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INSTITUT DE FORMATION EN MASSO-KINESITHERAPIE DE RENNES

LA TECHNIQUE DE PERFETTI AU SEIN DE LA


REEDUCATION DU MEMBRE SUPERIEUR DU
PATIENT HEMIPLEGIQUE :

UN OUTIL RAREMENT MAITRISE

Oriane LE DÛ

Année scolaire 2009/2010

Selon le code de la propriété intellectuelle, toute reproduction intégrale ou partielle faite


sans le consentement de l'auteur est illicite.
Ministère de la Santé et des sports

Région Bretagne

Institut de Formation en Masso-Kinésithérapie de Rennes

LA TECHNIQUE DE PERFETTI AU SEIN DE LA


REEDUCATION DU MEMBRE SUPERIEUR DU
PATIENT HEMIPLEGIQUE :

UN OUTIL RAREMENT MAITRISE

Travail Personnel présenté par :

Oriane LE DÛ

En vue de l’obtention du Diplôme d’Etat de Masseur-Kinésithérapeute

Année scolaire 2009/2010


Directeur de mémoire :

Gaël PIETTE, Cadre de Santé Formateur, IFMK de Rennes


SOMMAIRE :

RESUME ET MOTS-CLES

INTRODUCTION......................................................................................................................... p.1

I. RAPPELS ANATOMOPHYSIO-PATHOLOGIQUES................................................ p.3


• Neurophysiologie du contrôle moteur............................................................................. p.3
• L’hémiplégie.......................................................................................................................p.4
• Neuroanatomie de la voie pyramidale..............................................................................p.6
II. CONCEPT ET DESCRIPTION DE LA METHODE DE PERFETTI.......................p.7
• Exercices du premier degré..............................................................................................p.9
• Exercices du second degré..............................................................................................p.10
• Exercices du troisième degré..........................................................................................p.11
III. MISE EN PLACE DU QUESTIONNEMENT.............................................................p.12
• Questions préliminaires...................................................................................................p.12
• Problématique..................................................................................................................p.13
• Hypothèses........................................................................................................................p.13
• Méthodologie de réponse.................................................................................................p.13
IV. ANALYSE DES RESULTATS.......................................................................................p.14
• Questionnaire....................................................................................................................p.14
• Recherche et analyse documentaire................................................................................p.17
o Validation scientifique..........................................................................................p.17
o Arguments favorables...........................................................................................p.21
o Limites de la technique.........................................................................................p.23

CONCLUSION..............................................................................................................................p.24

DISCUSSION.................................................................................................................................p.25

BIBLIOGRAPHIE

ANNEXES
RESUME :

Le sujet présenté dans ce travail porte sur la rééducation du membre supérieur du patient
hémiplégique grâce à la technique mise en place par le Professeur Carlo Perfetti dans les années
soixante-dix. Ce travail a pour objectif de déterminer les raisons pouvant expliquer la faible
utilisation de cette méthode par les kinésithérapeutes lorsqu’ils prennent en charge des patients
atteints d’hémiplégie. Afin de tenter d’apporter des réponses satisfaisantes à cette question, un
questionnaire a été réalisé (auprès de kinésithérapeutes amenés à prendre en charge ces patients)
ainsi qu’une revue de littérature. Cette démarche a permis de mettre en avant le fait qu’aucune étude
n’a été réalisée dans le but de prouver que la technique de Perfetti est efficace ou ne l’est pas. Cette
méthode de rééducation n’est donc pas validée scientifiquement à l’heure actuelle, ce qui peut
permettre de répondre en partie à la question posée. D’autres éléments de réponse tels que le peu de
kinésithérapeutes formés, la complexité de la technique et ses limites très nombreuses ont été mis en
évidence grâce au questionnaire.

MOTS-CLES :

Perfetti

Hémiplégie / Hemiplegia

Processus cognitif / Cognitive process

Rééducation sensorimotrice / Sensorimotor rehabilitation


INTRODUCTION :

Le travail présenté ici se situe dans le cadre général très vaste de la neurologie centrale et va
s’intéresser particulièrement à une des pathologies qui y est rencontrée : l’hémiplégie. En effet, ce
mémoire va aborder le thème de la rééducation du membre supérieur du patient hémiplégique au
travers d’une des méthodes potentiellement utilisables : L’exercice thérapeutique cognitif décrit par
le Dr Perfetti dans son ouvrage « L’exercice thérapeutique cognitif pour la rééducation du patient
hémiplégique ».

Le sujet de ce travail porte principalement sur la validation de cette technique de rééducation et


sur l’utilisation qu’en font les kinésithérapeutes dans la prise en charge du membre supérieur de
leurs patients hémiplégiques.

Le choix de ce sujet à été déterminé par l’expérience personnelle acquise lors des stages au cours
des trois ans de formation à la masso-kinésithérapie à l’Institut de Formation en Masso-
Kinésithérapie (IFMK) de Rennes. Plusieurs de ces stages ayant été effectués en services de
neurologie (en centre de rééducation ou à l’hôpital), il m’est arrivé de voir des kinésithérapeutes
utiliser la « Malette de Perfetti » lors de leurs séances avec certains de leurs patients hémiplégiques.
N’ayant pas eu de cours ni de renseignements au sujet de cette technique avant la réalisation de ces
stages, j’ai donc interrogé ces kinésithérapeutes afin de savoir en quoi consistait cette technique et
quels en étaient les buts. Les réponses obtenues furent évasives, imprécises et je me suis rendu
compte que certains n’avaient qu’une vague connaissance de cette méthode rééducative. Après
avoir trouvé quelques renseignements je me suis rendue compte que certains ne l’utilisaient pas
dans le bon but ni de la bonne façon, la plupart ne savaient pas qu’il existait des exercices décrits
ainsi qu’un protocole de progression.

Le fait de vouloir cibler ce travail sur la prise en charge du membre supérieur est venu après
quelques recherches et l’observation, dans de nombreuses publications, d’une information
importante. Il semble qu’après avoir subit un Accident Vasculaire Cérébral (AVC), environ 80%
des patients remarchent alors que seulement 25 à 45% peuvent réutiliser leur membre supérieur
dans les activités de la vie quotidienne. Or la technique de Perfetti est tout de même principalement
axée sur la récupération du membre supérieur.

Tout ceci a permis d’aboutir à une question de départ : Pourquoi cette technique est-elle très
connue de nom, mais si peu utilisée et rarement comme le décrit Perfetti ?

1
Pour tenter de répondre à cette interrogation, deux outils vont être utilisés et exposés dans ce
travail. Tout d’abord un questionnaire réalisé auprès de kinésithérapeutes prenant en charge des
patients hémiplégiques. Puis une revue de littérature effectuée à partir de diverses bases de données
et permettant une synthèse des informations actuellement disponibles sur ce sujet.

2
I. RAPPELS ANATOMOPHYSIO-PATHOLOGIQUES :

• Neurophysiologie du contrôle moteur:

Le mouvement volontaire, bien que ressenti comme une action banale et simple, est soumis à un
processus complexe de contrôle (LE CAVORZIN, 2007). En effet lors de tout mouvement le corps
doit effectuer plusieurs actions afin que le but fixé soit atteint, il doit :

 localiser ce but, cette cible


 mettre en place une trajectoire pour l’atteindre
 planifier la stimulation des structures musculaires à recruter pour effectuer cette trajectoire
 modifier, adapter les commandes au cours du mouvement en cas de déstabilisation, de
changement de localisation de la cible. Cela grâce au retour sensoriel de toutes les structures
concernées par le mouvement (articulations, ligaments, tendons, muscles)
 mémoriser le mouvement effectué pour permettre l’apprentissage moteur

Plusieurs modélisations du contrôle moteur ont été effectuées par différents auteurs, par
exemple :

 Selon Bernstein le contrôle du mouvement est schématisé sous forme d’une boucle entre un
élément moteur, un récepteur, un comparateur, un enregistreur et un régulateur. Le
comparateur note les différences entre le mouvement prévu et celui effectué grâce au retour
sensoriel du récepteur et envoie cette valeur d’écart à l’enregistreur qui la transmet, sous
forme de corrections à effectuer, au régulateur qui va agir sur l’élément moteur.

 Selon Adams l’organisme effectuerait un premier mouvement grâce à une trace mnésique
qui permettrait un geste global et imprécis. Cette trace mnésique s’affinerait au fur et à
mesure des expériences du sujet vis-à-vis de ce mouvement. Le retour proprioceptif permet
à l’organisme de garder une trace perceptive du mouvement effectué qui sera elle aussi
affinée tout au long des expériences du sujet. Cette trace perceptive va finir par constituer la
valeur de référence du mouvement voulu et lors des réalisations suivantes de ce geste
l’organisme cherchera à retrouver les sensations ressenties auparavant. Pour cela ce modèle
présente lui aussi un système de comparateur et de régulateur lié au retour sensoriel.
 Selon Schmidt le cerveau contiendrait des programmes moteurs génériques qui donneraient
la forme générale du mouvement mais les caractéristiques plus précises dépendraient de la

3
situation et seraient modulées à partir de cette base invariante grâce au retour sensoriel. Un
même programme permettrait donc d’effectuer plusieurs mouvements différents à condition
qu’ils appartiennent à la même classe.

Ces modélisations du contrôle moteur mettent bien en avant le fait que la sensibilité et la
motricité sont deux éléments indissociables, la réalisation correcte d’un mouvement dépendant en
partie du retour proprioceptif qu’enregistrent les structures cérébrales.

• L’hémiplégie :

Pour commencer voici quelques définitions tirées de dictionnaires de la langue française ainsi
que de dictionnaires médicaux :

 Nf MED Paralysie frappant une moitié du corps à la suite d’une lésion des centres moteurs
cérébraux ou du faisceau pyramidal. (Dictionnaire Hachette, 2005)
 F (angl. Hemiplegia). Paralysie de la moitié, gauche ou droite, du corps. (MANUILA L.,
1996)
 S.f. (gr. Hêmisus, demi ; plêssein, frapper) [angl. Hemiplegia]. Paralysie complète ou
incomplète frappant une moitié du corps entièrement ou partiellement. D’une façon générale
et conformément à l’étymologie : atteinte dimidiée de l’organisme (P. Marie et Foix).
(GARNIER DELAMARE, 2006)

L’hémiplégie est donc une paralysie de la moitié du corps due à une lésion du faisceau
pyramidal controlatéral, le plus souvent, sauf lors des atteintes bulbaires ou médullaires hautes où la
paralysie est homolatérale à la lésion (Larousse de la médecine, 1982). La principale cause de
l’hémiplégie est l’AVC par hémorragie ou ischémie cérébrale, même si la majorité des affections du
système nerveux central peuvent également la provoquer (tumeur cérébrale, abcès, traumatisme,
infection…). Le plus souvent l’apparition de la paralysie est soudaine mais elle peut également se
faire de façon progressive dans le cas par exemple d’une tumeur cérébrale qui serait en expansion.
L’apparition brutale s’accompagne d’une perte de connaissance, d’un coma ; et au réveil le patient
présente une déficience de la commande motrice volontaire qui prédomine au niveau des muscles
extenseurs du membre supérieur, des muscles intrinsèques de la main et des muscles fléchisseurs du
membre inférieur. Globalement le déficit des muscles distaux est plus important que celui des
muscles proximaux.

Lors de la phase initiale les muscles du patient restent flasques puis peu à peu apparaît de la
spasticité (YELNIK AP., 2008) qui entraine les membres supérieur et inférieur atteints dans des
4
positions préférentielles : le plus souvent en rotation médiale et adduction de l’épaule, flexion du
coude, du poignet et des doigts pour le membre supérieur et en extension de genou et de cheville
pour le membre inférieur. La spasticité est une augmentation pathologique du tonus musculaire de
base due à la lésion du faisceau pyramidal (KIEFER C., 2000), elle apparaît lors de l’étirement
passif des muscles concernés (MAILHAN L., 2003) et augmente si la vitesse et/ou l’amplitude de
l’étirement augmente(nt). Depuis les travaux de Lance en 1980 elle est définie comme une
hyperactivité de l’arc réflexe myotatique entrainant une augmentation vitesse-dépendante du réflexe
tonique d’étirement (REMY-NERIS O., 1997). Elle peut également être augmentée lorsque le
patient ressent une douleur ou une gêne (épine irritative).

Cette spasticité s’accompagne de réflexes ostéotendineux anormalement vifs du côté atteint et


d’une modification des réflexes cutanés dont le signe de Babinski (spécifique du syndrome
pyramidal).

On peut également observer des syncinésies (MAILHAN L., 2003) du côté hémiplégique qui
perturbent la récupération de mouvements normaux en déclenchant des schémas moteurs
stéréotypés également appelés schémas élémentaires par Perfetti. Les syncinésies sont des
mouvements involontaires observables lors de mouvements volontaires, il en existe trois types :

 Les syncinésies globales, qui apparaissent du côté hémiplégique lors de mouvements


volontaires du côté sain en renforçant les schémas de flexion du membre supérieur et
d’extension du membre inférieur.
 Les syncinésies d’imitation, lors desquelles le côté hémiplégique effectue le même
mouvement que le côté sain.
 Les syncinésies de coordination, qui apparaissent lors d’un mouvement volontaire du côté
hémiplégique.

En plus de ces symptômes il peut y avoir d’autres troubles associés qui dépendent de la
localisation et de l’étendue de l’atteinte : troubles sensitifs, troubles du langage, troubles visuels,
troubles cognitifs, troubles de l’humeur…

5
• Neuroanatomie de la voie pyramidale :

La voie pyramidale est la voie de la motricité volontaire et de la régulation tonique de


l’hémicorps controlatéral, elle est constituée du faisceau cortico-spinal et du faisceau cortico-
nucléaire (=faisceau géniculé). C’est une voie descendante à vitesse de conduction relativement
lente qui fait partie du système moteur latéral (avec le faisceau rubro-spinal) et qui commande
principalement les mouvements des extrémités (motricité fine et précise).

Elle prend son origine par un premier neurone dans différentes aires corticales : l’aire motrice
précentrale, l’aire pariétale primaire, et l’aire pariétale secondaire.

Ces fibres se regroupent en faisceau pour passer par la capsule interne avant de descendre par le
tronc cérébral et plus précisément par le pédoncule cérébral et la protubérance annulaire. A ce
niveau les fibres du faisceau cortico-spinal sont latérales alors que celles du faisceau cortico-
nucléaire sont médiales et vont décusser pour terminer sur les noyaux moteurs des nerfs crâniens.

Au niveau du bulbe rachidien la majorité des fibres du faisceau cortico-spinal (70 à 80%) vont
décusser et former le faisceau pyramidal latéral, les autres fibres (20 à 30%) restent homolatérales et
forment le faisceau pyramidal ventral. A la partie basse du bulbe rachidien, toutes les fibres du
faisceau cortico-nucléaire ont fini leur décussation.

Au niveau de la moelle épinière la majorité des fibres du faisceau pyramidal latéral se terminent
entre les cornes ventrales et dorsales en contact avec des neurones intermédiaires qui font le relais
avec le deuxième neurone (=deutoneurone), l’alpha-motoneurone. Ce deutoneurone est un neurone
périphérique qui va constituer la racine antérieure et terminer directement sur le muscle cible. Une
petite partie des fibres du faisceau pyramidal fait directement relais avec le deutoneurone de la
corne ventrale, cela concerne les alpha-motoneurones qui innervent les muscles distaux des
membres (surtout la main). Enfin les fibres qui prennent leur origine dans le cortex pariétal se
terminent dans les noyaux relais des cordons dorsaux et dans la corne dorsale de la moelle, elles
réguleraient les afférences sensitives. En ce qui concerne le faisceau pyramidal ventral, à chaque
niveau métamérique certaines de ses fibres vont décusser pour rejoindre la corne antérieure de la
moelle et faire relais avec le deutoneurone de la même façon que pour les fibres du faisceau
pyramidal latéral.

6
II. CONCEPT ET DESCRIPTION DE LA METHODE DE PERFETTI :
(PERFETTI C., 2001)

Dans les années soixante-dix, Perfetti et d’autres rééducateurs se sont intéressés à la main et à
ses rapports avec le cortex cérébral afin de l’intégrer à la rééducation car jusqu’alors les méthodes
de rééducation la négligeaient. Ils sont partis de l’hypothèse que la main étant un organe du toucher
en plus d’être un organe du mouvement, il fallait intégrer à sa rééducation des exercices faisant
appel à la perception tactile. D’après lui l’exploration tactile, consciente et attentive de l’objet
favorise le comportement moteur de préhension et donc la récupération fonctionnelle de la main
(DAVIET JC., 2002). Leurs recherches les ont amenés à se rendre compte que leurs hypothèses
pour la main étaient également valables pour toutes les autres parties du corps. Ils ont pu prouver
que chaque partie du corps est représentée plusieurs fois au niveau cortical, chaque représentation
permettrait un type d’interaction avec le monde extérieur.

Pour Perfetti, la rééducation doit être considérée comme un apprentissage en condition


pathologique car elle doit faire prendre conscience des conséquences de l’atteinte (TUFFERY R,
2003), pour que l’apprentissage moteur puisse se faire il est nécessaire de faire appel aux
informations sensitives les plus conscientes et les plus précises possible (PICARD Y., 2006). Sa
technique comme beaucoup d’autres existantes est censée faciliter les processus de plasticité
cérébrale et donc favoriser une récupération plus rapide et plus complète (YELNIK AP., 2008). Il
avance que le fait de faire appel à des processus cognitifs comme l’attention, la mémoire, le
langage, la perception ou la résolution de problème chez le patient améliore la qualité de la
récupération car ils permettent à l’homme d’interagir avec son environnement. Il parle donc
d’exercices thérapeutiques cognitifs.

Dans la théorie de Perfetti, le mouvement est décrit comme permettant l’interprétation de


données, l’assignation de sens au monde extérieur. D’après lui, le mouvement n’est pas un but en
soi, il permet à l’homme d’entrer en relation avec le monde extérieur, la contraction musculaire
servant à traiter et sélectionner les informations du milieu extérieur (TUFFERY R, 2003). Son
concept repose donc sur la vérification par le patient d’une hypothèse perceptive par le biais d’actes
moteurs et la technique ne devra pas être de demander un mouvement ou de sentir quelque chose
mais de l’interpréter, de lui assigner un sens (est-ce qu’un objet est plus grand ou plus petit qu’un
autre, est-ce qu’il est plus près ou plus loin, cet objet est-il à droite ou à gauche…). La technique de
Perfetti est une technique sensitivo-motrice.

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Le corps humain perçoit le monde à travers différents systèmes sensitifs : visuel, auditif, gustatif,
olfactif et somesthésique ; les plus utilisés par l’homme pour interagir avec le monde extérieur sont
les systèmes visuel et somesthésique. Or chez l’hémiplégique la lésion concerne principalement le
faisceau pyramidal, lésion qui met en difficulté les voies qui descendent de l’aire motrice primaire
qui est contrôlée par les afférences kinesthésiques et cutanées, les possibilités de dialogue
somesthésique du patient hémiplégique sont donc endommagées. L’aire motrice primaire n’étant
pas soumise au contrôle visuel mais au contrôle somesthésique, Perfetti a émit l’hypothèse que pour
obtenir une meilleure perception des sensations corporelles chez un hémiplégique il fallait le faire
travailler dans un seul espace, celui de la somesthésie, et donc le faire travailler les yeux fermés.
Pour lui il serait possible que la vue, qui est le sens le plus important pour l’espèce humaine, prenne
le dessus dans l’organisation de la récupération du patient et entraine des compensations. Il précise
que lorsque les déficiences du patient sont trop importantes pour espérer un retour à une motricité
normale et que l’équipe soignante juge qu’il faut se contenter des compensations, alors on peut
travailler les yeux ouverts.

Cette technique est basée sur des exercices thérapeutiques cognitifs, qui sont des mises en
situation du patient face à une série d’expériences spécifiquement programmées et qui doivent
présenter la nécessité d’acquérir par le rapport avec le monde extérieur une série d’informations.
Lors de ces exercices le patient va devoir élaborer et vérifier une hypothèse perceptive dans le but
de résoudre un problème cognitif. Ce but peut être atteint par le déplacement et le fractionnement de
plusieurs segments corporels que le patient effectue avec l’aide plus ou moins grande du thérapeute
en fonction de ses capacités.

Le patient doit prévoir quelles informations venant de l’interaction avec l’objet devront être
privilégiées et lesquelles devront être négligées pour la reconnaissance de l’objet senti. Pour cela il
effectue une analyse visuelle des différents objets que lui présente le thérapeute et effectue une
transformation visuelle somesthésique. Lors de l’exercice il effectue une analyse somesthésique de
chaque objet qu’il ressent et compare ses sensations à l’image somesthésique qu’il a enregistré des
différents objets. L’hypothèse perceptive est la prévision de la série d’informations qui arriveront au
système nerveux central à la suite de l’action, elle sert de stimulus et de guide pour les contractions
qui doivent être mises en jeu. Le système nerveux central va donc chercher à obtenir ces
informations et programmer avec précision des séquences motrices qui la mettent en rapport avec
les objets de la façon la mieux adaptée. Le retour sensitif permet de confronter le programme
moteur réalisé à celui qui était prévu et si les deux coïncident alors il peut y avoir apprentissage
moteur (TUFFERY R, 2003).

8
L’interaction entre le patient et le thérapeute ne doit pas être seulement mécanique, elle doit
respecter une stratégie d’enseignement. On parle d’interaction coopérative car le patient et le
thérapeute coopèrent pour joindre deux buts en partie identiques : ils ont un but commun qui est la
reconnaissance de l’hypothèse perceptive par le patient, mais le thérapeute a un but supérieur (dont
le patient n’est pas forcement informé, qu’il ne réalise pas toujours) qui est de faire adopter au
patient une stratégie motrice prédéterminée. Les deux protagonistes doivent donc être d’accord sur
l’intérêt de poursuivre le même but, c’est ce que l’on appelle l’adoption, mais ce but ne peut pas
être atteint par un participant sans action de la part de l’autre, c’est la dépendance.

Perfetti avance le fait que pour revenir à une motricité de type évolué, l’hémiplégique doit
pouvoir contrôler les principales composantes pathologiques de son atteinte :

 La réaction anormale à l’étirement : Il a été prouvé qu’il est possible d’apprendre à contrôler
consciemment le réflexe myotatique, la réponse à l’étirement.
 L’irradiation anormale, les syncinésies : Chez l’hémiplégique le seuil de déclanchement de
l’irradiation est nettement plus bas ce qui entraine une plus grande importance du
phénomène. Cette irradiation active toujours les mêmes groupes musculaires.
 Les schémas élémentaires moteurs : Favorisés par l’irradiation musculaire anormale, ce sont
les mouvements qui apparaissent les premiers et les plus faciles à exécuter. Leur activation
est plus fréquente et plus intense au niveau des régions proximales des membres atteints, le
plus souvent la main ne présente aucun type significatif de motricité. Ces schémas ne
permettent pas la prise d’informations efficace sur l’environnement.
 Le dérèglement du recrutement d’unités motrices de l’hémicorps lésé tant qualitativement
que quantitativement.

Pour acquérir ce contrôle, Perfetti propose trois degrés d’exercices :

• Exercices du premier degré :

Il est possible de débuter ces exercices dès que le patient est capable de différencier les
sensations kinesthésiques et extéroceptives, même grossièrement, et dès qu’il peut les localiser
(PICARD Y., 1996).

Le but de ces exercices est le contrôle de la réaction anormale à l’étirement par le patient, lors de
la vérification de l’hypothèse perceptive, afin de pouvoir exécuter une action motrice volontaire
correcte par la suite. Lors de cette première phase il ne doit pas y avoir de contraction volontaire de
la part du patient.
9
La demande du thérapeute est de reconnaitre avec les yeux fermés les caractéristiques
principales des différentes figures ou des déplacements de parties du corps effectués par le
thérapeute. Cette reconnaissance ne sera possible et correcte que si le patient arrive à contrôler la
réaction à l’étirement de tous les muscles impliqués dans la séquence comportementale.

Le thérapeute présente d’abord une série d’objets, de figures ou de déplacements plus ou moins
différents selon le niveau de difficulté que l’on souhaite obtenir. Ensuite, le patient ayant les yeux
fermés, le thérapeute guide le membre supérieur de façon sécurisante pour lui faire parcourir les
bords de la figure à reconnaitre avec l’extrémité d’un doigt ou pour le mettre dans la position
voulue. Enfin, les yeux ouverts, le patient indique quelle figure ou quel mouvement (position) il
pense avoir perçu.

Il existe au sein de ce premier degré deux types d’exercices :

 Les exercices globaux, lors desquels le thérapeute mobilise plusieurs articulations. Le


patient doit reconnaitre la position exacte du membre ou bien la distance, la situation (à
gauche, à droite, devant…) d’un objet par rapport à son corps. Le travail est effectué dans le
canal somesthésique principalement grâce à des afférences kinesthésiques. Il est également
possible d’utiliser la reconnaissance de différentes formes ou superficies pour travailler à
base d’informations tactiles.
 Les exercices segmentaires, lors desquels le thérapeute ne bouge qu’un seul segment du
membre. Le patient doit reconnaitre le plus précisément possible la position de ce segment.
Dès que la réaction à l’étirement apparait, il faut attirer l’attention du patient sur ses
conséquences (contracture musculaire, tension…) pour qu’il puisse tenter de la corriger.

Ces exercices permettent souvent d’améliorer les problèmes de sensibilité que présentent les
hémiplégiques ce qui favorise la récupération en cassant le cercle vicieux suivant : un problème de
sensibilité empêche l’acquisition du contrôle des schémas moteurs ce qui limite l’assimilation
correcte des informations tactiles et kinesthésiques.

• Exercices du second degré :

Le but de ces exercices est de contrôler les effets de l’irradiation musculaire induite par la
contraction volontaire dans le cadre d’une séquence programmée et facilitée par le thérapeute. Ils
sont mis en place une fois que le patient a appris de façon suffisamment automatisée à contrôler la
réaction à l’étirement, et quand le thérapeute commence à ressentir des mouvements isolés des
doigts, de la main et autres segments proximaux lors des mouvements effectués. La récupération du
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contrôle sur la qualité du recrutement des unités motrices est également débutée puisqu’il est fait
appel à une contraction volontaire de la part du patient. Sur le principe ils sont identiques aux
exercices du premier degré, le patient doit toujours valider une hypothèse perceptive mais le
thérapeute n’effectue plus la totalité du mouvement, une partie de la séquence est assurée par le
patient grâce à une contraction volontaire lors de laquelle il devra contrôler toute irradiation qui
pourrait apparaitre.

L’intensité et la rapidité de cette contraction volontaire dépendent de la capacité du patient à


contrôler la réaction à l’étirement et l’irradiation. Le thérapeute peut faciliter plus ou moins le
mouvement si besoin mais cette facilitation doit être parfaitement dosée au niveau du seuil des
capacités du patient. Si la facilitation est excessive, alors le nombre d’unités motrices activées est
insuffisant et aucun type de contrôle n’est acquis. A l’inverse, si la facilitation est insuffisante, le
patient ne peut pas inhiber les contractions anormales qui sont déclenchées.

• Exercices du troisième degré :

Le but de ces exercices est en théorie l’automatisation des contrôles acquis lors des exercices
précédents, l’attention doit être uniquement tournée vers la vérification de l’hypothèse perceptive.
Ceci n’est jamais complètement possible, l’automatisation du contrôle des réactions anormales reste
généralement partielle. A ce stade le patient doit contrôler à la fois l’intensité, la localisation dans
l’espace et le déroulement dans le temps du mouvement ; il doit apprendre à adapter son
mouvement à l’hypothèse perceptive proposée par le thérapeute. Ces exercices permettent
également le recrutement d’un grand nombre d’unités motrices et permettent au patient d’effectuer
le recrutement dans différentes conditions pour réacquérir les régulations fines du mouvement qui
permettent son adaptabilité. Lors de cette phase le patient doit pouvoir réapprendre le
fractionnement, c'est-à-dire la capacité de donner une orientation différente à chacun de ses
segments corporels (TUFFERY R, 2003).

En pratique, même à ce stade, le thérapeute agit toujours de façon segmentaire et effectue


toujours des facilitations pour des segments dont l’activation peut provoquer l’apparition
d’irradiation ou de réaction à l’étirement. Ces exercices exigent du patient qu’il contrôle
simultanément plusieurs articulations, il faut donc être très précis dans la programmation des
difficultés de contrôle demandées par le thérapeute pour éviter le retour des irradiations, de la
réaction à l’étirement ou des schémas synergiques. Les principales difficultés sont les trajectoires
choisies et l’intensité des contractions demandées.

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Ces trois degrés d’exercices sont bien entendu schématiques et impossibles à séparer à ce point
car l’automatisation des contrôles est très lente et le déficit moteur n’est pas homogène sur
l’ensemble du membre. Le thérapeute peut augmenter la difficulté des exercices de chacun des
degrés en choisissant une série d’objets à reconnaître se ressemblant de plus en plus ou de plus en
plus nombreux, il peut aussi augmenter le nombre d’articulations concernées par la séquence
motrice du distal vers le proximal, faire travailler les articulations dans un nombre croissant de plan
de mouvement ou encore passer de la position de travail de latérocubitus à assis puis à debout
(TUFFERY R, 2003).

III. MISE EN PLACE DU QUESTIONNEMENT :

• Questions préliminaires :

Au cours des stages effectués dans le cadre des trois ans de formation à la masso-kinésithérapie,
dont plusieurs en services de rééducation spécialisés en neurologie, il a été intéressant de voir
quelques kinésithérapeutes utiliser la mallette dite « de Perfetti ». Les premières questions que je me
suis posées concernaient les principes de cette technique, apparemment peu utilisée, et son but.
N’ayant pas pu obtenir de réponse par les kinésithérapeutes en question, et n’ayant pas eu de cours
approfondi répondant à mes questions lors de la formation à l’Institut de Formation en Masso-
Kinésithérapie d’autres questions se sont alors posées.

Si cette technique est apparemment si peu utilisée par les kinésithérapeutes, bien que très connue
de nom, il parait censé d’avancer qu’il doit y avoir une raison qui leur fait préférer d’autres
techniques de rééducation. Se pose alors la question suivante : Quelle peut-être cette raison ? De
cette question principale ont découlées des questions secondaires :

 Bien que tous les kinésithérapeutes semblent connaître cette technique de nom, aucun de
ceux interrogés en stage n’ont pu expliquer en quoi elle consistait exactement et quel était
son but. Ceci amène à la question suivante : Cette méthode est-elle maîtrisée par les
kinésithérapeutes ?
 Si non pourquoi ne l’est-elle pas ?
 Est-ce une technique validée scientifiquement ?
 Est-elle moins efficace qu’une autre méthode de rééducation ?

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• Problématique :

Ce questionnement permet la mise en place de la problématique suivante : Quelles raisons


pourraient expliquer que la méthode de rééducation mise en place par le Professeur Perfetti soit
si peu utilisée dans la prise en charge du membre supérieur du patient hémiplégique ?

• Hypothèses :

Plusieurs hypothèses ont été posées afin de répondre à cette problématique :

 Cette technique n’est peut-être pas validée scientifiquement, les kinésithérapeutes


préfèreraient alors se tourner vers des méthodes plus reconnues.
 Le nombre de kinésithérapeutes formés à cette technique est peut-être limité, ce qui
impliquerait une utilisation forcement limitée de cette méthode.
 Cette méthode apparaît peut-être aux yeux des kinésithérapeutes comme trop complexe à
utiliser.
 Peut-être cette technique est-elle trop longue à mettre en place lors de séances avec un
patient hémiplégique.

• Méthodologie de réponse :

Afin de vérifier les hypothèses précédemment exposées deux méthodes différentes ont été
choisies :

 Un questionnaire : Ce questionnaire (Annexe 1) est proposé afin d’avoir une idée des
connaissances, avis et habitudes d’un panel de kinésithérapeutes en ce qui concerne la
technique de rééducation mise en place par Perfetti. Rédigé et analysé grâce à Google
Documents, il a été expédié via internet à plusieurs services de rééducation au sein
d’établissements ayant un service de neurologie. Les services en question ont été
sélectionnés au sein des établissements proposant des stages en rééducation de neurologie
aux étudiants de l’IFMK de Rennes, les cadres de santé ont été contactés par téléphone pour
obtenir leur accord de diffuser le questionnaire dans leur service et une liste d’adresses mail
auxquelles expédier les formulaires. Ce questionnaire ciblait donc une population de
kinésithérapeutes qui sont amenés à prendre en charge des patients hémiplégiques et
comportait treize questions. Le but de ces questions était de savoir si la méthode de Perfetti
était connue de ces kinésithérapeutes, s’ils l’utilisaient dans leur prise en charge, s’ils
13
avaient suivi une formation, s’ils connaissaient les principes de cette technique et les
respectaient et surtout s’ils croyaient en l’efficacité de cette méthode de rééducation. Sur
l’ensemble des questionnaires expédiés (plus de quatre-vingt exemplaires), vingt-six
kinésithérapeutes ont répondu.

 Une recherche et analyse documentaire : Elle permettra de savoir si des études ont été
menées afin de valider ou d’invalider scientifiquement cette méthode.

IV. ANALYSE DES RESULTATS :

• Questionnaire : (Annexe1)

A la première question posée, la quasi-totalité des kinésithérapeutes ont affirmé connaître la


technique de rééducation de Perfetti, seulement deux sur les vingt-six ayant répondu disent ne pas la
connaître. Ceci nous confirme bien que cette technique est fortement connue dans le monde de la
kinésithérapie, au moins de nom. Ce n’est donc pas parce qu’elle est peu connue qu’elle n’est pas
beaucoup utilisée.

En réponse à la deuxième question, douze des kinésithérapeutes disent avoir été formés à cette
technique de rééducation alors que les quatorze autres ne l’ont pas été. Il est donc possible que la
faible utilisation de cette technique soit due au fait que les kinésithérapeutes soient peu nombreux à
être formés (moins de 50%).

En ce qui concerne l’utilisation de cette méthode par les kinésithérapeutes ils disent tout de
même être dix à l’utiliser contre seize à ne pas l’utiliser. Au sein des dix kinésithérapeutes qui
utilisent la technique de Perfetti, on retrouve sept de ceux qui ont suivi une formation et trois qui
l’utilisent sans jamais avoir été formés. Il y a donc trois personnes qui ont suivi la formation mais
qui n’utilisent pas cette méthode de rééducation.

La quatrième question s’adressait aux kinésithérapeutes n’utilisant pas la méthode mise en place
par Perfetti afin de connaître les raisons de cette non utilisation, quinze personnes ont répondu à
cette question. Plusieurs choix (figure 1) leur étaient proposés, ils pouvaient choisir dans la liste une
ou plusieurs raisons et pouvaient personnaliser leur réponse si besoin. La raison majoritairement

14
évoquée est le manque de connaissance sur la technique en question mais les trois kinésithérapeutes
ayant suivi la formation mais qui n’utilisent pas cette méthode évoquent une méthode trop
complexe et trop longue à mettre en place. Une personne précise qu’elle n’est pas convaincue de
l’efficacité de la technique, une autre répond que dans son service ce sont principalement les
ergothérapeutes qui utilisent cette technique et une troisième note que cette méthode est trop
complexe pour la plupart des hémiplégiques, efficace seulement chez des hémiplégiques faiblement
atteints mais très efficace sur des patients orthopédiques.

Il semble donc que si les kinésithérapeutes n’utilisent pas souvent la méthode de rééducation de
Perfetti c’est principalement dû à un manque de formation. Pourtant même certains ayant été formés
la jugent trop complexe et trop longue à mettre en place. Ces différents facteurs associés jouent très
certainement sur le fait que cette technique ne soit pas aussi répandue que d’autres dans les services
de rééducation.

En ce qui concerne le protocole mis en place par Perfetti et décrit lors de la première partie de ce
travail (exercices de trois degrés différents), treize kinésithérapeutes ont répondu. Huit disent le
connaître contre cinq qui ne le connaissent pas. Il leur était demandé, s’ils connaissaient ce
protocole, de le décrire en quelques mots. Sur les huit qui disaient le connaître deux précisent qu’ils
savent juste qu’il y a une progression mais ne l’ont pas expliqué et un n’a rien précisé. Sur les douze
kinésithérapeutes ayant suivi une formation il n’y a donc que cinq personnes qui ont su retranscrire
le protocole mis en place par Perfetti. Sur ces cinq personnes, quatre respectent ce protocole dans
leur prise en charge et une d’entre elles ne le respecte pas.

La neuvième question portait sur le but recherché par Perfetti avec l’utilisation de cette
technique de rééducation (décrit lors de la première partie de ce travail). Dix-huit kinésithérapeutes
ont dit connaître ce but contre sept qui disent ne pas le connaître, cependant, à la question suivante
qui demandait de préciser ce but pour ceux qui le connaissaient, seulement quatorze personnes ont
répondu. Sur ces quatorze personnes, treize ont décrit, au moins partiellement, le but réel de cette
technique mais une a présenté cette technique comme un travail à but sensitif. Cette personne n’a
pas suivi de formation à cette méthode de rééducation. En ce qui concerne les autres
kinésithérapeutes n’ayant pas suivi la formation, pour la plupart ils n’avaient qu’une vague idée du
but de cette technique, citons par exemple : « Régénération neuronale » ou encore « Sollicitation
des aires corticales ».

Ces dernières questions nous montrent que même si toutes les personnes interrogées ne décrivent
pas la méthode de Perfetti comme étant trop complexe, très peu la connaissent suffisamment bien
pour la décrire et surtout, une grande partie de ceux qui disent utiliser cette technique, l’utilise en

15
fait d’une façon toute personnelle et non pas comme Perfetti la décrit. Certains kinésithérapeutes
font reconnaitre différents objets mais sans tenir compte de l’apparition de facteurs pathologiques,
sans faciliter le mouvement afin de permettre le contrôle par le patient. On pourrait donc avancer
que cette technique, est en fait trop compliquée pour être utilisée telle qu’elle est décrite par Perfetti.

Il a ensuite été demandé aux kinésithérapeutes interrogés si la technique de Perfetti était la seule
qu’ils utilisaient lorsqu’ils prenaient en charge des patients hémiplégiques. Vingt et une personnes
ont répondu à cette question et toutes affirment ne pas utiliser uniquement cette méthode de
rééducation.

En ce qui concerne le temps que les kinésithérapeutes passent à utiliser cette technique par
semaine et par patient (figure 2), quinze personnes ont répondu alors que seulement dix disaient
l’utiliser. Il semble que les kinésithérapeutes interrogés n’utilisent, pour la plupart, cette technique
que sur un temps très limité puisque inférieur à quinze minutes par semaine et par patient.

La dernière question demandait aux kinésithérapeutes leur avis sur l’efficacité de la technique
décrite par Perfetti (figure 3), seize personnes ont répondu à cette question. Les avis semblent très
partagés mais une majorité évalue l’efficacité de cette méthode à cinq sur une échelle allant de zéro
à dix (0= pas du tout efficace et 10= toujours efficace).

Ce questionnaire permet de se faire une idée sur la vision que les kinésithérapeutes ont de la
technique de Perfetti et sur l’utilisation qu’ils en font. En fait, même si beaucoup de
kinésithérapeutes disent utiliser cette méthode de rééducation, comme ils l’adaptent à leur façon et
ne respectent pas tous le protocole mis en place, on peut donc dire que ce n’est pas vraiment la
technique de Perfetti qu’ils utilisent puisqu’il insiste fortement sur l’importance d’une rééducation
lente et progressive qui s’adapte aux capacités du patient au fur et à mesure qu’il progresse.

L’analyse de ces réponses ne valide pas à elle seule les hypothèses posées sur le manque de
formation des kinésithérapeutes, sur la trop grande complexité et sur la trop grande longueur de
cette technique. Cependant elle met en avant que l’accumulation de tous ces facteurs, ajoutée au fait
que très peu des kinésithérapeutes interrogés croient réellement en l’efficacité de cette méthode,
explique très certainement le fait que seulement quelques personnes l’appliquent vraiment telle
qu’elle a été décrite et la connaissent parfaitement.

16
• Recherche et analyse documentaire :

Dans le but de vérifier l’hypothèse qui avance que cette technique n’est peut-être pas vérifiée et
validée scientifiquement, une recherche et une analyse de documentation ont été effectuées à partir
de plusieurs bases de données s’appuyant sur des mots clés notés au début de ce travail, aussi bien
en français qu’en anglais. Les bases de données qui ont été explorées sont :

 Le centre de documentation de l’IFMK de Rennes


 PubMed
 PEDro
 EM consulte
 KINEDOC
 BDSP (Banque de Données en Santé Publique)
 Les catalogues des universités de Rennes
 Le centre de documentation du CHU de Rennes
 Le catalogue du Système Universitaire de Documentation (SUDOC)

Malgré toutes ces bases de données explorées, il ne semble y avoir aucun article faisant allusion
à des études menées dans le but de démontrer la validité scientifique de la méthode de rééducation
de Perfetti. Au sein des bases de données anglophones il semble même que cette technique soit
quasiment inconnue, le seul article étranger trouvé sur PubMed est en effet un article publié par
Perfetti lui-même dans un journal italien. La version en ligne n’était pas disponible et la version
papier se trouvait uniquement dans des bibliothèques universitaires trop éloignées de Rennes. Sur
PEDro les seuls articles trouvés en rapport avec un Perfetti concernaient en réalité un homonyme
publiant sur des problèmes respiratoires.

Les seules références trouvées l’ont été principalement au centre de documentation de l’IFMK
de Rennes et sur le site EM consulte et sont apparemment toutes européennes voir françaises, ce qui
laisserait penser que cette technique ne s’est pas développée en dehors de l’Europe. A moins qu’elle
ne soit pas dénommée sous le nom de Perfetti ce qui semble peut probable, on devrait en effet
trouver au moins le nom de son fondateur.

o Validation scientifique :

Ces ouvrages et articles ne font jamais référence à une éventuelle étude ayant validée ou même
invalidée la technique de Perfetti. On aurait pourtant pu s’attendre à ce qu’une technique aussi
connue de nom fasse l’objet de nombreuses études, surtout depuis quelques années avec
17
l’avènement de la médecine basée sur des preuves. Le livre rédigé par Perfetti a bien entendu servi
de base à ce travail mais la quasi-totalité des articles (CECCONELLO R., 2006) (CHAUVIERE C.,
2006) (DAURES C., 1996) trouvés en plus se contentent de décrire la méthode tel que Perfetti l’a
fait au démarrage.

Quelques articles récents confirment les résultats de cette recherche en notant également le
manque d’études scientifiques (ROUSSEAUX M., 2002) prouvant l’efficience de cette technique
voir même sa supériorité à d’autres techniques de rééducation telles que celles de Bobath ou de
Brunnstrom pour ne citer que celles-ci. D’après différents auteurs (DAVIET JC., 2002) (YELNIK
A., 2005), plusieurs études ont comparé certaines techniques entre elles mais il ne semble pas que
celle de Perfetti en faisait partie. Il est avancé par certains (AHMAD RIFAII SARRAJ, 2006) que le
manque d’études scientifiques comparatives serait dû à la trop grande diversité de principes entre
les techniques.

Au début le manque de références basées sur des études a été considéré comme un obstacle pour
la réalisation d’une revue de littérature. Par la suite il a été intéressant de voir que seulement
quelques thérapeutes se sont penchés sur la validation de cette technique.

Deux articles ont en effet tenté d’initier une démarche de preuve scientifique en mettant en place
des études sur de petits panels de patients. L’une (POUBLANC I., 1995) des études concernait les
effets sur quinze jours de la méthode Perfetti et la seconde (ROUSSEAUX M., 2002) portait sur la
comparaison entre la technique de Bobath et celle de Perfetti sur une période de six mois.

 La première étude (POUBLANC I., 1995) a été effectuée sur dix patients hémiplégiques
dont aucun ne souffrait de troubles de la compréhension mais dont quatre souffraient de
troubles sensitifs. Tous les patients ont passé un bilan constitué de quatre tests à l’aide
d’une partie du matériel de Perfetti (valise-pupitre, trois plaques de surfaçages différents,
trois plaques de rugosités différentes, trois plaques avec des formes de « H » différentes et
un plateau avec des ressorts de trois résistances différentes). Chacun de ces tests était
effectué trois fois selon les modalités des exercices de premier degré décrites par Perfetti :
une fois sur la main saine, une fois sur la main atteinte avec le poignet en flexion et une
dernière fois sur la main atteinte avec le poignet en extension. A la suite de ce bilan les
patients ont reçu cinq séances d’une demi-heure chacune pendant quinze jours en plus de
leur rééducation en kinésithérapie et ergothérapie. Ces séances consistaient en un
entrainement des patients aux mêmes exercices que lors du bilan. Au terme de ces quinze
jours de rééducation un second bilan identique au premier a été effectué. L’analyse de ces
deux bilans fait ressortir une évolution favorable du nombre de bonnes validations de

18
l’hypothèse perceptive aussi bien du côté sain que du côté hémiplégique. Il est intéressant
de noter que le nombre de bonnes réponses est plus important quand le poignet du membre
hémiplégique est placé en flexion que lorsqu’il est placé en extension, ceci surement à cause
de l’étirement des muscles spastiques et des structures éventuellement rétractées ce qui
provoque une douleur et empêche une bonne utilisation de la sensibilité.

Cette étude, bien qu’intéressante, ne porte pas sur un nombre suffisant ni de patient ni
d’exercices utilisés pour pouvoir valider la technique de Perfetti. Le but de cette méthode étant une
amélioration des capacités de mouvement du patient, il aurait été plus justifié d’utiliser des bilans
d’évaluation fonctionnelle du membre supérieur, car ici tout ce qu’il est possible de dire c’est que
les patients, grâce à l’entrainement, se sont améliorés dans la réalisation de ces exercices et non
dans leurs schémas de mouvements. De plus, il aurait été intéressant d’évaluer l’évolution de la
réaction anormale à l’étirement et de l’irradiation musculaire puisque c’est sur leur contrôle que
Perfetti base toute sa technique.

L’étude effectuée ne permet donc pas de valider l’utilisation de la méthode de Perfetti mais
apporte un début d’argumentation en sa faveur.

 L’autre étude réalisée (ROUSSEAUX M., 2002) est une étude prospective et randomisée
qui avait pour but de comparer l’efficacité des méthodes de Bobath et Perfetti appliquées au
membre supérieur de l’hémiplégique et de donner des résultats préliminaires. La sélection
des patients a été beaucoup plus stricte que lors de l’étude précédente, leurs critères
d’exclusion de l’étude concernaient principalement les caractéristiques de l’AVC, les
troubles cognitifs, les troubles de la participation, de la compréhension, une hypoesthésie
franche et des problèmes articulaires au niveau du membre supérieur hémiplégique. Seize
patients ont donc été inclus dans ce protocole et deux groupes ont été formés de façon
randomisée. Le premier groupe de neuf personnes a reçu la méthode Bobath au membre
supérieur pendant une période de deux mois, à raison de deux heures et demie par semaine
en kinésithérapie et une heure par semaine en ergothérapie. Le deuxième groupe constitué
de sept patients a reçu la méthode Perfetti avec le même rythme et la même intensité de
séance. Après cette période de deux mois, les patients des deux groupes ont bénéficié d’une
rééducation dite standard pendant quatre mois en kinésithérapie et ergothérapie. Le suivi de
cette rééducation était marqué par plusieurs bilans effectués à des dates clés : au premier
jour avant le début de l’étude, après deux mois de rééducation différente pour les deux
groupes, quatre mois après le début de la rééducation et au sixième mois, à la fin de l’étude.

19
Ces bilans étaient très complets et se basaient sur des échelles et scores divers : le score
d’Ashworth modifié, le score de Demeurisse, le score de Collin et Wade, le Motricity
Index, une échelle de 0 à 6 pour les douleurs articulaires, un score de 0 à 4 pour la
sensibilité superficielle et profonde, le Frenchay Arm Test (FAT), le Rivermead Motor
Assessment (RMA) du membre supérieur, le bilan des 400 points et la mesure de
l’indépendance fonctionnelle. Suite au bilan initial, les deux groupes étaient comparables
malgré un niveau de spasticité légèrement plus faible et des performances fonctionnelles
plus réduites pour le groupe Perfetti. En ce qui concerne les résultats issus de cette étude, il
apparait que l’évolution des deux groupes est relativement semblable même si quelques
différences non significatives ont été observées. Il semble en effet que la spasticité se soit
légèrement renforcée et que la progression fonctionnelle évaluée par les FAT et RMA soit
légèrement plus importante pour le groupe Perfetti. L’évaluation des activités du membre
supérieur montre une progression plus importante également dans le groupe Perfetti surtout
entre le début de la rééducation et le deuxième mois. Cependant l’auteur attire l’attention
sur le fait que l’atteinte initiale de ce groupe était plus sévère et que ces patients pouvaient
donc avoir une marge de progression plus importante que celle des patients du groupe
Bobath.

Malgré une étude dont la méthode de réalisation était beaucoup plus stricte que pour la
précédente, les résultats ne permettent pas de valider ou d’invalider la technique de Perfetti par
rapport à celle de Bobath. En effet, tout comme pour l’étude précédemment décrite, le nombre de
patients suivis était beaucoup trop faible pour que les résultats soient vraiment fiables et même si on
les prend comme arguments ils ne prouvent en aucun cas la supériorité d’une technique par rapport
à l’autre.

Au vu de ces deux études, même si elle est théoriquement plus complète et très intéressante, il
est impossible de dire que la technique de Perfetti soit plus efficace que celle de Bobath ni même de
dire qu’elle soit scientifiquement validée. Ceci justifie le fait qu’il faudrait effectuer une nouvelle
étude, qui pourrait reprendre les méthodes de réalisation de la seconde étude qui a été présentée,
mais en incluant dans les deux groupes un nombre beaucoup plus important de patients voire même
en créant en plus un groupe témoin qui ne bénéficierait que d’une rééducation dite standard. Une
telle étude est très difficile à mettre en place du fait des critères d’inclusion très stricts
(indispensables car tenant compte des contraintes de la méthode de Perfetti) mais permettrait non
seulement de valider ou non ces deux techniques de rééducation, mais aussi de déterminer si l’une
d’elle est plus efficace que l’autre.

20
Le fait que cette méthode de rééducation ne soit pas validée peut expliquer en partie que les
kinésithérapeutes hésitent à l’employer. Et pourtant ils sont nombreux à utiliser la méthode de
Bobath qui elle non plus n’est pas validée scientifiquement (AHMAD RIFAII SARRAJ, 2006) bien
qu’il semble qu’elle soit la technique la plus souvent comparée dans des études comparatives.

Un autre article (PICARD Y., 2006) avance que pour être réellement efficace cette technique
devrait être utilisée cinq à six heures par jour pendant une période de six semaines mais cette notion
n’a été retrouvée dans aucune autre référence étudiée. Ceci confirmerait l’impression de certains
kinésithérapeutes interrogés lors du questionnaire et qui trouvaient cette méthode trop longue à
mettre en place lors des séances. En effet si pour être vraiment efficace il faut que les patients soient
pris en charge sur une durée aussi longue on peut se demander s’il est intéressant de l’utiliser.
D’autant plus que les patients hémiplégiques sont souvent très fatigables et que cette technique
demande beaucoup de concentration de leur part. Cette information mériterait d’être elle aussi
vérifiée par une étude qui présenterait plusieurs groupes, chacun bénéficiant d’une durée différente
de rééducation avec la méthode de Perfetti et comparés à un groupe témoin.

o Arguments favorables :

Un des buts poursuivi par Perfetti est la facilitation de la plasticité cérébrale par l’apprentissage
en condition pathologique, il convient donc de définir cette plasticité.

La plasticité se définit donc « comme toute modification durable dans les propriétés corticales
aussi bien morphologiques que fonctionnelles. » (DUPREY E., 2003), c’est une modification des
connexions au sein du cortex cérébral. Le système nerveux central serait donc capable d’une
certaine réparation ou réorganisation mais cela sous la dépendance de l’apprentissage
(BOUDRAHEM S., 2002). En effet lors d’une tâche d’apprentissage moteur la représentation
corticale des muscles mis en jeu augmente avec la pratique de la tâche. Il est donc logique de penser
que les exercices thérapeutiques cognitifs de Perfetti (définis comme apprentissage en condition
pathologique) pourraient en effet faciliter une récupération motrice par le biais de la plasticité
cérébrale.

L’idée de plasticité cérébrale existe depuis longtemps (WHISHAW I., 2002) puisque dès 1928
l’espagnol Santiago Ramòn y Cajal avançait l’idée que l’apprentissage produisait des changements
morphologiques à long terme en matière d’efficacité des synapses activées par cet apprentissage.
Ceci est difficile à prouver car les chercheurs possèdent peu de données sur la localisation des

21
synapses qui assurent le stockage de la mémoire et peuvent donc difficilement observer leurs
modifications même grâce à l’imagerie actuelle.

Les neurones pyramidaux possèdent 95% de leurs synapses au niveau des dendrites, des
changements d’étendue de ces dendrites sont donc susceptibles d’entrainer des changements de
quantité de synapses. Plus les dendrites sont nombreuses et étendues et plus le nombre de synapses
est important. Or il a été prouvé que les dendrites se modifient en fonction des expériences vécues,
ceci prouve que l’apprentissage modifie bien des circuits neuronaux déjà existants en favorisant de
nouvelles connexions.

Il a été prouvé chez des rats, que ceux confrontés à des expériences sensorielles et cognitives
enrichies développaient plus de synapses par neurones, plus de nouveaux neurones mais également
un réseau capillaire et nutritif plus important que des rats élevés sans stimulation spéciale.

Le cortex cérébral est donc capable, contrairement à ce que l’on a longtemps pensé, de produire
de nouveaux neurones, de nouveaux circuits et cela grâce à l’expérience du sujet.

L’apprentissage ou expérience peut donc modifier les circuits cérébraux de deux manières
différentes, il peut y avoir modification de circuits déjà existants ou bien création de nouveaux
circuits.

Chez le singe, il a été prouvé que le fait de les exercer à une tâche de préhension augmentait la
représentation corticale de la main exercée, plus cette tâche est difficile et plus la représentation
corticale est importante.

Ces expériences sur les animaux peuvent s’appliquer à l’homme et permettre de confirmer que
les expériences vécues modifient l’organisation cérébrale, surtout au niveau des synapses.

Kolb (WHISHAW I., 2002) parle de thérapie comportementale pour accroître l’activité cérébrale
et stimuler les modifications neuronales. Cette thérapie comportementale ressemble en réalité
fortement aux exercices thérapeutiques cognitifs que décrit Perfetti (PICARD Y., 2006). Kolb note
une corrélation entre les modifications morphologiques au niveau cérébral et l’amélioration des
fonctions motrices de préhension fine et il précise que suite à une lésion cérébrale des modifications
cérébrales dues à la plasticité surviennent de la même façon que chez le sujet sain mais pas toujours
spontanément. Le sujet cérébrolésé doit donc bénéficier d’une thérapie comportementale afin de
stimuler ces modifications.

Tous ces apports sur la plasticité ainsi que les expériences menées sur les animaux par Kolb et
d’autres chercheurs ne valident pas la technique de Perfetti mais argumentent en sa faveur. D’un

22
point de vue purement théorique la méthode de Perfetti est idéale pour stimuler la plasticité
cérébrale.

o Limites de la technique :

La plupart des articles (ROUSSEAUX M., 2002) (TUFFERY R., 2003) (PICARD Y., 2006)
(DAVIET JC., 2002) référencés qui abordent le sujet de l’utilisation de cette technique de
rééducation la décrivent comme une méthode intéressante du point de vue théorique mais qui
présente cependant de nombreuses limites qui empêchent son utilisation chez tous les sujets
hémiplégiques. Les limites citées sont toujours les mêmes et réduisent fortement la population de
patients susceptibles de bénéficier de cette technique de rééducation dans des conditions idéales. On
retrouve notamment :

 Les troubles de la compréhension, qui empêcheraient le patient d’intégrer correctement les


consignes données par le thérapeute.
 Des troubles cognitifs atteignant la planification de l’action ou la mémoire de travail.
 Une anesthésie totale, qui rendrait impossible la validation d’une tâche perceptive par
exploration tactile des objets, alors que les troubles sensitifs habituellement rencontrés chez
l’hémiplégique obligent le thérapeute à utiliser des hypothèses perceptives simples.
 L’héminégligence empêcherait le patient de contrôler les réactions anormales puisqu’il
n’est pas conscient du fait que le membre supérieur atteint fait partie de son entité
corporelle. Des troubles de l’attention auraient le même résultat.
 L’absence de réveil moteur au niveau distal du membre supérieur rendrait impossible le
passage aux exercices du deuxième degré.
 Perfetti ne prend pas en compte en temps normal les entrées visuelles alors qu’elles
permettent l’apport d’informations proprioceptives importantes dans la constitution du
schéma corporel.

Les patients présentant des conditions idéales à l’utilisation de cette technique sont ceux qui
souffrent d’une atteinte motrice vraiment sélective. Ceci arrive dans des infarctus limités du
territoire de l’artère choroïdienne antérieure ou du territoire sylvien profond. Cependant ces patients
ne représentent pas la majorité des hémiplégiques qui présentent le plus souvent des atteintes mixtes
(motrice et sensitive) accompagnées de troubles cognitifs.

Cette méthode de rééducation n’est donc pas évidente à mettre en place chez la totalité des
patients hémiplégiques ce qui pourrait expliquer que les kinésithérapeutes ne l’utilisent que dans
certains cas.

23
CONCLUSION :

La question initialement posée dans ce travail était : Quelles raisons pourraient expliquer que
la méthode de rééducation mise en place par le Professeur Perfetti soit si peu utilisée dans la
prise en charge du membre supérieur du patient hémiplégique ?

Tout au long de ce travail, différents éléments de réponse ont pu être apportés. Chacun d’entre
eux pris séparément ne peut expliquer à lui seul le fait que cette méthode soit si peut utilisée.
Cependant, si l’on considère tous ces facteurs ajoutés les uns aux autres, cela peut permettre
d’expliquer ce phénomène.

Pour commencer, à peine 50% des kinésithérapeutes sont apparemment formés à la technique de
Perfetti, il semble normal de penser que si plus de kinésithérapeutes étaient formés alors cette
méthode de rééducation serait plus répandue.

S’ajoute à cela le fait qu’une partie des kinésithérapeutes formés juge cette technique trop
complexe à mettre en place et trop peu efficace comparativement au temps passé (apparemment
dans l’idéal cinq à six heures par jour pendant six semaines).

Les limites de cette méthode, qui la rendent applicable sur peu de patients, sont une des raisons
également évoquées par les kinésithérapeutes. Elles peuvent en partie expliquer le fait que les
thérapeutes doivent attendre d’avoir un patient ne présentant aucun trouble associé à sa déficience
motrice pour pouvoir utiliser la technique de Perfetti.

Le facteur principal qui fait que les kinésithérapeutes peuvent préférer une autre technique à
celle de Perfetti est qu’elle n’est pas validée scientifiquement.

De nouvelles questions découlent de toutes ces informations : Comment pourrait-on faire pour
que cette méthode de rééducation, qui semble tout de même très intéressante sur le plan théorique,
soit plus souvent utilisée par les kinésithérapeutes ? Serait-il possible d’extraire une partie de cette
technique, qui soit validée par des études, de façon à ce que l’utilisation de cette méthode en soit
rendu plus simple sans pour autant sacrifier les principes de base décrits par Perfetti ?

24
DISCUSSION :

Le premier temps de cette discussion porte sur la méthodologie utilisée afin de répondre à la
question de départ de ce travail.

Le questionnaire réalisé, même s’il met déjà en avant quelques points importants, est apparu
avec le recul comme incomplet. En effet il aurait été intéressant de savoir quelles autres techniques
les kinésithérapeutes interrogés utilisent pour la prise en charge du membre supérieur de leurs
patients hémiplégiques et surtout pourquoi. Cela aurait éventuellement pu apporter un
éclaircissement sur leurs motivations à utiliser préférentiellement d’autres techniques que celle de
Perfetti. Dans le même but il aurait fallu leur demander s’ils pensaient que la méthode de Perfetti
était validée ou pas et si cela influençait leur utilisation de cette technique.

Avec le recul, il est également apparu que la population ciblée par ce questionnaire aurait pu
s’étendre aux ergothérapeutes prenant en charge des patients hémiplégiques. D’autant plus que dans
de nombreux services de rééducation, ce sont principalement ces thérapeutes qui s’occupent de la
récupération fonctionnelle du membre supérieur alors que la priorité des kinésithérapeutes est de
refaire marcher le patient. Cela aurait permit de toucher un panel de thérapeutes beaucoup plus
important et aurait peut-être modifié les résultats obtenus.

La seconde partie de cette discussion, partant du constat de la non validation de la technique de


Perfetti, permet une ouverture sur un débat qui est d’actualité.

Beaucoup de méthodes (Bobath, Sohier, Kabat, Mézière…) souvent très répandues dans le
milieu de la rééducation, ont été élevées au rang de dogmes par leurs fondateurs qui préconisent
parfois leur utilisation exclusive (chacun pour sa méthode). Au sein de ces différentes techniques,
on en retrouve plusieurs qui elles non plus n’ont jamais fait l’objet de validation scientifique et sont
purement empiriques ou basées sur des théories uniquement physiologiques.

Le problème posé par toutes ces méthodes non validées n’est pas uniquement de savoir si elles
sont efficaces ou non. En effet, à une époque ou tout doit être justifié, où on parle de médecine
basée sur les preuves, comment pouvons-nous justifier de l’utilisation de méthodes n’ayant pas fait
l’objet de validations vis-à-vis de nos patients et du système de santé ? La question se pose d’autant
plus que les réformes de ce dernier sont de plus en plus nombreuses et que l’on doit de plus en plus
justifier nos actes de santé. On peut se demander ce qu’il va advenir du remboursement de ces
méthodes si l’on n’est pas capable de les justifier par des preuves scientifiques telles que des études.

25
Raisons de la non utilisation de la technique
de Perfetti

3
18% manque de connaissances
manque de matériel
3 9
17% 53% manque de temps
trop complexe
2
12%

Figure 1: Raisons, données par les kinésithérapeutes interrogés, pour lesquelles ils n’utilisent
pas la technique de Perfetti (15 réponses reçues avec plusieurs raisons possibles).
Temps d'utilisation de la technique de
Perfetti par semaine et par patient

1
7%
moins de 15 minutes
4
27% moins de 30 minutes
8
53% moins de 1 heure

2 plus de 1 heure
13%

Figure 2: Temps d’utilisation de la technique de Perfetti par semaine et par patient, estimé
par les kinésithérapeutes interrogés (15 réponses reçues)

Echelle d'éfficacité de la technique de


Perfetti
4,5
4
3,5
3
2,5
2 Nombre de réponses
1,5
1
0,5
0
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

Figure 3: Evaluation, par les kinésithérapeutes interrogés, de l’efficacité de la technique de


Perfetti sur une échelle allant de 0 à 10 (16 réponses reçues).
BIBLIOGRAPHIE :

AHMAD RIFAII SARRAJ. Que reste-t-il de la méthode Bobath ? Kinésithérapie la revue, 2006,
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ANNEXES :

Annexe 1 :

Questionnaire Perfetti

Bonjour,
Je suis actuellement étudiante en 3ème année de masso-kinésithérapie à l'IFMK de Rennes et
dans le cadre de mon mémoire de fin d'études je sollicite votre aide. Le sujet de mon mémoire
est en relation avec la méthode de Perfetti et ce questionnaire va me permettre de mieux
connaitre les habitudes des masseurs-kinésithérapeutes en ce qui concerne cette technique. Je
vous remercie de bien vouloir y répondre rapidement, cela ne vous prendra que quelques
minutes.
Merci d'avance
Le Dû Oriane, K3 à l'IFMK de Rennes

Connaissez-vous la technique de Perfetti? *


• oui
• non

Avez-vous suivi une formation à cette technique? *


• oui
• non

Utilisez-vous cette technique dans la prise en charge de vos patients hémiplégiques? *


• oui
• non

Si non, pourquoi?
• manque de matériel
• manque de temps
• manque de connaissances sur cette technique
• trop complexe
• pas efficace
• autre

Si autre, précisez
Si vous utilisez cette technique, connaissez-vous le protocole mis en place par Perfetti?
• oui
• non

Si oui, précisez en quelques mots quel est ce protocole

Respectez-vous ce protocole dans votre prise en charge?


• oui
• non

Connaissez-vous le but de cette technique?


• oui
• non

Si oui, précisez en quelques mots quel est ce but

Est-ce la seule technique que vous utilisez?


• oui
• non

Combien de temps par semaine et par patient estimez-vous utiliser cette technique?
• moins de 15 minutes
• moins de 30 minutes
• moins de 1 heure
• plus de 1heure

De votre point de vue, notez l'efficacité de cette technique

0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

pas du tout efficace toujours efficace

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