvemementale car elle est composée
de 4 représentants de chaque État membre, dont 2 sont
les délégués du gouvernement et dont les 2 autres
représentent respectivement, d’une part les employeurs,
d’autre part les travailleurs ressortissants à chacun des
membres. La composition de la Conférence est donc très
particulière. En 1919 cette formule de représentation, à
côté des gouvernements, de l’ensemble des travailleurs
et des employeurs a été considérée comme une stmcture
véritablement révolutionnaire, tranchant d’une manière
absolue avec les formules classiques de la représentation
gouvernementale de caractère diplomatique. ÈUe demeure
exceptionnelle parmi les solutions adoptées dans les
assemblées ou conférences des institutions spécialisées.
Les délégués non gouvernementaux sont désignés par
les gouvernements en accord avec les organisations pro¬
fessionnelles les plus représentatives, soit des employeurs,
soit des travailleurs du pays considéré, sous la réserve
évidemment que ces organisations existent. La formule
K organisations les plus représentatives » a soulevé des
difficultés à l’occasion de la désignation du délégué ouvrier
néerlandais à la troisième session de la conférence, en
1921 (cas Serrarens). La Cour permanente de justice
internationale fut appelée à ce propos à donner un avis
consultatif et déclara que le nombre des adhérents d’une
organisation n’est pas le seul élément à considérer pour
déterminer le caractère représentatif. Des difficultés
particuhères se sont présentées avec la présence dans
l’Organisation de pays à régime collectiviste. Le principe
de l’universalité de l’Organisation pouvait en effet entrer
en conflit avec le principe de la hberté des organisations
professionnelles. Les délégués employeurs des pays à
régime collectiviste peuvent en effet apparaître comme
des représentants gouvernementaux. Le problème se
posa avec acuité lorsqu’on avril 1954 R. S. S. est
redevenue membre de l’O. I. T. En février 1955 l^s délé¬
gués patronaux des pays non collectivistes avaient
décidé, par un vote à l’intérieur de leur groupe, que les
délégués employeurs des pays collectivistes ne siégeraient
pas dans les commissions. Cette solution a été annulée
par un vote de la Conférence elle-même, sur proposition
du Gouvernement britannique soutenue par le Gouverne-
552 LES ORGANISATIONS SPÉCIALISÉES

ment français. Une formule transactionnelle a été adoptée ;


en juin 1955, selon laquelle les délégués employeurs des;
pays collectivistes participeront désormais aux travaux ,
des commissions, non pas comme membres titulaires,,
mais en qualité d’adjoints. Le problème particulier de lai
définition des délégués « patronaux », pour les pays oùi
il n’y a plus de patronat, et le conflit entre le principe;
« tripartite » de l’O. I. T. et la structure économique des ;
pays collectivistes a été renvoyé à un comité spécial 1
chargé d’élaborer une solution.
D’une manière générale, la Conférence eUe-même;
vérifie les pouvoirs des délégués et peut, par un vote à la i
majorité des deux tiers, refuser d’admettre tout délégué;
qu’elle estimera ne pas avoir été désigné conformément;
aux principes posés par la Constitution de l’O. I. T. Lai
Conférence élit un président et trois vice-présidents i
destinés à assurer le jeu du principe du tripartisme et qui i
sont donc respectivement un délégué gouvernemental, un 1
délégué des travailleurs, un délégué des employeurs.

555. — Le Conseil d’administration. — Les mêmes ;


principes dominent le Conseil d’administration. Il est :
composé de 48 personnes, dont 24 représentent les gou- ■
vemements, 12 représentent les employeurs et 12 les;
travailleurs. Cette formule de représentation tant des;
gouvernements que des milieux professionnels était déjà i
celle consacrée par l’article 393 du traité de Versailles;
mais avec des données numériques différentes puisque;
le nombre des personnes siégeant au Conseü était de 24..
Un amendement au statut, adopté en 1922 mais quii
n’entra en vigueur qu’en 1934, porta ce nombre à 32.
L’article 7 de la constitution de l’O. I. T. fixe les règles ;
définissant le choix des personnes qui doivent siéger au i
Conseil pour une durée de trois ans. Sur les 24 représen- ■
tants gouvernementaux 10 doivent être désignés par les ;
États membres dont l’importance industrielle est la plus ;
considérable, 2 par les États membres dont l’importance ;
agricole est la plus considérable et 12 par le Collège élec¬
toral gouvernemental. Le Conseü lui-même détermine
quels sont les membres ayant l’importance industrielle la t
plus considérable, il établit des règles qui sont mises en 1
œuvre par un Comité impartial. En cas de contestation,.
appel de la décision du Conseil peut être porté devant la ;
Conférence. Les critères retenus ont varié depuis 1919,
c’est actuellement la contribution au budget de l’0.1. T.,.
LA PROTECTION DE l’ÊTRE HUMAIN 553
le revenu national, rimportance du commerce extérieur
et de la population active rémunérée. En réalité, les sept
DU huit premières places sont toujours occupées par les
mêmes Etats, des changements interviennent seulement
pour deux ou trois.
Les personnes représentant les employeurs et celles
représentant les travailleurs sont élues respectivement par
[es délégués des employeurs et les délégués des travailleurs.
Deux représentants des travailleurs et deux représentants
ies employeurs doivent être des ressortissants d’États
extra-européens.

556, — Le Bureau international du Travail. — Le


B. I. T. constitue le secrétariat permanent de l’Organisa¬
tion, ü siège à Genève. A sa tête est placé un directeur
général désigné par le Conseil d’administration de qui ü
reçoit ses instructions. Le personnel est choisi par le
Erecteur général, conformément aux règles approuvées
par le Conseil d’administration. L’effectif en 1965 est de
l’ordre de 1.700 personnes. Les principales tâches du
B. I. T. sont la préparation technique des travaux de la
Conférence et du Conseil d’administration, la réunion et
la publication d’informations sur les problèmes du tra¬
vail, la préparation de consultations demandées par les
gouvernements ou les organisations professionnelles. Le
Bureau publie un grand nombre de périodiques, un
annuaire statistique notamment. Le premier directeur du
B. 1. T. a été un ancien syndicaliste français, Albert Tho¬
mas, qui demeura en fonction de 1919 à la date de sa
mort en 1932. Il anima l’institution de son inlassable
activité et de sa foi dans la protection internationale du
travail.

557. — La « législation » internationale. — La tâche


principale de la Conférence est la préparation de textes
destinés à régler les problèmes posés par le travail humain.
La procédure adoptée est généralement celle de la double
Escussion selon laquelle les questions inscrites à l’ordre
du jour reviennent à 2 sessions successives devant la
Conférence. Au cours de la première session on se pro-
Qonce sur les questions de principe et on établit un avant-
projet qui est soumis aux gouvernements. Au cours de
la seconde session on adopte un texte préparé par le
Bureau sur la base des travaux antérieurs et des observa¬
tions formulées.
LES ORGANISATIONS SPÉCIALISÉES
554
La Conférence n’est pas un législateur international, et
le texte qu’elle adopte à la majorité des 2/3 des membres
présents à la session n’est pas un texte de droit positif
obligatoire pour les États. Ceux-ci n’ont qu’une obligation,
celle de saisir l’organe interne compétent. Il convient de
distinguer à ce point de vue deux t5q)es diâérents de
textes que peut adopter la Conférence, le type « conven¬
tion », le type « recommandation ».
Si les propositions adoptées par la Conférence doi^^nt,
d’après ceUe-ci, prendre la forme d’une convention, l’Etat
membre a l’obligation de somnettre ce texte dans le délai
d’un an à partir de la clôture de la Conférence, et excep¬
tionnellement dix-huit mois, à l’autorité ou aux autorités
dans la compétence desquelles rentre la matière, en vue^ de
la trcinsformer en loi ou de prendre des mesures d un
autre ordre. La procédure diffère donc de celle de la rati¬
fication des traités en ce sens que le gouvernement est
tenu de soumettre le texte élaboré par la Conférence
à l’autorité compétente, c’est-à-dire à l’autorité législative
dans un délai déterminé.
L’obligation du gouvernement de présenter la convention
n’implique pas l’obligation de ratifier postérieurement
d’aüleurs.
Les recommandations doivent, elles aussi, être soumises
aux autorités nationales compétentes, elles ne donnent
pas lieu à ratification et ne deviennent pas des textes
obligatoires pour les États, elles sont destinées à orienter
l’action sur un plan national.
Ces procédures sont intéressantes, l’élaboration des
normes internationales du travail à partir d’une représen¬
tation tripartite mérite d’être soulignée, mais on doit:
noter que les textes adoptés par la Conférence ne sauraient
être considérés comme constituant en eux-mêmes une
législation internationale, comme on l’a dit quelquefois.,
L intervention des États demeure nécessaire pour
aboutir à des textes de droit positif.

558. — L’activité de l’O. I. T. — L’Organisation a pour¬


suivi sans défaillance, depuis 1919» grand objectif
d’instauration d’une justice sociale en laquelle les direc¬
teurs généraux du B. L T. ont successivement vu la base
la plus solide sur laquelle puisse être édifiée la paix du
monde. Même si on se bornait à la considérer sur le simple
plan numérique, l’œuvre est considérable :
Au 31 décembre 1966 l’O. L T. avait élaboré 126 conven-
LA PROTECTION DE l’ÊTRE HUMAIN 555

lions. Le nombre total des ratifications intervenues dépas¬


sait 3.250 et plus d’une centaine de conventions avaient
recueilli le nombre suffisant de ratifications pour être
entrées en vigueur. A la même date ü avait été adopté
127 recommandations.
L’O. I. T. a depuis quelques anneés étendu ses activités
de caractère pratique, notamment en matière d’assis¬
tance technique et plus spécialement d’industrialisation
des pays en voie de développement.

Section IL — L’Organisation mondiale


de la Santé (O. M. S.)«

559. — La défens^sanitaire. — La protection contre les


maladies épidémiques est apparue depuis des siècles, notam¬
ment dans le monde méditerranéen. Les villes maritimes,
véritables « portes de l’Orient », furent les premières à se
défendre. Venise, en relations constantes avec le Proche-
Orient, chargeait dès 1348 trois « provéditeurs de santé »
de prendre les mesures nécessaires pour éviter le retour de
la peste et créait un lazaret de quarantaine en 1403, exemple
qui fut suivi par Gênes en 1467. A Marseille les consuls
recevaient en 1476 des instructions du roi René en vue
d’apphquer le régime des léproseries aux étabhssements
ayant pour objet la prophylaxie de la peste et un lazaret fut
créé en 1527, le premier en France.
Le mécanisme du régime dit de la quarantaine, qui s’ap¬
pliquait à l’arrivée d’un navire, était rigoureux. A Mar¬
seille il comportait, après quelques jours de consignation à
bord, l’admission au lazaret et un séjour qui n’était pas infé¬
rieur à 8 jours. Bonaparte au retour d’Égypte faillit être
emprisonné pour n’avoir voulu s’astreindre à aucune de ces
pratiques.
Les transformations techniques du xix® siècle devaient
avoir pour effet l’utihsation de moyens de transport rapides
comme le chemin de fer et les bateaux à vapeur, et l’ouver¬
ture du canal de Suez en 1869 accélérait encore les déplace¬
ments des hommes et des marchandises et par suite la pro¬
pagation des maladies transmissibles. Des épidémies massives
venues d’Orient gagnent rapidement l’Europe et y exercent
leurs ravages, en particuüer le choléra. Une défense sur le
plan de chaque Etat devient insuffisante et des mesures
mtemationales s’avèrent nécessaires.

560. — Les conférences internationales. — La première


conférence sanitaire internationale s’est réunie à Paris en
1851 sur l’initiative de Louis-Napoléon Bonaparte. Ses
résultats immédiats ont été très minimes mais la voie de la
556 LES ORGANISATIONS SPÉCIALISÉES

coopération sanitaire internationale était ouverte. Les épi¬


démies de choléra de 1853, 1854 et 1855 montrèrent l’urgence
d’autres conférences qui se réunirent à Paris en 1859, à
Constantinople en 1866, à Vienne en 1847, plus tard à Was¬
hington en 1881, à Rome en 1885. La première convention
sanitaire internationale fut signée à Venise en 1892, elle
organisait la défense de l’Europe contre le choléra en prove¬
nance de l’Asie. La conférence de Dresde de 1893 adopte l’im¬
portante mesure de l’exigence de la notification des premiers
cas de choléra dans un pays. La conférence de Paris de
1894 se préoccupe de la prophylaxie du pèlerinage de La
Mecque et de la surveillance sanitaire du golfe persique et,
à la suite d’une épidémie de peste aux Indes, se réunit la
conférence de Venise en 1897. A Paris en 1903. une régle¬
mentation nouvelle des quarantaines est adoptée, en har¬
monie avec les besoins d’une circulation dominée déjà par
la vitesse et avec les découvertes biologiques de la fin du
xix® siècle notamment dans le domaine des microbes et des
bacilles. La réglementation internationale se développait
ainsi, mais ü restait à créer des institutions permanentes de
caractère général.

561. — Le# organismes internationaux. — La conférence


de Venise de 1892 avait créé le Conseil quarantenaire
d’Égypte, et d’autres existaient à Tanger, à Téhéran et à
Constantinople. Ils avaient un rôle local, mais en raison du
régime capitulaire et de la présence de médecins européens,
ils revêtaient un aspect international. Le premier organisme
international général fut créé par la conférence de Rome,
aux termes d’un « arrangement » du 9 décembre 1907, sous
le nom d’Oflfice international d’hygiène publique, étabü à
Paris en 1908. Il se présentait sous la forme d’une Union
administrative groupant 55 États avec comme organe déli¬
bérant un Comité permanent qui se réunissait deux fois par
an et exerçait ses attributions par l’intermédiaire de com¬
missions. Un organisme exécutif ayant à sa tête un directeur
de l’ofifice assurait véritablement la permanence. L’office
préparait la révision des conventions internationales, il
diflusait des renseignements épidémiologiques, provoquait
des études et des enquêtes et a rendu des services émi¬
nents.
Un second organisme a été créé par la S. D. N. conformé¬
ment à l’article 23, § /, du Pacte qui prévoyait que les
membres de la Société « s'efforceraient de prendre des mesures
d’ordre international pour prévenir et combattre les mala¬
dies ». En 1920, fut créée une Commission temporaire des
épidémies chargée de prendre les mesures qu’exigeait l’épi¬
démie de typhus qui ravageait la Russie et menaçait de
gagner le reste de l’Europe et d’élaborer un projet de statut
constitutif d’un organisme international d’hygiène unique.
LA PROTECTION DE l’ÊTRE HUMAIN 557

Cette tentative « d’annexion » de l’O. I. H. P. n’aboutit


pas et la Commission des épidémies se transforma, dans le
cadre de la S. D. N., en un Comité d’hygiène. Une coopé¬
ration s’établit en 1923 entre les deux organismes. En 1936
l’organisation d’hygiène de la S. D. N. comprenait trois
rouages : un Comité d’hygiène composé de douze membres
dont le président de l’O. I. H. P. ; un Conseil général consul¬
tatif formé par la réunion du Comité d’hygiène et du Comité
permanent de l’O. I. H. P. ; enfin un Secrétariat formé
par la section hygiène du secrétariat de la S. D. N. L’acti¬
vité déployée fut considérable et multiforme, depuis les
renseignements épidémiologiques jusqu’aux cours interna¬
tionaux et voyages d’études.
Au cours de la seconde guerre mondiale ces organismes
durent restreindre leur activité, mais en décembre 1944 une
partie de leurs attributions fut transférée aux services de
l’Administration des Nations Unies pour le secours et le
relèvement (U. N. R. R. A.).

562. — La création de TO. M. S. — La proposition de


convoquer une conférence internationale pour créer une
nouvelle organisation sanitaire intemationde fut formulée
au cours même de la conférence de San-Francisco et, le
15 février 1946, lors de sa première session, le Conseil
économique et social adopta une résolution instituant
une Commission préparatoire technique composée d’ex¬
perts en matière de santé, chargée de préparer la documen¬
tation en vue d’une conférence internationale. La com¬
mission s’est réunie à Paris du 18 mars au 5 avril 1946
et la conférence eUe-même s’est ouverte à New York le
19 juin, elle a adopté le 22 juillet une Constitution de
l’Organisation mondiale de la Santé (O. M. S.).^ Une
Commission intérimaire de 18 membres fut chargée, en
attendant que les ratifications soient acquises en nombre
suffisant pour permettre l’entrée en vigueur de la Consti¬
tution, d’assurer les fonctions antérieurement dévolues
aux organismes Sanitaires internationaux. La Commis¬
sion intérimaire a été ainsi amenée k jouer un rôle très
important dans l’aide apportée à l’Égypte dans la lutte
contre l’épidémie de choléra survenue dans ce pays.
La Constitution est entrée en vigueur le 7 avril 1948 et
la première Assemblée mondiale s’est réunie à Genève
le 24 juin.

563. — La composition de TO. M. S. — La participa¬


tion des diverses collectivités à l’O. M. S. se présente sous
des aspects différents suivant que l’on considère l’organi-
558 LES ORGANISATIONS SPÉCIALISÉES

sation centrale elle-même ou les comités régionaux, car


l’Organisation est décentralisée.
L’organisation eUe-même comprend deux catégories
de membres ; les membres ordinaires qui sont les États
et les membres associés qui sont les territoires ou groupes
de territoires n’ayant pas la responsabilité de la conduite
de leurs relations internationales. Les organisations
régioncdes qui peuvent être créées sont partie intégrante
de l’organisation eUe-même, elles peuvent comprendre non
seulement les États membres et les membres associés,
mais aussi des territoires ou groupes de territoires de la
région n’ayant pas la responsabilité de la conduite de
leurs relations internationales et qui ne sont pas des
membres associés.
L’O. M. S. groupe en 1967 124 membres et 3 territoires
associés.

564. — La structure. — L’Organisation elle-même


présente la structure tripartite habituelle des organisa¬
tions internationales, les organisations régionales ont
une structure bi-partite.
L’Assemblée est composée de délégués représentant
les États membres et les membres associés, toutefois
ceux-ci ne disposent pas du droit de vote; eUe se réunit
une fois par an en session ordinaire et en autant de sessions
extraordinaires que les circonstances l’exigent. EUe
éUt son président et son bureau.
Le Conseil est composé, depuis 1961, de 24 personnes
désignées par autant d’États membres. L’Assemblée de la
Santé cho^it, compte tenu d’une répartition géographique
équitable, les États appelés à d&igner un délégué au
Conseil. Chacun de ces États envoie au Conseil une
personnaüté techniquement quaüfiée dans le domaine
de la santé. Les membres du Conseil exécutif siègent à
titre individuel et non point comme représentants de
leurs pays. Ils sont mandataires de l’Assemblée toute
entière et n’agissent pas sur instructions de leur gouverne¬
ment. Une proposition tendant à faire des membres du
Conseil exécutif des représentants des gouvernements
a été rejetée par la troisième assemblée. Les États qui
désignent des membres du Conseil exécutif sont élus
pour trois ans. Le Conseil se réunit deux fois par an au
moins. Il éüt son président et adopte son propre règlement.
Le Secrétariat comprend le directeur général et tel
personnel technique et administratif nécessaire à l’Orga-
LA PROTECTION DE l’ÊTRE HUMAIN 559

nisation. Le Directeur général est nommé par l’Assemblée


sur proposition du Conseil. Pour tenir compte de pro¬
blèmes sanitaires particuliers à certaines régions du
monde, la Constitution de l’O. M. S. prévoit la possibi¬
lité « d’arrangements régionaux », dans son chapitre XI.
L’Assemblée peut créer, avec le consentement des Etats
membres situés dans chaque région ainsi déterminée, une
organisation régionale pour répondre aux besoins parti-
cuhers de cette région. Chaque organisation régionale est
partie intégrante de l’O. M. S. Chaque organisation
régionale comporte un Comité régional et un Bureau
régional. Le Comité régional est composé des Etats
membres situés dans la région, des membres associés
situés dans la région et des territoires qui, sans avoir la
quahté de membres associés, demandent à être repré¬
sentés au Comité. Le Bureau régional, sous l’autorité
d’un directeur régional, est l’organe administratif du
Comité régional et l’agent d’exécution dans la région des
décisions de l’Assemblée de la Santé et du Conseil.

565. — Le fonctionnement. — L’Assemblée de la


Santé est l’organe déhbérant. Les décisions sont acquises
à la majorité des deux tiers pour les questions importantes
(adoption de projets de convention ou d’accords par
exemple), à la majorité simple pour les autres. L’Assem¬
blée examine et approuve les prévisions budgétaires
proposées par le Conseil et effectue la répartition des
dépenses parmi les États membres conformément à un
barème qu’elle arrête.
Le Conseil est l’organe exécutif de l’Assemblée dont il
apphque les décisions et les directives. Il peut lui sou¬
mettre des propositions. Il prépare l’ordre du jour de
l’Assemblée et est habiüté à prendre toute mesure d’ur¬
gence dans le cas d’événements exigeant une action
immédiate.

566. — La « législation » sanitaire interaalionale.


— Les accords ou conventions qu’adopte l’Assemblée
à la majorité des deux tiers ne constituent pas aussitôt
le droit,positif et n’entrent en vigueur, au regard de
chaque État membre, que lorsque celui-ci les aura acceptés
conformément à ses règles constitutionnelles. Chaque
État s’engage à fixer son attitude dans un délai de
i8 mois après l’adoption d’une convention ou d’un accord
560 LES ORGANISATIONS SPÉCIALISÉES

par l’Assemblée, et cette formule n’est pas sans analogie


avec la solution adoptée par l’O. I. T.
L’Assemblée a également compétence pour faire des
recommandations aux États membres en ce qui concerne
toute question entrant dans la compétence de l’Organi¬
sation, mais il s’agit ici d’une simple suggestion.^
Au contraire, dans un domaine de caractère plus
technique, l’Assemblée de la Santé est véritablement
dotée d’un pouvoir réglementaire qui se manifeste sous
la forme du règlement sanitaire inürnational. Les règle¬
ments sanitaires peuvent porter sur les mesures sani¬
taires ou de quarantaine, sur la nomenclature des mala¬
dies, les méthodes d’hygiène pubhque, les « standards »
sur les méthodes de diagnostic, les normes relatives aux
produits biologiques, pharmaceutiques et similaires.
La première Assemblée a adopté le 24 juillet 1948, à
l’unanimité, le règlement sanitaire n° i relatif à la nomen¬
clature des maladies et causes de décès. Du point de vue
de la technique juridique, ce texte présentait une très
grande importance que le président de la commission
juridique ne manqua pas de souligner, faisant remarquer ;
« Pour la première fois dans l’histoire du monde, un
organe législatif international a eu la faculté d’adopter
des règlements qui pourront entrer en vigueur sans
acceptation formelle par les divers pays. » Avec le règle¬
ment sanitaire l’Assemblée de la Santé est en effet
investie du pouvoir législatif sur le plan technique, car
le réglement adopté par l’Assemblée entre en vigueur
pour tous les États membres dès que son adoption par
l’Assemblée a été notifiée aux États. L’atteinte à la
souveraineté est certaine et l’on se trouve bien en pré¬
sence de l’élaboration de la règle de droit par un orga¬
nisme international statuant à la majorité. Toutefois
cette compétence législative n’existe que dans le domaine
technique et pour les matières énumérées limitativement
à l’article 21 de la Constitution. En outre, les États
peuvent se dégager de la règlementation internationale
en faisant connaître au directeur général, dans les délais
prescrits par la notification, qu’ils refusent le règlement
ou qu’ils l’acceptent avec réserves. Le règlement n° i
n’a fait l’objet d’aucun refus, mais 14 membres ont
formulé des réserves. Le règlement n® 2, adopté le
25 mai 1951, a fait l’objet de 73 réserves formulées par
25 États sur les 79 que comptait l’O. M. S. au moment
de l’adoption du règlement. La possibilité du refus et
LA PROTECTION DE L'ÊTRE HUMAIN 561

celle de l’acceptation avec réserve constituent les limites


actuelles de la législation sanitaire internationale, mais
on notera le renversement fort important de la règle
traditionnelle, le refus ou la réserve sont au fond une
modalité de la sécession à l’égard d’un système préétabli.
A cet égard la formule consacrée par la Constitution de
l’O. M. S. revêt une particulière importance dans le
domaine de la technique juridique internationale.

Section III. — L’Organisation des Nations Unies


pour l’Éducation, la Science et la Culture
(U. N. E. S. C. O.).

567. — La coopération intellectuelle internationale.


— L’utilité d’une coopération internationale dans le
domaine culturel et éducatif est évidente pour favoriser
la connaissance et la compréhension mutuelles des nations,
aider à l’avancement et à la diffusion de la science, déve¬
lopper enfin l’éducation populaire.
La première tentative pourtant en ce domaine date
seulement de 1913 et fut faite par le Gouvernement des
Pays-Bas qui lança des invitations à une conférence
intergouvemementale sur l’éducation, avec un projet
de statut d’une « Organisation internationale de l’Educa¬
tion ». La conférence ne put se réunir en 1913 et fut
reportée à septembre 1914. Mais la première guerre
mondiale l’empêcha de se réunir.
En 1921, sur l’initiative des Gouvernements belge et
français fut créée, dans le cadre de la S. D. N., comme
organe consultatif du Conseil et de l’Assemblée, une
Commission de coopération intellectuelle, complétée en
1930 par un Comité exécutif chargé dans l’intervalle de
ses sessions de veiller à l’exécution des décisions.
Pour assurer la bonne marche des travaux de la com¬
mission, le Gouvernement français créait en 1924 un
Institut international de coopération intellectuelle qui fut
mis à la disposition de la S. D. N. et fonctionna à Paris
jusqu’à la deuxième guerre mondiale.
Au cours de ceUe-ci les ministres de l’Éducation des
gouvernements alliés installés à Londres se préoccupèrent
des questions culturelles et, par une résolution du 12 juil¬
let 1945, demandèrent au Gouvernement britannique de
réunir à Londres une conférence relative à la création
562 LES ORGANISATIONS SPÉCIALISÉES

d'une Organisation permanente de l’Éducation et de la


Culture. La conférence, qui groupait 44 États dont les
membres permanents du Conseü de sécurité, à l’exception
de ru. R. S. S., adopta le 16 novembre une convention
créant une « Organisation des Nations Unies pour l’Édu¬
cation, la Science et la Culture », dont le siège est à Paris.

568. — La structure. — La structure de l’U. N. E.


S. C. O. présente l’aspect classique des institutions spé¬
cialisées avec une Conférence générale, un Conseil exécutif
et un Secrétariat.
La Conférence générale se compose de tous les États
membres. Les États membres de l’O. N. U. peuvent
adhérer à l’Organisation sur simple demande. Les autres
États doivent poser leur candidature qui, après avis du
Conseü économique et social, doit être acceptée par un
vote de la Conférence générale obtenant la majorité des
deux tiers. Une procédure de retrait est prévue après un
préavis d’un an. La Conférence se réunit tous les deux ans,
elle arrête les lignes directrices de la politique générale à
suivre et vote le budget.
En 1967 l’U. N. E. S. C. O. compte 121 membres. Le
Conseil exécutif se compose de 30 membres élus par la
Conférence générale parmi les délégués des États membres.
La convention constitutive de l’U. N. E. S. C. O. pré¬
voyait que les membres du Conseü siégeaient au nom
de la conférence toute entière et non comme représen¬
tants^ de leurs gouvernements. Mais sur la proposition
des États-Unis, et malgré la très vive opposition de la
Belgique et de la France, la huitième session de la Confé¬
rence générale qui s’est tenue à Montevideo en 1954 a
adopté une modification du statut de l’organisation qui
fait des membres du Conseil les délégués du gouverne¬
ment qui les a désignés pour siéger à la conférence. Le
Conseil exécutif devient donc une réunion intergouveme¬
mentale au lieu d’être un coüège de personn^ités sié¬
geant en raison de leurs qualités personneUes propres.
On peut considérer cette transformation comme parti-
cuüèrement regrettable.
Le directeur général est placé à la tête d’un secrétariat
permanent qui groupe plus de 2.500 fonctionnaires inter¬
nationaux recrutés sur une base géographique aussi
large que possible.
LA PROTECTION DE l’ÊTRE HUMAIN 5^3

569. — Activité de l’U. N. E. S. C. O. — Le travail accom¬


pli par l’Organisation depuis sa création a été considérable.
Dans le domaine de l’éducation de base a été entreprise
une campagne de lutte contre l’analphabétisme dans le
monde, une action pour le développement de l’enseigne¬
ment primaire en Asie du sud et dans le Proche-Orient.
L’U. N. E. S. C. O. encourage le développement de la
coopération internationale. Dans le domaine de la corn-
préhension internationale, l’Organisation a entrepris
d’étudier le problème de l’améhoration des manuels
scolaires, d’encourager les enseignements civiques et ceux
relatifs à l’Organisation des Nations Unies et aux organi¬
sations internationales.
Sur un plan culturel plus élevé l’Organisation encourage
le développement de la coopération scientifique interna¬
tionale tant sur le plan des sciences humaines que sur
celui des sciences exactes. On peut citer par exemple dans
ce dernier domaine son rôle dans la création du Conseil
européen pour la recherche nucléaire et l’étude des plans
pour un laboratoire international. Des conférences inter¬
nationales ont été réunies sur l’initiative de l’Organisation
pour établir des conventions internationales en matière
par exemple de protection des biens culturels en cas de
guerre, et c’est sous les auspices de l’U. N. E. S. C. O.
qu’a été conclue la convention universelle sur le droit
d’auteur. La pubhcation de livres, de revues concernant
l’éducation, l’enseignement, les sciences, les arts a été
entreprise.
L’U. N. E. S. C. O. a lancé depuis i960 un appel et
organisé une campagne pour la sauvegarde des rnonu-
ments égyptiens de Nubie menacés par la construction et
la mise en eau du barrage d’Assouan et elle a conclu un
accord avec la République Arabe Unie en 1963.
L’activité de l’Organisation se développe ainsi en
parfaite conformité avec les formules de l’article de
l’acte constitutif qui lui fixait comme but de resserrer
par l’éducation, la science et la culture, la collaboration
entre nations, afin d’assurer le respect universel de la
justice, de la loi, des droits de 1 homme et des libertés
Wdamentales pour tous, sans distinction de race, de
sexe, de langue ou de religion que la Charte des Nations
Unies reconnaît à tous les peuples.
564 . LES ORGANISATIONS SPÉCIALISÉES

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IV._L’Organisation de l’Alimentation et de VAgriculture.

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Politique étr., 1959» P* 105-120.
Voir aussi Documentation française,^ NED 3097, La
structure mondiale de l’alimentation et de l’agriculture.
TITRE IV

CARACTÈRES GÉNÉRAUX
DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES

Pendant très longtemps la société internationale défime


comme l’ensemble des êtres humains vivant sur la pla-
nète s*est présentée sous la forme d une société interéta-
tique dans laquelle les rapports juridiques s’établissaient
essentiellement entre les États. Les rapports existant
entre eux apparaissaient d’ailleurs principalement sur
le plan politique et les phénomènes d affrontement
étaient plus nombreux que les phénomènes de sohdanté.
A partir du xix® siècle et malgré des affrontements
qui se sont étendus à deux reprises à l’échelle du monde
entier on voit apparaître pourtant des manifestations
diverses de solidarité dans plusieurs domaines, écono¬
miques, sociaux, culturels et scientifiques. Le progrès
technique, le développement des communications sont à
la base de cette transformation.
Les relations deviennent ainsi plus étroites, eues sont
en même temps plus durables. Les problèmes qu eU^
posent aux États vont être résolus par ceux-ci par la
création d’organisations dans lesquelles ik collaborent.
Ainsi se sont multipliées les orgamsations dites inter¬
nationales à compétence générale ou spéciale, à rayon
d’action régional ou à tendance universahste. Les com¬
missions fluviales, dès le début du xix^ siècle,^ en 1815
en tout cas, sont une première manifestation d une soli¬
darité particulière, le développement des communica-
568 ORGANISATIONS INTERNATIONALES

tions devait entraîner la création d’organismes nouveaux


rendus nécessaires par le caractère désormais trop étroit
du territoire des États. L’Union télégraphique de 1865,
l’Union postale universelle de 1874, l’Union internatio¬
nale pour le transport des marchandises par chemins de
fer de 1890 marquent le début d’une évolution qui
s’accélère singuhèrement par la suite, tout particuhère-
ment depuis la fin de la seconde guerre mondiale.
Les principales de ces organisations intergouvememen¬
tales ont été présentées dans les pages qui précèdent,
d’une manière analytique, mais une étude générale de
caractère t5q)ologique est pleine d’intérêt et d’enseigne¬
ments. Ces organisations se trouvent en effet confron¬
tées avec des problèmes analogues mais adoptent des
solutions qui ne sont pas identiques bien que présentant
des éléments communs et par catégorie au moins une
sorte « d’air de famiUe ».
La théorie générale de l’organisation internationale
met en jeu des notions complexes et c’est la raison pour
laquelle elle figure formellement dans le programme de
Droit international pubUc de la troisième année de
licence en droit mais ü convient de présenter ici quelques
remarques de portée générale. Elles sont regroupées sous
deux rabriques, la première traitant du développement
même des organisations, la seconde consacrée à l’étude
des moyens dont elles disposent.
CHAPITRE PREMIER

NATURE ET DÉVELOPPEMENT
DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES

En considérant les organisations internationales qui


existent actuellement on peut retenir trois éléments
essentiels : leur diversité générale, la complexité des
organisations intergouvemementales, l’évolution institu¬
tionnelle qui les a marquées.

§ I. — La diversité des organisations.

L’expression généralement utilisée d’organisations inter¬


nationales est imprécise car eUe recouvre deux réalités
juridiques et sociales différentes, les organisations pou¬
vant en effet être classées en deux catégories fondamenta¬
lement différentes, celles dites gouvernementales ou inter¬
gouvemementales, celles dites non gouvernementales.

570. — Les organisations non gouvernementales.


Particulièrement nombreuses actuellement dans le monde,
elles sont près de 2.000. Elles se définissent d’une manière
négative, selon la résolution du Conseil économique et
social du 27 février 1950 qui précise : « toute organisation
internationale qui n’est pas créée par voie d accords
intergouvemementaux sera considérée comme une orga¬
nisation non gouvernementale internationale ». Ces organi¬
sations, souvent appelées O. N. G. sont de nature
privée, groupent des personnes privées mêlées parfois à
des personnes publiques mais pas à des Etats. Ne pour-
570 ORGANISATIONS INTERNATIONALES

suivant pas de but lucratif mais dotées de moyens


matériels parfois très puissants, elles possèdent la person¬
nalité morale mais ü n’existe aucun statut international
et leur régime juridique propre varie selon les pays.
Les O. N. G. ont des liaisons avec les grandes organisa¬
tions intergouvemementales. Leurs rapports avec
rO.N.U. sont prévus par la Charte elle-même dont l’article
71 indique : « Le Conseil économique et social peut prendre
toutes dispositions utües pour consulter les organisations
non gouvernementales qui s'occupent de questions relevant
de sa compétence. Ces dispositions peuvent s’appliquer
à des organisations internationales et, s’il y a heu, à des
organisations nationales après consultation du membre
intéressé de l’Organisation. » Le régime des consultations
prévu par l’article 71 de la Charte a été organisé par des
résolutions du Conseil économique et social (21 juin 1946—
27 février 1950). Les organisations susceptibles de bénéficier
d’arrangements consultatifs sont classées en trois catégo¬
ries : dans la catégorie A figurent celles qui ont des rapports
particuhers avec la vie économique et sociale des régions
qu’elles représentent et qui s’intéressent directement aux
activités du Conseil — dans la catégorie B apparaissent
des organisations qui s’intéressent à certains domaines
d’activités du Conseil et ont elles-mêmes des objectifs
spécialisés. Les organisations qui, tout en ne possédant
pas les quahtés précitées, sont susceptibles d’apporter
une contribution aux travaux du Conseil sont inscrites
sur un registre particuher où figurent notamment des
organisations bénéficiant du statut consultatif auprès
d’une institution spéciahsée mais n’appartenant pas aux
catégories A ou B. Les arrangements consultatifs qui
font participer les O. N. G. à l’activité d’organisations
intergouvemementales n’existent pas simplement avec
rO. N. U., ru. N. E. S. C. O. a utilisé très largement la
formule ainsi que l’0.1. T., la F. A. O., l’U. I. T. Le
Conseil de l’Europe a créé également en 1951 un système
d’arrangements consultatifs et a classé à cet effet les
organisations en trois catégories. Dans les Communautés
européennes les solutions adoptées sont différentes
puisqu’il existe des comités consultatifs au sein même de
l’organisation intergouvemementale dans lesquels des
intérêts privés sont représentés (voir supra, n® 492).

571. — Les organisations intergouvemementales.


— Par opposition aux organisations non gouvememen-
NATURE ET DÉVELOPPEMENT 571

taies, les organisations intergouvemementales, qui


groupent évidemment des États, apparaissent comme
moins nombreuses. On en peut compter actuellement
tout de même près de 200. Ce nombre déjà considérable
est d’ailleurs susceptible de s'accroître très largement
beaucoup plus facilement en tout cas que le nombre
même des États qui est actuellement de l'ordre de 130
et qui ne paraît pas devoir augmenter très considérable¬
ment dans les années à venir après que le phénomène
de décolonisation ait atteint son apogée dans les années
autour de 1960.
Les organisations intergouvemementales sont d’ail¬
leurs diverses les unes par rapport aux autres. On a déjà
marqué que du point de vue de la technique juridique
elle-même on peut opposer les organisations dites inter¬
nationales aux organisations dites supranationales ou
extra-nationales.
Sur le plan des buts poursuivis, des missions confiées
comme sur le plan des aires territoriales concernées, les
classifications les plus diverses peuvent être imaginées.
Elles apparaissent ainsi selon les cas et les critères, uni¬
verselles, continentales ou régionales, de caractère poH-
tique voire mihtaire ou de caractère économique ou
scientifique ou technique. En elles les États se regroupent,
parfois se préparent à un éventuel affrontement mais
plus généralement œuvrent ensemble pour développer
les multiples sohdarités humaines.
On peut dire sans lyrisme que les plus importantes
d’entre elles sont chargées du destin de l’humanité.

§ 2. — La complexité
des organisations gouvernementales.

La complexité des organisations intergouvemementales


apparaît sur un double plan, celui des textes, celui
surtout de la pratique et de la vie.

572. — Les textes. — L’organisation intergouveme¬


mentale trouve son origine dans la conférence diploma¬
tique, vieille institution des relations internationales
utihsée pendant longtemps sur le seul plan politique et
transposée.
Les textes constitutifs, quels que soient les noms
employés. Charte, Pacte, voire Constitution définissent la
structure institutionnelle. Selon les organisations elle est
572 ORGANISATIONS INTERNATIONALES

variable et plus ou moins complexe. On rencontre au


minimum deux organes. L'un exprime le caractère
intergouvememental et se compose de représentants des
États membres. Il se réunit à intervalles plus ou moins
rapprochés, il a parfois un caractère permanent. L’autre
organe est lui certainement permanent, ü est normale¬
ment installé dans une ville qui est le siège de l’Organisa¬
tion considérée, c’est le Secrétariat. Il a à sa tête un per¬
sonnage qualifié très généralement de Secrétaire général,
parfois de Directeur qu’assistent des adjoints et des col¬
laborateurs. Le chef du Secrétariat, comme l’ensemble
du personnel de direction et d’administration, se trouve
vis-à-vis des États en situation d’indépendance, il est
un fonctionnaire international (voir infra, n° 568). On
voit là se manifester un phénomène de spécialisation
fonctionnelle, la formule employée initialement et qui
consistait à faire jouer à des agents nationaux un rôle
international dans un secrétariat et dans laquelle Georges
Scelle voyait la manifestation de ce qu’il appelait le
dédoublement fonctionnel existe encore quelquefois actuel¬
lement mais elle est devenue exceptionnelle.
En réahté les actes constitutifs de nombreuses orga¬
nisations internationales prévoient une structure insti¬
tutionnelle plus complexe. L’organe de représentation des
États est souvent dédoublé avec l’existence de deux
assemblées, l’une groupant tous les États membres, l’autre
groupant seulement les représentants de certains d’entre
eux siégeant souvent, en totahté ou en partie par roule¬
ment. D’autres organisations sont plus complexes encore,
les Communautés européennes comportent des organes
dits communautaires comme la Haute Autorité de la
C. E. C. A. ou les Commissions du Marché commun ou
de l’Euratom. Diverses organisations comportent un
organe juridictionnel, une Cour de justice, organe régula¬
teur du traité chargé de résoudre les différends surgissant
entre les États membres.

573.— Les organes subsidiaires. — Plus que des textes


la complexité structurelle constatée aujourd’hui dans
les organisations internationales procède de la vie elle-
même et de la pratique. Une constatation fondamen¬
tale s’impose ; les organisations internationales sont des
êtres vivants. Les statuts constitutifs les créent, ensuite
elles jouissent d’une vie propre. Il ne s’agit pas simplement
du phénomène juridique de l’attribution aux organisa-
NATURE ET DÉVELOPPEMENT 573
lions de la personnalité morale, il s’agit de la possibilité
qu'elles ont de créer tous les organes qui leur sont néces¬
saires pour accomplir leur mission. C’est le développe¬
ment de ces organes particuliers, dits organes subsidiaires,
qui a entraîné l’existence d’une structure particulière¬
ment complexe.
La création de ces organes est généralement prévue
dans les textes constitutifs. L’article 22 de la Charte des
Nations Unies stipide par exemple « L’Assemblée générale
peut créer les organes subsidiaires qu’elle juge nécessaires
à l’exercice de ses fonctions », et l’article 29 reprend la
formule pour le Conseil de sécurité. L’article 7> § 2 pose
d’ailleurs le principe général « les organes subsidiaires
qui se révéleraient nécessaires pourront être créés confor¬
mément à la présente Charte ». Des formules analogues se
retrouvent dans les textes constitutifs de la plupart des
organisations indépendamment du but qu’elles pour¬
suivent.
Ces textes offraient des possibiütés mais ce qui est
remarquable, c’est que la plupart des organisations ont
très largement usé de cette faculté. Dans le cadre de
rO. N. U. l’Assemblée générale a créé, depuis 1946, plus
de 250 organes subsidiaires et depuis i960 il en a été
créé plus de 150 par les organes principaux.
Si d’autres organisations ont créé moins d’organes subsi¬
diaires, il n’en demeure pas moins qu’ils sont dans l’en¬
semble extrêmement nombreux.
Leurs modalités de création sont diverses, ils peuvent
être créés par une résolution adoptée par un organe
principal, quelquefois on rencontre outre cette résolu¬
tion un accord intergouvememental complémentaire qui
dote l’organisme de certains pouvoirs ou de certaines
ressources.
Leurs fonctions sont variables. Elles s’inscrivent néces¬
sairement dans le cadre de l’activité même de l’organisa¬
tion dont il s’agit et, procédant d’un organe principal par
voie de délégation de compétence, ne peuvent sortir du
domaine imparti à l’Organisation elle-même mais qui
peut être fort vaste. On peut, selon l’activité qui leur est
confiée, distinguer des fonctions d’étude et d’information,
des fonctions diverses de règlement pacifique de différends
— rO. N. U. a ainsi créé diverses commissions de conci-
üation ou des comités de bons offices —, enfin des fonc¬
tions de gestion matérielle et l’on emploie alors l’expres¬
sion d’organismes de gestion [operational agencies).
574 ORGANISATIONS INTERNATIONALES

Nés de la pratique et de la vie elle-même, les organes


subsidiaires revêtent une grande plasticité juridique.
Ils n'ont pas nécessairement la personnalité internatio¬
nale mais certains ont une compétence fort étendue et
signent des accords internationaux avec d'autres organes,
subsidiaires ou principaux, avec des organisations, voire
avec des Etats.
Les organes subsidiaires par leur nombre et leur variété
sont aujourd'hui une manifestation essentielle de la
vitalité des organisations internationales et de l'impor¬
tance du rôle joué par celles-ci dans les domaines les plus
divers.

§ 3- — L’évolution institutionnelle.

Les organisations intergouvemementales apparaissent


à bien des égards comme procédant des anciennes confé¬
rences diplomatiques ; par rapport à ceUes-ci, sous la
pression des circonstances, une transformation institu¬
tionnelle considérable s'est opérée qui a abouti à la
création d'une institution juridique nouvelle.
On peut mesurer essentiellement sur deux plans l'im¬
portance de cette transformation, celui de l’égalité des
Etats, celui de la représentation étatique.

574. —, Égalité et structure. — Le principe de l’éga¬


lité des Etats domine la conférence diplomatique. Il se
trouve très généralement encore affirmé dans bien des
textes constitutifs d'organisations internationales, à
rO. N. U. en particulier, la Charte proclame dans son
article 2, § i®*" : « L’Organisation est fondée sur le principe
de l’égalité souveraine de tous ses membres ». Mais si
cette formule demeure exacte dans la mesure où, quelles
que soient les différences de puissance économique par
exemple entre les Etats membres, chaque État dispose à
l’Assemblée générale d’une voix, du moins convient-il
de remarquer que bien souvent, et à l’O. N. U. elle-même
l’égahté est « aménagée » sinon abandonnée.
Cet aménagement est généralement réahsé grâce aux
structures complexes des Organisations. Si certaines,
comme la Ligue arabe, l’O. C. D. E., l’A. E. L. E. ne com¬
portent qu’une seule assemblée ou si d’autres, comme
l’Organisation des États américains, réalisent la formule
formellement égahtaire, beaucoup d’organisations sont au
contraire à structure complexe et à côté de l’Assemblée
NATURE ET DÉVELOPPEMENT 575
OÙ sont représentés également tous les Membres existe
im « Conseil » plus restreint dans lequel siègent quelques
membres. Les membres qui sont appelés à siéger dans ces
conseils sont, pour partie au moins, désignés selon des
procédures diverses en considération de leur importance
eu égard au rôle confié à l’Organisation. Au Conseil de
l’Organisation internationale du travail, dès 1919, siègent
nécessairement dix États qui ont « l’importance indus¬
trielle la plus considérable » et des critères sont dégagés
pour la définir. Au Fonds monétaire international et à la
Banque internationale pour la reconstruction et le
développement siègent au Conseil d’administration,
parmi les 20 membres, les cinq États qui ont souscrit
le plus grand nombre de parts du capital. A l’O. A. C. I.
siègent au Conseü, en nombre non défini, les États les
plus importants en matière de trafic aérien. A l’Orga¬
nisation intergouvemementale consultative maritime sur
»n ensemble de seize membres siègent au Conseil néces¬
sairement douze États dont six sont les plus intéressés
à fournir des services internationaux de navigation mari¬
time et six autres sont les plus intéressés dans le com¬
merce international maritime. Dans cette même organi¬
sation le Comité de la sécurité maritime qui compte
quatorze membres comporte les huit États qui possèdent
les flottes de commerce les plus importantes (leur déter¬
mination a posé des problèmes et donné lieu à un avis
consultatif de la C. I. J. du 8 juin i960 concluant à la
prise en considération du tonnage immatriculé). D’une
manière fort compliquée les statuts de l’Agence inter¬
nationale de l’énergie atomique réservent au sein du
Conseil des gouverneurs une place prépondérante aux
États les plus avancés au point de vue de la technologie
de l’énergie atomique, y compris la production de matières
atomiques et la fourniture d’une assistance atomique.
Ces États ne sont pas seuls dans ces conseils, d’autres y
sont appelés à siéger pour assurer la représentation
géographique des diverses régions du monde, mais le
principe de l’égaüté est ici abandonné pour des raisons
évidentes de réalisme.

575. — Égalité et délibérations. — La règle de l’unani¬


mité découle logiquement de la règle de l’égahté. Or
Tunanimité est souvent abandonnée. La notion de majo¬
rité joue pour les recommandations de l’Assemblée
générale de l’O. N. U. et pour les délibérations du
576 ORGANISATIONS INTERNATIONALES

Conseil de sécurité qui concernent la procédure. Elle


joue également pour les autres questions sauf à l’égard
des membres permanents qui alors doivent voter unanime¬
ment, la pratique a réduit la portée de cette obligation
de la Charte, en cas d’abstention.
Diverses organisations, tout en affirmant le principe de
l’unanimité, admettent que l’abstention d’un État ne
fait pas obstacle à la validité de la délibération non
unanime dans les rapports entre les États l’ayant adoptée,
c’est la formule de l’unanimité relative (Ligue arabe,
O. C. D. E.-O. E. C. E.) ou même considèrent que s’abs¬
tenir n’est point voter contre et que l’unanimité est
atteinte s’il y a des abstentions mais pas de votes contre,
c’est la formule de la quasi-unanimité.
Bien souvent la règle de la majorité est adoptée. Elle
gouverne les délibérations des organes communautaires
des Communautés européennes. Elle joue aussi pour les
organes représentant les États, les Conseils des ministres.
Cette majorité doit remplir d’ailleurs diverses conditions
dans certains cas et l’on utilise la technique de la majorité
quahfiée ou encore celle dite de la pondération des
voix (voir supra, n° 495).

576. La représentation au sein de l’Organisation


internationale. — La conférence diplomatique est com¬
posée de représentants des États. De nos jours l’organi¬
sation internationale comporte la représentation des
États mais celle-ci n’est pas toujours exclusive.
Dès 1919 et selon une formule alors insohte, l’Organisa¬
tion internationale du Travail a prévu la représentation
à côté des États des employeurs et des travailleurs res¬
sortissants des États membres. Dans certains conseils
d’organisations complexes, les membres bien que désignés
normalement par les États ne les représentent pas. Cette
solution a joué pour l’U. N. E. S. C. O. jusqu’en 1954,
date à laquelle eUe a été abandonnée, on la trouve dans
l’Union internationale des télécommunications pour le
Bureau d’enregistrement des fréquences.
Mais l’exemple le plus net de l’atteinte portée actuelle¬
ment dans diverses organisations internationales à la
formule classique du monopole de représentation gou¬
vernementale apparaît avec l’existence des assemblées
diverses qui procèdent des Parlements et non des gouver¬
nements. La formule a été imaginée en 1949 avec le
Conseil de l’Europe et son Assemblée consultative, elle a
NATURE ET DÉVELOPPEMENT 577
été reprise ensuite dans le cadre de la C. E. C. A. et du
Conseil nordique en 1951, dans le projet de C. E. D. en
1952, puis en 1954 dans l’U. E. O. et dans le traité de
Bled constituant l’Entente balkanique, enfin en 1957
avec les traités de Rome. Le rôle de ces assemblées, sauf
pour les Communautés européennes demeure mineur,
mais il s'agit d’une étape dans l’évolution qui annonce
le stade des assemblées à plus large compétence élues par
les peuples qui marqueront une institutionnalisation plus
grande ; les États fédéraux à leur début ont comporté
bien souvent des phases analogues.

577. — La présidence des organes. — La formule


diplomatique de la présidence assurée par un représen¬
tant des États, avec des mécanismes de roulement se
rencontre souvent dans les organisations internationales.
Mais une certaine dissociation tend à s’opérer entre les
fonctions de représentation étatique et celles de prési¬
dence de l’organe international. A l’O. N. U. si le Prési¬
dent du Conseil de sécurité, appelé à siéger par roulement
pour une durée d’un mois, vote, il n’en va pas de même à
l’Assemblée générale, le Président ne prend pas part aux
scrutins et un membre de sa délégation le remplace pour
les votes. Une formule analogue mais plus nette puisqu’il
siège pour trois ans concerne le Président du Conseil de
l’O. A. C. 1.
Dans certaines organisations de caractère fort tech¬
nique, on ne se trouve plus en présence d’une dissociation
des deux fonctions mais d’une véritable incompatibilité.
La présidence échappe aux représentants des États pour
être confiée à des personnes indépendantes (Accord sur
l’étain. Conseil de l’étain) et aux véritables fonctionnaires
internationaux eux-mêmes. Ainsi au Fonds monétaire,
à la Banque internationale la présidence du Conseil
d'administration est assurée par le Directeur général ou
le Président qui ne votent pas sauf en cas de partage des
voix.
L’O. T. A. N. fournit un exemple très net d’évolution.
A l'origine le Conseil de l’Atlantique nord est présidé à
tour de rôle par les Ministres des Affaires étrangères puis
en 1952 il est décidé à la conférence de Lisbonne de créer
une fonction nouvelle, celle de Secrétaire général. Parmi
ses attributions se trouve la présidence du Conseil lorsque
celui-ci est réuni à l’échelon infra-ministériel, celui des
Représentants permanents. A l’échelon ministériel la
19. - INSTmmON8 INTBBNATIONAI.B8.
578 ORGANISATIONS INTERNATIONALES

présidence d’un Ministre est conservée et attribuée pour


un an à tour de rôle. Mais en 1956, sur le rapport du
Comité des Trois, il est décidé de confier la présidence du
Conseil, même se réunissant à l’échelon ministériel, au
Secrétaire général, les Ministres ne pouvant être nommés
que Présidents d’honneur. La tendance à l’institution¬
nalisation, l’abandon du « dédoublement fonctionnel »
sont ici manifestes.

BIBLIOGRAPHIE

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et fonctionnement des organisations internationales,
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internationale, théorie,, et méthodes, Cours de l’Institut des
Hautes Études Internationales de Paris, 1964-1965.
CHAPITRE II

LES MOYENS
DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES

Pour accomplir la mission qui leur est impartie par les


textes constitutifs et que développe la pratique, les
Organisations internationales doivent disposer de cer¬
tains moyens.

578. — La capacité juridique. — Sur le plan juridique


l’Organisation se voit généralement reconnaître par
l’acte constitutif ou par un autre acte une capacité
juridique, des privilèges et immunités sur le territoire
de chacun des États membres. A i;et égard un accord
particulièrement important est celui conclu par l’Organi¬
sation avec l’État sur le territoire duquel est établi son
siège. Cet accord généralement appelé « accord de siège »
précise l’étendue des immunités et privilèges et instaure
un système juridique particulier qui déroge à l’application
automatique du droit national territorial.
A propos de la question dite de la réparation des dom¬
mages subis au service des Nations Unies qui est apparue
après l’assassinat du Médiateur des Nations Unies en
Palestine, le comte Bernadette, la Cour internationale
de Justice dans son avis consultatif du ii avril 1949 a
déclaré que l’O. N. U. était le type le plus élevé d’organi¬
sation internationale et qu’elle ne pourrait répondre aux
intentions de ses fondateurs si elle était dépourvue de la
personnalité internationale. Elle a estimé qu’elle était
« revêtue de la compétence nécessaire pour lui permettre de
s’acquitter effectivement de ses fonctions » et admis que
LES MOYENS 581

a l Organisation est un sujet de droit international, ayant


capacité d etre titulaire de droits et de devoirs internationaux
et de se prévaloir de ses droits par voie de réclamation
internationale ». Ces formules, d’un ton particulièrement
élevé, concernent l’O. N. U. mais peuvent plus générale¬
ment s’appliquer aux organisations internationales.
Mais par-delà la capacité juridique, l’Organisation
internationale doit disposer de ressources matérielles et
de personnel.

I. — Le budget
des Organisations internationales.

Le fonctionnement de toute organisation internationale


entraîne évidemment des dépenses. Pour financer ces
dépenses l’Organisation internationale doit se procurer
des ressources.
Les actes constitutifs des diverses organisations
contiennent des dispositions générales relatives aux
finances de l’Organisation, ils sont complétés sur ce
point par les Règlements financiers. Les solutions
adoptées par les Règlements financiers sont du même
type que celles qui se trouvent dans les textes budgétaires
des divers Etats et les problèmes budgétaires tradition¬
nels se posent : annualité budgétaire-antériorité-unité.
Les procédures budgétaires présentent également des
analogies avec les solutions étatiques.

579. — Les contributions des États membres. — Les


ressources principales des Organisations internationales
sont constituées par les contributions versées par les
Etats membres. Le problème qui se pose est celui d'éta¬
blir la répartition des charges entre les États. La première
solution utilisée fut celle de la répartition des membres
entre diverses classes dont chacune est redevable d’un
certain nombre d’unités. Ce mécanisme est employé par
exemple à l’Union postale universelle et à l’Union inter¬
nationale des télécommunications, l’éventaü entre la
classe la plus basse et la classe la plus élevée peut évi¬
demment être plus ou moins largement ouvert. La
S. D. N. avait utihsé à l’origine le système des classes
avec un large éventail mais on y substitua par la suite le
mécanisme dit de la « capacité de paiement », tenant
compte pour déterminer les parts contributives des États
582 ORGANISATIONS INTERNATIONALES

des recettes budgétaires de 1913 et du chiffre de la popu¬


lation en 1919. avec d’aüleurs des dispositions spéciales
pour l’Inde et la Chine. En 1939 le budget de la S. D. N.
présentait une répartition en 917, 15 unités, le Royaume-
Uni contribuait pour 108 unités, l'U. R. S. S. pour 94,
la France pour 80.
Selon l’article 17, § 2 de la Charte, les dépenses de
l’O. N. U. sont supportées par les membres selon la
répartition fixée par l’Assemblée générale. Les bases
techniques qui sont apparues les plus équitables aux
Commissions d’experts furent « les montants comparables
du revenu national ». Le Comité des contributions élabora
des règles particuhères pour effectuer ce calcid. Pour
éviter des anomahes dans la répartition, le Comité tient
compte de divers facteurs qui permettent d’apporter des
corrections, üs sont au nombre de trois : revenu comparé
par habitant, désorganisation temporaire des économes
nationales provoquée par la deuxième guerre mondiale,
enfin mesure dans laquelle les États membres peuvent se
procurer des devises car le paiement se fait en principe
en dollars des États-Unis. Il a été par ailleurs fixé des
limites maximales et minimales de manière à éviter que
l’indépendance de l’Organisation soit menacée par les
États économiquement plus puissants. Le premier
barême établi par le Comité^ des contributions aboutissait
à une quote part pour les États-Unis de 49>®9 % Avec à
l’autre bout de l’échelle des quote-parts de 0,02 pour le
Costa Rica ou Haïti. Une résolution de l’Assemblée
générale (238/III) du 18 novembre 1948 a décidé qu’aucime
contribution ne peut dépasser le tiers, ultérieurement on
décide (Rés. 1137,-XII du 14 octobre 1957) de réduire la
quote-part de l’État membre qui verse la contribution
la plus élevée lorsque de nouveaux États seraient admis
à l’O. N. U. Ainsi la contribution des États-Unis a-t-elle
été ramenée à 32,51 % en 1958 à 32,02 pour 1962-1964
et pour le barême de 1965 à 1967 à 31,91 %.
Le budget des diverses organisations internationales
est en général alimenté, selon des solutions voisines, par
des contributions.
On doit d’ailleurs noter que si les États-Unis supportent
ainsi une part considérable du budget de l’O. N. U., üs
bénéficient de l’installation de l’Organisation sur leur
territoire et conune ils n’accordent pas d’exonération
d’impôts aux fonctionnaires de l’Organisation de natio¬
nalité américaine et que l’Organisation rembourse aux
LES MOYENS 583
fonctionnaires de nationalité américaine l’impôt qu’ils
ont payé, le Trésor américain bénéficie d'une contribu¬
tion versée par l’Organisation et qui vient en déduction
de la contribution des États-Unis, il s’agit d’ailleurs de
sommes infiniment plus faibles.
Les solutions utilisées à l’O. N. U. pour la fixation
des contributions sont très généralement utilisées dans
les diverses organisations internationales.

580. — Organisations internationales et pouvoir


— Quelques organisations peuvent, en vertu de leurs
trdtés constitutifs, instituer des impôts qu’eUes per¬
çoivent ou pourr^ent percevoir directement sur les
ressortissants des États membres. La C. E. C. A. n'a
recouru aux contributions des États membres qu’à
titre provisoire, pour faire face aux premières dépenses
administratives et a ensuite utilisé la formule des prélè¬
vements sur les entreprises de production de charbon ou
d’acier (art. 49). Pour les autres Communautés l’ar¬
ticle 201 du traité C. E. E. et l’article 173 du traité
Euratom prévoient que les contributions financières des
Etats membres pourront être remplacées en tout ou en
partie par le produit de prélèvements perçus par la
Communauté dans les États membres.
En dehors de la C. E. C. A. qui a institué ce qu’on a
appelé « le premier impôt européen », les autres Commu¬
nautés ont gardé la solution des contributions sans faire
encore usage des formules du prélèvement, mais l’organi¬
sation du marché commun agricole comporte l’institu¬
tion de prélèvements destinés en particulier à financer
le Fonds d’orientation agricole.

581. — Autres ressources. — Les organisations inter¬


nationales possèdent parfois d’autres ressources que les
contributions des États membres. Parmi ces ressources
figure l’emprunt. L’O. N. U. a eu recours à l’emprunt à
diverses reprises, en 1948 pour la construction de son
siège à New York, en 1957 pour la modernisation du
Palais des Nations à Genève, ensuite pour faire face aux
dépenses opérationnelles du dégagement du Canal de
Suez et plus récemment pour assurer le financement des
activités opérationnelles pour le maintien de la paix,
tout partieuhèrement l’entretien des forces des Nations
Unies au Congo.
Les organisations possèdent parfois d’autres sources de
ORGANISATIONS INTERNATIONALES
584
financement, ainsi l’O. N. U. a-t-elle des recettes commer¬
ciales, essentiellement la vente des timbres-poste.

582. — Les dépenses. — Les dépenses des organisa¬


tions intemation^es posent divers problèmes, celui de
leur montant, celui de leur classification qui commande
le caractère obligatoire.
Du point de vue du montant on peut dire que les
dépenses des organisations tendent à augmenter. On
pourrait transposer sur le plan des organisations interna¬
tionales la loi de Wagner. A l’O. N. U. par exemple le
budget annuel fait apparaître l’augmentation des crédits
prévisionnels. Inférieurs à 20 millions de dollars en 1946
ils s’élèvent à près de 90 en 1963 et dépassent 100 en
1964, 120 en 1966, approchent 130 en 1967. Ainsi en vingt
ans le budget administratif normal a sextuplé. Un mou¬
vement analogue est enregistré pour les budgets des diverses
organisations. Les contributions des États membres de
rO. N. U. et des institutions spécialisées atteignaient
dans l’ensemble 232 millions de dollars en 1965, les mises
en recouvrement pour 1966 et 1967 étaient respectivement
de 266 et de 286 millions de dollars.
Mais les organisations internationales actuelles ne sont
pas simplement des « machines administratives » plus ou
moins complexes, elles tendent à développer leur activité,
elles assurent de plus en plus des services publics interna¬
tionaux. Le financement de ces activités dites « opéra¬
tionnelles » pose des problèmes. Doit-il être assuré dans
les mêmes conditions que celui des dépenses administra¬
tives normales de l’organisation ? Le problème s’est posé
aux Nations unies. Comme on l’a vu {supra, n® 413), la
Cour internationale de justice dans un avis du 28 juil¬
let 1962 a considéré que les dépenses opérationnelles de
la Force d’urgence des Nations unies et de la Force des
Nations unies au Congo sont obligatoires pour les États
membres et doivent être réparties selon les mêmes clefs
que les dépenses administratives. Ces dépenses sont consi¬
dérables. Celles relatives aux opérations du Congo se
sont élevées, entre i960 et 1964, à 275 millions de dollars.
Elles ont été en 1961 de l’ordre de 100 milhons de dollars
alors que le budget ordinaire pour la même année était
de l’ordre de 71.
En ce qui concerne les forces de l’O. N. U. à Chypre
les dépenses faites par l’O. N. U. et les remboursements
LES MOYENS 585

demandés par les gouvernements étaient à la fin de l’an¬


née 1966 de 60 millions de dollars.

583. — Les dépenses obligatoires. — Les dépenses


des Organisations normalement doivent être couvertes
par des cotisations qui ont un caractère obligatoire pour
les États.
On sait (voir supra n° 413) que la question s’est posée,
à rO. N. U., de savoir si les dépenses entraînées par les
opérations du Congo constituaient des dépenses de
caractère obügatorre. La Cour internationale de justice,
dans un avis consultatif, a statué en ce sens. Mais divers
États ont refusé de verser les cotisations correspondantes
par application du barême. Ils se sont trouvés dès lors
en arriéré de leurs cotisations. Évidemment il n’existe
pas de voies d’exécution à l’encontre d’un État finan¬
cièrement défaillant, mais l’article 19 de la Charte de
l’O. N. U. prévoit une sanction : le membre en retard
dans le paiement de sa contribution aux dépenses de
l’Organisation ne peut participer au vote de l’Assemblée
générale si le montant de ses arriérés est égal ou supérieur
à la contribution due par lui pour les deux années com¬
plètes écoulées.
Le problème de la privation du droit de vote, à l’Assem¬
blée, de l’U. R. S. S. qui lors de la session de 1964 se
trouvait devoir plus de deux années de cotisations a été
soulevé par les États-Unis lors de la 19® session. Il est
apparu très difficile de mettre en application l’article 19.
On a eu recours lors de cette session à divers subterfuges.
On a renoncé, pour les élections au Conseil de sécurité,
à des votes formels et procédé à des « désignations ».
Et finalement la 19® session a été écoirrtée en attendant
que soit trouvée une solution qu’un Comité spécial dit
des 33 était chargé de rechercher. Il est apparu, en effet,
que l’Assemblée générale n’adopterait pas, à la majorité
des 2/3, une résolution privant l’U. R. S. S. de son droit
de vote. Finalement, à la veille de la 20® session les États-
Unis ont renoncé à soulever la question. La Commission
chargée du financement des opérations de paix a adopté
un texte selon lequel la question de l’apphcabilité de
l’art. 19 de la Charte ne sera pas soulevée en ce qui
concerne la F. U. N. U. et l’O. N. U. C.
L’Assemblée générale, à la XX® session, a adopté une
résolution (2049 du 13 décembre 1965) instituant un
Comité ad hoc d’experts chargé d’étudier les finances de
586 ORGANISATIONS INTERNATIONALES

BUDGETS ADMINISTRATIFS ANNUELS


DE L’O. N. U.

Exercice financier Montant en $

1946 19.390.000
1947 28.616.568
1948 39.285.736
1949 43.204.080
1950 44.520.773
1951 48.925.500
1952 50.547.660
1953 49.869.450
1954 48.528.980
1955 50.228.000
1956 50.683.850
1957 53.174.700
1958 61.121.900
1959 61.657.100
i960 65-734-900
1961 71.649.300
1962 85.818.220
1963 92.876.550
1964 101.327.600
1965 107.111.392
1966 121.567.420

BUDGETS d’institutions SPÉCIALISÉES

Exercice Montant

O.I.T. 1966 21.034.412 $


O.A.A. 1966 24-915-950 $
UNESCO 1966 27.190.185 $
O.M.S. 1966 44.481.800 $
O.A.C.I. 1966 7.565.650 $
O.M.M. 1966 2.258.945 S
U.I.T. 1966 4.900.715 $
U.P.U. 1966 1.133.918 $

BUDGETS d’autres ORGANISATIONS

Conseil de l’Europe 1966 31.043.486 Frs. Français


Euratom tranche 1966 15.016.469 $
C.E.E 1966 369-559.410 *
LES MOYENS 587

rO. N. U. et des institutions spécialisées afin d’assurer


une meilleure utilisation des crédits disponibles.
Le problème du non paiement, dans le cadre de
rO. N. U., à propos des opérations du Congo, a revêtu
une grande importance et sur un plan politique mais la
difiiculté, en elle-même, se retrouve dans diverses organi¬
sations internationales.

584. — Les contributions volontaires. — A côté


des contributions obligatoires qui concernent les dépenses
administratives normales et celles qui sont soumises à
ce même régime par application d’un avis consultatif
3ar exemple, existent des contributions facultatives qui
>euvent être accordées ou refusées par les États et dont
e montant n’est pas prédéterminé par une clef de répar¬
tition.
La formule des contributions volontaires a été largement
utilisée dans le cadre de l’O. N. U. en matière par exemple
de progranune élargi de l’assistance technique, et aussi
pour le financement du Fonds spécial de développement
économique (S. U. N. F. E. D.). Les contributions volon¬
taires des États sont versées à un compte spécial de
l’Organisation qui est géré d’une manière distincte par
rapport au budget général et qui se présente sous la
forme d’une sorte de Compte spécial faisant songer aux
Comptes spéciaux du Trésor du droit budgétaire français.
L’évolution des montants dont disposent ces Fonds est
également marquée par une extension continue.
Les contributions volontaires ont parfois été utilisées
en dehors de l’assistance technique. En 1965 l’O. N. U. a
reçu ainsi plus de 17 millions de dollars pour améliorer
sa situation financière.

§ 2. — Les fonctionnaires internationaux.

On désigne sous le nom de fonctionnaires internationaux


un ensemble de personnes qui sont chargées d'assurer le
fonctionnement des organisations internationales. Leur
activité professionnelle est ainsi consacrée à un but
international et, pour leur permettre d’assurer au mieux
leurs fonctions, üs sont soumis à un statut juridique
particulier.
588 ORGANISATIONS INTERNATIONALES

A. — Définition du fonctionnaire international.

Il convient de distinguer le fonctionnaire international


du représentant d’un État ou du fonctionnaire d'un État.

585. — Le fonctionnaire international. — Dans son


ouvrage classique La condition juridique des fonction¬
naires internationaux, Mme Suzanne Bastid a donné la
définition suivante : « Est fonctionnaire international
tout individu chargé par les représentants de plusieurs
États ou par un organisme agissant en leur nom, à la
suite d’un accord interétatique et sous le contrôle des
uns ou de l’autre, d’exercer, en étant soumis à des régules
juridiques spéciales, d’une façon continue et exclusive
des fonctions dans l’intérêt de l’ensemble des États en
question ».
Quatre éléments déterminent ainsi la notion de fonc¬
tionnaire international :
1° Le fonctionnaire international est au service non pas
d’un État particulier ni de divers organismes privés de
nationalités différentes, mais d’une administration inter¬
nationale qui ne dépend pas d’un État mais de l’ensemble
des États membres. Le fonctionnaire international
s’oppose à l’agent d’une association internationale quel¬
conque, d’une organisation non gouvernementale.
2° Le fonctionnaire international agit pour la satisfac¬
tion des buts poursuivis par l’Organisation, ü ne se
préoccupe pas des intérêts particuliers d’un État membre
mais des intérêts de la communauté internationale
considérée tout entière. Une difficulté peut surgir lorsque
les fonctions confiées au fonctionnaire sont localisées sur
le territoire d’un État. La notion de compétence territo¬
riale particulière demeure compatible avec la notion de
fonctionnaire international. Le médiateur des Nations
Unies en Palestine était un fonctionnaire de rang parti¬
culièrement élevé et la qualité de fonctionnaire interna¬
tional a été reconnue par le Tribunal de l’0.1. T. à im
certain nombre d’employés de l’Office de secours et de
travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine
dans le Proche-Orient. Des fonctionnaires de l’O. N. U.
ont des compétences localisées territorialement avec les
Commissions économiques d’Europe, d’Asie, d’Amérique
latine et d’Afrique.
3° Le fonctionnaire international peut être caractérisé
d’une manière négative comme n’étant pas au service
LES MOYENS 589

d’un État, ne faisant pas partie sous réserve de détache¬


ment des cadres administratifs d’un État. Ainsi les
officiers des commandements de l’O. T. A. N. ne sont
pas des fonctionnaires internationaux mais nationaux.
Il en allait de même pour les troupes dites des Nations
Unies combattant en Corée, la révocation du commandant
en chef par le président des États-Unis a fourni à cet
égard im exemple typique.
40 Le fonctionnaire international doit remphr une
dernière condition, ü doit se consacrer entièrement à
son activité de fonctions. Le fonctionnaire international
est employé à plein temps par l’Organisation internatio¬
nale et d’une manière continue. Il existe des contrats dits
temporaires mais pendant leur durée le fonctionnaire est
entièrement au service de l’Organisation. La notion de
continuité permet d’opposer le fonctionnaire international
au simple agent international investi d’une fonction
discontinue. Les experts techniques, les membres d’une
commission d’arbitrage ou de conciliation ou des tribu¬
naux administratifs ne sont pas des fonctionnaires
internationaux. Il en va de même des membres des
Conseils de certaines organisations qui ne sont pas dési¬
gnés en tant que représentants des États mais par réfé¬
rence à leurs aptitudes personnelles, ainsi les membres
de la Commission de navigation aérienne de l’O. A. C. L,
les membres du Comité international d’enregistrement
des fréquences de l’U. I. T. et, avant la résolution de 1954,
les membres du Conseil exécutif de l’U. N. E. S. C. O.

B. — Statut des fonctionnaires internationaux.

a) la nomination et répartition.

586. — Nomination. — L’intervention des États eux-


mêmes dans la nomination des fonctionnaires interna¬
tionaux ne se produit d’une manière directe que pour les
fonctionnaires de rang très élevé, les juges des Cours
internationales, les Secrétaires généraux des organisa¬
tions.
Le pouvoir de nomination des fonctionnaires inter¬
nationaux membres des secrétariats n’appartient pas aux
États membres mais à l’Organisation eUe-même, il est
normalement exercé par le Secrétaire général ou le direc¬
teur général. Cette solution prévue par l’article loi.
ORGANISATIONS INTERNATIONALES
590

§ ler de la Charte de l’O. N. U. se retrouve dans les


diverses organisations.
Les conditions de recrutement sont fixées par des
textes généraux. La Charte de l’O. N. U. contient des
dispositions qui constituent une solution type. Elle
précise dans le § 3 de l’article lOi que les fonctionnaires
devront posséder les plus hautes quahtés de travail, de
compétence et à!intégrité. Cette formule se retrouve a
peu près textuellement dans beaucoup d’organisations,
notamment les institutions spécialisées.
L’intégrité n’a pas été définie par le texte mais elle est
distincte, selon la jurisprudence des tribunaux adminis¬
tratifs, de la notion de « loyalisme » envers un Etat déter¬
miné dont le fonctionnaire se trouve ressortissant.

587. — La répartition géographique, -y Le secrétariat


d’une organisation internationale doit faire place à des
fonctionnaires de diverses nationalités. Mais dès lors un
problème se pose, celui de la répartition même des postes.
Avec un système rigide de répartition par État on assure
la structure véritablement internationale du corps des
fonctionnaires, mais il n’est pas sûr que l’on puisse ainsi
recruter les meilleurs des candidats au service pubhc
international. Les textes, après avoir posé le principe
d’un recrutement fondé sur les quahtés personnelles de
travail, de compétence, d’intégrité, prévoient en général,
selon la formule même de la Charte (article loi, § 3), que
« sera dûment prise en considération l’importance d’un
recrutement effectué sur une base géographique aussi
large que possible ». Ce résultat a été en général obtenu.
Le système généralement utihsé est un système souple qui
tend à établir un rapport entre le taux de contribution
financière de l’État à l’organisation et le pourcentage de
fonctionnaires.

b) la situation du fonctionnaire international.

D’un point de vue juridique la situation du fonction¬


naire international peut être déterminée par référence
à la formule contractuehe ou à la formule statutaire.
Dans le cadre de l’O. N. U., le Tribunal administratif a
rejeté la solution contractuelle et considéré que l’engage¬
ment temporaire de durée indéfinie qui existe entre l’Orga»
nisation et le fonctionnaire s’apparente à la solution
statutaire. La formule contractuelle semble prévaloir
LES MOYENS 591

dans les institutions spécialisées mais les Communautés


européennes au contraire adoptent la solution statutaire.
(Voir Règlement n® 31. C. E. E. Rég. ii C. E. E. A.
fixant le statut des fonctionnaires, du 18 décembre 1961.)

588. — Les obligations du fonctionnaire international.


— Le fonctionnaire international doit accomplir les
devoirs de sa charge, se consacrer d'une manière exclusive
à son travail. Les textes prévoient parfois certaines
incompatibilités. Le personnel de la C. E. C. A. ne peut
en principe acquérir aucun intérêt dans les industries
relevant de la juridiction de la communauté. Les fonc¬
tionnaires du C. E. R. N. ne peuvent exploiter commer¬
cialement xme invention qu’ils ont faite dans le cadre de
leurs fonctions. Les membres de la Cour internationale
de justice ne peuvent se livrer à aucune activité profes¬
sionnelle, exercer les fonctions de conseü, d'avocat.
Tenu au secret professionnel, animé d’un esprit inter¬
national qui procède de la compréhension des fins de
l’organisation qu’ü sert, le fonctionnaire international doit
savoir agir avec tact et discrétion. Sur le plan pohtique le
fonctionnaire international demeure évidemment le
citoyen d’un État, mais il doit s'abstenir de toute activité
pohtique, et l’article 17 du Statut du personnel de
l’O. N. U. tel qu’il a été modifié le 9 décembre 1953 précise
cette situation : « Les fonctionnaires peuvent exercer le
droit de vote, mais ils ne peuvent se hvrer à aucune
activité pohtique qui soit incompatible avec l’indépen¬
dance et l’impartiahté qu’exige leur quahté de fonction¬
naires internationaux ou qui puisse en faire douter ».
Les obhgations qui pèsent ainsi sur le fonctionnaire
ont un contenu international, parmi eh es ne figure
point le « loyahsme » à l’égard de l’État d’aUégeance.
L’article 100 de la Charte pose d’aiheurs les principes
généraux qui définissent le caractère international des
fonctionnaires. Il précise que dans l’accomphssement de
leurs devoirs le secrétaire général et le personnel ne soUi-
citeront ni n’accepteront d’instructions d’aucun gouverne¬
ment, ni d’aucune autorité extérieure à l’Organisation.
Ils s’abstiendront de tout acte incompatible avec leur
situation de fonctionnaires internationaux et ne sont
responsables que devant l’Organisation.
En contrepartie, le paragraphe 2 obhge chaque membre
à respecter le caractère exclusivement international des
592 ORGANISATIONS INTERNATIONALES

fonctions du secrétaire général et du personnel et à ne pas


chercher à les influencer dans l’exécution de leur tâche.

589. — Les droits des fonctionnaires internationaux.


— Le fonctionnaire international perçoit un traitement
qui est en général élevé en compensation de l’éloignement
par rapport au pays d’origine pour tous les fonction¬
naires qui ne sont pas des ressortissants de l’État du
siège. Il existe des mécanismes de pensions, de retredte.
Les fonctionnaires internationaux possèdent le droit
d’association. Les associations syndicales constituées
dans les diverses organisations sont groupées dans une
Fédération des Associations de fonctionnaires interna¬
tionaux qui représente ainsi quelques lo.ooo fonctionnaires
internationaux dont plus de la moitié sont des fonction¬
naires de ro. N. U.

590. — Les privilèges et immunités. — Selon l’ar¬


ticle 105, § 2 de la Charte qui est reproduit dans presque
tous les textes constitutifs «les fonctionnaires de l’Organi¬
sation jouissent également des privilèges et immunités
qui leur sont nécessaires pour exercer en toute indépen¬
dance leurs fonctions en rapport avec l’Organisation ».
C’est donc sur la notion même des nécessités du fonc¬
tionnement de l’institution internationale que reposent
les privilèges et immunités. Divers accords internatio¬
naux, notamment les accords de siège, reconnaissent les
immunités des fonctionnaires internationaux.
Le privilège fiscal pose un problème particuher car il
est dans l’intérêt du fonctionnaire lui-même. Les États-
Unis ont refusé d’accorder l’exonération fiscale aux
fonctionnaires des Nations unies, par exemple, de natio-
nahté américaine. L’Organisation rembourse à ces
fonctionnaires le montant de ces impôts pour qu’üs
perçoivent le même traitement que ceux d’autres nationa-
Htés.

591. — Les garanties du fonctionnaire international.


— La protection du fonctionnaire international, destinée
à assurer sa sécurité juridique, est assurée par l’interven¬
tion d’organismes administratifs et d’organismes juridic¬
tionnels. Il existe ainsi divers comités administratifs de
type paritaire.
La meilleure garantie dont dispose le fonctionnaire
international se trouve dans l’existence d’un tribunal
LES MOYENS 593

administratif indépendant qui puisse trancher le litige


survenant entre l’Organisation et le fonctionnaire.
Il existe notamment im tribunal administratif de
rO. I. T. qui n’est autre que l’ancien tribunal adminis¬
tratif de la S. D. N. et dont la compétence s’étend à
d’autres institutions spécialisées et à certaines organisa¬
tions internationales.
Le tribunal administratif de l’O. N. U. institué en
1949 a joué un rôle important à la période de la « chasse
aux sorcières » et accordé des indemnités à des fonction¬
naires qui avaient été licenciés à tort. La question s’est
posée de savoir si l’Assemblée était hée par les jugements
du Tribxmal. Un avis consultatif fut demandé sur ce
point à la Cour internationale de justice qui conclut que
l’Assemblée ne peut refuser d’exécuter un jugement du
Tribimal accordant une indemnité à un fonctionnaire de
l’Organisation (avis du 13 juillet 1954). Ultérieurement
une instance de recours a été créée permettant dans
certaines conditions une révision du jugement.

BIBLIOGRAPHIE

Sur la capacité juridique des organisations, voir :


Zemanek (K.), Das Vertragsrecht der internationalen
Organisationnen, Wien, Springer Verlag, 1957; Schnei¬
der (J. W.), Treaty-making Power of international orga-
nizations, Genève, 1959; Dupuy (R.-J.), Le droit des rela¬
tions entre les organisations internationales, R. C. A. D. I.,
i960, t. II; Kasme (B.), Le droit de l’O. N. U. de conclure
des traités, Paris, i960; Rouyer-Hameray (B.), Les
compétences implicites des organisations internationales,
Paris, 1962; SociNi (R.), GU accordi internazionali dette
organizzazioni intergovernative. Milan, 1962.
Sur les privilèges et immunités des organisations :
Nguyen Quoc Dinh, Les privilèges et immunités des
organismes internationaux d’après les jurisprudences
nationales depuis ig45, A. F. D. I., 1957, p. 262 et s.;
Cahier (P.), Études des accords de sièges conclus entre les
organisations internationales et les États où elles résident.
Milan, 1959; Nations unies. Série Législative, Textes
législatifs et dispositions de traités concernant le statut
juridique, les privilèges et immunités d’organisations
internationales, ST/ LEG/ SER. B/io.
594 ORGANISATIONS INTERNATIONALES

Sur le secrétariat et les fonctionnaires :


L’ouvrage fondamental demeure : La condition juri¬
dique des fonctionnaires internationaux, de S. Basdevant,
thèse, Paris, 1930 ; Ranshofen-Westheimer (E.-F.),
The international Secrétariat. A great experiment in interna¬
tional administration, Washington, 1945; Giraud (E.), Le
secrétariat des organisations internationales, R. C. A. D. I.,
1951, vol. 79; ScHWEBEL (S.), The origin and devdopment
of article 99 of the Charter, the powers of the Secretary
General of the U. N., British Yearbook of international
law, 1951, p. 371 et s.; Bastid (S.), Statut juridique des
fonctionnaires internationaux, The U. N. ten years legal
progress, 1956 ; Loveday (A.) Reflections on international
administration. Oxford, 1956; Statut du personnel de
l’O. N. U., texte dans l’A. F. D. I., 1957, p. 136-174;
Crozat (C.), Recueil de la fonction publique internationale,
Annales de la Faculté de droit d’Istambul, 1957; Bas-
TID (S.), Les tribunaux administratifs internationaux et
leur jurisprudence, R. C. A. D. I., 1957, vol. 92; Bed-
JAOUI (M.), Fonction publique internationale et influences
nationales, Londres, 1958; Cuille (G.), Le statut juridique
des fonctionnaires internationaux, thèse Paris, 1959;
Vellas (P.), L’évolution récente du statut des fonction¬
naires internationaux, Mel. Maury, 1959; Bedjaoui (M.),
Les tribunaux administratifs internationaux. Jurisclasseur
de droit international, fasc. 230 et 231, i960; Daus-
SIN (A.), Vers une fonction publique européenne; Annuaire
Européen, i960, p. 122 et s.; Jenks (W.), International
immunities, Londres, 1961; Salmon (J.), La Beneficiary
Form, A. F. D. L, 1961, p. 524-535; Goodrich (L.-M.),
Geographical distribution of the staff of the U. N., Inter¬
national Organization, 1962, n° 3, p. 465 et s. ; Bloch (R.),
et Lefevre (J.), La fonction publique internationale et
européenne, Paris, 1963; Langrod (G.), La fonction
publique internationale, Leyde, 1963; SiOTis (J.), Essai
sur le secrétariat international, Genève, 1963; Weil (P.),
La nature du lien de fonction publique dans les organisa¬
tions internationales, R. G. D. I. P., 1963, p. 273-296;
Bastid (S.), La nature réglementaire ou contractuelle du
lien des fonctionnaires et des institutions des communautés
européennes, Rivista di diritto europeo, avril 1964,
p. 135-148; Knapp (B.), Les privilèges et immunités des
organisations internationales et de leurs fonctionnaires
devant les tribunaux internationaux, R. G. D. I. P., 1965,
LES MOYENS 595

p. 615-681; Lassalle (C.), Aspects de la fonction publique


européenne, R. G. D. I. P., 1965, p. 682-741.
Voir dans TA. F. D. I. la jurisprudence des tribunaux
administratifs internationaux.
Sur les finances des organisations :
VoLLMAR, Les finances de la S. D. N., La Haye, 1924;
Kunstenaar (J.), Der Finanzhalt des Vôlkerbundes,
thèse Zürich, 1932; Jacklin (S.), The finances of the
League, International Affairs, septembre 1934: Marcan-
TONATO (G.), L’administration financière de la S. D. N.,
thèse Paris, 1938; Jenks (W.), Some legal aspects of the
financing of international institutions, Transactions of
the Grotius Society, XXVIII, 1943; Sommer (A.), Les
finances de l’O.N.U., thèse Zürich, 1951; Schelling
(T. C.), International cost sharing arrangements, Prin¬
ceton, 1955: CoLLiARD (C.-A.), Finances publiques inter¬
nationales, Revue de science financière, 1958, p. 237-260,
437-460, 679-697; Weides (N. P.), Bas Finanzrecht
der Europàischen Gemeinschaft für Kohle und Stahl.
Fin Beitrag zur Lehre vom internationalen Finanzrecht,
Francfort, i960; Singer (J. D.), Financing international
organization, the U. N. budget process, La Haye, 1961 ;
SzAWLOWSKi (R.), The budget and the budgetary law
of an international governmental organization, Finances
publiques, 1961, p. 1-23; sar Cem, Les finances de
VO.N.U., thèse Paris. 1962; Stoessinger (J. G.),
Financing the United Nations System, Washington, 1964»
Gross (E. a.), Expenses of the U. N. for Peace-keeping-
operations, International Organization, 1963, n" i.
Deuxième Sous-Partie

LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE

Les problèmes financiers, économiques, techniques.


Agencement et développement économiques.

La notion d’État est traditionnellement liée à la notion


d’une domination politique sur un territoire donné. Les
relations entre les États appelées assez curieusement
• relations internationales sont longtemps apparues comme
se situant sur le plan politique. Mais en ré^té un État
n’est pas seulement un pouvoir politique, c’est un ensemble
d’activités économiques, un ensemble de services et les
relations entre les Etats ne peuvent pas se réduire à de
simples relations politiques.
Une constatation analogue doit être faite en ce qui
concerne les organisations internationales. Il apparaît
nettement que si certaines d’entre elles ont une vocation
politique, si d’autres ont une vocation militaire, beaucoup
d’entre elles possèdent une finalité économique.
Dans la seconde partie de cet ouvrage, consacrée à
l’étude de la solidarité internationale, une première sous-
partie a traité des diverses organisations existant entre
les États et décrit donc les structures institutionnelles
qu’elles présentent, il n’a pu être fait abstraction dans
cette étude de certains aspects économiques qui pour
telle ou telle organisation ont une importance parti¬
culière, conditionnent son existence, mais cette étude
n’a été qu’adjacente. Il convient de présenter à titre
principal les problèmes économiques qui se posent dans
le cadre international en les examinant évidemment
598 LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE

SOUS l’aspect des solutions juridiques et politiques qui


peuvent être imaginées. Le mot économique doit être
pris d’ailleurs dans une acception générale. L’économie
est conditionnée d’une part par la technique elle-même,
par ailleurs elle est également liée aux questions finan¬
cières. Le développement de la production, l’ampleur du
commerce international dépendent de facteurs techniques
comme de facteurs financiers.
Les pages qui suivent sont relatives à l’étude des
problèmes non plus pohtiques mais économiques, tech¬
niques et financiers qui apparaissent à l’échelle interna¬
tionale, au niveau des régions, des continents et de
l’humanité tout entière.
Aujourd’hui, en effet, en raison des progrès techniques
qui constituent des conditions plus favorables au renfor¬
cement de la soHdarité internationale, c’est dans le cadre
général de la Communauté internationale tout entière
qu’il faut poser le problème de la satisfaction des besoins
des hommes.
C’est sous cet angle qu’il convient de présenter et.
d’expüquer les institutions qui tendent à l’agencement
économique de la Communauté internationale, tendant à
réahser une sorte de bien commun malgré les différences >
qui existent entre des États divers non seulement quant,
à la puissance pohtique mais aussi quant à leurs niveaux :
de développement économique.
Cette analyse, dans le cadre d’un enseignement à’Ins--
titutions internationales qui s’adresse à des étudiants aui
début même de leurs études, ne peut être entreprises
que d’une manière sommaire et schématique.
Trois thèmes principaux seront présentés. Celui dui
commerce international en général, celui du développe--
ment économique, celui enfin des gestions techniques s
communes.
Ils font l’objet de trois titres.
TITRE PREMIER

LE COMMERCE INTERNATIONAL

Parmi les divers problèmes que pose, d’une manière


générale, le commerce international, considérés du point
de vue des institutions internationales, on peut en dis¬
tinguer, essentiellement, trois séries. Les premiers se
réfèrent au cadre monétaire dans lequel s’inscrivent les
échanges internationaux. Les seconds concernent l’exis¬
tence d’une liberté commerciale qui permettrait l’accrois¬
sement de ces échanges
Les troisièmes se situent presque à l’opposé des seconds
puisqu’ils sont relatifs aux réglementations particulières
qui peuvent régir le commerce de certains produits et
qui aboutissent à des marchés organisés, ou au moins
à des tentatives d’organisation.

* Les questions qui ont trait à la liaison pouvant exister entre le coninierce
international et le développement sont étudiées à propos du développement,
dans le titre it de cette sous-partie, chap. i (voir infra n® 626 et s.).
!
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CHAPITRE PREMIER

LA COOPÉRATION MONÉTAIRE INTERNATIONALE

Le commerce international pose la question des


paiements et par voie de conséquence des problèmes
monétaires. Il est évidemment rendu plus facile par
l’existence de changes stables entre les monnaies natio¬
nales et celle d’une convertibilité.
Diverses institutions ont pu être établies sur un plan
régional ou dans le cadre d’organisations internationales
non universelles, par exemple l’Union européenne des
paiements et l’Accord monétaire européen dans le cadre
de rO. E. C. E. D’un point de vue plus général l’institu¬
tion la plus importante est le Fonds monétaire inter¬
national.

592. — Le Fonds monétaire intemationïJ. — Le


F. M. I. a été créé par la conférence de Bretton Woods
de 1944. Il est entré en vigueur en décembre 1945. Le
Fonds est une organisation internationale qui a le statut
d’institution spécialisée des Nations unies. Il présente
la structure habituelle des institutions spéciahsées dont il
a constitué la préfiguration avec ime structme « bicamé¬
rale » et un secrétariat international. Le Fonds comporte
im Conseil des gouverneurs composé de représentants de
chacun des États membres et un Conseil d’administration
plus restreint, actuellement de 20 membres. Parmi les
administrateurs cinq sont désignés pour représenter les
cinq États membres disposant des quotes-parts de capital
souscrit les plus élevées, les autres sont élus selon les
procédures complexes et assurent la représentation d’autres
602 COMMERCE INTERNATIONAL

États selon des formules de caractère géographique. Un


Directeur général choisi en dehors des Gouverneurs et des
administrateurs assure la présidence du Conseil d'admi¬
nistration et gère les affaires du Fonds sous le contrôle
des administrateurs. Les votes dans les assemblées inter¬
viennent selon les deux principes de la majorité et de la
pondération des voix. Chaque État dispose en effet de
250 voix en tant que Membre et en outre d’une voix
supplémentaire pour chaque fraction de sa quote-part
équivalente à 100.000 dollars des États-Unis. Le F. M. I.
apparaît comme une Banque au capital de laquelle chaque
État souscrit, la souscription s’effectuant pour partie en or
(au plus 25 % de la quote-part), pour partie en monnaie
nationale.
Le Fonds compte, en 1967, 106 membres. Toutefois les
États sociahstes, à l’exception de la Yougoslavie, n’en
font pas partie. Le total des souscriptions dépasse légère¬
ment 21 milliards de dollars après le relèvement des
quotas décidé à la conférence de Tokyo de 1964.

593. — Activité et rôle du Fonds. — Le F. M. 1. a


été créé pour favoriser la coopération monétaire inter¬
nationale, afin d’obtenir la stabilité des changes destinée
à éviter des dépréciations de surenchère, lutter contre le
déséquilibre des balances internationales des paiements
et d’une manière générale donner en quelque sorte
confiance aux États les ims dans les autres. La stabilité
monétaire recherchée est un moyen de faciliter l’expan¬
sion et la croissance harmonieuse du commerce inter¬
national, un moyen aussi de favoriser par cela même l’ins¬
tauration et le maintien d’un niveau élevé d’emplois et de
revenus réels. Ces notions de haut niveau de vie, de plein
emploi, de développement économique et de commerce
international sont des notions très en honneur à la fin
de la seconde guerre mondiale, que les experts monétaires
et financiers réunis à Bretton Woods mettaient au
premier plan de leurs préoccupations et des préoccupa¬
tions gouvernementales.
Le Fonds intervient essentiellement dans trois t5q)es
d’opérations. Tout d’abord, lorsqu’à été déterminée la
parité des monnaies des États membres entre elles, le
système doit être maintenu sauf autorisation du Fonds.
Un État membre ne peut proposer une modification du
pair de sa monnaie que pour corriger im déséquilibre
fondamental et cette modification peut être faite seule-
LA COOPÉRATION MONÉTAIRE INTERNATIONALE 603

ment sur la proposition de l’État membre intéressé et


après consultation du Fonds. Les modifications d’une
certaine importance peuvent être désapprouvées par le
Fonds. L’État qui dévaluerait sa monnaie dans une
telle hypothèse pourrait encourir une sanction et se
voir interdire l’accès aux ressources du Fonds (art. 4).
On aborde ainsi le second type d’opérations que peut
effectuer le Fonds. Un État peut, en effet, par l’intermé¬
diaire du Fonds acheter la monnaie d’un autre État,
en échange d’or, ce qui ne soulève pas de difficulté parti-
cuhère mais aussi en échange, dans certains cas, de sa
propre monnaie. L’intervention du Fonds tend ainsi à
réaUser une sorte de convertibilité de deux monnaies ce
qui permet à certains États de solder des achats exté¬
rieurs en monnaie nationale, le Fonds procurant en
échange de monnaie nationale de l’État acheteur des
devises de l’État vendeur. Cette faculté est d’ailleurs
contenue dans certaines ümites car le danger est évi¬
dent que beaucoup d’États à monnaie nationale faible
demandent à acheter des monnaies fortes ce qui pourrait
entraîner pour le Fonds une « hémorragie » de devises
fortes que ne compenserait qu’imparfaitement l’acquisi¬
tion d’une masse importante de monnaies faibles. Le
mécanisme indiqué ne peut donc jouer que d’une manière
limitée, il ne faut pas que la devise demandée soit trop
rare, il ne faut pas que la monnaie nationale offerte le
soit en trop grandes quantités. Des ajustements sont
nécessaires, ils sont précisément l’objet même de l’inter¬
vention du Fonds (art. 5).
Enfin, et c’est son troisième rôle, le Fonds peut servir
au transfert des capitaux de manière à éviter que des
capitaux ne sortent trop hbrement, il exerce ainsi un
rôle de contrôle (art. 6).

594. — Convertibilité. — Aux termes de l’art. 8,


aucun État qui en accepte les obligations ne peut adopter
de restrictions sur les paiements et transferts courants
sans l’approbation du Fonds. La portée de cet article se
trouve toutefois limitée par l’art. 14 selon lequel les
États membres, au cours d’une période transitoire, ont
la possibihté de maintenir les restrictions de paiements
qu’ils avaient adoptées au cours de la guerre 1939-1945.
En fait, jusqu’en 1961, dix États seulement ont accepté
les obhgations de l’art. 8, tous dans l’hémisphère occi¬
dental notamment les États-Unis, le Canada, le Mexique.
6o4 commerce international

En 1961 divers États européens acceptèrent à leur tour,


les États de la Communauté, le Royaume-Uni et l’Ir¬
lande, l’Autriche s’y joignit en 1962, plus tard le Japon.
Sur l’ensemble des 102 États moins du tiers acceptent les
obligations de convertibilité.

595. — Parité. — Chaque membre convient avec le


Fonds de la parité de sa monnaie, rapport entre sa mon¬
naie et l’or pris comme commun dénominateur ou le
dollar des États-Unis du poids et titre en vigueur au
juillet 1944. La parité doit être maintenue dans une
limite supérieure ou inférieure de i %.
Aucun État membre ne peut proposer de modification
du pair de sa monnaie sinon pour corriger un déséquihbre
fondamental ^art. 4 section v) et la modification suppose
une consultation du Fonds. Les modifications qui (éven¬
tuellement cumulées avec d’autres antérieures) ne
dépassent pas 10 % n’entraînent pas d’objection de la
part du Fonds. Les modifications supérieures à un mon¬
tant additionnel de 10 % du pair initial supposent
l’approbation ou les objections du Fonds mais celui-ci
doit prendre position dans les 72 heures. Au-delà le Fonds
dispose de délais plus étendus pour arrêter sa décision.
Depuis 1947 diverses modifications sont intervenues.
Le Royaume-Uni dévalua en 1949 et laissa au Fonds
quelques heures. La France abandonna en 1949 la parité
convenue et en 1958 fixa encore une nouvelle parité,
cette fois en accord avec le Fonds. La Répubhque fédé¬
rale et les Pays-Bas réévaluèrent leurs monnaies de 5 %
en 1961. Le Canada en 1962 réduisit en accord avec le
Fonds la parité du dollar canadien après une période à
taux de change fluctuant.

596. — Tirages sur le Fonds. — Les États membres


peuvent « tirer » sur les ressources du Fonds c’est-à-dire
acheter au Fonds de la monnaie d’autres membres qui
leur est nécessaire pour effectuer des paiements interna¬
tionaux. On distingue le tirage dit dans la tranche-or
qui ne porte pas les avoirs du Fonds en la monnaie d’un
membre à un montant supérieur au montant de sa quote-
part et le tirage dans les tranches de crédit, dans les cas
contraires. Le tirage dans la tranche-or est accordé
presque automatiquement. Pour les tirages supplémen¬
taires le Fonds est libéral lorsqu’il s’agit de la première
tranche de crédit (ne dépassant pas une nouvelle tranche
LA COOPÉRATION MONÉTAIRE INTERNATIONALE 605

de 25 % de la quote-part), il est plus circonspect pour les


tranches ultérieures, et l’État emprunteur doit fournir
des justifications plus rigoureuses.
Une commission est versée par l’État emprunteur sur
tous les tirages, elle est plus élevée pour les tranches
supplémentaires. Un tirage consenti par le Fonds doit
être rembomsé dans un dàai de trois à cinq ans, ce rem¬
boursement consiste en un rachat de la monnaie nationale
par de l’or ou de la monnaie convertible.
Depuis 1952 s’est développée la pratique dite des
accords de crédit « stand by » par lesquels le Fonds per¬
met aux États membres d’effectuer dans certaines hmites
numériques et dans un certain délai des tirages différés
s^s qu’ü soit nécessaire, pour chacun de ces tirages,
d’apprécier à nouveau la position du pays utilisateur.

597. — Les ressources du Fonds. — Les ressources


du Fonds proviennent des souscriptions des États
membres. Le total initial des quote-parts avait été
calculé en fonction du volume des échanges commerciaux
et était en 1947 de 7,7 miUiards de dollars. L'art. 3
section ii des statuts prévoit un réexamen général des
quotes-parts tous les cinq ans. Mais c’est en 1959 seulement
qu’eût heu le premier relèvement des quote-parts, de
50 % et le total alors, le nombre initial des membres
s’étant accru, dépassa 15 miUiards de doUars. La réunion
des gouverneurs tenue à Tokyo en septembre 1964 décida
un nouveau relèvement général de 25 % des quotas
antériems et une majoration complémentaire des quotas
de 16 membres (notamment le Japon, le Canada, la
Suède, la Répubhque fédérale aUemande). Devenue
applicable le 31 mars 1965, malgré l’opposition du gou¬
vernement français, cette décision porta le montant des
quotes-parts à 21.036.000.000 dollars.

598. — L’accord des Dix. — Les moyens dont le Fonds


dispose pour défendre le système monétaire international
et les mécanismes des tirages peuvent apparrntre insuffi¬
sants lors de certaines crises. Aussi après la brusque
tension apparue sur le marché de l’or à Londres en
novembre i960 et la crise du sterhng en mars 1961 après
la réévaluation du Deustche mark et du florin néerlandais
et lorsque les tirages et accords de « stand by » pratiqués
depuis 1961 montrèrent que la part du doUar et de la
hvre diminuait considérablement dans ces opérations
6o6 COMMERCE INTERNATIONAL

on utilisa la formule de l’emprunt par le Fonds ou les


membres intéressés des monnaies rares dont un certain
montant est mis à la disposition des États qui en auraient
besoin.
On désigne sous le nom à!accord des Dix un accord
international, de caractère multilatéral, conclu le
13 décembre 1961 par lequel les dix principaux États
exportateurs et importateurs se sont engagés à mettre
des crédits libellés en leur propre monnaie à la disposition
du F. M. I. dans certaines limites. L’accord porte sur
6 milliards de dollars, il groupe dix États (États-Unis,
Royaume-Uni, République fédérale, France, Italie,
Pays-Bas, Belgique, Suède, Canada, Japon). Il est entré
en vigueur, après ratification en octobre 1962. La Suisse,
qui n’est pas membre du Fonds, s’est associée en mars 1963
et engagée pour 200 millions de dollars. L’accord des Dix
joue en faveur des membres de ce « Club ». Pour effectuer
des prêts nécessaires à certains de ses membres l’Accord
prévoit des procédures complexes. L’accord unanime
est recherché en principe mais, s’il n’est pas obtenu il
existe des mécanismes de votes pondérés, le tireur éven¬
tuel n’ayant pas droit de vote. Prévu pour une durée de
quatre ans, renouvelable, l’accord doit être renouvelé
pour une nouvelle période de quatre ans.

599. — La réforme du système monétaire inter»


national. — L’année 1965 a été marquée par diverses
prises de position au sujet d’une réforme des mécanismes
monétaires internationaux.
On a pu observer que le système du F. M. I. avait évo¬
lué en fait et que le système du Gold exchange standard
s’était transformé ou déformé puisqu’à côté de l’or
apparaissaient des monnaies de réserve, le sterling et
essentiellement le dollar.
A l’origine du système, dans les années qui suivent
immédiatement la création du F. M. I., le dollar est
apparu comme une véritable monnaie mondiale, la
convertibilité en or du dollar ne faisant alors aucun
doute.
Depuis 1951 l’existence et l’accroissement du déficit
de la balance des paiements des États-Unis ont fait
que le dollar est devenue une monnaie de réserve. Le
gouvernement français, en 1964. lors de la réunion des
gouverneurs du F. M. L, à Tokyo, ultérieurement en
février 1965 a demandé que désormais les règlements des
LA COOPÉRATION MONÉTAIRE INTERNATIONALE 607

déficits des balances de paiements aient lieu en or et en


second lieu que soit réformé le système monétaire inter¬
national.
La thèse française en matière de réforme est définie
comme le système de l’Unité de réserve collective (U. R. C.).
Les projets gouvernementaux (différents des propositions
de certains théoriciens) ne constituent pas un retour à
l’or mais placent l’or au centre du système monétaire
comme un étalon de référence présent et immuable.
Ainsi se pose d’aiUeurs le problème du prix de l’or.
Le projet français tend à ajouter à l’or un dispositif
complémentaire sous la forme de la création de moyens
monétaires supplémentaires.
Selon la thèse française cette création se ferait non en
fonction des déficits individuels mais en fonction des
besoins globaux et à cet égard il est rappelé qu’actueUe-
ment, et d’une manière globale, les liquidités sont suf¬
fisantes. Si l’augmentation éventuelle du volume des
échanges internationaux rendait nécessaire cette création,
le gouvernement français propose diverses modalités.
La création devrait se faire non pas dans le cadre
général du F. M. I. qui groupe io6 Etats mais dans le
cadre plus étroit des Dix. La décision d’émission de la
nouvelle monnaie (U. R. C.) devrait se faire à l’unanimité
des Dix. L’U. R. C. serait rattachée étroitement à l’or
car la répartition entre les Dix des nouveaux moyens
monétaires se ferait au prorata des avoirs en or.
La thèse nord-américaine propose au contraire d’utiliser
comme cadre le F. M. 1. et d’en étendre son rôle. Des
moyens monétaires nouveaux seraient créés par augmen¬
tation des droits de tirage automatique au profit de
certains pays ou par augmentation des quotas des pays
membres. Mais dans le cas de l’augmentation des quotas,
la clause or qui oblige actuellement les États membres
du F. M. I. à verser en or ime partie de leurs quotas serait
modifiée et les nouveaux quotas seraient des « quotas or
sans or » comportant le droit de tirage inconditionnel.
Le répartition des moyens nouveaux se ferait dans ce
cadre général du F. M. I. essentiellement en fonction de
l’usage actuel des hquidités et donnerait aux États-Unis
et au Royaume-Uni des facilités nouvelles. La formule
française, dans le cadre des Dix, avantagerait au contraire
la France et les États qui comme eUe ont converti récem¬
ment en or une partie importante de leurs avoirs en
dollars.
6o8 COMMERCE INTERNATIONAL

Dans son rapport annuel 1965 le F. M. I. lui-même a


étudié le problème relatif à l’éventueUe nécessité de
liquidités additionnelles. L’extension des facilités de
tirage au delà de la tranche or pourrait être envisagée et
faire l'objet d’une décision du Conseil d’administration
dans le cadre des politiques de tirage. En outre le F. M. I.
pourrait lui-même créer des liquidités en empruntant à
des pays membres des sommes qu’il investirait ensuite
dans ces mêmes pays. La créance du pays prêteur serait
utilisée comme monnaie de réserve pour financer le
déficit des comptes extérieurs.
Les divers projets en présence ont fait l’objet d’ime
étude objective exposée dans un rapport présenté par
un groupe de travail dans le cadre des Dix (rapport
Ossola septembre 1965).
L’examen des divers problèmes que pose la réforme
du système monétaire international fait apparaître depuis
1966 une évolution sensible des points de vue par rapport
à trois solutions schématiques possibles : système de
l’étalon or avec réévaluation de l’or — création de
nouveaux instruments monétaires utüisés concurremment
avec l’or pour le règlement des soldes — système d’octroi
de crédits internationaux.
Ces problèmes se débattent dans trois groupes diffé¬
rents, celui des Six États de la C. E. E., celui des Dix
(accord de 1961 renouvelé), celui enfin du F. M. 1.
(106 États avec une majorité d’États du tiers-monde ne
disposant pas d’une majorité de voix).
Abandonnant sa thèse extrême sur l’or, le gouvernement
français a fait progresser certaines de ses conceptions.
En janvier 1967, dans le cadre des Six, la thèse française
initiale sur l’étalon or n’a plus guère été soutenue devant
l’hostihté des autres États et le problème du prix de l’or a
été jugé « inactuel ». On a retenu, au contraire, comme
devant constituer un thème d’étude le perfectionnement des
méthodes de crédit international, ce qui aboutit ainsi,
indirectement, à considérer également comme peu actuel
le problème de la création de réserves additionnelles.
Désireux de voir accroître l’influence des Six au sein du
F. M. I. le gouvernement français préconise le relèvement
des quotas des Six de manière qu’ils disposent ensemble
d’un peu plus de 20 % des voix au Fonds ce qui leur assu¬
rerait une sorte de droit de veto dont seuls disposent
actuellement les États-Unis qui sont dotés de 22, 29 % des
voix.
LA COOPÉRATION MONÉTAIRE INTERNATIONALE ÔOQ

A la conférence de Munich, le 19 avril 1967, les Six


ont adopté un point de vue commun sur la réforme du
système monétaire international. Écartant les possibi-
htés extrêmes de solutions que constituent le recours à
l’or avec réévaluation, ou la constitution d’une nouvelle
unité de réserve, les Six envisagent la formule de nouveaux
droits de tirage.
La position commune s’affirme sur trois points :
— la création de nouvelles facilités de paiement doit
être subordonnée à une pénurie de liquidités de caractère
général et non pas fondée sur des besoins en matière de
balance de paiements propres à certains pays.
— ces facilités devraient être assurées par l’utilisation
de droits de tirage d’un type nouveau, sur le F. M. I.,
une partie de ces droits de tirage étant inconditionnelle,
c’est-à-dire sans examen par le Fonds de la politique
financière de l’État. Ces droits de tirage s’analysent en
des mécanismes de crédits et ne constituent pas une
« quasi-monnaie », ils doivent être remboursés à l'expira¬
tion d’un certain délai ;
— même en l’absence d’un accord sur ces facilités le
F. M. I. doit être réformé pour assurer aux Six une
influence suffisante notamment dans les procédures de
vote.

QUOTAS ET DROITS DE VOTE AU F. M. I.

QUOTAS % DES
France . 4.77 4.34
République fédérale 5,82 5.27
Italie . 3.03 2,79
Belgique . 2,05 1,92
Pays-Bas . 2,52 2,34
Luxembourg . 0,008 0,18

18,198 16,84

Royaume-Uni. 11,83 10,60


États-Unis . 25,01 22,29

20. - INSTITUTIONS INTERNATIONALES.


6io COMMERCE INTERNATIONAL

BIBLIOGRAPHIE

Fonds Monétaire International.


Voir les rapports annuels de cette Organisation. L'acti¬
vité du Fonds est suivie par la publication qui lui est
commune avec la B. I. R. D,, Finances et Développement,
revue trimestrielle. Perroux (F.), Les accords de Bret¬
ton Woods, Paris, 1945; Hexner (E. P.), Das Verfassungs-
und Rechts System des internationalen Wahrungsfunds,
Francfort, i960; Tew (B.), The International Monetary
Fund, Princeton University Press, 1961; Aufricht (H.),
The International Monetary Fund, Londres, 1964» Taba-
TONi (P.), Problèmes de l’Organisation monétaire interna¬
tionale, Revue d’économie politique, 1963, p. 327-405;
Guglielmi (J.-L.), Quelques aspects monétaires des pro¬
blèmes posés par le développement économique, Annales de
la Faculté de Droit et des Sciences économiques de
Dakar, 1963; Triffin (R.), The évolution of the internatio¬
nal monetary system, Princeton University Press, 19^4 J
Carreau (D.). Souverainetés et coopération monétaire
internationale, 1965; Roosa (R.), Monetary reform for the
World economy, New York, Harper et Row, 1965.
CHAPITRE II

LA UBERTÉ COMMERCIALE

Le territoire étatique se présente du point de vue


économique comme une zone régie par im principe
d’exclusivisme économique. A partir du principe de la
compétence étatique territoriale on est tenté de conclure
que l’État peut s’enfermer derrière des barrières doua¬
nières, se soustraire au commerce international, vivre en
autarcie. La réalité pratique est normalement différente.

600. — Aspect historique. — L’histoire des relations


internationales montre tout d’abord que certains États
ont affirmé l’existence d’xm principe politique selon lequel
nul État ne pouvait se fermer au commerce international.
Cette afiirmation était au service des politiques com¬
merciales des États en voie d’industrialisation au cours du
XIX® siècle et avides de débouchés. Ce principe de l’ou¬
verture de tout État au commerce a été formulé par la
Grande-Bretagne à l’égard de la Chine et appuyé par des
mesures de force, comme la guerre de l’opium qui conduit
au traité de Nankin de 1842. Mais ouverte par la force
au commerce britannique, la Chine doit s’ouvrir au com¬
merce de toutes les Puissances sur une base d’égalité,
c’est alors la théorie de la porte ouverte.
D’autres hypothèses se présentent sous une forme
moins brutale et les réglementations internationales
sur lesquelles elles se fondent expriment non pas des
affrontements mais des équihbres.
6i2 COMMERCE INTERNATIONAL

601. — Les dispositions conventionnelles. — L’espace


étatique peut échapper à la compétence exclusive de
l’État du point de vue de sa réglementation économique
en vertu de dispositions conventionnelles particulières.
Des principes de liberté peuvent ainsi régir non seulement
les domaines internationaux eux-mêmes, qui ne font pas
partie d’un territoire étatique quelconque, comme par
exemple la haute mer ou les fleuves internationaux,
mais aussi des espaces étatiques à statut participer.
La liberté économique apparaît ainsi dans trois hypo¬
thèses.
i® Il existe des territoires dans lesquels la hberté
économique constitue une hmite de la souveraineté
politique. Les exemples en sont classiques : bassin du
Congo avec une liberté économique qui est établie en
1885 à la Conférence de Berlin pour faire contrepoids
à la souveraineté de l’État indépendant du Congo
dominé par Léopold II de Belgique — statut économique
du Maroc tel qu’il est instauré par l’Acte d’Algésiras de
igo6 dont l’Acte final proclame la hberté économique
sans aucune inégahté — statut de l’archipel du Spitzberg
(traité du 9 février 1920) où la hberté économique
concerne l’exploitation minière, la pêche et la chasse
dans les eaux territoriales, la liberté d’entrée dans les
ports et de cabotage entre ces ports.
2° Dans d’autres territoires au contraire la hberté
économique, loin de constituer une hmite à une souverai¬
neté pohtique dont eUe atténue l'importance, n’est plus
que le reflet d’un statut pohtique particuher. Les exemples
là encore sont classiques, on peut citer les territoires sous
mandat dans le cadre de la S. D. N., les territoires sous
tutehe dans le cadre de l’O. N. U.
30 La troisième manifestation de la hberté économique
est fort différente, eUe repose ici sur une base volontaire
et procède de la réciprocité. C’est la formule dite de la
zone de hbre-échange ou hbre commerce c’est-à-dire
d’une zone englobant les territoires de plusieurs États
qui dans leurs rapports inter se abandonnent toute pro¬
tection douanière. On a cité plus haut en en présentant
les aspects institutionnels, l’Association européenne
de hbre-échange du traité de Stockholm du 3 mai i960,
et l'Association latino-américaine de hbre commerce du
traité de Montevideo du 18 février i960. Les Com¬
munautés européennes fournissent également des exemples
de hberté économique poussée même beaucoup plus loin
LA LIBERTÉ COMMERCIALE 613

et complétée surtout par l’existence d’une politique com¬


mune alors que les zones de libre-échange n'en comportent
pas.
Mais ces exemples divers concernent des Etats ou des
territoires particuliers, le problème qu’il convient d’exa¬
miner est celui de l’existence d’une liberté commerciale
générale jouant entre un grand nombre d’États ou même
s’étendant à tous les États.

§ I. — La crise de la liberté commercieile


avant 1946.

602. — La situation avant 1914 et son évolution. — Avant


la première guerre mondiale il existe de par le monde entre
les différentes Puissances un très considérable courant
d’échanges. Les relations commerciales sont facilitées à
cette époque par la stabilité monétaire, la liberté de circu¬
lation des personnes et des capitaux. La guerre de 1914
brise tout cela et aboutit à la constitution d’autarcies écono¬
miques. Les réglementations très sévères du commerce inter¬
national qui ont été établies pendant les hostilités et qui
comportent le contrôle des changes, le contrôle du mouve¬
ment des capitaux, le contrôle de l’entrée et de la sortie des
marchandises vont demeurer en vigueur après la guerre.
Le rétabhssement de la liberté commerciale va apparaître
dès lors comme un idéal vers lequel tendent les efforts.
Dans le fameux Message du Président Wilson, le point 3
place parmi les objectifs qui doivent être poursuivis « sup¬
pression autant qu’il sera possible de toutes les barrières
économiques et établissement de conditions commerciales
égales pour toutes les Nations consentant à la paix et s’asso¬
ciant pour la maintenir ». Ainsi parmi les éléments qui
caractérisent la reconstruction d’une société internationale
pacifique la libre circulation des marchandises figure-t-elle.
Le Pacte de la S. D. N., bien qu’il consacre peu de place
aux considérations de caractère économique, prévoit toute¬
fois dans son article 23, alinéa e ; « les membres de la Société
prendront les dispositions nécessaires pour assurer la garan¬
tie et le maintien de la hberté des communications et du
transit, ainsi qu’un équitable traitement du commerce de tous
les membres ». Précisément, pendant vingt ans, de 1919 à
1939, on assiste à des tentatives multiples de la part de la
S. D. N. et de divers États pour développer le commerce
international.

603. — Les tentatives de 1919 à 1939. — Dès 1920 se


réunit à Bruxelles (24 septembre-8 octobre) sous l’égide de
la S. D. N. et sur l’initiative de Lord Balfour une conférence
financière qui groupe trente pays et une centaine de partici-
614 COMMERCE INTERNATIONAL

pants appartenant tant aux milieux publics (diplomates,


agents des gouvernements) qu’aux müieux des affaires pri¬
vées. Les résolutions adoptées sont essentiellement de carac¬
tère financier, elles ont pour thème la lutte contre l’inflation,
le maintien de l’équilibre budgétaire, la restauration de l’éta¬
lon or et sur le plan du commerce international le vœu est
formulé que chaque pays rétabhsse progressivement la hberté
économique. Ce rétablissement se trouve d’ailleurs lié au
problème de l’octroi de crédits par les Pays économiquement
les plus puissants, au moins pour une période initiale. Ce
lien n’est pas très nettement aperçu à Bruxelles. Plus tard
l’octroi de crédits se fera dans le cadre de la S. D. N. mais
sur un plan particuüer, par exemple au profit de l’Autriche
dont la pohtique commerciale au contraire est très étroite¬
ment limitée par les traités de paix qui interdisent l’Anschluss.
Une seconde conférence économique se tient à Gênes en
1922. Elle a une importance historique considérable car la
Russie bolchevik, comme on l’appeUe alors, y participe. De
multiples résolutions y sont adoptées relatives au commerce
international et aussi à la protection de ce commerce que
rendent fort actuelles les expropriations soviétiques.
En 1927 à Genève se réunit une troisième grande confé¬
rence économique. Cinquante pays y sont représentés par
deux cents délégués, cent cinquante experts, des résolutions
diverses sont adoptées mais ce qui est plus important c’est
la signature, en 1927 encore, mais en octobre alors que la
conférence a eu lieu en mai, à la suite des travaux d’une
conférence diplomatique plus restreinte, d’une Convention
qui est signée par divers États parmi lesquels des États
jouant un rôle important dans le commerce international,
les États-Unis, la Grande-Bretagne, l’Allemagne, la France,
l’Itahe, le Japon. Les signataires s’engagent, selon l’article
« à supprimer dans un délai de six mois toutes prohibitions
et toutes restrictions à l’importation ou à l’exportation et à
ne pas les remplacer par des mesures équivalentes ».
Mais les ratifications devaient être peu nombreuses et d’ail¬
leurs le traité contenait un article 5, qui fournissait une véri¬
table échappatoire car il permettait « d’assurer la sauvegarde
contractuelle des États lorsque des circonstances mettent en
danger les intérêts vitaux du pays ».
Finalement les résultats positifs des trois conférences sont
très minces, ce n’est que sur des points particuhers que des
conventions conclues dans l’intervalle de ces quelques
années libéreront le commerce international, par exemple
dans le domaine des industries de la récupération (1929)
ou apporteront quelques faciütés : simplification des for-
mahtés douanières (Genève 1923), existence d’un arbitrage
international en matière commerciale (1924), protection
de la propriété industrielle (La Haye 1925).
Avec ténacité les tentatives se poursuivent encore en
LA LIBERTÉ COMMERCIALE 615

1930 avec la signature le 24 mars d’une convention par


laquelle les signataires s’engagent à ne pas relever leurs
tarifs douaniers au cours d’une certaine période si ce n’est
avec l’accord des autres États intéressés. Une dernière confé¬
rence se réunit enfin à Londres en juin 1933, c’est la Confé¬
rence monétaire et économique internationale. Les thèmes
débattus sont classiques : réduction des tarifs douaniers,
stabilisation des monnaies, mise en œuvre de la clause de la
Nation la plus favorisée. Mais les résultats sont décevants
et d’ailleurs la crise économique a déferlé en Europe et
depuis janvier le national sociaüsme est au pouvoir en
Allemagne. Les tentatives de l’entre-deux-guerres sont
demeurées sans grande portée mais tous les thèmes étudiés
vont se retrouver par la suite.

604. — La deuxième guerre mondiale. — Les


périodes de guerre ne sont évidemment pas favorables au
développement du commerce international. On doit noter
cependant qu'à l’intérieur du camp occidental des échanges
divers s’intensifient toutefois car les guerres modernes
sont grandes consommatrices non seulement d’êtres
humains mais aussi de matières et produits fabriqués.
Pour éviter de trop grandes difficultés ou perturbations
économiques, des procédés particuüers sont imaginés
notamment le mécanisme dit du prêt-bail.
Au cours même de la période de guerre, des vues sur
l’avenir vont d’ailleurs être exprimées. La Charte de
l’Atlantique du 14 août 1941 décrit les traits essentiels
du monde de l’après-guerre, le Premier ministre britan¬
nique et le Président des États-Unis y déclarent notam¬
ment qu’ils s’efforceront « d’ouvrir à tous les États,
grands ou petits, vainqueurs ou vaincus, l’accès aux
matières premières du monde et aux transactions com¬
merciales qui sont nécessaires à leur prospérité écono¬
mique ». Ils recommandent en outre « une collaboration
internationale afin de garantir à tous l’améhoration de
la condition ouvrière, le progrès économique et la sécu¬
rité sociale ». Ce sont là des mots clefs qui préfigurent le
plan Beveridge.
La Charte de l’Atlantique est une déclaration de portée
éthique ou philosophique, mais en juillet 1944, avec la
conférence de Bretton Woods où sont représentées 44
Nations unies engagées dans la guerre, le caractère insti¬
tutionnel se précise. Deux organisations internationales,
le Fonds monétaire international, la Banque internatio¬
nale de reconstruction et de développement sont créées
6i6 COMMERCE INTERNATIONAL

(voir infra, n° 649). L’Acte final recommande la création


par les États de mécanismes qui permettront d’atteindre
le développement du commerce international, la régula¬
risation des échanges des marchandises principales, à un
prix équitable pour la production et la consommation; il
prévoit aussi la recherche d’un accord permettant l’har¬
monisation des économies nationales.

605. — La Charte des Nations unies. — Alors que le


Pacte de la S. D. N. ne contenait guère d’autres disposi¬
tions de caractère économique que l’aünéa e de l’ar¬
ticle 23, la Charte consacre aux questions économiques
des développements plus importants. C’est le chapitre ix
composé des articles 55 à 61 sous le titre « Coopération
économique et sociale internationale » et le chapitre x
qui, dans ses articles 61 à 72 traite du Conseil économique
et social chargé de mettre en œuvre les principes dégagés
par la Charte dans le domaine économique et social. Ces
principes marqués dans ces textes et aussi dans le préam¬
bule peuvent se résumer en deux propositions fondamen¬
tales : le relèvement des niveaux de vie, le développement
dans l’ordre économique et social. La formulation est
donc très générale mais ces principes commandent et
animent toute une série d’institutions qui sont prévues
ou seront créées ultérieurement.
Le problème plus technique du commerce intemation^
lui-même va être abordé à la demande des États-Unis
sur l’intervention du Conseil économique et social qui
prend l’initiative de la réunion en 1946 d’une conférence
internationale de caractère économique.

§ 2. — Les tentatives contemporaines


de rétablissement de la liberté commerciale.

Les tentatives faites depuis 1946 pour rétabhr la


überté du commerce international sont complexes. Elles
se heurtent à des difficultés dont les unes existent au
lendemain de la guerre mais s’atténueront ou disparaî¬
tront tandis que d’autres sont d’un caractère plus per¬
manent.
Les difficultés temporaires et initiales proviennent de
la situation respective des États-Unis et des autres
États. Les États-Unis sortent de la guerre non seulement
victorieux mais économiquement développés, leurs pertes
humaines ont été très faibles, leur potentiel économique
LA LIBERTÉ COMMERCIALE 617

n’a pas souffert. Les formules de liberté du commerce


non seulement correspondent à la philosophie du pays
de la hbre entreprise mais sont de nature à favoriser le
développement de son économie et lui assureraient une
extraordinaire prépondérance sur les autres États. Ceux-
ci adoptent comme système de défense une attitude
réservée. Cela s’est marqué par exemple sur le plan
particuUer de la navigation aérienne, la solution d’un
air libre proposée par les États-Unis est en réalité rejetée
par les autres États à la conférence de Chicago de 1944,
car elle aboutirait à une domination commerciale nord-
américaine.
La difficulté permanente provient de ce que la liberté
du commerce international apparaît comme une pièce
d’un système économique libéral que rejettent les Etats
sociahstes, l’U. R. S. S. entend demeurer en dehors
d’un régime de hberté générale, sans pour autant se
fermer au commerce international mais en le faisant
reposer sur des accords spéciaux dans le cadre d’une
pohtique de planification. Toutefois, d’autres États
socialistes adopteront des attitudes plus nuancées.
Les tentatives qui vont être examinées concernent
l’étabhssement de relations commerciales aussi étendues
que possible et non pas Hmitées à certaines zones géo¬
graphiques. Les solutions des zones de libre-échange
en Europe ou en Amérique ont été exposées plus haut
(voir supra, n° 443). Les tentatives faites depuis 1946
et qui n’ont d’ailleurs pas toutes réussi peuvent être
présentées en distinguant trois questions : la Charte
de La Havane et le G. A. T. T.

A. — La Charte de La Havane.

606. — Les conférences de Londres et de Genève.


— A la demande des États-Unis le Conseil économique
et social décide la tenue à Londres d’une conférence
internationale qui doit étudier un projet, d’origine amé¬
ricaine, concernant une Charte pour une organisation
internationale du commerce.
Dix-neuf États sont invités à Londres en octobre 1946
mais l’U. R. S. S. décline l’invitation par une formule
courtoise selon laquelle elle n’aurait pas, à la date fixée,
« la possibihté de pousser assez loin l’étude préliminaire
des vastes et importantes questions qui doivent faire
l’objet du débat ». La raison de l’absence soviétique est
6i8 COMMERCE INTERNATIONAL

autre, le projet nord-américain n’est guère compatible


avec l’économie collectiviste.
A Londres un avant-projet est établi d’organisation
internationale du commerce qui est soumis en 1947 à
une nouvelle conférence réunie à Genève au mois d’août
et au cours de laquelle sera discuté également un autre
problème, celui des négociations entre États en vue de
réductions tarifaires.

607. — La conférence de La Havane. — Le projet


concernant l’organisation internationale du commerce
avait été étudié à Londres et à Genève par une conférence
restreinte n’ayant groupé, avec la défection soviétique,
que 18 États. Mais la conférence qui se réunit à La
Havane le 21 novembre 1947 et dont les travaux dmreront
jusqu’au 24 mars 1948 réunit un plus grand nombre de
participants puisque 56 États y sont représentés; 53
d’entr’eux signeront l'accord élaboré au cours de la
conférence, l’Argentine, la Pologne, la Turquie étant les
seuls à ne pas signer.
La conférence de La Havane groupe donc un grand
nombre d’États, on note quelques absences, non seule¬
ment celle de l’U. R. S. S. mais aussi celle des États
vaincus comme l’Allemagne et le Japon qui ont capitulé
inconditionnellement, celle aussi de l’Èspagne tenue
alors à l’écart des conférences internationales.

608. — La Charte de La Havane. — La convention


internationale élaborée à La Havane est fort longue, avec
106 articles. Il avait été prévu qu’eUe entrerait en vigueur
après avoir été ratifiée par 27 États, soit la majorité des
signataires, mais il n’y eut que deux ratifications car non
seulement beaucoup d’États manifestent rme grande
prudence à l’égard du texte mais les États-Unis eux-
mêmes finissent par abandonner leur projet et ne ratifient
pas la convention.
Le texte n’est pas entré dans le droit positif. Il contenait
parmi ses neuf chapitres des dispositions fort intéres¬
santes sur le développement économique, la politique
commerciale, le commerce international des produits de
base (chap. vi) et diverses prescriptions relatives à l’in¬
terdiction des restrictions en matière de commerce
international.
La Charte de La Havane contenait d’aüleurs deux
thèmes différents, l’un était celui du commerce interna-
LA LIBERTÉ COMMERCIALE 619

tional et des principes qui devaient le régir, l’autre était de


caractère institutionnel. Le chapitre vu était, en effet,
relatif à la création d’une Organisation internationale du
Commerce qui apparaissait comme une institution spé¬
cialisée au sens de la Charte des Nations unies. La struc¬
ture projetée était à l’image de l’O. N. U. : une assemblée
générale groupant tous les Membres, un Conseil exécutif
qui n’en comptait que dix-huit (comme le Conseil écono¬
mique et social), un Directeur général assisté d’un secré¬
tariat comportant des fonctionnaires internationaux.
Le Conseil exécutif qui ne comprenait que dix-huit
membres posait le problème de la désignation de ceux-ci,
problème classique des Organisations internationales à
structure dite « bicamérale ». La solution adoptée
(art. 78) aboutissait à faire désigner d’abord les huit
États membres les plus importants du point de vue
économique en tenant particuhèrement compte de leurs
parts dans le commerce international et en assurant la
représentation appropriée des différents types d’écono¬
mie ou des différents degrés de développement éco¬
nomique. Si la Charte avait fonctionné, les premiers États
désignés en tant que les plus importants eussent été le
Bénélux (en tant qu’entité internationale), le Canada, la
Chine, les États-Unis, la France, l’Inde, le Royaume-Uni
et ru. R. S. S. considérée comme devant adhérer un jour
à l’Organisation. A côté de ces huit membres, lo autres
États devaient être élus par la Conférence à la majorité
des 2/3.
B. — Le g. a. T. T.

La conférence de Genève d’août 1947 avait examiné


deux séries de problèmes, d’une part celui de la charte du
commerce international qui devait être repris en
novembre 1947 à la conférence de La Havane, d’autre
part la question des tarifs douaniers et d’un accord
concernant leur réduction. Ce problème particulier a été
à l’ordre du jour d’une nouvelle conférence tenue encore
à Genève à partir du 20 octobre 1947. Les États repré¬
sentés à cette conférence sont beaucoup moins nombreux
qu’à La Havane, ils ne sont que 23. Ils établissent un
accord dit Accord général sur les tarifs douaniers et le
commerce, plus généralement désigné par ses initiales
de langue anglaise G. A. T. T. (Généré agreement on
tariffs and trade). Cet accord est entré en vigueur le
620 COMMERCE INTERNATIONAL

ler janvier 1948. Il semblait à l’origine de caractère


provisoire, simplement destiné à permettre des négo¬
ciations bilatérales entre ses signataires qui vont, par des
traités particuliers, se consentir les uns aux autres des
concessions tarifaires et libérer progressivement entre
eux leurs échanges bilatéraux. Le G. A. T. T. est donc
simplement un cadre pour des négociations commerciales
bilatérales mais, par la multiplication des relations com¬
merciales bilatérales et grâce à ce facteur d’unification
bien classique qu’est la clause de la Nation la plus favo¬
risée, le G. A. T. T. va avoir une grande portée de rayon¬
nement.
Le système adopté à Genève en 1947 n’apparaît pas
comme très original, à certains égards il est d’ailleurs
une pièce de l’ensemble plus complexe discuté à La
Havane et correspond au chapitre iv de la Charte ainsi
qu’à une partie du chapitre iii.

609. — Le succès de l’Accord général, -y L’accord


est fort simple, ne prévoit pas de structure institutionnelle
complexe nouvelle et apparaît essentiellement comme
formulant certains principes qui constituent l’éthique
des relations commerciales internationales entre les
États signataires, qui à l’ori^ne sont au nombre de 20.
Les États apphquent ces principes dans leurs relations
commerciales. Les États signataires se retrouvent d’ail¬
leurs dans des conférences successives dites « conférences
tarifaires », les premières sont demeurées célèbres qui se
tiennent à Annecy (août-septembre 1948), à Genève
(février-avril 1950), à Torquay (septembre 1950-avril
1951). Jusqu’en 1955 le G. A. T. T. est donc simplement le
cadre de conférences périodiques entre les États membres.
Le succès du G. A. T. T. est dû à diverses causes, à la
simpücité d’un texte bref qui ne comportait pas plus de
35 articles, à l’utihsation des mécanismes bilatéraux
qui rassurent les États car ils peuvent, dans chaque cas,
mesurer fort exactement ce à quoi ils s’engagent et les
avantages qu’ils peuvent retirer, peut-être aussi au
caractère non novateur des formules retenues et qui sont
purement et simplement celles de la conférence inter¬
nationale classique.

610. — Les piincipes du G. A. T. T. — Parmi les


divers principes formulés par l’Accord général, trois sont
essentiels.
LA LIBERTÉ COMMERCIALE 621

1° Le principe de non discrimination. — C’est le prin¬


cipe fondamental du G. A. T. T. Il constitue une exten¬
sion de la formule de la clause de la nation la plus favori¬
sée puisqu’il aboutit non seulement à traiter les produits
étrangers de la même manière entre eux, mais à les traiter
de la même manière que les produits nationaux.
Ce principe général admet toutefois, dans l’Accord
lui-même, quelques limites. Des dérogations apparaissent
dans certaines circonstances, on retrouve la notion de
clauses de sauvegarde. Certaines exceptions ont une plus
large portée. L’article 24 de l’Accord admet le caractère
licite des intégrations régionales, unions douanières et
zones de libre-échange, d’ailleurs sous certaines condi¬
tions et dans l’accomplissement de diverses procédures
de contrôle ou d’examen prévues par ledit article.
2° L’interdiction des restrictions quantitatives. — L’Ac¬
cord condamne les restrictions quantitatives, les poli¬
tiques de contingentement. L’article ii, § le fait en
termes formels : « Aucune Partie contractante n’insti¬
tuera ou ne maintiendra à l’importation d’un produit
originaire du territoire d’une autre Partie contractante,
à l’exportation ou à la vente pour l’exportation d’un pro¬
duit destiné au territoire d’une autre Partie contractante,
de prohibitions ou de restrictions autres que de droits
de douane ».
Du point de vue juridique il existe une différence essen¬
tielle entre le problème des contingentements et celui
des restrictions tarifaires. En matière tarifaire l’Accord
préconise des réunions en vue de l’abaissement des droits,
en matière de contingentements l’Accord édicte ime
interdiction.
Mais des tempéraments sont apportés à cette prohibi¬
tion, ils se groupent autour de l’idée de la conservation
et de la sauvegarde des intérêts nationaux. Ainsi un
État membre du G. A. T. T. peut, à certains moments,
ne pas respecter l'interdiction des contingentements
lorsqu’il s’agit par exemple pour lui de défendre ses
marchés agricoles et son agriculture, ou lorsque sa
balance des paiements serait dans un état de grave
déséquihbre ou enfin et plus généralement lorsqu’il
s’agit de son développement économique, on retrouve là
le thème classique du protectionnisme douanier dont
List s’est fait le théoricien au xix« siècle.
3° Les concessions tarifaires. — C’est d’une manière
très simple que l’article 28 bis formule l’un des prin-
022 COMMERCE INTERNATIONAL

cipes essentiels du G. A. T. T., celui des concessions tari¬


faires : « Les Parties contractantes reconnaissent que
les droits de douane constituent souvent de sérieux
obstacles au commerce. C’est pourquoi les négociations
visant sur une base de réciprocité et d’avantages mutuels
à la réduction substantielle des droits de douane et des
autres impositions perçues à l’exportation et à l’impor¬
tation présentent, lorsqu’elles sont menées en tenant
compte des objectifs du présent accord et des besoins de
chaque Partie contractante, une grande importance pour
l’expansion du commerce international ». Il est prévu
que de telles négociations peuvent être organisées pério¬
diquement, qu’elles peuvent porter sur des produits
choisis un à un ou se fonder sur des procédures multi¬
latérales acceptées par les Parties.
L’engagement initial souscrit par les|'États est,[on le
voit, fort léger, l’obhgation se borne à des discussions de
temps à autre avec les autres États. Mais de ces ren¬
contres et des échanges de vues qui s’y produisent sort la
coopération internationale, i Jexiste d’ailleurs des soupapes
de sûreté. Les concessions tarifaires sont_ recommandées
mais l’État acceptera ou non des concessions et même
s’il accepte ce sera généralement pour une période de trois
ans, ce qui n’exclut pas la reconduction ultérieure mais
permet également d’avancer avec prudence. Une institu¬
tion toutefois^élargit le champ même des concessions
consenties, la clause de la Nation la plus favorisée qui,
dans le cadre du G. A. T. T. comme ailleurs, constitue un
puissant facteur d’unification économique et juridique,
l’ajustement automatique devient multilatéral.

611. — L’assouplissement de la non discrimina¬


tion. — Le G. A. T. T. avait été initialement conçu
comme un ensemble de règles devant s'apphquer au
commerce international entre des États dont les éco¬
nomies étaient développées et constituaient des écono¬
mies de marché. Mais le G. A. T. T. était, par ailleurs,
destiné à favoriser l’expansion du commerce international
à partir de l’accroissement de la production et de la
pleine utihsation des ressources mondiales, selon les for¬
mules de l’article de l’Accord.
Or depuis 1947 les données du commerce international
se sont trouvées modifiées avec l’apparition, comme le note
fort justement T. Flory dans sa thèse (Le G. A. T. T.,
droit international et commerce mondial) de trois phé-
LA LIBERTÉ COMMERCIALE 623

nomènes : le développement des intégrations régionales,


l’apparition des États en voie de développement, enfin
la participation au commerce international des États
socialistes.
Pour faire face à ces transformations il y a eu une
véritable adaptation, variable d’ailleurs selon les cas.
1° Les intégrations économiques. — L’accord de 1947
contenait déjà quelques formules en prévoyant des condi¬
tions de licéité et des procédures d’examen et de con¬
trôle. La pratique suivie par le G. A. T. T. à l’égard des
unions douanières et des zones de libre échange a été
très libérale. Elle a abouti à ne voir dans les diverses
solutions régionales ou particulières non pas des viola¬
tions d’une règle impérative de non discrimination abso¬
lue mais des solutions appliquant dans des aires géogra¬
phiques limitées ce même principe et constituant donc
des réalisations partielles s’analysant en des étapes ou
des essais d’application régionale d’un principe universel.
2° Les États en voie de développement. — La solution
adoptée fut ici celle de l’assouplissement d’un système
rigide après qu’ait été constatée l’inadaptation du
G. A. T. T. et que soit apparue inapphcable fa clause de
la Nation la plus favorisée. Tenant compte de la Confé¬
rence des Nations Unies sur le commerce et le déve¬
loppement tenue à Genève en 1964 le G. A. T. T. a pro¬
cédé à une révision de l’Accord en faveur des États en
voie de développement. Un comité avait été constitué
avant même la Conférence de Genève, en mai 1963. Une
partie IV à ajouter à l’Accord et relative au Commerce
et au développement a été adoptée par les Parties con¬
tractantes du G. A. T. T. en novembre 1964. Ces dispo¬
sitions devaient être appliquées de facto en vertu d’une
Déclaration du 8 février 1965 et entrer officiellement en
vigueur le 27 juin 1966 entre les États qui avaient accepté
(la France n’est pas de ceux-là). Le texte complémen-
raire assouplit considérablement au profit des Etats en
voie de développement la règle de la réciprocité et de la
non discrimination, il aboutit même, quant à ces États
dans leurs rapports avec les États développés à formu¬
ler le principe inverse. Les modes de règlement des diffé¬
rends sont par ailleurs distincts des modes généraux anté¬
rieurs.
30 Les États socialistes. — L’article 17 de l’Accord
initial pose quelques règles en matière d’entreprises
624 COMMERCE INTERNATIONAL

commerciales d’État dans des pays à économie de mar¬


ché. Tout un travail d’analyse et d’interprétation libé¬
rale du texte a été entrepris. Par ailleurs une opposi¬
tion se présentait initialement entre les formules du
multilatéralisme qui caractérisaient le G. A. T. T. et les
formules des mécanismes bilatéraux assortis de contrats
d’achats, de contingents et d’accords de paiement carac¬
téristiques des relations commerciales avec les États
sociaüstes. Dans les relations avec les États sociahstes
le G. A. T. T. a admis une atténuation du principe de
non-discrimination et une adaptation du système de la
clause de la Nation la plus favorisée. Divers États socia-
Ustes ont pu ainsi être membres ordinaires du G. A. T. T.
ainsi la Tchécoslovaquie, d’autres ont été associés en vertu
d’arrangements spéciaux.

612. — L’évolution du système du G. A. T. T. —


L’Accord avait été signé à l’origine par 20 États mais
depuis son entrée en vigueur en 1948 le système s’est
étendu et perfectionné.
Le nombre des adhérents s’est accru. Il passe à 38 en
i960 et en mars 1967 atteint 72 Etats auxquels s’ajoutent
14 États associées, l’ensemble dépasse 80 % du com¬
merce mondial. Parmi les États membres on ne trouve
guère d’États sociahstes, mais on peut noter toutefois
que la Tchécoslovaquie est membre ordinaire du
G. A. T. T. Par delà les États membres proprement dits,
parties contractantes à l’accord, le système du G. A. T. T.
comporte des associations et des rattachements. Ainsi
certains pays sont üés par le régime de l’accession pro¬
visoire, ainsi la Yougoslavie et la Suisse. D’autres États
participent aux travaux des Parties contractantes en
vertu d’arrangements spéciaux (notamment la Pol(^e).
Enfin divers Pays au territoire desquels le G. A. T. T.
était apphqué autrefois, devenus indépendants, conti¬
nuent d'appliquer le G. A. T. T. de facto en attendant
d’avoir arrêté définitivement leur politique commerciale
(ainsi l’Algérie, le Congo-Léopoldville, le Mah, le Ruanda,
le Burundi).
Une grande souplesse se révèle également en ce qui
concerne les principes qui ont pu comporter une certaine
évolution.
Diverses négociations commerciales se déroulent dans
le cadre du G. A. T. T., telles celles famihèrement désignées
sous le nom de Kennedy round, ou celles concernant les
LA LIBERTÉ COMMERCIALE 625

pays en voie de développement (accord de février 1962


sur les textiles de coton).

613. — L’évolution institutionnelle. — La Charte


de La Havane, fidèle d’ailleurs au projet nord-américain
initial, entendait non seulement réglementer le commerce
international mais encore créer une Organisation inter¬
nationale nouvelle qui devait porter le nom d’O. I. C.
(Organisation internationale du commerce) ou selon les
initiales anglaises 1. C. O. Créée sur le papier elle n’a pas
été constituée puisque la Charte n’est pas entrée en
vigueur, même sous la forme d’un organisme intérimaire.
La création d’une organisation analogue a été tentée
ultérieurement dans le cadre plus étroit du G. A. T. T.
Lors de la réunion à Genève, pour la neuvième fois, de la
Conférence diplomatique des États du G. A. T. T.
(28 octobre 1954-8 mars 1955) le texte constitutif d’une
Organisation de coopération commerciale (O. C. C.) a été
adopté. Du point de vue structurel l’Organisation res¬
semblait fort à la formule de l’O. I. C. avec une assemblée
générale et un Comité exécutif ne comportant que 17
membres dont les cinq États les plus importants du point
de vue du commerce international. La Convention de
1955 était intéressante mais elle n’est point entrée en
vigueur.
L’évolution institutionnelle réeUe s’est réahsée dans
le cadre primitif du G. A. T. T. avec la création de
divers organes et le développement de procédures. Avant
i960 il n’existait, en dehors du Secrétariat, qu’un seul
organe dénommé « les Parties contractantes » qui corres¬
pondait à la conférence des États membres telle qu’elle
existe dans la plupart des Organisations internationales.
Cet organe dispose de larges pouvoirs, exerçant en quelque
sorte, en matière de commerce international, une fonc¬
tion législative par la voie de décisions, de résolutions,
de recommandations, mais disposant aussi du pouvoir
d’interpréter l’Accord et compétent pour assurer le
règlement des différends entre les Membres après une
instruction faite par un panel. Malgré la très grande
différence existant sur le plan économique entre les
Membres, chaque État dispose d’une voix et les décisions
sont prises à la majorité, normalement la majorité ordi¬
naire, exceptionnellement celle des 2/3.
Une décision des Parties contractantes du 4 juin i960
a créé le Conseil des Représentants, organe essentielle-
626 COMMERCE INTERNATIONAL

ment destiné à fonctionner dans l’intervalle des sessions


annuelles des Parties contractantes. Ce Conseil est ouvert
à tous les États membres, il est assisté d’organes subsi¬
diaires comme le Comité des négociations commerciales
et le Comité du commerce et du développement.
On utilise beaucoup dans le cadre des travaux du
G. A. T. T. les groupes de travail {working groups) qui
sont composés de quelques personnes, une dizaine, et
constitués pour étudier un problème et présenter un
rapport. Le panel est un groupe particulier composé de
personnes agissant en qualité d’experts indépendants et
non pas en tant que représentants d’États ; le panel est
utilisé dans la procédure de règlement des différends.
Le secrétariat a à sa tête une personne dénommée
depuis 1965 Directeur général, qui est l’animateur du
G. A. T. T.

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et au développement, G. A, T. T., 1965, Flory (T.).
Le G. A. T. T. droit international et commerce mondial,
thèse Paris 1966. (Ouvrage fondamental en langue fran¬
çaise.)
CHAPITRE III

LA RÉGLEMENTATION DE CERTAINS PRODUITS

Il existe depuis longtemps des réglementations inter¬


nationales qui concernent certaines activités économiques
ou certains produits.
L’interdiction de l’exploitation ou la réglementation
de l’exploitation de certaines richesses naturelles sont
classiques en droit international. La protection des
espèces animales contre des entreprises de destruction
(Rauhwirtschaft) existe depuis longtemps, qu’il s’agisse
des phoques à fourrure du détroit de Behring avec l’arbi¬
trage du baron de Courcelles en 1893 ou des baleines que
protège la convention de Washington du 2 décembre 1946.
Un exemple de réglementation très stricte de la produc¬
tion et du commerce de certains produits existe en ce qui
concerne les stupéfiants. Il s’agit d’établir des règles et
de veiller à leur respect qui permettront l’usage de ces
produits sur un plan médical et pharmaceutique et inter¬
diront les autres usages (Bureau central permanent de
l’Opium — convention internationale sur les stupéfiants
du 19 février 1925 — convention du 13 juillet 1931).
En dehors de ces cas qui sont en quelque sorte
« limites », il existe des réglementations particulières à
certains produits et à leur commerce. On peut, à titre
d’exemples d’ailleurs, classer ces réglementations inter¬
nationales selon les produits dont il s’agit en distinguant
les produits de base et d’autres produits.
LA RÉGLEMENTATION DE CERTAINS PRODUITS 629

Section I. — Les produits de base.


Le droit international contemporain comporte diverses
réglementations concernant les produits de base. L’im¬
portance de ces réglementations est considérable car les
fluctuations de cours des produits de base sont considé¬
rables et les pays producteurs qui sont souvent des pays
sous-développés perdent en fait, par ces variations, des
sommes considérables qui annulent souvent les aides
financières qu’ils peuvent recevoir par aüleurs.
La Charte de La Havane comportait un chapitre 6
intitulé « accords intergouvemementaux sur les produits
de base », comprenant les articles 55 à 70. L’article 56
donnait des produits de base la définition suivante :
« tout produit de l'agriculture, des forêts ou de la pêche,
tout minéral, que ce produit soit sous sa forme naturelle
ou qu’il ait subi la transformation qu’exige communé¬
ment la vente en quantité importante sur le marché
international ». Cette définition a été reprise textuelle¬
ment dans l’interprétation de la section b de l’article 16 du
G. A. T. T.
On remarque que la définition n’a, en aucune manière,
un aspect juridique, c’est une définition de caractère
quantitatif, les produits de base étant ceux qui, autres
que les produits manufacturés, font l’objet, sur le marché
international, de transactions en quantités importantes.

614. — Réglementation générale. — Des organisa¬


tions internationales diverses se préoccupent des pro¬
blèmes posés par les produits de base. L’O. N. U. par
exemple comporte des organismes subsidiaires qui jouent
un rôle dans ce domaine. Le Conseil économique et social
avait créé (Résolution 691 A xxvi) une Commission du
commerce international des produits de base (C. I. C. T.)
comprenant les représentants de 18 membres de
l’O. N. U. désignés par ce conseil. Cette Commission a
disparu en 1965, elle a été remplacée par un autre orga¬
nisme dénommé Commission des produits de base créée
par le Conseil du commerce et du développement confor¬
mément à l’acte final de la Conférence de Genève de
1964 et à la Résolution 1995 (xix) de l’assemblée géné¬
rale. Les commissions économiques de l’O. N. U., notam¬
ment les commissions économiques pour l’Asie et l’Ex¬
trême-Orient, l’Amérique latine et l’Afrique, font place
630 COMMERCE INTERNATIONAL

dans leur programme de travail aux questions concer¬


nant les produits de base. La F. A. O., le G. A. T. T.,
le Fonds monétaire international, d’autres Organisations
internationales diverses traitent également des produits
de base. Mais par delà les analyses et études générales
la réglementation proprement dite est établie par des
accords internationaux spécialisés par produits.

615. — La réglementation par produits. — La régle¬


mentation des produits de base apparaît comme très
récente. Toutefois il faut remarquer que pour tel ou tel
produit, que l’on n'appelait pas encore « de base », des
réglementations particulières ont parfois existé depuis
longtemps. En 1934 un accord particulier a été établi
pour le caoutchouc. Surtout il est un produit à propos
duquel une réglementation particulière a été instituée au
cours du XIX® siècle, le sucre, dont le commerce a été régle¬
menté pour la première fois par une convention de 1864.
La réglementation des produits de base est assurée
sur le plan international par des traités particuliers,
que l’on appelle généralement « accords de produits »,
conclus entre des États et qui créent pour eux des
obligations juridiques. Par leur caractère intergouver-
nementad ces accords s’opposent à des accords de carac¬
tère privé qui peuvent limiter la concurrence ou organiser
la vente de certains produits et qui sont conclus entre des
sociétés ou organismes privés dans le cadre des cartels
ou des trusts. Mais ces accords intergouvemementaux
sont créateurs pour les États d'obligations juridiques, à
cet égard üs se distinguent d’autres formules intergou¬
vemementales, ainsi de celles qui s’analysent en la
constitution de groupes d’études de problèmes posés
par certains produits. Les groupes d’études n’aboutissent
pas à une réglementation du commerce des produits,
ils peuvent parfois y conduire, la préparer; parfois
coexistent pour un même produit des groupes d’études
et un accord de réglementation, ainsi a été créé un groupe
d’études sur le café et un comité de l’utilisation du blé.
Il en existe actuellement pour le plomb et le zinc, le
coton, la laine, le caoutchouc. Les accords de produits
principaux actuellement en vigueur portent sur le blé, le
sucre, l’huile d’ohve, le café et l’étain, il a existé également
un accord sur le thé.
Ces accords peuvent s’analyser sous deux aspects,
celui des buts poursuivis, celui des mécanismes utüisés.
LA RÉGLEMENTATION DE CERTAINS PRODUITS 63I

616. — Les buts des accords. — Les buts poursuivis


peuvent être différents selon les produits, ils varient aussi
selon les époques.
La réglementation internationale en matière de com¬
merce du sucre fournit l'exemple d’une variation des buts
poursuivis selon les époques. Initialement, avec la conven¬
tion du 8 novembre 1864 qui ne fut qu'une tentative,
puis celles de Bruxelles du ii août 1875, de Londres du
30 août 1888, de Bruxelles encore du 5 mars 1902, la
réglementation se borne à l’interdiction de pratiques qui
tendraient à fausser la libre concurrence, par exemple
l’octroi par les États de primes directes ou indirectes à
la production ou à l’exportation du sucre. L’organisation
internationale a pour but le maintien d’un régime de
libéralisme économique.
Actuellement le but n’est plus le même, il est celui de
l’organisation même d’un marché, l’accord ayant pour
objet d’assurer les approvisionnements en sucre aux
pays importateurs et des débouchés pour le sucre aux
pays exportateurs à des prix équitables et stables. A
cette première idée de l’organisation même du marché
et du maintien des cours s’ajoutent d’autres idées, par
exemple l’accroissement de la consommation du sucre
dans le monde, la sauvegarde des intérêts des pays gros
producteurs pour lesquels le sucre apparaît comme le
produit résultant d’une monoculture. L’accord sur le sucre
contient aussi une idée sociale importante : assurer un reve¬
nu satisfaisant aux producteurs rendant possible le maintien
de conditions équitables de travail et de rémunération.
L'exemple des récents accords sur le sucre (accord de
1953, révisé en 1956, modifié en 1958, prorogé jusqu’au
31 décembre 1965, accord du 2 novembre 1964 devant
entrer en vigueur en 1966) montre d’une manière typique
les buts qui peuvent être poursuivis par un accord inter¬
national sur les produits de base avec ses aspects écono¬
miques (marché organisé-stabihté des cours) et ses pré¬
occupations sociales.
On retrouve des considérations analogues dans divers
accords. Pour le blé, par exemple les accords successifs
de 1949, 1953, 1956, 1959, 1962 (ce dernier prolongé
jusqu’au 31 juillet 1967) précisent qu’ils ont pour objet
d’assurer l’approvisionnement des pays importateurs et
des débouchés pour les pays exportateurs à des prix
équitables et stables définis à l’intérieur d’une fourchette
fixée par l’accord lui-même qui groupe 50 pays expor-
632 COMMERCE INTERNATIONAL

tateurs dont TU. R. S. S. et les divers importateurs dont


le Royaume-Uni.
L’accord international sur l’huile d’olive (accord de
1956 modifié par un protocole du 3 avril 1958) a pour
but d’assurer entre les pays producteurs et exportateurs
d’huile d’olive une concurrence loyale et aux consomma¬
teurs la livraison d’une marchandise conforme aux termes
des contrats passés. Pour réduire les inconvénients qui
tendent aux fluctuations des disponibihtés sur le marché
un système de stockage et d’échanges compensatoires
a été imaginé.
L’accord international sur l’étain (convention de
Londres du 20 juin 1954, nouvel accord élaboré en i960,
troisième accord entrant en vigueur en 1966) poursuit
des buts complexes, l’encouragement de la production
de l’étain à des conditions de plus en plus économiques,
l’obtention à des prix raisonnables d’un approvisionne¬
ment suffisant du marché en étain. Il tend à empêcher
des fluctuations excessives de prix et à arriver à un
certain degré de stabihté de ceux-ci et cherche à éviter
ou atténuer un état de chômage ou de sous emploi étendu
que pourrait créer un déséquihbre entre l’offre et la
demande d’étain.
L’accord sur le café (27 janvier 1958 modifié en i960
et renouvelé le 28 septembre 1962) comporte des buts
qui sont définis d’une manière moins précise mais qui
s’analysent également en un encouragement de la consom¬
mation mondiale, une expansion du commerce de cette
denrée dans l’intérêt des pays producteurs comme des
pays consommateurs.
Les accords dont l’idée centrale est donc celle de l’or¬
ganisation d’un marché et d’une régularisation des cours
tendent à parvenir à ces résultats par le moyen de divers
mécanismes destinés précisément à tenter d’accorder les
intérêts, antagonistes en principe, des pays producteurs
et consommateurs.

617. — Les mécanismes utilisés. — Les mécanismes


utilisés dans les différents accords, sans être identiques,
présentent des analogies.
Les accords sur les produits de base comportent la
création, dans chaque cas, d’une organisation intema-
nationale particulière. Cette organisation est constituée
par des organes divers, selon les types habituels et clas¬
siques des organisations internationales. En général la
LA RÉGLEMENTATION DE CERTAINS PRODUITS 633

structi^e fait place à un système « bicaméral » avec à


côté d'une assemblée, généralement dénommée Conseil,
un Comité exécutif plus restreint, toutefois l’Accord
sur l’étain ne prévoit qu’une seule assemblée.
Les organisations créées en matière de produits de base
sont essentiellement chargées d’assurer la réglementation
du marché. Il existe donc un pouvoir de décision confié à
une assemblée de représentants d’États. Mais les États
membres appartiennent soit à la catégorie des producteurs,
soit à celle des consommateurs. Les décisions prises le
sont en général à la majorité. L’expression de cette
majorité peut revêtir des formes différentes. Tantôt
doit être réimie une double majorité, celle d’une part des
exportateurs, celle d’autre part des importateurs. Tantôt
la majorité requise est une majorité mêlée où l’on addi¬
tionne les diverses voix sans distinguer s’il s'agit d’im¬
portateurs ou d’exportateurs, solution qui s’oppose à
celle des majorités « réparties ». Il peut exister des sys¬
tèmes de pondération des voix, en fonction par exemple
des pourcentages de production ou d’importation ou quel¬
quefois d’une manière fixée dans la convention elle-même.
Du point de vue opérationnel les solutions adoptées
par les Accords sont assez variables. L’accord sur le sucre
prévoit des tonnages d’exportation pour le marché dit
libre qui sont fixés pour chaque année contingentaire et
qui comportent des priorités pour certains États pour les
exportations effectives si la demande fléchissait. L’accord
sur le blé prévoit des achats et des ventes garantis pour
les années agricoles. Les mécanismes sont moins poussés
pour l’huile d’ohve ou le café, ils sont plus perfectionnés
pour l’étain car il existe là un organe opérationnel parti¬
culier, le stock régulateur géré par le Directeur de l’Orga¬
nisation qui est un fonctionnaire international. L’un des
buts poursuivis par chaque accord est la régularisation
des prix et l’effacement des fluctuations les plus impor¬
tantes. Les accords prévoient souvent des fourchettes de
prix avec un prix plancher et un prix plafond (sucre-
blé-étain). Le mécanisme régulateur le plus poussé est
celui du stock régulateur de l’accord de l’étain. La gestion
de ce stock est fort complexe dans ses modahtés précises
mais le principe d’intervention est simple : si le prix
de l’étain à la Bourse des métaux de Londres dépasse le
prix plafond, le Directeur offre de l’étain et fait baisser
les cours, si le prix est inférieur ou égal au prix plancher,
le Directeur achète. Le stock régulateur est constitué
634 COMMERCE INTERNATIONAL

en effet d’une part de stocks de métal d’autre part de


disponibilités financières. L’Accord sur l’étain fournit
l’exemple d’une gestion opérationnelle directe et se
montre donc beaucoup plus complet que les autres.

Section IL — Les matières énergétiques.

A côté des accords sur les produits de base pro¬


prement dits, il existe ou a existé certaines réglemen¬
tations concernant diverses matières, en particulier les
matières énergétiques.
Certaines de ces matières peuvent parfaitement rentrer
d’ailleurs dans la catégorie des produits de base, en tant
que substances minérales par exemple.

618. — Le pétrole. — L’exploitation des richesses


minières, et en particulier du pétrole a fait l’objet de
multiples accords.
I® Les accords intergouvemementaux de partage. — On
rencontre en matière de pétrole de multiples accords
intergouvemementaux par lesquels des États se par¬
tagent des droits d’exploitation pétrolière sur certains
territoires. On cite souvent à cet égard l’accord de San
Remo du 29 avril 1920 entre la Grande-Bretagne et la
France pour le partage des pétroles du Moyen-Orient.
Un autre accord de partage relatif d’ailleurs à des espaces
maritimes est intervenu entre le Venezuela et la Grande-
Bretagne, concernant le golfe de Paria (26 février 1942).
C’est également une formule de partage économique des
ressources pétrolières au Moyen-Orient que consacre l’ac¬
cord intervenu entre les États-Unis et le Royaume-Uni
le 8 août 1944 modifié le 24 septembre 1945 qui n’a pas
d'ailleurs été ratifié.
2® Les accords de concession et leur évolution. — Toute
une catégorie d’accords relatifs à l’exportation pétro¬
lière est d’un t3q)e particulier en ce sens qu’il s’agit de
concessions accordées par un État à une société étran¬
gère. De telles concessions ne sont pas de véritables
accords internationaux et les difficultés nées de la conces¬
sion par l’Iran de ses pétroles à l’Anglo-iranian sont
bien connues, avec en 1951 la nationalisation des pétroles
d’Iran et la politique du Dr Mossadegh.
La politique pétrohère a été marquée par des péripéties
diverses avec les luttes des compagnies internationales
LA RÉGLEMENTATION DE CERTAINS PRODUITS 635

entre elles et les conflits qui ont pu les opposer aux États
concédants pour la détermination du partage des béné¬
fices. Au cours d’une évolution durant une cinquantaine
d'années, depuis le début du xx® siècle, la part de l’État
concédant s’est sans cesse accrue. Alors qu’à l’origine
l’État concédant ne recevait que de très faibles sommes,
parfois indépendantes du tonnage extrait, sa part a
augmenté. En 1931 l’Irak obtient 10 % de la valeur du
pétrole. En 1950 l’Arabie Saoudite obtient le partage par
moitié des bénéfices, c’est désormais la règle dite « fifty-
fifty » qui va être pratiquée dans les rapports État concé¬
dant et compagnie concessionneiire. L’organisme italien
E. N. I. (Ente nazionale idrocarburi) qu’animait Mattéi
signe en 1957 avec l’Iran un accord fort complexe qui
s’analyse en une association État — compagnie complétée
par un partage 50-50. On présente quelquefois ce mode de
calcul comme signifiant un partage 75-25 dans lequel
l’État aurait 75, ce qui n’est pas rigoureusement exact.
Cette évolution qui consacre l’accroissement de la part
de l’État concédant s’inscrit dans une ligne plus générale,
celle de la reconnaissance du droit de chaque État à
l’exploitation de ses ressources naturelles qui est formu¬
lée dans diverses recommandations de l’Assemblée géné¬
rale de l’O. N. U., qui s’échelonnent depuis 1952 (voir
supra, n®® 327 et 328).
3° Les formules récentes d’association. — Des formules
plus modernes et plus favorables aux États sur le ter¬
ritoire desquels existent des gisements pétrohers ont été
récemment utihsées par le gouvernement français. Ce
sont des formules d’association.
L’accord franco-algérien sur les hydrocarbures et le
développement industriel de l’Algérie du 29 juillet 1965
en est un premier exemple. Il définit un système dit
à’association coopérative conclu entre deux sociétés, l’une
représentant l’Etat algérien, l’autre constituée par des
groupes français, principalement des groupements pétro¬
liers pubhcs. Le prélèvement fiscal de l’État algérien est
supérieur à 50 % des bénéfices théoriquement réahsés
par les exploitants français, en utilisant une notion de
prix théonque supérieur au prix réel. Il existe dans l’ac¬
cord une contribution gouvernementale française sous
forme d’une aide au développement industriel.
Un second accord entre la Société nationale iranienne
des pétroles (N. 1.0. C.) et l’E. R. A. P. (entreprise de
recherches et activités pétrolières), établissement public
636 COMMERCE INTERNATIONAL

français a été conclu le 30 août 1966. Il repose sur la


notion à’entreprise. L’E. R. A. P. joue le rôle d’entre¬
preneur pour le compte de la N. I. O. C., elle ne dispose
d’aucun droit de propriété sur les gisements (ce qui dis¬
tingue fondamentalement l’accord des concessions de
type traditionnel) mais si ses recherches sont couronnées
de succès elle reçoit, à titre de rémunération, la possi¬
bilité d’acheter pendant 25 ans, au prix coûtant aug¬
menté des impôts, entre 35 et 45 % de la production
de la moitié des gisements, l’autre moitié étant une
réserve nationale pour la N. I. O. C.

619.—L’Organisation des pays exportateurs de pétrole.


— Les pays dont le sous-sol recèle des gisements pétro¬
liers importants sont souvent des pays sous-développés.
Ils ont cherché à défendre leurs intérêts contre les com¬
pagnies pétrolières et contre les grandes Puissances
industrielles, dans le cadre général du principe proclamé
à rO. N. U. du droit des peuples à disposer de leurs res¬
sources naturelles. Dans une telle perspective certains
de ces pays se sont groupés dans une Organisation des
pays exportateurs de pétrole instituée en 1961. Cette orga¬
nisation a été établie non par un traité international mais
par une résolution adoptée par une conférence interna¬
tionale tenue à Caracas en janvier 1961 et qui groupait
cinq États : Arabie séoudite, Irak, Iran, Koweït, Vene¬
zuela auxquels s'est joint ultérieurement la principauté de
Katar. Ces six États représentent 80 % de la production
de pétrole du monde « occidental » et les réserves de leurs
sous-sols sont plus considérables encore.
La Libj^e et l’Indonésie se sont joints ultérieurement,
portant à 8 le nombre des États membres.
L’Organisation présente la particularité de ne grouper
que des pays producteurs et de ne pas faire place aux
pays consommateurs, à la différence des accords sur les
produits de base. Les statuts de la nouvelle organisation
dont le siège est à Genève sont fort souples, ils réservent
une place prépondérante aux cinq États fondateurs. Il
existe un Conseil des gouverneurs, un Secrétariat et une
Conférence internationale.

A la conférence de Djakarta en novembre 1964 cinq États


(Iran, Koweït, Libye, Katar, Arabie séoudite) ont accepté
les propositions faites par les compagnies pétrolières. Les
gouvernements toucheront par baril (7 à 8 barils pour une
LA RÉGLEMENTATION DE CERTAINS PRODUITS 637

tonne de pétrole brut) 0,815 dollar en 1964 (au lieu de 0,78)


avec une majoration de 4,5 cents en 1965 et 6 cents en 1966.
L’O. P. E. P. ne pouvant obtenir l’unanimité de ses membres
a laissé la liberté, l’Irak a refusé et l’Indonésie et le Venezuela
n’étaient pas concernés par la négociation.
La difficulté principale rencontrée par l’O. P. E. P. réside
dans un fait économique : la baisse des prix du pétrole brut
dans le monde.

620. — Le charbon. — Divers accords internationaux


sont intervenus pour le charbon. C’est par exemple la
réglementation concernant l'exploitation des mines de la
Sarre contenue dans le traité de Versailles. On peut en
rapprocher certaines dispositions des conventions de
Luxembourg du 27 octobre 1956 réservant à la France
une part de la production charbonnière du bassin de
la Sarre selon des modalités complexes, en compensa¬
tion de la réintégration de la Sarre dans le système
politique et économique de la République fédérale
allemande.

BIBLIOGRAPHIE

La réglementation de certains produits.


Sur les produits de base, voir :
Faits nouveaux concernant les produits de base, publi¬
cation annuelle des Nations unies, ainsi que les rapports
annuels de la Commission du commerce international des
produits de base; Amz.a.lak (M. A.), Le café et le sucre au
point de vue international, R. C. A. D. I., 1951, vol. 78;
Beb a Don, La conférence internationale du café de
Rio de Janeiro^, A. F. D. L, 1958, p. 465-476; Wilkin¬
son (H. F.), Étude des initiatives internationales en vue
de la stabilisation des marchés des produits de base, Genève,
1959; XXX., L’action internationale et les produits de
base, A. F. D. I., i960, p. 724-754; Mesures internationales
destinées à compenser les fluctuations du commerce des
produits de base. Nations unies, 1961; Problèmes inter¬
nationaux des produits de base. Conférence des Nations
unies sur le commerce et le développement, 1964
(E/Conf. 46^3); Ch ARN Y (F.), Le sucre. Collection « Que
sais-je? », Paris, 2® éd., 1965, Blau (G.), Politiques et
638 COMMERCE INTERNATIONAL

arrangements internationaux concernant les produits,


F. A. O., Rome, 1964; Voir aussi : le rapport annuel de
la Commission des produits de base de TU. N. C. T. A. D.
Sur l’Organisation des pays exportateurs de pétrole,
voir :
Fischer (G.), L’Organisation des pays exportateurs de
pétrole, A. F. D. I., 1961, p. 163-172.
TITRE II

INSTITUrnONS INTERNATIONALES
ET DÉVELOPPEMENT

La société interétatique contemporaine est caractérisée


non seulement par l’existence d’un ^and nombre d’États
mais encore par la disparité et la diversité de ceux-ci. Il
s’agit d’une société fort hétérogène comprenant des États
d’importance très variable. Les époques précédentes ont
connu des États inégaux entre eux en fait malgré la
proclamation du principe juridique de l’égalité des États,
mais la période actuelle fait apparaître une accentuation
du phénomène d’inégahté. Celle-ci se manifeste non
seulement sur le plan poütique mais aussi sur le plan
économique. Parmi les notions fondamentales de notre
époque l’une des plus répandues est celle du « sous-
développement ». La société interétatique voit ainsi se
manifester une opposition entre les États développés
et les États sous-développés appelés quelquefois insuf¬
fisamment développés ou encore, d’une manière plus
euphéimque, les États en voie de développement.
L’existence de niveaux matériels de vie fort différents
entre des États n’est point un phénomène nouveau et on
a pu la constater depuis longtemps mais c’est très récem¬
ment, essentiellement depuis la fin de la seconde guerre
mondiale qu’on a pris conscience du problème des pays
sous-développés, que l’on s’est livré à une anedyse du
sous-développement et que des mesures diverses ont été
adoptées, sur le plan international, pour tenter de porter
remède à une situation qui est parfois véritablement
640 LE DÉVELOPPEMENT

dramatique, caractérisée par la souffrance d’êtres humains


en proie à la faim et à la misère.
Les pays considérés comme sous-développés repré¬
sentent actuellement près des trois quarts de l’ensemble
de la population du globe. Ces pays sont évidemment
très différents les uns des autres mais présentent à l'in¬
verse certains traits communs.
La notion de pays sous-développés, pour répandue
qu’elle soit et très fréquemment invoquée, n’est pas d’une
précision très grande d’autant plus que divers États
considérés comme développés comportent des zones ou
des régions qui sont elles mêmes en état de sous-dévelop¬
pement.
On peut pourtant dégager quelques traits qui sont
caractéristiques du sous-développement. Ils peuvent
être analysés au triple point de vue de la démographie,
des structures économiques, du niveau de la consomma¬
tion.

621. — Sous-développement et démographie. — D’un


point de vue démographique on peut remarquer que les
pays sous-développés sont caractérisés par un taux fort
élevé de natahté et un taux de mortalité qui demeure
important bien qu’il soit en voie de régression.
Les taux de natahté sont très fréquemment de l’ordre
de 40/1000, parfois supérieurs, ce qui représente donc
une proportion souvent double de celle qui existe dans
les pays les plus développés. La mortahté demeure
élevée avec un taux qui est souvent de l’ordre de
25/1000. Le développement de l’hygiène et des traitements
médicaux tend à faire baisser ce taux mais la mortahté
demeure encore importante, plus particuhèrement la
mortahté infantile.
L’espérance de vie demeure très différente entre les
pays développés et les pays sous-développés. Alors que
dans les États les plus évolués ehe est de l’ordre de 65 à
75 ans, ehe s’abaisse à une trentaine d’années serdement
pour les pays sous-développés et ainsi apparaît une inéga¬
lité non seulement devant la vie mais aussi devant la
mort.
Les données démographiques confèrent au problème
du sous-développement un aspect particuhèrement dra¬
matique en ce sens que le taux de croissance démogra¬
phique des pays sous-développés demeurant élevé,
l’importance relative des populations sous-développées
LE DÉVELOPPEMENT 64I

par rapport à l’ensemble de la population humaine a


tendance à s’accroître.
Selon les évaluations de certains spécialistes, après
avoir été en 1955 de l’ordre des 2/3, elle serait voisine de
4/5 vers l’an 2000 et supérieure à cette fraction au milieu
du vingt et unième siècle.

622. — Sous-développement et structures économiques.


— Dans les pays sous-développés l’activité économique
est essentiellement constituée par l’agriculture, l’élevage,
parfois l’extraction minière. Les secteurs secondaires et
tertiaires sont très peu importants.
La proportion de la population agricole active par rap¬
port à la population active totale est considérable, elle
dépasse très largement 50 %, atteignant 75 ou 80 %
en Inde et au Pakistan par exemple alors qu’elle est de
l’ordre de 12 % aux États-Unis, de 27 % en France.
Malgré l’importance de la population active agricole les
rendements culturaux par unité de superficie demeurent
très médiocres, souvent de l’ordre du i/io seulement du
rendement des pays développés. Cette faiblesse des rende¬
ments s’explique par l’absence de protection des récoltes,
les mauvaises méthodes d’exploitation, la faible durée
du travail du paysan souvent en proie à la maladie, la non
utilisation d’engrais.

623. — Sous-développement et consommation. —


Les pays sous-développés sont caractérisés par la faiblesse
des revenus et des consommations par tête d’habitant.
L’évaluation du revenu en argent par tête d’habitant
fournit des indications peu précises évidemment mais
particuhèrement nettes sur le sous-développement. Les
pays développés se situent au-dessus d’un seuil de 500 dol¬
lars, avec en tête les États-Unis (plus de 2.000), mais à
l’autre bout de l’échelle une masse humaine de plus d’un
quart de la population mondiale ne dispose que d’un
revenu moyen de l’ordre de 50 dollars. L’ensemble des
pays sous-développés ne dépasse guère 150 dollars ou au
mieux 200.
La faiblesse des revenus entraîne la sous-consomma¬
tion. Elle apparaît en ce qui concerne l’énergie, les textiles,
l’acier mais aussi en ce qui concerne la nourriture.
Les pays sous-développés souffrent de la faim. Alors
que la ration alimentaire a une valeur supérieure à plus
de 3.000 calories dans les pays les plus développés aux
21. — INSTITUTIONS INTERNATIONALES.
642 LE DÉVELOPPÈMENÏ

États-Unis, au Canada, en Australie, en Nouvelle*


Zélande, en Suisse, dans les pays Scandinaves, qu’elle
s’établit à près de 3.000 calories pour la France elle
tombe à de plus faibles valeurs dans les pays sous-
développés, ordre de grandeur de 2.000 calories. La
composition des rations ajoute d’ailleurs à l’insuffisance
quantitative une insuffisance qualitative marquée par la
faiblesse des protéines d’origine animale contenant certains
acides nécessaires à l’harmonieux équilibre de l’organisme
humain. Ainsi près de 60 % de l’humanité souffre aujour¬
d’hui de la faim, et de maladies diverses qui proviennent
des carences alimentaires. Josue Castro a pu dresser le
tableau tragique d’une géographie de la faim, et à l’appel
de la F. A. O. a été lancée, en i960, une campagne contre la
faim qui devait durer cinq ans pour mobihser les énergies
en vue d’un effort pour permettre de produire des ah-
ments en quantité suffisante pour nourrir tous les hommes.
Il a été étabh un pathétique manifeste sur « le droit de
l’homme à manger à sa faim » (mars 1963).
Alors que des besoins aussi élémentaires que se nourrir
et se vêtir ne sont pas satisfaits il est évident que d’autres
besoins humains, plus complexes et moins immédiate¬
ment impérieux ne le sont que moins encore. Les pays
sous-développés souffrent d’un sous équipement grave
dans le domaine médical, dans le domaine de l’enseigne¬
ment et le pourcentage de l’analphabétisme y est fort
élevé.

624. — L’aide aux pays sous-développés. — L’exis¬


tence de telles situations si largement répandues dans le
monde pose le problème des remèdes à apporter.
L’époque contemporaine voit les pays industriahsés
apporter une aide aux autres. L’aide aux pays sous-
développés ne se situe pas simplement sur le plan d’une
« charité internationale », elle peut apparaître non seule¬
ment comme une mesure de justice sociale mais aussi
comme ime précaution, une sorte d’assurance des pays
développés contre les risques de déséquilibre et de boule¬
versement que peuvent représenter les pays sous-dévelop¬
pés.
L’aide peut même apparaître comme une opération
pohtique à laquelle se hvrent divers pays pour s’eissurer
certains avantages de caractère stratégique ou pohtique.
Les formes d’aide sont multiples et on peut les classer
de diverses manières. Il est des aides fournies directe-
LE DÉVELOPPEMENT 643

ment par les États développés à tel ou tel État et il


s’agit alors d’aide bilatérale. D’autres aides sont fournies
par des organisations internationales utilisant par un
mécanisme de redistribution des sommes fournies par les
États eux-mêmes et il s’agit ici d’aide multilatérale.
A côté de cette distinction entre les aides suivant
qu’existe ou non un organisme international de gestion,
existe une autre distinction qui oppose l’assistance dite
technique à l’assistance économique.
L’assistance économique se traduit par des prêts ou
des dons et elle est destinée à assurer des investissements.
L’assistance technique a une portée plus large recouvrant
toutes les formes d’une aide qui peut être très générale¬
ment définie comme la communication du savoir humain
destinée à permettre le progrès. La distinction de l’aide
technique et de l'aide économique n’est pas toujours très
facile à faire car elles sont souvent étroitement liées et se
conditionnent l’une l’autre. Les pages qui suivent les
distingueront tout de même sans que cette classification,
qui est généralement utilisée, prétende à une grande
rigueur.

BIBLIOGRAPHIE

Voir Développement et civilisation, Revue trimestrielle,


Paris, dirigée par R. Buron et le R.P. J. Lebret.
Cepede (M.) et Lenglelle (M.), Économie alimentaire
du globe, Paris, 1953; Balandier (G.), Tiers monde,
Paris, 1956; Lacoste (Y.), Les pays sous-développés.
Collection « Que sais-je? », Paris, 1959; Castro (J. de).
Géopolitique de la faim, Paris, 1962; Tunc (A.), Dans
un monde qui souffre, Paris, 1962; Cepede, Houtard
et Grond, Nourrir des hommes, Paris, 1963; Freyssi-
NET, Le concept de sous-développement, thèse Paris, 1964.
'Èà' .ËÔTàL sir VÎ 5>3^;fîîïy< r3%ftô;
^ficf ii^^h 'Jtfpiûidt. %£vl;. î' i*t> çmd/ùl
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CHAPITRE PREMIER

COMMERCE ET DÉVELOPPEMENT

Dans une résolution 1707 (XVI) du 19 décembre 1961,


intitulée Le commerce international, principal instrument
du développement économique, l’Assemblée de l’O. N. U.
envisageait la tenue d’une conférence intergouveme¬
mentale, chargée d’examiner les problèmes du commerce
international concernant en particulier les produits de
base, et invitait le Secrétaire général à consulter les
gouvernements à cet effet.
Un certain nombre de pays en voie de développement
réunis en 1962 à la Conférence du Caire sur le développe¬
ment économique, se montraient favorables à cette confé¬
rence.
L'idée fut reprise par la résolution 1785 (XVII) du
8 décembre 1962 de l’Assemblée générale de l’O. N. U.
Préparée par un Comité spécial la Conférence des Nations
unies sur le commerce et le développement s’est tenue à
Genève du 23 mars au 16 juin 1964, réunissant les repré¬
sentants de 120 Etats, dont 77 en voie de développement.
La Conférence a clos ses travaux par l’adoption d’un
acte final dont une partie est constituée par le texte de
diverses recommandations qui sans lier entre eux les
États participants ont exprimé un point de vue sur cer¬
tains problèmes ou suggéré des solutions souhaitables.
Les recommandations ont été transmises à l’assemblée
générale de l’O. N. U. pour examen à sa dix-neuvième
session en septembre 1964.
L’ensemble de ces recommandations peut être classé
en deux grandes séries, les unes formulent certains prin-
646 LE DÉVELOPPEMENT

cipes qui, selon la Conférence, devrait régir le commerce


international, les autres ont un caractère institutionnel
et concernent un Conseil du commerce et du développe¬
ment qui devrait être mis en place par une résolution de
l’Assemblée générale.

§ I. — Les principes de Genève.

La Conférence de Genève a adopté un certain nombre


de principes : quinze principes dits généraux, treize
principes dits particuliers, ainsi que huit principes rela¬
tifs au commerce de transit des pays sans littoral. La
Conférence a recommandé que les relations commerciales
internationales et les politiques commerciales propres à
favoriser le développement soient régies par ces principes.
Toutefois non seulement les formulations ont la simple
portée de recommandations mais encore elles ne cons¬
tituent que des cadres, les nouvelles institutions à créer
devant rechercher des formules propres à recueillir le
plus large accord.

625. — Les principes généraux. — Ils sont formulés


en quinze points et ne se combinent pas toujours entre
eux d’une manière parfaite, on peut relever même
quelques contradictions.
Les notions fondamentales qui se dégagent si l’on veut
avoir de ces principes une vision synthétique sont celles
de souveraineté, d’égahté et non discrimination d’orga¬
nisation générale de la communauté internationale, enfin
de spécificité.
_ La souveraineté figure parmi les principes. Les rela¬
tions économiques sont fondées sur le respect du prin¬
cipe de l’égahté souveraine entre les États, de l’auto¬
détermination des peuples, de la non ingérence dans les
affaires intérieures (Pr. i). Tout pays a le droit souverain
de commercer hbrement et de disposer hbrement de ses
ressources naturelles dans l’intérêt du développement
économique et du bien être de sa population (Pr. 3).
La décolonisation (tantôt limite, tantôt condition de la
souveraineté) est une condition nécessaire du déve¬
loppement économique (Pr. 14).
L'égalité et la non discrimination. Il ne doit exister
aucune discrimination fondée sur les différences entre
systèmes socio-économiques (Pr. 2). Mais le point n» 8
COMMERCE ET DÉVELOPPEMENT 647

adopte, d'une manière réaliste, une formule que l’on


pourrait appeler la discrimination compensatrice en pré¬
voyant que les pays développés devraient accorder des
concessions à tous les pays en voie de développement
sans exiger d’eux la réciprocité et sans en faire béné¬
ficier les pays développés.
La communauté internationale. Parmi les principes
généraux une place importante doit être faite à la notion
de communauté internationale. C’est là, semble-t-il que
réside la formulation la plus importante, celle à partir
de laquelle se construit d’ailleurs plus généralement le
droit international actuel. Le point 4 précise cette notion
d’un ensemble international : le développement écono¬
mique et le progrès social doivent être la préoccupation
commune de toute la communauté internationale et
doivent, en accroissant la prospérité et le bien être écono¬
miques contribuer à renforcer les relations pacifiques et
la coopération entre les Nations. Les intérêts des pays
doivent s’harmoniser, en outre, dans le cadre d’une divi¬
sion internationale du travail (Pr. 5).
La spécificité. Les principes généraux tout en posant
des règles de large portée font place à la prise en considé¬
ration de situations spécifiques, telles que les caractéris¬
tiques particulières et les divers stades de développe¬
ment. La distinction n’est pas seulement entre pays
développés et pays en voie de développement, eUe joue
également parmi les divers pays en voie de développe¬
ment, selon leur niveau.
Une situation particulière est prise en considération,
celle des États sans littoral maritime, à propos desquels
sont formulés des principes spéciaux.

626. — Les principes particuliers. — Les treize prin¬


cipes dits particuliers concernent divers problèmes essen¬
tiels et ont parfois une portée générale.
Trois thèmes principaux apparaissent : l’industriah-
sation, les produits primaires, les facihtés financières.
L’industriahsation des pays en voie de développement
doit être favorisée par l’assistance scientifique, technique
et financière des États développés et par la possibilité
d’une protection particuhère en faveur des industries
naissantes.
Pour les produits primaires il apparaît souhaitable de
stabihser les cours ou d’annuler les effets de la détériora¬
tion des termes de l’échange. Il convient également que
648 LE DÉVELOPPEMENT

soient compensés, par les pays développés, les effets du


remplacement des produits naturels par des produits
synthétiques.
Les ressources financières des États en voie de dévelop¬
pement sont insuffisantes à leur égard. L’assistance éco¬
nomique et financière doit jouer et revêtir des formes
favorables : dons ou prêts à long terme, à faible intérêt
remboursables à long terme en monnaie locale ou en
produits du pays bénéficiaire. Pour permettre aux pays
en voie de développement d’accroître leurs recettes et de
réduire leurs dépenses afférentes au commerce invisible
des mesures doivent être adoptées tendant à les aider à
créer des moyens de transports maritimes et autres et à
disposer de conditions améliorées de frêt et d’assurance
pour le transport de leurs produits.

627. — Pays sans littoral. — La Conférence a


adopté divers principes relatifs au droit pour tout État
dépourvu de littoral maritime d’accéder commercialement
à la mer. Ce principe avait d’ailleurs été posé déjà dans
l’article 3 de la Convention de Genève sur la haute mer
(en vigueur depuis le 30 septembre 1962).
Elle a invité le Secrétaire général de l’O. N. U. à
constituer une commission chargée d’élaborer un projet
de convention relatif au commerce en transit des États
sans httoral. La convention a été élaborée en 1965, elle
est ouverte à la signature.

§ 2. — Les aspects institutionnels.

La Conférence de Genève de 1964 a recommandé à


l’Assemblée générale d’adopter à sa XIX® session tme
série de dispositions institutionnelles contenues dans
l’acte final. Cette adoption fut opérée effectivement
(résolution 1995 (XIX) du 30 décembre 1964).
Plusieurs organes sont ainsi créés, la Conférence et le
Conseil ainsi qu’un secrétariat permanent qui existe dans
le cadre du secrétariat des Nations unies. Les dépenses
sont couvertes par un chapitre ouvert dans le budget
ordinaire de l’O. N. U.

628. — La Conférence sur le commerce et le dévelop¬


pement. — La Conférence est constituée en organe de
l'Assemblée générale. EUe groupe des États membres de
l’O. N. U., des institutions spécialisées et de l’Agence
COMMERCE ET DÉVELOPPEMENT 649

internationale de l'énergie atomique. Elle compte


131 membres en 1967. Elle se réunit à des intervalles
de temps de trois ans au plus.
Ses fonctions principales consistent : à favoriser l’ex¬
pansion du commerce international en vue d’accélérer
le développement économique, entre des pays à niveaux
de développement économique différents, entre pays en
voie de développement et pays à systèmes économiques
et sociaux différents; — à formuler des principes et des
politiques concernant le commerce international et les
problèmes connexes du développement économique; —
à soumettre des propositions pour faciliter l’application
de ces principes; — à prendre les mesures nécessaires,
en vue de la négociation d’accords multilatéraux; — à
servir, plus généralement de cadre pour l’harmonisation
des politiques des États et des groupements économiques
régionaux en matière de commerce et de développement
conformément à l’article premier de la Charte.

629. — Le Conseil. — Il est étabh un Conseil du com¬


merce et du développement qui constitue un organe perma¬
nent de la Conférence et est rattaché aux mécanismes de
rO. N. U. dans le domaine économique, il rend compte,
en particuher, de ses activités, annuellement, à l’Assem¬
blée générale par l’intermédiaire du Conseil économique
et social.
En dehors des réunions de la Conférence le Conseil
exerce les fonctions dévolues à celle-ci, il suit la mise en
œuvre des recommandations, prépare les futures sessions,
étabht les Mens nécessaires avec les organismes écono¬
miques de rO. N. U., notamment les commissions écono¬
miques régionales.
Les États membres du Conseil sont élus à chaque ses¬
sion de la Conférence et sont rééhgibles.
Le nombre des membres du Conseil est élevé, ils sont
55. En éhsant les membres la Conférence doit tenir
compte de la nécessité d’assurer une répartition géo¬
graphique équitable et de maintenir la représentation
des principaux États commerçants. Pour parvenir à ce
résultat la Conférence de Genève a classé les États parti¬
cipants en quatre catégories : la première compte 61 États
en voie de développement, ce sont des États afro-asia¬
tiques auxquels s’ajoute la Yougoslavie; — la seconde
comprend les États développés de l’Europe, l’Amé¬
rique du Nord de l’Australie (29 États dont Monaco,
650 LE DÉVELOPPEMENT

Saint-Marin, le Liechtenstein ainsi que le Saint-Siège);


— la troisième comprend 22 États du continent améri¬
cain, soit l’Amérique latine, la Jamaïque, Trinité et
Tobago; — la quatrième enfin comprend 9 États socia¬
listes européens dont l’Ukraine et la Biélorussie.
Entre ces quatre catégories sont répartis les 55 membres
du Conseil selon la clef suivante : 22 États sur les 61 de
la première catégorie, 18 sur les 29 de la seconde, 9 sur
les 22 de la troisième et enfin 6 sur les 9 de la qua¬
trième.

630. — Fonctionnement et vote. — Le Conseil du


commerce et du développement s’est réuni pour la pre¬
mière fois à New York (5-30 avril 1965). La conférence
de Genève avait prévu la création d’organes subsidiaires
et il a été créé une Commission des produits de base
(voir supra n® 614), une Commission des articles manu¬
facturés, une autre dite des invisibles et du financement,
enfin un organe particulier chargé des transports mari¬
times.
Du point de vue des votes chaque État, à la conférence,
dispose d’une voix, les décisions sur les questions de
procédure sont prises à la majorité, celles sur les ques¬
tions de fond à la majorité des 2/3.
Mais il convient de remarquer que, malgré la termino¬
logie employée, les résolutions adoptées par les organes
sont des recommandations et non pas des décisions
puisqu’on dehors des mesures internes à la Conférence
ou au Conseil elles ne sont pas obligatoires pour les
États. En outre il existe une disposition fort importante,
celle du § 25 de l’annexe A. V. I. de l’acte final relative
à une procédure dite de conciliation. Sans aucun rapport
avec la procédure classique de la conciliation considérée
comme un mode de règlement pacifique de certains dif¬
férends internationaux, il s’agit ici d’une procédure pré¬
paratoire se déroulant avant le vote et qui permettra de
donner une base suffisante pour l’adoption de recomman¬
dations relatives à des propositions concrètes prévoyant
des mesures qui affectent les intérêts économiques ou
financiers de certains pays.
La procédure dont il s’agit montre une vision réaliste
des délibérations des assemblées intergouvemementales.
L’adoption de résolutions par une majorité d’États en
voie de développement est facile à obtenir mais ne signi¬
fierait rien de réel, au contraire l’adoption par un
COMMERCE ET DÉVELOPPEMENT 65I

ensemble d’États appartenant par exemple à différents


groupes d’une résolution qui ama été préparée en com¬
mun par eux peut être d’une portée plus grande.

BIBLIOGRAPHIE

Lacharrière (G. de). Commerce extérieur et sous-


développement, Paris, 1964; Philip (A.), La Conférence
de Genève sur le commerce et le développement, Dévelop¬
pement et civilisation, 1964, no 19, p. 52-64; Maes (A.),
La signification de la Conférence sur le commerce et le
développement. Chronique de politique étrangère, 1965,
no I, p. 31-49.
Consulter les documents de la Conférence de Genève,
l’acte final, le rapport général ainsi que les rapports du
Conseil du commerce et du développement de la pre¬
mière session à la quatrième session.
CHAPITRE II

L’ASSISTANCE TECHNIQUE

L’assistance technique, au sens précédemment donné


de l’expression, est actuellement assurée soit sous une
forme multilatérale, dans le cadre de l’O. N. U. et des
institutions spécialisées, soit sous une forme plus limitée
de caractère régional ou bilatéral.

§ I. — L’assisteince technique et l'O. N. U.

631. — Développement économique et Nations unies.


— Plusieurs dispositions de la Charte concernent le
développement économique. Le Préambule d’abord
souhgne la résolution des Nations unies de « recourir
aux institutions internationales pour favoriser le progrès
économique et social de tous les peuples ». L’article
premier place parmi les buts de l’Organisation la réalisa¬
tion de la coopération internationale pour résoudre en
particulier les problèmes économiques et sociaux.
Surtout les chapitres ix et x de la Charte sont consa¬
crés aux questions économiques. Le chapitre ix est :
intitulé « coopération économique et sociale interna¬
tionale ». Dans l’article 55 il est prévu que les Nations i
unies favoriseront le relèvement des niveaux de vie,
le plein emploi et des conditions de procès et de dévelop¬
pement dans l’ordre économique et social. Le chapitre x.
concerne le Conseil économique et social (v. supra, n® 390),,
il prévoit le rôle de celui-ci en matière d’études, de rap- -
ports, de recommandations.
La Charte se préoccupe donc du développement éco--
L’ASSISTANCE TECHNIQUE 653

nomique, elle en fait un des buts de l’Organisation et


l’article 56 précise que les membres s’engagent à favoriser
ce développement économique, tant conjointement que
séparément, en coopération avec l’Organisation elle-
même. L’article 60 précise que l’Assemblée générale et,
sous son autorité, le Conseil économique et social sont
investis des compétences nécessaires pour réaliser cette
action de développement économique qui a été appelée
assistance technique.
Les modalités d’action ont varié depuis 1945, le
domaine d’action s’est progressivement élargi, on peut
compter quatre types d’intervention, la quatrième qui
date de 1965 ayant opéré la fusion des deuxième et troi¬
sième.

7. — Le système initial.

LE PROGRAMME PRIMITIF

632. — Le programme primitif d'assistance technique.


— L’Assemblée générale a porté son attention sur les
problèmes de l’assistance technique dès le mois de
décembre 1946. Dans sa résolution 52, constatant que les
membres des Nations unies ne sont pas tous parvenus au
même stade de développement, elle a demandé au
Conseil économique et social d’étudier « la question de
prévoir des moyens efi&caces pour fournir, en coopération
avec les institutions spécialisées, des conseils techniques
dans les domaines économique, social et culturel, aux
États membres qui désireraient cette aide ».
On trouve dans cette résolution une définition véritable
de l’assistance technique qui consiste à mettre à la dispo¬
sition des États qui le désirent des experts ou personnes
compétentes pouvant fournir des conseüs en vue du
développement économique, social, culturel, administra¬
tif d’un pays.
La mise à la disposition de divers États de tels spécia-
hstes n’est pas chose nouvelle. L’histoire des relations
internationales montre l’existence de conseillers tech¬
niques, de conseillers financiers, économiques ou mili¬
taires. La nouveauté de l’institution de l’assistance
technique est son caractère international. L’organisation
internationale peut agir comme une sorte de filtre qui
empêche l’aide technique de devenir la source d’une
domination ou d’une main-mise internationale.
654 LE DÉVELOPPEMENT

Le problème qui se pose, en présence de l’envoi de ces


techniciens, est celui du coût de leurs missions. Le pays
bénéficiaire peut ne pas pouvoir les supporter. Le pays qui
envoie les techniciens doit apparaître comme remphssant
une véritable fonction internationale et ne pas financer
lui-même l'envoi des spéciahstes. Pour ces raisons l’As¬
semblée générale, dans sa résolution 200 du 4 décembre
1948, a accordé les crédits nécessaires pour permettre
au secrétaire général d’organiser les équipes interna¬
tionales d’experts, d’assurer la formation à l’étranger,
par le moyen de bourses, de spéciahstes provenant des
pays insuffisamment développés, d’organiser dans ces
pays la formation sur place de techniciens locaux, d’aider
enfin les gouvernements à se procurer le personnel, le
matériel et les fournitures techniques.
Ainsi est apparu le premier programme d’assistance
technique. Il est financé sur le budget ordinaire de l’Or¬
ganisation, il est donc relativement modeste. Il s’accom-
pht d’ailleurs en haison avec les diverses institutions
spéciahsées.
Ce premier programme, complété ultérieurement par
la résolution 246 concernant un programme international
de formation en matière d’admmistration pubhque,
subsiste encore mais depuis 1949 il a été doublé par
un programme dit progranune élargi.

II. — L’extension de Vassistance.

L’extension de l’assistance a été réaUsée avec le Pro¬


gramme élargi dès 1949, ultérieurement le Fonds spécial
à partir de 1959.
Ces institutions sont remplacées par un système unifié
depuis 1965, il convient de rappeler leurs mécanismes.

A. - LE PROGRAMME ÉLARGI.

En 1948 l’Assemblée générale, se conformant à l’esprit de


la Charte elle-même, a recommandé au Conseil économique
et social et aux institutions spécialisées de procéder « d’ur¬
gence à un nouvel examen d’ensemble du problème du déve¬
loppement économique des pays insuffisamment dévelop¬
pés, sous tous ses aspects ». Elle invitait en outre le Conseil
économique et social à lui rendre compte des diverses
mesures déjà prises ou proposées « pour favoriser le déve¬
loppement économique et relever le niveau de vie des pays
insuffisamment développés ».
l'assistakce technique 655

Le message au Congrès des États-Unis du président Tru-


man, en date du 20 janvier 1949, allait dans le même sens
que la résolution de l’Assemblée générale. Le discours inau¬
gural comportait en effet un paragraphe qui devait devenir
fameux, le point IV, qui proposait un « programme neuf et
hardi » pour faire bénéficier les pays insuffisamment déve¬
loppés des découvertes scientifiques et des progrès indus¬
triels. Le point IV dépassait largement le cadre d’un seul
État, disposât-il du potentiel économique des États-Unis,
il invitait les autres pays « à mettre en commun leurs res¬
sources techniques dans une entreprise de coopération où
toutes les Nations travailleraient de concert, par l’entre¬
mise de l’Organisation des Nations unies et des institutions
spéciahsées, chaque fois qu’il serait possible ».
Par une résolution n° 180 du 4 mars 1949, adoptée sur
proposition du représentant des États-Unis, le Conseil éco¬
nomique et social a chargé le secrétaire général de préparer
un projet complet pour l’élargissement du programme d’as¬
sistance technique. Le trait essentiel de ce programme devait
être la coopération internationale marquée par la partici¬
pation du plus grand nombre d’États à la réalisation du
programme lui-même, tant sur le plan technique que sur le
plan de la charge financière.
Saisi du rapport préparé par le secrétaire général de
l’O. N. U. et les directeurs généraux des institutions spécia¬
hsées siégeant en Comité de coordination, le Conseil écono¬
mique et social a défini par une résolution n® 222, qu’il a
adoptée le 15 août 1949, les objectifs du programme élargi,
les principes à apphquer et les méthodes à suivre. Ce texte
a été approuvé à l’unanimité le 16 novembre 1949 par l’As¬
semblée générale elle-même.
Il constitue aujourd’hui encore le texte fondamental qui
régit le programme élargi, avec quelques modifications qui
ont été apportées en mai 1952 par le Conseil économique et
social.

633. — Les principes du programme élargi. — L’assis¬


tance technique a pour objectif principal d’aider les pays
insuffisamment développés à renforcer leurs économies
nationales, grâce au développement de leurs industries et
de leur agriculture, afin de favoriser leur indépendance
économique et pohtique et permettre à leur population
d’atteindre un niveau plus élevé de bien-être économique et
social.
L’assistance technique repose sur le double principe du
respect gouvernemental et de la non-discrimination.
L’aide est fournie par des organisations internationales,
mais elle ne peut être fournie qu’à des gouvernements qui
en font la demande ou au moins par leur intermédiaire. La
compétence gouvernementale du pays assisté se trouve ainsi
656 LE DÉVELOPPEMENT

respectée, c’est ce gouvernement qui définit la nature et


la portée de l’aide qu’il sollicite, la forme sous laquelle il
désire être aidé. Ce respect se manifeste aussi du point de
vue de l’indépendance. Un principe essentiel est que l’as¬
sistance fournie ne doit pas constituer un prétexte d’ingé¬
rence économique ou politique de la part de l’étranger dans
les affaires intérieures du pays intéressé et ne doit être
accompagnée d’aucune considération de caractère politique.
Le principe de non-discrimination conduit à éviter, dans
l’octroi de l’assistance technique ou sa mise en oeuvre, toutes
distinctions fondées sur le régime politique du pays qui
demande une aide ou sur la race ou la religion de sa popu¬
lation.

634. — L’organisation du programme élargi. — L’assis¬


tance technique comporte une organisation composée du
Comité de l’assistance technique (C. A. T.) et du Bureau de
l’assistance technique (B. A. T.).
Le Comité est composé de représentants des gouverne¬
ments qui siègent au Conseil économique et social. Il assure
la surveillance générale du programme, reçoit les rapports
du Bureau, fait rapport au Conseil économique et social qui
fait à son tour rapport à l’Assemblée générale, organe
suprême en la matière.
Le Bureau est destiné à assurer la coopération entre
elles de l’O. N. U. et des institutions spécialisées. Il se
compose des directeurs généraux, ou de leurs représentants,
des organisations internationales participantes. Il est pré¬
sidé par un président-directeur qui consacre tout son temps
à ces fonctions. La Banque internationale et le Fonds moné¬
taire international sont représentés au Bureau.
Le Bureau est informé de toutes les demandes formulées
par les États. Il étudie les programmes, approuve les projets
les plus importants. Il répartit les crédits.
Dans de nombreux pays où le programme élargi est mis
en œuvre, le Bureau peut nommer un représentant qui coor¬
donne les services, conseille le gouvernement et peut négo¬
cier avec lui les accords relatifs à l’assistance.

635. — Accords de base. — On désigne sous ce nom


les conventions internationales qui interviennent entre le
gouvernement bénéficiaire de l’assistance technique et les
organisations internationales dites participantes, c’est-à-dire
rO. N. U. et les diverses institutions spéciahsées.
L’accord de base précise les conditions de fourniture de
l’assistance. Il détermine les obligations administratives et
financières des organisations et celles du gouvernement béné¬
ficiaire.
Conclu entre, d’une part, un gouvernement étatique,
d’autre part des organisations internationales, l’accord de
l’assistance technique 657

base est un texte de portée internationale d’un caractère


particulier.

636. — Financement. — L’assistance technique, sous


la forme de mise à la disposition de gouvernements des spé¬
cialistes nécessaires ou sous la forme d’enseignements don¬
nés, entraîne des dépenses. Le problème du financement est
donc important à résoudre.
La solution adoptée est celle des contributions volon¬
taires. Chaque année se réunit une conférence internatio¬
nale qui groupe les représentants des gouvernements de tous
les États qui sont membres de l’O. N. U. ou des institu¬
tions spéciahsées coopérant au programme élargi, et il est
déterminé les contributions de chaque gouvernement au
financement du programme.
Ces sommes sont versées à un compte spécial pour l’as¬
sistance technique, qui est géré d’une manière distincte du
budget de l’O. N. U. et des institutions spécialisées.
Une résolution de l’Assemblée générale sur proposition
du C. A. T. étabht chaque année la répartition des ressources
entre les diverses organisations participantes, O. N. U. elle-
même et Institutions spécialisées.
Depuis la mise en œuvre du Programme élargi on peut
constater que le nombre des gouvernements promettant une
contribution s’est accru notablement, le montant des sommes
promises a également augmenté passant d’un ordre de gran¬
deur initial de 20 millions de dollars à 25 en 1954, 3° ^n 1957,
40 en 1961, plus de 50 en 1964.

B. — Le Fonds spécial.

Malgré son bon fonctionnement, le programme élargi d’as¬


sistance technique est apparu comme insuffisant eu égard à
l’importance considérable des besoins des pays sous-déve¬
loppés.
Des projets plus grandioses ont été élaborés à diverses
reprises au Conseil économique et social ou dans des comités
spéciaux institués par celui-ci ou par l’Assemblée générale.
Un rapport détaillé relatif à un Fonds spécial des Nations
unies pour le développement économique (S. U. N. F. E. D.)
a été ainsi examiné en 1953. Mais ces projets qui dépas¬
saient l’assistance technique pour prévoir l’organisation
d’une assistance économique n’ont pas abouti, au cours des
années suivantes.
En 1957 contraire a été adopté par l’Assemblée géné¬
rale, dans sa résolution 1219 (XII) du 14 décembre, le
principe de la création d’un Fonds spécial distinct qui per¬
mettrait d’étendre les activités d’assistance et de dévelop¬
pement techniques de l’O. N. U. et des institutions spécia¬
lisées.
658 LE DÉVELOPPEMENT

La résolution 1240 (XIII) du 14 octobre 1958 adoptée par


77 voix contre o avec i abstention a créé et établi le Fonds
spécial des Nations unies.

637. — Principes généraux du Fonds spécial. — Le


Fonds spécial ne dispense pas une aide économique mais
il est destiné à fournir une assistance systématique et sou¬
tenue dans les domaines qui sont essentiels pour le progrès
technique, économique et social des pays peu développés.
La résolution 1240 a posé quelques principes qui dominent
la pohtique du Fonds. Les opérations se distinguent des
opérations incluses dans les programmes élargis.
Le Fonds en effet doit consacrer tout d’abord son assis¬
tance à des projets relativement importants et non pas sou¬
tenir de multiples projets mineurs et doit adopter des for¬
mules qui dépassent dans leur durée le cadre annuel. L’action
du Fonds ne doit être accompagnée d’aucune condition poli¬
tique et ne doit pas permettre une ingérence étrangère
pohtique ou économique dans les affaires intérieures des
pays intéressés. Les affectations de crédits doivent être
faites selon un principe de large répartition géographique
et il n’y a pas de répartition a priori entre pays ou entre
grands domaines d’assistance.
Les domaines essentiels pour lesquels le Fonds accordera
son assistance sont très vastes, ils englobent les ressources
(y compris la main-d’œuvre), l’industrie et l’artisanat, l’agri¬
culture, les transports et communications, l’hygiène, l’en¬
seignement, l’administration publique et les études statis¬
tiques. Le Fonds peut fournir du personnel, des experts, du
matériel et des services, créer des instituts et des organismes
pilotes. Il peut fournir certains équipements mais ne peut
engager des dépenses d’investissement, ses opérations devant
être de nature à faciliter de nouveaux investissements en les
rendant possibles ou plus efficaces.

638. — Fonctionnement du Fonds. —- Finances. — Le Fonds


spécial dispose d’un financement propre sur la base de contri¬
butions volontaires versées par les gouvernements des États
membres de l’O. N. U., des institutions spéciahsées et de
l’Agence internationale de l’énergie atomique. Les contribu¬
tions sont annuelles, mais il est recommandé en raison de la
pohtique même du Fonds que les engagements soient pris pour
plusieurs années. Une conférence se tient chaque année, à
l’initiative du secrétaire général au cours de laqueUe les États
disposés à le faire indiquent les contributions qu’ils acceptent
de verser.
Le Fonds est entré en activité à dater du ler janvier 1959.
Les promesses de contributions se sont accrues passant suc¬
cessivement de 26 miUions de dollars des E. U. en 1959 à
plus de 85 en 1964 avec une progression réguhère {38,7
en i960; 48,1 en 1961; 60,1 en 1962; 73,5 en 1963).
l’assistance technique 659

L’ordre de grandeur est comparable à celui du Programme


élargi.
Administration. — Placé sous l’autorité du Conseil éco¬
nomique et social de l’Assemblée générale, le Fonds est
administré par un directeur général assisté d’un nombre
restreint de fonctionnaires et d’un comité consultatif com¬
posé du secrétaire général de l’O. N. U., du président-direc¬
teur du B. A. T. et du président de la B. I. R. D. Le contrôle
direct sur la politique et les opérations du Fonds est exercé
par un Conseil d’administration composé des représentants
de 18 États membres élus par le Conseü économique et
social pour une durée de trois ans. Le Conseil est constitué
sur une base paritaire, 9 membres appartenant à des pays
économiquement développés et fournissant d’importantes
contributions au Fonds, 9 membres représentant les pays
sous-développés, compte tenu d’une répartition géographique
équitable.

III. — L’unification de l’assistance élargie.

LE PROGRAMME DES NATIONS-UNIES


POUR LE DÉVELOPPEMENT

Par la Résolution 2029 (XX) du 22 novembre 1965


connue sous le nom de « Au service du progrès », l’Assem¬
blée générale a opéré la fusion du Fonds spécial et du
Programme élargi en un seul programme dénommé Pro¬
gramme des Nations-Unies pour le développement.
(P. N. U. D.) Le nouveau Programme tout en gardant
les principales caractéristiques et les méthodes des inter¬
ventions précédentes tend à accroître leur efficacité par
l’unification de la direction, de l’organisation centrale et
des services extérieurs. Le système est entré en vigueur
le janvier 1966.

639. — Principes du P. N. U.D. — Le P. N. U. D.


constitue un grand programme d’assistance multilatérale
au « pré-investissement ».
Les services de coopération technique fournis grâce
au P. N. U. D. interviennent pour : rechercher et
accroître les ressources naturelles des pays; 2° former un
grand nombre de techniciens; 3° développer et trans¬
mettre les possibüités technologiques; 4° créer les struc¬
tures permanentes nécessaires au développement. L’ac¬
tion utihse la planification du développement, tend à
développer la productivité, les services pubhcs, assure
la diffusion des connaissances et de l’enseignement.
66o LE DÉVELOPPEMENT

Le P. N. U. D. s’efforce d’accroître la richesse poten¬


tielle que recèle chaque pays, il étabUt une coopération
entre pays en voie de développement et pays industria-
üsés recrutant du personnel et des fonds dans les deux
catégories de pays.

640. — Structures. — Le P. N. U. D. est un


organisme des Nations-Unies placé sous l’autorité du
Conseil économique et social et de l’Assemblée générale.
Un comité intergouvememental de 37 membres, appelé
Conseil d’administration, examine les projets, les pro¬
grammes et les allocations de fonds. Il prend ses décisions
à la majorité.
Les sièges sont répartis 19 aux pays en voie de déve¬
loppement, 17 aux pays économiquement plus dévelop¬
pés avec un système compliqué de roulement pour le
37e siège.
La direction du P. N. U. D. est assurée par un Direc¬
teur (ancien directeur général du Fonds spécial) et im
Co-directeur (ancien Président directeur du B. A. T.).
Ils sont assistés par un Bureau consultatif interorganisa¬
tions comprenant le Secrétaire général de l’O. N. U. et
les chefs des secrétariats des Institutions spéciahsées.
Les bureaux extérieurs du P. N. U. D. sont étabhs dans
les pays bénéficiaires, chacun d’eux est dirigé par un
Représentant résident du P. N. U. D.
Le financement est assuré, comme antérieurement par
des contributions volontaires. La nécessité d’un ensemble
de contributions de l’ordre de 200 müHons de dollars dès le
début a été souUgnée.

§ 2. — Autres formes d’assistance technique.

En dehors de l’aide multilatérale caractérisée par la


redistribution internationale, existent d’autres formes
d’assistance technique dans lesquelles l’intervention des
États s’exprime d’une manière plus directe et moins
anonyme, on peut distinguer les assistances techniques
régionales et les assistances de caractère bilatéral.

A. — Les assistances techniques régionales.

Les assistances techniques régionales jouent non pas à


l’échelon mondial mais dans certaines régions du monde
l’assistance technique 66i

qui peuvent d’ailleurs être fort vastes, trois séries


d’exemples peuvent être donnés.

641. — Le plan de Colombo. — Le plan de Colombo


pour le dével(ypement économique des pays de l’Asie
et de l’Asie du Sud-Est est le cadre dans lequel s’inscrivent
les programmes de développement élaborés progressi¬
vement par les pays membres.
Cette formule d’assistance technique qui n’est pas d’ail¬
leurs im plan véritable, malgré son nom, a pris naissance
en janvier 1950 à la conférence de Colombo qui réunissait
certains pays du Commonwealth, l’Inde, le Pakistan,
Ceylan, le Royaume-Uni, le Canada, l’Australie, la
Nouvelle Zélande ainsi que les territoires britanniques
de la Malaisie et de Bornéo. Si primitivement le plan de
Colombo ne concernait que les pays du Commonwealth
il n’a pas tardé à s’étendre à d’autres États, la participa¬
tion des pays de la zone de l’Asie et de l’Asie du Sud-Est
étant prévue. Au cours même de l’année 1950 le Cam¬
bodge, le Laos, le Viêt-nam participèrent au plan de
Colombo qui depuis 1954 comprend tous les pays de
l’Asie à l’Est du Pakistan sauf le Nord Viêt-nam et la
Chine.
Le plan de Colombo apparaît comme un cadre rassem¬
blant les divers plans de développement distincts établis
et gérés par chacun des États de la zone.
Une des pièces essentielles du plan de Colombo est le
plan de coopération technique qui complète pour chaque
pays l’aide technique reçue des Nations-unies ou prove¬
nant d’rme aide bilatérale nord-américaine.
La contribution financière initiale avait été fixée à
8 millions de Livres devant être utilisés en trois ans. Le
Plan fut ensuite étalé dans le temps puis reconduit
jusqu’en 1967. La caractéristique du plan est que les
divers pays participent financièrement. La répartition
initiale, entre membres du Commonwealth faisait reposer
l’essentiel de l’aide sur le Royaume-Uni et l’Australie
devant intervenir chacun pour 35 % du total.

642. — Les organes. — Le plan de Colombo comporte


une structure fort élémentaire du point de vue organique.
Les plans de développement sont élaborés par les États et
sont l’objet d’études et de discussions au sein d’un Comité
consultatif composé des ministres et des fonctionnaires
compétents.
662 LE DÉVELOPPEMENT

Il n’existe d’organe institutionnel que pour la section


d information et le Conseil de la coopération technique.
Ce conseil a été créé par l’Accord de Londres du
2 novembre 1950. Il se compose de représentants des
gouvernements p^ticipant au programme, il est établi
à Colombo et assisté dans sa tâche par un Bureau. Le
rôle des organismes est d’ailleurs limité car il consiste
essentiellement à mettre en rapport les deux États
dont l’un va fournir l’aide et l’autre la recevoir. Les deux
gouvernements signent les accords d’assistance et
conviennent du mode de règlement des frais d’assistance,
généralement l’État qui fournit les experts supporte leur
traitement qu’il prélève sur les sommes qu’il s’est engagé
à verser au titre de la coopération et l’État bénéficiaire
prend à sa charge les frais de voyage et de séjoirr des
experts.

, 643. — L’Amérique latine. — L’Organisation des


Etats américains (voir supra, nP 425) a étabh un certain
nombre de programmes d’assistance technique dont
la charge retombe essentiellement sur les États-Unis.
Cette assistance s’intégre dans le cadre plus général du
développement économique pour lequel des aides finan¬
cières de caractère économique et des investissements
sont nécessaires. Ces aides se matériahsent avec la création
en 1959 de la Banque interaméricaine de développement
(B. 1. D.). Dans la déclaration de Punta del Este,
d août 1961, qui met en œuvre l’idée de l’Alhance pour
le progrès, lancée par le président Kennedy en mars 1961,
l’essentiel est constitué par la promesse des États-Unis
de fournir à l’Amérique latine vingt milliards de dollars
provenant de fonds publics et devant être utilisés dans la
pochaine « décennie », mais on doit noter que les États-
Unis s’engagent à mettre au service de l’Alliance ime
contribution financière et technique et un passage de la
Déclaration fait allusion aux « experts indépendants et
hautement qualifiés mis à la disposition des pays d’Amé¬
rique latine pour les aider à élaborer et à examiner leurs
plans nationaux de développement ».

644. — Les ^ organisations régionales de coopération


technique. — L’assistance technique, au sens même de l’ins¬
titution, est destinée à permettre d’assurer le développement
économique de certains pays en instaurant une collaboration
internationale et en évitant ou limitant au moins l’ingérence
l’assistance technique 663

économique et politique d’un État développé dans les afiaires


intérieures de l’État bénéficiaire.
L’assistance technique peut apparaître à ce titre comme
destinée à remplacer la colonisation qui comportait un
élément de développement économique mais dans le cadre
d’un ensemble dont le territoire considéré n’était qu’une
pièce, avec subordination du développement local aux inté¬
rêts de la métropole ou de ses nationaux. Dans la mesure où
elles existent encore, les structures politiques coloniales
font place à des mécanismes d’aide financière et technique
métropolitaine aux territoires coloniaux, cette aide étant
financée par le budget métropohtain et jouant dans un cadre
de droit interne.
Dans la période des dominations coloniales les rapports des
Puissances coloniales entre elles ont été généralement mar¬
qués par des affrontements ou au moins des rivahtés. Toute¬
fois une coopération internationale entre Puissances colo¬
niales ayant des responsabilités à l’égard de territoires situés
dans telle ou telle région est apparue au lendemain de la
seconde guerre mondiale, elle s’est manifestée sur le plan
du développement économique et de l’assistance technique
et a abouti à la création de certaines organisations régionales
de coopération technique. Ces organisations, parfois avec
quelques transformations ont continué à exister lorsque les
territoires auxquels elles s’appliquaient sont devenus, tous
ou quelques-uns, indépendants. Trois régions apparaissent
comme le champ d’action de ces pohtiques de coopération
technique.

1° L’Organisation des Caraïbes. — Un traité du 21 juin i960


signé à Washington par la France, les Pays-Bas, le Royaume-
Uni et les États-Unis a créé une organisation internationale
dite des Caraïbes. Elle remplace une organisation antérieure,
la Commission des Caraïbes instituée entre les mêmes États
en 1946 et qui avait succédé elle-même, par élargissement, à
la Commission anglo-américaine des Caraïbes créée en 1942.
Le but de la nouvelle organisation est de poursuivre la coopé¬
ration sociale, culturelle et économique dans la région en
tenant compte des transformations politiques intervenues ou
pouvant intervenir. Cette coopération tend à contribuer au
bien-être dans la région des Caraïbes, à donner des conseils
techniques d’ordre régional, à promouvoir la coordination
des recherches. L’organe directeur est un Conseil des Caraïbes
dont sont membres les États de la zone, soit donc les métro¬
poles lorsqu’un statut dérivé du type colonial subsiste, soit
les nouveaux États, comme la Jamaïque ou Trinité. Le siège
de l’organisation est à Port of Spain (Trinité).

2° La Commission du Pacifique Sud. — Sur le modèle de


la Commission des Caraïbes, un traité du 6 février 1947
664 LE DÉVELOPPEMENT

conclu entre l’Australie, les États-Unis, la France, la


Nouvelle-Zélande, les Pays-Bas et le Royaume-Uni a établi
une Commission du Pacifique Sud dont le secrétariat est à
Nouméa. La Commission qu’assistent un Conseil de
recherches et une Conférence du Pacifique Sud composée de
représentants des territoires s’efforce de coordonner les acti¬
vités des divers services (agriculture, pêche, exploitation
forestière, industrie, transports) et de développer les projets
communs d’assistance technique.

3° La Commission de coopération technique en Afrique au


sud du Sahara. — Une convention signée à Londres le
i8 janvier 1954 ^ consacré officiellement des tentatives
préexistant depuis 1947 par lesquelles plusieurs Puissances
européennes administrant des territoires coloniaux en
Afrique, au sud du Sahara, s’efforçaient de réaliser une colla¬
boration dans des domaines techniques précis, recherche
scientifique, développement des communications, lutte
contre les fléaux naturels. Les membres de la Commission
étaient en 1954 Belgique, la France, le Portugal, la Fédé¬
ration de Rhodésie et du Nyassaland, le Royaume-Uni,
l’Union Sud-africaine. Le caractère scientifique, au sens de la
science appliquée, qui marque cette organisation apparaît
nettement avec l’existence de bureaux techniques spéciaUsés
dans diverses questions : la pédologie, l’économie rurale, la
lutte contre les épizooties, la lutte contre la mouche tsé-tsé
et les maladies africaines. La coopération technique revêt
ici une grande importance. Ainsi s’exphque-t-on que cette
organisation internationale ait été maintenue après l’acces¬
sion à l’indépendance d’une série de territoires sur lesquels
s’étendait son activité. Mais des transformations profondes
sont intervenues en conséquence de la décolonisation, des
tentatives de regroupement des États africains et des pro¬
blèmes politiques particuhers posés par la Fédération de
Rhodésie, l’Afrique du Sud et le Portugal.
Une nouvelle convention internationale, destinée à rem¬
placer celle de 1954 a été signée à Dar-El-Salam lors de la
tenue de la dix-huitième session de la Commission, la nou¬
velle organisation doit compter 26 membres y compris l’Ou¬
ganda et le Ruanda qui ont été admis à cette session (1963).

B. — Les assistances bilatérales.

Des mécanismes d’assistance technique précédemment


exposés il convient de distinguer d’autres formes qui
comportent une aide apportée par un État directement
à un autre État. L’aide est alors négociée sur le plan
bilatéral, sur la base d’une convention interétatique, en
l’ASSISTANCE TECHNIQUE 665

dehors de l’intervention de l’O. N. U. et des diverses


organisations internationales.

645. ~ L’assistance bilatérale des Ëtats»Unis. —


Dans son message du 20 janvier 1949 le président Tru-
man a recommandé au Congrès des États-Unis l’adoption
d’un programme d’assistance technique aux pays sous-
développés. C’est le point IV de ce message qui était
consacré à ces problèmes. Le Président indiquait : « Plus
de la moitié des habitants du monde vivent dans des
conditions approchant de la misère. Leur alimentation
est insuflSsante, üs sont les victimes des maladies. Leur
vie économique est primitive et stagnante. Leur pauvreté
est un handicap et une menace non seulement pour eux
mais pour des régions plus prospères. » Il mettait ensuite
l’accent sur l’importance de l’assistance technique : « Les
ressources matérielles que nous pouvons nous permettre
d’utüiser pour venir en aide aux autres peuples sont
hmitées mais nos ressources impondérables en connais¬
sances techniques augmentent sans cesse et sont inépui¬
sables. Je crois que nous devrions mettre à la disposition
des peuples qui aiment la paix les bénéfices de notre
abondance de connaissances techniques afin de les aider
à réahser leurs aspirations à une vie meilleure... »
Le point IV ne se bornait pas à l’assistance technique
et prévoyait aussi le lancement d’un programme qui
encouragerait le placement de capitaux privés. Par
ailleurs le point IV ne se limitait pas à des formules d’aide
bilatérales, il envisageait la coopération internationale
et l’intervention des Nations unies.
Selon des solutions d’aide bilatérale les États-Unis
ont conclu une série de conventions avec des États qui
ont ainsi bénéficié de l’aide technique américaine. On
peut citer de nombreuses conventions conclues par les
États-Unis avec des États de l’Amérique latine et
d’autres pays comme le Pakistan (accords du 9 février
1951, 12 février 1952, 27 mars 1953, 19 mai 1954).
Ces conventions d’assistance se distinguent des accords
d’aide mutuelle de caractère économique ou militaire qui
s’intégrent souvent dans le cadre d’organisations inter¬
nationales comme l’O. E. C. E. ou l’O. T. A. N. Elles se
combinent souvent aussi avec des accords d’assistance
militaire. L’assistance technique des États-Unis est
apparue ainsi comme une des pièces du système de
666 LE DÉVELOPPEMENT

sécurité en Asie, à la réalisation duquel John Forster


DuUes a attaché ses efforts depuis 1951.

646. — Les , assistances bilatérales d’autres États.


— D’autres États économiquement développés ont
également conclu des accords d’assistance technique avec
des pays sous-développés.
Dans certains cas ces accords ont pris en quelque sorte
la suite d’aides techniques antérieurement dispensées
dans le cadre des rapports de droit interne existant entre
une métropole et ses colonies. L’accession de celles-ci à
l’indépendance a entraîné des modifications dans la
forme juridique de l’assistance. La France a ainsi conclu
de multiples accords avec des États africains qui entre
1958 et i960 étaient devenus des États de la Communauté,
amsi qu’avec le Maroc et la Tunisie. En outre la France a
conclu des accords avec divers États du Moyen-Orient
comme le Liban ou l’Iran, ou de l’Amérique latine
comme le Pérou, le Brésil, le Mexique. Le Royaume-Uni
dispense dans des conditions assez analogues une assis¬
tance technique à d’anciennes colonies devenues indé¬
pendantes et à d’autres États. L’assistance technique
soviétique utilise également la formule des accords
bilatéraux. Elle présente certaines particidarités, se
combinant souvent avec une aide économique et finan¬
cière et s’apphquant principalement à certains États
comme la Birmanie, Ceylan, l’Indonésie, rÉg5q)te, la
Syrie, l’Afghanistan et tout particuhèrement l’Inde.
L’aide bilatérale soviétique a une importance particuhère
dans la mesure où les roubles étant difficilement conver¬
tibles, une très grande partie de l’aide multilatérale
accordée dans un cadre international se trouve en réahté
mise en œuvre grâce à des accords complémentaires de
caractère bilatéral permettant l’achat de matériel d’équi¬
pement et la formation de bomsiers en Union soviétique.
La République fédérale allemande a conclu aussi des
accords bilatéraux avec l’Inde, Ceylan, le Pakistan, la
Tunisie mais une particularité de l’aide aUemande consiste
dans le rôle important joué par les organismes privés pour
la réalisation de cette aide.
Divers accords d’assistance technique de caractère
bilatéral ont été également conclus par divers pays -
européens comme la Norvège, la Suède, la Suisse, les '
Pays-Bas, l’Itahe et la Belgique.
l’assistance technique 667

BIBLIOGRAPHIE

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Assistance multilatérale.
Voir les rapports annuels du Comité de Vassistance
technique des Nations unies; Sharp (W. R.), International
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développement, Pol. Étr., 1957, p. 281-286; L’aide bila¬
térale de la République populaire de Chine aux pays en voie
de développement, N. E. D., 3165; L’aide de la France
aux pays en voie de développement. Problèmes écono¬
miques, 1965, no 899 et 913.
CHAPITRE III

L’ASSISTANCE ÉCONOMIQUE

L’assistance technique a une importance certaine, la


mise à la disposition des pays sous-développés d’experts
et de techniciens, l’octroi de bourses permettant la forma¬
tion et le perfectionnement des cadres Içcaux dans les
Universités et les centres techniques des États industria-
üsés sont bénéfiques. Mais la formation d’un personnel
compétent et l'introduction de méthodes valables ne
peuvent avoir une efficacité réelle et complète que si les
pays sont dotés d’un équipement suffisant.
Ainsi se pose le problème complexe de l’assistance
financière et économique, c’est-à-(üre le problème des
investissements. Mais la notion d’investissement est en
elle-même fort complexe et doit être analysée à divers
points de vue.

647. — Les investissements du point de vue des pays


bénéficiaires. — Les investissements qui apparaissent
nécessaires dans les pays sous-développés peuvent être
classés en trois grandes catégories.
Les uns peuvent être appelés non lucratifs en ce sens
qu’on ne saurait déterminer leur rentabilité selon des i
mesures d’utüité économique. Ils sont relatifs à la connais¬
sance même des données économiques et sociales du pays,
(enquêtes, recherches scientifiques, établissement de
statistiques), à l’administration générale, à l’enseignement
et à la formation professionnelle, à la santé (hygiène,
hôpitaux, urbanisme).
Une seconde catégorie concerne les investissements dits ^
de base qui concernent les équipements fondamentaux : •
transports et communications, routes, voies ferrées, aéro-
l’assistance économique 669

dromes, énergie électrique — problèmes de l’hydrau¬


lique urbaine et rurale.
Une troisième catégorie enfin est celle des investisse¬
ments productifs qui s’appliquent aux diverses activités
économiques, qu’ü s’agisse du secteur primaire, des
industries du secteur secondaire et des activités du sec¬
teur tertiaire.
Selon qu’il s’agit d’une des catégories précitées les
modalités de financement ne peuvent être les mêmes.

648. — Les investissements privés. — Les investis¬


sements qui sont faits dans un pays sous-développé
peuvent être des investissements par fonds publics aun
État prêtant son assistance financière et économique ou
des investissements de capitaux privés.
L’investissement privé a été largement pratiqué autre¬
fois, au XIX® siècle ou dans la première moitié du xx®
dans le cadre de la pratique de placement de capitaux à
l’étranger, favorisé par la promesse d’un intérêt beaucoup
plus élevé qu’en Europe.
Mais l’investissement privé, dans la mesure où il
recherche et suppose la rentabihté économique directe,
ne peut être utilisé normalement pour la réahsation des
infrastructures de base et ü n’intervient utüement qu’à
un stade second ou dans des secteurs bien déterminés.
Les investissements privés se heurtent par ailleurs
actuellement, dans les pays sous-développés à des risques.
Il s’agit non seulement du risque économique lui-même
constitué par l’éventuahté d’une affaire se développant
mal, ü s’agit aussi et principalement du danger de
nationahsation, ou du risque de lourdes impositions.
Pour attirer les capitaux privés les États sous-développés
peuvent utüiser divers procédés, ils peuvent offrir des
garanties aux capitaux, que forrnulent généralement les
Codes de l’investissement. Les États dont les prêteurs
sont ressortissants peuvent également offrir à ceux-ci
des garanties.
Afin d’encourager l’investissement privé international
tout en maintenant un équihbre entre les intérêts des
investisseurs et ceux des États hôtes une Convention pour
le réglement des différends relatifs aux investissements a
été élaborée dans le cadre de la Banque internationale
pour la reconstruction et le développement. Cette conven¬
tion qui étabht des procédures d’arbitrage et de concilia-
670 LE DÉVELOPPEMENT

tion a été soumise à la signature des États au printemps


de 1965.
Au 31 mars 1967 la Convention avait été si^ée par
52 États et ratifiée par 30. Elle est entrée en vigueur le
14 octobre 1966 date à laquelle ont été obtenues les 20 rati¬
fications requises.
La Convention crée un Centre international pour le
règlement des différends relatifs aux investissements. Ce
Centre fournit aux États contractants et aux investis¬
seurs étrangers ressortissants d’autres États les moyens
de régler sur une base volontaire les litiges relatifs aux
investissements qui pourraient surgir entre eux.
Les modes de règlement sont la conciliation ou l’arbi¬
trage. Le Centre sans assumer lui-même les fonctions de
conciliateur ou d’arbitre tient à jour des listes de per¬
sonnes qualifiées. Le recours à la conciliation ou à l’arbi¬
trage, sous les auspices du Centre demeure volontaire,
aucun État n’étant tenu en raison de sa ratification de
soumettre un différend au Centre. Mais si l’État béné¬
ficiaire et l’investisseur étranger sont convenus de recou¬
rir au Centre, la procédure s’engage et les parties doivent
prendre en considération les recommandations du conci¬
liateur et se conformer à la sentence arbitrale. Cette
dernière est obligatoire pour tous les États parties à
la Convention et ceux-ci doivent exécuter les obligations
pécuniaires qu’impose la sentence.
On peut aussi imaginer de garantir les capitaux privés
investis en ayant recours à l’intervention d’un organi.sme
international intermédiaire entre les prêteurs et les béné¬
ficiaires.
Les investissements apparaissent ainsi comme multi¬
formes, et les organismes internationaux jouent un grand
rôle en ce domaine, les États apportant par ailleurs des
aides économiques et financières de caractère bilatéral.

§ I. — Investissements
et organismes internationaux.

L’intervention d’organismes internationaux en matière


d’investissements se manifeste soit sur le plan général,
soit dans un cadre continental ou régional.
l'assistance économique 671

I- Les organismes de caractère général.

Les orgasmes de caractère général peuvent être clas¬


sés en (üstinguant les Fonds spéciaux de l’O. N. U. et les
institutions spécialisées, qui sont au nombre de trois.

A. — L’O. N. U. ET LES Fonds spéciaux.

Les projets envisagés à partir de 1948, au Conseil éco¬


nomique et social et à l’Assemblée générale de l’O. N. U.,
de créer im fonds de développement économique per¬
mettant de financer des dépenses d’équipement
(S. U. N. F. E. D.) n’ont pas pu être réalisés et en 1957
on s’est orienté vers la formule différente du Fonds spé¬
cial qui est consacré à l’assistance technique (voir supra,
638), Toutefois en i960, la Résolution 1521-XV a
posé le principe de la création d’un Fonds d’équipement
{Capital development fund) et un comité a été constitué
afe d’étudier les problèmes qui se posent à cet égard.
L’Assemblée, aux sessions suivantes, a repris les formules
précédentes (Résolution 1706-XVI de 1961) et par des
résolutions successives (1710-XVI de 1961, 1826-XVII
de 1962) a marqué l’intérêt qu’elle portait à ces problèmes
avec l’institution de la Décennie des Nations unies pour le
développement.

649. — Le Fonds d’équipement des Nations Unies. —


En 1963 l’Assemblée a adopté la Résolution 1936 (XVIII)
sur la création d’un Fonds d’équipement. Mais le problème
pratique des ressources a soulevé de grandes difficultés.
La Conférence de Genève sur le développement s’est
préoccupée en 1964 des mesures pratiques qui permet¬
traient de transformer le Fonds spécial en Fonds d’équi¬
pement.
Par une Résolution 2186 (XXI) du 13 décembre 1966,
l’Assemblée a créé un Fonds d’équipement des Nations
Unies.
Il s’agit d’un organe de l’Assemblée générale fonction¬
nant comme une organisation autonome dans le cadre des
Nations Unies.
Son objectif est d’assister les pays en voie de dévelop¬
pement dans la croissance de leur économie et de com¬
pléter les ressources existantes en matière d’aide à
l’équipement au moyen de dons et de prêts, en parti¬
culier de prêts à long terme sans intérêt ou à faible
672 LE DÉVELOPPEMENT

intérêt. La nécessité du développement industriel comme


base du progrès économique et social est affirmée.
Les dépenses du Fonds sont réparties en deux caté¬
gories. Les dépenses d’administration sont imputées sur
le budget ordinaire de l’O. N. U., des crédits distincts étant
prévus à ce titre. Les dépenses de caractère opération¬
nel sont couvertes au moyen de contributions volon¬
taires. Les États participants annoncent le montant de
leurs contributions et autant que possible pour plusieurs
années. Le contrôle intergouvememental de la politique
et des opérations du Fonds est exercé par un Conseil
d’administration.
Ce conseil se compose des représentants de 24 États
membres de l’O. N. U. et des institutions spécialisées et
de l’Agence internationale de l’énergie atomique. Ces
États sont élus pour trois ans par l’Assemblée de manière
à assurer une représentation équitable des États écono-'
miquement développés compte tenu de leurs contribu¬
tions au Fonds et des États en voie de développement
compte tenu pour ceux-ci d’une répartition géographique
équitable.
Le Secrétaire général de l’O. N. U. nomme le Direc¬
teur Général pour quatre ans et la nomination doit être
confirmée par l’Assemblée.
Les opérations du Fonds doivent commencer en
janvier 1968.

B. — La b. I. R. D.

650. — La banque et sa structure. — La B. I. R. D.


a été créée en même temps que le Fonds monétaire inter¬
national par la Conférence de Bretton Woods qui, sur
l’invitation des États Unis, réunit au cours de l’été 1944,
quarante-quatre États. Elle constitue un intermédiaire
entre des détenteurs de capitaux dans divers pays et les
utilisateurs de capitaux dans d’autres pays. Il s’agit
d’une Banque qui peut accorder ou garantir des prêts
et se procure des fonds par le moyen d’emprunts, mais
c’est un organisme interétatique car les États fournissent
son capital social et contrôlent son administration par le
moyen de leurs représentants.
En juin 1966, la B. 1. R. D. comptait 105 membres
et le capital actions souscrit par les États s’élevait à
21 milliards de dollars.
La B. 1. R. D. est une organisation internationale, une
l’assistance économique 673

institution spécialisée rattachée à l’O. N. U. Sa structure


est de type bicaméral avec un Conseil des Gouverneurs
ou sont représentés tous les États membres et un Conseil
d administration composé actuellement de 20 membres,
5 d’entre eux représentant des États qui détiennent le
plus grand nombre de parts de capital : États-Unis,
Royaurne-Uni, France, Allemagne, Inde (au 30 juin 1966).
L organisation utihse le mécanisme de la pondération
des voix, chaque État a 250 voix en tant que membre
auxquelles s ajoutent des voix en proportion du capital
souscrit. Le Président de la Banque est choisi par les
administrateurs en dehors d’eux et des gouverneurs, il
préside le Conseil d’administration et est le chef du per¬
sonnel administratif.

651. — Les buts et les principes. — 1“ Les buts. —


La Banque, selon l’article i^r de ses Statuts, a pour objec¬
tifs d aider à la reconstruction et au développement, en
facihtant l’investissement de capitaux à des fins produc¬
tives. Mais 1 action ^essentielle a porté sur le développe¬
ment. La Banque s’efforce de promouvoir les investisse¬
ments privés à l’etranger au moyen de garanties ou de
participations à des prêts et autres investissements effec¬
tués par les fournisseurs de capitaux privés. A titre sub¬
sidiaire, et si elle ne peut se procurer des capitaux privés
à des taux raisonnables, elle peut suppléer à l’investis¬
sement privé en foimnissant, à des fins productives, des
moyens financiers tirés de son propre capital, des fonds
qu’elle s’est procurés et de ses autres ressources. La
Banque tend aussi à favoriser l’expansion, sur une longue
période, des échanges internationaux et l’équihbre des
balances des paiements, elle encourage les investissements
consacrés au développement des ressources productives
des États et contribue ainsi à relever la productivité, le
niveau d’existence et la situation des travailleurs.
La Banque fournit également une assistance technique
et envoie des missions d’experts dans les pays pour étabhr
des plans de développement ou accroître leur efihcacité,
elle forme aussi des experts spéciahstes.
2° Les principes. — Plusieurs principes régissent
1 activité de la Banque, l’octroi de prêts ou de garanties.
Ces principes se dégagent des stipulations de l’article 3,
section 4, et peuvent être systématisés ainsi. Les prêts
supposent un accord de l’État, soit que celui-ci soit
1 emprunteur, soit qu’il garantisse le prêt consenti à une
22. — rNSTnTTrioNS internationales.
674 LE DÉVELOPPEMENT

entreprise établie sur son territoire. Les prêts ne sont


accordés qü’à des États membres ou à des entreprises
établies sur leurs territoires.
Les prêts ne sont accordés qu’à titre subsidiaire, c’est-à-
dire à la condition que l’emprunteur ne puisse, de l’avis
de la Banque, se procurer autrement un prêt à des condi¬
tions raisonnables.
Les prêts sont individualisés en ce sens qu’ils sont
accordés pour le financement de projets précis de recons¬
truction ou de mise en valeur, la Banque veille à ce que
le prêt soit bien utilisé en vue des fins initialement fixées
sans laisser intervenir des considérations politiques ou
extra-économiques.
Dans ces diverses opérations l’Organisation doit agir
avec prudence et s’assurer de la solvabilité de l’emprun¬
teur lorsqu’il ne s’agit pas d’un État membre.

652. — L’activité de la Banque. — Au 30 juin 1966 la


Banque, après vingt années d’existence, avait consenti
des prêts pour un total de 9.583,6 millions de dollars. Les
prêts de reconstruction sont un peu inférieurs à 500 mil¬
lions (496,8) et ont concerné uniquement l’Europe.
Les prêts de développement cumulés se sont ainsi
élevés à près de 9.087 millions. Leur classement par objet
fait apparaître comme domaines essentiels d’utilisation,
en tête et pour des parts presque égales l’énergie élec¬
trique (3.260 millions de dollars), les transports (3.246),
ensuite l’industrie (1.480) puis l’agriculture (745). Les
régions bénéficiaires sont d’abord l’Asie et le Moyen-Orient
(3.175), l’hémisphère occidental (2.561,9), l’Europe (2.081),
l’Afrique (1.244,6), enfin l’Australasie (519,8).
La Banque a un capital de 21 milliards de dollars dont I
10 % sont payables en espèces. Les 90 % non appelés;
constituent un capital de garantie qui pourrait permettre i
de faire face aux obhgations découlant des emprunts. La ■
Banque a émis des emprunts sur les marchés financiers:
pour 2,7 milliards de dollars, principalement aux États--
Unis mais aussi en Suisse et dans la Répubhque fédérale:
allemande.
Pour l’emprunteur les prêts de la Banque comportent
les charges normales du remboursement à terme et du
service de l’intérêt. Les durées des prêts consentis sonti
évidemment variables. Les taux d’intérêt sont souvent:
fort lourds. Il est exceptionnel de trouver des prêts à.
3,5 % mais le plus grand nombre des prêts est à 5,75 %.
l’assistance économique 675

et souvent des prêts sont accordés à des taux plus élevés


de 6, voire 6,5 %.
La Banque internationale poursuit en effet des opé¬
rations rentables et réalise des bénéfices qu’elle peut uti¬
liser pour la poursuite d’autres opérations de prêt. EUe
repose par aüleurs sur le principe des investissements
pnvés. Ces principes de la Banque expliquent que les
États socialtôtes n'en fassent pas partie, Cuba s’en est
retiré.
Conçue à l’origine comme un organisme de prêt de
caractère classique et rentable, la Banque a transformé
son action.
Après avoir apporté une assistance de caractère finan¬
cier elle tend à ajouter à ceUe-ci une assistance technique.
Surtout elle a tout récemment admis des financements
dans le domaine de l’instruction publique en considérant
que ces dépenses étaient d’une rentabilité à long terme.
La Banque a complété son action par le moyen d’autres
organismes qui sont distincts d’elle mais lui sont étroite¬
ment reliés.

C. — La société financière internationale.

653. — Création et structure. — A la suite d’une réso¬


lution de l’Assemblée générale de l’O. N. U. du ii dé¬
cembre 1954, la Banque a établi un projet de Société
financière internationale qui a été effectivement consti¬
tuée le 24 juillet 1956, avec un capital prévu de 100 mil¬
lions de dollars.
La S. F. I. présente ime structure identique à celle de
la Banque sous la seule réserve qu’il existe un Directeur
général distinct du président du Conseil d’administration.
Normalement les mêmes personnes exercent des fonctions
dans les deux organismes, en tant que gouverneurs ou
administrateurs. Malgré cette S5rmbiose la société constitue
une entité distincte et ses ressources sont séparées de celles
de la Banque à laquelle elle ne peut ni prêter ni emprunter.
En juin ip66, la société comptait 82 membres et le capi¬
tal souscrit était de plus de 99 miUions de dollars.

654. — Principes directeurs. — Dans la société finan¬


cière internationale l’accent est mis sur le caractère privé
des opérations. La S. F. L, selon l’article i®’’ des statuts,
a pour objet de stimuler l’expansion économique en encou¬
rageant le développement d’entreprises privées de carac-
676 LE DÉVELOPPEMENT

tère productif dans les États membres, en particulier


dans les régions moins développées.
L’octroi de prêts se trouve donc dominé par la notion
de rentabilité financière, notion plus étroite que celle
d’utilité économique qui marque les opérations de la
Banque. Par ailleurs, alors que la Banque prête normale¬
ment à des États membres et secondairement à des entre¬
prises, avec la garantie des États, la Société financière
prête à des entreprises privées de caractère productif,
sans exclure automatiquement toutefois les entreprises
d’économie mixte.
Les statuts prévoyaient initialement que la Société
ne pouvait intervenir qu’en tant que prêteur d’argent et
ne pouvait participer au capital social par voie de sous¬
cription d’actions ordinaires, mais une modification inter¬
venue en 1962 a supprimé ces limitations.
Certains des principes valables pour la Banque sont
conservés par la Société, par exemple la Société ne finan¬
cera pas une entreprise si l’État sur le territoire duquel
elle est établie fait des objections, de même eUe n’inter¬
vient qu’à titre subsidiaire complétant l’intervention
d’investisseurs privés et seulement si elle estime que du
capital privé suffisant ne peut être obtenu à des conditions
raisonnables. La Société jouit d’une grande liberté tant
dans l’octroi des prêts que dans la fixation des conditions
de ceux-ci et tient compte des risques qu’elle peut encourir.
L’ensemble des opérations de la Société porte le mon¬
tant cumulé des engagements bruts à 172,4 millions de
dollars, au 30 juin 1966. Les engagements bruts pour
l’exercice se sont élevés à 35,6 millions de dollars. Le
revenu net des opérations pendant l’exercice a été de
4.364.489 dollars au lieu de simplement un peu plus de
3 millions pour l’exercice précédent, il y a eu une hausse :
des dividendes payés.
Des amendements aux Statuts intervenus en 1966 ont .
permis à la Banque d’accroître au moyen de prêts les ;
ressources de la S. F. I. Les amendements permettent à
la Banque de prêter à la S. F. 1. jusqu’à environ 400 mil¬
lions de dollars soit quatre fois le capital propre de la
S. F. I.
Les disponibilités financières de la S. F. 1. demeurent
réduites. Aussi une modification des statuts est-eUe
actuellement à l’étude qui permettrait à la Banque de
faire à la Société des prêts à long terme, cette dernière '
pouvant alors accroître son activité.
l’assistance économique 677

D.—L' ASSOCIATION internationale DE DÉVELOPPEMENT.

655. — Création et structure de FÂssociation. — La


B. î. R. D. fonctionne du point de vue financier comme
ime banque classique, elle ne prête que pour financer des
opérations rentables, les taux d’intérêt qu’elle pratique
sont ceux du marché, souvent donc trop élevés pour des
États sous-développés, les prêts qu’elle consent se font
en outre en monnaie forte que ces États peuvent difficile¬
ment se procurer pour un remboursement.
L’idée fut lancée par le sénateur des États-Unis Mon-
roney en février 1958 de la création d’un nouvel organisme
international qui pourrait octroyer des crédits à long
terme, à un taux d’intérêt très faible, avec des possibilités
de remboursement en monnaie locale, ce qui rendrait ces
prêts accessibles à des États ne pouvant utiliser la
B. L R. D. et pourrait concerner des investissements non
lucratifs ou de base sans rentabilité financière ou écono¬
mique directe.
Les statuts de la nouvelle organisation ont été élaborés
par les administrateurs de la Banque le 26 janvier i960.
Ils ont été soumis aux gouvernements des États membres
et l’Association internationale de développement est
entrée en activité en septembre i960.
La structure de l’A. L D. a été conçue de telle sorte
qu’elle puisse être administrée par la Banque. Elle com¬
porte un conseil des Gouverneurs, un Conseil d’admi¬
nistration et un président, les personnalités qui détiennent
ces fonctions dans la Banque les exercent également en
principe dans l’A. I. D.
Le montant envisagé du capital initial de l’A. L D. est
d’im milliard de dollars, les souscriptions envisagées
doivent être approximativement en proportion des sous¬
criptions au capital de la B. L R. D. Une disposition origi¬
nale des statuts divisent les pays membres en deux
groupes. Si tous les membres doivent verser 10 % de leur
souscription en or ou en monnaie librement convertible,
les dispositions concernant les 90 % restant sont diffé¬
rentes; les 17 États les plus industrialisés, définis dans une
annexe, doivent régler ce complément de souscription en
or ou en monnaie convertible, les autres États sont auto¬
risés à régler ce solde en monnaie nationale que l’A. I. D.
n’aura pas la faculté de convertir en une autre monnaie
ou d’utiliser sans le consentement de ces États, ainsi sera
facilitée la souscription.
678 LE DÉVELOPPEMENT

Au 30 juin 1966, TA. I. D. comptait 96 membres et les


souscriptions s’élevaient à un^î montant en dollars de
999 millions 145.000 dollars.
Bien que les modalités d’intervention de l’Association
soient très différentes de celles de la Banque, l’U. R. S. S. et
les États socialistes ne font pas partie de cette organisa¬
tion.

656. — Buts et principes. — L’Association a pour


objet d’encourager le développement économique, d’ac¬
croître la productivité et d’élever les niveaux d’existence
dans les régions les moins avancées du monde, qui sont
couvertes par une affiliation à l’Association. Le finance¬
ment par l’A. 1. D. est réservé aux opérations indispen¬
sables à la mise en valeur des régions intéressées, eu égard
à leurs besoins, et affecté à des projets déterminés.
L’A. I. D. est autorisée à financer tout projet susceptible
de contribuer efficacement au développement d’un État
ou d’une zone, que ce projet soit ou non rentable ou direc¬
tement productif. L’A. LD. ne fournit pas de crédits
dans les cas où des capitaux privés peuvent être obte¬
nus à des taux raisonnables ni dans les cas où le finance¬
ment pourrait être effectué par des prêts entrant dans la
catégorie de ceux qui sont consentis par la Banque.
Les opérations de financement sont effectuées sous forme
de prêts que l’A. 1. D. accorde avec une grande liberté
puisqu’elle peut les consentir sous la forme et aux condi¬
tions qu’eUe juge « appropriées ». L’Association peut
varier donc les conditions, accorder des facilités de rem¬
boursement en jouant sur la durée du prêt, sur la possi¬
bilité d’un remboursement en monnaie locale, en stipu¬
lant un intérêt très faible, voire en prêtant sans intérêt.
L’Association peut fournir des capitaux aussi bien à un
gouvernement, qu’à une entité publique ou privée, ou à
une organisation publique internationale. A la différence
de la Banque eUe n’est pas tenue d’obtenir la garantie
du gouvernement intéressé. La souplesse qui caractérise
ainsi l’intervention de l’A. I. D. est de nature à permettre
une aide plus efficace et moins étroitement dominée par
des considérations strictement financières que lorsqu’il
s’agit de la Banque ou a fortiori de la S. F. 1.
Au 30 juin 1966, l’A. I. D. avait accordé 89 prêts
totalisant 1.365 millions de dollars. Plus d’un milliard
(1.046 millions) bnt été accordés à l’Asie et l’Extrême-
Orient. L’Afrique a seulement 145 millions.
l'assistance économique 679

Les crédits portent sur des investissements de base,


ports, routes, travaux d’hydraulique et depuis quelques
années sur des projets concernant l’instruction publique.
Les prêts remboursables en 50 ans ont été octroyés sans
intérêt avec un amortissement qui ne commence qu’au
bout de dix ans, pour faire face aux dépenses administra¬
tives de l’Association il est simplement demandé une com¬
mission de 0,75 %. Les conditions sont donc infiniment
plus avantageuses que celles de la Banque et les prêts ont
porté sur des investissements autres que ceux à rentabi¬
lité économique directe.

II. — Les organismes régionaux.

Les organismes décrits ci-dessus ont une vocation mon¬


diale, les États participants sont fort nombreux et les
opérations auxquelles if est procédé s’effectuent dans les
diverses parties du monde; il existe d’autres organisations
qui groupent des États moins nombreux et dont le champ
d’activité est régionalement hmité.
De tels organismes sont prévus ou projetés dans le
cadre de la Ligue arabe ou de certains regroupements
africains, les plus importants ont été créés dans l’Europe
des Six et dans le cadre de l’Organisation des États améri¬
cains.

657. — La banque européenne d’investissement. —


Les articles 129 et 130 du traité de Rome du 25 mars 1957
créant la Communauté économique européenne ont prévu
l’institution d’une Banque européenne d’investissement
dont les statuts sont étabhs par un protocole annexe.
La Banque européenne a pour but de contribuer au
développement du marché commun, en faisant appel aux
marchés des capitaux et à ses ressources propres. Elle ne
poursuit pas de but lucratif et facihte le financement de
projets concernant la mise en valeur des régions moins
développées, de projets relatifs à la modernisation d’entre¬
prises ou la création d’activités nouvelles qui ne peuvent
être entièrement couverts par les moyens existant dans
chaque État membre ainsi que les projets d’intérêt com¬
mun pour plusieurs États.
La Banque européenne est une organisation internatio¬
nale propre à structure de type bicaméral avec un Conseil
de gouverneurs composé de ministres désignés par les
six Etats et un Conseü d’administration de 12 membres.
68o LE DÉVELOPPEMENT

3 d’entre eux désignés par chacun des plus grands États,


2 par le Bénélux et i par la Commission. Le capital
souscrit est d’un milliard d’unités de compte, la vdeur
de celle-ci étant fixée à 0,888 670 88 gramme d’or fin.
La Banque accorde des crédits tant aux États eux-
mêmes qu’à des entreprises privées ou publiques en vue
de faciliter des projets à réahser en principe sur les terri¬
toires européens des États.
Les opérations de la Banque sont faites avec des taux
d’intérêt qui sont ceux des conditions du marché des
capitaux. La Banque emprunte elle-même sur ce marché
des capitaux pour se procurer les ressources nécessaires
à son action.
La Banque européenne qui constitue une organisation
internationale propre se distingue ainsi des divers Fonds
qui existent dans le cadre du Marché commun tels le
Fonds de développement pour les pays et territoires
d’Outre-mer (art. 16 et annexe IV), le Fonds d’orientation
et de garantie agricoles, le Fonds social européen.

658. — La Banque interaméricaine de développement.


— La création d’une banque interaméricaine leur per¬
mettant de recevoir plus rapidement, en plus grande
quantité et sous des conditions différentes, une aide éco¬
nomique avait été demandée par les États de l’Amérique
latine depuis près d’un demi-siècle. Son institution est
devenue officielle le 8 avril 1959. Les statuts de la Banque
interaméricaine de développement, B. 1. D., sont très
voisins de ceux de la B. 1. R. D. La Banque fonctionne
dans le cadre de l’Organisation des États américains, elle
a un capital de 850 millions de dollars dont les États-Unis
doivent souscrire 500. EUe consent des prêts dans des
conditions normales et qui sont remboursables dans la
monnaie dans laquelle ils ont été accordés. On doit dis¬
tinguer la Banque du Fonds interaméricain de dévelop¬
pement social auquel les États-Unis se sont engagés à
fournir 50 millions de dollars et dont les opérations sont
pour une grande part d’ailleurs administrées par la B. 1. D.
elle-même.
Il existe également un organisme créé par le même acte
constitutif que celui de la Banque mais doté d’un patri¬
moine distinct : le Fonds des opérations spéciales. Il est
destiné à prolonger l’action de la Banque dans le domaine
d’activités où les conditions d’investissements sont moins
sûres.
l’assistance économique 68i

La B. I. D. entretient d’étroits rapports avec les orga¬


nismes financiers et techniques des Nations unies, elle
joue un certain rôle dans le cadre de la Charte de Punta
del Este (voir supra n” 428).
Le continent américain, dans le cadre de l’Amérique
centrale, connaît une autre Banque de développement ; la
B. C. A. 1. E., banque centre américaine-d’intégration
économique créée en i960.

659. — Les Banques africaine et asiatique. — L’idée


d’une Banque africaine de développement (B. A. D.) a
pris naissance en i960 à la conférence des peuples afri¬
cains de Tunis ; elle a été mise en œuvre sous l’impulsion
de la Commission économique pour l’Afrique des Nations
unies. L’accord de création a été signé en décembre 1963
et est entré en vigueur en septembre 1964. Financée par
des capitaux africains et dirigée par des africains, la
B. A. D. a pour objet d’étudier et financer des projets
concernant le développement économique et social, en
priorité de caractère régional.
Le capital autorisé est de 250 millionsfde dollars, le
capital souscrit de 200 et le capital actuellement versé de
32. Les plus gros actionnaires sont la R. A. U., l’Algérie,
le Nigéria, le Maroc.
La Banque asiatique de développement a été créée sous
l’égide de la Commission économique des Nations unies
pour l’Asie et l’Extrême-Orient par une charte signée à
Manille le 4 décembre 1965. Elle a commencé ses opéra-
tions|en décembre 1966. Le capital autorisé est de i^mil-
hard*^de dollars. Le siège est a Manille. Il y a 18 États
membres originaires faisant partie de la région de la
C. E. A. E. O. et 12 membres originaires n’appartenant
pas à cette région, qui sont des Etats européens sauf le
Canada et les États-Unis.

§ 2. — Les aides économiques


et financières bilatérales.

Malgré l’existence de divers organismes internationaux


par lesquels est distribuée une aide multilatérale, l’aide
bilatérale représente plus des 3/4 de l’aide totale accordée
aux pays sous-développés.
Les aides bilatérales sont très diverses, elles sont plus
ou moins liées à l’assistance technique dont elles se dis¬
tinguent en principe.
682 LE DÉVELOPPEMENT

L’extrême variété des aides bilatérales ne permet pas


une systématisation, on peut donner simplement quelques
indications d’ensemble.

660. — Les distinctions théoriques. — L’aide écono¬


mique et financière peut revêtir des formes très diverses.
Une première distinction oppose l’aide à fonds perdus,
quelquefois qualifiée de dons, à l’aide qui revêt la forme
de prêts. Le don est souvent utilisé pour de petits inves¬
tissements et pour des fins de caractère non économique
mais social, construction et équipement d’un hôpital, d’une
Université. Le prêt est la forme la plus courante. Il peut
revêtir des modalités bien diverses. Il tend à se rapprocher
du don si la durée d’amortissement est très grande, si
l’intérêt stipulé est très faible. Il apparaît comme favo¬
rable si le remboursement du prêt effectué en monnaie
forte peut être réahsé en monnaie locale. Il peut à l’inverse
prenà-e l’allure d’une opération commerci^e intéressante
pour l’État prêteur dans le cas des prêts liés lorsque l’octroi
d’un prêt s’accompagne de l’obhgation d’utihser le prêt
pour procéder à des achats de biens dans le pays prêteur.
L’aide bilatérale se présente tantôt sous la forme d’une
aide publique, tantôt sous la forme d’une aide privée
soutenue par le pays sur le territoire duquel sont étabhes
les entreprises qui vont consentir des prêts ou hvrer des
biens, c’est le mécanisme complexe des crédits à l’expor¬
tation qui sont fiés à une politique commerciale.
Les aides sont généralement en argent mais elles peuvent
aussi apparaître, dans certains cas, sous forme d’aide en
nature, on a songé à utiüser dans ce cadre des surplus
agricoles, formule qui, en dehors de cas exceptionnels,
n’est d’ailleurs pas sans danger.

661. — Les politiques d’aide bilatérale. — Les aides


bilatérales sont non seulement variées en leurs modalités
théoriques mais encore dans la pratique eUe-même. Les
aides des pays occidentaux sont différentes des aides de
ru. R. S. S. L’aide bilatérale des États-Unis est consi¬
dérable par l’importance des sommes, elle a été accordée à
un grand nombre d’États ce qui signifie une certaine
dispersion, elle a été parfois combinée avec une aide
mihtaire ce qui signifiait certaines conditions de carac¬
tère pohtique. L’aide bilatérale britannique et l’aide
bilatérale française se rapprochent dans la mesure où elles
ont souvent joué au profit d’États qui étaient d’anciennes
l’assistance économique 683

colonies mais elles se différencient dans la mesure où l’aide


britannique comporte certains aspects privés et s’accom¬
pagne de formules d’économie libérale tandis que l’aide
française importante en valeur absolue se place dans une
conception planificatrice. L’aide de la République fédérée
allemande est presqu’entièrement dominée par les prin¬
cipes de libér^sme économique, elle réserve une très
large place aux capitaux privés et comporte des rembour¬
sements en monnaie convertible.
Les aides des États occidentaux présentent ainsi, selon
les pays, des caractéristiques propres. L’ensemble de ces
aides est considérable. En 1964 le total des contributions
bilatérales (secteur public) s’est élevé, pour les États-Unis
à 3.308 milliards de dollars (3.644 en 1963), pour la
France à 822 (814 en 1963), pour le Royaume-Uni à 446
(370 en 1963), pour la République fédérale allemande à
450 (396 en 1963).
Parmi les États membres de l’O. C. D. E., le groupe
des États qui constituent actuellement le Comité d’aide
au développement (voir supra n® 444) fournit aux pays
sous-développés une aide économique fort importante qui
a atteint, en 1963, 5.662 millions de dollars (contributions
bilatérales provenant du secteur public) auxquels
s’ajoutent 2.438 millions de contributions provenant de
sources privées.
Le premier programme d’aide soviétique date de 1954
et les premiers versements de 1956. D’autres États ont,
depuis, établi des programmes d’aide : Bulgarie, Hongrie,
Pologne, Roumanie, République démocratique allemande
et Chine.
A la fin de 1963 le total cumulatif des engagements
s’élevait à 5,4 milliards de dollars, les versements effec¬
tivement opérés se montaient à près de 1,9 milliard de
dollars. L’aide soviétique a été presque la seule dans les
premières années, elle était encore de 85 % en 1959 mais
a tendance à baisser actuellement en pourcentage. La
part de la Chine dans l’ensemble des aides sociahstes
est de l’ordre de 10 %.
L’aide soviétique est concentrée sur certains pays, une
vingtaine, situés dans diverses régions du monde, mais
principalement en Asie et dans le Moyen-Orient, elle a
été étendue à Cuba à partir de 1961.
Pour l’ensemble des aides socialistes plus de la moitié
du total cumulatif des engagements concerne quatre
États : Inde, R. A. U., Afghanistan, Brésil. Depuis 1963
684 LE DÉVELOPPEMENT

l’Algérie bénéficie d'une priorité. Les aides socialistes sont


gén&aJement destinées à des projets spécifiques, ainsi le
barrage d’Assouan en R. A. U., des centrales hydro¬
électriques en Afghanistan, un complexe métallturgique
en Inde.
Les dons représentent une faible part, de l’ordre de
6 % du montant total des engagements des États socia-
hstes.
Les prêts soviétiques sont caractérisés par im faible
taux d’intérêt de 2,50 %. Le remboursement est fréquem¬
ment de l’ordre de 12 ans mais certains prêts sont beau¬
coup plus longs, jusqu’à 50 ans. Les autres États socia-
hstes d’Europe consentent des prêts de taux plus élevé
et avec des délais de remboursement moindres. Les prêts
des États sociahstes, dans leur ensemble, sont fiés à des
achats dans les pays prêteurs. Le remboursement est
assez fréquenunent effectué en nature, l’État prêteur
achetant à l’emprunteur des produits locaux. Le problème
du prix des produits se pose, la référence normale aux
prix mondiaux constitue le principe.

§ 3- — Aspects généraux de l’ensemble des aides.

Pour se représenter les aspects généraux des aides,


il convient de donner quelques indications de caractère
numérique et statistique en distinguant l’apport total et
l’effort d’aide par pays.

662. — Les composantes de l’apport totîü. — Pour


l’ensemble des pays bénéficiaires, comme pour chaque
État fournisseur, la distinction entre aides bilatérales et
aides multilatérales a un certain intérêt, mais finalement,
du point de vue des contributions pour les uns, des recettes
pour les autres, une addition est à faire. Il en va de même
de la distinction entre aides pubhques et aides privées
puisque les deux catégories existent dans le cadre des
États non socialistes.

663. — L’effort d’aide et la théorie du 1%. — Si


la connaissance, par grandes masses, de l’ensemble des
ressources apportées aux pays en voie de développement
est intéressante, il convient de ne pas se borner aux don¬
nées globales et de rapporter pour chaque pays le total
de son apport d’aides à ses propres possibilités écono¬
miques et financières.
l’assistance économique 685

Pendant longtemps la mesme de l’importance relative


de l’aide s’est faite en la conmarant au produit national
brut, mais la Conférence de Genève sur le commerce et
le développement de 1964 a retenu la notion de revenu
national, retranchant du produit brut les sommes néces¬
saires à l’amortissement et certains impôts indirects.
Adoptant une proposition du représentant de la France,
le professeur André Philip, la Conférence de 1964 a
approuvé ime recommandation (annexe A, IV, 2, Crois¬
sance et aide) selon laquelle « chaque pays économique¬
ment avancé s’efîorce de fournir des ressources finan¬
cières aux pays en voie de développement d’un montant
net minimal aussi proche que possible de i % de son
revenu national, en tenant compte toutefois de la posi¬
tion spéciale de certains pays qui sont importateurs nets
de capitaux. Cet effort n’est censé représenter ni un
maximum, ni une méthode permettant de comparer
comme il convient l’importance quantitative ou qualita¬
tive de l’assistance au développement fournie par dif¬
férents pays économiquement avancés ».
Le Conseü de l’U. N. C. T. A. D. dans une résolution 30
(IV) du 17 septembre 1966 a réaffirmé la nécessité d’un
effort d’aide tendant à atteindre et dépasser le taux de
I %•
Le tableau suivant fait apparaître pour quelques pays
du Comité d’aide au développement de l’O. C. D. E. les
pourcentages des contributions par rapport au revenu
national. La moyenne générale est de l’ordre de i %.
La contribution de la France est de l’ordre du double :
1,88 en 1965, 1,94 % en 1964 et en 1963, elle était de
2,31 % en 1962. On remarque que le pourcentage a
tendance à décroître, en raison de l’accroissement du
revenu national dans les pays développés.
LES APPORTS DE MOYENS FINANCIERS EN POURCENTAGE DU REVENU NATIONAL, 1962-1965 686
LE DÉVELOPPEMENT
l’assistance ÉCONOMIQUE 687

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688 LE DÉVELOPPEMENT

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690 LE DÉVELOPPEMENT

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Sur les problèmes de l’assistance technique multi¬
latérale et bilatérale, voir avis et rapports du Conseil
économique et social de la République française, session de
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ment; session de 1962, n® 4, méthodes de l’assistance bila¬
térale étrangère.
Sur l’assistance bilatérale, voir :
Julienne (R.), La coopération entre la République
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le financement du barrage d’Assouan, Revue française de
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socialistes et les pays sous-développés d’Asie et d’Orient,
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et l’aide économique au tiers monde. Tiers-monde,
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n® 20, p. 113-117: XXX, L’aide soviétique aux pays en
voie de développement, N. E. D., n® 2797 (17 juillet 1961)
et n® 2760 (13 mars 1961), L’aide soviétique aux pays
sous-développés.
On trouvera un bon exposé des problèmes de la coopé¬
ration dans F. Luchaire, Droit d’Outre-mer et de la
coopération, Paris P. U. F., 1966, p. 463-578.
Pour la coopération française consulter les rapports
l’assistance économique 691

d’activité (1964-1966) présentés par la Direction de la


coopération culturelle et technique (Secrétariat d’Etat
aux affaires étrangères chargé de la coopération).
On consultera avec grand profit les publications de
rO. C. D. E., notamment le volume annuel intitulé Efforts
et politiques d’aide au développement (voir notamment les
examens 1964, 1965, 1966) ainsi que le volurne récapitu¬
latif : Les moyens ffnanciers mis à la disposition des pays
moins développés 1956-1963, Paris O. C. D. E. 1964.
Voir également Ohlin (G.), Réévaluation des politiques
d’aide à l’étranger, Centre de développement de l’O. C. D. E.,
Paris, 1966.
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TITRE III

COOPÉRATIONS TECHNIQUES
ET GESTIONS COMMUNES

C’est une banalité de constater que le monde actuel du


XX® siècle est dominé par l’existence d’une civilisation
de haut niveau technique, dans les pays les plus dévelop¬
pés au moins.
Les relations entre les États, les coopérations pacifiques
entre États, sous forme bilatérale ou dans le cadre des
organisations internationales, le développement et l’ac¬
tivité de ces organisations, les relations entre elles-mêmes,
ont subi très nettement l’influence de ce progrès scienti¬
fique et technique.
Le jeu des facteurs scientifiques n’est sans doute pas
une nouveauté en soi et Louis Renault, à la fin du
XIX® siècle, l’avait déjà noté à propos de ce qu’on appelle
aujourd’htd les télécommunications. Ce n’est pas par
hcisard que la plus ancienne des organisations interna¬
tionales au sens moderne de l’expression est l’Union
télégraphique internationale étabhe en 1865, ancêtre de
l’actuelle Union internationale des télécommunications
(voir supra, n° 542). Les découvertes scientifiques ont
« rapetissé » le monde, elles ont accru l’interdépendance
des États et des hommes. Elles agissent ainsi d’une
manière favorable pour le développement des institutions
internationales, tant du moins que leur utihsation
demeure pacifique et qu’elles ne mettent pas entre les
mains des dirigeants politiques d’effroyables moyens de
destruction.
694 COOPÉRATIONS TECHNIQUES

Diverses organisations internationales de caractère


scientifique ont été analysées dans la seconde partie de
cet ouvrage mais il convient de réserver une place à part
à certaines d’entre elles qui sont relatives à des coopéra¬
tions d’une importance fondamentale jouant dans les
deux domaines caractéristiques du progrès scientifique
du XX® siècle, l’énergie atomique et les recherches spa¬
tiales, elles seront présentées dans un premier chapitre.
Le second chapitre traitera de coopérations interna¬
tionales qui sont caractérisées par le caractère particuher
de l’activité assumée, qui est une activité de gestion. La
dominante ici encore est de caractère technique en enten¬
dant cet adjectif dans un sens qui est normalement
d’ailleurs l’un des siens, celui d’une intervention directe
en vue de réahsations concrètes. La gestion commime
qu’assurent certains organismes internationaux sera pré¬
sentée dans le chapitre second de ce titre.
CHAPITRE PREMIER

ORGANISATIONS INTERNATIONALES
ET TECHNIQUES PROPRES
AU XXe SIÈCLE

Le progrès technique, qui s’affirme avec continuité


depuis le milieu du xix® siècle et dont les premières mani¬
festations sont apparues au début du siècle dernier, a
marqué d’extraordinaires progrès au milieu du xx® siècle
et des organisations internationales sont ainsi apparues
dans les deux domaines véritablement nouveaux, celui
de l’énergie atomique, celui des recherches spatiales.

Section L — La coopération « atomique ».

Dans le domaine atomique les coopérations peuvent


apparaître de diverses manières. Elles varient non seule¬
ment d’un point de vue territorial, selon que les États
participants sont plus ou moins nombreux, mais aussi du
point de vue de la portée même de la coopération ins¬
tituée qui peut tantôt consister en la création et l’utili¬
sation d’un laboratoire international, tantôt en celle d’un
organisme chargé d’apporter une assistance technique
nucléaire ou plus simplement d’assurer l’approvisionne¬
ment en substances nucléaires et fonctionnant comme
une sorte de coopérative. Comme les buts poursuivis par
ces organisations peuvent quelquefois être multiples, il
est préférable de les classer en distinguant selon les esari
territoriales.
696 COOPÉRATIONS TECHNIQUES

§ I. — Los organisations « régionales ».

Les organisations assurant la coopération atomique,


sous des formes diverses, et qui ne regroupent qu’un
nombre relativement limité d’États sont des organisa¬
tions principalement européennes, il existe aussi une
organisation regroupant les États socialistes, du point
de vue de l’activité ce sont des laboratoires internationaux.

A. — L’Organisation européenne
POUR LA RECHERCHE NUCLÉAIRE.

664. — Historique. — L’idée de la création d’un


laboratoire scientifique nucléaire européen a été émise en
décembre 1949 dans le cadre d’une conférence européenne
de la culture, de caractère privé, organisée par des mou¬
vements fédéralistes européens. Il apparut que l’Europe
pourrait retrouver en matière de physique nucléaire la
place éminente qui avait été la sienne avant 1940 si une
coopération s’instaurait entre les divers États, et il était
ainsi proposé de mettre à l’étude la création d’un Institut
de science nucléaire orientée vers les applications à la vie
courante.
Cette suggestion fut reprise au cours de la Conférence
générale de l’U. N. E. S. C. O. siégeant à Florence en
1950 et un bureau d’études fut créé. Le 15 février 1952
était signé à Genève un accord portant création d’un
Conseil de représentants d’États européens pour l'étude
des plans d’un laboratoire international. Il comprenait
10 États : Belgique, Danemark, France, Italie, Norvège,
Pays-Bas, République fédérale d’Allemagne, Suède,
Suisse et Yougoslavie. La convention entra en vigueur le
2 niai 1952 et les groupes d’études mirent au point un
projet concret d’organisation internationale. Elle fut
créée par une convention si^ée à Paris le ler juillet 1953
par 12 États, soit les 10 signataires de l’accord du 15
février 1952, la Grèce et le Royaume-Uni, et instituant
une Organisation européenne pour la recherche nucléaire.

665. — Le but de l’Organisation. — Trois principes


dominent l’Organisation : le principe que les recherches
sont de caractère purement scientifique, le principe que
toute activité militaire est bannie, enfin, comme il convient
ORGANISATIONS INTERNATIONALES 697

à un organisme scientifique, le principe que les résultats


des travaux entrepris sont publiés ou au moins commu¬
niqués.
Le programme de base comporte trois éléments. Le
premier objectif est la construction d’un laboratoire
intemation^ installé près de Genève et doté de deux
très puissants accélérateurs de protons. Le fonctionne¬
ment du laboratoire international constitue le second
but poursuivi. Le troisième s’analyse d’une manière plus
générale en l’organisation et l’encouragement de la
coopération internationale dans la recherche nucléaire, y
compris la collaboration en dehors du laboratoire.

666. — Structure. — L’Organisation comprend un


Conseil et un directeur assisté d’un personnel. Le Conseil
est composé de deux délégués par État membre, il arrête
son propre règlement intérieur, éht son président et ses
deux vice-présidents, pour une durée d’un an, et ils ne
peuvent être réélus plus de deux fois consécutivement.
Le Conseil déhbère à la majorité simple, sauf disposition
contraire de la convention. Par exemple l’admission
dans l’Organisation d’autres États que les signataires
originaux est décidée à l’unanimité des membres du
Conseil, cette disposition confère à l’Organisation le
caractère d’une Union fermée.
Le directeur est nommé par le Conseil à la majorité
des deux tiers et pour une période déterminée. Il peut
être licencié de la même manière. Le personnel est
engagé par le Conseil sur recommandation du directeur.
Le directeur et les membres du personnel réguher sont
des fonctionnaires internationaux mais des chercheurs
peuvent être invités à effectuer des travaux dans le labo¬
ratoire, ils ne font pas partie du personnel tout en étant
placés sous l’autorité du directeur.
Le Conseil se réunit au moins une fois par an. Il dirige
l’Organisation en déterminant la ligne de conduite à
tenir en matière scientifique, technique et administra¬
tive, il approuve le programme d’activité, vote le budget,
contrôle les dépenses. Les contributions financières des
États, au delà d’une période provisoire se terminant le
31 décembre 1956, sont étabhes conformément à un
barème établi par le Conseil statuant à la majorité des
deux tiers, en principe, sur la base de la moyenne du
revenu national net, au coût des facteurs, de chaque
État membre.
6g8 COOPÉRATIONS TECHNIQUES

B. — L’Institut unifié de recherches nucléaires.

667. — Création. — Un Institut unifié des recherches


nucléaires a été créé par un accord international signé à
Moscou le 26 mars 1956 entre les représentants de onze
démocraties populaires ; Albanie, Allemagne démocra¬
tique, Bulgarie, Chine, Corée du Nord, Hongrie, Mon¬
golie extérieure, Pologne, Roumanie, Tchécoslovaquie,
U. R. S. S. Il s'agit donc d’une organisation internationale
qui est particulière au monde socialiste et qui territoriale¬
ment s’étend de l’Europe orientale à l’Asie. L’article 3
du Traité prévoit toutefois la possibilité pour d’autres
États de participer aux travaux de l’Institut s’ils
acceptent le texte constitutif et sont admis par la majo¬
rité des États membres.
L’Institut est présidé par un directeur assisté de deux
adjoints, ces personnages sont désignés par l’accord des
États membres. Le directeur préside le Conseil scienti¬
fique constitué par trois savants désignés par chaque
État. Un comité des finances composé d'un représentant
par État approuve le budget et contrôle l’activité finan¬
cière. Ce Comité des finances constitue l’organe adminis¬
tratif de l’Institut.
La prépondérance de l’U. R. S .S. dans l’organisation
internationale découle de l’avance scientifique de ce pays
dans le domaine atomique et aussi d’une part contributive
considérable dans le financement des dépenses d’équipe¬
ment et de fonctionnement. La part de l’U. R. S. S. est
en effet fixée par l’article 6 à 47,25 %, celle de la Chine
à 20 %. Toutefois l’article 6 stipule que la proportion de
la participation financière de chaque État ne saurait
influer sur le degré de participation à l’activité scienti¬
fique ou à l’administration de l’Institut. Le siège de l’or¬
ganisation est en U. R. S. S., dans la région de Kalinine.

668. — Activités. — Le préambule de l’accord souligne


l’importance de l’utilisation pacifique de l’énergie ato¬
mique, la nécessité de la coopération des savants de divers
pays aux études théoriques et expérimentales dans le
domaine de la physique nucléaire et l’article donne
pour but à l’Institut la réalisation d’une telle coopération.
L’article 4 précise d’un point de vue scientifique les
installations et laboratoires dont doit être doté l’Institut,
il comporte transfert à l’organisation internationale par
l’Union soviétique d’un laboratoire des problèmes
ORGANISATIONS INTERNATIONALES 699

nucléaires, avec un puissant synchrocyclotron ainsi que


d’un laboratoire d’électro-physique. En dehors de ces
transferts des laboratoires soviétiques existants il est
pré\'Ti la construction de divers laboratoires et d’accélé¬
rateurs de particules.

C. — L’Agence européenne pour l’énergie nucléaire.

669. — Origines. — Les études entreprises dans le


cadre de l’O. E. C. E. au cours des années 1953, 1954 ont
fait apparaître que la situation énergétique de l’Europe
occidentale était déficitaire et devait le devenir davan¬
tage au cours de la période à venir. Pour tenter d’enrayer
ce déficit, les experts ont estimé qu’il convenait de dévelop¬
per la production de l’énergie nucléaire et que les efforts
à cette fin, rendus possibles par le potentiel industriel et
financier de l’Europe, seraient plus efficaces si étaient
réahsées une coordination des efforts nationaux et une
coopération entre les pays européens.
Le Conseil de l’O. E. C. E. a été ainsi amené à décider le
18 juillet 1956 d’une action commune des pays membres
dans le domaine de l’énergie nucléaire et a établi un
Comité de direction, composé des fonctionnaires respon¬
sables des programmes de développement de l’énergie
nucléaire dans les pays de l’O. E. C. E., chargé de définir
l’action commune et de présenter des propositions sur la
création d’une Agence européenne pour l’énergie nucléaire.
Prenant en considération un rapport préparé par le
comité de direction, le Conseil a adopté le 17 décembre
1957 les statuts de l’Agence européenne pour l’énergie
nucléaire avec entrée en vigueur le février 1958. Ses
membres étaient ceux de l’O. E. C. E. (voir supra, n® 439).

670. — Structure. — L’Agence, généralement désignée


par ses initiales de langue anglaise sous le nom de
E. N .E. A., ne dispose pas de la personnahté juridique,
sans avoir non plus la personnahté financière elle a un
budget distinct de celui de l’O. E. C. E. Après la trans¬
formation de rO. E. C. E. en O. C. D. E., l’Agence a été
maintenue dans le cadre de la nouvelle organisation.
Elle est soumise à l’autorité du Conseil de l’Organisa¬
tion mais dans son fonctionnement propre on constate
un assouplissement des règles régissant l’Organisation.
L’Agence apparaît comme un organe subsidiaire qui a
été créé par le Conseil. Elle comporte trois séries de
700 COOPÉRATIONS TECHNIQUES

rouages. L’organe directeur est le comité de direction


qui a été créé avant l’Agence et qui groupe les fonction¬
naires responsables des programmes de développement
atomique dans les divers États membres. Un représen¬
tant de l’Euratom participe aux réunions du Comité
ainsi que des représentants des États-Unis, du Canada
et de l’Espagne qui apparaissent comme associés. Le
Comité est assisté de commissions techniques à compé¬
tence générale ou spéciale qui mettent en œuvre la solida¬
rité atomique dans des domaines divers. Un secrétariat
permanent prépare les travaux du Comité et des commis¬
sions, il assure l’exécution de leurs délibérations.

671. — Objets et fonctions. — Sous l'objet général


du développement de la coopération atomique, les fonc¬
tions de l’Agence sont multiples et diverses. On peut dis¬
tinguer pour plus de clarté quatre fonctions différentes.
La première peut être définie comme l’harmonisation
des programmes nationaux qui conduit à des échanges
d’informations et parfois à des spécialisations nationales.
La seconde favorise le développement de l’industrie
nucléaire dans les États membres en tendant à la libéra¬
lisation des échanges internationaux de biens d’équipe¬
ment et de matières intéressant les industries atomiques,
l’Agence a organisé des cours spécialisés de caractère
universitaire ou plus proprement technique.
L’Agence en troisième lieu facilite la création d’entre¬
prises communes ou de réalisations expérimentales ou
industrielles en lesquelles se manifeste une coopération
internationale, construction et exploitation de réacteurs
etc. On se trouve donc ici en présence d’une activité
de gestion, (voir infra, n® 688). L’Agence enfin joue im rôle
important du point de vue juridique en élaborant des
règles de droit et en contrôlant les activités, l’action com¬
mune entreprise devant être pacifique.

672. — Règles juridiques et contrôle de sécurité. —


L’Agence s’est efforcée d’assurer une harmonisation des
règles juridiques touchant la santé des travailleurs de
l’industrie nucléaire et du public ainsi que des mécanismes
de contrôle de la radioactivité.
L’unification des règles juridiques peut être obtenue
d’une manière satisfaisante par la conclusion de conven¬
tions internationales. L’Agence a poursuivi et atteint de
tels buts avec la signature de conventions en matière de
ORGANISATIONS INTERNATIONALES 7OI

responsabilité civile nucléaire : ainsi la convention du


29 juillet i960 concernant les réacteurs terrestres, qui
consacre les principes habituels de la responsabilité ato¬
mique, responsabilité objective, responsabilité « canalisée »
et enfin limitation de la responsabilité à un certain pla¬
fond.
L'Agence intervient enfin dans le cadre de l’exécution
du contrôle de sécurité. La convention du 20 décembre
1957 instituant le contrôle de sécurité est antérieure à
l'entrée en vigueur des textes constitutifs de l’Agence,
mais eUe est chargée de son exécution et les inspecteurs
internationaux dépendent de l'Agence. Il s'agit de veiller
à ce que soit respecté le caractère purement pacifique de
l’action commune entreprise. Ce contrôle concerne nor¬
malement et tout d’abord les entreprises communes
(voir infra, n® 688) mais les États membres peuvent
admettre son extension à leur industrie nucléaire natio¬
nale ou à certains de ses secteurs. La convention a institué
un Tribunal particulier connaissant des réclamations qui
concernent le contrôle de sécurité.

D. — Euratom.

La Communauté européenne de l’énergie atomique ou


C. E E, A., souvent appelée Euratom, a été créée par le
traité de Rome de 1957 en même temps que la Communauté
économique européenne et fait partie des Communautés
européennes. Les institutions de l'Euratom ont été étu¬
diées ci-dessus (voir supra, n® 491) mais il convient de
préciser le rôle propre de la Communauté ^en ce qui con¬
cerne la coopération atomique entre les six États membres.

673. — Missions de TEuratom. — L’Euratom, aux


termes de l’article du traité constitutif, a pour mission
de contribuer à l’élévation du niveau de vie dans les
États membres et au développement des échanges avec
les autres pays, ce but devant être poursuivi par l’établis¬
sement des conditions nécessaires à la formation et à la
croissance rapide des industries nucléaires.
L’article 2 précise cette mission plus directe de l’Eura¬
tom qui apparaît ainsi sur de nombreux plans. Le progrès
dans le domaine de l’énergie atomique est le résultat
auquel tend l’Euratom, les moyens qui y conduisent sont
multiples et on peut distinguer plusieurs domaines diffé¬
rents.
702 COOPÉRATIONS TECHNIQUES

Un premier domaine est de caractère scientifique et


technique. L’Euratom développe la recherche et assure la
diffusion des connaissances techniques. Il institue avec les
autres pays et avec les organisations internationales
toutes liaisons susceptibles de promouvoir le progrès
dans l’utüisation pacifique de l’énergie nucléadre. Sur le
plan économique l’Euratom facihte les investissements et
encourage les initiatives des entreprises afin d’assurer la
réalisation des installations fondamentales nécessaires au
développement de l’énergie nucléaire dans la Commu¬
nauté. L’un des buts principaux de l'Organisation est de
réahser un marché commun atomique, à cet effet l’Euratom
a pour mission d’assurer de larges débouchés et l’accès aux
meilleurs moyens techniques par la création d’un marché
commun des matériels et équipements spécialisés, par la
fibre circulation des capitaux pour les investissements
nucléaires et par la liberté d’emploi des spécialistes à
l’intérieur de la communauté. L'Organisation doit aussi
jouer un rôle de contrôle et de régulation. EUe établit
des normes de sécurité uniformes pour la protection sani¬
taire de la popidation et des travailleurs et veiUe à leur
application. L’Euratom veille au respect du caractère paci¬
fique de l’utüisation des matières nucléaires, des contrôles
appropriés doivent garantir que ces dernières ne sont pas
détournées à d’autres fins que celles auxquelles elles sont
destinées. La Communauté doit veüler à assurer l’appro¬
visionnement en minerais et combustibles nucléaires et
exercer un droit de propriété sur les matières fissiles
spéciales. Des règles et des institutions particulières sont
prévues à cet égard.

674. — L’approvisionnement et l’Agence. — L’appro¬


visionnement en minerais, matières brutes et matières
fissiles spéciales repose sur deux principes, celui de l’égal
accès aux ressources, celui de la poursuite d’une politique
commune. Pour assurer le respect de ces principes il existe
deux séries de dispositions. La première interdit toutes
pratiques ayant pour objet d’assurer à certedns utilisa¬
teurs une position privilégiée. La seconde constitue pour
mettre en œuvre ces principes une Agence disposant d’un
droit d’option sur les minerais, matières brutes et matières
fissiles spéciales, produits sur le territoire des États
membres ainsi que du droit exclusif de conclure des
contrats portant sur ces diverses matières, en pro¬
venance de l’intérieur ou de l’extérieur de la Communauté.
ORGANISATIONS INTERNATIONALES 703

L'Agence, qui apparaît comme l’instrument de la poli¬


tique d'approvisionnement de la Communauté, est un
organisme spécial, doté de la personnalité juridique et de
l’autonomie financière. EUe fonctionne sous le contrôle
de la Commission et suivant des règles commerciales. EUe
est prévue par le Traité mais ses statuts ont été préparés
par la Commission et adoptés par le Conseü en 1958.
L'Agence joue le rôle d’un intermédiaire entre les pro¬
ducteurs et les utilisateurs. Mais le droit d’option dont
eUe est investie n’a pas la même portée selon les matières.
L’article 197 du traité distingue en effet d’une part les
matières fissiles spéciales, d’autre part les matières brutes
et les minerais. Pour les matières fissües spéciales, c’est-à-
dire le plutonium 239, l’uranium 233, l’uranium enrichi
en uranium 235 ou 233, ainsi que tout produit contenant
im ou plusieurs des isotopes ci-dessus et toute autre
matière définie par le Conseil statuant à la majorité
qualifiée sur proposition de la Commission, le droit
d’option ne porte que sur le droit d’utilisation et de
consommation et non pas sur la propriété elle-même.
En effet, pour ces matières existe un droit de propriété
de la Communauté elle-même. C’est un droit de propriété
très particulier qui découle de la notion de contrôle et
qui est dépouillé de tout contenu économique. La propriété
communautaire des matières fissiles spéciales signifie
que la Communauté doit veiUer à ce que ces matières soient
utilisées conformément aux règles communautaires, assu¬
rer le contrôle correspondant et prononcer éventuellement
les sanctions nécessaires, elle est, comme on l’a dit, dépatri-
monialisée (Doyen Vedel). Ce résultat est obtenu par l’exis¬
tence d’une comptabilité particulière tenue par l’Agence au
nom de la Communauté sous la forme d’un compte financier.
L’Agence a donc une structure et un rôle particuliers,
elle doit être considérée du point de vue juridique comme
un organe spécial de l’Euratom distinct d’aüleurs des
entreprises communes et qui se rapproche de la catégorie
des organes de gestion ou organes opérationnels des orga¬
nisations internationales.

§ 2. — L’Agence inteniationale
de l’énergie atomique.

675. — Historique. — L’Agence internationale de


l’énergie atomique a pour origine le discours prononcé le
8 décembre 1953 devant l’Assemblée générale des Nations
704 COOPÉRATIONS TECHNIQUES

unies par le président Eisenhower et connu généralement


sous le nom « des atomes pour la paix ». Le Président, après
avoir évoqué les risques mortels pour l’humanité d’une
guerre thermo-nucléaire, indiquait : « Il ne suffit pas d’enle¬
ver cette arme des mains des soldats, il faut aussi la placer
entre les mains d’hommes qui sauront la dépouiller de
son enveloppe mihtaire pour l’adapter aux arts de la
paix. » Il suggérait que les gouvernements intéressés
pourraient apporter une partie de leurs stocks d’uranium
et de matières fissiles à une agence internationale de l’éner¬
gie atomique qui devrait être créée sous les auspices des
Nations unies.
Cette proposition a rencontré un accueil très favorable et
une résolution de la XI® assemblée en 1954 en a approuvé
les grandes lignes, a adopté le principe de la création de
l’Agence et décidé la réunion d’une conférence interna¬
tionale sur rutilisation de l’énergie atomique à des fins
pacifiques qui s’est ouverte à Genève en août 1955. Le
statut de l’Agence a été établi le 23 octobre 1956 à la suite
des travaux d’une conférence internationale ouverte à
New York le 20 septembre et groupant les représentants
de 81 États. L’Agence a été constituée juridiquement le
29 juillet 1957 lorsque les ratifications nécessaires ont été
déposées à Washington, l’U. R. S. S. a été parmi les
grandes puissances atomiques la première à ratifier le
statut. La première session de la Conférence générale s’est
tenue à Vienne, siège de la nouvelle organisation du i®^ au
23 octobre 1957.
L’Agence, bien que n’étant pas exactement une institu¬
tion spécialisée, est placée sous l’égide des Nations unies
et les rapports entre les deux organisations sont définis
par un accord approuvé par l’Assemblée générale de
l’O. N. U. le 14 novembre 1957.
L’Agence présente chaque année un rapport au Conseil
économique et social et à l’Assemblée générale. Elle peut
être tenue de présenter un rapport au Conseil de sécurité en
cas de violation des règles de l’emploi des matières fissiles.
L’A. I. E. A. comptait, en mars 1967, 99 États membres.
676. — Structure. — L’Agence comporte la structure
habituelle des organismes internationaux et adopte le
type « bicaméral ». L’assemblée générale, dénommée
Conférence générale se réunit en principe chaque année.
Elle examine le programme et les activités de l’Agence,
ORGANISATIONS INTERNATIONALES 705

adopte le budget, décide des admissions de nouveaux


membres, élit certains membres du Conseil des gouver¬
neurs.
Le Conseil des gouverneurs est l’organe d’exécution
de l’Agence, il est composé de 25 États membres. La dési¬
gnation de ceux-ci s’opère d’une manière compliquée
(art. 6). On distingue deux groupes l’un de treize membres,
l’autre de douze. Les treize membres du premier groupe
sont désignés par le Conseil sortant parmi les États qui
ont une certaine importance du point de vue atomique.
Cette notion d’importance revêt d’ailleurs diverses formes.
Une place particulière est faite tout d’abord aux pays les
plus avancés du point de vue de la teclmologie atomique
et les cinq États les plus importants sur le plan mondial
doivent être désignés (en pratique : les États-Unis d’Amé¬
rique, le Royaume-Uni, la France, le Canada, l’Union
Soviétique). Le Conseil élit ensuite le membre le plus
avancé du même point de vue dans chacune des régions
suivantes qui ne sont pas représentées par les premiers
cinq membres choisis : Amérique du Nord, Amérique
latine, Europe occidentale, Europe orientale, Afrique et
Moyen-Orient, Asie du Sud-Est, Asie du Sud-Est et
Pacifique, Extrême-Orient ; en pratique cinq membres
sont élus en fonction de cette technicité relative
(puisque régionale), ce sont : le Brésil ou l’Argentine,
l’Afrique du Sud, l’Inde, l’Austrahe et le Japon. Le
Conseil désigne ensuite deux membres choisis parmi les
États producteurs de matières brutes qui sont émunérés
d’ailleurs par l’article 6, § 2 : Belgique, Pologne, Portugal,
Tchécoslovaquie, la Belgique ayant été désignée en consi¬
dération du Congo belge; en pratique un Etat d’Europe
orientale et un État d’Europe occidentale sont élus dans
cette catégorie. Un dernier membre complète cette repré¬
sentation des pays importants, en tant que fournisseur
d’assistance technique, jusqu’à présent cet État fut
désigné parmi les États Scandinaves. Au premier groupe
de ces treize États à « vocation atomique » particulière
s’ajoutent, pour compléter le Conseil douze membres qui
sont désignés par la Conférence générale d’une manière
qui permet d’arriver à la représentation de toutes les
principales régions du monde, la Conférence votant par
région.

677. — Financement. — L’art. 14 des statuts fixe les


règles relatives au financement de l’Agence.
23. — INSTITUTIONS INTERNATIONALES.
706 COOPÉRATIONS TECHNIQUES

Le budget ordinaire comprend les dépenses d’adminis¬


tration. Il est réparti entre les membres suivant un
barème fixé par la Conférence générale et inspiré de celui
des Nations unies. Il s’est élevé en 1967 à plus de 9 mil¬
lions de dollars des E. U.
Le budget opérationnel comprend les dépenses relatives
aux produits, aux opérations, au matériel acquis par
l’Agence dans l’exercice de ses attributions ainsi que le
coût des produits, services, équipements et installations
fournis par eUe au titre d’accords passés avec des États
membres.
Ce budget est alimenté par des contributions volon¬
taires des États membres. Les États-Unis contribuent
pour un tiers environ.

678. — Buts et activités. — Selon l’article 2 de son


statut l’Agence s’efforce de hâter et d’accroître la contri¬
bution de l’énergie atomique à la paix, la santé et la
prospérité dans le monde entier. Elle s’assure, dans la
mesure de ses moyens, que l’aide fournie, par eUe-même
ou à sa demande, ou sous sa direction ou sous son contrôle
n’est pas utilisée de manière à servir à des fins militaires.
En vue de réaliser ces objectifs l’Agence est autorisée ài
assumer diverses fonctions.
EUe favorise tout d’abord l’échange de renseignements ;
scientifiques et techniques, développe les échanges et:
les moyens de formation de savants et de spécialistes;
dans le domaine de l’utihsation de l’énergie atomique ài
des fins pacifiques. L’Agence en second heu tend à dévelop- ■
per l’utiüsation de l’énergie atomique, à cette fin ehe agit t
comme intermédiaire pour obtenir que certains de ses;
membres fournissent à d’autres des services, des produits,,
de l’équipement ou des installations. EUe joue un rôle;
d'incitateur afin que l’énergie atomique soit utihsée par :
les États les moins développés, notamment en ce quii
concerne la production d’énergie électrique.
L’Agence dispose d’un pouvoir de réglementation tou- -
chant à la protection sanitaire de manière à réduire les
dangers auxquels peuvent être exposés les personnes
et les biens, eUe a été saisie par exemple du problème de
l’évacuation des déchets radio-actifs.
Enfin l’Agence doit veiUer à l’apphcation du principe '
fondamental qui la domine, celui de Vutilisation pacifique •:
de l’énergie atomique. Elle institue et appUque des mesuresf
visant à garantir que les produits fissiles spéciaux ett
ORGANISATIONS INTERNATIONALES 707

autres produits, les services, l’équipement, les installa¬


tions et renseignements qui sont fournis par elle ou par
son intermédiaire ne puissent être utilisés de manière à
servir à des fins militaires.

Section II. — La coopération spatiale.

La coopération internationale fort développée dans le


domaine de l’énergie atomique apparaît également dans
tm domaine scientifique et technique particulièrement im¬
portant à l’époque actuelle, celui des recherches spatiales.
Évidemment les grands succès remportés dans la « con¬
quête de l’espace » demeurent le fait des États à très
haute technique, l’U.R.S.S. et les États Unis dont la
compétition se marque depuis le lancement par l’U.R.S.S.
le 4 octobre 1957 du premier sateUite suivi de multiples
lancements par les États-Unis ainsi que l’envoi d’hommes
dans l'espace pour des vols orbitaux ou des « vols » cos¬
miques.
La coopération spatiale apparaît d’une part au niveau
mondial, d’autre part à l’écheUe de l’Europe, enfin dans le
cadre géographiquement mondial mais techniquement
particuher des télécommunications,

I. — La coopération mondiale.

Elle se situe sur deux plans tout à fait différents, l’un


intergouvememental, l’autre de caractère purement
scientifique.

679. — La coopération intergouvemementale. —


Dans le cadre de l’O. N. U., en 1958, un an après le lance¬
ment du premier satellite a été constitué un Comité des uti¬
lisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique. Une
résolution de l’Assemblée générale de décembre 1959 (1472-
XIV) en avait fixé la composition et avait indiqué sa mis¬
sion. Ce comité ne put toutefois fonctionner utilement
tout de suite. Une seconde résolution du 20 décembre 1961
(1721-XIV) a élargi le Comité porté à vingt-huit membres
et lui a donné une impulsion nouvelle. Le Comité a cons¬
titué au cours de l’année 1962 deux sous-comités, l’un
scientifique et technique, l’autre juridique. Le premier
permettra l’échange d’informations et éventuellement
l’exécution de programmes en commun dans les domaines
7o8 COOPÉRATIONS TECHNIQUES

de la recherche spatiale, de l’exploration et de l’utüisa-


tion des espaces extra atmosphériques, I.e comité juri¬
dique préparera les projets de réglementation internatio¬
nale concernant ces espaces et les corps célestes.

680. — La coopération purement scientifique. —


Un autre aspect, tout différent de la coopération spa¬
tiale à l’échelle mondiale, apparaît dans le cadre du Comité
de la recherche spatiale ou C. O. S. P. A. R. (Comittee on
space research). Il s’agit ici d’un organisme non gouver¬
nemental constitué lui-même dans le cadre d’une organi¬
sation non gouvernementale, le Conseil international
des Unions scientifiques. Désigné généralement par ses
sigles de langue anglaise, I. C. S. U., International coimcil
of scientific unions, celui-ci a pour but de coordonner
l’action des unions scientifiques internationales dans le
domaine des sciences exactes et naturelles et de dévelop¬
per la recherche scientifique dans les divers pays par
l’intermédiaire des organisations nationales adhérentes, il
groupe actuellement dix unions scientifiques internatio¬
nales et des représentants d’organismes scientifiques,
notamment les académies des sciences des nations inté¬
ressées. Créé en 1958, le C. O. S. P. A. R. a établi une
charte qui a été approuvée par l’I. C. S. U. en novembre
1959. L’activité de l’organisme se définit très simplement
comme une coopération mondiale, dans le domaine spatial,
sur le plan des recherches fondamentales, il s’agit donc
du progrès des recherches scientifiques de toutes sortes
utilisant des fusées et des satellites et aussi les ballons
de haute altitude. Le C. O. S .P. A. R. est administré par
un Conseil exécutif avec un bureau de sept membres
dont le président est élu et les deux vice-présidents dési¬
gnés par les académies des sciences des deux États qui
ont seuls jusqu’à maintenant lancé des satellites artifi¬
ciels. L’assemblée générale est un organisme plus nom¬
breux qui comprend, outre les membres du Conseil, les
dix-huit représentants des organismes scientifiques
nationaux participant actuellement aux activités du
C. O. S. P. A. R.

II. — La coopération européenne.

La coopération intergouvemementale en matière spa¬


tiale s’est manifestée sur un plan européen avec la création
de deux organisations internationales partieuhères. Elles
ORGANISATIONS INTERNATIONALES 709

se distinguent du C. O. S. P. A. R. non seulement par le


caractère intergouvememental mais aussi par le domaine
de l’activité, qui déborde les recherches fondamentales
pour déboucher sur le plan de la science appliquée. Ces
organisations ont pour but d’obtenir par la coopération
internationale des réalisations qui jusqu’à maintenant ont
résulté des efforts financiers, scientifiques et techniques
des deux plus grands États, l’U. R. S. S. et les États-Unis.

681. — Le lancement d’engins. — On désigne géné¬


ralement sous le nom d’E. L. D. O. (European launching
development organization) une organisation européenne
pour la mise au point et la constmction de lanceurs
d’engins spatiaux. La convention portant création d’un
Conseil à cet effet (C. E. C. L. E. S.) a été signée à Londres
le 29 mars 1962 par 7 États, 6 européens (Répubhque fédé¬
rale, Belgique, France, Italie, Pays-Bas, Royaume-Uni) et
l’Australie.
Un protocole signé à Londres le 9 mai 1962 étabhssait
un groupe préparatoire en vue de la création effective
de l’Organisation. Les institutions furent définitivement
mises en place le mai 1964. La coopération concerne
la mise au point et la construction de lanceurs d’engins
spatiaux et de leurs équipements. Le programme initial
comporte la construction d’un lanceur à trois étages, à
une fusée britannique (Blue Streak) doit s’ajouter une
fusée française (Corahe) et au-dessus une fusée de la
Répubhque fédérale. Les satelhtes expérimentaux doivent
être construits sous la direction de l’Itahe, le système de
télémesures est confié aux Pays-Bas, le radio-guidage
assuré par la Belgique. L’Austrahe fournit le champ de
tir de Woomera.
Au cours du printemps 1966 de graves difficultés ont
surgi à l’E. L. D. O., tenant aux charges financières jugées
trop lourdes par le Gouvernement britannique. Un
compromis a finalement été adopté ramenant la part du
Royaume-Uni de 39 à 27 %. Deux programmes de
construction sont retenus et la France a fait admettre la
Guyane comme champ de tir (juillet 1966).

682. — Les recherches spatiales. — Une seconde orga¬


nisation européenne est dite Organisation européenne
de recherches spatiales, ou avec les initiales de langue
anglaise E. S. R. O. {European spatial research organi¬
zation). Les divers textes constitutifs de l’organisation et
710 COOPÉRATIONS TECHNIQUES

établissant tant le premier programme de ses travaux


que les prévisions budgétaires correspondantes ont été
soumis le 14 juin 1962 à la signature des États dont les
représentants étudiaient ces problèmes depuis deux ans.
L'Organisation qui succédera à la Commission préparatoire
européenne de recherches spatiales, C. O. P .E. R. S. dont
l’origine avait été une initiative de caractère purement
scientifique présente quelque analogie avec le Centre
européen de recherches nucléaires. Le but poursuivi ne se
confond aucunement avec celui de l’E. L. D. O. car il
ne s’agit pas ici de construire les en^ns spatiaux eux-
mêmes, mais les véhicules porteurs d’instruments scien¬
tifiques et leurs déhcats appareillages.
La convention constitutive signée à Paris le 14 juin 1962
est entrée en vigueur le 20 mars 1964. L’Organisation
groupe dix États (République fédérale, Belgique, France,
Italie, Pays-Bas, Royaume-Uni, Suède, Suisse, Danemark,
Espagne) et un observateur (Autriche).
Le siège, comme l’E. L. D. O. est à Paris avec un
centre de technologie et un laboratoire de recherches à
Delft, un centre d’analyses à Darmstadt, un Institut de
recherches en Italie et un champ de tir à Kiruna (Suède).
L’Organisation a pour but d’assurer, à des fins exclusi¬
vement pacifiques, la collaboration entre États européens
dans le domaine de la recherche et de la technologie spa¬
tiales.
Le budget s’élève à i milliard 500 milhons de francs.

III. — La coopération et les satellites


de télécommunications.

683. — Les accords de Washington. — Le développe¬


ment des télécommunications est xm fait dominant de
l’histoire moderne du monde. De nouveaux besoins sont
apparus ces dernières années, avec la télévision par
exemple. Des satellites de télécommunications permettent
déjà d’assurer la transmission télévisée des informations,
par exemple le sateUite nord américain S5mcom depuis
octobre 1964.
Le 19 juillet 1964 deux accords étaient paraphés à
Washington permettant la mise en place d’un système
mondial de télécommunications par satellites.
Le prenuer est un accord établissant un régime provi¬
soire appücable à un système commercial mondial de
télécommunications par satellites. Le second, sous le
ORGANISATIONS INTERNATIONALES 7II

nom d’accord spécial, précise l’application pratique sous


la responsabilité des organismes de télécommunications.
Ouverts ultérieurement à la signature le 20 août 1964,
les accords tendent à mettre à la disposition de toutes les
nations, sans discrimination, des moyens de télécommuni¬
cations par satellites sur une base mondiale, conformé¬
ment aux principes posés par la Résolution 1721-XVI de
l’Assemblée générale de l’O. N. U. le 20 décembre 1961.

684. — La portée de la coopération. — Les accords


prévoient le lancement d’un satellite stationnaire en 1965
et efiectivement le satellite synchrone dit Early bird
transmet des images et des télécommunications depuis
le 9 mai 1965.
Toutefois il existe un véritable monopole au profit
d’une société capitaliste nord américaine, la Comsat,
régie par les dispositions de la loi interne américaine
connue sous le nom de « Communication satellite act de
1962 » qui apparaît comme la gérante du système mondial
de télécommunications par satellites.
Pour contrôler ses activités les accords créent un Comité
composé des représentants des États parties aux accords.
Les décisions du Comité sont prises d’une manière majo¬
ritaire, selon des dispositions complexes qui tiennent
compte de l’importance des participations des États au
financement du système. La quote-part des États-Unis
est de 61 %, celle du Royaume-Uni de 8,4, celles de la
France et de la République fédérale allemande de 6,1.
En fait aucune décision importante ne peut être prise
sans l’accord des États-Unis, à l’inverse aucune décision
ne peut être prise sans l’accord d’au moins un pays
européen.
Les accords sont conclus pour une durée limitée au
janvier 1970. D’ici là il est envisagé de prévoir et pro¬
poser un contrôle plus poussé de l’organisme de gestion
et aussi une internationalisation de celui-ci.
Mais l’avance technologique des États-Unis est considé¬
rable et il n’est pas sûr que l’on puisse en 1970 éviter
encore le monopole de la Comsat pour la maintenance et
la gestion du système mondial. On notera toutefois que
les stations terriennes ne sont pas régies par les accords
et que les prix pratiqués par la Comsat sont actuellement
tellement élevés que l’utihsation des possibihtés tech¬
niques du satelhte demeure partielle.
712 COOPÉRATIONS TECHNIQUES

BIBLIOGRAPHIE

Organisations internationales et techniques propres au


XX^ siècle.
La coopération atomique.
Généralités : Bourquin (M.), Pouvoir scientifique et
droit international, R. C. A. D. I., 1947, vol. 70; Rous¬
seau (Ch.), Progrès technique et droit international, Cours
de l’Institut des Hautes Études Internationales de Paris,
1956-1957; Chartier (R.), Questions juridiques soule¬
vées par l’évolution de la science atomique, R. C. A. D. I.,
1957, vol. 91., Aspects du droit de l’énergie atomique,
C. N. R. S., 1965.
Fischer (G.), La coopération internationale en matière
d’utilisation pacifique d’énergie atomique, A. F. D. I.,
1955, p. 228-258; Hirsch (E.), L’énergie nucléaire et
l’Europe, Revue écon., i960, p. 866 et s.
Euratom.
Fischer (G.), Euratom, A. F. D. I., 1956, p. 695-710;
Rieber (H.), Die Europdische Atomgemeinschaft, Baden-
Francfort, 1957; Vedel (G.), La propriété des matières
fissiles spéciales, A. F. D. I., 1957, p. 586-596; Armand,
Euratom et problèmes énergétiques de l’Europe, Annuaire
Européen, 1958, p. 21-35; Errera et autres, Euratom,
analyses et commentaires du Traité de Bruxelles, 1958; Fis¬
cher (G.), L’accord de coopération entre les États-Unis et
l’Euraton, A. F. D. I., 1958, p. 540-555; Nelson (G. R.),
European organization in the field of atomic energy,
Annuaire Européen, 1958; Vedel (G.), l’Euratom,
Revue écon., 1958, p. 402 et s. ; XXX, De quelques aspects
des institutions de l’Euratom, A. F. D. I., 1958, p. 535-
539; Dollfuss (D.) et Rivoire (J.), A propos de l’Eura¬
tom, Paris, 1959; Chatenet (P.), Aspects nucléaires de la
politique européenne, Chr. Pol. Étr., mars 1964, p. 135-154;
Issac-Georges (J.), Le développement de l’énergie nucléaire
dans la communauté européenne en IÇ63, N. E. D., no 3055,
1964; Hebert (J.), La situation du droit nucléaire européen
au début de igôfi. Rev. trim. dr. eur., 1965, p. 41-47.
ORGANISATIONS INTERNATIONALES 713

L’agence européenne pour l’énergie nucléaire.


Huet (P.), Le programme d’action commune des pays
de l’O. E. C. E. dans le domaine de l’énergie nucléaire,
Pol. Étr., 1956, p. 595-702; Huet (P.), L’action de
l’O. E. C. E. dans le domaine de l’énergie nucléaire,
A. F. D. I., 1956, p. 688-695; Huet (P.), L’agence euro¬
péenne pour l’énergie nucléaire et la société Eurochimic,
A. F. D. I., 1958, p. 512-535; XXX, Agence européenne
pour l’énergie nucléaire et Société Eurochimic, publication
de rO. E. C. E., Paris, 1958; Vignes (D. H.), Le système
de contrôle de sécurité de l’Agence européenne pour l’énergie
nucléaire, A. F. D. I., 1961, p. 555-568; Strohl (P.),
Problèmes juridiques soulevés par la constitution et le
fonctionnement de la société Eurochimic, A. F. D. I., 1961,
p. 569-591.

L’Agence internationale de l’énergie atomique.


Voir les publications de l’Agence. Voir aussi :
Fischer (G.), L’Agence internationale de l’énergie
atomique, A. F. D. I., 1956, p. 616-634; Saumon (S.),
L’Agence internationale de l’énergie atomique, thèse Paris,
1966.
Coopération spatiale.
Mankiewicz (R. H.), De l’ordre juridique dans l’espace
extra-atmosphérique, A. F. D. I., i959> P- 103-160; Auger,
Pépin, Feron, Coopération internationale et recherches
spatiales. Monde diplomatique, n» 85, 1961; Blagonra-
vov (A.), De la coopération internationale pour l’utilisation
pacifique de l’espace. Monde diplomatique, n“ loi, 1962;
Korovine (E.), La collaboration scientifique dans le
cosmos. Vie intern., mars 1962, p. 65-68; XXX, La
recherche spatiale, nouvelle forme de coopération interna¬
tionale, Monde diplomatique, juillet 1962, p. 9-11 ; XXX,
Les Nations unies et les recherches spatiales. Monde diplo¬
matique, septembre 1962; Toth (J.), Les activités de
l’O. N. U. concernant le droit de l’espace, Journal du droit
international, 1964, p. 58 et s.; Jenks _(W.), Le droit de
l’espace commence à se concrétiser, Annuaire suisse de droit
international, vol. XX, p. 11-19.

On consultera utilement les rapports du Comité des


utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique de
ro. N. U.
714 COOPÉRATIONS TECHNIQUES

Sur les organisations européennes voir ;


Enti spaziali internazionali : statuts et documents
annexes avec une introduction de Monaco (R.), Padoue,
1962. Dreyfus (B.), L’organisation européenne de
recherches psatiales. Annuaire Européen, 1962, p. 151-
176; Barry (N.), La coopération européenne en matière
spatiale, thèse, Paris, 1964; Demarliac (Y.), Réalisa¬
tions et perspectives spatiales européennes, Revue maritime,
1964, n® 216, p. 1467-1485.

Voir N, E. D. n® 3 162 Accords internationaux pour


les télécommunications par satellites avec un article de
Guepin (C.).
CHAPITRE II

LES ORGANISMES INTERNATIONAUX


DE GESTION

Les organisations internationales ont généralement


pour but principal de fournir un cadre et un ensemble
de réglementations qui permettent le développement
d’activités nationales et privées et le favorisent. Mais on
peut constater depuis quelques années une évolution. Elle
apparaît dans deux directions. D’une part, comme les
États, sur le plan interne, dépassent souvent le rôle tradi¬
tionnel de réglementation pour apparaître comme parti¬
cipant à des activités de gestion, il est naturel que plusieurs
États s’associant dans le cadre d’une organisation inter¬
nationale dépassent là aussi les activités traditionnelles
et exercent en commun des activités de gestion.
D’autre part, on sait que les organisations internatio¬
nales modernes ne se bornent pas non plus, de leur
côté, à élaborer des recommandations ou à prendre des
décisions de caractère administratif, elles interviennent
directement et ont une activité opérationnelle qu’eUes
exercent directement ou par l’intermédiaire des organismes
opératiormels (operaüonal agencies).
Ainsi pour des raisons qui tiennent tant au rôle actuel
des États qu’au rôle également actuel des organisations,
apparaît-il comme naturel que des coopérations se réa¬
lisent entre États dans le cadre d’organisations interna¬
tionales qui aboutissent à des gestions communes.
L’aspect opérationnel de la coopération technique inter¬
nationale ne constitue pas d’ailleurs une nouveauté abso¬
lue. Divers organismes internationaux créés au xix® siècle
ont exercé une activité que l’on qualifierait volontiers
7i6 COOPÉRATIONS TECHNIQUES

aujourd’hui d’opérationnelle. On peut évoquer par


exemple les Commissions fluviales. Déjà le Règlement du
Rhin de 1815 chargeait la Commission centrale de s’occu¬
per « de tout ce qui pourra tendre au bien général de la
navigation et du commerce », ce qui dépassait l’étabhs-
sement d’un règlement ou le contrôle de celui-ci. Mais
l’exemple le plus net d’un organisme international doté
d’une compétence d’exécution directe s’étendant bien
largement au delà de la possibihté de délibérer et de
réglementer apparaît avec la Commission européenne du
Danube telle qu’elle est instituée par le Traité de Paris
du 30 mars 1856, complété par des textes subséquents.
La Commission a géré des services de navigation, de pilo¬
tage et de remorquage, dans les ports fluviaux, et sur le
fleuve lui-même, elle a décidé des travaux nécessaires et
en a assuré elle-même l’exécution par ses propres agents
et moyens.

§ I. — La diversité des « gestions ».

685. — La diversification des activités. — Une activité


de gestion apparaît tout d’abord d’une manière négative,
elle se définit en effet par opposition tant à une activité de
réglementation ou d’élaboration de la règle de droit qu’à
une activité de surveillance ou de contrôle. L’organisme
de gestion, ou comme l’on dit quelquefois, l’organisme
opérationnel est un organisme qui agit sur un plan matériel
et d’une manière concrète. Il s’agit donc d’un phénomène
de mise en œuvre de moyens. L’aboutissement de l’acti¬
vité de gestion est la réahsation d’une œuvre matérielle.
Mais il est évident que cette œu%T:e matérielle peut
revêtir les aspects les plus divers. L’octroi d’un crédit
par un organisme international à un État sous développé
dans le cadre de l’assistance technique est une activité
de gestion tout comme la formation de spéciahstes d’une
question dans un centre d’enseignement instauré par ledit
organisme.
Un classement des activités de gestion fait apparaître
la pluralité des gestions et la hste n’en sera d’ailleurs
jamais complète.
Les organismes de gestion peuvent ainsi avoir des acti¬
vités de caractère économique, octroi de crédits, octroi
de prêts, dons d’équipements particuüers, etc. Il peut
exister des activités de gestion qui sont de caractère
ORGANISMES INTERNATIONAUX 717

militaire ou para-militaire, la forces d’urgence des


Nations unies, la force des Nations unies au Congo ont
un caractère opérationnel.
Il est des activités opérationnelles de caractère tech¬
nique, l’E. L. D. O. doit aboutir à la construction de
lanceurs de satellites, le C. E. R. N. ou l’Institut unifié de
recherches nucléaires sont de véritables laboratoires inter¬
nationaux dont l’activité opérationnelle est de caractère
scientifique.
Mais l’analyse des « gestions » entendues en tant qu’acti-
vités diverses, si eUe fait apparaître une grande diversité,
demeure très superficielle car elle ne permet pas de distin¬
guer entre eux les divers organismes de gestion qui peuvent
appartenir à des catégories fort différentes. Il faut donc
compléter cette analyse purement externe, de caractère
descriptif, par une analyse interne portant sur les divers
organismes de gestion.

686. — La diversification des organismes. — Si


l’existence des multiples « gestions » internationales est
aujourd’hui une réahté d’évidence, on doit constater que
les organismes de gestion sont également très divers. On
ne peut dégager la nature véritable des organismes de
gestions internationales qu’en les situant par rapport
aux organisations internationales elles-mêmes.
A cet égard trois situations se présentent.
1° Dans certains cas l’organisme de gestion coïncide
avec une organisation internationale particuhère. La
coïncidence est absolue si l’organisation considérée n’a
aucune autre activité que celle de la gestion proprement
dite, ce qui est en général assez rare. Mais la coïncidence
relative se rencontre plus fréquemment, l’organisation
intergouvemementale exerçant diverses fonctions et
particulièrement une fonction importante de gestion. Les
exemples en ce cas sont assez nombreux. Les organisations
internationales pouvant être définies comme des orga¬
nismes de gestion revêtant cette forme apparaissent dans
le domaine économique ou financier. La Banque inter¬
nationale pour la reconstruction ou le développement,
la Société financière internationale, l’Association inter¬
nationale de développement exercent des fonctions de
gestion et le Fonds monétaire international peut appa¬
raître comme ayant un rôle analogue dans un domaine
différent.
yiS COOPÉRATIONS TECHNIQUES

2° Dans d'autres cas l’Organisation internationale a


des fonctions et des activités multiples, notamment des
fonctions réglementaires et normatives. EUe exerce égale¬
ment des activités de gestion mais les confie à des orga¬
nismes particuliers.
Ne s’identifiant pas avec l’organisation internationale
tout entière, l’organisme de gestion, investi d’une activité
opérationnelle peut prendre figure d’organisme spécial
ou spécialisé ou figure d’organisme subsidiaire, mais le
phénomène dont il s’agit est, dans tous les cas, un phé¬
nomène de division du travail ou si l’on préfère de diversi¬
fication des fonctions.
Dans le cadre général de l’Organisation des Nations
unies, les institutions spéciahsées apparaissent comme
des institutions nées de la notion de division du travail,
elles ne sont pas pour autant nécessairement des organes
de gestion car elles ont elles-mêmes des compétences
généralement complexes. On peut opposer parmi les orga¬
nismes de gestion les organes spéciaux et les organes subsi¬
diaires selon un critère fort simple. L’organe spécial est
créé par l’acte constitutif ou par un acte additionnel établi
lors de la constitution de l’organisation. Ainsi la Banque
européenne d’investissement de la Communauté écono¬
mique européenne est-elle un organisme de gestion que
l’on peut définir comme un organe spécial de la C. E. E.
prévu par l’article 129 et étabh par un protocole spécial.
On pourrait définir de la même manière, encore que cela
soit moins précis, le Fonds social européen. Dans le traité
de l’Euratom un organisme de gestion est également prévu
qui a ainsi le caractère d’organe spécial, l’Agence d’appro¬
visionnement. On pourrait multipher les exemples.
Mais l’activité de gestion peut ne pas avoir été prévue
ou envisagée lors de la constitution de l’organisation
internationale principale et si celle-ci, au cours de son
existence, se trouve devoir assumer cette activité elle
peut en confier l’exercice à im organisme particuher
qu’eUe créera en tant qu’organe subsidiaire.

30 Dans d’autres cas enfin il est prévu dans l’acte consti¬


tutif d’une organisation intergouvemementale la possi-
büité de création dans l’avenir d’organismes de gestion
mais l’initiative de création n’en est pas réservée aux États
membres ou à l’organisation internationale, elle peut
appartenir aussi à des entreprises privées et l’organisation
internationale interviendra alors pour permettre la créa-
ORGANISMES INTERNATIONAUX 719

tion — ce qui n’est aucunement un acte de gestion en ce


qui la concerne — et accorder par voie de conséquence
les avantages juridiques qui découle de ce statut parti¬
culier. C’est à cette notion particulière qu’appartiennent
les entreprises communes prévues par les articles 45 à 51
du traité constitutif de l’Euratom.

§2. — Les problèmes juridiques des « gestions ».

687. — La personnalité juridique. — L’existence


d’ime activité de gestion au sein d’une organisation inter¬
nationale n’imprime pas à l’organisme qui en est chargé
une nature juridique particulière.
Une première question qui se pose sur le plan juridique
est celle de savoir si l’organisme dispose ou non de la
personnalité juridique. S’ü n’en dispose, pas on se trouve
en présence d’une simple spécialisation ou différencia¬
tion fonctionnelle. Il peut y avoir toutefois, en l'absence
d’une personnalité juridique, une autonomie financière
marquée par l’existence d’un budget séparé ou de res¬
sources affectées. C’est la théorie des Fonds spéciaux ou
comptes spéciaux qui peuvent exister dans diverses orga¬
nisations internationales comme par exemple le Fonds
spécial des Nations unies en matière d’assistance tech¬
nique ou le mécanisme du programme élargi. C’est une
formule analogue que l’on trouve avec le Fonds européen
prévu par l’Accord monétaire européen de 1955
reçoit d’ailleurs des États une dotation en capital.
L’organisme de gestion peut disposer au contraire de la
personnalité juridique et c’est dans ce cas seulement que
l’on se trouvera en présence d’un organisme international
proprement dit qu’on pourrait dénommer « organisme
international de gestion ».

688. — Nature juridique. — L’organisme intema,tio-


nal de gestion doté de la personnahté morale ne constitue
pas une catégorie juridique très strictement définie,
il existe une gamme véritable de types d’organismes.
Les « organismes internationaux de gestion » doivent
toutefois être distingués des sociétés internationales qui
sont de caractère purement privé et qui demeurent donc
des organismes privés même si elles peuvent quelquefois
apparaître comme concessionnaires d’un service pubüc
international. Ainsi la Compagnie universelle du canal
de Suez qui assurait la gestion du canal avant la natio-
720 COOPÉRATIONS TECHNIQUES

nalisation intervenue en 1956, en raison de son caractère


purement privé, n’apparaissait pas comme un « organisme
international de gestion ». Sous cette formule on peut
au contraire classer toute une série d’organismes fort
divers. Il parait difficile de les désigner sous un seul
vocable juridique. On a quelquefois pensé à utiliser
l’expression à!établissements publics internationaux. Il
anive en effet que certains textes emploient cette expres¬
sion, ou parfois celle d’établissement public, ainsi par
exemple la convention franco-suisse du 4 juiEet 1949
créant l’aéroport de Bâle-Mulhouse. Mais la formule
d’établissement public international ne saurait être
étendue à tous les organismes internationaux de gestion.
Elle demeure en effet fort artificielle et liée à des concep¬
tions de droit public français qui ont quelquefois influencé
des créations intervenues en Europe, mais cette notion
n’est pas transposable d’une manière générale sur le
plan du droit international, sauf disposition convention¬
nelle contraire l’utüisant.
Elle exige d’ailleurs, même dans un cadre restreint,
que l’organisme ^constitué ait un capital uniquement
souscrit par des États ce qui écarte toute formule d’éco¬
nomie mixte, or cette formule très largement utilisée dans
le cadre du droit interne est également employée dans le
cadre international.
D’ailleurs la formule de l’établissement public incom¬
patible avec la présence de capitaux privés est bien sou¬
vent formellement écartée par les textes constitutifs de
l’organisme international de gestion même si le capital de
celui-ci est entièrement constitué par des capitaux publics.
Divers organismes sont en effet qualifiés de sociétés. La
Banque des règlements internationaux constituée en 1931
pour permettre d’assurer les transferts de capitaux dans
le cadre du règlement des réparations et instituée par un
accord interétatique du 20 janvier 1930 est une société
internationale. La même solution a été adoptée pour la
Société internationale de la Moselle par la convention
franco-allemande du 27 octobre 1956. On la trouve égale¬
ment dans la convention et les textes annexes signés le
30 septembre 1955 à. Londres et concernant la Société
européenne pour le financement du matériel ferroviaire
(Eurofima). Un autre exemple fort analogue est celui
fourni par la convention et les textes complémentaires
relatifs à la société Eurochemic constituée par divers
États dans le cadre de l’O. E. C. E.
ORGANISMES INTERNATIONAUX 721

C'est normalement aussi à la catégorie juridique de la


société que correspond la notion d’entreprise commune
définie par le traité d’Euratom dans ses articles 45 à 51.
Ainsi l’organisme international de gestion, doté de la
personnalité juridique peut-il revêtir, en dehors de l’hy¬
pothèse de coïncidence avec une véritable organisation
internationale, soit la forme d’un étabhssement public,
soit plus fréquemment celle d’une société. Cette dernière
formule a l’avantage de la souplesse puisqu’elle convient
aussi bien lorsque le capital est entièrement pubhc que
lorsqu’il présente un caractère mixte.
Il arrive d’ailleurs exceptionnellement que la termi¬
nologie ofi&cieUement employée dans une convention
interétatique constitutive ne corresponde pas à la réahté
juridique, un exemple d’ailleurs isolé en est fourni par la
Société financière internationale créée à côté de la
B. I. R. D. le 24 juillet 1956 (voir supra, n" 653), il s’agit
d’une organisation internationale de caractère interéta¬
tique.

689. — Régime juridique de l’organisme. — Les


divers organismes internationaux de gestion posent non
seulement le problème de leur nature juridique mais aussi
celui de leur régime juridique.
Il ne s’agit plus ici seulement de définir l’organisme lui-
même et de l’insérer dans une classification juridique mais
de préciser les règles de droit qui lui sont apphcables.
Ce problème est fort complexe. Les solutions qui peuvent
lui être apportées sont variables et présentent à leur tour
une gradation.
L’organisme peut être entièrement régi par le droit
international c’est-à-dire par la convention constitutive
et elle seule, sans référence à aucun droit national, cette
solution existe pour les organisations internationales en
général et donc éventuellement pour celles d’entre elles qui
peuvent apparaître, au moins à titre principal, comme
s’analysant en des organismes de gestion. En dehors de ce
cas particulier, les organismes internationaux de gestion
sont régis par des règles juridiques diverses et complé¬
mentaires, tout d’abord la convention constitutive,
ensuite les statuts mêmes de l’organisme qui complètent
la^ convention, enfin et éventuellement par le droit de
l’État du siège qui est appliqué à titre subsidiaire et non
pas à titre impératif dérivant de l’implantation terri¬
toriale. Il arrive même que l’on rencontre une dernière
722 COOPÉRATIONS TECHNIQUES

catégorie de règles applicables, un pouvoir réglementaire


interne qui existe normalement dans les organisations
internationales proprement dites et qui peut être prévu
parfois dans les statuts mêmes de l’organisme internatio¬
nal de gestion, la société Euroctiemic en fournit un
exemple avec les « règlements de gestion » prévus par les
statuts eux-mêmes.

BIBLIOGRAPHIE

Gestion internationale.
Voir les articles donnés dans la bibliographie du cha¬
pitre précédent concernant la société Eurochemic.
Voir aussi : Friedmann (W.), International public corpo¬
rations, Modem law review, 1943, p. 203 et s.; Jes-
sup (Ph. C.), Transnational law, Yale, 1956; Adam
(H. T.), Les établissements publics internationaux, Paris,
1957; Langrod (G.), Quelques aspects du problème des
établissements publics internationaux, Archiv des Vôlker-
rechts, 1958, p. 113-119; Adam (H. T.), Les problèmes
administratifs et financiers relatifs à la création d’entre¬
prises communes, A. F. D. I., 1958, p. 523-535; Adam
(H. T .), Les organismes internationaux spécialisés, contri¬
bution à la théorie générale des établissements publics
internationaux, Paris, 1965.
INDEX ALPHABÉTIQUE

N. B. - Les numéros renvoient aux paragraphes

A Afrique
— Conférences afri¬
Aaland (île) 49,156, 265, 374 caines
Académie de droit in¬ — Accra . 524
ternational . 286 — Adis-Abeba ... 524
Accord — Casablanca .... 528
— de base . 636 — Lagos . 528
(Voir Assistance tech¬ — Monravia. 528
nique). — Yaoundé. 525
— de crédit stand-by — décolonisation .... 56
596, 598 — union économique
(Voir F. M. /.). — Conseil de l’En¬
— de Paris (1954) ... 472 tente . 520
— de produit . 615 — O. A. M. C. E. et
— de siège. 578, 590 U. A. M. C. E. 525,
— de tutelle . 175 526
— des Dix. 598 — Union douanière
(Voir F. M. /.). éco. de l’Afr. cen¬
— du Latran ... 204-208 trale . 522
(Voir Saint-Siège).
— Union douanière
— en forme simplifiée 249, équatoriale. 519
251, 252
— monétaire européen — Union douanière
440, 443 de l’Afrique de
Acheson (Résolution) 410, l’Ouest. 521
411, 412 — union politique 519, 520,
(Voir O. N. U.lrègle- 523, 524, 527, 528, 529
Afrique du sud
ment des différends).
Aden — assistance technique 644
—■ Commonwealth ... 193 — Commonwealth 180, 182
Adhésion aux traités .. 261 187, 192
Afghanistan — fédéralisme .. 128, 140
— aide bilatérale. 661 — O. U. A. 529
— S. D. N. 355
— assistance technique 646
Afrique — Sud Ouest Africain 166
— Banques 174
— africaine de dé¬ — traitement des In¬
veloppement . 659 diens . 193
— de l’Afrique cen¬ Agence
trale . 622 — atomique euro¬
— de développe¬ péenne . 502
ment arabe . 517 (Voir C. E. E. A.).
724 INDEX ALPHABETIQUE

Agence Allemagpie (R. D. A.)


— européenne de pro¬ —■ Pacte de Varsovie . 476
ductivité . 440, 443 Allemagne (R. F. A.)
(Voir O. E. C. E.). — aide bilatérale .... 661
— européenne pour l’é¬ — assistance tech¬
nergie nucléaire 440, 443, nique . 646
669-672 — B. I. R. D. . . __ 652
(Voir O. E. C. E.). — Conseil de l’Europe 453
— de contrôle des ar¬ 455
mements . 475 — O. T. A. N. 465
(Voir U. E. O.). — réarmement 472, 473
— internationale de 486
l’énergie atomique — U. E. 0. 472, 473
— activités . 678 — Union occidentale . 461
— buts . 678 Alliance pour le pro¬
— financement ... 677 grès . 427, 428, 643
— historique. 674 (Voir O. E. A.).
— structure. . 574, 676 Ambassadeur. 234
— juive . 170 American Society of
(Voir Palestine). international law . .. 286
Ago (R.). 283 Amérique latine
Agriculture — dénucléarisation 59, 157
— C. E. E. 489, 503, 580 Andorre (Vallées d’) .. 88
— Communauté euro¬ Angola . 326
péenne de r —. 485 Ankara (traité d'). 482
Aix-la-Chapelle Année géophysique ... 161
— Congrès d’ —. 31 Anschluss . 151, 374
— Protocole d’ — ... 232 Antarctiqpie
Alabama (Affaire de) 42, 333 — internationalisation 161
Alaska. 310 (Voir Washingtonjtraité
Albanie de).
— Conseil d’assistance Antüles . 193, 325
économique mutuelle.. 448 Antiquité . 9
— Création. 32, 33 Arabie séoudite
— S. D. N. 353 — Ligue Arabe 515, 518
Algérie — O. P. E. P. 619
— aide bilatérale .... 661 Arbitrage
— G. P. R. A. 228 — Acte général d’ —
— Ligue arabe.. 515, 518 48, 329, 332, 335
— O. T. A. N. 467 — compromis d’ — . . 333
— Pétrole. 618 — Cour Permanente
Algésiras (Acte d’—) 158 d’ — (C. P. A.). 42, 289
296, 297, 601 334
(Voir Maroc). — définition 333, 334, 335
Allenaagne — origine.. 42, 329, 333
— Anschluss . . . 151, 374 (Voir arbitral).
— division en deux Arbitral
Etats. 52 — Commission —•
.— fédéralisme .. 137, 141 — généralités. 333
— national-socialisme 318 — sur les biens,
— S. D. N. 356, 363 droits et intérêts en
— unité. 34 Allemagne . 347
(Voir aussi. Confédéra¬ — sentence — 333 et s.
tion). Argentine
Allemagpie (R. D. A.) — A. L. A. L. C. 433
— aide bilatérale .... 661 — S. D. N. 355
— Conseil d’assistance Articles de Confédéra¬
économique mutuelle 448,450 tion
INDEX ALPHABÉTIQUE 725

(Voir Confédération.! — structure . 655


Etats-Unis). Association latino-
AsUe . 239, 278, 280 américaine de libre
Assistance économiç[ue commerce (A. L. A.
(mutuelle). L. C.)
(Voir Conseil d’assis¬ — G. A. T. T. 612
tance économique mu¬ — généralités. 433
tuelle). Augsbourg (Paix d’) . . 21
Assistance économique Australie
— bilatérale . . . 660-661 — assistance technique
(Voir par pays). 641, 644
— générale .... 649, 656 — Commonwealth 180,
— généralités 647, 648 182, 187, 192, 194
662, 663 — S. D. N. 355
— régionale ... 657-659 — traité de l’A. N. Z.
Voir£. I.R.D.,S.F. U. S. 530
A. I. D., O. C. D. E., — traité de l’Asie du
C. E. E.jAfrique, O. E. Sud-Est . 531
A., O. D. E. C. A., — tutelle . 173, 178
Fonds d’équipement des Autodétermination des
Nations Unies). peuples
Assistance technique (Voir droit des peuples
— bilatérale, voir par à disposer d’eux-mêmes)
pays. Autolimitation (théorie
— O. C. D. E. 444 de) —. 77
— O. N. U. Autriche
— Fonds spécial 637-638 — A. E. L. E. . 446, 447
— généralités. 631 — C. E. E-/association 505
— P. E. A. T. 633-636 — Confédération avec
— P. N. U. D. 639-640 la Prusse. 124
—• programme pri¬ — Conseil de l’Europe 453,
mitif . 632 455
(Voir aussi Alliance — neutralité. 151
pour le progrès, Commis¬ (Voir Autriche-Hon¬
sion de coopération tech¬ grie).
nique en Afrique au sud Autriche-Hongrie
du Sahara, Commission — dislocation. 319
du Pacifique Sud, Orga¬ — union de .... 110, 140
nisation des Caraïbes, Aviation
Plan de Colombo). (Voir O. A. C. /.).
Association eiiro-
péenne de libre B
échange (A. E. L. E.)
— C. E. E. ... 445, 447 Bagdad
— création . 445 — Bahn. 38
■—• fonctionnement ... 446 — traité de, voir
— G. A. T. T. 612 C. E. N. T. O.
— institutions . . 447, 574 Balfoiir
— membres. 445 — déclaration. 170
— O. E. C. E. 445 — rapport 179, 187, 192
Association internatio¬ (Voir Palestine).
nale de développe¬ B^kans
ment (A. I. D.) —• coopération dans les
— activités ... 656, 686
— B. I. R. D. 655 (Voir Entente balka¬
— capital . 655 nique).
— composition. 655 Bandoeng (Conférence
— principes. 656 de).... 55, 61, 155, 313
726 INDEX ALPHABÉTIQUE

Banque africaine de dé¬ Belgrade (Conférence


veloppement . 659 de) . 61, 155
Banque asiatique de Benelux
développement. 659 — composition. 477
Banque de l’Afrique — fonctionnement 478, 479
centrale. 522 — origines . 57,477
Ban^e centro-améri- — structure . 478
ceiine d’intégration Bentham . 348
économique .. 431, 658 Berlin
(Voir O. D. E. C. A.). — blocus de — .. 52, 465
Banque de développe¬ — conférence de — . 36,
ment arabe . 517 297, 320
Banque des règlements — congrès de —, 32, 33,
internationaux. 688 296, 303
Banque eiu-opéenne — traité de — .. 91, 102
d’investissement 503, 657 Bernadette. 170,330
Banque interaméri¬ Birmanie
caine de développe¬ — assistance technique 646
ment (B, I. D.) 427, 643, Bizerte (Affaire de)
658 — O. T. A. N. 471
(Voir O. E. A.). Blaine (J.). 417
Banque internationale Blé . 615, 616, 617
de coopération éco¬ Bled (traité de). 482
nomique . 450 Boers (guerre des) . 40
Banque internationale Bohême-Moravie
pour la reconstruc¬ — protectorat alle¬
tion et le développe¬ mand . 82, 89, 318
ment (B. I. R. D.) Bolivar . 35, 415
— activités ... 652, 686 Bolivie
— A. I. D. 655 — A.L.A.L. C. 433
— buts. 651 Bons offices
— capital . 650 — généralités. 329
— composition. 650 — O. T. A. N. 471
— principes. 651 (Voir Différend interna¬
— règlement des diffé¬ tional! Règlement).
rends . 648 Bornéo
— S. F. 1. 653, 654 — Commonwealth ... 193
— structure 574, 577, 649 Brazzaville (Conférence
Bardo (traité du). 85 de) . 125, 126
(Voir Tunisielprotecto¬ Brésil
rat). — A. L. A. L. C. 433
Base stratégique. 93 — assistance écono¬
Bechuanaland mique . 661
— Commonwealth ... 193 — assistance tech¬
Belgique nique . 646
— assistance technique — S.D. N. ... 356, 362
644, 646 Briand (A.) . 435
— Benelux .... 447, 479 Bricker (amendement) . 252
— Congo . 107, 412 Bruxelles
— Conseil de l’Europe — Conférence anti-es¬
451, 452, 455 clavagiste de —. 344
— indépendance . 34, 148 — traité de — (1948) 460,472
— mandat. 166 Bryan-Chamorro (trai¬
— neutralité .... 34, 148 té) . 93, 331
— S. D. N. 362 Bulgarie
— tutelle. 173 — Conseil d’assistance
— Union occidentale 460, économique mutuelle.. 448
461 — indépendance .. 32,102
INDEX ALPHABÉTIQUE 727

Bureau internationsQ ChablEûs. 156


du travail (B. I. T.) . 556 Charbon. 620
(Voir O. I. T.). (Voir C. E. C. A.).
Burundi
Cheirgé d’affaires. 234
— création . 178 (Voir Diplomatique!
agent).
G Charte
— de Bogota. 423
(Voir O. E. A.).
Cachemire
— de la Havane . 606, 608
— différend du — 193, 330
(Voir O. I. C.).
Café . 615, 616, 617
Californie (Affaire des — de l’Atlantique 50,375,604
écoles de —). 142 — de l’O. N. U.
(Voir O. N. U.lcharte).
Cambodge
— de Punta del Este 428
— assistance technique 641
(Voir Alliance pour le
— neutralité. 152
progrès).
— protectorat français 87
Cameroun — de San Salvador
— 1951 . 429,430
— mandat. 166
— 1962 . 432
— tuteUe... 173,175,178
(Voir O. D. E. C. A.).
— Union douanière et
économique de l’A¬ — Sociale européenne 459
(Voir Conseil de l’Eu¬
frique centrale. 522
rope).
Canada
— assistance technique 641 Chemin de fer
— Commun wealth 180, — Bagdad Bahn .... 38
182, 184, 185, 186, 187, 192 — généralités. 38
— O. E. C. E. 439 — Union sur les —... 39
— S. D. N. 355 Chili
Canal — A. L. A. L. G. 433
— transocéanique 156, 264 — S. D. N. 355
(Voir par nom de canal). Chine
Capitulations (régime — Break up of China 37, 92
des) 21, 96, 97, 98, 99, 100, — Commerce interna¬
144, 242, 248 tional . 298,600
Caraïbes — Concessions . 95
(Voir Organisation des — S. D. N. 355
Chine nationaliste
Carolines (îles) — O. N. U. 381,387,390,400
— mandat. 166 Chine populaire
— revendication terri¬ — aide bilatérale .... 661
toriale . 330 — Inde . 312, 314
— tutelle . 173, 176 — O. N. U. 381
Carthage (Affaire de la) 292 — reconnaissance 212, 218
Casablanca (Affaire des ChurchUl (W.) . 437
déserteurs de) . 334 Chypre
C. E. N. T. O. — cession d’adminis¬
— création . 54 tration . 91
— Ligue arabe. 518 — Commonv^ealth ... 192
Cession — Conseil de l’Europe 453,
— à bail _ 90, 92, 93 455
— d’administration 90, 91 — 0. T. A. N. 471
Ceylan Clause
— assistance tech¬ — de la nation la plus
nique . 641, 646 favorisée 262, 299, 609, 611
— Commonwealth 191, 192, — rebus sic stantibus 271,
194 (Voir traité). 272
728 INDEX ALPHABETIQUE

Codification du droit nente des mandats 164,


international 167,168, 170,174,177, 347
— O. N. U. 280, 283 Commission euro¬
(Voir O. N. U.ICommis- péenne des droits de
sion du Droit interna¬ l'homme
tional). (Voir droits de l’homme).
— S. D. N. 282 Commission interna¬
Coexistence pacifique 61, tionale de la naviga¬
150, 155, 312, 315 tion aérienne (C. I.
Colombie N. A.) . 545, 546
— A. L. A. L. C. 433 (Voir O. A. C. I.lhisto-
— S. D. N. 355 rique).
Colombo Commonwealth 179-195
(Voir plan de —). ■— Commonwealth re¬
Colonisation . 320 lations Office. 194
Comecon — Conférence du Com¬
(Voir Conseil d’assis¬ monwealth . 194
tance économique mu¬ — Conférence Impé¬
tuelle). riale . 182
Comité d’aide au déve¬ — Economie. 194
loppement . 444 — Impérial War Cabi¬
(Voir O. C. D. E.). net . 184, 187
Comité de la recherche -Secrétariat. 194
spatiale. 280 Communauté . . . 126-127
Comité français de li¬ Communauté Econo¬
bération nationale 223, mique Européenne
224 (C. E. E.)
—- Adhésion de la
Commerce
Grande Bretagne 195, 507,
— Charte de La Ha¬
508
vane . 606-608 — A. E. L. E. . . 445, 447
— Conférence de Ge¬ — Agriculture
nève sur le —- et le dé¬ —■ politique agri¬
veloppement 299, 625-630
cole commune 489, 503
— droit au commerce 298 — F. E. O. G. A. 503,
— G. A. T. T. 609-613
580
— liberté commerciale 600 — Assemblée
605
— compétence .. . 500
— organisation de coo¬ — structure . 499
pération commerciale.. 613 — Association
— organisation inter¬ — généralités. 505
nationale du commerce. 608 — Autriche. 505
613 — Etats africains 506
Commission de coopé¬ — Grèce . 506
ration technique en — Nigéria. 506
Afrique au sud du Sa¬ — Turquie . 506
hara . 644 — Banque Européenne
Commission des Na¬ d’investissement 503,657
tions Unies pour le — Commission
droit commercial — composition ... 493
international (Voir — fusion des exé¬
O.N. U.) cutifs (C. E. C. A.-
Commission du droit C. E. E.-C. E. E. A.) 498
international (Voir — règlements .... 496
O. N. U.). — vote. 493
Commission du Paci¬ — Conseil des mi¬
fique Sud. 644 nistres
Commission perma¬ — composition ... 495
INDEX ALPHABÉTIQUE 729

Communauté Econo¬ Communauté euro¬


mique Européenne péenne du charbon et
(G.E.E.) de l’acier (C.E.C.A.)
— rapports avec la —• Conseil des mi¬
Commission .. 495, 497 nistres
— vote . 495, 575 — compétence .. . 494
— Cour de justice 339, 347, — composition . .. 494
501 — vote _ 494, 575
— douane . ... 488 —• Cour de justice 339,347,
— ententes . ... 488 501
— entreprises pu- — Financement. 580
bliques . ... 488 — Haute Autorité
— financement .. 490, 580 — composition . . . 492
— Fonds social euro- — fusion des exé¬
péen . ... 503 cutifs . 498
— G. A. T. T. ... 612 — Président. 492
— monnaie. ... 490 — Haute Autorité
—• monopoles .... ... 488 —• rapports avec le
— O. C. D. E. ... ... 444 Cl des ministres 494,497
— origine . ... 487 — règlements .... 496
— O. T. A. N. ... ... 470 — vote. 492
— transports .... ... 490 — Origines. 483
Communauté euro- Concession
péenne (projet dit de — généralités. 95
—). ... 511 Concile . 201
Communauté euro- Conciliation
péenne de défense — Commission de —
(C. E. D.) franco-italienne. 332
— échec 57, 159, 472, 486, — Conseil du commerce
487 et du développement.. 630
— U. E. O. ... 472 — définition. 332
Commimauté evuo- — origine . 331
péenne de l’énergie (Voir Différend interna¬
atomique (C. E. E. A) tional! Règlement).
— Agence atomique Conclusion des traités
européenne. 502, 674 (Voir traité).
—- Assemblée .... 499, 500 Concordat . 204, 248
— Commission C ondominium
— composition ... 493 — exemples . 144
— fusion des exé¬ —• généralités. 143
cutifs . 498 — et tutelle . 172
—■ règlements .... 496 Confédération
— vote. 493 — du Rhin _ 118, 124
— Conseil des mi¬ — Etats-Unis 118,119,120,
nistres . 495, 575 123
— Cour de justice 339,347, — généralités 113,115 et s.
501 — Germanique 118, 119,
— objectifs. 491, 673 120, 124
— origines . 487, 491 — Helvétique 118,119,120,
Commmiauté euro¬ 123
péenne du charbon et (Voir Provinces Unies.).
de l’acier (C. E. C. A.) Conférence
— Assemblée .. 499, 500 — africaine. (Voir A-
— Association à la — frique).
— généralités. 504 — d’Algésiras. 33
— Gde Bretagne . 504 — d’ambassadeurs ... 33
— Communauté euro¬ — de Bandœng 55, 61,155,
péenne . 511 313
730 INDEX ALPHABÉTIQUE

Conférence Congrès
— de Belgrade ... 61,155 — de Berlin 32, 33, 296, 303
— de Berlin (1885) 36, 297, — de l’Europe . 451
320 (Voir Conseil de l’Eu¬
— de Brazzaville 125, 126 rope).
— de Bruxelles (1889) 36, — de Lima. 416
344 — de Paris (1856) 32, 33
— de Dumbarton Oaks 50, — de Vienne 28, 156, 199,
375 232
— de La Haye Conseil d’assistance
— (1899, 1907) 33, 41, économique mutuelle
43, 44, 330, 331, 334, 336 — création . 448
— (1949 : Indoné¬ — composition. 448
sie/Pays-Bas) . 127 — fonctionnement ... 450
— de Messine. 487 — institutions .. 449, 450
— de Moscou. 50 — siège . 450
— de Postdam. 51
Conseil de l’Entente .. 520
— de San Francis¬
co . 50, 376 Conseil de l’Europe
— de Vienne ... 232, 233, — agriculture. 459
234 — Assemblée consul¬
— de Washington tative
— (1889) . 417 — composition . .. 455
— (1922) .... 92, 95 — fonctionnement 456
— de Yalta _ 50, 375 — U. E. 0. 474
— diplomatique 118, 289, — Comité des mi¬
290, 296, 572, 574 nistres . 454
(Voir diplomatique). —■ compétence poli¬
Conférence sur le com- tique . 459
commerce et le déve¬ — droits de l’homme 346,
loppement 347, 459
— Conférence — 535, 628 — membres ... 452, 453
— Conseil . 629, 630 — origine .. 57, 451, 452
— G. A. T. T. 612 — secrétariat . 458
— principes 625, 626, 627 — sécurité sociale .... 459
Congo — siège . 453,454
— neutralisation .... 156 — transports . 459
— O. N. U. 412, 413, 582, Conseil nordique
583 — compétence ...... 481
— Union des Répu¬ — composition. 480
bliques d'Afrique cen¬ — origine . 480
trale . 519 — structure . 481
— union personnelle Consul
avec la Belgique . 107 (Voir Consulaire!Agent)
Congo (Bassin du)
— Commerce interna¬ Consulaire
tional . 601 — agent . 244, 245
Congo (Brazzaville) — fonctions . 243
— Union douanière et •—• immunités .. 245, 283
économique de l’Afrique —■ relation
centrale . 522 — — et diploma¬
Congo (fleuve) tique . 2431
— liberté de naviga¬ -- origine .... 242
tion . 297 (Voir Convention de
Congo (Léopoldville) Vienne).
— O. C. A. M. 527 Constantinople (con¬
Congrès vention de) ... 103, 264 l
— d’Aix-la-Chapelle . 31 (Voir Suezicanal).
INDEX ALPHABÉTIQUE 731

Convention Croix Rouge


— de Constantinople 103, — fonctionnement 269, 340
264 — origine . 43
— de Montreux . 99 Crucé (E. de). 348
— de Stockholm 109, 154, Cuba
445 — aide bilatérale .... 661
— de Vienne (1963) 242, — B. I. R. D. 652
245, 283 — Etats Unis 84, 93, 310
-Porter. 305 — indépendance. 35
Corée (guerre de) 54, 311, — O. E. A. 425
342
Corfou (affaire de—) .. 374 D
Costa Rica
— O. D. E. G. A. 429, 432 Dethomey
Côte d’ivoire — Conseil de l’Entente 520
— Conseil de l’Entente 520 — Fédération du Mali 519
— Union douanière de — Union douanière
l'Afrique de l’Ouest ... 521 de l’Afrique de l’Ouest. 521
Cour de justice centra- Danemark
méricaine 336, 347, 432 — A. E. L. E, ... 446, 447
(Voir panamérica¬ — Conseil de l’Europe 452,
nisme). 455
— Conseil nordique .. 480
Cour de justice des
— S. D. N. 355
communautés euro¬
— union avec l’Islande 110
péennes .. 339, 347, 501
Dantzig. 158, 374
Cour de justice du
Déclaration
Benelux. 478
— Balfour. 170
Cour européenne des — d’indépendance
droits de l'homme 339, (Etats Unis) . 26
346, 347 — de Monroe . 35
Cour Internationale de — universelle des
Justice (C. I. J.) droits de l’homme .... 344
— compétence . 338, 339 Décolonisation
— création . 337 — O. N. U. (Voir O.
— Etats parties au N. U .jterritoires non
statut. 337 autonomes).
Cour Internationale — principe de la — .. 56
des Prises . 289 Dédoublement fonc¬
Cour permanente d'ar¬ tionnel 115, 125, 132, 134,
bitrage (C. P. A.). 42, 289, 230
334 Désarmement
Cour Permanente de — généralités .... 59, 165,
Justice internatio¬ 172
nale (C. P. J. I.). 46,336, — nucléaire 59, 157, 161
339, 365 (Voir traité de Moscou).
(Voir S. D. N.). Déserteurs de Casa¬
Coutume blanca (affaire des).. 334
— codification ... 282, 283 Détroits
— définition ... 276-278 — liberté de passage 38
— fondement. 279 Développement
-générale . 280 — Economique (Voir
— locale. 280 Conférence sur le com¬
— traités. 281 merce et le -—).
(Voir Sources du droit). — Pays en voie de —
Crimée (guerre de).... 33 (Voir Pays en voie de
Croisades. 17 développement).
732 INDEX ALPHABÉTIQUE

DiHérend international Dominion 180,181,182,183,


-juridique 329-332 185, 186, 187, 188
— ■—■ politique .. 329-332 Droit de passage sur le
— Règlement des — territoire indien (ar¬
— B. I. R. D. 648 rêt du) . 278
— Conseil de l’Eu¬ Droit des peuples à
rope . 455 disposer d’eux-mê¬
— Conventions de mes 27, 73, 159, 162, 319,
La Haye. 330 327
— généralités. 329 (Voir nationalités!prin¬
— O. N. U. 395, 406, cipe des).
407, 408, 409, 410, 413 Droit international
— O. T. A. N. 471 — droit interne
— S. D. N. ... 370-374 (Voir dualisme, immé-
(Voir bons offices, arbi¬ diateté, monisme).
trage, médiation, en¬ — histoire. 8, 61
quête, conciliation, rè¬ Droits de l’homme
glement fudiciaire). — Commission euro¬
Diplomatie péenne des—_ 346, 347
— origine . 231 — Cour européenne
-secrète . 253 des—. 339, 346, 347
Diplomatique — déclaration univer¬
—- agent — .... 230-241 selle des — . 344
— asile 239, 278, 280 — Pactes internatio¬
— conférence — 118, 289- naux des — .... 328, 345
290, 296, 572, 574 (Voir esclavage, mino¬
— corps —. 235 rité, individu).
— doyen . 235 Dualisme. 259
— égalité — .... 289-296 Dubois (P.) . 348
— immunité — 232, 237, Duguit. 67
238, 239, 240, 241 Dumbarton Oaks (Con¬
— langue — .... 250, 291 férence de) . 50, 375
— mission — Dvmant (H.). 43
— fonctions. 233 Durand (Ch.). 114
— chef . 234-235
— valise— . 238-239 E
(Voir immunité).
— relation — et consu¬ EHets des traités
laire . 243 (Voir traité).
Egalité
(Voir Convention de
— définition .... 288, 300
Vienne, immunités di¬ -diplomatique 289-296,
plomatiques). 576
Directoire européen 28, 29, — —■ économique 297, 299,
30, 31,32, 33, 34,148 611, 625
Doctrine — organisations inter¬
— source du droit.... 286 nationales ... 574, 575, 577
— de Monroe 35, 284, 308, Eglise
414 —• catholique .... 197, 209
— Drago . 305 — généralités. 196
— Eisenhower. 311 (Voir Saint-Siège).
— Hallstein. 228 Egypte
— Stimson. 227 — affaire de Suez
— Tobar. 226 (1956) . 411
— Truman. 53, 311 — assistance écono¬
— Wilson. 226 mique . 661
Dogger Bank (affaire — assistance tech¬
du) . 331 nique . 646
INDEX ALPHABÉTIQUE 733
Egypte spatiales. 682
— capitulations ... 98, 99 — Organisation euro¬
— indépendance. 103 péenne pour la cons¬
— Ligue arabe .. 515-518 truction et le lancement
— protectorat anglais 82, d’engins spatiaux. 681
84, 303 — utilisation pacifique
— S. D. N. 356 de l’espace . 157
— Vassalité. 103 Espagne
(Voir SuezjCanal). — Conseil de l’Europe 453
Empire ottoman —' France . 301
— dislocation ... 102, 165 — guerre civile 219, 300,
— vassalité. 102 374
Energie atomique — O. E. C. E. 439
— Agence européenne — S. D. N. 355, 362, 363,
pour l’énergie nucléaire 669- 374
672
Etain . 615, 616, 617
— Agence internatio¬
nale de r —. 675-678 Etat . 67-80
•— Communauté euro¬ — honneur de 1’ —■... 292
péenne de r —• .. 487-502, — petit — . 293-296
673, 674 — sujet du droit inter¬
— Institut unifié de re¬ national . 64, 65
cherches nucléaires 667, 668 (Voir population, terri¬
— Organisation euro¬ toire, pouvoir politique).
péenne pour la recher¬ (Voir fédéral).
che nucléaire .... 664-666 Etats Unis
Enquête — A. I. D. 655
— définition. 331 — aide bilatérale .... 661
— exemples. 331 — A. L. A. L. C. 433
— origine. 331 — assistance tech¬
(Voir Différend interna¬ nique . 644, 645
tional j Réglement). — B. L R. D. 652
Enregistrement des — C. E. E. 558
traités — fédéralisme 135, 138,
(Voir traité). 139, 140, 141, 142
Entente — bicaméralisme. . 131
■— -— balkanique 436, 486 — pouvoir exécutif. 132
-baltique . 436 — F. M. 1. 598, 599
— Petite — . 436 — histoire. (Voir Con¬
Equateur fédération! Etats-Unis).
— A. L. A. L. C. 433
— intervention (Voir
— S. D. N. 355
doctrines Eisenhower, de
Equilibre européen 19, 24,
Monroe, Truman, Saint
27, 28
Domingue).
Equité . 284
(Voir principes généraux — O. C. D. E. . . 442, 444
du droit). — O. E. A. 414-428
Esclavage — O. E. C. E. .. . 438, 439
— lutte contre 1’ — . . 36 — O. N. U. 400, 579
— répression de 1’ — 165, — O. T. A. N. .. 465 et s.
320, 344 — seconde guerre mon¬
Espace diale . 311
— Comité de la recher¬ — S. D. N. 311, 355, 363
che spatiale. 280 — traité de l’A. N. Z.
-— course à 1’ —. 59 U. S. 530
-vital . 318 — traité de l’Asie du
— Organisation euro¬ Sud-Est . 531
péenne de recherches — tutelle ... 172, 173, 178
734 INDEX ALPHABÉTIQUE

Ethiopie Fonctionnaire interna¬


— Erythrée. 173 tional
— Italie. 227 — définition .... 572, 585
— S. D. N. 353, 374 — statut
Etranger. 74 — droits et obliga¬
Eurochemic . 688, 689 tions . 588, 589
(Voir O. E. C. E.). — garanties. 591
Europe — nomination 586, 587
— directoire européen 28, — privilèges. 590
29, 30, 31, 32, 33, 34,. 148 (Voir à Secrétariat de
— équilibre européen 19, chaque organisation in¬
24, 27, 28 ternationale).
— organisation poli¬ Fonds d’équipement
tique de r — après 1945 des Nations Unies 535,
— Communauté po¬ 649
litique (1954) . 511
Fonds monétaire inter¬
— plan Fouchet .. 514 national (F. M. I.)
(Voir Conseil de l’Eu¬
—■ composition. 592
rope, Union occiden¬
— historique. 592
tale, O. T. A. N.,
— principes de fonc¬
Union européenne
tionnement 593, 594, 595,
occidentale, pacte de
596
Varsovie).
Pour les organisa¬ — réforme du système
tions européennes, monétaire internatio¬
voir au nom de chaque nal . 598, 599
organisation. — ressources .... 597, 598
Executive agreement . 252 — structure. 574, 577, 592
(Voir accord en forme Fonds spécial
simplifiée). — financement. 638
Exequatur. 244 — organisation. 638
— principes. 637
F Fouchet (plan).514
Foyer national juif
Faisans (île des). 144 (Voir Palestine).
Faucigny . 156 France
Fédéral (Etat) 113,114,115, — aide bilatérale .... 661
128, 129, 130,131, 132, 133, — Allemagne (R. F.
134, 135, 136, 137, 138,139, A)
140, 141, 142. — réarmement ... 486
Fédéralisme — assistance tech¬
— généralités 112, 113, 183 nique . 644, 646
Fénelon. 348 — C. E. E. 489
Fès (traité de). 83, 86 — C. E. D. 472
Fin des traités — Conseil de l’Europe,
(Voir traité). 451, 452, 455, 459
Finlande — F. M. I. ... 598, 599
— Conseil nordique .. 480 — Grande Bretagne
— neutralité. 154 — Union franco-
— S. D. N. 357, 374 britannique . 437
Fleuve international — O. N. U.
— liberté de naviga¬ — Contributions fi¬
tion . 36, 38, 297 nancières. 400,413
(Voir Congo). — tutelle ... 173, 178
Fonction publique in¬ — O. T. A. N.
ternationale — retrait. 471
(Voir Fonctionnaire in¬ — S. D. N. 362
ternational). — mandat. 166
INDEX ALPHABÉTIQUE 735

France Goa . 326, 471


— traités ... 251, 259, 260 Gouvernement en exil
— de l’Asie du Sud — exemples 222, 223, 224,
Est. 531 228
— U. E. 0. 472 —• généralités. 221
— Union occidentale 460, Gouvernement de fait . 217
461, 462, 463 Gouvernement provi-
Frontière soîre
— Oder-Neisse. 51 — de la République
(Voir territoire). algérienne. 228
—• Français. 224
Grande Bretagne
G — A. E. L. E_ 446, 447
— aide bilatérale .... 661
Gabon — assistance tech¬
— Union des Répu¬ nique . 641, 644, 646
bliques d’Afrique cen¬ — C. E. C. A.
trale . 519 — association .... 504
— Union douanière et — C. E. E.
économique de l’Afri¬ — adhésion .. 500,507,
que centrale. 522 508
Gambie — Commonwealth 179-195
— Commonwealth ... 192 — Conseil de l’Europe 451,
— O. N. U. 380 452, 455
Gandhi . 191 — France
Garanties (loi des) 200, 201, — union franco-
202, 203, 204, 206, 208 britanique . 437
(Voir Saint Siège). — O. N. U.
General Agreement on — contribution
Tarifis and Trade financière. 400
(G. A. T. T.) — tutelle. 173,178
— composition. 612 — S. D. N. 362
— Conférence sur le — mandats 166, 168-
commerce et le déve¬ 170
loppement . 611,612 — Union occidentale 460,
— Kennedy round ... 612 461
— principes. 610 — Traité de l’Asie du
— produits de base .. 614 Sud Est . 531
— unions douanières . 611 (Voir Commonwealth).
— structure .... 612, 613 Grèce
Genève — C. E. E.
— Conférence de — sur — association .... 505
le commerce et le déve¬ — Conseil de l’Europe, 453,
loppement. .. 299, 625-630 455
— Protocole de— 48, 335 — Entente balkanique 436
Génocide (Convention 482
sur le —) . 230,, 341 — Indépendance . 32, 102
— Avis de la C. I. J. . 258 — Intervention en — 303
Gestion internationale 685- — doctrine Truman 311
689 — O. T. A. N. 466
Ghana — S. D. N. 362, 374
— Commonwealth ... 192 Grégoire (abbé). 348
■— création . 178 Groenland oriental (af¬
— O. C. A. M. 527 faire du). 250
— U. E. A. 53 Grotius . 25, 279
(Voir Togo). Guantanamo. 84
Gibraltar Guatemala
— Commonwealth ... 193 — O. D. E. C. A. 429-432
736 INDEX ALPHABETIQUE

Guerre — S. D. N. 353
— civile —• Union avec l’Au¬
— Espagne . . 219, 300 triche . 110
— Corée .... 54, 311, 342 140, 319
— de l’opium. 37 (Voir Autriche-Hongrie).
—• de sécession 35, 40, 216 Honneur de l'Etat .... 292
— des Bôers . 40 Huile d’olive 615, 616, 617
— droit de la — Hydrocarbures (Voir
— origine 33, 41, 43, Pétrole.)
44, 340
— sur mer. 44
(Voir Conférences de La
Haye). I
— limitation du re¬
cours à la — 48, 275, 294,
371, 406, 461, 517 ne
(Voir O. N. U., S. D. (Voir au nom de l’île).
N.). _ Irnmédiateté (théorie
— traités de) . 78, 129,138
— effets de la guer¬ (Voir Etat).
re sur les — .. 268, 270 Immunités
Guinée •— consulaires ... 245, 283
— indépendance. 126 — diplomatiques
—- U. E. A. 523 — fiscales . 241
Guyane — fondement 237, 283
— Commonwealth ... 193 — Inviolabilité du
domicile. 239
— juridictionnelles. 240
H — liberté de com¬
munications . 238
Haïti protectorat sur — 84, (Voir diplomatique. Con¬
304, 310 vention de Vienne, con¬
Hammarskjold (Dag) 391, sulaire).
392 Inde
Hangoe (presqu’île de) 93 — Affaire du droit de
Haut Commissaire 158, passage sur le territoire
159, 235 de 1’ —. 278
Haute-Savoie. 156, 263 — assistance écono¬
Haute-Volta mique . 661
— Conseil de l’Entente 520 — assistance tech¬
— Mali. 519 nique . 641, 646
— Union douanière de — Chine . 312, 314
l’Afrique de l’Ouest . . . 521 — Commonwealth 180,
Haya de la Torre (af¬ 190, 191, 192, 194
faire) . 239, 278, 280 —-Grande-Bretagne.. 180
(Voir Asile). — indépendance .... 55
Herzl (Th.). 170 — O. N. U. 378
Honduras — S. D. N. 185, 353, 355
— Commonwealth ... 193 Individu
— intervention fi¬ — protection 340-347, 557,
nancière au — .. 304, 310 566, 569
— O. D. E. C. A. 429-432 (Voir droits de l’homme,
Hong Kong minorité, esclavage).
— Commonwealth ... 193 Indépendance
Hongrie — économique.. . 327, 328
— Conseil d’assistance — principe d’ — 316-328
économique mutuelle 448, (Voir souveraineté; Voir
450 par pays).
INDEX ALPHABÉTIQUE 737

Indochine Irian occidental. 162


— protectorat français 83, Irlande
84, 87 — Commonwealth 186,
(Voir Cambodge, Laos, 190,192
Viêt-nam). — Conseil de l’Europe 452,
Indonésie 455
— assistance tech¬ — seconde guerre mon¬
nique . 646 diale . 187
— indépendance 55, 127, — S. D. N. 353
162 Islande
— O. N. U. 384 — Conseil de l’Europe 453,
— O. P. E. P. 619 455
Institut — Conseil nordique .. 480
-américain de — Union avec le Da¬
droit international.... 286 nemark . 110
-de droit interna¬ Israël
tional . 286 — Affaire de Suez
-international de (1956). 411
coopération intellec¬ — création de l’Etat
tuelle . 365,567 d’ — . 55,170
-imiSé de recher¬ fVoir Palestine, Agence
ches nucléaires juive, Jourdain, Foyer
— activités. 668 national juif, Jérusa¬
— but . 667 lem).
— composition ... 667 Italie
— structure . 667 — assistance technique 646
Institutions spéciali- — Conseil de l’Europe 452,
séos 455
— généralités 58, 532, 533, — fascisme . 318
536 — Saint Siège .. 199, 204
— O. N. U. 534, 535, 536, — S. D. N. 356, 362, 363,
546, 552 374
(Pour chaque institu¬ — U. E. 0. 473
tion, voir au sigle cor¬ — Union occidentale . 464
respondant). — unité. 34
International Law As¬
sociation . 286
Interprétation des
traités
(Voir traité). Jamaïque
Intervention — assistance tech¬
— de poiice. 306 nique . 644
— d’humanité . 306 — Commonwealth ... 192
— financière Japon
— exemples... 303-305 — commerce interna¬
— généralités . 302-307 tional . 298
— idéologique ... 301, 307 — O. C. D. E. 442
— principe de non — 300- — seconde guerre mon¬
315 diale . 311, 318
(Voir par pays). — S. D. N. 356, 362
Irak — mandat. 166
— Ligue arabe .. 515, 518 — traité
— mandat.. 166, 168, 353 — ratification .... 252
— O. P. E. P. 619 Jay (traité). 42
Iran (Voir Arbitrage).
— assistance tech¬ Jellinek. 77-78
nique . 646 Jérusalem. 170
— O. P. E. P. 619 (Voir Israël).

24. — INBTmmONS INTEHNATIONAIÆS.


738 INDEX ALPHABETIQUE

Jordanie Légitime défense


— Ligue arabe .. 515, 518 — O. T. A. N. 467
(Voir Transjordanie). —• Pacte de Varsovie . 476
Jourdain (détourne¬ — U. E. 0. 476
ment des eaux du —) 518 Lettre de provision ... 244
Justice Liban
(Voir Cour, règlement — assistance tech¬
pacifique des différends). nique . 646
— Ligue arabe .. 515, 518
— mandat . 166, 169
K Libye
— indépendance. 173
Kant. 348 — Ligue arabe. 515
Katar (principauté de) — O. P. E. P. 619
— O. P. E. P. 619 Lie (Trygve). 391
Kelsen (H.) . 255 Liechtenstein (princi¬
Kennedy (J. F.). 428 pauté de) 88, 337, 380
-Round . 612 Ligue arabe
(Voir G. A. T. T.). — Affaire de Suez.... 518
Kenya — Banque de dévelop¬
— Commonwealth ... 192 pement arabe . 517
Kiao-Tchéou. 92 — G. E. N. T. 0. 518
Kominlorm. 301 — Jourdain (détourne¬
Komintern. 301 ment des eaux). 518
Kouang-Tchéou. 92 — Membres. 515, 517
Koweït — O. N. U. 518
— Ligue arabe 515, 518 — Origines. 57, 515
— O. P. E. P. 619 — Palestine .... 170, 518
Kunz . 78, 114 — Structure 516, 574-575
Lima (Congrès de) .... 416
Lloyd (G.) . 184, 186
L Locarno (Pacte de)
— dénonciation . 49, 266
Laband. 77, 78 — dispositions.. 329, 332,
La Haye (Conférences 335
de) — historique. 48
— désarmement 33, 41, 43, Londres (traité de).. 32, 33
44, 340 Lotus (arrêt du) 278, 279
— règlement pacifique Luxemb ourg
des différends, 33, 330, 331, — Benelux 477, 478, 479
334, 336 — Conseil de l’Europe 451,
— Table ronde (Indo¬ 452, 455
nésie— Pays-Bas).... 127 — neutralité. 149
Langue diplomatique 250, — Union occidentale 460-
291 462
Lanoux (lac)
— Affaire du —. 335 M
Laos
— assistance tech¬ Madagascar
nique . 641 — protectorat français 84
— neutralité 87, 153, 249 (Voir organisations afri¬
— protectorat français 87 caines).
Latran Malaw
— accords du — 204-208 — Commonwealth ... 192
— palais du —. 201 Malaisie
(Voir Saint-Siège). — Commonwealth ... 192
LausEinne (traité de) 45, 97 Maldives (îles)
Lefur. 114 — O. N. U. 380
INDEX ALPHABÉTIQUE 739

Mali (Etat du —) Mauritanie


— Union douanière de — Union douanière de
l’Afrique de l’Ouest... 521 l’Afrique de l’Ouest... 521
— Union des Etats afri¬ Mavrommatis (Af¬
cains . 523 faire). 167
Mali (Fédération du —) 519 Médiation
Malte — origine. 42, 330
— Commonwealth 192-193 — Palestine . 170
— Conseil de l’Europe 453, (Voir Différend interna¬
455 tional f règlement).
Mandat Mehemet-Ali. 103
Mer
— Commission perma¬
nente des — 164, 167, 168, — droit d’accès à la — 627
170, 174, 177, 347 — droit de la mer 25, 38,
— exemples. 165-172 283, 297
— origine. 163 — — Noire. 156
— régime. 164 -territoriale .... 280
(Voir Sud-Ouest Afri¬ Messine (Conférence
de) . 487
cain, S. D. N-lcolonisa-
tion. Voir par pays). (Voir C. E. E. et C. E.
E. A.forigines).
Mandchoukouo Mexique
— création de l’Etat
— A. L. A. L. C. 433
du — . 49, 227 — assistance tech¬
Manille (pacte de) nique . 646
(Voir O. T. A. S. E.). Minorité. 72, 367
Manouba (AHaire de Molotov (plan) . 476
la). 292 Monaco (Principauté
Marché commun de) . 88, 380
■—• Amérique latine Mongolie extérieure
— voir A. L. A. L. C. — Conseil d’assistance
— voir O. D. E. C. A. économique mutuelle.. 448
— voir O. E. A. — O. N. U. 380, 383
— Europe Monisme . 259
— voir C. E. E. Monnede (Voir F. M. L).
(Voir aussi A. E. L. E.) Monroe (doctrine de) 35,
Mariazmes (îles) 284, 308, 414
— mandat. 166 Montevideo (traité de) 433
— tutelle. 173, 176, (Voir A. L. A. L. C.).
178 Montreux (Convention
Maroc de) . 99
— assistance tech- Moscou
nique . 646 — conférence de — .. 50
— capitulations. 98 — traité de — 59,157,161
— liberté économique 297, Moselle (Société inter¬
601 nationale de la) .... 688
— Ligue arabe 515, 518 Moyen Age
— •—• espagnol . 86 — droit international 13,
— protectorat fran- 14, 15, 16, 17
çais . ... 83, 86 — institutions juri¬
Marshall (îles) diques . 16
— mandat. 166 Nation. 69
— tutelle .. 173, 176,, 178 Nationalisation .. 328, 648
Marshall (Plan) 57, 438, Nationalités (principe
448 des) 27, 30, 32, 34, 71,
(Voir Etats-Unis). 284, 319, 327
Mauritanie (Voir droit des peuples à
— O. C. A. M. 527 disposer d’eux-mêmes).
740 INDEX ALPHABÉTIQUE

N O

Nauru Oder-Neiss (frontière) 51


— mandat. 166 Organe subsidiaire 573,686
— tutelle .. 173-175, 178 Organisation africaine
Neuilly (traité de) .... 45 et malgache decoopé-
Neutralisation pération économique
— exemples . 155 (O. A. M. G. E.) 525, 526
Neutralisme . 155 Orgeinisation de l’avia¬
Neutralité tion civile internatio¬
— exemples 147-154, 422 nale (O. A. G. I.)
— généralités .... 146-150 — fonctionnement 547, 548
— permanente ... 147-154 — historique .... 545, 546
(Voir Suisse, Belgique, — structure. 547, 548, 574,
Luxembourg, Autriche, 577, 585
Laos, etc...). Organisation Gom-
Nicaragua mune africaine et
— intervention finan¬ malgache (O. G. A.
cière au—. 304, 310 M.) . 527
— O. D. E. G. A. 429-432 Organisation de Goo-
Niger pératlon commer¬
— Conseil de l’Entente 520 ciale (O. G. G.) . 613
— Union douanière de (Voir G. A. T. T.).
l’Afrique de l’Ouest... 521 Organisation de coopé¬
Nigeria ration et de dévelop¬
— G. E. E. 506 pement économiques
— Commonwealtli ... 192 (O. G. D. E.)
Nonce . 202, 235 — Agence européenne
(Voir Agent diploma¬ pour l’énergie nucléaire 669-
tique). 672
Norvège — assistance
— A. E. L. E. 446 — économique.... 661
— assistance technique 646 — technique. 444
— Conseil de l’Europe 452, — composition. 442
455 — création . 442
— Conseil nordique .. 480 — fonctionnement 443, 444
— S. D. N. 355 — structure 443, 444, 574
— Union avec la Suède 109 (Voir O. E. C. E.).
Nouvelle Guinée 127, 162, Organisation euro¬
166, 173, 175, 178 péenne de coopéra¬
Nouvelles Hébrides .. 144 tion économique (O.
Nouvelle Zélande E. G. E.)
— assistance tech¬ — accord monétaire
nique . 641 européen. 440
— Commonwealth 180,182, — A. E. L. E. 445
187, 192 — agence européenne
— O. N. U. de l’énergie nucléaire 440,
— tutelle ... 173, 178 669, 670, 671, 672
— S. D. N. 355 — agence européenne
— traité de l’A. N. Z. de productivité. 440
U. S. 530 — composition. 439
— traité de l’Asie du — Eurochemlc .. 688, 689
Sud-Est. 531 — origines. 438
Nuremberg (tribunal — structure. 440, 575
de). 230, 341 — Union européenne
Nyassaland des paiements. 440
— Commonwealth ... 193 (Voir O. C. D. E.).
INDEX ALPHABÉTIQUE 741

Orgajiisation de l’Unité Organisation des Na¬


africaine (O. U. A.) . 529 tions Unies (O. N.U.)
— rapports avec — assistancetechnique 584,
l'O. C. A. M. 527 631-640
Organisation des Ca¬ (Voir Conseil économi¬
raïbes . 644 que et social).
Organisation des Etats — Charte
Américains (O. E. A.) — révision 387, 388, 390,
— Alliance pour le pro¬ 405
grès _ 427, 428, 429, 648 — Comité d’état-major 408
— banque interaméri¬ — Commission des
caine de développement 658 Nations Unies pour le
— Cuba droit commercial in¬
— exclusion . 425, 426 ternational . 280
— économie de TA- — Commission du
mérique latine. 429 droit international
— différend Haïti- — activités 232, 242,
Saint-Domingue . 425 248, 249, 258, 260, 267,
— historique .... 414-425 271
— charte de Bogota 423 — fonctionnement 283
— Conf. de Caracas 452 — statut .. 283, 386
— Conf. de La Ha¬ — commerce interna¬
vane . 420 tional . 601, 605, 608
— Conf de Lima .. 421 (Voir aussi Conférence
— Conf. de Monte¬ de Genève sur le — et le
video . 421 développement).
— Conf. de Rio — compétence .. 399, 578
(1965). 424 — Conseil économique
— Nicaragua . 425 et social
— O. N. U. 426 — assistance tech¬
— Saint-Domingue (in¬ nique . 630-640
tervention américaine). 426 — composition ... 390
— structure. 423,424, 574 — commissions éco¬
— réunion des mi¬ nomiques régionales 390
nistres des affaires — commerce inter¬
étrangères. 425 national . 605
Organisation des Etats — institutions spé¬
centraméricains (O. cialisées . 534, 535
D. E. G. A.) — produits de hase, 614
— structure .. 430 — Conseil de sécurité
— unification écono¬ — composition 387, 388
mique . 431, 658 — Congo_ 412, 583
— unification politique 432 — maintien de la
Organisation des Na¬ paix
tions Unies (O.N.U.) — généralités .. 406,
— Assemblée générale 407, 408, 409, 410, 413
— Bureau. 386 — organes subsi¬
— Congo... 412 diaires . 573
— organes subsi¬ — président.. 387, 577
diaires .... 393-396,573 — Suez. 411
— Président.. 386, 577 — Trieste. 160
— règlement des dif¬ — vote (procédure
férends . 395,410 de). 403, 404, 575
— structure. 386 — Conseil de tutelle
— Suez (1956).... 411 — composition 177, 178
— Vote. 386, 401, 402, — droit de pétition
575 devant le —. 347
742 INDEX ALPHABÉTIQUE

Orgamisation des Na¬ 325, 326, 328, 394, 399


tions Unies (O. N. U.) — Comité des rensei¬
— Sud-Ouest afri¬ gnements relatifs
cain . 174 aux — 323, 324, 395
— zones stratégi¬ — Tribunal adminis¬
ques . 176 tratif . 591
— Cour Internationale — Traités
de Justice — enregistrement. 253
(Voir Cour Internatio¬ ■— révision. 275
nale de Justice). — Véto
— création .. 50, 375, 376 (Voir Cl de Sécurité/
— décolonisation. Vote).
(Voir O. N. U./territoires Organisation des Na¬
non autonomes). tions Unies pour le
— droit de l’espace 59, 679 développement in¬
— droits de l’homme 344, dustriel
345 (O. N.U.D. I.) . 535
— Etats non membres 380, Organisation des pays
381, 383 exportateurs de pé¬
— financement 400-413, trole (O. P. E. P.) .. 619
579, 581, 582, 583, 584. Organisation du traité
— Fonds d’équipe¬ de l’Asie du Sud Est
ment de T — ... 535, 649 (O. T.A. S. E.)... 54.531
— force de police inter¬ Organisation du traité
nationale de l’Atlantiqpie (O.
— Chypre. 396 T. A. N.)
— Congo. 396 — C. E. E. 470
400-413 — Composition. 465
— Suez. 396-411 — Coopération écono¬
400, 411 mique . 470
— Haut-Commissariat — France
des Nations Unies pour — retrait. 471
les réfugiés. 342 — O. N. U. 466
— Membres —■ pays en voie de dé¬
— généralités. 377-378 veloppement . 470
— originaires. 378 — principes. 466
— admission 379, 380, — règlement pacifique
381, 383 des différends. 470
— retrait. 384 — structure. 467
— blocs . 382 — conseil_ 468, 577
— Palestine 170, 330, 578 — secrétaire 468,577,585
— Règlement des dif¬ — organismes ci¬
férends internationaux vils . 468
— généralités 330, 331, — organismes mi-
398, 407, 408, 409, 410 iitaires. 469
— Suez. 411 Organisation euro¬
— Congo . 412 péenne de recherches
— Rhodésie. 409 spatiales. 682
Secrétaire général Organisation euro¬
— Congo. 412 péenne pour la cons¬
— fonctions.. 391,392, truction et la mise au
413 point d’engins spa-
— statut. 391 tiaxix . 681
Secrétariat... 391,585, Organisation euro¬
586, 587, 588, 589 péenne poin- la re¬
Territoires non au¬ cherche nucléîdre
tonomes — but . 665
— généralités 323, 324, — composition. 664
INDEX ALPHABÉTIQUE 743

Org-anisation euro¬
péenne pour la re¬ P
cherche nucléaire
— historique. 664 Paciflco (affaire) . 306
— structure . 666 Pacte sunt servanda... 255
Orgemisation inter¬ Pacte
gouvemementale — Atlantique. (Voir
consultative de la na¬ O. T. A. N.).
vigation maritime — Briand-Kellog . 48, 371
(O. M. C. I.) — d’Acier. 318
— structure . 574 — de Bruxelles. 57
Organisation interna¬ (Voir Benelux).
tionale — de Locarno 48, 49, 266,
—- intergouveme¬ 329, 332, 335
mentale — de Manille .... 54, 531
— capacité juri¬ (Voir O. T. A. S. E.).
dique . 578 — de Rio. 426
— financement 579-584 (Voir O. E. A.).
— généralités 571, 572 — de la S. D. N.
— représentation . 576 (Voir S. D. N.).
— structure . 574, 577 — de Varsovie .. 53, 476
— vote . 575 — tripartite (Italie-
— non gouvernemen¬ Allemagne-Japon) .... 318
tale. 570 Pakistan
Organisation- interna¬ — assistance technique 641,
tionale du commerce 645, 646
(O. I. C.) . 608, 613 — Commonwealth 191,192,
(Voir Charte de La Ha¬ 194
vane). — Traité de l’Asie du
Orgeudsation interna¬ Sud-Est . 531
tionale du travail (O. Palestine
I. T.) — mandat. 166, 170
— fonctionnement 557, 558 — O. N. U.
— historique 549, 550, 551, — médiateur . 330, 578
552 — réfugiés. 342
— structure 554, 555, 556, (Voir Israël, Agence jui¬
574 ve, Foyer national juif).
Organisation mon¬ Pan-africanisme. 57
diale de la santé (O. (Voir Afrique).
M. S.) Panama
— fonctionnement 565, 566 — canal. 35, 264, 310
— historique 559,560,561, — Congrès de —
562 (1826) . 35,415
— structure ... 563, 564 — déclaration de —
Organisations afri¬ (1940) . 422
caines — O. D. E. C. A. 432
(Voir Afrique). Panaméricanisme 35, 57,
Oscar Chinn (Affaire) . 297 232, 414-428
Ossola (rapport) . 599 (Voir O. E. A.).
(Voir F. M. /.). Pape
Ouganda — médiation du — ... 330
— Commonwealth 192, 193 — pouvoir spirituel 200,
Organisation du traité 208
de l’Asie du Sud-Est — pouvoir temporel 198,
(O. T. A. S. E.) . . 54, 531 199, 207, 208
Opium (guerre de). 37 (Voir Saint-Siège).
Paraguay
— A. L. A. L. C. 433
744 INDEX ALPHABÉTIQUE

Paris Plébiscite 72, 109, 159, 199


— Accords de _ (Voir droit des peuples à
(1954). . 472 disposer d’eux-mêmes).
— Congrès de — PoUtis (N.). 268
(1856).... 32, 33 Pologne
Pays-Bas — Conseil d’assistance
— assistance tech- économique mutuelle 448,
nique., 644, 646 450
— Benelux. . 477-479 — S.D. N. ... 363, 374
— Conseil de l’Europe 451, (Voir frontière Oder-
452, 455 Neiss).
— Histoire. . 118-122 Population
— S. D. N. . 355 — échanges de — ... 72
— Union occidentale 460, — élément de l’Etat 68, 72
461, 462 73, 74
Pays en voie de déve¬ — généralités. 62
loppement Porkkala-Udd. 93
— assistance Port-Arthur . 92
— économique. 647-663 Porter (convention) .... 305
— technique .. 632-646 Porto lÙco. 325
— Conférence de Ge¬ Portugal
nève sur le commerce — A. E. L. E. 446
et le développement . 299, — assistance tech¬
625-630, 663 nique . 644
— généralités 621-624, 647, — Conseil de l’Europe 453
648 Postdam (conférence de) 51
—- O. T. A. N. 471 Pouvoir exécutif
Peeirl Harbour. 311 — Etat fédéral. 132
Pêcheries Pouvoir juridictionnel
— Affaires des — de — Etat fédéral. 133
l’Atlantique Nord .... 334 Pouvoir législatif
— Affaire des — nor¬ — Etat fédéral. 131
végiennes . 280 Pouvoir politique
Penn (W.). 348 — élément de l’Etat .. 75
Pérou Principauté
— A. L. A. L. C. 433 (Voh’ au nom particu¬
— assistance tech¬ lier).
nique . 646 Principe
Pétition — Cinq —. 312-313
— et tutelle. 177 — Dix — . 313
Pétrole — Dix-heuf —. 315
— généralités. 618 (Voir aussi Coexistence
— Organisation des pacifique).
pays exploitateurs de -des nationalités.
— . 619 (Voir nationalités).
Philippines Principes généraux du
— traité de l’Asie et du droit. 284, 285
Sud Est . 531 (Voir Sources du droit).
Phoques (affaire des — Prises
de la mer de Behring) 42,333 — Cour Internationale
Piraterie. 215 des —. 289
Plan Prodrdts de base 614-617,626
— de Colombo .. 641, 642 Programme des Na¬
— Fouchet . 514 tions Unies pour le
— Marshall .. 57, 438, 448 développement
— Molotov . 476 (P. N. U. D.)
— Schuman. 483 — principes. 639
— Rapacki. 157 — structure. 640
INDEX ALPHABETIQUE 745

Programme élargi République centrafri¬


d'assistance tech¬ caine
nique (P. E. A. T.) — Union des Républi¬
— financement. 636 ques d’Afrique centrale 519
— organisation... 634, 635 — Union douanière et
— principes. 633 économique de TA-
Protectorat frique centrale. 522
— généralités. 82, 83 Répiiblique sud afri¬
(Voir au nom des pays caine
protégés). (Voir Afrique du Sud).
Protocole Réserves
(Voir traitélterminolo- (Voir traité).
gie). Responsabilité inter¬
-de Genève . 48, 335 nationale . . 142, 214, 215
Provinces Unies ... 118-122 Ressortissant. 74
(Voir Pays Bas I His¬ Ressources natmelles
toire). — Commission pour la
Publication des traités souveraineté sur les — 327
(Voir traité). — souveraineté sur les
— . 327, 328, 625
Révision des traités
Q (Voir traité).
Révisionnisme_ 271-273
Question romaine 199, 204 Révolution
(Voir Saint-Siège / Ita¬ — française. 27,301
lie). — soviétique. 301
Rhin
— Confédération du 118,
R
124
— liberté de naviga¬
Rapacki (plan). 157 tion . 297
Ratification des traités — Rive gauche du — 156
(Voir traité). Rhodésie
Rebus sic stantibus — Commonwealth ... 193
(clause). 271, 272 — Conseil de sécurité . 409
(Voir traité). Roosevelt. 172
Reconnaissance Roumanie
— Comme nation .... 220 — Conseil d’assistance
— de belligérance.... 216 économique mutuelle.. 448
— de gouvernement.. 213, — Entente balkanique 436
220, 225, 226, 229 — indépendance. 32
— de facto... 217, 228 — Petite Entente.... 436
— de jure 217, 219, 228 Rousseau (Ch.) ... 78, 264
— d’insurgés.... 215, 216 Rousseau (J.-J.) . 348
— généralités .. 211, 212, Ruanda
225, 229 — création. 178
— non —. 226, 227 — O. C. A. M. 527
— tacite . 218 Ruanda-Urundi
Referendum. 159, 162 — mandat. 166
(Voir plébiscite). — tutelle... 173, 175, 178
Réforme. 21 (Voir Ruanda et Bu¬
Réfugié rundi).
— généralités . 341
— Haut Commissariat S
des Nations Unies pour Sadowa. 124
les — . 341 Saint-Domingue
Renault (L.). 349 — intervention finan¬
Réparations. 159 cière à —. 304, 310
746 INDEX ALPHABETIQUE

Saint-Domingue Selden. 25
— intervention d’hu¬ Sénégal
manité à — ... 306, 426 — Fédération du Mali 519
Saint-Germain (traité — Union douanière de
de) 45, 147, 148, 151, 344 l’Afrique de l’Ouest... 521
Saint-Siège Serbie
— activités. 208 — Indépendance .... 32
— France . 200 Servitude. 155
— Italie . 199, 204 (Voir Affaire du droit
— loi des garanties 200, de passage sur le terri¬
201, 202, 203 toire indien).
— organisations in¬ Sèvres (trfdté de). 45
ternationales . 209 Sierra Leone
— relations diploma¬ — Commonwealth ... 192
tiques . 206 Signat\xre des traités
(Voir nonce). (Voir traité).
— souveraineté. . 205, 207 Singapour
(Voir Vatican, Pape). — Commonwealth ... 193
Saint-Marin .. 88, 337, 380 — O. N. U. 380
Saint-Piérre (abbé de) 348 Smuts ^général) 163, 174,
Sainte Alliance 29, 31, 32, 353, 362, 437
301, 310 Société des Nations
Salomon (île) (S. D. N.)
— Commonwealth ... 193 — Assemblée
Salvador — composition ... 361
— O. D. E. G. A. 429-432 — vote. 366, 367
— S. D. N. 355 — codification du droit
Samoa occidental international. 282
— indépendance. 178 — colonisation
— mandat. 166 — mandats .. 164 et s.
— tutelle. 173, 175 — commerce interna¬
San Francisco (Confé¬ tional. 601, 602, 603
rence de) . 50, 376 — Conseil
Santé — compétence 369,
— communauté euro¬ 373
péenne de la —. 485 — composition 362, 363
— organisation mon¬ — vote. 366, 367
diale de la — — C. P. J. I. 46, 336, 339,
(Voir O. M. S.). 365 .
Sarre . 159, 367, 453 — création. 46, 352 :
Satellite . 62, 683,684 — fin. 49, 374
(Voir Washington! Ac¬ — financement .. 359, 579 l
cords de). — Mandat
Sécession (guerre de) 35, — origine. 163 I
40, 216 — régime. 1641
SceUe (G.). 62, 79, 112, 113, — exemples... 165-172!
115, 230 — Commission per¬
Schuman (plan). 483 manente (Voir C. P. des
(Voir G. E. C. A.). mandats).
Sécurité collective — Membres
— O. T. A. N. 467 — admission. 366 1
— pacte de Varsovie . 476 — exclusion . 357 >
— traité de l’A. N. Z. — généralités. 353,354,,
U. S. 530 356:1
— traité de l’Asie du — non originaires . 355 ;l
Sud-Est. 531 — originaires .... 3551
— U. A. M. 525 — Pacte de la —
— U. E. 0. 473 — révision. 368^
INDEX ALPHABÉTIQUE 747

Société des Nations Suède


(S. D. N.) — S. D. N. 355, 374
— Secrétariat. 364 — Union avec la Nor¬
— Règlement paci¬ vège . 109, 156
fique des différends in- Suez (canal de)
tern. 330, 335, 336, 371-374 — crise de 1956 .. 411, 518
— Traités (Voir O. N. U.).
— enregistrement 253 — liberté de passage.. 38,
— révision. 274 103
—; Union européenne. 435 Suisse
Société financière in¬ — A. E. L. E. .. 446, 447
ternationale (S. F. I.) — assistance tech¬
— activités .... 654, 686 nique . 646
— B. I. R. D. 653, 654, 688 — B. I. R. D. 652
— capital . 653 — C. I. J. 337
— composition. 653 — Conseil de l’Europe. 453,
— principes. 654 455
— structure. 653 —■ fédéralisme .. 138, 140,
Société internationale 141
de la Moselle. 688 — G. A. T. T. 612
Somalie . 173, 175, 178 — histoire : voir Con¬
Soudan fédération helvétique.
— Fédération du Mali. 519 — neutralité. 147
— Indépendance .... 144 — O. E. C. E_. 439
— Li^e arabe. 515 — S. D. N. 355, 358
— Union douanière oc¬ — traité
cidentale . 521 — ratification .... 252
Sources du droit 246, 247, Surinam.. 325
284, 276, 286, 285 Syrie
(Voir traité, coutume, — assistance tech-
principes généraux du nique.
droit, doctrine). — Ligue arabe ..- 515
Souveraineté — mandat. 166, 169
— critère de l’Etat. 65, 77,
129, 625
-sur les ressour¬ T
ces naturelles.... 327, 328
Sous-développement Tanganyka
(Voir pays en voie de — mandat. 166
développement). — tutelle ... 173, 175,178
Spaak . 445 (Voir Tanzanie).
Spitzberg (Archipel Tanger. 86, 156, 158
du). 156, 297, 601 Tanzanie
Stipulation pour autrui. 263 — Commonwealth ... 192
(Voir traité). — création. 178
Stockholm (convention Tchad
de). 109, 154, 445 — Union des Répu¬
Sucre. 615, 616, 617 bliques d’Afrique cen¬
Sud ouest africain 165, 166, trale . 519
174 — Union douanière et
Suède économique del’Afrique
— A. E. L. E.... 446,447 centrale . 522
— assistance tech¬ Tchécoslovaquie
nique . 646 — Conseil d’assistance
— Conseil de l’Europe. 452, économique mutuelle. 448,
455, 459 450
— Conseil nordique .. 480 — O. E. C. E. 439
— neutralité. 154 — Petite Entente ... 436
748 INDEX ALPHABÉTIQUE

Tegulclgalpa (traité Traité/Effets


de) . 431 — stipulation pour
(Voir O. D. E. C. A.). autrui. 263
Télécommunications — fin
— accords de Was¬ — clause rebus sic
hington . 682, 684 stantibus. 271, 272
(Voir Union internatio¬ — effets de la
nale des). guerre. 268-270
Terre-N euve — dénonciation. 266,
— Commonwealth. 180,182, 267
190 — révision ... 273-275
Territoire — généralités
— acquisition. 36 — définition.. 148,249
— élément de l’Etat.. 67 — terminologie ... 248
— Etat fédéral. 134 — traité bilatéral. 247,
— non autonome. 173, 322, 258
323, 324, 325 — traité contrat. 247,
(Voir O. N. U.). 262
— revendication. 161, 330 — traité loi. 247, 264,
Thaïlande 267
— traité de l’Asie du — traité multilaté¬
Sud-Est . 531 ral. 247, 258
Thant . 391
Thé... 615 — ratification
Tibet. 312 — Allemagne .... 252
Tiers monde. 61 — Belgique. 252
(Voir pays en voie de — Etats-Unis .... 252
développement). — France. 251
Togo . 166 — Grande Bre¬
— mandat . 166 tagne . 252
— tutelle .. 173, 175, 178 — Japon . 252
— réserve à la — 257
(Voir Ghana).
— Suisse. 252
Tonga (île)
— Commonwealth ... 193 — U. R. S. S. 252
— valeur juridique. 249,
Traité
— conclusion 251, 254
— date. 254 — réserve
— enregistrement . 253 — adhésion. 261
— forme . 250 — définition. 256
— langue .... 250, 291 — exemples ..... 257
— négociations ... 250 — ratification .... 257
— paraphe. 250 — valeur juridique 258
— ratification (Voir Sources du droit).
(Voir traitéIratifica¬
tion). — d’Ankara (1953) .. 482
— signature. 250, 254, — de l’A. N. Z. U. S. 530
257,290 — de Bagdad. 54, 518
— effets ~ de Berlin. 91, 102
— accession. 261 — de Bled. 482
— adhésion. 261 — de Bruxelles (1948). 460,
— clause de la no¬ 472 1
tion la plus favori¬ — Bryan-Chamorro 93, 331
sée. 262, 299, 609, 611 — deFès. 83,86;
— droit interne... 259, — Jay. 421
260 — de Lausanne.... 45, 97
— interprétation .. 260 — de Londres. 32, 33 i
— réserves — de Manille. 54, 531
(Voir traitéIréserves). — de Mexico. 59 '
INDEX ALPHABÉTIQUE 749

Traité Tutelle
— de Montevideo .... 433 — accords de —. 175
— de Moscou. 59,157,161 — Conseil de —
— de Neuiliy. 45 (Voir O. N. U.l Cl de
— de Saint-Germain. 45, tutelle).
147, 148, 151, 344 — fin de la —. 178
— de Sèvres . 45 — liberté économique 297
— de Trlanon.... 45, 148 — origine . 172
— de Versailles.. 45, 147, -stratégique ... 175,
148, 149, 151, 156, 158, 159, 176, 177,, 178
166, 230, 310 — territoires sous — . 173
— de Westphalle.. 20, 22, (Voir territoires non
121, 124, 250 autonomes).
— de Washin^on
(1959). 161
Tr ans j or dame
U
— Ligue arabe. 515
— mandat. 166 U. N. E. S. C. O,
(Voir Jordanie). — accord de siège ... 535
Transports — fonctionnement ... 569
— Communauté euro¬ — historique. 567
péenne des — . 485 — structure. 568, 576, 585
— C. E. E. 490 Union
Travail — personnelle
(Voir O. I. T.). — exemples.. 106, 107,
Trianon (traité de) 45, 148
194
— généralités. 105
Tribunal arbitral — réelle
mixte — exemples. 109, 110,
— en Egypte. 99 111
Triepel . 279 — généralités. 108
Trieste Union africedne et
— internationalisation. 160 malgache de coopé¬
— O. C. D. E. 439 ration économique 526
Trinité et Tobago Union do l’Europe occi¬
— assistance tech¬ dentale (U. E. O.)
nique . 644 — agence de contrôle
— Commonwealth ... 192 des armements . 475
Truman (doctrine) 53, 311 — assemblée. 474
Tunisie — conseil . 474
— assistance tech¬ — O. N. U. 473
nique . 646 — origines. 472
— Bizerte. 471 — structure . 474
— Capitulations. 98 Union des Etats afri¬
— Ligue arabe... 515, 518 cains . 523
— protectorat français. 83, Union des Républiques
85, 303 d'Afrique centrale .. 519
Turquie Union douanière et
— capitulations. 97 économique de l’A¬
— Conseil de l’Europe.453, frique centrale . 522
455 Union douanière de
— Entente balkanique 436, l’Afrique do l’Ouest. 521
482 Union européenne .... 435
— Intervention finan¬ (Voir Europe).
cière en —. 303 Union européeime des
— O. E. C. E. 439 paiements . 440
— O. T. A. N. 466 (Voir O. E. C. E.).
(Voir Empire ottoman). Union française. 125
750 INDEX ALPHABETIQUE

Union franco-britan¬ U. R. S. S.
nique . 437 — Pacte de Varsovie . 476
Union internationale — reconnaissance de
des télécommunica¬ — . 212, 217
tions (U. I. T.) — révolution . 301
— fonctionnement... 543, — S. D. N. 356, 357, 363
544 — traité
— historique. 39, 540, 541 — ratification .... 252
— structure. 542, 543, 544,
576, 585
Union monétaire
ouest-africaine. 521 V
Uzdon panaméricaine
(Voir O. E. A.jhisto-
rique).
Union occidentale Valise
— Allemagne .. 462, 464 — consuiaire. 245
— Etats Unis. 465 — diplomatique. 238, 239
— forces armées. 463 (Voir immunités diplo¬
— Italie. 464 matiques).
— origines. 460 Vandenberg. 465
— Union de l’Europe Varsovie (Pacte de)
occidentale. 473 — composition. 476
Union pour la protec¬ — origine. 53, 476
tion de la propriété — structure . 476
industrielle . 39 Vassalité
Union pour la protec¬ — Egypte. 103
tion de la propriété — Empire ottoman .. 102
littéraire et artis¬ — généralités. 101
tique . 39 Vatican
Union pour le système — Cité du —. 205, 207, 208
métrique . 39 — palais du —. 201
Union Postale Univer¬ (Voir Saint-Siège, Pape)
selle (U. P. U.) Venezuela
— historique. 39, 537, 538 — A. L. A. L. C. 433
— structure . 539 — intervention finan¬
— fonctionnement ... 539 cière au —. 305, 309
Union sur les chemins — S. D. N. 355
de fer. 39 — O. P. E. P. 619
Uruguay Verdross (A. von) 78, 114
— A. L. A. L. G_ 433 Versailles (traité de) — 45,
U. R. S. S. 147, 148, 149, 151, 156, 158,
— aide bilatérale .... 661 159, 166, 230, 310
— assistance tech¬ Vienne
nique . 646 — conférence (1961). 232,
— bicaméralisime ... 131 233, 234
— Conseil d’assistance — Congrès.. 28, 124, 296,
économique mutuelle. 448, 297, 344
449, 450 — Convention (1963). 242,
— fédéralisme .. 135,140 243, 244, 245, 283
— Institut unifié de re¬ Viêt-Nam
cherches nucléaires 667, 668 — assistance tech¬
— O. A. G. 1. 547 nique . 641
— O. I. T. 554 — élections. 87
— O. N. U. — division. 55
— Contribution fi¬ — protectorat français. 87
nancière. 400,413 Vilna . 374
— O. T. A. N. 467 Vitoria (F. de). 320
INDEX ALPHABÉTIQUE 751

Yougoslavie
W — Affaire de Suez
(1956) . 411
Washington — Entente balkanique 436,
— Accords de — 482
(1964). 683,684 — G. A. T. T. 612
— Conférence de — — Petite Entente.... 436
— (1889). 417
— (1922) _ 92, 95 Z
— Traité de —•
(1959) . 161 Zambie
Weï-Haï-Weï. 92 — Commonwealth ... 192
Westminster (statut Zanzibar
de). 187, 190 (Voir Tanzanie).
(Voir Commonwealth). Zone
Westphalie (traités de) — de libre échange
(1648) 20, 22, 121, 124, 250 (Voir A. E. L. E., A. L.
Wüson (Pt) 253, 311, 352, A. L. C.).
602 — d’influence. 145
— sterling. 194
Y (Voir Commonwealth).
— stratégique... 172, 176,
Yalta (Conférence de). 50, 178
375 (Voir tutelle).
Yemen — zones franches
— Ligue arabe .. 515, 518 — Affaire des — 263
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TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES
N. B. — Le premier chiffre renvoie au numéro, le second à la page.

Préface de la troisième édition. vii


Avant-propos. xi
Table des abréviations des organisations internationales .. xm
Table des abréviations utilisées dans la bibliographie .... xvii

INTRODUCTION
1. Sens de renseignement . 1
2 .
Sa complexité . 2
3 .
La relativité des solutions. 3
4 .
Institutions internationales et organisations interna¬
tionales . 3
5. Institutions internationales et relations internatio¬
nales . 4
6. Bibliographie . 5
7. Méthode . 13

TITRE PRÉLIMINAIRE

L’évolution du droit des gens


et des institutions internationales.
8. Le problème du cadre . 17
9. Le point de départ. Le problème de l’Antiquité. 18
10 . Le point de départ. Moyen-Age ou xvi® siècle. 19
11 . Le cadre géographique. 20
12 . Plan . 21

Chapitre Premier

LA NAISSANCE DE LA SOCIÉTÉ
INTERNATIONALE MODERNE

§ !«'. — Le Moyen Age.


13 . Le particularisme politique. 23
14 . La communauté chrétienne . 24
15 . Les deux glaives. 24
16 . Les institutions juridiques . 25
17 . Les croisades. 26

§ 2. — Les temps modernes.


18. La fin du Moyen Age . 27
.
19 Les grandes découvertes. 27
754 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES

20. La naissance du sentiment national . 28


21. La Réforme. 28
22. Les traités de Westphalie .! 29
23. Le statut de l’Europe. 30
24. Le principe d’équilibre. 30
25. Le droit de la mer . 30

Chapitre II

LE SIÈCLE DES CONQRÈS


ET L’AVÈNEMENT DE L’ÈRE INDUSTRIELLE

§ 1*L — Nouveauté et tradition.


26. Un nouveau droit public. 32
27. La Révolution française . 33
28. Le Congrès de Vienne . 33
29. La Sainte Alliance . 34
30. La fragilité de l’oeuvre de Vienne . 35
31. Le Directoire international . 35
32. Concert international et congrès . 36
33. Les mécanismes de la consultation internationale ... 37
34. Le bouleversement de l’Europe de Vienne. 38
35. Le continent américain. 38

§ 2. — L’expansion coloniale.
36. Europe et Afrique.. 40
37. L’Europe et l’Asie . 41

§ 3. — Uère industrielle.
38. L’influence des transformations économiques . 42
39. Évolution technique et institutions internationales... 43

§ 4. — La recherche de la paix.
40. Le siècle pacifique. 44
41. Les Conférences de La Haye. 44
42. Les procédures pacifiques . 45
43. L’humanisation de la guerre sur terre. 46
44. La réglementation de la guerre sur mer. 47

Chapitre III

LES TENTATIVES D’ORGANISATION


DE LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE DEPUIS 1919.

§!*'■• — Après la première guerre mondiale.


45. La Conférence de la Paix . 48
46. La création de la S. D. N. 49
47. Les faiblesses de la S. D. N. 50
48. Les problèmes de la guerre et du désarmement. 50
49. La crise de la S. D. N.. . 51

§ 2. — La seconde guerre mondiale


et l’évolution internationale depuis 1945.
50. Reconstruction . 52
TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 755

A. — Le Rétablissement de la Paix.
51. Le rétablissement imparfait . 54
52. Les problèmes allemands. 54
B. — L’Affrontement Est-Ouest.
53. La rivalité soviéto-américaine . 55
54. La guerre de Corée. 55
C. — La décolonisation
et la création de nouveaux États.
55. Moyen-Orient et Asie. 56
56. Les indépendances africaines . 57
D. — La multiplication
des Organisations internationales.
57. L’aspect politique. 58
58. Les aspects administratifs et techniques. 59
59. Le monde actuel ; atome et cosmos. 61
60. Le monde actuel : le sous-développement . 64
61. Le problème actuel : blocs de Puissances et neutra¬
lisme . 64
Bibliographie du titre préliminaire. 65

PREMIÈRE PARTIE

LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE
62. La complexité de la société internationale. 67
63. Société internationale et société inter-étatique. Le
problème du sujet de droit... 68
64. Délimitation du champ de l’étude. 69

TITRE PREMIER

Description de la société inter-étatique.


65. La méthode classique. 71
66. La méthode proposée. 72

Chapitre Premier

LA COLLECTIVITÉ ÉTATIQUE

§ l'f. — Les éléments de l’État.


67. Le territoire. 75
68. La population. 77
69. La notion de Nation. 77
70. Nation et communauté étatique. 78
71. Le principe des nationalités . 79
72. Les minorités nationales . 79
73. Le droit des peuples. 80
74. Population et habitants. 81
75. Le pouvoir politique. 82

§ 2. — Existe-t-il un critère de l’État ?


76. La notion de collectivité étatique . 82
77. Critère de la souveraineté. 82
756 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES

78
79
.. Absence
Autres critères juridiques proposés .
de critère juridique.
83
85
80 . Société internationaie et sociétés étatiques .
Bibiiographie.
85
87

Chapitre II

LE PHÉNOMÈNE DE DOMINATION :
L’IMPÉRIALISME

81. Objet de l’étude . 88

§ — Les Protectorats.
82
83
.. Variété
Caractères généraux du régime.
des protectorats .
88
89
84 . L’évolution des protectorats.
85. La Tunisie.
90
91
86. Le Maroc . 92
87. La fln des protectorats français d’Indochine.
88. Régimes spéciaux.
92
94
89. Le « protectorat de Bohême-Moravie ». 95

§ 2. — Cessions d’administration et cessions à bail.


.
90 Généralités. 95
91. Cessions d’administration . 96

..
92 Cessions à bail : les exemples caducs.
93 Cessions à bail : exemples actuels .
96
97

§ 3. — Régime des concessions et régime capitulaire.


94. Définitions. 98
95. Les concessions. 98
96. Le régime des capitulations . 98
97. Les capitulations et la Turquie . 99
98. Capitulations et protectorat. 100
99. Le problème de l’Égypte. 100
100. Les capitulations en Orient. 100

§ 4. — La vassalité.
. La notion d’État vassal.
101 101
. Exemples d’États vassaux .
102 101
. Bibliographie
103 L'évolution de la situation internationale de TÉgypte.
.
102
104

Chapitre III

LE PHÉNOMÈNE D’ASSOCIATION

104. Les associations d’États . 106

Section I. — Les Unions d’États.

§ !•'. — Les unions personnelles.


105. L’union personnelle. 107
.
106 Principaux exemples d’unions personnelles . 107
.
107 L’État indépendant du Congo . 108
TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 757
§ 2. — Les unions réelles.
108. L’union réelle . 108
109. L’union Suède-Norvège . 109
109
110. L’Autriche-Hongrie .
111. L’union Danemark-Islande. 110

Section II. — Le Fédéralisme.

..
112 Définition._•. 111
113 Les lois fondamentales du fédéralisme - 111
114. La loi de participation. 112
11 B. La loi de dédoublement fonctionnel . 113
116. Les types de sociétés fédérales. 114

5 l«r, — La confédération d’États.


117 . Définition. 114

A. — Les aspects juridiques.


.
118 Les institutions confédérales . 115
.
119 Faiblesse des institutions centrales. 116
.
120 Le partage de compétence. 117

B. — Les aspects historiques.


Précarité des Confédérations. 118
121. La confédération helvétique. 118
122
123
.. Les Provinces Unies .
La Confédération des États-Unis.
119
119
124. Le système confédéral en Allemagne. 119

C. — Confédération et Décolonisation.
.
125 L’Union française. 120
..
126 La Communauté.
127 L’Union hollando-indonésienne.
121
123

§ 2. — L’État fédéral.
Définition . 124
.
128 Les États fédéraux. 124
.
129 Critère de l’État fédéral. 125

A. — Les institutions fédérales.


130. Les institutions fédérales. 126
131. Le pouvoir législatif. 127
132. Le pouvoir exécutif. 128
133. Le pouvoir juridictionnel. 128
134. Le territoire fédéral. 129

B. — L’autonomie des États membres.


.
135 L’autonomie des États membres . 130
.
136 Les garanties de l’autonomie. 130
.
137 Les droits des États membres. 131

C. — Le partage de compétence.
138 . Le partage de compétence entre l’État fédéral et les
132
États membres.
758 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES

139 . Le partage dans le domaine des affaires intérieures_ 133


140 . Le partage dans le domaine des affaires extérieures... 134
141
142
.. L’État
Reports entre États membres et État fédéral.
fédéral et le droit international.
135
136
Bibliographie . 136

Chapitke IV

LES RÉGLEMENTATIONS

§ 1 *’■. — Le condominium.
143. Définition. 140
144. Exemples de condominium. 141
145. Zones d’influence .!.. ! ! 141

§ 2. — Neutralité et neutralisation.

A. — La Neutralité permanente classique.


146. Le régime de la neutralité. 142
147. La neutralité de la Suisse .!. ! ! ! 143
148. La neutralité de la Belgique. 143
149. La neutralité du Luxembourg . 144

B. — Les Neutralités au xx® siècle.


150. Actualité de la neutralité. 144
151. La neutralité de l’Autriche.! 145
152. La neutralité du Cambodge . 146
153. La neutralité du Laos . 146
154. La politique suédoise.!!!!!! 146
155. Neutralisme et non-engagement. 147

G. — Neutralisation et démilitarisation.
156. Exemples de neutralisation. 148
157. Démilitarisation atomique. I49

§ 3. — Les internationalisations.
158. Régimes de Tanger et de Dantzig. 152
159. Les statuts de la Sarre. 152
160. Le statut de Trieste (1947-1954) .!!!!!!!! 154
161. Une internationalisation scientifique : l’Antarctique. 154
162. L’administration temporaire de l’Irian occidental .. 155

§ 4. — Les mandats.
.
163 Origine de l’institution. I55
.
164 Le régime du mandat. 156
.
165 Les différents mandats. 157
.
166 Établissement des mandats.! 158
.
167 Le contrôle des mandats . 158
.
168 La fin des mandats. L’indépendance irakienne. 159
.
169 La fin des mandats en Syrie et au Liban. 160
.
170 Le mandat sur la Palestine. 160
.
171 La fin des mandats B et C . 162
TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 759

§ 5. — Les territoires sous tutelle.


172. Le régime de la tutelle internationale. 163
173. Les territoires sous tutelle. 164
174. Le Sud-Ouest africain. 164
175. Les accords de tutelle . 166
176. La tutelle des zones stratégiques . 166
177. Le contrôle : le Conseil de tutelle . 167
178. La fin des tutelles. 167
Bibliographie. 169

Chapitre V

LE COMMONWEALTH

.
179 La singularité du Commonwealth. 174

§ 1er. — L’évolution du Commonwealth.

A. — La période 1776-1914.
Le self-government.
180. Empire colonial et self-govemment. 175
181. La compétence des Dominions. 176
182. Les institutions impériales . 177
183. Le refus de la structure fédérale . 178

B. — La période 1914-1939.
L’égalité de statut.
184. La grande guerre . 178
185. Les traités de paix et la S. D. N... 179
186. L'Irlande. Le développement de la compétence inter¬
nationale . 180
187. L’égalité de statut . 181
188. Le mécanisme de coopération internationale. 182
189. La seconde guerre mondiale. 182

§ 2. — La strueture actuelle du Commonwealth.


190. La composition du Commonwealth . 183
191. Les nouveaux Dominions . 184
192. Du British Commonwealth au Commonwealth . 185
193. Aspect international du Commonwealth. 186
194. La notion d’association. 187
195. Les problèmes économiques. 188
Bibliographie . 189

Chapitre VI
LE SAINT-SIÈGE

196 . Églises et État . 191


197 . L’Église catholique. 191

§ 1er. — La papauté
et le pouvoir temporel jusqu’en 1870.
198 . Origine du pouvoir temporel. 192
199 . Le déclin du pouvoir temporel. 193
760 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES

§ 2. — Le régime de la loi des garanties


(1871-1929).
200 . La loi des garanties. 194
201 . Le ministère spirituel. 195
202 . Les relations diplomatiques . 196
203 . La situation juridique. 196

§ 3. — Le régime des accords du Latran


depuis 1929.
204 . Les accords . 197
205 . La Cité du Vatican . 197
206 . Les relations diplomatiques . 198
207 . La souveraineté du Saint-Siège. 198
208 . La Cité du Vatican n’est pas un État. 199
209 . Les activités internationales du Saint-Siège. 201
Bibliographie . 201

TITRE II

La vie internationale.
210 . Les rapports internationaux. 203
Plan. 204

Chapitre Premier

LA RECONNAISSANCE

211 . La notion de reconnaissance . 205

§ 1®*’. — La théorie classique de la reconnaissance.


212 . L’aspect déclaratif de la reconnaissance étatique... 206
213 . Reconnaissance et nouvel État. 207
214 . Reconnaissance et révolution. 208
215. Reconnaissance d’insurgés. 208
216 . Reconnaissance de belligérance. 209
217 . Reconnaissance de jure et reconnaissance de facto... 209
218. La reconnaissance tacite. 210

§ 2. — La pratique internationale de la reconnaissance


au cours des deux dernières guerres mondiales. ■
219. La crise de la notion d’effectivité . 211
220. La reconnaissance comme Nation. 211
221. Le problème des gouvernements en exil. 212
222. La France libre. 213
223. Le Comité français de la Libération Nationale. 213
224. Le gouvernement provisoire. 214

§ 3. — Reconnaissance et contrôle
de légalité ou de légitimité.
225. La notion de légitimité. 214
226. La légitimité « interne ». 214
227. La légalité internationale . 215
228. La non-reconnaissance « qualifiée ». 216
TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 761

229 . Reconnaissance et admission dans une organisation


internationale. 217
Bibliographie . 218

Chapitre II

LES ORGANES DES RELATIONS INTERNATIONALES

230 . Relations internationales et gouvernants. 221

§ l®»'. — Les agents diplomatiques.


231 . Origines de l’institution . 222
232 . La réglementation internationale . 222

A. — Les missions diplomatiques.


233 . Les fonctions des missions diplomatiques. 224
234 . Les chefs de mission et leur classement. 224
235 . Les missions et le corps diplomatique. 225
236 . Rôle des agents diplomatiques. 226

B. — Les immunités diplomatiques.


237. Le fondement des immunités. 227
238. La liberté des communications. 228
239. L’inviolabilité. 228
240. L’immunité juridictionnelle. 229
241. Les privilèges fiscaux. 229

§ 2. — Les relations et les fonctionnaires consulaires.


242. Les relations consulaires. 230
243. Les fonctions consulaires. 231
244. Les postes et agents consulaires. 231
245. Immunités consulaires. 232
Bibliographie . 233

Chapitre III

LES RÈGLES DE DROIT RÉGISSANT


LA VIE INTERNATIONALE

246 . Idées générales . 235

Section I. — Le traité international.


247 . Acte plurilatéral et acte unüatéral. 236
248. Terminologie. 236
249. Les accords en forme simplifiée. 237

§ l«r. — La procédure du traité.


250. L’instrumentum . 238
251. La ratification. 239
252. Les procédures de ratification. 239
253. L’enregistrement des traités. 242
254. La date des traités. 242
762 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES

§ 2. — Les effets des traités.


255. Le principe. 243
A. — Le problème des réserves.
256. La notion de réserves. 243
257. Les types de réserves. 243
258. Valeur des réserves. 244
B. — Les effets du traité à l’intérieur
de la Communauté des États signataires.
259. Les rapports du traité et de la loi. 245
260. L'interprétation du traité. 246
G. — Les effets du traité en dehors
de la Communauté des États signataires.
261. Extension de la notion de communauté des États
signataires . 247
262. La clause de la nation la plus favorisée .. 248
263. La stipulation pour autrui . 248
264. Les traités créateurs de situations objectives. 249

§ 3. — Transformation et fin des traités.


265. Aspect général du problème. 250
A. — La dénonciation unilatérale.
266. Dénonciation et abrogation. 251
267. Aspect non juridique de la dénonciation. 252
B. — Effets de la guerre sur les traités.
268. Évolution des solutions . 252
269. Hypothèses de maintien des traités. 253
270. Attitude des tribunaux . 253
G. — La clause « rebus sic stantibus ».
271. Définition. 254
272. Pratique internationale et changement de circons¬
tances . 255
D. — La révision des traités.
273. Les données du problème . 255
274. L’article 19 du pacte de la S. D. N. 256
275. Le silence de la Charte des Nations Unies. 257

Section IL — La coutume internationale.


276. Définition. 257
277. Les éléments matériels. 258
278. L’élément psychologique. 258
279. Le fondement de la coutume internationale. 259
280. Généralité de la coutume. 259
281. Rapports de la coutume et du traité. 260
282. La codification . 261
283. L’O. N. U. et la codification . 262

Section III. — Les principes généraux du droit.


Les sources subsidiaires.
284. Définition. 263
TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 763

285. Exemples de ces principes. 263


286. Autres sources. 263
Bibliographie.. 264

Chapitre IV
LES PRINCIPES POLITIQUES
REQISSANT LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

287. Société internationale et principes politiques . 269

Section I. — Le principe d’égalité des États.


288. Définition.. 270

§ 1®’. — L’égalité diplomatique.


A. — Les manifestations du principe,
a) Conférences et traités.
289. La participation aux conférences internationales ... 271
290. La signature au rang alphabétique . 272
291. La langue diplomatique. 272

b) Le problème du respect réciproque.


292. L’État et son honneur. 273

B. — Grands et petits États.


293. Inégalité de fait des États. 273
294. La notion de « petit État *. 274
295. Civilisation et « petit État » . 274
296. Politique internationale et « petits États ». 275

§ 2. —■ L’égalité économique.
297. L’égalité de traitement . 277
298. La théorie du droit au commerce. 278
299. Le principe de l’égalité relative ou de l’inégalité com¬
pensatrice. 279

Section II. —- Le principe de non-intervention.


300. Généralités. 280

§ 1®’. — Les hypothèses d’intervention.


301. Les interventions idéologiques. 280
302. Les interventions financières. 282
303. Les contrôles financiers dans le monde méditerranéen. 282
304. L’Amérique centrale. 283
305. L’affaire du Venezuela et la doctrine Drago . 283
306. Les interventions de police internationale . 284
307. Caractère de ces diverses interventions. 285

§ 2. — La doctrine de Monroe et son abandon.


308. La formule. 285
309. Les applications de la doctrine. 286
310. Les transformations de la doctrine . 287
311. Les doctrines américaines d’intervention. 288
764 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES

§ 3. — La coexistence pacifique.
.
312 Le traité sino-indien. 290
.
313 Les formulations internationales ... 290
.
314 Le sens international des principes de coejçistence... 291
.
315 La coexistence pacifique en tant que principe général
de droit international. 291

Section III. — Le principe d’indépendance.


316 . Définition . 292
§ 1er. — Relations interétatiques
et principe de V indépendance.
317. L’affirmation du principe. 293
318. La négation du principe. 293

§ 2. — Le principe d’indépendance dans le cadre étatique.


Le problème « colonial ».
319. Indépendance et droit des peuples. 294
320. La colonisation et le droit international. 295
321. Colonisation et Pacte de la S. D. N. 296
322. Le problème colonial et la Charte de l’O. N. U. 296
323. La pratique de l’Organisation. 297
324. Le territoire non autonome. 297
325. L’évolution des territoires non autonomes. 299
326. La résolution du 14 décembre 1960. 300

§ 3. — L’indépendance économique.
327. La souveraineté sur les ressources naturelles. 301
328. La déclaration de 1962. 302
Bibliographie . 304

Chapitre V

LE RÈGLEMENT DES CONFLITS

329 . Les modes pacifiques de règlement des conflits .. 308

§ 1 er. — Res solutions à portée non obligatoire.


330 . Bons offices et médiation. 309
331 . L’enquête. 310
332 . La conciliation . 311

§ 2. — Les solutions à portée obligatoire.

A. — L’Arbitrage.
333 . L’Arbitrage isolé et son évolution . 313
334 . L’Arbitrage obligatoire . 313
835 . Transformation de l’arbitrage. 314

B. — Le règlement judiciaire.

336 . Les difficultés. 314


337 . La Cour internationale de justice. 315
TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 765

338. Compétence de la Cour. 316


339. Problèmes actuels de la juridiction internationale.... 316
Bibliographie . 317

Chapitre VI
L’INDIVIDU DANS LA SOCIÉTÉ INTER-ÉTATIQUE

L’individu et le droit international.

340. L’individu et les groupes. 321


341. Le réfugié. 322
342. Valeur et portée des réglementations internationales.. 322
343. Les réglementations classiques protégeant les indi¬
vidus . 323
344. La Déclaration universelle des droits de l’homme. 324
345. Les Pactes internationaux des droits de l’homme.... 324
346. La Convention européenne des droits de l’homme.... 326
347. L’accès des particuliers aux juridictions internatio¬
nales . 327
Bibliographie . 329

DEUXIÈME PARTIE

LA SOLIDARITÉ INTERNATIONALE
PREMIÈRE SOUS-PARTIE
LES ORGANISATIONS INTERNATIONALES

348. Les aspects doctrinaux. 335


348. Les tentatives véritables. 336
350. Les apects actuels. 336
351. Organisations internationales et organisations supra¬
nationales . 336
Plan de l’étude. 337

TITRE PREMIER

Les organisations universeiles


à connpétence étendue.
Définition. 339

Chapitre Premier

LA SOCIÉTÉ DES NATIONS

352. Histoire. 341

§ 1®'. — L’association de gouvernements.


A. — Association de gouvernements.
353. La notion de Membre... 342
354. La représentation gouvernementale. 343
B. — L’aspect volontaire et la tendance universaliste.
355. La tendance universaliste. 343
766 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES

356. Le caractère volontaire. 344


357. Les limites de l’aspect volontaire : l’exclusion. 344

G. — Association de caractère égalitaire.


358 . Égalité des obligations. 344
359 . Les obligations financières. 345
360 . Égalité des droits. 345

§ 2. — La Société des Nations,


organisme international.
.
361 L’Assemblée. 345
.
362 Le Conseil . 346
.
363 Les transformations du Conseil . 346
.
364 Le Secrétariat. 347
.
365 Autres organismes . 347

§ 3. — La Société des Nations, mode d’organisation


de la société internationale.
A. — La Société des Nations n’est pas un Super-État.
366 . Les délibérations. 348
367 . Portée des délibérations. 348
368 . Le problème des ratifications. 349
369 . La compétence exclusive. 349

B. •— La Société des Nations, mode d’organisation


de la société internationale.
370 . Le système politique de la S. D. N. 350
371. La guerre et la S. D. N. 350
372 . Les procédures pacifiques . 350
373 . Les sanctions. 351
374 . L’activité de la S. D. N. 351
Bibliographie. 352

Chapitre II

L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES

375 . Histoire . 353


376 . La Conférence de San-Francisco . 354
Plan . 355

Section I. — L'association d'États


à tendance universelle.

§ 1 — L’aspect inter-étatique.
377 . Le caractère intergouvememental. 355
378 . La notion de membre. 355

§ 2. — La tendance universaliste.
379 . La procédure d’admission . 356
380 . La pratique des admissions. 356
381 . Le problème de la Chine. 357
382 . L’aspect universel. 359 >
TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 767

§ 3. — L'aspect volontariste.
383. L’entrée . 359
384. Le retrait.!!!...! 359

Section II. — La structure interne.


385. L’organisation générale. 362

§ — Organisation prévue par la charte elle-même.


386. L’Assemblée générale. 363
387. Le Conseil de sécurité. 364
388. L’élection des membres non permanents. 365
389. Le Conseil de tutelle. 366
390. Le Conseil économique et social. 366
391. Le Secrétaire général . 367
392. Le caractère du Secrétariat général. 368

§ 2. — Les transformations de structure depuis 1946.


393. La Petite Assemblée. 370
394. Le Comité des renseignements. 370
395. Union pour le maintien de la paix. 370
396. Organes subsidiaires. 37I

Section III. — Le fonctionnement do l’O. N. U.


La Société Internationale organisée.

§ 1 — Les buts et les principes.


397. Les buts . 372
398. Les principes. 372
399. La compétence nationale. 373
400. Le principe de l’égalité souveraine. 374

§ 2. — Les délibérations et les mécanismes de vote.


401. Les délibérations. 375
402. Le vote de l’Assemblée générale. 376
403. Le vote au Conseil de Sécurité. 377
404. L’exercice du « veto ». 373
405. La révision de la Charte. 379

Section IV. — L’O. N. U. et le maintien de la paix.


406. Le maintien de la paix. 381

§ 1 ®'’. — Le rôle du conseil d’après la Charte.


A. — Les Procédures de règlement pacifique.
407. Le règlement pacifique des différends. 381

B. —■ L’action coercitive.
408. L’action coercitive du conseil. 382
409. Le caractère de l’action coercitive. 383

§ 2. — Les opérations de police inlernationale.


410. La résolution 377 (V). 384
768 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES

411. L’affaire de Suez et la force internationale d’urgence 385


412. L’affaire du Congo . 386
413. Les difficultés financières. 388
Bibliographie. 389

TITRE II

Les organisations de caractère continental


ou régional.

SOUS-TITRE PREMIER

Le continent américain.

Chapitre Premier

L’OROANISATION DES ÉTATS AMÉRICAINS

§ Ier. — Les origines historiques.


414. La politique de solidarité continentale. 397
41 B. Les tentatives de Bolivar. 397
416. Les tentatives du Pérou. 398
417. Les réalisations des États-Unis. 398

§ 2. — L’histoire de l’Union panaméricaine.


418. Les débuts de l’Union panaméricaine. 398
419. L’évolution de l’Union . 399
420. La conférence de La Havane . 400
421. Les conférences postérieures.. 400
422. La procédure particulière des conférences facultatives. 401

§ 3. — L’organisation des États américains.


A. — Le plan institutionnel.
Le système de Bogota.
423. L’Organisation des États américains. 402

Le système de Rio.
424. La réforme de l’Organisation des États américains ... 404

B. — Le plan politique.
425. Les prises de positions politiques. 404
426. Les procédures pacifiques. 406

C. — Le plan économique.
Avant la Conférence de Rio.
427. L’Alliance pour le progrès. 407
428. La Charte de Punta del Este. 408

La Conférence de Rio (1965) et l’évolution postérieure.


429. L’Acte économique et social 410
TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 769

Chapitre II
LES ORGANISATIONS INTERAMÉR ICA INES PARTICULIÈRES

Section I. — L’Organisation des États centre-américains.

430. Structure de l’Organisation. 413


431. L’unification économique. 413
432. La Convention du 12 décembre 1962 . 414

Section II. — L’Association latino-américaine de libre commerce.

433. Le traité de Montevideo. 414


Bibliographie du sous-titre premier. 416

SOUS-TITRE II
Le continent européen.

434. Le particularisme européen. 417


LES tentatives ANTÉRIEURES A 1939
435. L’Union européenne. 418
436. Les ententes régionales . 419
LES ORGANISATIONS EUROPÉENNES APRÈS 1946
437. Perspective d’ensemble . 419
Plan. 421
Bibliographie . 421

I. LES ORGANISATIONS INTERNATIONALES

Chapitre Premier

LES ORGANISATIONS EUROPÉENNES


DE CARACTÈRE ÉCONOMIQUE

Section I. — L’Organisation européenne de coopération écono¬


mique et l’Organisation de coopération et développement écono¬
miques.
§ 1«. — U O. E. C. E.
438. Les origines. 424
439. Composition. 425
440. Structure et évolution. 425
441. Œuvre de l’Organisation. 426

§ 2. — L’O. C. D. E.
442. La création de l’O. C. D. E. 426
443. Structure et fonctionnement. 427
444. Le Comité d’aide au développement . 427

Section IL — L’Association européenne de libre échange.


445. Origines de l’Association . 428
446. La Zone de libre-échange. 429
447. Les institutions. 430
26. — INSTITUTIONS INTEKNATIONALES.
770 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES

Section III. — Le Conseil


d’assistance économique mutuelle (Comecon).
448. Historique . 431
449. Structure . 432
450. Les organes et activités techniques . 432
Bibliographie. 434

Chapitre II

L’ORGANISATION POLITIQUE :
LE CONSEIL DE L’EUROPE

451. Les origines historiques . 437


452. L’opposition des thèses . 437
453. Le statut . 438
454. Le Comité des Ministres . 439
455. L’Assemblée consultative, sa composition . 440
456. L’Assemblée consultative, son rôle . 441
467. Évolution du Conseil de l’Europe . 441
458. Le Secrétariat . 442
459. L’œuvre du Conseil. 442
Bibliographie. 444

Chapitre III

LES ORGANISATIONS EUROPÉENNES A COMPÉTENCE


POLITICO-MILITAIRE

Section I. — L’Union occidentale.


460. Origines historiques. 445
461. Les principes directeurs. 446
462. La structure. 446
463. Les organismes militaires . 447
464. Évolution de l’Union . 447

Section II. — L’Organisation du Traité


de l’Atlantique Nord (O. T. A. N.).
465. Composition. 449
466. Les principes directeurs du traité . 450
467. La structure. 451
468. Les organismes civils. 451
469. Les organismes militaires . 452
470. La coopération non militaire . 453
471. Le retrait de la France de l’Organisation . 453

Section III. — L’union européenne occidentale.


472. Les accords de Paris. 455
473. La transformation du traité de Bruxelles. 455
474. L’Organisation de l’Union de l’Europe occidentale ... 456
475. L’Agence de contrôle des armements . 457

Section TV. — Le système du Bloc oriental.


476. Le traité de Varsovie. 458
Bibliographie .. 459
TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 771

Chapitre IV

LES ENTENTES RÉGIONALES

§ l®^ — Le Bénélux.
477. Évolution du Bénélux. 462
478. Les institutions du Bénélux. 463
479. Dispositions générales. 464

§ 2. — Le Conseil nordique.
480. Les origines. 465
481. Structure et compétence du Conseil. 465

§ 3. — L’Entente balkanique.
482. Le traité de Bled . 467
Bibliographie. 468

II. LES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Chapitre Premier

LES COMMUNAUTÉS

Section I. — Histoire des communautés.


§!*'■. — La Communauté européenne
du charbon et de l’acier.
483. Les circonstances . 471
484. Le Marché commun. 472
485. L’exemple de la C. E. C. A. 473
§ 2. — La Communauté européenne de défense.
486. Le problème du réarmement allemand. 473
§ 3. — Les traités de Rome (1967).
A. — La Communauté économique européenne.
487. La « relance européenne » . 475
Le Marché Commun.
488. L'Union douanière. 476
Les politiques communes
489. La politique agricole commune. 477
490. Les autres politiques communes. 479

B. — La Communauté européenne atomique.


491. L'Euratom. 479

Section II. — Les structures Institutionnelles.

§ 1*L — Les organes d’action.


LE RÉGIME PRIMITIF DES TRAITÉS

A. — Les organes « nouveaux ».


492. La Haute Autorité. 481
493. Les Commissions. 482

26*. — DJSTITOTIONS INTERNATIONALES.


772 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES

B. — Les organes « classiques ».


494. Le Conseil spécial des ministres . 482
495. Le Conseil de la C. E. E. 483

C. — L’élaboration des règles de droit.


496. Les diverses règles . 485
497. La collaboration. 485
LE TRAITÉ DU 8 AVRIL 1965
498. La fusion. 486

§ 2. — Les organes de contrôle.


A. — L’Assemblée.
500. Structure de l’Assemblée. 488
499. Rôle de l’Assemblée. 489

B. — La Cour de justice.
501. La Cour de justice . 489

§ 3. — Les organes de gestion.


502. Agence de l’Euratom. 490
503. Les organismes de gestion du Marché commun. 490

Section III. — L’extension des Communautés.

§ 1 — Les formules d’association.


504. L’association C. E. C. A.-Royaume-Uni . 492
505. L’association au Marché commun .493
506. L’association des États africains . 494
§ 2. — L’adhésion.
507. La demande d’admission du Royaume-Uni. 495
508. Les négociations. 496
Bibliographie. 497

Chapitre II
LES TENTATIVES
D’UNE COMMUNAUTÉ POLITIQUE

Section I. — La communauté politique


européenne (1952-53).
509. Le problème de l’autorité politique. 502
510. L’Assemblée ad hoc. 503
511. L’échec de la Communauté politique . 504

Section IL — L’Union d’États (1961).


512. L’Europe des patries . 504
513. Les plans de 1961 . 505
514. L’Union d’États. 505
Bibliographie . 506
TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 773
SOUS-TITRE III

Les autres continents.

Chapitre Premier

LA LIQUE ARABE

B15. Origines et composition de la Ligue . 511


516. Aspect institutionnel . 512
617. Les rapports entre Etats membres. 513
518. La politique de la Ligue arabe . 513
Bibliographie. 515

Chapitre II
LES ORGANISATIONS AFRICAINES

I 1«'. — Les regroupements régionaux.


519. Les tentatives de fédération. 517
520. Le Conseil de l’Entente. 517
521. Union douanière de l’Afrique de l’Ouest. 518
622. Union douanière et économique de l’Afrique centrale 518
623. L’Union des Etats africains. 518

§ 2. — Les regroupements continentaux.


524. Les groupes de Casablanca et Monrovia. 520
525. L’Union africaine et malgache. 520
526. L'évolution vers l’U. A. M. C. E. 521
B27. L’Organisation commune africaine et malgache. 522

§ 3. — Les tentatives pan africaines.


528. L’Organisation interafricaine et malgache. 522
529. L’Organisation de l’Unité africaine . 523
Bibliographie . 524

Chapitre III

LES ORGANISATIONS
DES PACTES D’ASSISTANCE DU PACIFIQUE

530. Le traité de l’A. N. Z. U. S. 526


531. L’Organisation du traité de l’Asie du Sud-Est. 526
Bibliographie. 528

TITBE III

Les organisations spécialisées.

532. La tendance organisatrice. 529


533. La S. D. N. et les bureaux internationaux. 530
534. L’O. N. U. et les institutions spécialisées. 531
535. L’antonomie des institutions spécialisées. 532
536. Institutions et organisations spécialisées . 533
Bibliographie. 534
774 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES

Chapitre Premier

LES INSTITUTIONS SPÉCIALISÉES DU DOMAINE


DES COMMUNICATIONS

Section I. — L'union postale universelle.


B37. La poste au point de vue international. 535
638. Vers l’organisation internationale . 536
639. Structure de TUnion . 536

Section II. — L’union internationale


des télécommunications.
640. L’Union télégraphique internationale. 537
641. L’Union radiotélégraphique internationale. 538
642. L’Union internationale des télécommunications. 539
643. Structure de l’Union . 540
644. Les Comités. 541

de l'aviation civile internationale.


646. La Convention de 1919 . 542
646. La conférence de Chicago . 543
647. Structure de l’O. A. C. I.. 543
648. La Commission de la navigation aérienne. 545
Bibliographie. 545

Chapitre II
LES INSTITUTIONS SPÉCIALISÉES
CONCERNANT LA PROTECTION DE L’ETRE HUMAIN

Section I. — L’Organisation internationale


du travail (O. I. T.).
649. La protection des travailleurs. 547
660. L’Association internationale. 548
661. La conférence de la paix. 549
662. L’Organisation internationale du Travail et la S. D. N. 549
663. Structure de l’O. I. T. 550
664. La Conférence générale . 551
656. Le Conseil d’administration. 552
666. Le Bureau international du Travail . 553
667. La « législation * internationale . 553
668. L’activité de TO. I. T. 554

Section II. — L’Organisation mondiale


de la santé (O. M. S.).
669. La défense sanitaire. 555
660. Les conférences internationales . 555
661. Les organismes internationaux. 556
562. La création de l’O. M. S. 557
663. La composition de l’O. M. S. 557
664. La structure. 558
666. Le fonctionnement. 559
666. La « législation » sanitaire internationale. 559
TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 775

Section III. — L’organisation des Nations Unies pour l’Éducation,


la Science et la Culture (U. N. E. S. C. 0.)>
567. La coopération intellectuelle internationale. 561
568. La structure. 562
569. Activité de l’U. N. E. S. C .0. 563
Bibliographie. 564

TITRE IV

Caractères généraux
des organisations internationaies.

Chapitre Premier

NATURE ET DÉVELOPPEMENT
DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES

§ — La diversité des organisations.


570. Les organisations non gouvernementales. 569
571. Les organisations intergouvemementales. 570

§2. — La complexité des organisations gouvernementales.


572. Les textes. 571
573. Les organes subsidiaires. 572

§ 3. — L’évolution institutionnelle.
574. Égalité et structure . 574
575. Égalité et délibérations. 575
576. La représentation au sein de l’organisation interna¬
tionale . 576
577. La présidence des organes. 577
Bibliographie. 578

Chapitre II
LES MOYENS DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES

578. La capacité juridique. 580

§ 1 er. — Le budget des Organisations internationales.


579. Les contributions des États membres. 581
580. Organisations internationales et pouvoir fiscal . 583
581. Autres ressources . 583
582. Les dépenses . 584
583. Les dépenses obligatoires. 585
584. Les contributions volontaires . 587

§ 2. — Les fonctionnaires internationaux.


A. — Définition du fonctionnaire international.
585. Le fonctionnaire international . 588

B. — Statut des fonctionnaires internationaux.


a) la nomination et répartition
586. Nomination. 589
587. La répartition géographique. 590
776 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES

b) la situation du fonctionnaire international.


588. Les obligations du fonctionnaire international . 591
589. Les droits des fonctionnaires internationaux. 592
590. Les privilèges et immunités . 592
591. Les garanties du fonctionnaire international. 592
Bibliographie . 593

DEUXIÈME SOUS-PARTIE
LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE

TITRE PREMIER
Le commerce international.

Chapitre I
LA COOPÉRATION MONÉTAIRE INTERNATIONALE

502. Le Fonds monétaire international. 601


593. Activité et rôle du Fonds. 602
504. Convertibilité. 603
595. Parité. g04
506. Tirages sur le Fonds. 604
597. Les ressources du Fonds. 605
598. L’accord des Dix. 605
599. La réforme du système monétaire international. 606
Bibliographie. 610

Chapitre II
LA LIBERTÉ COMMERCIALE

600. Aspect historique . 611


601. Les dispositions conventionnelles. 612
§ 1 *'■. — La crise de la liberté commerciale avant 1946.
602. La situation avant 1914 et son évolution. 613
603. Les tentatives de 1919 à 1939 . 613
604. La deuxième guerre mondiale. 615
605. La Charte des Nations Unies . 616
S 2. — Les tentatives contemporaines de rétablissement
de la liberté commerciale.
A. — La charte de La Havane.
606. Les conférences de Londres et de Genève. 617
607. La conférence de La Havane .. 618
,608. La charte de La Havane. 618
B. — Le G. A. T. T.
609. Le succès de l’Accord général. 620
610. Les principes du G. A. T. T. 620
611. L’assouplissement de la non-discrimination . 622
612. L’évolution du système du G. A. T. T. 624
613. L’évolution institutionnelle. 625
Bibliographie. 626
TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 777
Chapitre III
LA RÉGLEMENTATION DE CERTAINS PRODUITS

Section I. — Les produits de base.


614. Réglementation générale. 629
615. La réglementation par produits . 630
616. Les buts des accords . 631
617. Les mécanismes utilisés. 632
Section IL — Les matières énergétiques.

618 . Le pétrole. 634


619 . L’Organisation des pays exportateurs de pétrole .... 636
620 . Le charbon. 637
Bibliographie. 637

TITRE II
Institutions internationales et développement.
621. Sous-développement et démographie. 640
622 . Sous-développement et structures économiques .... 641
623 . Sous-développement et consommation. 641
624 . L'aide aux pays sous-développés . 642
Bibliographie. 643

Chapitre Premier

COMMERCE ET DÉVELOPPEMENT

§ Ier. — 2.es principes de Genève.


625 . Les principes généraux. 646
626 . Les principes particuliers. 647
627 . Pays sans littoral. 648

§ 2. — Les aspects institutionnels.


628 . La Conférence sur le commerce et le développement. 648
629 . Le Conseil. 649
630 . Fonctionnement et vote. 650
Bibliographie. 651

Chapitre II
L’ASSISTANCE TECHNIQUE

S l*r. — L’assistance technique et l’O. N. U.


631. Développement économique et Nations Unies. 652

I. Le système initial.
Le programme primitif.
632 . Le programme primitif d’assistance technique . 653

II. L’extension de l’assistance.


A. — Le programme élargi.
633 . Les principes du programme élargi. 655
634 . L’organisation du programme élargi. 656
778 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES

635 . Accords de base. 656


636 . Financement. 657

B. — Le Fonds spécial.

.
637 Principes généraux du Fonds spécial. 658
.
638 Fonctionnement du Fonds. 658

III. L’uniflcation de l’assistance élargie.


Le programme des Nations Unies pour le déoeloppement.
.
639 Principes du P. N. U. D. 659
.
640 Structures. 660

§ 2. — Autres formes d’assistance technique.

A. — Les assistances techniques régionales.


641. Le plan de Colombo. 661
642 . Les organes . 661
643 . L'Amérique latine. 662
644 . Les organisations régionales de coopération tech¬
nique . 662

B. — Les assistances bilatérales.


645 . L’assistance bilatérale des États-Unis . 665
646 . Les assistances bilatérales d’autres États. 666
Bibliographie . 667

Chapitre III
L’ASSISTANCE ÉCONOMIQUE

647. Les investissements du point de vue des pays bénéfi¬


ciaires . 668
648. Les investissements privés . 669

§ 1®''. — Investissements et organismes internationaux.


I. LES ORGANISMES DE CARACTÈRE GÉNÉRAL.

A. — L’O. N. U. et les Fonds spéciaux.


649 . — Le Fonds d’équipement des Nations Unies. 671

B. — La B. I. R. D.
.
660 La banque et sa structure. 672
661. Les buts et les principes. 673
.
662 L’activité de la banque. 674

C. — La Société financière internationale.


663 . Création et structure . 675
664 . Principes directeurs . 675
D. — L’Association internationale de développement.
656. Création et structure de l’Association. 677
666. Buts et principes. 678
TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 779
IL LES ORGANISMES RÉGIONAUX.

.
657 La Banque européenne d’investissement. 679
658. La Banque interaméricaine de développement . 680
659. Les Banques africaine et asiatique. 681

§ 2. — Les aides économiques et financières bilatérales.


.
660 Les distinctions théoriques. 682
661. Les politiques d’aide bÛatérale. 682

§ 3. — Aspects généraux de l’ensemble des aides.


662. Les composantes de l’apport total. 684
663. L’effort d’aide et la théorie du 1 %. 684
Bibliographie . 688

TITRE III
Coopérations techniques
et gestions communes.

Chapitre Premier
ORGANISATIONS INTERNATIONALES ET TECHNIQUES
PROPRES AU XX* SIÈCLE

Section I. — La coopération « atomique».

§!««■. — Les organisations « régionales *.


A. — L’Organisation européenne
pour la recherche nucléaire.
.
664 Historique . 696
.
665 Le but de l’Organisation. 696
666. Structure . 697

B. — L’Institut unifié de recherches nucléaires.


667 .Création. 698
668. Activités. 698

C. — L’Agence européenne pour l’énergie nucléaire.


669. Origines . 699
670. Structure . 699
671. Objets et fonctions. 700
672. Règles juridiques et contrôle de sécurité . 700

D. — Euratom.
673 . Missions de l’Euratom. 701
674 . L’approvisionnement et l’Agence. 702

J 2. — L’Agence internationale de l’énergie atomique.


675 . Historique . 703
676 . Structure . 704
677 . Financement. 706
678 . Buts et activités. 706
ySo TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES

Section II. — La coopération spatiale.

I. La coopération mondiale.
679 . La coopération intergouvemementale . 707
680 . La coopération purement scientifique . 708

II. La coopération européenne.


681 . Le lancement d’engins . 709
682 . Les recherches spatiales. 710

III. La coopération et les satellites de télécommunications.


683 . Les accords de Washington. 710
684 . La portée de la coopération. 711
Bibliographie .| ’ 712

Chapitre II

LES ORGANISMES INTERNATIONAUX DE GESTION

fl®''. — La diversité des « gestions ».


685 .
La diversification des activités. 716
686. La diversification des organismes. 717

§ 2. — Les problèmes juridiques des « gestions ».


687. La personnalité juridique. 719
688. Nature juridique.| 719
688. Régime juridique de l’organisme.! 721
Bibliographie . 722

Table alphabétique. 723


Table analytique.;. 753

602o

IMPRIMÉ EN FRANCE
2190-1967. — Tours, lmp. Marne.
Dépôt légal : 3® trimestre 1967.
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Date Due
JX 1954 .C56 1967 010101 000
Colliard, Claude Albert.
Institutions internatioiiales

63 0 57705 6
TRENT UNIVERSITY

JX1954 .C56 1967


Colliard, Claude Albert
Institutions internationales

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HISTOIRE DES INSTITUTIONS PUBLIQUES

INTRODUCTION A L’ÉTUDE DU DROIT DES


PERSONNES

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