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23-440-A-10
Mots-clés : Maladie gingivale ; Gingivite ; Plaque dentaire ; Biofilm ; Risque parodontal ; Facteur systémique
Définitions. Classification. L’aspect réversible des lésions tissulaires après l’instauration d’un
traitement étiologique en fait la principale caractéristique par
Terminologie rapport à la parodontite.
Nous aborderons l’ensemble des maladies gingivales induites par la
La terminologie en parodontologie, comme dans toutes disciplines
plaque bactérienne dentaire : dans un premier temps les gingivites,
médicales, est évolutive en fonction des progrès des connaissances
puis les maladies gingivales modifiées par les différents facteurs sus-
étiologiques et pathogéniques. [1, 2]
cités. Nous ne manquerons pas de faire un diagnostic différentiel
De nombreux termes concernant les gingivites sont ainsi devenus d’avec les maladies gingivales non induites par la plaque
obsolètes. À la lumière des dernières classifications des maladies bactérienne et les parodontites.
parodontales et en particulier de celle d’Armitage, [1] adoptée lors
de la Conférence internationale de consensus de l’Académie
américaine de parodontologie en 1999, se dégage une orientation
consensuelle à ce sujet. Il existe deux grands types de maladies Diagnostic positif des gingivites
gingivales (gingivopathies) : les maladies gingivales induites par la
plaque bactérienne dentaire (biofilm dentaire) [3] et les maladies Le tableau de la gingivite est souvent discret ; son installation passe
gingivales non induites par la plaque bactérienne dentaire. fréquemment inaperçue. Les premiers signes de la gingivite sont une
Les gingivites au sens strict du terme sont actuellement définies augmentation du volume du fluide gingival, une tendance de la
comme des maladies gingivales associées uniquement à la plaque fibromuqueuse au saignement provoqué par un sondage délicat à
bactérienne sans facteurs modifiants. En effet, dans le groupe des l’entrée du sillon gingivodentaire (sulcus). En effet, le saignement
« maladies gingivales induites par la plaque », se trouvent également serait pour de nombreux auteurs le premier signe à apparaître lors
les maladies gingivales modifiées notamment par des facteurs de gingivite, avant même le changement de couleur ou tout autre
systémiques ou par des médicaments. signe. [4, 5] Le saignement gingival, ou gingivorragie, déclenché par
Les maladies gingivales induites par la plaque dentaire se le brossage buccodentaire, peut être évoqué par le patient ou
caractérisent par une inflammation gingivale localisée à la seule recherché par le praticien lors de l’entretien avec le patient. Les
fibromuqueuse gingivale. C’est la forme la plus commune de gingivorragies spontanées sont rares, voire inexistantes dans le
maladies gingivales, qui s’observe aussi bien chez l’enfant que chez tableau de la gingivite ; elles signent dans la majorité des cas des
l’adulte. troubles généraux, comme des troubles de la crase sanguine. La
gingivite évolue généralement en l’absence de douleur ; parfois les
patients décrivent des agacements gingivaux (prurit gingival) ou
une sensibilité gingivale accrue. Les signes classiquement retenus
pour décrire la gingivite sont ceux liés à l’installation du processus
F. Boschin (Assistant des Universités).
H. Boutigny (Maître de Conférences des Universités, praticien hospitalier)
inflammatoire au sein d’un tissu, c’est-à-dire l’extravasation
Adresse e-mail : hboutigny@univ-lille2.fr vasculaire entraînant œdème et hyperhémie. Il y a donc des
E. Delcourt-Debruyne (Professeur des Universités, praticien hospitalier)
Sous-section de parodontologie, Faculté d’odontologie de Lille, Université « Droit et Santé » de Lille II, Place
modifications de couleur, de consistance, de texture, de volume et
de Verdun, 59000 Lille, France. de contour gingival.
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MODIFICATION DE COULEUR
De rose pâle, couleur normale de la fibromuqueuse gingivale, la
couleur de celle-ci passe au rouge, rouge violacé, rouge lie-de-vin.
L’intensité de l’érythème varie en fonction de celle de l’inflammation
et donc de l’hyperhémie sous-jacente. Elle varie également en
fonction du type de parodonte, fin et festonné ou épais et plat, la
densité collagénique dans ce dernier cas masquant l’inflammation
sous-jacente.
MODIFICATION DE CONSISTANCE
La fibromuqueuse gingivale saine est de consistance ferme et
élastique ; elle est fermement attachée aux plans dentaires et osseux
sous-jacents. Au cours de l’installation de la gingivite, la
fibromuqueuse gingivale devient molle, moins rénitente à la
pression digitale. Figure 1 Gingivite marginale généralisée débutante : les modifications gingivales
sont discrètes, témoignant d’une inflammation subaiguë.
MODIFICATION DE TEXTURE
Le granité, ou piqueté en peau d’orange, présent chez environ 40 %
de la population qui présentent une gencive normale, disparaît dans
la gingivite pour laisser place à des zones vernissées, lisses,
brillantes, qui témoignent d’une atteinte des fibres du tissu
conjonctif gingival.
Formes cliniques
La gingivite peut être localisée à une dent, ou bien généralisée à
l’ensemble des dents d’une cavité buccale. Elle peut siéger sur la
fibromuqueuse gingivale interdentaire ou papille (papillite), sur la
gencive marginale (gingivite marginale), sur toute la fibromuqueuse
gingivale (gingivite diffuse). L’intensité de la réponse de l’hôte à
l’agression d’origine bactérienne, c’est-à-dire l’intensité de la réponse
inflammatoire, dépend du caractère de virulence bactérienne et des
capacités de défense et de régénération de l’hôte ; il est ainsi
classiquement décrit des gingivites qui s’installent et évoluent Figure 3 Gingivite diffuse généralisée hyperplasique : sur une base de gingivite
lentement, des gingivites aiguës, d’apparition soudaine, des installée, l’inflammation aiguë se traduit par la présence de zones érythémateuses qui
sont associées à des accroissements du volume de la gencive déformant le contour gin-
gingivites subaiguës et des phases d’inflammation aiguë survenant
gival.
sur une gingivite déjà installée (Fig. 1, 2, 3).
¶ Indice de plaque de Quigley et Hein modifié
Épidémiologie des gingivites par Turesky et al. [6]
Cet indice requiert l’utilisation d’un révélateur de plaque
Les enquêtes épidémiologiques ainsi que de nombreuses études bactérienne, comme par exemple la fuchsine basique ou l’érythrosine
cliniques concernant les gingivites requièrent l’utilisation d’indices à 2 % en solution hydroalcoolique. Après coloration de la plaque
épidémiologiques, qui sont des valeurs chiffrées qui permettent de bactérienne à l’aide d’une boulette de coton saturée en révélateur de
quantifier des signes cliniques. En ce qui concerne les gingivites, les plaque et élimination de l’excédent de révélateur par rinçage à l’eau,
indices retenus sont les indices de plaque bactérienne et les indices la plaque est quantifiée sur les faces vestibulaires et linguales des
gingivaux. Nous ne décrirons que les indices épidémiologiques le dents prises en compte, selon six scores possibles :
plus fréquemment utilisés dans les études cliniques.
– 0 : absence de plaque ;
INDICES DE PLAQUE – 1 : îlots de plaque dans la région cervicale dentaire ;
Les indices de plaque bactérienne permettent d’apprécier le degré – 2 : une fine et continue bande colorée de plaque de moins de
d’hygiène buccodentaire et la qualité de l’élimination de la plaque 1 mm de large est présente au bord cervical des dents ;
bactérienne. Ils ne permettent pas d’apprécier la qualité de cette – 3 : une bande colorée de plaque recouvre moins d’un tiers de la
plaque et n’ont donc aucune valeur quant à la virulence de celle-ci. couronne ;
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INDICES GINGIVAUX Figure 4 A. Absence de pathologie gingivale notoire chez une fillette âgée de 3 ans.
Les indices gingivaux sont utilisés pour décrire l’état relatif du degré B. Le révélateur de plaque met cependant en évidence une quantité de biofilm im-
portante. Ceci dénote une réaction inflammatoire moindre chez l’enfant que chez
de santé et/ou de maladie des tissus gingivaux. La plupart de ces l’adulte.
indices ont une échelle graduée avec des limites supérieure et
inférieure définies. Ces indices sont en relation avec un ou plusieurs
– 2 : inflammation de la papille et de la gencive marginale pouvant
des critères suivants : couleur, contour, saignement, étendue, fluide
s’étendre à la gencive attachée ; l’œdème est discret et il existe un
gingival. [8]
saignement provoqué au sondage ;
¶ Indice gingival de Löe et Silness (« gingival index » – 3 : œdème, inflammation importante, changement de couleur de
[GI]) [9] la gencive et saignement au sondage ;
L’indice gingival permet d’apprécier la sévérité et la localisation des – 4 : des ulcérations surajoutées sont relevées.
gingivites. Il se calcule sur les quatre unités gingivales d’une dent, Selon Stamn, [11] la gingivite marginale commence dès la plus petite
vestibulaire, distale, linguale et mésiale, selon quatre scores : enfance, vers l’âge de 5 ans, progresse en fréquence globale et en
– 0 : fibromuqueuse gingivale normale ; sévérité jusqu’à l’adolescence puis tend à se stabiliser. Il est difficile
d’évaluer la fréquence de la gingivite dans la population étant donné
– 1 : légère inflammation gingivale avec un léger changement de la pauvreté des études épidémiologiques dans ce domaine. Selon les
couleur, aucun saignement provoqué ; études et les critères pris en compte, la fréquence des gingivites chez
– 2 : inflammation modérée ; fibromuqueuse gingivale de couleur l’adulte varie de 50 à 100 %. Dans les pays industrialisés, les
rouge, rouge bleuté ; œdème, aspect vernissé ; il existe un gingivites affectent la quasi-totalité des adolescents et 40 à 50 % des
saignement provoqué au sondage ; adultes.
– 3 : inflammation sévère, œdème important, tendance à l’ulcération Une étude épidémiologique conduite en Suède [ 1 2 ] sur une
et à l’hémorragie spontanée. population âgée de 20 à 70 ans et suivie sur une période de 30 ans
Cet indice peut également être utilisé dans le contrôle de l’efficacité montre une décroissance du nombre d’individus porteurs de
d’une thérapeutique visant à réduire ou à éliminer l’inflammation parodontites superficielles au profit d’une augmentation du nombre
gingivale. Une gingivite légère présente un GI compris entre 0,1 et d’individus sains ou porteurs de gingivite. Cette étude comme
1, une gingivite modérée un GI compris entre 1,1 et 2, et une d’autres du même genre atteste que, dans les pays industrialisés, un
gingivite sévère un GI compris entre 2,1 et 3. système de prise en charge médicale évolué et un haut niveau
d’hygiène buccodentaire permettent de réduire la fréquence des
¶ Indice de saignement de Mühlemann (« sulcus gingivites.
bleeding index » [SBI]) [10] À l’exception de la période de la puberté, les femmes semblent avoir
une fréquence globale et une sévérité de gingivite moindre que les
Cet indice combine les signes cliniques de l’inflammation et le
hommes. De par l’influence des cycles hormonaux sur le terrain, les
saignement provoqué, premier signe de la gingivite. Suite à un
femmes présentent une gingivite plus prononcée durant les périodes
sondage délicat du sillon gingivodentaire, le saignement provoqué
de grossesse et de règles. Les sujets d’ethnie noire ont en général
au niveau de la papille et au niveau de la fibromuqueuse gingivale
davantage d’inflammation gingivale que les sujets d’ethnie
est relevé selon quatre scores :
blanche. [13]
– 0 : gencive normale, absence d’inflammation ; La tendance au développement d’une gingivite est plus marquée
– 1 : les papilles et la fibromuqueuse marginale sont d’apparence chez les adultes que chez les enfants ; une résistance plus marquée à
normale ; le sondage avec une sonde parodontale peut faire la plaque bactérienne expliquerait une inflammation moindre chez
apparaître un point de saignement ; les enfants [14, 15] (Fig. 4).
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ANATOMOPATHOLOGIE
Les modifications microscopiques liées à la formation d’une
gingivite apparaissent bien avant toute modification clinique. Au
plan anatomopathologique, il faut pouvoir différencier un parodonte
sain d’un parodonte qui commence à devenir pathologique et dans
lequel une inflammation gingivale commence à s’installer. En
d’autres termes, il est très difficile de déterminer avec exactitude
quand débute précisément une inflammation gingivale. Dans une
fibromuqueuse gingivale cliniquement saine, la portion la plus
coronaire du tissu conjonctif gingival (de 3 à 5 % de ce tissu
conjonctif) contient un petit infiltrat de cellules inflammatoires
Figure 8 Gingivite diffuse généralisée aggravée par le traitement multiattaches se composé de lymphocytes, de granulocytes neutrophiles, de
traduisant dans la zone antéromaxillaire par un accroissement considérable des pa- monocytes/macrophages qui sont au contact de l’épithélium de
pilles.
jonction. De rares plasmocytes sont visibles parmi ces cellules
inflammatoires. Des granulocytes neutrophiles migrent depuis le
plexus vasculaire dentogingival à travers l’épithélium de jonction
vers le sillon gingivodentaire ou la gencive marginale. Dans des
conditions drastiques de contrôle de plaque et en l’absence de tout
traumatisme, il est possible d’obtenir chez l’animal un parodonte
qualifié d’« histologiquement sain » dépourvu d’infiltrat
inflammatoire : un petit nombre de cellules leucocytaires isolées se
retrouve dans le tissu conjonctif gingival au voisinage des vaisseaux.
Suite à l’accumulation du biofilm au contact de la fibromuqueuse
gingivale, un infiltrat inflammatoire s’installe progressivement dans
le tissu conjonctif gingival, s’accompagnant de la réduction du
nombre de fibroblastes et de la densité des fibres collagéniques. La
classification pionnière de Page et Schroeder (1976) [41] rend compte
de la modification des tissus parodontaux suite à cette accumulation
de plaque bactérienne. Elle décrit quatre stades d’évolution : les
Figure 9 Gingivite d’un secteur incisivocanin mandibulaire aggravée par la pré- lésions initiale, précoce et établie qui sont des lésions gingivales, et
sence de tartre sous-gingival, rétenteur de plaque, ce qui explique la déformation du fes- la lésion avancée qui est une lésion parodontale, c’est-à-dire une
ton gingival avec l’hyperplasie des papilles. lésion qui affecte l’ensemble des tissus parodontaux.
La lésion initiale apparaît 2 à 4 jours après une accumulation de
plaque ; la lésion précoce apparaît entre 4 et 14 jours ; elle correspond
au plan clinique à une gingivite en phase aiguë. Les principales
caractéristiques anatomopathologiques de ces deux premiers stades
d’évolution sont : altération de l’épithélium de jonction qui
commence à proliférer latéralement dans la portion la plus
coronaire ; hyperhémie et exsudat de protéines plasmatiques ;
augmentation de la migration des granulocytes neutrophiles au
travers de l’épithélium de jonction en direction du sillon
gingivodentaire ; accumulation de cellules lymphoïdes, de
monocytes et de macrophages ; altérations cytoplasmiques de
certains fibroblastes gingivaux ; perte de collagène dans la zone
infiltrée ; prolifération vasculaire.
La lésion établie fait suite et se développe entre 2 et 3 semaines après
une accumulation de plaque, mais peut très bien se développer plus
Figure 10 Gingivite diffuse localisée aux secteurs antérieurs potentialisée par une lentement en plusieurs mois. Cette dernière situation peut persister
respiration buccale. de nombreuses années sans aucune évolution. Elle correspond à un
stade de gingivite installée. Les altérations cellulaires et tissulaires
observées au cours des deux précédents stades se poursuivent,
– les fractures radiculaires ; entraînant une augmentation du volume du tissu gingival qui
– les lésions cervicales radiculaires et les défauts cémentaires. s’accompagne d’une augmentation de la profondeur du sillon
gingivodentaire et la formation d’une fausse poche parodontale,
Le tartre, produit de la minéralisation de la plaque bactérienne
encore appelée poche gingivale. La taille de l’infiltrat inflammatoire
dentaire, ne peut affecter par lui-même la santé gingivale, mais sa
augmente ; sa composition évolue vers une prédominance de
surface rugueuse et poreuse, constamment recouverte d’une fine
cellules plasmatiques et de lymphocytes T. [14, 41, 42, 43]
couche de plaque bactérienne, même après un brossage minutieux,
en fait un facteur aggravant une gingivite (Fig. 9). Ces trois stades de lésions gingivales présentent comme
caractéristique commune une absence de lésion de l’os alvéolaire et
La respiration buccale a tendance à aggraver une gingivite des un respect du niveau d’attache.
secteurs antérieurs en se comportant comme irritant physique
(Fig. 10).
Les effets du tabac sur les signes cliniques de la gingivite et sur son MÉCANISMES PATHOGÉNIQUES
devenir sont bien connus et très complexes. Le tabac agit aussi bien La fibromuqueuse gingivale est constamment exposée à
localement que sur le terrain immunitaire de l’hôte. À ce titre, l’environnement bactérien. Un biofilm dentaire supragingival, si
l’impact du tabagisme sur le parodonte est développé dans le minime soit-il, est toujours présent sur les surfaces dentaires ; dans
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– lésions gingivales traumatiques iatrogènes ou accidentelles, qualité des monocytes et de leur faculté plus ou moins augmentée à
chimiques, thermiques ou physiques ; libérer de l’interleukine 1. Ainsi, un génotype PST positif, c’est-à-
– réactions gingivales à des corps étrangers. dire un patient qui possède des monocytes hyperinflammatoires et
donc qui libèrent une quantité importante d’interleukine 1 est plus
Chacune de ces maladies ou lésions présente des caractéristiques
susceptible de voir évoluer sa gingivite en parodontite comparé à
dont la démarche sémiologique permet d’en approcher le diagnostic.
un patient au génotype PST négatif, et ce pour une agression
L’anamnèse permet de s’enquérir du mode de vie du patient
bactérienne identique.
(possibilité d’une contamination par une maladie sexuellement
transmissible [66]), de son alimentation (carences [67]), de la présence La présence, dans une microflore parodontale, de bactéries
d’atteintes systémiques connues (lichen plan, pemphigus [68]), la parodontopathogènes, [3, 23, 48] comme Actinobacillus actinomy-
présence d’un traumatisme associé (brûlure, prothèse mal cetemcomitans ou Porphyromonas gingivalis, signe également un
ajustée [ 6 9 ] ), l’existence d’autres manifestations buccales ou risque parodontal augmenté. La recherche de ces bactéries peut être
extraorales susceptibles de réaliser le diagnostic différentiel. entreprise par des prélèvements dans le biofilm sous-gingival qui
L’examen clinique est orienté vers la recherche de localisations non sont analysés soit par cultures, soit par des tests spécifiques [74]
décelées par le patient et/ou de signes pathognomoniques de comme les sondes génétiques. [75]
maladies virales ou fongiques comme par exemple la présence de Le risque parodontal, comme toute notion de risque, est une
vésicules herpétiformes ou de plaques blanchâtres d’une candidose. probabilité de survenue d’un évènement. Il est la résultante d’un
Les examens biologiques sanguins, microbiologiques et/ou ensemble d’éléments. L’accumulation de ces éléments concourt à
anatomopathologiques, sont souvent effectués afin de poser avec augmenter ce risque. Cependant, un patient pour lequel aucun
précision le diagnostic. Des tests d’allergologie complètent parfois risque parodontal n’a été détecté peut néanmoins voir sa gingivite
cette démarche. évoluer en parodontite ; certaines composantes étiopathogéniques
restent encore à éclaircir. [76]
PARODONTITES
Le sondage parodontal et la radiographie rétroalvéolaire prise avec TRAITEMENTS
un long cône et des angulateurs de Rinn permettent de faire le
Le traitement d’une gingivite induite par la plaque doit prendre en
diagnostic différentiel entre une gingivite et une parodontite. Dans
compte aussi bien les composantes étiologiques et les facteurs locaux
le cas de la gingivite, il n’existe aucune perte d’attache, c’est-à-dire
aggravants que les composantes liées à l’hôte quand celles-ci
qu’il n’est pas possible de mettre en évidence l’existence de poche
peuvent l’être.
parodontale. D’autre part, l’examen radiographique en cas de
gingivite ne montre aucune alvéolyse, aucune décapitation des septa
interdentaires ; il y a respect des « fers de lance alvéolaires ». ¶ Prise en charge des composantes liées à l’hôte
La prise en charge des composantes liées à l’hôte représente un
élément déterminant dans le succès thérapeutique. De plus, en tant
Prise en charge d’un patient porteur que maillon de la chaîne médicale, nous pouvons contribuer à une
d’une maladie gingivale induite meilleure prise en charge médicale des maladies systémiques par
par la plaque notre action de motivation et d’orientation vers les compétences
médicales ad-hoc. Nous devons nous assurer que les maladies
Si toutes les gingivites se traduisent cliniquement par une systémiques qui sont susceptibles d’interférer avec les gingivites
inflammation gingivale, il convient comme il a été décrit sont correctement prises en charge et le cas échéant intervenir. Dans
précédemment de dissocier les gingivites induites par la plaque [70] le cas où nous sommes à l’origine du diagnostic d’une maladie
et les maladies gingivales non induites par la plaque. D’autre part, systémique, comme c’est souvent le cas pour le diabète de type II, le
parmi les gingivites induites par la plaque, la prise en charge est patient est orienté soit vers son médecin généraliste, soit vers un
différente selon qu’il s’agit de gingivites avec ou sans risque spécialiste.
d’évoluer en parodontites et/ou de gingivites modifiées ou non par Dans le cas du tabagisme, nous avons un devoir d’information sur
des facteurs systémiques ou autres. La nature des bactéries qui ses effets nocifs tant généraux que sur le parodonte. Les résultats
colonisent les environnements supragingival et sous-gingival, ainsi thérapeutiques parodontaux escomptés participent à la motivation
que la nature de la réponse de l’hôte, conditionnent cette évolution au sevrage tabagique. Une orientation vers des équipes médicales
possible. Il convient donc d’inclure dans la démarche de prise en spécialisées dans le sevrage tabagique est proposée au patient.
charge d’un patient porteur d’une gingivite le diagnostic du risque
Tout conseil visant à diminuer le stress de nos patients, comme celui
parodontal. [71] L’exploration de l’hôte associée à l’exploration de la
de la pratique d’un sport, contribue à l’obtention des résultats
microflore parodontale permet de cerner ce risque parodontal. Le
thérapeutiques.
traitement mis en place doit être adapté aux différentes situations.
Enfin, une maintenance adéquate permet de pérenniser les résultats
ou à défaut de traiter à temps une récidive tant qu’elle est réversible. ¶ Prise en charge des composantes étiologiques
et des facteurs locaux aggravants
DIAGNOSTIC DU RISQUE PARODONTAL Le protocole de gingivite expérimentale [4, 5] a permis de montrer la
relation de cause à effet entre biofilm et gingivite, et qu’après
Le diagnostic du risque parodontal qui détermine l’existence d’une
élimination régulière du biofilm dentaire une santé gingivale est
gingivite banale ou d’une gingivite à risque résulte de la détection
restituée. [77, 78, 79]
de facteurs liés à l’hôte et/ou liés à la microflore parodontale. [38]
Les facteurs liés à l’hôte sont recherchés par l’interrogatoire du Tout traitement de maladie gingivale induite par la plaque doit bien
patient qui permet de détecter l’existence des facteurs généraux évidemment comporter le contrôle du facteur étiologique bactérien
comme le diabète, le tabagisme, la prise de certains médicaments, le et la suppression ou le contrôle des facteurs locaux aggravants
stress, etc. (cf. supra). Les examens biologiques sanguins sont (cf. supra).
fréquemment d’un précieux recours et, dans certains cas, permettent
de dépister l’existence de maladies systémiques jusqu’alors Contrôle du facteur étiologique bactérien
méconnues du patient. Le contrôle du facteur étiologique bactérien comprend l’élimination
Le comportement immunitaire de l’hôte peut être exploré entre des biofilms supra- et sous-gingivaux. Le biofilm supragingival est
autres grâce au test génétique PST. [72, 73] Ce test rend compte de la essentiellement contrôlé par le patient suite à une motivation à
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Figure 15 A. Vue linguale d’un secteur incisif mandibulaire présentant une gin- B. Restitution ad integrum des papilles linguales 15 jours après enseignement d’un
givite avec papilles rétractées et œdématiées en regard de plaque bactérienne et de tar- contrôle de plaque adapté et détartrage.
tre.
Figure 16 A. Tableau clinique pouvant faire penser à une gingivite marginale gé- B. Vue clinique 15 jours après la mise en œuvre d’un traitement adapté montrant des récessions
néralisée assortie d’une manifestation épuliforme localisée entre 11 et 12. parodontales, lésions parodontales irréversibles, qui signent l’existence d’une parodontite.
maintenance parodontale est couplée à une maintenance médicale parodontite serait la résultante de déséquilibres dans la balance
qui permet de vérifier en parallèle les composantes liées à l’hôte. hôte/agresseurs, qui entraîneraient des épisodes intermittents de
Le risque parodontal n’est pas une notion figée ; il est susceptible lésions tissulaires et à long terme des destructions parodontales
d’être augmenté suite à l’acquisition de nouvelles pathologies accumulées. L’évolution d’une gingivite vers une parodontite serait
systémiques ou à l’aggravation de pathologies systémiques la conjonction d’un ou de plusieurs des facteurs suivants :
existantes. Il doit donc être systématiquement réévalué lors de – la flore s’enrichit en espèces pathogènes ; la présence d’une
chaque visite de contrôle. inflammation gingivale favoriserait l’apparition de certaines espèces
bactériennes pathogènes ; [27]
Pronostic avec ou sans traitements – les systèmes immunitaires du patient permettent à l’agression
d’origine bactérienne d’entraîner une perte d’attache et l’un des
L’installation d’une gingivite chez un sujet signe l’existence d’une différents types de parodontites ;
réaction inflammatoire de la part de celui-ci, première étape de la – l’absence des bactéries compatibles voire nécessaires à la santé
réaction immunitaire face à l’agression antigénique de la plaque parodontale.
bactérienne. Cette inflammation gingivale primitive est donc la Le traitement permet une réparation ad integrum du parodonte
manifestation de l’efficacité du système de défense de l’individu, superficiel puisque, lors d’une gingivite, les lésions ne concernent
système qui sera sensibilisé voire renforcé lors d’une agression que la fibromuqueuse gingivale qui est susceptible de
bactérienne ultérieure. Le passage à la chronicité peut traduire au « régénération », les structures sous-jacentes n’ayant pas subi de
contraire l’incapacité de l’individu à maîtriser cette agression destruction. Ainsi, dans ce cas de figure, les papilles gingivales
d’origine bactérienne si celle-ci est maintenue par absence de décapitées peuvent voir leur fer de lance reconstruit après
contrôle de plaque ou si les défenses immunitaires intrinsèques du traitement, le niveau du bord marginal gingival se rétablissant du
sujet sont insuffisantes ou dépassées. Cette dernière situation fait même de la « mémoire gingivale » à une distance constante du
concerne peut-être les sujets à risque susceptibles de développer bord marginal de l’os qui ne subit aucune modification
ensuite une parodontite. [28, 38, 76] morphologique (Fig. 15). Lors de la gingivite, l’espace biologique est
Il est maintenant bien mis en évidence que tout porteur de gingivite maintenu entre le niveau de l’attache conjonctive situé à la jonction
ne développe pas systématiquement une parodontite. Mais il n’a émail-cément puisqu’il n’y a pas de migration apicale de l’attache et
jamais été démontré qu’une parodontite peut survenir en l’absence que le bord marginal de l’os n’est pas modifié dans sa position de
d’inflammation gingivale. [48] Le passage de la gingivite à la référence à la différence d’une situation de parodontite (Fig. 16).
Références ➤
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