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EVALUATION DES ENTREPRISES

Université Mohammed V de Rabat

Faculté des sciences juridiques économiques et sociales- Salé


Cours Semestre 6 Pr. Nawal BENSAID

EVALUATION DES ENTREPRISES

Plan du cours :

- Approches patrimoniales

- Approches actuarielles

- Approches boursières

ANNEE UNIVERSITAIRE

2019-2020

Pr N.BENSAID 1
EVALUATION DES ENTREPRISES

- C’est quoi l’évaluation des entreprises ?


- C’est quoi l’objet de l’évaluation ?
- Dans quel objectif ?
- Quelles sont les grandes approches d'évaluation?
- Quelles sont les méthodes d’évaluation qui existent ?
- Sont-elles indépendantes ou complémentaires ?

Pr N.BENSAID 2
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La valeur est un concept d’appréciation des caractéristiques qualitatives et


quantitatives d’un objet. Elle mesure son importance par rapport à d’autres objets. Cette
mesure peut être exprimée par une appréciation personnelle (valeur relative, valeur d’utilité)
ou encore par une appréciation collective (valeur d’échange, valeur de marché).
La valeur et l’évaluation ont fait l’objet, toutes les deux, de plusieurs théories au cours
de l’histoire économique. Dans le cadre de l’efficience du marché, spécialement sous
l’hypothèse de rationalité des investisseurs, les estimations individuelles doivent converger
vers une seule estimation de la valeur fondamentale.

La valeur intrinsèque n’est ni précise ni facile à déterminer. Elle est définie comme
étant la valeur justifiée par les faits, c’est-à-dire les actifs, les bénéfices, les dividendes et les
perspectives claires. C’est une opération assez compliquée du moment que la valeur d’un titre
n’est que l’évaluation des flux futurs. La question posée est toujours : quel est mon rapport à
l’avenir ?

Dans sa Théorie générale, Keynes indiquait que « la valeur fondamentale d’une


entreprise correspond à une estimation de la valeur actuelle des flux futurs de revenus attachés
à la détention de son capital »1. L’actionnaire serait ainsi riche des revenus futurs actualisés
que vont lui procurer les actions dont il est propriétaire. La théorie financière a introduit dans
ce cadre l’idée d’un placement en actions d’une durée infinie, même si, dans la réalité, les
investisseurs se relaient les uns les autres dans une sorte de chaîne sans fin, sachant qu’au
moment de chaque transaction, l’acquéreur appréciera la valeur de son investissement à
travers la valeur actuelle des flux prévisionnels de revenus qu’il est censé recevoir, année
après année, sans limite de temps. D’où la nécessité théorique d’effectuer des calculs
d’actualisation sur une durée infinie.

I- L'objet et motifs de l'évaluation :

L’évaluation d’une entreprise est nécessairement liée aux circonstances dans lesquelles
elle est menée. Elle dépend, certes, de l’entreprise à évaluer, mais aussi du contexte de la
mission d’évaluation elle même.

1
J. M. Keynes (1971) « Théorie Générale de l’Emploi, de l’Intérêt et de la Monnaie, Paris, Petite Bibliothèque
ère
Payot, n°139, [1 édition 1936].

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L’évaluation d’une entreprise peut être menée à différentes occasions, dont


principalement :
- Cession totale d’une entreprise,
- Acquisition du contrôle d’une entreprise,
- Introduction en bourse ou acquisition d’actions sur ce marché ;
- Augmentation de capital, fusions et autres,
- Liquidation.
- Recherche de nouveaux financements
- Rapprochement ou de partenariat avec d’autres entreprises.

L'approche ne peut être la même pour chacune de ces circonstances. La valeur à


l’occasion d’une liquidation repose sur la détermination de la valeur de liquidation des
éléments patrimoniaux de l’entreprise, alors que la valeur à l’occasion d’une cession globale
de l’entreprise nécessite l’appréciation de la capacité de l’entreprise à continuer son
exploitation.
La valorisation lors d'une cession globale de l'entreprise est différente du cas de
valorisation pour la cession d'une part seulement de son capital. L'approche diffère même
suivant la proportion du capital à céder ou à acquérir: l’acquisition d’un bloc de contrôle
d’une entreprise est différente d’un placement financier par achat de titres en bourse de cette
même entreprise.
L'approche ne peut être la même pour chacune de ces circonstances. La valeur à
l’occasion d’une liquidation repose sur la détermination de la valeur de liquidation des
éléments patrimoniaux de l’entreprise, alors que la valeur à l’occasion d’une cession globale
de l’entreprise nécessite l’appréciation de la capacité de l’entreprise à continuer son
exploitation.
La valorisation lors d'une cession globale de l'entreprise est différente du cas de
valorisation pour la cession d'une part seulement de son capital. L'approche diffère même
suivant la proportion du capital à céder ou à acquérir: l’acquisition d’un bloc de contrôle
d’une entreprise est différente d’un placement financier par achat de titres en bourse de cette
même entreprise.
Quant il s’agit de valoriser une entreprise dans une perspective de liquidation, on n’a
pas réellement besoin d’un expert en évaluation d’entreprises, mais plutôt de différents
experts en immobilier, en équipements et autres.

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L’évaluation d’entreprises prend son sens pour une entité qui continue son exploitation
et qui justifie, donc, une valeur différente de celle qu’elle aurait eue si elle était destinée à la
liquidation.
Si la continuité d’exploitation d’une entreprise est vérifiée, alors sa valeur sera
nécessairement supérieure à la valeur des éléments patrimoniaux qui la constituent, on
parlerait de survaleur de l'entreprise et où donc, la valeur de l’entreprise sera exprimée comme
suit : VE = Patrimoine + survaleur

La survaleur représente la valeur de la capacité de l’entreprise à se maintenir en


activité et est ainsi, fonction de sa rentabilité future. Cette valorisation se défend pour une
cession globale d’une entreprise. Il n’en est pas de même, lorsqu’il s’agit de l'acquisition
d'une proportion du capital. Si cette acquisition est minoritaire, l'opération d'évaluation
concerne un simple placement, et donc c'est la valeur de rentabilité qui serait cherchée. Pour
sa part, si l'acquisition est majoritaire, la valeur de l'entreprise pourrait contenir une survaleur
spécifique qui découle de l'intérêt qu'a l'acquéreur dans la concrétisation de cette opération.
Il est également à signaler que, même pour le cas d’une cession globale d’une
entreprise, l’approche pourrait différer selon les attentes spécifiques de l’acquéreur ou encore
selon qu’il s’agisse d’une entité industrielle, commerciale ou de services. L’approche
Patrimoine + survaleur n’est pas toujours évidente pour les deux derniers cas. Une approche
basée seulement sur le revenu futur pourrait se justifier davantage.
L’approche basée sur le revenu pourrait se justifier pour tout autre cas aussi, dés lors
qu’elle incarne la notion de la valeur même: la valeur d’un objet à un instant donné
correspond à la valeur des avantages que cet objet pourrait procurer à son détenteur.
On comprend par là, qu’il n’existe pas une seule approche, mais qu’il y en a plusieurs.
L’important est de choisir l’approche qui se justifie le mieux, compte tenu de l’entreprise à
évaluer et du contexte de l’évaluation. L’évaluation d’une entreprise consiste à arrêter une
valeur (ou une fourchette de valeurs) compte tenu du contexte et de l’objectif de la mission.
L’évaluation des entreprises est ainsi traitée en deux parties:
Première partie : LA PHASE PRELIMINAIRE A L'EVALUATION
Deuxième partie: LA DETERMINATION DE LA VALEUR DE L'ENTREPRISE

II- LA PHASE PRELIMINAIRE A L'EVALUATION

L’évaluateur a besoin de collecter des informations sur les valeurs comptables, la


rentabilité, la croissance et la performance. Il doit être à même d’apprécier les prévisions

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financières de l’entreprise à évaluer. Il a besoin, pour ce faire, d’analyser de nombreux


paramètres économiques (la notoriété, la position sur le marché, les moyens humains,
l’environnement, etc.)
L’évaluateur doit alors accomplir un certain nombre de tâches avec soins et attentions,
en vue de recueillir les informations nécessaires à la valorisation de l’entreprise. On qualifie
cette étape de la mission de Due Diligence. La due diligence doit couvrir les domaines
financiers, stratégiques, opérationnels, organisationnels, juridiques et fiscaux et de l’entreprise
à évaluer.
L’évaluateur devra traiter un ensemble d’informations variées et parfois complexes,
collectées à l’intérieur ou à l’extérieur de l’entreprise afin de mieux la comprendre sous ses
différents aspects (comptables, financiers et autres) et de la situer dans son environnement
juridique, économique et social.
Il découle de ce qui précède, la nécessité de réaliser un diagnostic global, dénommé
aussi diagnostic pluridisciplinaire qui associe aux compétences financières requises pour
l’évaluation, des compétences stratégiques, industrielles, commerciales, juridiques voire
sociales.
Ce diagnostic va porter sur les aspects actuels de la situation patrimoniale et sur les
aspects actuels et futurs du marché, des produits, de la production, des ressources humaines et
de l’organisation générale.
Le diagnostic débute par une prise de connaissance préliminaire de l’entreprise pour
permettre à l’expert évaluateur de définir et de planifier une approche de la mission et de
préparer les travaux du diagnostic général. Le diagnostic général de l’entreprise se subdivise
en deux catégories: le diagnostic comptable et financier et le diagnostic stratégique.
II-1- le diagnostic comptable et financier :
A l’issue de ce diagnostic, l’évaluateur est ainsi en mesure de proposer, par rapport
aux états financiers établis par l’entreprise, les ajustements sur les éléments patrimoniaux et
sur les données d’exploitation.
Des états financiers retraités seront alors établis par l’expert évaluateur et serviront de base à
la mise en œuvre des différentes méthodes d’évaluation.
II-2- le diagnostic stratégique:
Il s’agit de l’examen des données d’exploitation en vue de s’assurer de la continuation
de l’activité de l’entreprise dans les conditions actuelles et d’identifier les éléments
susceptibles de modifier dans l’avenir les courbes d’évolution obtenues dans le passé. Ce
diagnostic sera mené sur quatre aspects : commercial, technique, organisationnel et juridique.

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Il devra en conséquence exploiter les informations collectées et les travaux effectués


pour en faire une synthèse lui permettant de valider les prévisions d’exploitation de
l’entreprise à évaluer. Ces prévisions seront consignées dans un plan d’affaires : Business
Plan qui servira d’outil de base pour la valorisation à déterminer.
Le business plan constitue un outil de synthèse de l’avenir de l’entreprise sur un
certain nombre d’années. L’évaluateur se doit d’apprécier le caractère vraisemblable du
Business Plan avant de l’utiliser dans ses calculs de valeur.

III- DETERMINATION DE LA VALEUR DE L’ENTREPRISE

La valeur fondamentale d’une société repose sur deux principaux éléments : les profits
futurs que la société est supposée pouvoir extraire dans les prochaines années, d’une part, et le
coût du capital qui correspond à l’exigence des investisseurs, de l’autre.

En notant Ft le flux de revenus que l’actionnaire reçoit à la date t, il vient que le prix
en date t d’une action est, en première approximation :

(1) = +=( + …..+ ( +….=
) ) ( )

Où : x : est le taux d’actualisation de la séquence de flux futurs.

Pt : représente la valeur fondamentale en date t de l’action.

Une première difficulté majeure liée à l'estimation de la valeur fondamentale est


associée à l'estimation des résultats futurs de l'entreprise (Gordon, 19632; Molodovsky, 19623;
Shiller, 19814 ; et Prat, 19845). Une deuxième difficulté découle du choix du taux d'intérêt
servant à actualiser les flux de revenus futurs (Allais,19726; Shiller, 1981 et Prat, 1984).

III.1- Les flux à actualiser:

Dans la pratique, la détermination des flux ne peut être menée à bien qu’avec l’aide de
modèles s’appuyant sur des hypothèses simples d’évolution des flux prévisionnels Ft

2
Myron J. Gordon (Sep., 1963), « The Investment, Financing, and Valuation of the Corporation” The Journal of
Finance Vol. 18, No. 3, pp. 579-581
3
Nicholas Molodovsky (1965), « Common Stock Valuation », The Financial Analysts Journal.
4
Shiller R. (1981), « Do Stock Prices Move Too Much to be Justified by Subsequent Changes inDividends », The
American Economic Review, Vol. 71, n°3, pp.421-436.
5
G. Prat (1984), « Essai Pour Une Formulation Générale Du Cours Des Actions », Economica, 286 pages, Paris.
6
M. Allais (1972), “Forgetfulness and Interest”, Journal of Money, Credit and Banking, vol.4, n°1, pp. 40-71.

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(supposés soit constants, soit animés d’un taux de croissance annuel constant) qui rendent
ainsi possibles les calculs en question. Dans ce sens, les théoriciens ont retenu cinq types7 de
variables pour déterminer les flux de revenus :

Premier type : les dividendes (Dt) versés à l’actionnaire et qui correspondent à son
revenu tant qu’il est propriétaire d'une action. La formule (1) devient dans ce cas :

(2) =
( )

Avec : Pt = la valeur actuelle ;

Dt = le dividende global versé en année t ;

x = le taux d’actualisation correspondant au coût des fonds propres.

En matière d'actualisation des dividendes, plusieurs modèles ont été développés dont
les plus importants portent les noms de leurs promoteurs.

Deuxième type : les dividendes versés sur la durée de détention majorés d’un prix de
revente du titre à l’issue de celle-ci. La méthode correspondante, appelée modèle de Bates.

Troisième type : les excédents de trésorerie distribuables encore appelés cash-flows


libres (free cash-flow) qui sont censés représenter le bénéfice distribuable qui pourrait revenir
aux actionnaires année après année. Les prévoir suppose de disposer d’un plan d’affaires
prévisionnel détaillé qui ne peut être établi sans un sérieux diagnostic de la valeur étudiée. À
l’issue de ce plan prévisionnel, un modèle fondé sur un taux de croissance constant des flux
est le plus souvent appliqué, rendant ainsi possible le calcul jusqu’à l’infini, puisque la suite
des termes d’une progression géométrique présente alors une somme finie.

Quatrième type : la trésorerie secrétée par l’exploitation de l’entreprise (cash-flow


disponible ou cash-flow d’exploitation) qui met en relation la rentabilité d’exploitation et la
trésorerie corrélative qu’elle dégage avec la valeur des actifs engagés dans cette exploitation,
au-delà du plan d’affaires prévisionnel, on utilise généralement un modèle avec taux de
croissance constant des flux jusqu’à l’infini qui, là aussi, rend le calcul possible. Il conduit à
déterminer la valeur d’une entreprise en substituant à la valeur comptable de ses actifs
d’exploitation, la valeur actualisée des cash-flows générés par ces actifs, nets des

7
D’après la classification retenue par les auteurs de l’ouvrage qui s’intitule « la critique de la valeur
fondamentale »

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investissements et des augmentations de besoins de fonds de roulement nécessaires pour


atteindre les objectifs de résultats prévus.

Cinquième type : le supplément de rentabilité d’exploitation, s’il existe, apprécié par


rapport aux normes du marché (c’est-à-dire par rapport à la rentabilité procurée par des actifs
comparables, notamment en regard des risques dont ils sont porteurs). À cette performance de
rentabilité future est alors associé par actualisation, sur la durée d’existence de cette
performance, un supplément de valeur, de nature incorporelle s’ajoutant à la valeur comptable
des fonds appartenant aux actionnaires (les fonds propres). On dira d’ailleurs qu’une affaire
crée de la valeur pour ses actionnaires dès lors que les performances de rentabilité des
capitaux qu’elle met en œuvre dans son exploitation dépassent les normes (ou des attentes) du
marché. Se rattachent à cette sous-famille, les modèles d’évaluation dits de la rente du
goodwill et de l’EVA/MVA (Economic Value Added et Market Value Added).

Toutes ces méthodes d’actualisation de flux futurs de rentabilité, qui s’appuient sur
des modèles prévisionnels différents, ont en commun, dès qu’on les met en œuvre
correctement, de faire recourir à des données de marché permettant de déterminer le taux
d’actualisation à utiliser. Comment calcule-t-on ce taux d'actualisation ?

III.2- Calcul du taux d'actualisation et détermination de la prime de risque :

Les méthodes d'évaluation basées sur les prévisions nécessitent la fixation d'un taux
d'actualisation. Rappelons ainsi que le taux d'actualisation est le taux de rémunération
minimale exigée par un actionnaire pour tenir compte des aléas qui entachent la pérennité des
bénéfices de l'entreprise. De sorte que plus l'investissement est risqué, plus l'investisseur sera
tenté d'exiger une rémunération élevée.

Le taux d’actualisation correspond à deux réalités économiques : la probabilité


d’occurrence ou non des profits (capacité d’exécution du management du plan stratégique
présenté) et l’exigence de capital souhaitée par les investisseurs. Cette exigence de rentabilité
s’estime comme la somme du taux sans risque (taux des emprunts des États sur une moyenne
ou longue maturité, 5 ou 10 ans par exemple) et la prime de risque.

Cette prime de risque est liée à une composante globale (marché) qui correspond à
l’appétit du marché action pour le risque au moment de l’évaluation et une composante
spécifique (dite bêta) qui correspond au risque spécifique à la société par rapport au groupe de
sociétés cotées sur le marché considéré.

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La prime de risque est considérée également comme un indicateur qui représente la


rémunération supplémentaire exigée par un investisseur pour la détention d’un actif au
rendement incertain par rapport à un titre souverain.

Cependant, cette approche suppose que les marchés sont, à tout moment, efficients, et
que la prime de risque pourra être extraite de la vue du marché et des valorisations des
sociétés qui le constituent.

Le taux d’actualisation est généralement calculé en ayant recours à l'approche du


coût moyen pondéré du capital (CMPC) dont la formule est la suivante :

CMPC = Ks (S /D+S ) + Kd ( D/S+D )

Où:

Ks : Le coût du capital

Kd : Le coût de la dette

D : Dettes totales

S: Capitaux propres

III.3- Les principales méthodes actuarielles d'évaluation des actifs financiers

Les principales méthodes d’évaluation couramment utilisées s’appuient actuellement, soit


sur la théorie du portefeuille de marché et le célèbre modèle d’évaluation des actifs financiers
(CAPM), soit plus directement sur l’observation du comportement des marchés avec alors
pour objectif d’en tirer des comparaisons.

Dans la pratique, trois grandes approches, considérées comme étant complémentaires,


sont utilisées par les analystes. Il s’agit d’approches dynamique, comparative et patrimoniale
dont nous allons donner, ci-après, les principales caractéristiques.

III.3.1. L'approche dynamique:

On l'appelle aussi l'approche par les flux, elle se fixe comme objectif de déterminer au
plus près les flux économiques et financiers futurs de l'entreprise.

On distingue principalement deux types de flux :

- Les flux de Résultat net ou de Dividende : il s'agit principalement des modèles


d’Irwing Fisher et, de Gordon Shapiro.

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- Les flux de trésorerie ou flux de « cash » sécrétés par l'activité : il s'agit de la


méthode dite Discounted Cash Flow (DCF).

- Le modèle de Irwing Fisher : Le modèle d’Irving Fisher suppose que la valeur d’une action
correspond à la valeur actuelle des flux de dividendes à recevoir par l’actionnaire.

Concernant la progression des dividendes, Irwing Fisher suppose que le flux de


dividendes à recevoir est constant, soit Dt= D pour tout t. Cette hypothèse, très simplificatrice,
met alors l’actionnaire dans la position du détenteur d’une rente perpétuelle dont il est
possible de calculer la valeur, ainsi la formule (2) devient après calculs8 :

(3) =

Ce modèle est resté limité parce qu’il suppose que les dividendes à un certain moment
sont constants, alors que ce n’est pas vrai. Par contre, d’autres efforts de simplification ont
permis de développer d’autres modèles plus accessibles et plus satisfaisants.

- Le modèle de Gordon et Shapiro: Elaboré en 1956, il se base sur le modèle d’actualisation


des dividendes. Ce modèle s’appuie sur le principe que le prix d’une action correspond à la
somme des flux de dividendes générés par l’entreprise actualisés au taux de rentabilité exigé
par les actionnaires.

Gordon et Shapiro reprennent le modèle de Fisher en introduisant un certain nombre


d’hypothèses qui permettent de valoriser une action et donc une société :

◦ Les dividendes augmentent à un taux constant, année après année (hypothèse de croissance
perpétuelle des bénéfices), soit Dt+1 = Dt(1+g),

◦ Le taux de distribution des bénéfices (Le pay - out ratio) est identique tous les ans.

◦ La période de distribution des dividendes est infinie si D est le dividende à recevoir.

Alors le cours de l’action peut être estimé ainsi:


( )
(4) =

Où :

Pt= Prix de l’action au temps t,

D = dividende attendu à la fin de l’année,

8
C.Walter et E.Brian (2008) « Critique De La Valeur Fondamentale » P. 16.

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x = rentabilité exigée,

g = taux de croissance constant des dividendes

Ce modèle est approprié si le taux de croissance du dividende est constant et si le taux


de rendement exigé est supérieur au taux de croissance des dividendes, ce qui n’est pas
forcément le cas dans la réalité, ce qui fait que le modèle de Gordon – Shapiro est resté limité
parce que le taux de croissance des dividendes est croissant à une période donnée mais varie
dans d’autres périodes.

- The Discounted Cash Flow Model:

La méthode d’évaluation de l’entreprise par l’actualisation des flux de trésorerie est


développée en 1990 par le cabinet Mc Kisney, en se basant sur les travaux académiques
fondateurs de Markovitz, Sharpe, Modigliani et Miller, Gordon et Shapiro. Dans cette
méthode, l’entreprise est considérée comme une entité dont la valeur correspond à la somme
des valeurs actuelles des flux futurs, engendrés par son exploitation, actualisés à un taux
approprié. Les Cash-Flows représentent le potentiel de création de valeur de l’entreprise car
ils peuvent être réinjectés dans la société. Cette méthode permet de dégager la valeur
économique de l’entreprise en faisant abstraction de ses dettes financières.

Les auteurs ayant développé ce modèle sont Copeland et al (1991)9, Stewart (1991)10
et Hackel et Livnant (1992)11. Cette méthode s’appuie sur les critiques apportées aux
méthodes traditionnelles d’évaluation telles que le bénéfice net, qui est un mauvais indicateur
de gestion dont la croissance n’est pas synonyme de rentabilité. Le vrai critère est celui du
cash-flow qui mesure le flux de liquidité généré par l’entreprise. Le concept pertinent est celui
du cash-flow disponible ou free cash-flow c’est-à-dire le cash-flow total après impôts et
charges financières et investissements à la disposition des apporteurs de ressources financières
: créanciers et actionnaires.

Cette méthode constitue une des méthodes modernes les plus employées de
détermination normative de la valeur actionnariale qui s’appuie sur le concept du coût moyen
pondéré (CMPC) ou AverageWeightedCost of Capital (WACC).

9
T. Copeland, T. Koller, J. Murrin(Mar., 1991), “Measuring and Managing the Value of Companies”The Journal
of Finance Vol. 46, No. 1, pp. 459-463
10
G.B. Stewart (1991), “ The Quest for Value: A Guide for Senior Managers”, Harper Business, New York
11
K. Hackel, J.Livnat (1992); “Cash Flows and Security Analysis”, Business One Irwin.

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La DCF est une méthode très utilisée actuellement car elle repose sur une idée simple :
une entreprise n’a de valeur que si, un jour, elle rapporte de l’argent. Certains auteurs
(COPELAND et al, 200012 et DAMODARAN, 199913), la considèrent comme étant la plus
dominante et la seule approche reposant sur un fondement théorique solide.

Malgré ces avantages, cette méthode reste difficile dans son application parce que
l’estimation du taux d’actualisation est délicate pour les raisons suivantes :

- Le coût des fonds propres est déterminé sur base de données passées et non futures ;

- La pondération entre l’endettement financier et les capitaux propres n’est guère aisée vu la
difficulté d’appréhender une structure de financement optimale pour l’entreprise.

En plus de ça, l’information qui circule dans l’entreprise est souvent limitée surtout
pour l’analyse externe ou l’acquéreur potentiel. Cette méthode repose sur des données
prévisionnelles. A cause de ces limites, le calcul de la valeur terminale est lui aussi délicat.

III.3.2- L'approche comparative:

Pour mettre en œuvre cette approche, l'évaluateur recherche sur les marchés boursiers
un échantillon de sociétés comparables à celle qu'il se propose d'évaluer.

La particularité des sociétés cotées est bien entendu que leurs cours de bourse
constituent, pour elles, une référence de prix. L'évaluateur cherche à déterminer les critères
communs de valorisation qui se dégagent de l'échantillon. Il les applique ensuite à la société,
objet de son étude, pour définir sa valeur ou sa fourchette de valeur. On distingue parmi ces
méthodes principalement le PER et la méthode de Bates.

- Le Price Earning Ratio:

Le PER indique « combien de fois le bénéfice » la bourse a accepté de payer un titre. C’est-à-
dire, à combien de fois on capitalise le revenu que peut procurer une entreprise.

Le calcul du PER s’effectue en rapportant le cours d’une action au bénéfice par action :

(5) PER =

- Le Modèle de Bates (1962) : il met donc en relation trois variables qui sont la valeur
présente, la valeur de revente à un horizon fini (quelques années, en général) et les prévisions
12
T. Copeland., T. Koller and J. Murrin (2000), ” Valuation – Measuring and Managing the Value of Companies.
3rd edition. New York: Wiley & Sons.
13
A .Damodaran (1999), « Discounted Cash flow Valuation: Equity and Firm Models”.

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de dividendes à recevoir avant revente. La connaissance de deux de ces trois variables permet
de déterminer la troisième. Ce modèle reflète plutôt bien le comportement réel des
investisseurs qui achètent un titre, le conservent en portefeuille quelques années et enfin le
cèdent sur le marché.

Le modèle de Bates permet d’évaluer une société en tenant compte des bénéfices
futurs et du Pay-Out et pas simplement du dividende comme dans le modèle de Gordon
Shapiro. Il permet par ailleurs de diviser la période totale d’observation en sous-périodes ce
qui résout ainsi le problème de constance des données inhérent au modèle de Gordon Shapiro.
La méthode de Bates bénéficie ainsi d’un aspect plus réaliste puisqu’il est possible-
conformément à la réalité du marché- de modifier les paramètres de la formule. L’originalité
et la réalité de la formule de Bates résident dans la logique comparative du modèle.

La relation est la suivante: la société appartient à un échantillon ou à un secteur de


référence dont les données (Price Earning Ratio (PER), Pay-Out, taux de croissance des
bénéfices sur n années et rentabilité exigée par les actionnaires), sont connues. Elles
permettent de définir le Price Earning Ratio du secteur, à l’année n. Au-delà de l’année n,
l’horizon est trop lointain et Bates affirme que le PER du secteur se confond alors avec le
PER de la société. Dès lors, à partir des prévisions effectuées par les analystes sur le secteur
pour les périodes n, il est possible de déterminer la valeur actuelle de la société.

La formule permet de relier le PER initial au PER final comme suit :

(6) = ( ) +d [1- ( )]

Avec :

- PERn : le PER du secteur de la société;

- d : le taux de distribution du bénéfice (Part du bénéfice versé aux actionnaires sous forme de
dividendes);

- g : le taux de croissance du bénéfice supposé constant sur la période de croissance;

- k : le taux de rentabilité exigé par les actionnaires;

- n : le nombre d’années de croissance au taux unique g.

À partir de cette formule, la valeur de l’action est :

!" = #$%" X Bénéfice par action à l’instant 0

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Le modèle de Bates convient bien à l’évaluation d’une entreprise dite de croissance


qui, dans quelques années, s’alignerait sur les autres entreprises de son secteur.

III.3.3. L'approche patrimoniale

Cette approche se base sur le principe que l'entreprise vaut ce qu'elle possède. Elle
consiste donc à rechercher la valeur de marché de chacun des éléments qui composent l’actif
et le passif envers les tiers de l’entreprise. Le solde de ces deux agrégats correspondra à l’actif
net corrigé ou réévalué, c’est-à-dire aux fonds propres réévalués de l’entreprise. Il est à noter
que l'évaluateur peut être amené à utiliser les autres approches présentées précédemment
(dynamique et analogique) pour valoriser certains postes figurant (comme la participation) ou
ne figurant pas (exemple du goodwill) à l’actif du bilan.

En effet comme il s'agit d'une méthode statique, s'appuyant dans bien des cas sur des
expertises, cette dernière trouve dans la pratique de sérieuses limites à son utilisation, De ce
fait, elle n’est pas adaptée aux affaires connaissant une évolution rapide : start-up, sociétés en
forte croissance, pour lesquelles les derniers comptes publiés ne donnent qu’une image
dépassée de l’affaire et de son potentiel, tant est rapide son évolution.

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Bibliographie

- Alain Coulaud(2009) « Diagnostic financier et évaluation financière de l'entreprise »,


Edition Les éditions Démos.
- Bernard Dumas, Blaise Allaz (1995) « les titres financiers, équilibre du marché et
méthodes d'évaluation ». Presse universitaire de france.
- Charles André Vailhen (1995), « Évaluation de l'entreprise et coût du capital »
Vuibert.
- Christian Hoarau (2008), « Analyse et évaluation financière des entreprises et des
groupes » Vuibert.
- Christian Pierrat,(1990) « Evaluer une entreprise, cession gestion transmission »,
Editions Nathan, Paris.
- Emmanuel tchemeni (2009), « l'evaluation des entreprises » Economica, 4ème édition.
- Florence Pierre, WalthèreMalissen (1995), « Valorisation de l'entreprise et théorie
financière » Collection Gestion.
- Gérard Hirigoyen (1988), « Évaluation des sociétés et de leurs titres » Vuibert
Gestion.
- Jean Brilman, Claude Maire (1992), « Manuel d'évaluation des entreprises : Sociétés
cotées et non cotées » les éditions d'organisation.
- Jean Raffegeau, Fernand Dubois (2003). « L'Évaluation financière de l'entreprise »
Collection Que sais-je?.
- Jean-Michel Palou (2008). « Les méthodes d'évaluation d'entreprise », 2ème Edition
Groupe Revue Fiduciaire.
- Philippe de La CHAPELLE (2002). « L'évaluation des entreprises », Edition
Economica, Paris.
- Philippe Giraudon, Vincent Juguet, Stéphane Onnée (2009)
« Evaluationd'Entreprises », Edition PEARSON.

Pr N.BENSAID 16

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