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Droit de la concurrence approfondi

Examen : 4 questions de cours 5 pages max sinon c’est foutu, 1h30


Première partie (Destours) : antitrust

Introduction

L’influence du droit européen sur le droit franco-français de la concurrence est notable. On retrouve
le principe de la liberté du commerce et de l’industrie issu du décret Ballard tel qu’interprété par la
juridiction administrative. Le juge administratif l’interprète comme un principe d’interdiction : les
personnes publiques ne sont pas des acteurs sur le marché concurrentiel. En réalité, on ne trouve
rien derrière ce texte.

Le premier véritable texte date du 30 juillet 1945 et a survécu jusqu’en 1986. C’est un texte de
circonstance géopolitique qui consiste à donner les pleins pouvoirs aux pouvoirs publics
réglementaires et pour imposer des prix de revente. Ce texte s’applique entre professionnels et
consommateurs pour que le consommateur ne subisse pas des prix de revente exubérants.
Liberticide au possible car pas de liberté des prix. La seule concurrence ne se faisait donc pas par le
prix mais par le service. Ce texte a été modifié de nombreuses fois sans que ce principe ne soit
remis en cause.

En sa version initiale, cette ordonnance venait sanctionner une PAC qui est le délit de coalition,
c’est l’ancêtre des « ententes ». Le premier texte qui modifie l’ordonnance est un décret de 1953 qui
va ôter la sanction pénale du délit de coalition pour parler de la première fois d’entente, on passe du
pénal au civil. Pour l’occasion on crée une commission technique des ententes. Les avis rendus par
le ministre de l’Économie sur la question de l’entente ne sont pas conformes et pas liant.

Loi du 2 juillet 1963 modifie une fois encore l’ordonnance pour prohiber l’abus de position
dominante. La France fait partie des 6 états composant la CEE et ce traité prohibe comme on le
faisait déjà les ententes et les positions dominantes. Le législateur français a transposé cette
interdiction internationale au niveau national.

Loi de 1977 vient modifier une fois encore l’ordonnance en apportant deux mesures :

- Mesure de forme : requalifier la commission technique des ententes en commission de la


concurrence car elle regroupe plusieurs attributions désormais. Il n’y a pas plus de pouvoir pour
cette commission.

- Mesure de fond : cette mesure consiste à doter pour la première fois le droit français de la
concurrence un droit des concentrations, contrôle des structures.

En 1986 cette ordonnance est abrogée au profit d’une autre dite relative à la liberté des prix et de la
concurrence, l’administration ne peut plus imposer un prix de revente. Par principe, c’est la liberté

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des prix et de la concurrence (on le retrouve encore aujourd’hui dans le Code de commerce).
Structurellement (ex : prix du livre) ou conjoncturellement des prix de revente peuvent être fixés.

On fixe des lignes rouges à ne pas dépasser : interdiction des ententes et des abus de position
dominante. On crée une autorité administrative indépendante en France qui est le Conseil de la
concurrence pour contrôler ces lignes rouges. Ce conseil de la concurrence peut rendre des avis
&également et se voit attribuer une compétence contentieuse pour pouvoir condamner des entités
faisant preuve d’entente concurrentielle ou d’abus de position dominant. Le ministre de l’Économie
ne peut donc que se plaindre et saisir cette autorité.

Par ailleurs on voit apparaître une cohorte de règles permettant de réguler ce commerce. Cependant
rien n’annule l’ordonnance de 1986 encore d’actualité.

L’ordonnance de 1986 a été codifiée dans le Code de commerce alors qu’elle se contentait autrefois
d’être une annexe. Il s’agit désormais du Livre IV du Code de commerce relatif à liberté des prix et
de la concurrence (L410-1 à L490-5 du Code de commerce). Depuis 2000 ce livre a suivi des
évolutions notables :

- Loi NRE (Nouvelles Régulations Économiques) du 15 mai 2001. Il impacte très peu le droit
matériel des PAC. En revanche, pour la première fois est créée un embryon de droit processuel.
Autrefois il fallait se référer au CPC, la loi NRE crée un droit ad hoc de la PAC. À partir de cette
loi, le droit des concentrations est véritablement contraignant.

- Loi LME (Modernisation de l’Économie) en date de 2008. Consolide le travail d’édification d’un
droit processuel. Le Conseil de la Concurrence est désormais baptisée Autorité de la Concurrence
(ADLC). Désormais elle a des pouvoirs consultatifs (héritage = rendre des avis non conformes et
non liants) + possibilité de rendre des décisions contentieuses en matière anticoncurrentielle +
possibilité désormais de pouvoir intervenir en matière de concentration d’entreprise en droit des
structures. Autrement dit, depuis 2008, l’ADLC est la seule en France à pouvoir connaitre des
PAC et des concentrations. On débarque donc le ministre de l’Économie au profit de l’ADLC.

- Loi MACRON entrée en vigueur en août 2016. Ne sert à rien : action de groupe en matière de
PAC.

- Loi Sapin II : modifie quelques détails procéduraux.

- Ordonnance du 17 mars 2017 : une ordonnance est venue introduire en France une réparation des
dommages civils résultant des PAC.

L’Autorité de la concurrence est une autorité indépendante qui rend des sanctions administratives,
des amendes versées au trésor public français. L’objet n’est pas de réparer le préjudice subi. Mais
comment adapter cette sanction au préjudice subi ? Il a fallu transposer une directive en 2017 pour
adapter cela. Avant cela on raisonnait sur l’article 1240 du Code civil.

Une directive transposée en France en mai 2022 : donne plus de pouvoir à l’Autorité de la
concurrence dans son exercice répressif.

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Aujourd’hui le droit de la concurrence est régi par le Livre IV du Code de commerce dans sa partie
en R / L / D / A. La carte blanche a été laissée au juge pour interpréter ces notions. La jurisprudence
doit donc être connue en droit de la concurrence, tant européenne que nationale. Il y a également de
la soft law à côté : droit sans force contraignante par les lignes directrices.

Cours :
Le droit anti trust sur lequel on va se concentrer :
- Le contrôle des PAC (I)
- Le contrôle des structures aussi dit « droit des concentrations » (II)

Pourquoi les scinder ? :

- PAC : contrôle à posteriori


- Droit des concentrations : contrôle à priori

Autre distinction, concernant :

- Les PAC : L’Autorité de la concurrence qui statue au contentieux vérifie systématiquement si le


comportement dit d’entente l’est au sens du droit français et du droit européen, application
parallèle de la même prohibition aux mêmes faits. Car si l’entente dépasse la dimension nationale
et va jusqu’à l’européenne (commerce intercommunautaire) on va pouvoir prendre conscience de
sa gravité. Principe de subsidiarité.

- Droit des concentrations : soit l’entente est de dimension nationale soit de dimension
européenne et là chacun son droit, chacun sa compétence.

Chapitre 1 : Le droit des PAC


Sec on 1 : Le droit matériel

§1) La prohibition des PAC

De quoi s’agit-il quand on parle des PAC ? Il y a 6 pratique anticoncurrentielles, seules 3 nous
intéressent.
- L420-2-1 Code de commerce : PAC inapplicable et ne sert à rien.
- L420-2-2 Code de commerce : mal rédigé, inapplicable, supposé encadrer l’activité des VTC
mais ne fonctionne pas car il faut que soit exigée l’exclusivité des chauffeurs ce qui n’arrive
jamais en pratique, chaque chauffeur étant sur plusieurs plateformes.
- L420-5 Code de commerce : prohibe les prix abusivement bas mais mal rédigé. Il faut que la
victime soit le consommateur final, donc il faudrait mettre cette disposition dans le Code de
consommation car dans le Code de commerce on trouve des professionnels.

Les trois que nous allons étudier, dont deux concomitamment :

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- L420- 1 Code de commerce et Article 101 §1 TFUE : Prohibition des ententes. Ces deux textes
disent la même chose, le droit européen prime sur le droit français mais les deux se suivent. Ces
deux textes ne définissent pas l’entente mais la prohibe. C’est volontaire car les concours de
cette définition ont été laissés aux juges européens et nationaux. Avec plus de 60> ans d’acquis
décisionnel européen on connaît désormais les conditions requises pour que tel comportement
soit qualifiable d’entente anticoncurrentielle prohibée.

- Les abus de domination (regroupant 2 types d’abus) :


• Abus de position dominante
• Abus de dépendance économique

I / L’entente

A°) 1ère condition : La concertation.

Démontrer l’existence d’une concertation est le plus difficile comme le prouve le contentieux.
Quelles questions doivent-être posées pour entrer dans le champ d’application du droit de la
concurrence?

1°) Les auteurs de la concertation

a) Nature juridique de l’activité exercée

Le champ d’application du droit antitrust doit être ici délimité. Il faut définir l’entreprise au sens du
droit antitrust. C’est une entité qui exerce une activité économique donc d’offres de biens ou de
services. À contrario, si l’offreur est une entreprise, l’acheteur final ne l’est pas.

Le premier article du livre IV Code de commerce définit l’entreprise et précise que tous les articles
qui suivent ne s’appliquent qu’aux entreprises. Ce qui compte c’est la nature de l’activité, pas la
nature de celui qui l’exerce. Personne physique ou morale, peu importe, ce qui compte est d’exercer
une activité de production et/ou distribution de services.

L’entreprise est une notion qui ne connaît à ce jour que deux exceptions ne résultant d’aucun texte
car au sein des articles L420-1 et du traité du TFUE article 101 §1 ne réserve aucune exception. Ces
deux exceptions sont prétoriennes :

- N’est pas entreprise au sens du droit antitrust : l’exception d’activité sociale. Affaire de
1993 dans un arrêt Poucet et Piste. Faits : ils veulent bien payer leurs cotisations mais ne veulent
pas cotiser auprès d’une caisse unique. Ils sont pénalement poursuivis et une question
préjudicielle est soulevée : si on ne paye pas c’est qu’on eut remettre en cause le monopole
consacré par l’Etat français qui a désigné cette caisse pour récolter l’ensemble des cotisations. Le
tribunal correctionnel a saisi la CJUE : est-ce que la caisse nationale de retraite des artisans qui
dispose d’un monopole de droit pour les cotisations exerce-t-elle valablement le monopole ? La
CJUE a voulu avant tout vérifier que celle-ci entre dans la champ d’application, si elle est donc
une entreprise au sens du droit antitrust. Cette entité gère un régime dit « de mutualisation » et
non de capitalisation. Elle offre des services mais pour autant l’opérateur n’est pas sur un marché
concurrentiel car le principe de mutualisation dit que tous les artisans doivent cotiser en fonction
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de leur CA mais en aval tout le monde obtient les mêmes prestations (définition de
mutualisation). C’est l’antithèse du principe de capitalisation, on se voit verser en aval ce qu’on a
versé en amont. La CJUE dit que cette caisse est dominée par un principe de mutualisation, de
sorte que c’est un principe de solidarité nationale qui prévaut et qu’il ne s’agit pas d’une
entreprise exerçant une activité économique, car l’activité est sociale, donc ce n’est pas une
entreprise.

Les Etats membres ont voulu s’engouffrer dans cette brèche en sollicitant cet arrêt. Ça n’a pas
marché. Le CE pose une question préjudicielle deux ans après à la CJUE concernant un régime
facultatif de sécurité sociale et non obligatoire : « cotise qui veut ». Ils ont tenté de faire valoir
cet arrêt mais il s’agit d’une capitalisation et non d’une mutualisation, donc échec. Il faut
s’intéresser non pas à l’acteur en jeu mais à l’activité : celle-ci est économique donc l’arrêt
Poucet et Piste ne s’applique pas.

- N’est pas entreprise au sens du droit antitrust : l’activité régalienne, arrêt de 1994
Eurocontrol. Il s’agit d’une association qui gère la navigation aérienne sur l’ensemble du
territoire européen. Cette association est financée par des cotisations versées par tous les états
membres de l’UE. CJUE comme dans l’arrêt de 93 s’assure avant tout qu’il s’agisse d’une
entreprise, même s’il s’agit d’une association subventionnée par les états membres. Assurer le
contrôle de la navigation aérienne sur le territoire est selon la CJUE, une mission relevant de
prérogatives de puissance publique, c’est donc une activité régalienne hors marché. Ce n’est
donc pas un marché concurrentiel mais une activité typiquement de puissance publique.

b) Pluralité d’auteurs

Il faut être au moins 2 entité économiques qualifiables d’entreprises au sens du même droit de la
concurrence pour s’entendre.

Peut-on imaginer une concertation entre un employeur et un employé ? Non car lien de
subordination juridique de l’employeur à l’employé : subordination tant juridique qu’économique.
N’étant pas économiquement autonome, l’employé n’est donc assimilable à une entreprise. Pas de
concertation possible.

Peut-on imaginer une concertation entre un mandant et son mandataire ? En d’autres termes,
peuvent-ils tous deux être qualifiés d’entreprises ? Non, le mandataire n’est pas économiquement
autonome car il agit au nom et pour le compte du mandant donc il ne peut pas y avoir de
concertation, il n’y a qu’une entité économique et on ne peut s’entendre seul.

Peut-on imaginer une concertation au sein même d’un groupe, entre une société mère et sa filiale ?
L’enjeu tient à l’imputabilité de la PAC. Si c’est la filiale qui est condamnée pour avoir participé à
une entente anticoncurrentielle, le plafond à verser est le montant maximal est l’assiette du CA, si
on remonte à la société mère ce sera le même plafond mais l’assiette du CA est plus importante.
Pour un énorme groupe comme Vinci qui a des centaines de filiales on peut saisir l’enjeu. La
question est de savoir si on peut tomber sur la simple filiale ou sur la société mère dont le chiffre
d'affaires est imposant. Des contentieux durent des dizaines d’années pour savoir à qui imputer la
sanction une fois que l’entente a été démontrée.

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Selon quoi la filiale est-elle économiquement indépendante de sa mère ? Plus la mère détient du
capital de la fille plus cela militera pour tomber sur l’assiette du CA de la mère. Si les deux sont
économiquement autonomes on peut tomber sur la concertation. L’indépendance de la fille vis-à-vis
de la mère présente donc avantages et inconvénients.

c) Position économique des auteurs

Le droit européen des ententes a toujours été imaginé sur le droit horizontal. Le cartel risque
d’affecter le marcher, les concurrents et in fine le consommateur. Pourtant ce n’est pas que le droit
horizontal qui est sanctionné, mais ça a été imaginé comme ça. On peut prohiber les ententes
verticales entre non-concurrents. L’article L420-1 du Code de commerce dispose seulement
d’exemples d’ententes horizontales et non verticales.

Quid des ententes transversales ? Je suis ni fournisseur ni distributeur mais entremetteur. Au regard
de l’absence d’acquis décisionnel on n’en parlera pas.

2°) Formes de la concertation

a) Accord entre entreprises (RV)

L’instrumentum, la concertation apportée par les deux parties est la concertation même. L’accord
entre entreprises c’est le contrat stricto sensu. On ne va les retrouver que dans les relations
verticales de concurrence. Les concurrents font tout pour ne pas laisser de trace.

Les fournisseurs ont compris que tout ce qui était potentiellement restrictif de concurrence dans leur
contrat est balayé. L’instrumentum doit être dépollué de toute problématique lié au droit de la
concurrence.

Dans l’accord entre entreprises stricto sensu c’est expresse et l’instrumentum est l’appui de la
concentration. Dans l’accord entre entreprises lato sensu on a d’abord en apparence une volonté
unilatérale du fournisseur qui rencontre l'acceptation tacite de son ou ses distributeurs.

L’Autorité de la concurrence pour désigner un accord lato sensu relève trois indices :

- Prix maximas ou conseillés


- Respect des prix conseillés (massif - quasi permanent)
- Mesures de rétorsion, police des prix.

Ça peut mener à qualifier de véritable accord d’entreprises tacite.

b) Décision d’association d’entreprises (RH)

Cette décision est parfois neutre ou parfois pro-concurrentielle. Des entreprises se regroupent selon
leurs spécialités. En tant qu’ordre professionnel, que syndicat on peut le faire, ce sont des lobbys
institutionnalisés. Néanmoins durant ces réunions, la tentation est grande de parler d’autres choses.
Chaque fois, qu’intentionnellement ou non, on sort du cadre de l’objet social on peut tomber sur le

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joug de la concertation. Ce n’est pas la décision d’association d’entreprise en elle-même qui est
illicite, mais c’est celle-ci si son but est anticoncurrentiel.

Par exemple, à Marseille, barème de prix minimas : il y a des planchers pour les praticiens de
l’ordre. On sort du cadre : décision d’entreprise à finalité anticoncurrentielle.

Autre exemple : dans le secteur du football en France. FFF association loi 1901 qui dépend du
ministère de la Jeunesse et des sports et qui a une délégation en France. La FFF avait subdélégué
une partie du pouvoir réglementaire à une ligne nationale, qui lui avait déjà été déléguée, pour
laisser organiser l’organisation intérieure de compétitions en France. Adidas propose de faire du
mécénat qui consiste à donner X pour modifier le règlement intérieur à son profit. Ce règlement
intérieur disait que chaque membre de la ligue choisissait son équipement, lequel est en pratique
Adidas même si c’est pas dans le règlement. Les clubs qui étaient déjà en relation contractuelle avec
Adidas ne voient pas de différence, pour les autres il faut rompre leurs relations contractuelles avec
d’autres marques. Le Conseil de la concurrence confirme que l’expression de ce pouvoir
réglementaire est ici utilisé à des fins purement commerciales dans le cadre d’une décision
d’association d’entreprises. C’est anticoncurrentiel, non pas la décision d’association, mais sa
finalité. Il s’agissait donc bien d’une concertation.

c) Pratiques concertées (RH)

Impossible à définir, sinon par opposition ce n’est ni l’accord d’entreprises, ni la décision


d’association d’entreprises. Tout débute par un constat : au début on avait dit que l’accord entre
entreprises ne valait que dans les relations verticales, les secondes : associations d’entreprises c’est
entre concurrents donc ça concerne les relations horizontales. La pratique concernée elle ne se
révèle que dans le cadre de la relation horizontale, c’est le cartel, la raison de la prohibition des
pratiques concertées (ex : alignement des prix concurrents).

Le constat est suivi d’une question :

- Constat : Regarder les prix qui se ressemblent tous, on parle de « parallélisme des
comportements » qui est dans l’immense majorité des cas tarifaires. Tout le monde s’aligne ou
donne l’impression de s’aligner.

- Question : Cela résulte-t-il d’une concertation préalable entre les auteurs qui ont décidé de
pratiquer à peu de choses près les mêmes prix ?

Parfois, les concurrents se connaissent de longue date et peuvent anticiper les prix des voisins, donc
le parallélisme des comportements n’est pas la preuve des pratiques concertées mais c’est un indice.
On doit donc se demander si la concertation était ou non préalable, et donc si elle peut former ou
non une entente anticoncurrentielle.

3°) Preuves de la concertation

Comment prouver la concertation quelle que soit sa forme ? Le standard de preuve varie.

- L’accord entre entreprises :


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• Stricto sensu : le contrat prouve tout
• Lato sensu : le faisceau d’indices trouvé par le conseil de la concurrence largement admis par
le juge européen (cf les trois indices)

- La décision d’association d’entreprises : secrétariat de l’ordre qui envoie l’ordre du jour dans
lequel on parle de consignes de prix ou autre, on peut le lire dans le PV aussi.

- Pratiques concertées : preuve indirecte, c’est le droit de l’enquête de concurrence. Droit douanier
et fiscal. Articles L450-1 et suivants du Code de commerce, volet pénal de la matière où les
enquêteurs du droit de la concurrence sont autorisés pour aller de façon non-contradictoire
chercher les pièces qui font défaut. Il faut donc rédiger une requête pour convaincre le juge
territorialement compétent à m’autoriser à me rendre dans un siège social sur le territoire français
pour collecter des informations me faisant défaut pour prouver la concertation entre entreprises.
C’est donc bien évidemment non-contradictoire pour éviter le dépérissement des preuves. Il faut
prouver les raisons qui justifient cela. Tous les documents saisis sont opposables. Des
enregistrements téléphoniques étaient considérés comme une preuve recevable, et depuis une
ordonnance en date de 2021 le Code de commerce tranche une jurisprudence hésitante : tout
mode de preuve est recevable. La question des enregistrements téléphoniques ne se pose plus.

Le plus dur, c’est de trouver la preuve. Elle est souvent indirecte et nécessite une collection
d’indices précis, graves et concordants. Si le plaignant n’a pas assez de pièces, il faudra aller les
chercher (145 du Code de procédure civile). Il y a un droit des enquêtes de concurrence (L450-1 du
Code de commerce) qui heurte le principe du contradictoire pour ménager l’effet de surprise et les
preuves, il faut donc être autorisé par le juge pour récupérer les documents.

Tout cela doit être proportionné, la requête au juge doit être proportionnée avec uniquement les
termes nécessaires (à rechercher dans les documents etc) sinon il pourra y avoir un contentieux sur
ça. Le choix des mots clefs est déterminant. Si on met le nom d’une personne physique par
exemple, et qu’on demande la collecte de tous les mails reçus par cette personne. Alors toute la
boite pourra être fouillée, mais tout ne sera pas en rapport avec ce qu’on est venu chercher. Donc il
faut circoncire dans le temps et définir d’autres termes à rechercher car après le contrôle du juge
sera sévère.

Si une enquête se passe bien et justifie la dérogation au contradictoire, avec une mesure
proportionnée, il est possible que les enquêteurs trouvent des choses qui matchent bien avec la
version alléguée par le plaignant.

C’est vraiment le plus complexe d’aller chercher les preuves, car on écrit une histoire, on fait une
enquête mais le collège de la concurrence peut ne pas être convaincu par l’histoire écrite. Une
décision de rejet peut être rendue si des preuves ne sont pas suffisantes, sans même dire s’il y a ou
non une entente.

En la matière, on admet réellement tout mode de preuve, alors qu’avant la chambre commerciale
avait rejeté les conversations téléphoniques à l’insu de leur auteur, car elle considérait que c’était
une atteinte trop forte à la vie privée. Mais est intervenu un arrêt de la Cour européenne qui l’a
autorisé. De plus en 2021, avec la transposition d’une directive européenne, on a modifié l’article
L443-1 du Code de commerce : tout mode de preuve.
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B°) 2ème condition : La restriction de la concurrence.

1°) Approche qualitative.

Si on a franchi la concertation, il faut désormais démontrer une restriction de concurrence. Si on


prend l’article L420-1 du Code de commerce, ou §1 101 TFUE, les ententes sont interdites en cas
d’objet ou d’effet de restriction de la concurrence.

On oppose objet et effet. C’est déterminant, si la restriction de concurrence est qualifiée par l’objet,
il n’y a pas a démontrer les effets anticoncurrentiels et donc ça allège la preuve.

- Par l’objet : Depuis très longtemps, la Cour de justice a identifié des restrictions par l’objet (on
sait que par expérience, quel que soit les auteurs, la taille, le contexte, le secteur concernés, ces
restrictions sont nocives pour le marché). C’est la culture du précédent. Si une victime saisie ou
si l’autorité s’auto saisie, il est possible très rapidement de satisfaire cette seconde condition si
jamais on identifie bien une restriction par l’objet, sans avoir à démontrer les effets. On appel
cela aussi les restrictions caractérisées ou les restrictions flagrantes de concurrence.

Mais alors existe t-il un monde fini des restrictions par l’objet ? : on en connait par les textes et la
jurisprudence : répartition territoriale, interdiction d’exportation, imposition des prix de
revente… Mais il n’existe pas un ensemble fini, il y en a moins d’une dizaine mais d’autres
peuvent être découvertes.

Au milieu des années 2000, on avait un contentieux avec des opérateurs poursuivis pour le même
comportement. Ils avaient prévu dans leur contrat de distribution la même clause interdisant à
leurs distributeurs physiques de revendre les produits contractuels sur internet. La qualité des
points de vente était un critère essentiel, et donc on leur avait interdit de revendre en ligne. Mais
les distributeurs ont invoqué une restriction de concurrence interne et externe au réseau. La Cour
l’a identifié mais on se demandait de quelle nature est la restriction ?. Les têtes de réseaux ont
demandé de prendre des engagements pour éviter les sanctions. Les engagements consistaient à
faire signer des avenants aux distributeurs en disant que désormais la clause d’interdiction des
ventes par internet était prohibée mais un agrément a été mis en place avec un contrôle des
ventes sur internet. Donc plus de refus strict, mais possibilité conditionnée. Ces engagements
avaient été acceptées par le Conseil de la concurrence

Mais aucune autre autorité nationale ou européenne n’avait eu cette question. Une des têtes de
réseau avait refusé. Le contentieux a continué à son encontre. Le Conseil de la concurrence va
s’appliquer en expliquant pourquoi c’était une restriction de concurrence : ça interdit de
distribuer sur internet donc ça coupe d’un canal de vente. Mais le Conseil définit cela comme une
restriction par objet. Un appel est formé devant la CA de Paris. La CA pose une question
préjudicielle à la CJUE. Dans un arrêt très court, la CJ donne raison au Conseil de la concurrence
(CJUE Pierre Fabre) en disant que c’est une restriction par l’objet. C’est un bon exemple de
découverte d’une restriction par l’objet.

- Par l’effet : ici c’est très complexe car il faut démontrer les effets anticoncurrentiels. Il faut
souvent être assisté d’un cabinet d’économistes, avec une analyse contre-factuelle (donc remettre
fictivement les parties dans leur situation antérieur en analysant les effets de la pratique pour voir

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les éventuels changements). Est ce qu’il en aurait été autrement sans la concertation des
entreprises ? Ou au contraire est ce que l’effet aurait été le même en l’absence de concertation.

2°) Approche quantitative.

a) Principe de droit européen.

Comme dans d’autres matières du droit, certaines restrictions de concurrence ne doivent pas donner
lieu à condamnation, c’est l’effet sensible ou l’absent d’effet de la pratique en droit de la
concurrence. En dessous de ces seuils, on considère qu’il n’y a pas assez d’effet nocif pour la
concurrence et donc on ne traite pas la pratique.

Ce sont les seuils des minimis. La première décision de la Commission européenne date de 1969
(Volk), il y avait bien une concertation et une atteinte au droit de la concurrence, mais cette atteinte
était tellement faible qu’elle ne l’a pas considéré. Donc les deux conditions sont satisfaites, mais on
ne sanctionne pas car l’intensité de la pratique était trop faible. À l’époque il n’y avait pas de seuil
chiffré.

C’est au début des années 2000 que la Commission a chiffré ces seuils des minimis pour assurer une
sécurité juridique. Ils ont été posés dans une communication de la Commission, dépourvue de tout
pouvoir normatif. La Commission donne deux seuils en fonction de la restriction :

- Seuils pour les restrictions horizontales : la condition nous dit qu’entre concurrents, les seuils
sont non atteints dès lors que les opérateurs considérés cumulent 10% ou moins des parts du
marché concerné. En deçà, on présume que la restriction est trop faible pour qu’on s’intéresse.

- Seuils pour les restrictions verticales : entre non concurrents, les seuils sont plus lâchement
entendu, chacune des entreprises concernées doit disposer de moins de 15% des parts du marché,
c’est un total individuel.

c) L’exception pour les restriction par l’objet (inapplicables).

Ce sont les lignes directrices, donc il n’y a pas de valeur normative, mais on les considère
néanmoins d’une manière importante. Ces seuils ne peuvent être invoqués que pour des
restrictions par l’effet, ça enlève beaucoup de restrictions de concurrence à analyser. Les
hypothèses d’invocation utiles sont donc très restreintes.

Cependant, ces seuils sont sous réserves de la condition qu’on ne soit pas en présence d’une
restriction caractérisée (par l’objet) de la concurrence. En présence d’une telle restriction, peu
importe les seuils, on sanctionnera.

Ce qui importe, c’est que dans la vraie vie, les restrictions horizontales sont majoritairement par
l’objet alors que les verticales sont le plus souvent par l’effet, c’est une quasi-règle qu’on voit dans
les contentieux. Quel que soit la taille de l’opérateur, en matière horizontale c’est le plus souvent
une restriction par l’objet (prix, territoire…).

c) L’introduction en droit français.

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Le législateur français a jugé bon d’introduire dans le Code de commerce (L464-6-1 et L464-6-2 du
Code de commerce) des seuils des minimis en s’inspirant de la rédaction et des seuils fixés par la
Commission. Mais la seule différence c’est que pour les ententes verticales, on retient des seuils
cumulés et non pas individuels.

Le législateur l’a introduit dans le Code de commerce contrairement à la Commission qui l’a
simplement inscrit dans les lignes directrices de 2010 réformées cette année. La portée normative
est donc complètement différente.

L’invocation de ces seuils ne peut pas être faite n’importe comme, il faut toujours regarder si c’est
une restriction par l’objet avant même d’invoquer les seuils donc ça donne :

- Analyse de la restriction
- Si c’est par l’objet on ne les invoque pas
- Si c’est une restriction par l’effet alors on peut tenter les seuils
- Si on ne dépasse pas les seuils, alors pas de contrôle
- Si on dépasse les seuils alors on contrôle et potentiellement on sanctionne si les conditions sont
remplies (concertation + atteinte à la concurrence).

3°) Conclusion des deux approches.

Si on remplit les deux approches, alors on sanctionne.

II / La prohibition des abus de domination.

Article L420-2 alinéa 1 du Code de commerce pour l’abus de position dominante et aliéna 2 pour
l’abus de dépendance économique.

A°) L’abus de position de dominante

C’est une prohibition qui résulte de l'article 102 TFUE. C’est la prohibition de l’exploitation
abusive d’une position dominante ; ça suggère que deux conditions soient satisfaites. La position
dominante n’est pas en elle-même anticoncurrentielle, mais des comportements peuvent être
qualifiés d’abusif avec deux conditions cumulatives :

- Démontrer une position dominante


- L’exploitation abusive de cette position (l’abus)

1°) Démontrer une position dominante.

La position dominante implique de déterminer ce qu’on domine (quel marché pertinent ?) et quel
est le pouvoir de marché de l’entreprise poursuivit.

a) La délimitation du marché pertinent.

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On l’appelle parfois le marché relevant ou le marché en cause. Ce marché pertinent doit être (au
sens de la communication de la commission de 1997) doublement limité :

- Dimension matérielle
- Dimension géographique

i. Délimitation de la dimension matérielle

C’est la substituabilité des biens et des services. Il faut qu’on trouve un seul et même marché qui
répond aux mêmes besoins (fioul =/ bois ; téléphone mobile =/ téléphone fixe). Mais les autorités de
concurrence européennes et nationales ont souvent eu tendance à délimiter des marchés de façon
inductive très étroite.

Par exemple, un arrêt de la CJ de 1978 banane tchikita : en Europe il n’y avait qu’un seul
producteur de bananes. Elle faisait concurrence a des américains faisant produire en Amérique du
Sud et en inondant le marché européen avec des prix cassés. On s’est demandé si la société
américaine ne faisait pas des prix prédateurs en raison de sa position dominante. Mais avant de
déterminer un abus, il faut délimiter un marché matériel très petit : pas les fruits et légumes, pas les
fruits (car ne fait que de la banane), donc on retient un marché unique de la banane. Donc c’est un
marché matériel très étroit.

Les arguments sortis à l’époque pour délimiter strictement le marché :

- La banane se trouve toute l’année à maturité


- C’est un produit qui de par sa forme présente une spécificité (on peut manger par les deux bouts)
- C’est un fruit qui peut être mangé par tout le monde

Sur la base de ces arguments, la Commission et la CJ a dit oui il existe un marché pertinent de la
banane. Aujourd'hui on ne trouverait plus ce genre de raisonnement, mais des marchés sont
complexes à définir en raison de leur complexité scientifique.

De nos jours, on va surtout envisager le produit substituable, fongible. Est ce qu’on peut remplacer
ce produit par l’autre produit ou pas ? Et si on augmente le prix d’un, si le consommateur continue
de l’acheter c’est que peut être qu’il n’est pas remplaçable. Mais ça ne marche pas toujours, parfois
les prix augmentent et on continue d’acheter car ce sont des produits de luxe ou autre.

La substituabilité du produit est donc une donnée complexe car elle pourra variée selon le
consommateur, par exemple entre celui qui est attaché à la qualité sans se soucier du prix, et celui
qui se soucie du prix sans chercher une grande qualité. Donc on est parfois contraint de bricoler car
les besoins sont différents selon les consommateurs. Tout cela se fait donc en méconnaissance de la
définition du marché pertinent (lieu de rencontre de l’offre, de services substituables entre eux par
le consommateur). Mais le consommateur est pluriel. Les exemples sont multipliables.

Les autorités de la concurrence ont parfois eu des approches finalistes : existe t-il un marché général
des boissons ? : la Commission nous invite à segmenter à chaque fois. Ça n’existe pas un marché
général. Donc par exemple je veux un coca zéro :

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Grande surface alimentaire → boisson alcoolisée et non alcoolisée → jus et boissons gazeuses →
soda et non soda : au sens du droit de la concurrence, chaque segment de marché est un marché
pertinent donc on voit bien qu’il n’y a pas de marché général.

Pour coca le marché pertinent est celui des sodas. Donc on pourrait identifier la position dominante
de coca sur ce marché, et potentiellement d’analyser ses abus.

Autre exemple, France Loisir était une entreprise permettant des livres référencés et de la papeterie.
Un seul concurrent existait : Dual (société américain). Elle a suscité un abus de position dominante
de France loisir sur le marché français du livre. Mais personne n’a considéré cette plainte car France
loisirs ne pesait rien dans l’activité de distribution du livre, notamment car plusieurs modes de
distribution existent dans ce domaine. Il fallait donc déterminer un autre marché pertinent. Mais les
deux se rejoignaient sur une chose : les livres étaient acquis sur abonnement. Il y avait donc un
marché de la vente de livre par abonnement et seuls ces deux acteurs étaient présents. C’est ce qui a
permis à la Cour de cassation et aux autorités de concurrence de considérer l’abus commis par
France Loisir.

On trouve les mêmes mécanismes dans tous les marchés pertinents (ex : automobile, pneus…).

En l’absence d’acquis décisionnel, c’est au plaignant de démontrer le marché, la segmentation, et


l’abus qui en découle.

ii. Délimitation de la dimension géographique.

Elle vient doubler la dimension matérielle. La question qui se pose ici c’est la zone ou le territoire
où la concurrence s’exerce. Dans l’immense majorité des cas c’est un marché :
- national
- européen (polypropylène, saumon d’élevage)
- mondial (les cigarettes, les hard et software avec GAFAM).

Mais le marché peut être local, infra-national et ça dépend des produits considérés. Par exemple, les
produits pondéreux (cailloux) pour construire sont souvent achetés sur des marchés locaux car le
transport est très cher. Le consommateur va arbitrer en fonction du coût du transport, et c’est ce qui
permet aux autorités de la concurrence de limiter le marché à une dimension très réduite (ex : 30 km
autour de telle centrale à béton → au delà le coût est trop élevé pour considérer que le marché est
plus large que ce qu’il est).

Donc on prend parfois un rayon autour du centre de stockage ou de production pour délimiter le
marché en cause. Dans la distribution de produits pétroliers, la dimension matérielle est très large
mais au sens géographique c’est plutôt étroit.

b) Le pouvoir de marché de l’entreprise poursuivit.

La Commission et la CJUE dans un arrêt AKZO considère que 50% de part de marchés est une
présomption de position dominante, alors qu’en deçà de 10% elle considère qu’il y a une
présomption d’absence de position dominante.

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Même si les textes ne disent pas ou la jurisprudence, la notion de position dominante implique une
durabilité, il faut que ça dure dans le temps, ça ne doit pas être juste un trimestre.

Si on arrive pas à savoir s’il y a une position dominante par des seuils, la Commission se réfère à
d’autres indices : les barrières à l’entrée sur le marché. Par exemple je suis en position dominante
mais de très peu par rapport à mon concurrent direct. Qu’est ce qui peut me faire gagner des parts
de marché ? : c’est très circonstancié, par exemple un plan d’implantation physique des points de
vente. Ça va donner un avantage concurrentiel d’avoir des points de vente physiques et donc
accentuer les parts de marché. Ou encore le fait de disposer demain d’un brevet d’invention. C’est
une barrière d’entrée sur le marché car l’exploitation du brevet se fait seule (hors licence
d’exploitation) ce qui donne un avantage concurrentiel.

Par exemple, au début de la box internet, une filiale de France Télécom (Wanadoo) était poursuivie
au niveau européen pour avoir mis en place des prix prédateurs sur le marché de l’ADSL (en
dessous du coût moyen variable). Le but étant de nuire à la concurrence pendant un temps pour la
faire s’effondrer. Il fallait se demander si c’était un marché pertinent : oui. Ensuite combien pèse
Wanadoo sur ce marché. En regardant les parts de marché ça ne suffisait pas car ce n’était pas
l’opérateur dominant de manière incontestable. Wanadoo avait développé une innovation
particulière qui allait lui apporter un avantage concurrentiel + distribution en points de vente
physiques → position dominante.

Si l’entreprise est dominante, il faut analyser son possible abus sur le marché. Il faut donc franchir
la barrière de la position dominante.

2°) L’abus dans la position dominante.

On distingue encore deux choses, deux types d’abus possibles :

- L’abus de comportement
- L’abus de structure / d’éviction

Lorsque l’on a parlé des ententes, on a dit que le législateur européen (et français) a imaginé les
ententes uniquement entre non-concurrents et ce n’est qu’au grès des contentieux que la
Commission avait ouvert les ententes horizontales. Quand le législateur en 1957 écrit l'article 102
du TFUE il n’imagine l’abus de position dominante qu’entre non-concurrents. L’idée était de voir la
position dominante dans une relation verticale. Dans les relations horizontales est apparue plus tard
de la position dominante d’éviction.

a) Abus de comportement.

Si on prend l’article L420-2 alinéa 1 du Code de commerce on trouve des exemples :


« Ces abus peuvent notamment consister en refus de vente, en ventes liées ou en conditions de vente
discriminatoires ainsi que dans la rupture de relations commerciales établies, au seul motif que le
partenaire refuse de se soumettre à des conditions commerciales injustifiées ».

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Cet article est relatif à des abus de comportement. Même si toutes les pratiques ne sont pas
interdites en elles-même (PRC pas sanctionnées comme le refus de vendre), elles peuvent l’être si
elles participent à la constitution d’un abus de position dominante.
Tout ce qu’on met sous le vocable de PRC est possiblement autant d’illustrations d’un abus de
comportement (ex : un chantage au déréférencement pour revoir tous les tarifs, c’est un abus de
comportement alors même qu’il y a la possibilité de refuser de vendre). C’est toutes les situations
ou j’entretiens mon partenaire commercial dans une forme de dépendance économique.

C’est ce pourquoi on a crée la prohibition de ce type de comportements par un leader, étant dit que
les autres ne peuvent pas forcément le faire.

b) Abus de structure.

Dans les relations verticales avec les abus de structure ou d’éviction, je cherche à nuire à un
concurrent ou à des concurrents (tous). Je cherche à les évincer du marché.

Par exemple, il a été découvert le Conseil de la concurrence, on a à faire à une lutte entre les
laboratoires pharmaceutiques. Ils ont tous un service de R&D pour faire des brevets et les exploiter
(nouvelles molécules). Au bout de 20 ans, tous les laboratoires peuvent exploiter sous forme de
générique. Mais avant cela, le laboratoire qui a découvert exploite seul et donc les revenus tirés du
brevet vont fondre car il n’y aura plus de monopole de droit. Celui qui avait le monopole de droit
dénigre parfois ceux qui distribuent en générique en disant que c’est mieux l’original. Dans d’autres
circonstances ça pourrait être de la concurrence déloyale. Mais ici on est dans un contexte d’abus de
position dominante de structure, et le dénigrement peut être une forme d’abus de structure en
discréditant les concurrents pour les évincer du marché. l’Autorité de la concurrence sanctionne
cette pratique.

D’autres abus de structure sont plus complexes : par exemple avec la politique de prix prédateurs,
c’est une forme d’abus de structure. L’idée de base c’est que le dominant veut rester dominant sur le
marché en tuant la concurrence. Il a de la trésorerie et il va la mettre en place pour faire un plan de
prédation :

- 1er temps je baisse tous mes prix : je dissuade les nouveaux d’entrer, j’empêche les concurrents
d’être compétitif. Cette période n’est pas ad vitam aeternam. Je vais vendre soit en dessous de
mes coûts moyens variables, c’est de la super revente à perte, ça coute de l’argent de vendre les
produits et services car je ne couvre pas les charges. Cela, je le fais à dessein pendant un certain
temps car je peux me permettre d’accumuler les pertes. Le concurrent va perdre ses clients en
regardant l’avantage sur le prix. Il y a donc une captation de clientèle donc de parts de marché.
Quand j’ai fini de tout capter, j’arrête et je rehausse.

- 2ème temps je rehausse : une fois que j’ai gagné la bataille je rehausse. Si j’ai tué tout le monde,
et que j’ai le monopole de fait, je vais récupérer l’intégralité des pertes car j’ai une clientèle
immense, le consommateur n’a plus le choix. Si demeure encore des concurrents, je vais
récupérer une partie de mes pertes, et je vais garder les nouveaux clients car je m’aligne sur les
prix du marché, donc les clients n’ont aucune raison de repartir vers la concurrence.

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Cette politique prédatrice peut être un abus de position dominante. Mais encore faut-il démontrer
qu’il pratique effectivement des prix prédateurs. C’est donc très complexe, d’autant qu’il faut
démontrer que le leader pratique des prix en dessous de ses prix moyens. Il n’existe actuellement
que deux décisions : une de l’autorité de la concurrence et une de la CJUE. Dans tous les autres cas
ce qui faisait défaut c’était les informations, on n’arrivait pas à passer le cap de la démonstration. Le
test de prédation de 1991 AKZO.

Autre forme d’abus de structure : la diversification des acteurs publics. Un exemple qui est
arrivé : Je suis une régie publique, le département de la Vendée, qui gère un port qui dessert des Îles.
Ce port unique dans la région. Dans ces Îles il y a des Ilés (ceux qui habitent sur l’Îles à l’année).
Pour eux, il y a le principe de continuité territoriale du service public. Donc la métropole s’étend
aux Îles. Donc le département assure aux frais du contribuable des liaisons maritimes matin et soir
entre les Îles et la métropole. Une entreprise privée s’est dit qu’il y avait quelque chose à faire l’été
pour les escapadeurs (touristes). Pas la peine d’un ferry car il ne vient pas en voiture. Donc on crée
un service de vedette rapide pour faire la même liaison maritime. La régie réfléchie et décide de le
faire. La régie a crée cela sur fonds public. Contentieux de 25 ans. La régie le fait pour toute
l’année. La société privée va demander au port et à la régie si elle pouvait aussi faire ça de manière
concurrente au printemps et en été. Elle finit par dire non. Problème concurrentiel car le port est
géré par la régie et il est unique dans la région, le seul à permettre de partir du continent. C’est une
infrastructure essentielle pour l’exercice de l’activité de la société, en tant que compagnie
maritime je dois avoir un port pour faire partir mes bateaux.
Le Conseil de la concurrence est saisit en référé conservatoire par la société. Le Conseil dit qu’il se
peut qu’il y ait un abus de position dominante, car ce port peut constituer une infrastructure
essentielle. Si la régie refuse son accès, ça peut être un abus de position dominante. La régie se
ravise suite à la décision.
La société privée va reformuler sa demande pour obtenir un accès à l’infrastructure essentielle. La
régie va dire oui mais à mes conditions : horaires impossibles et impraticables, discriminatoires. Ça
équivaut à un refus d’accès. Nouvelle saisie à titre conservatoire. Le Conseil redit la même chose
avec la théorie des infrastructures essentielles.
L’opérateur qui domine est dans un marché amont, alors que le marché aval n’est pas forcément
dominé par cet opérateur. La régie gère le port (marché amont : gestion du port), mais elle s’est
adjoint une nouvelle activité aval (vedette rapide). Le premier marché est essentiel au marché
secondaire (aval) car il y a un lien économique essentiel entre les deux. Ça vaut aussi avec un
aéroport et les compagnies aériennes. Sur le marché amont et aval du port, les deux opérateurs ne
sont pas en concurrence initialement. Mais si j’autorise l’accès à l’aval alors que j’ai une émanation
de moi-même, en tant que régie je subis la concurrence. La régie avait donc un intérêt personnel
dans l’interdiction qu’elle a émise.
C’est la diversification de l’acteur public qui produit sa décision de refuser la concurrence sur l’aval
de l’activité portuaire. La théorie des infrastructures essentielles est donc apparue. Elle vise des
infrastructures matérielles publiques essentiellement (ports, aéroports) mais aussi immatérielles
(fréquences radios, ondes…). Il y a par exemple eu un contentieux Radio classique sur la demande
d’attribution de nouvelles ondes.

Cette théorie risque d’être transposée dans le domaine de la distribution alimentaire, mais encore
faut-il savoir ce qu’est l’infrastructure essentielle : peut être dans les linéaires (qui se réduisent de
plus en plus en taille, ce qui produit donc une exclusion de certains produits et donc de
fournisseurs). On se demande donc si des infrastructures privées pourraient faire l’objet de la

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théorie des infrastructures essentielles, tendance qui concerne normalement des structures
publiques.

B°) L’abus de dépendance économique.

Il n’y a pas d’équivalent européen dans le TFUE. L'article L420-2 alinéa 2 du Code de commerce
prohibe l’exploitation abusive d’un état de dépendance économique. En 1986, avec l’ordonnance du
1er novembre, on vient de prendre en considération les abus de la grande distribution alimentaire vis
à vis des petits et moyens fournisseurs. Ils avaient des comportements déviants mais qu’on ne
pouvait pas sanctionner par l’abus de position dominante.

Pour qu’un opérateur soit poursuivit pour une position dominante il faut aussi identifier un marché.
Mais à l’époque on disait qu’un distributeur alimentaire n’était sur aucun marché spécifique. Un
distributeur alimentaire distribuait en moyenne 27 000 références distinctes donc aucune position
dominante sur un quelconque marché. Donc on a pris la chose à l’envers, et on a renversé les
perspectives, on les a poursuivi en démontrant qu’ils entretiennent leurs partenaires contractuel dans
un état de dépendance économique.

L’abus de position est complété par la dépendance économique. À l’époque, le quasi législateur de
1986 pose 4 conditions cumulatives (et ce jusqu’à la loi NRE) :

- 100% de dépendance économique : Il faut démontrer que l’on a pas d’autre solution alternative,
il faut avoir 100% de son CA avec un seul interlocuteur. Donc pas d’autre source d’écoulement
de sa production. Mais ça ne marche pas car aucun fournisseur n’a qu’un seul client. Donc
jusqu’en 2001 pourtant c’est comme cela que ça se passait. On arrivait même pas à passer cette
étape.

En 2001, le législateur se dit que cette condition ne marche pas malgré les abus de la grande
distribution. Le législateur va combattre cette condition, et il va supprimer cette condition en
modifiant l'article L420-2 aliéna 2 du Code de commerce. Dès l’entrée de NRE, le Conseil de la
concurrence reçoit une affaire mettant en cause l’application de ce nouveau texte. C’est l’affaire
Sony c/ M. Chapelle : la décision nous dit que la condition supprimée par le législateur doit
quand même être prise en considération. La jurisprudence combat la loi nouvelle.

Mais alors pourquoi on serait le seul pays de l’UE et du monde avec des comportements déviants
de la grande distribution. Parce qu’à l’époque il n’y avait pas de texte européen. On y arrivait pas
car on avait cette condition, qui partait du postulat que la grande distribution n’avait pas de
position dominante sur un marché pertinent.

Par exemple le droit de l’aménagement commercial : il faut solliciter une autorisation


administrative pour construire un centre commercial. Dans ce domaine, il faut déposer un dossier
administrative avec la délimitation d’une zone de chalandise. En droit de la concurrence, la
zone de chalandise c’est le marché pertinent. Donc ce n’était pas du tout pertinent de dire que
la grande distribution n’avait pas de marché pertinent puisqu’en réalité à l’ouverture d’un point
de distribution (grande surface), alors un marché était déterminé par la zone de chalandise.

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La jurisprudence commence à se développer dans le sens de la détermination d’un marché local de
la grande distribution ce qui permettrait d’appliquer le droit des abus de position dominante.

§2) La possible justification des PAC

Cette possibilité est très circonstanciée, on va parfois pouvoir justifier telle ou telle pratique
anticoncurrentielle.

Article L420-4 du Code de commerce :

I.-Ne sont pas soumises aux dispositions des articles L. 420-1 et L. 420-2 les pratiques :

1° Qui résultent de l'application d'un texte législatif ou d'un texte réglementaire pris pour son
application ;

2° Dont les auteurs peuvent justifier qu'elles ont pour effet d'assurer un progrès économique, y
compris par la création ou le maintien d'emplois, et qu'elles réservent aux utilisateurs une partie
équitable du profit qui en résulte, sans donner aux entreprises intéressées la possibilité d'éliminer la
concurrence pour une partie substantielle des produits en cause. Ces pratiques qui peuvent consister
à organiser, pour les produits agricoles ou d'origine agricole, sous une même marque ou enseigne,
les volumes et la qualité de production ainsi que la politique commerciale, y compris en convenant
d'un prix de cession commun ne doivent imposer des restrictions à la concurrence, que dans la
mesure où elles sont indispensables pour atteindre cet objectif de progrès.

Dans le droit national c’est un même texte qui peut apporter deux justifications : L420-4 I du Code
de commerce. Son petit 1° et son petit 2° offrent deux justifications qui n’ont aucun lien entre elles :

- Petit 1° justification d’une pratique anticoncurrentielle par un texte : il n’y aura pas de
sanction dès lors que la pratique en question résulte d’un texte législatif ou réglementaire pris
pour l’application de cet article. Déjà le cadre est fixé, le texte qui fixe cela ne peut être qu’une
loi ou un décret d’application de ladite loi. Il y a bien une chronologie car ici c’est le texte qui
crée l’entente (et l’abus de position dominante). Par exemple, le décret octroi une position
dominante à un acteur sans limitation de durée (ex : tel secteur est attribué à telle entreprise sans
limite de temps) ou encore ces deux acteurs sont entendus de s’entendre.

Mais dans la vraie vie, ce texte franco-français qui n’a pas d’équivalence dans le monde n’a
jamais été appliqué et ça ne peut pas être justifié à l’échelle de l’UE car on a repoussé les
frontières des Etats au niveau de l’UE. La Commission et la Cour de justice empêcherait tout
comportement de la sorte car il serait anticoncurrentiel, les deux dissocient le texte du
comportement pour sanctionner l’entente. Donc ne contentieux quand on invoque ce texte c’est
qu’on est à bout d’argument. Ce texte existe depuis 1945, mais il n’y a presque jamais eu
d’hypothèse.

- Petit 2° justification par la contribution au progrès économique : cette option est bien plus
intéressante que la première. C’est la retranscription en droit national du §3 du 101 TFUE.

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Schéma de l’article 101 TFUE :

Le §1 c’est l’équivalent de l'article L420-1 probation des ententes.


Le §2 c’est l’équivalent de l’article L420-3 nullité des actes contraries à la prohibition des ententes.
Le §3 c’est l’équivalent de l’article L420-4 I 2° possible justification d’une entente du fait du
progrès économique.

L'article 102 du TFUE probation l’abus de position dominante. En revanche cet article ne contient
qu’un §, il n’y a pas de justification des positions dominantes. Mais en droit national, l'article
L420-4 permettrait de justifier ce que le droit européen ne permet pas. Cette possible justification
d’une entente résulte d’une philosophie particulière du droit de la concurrence, notre droit européen
de la concurrence, quand il a été écrit, a pris comme modèle celui du droit antitrust nord américain
qui existe depuis 1890. La concurrence est une fin en soit dans ces textes. Mais le législateur
européen ne veut pas en faire une fin en soit, il pense qu’une pratique anticoncurrentiel permette des
effets positifs (sauvegarde de l’emploi…), c’est ce qu’on appel un bilan économique (exemption
individuelle) Ça permet de contrebalancer la restriction par des avantages économiques. Si le bilan
économique est favorable alors j’aurais une justification.

Les termes sont très généraux, et c’est très complexe de pouvoir justifier grâce à ce texte qui reste
imprécis. À la lecture du seul énonce de l'article L420-4 et du 101 TFUE, on a du mal à faire un
bilan économique favorable. Avant il fallait notifier son accord à la commission européenne pour
qu’elle donne un avis. Mais c’était jusqu’en 2001.

Elle a voulu faire autrement, elle édicté des normes de droit dérivé (des règlements d’exemption
par catégorie). Elle a catégorisé les règlements par type de secteur. Au visa de l'article 101 §3 du
TFUE, elle a pris des règlements qui font le bilan économique. Il en existe dans pleins de secteurs.
Le 101 §3 est un texte général, alors que les règlements sont autant de droits spéciaux de
l’exemption. Lorsque je ne remplis par les cases d’un règlement par catégorie, ça ne veut pas dire
que je vais être sanctionné, je pourrais appliquer le droit général de l’exemption (bilan économique,
exemption individuelle).

- Règlement d’exemption = droit spécial


- 101 TFUE = droit général

On applique le premier et si on ne rentre pas les règlements par catégorie, on applique le droit
général de l’exemption (donc le §3 101 TFUE avec l’exemption individuelle - bilan économique).

Exemple avec le nouveau REC des ententes verticales : si le règlement d’exemption s’applique,
alors on échappe au §1. On a limité avec les seuils des 30%, le REC ne s’occupe que des
restrictions pour des opérateurs représentants moins de 30% des parts de marché, au delà on tente
l’individuelle (§3).

Les restrictions par l’objet et les restrictions exclues sont toujours maintenues, mais la liste a été
agrandie. Les restrictions par l’objet (caractérisée) sont toujours impossibles à exempter et les
restrictions exclues peuvent toujours être sauvées dans certaines circonstances.
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- Pour les restrictions par l’objet, dès lors qu’une est présente dans l’accord, tout l’accord saute
car son objet est anticoncurrentiel, c’est la nullité du §2 101 TFUE. Il y a un retrait du bénéfice
de l’exemption par catégorie pour l’ensemble de l’accord. Ça n’empêche pas d’essayer de faire le
bilan économique du §3 101 TFUE, on tente de sauver l’accord sur ça (peu de chance, personne
n’a jamais réussi à faire appliquer le bénéfice de l’exemption individuelle). En tout hypothèse,
l’accord sera probablement interdit.

- Pour les restrictions exclues, la nocivité est moindre donc seules les obligations en rapport avec
ça ne seront pas exemptées, mais le reste de l’accord pourrait l’être. Donc on prend la liste de
l'article 5 du REC et si on trouve une restriction dans l’accord, seule cette obligation ne
bénéficiera pas de l’exemption et pourra faire l’objet de l’annulation du §2 101 TFUE.

Il faut voir cela comme un entonnoir, on regarde d’abord s’il y a des restrictions par l’objet et
ensuite les restrictions par l’effet :

1 - on voit si restriction par l’objet ou pas : si oui c’est non exemptable sur le REC mais on tente
le bilan économique. Si non alors on exempte avec le REC

2 - on regarde si restriction par l’effet ou pas. Si pas de restriction par l’objet on définit les parts
de marché avec les seuils des minimis et on regarde s’il y a des restrictions par l’effet qui peuvent
être ou non exemptables :

- Inférieur ou égal à 15% de parts de marché : ce n’est pas une entente au sens de 101 §1 TFUE
donc on n’a même pas à se demander si on exempte ou pas.

- Entre 15% et 30% de parts de marché : c’est l’hypothèse de l’article 5 du REC, on entre dans
son champ d’application (du REC). Normalement dans ça on peut exempter mais il faut regarder
s’il y a ou non une restriction exclue. Si oui, alors cette obligation restrictive (restriction exclue)
ne bénéficie pas de l’exemption (réputée non écrite) mais on peut tenter de la sauver avec le §3,
le reste du contrat/accord subsiste quoi qu’il arrive. Si non, alors tout va bien, on exempte avec le
REC. On peut s’émanciper du REC mais il faut anticiper ce qu’on aura à dire pour sauver
l’accord sur le droit général.

- Au delà de 30% de parts de marché : ce n’est pas couvert par le REC. On tente §3 101 TFUE
et on espère un bilan économique favorable.

QUESTION POUR LE PARTIEL : la justification des PAC : essentiellement du L420-4 petit


2° et 101 TFUE

Si on reprend le L420-4 petit 2°, il est écrit qu’il pourrait être pris des décrets aux visas des articles
L420-1 et -2. Mais depuis que cette disposition existe, le législateur français n’en a jamais pris.

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Sec on 2 : Le droit processuel

Le droit de la concurrence n’est pas le même s’il est appliqué par les autorités de concurrence ou
par les juridictions de droit commun. C’est un distinguo européen. On estime que les autorités de
concurrence appliquent le droit de la concurrence à titre principal la ou les juridictions de droit
commun l’appliquent à titre incident.

C’est considérer que les autorités de concurrence préservent l’ordre public de la concurrence (le
gendarme de la concurrence : c’est une sanction administrative qui est rendue). Cette définition de
sanction n’est pas la pour réparer le dommage causé à telle ou telle entreprise ou consommateur,
mais c’est une sanction pécuniaire la pour réparer un dommage fait à l’économie. Le chèque est
reversé au trésor français (ex : apple France 1,2 milliards d’euros d’amende administrative). Le but
est de réparer le dommage causé à l’économie de marché. Même en faisant appel, il faut payer.
C’est le prix pour aller voir la cour d’appel.

On appelle cela le « public enforcement » alors que devant les juridictions de droit commun c’est le
« private enforcement », donc l’action de droit privé qui vient réparer un dommage à celui qui
engage l’action, il alloue des réparations à la victime de la pratique anticoncurrentielle. C’est pour
cela que le droit processuel est différent entre les juridictions de droit commun et les autorités de
concurrence.

Donc dans une même affaire avec les mêmes faits et les mêmes parties, les conséquences sont
différentes. La juridiction de droit commun est la seule à pouvoir allouer des dommages et intérêts
et donc réparer le préjudice. Ensuite on peut aller voir l’autorité de la concurrence pour faire juger
le dommage causé à l’économie, ici on n’atteint pas le principe de non bis in idem car on répare
deux préjudices différents et l’addition comptable peut être très salée pour l’auteur de la pratique
anticoncurrentielle.

Lorsque l’autorité de la concurrence rend des décisions en matière de pratique anticoncurrentielle,


ce sont des décisions administratives. Malgré le caractère administratif de ces décisions, il y a une
loi de 1987 qui a dérogé à la répartition des litiges entre juge administratif et juge judiciaire, tout le
contentieux de réformation des décisions de l’autorité de la concurrence a été dévolue à la Cour
d’appel de Paris (essentiellement la chambre 5-7). Ensuite on saisira la chambre commerciale de la
Cour de cassation.

Au niveau européen c’est semblablement la même chose, la commission européenne rend des
décisions en matière de pratique anticoncurrentielle qui peuvent être contestée par le tribunal de
l’Union européenne, qui pourront elle-même être contestées devant la CJUE.

I / Devant les juridictions administratives.

Ce qui nous intéresse ici c’est le droit processuel applicable en France. Les autorités ont trois
types de pouvoirs :

- Des pouvoirs classiques : ce de toute autorité administrative qui dispose d’un pouvoir
contentieux.
- Des pouvoirs plus contemporains
21 sur 94
ti
- Des pouvoirs concernant les micro-pratiques anticoncurrentielles.

A°) Des pouvoirs classiques.

Concernant les pouvoirs classiques, on trouve d’abord la possibilité de prendre des décisions avant
dire-droit et les décisions au fond. C’est l’action publique, les pouvoirs de l’Autorité de la
concurrence.

1°) Les décisions avant dire-droit.

C’est l’article L464-1 du Code de commerce. Cet article ne parle pas de référé, mais c’est
l’équivalent du régime de référé commercial classique. Mais ce n’est pas un référé. Le ministre de
l’économie peut saisir l’autorité de la concurrence, ou une entreprise peut le faire, ou l’autorité peut
s’auto-saisir ; elle pourra prendre des mesures conservatoires, mais qui ne préjudicient pas du fond.

Si je suis victime d’une PAC mais je ne peux pas me permettre d’attendre une décision au fond en
raison d’une urgence, je saisis l’autorité de la concurrence sur le fondement de cet article en
demandant une mesure conservatoire.

Le problème en pratique c’est que l’autorité de la concurrence est très réticente à accorder des
mesures conservatoires, en 2021 elle n’en a accordé qu’une fois par exemple. Elle se fait une
acception particulière de ce qu’est l’urgence concurrentielle, il faut un péril imminent. Dans certains
secteurs sous monopole en France ont été ouverts à la concurrence, on avait des dates butoirs fixées
par des directives européennes. Beaucoup d’opérateurs alternatifs se sont plaints car certains
opérateurs historiques refusaient de lâcher leur monopole (EDF empêchait l’accès au réseau des
opérateurs alternatifs). Donc la, l’autorité avait enjoint de stopper ces pratiques. Mais c’est rare.

Mais on pourrait aussi utiliser les mesures du Code de procédure civile pour faire valoir un référé de
droit commun si jamais on n’est pas sur d’obtenir une mesure conservatoire, le L464-1 du Code de
commerce n’est qu’un droit spécial. Et souvent les acteurs préfèrent avoir un juge non spécialisé
qu’il est plus simple de convaincre que l’autorité de la concurrence qui a plus de mal à se faire
convaincre en matière de référé.

2°) Les décisions au fond.

En sa qualité d’AAI, l’autorité de la concurrence rend des décisions au fond. Il n’y a pas de lien
avec la mesure conservatoire. Il est possible de l’avoir saisie pour une mesure conservatoire mais ce
n’est pas obligé. C’est ici l’article L462-8 du Code de commerce. Elle peut rendre trois types de
décisions :

- Décision d’irrecevabilité : L462-8 alinéa 1 Code de commerce, défaut d’intérêt ou de qualité à


agir, faits prescrits, ou faits qui n’entrent pas dans le champ de sa compétence (ex : droit de la
concurrence déloyale qui ne fait pas partie de son attribution).

- Décision de rejet : ici, l’autorité est compétente mais l’alinéa 2 dispose qu’elle peut aussi rejeter
la saisine par décision motivée lorsqu'elle estime que les faits invoqués ne sont pas appuyés
d'éléments suffisamment probants (ex : on apporte pas la preuve qu’il y a eu concertation) ou

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lorsqu'elle ne les considère pas comme une priorité. Cette seconde option veut dire que sans
préjuger de la circonstance dans laquelle il peut y avoir une pratique anticoncurrentielle,
l’autorité peut dire si oui ou non cette affaire est prioritaire ou non, et si ça ne l’intéresse pas elle
pourrait rendre une décision de rejet. Pour le moment ça ne s’est pas traduit en pratique.

- Décision de sanction : J’ai franchi le stade de la compétence et le stade du non rejet, on retient la
qualification de PAC. Ici on est au stade de la sanction. D’abord il y a une injonction de cessation
de la pratique. Mais il se peut que cette pratique ait déjà cessé, donc l’autorité ne va pas enjoindre
de cesser la pratique. L’injonction de cessation s’impose lorsque c’est nécessaire, si la pratique
demeure. À coté de cette possible injonction, il y a la sanction pécuniaire. Dès qu’il y a des PAC
graves, il y a publication de la décision de sanction (« name and shame »). L’autorité rédige elle-
même le résumé de ses décisions, elle est publiée sur le site de l’autorité de la concurrence et
dans une revue spécialisée.

B°) Des pouvoirs plus contemporains.

Il y a des pouvoirs plus contemporains qui tiennent à deux choses : l’augmentation de la sanction
pécuniaire et les remèdes à la sanction pécuniaire.

1°) L’augmentation de la sanction pécuniaire.

De 1986 jusqu’à NRE en 2001, le plafond était 5% du chiffre d’affaires national pour toute sanction
pécuniaire. Ce plafond n’a jamais été atteint, et loin de la même. La plus grosse sanction pécuniaire
à l’époque était d’un milliard de francs (150 millions d’euros) dans un cartel (décision 00D28).
Mais de nos jours les sanctions ont grossi. Le cartel en question réunissait toutes les banques
établies sur le territoire français, les gens empruntaient à des taux d’intérêts élevés (15%) et
l’inflation était d’environ 10%. Quand l’inflation a décru, c’est devenu ruineux. Le consommateur
est allé voir sa banque en lui disant qu’il voulait renégocier et sinon il irait voir une autre banque.
Mais les banques avaient conclu un pacte de non agression entre-elles avec deux volets :

- Chacune des banques qui octroie un crédit s’interdit de renégocier les crédits
- Les banques s’engagent à ne pas accepter les clients d’une autre banque.

L’assiette a été élargie : on prend désormais le chiffre d’affaires mondial. On a aussi rehaussé le
taux, avec 10% du CA mondial. Mais ça n’a rien changé. C’était une décision de politique
décisionnelle. En 2004, quand le nouveau président du conseil de la concurrence arrive, en ne
voulant rendre de compte à personne. 1 an après son arrivée, il a battu tous les records, avec une
décision de 650 millions d’euros dans les cartels de la téléphonie. Plus personne n’a rigolé à ce
moment, et comme c’est une décision administrative elle est exécutoire de plein droit.

Comme le nouveau président en avait conscience, il s’est aussi focalisé sur le quantum de la
sanction pécuniaire. C’est un véritable enjeu rédactionnel pour le conseil et désormais l’autorité. Il
fallait écrire le pourquoi de telles sanctions. On a eu une inflation quantitative de la longueur des
décisions. Le droit de la concurrence a commencé à faire peur, car il a commencé à affecter la
trésorerie des entreprises.

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Est arrivé un contentieux avec le cartel de l’acier. Arcelor Mittal et toutes ses filiales et tous les
autres opérateurs, la sanction est de 780 millions d’euros. Véritable enjeux, tous les opérateurs
interjètent appel contre le quantum. À l’époque, la patron d’Arcelor Mittal entre en contact avec le
ministre de l’économie ; il tente le chantage social, si la CA de Paris confirme la sanction, nous
fermons tous les sites en France. La CA de Paris a réduit le montant de 90%. La presse s’est
emballée, en disant : que fait le ministre car à l’époque seul lui pouvait former un pourvoi en
cassation, ce qu’il n’a pas fait. Tout le monde a appris le chantage social.

La ministre de l’économie a crée une commission parlementaire, composée de savants en droit de la


concurrence et des praticiens. Au terme de ce rapport parlementaire, seule une initiative sera
retenue, le président du conseil de la concurrence pourra former lui-même un pourvoi en cassation.
Mais il a fini dans la poubelle.

On a vu apparaitre de la soft law de l’autorité de la concurrence, pour venir expliquer comment elle
détermine les sanctions pécuniaires en fonction de telle type de pratique (communiqué de
procédure). Ça constitue une base de donnée qui permet un peu de borner le risque encouru.
Lorsque le président de l’autorité prend la décision de faire cela, c’est pour redonner du crédit au
droit de la concurrence. Depuis lors, elle n’a pas cessé de faire ce qu’elle avait commencé, avec de
grandes sanctions en fonction de la situation des parties. L’article L464-2 du Code de commerce a
été adopté en matière processuelle, il prévoit que les membres du cartel peuvent être sanctionnés de
manière individuelle et proportionné en fonction de leurs agissements personnels dans le cartel et de
l’intensité de leurs pratiques. Cet article est issu d’une ordonnance de 2021, tirée d’une directive
européenne. Le terme dommage causé à l’économie a disparu du Code de commerce mais c’est
toujours l’idée qui sous-tend l’action publique.

Quand on a à faire qu’à des entreprises, la sanction va prendre en compte le CA de l’entreprise.


Quand il s’agit d’un cartel, d’un syndicat professionnel, d’une association d’entreprises, alors on
prend la somme du CA mondial réalisé par chacun des membres.

Cette augmentation tient à l’évolution de l’acquis décisionnel et aux nouveaux textes qui permettent
de lourdement sanctionner les entreprises et les décisions d’association d’entreprise lorsque l’on
prend le CA cumulé de chacun des acteurs.

2°) Les remèdes.

On trouve trois types de remèdes. Tout se trouve dans l’article L464-2 du Code de commerce. Ces
trois remèdes arrivent à des stades différents de la procédure.

a) Les engagements.

Article L464-2 II : Il faut retenir qu’on est au degré zéro de la procédure. Le service n’a pas encore
envoyé une notification de grief. Mais il y a peut être une dénonciation par un concurrent ou le
ministre de l’économie. Mais il n’y a pas encore de qualification juridique. L’autorité de la
concurrence va envoyer un questionnaire qui peut concerner la personne destinataire ou pas. Mais
on ne le saura que plus tard, on peut par exemple être le simple fournisseur de la personne
concernée par la surveillance ou l’enquête anticoncurrentielle.

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Parfois on trouve presque les réponses dans les questions, l’entreprise comprend assez vite qu’il y a
des préoccupations de concurrence. Soit l’entreprise s’en fiche, soit elle veut en savoir d’avantage
avec un rendez-vous avec le rapport général de l’autorité de la concurrence. C’est un rendez-vous
informel.

L’entreprise peut alors proposer des engagements de nature à satisfaire les préoccupations de
concurrence, si l’autorité les accepte ça clos la procédure, et il n’y aura pas de sanction, c’est un
choix stratégique. On l’a vu dans les contentieux sur les distributeurs qui interdisaient la revente sur
internet. Un des opérateurs avait accepté un engagement pour autoriser la vente sur internet en
imposant des conditions. Seul le laboratoire Pierre Fabres avait refusé.

En général, la rapporteur essaye de pousser à ce qu’il y ait des engagements, et qu’ils soient élevés
pour éviter les poursuites qui pourraient suivre. Il y a une décision d’acceptation de l’engagement
qui clos la procédure. Les engagements pris doivent être respectés, et l’autorité de la concurrence
a un service de suivi des engagements. Depuis 2001, il y a une 60aine de décisions d’acceptation
des engagements avec une clôture de la procédure.

La procédure d’engagement est un véritable succès pour éviter à des petites entreprises qui n’ont
pas connaissance du droit de la concurrence de se faire sanctionner. C’est une façon de diffuser la
culture de la concurrence.

b) La transaction.

C’est un autre remède qui vient plus tard. Ici, on a pas proposé des engagements ab initio. Donc on
attend une possible notification de grief. L’autorité envoie cette notification à tous les membres du
cartel avec toutes les pièces du dossier d’instruction et les concernés ont deux mois pour répondre.
Soit ils nient en contestant la qualification des faits. Soit ils acceptent en proposant au rapporteur
une transaction (L464-2 III du Code de commerce). Ici, je ne suis pas apte à éviter la sanction,
mais le but est de minorer son montant en faisant un deal avec le rapporteur. C’est un choix de
l’entreprise, une stratégie.

La transaction a un engouement moindre que pour l’engagement, car quand je viens dealer avec les
services du rapporteur général, ce sont eux qui vont préconiser une fourchette de réduction de la
sanction, mais l’autorité n’est pas liée par cette préconisation. Les opérateurs, face à cette forme
d’insécurité juridique ne sont pas incités à utiliser la forme de la transaction, donc il y a moins de
procédures de transactions que d’engagements.

Cette procédure ne peut être enclenchée à partir du moment ou il n’y a pas eu de notification de
grief.

c) La clémence.

Ça ne vise que les cartels. On va en retrouver des traces dans la loi NRE à l’article L464-2 IV du
Code de commerce. C’est un programme de délation, car celui qui est à l’origine de la délation va
bénéficier de la clémence, mais c’est uniquement dans les cadres des cartels. Le but est de favoriser
la preuve de la concertation, le mieux c’est que la preuve vienne de ceux qui sont à l’origine du
cartel. Tous les opérateurs ont le même intérêt que la preuve de la concertation n’apparaisse pas, ils

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ont tous intérêt à ce que ça reste occulte. Mais s’il y a le doute entre les membres du cartel, ils vont
peut être moins faire de cartel, mais surtout la preuve en cas de cartel sera simplifiée si un membre
de celui-ci la livre.

Ça permet donc de combattre les cartels en les révélant, et il y a la carotte de l’immunité. Mais est
ce qu’on peut donner l’immunité à tout le monde ? : Aujourd'hui on a 16 décisions de clémence.
Depuis mai dernier il y a eu des déserts d’application (R464-5 du Code de commerce). Le Président
de l’autorité de la concurrence a édité un communiqué de procédure sur le programme de clémence
pour expliquer comme ça marche. En gros il peut y avoir 4 bénéficiaires de la clémence. Mais
l’immunité va decrescendo :

- Celui qui arrive en premier bénéficie de 100% car il permet la révélation de la concertation.
- Celui qui arrive en deuxième, ça sera entre 25 et 50%
- Entre 15 et 40%
- Maximum 25%

La c’est chacun pour soit, donc personne ne sait si on est premier ou dernier. Sur le site de l’autorité
de la concurrence, il y a un onglet clémence. On peut prendre rendez-vous avec l’autorité après
avoir rempli un formulaire. Il y a une audition. L’autorité récolte les informations. Il faut apporter
des informations qui présentent une valeur significative approuvée.

Ce système marche bien, et marche aussi beaucoup sur le bluff. Elle émet des communiqués en
visant des secteurs pour faire peur et inciter à des dénonciations. La première décision de clémence
en France date de 2006 dans le secteur de la fabrication des portes. En France dans ce secteur le
marché est atomisé. La société France porte qui était leader du marché, a été à l’initiative d’un
cartel avec tous les opérateurs du marché pour se répartir les parts de marché en faisant une
cristallisation pour tuer la concurrence (cristallisation des parts de marché). La société France porte
est allée voir le rapport alors même qu’elle était instigateur. Elle a été immunisée à 100% et les
autres petits opérateurs ont été sanctionné. Cette première décision a été mal reçue car c’était
n’importe quoi.

Aujourd'hui il n’y a plus d’équivoque. Il existe donc 16 décisions que l’on peut retrouver sur le site
de l’autorité de la concurrence. Il y aussi la publication de la décision de clémence. Ça permet aussi
de faire en sorte que celui qui a balancé ne puisse plus jamais se retrouver dans un cartel puisque
plus personne ne voudra en faire un avec lui.

C°) Des pouvoirs concernant les micro-pratiques anticoncurrentielles.

On va parfois retrouver le ministre de l’économie dans ce domaine, ça lui permet de revenir dans la
danse des PAC alors qu’il en avait été jeté en 1986. Un article, L464-9 du Code de commerce a été
crée exprès pour ça dans la loi du 4 aout 2008.

Le ministre peut enjoindre aux entreprises de stopper la pratique anticoncurrentielle. C’est un droit
ad hoc qui concerne uniquement les pratiques anticoncurrentielles désignées audit article. Il ne faut
pas qu’on entre dans le champ du 101 et 102 TFUE ; et le chiffre d'affaires que chacune d'entre elles
a réalisé en France lors du dernier exercice clos ne dépasse pas 50 millions d'euros et que leurs
chiffres d'affaires cumulés ne dépassent pas 200 millions d’euros.
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Donc ce sont des cartels de nains. Ça ne concerne que des petites entreprises. Ça relève de la
compétence exclusive du ministre de l’économie. Il a des pouvoirs moins larges que l’autorité de
la concurrence : injonction de cessation ou proposition de transiger.

On pourrait dire que ce sont des petites entreprises qui mettent des petites PAC qui seraient peu
novices. Mais en réalité non. Pourtant on a donc deux régimes distincts qui coexistent. Ça n’a aucun
sens. Il y a une vingtaine de décisions par an, avec une proposition de transaction. Mais il n’est pas
possible de contester la qualification, mais seulement le montant. Il n’y a aucun contradictoire.
C’est doublement exorbitant. Tout cela sur la base d’un postulat erroné. C’est unique en Europe, il
n’y a aucun équivalent.

C’est surtout une présomption irréfragable et ça pose un problème de contradictoire car ici le
prévenu ne peut même pas se défendre mais il peut seulement contester le montant de l’amende que
le ministre veut lui infliger.

Du jour au lendemain on a enlevé des affaires de la compétence de l’autorité de la concurrence.

II / Devant les juridictions de droit commun

Ici, il y a eu une décision de sanction par l’autorité de la concurrence ou le ministre dans les micro-
PAC. Celui qui a dénoncé la pratique veut obtenir des dommages et intérêts, mais la décision
administrative ne peut pas lui en fournir. Donc il va effectuer une action de droit privé, c’est une
action de follow on, qui suit l’action de l’autorité de la concurrence. Parfois, il y a aussi du stand
alone, donc sans saisine de l’autorité de la concurrence.

Pendant des années, ça ne marchait pas car on avait pas de droit processuel particulier, donc on
fondait les actions sur 1240 du Code civil. Pendant des années, il fallait démontrer la faute
concurrentielle, le préjudice et le lien de causalité, ce qui en a découragé plus d’un. Il n’y avait
jamais de jugement malgré des assignations. La plupart du temps, les acteurs condamnés par
l’autorité de la concurrence faisaient une transaction à ceux qui voulaient agir au civil pour éviter à
repayer autre chose. Donc on avait pas de jugement.

La Commission européenne voit cela dans tous les Etats de l’UE, les actions civiles ne voyaient pas
le jour. Elle a décidé de prendre l’initiative d’une directive sur l’action privée. Le but était de
faciliter les présomptions de préjudice. On a voulu harmoniser les procédures, cette directive a été
transposée en France par une ordonnance de mars 2017 devenue aujourd'hui les articles L481-1 et
suivants et R481-1 et suivants du Code de commerce.

On a voulu faire ce que l’article 1240 ne pouvait pas faire. Il y a deux temps.

A°) Les missions des juridictions de droit commun.

L’objectif n’est pas de réparer le dommage contre l’économie, mais bien d’indemniser les
préjudices subis par les plaignants. On trouve donc deux types de mission selon le moment ou l’on
intervient : le follow on et le stand alone.

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1°) Le follow on.

Une décision de l’Autorité de la concurrence a déjà été rendue. Je suis peut être celui à l’origine de
la saisine ou alors je ne le suis pas, mais je prends la décision définitive de l’Autorité de la
concurrence pour obtenir réparation personnelle. Je vais utiliser le droit des articles L481-1 et
suivants du Code de commerce. On va faciliter la preuve de la faute et parfois même la présumer
avec une présomption irréfragable qui s’impose au juge de droit commun, le but étant de faciliter
l’action privée.

Une décision définitive (pas contestée ou confirmation par la CA) de l’Autorité de la concurrence
équivaut à une présomption irréfragable de faute. Le travail est fait pour les opérateurs qui font un
follow on.

Si la décision de l’autorité n’est pas définitive, il y a une présomption simple de preuve.

On fait donc tout pour faciliter l’action en réparation. Le cartel des camions a par exemple était
sanctionné pour 3,5 milliards d’euros et les actions en réparation pleuvent. Il y a un effet d’ombrelle
avec des condamnation solidaires pour les membres du cartel, ça permet de multiplier le nombre
d’auteurs solvables de la pratique anticoncurrentielle.

Beaucoup de contentieux se font en follow on car c’est bien plus simple que le stand alone en raison
des présomptions établies, ce qui permet au plaignant de se concentrer uniquement sur l’évaluation
du préjudice qu’il a subi.

La décision de la Commission européenne la plus lourde est celle du cartel des camions avec 3,5
milliards d’euros. Les concessionnaires de camions ont été victimes de l’entente des constructeurs
(qui ont fixé des prix élevés). Le préjudice subi par les concessionnaires est la différence entre le
prix dont ils auraient dû bénéficier à défaut d’entente et le prix dont ils disposent avec l’entente. Ce
contentieux se développe donc énormément, mais il faut agir dans le temps de la prescription de
droit commun : dans les 5 ans ou la décision est devenue définitive.

2°) Le stand alone.

Je n’ai pas toujours besoin d’un précédent de l’Autorité de la concurrence. J’ai un dossier et je
décide d’aller demander réparation au civil. Il faut bien sur avoir des preuves, mais ici on se fout de
l’ordre public économique. Il faut donc tout démontrer, il faut arriver armé pour démontrer la
pratique anticoncurrentielle, mais ça permet d’obtenir réparation si on a toutes les preuves et sans
passer par l’autorité de la concurrence ce qui représente une procédure en plus qui est très chère.

Ici, je peux convaincre un juge de droit commun pour qu’il nous indemnise sans précédent, bien sur,
aucune présomption n’est alors établie. Il faut donc arriver avec suffisamment de faits probants, car
ici il n’y a pas le service d’enquête de Autorité de la concurrence

B°) La spécialisations des juridictions de droit commun.

1°) Spécialisation de certaines juridictions judiciaires.

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Dans l’ordre judiciaire, très tôt on a eu le sentiment qu’il serait bon de spécialiser un nombre limité
de juges de droit commun ayant compétence pour appliquer le droit de la concurrence dans le cadre
de ses missions de follow on et stand alone R420-3 à -20 du Code de commerce qui limite à 8
juridictions compétentes en France pour le droit de la concurrence et pour indemniser les victimes
des pratiques anticoncurrentielles. Ce sont les 8 TJ et TC de :

- Lyon
- Lille
- Nancy
- Renne
- Paris
- Bordeaux
- Marseille
- Fort de France

Elles sont seules habilitées à pouvoir connaitre du droit de la concurrence national et


européen. Donc elles peuvent appliquer le 101 et 102 TFUE.

C’est la cour d’appel de Paris qui est exclusivement compétente pour connaitre des appels en la
matière.

2°) Spécialisation du juge administratif.

Au niveau administratif on se pose moins de questions car il n’y a pas de règle : c’est le TA
territorialement compétent qui peut être saisi pour une action privée. Donc tous les TA peuvent être
saisis.

On trouve par exemple le contentieux Autorité de la concurrence novembre 2017 cartel des sols
souples : condamné à 300 millions d’euros → toutes les victimes ont pu intenter des actions
indemnitaires pendant 5 ans, notamment les hôpitaux personnes morales de droit public, ils ont
donc saisi le tribunal administratif. Il y a donc actuellement 10 actions intentées par des CHU contre
les 3 opérateurs qui ont fait l’entente dans les sols souples.

Le juge administratif devient donc un juge de droit commun de l’action privée.

Chapitre 2 : Le droit des structures « concentrations »

On distingue le droit matériel et le droit processuel pour les pratiques anticoncurrentielles car on
regarde avant vers le passé, c’est un contrôle ex post.

Le contrôle des structures est de toute autre nature, on contrôle les velléités de rapprochements
d’entreprises. On veut savoir si le rapprochement de concurrents va poser un problème de
concurrence, c’est donc un contrôle ex ante, a priori. Mais ce n’est pas la seule différence, on
trouve d’autres distinctions, il y a aussi le guichet unique qui s’applique. Pour les PAC il appartient
aux autorités nationales de concurrence et de droit commun d’appliquer le droit national et européen
des PAC, il y a une volonté de décentralisation d’application du droit européen.

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En matière de concentration, c’est chacun son droit, il existe un droit français et un droit européen,
aucune autorité nationale n’applique le droit européen des concentrations et donc seules les
autorités européens appliquent le droit européen.

Le droit français des concentrations se trouve aux articles L430-1 et suivants et R430-1 et suivants
du Code de commerce. Ces textes ont été forgés au grès des décennies. On en est arrivé la
aujourd'hui car il y avait eu une loi de 1977 avec un objet de contrôle des concentrations. Ce texte
est important car c’était le premier en Europe et dans un droit national. Le droit européen des
concentrations est très récent. C’était le signe parfait que c’est un droit éminemment politique, car
en 1957 avec le traité de Rome on a pas réussi à s’en doter d’un. Il faudra attendre 1989 pour avoir
un droit européen des concentrations à travers un règlement.

Ce texte de 1977 est perfectible pour une raison essentielle : s’il n’est pas respecté, on est pas
sanctionné, donc les entreprises n’étaient pas pressées de se soumettre à un texte non sanctionné. Il
faudra attendre la loi NRE du 15 mai 2001 qui va bouleverser ce droit et en faire un droit efficace.
Ce droit ressemble au droit actuel des concentrations car tout vient de la. Il est révolutionnaire car il
est contraignant et impose un certain nombre d’obligations aux entreprises qui veulent se
rapprocher et se concentrer.

L’ultime étape arrive avec la loi LME de 2008 qui va faire naitre l'Autorité de la concurrence. On
tue le conseil de la concurrence car l'Autorité de la concurrence va hériter de toutes ses
compétences en matière de PAC et va aussi se voir donner des compétences nouvelles en matière de
concentration alors que le Conseil n’en avait pas.

Ligne du temps relative au droit matériel des concentrations :

- 1977
- Disparait en 2001 avec NRE et bouleversement du droit avec des sanctions et obligations
contraignantes et compétences nouvelle de l'Autorité de la concurrence.

Ligne du temps relative au droit processuel des concentrations :

- 1977
- Disparait avec LME 2008 : ministre de l’économie avant et après c’est Autorité de la
concurrence. On déconnecte le ministre, contrairement aux PAC ou c’est 1986. Le ministre
n’avait qu’une compétence consultative.

On s’est dit que des nouveaux pouvoirs impliquaient un nouveau nom. L'Autorité de la concurrence
n’a aucune compétence pour appliquer le droit européen des concentrations. Et seules les autorités
européennes de concurrence (Commission, tribunal et CJUE).

C’est une histoire de seuils exprimés en CA pour déterminer si c’est une opération européenne ou
française :
- Opérateurs réalisent au niveau mondiale = + 5 milliards de CA et dans l’UE + 250 millions de
CA

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90% des opérations ne sont pas des opérations qui relèvent du droit de l’UE. Le droit des
concertations français est dans le fond très largement inspiré du droit européen des concentrations,
avec les mêmes notions. On voit donc deux temps :

- 1) Les conditions du contrôle des concentrations.


- 2) Les effets du contrôle des concentrations.

I / Les conditions du contrôle des concentrations.

On trouve deux temps dans les conditions du contrôle.

A°) Une opération de concentration contrôlable.

On s’interroge sur le schéma juridique au sens du droit des concentrations, pas du droit des
sociétés :

- Fusion-acquisition.

- Contrôle capitalistique (même minoritaire : par exemple avec une golden share).

- Une filiale commune de plein exercice (ex : deux producteurs concurrents veulent assurer une
économie d’échelle, ils mettent en commun leur force de distribution en créant une société
commune pour vendre). Cette filiale ne doit pas être une coquille vide.

Il faut définir la concentration (article L430-1 du Code de commerce). Certaines opérations de


concentration entrent dans le schéma de cet article mais ne sont pas contrôlables en raison des
seuils.

1°) Définition de la concentration (L430-1 du Code de commerce).

On trouve donc trois formes (L430-1 du Code de commerce) :

- Fusion.

- Prise de contrôle : c’est souvent une prise participation capitalistique majoritaire (rachat des
parts d’un concurrent), ça peut aussi être une action de préférence qui bloque l’unanimité.

- Filiale commune de plein exercice : ça peut être une filiale commune de production ou de
distribution, au vu de faire des économies d’échelle. On doit faire le lien avec le droit des
ententes, car si la filiale est une coquille vide, si les deux concurrents se concertent, alors c’est
une entente anticoncurrentielle, et ce n’est pas une opération de concentration. Donc elle doit
accomplir de manière durable toutes les fonctions d’une entité économique autonome, il doit
donc y avoir des apports, des salariés, des transferts d’actifs… elle doit exercer l’activité qui était
hier exercée par deux entreprises distinctes. Les mères doivent descendre tout ce qui est
opérationnel, et sinon ça sera l’expression d’une concentration illicite entre les deux concurrents.

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Il n’y a que ces trois modèles qui constituent, au sens du droit français et européen, des opérations
de concentration. Ça ne fait pas de ces opérations des opérations contrôlables car il y a des seuils
pour qu’on contrôle. Si ces seuils exprimés en CA ne sont pas satisfaits, le législateur français
admet la concentration non-contrôlable. C’est une sorte de seuils des minimis en droit des
concentrations, en deçà desquels on ne contrôle pas.

2°) Définition de la concentration contrôlable (L430-2 du Code de commerce).

Quelque soit le schéma envisagé (3), on trouve des seuils :

- Seuils de droit commun depuis NRE (L430-2 I du Code de commerce) : 3 conditions


cumulatives :

• CA total cumulé mondial HT supérieur à 150 millions d’euros (chiffre cumulé).

• CA total HT réalisé en France réalisé par au moins 2 entreprises parties est supérieur à 50
millions (chiffre individuel)

• L’opération n’entre pas dans le champ d’application du droit européen des concentrations.

Ça parait simple de savoir si on contrôle. Mais parfois des opérateurs français sont dédiés à l’export
et peuvent réaliser tout leur CA ou une grande partie à l’étranger (ex : Total). Et donc je dois exclure
tout ce qui n’est pas réalisé en France, cela pose un problème.

Peut être qu’un autre droit national pourra s’appliquer mais pas celui français. On pourra par
exemple appliquer le droit des concentrations de l’autre Etat si les seuils sont remplis dans l’autre,
car il existe 150 droits des concentrations dans le monde. Chaque pays a ses critères de
contrôlabilité, en France on pense que le contrôle pas le chiffre d’affaires est le plus simple, mais
dans d’autres pays on sait qu’il y a des critères alternatifs. Il y a des droits complexes de
concentrations, en Russie par exemple les seuils changeaient tous les 6 mois.

Le droit des concentrations français peut s’appliquer à des entreprises étrangères si elles réalisent du
CA en France et dépassent les seuils requis, donc ce n’est pas la nationalité qui fait l’application de
la loi.

- Nouveaux seuils concentration le commerce de détail : les seuils sont ici plus bas, mais il y’en
a toujours 3 cumulatifs, seuls les chiffres changeant, car dans la grande distribution française on a
beaucoup d’opérations de concentration entre enseignes (cordages) :

• 75 millions (CA cumulé)


• 15 millions (CA individuel)
• Opération pas soumise au droit européen

On a crée ces seuils car les formats sont plus bas que 50 millions d’euros HT. Donc on avait besoin
de créer des seuils plus bas, on trouve plus des chiffres 10 à 20 millions de CA individuel et le seuil
de 50 millions d’euros n’était pas adapté, car jamais atteint par le point de vente à dominante
alimentaire. La loi LME a voulu contrôler mais avec des seuils spécifiques.
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- Seuils des collectivités ultramarines : ce sont aussi des seuils abaissés car on a voulu surtout
viser la Réunion avec le phénomène de certaines familles qui contrôlent beaucoup de business :

• 75 millions (cumulés)
• 15 millions ou 5 millions pour le commerce de détail
• Opération pas soumise au droit européen

Suivant les hypothèses applicables, soit on franchit les seuils, alors l’opération est une opération de
concentration mais ce n’est pas contrôlable alors que si on franchit les seuils on va contrôler.

B°) Un contrôle préalable (L430-3 et -4).

On trouve avant une obligation de projet de notification et il y a une période de suspension.

1°) L’obligation de notification.

Article L430-3 du Code de commerce : l’opération de concentration contrôlable doit être notifiée à
l'Autorité de la concurrence avant sa réalisation. Un dossier de notification c’est complexe, le
squelette se trouve en annexe du Code de commerce et c’est un gros dossier notamment lorsque ce
sont des opérations horizontales (entre concurrents) car il y a des rachats de parts de marché. Si
c’est une opération verticale, il n’y a pas de rachat de parts de marché, mais je devrais quand même
notifier.

Si je ne notifie pas mon opération contrôlable, il y a des sanctions (L430-8 I et III du Code de
commerce) :
- Sanction : l'Autorité de la concurrence enjoint sous astreinte de faire la notification, avec aussi
une sanction pécuniaire pouvant atteindre 5% du CA national.

Si le dossier contient des informations erronées ou inexactes, c’est le III :


- Sanction : même sanction et montant que le I.

Ce n’est donc pas une option de réaliser le dossier de notification, car sinon on s’expose à des
sanctions lourdes. Ça entraine l’obligation de suspension.

2°) L’obligation de suspension de l’opération.

Articles L430-4 et suivants du Code de commerce : la concentration ne peut se faire qu’après


autorisation de l'Autorité de la concurrence.

Si je fais du gun jumping, donc qu’en gros je me concentre sans que l’autorisation n’ait encore été
donnée : alors on applique encore l’article L430-8 II du Code de commerce : l'Autorité de la
concurrence peut infliger une sanction pécuniaire qui peut atteindre le montant définit au I (5% du
CA national).

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C’est notamment ce qui est arrivé au groupe Altis lors de la prise de contrôle de SFR. Il avait
effectué la notification, mais avait effectué la concentration, l’amende a été de 35 millions d’euros.
En parallèle il avait aussi été condamné dans une autre opération à 80 millions d’euros.

Donc il faut attendre pour réaliser l’opération dès lors qu’on a notifié.

II / Les effets du contrôle des concentrations.

Il faut donc se demander quels sont les effets du contrôle des concentrations. Il y a deux champs :
- Décision de l'Autorité de contrôle (Autorité de la concurrence ou Ministre).
- Contestation de la décision.

A°) La décision adoptée par l'autorité de contrôle (Autorité de la concurrence ou


ministre).

On notifie à l'Autorité de la concurrence, c’est elle qui se prononce et qui décide.

1°) Les décisions de l'Autorité de la concurrence.

Si j’ai fait les choses en règle, l'Autorité de la concurrence peut prendre cinq décisions :

- 1) Décision d’inapplicabiltié du contrôle (lettre de confort): parfois, on arrive pas à identifier


le CA réalisé en France, et donc si chaque partie a réalisé les seuils nécessaires en France. Si
l’opération est notifiée à l'Autorité de la concurrence, mais qu’elle décide que les seuils ne sont
pas atteints, alors elle pourra rendre cette décision. C’est une sécurité juridique pour l’opérateur
qui se protège de tout risque d’absence de notification. Donc il notifie même s’il n’est pas sur des
seuils, mais au moins il ne prend pas de risque de sanction pécuniaire. Ça peut arriver mais c’est
rare.

- 2) Décision d’autorisation : L’autorité autorise l’opération.

- 3) Décision d’autorisation sous conditions/engagements : l’autorité autorise l’opération mais


uniquement si les intéressés prennent des engagements. Elle fixe dont des conditions, par
exemple la cession de certains fonds de commerce pour éviter une trop grosse concentration pour
rétablir une intensité concurrentielle qu’on estime avoir perdu si on autorise sans réserve (ex :
Fnac et Darty se rapprochent, l'Autorité de la concurrence décide que le groupe Fnac doit céder 6
fonds de commerce d’une certaine zone géographique pour rétablir un équilibre).

- 4) Décision de refus : on ne connait que deux illustrations dans le commerce de détail, en gros
dans des zones de chalandise on a refusé l’opération car l’intensité concurrentielle serait
moindre.

- 5) Décision de retrait : c’est propre à la matière administrative, l’autorisation a été donnée mais
elle est retirée, c’est comme une nullité rétroactive. Par exemple, en 2006 il existait deux
concurrents sur le marché de la télé payante : Canal + et TPS. TPS était en manque, Canal fait
une offre et notifie son projet de concentration. Le Ministre alors compétent autorise mais avec
des engagements car on passe avec un unique opérateur. Les engagements étaient très rigides :
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maintenir une identité particulière à TPS (programme, rédaction, régie publicitaire différents). Le
groupe Canal + a plus ou moins respecté les engagements, mais plus moins que plus. Il y en avait
22. Ils ont respecté les plus simples, mais les plus durs n’ont pas été respectés. En 2008,
l'Autorité de la concurrence a pris la place du ministre de l’économie et en 2012, le Président de
l'Autorité de la concurrence a fait un strike en adressant une amende de 30 millions pour
manquement aux engagements. Ensuite, il a retiré la décision d’autorisation donnée en 2006, ce
qui équivaut à une nullité (donc rétroactivité en droit administratif). Il y a eu une fiction
juridique, obligeant Canal + a renotifier la concentration 6 ans après en se replaçant avant.
L’autorisation est obtenue mais avec des engagements encore plus lourds. En 2012 Canal voulait
aussi se diversifier avec la télé gratuite en rachetant deux chaines de la TNT (D18 et iTélé), et a
eu peur que l'Autorité de la concurrence lui impose des engagements terribles. Les deux chaines
ont pu être rachetées mais avec autorisation. C’est le seul exemple de retrait.

Projet fusion TF1-M6 : en France il y a une extrême concentration des médias, sur la TNT TF1 et
M6 représentent 7 chaines. Il était question de céder deux chaines. Et en tout 9 chaines étaient dans
le deal. Ça a posé un problème car c’était les chaines les plus importantes de la TNT. La
concentration aurait posé des problèmes de concurrence. Lorsque les deux ont notifié leur projet,
elles l’ont fait en présentant ab initio des engagements, car il y avait eu l’expérience Canal + et
TPS, mais aussi d’autres avec des anglo-saxons. Ici on était sur un même marché. l'Autorité de la
concurrence a convoqué tout le monde en début septembre pour savoir si oui ou non ce projet
pouvait porter atteinte à la concurrence.
TF1 et M6 dit qu’il y a un marché pertinent large. l'Autorité de la concurrence dit d’entrée de jeu
qu’il y a un débat sur la délimitation du marché pertinent (marché étroit pose des problèmes de
concurrence alors que marché plus large ça en pose moins, le problème se dilue). À l’issue de cette
audience, Bouygues a retiré son projet de rachat. Le Président de l'Autorité de la concurrence a été
interrogé à l’Assemblée nationale.
Dès le lendemain de l’annonce publique de retrait du dossier de notification, 3 offres ont été posées
sur la table. La semaine dernière, M6 a décidé de ne plus vendre. Il semble donc qu’il n’y aura
aucune alliance. Mais 100 millions d’euros ont été usés en communication et juridique. Le groupe
ne pourra plus être vendu pendant plusieurs années.

Il faut lire les articles L430-5 à -7 du Code de commerce. Ces textes disent en somme que :

- La notification est filtrée en phase une 25 jours ouvrés suivants la réception.

- En fonction du contenu, elle peut se fixer un temps supplémentaire en phase 2 (rare, et pour les
gros dossiers avec un problème de concurrence) : délai rallongé à 90 jours au total. Ça ne
concerne qu’un dossier sur 20. L’analyse est poussée mais ça ne préjuge pas de la nature de la
décision.

Après avoir reçue la notification, elle va contrôler, et ensuite rendre sa décision.

2°) Le Ministre.

L'Autorité de la concurrence s’est substituée au Ministre de l’économie. Mais il n’a pas tout perdu.
On l’a vu par exemple avec les micro-PAC.

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La même chose s’est faite avec les micro-concentrations : un article a été crée : L430-7-1 du Code
de commerce. C’est le droit d’évocation du Ministre de l’économie.

I. - Dans un délai de cinq jours ouvrés à compter de la date à laquelle il a reçu la décision de
l'Autorité de la concurrence ou en a été informé en vertu de l'article L. 430-5, le ministre chargé de
l'économie peut demander à l'Autorité de la concurrence un examen approfondi de l'opération dans
les conditions prévues aux articles L. 430-6 et L. 430-7.

II. - Dans un délai de vingt-cinq jours ouvrés à compter de la date à laquelle il a reçu la décision de
l'Autorité de la concurrence ou en a été informé en vertu de l'article L. 430-7, le ministre chargé de
l'économie peut évoquer l'affaire et statuer sur l'opération en cause pour des motifs d'intérêt général
autres que le maintien de la concurrence et, le cas échéant, compensant l'atteinte portée à cette
dernière par l'opération.

Les motifs d'intérêt général autres que le maintien de la concurrence pouvant conduire le ministre
chargé de l'économie à évoquer l'affaire sont, notamment, le développement industriel, la
compétitivité des entreprises en cause au regard de la concurrence internationale ou la création ou le
maintien de l'emploi.

Lorsqu'en vertu du présent II le ministre chargé de l'économie évoque une décision de l'Autorité de
la concurrence, il prend une décision motivée statuant sur l'opération en cause après avoir entendu
les observations des parties à l'opération de concentration. Cette décision peut éventuellement être
conditionnée à la mise en œuvre effective d'engagements.

Cette décision est transmise sans délai à l'Autorité de la concurrence.

Si le ministre chargé de l'économie estime que les parties n'ont pas exécuté dans les délais fixés un
engagement figurant dans sa décision, il peut prendre les décisions prévues aux 1° à 3° du IV de
l'article L. 430-8.

Le Ministre de l’économie peut reverser le sens de la décision de l'Autorité de la concurrence, lui et


lui seul peut venir modifier des engagements au titre de son droit d’évocation, il peut faire prévaloir
d’autres motifs d’intérêt général sur la préservation de la concurrence.

Le 1er décembre 2018 avec l’affaire Fleury Michon : impasse financière absolue, procédure
collective, plan de cession. Il faut faire vite, Fleury Michon est racheté par un groupe, l’autorisation
est donnée sous réserve de la cession d’éléments d’actifs. Le Ministre de l’économie s’est saisi de la
question, et sans jamais revenir sur le sens de la décision d’autorisation, il est venu amenuiser la
décision en disant que pas de cession d’actifs sinon ils vont partir à l’étranger ou dans des mains
étrangères.

C’est la seule fois que le Ministre de l’économie est intervenu en matière de concentration pour
modifier des engagements.

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B°) Contestation de la décision de l'Autorité de la concurrence.

Je peux contester la décision de l'Autorité de la concurrence devant le Conseil d’Etat en


premier et dernier ressort car c’est inscrit dans le Code de justice administrative depuis
longtemps. Néanmoins il y a une exclusivité de la CA de Paris en matière de PAC (mais c’est un
texte spécial). Donc dans le droit des concentrations c’est le Conseil d’Etat qui est compétent. C’est
le rempart contre l’illégalité des décisions de l'Autorité de la concurrence.

Schéma répartition des compétences :

PAC : Concentrations :
L420 suivants L430-1 et suivants
101 TFUE

Autorités de concurrence - ADLC ; CA Paris ; Casscom Autorité de la concurrence ;


compétentes (public - dommage Conseil d’Etat
à l’économie) - Ministre Éco pour microPAC
Ou Ministre éco qui se mêle au
Sanctions admin dans les deux jeu (L430-7-1)
cas pour réparer l’économie

Juge droit commun (privé - 8 TC ou TJ ; CA PARIS PERSONNE COMPÉTENT


dommage personnel) uniquement compétente

ou TA territorialement compétent
(R420-3 suivants) puis CAA et
Conseil d’Etat

37 sur 94
Concurrence suite Malo De Pincé : le
petit droit de la concurrence.
Examen :

Il faut comprendre pourquoi il existe des restrictions à la concurrence, dans quelles hypothèses elle
est protégée, il faut revenir aux fondamentaux. On va parler de liberté du commerce et de
l’industrie, de liberté de concurrence, de liberté d’entreprendre qui est la formule employée par le
Conseil constitutionnel dans une décision de 1982 qui en fait un PAVC.

Cette liberté d’entreprendre va être confrontée à deux limites :

- Limite délictuelle
- Limite contractuelle

C’est l’approche historique classique. La liberté a pour limite celle des autres, on est plus libre
d’entreprendre si ça porte atteinte à la liberté des autres.

L’autre hypothèse, c’est celle ou celui qui possède la liberté décide de l’aliéner (sous la contrainte
ou de manière libre), par contrat le plus souvent. Le cas du contrat de travail est marquant, si on
contracte un contrat de travail, on est tenu à une obligation de loyauté ce qui aliène le droit de
monter un commerce concurrence. On appréciera donc les règles de droit des contrats.

Un troisième élément est fort, c’est l’ouverture des marchés. La théorie de la concurrence déloyale
est importante, l’appréciation des clauses de non-concurrence, mais cela ne fait de moins en moins
sens au fur et à mesure que les marchés s’ouvrent et que l’on va alors accès à un droit étranger ce
qui posera des questions de loi applicable, de juge compétent (DIP).

En deux parties, chapitre 1 le droit commun de la concurrence et chapitre 2 le DIP de la


concurrence.

Chapitre 1 : Le droit commun de la concurrence.

Ce droit commun né en France à la fin du XVIIIème siècle parce qu’auparavant, historiquement, la


France est pays de privilèges (noblesse, clergé) et au sein du tiers état on voit se constituer d’autres
privilèges et notamment des privilèges économiques au travers des corporations. Chaque
profession, au fil des siècles, s’est organisée en association professionnelle et fixe ses propres règles
de fonctionnement et de concurrence entre les membres. Ces associations ont fixé des règles
limitant considérablement la concurrence. Cela veut dire limiter l’accès à l’exercice de la
profession, ce qui se passe c’est que pour exercer telle ou telle profession, il fallait l’autorisation de
l’association. Ça a posé deux difficultés :

38 sur 94
- Une offre potentiellement insuffisante par rapport à la demande : peu de professionnels pour
beaucoup de clients.

- Les règles d’exercice sont fixées par les seuls professionnels et dans un sens favorable.

Un tel système est peu favorable à l’innovation, à la performance car il n’y a pas de compétition. On
peut faire le parallèle avec la compétition sportive : la compétition par le mérite, il faut ouvrir la
compétition aux meilleurs pour obtenir la meilleure offre. Ça vient d’Angleterre : les physiocrates.
Ça amène à plusieurs tentatives de Turgot (ministre de Louis XVI) qui cherche à libéraliser
l’économie mais qui n’y arrive pas du fait de l’opposition du parlement de l’époque.

Une fois que la révolution française arrive, le décret d’Allarde de 1791 reprend ces idées libérales.
Il dispose qu’à compter du 1er avril 1792, il sera libre à toute personne de faire pleine négoce, mais
elle sera tenue de payer une patente (taxe). Ce décret est fondamental car il fixe la liberté
d’entreprendre, chacun peut exercer le métier qu’il veut, et toute interdiction d’exercer est illégale.
Mais les corporations n’ont pas directement pris en compte ce décret. Et il a fallu attendre la loi le
chapelier pour que le principe de la liberté du commerce soit affirmé par l’interdiction explicite de
tout groupement professionnel, de toute association professionnelle et de toute reconstitution de ces
groupements. C’est la fin du corporatisme.

En réalité, c’est la jurisprudence qui est venue appliquer ces textes, et affirmer ce principe de
liberté du commerce et de l’industrie. Les premières décisions datent de la fin de la première
moitié du XIXème siècle (ex : arrêt CA Paris 1842 : explique que si la concurrence est libre, cela ne
peut s’entendre que d’une concurrence loyale et non de celle qui tenterait de nuire à l’industrie des
autres par des moyens que réprouveraient la délicatesse et la probité commerciale).

Il faut voir dans la jurisprudence qu’il est affirmé la liberté du commerce. Ensuite, on va retrouver
la reprise de cette liberté dans différentes conventions internationales et notamment dans la
convention d’union de Paris pour la protection de la propriété intellectuelle de 1883. Cette
jurisprudence, de manière récurrente, va réaffirmer le principe de liberté en posant des
exceptions, qui sont appréciées et entendues de manière stricte.

Au XIXème siècle et surtout au XXème, on voit arriver un interventionnisme étatique qui amène
aux formulations au traité de Rome de 1957 qui pose, pour la construction du marché commun
intérieur, le principe du libre jeu de la concurrence, également contenu dans l’ordonnance du 1er
novembre 1986.

Une autre date importante, avec la décision du Conseil constitutionnel du 16 janvier 1982 « Liberté
d’entreprendre », le gouvernement gauchiste décide des nationalisations. Certains nationalisations
vont être censurées sur ce motif au motif que la liberté d’entreprendre est une liberté fondamentale
protégée par le bloc de constitutionnalité, dont la DDHC de 1789 en son article 4 : l’article 4 nous
dit que « la liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l'exercice des
droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la
société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la loi ».

Ma liberté d’entreprendre commence la ou celle des autres s’arrête, et je ne peux empiéter sur celle
des autres. La jurisprudence rappelle que par principe l’exercice d’une activité est libre et tous les
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moyens sont bons, sauf exceptions. Le simple fait d’avoir une activité concurrente, et notamment
plus efficace, ne suffit pas à justifier une action en concurrence déloyale.
L’exemple marquant c’est la situation des chauffeurs de taxi par rapport à Uber. En droit de la
concurrence, et de la concurrence déloyale, de fait et au lancement de cette application, l’offre a été
beaucoup plus pertinente que celle des chauffeurs de taxi parce que moins chère. Le simple fait
d’innover ne suffit pas à caractériser la déloyauté. En droit, cette concurrence n’est reconnue que
déloyale par exception, c’est quand les moyens de cette déloyauté seront illégaux ou déloyaux.

Le concurrent plus efficace n’est pas en soi déloyal. La simple perte du CA, de clientèle, ne suffit
pas non plus à caractériser la déloyauté. Ça veut aussi dire que c’est celui qui invoque une
exception qui doit la prouver. La charge de la preuve de la déloyauté incombe à celui qui
l’invoque.

Autre conséquence, si je parle de liberté à valeur constitutionnelle, l’article 4 de la DDHC dispose


que la liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui. C’est la liberté en général. La
liberté du commerce se voit ajouter d’autres libertés : liberté du travail, contractuelle, d’aller et
venir. Dans certains hypothèses, ces libertés entrent en contradiction avec la liberté d’entreprendre
et il faudra donc se livrer à une analyse de proportionnalité. C’est ce qu’on fait lorsque l’on
confronte liberté contractuelle et liberté d’entreprendre. Par exemple, je conclu un contrat de travail,
à la conclusion, je regarde deux choses : les missions + le salaire. Très souvent, on regarde avec
moins d’importance les clauses attentatoires aux libertés (ex : clause de non concurrence). Des
mécanismes permettent d’apprécier la validité des clauses de ce genre, mais par principe elles les
sont pas limitées, et on va les limiter en fonction de l’appréciation de la proportion des intérêts en
jeu.

On va envisager la concurrence déloyale et les atteintes contractuelles à la liberté d’entreprendre.


C’est le droit commun / petit droit de la concurrence.

Sec on 1 : Le devoir de loyauté dans l’exercice de la concurrence.

Le devoir de loyauté c’est une analyse des moyens mis en oeuvre pour la clause. C’est la théorie de
la concurrence par le mérite / moyen qui veut que chacun ait les mêmes chances pour son activité
économique mais qui veut aussi qu’on soit sanctionné si on emploie des moyens illégaux.

Le simple fait de causer un dommage aux concurrents, en exerçant son activité économique, ne
suffit pas à caractériser la concurrence déloyale. Souvent, on va voir des professionnels qui
reprochent à d’autres professionnels d’avoir été plus performants.

Par exemple, rue de l’université il y a un commerce. Un commerce avec le même objet s’installe
aussi. Ce nouveau commerce attire toute la clientèle de l’ancien. Le premier va y voir de la
concurrence déloyale. Mais elle ne sera déloyale que si on prouve que les moyens employés pour
l’exercice de cette activité sont déloyaux. Le fait de prendre toute la clientèle et de faire plus de
marges n’est pas déloyal. On trouve l’exemple d’Amazon qui se met à vendre des livres sur internet
avec une puissance de frappe plus grande que les libraires. Ce n’est pas déloyal en soit. Mais
Amazon a pu être sanctionné car l’entreprise se soustrayait à des obligations légales.

40 sur 94
ti
Il n’existe donc aucun droit privatif sur la clientèle (Yves Serrat). L’idée d’appropriation de la
clientèle, c’est l’idée que la clientèle et les contrats conclus avec sont acquis à cet opérateur. Ce
n’est pas toujours évident à comprendre lorsque la clientèle se détourne du commerce initial vers un
autre commerce.

En découle aussi un principe fondamental, le principe de liberté des prix. Si les prix sont libres, il
appartient à chacun de fixer les niveaux de prix qu’il entend, y compris des prix bas, sous réserve
d’abus.

La théorie de la concurrence déloyale a été développée au XIXème siècle, synthétisée par la


doctrine du XXème siècle :

- Concurrence : on retrouve ce terme dans d’autres pays, mais il faut faire attention à ce terme car
cette action peut être engagée alors qu’on est pas classiquement dans une situation de
concurrence. Elle peut être mise en oeuvre entre des personnes qui ne sont pas commerçantes. Il
n’y a pas forcément de concurrence (ex : activités libérales). Il peut y avoir concurrence déloyale
sans être en situation de concurrence, deux opérateurs économiques, ou un contentieux entre un
opérateur économique et un auteur qui n’est pas une opérateur.

• Dans la première hypothèse, on trouve par exemple le parasitisme (se placer dans le sillage de
la réussite d’autrui pour en retirer un profit indu) peut être envisagé dans des situations de non
concurrence (affaire Parfums Yves saint Laurent vs Champagne : pas de substituabilité entre
les produits, pourtant profit indu de l’appellation de Yves saint Laurent).

• Autre contentieux, celui du dénigrement par des non-concurrents. On voit par exemple le
contentieux Yuka. L’application permet d’avoir la performance des produits, ce qui a conduit à
la dévalorisation de certains produits avec des propos défavorables à l’entreprise. C’est par
l’exemple du jambon au nitrite, Yuka proposait aux utilisateurs de signer une pétition contre
l’emploi des nitrites dans la charcuterie.

- Déloyale : C’est une activité déloyale. Il faut envisager que la concurrence déloyale vise aussi la
non concurrence déloyale. C’est celui de l’activité économique en son ensemble. Une directive
de 2005 vise les pratiques commerciales déloyale : activités économiques des professionnels à
l’endroit des consommateurs.

Concrètement il faut poser deux questions pour l’action : les conditions de l’action et le régime de
l’action. L’article 1240 du Code civil va revenir souvent avec le triptyque de la responsabilité
délictuelle : faute, dommage, lien de causalité. On va aussi voir que l’action en concurrence
déloyale s’émancipe de son fondement textuel classique, et qu’il n’est plus nécessaire de démontrer
un préjudice.

§1) Les conditions de l’action en concurrence déloyale.

Ces conditions s’établissent à partir de l’article 1240 du Code civil avec le triptyque. Il faut un fait
générateur (faute : c’est un standard de jugement qui est susceptible d’évoluer), un dommage, un
lien de causalité.
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I / Une faute

C’est un standard de jugement, donc une notion considérée par le texte mais dont la qualification
relève de l’office du juge. La notion même, et son contenu, évolue au fil du temps. La faute a
évolué en ce qui concerne la concurrence déloyale, elle s’est étendue et s’est développée pour
intégrer d’autres hypothèses toujours plus nombreuses.

L’exemple même de cette extension c’est la copie servile entre non-concurrents (acte de
parasitisme).

En reprenant le raisonnement de l'article 1240 du Code civil : la faute c’est un fait de l’homme
contraire aux lois, aux règlements, aux usages du commerce. Il faut comprendre aussi que la faute
ne se présume pas, l’action en concurrence déloyale ne repose aucunement sur une présomption de
responsabilité et la jurisprudence a plusieurs fois rappelé que l’existence d’un dommage ne permet
en rien, y compris de manière simple, l’existence d’une faute. L’existence d’une faute permet
néanmoins de présumer un dommage qu’on arrive pas à prouver. Mais pour la faute, il appartient à
la victime qui s’en prévaut d’en ramener la preuve.

Peu importe, en revanche, que soit caractérisée une intention fautive, une intention d’être déloyal.
Les décisions rendues au visa de l’article 1241 du Code civil, donc peu importe la bonne ou
mauvaise foi de l’auteur de la faute, et son intention ou non. Peu importe qu’il ait été simplement
négligent, la jurisprudence peut y voir un manquement aux usages loyaux du commerce. Aussi, la
faute peut être un acte positif ou une omission. Par exemple, fait de ne pas payer ses charges
sociales est une omission, souvent volontaire et qui permet d’établir une faute.

Si je dois distinguer les fautes :

- La désorganisation
- Le dénigrement
- La confusion
- Le parasitisme

Cette dernière faute, se rapproche de la confusion selon le prof. Le Doyen Rouvié avait aussi la
théorie du manquement à la loi, le simple fait de ne pas respecter la loi pouvait selon lui être une
forme de concurrence déloyale. De plus en plus, les concurrents engagent des opérations contre les
opérateurs qui ne respectent pas leurs obligations légales ou règlementaires. Ils font le travail des
autorités de régulation, notamment de la DGCCRF, et on trouve ce contentieux devant les
juridictions.

Ce manquement à la loi est l’hypothèse la plus longue car le législateur contemporain intervient de
plus en plus dans l’activité économique, pose de plus en plus de contraintes et d’interdictions, il y a
donc plus de chances que les opérateurs contreviennent à ces règles.

A°) Le manquement à la loi et aux usages.

Il faut bien distinguer la loi de l’usage. La loi est l’expression de la volonté générale, l’usage est
l’expression de la volonté professionnelle ou d’une pratique. La différence entre les deux, est que
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l’usage qui se veut plus technique et construit par des spécialistes, peut aussi avoir un effet
anticoncurrentiel et par exemple conduire à un certain corporatisme. Faire respecter l’usage,
aboutissait parfois à limiter la liberté du commerce et de l’industrie.

1°) Le manquement à la loi.

La première faute évidente dans ce cas, c’est donc tout manquement à la loi. Si elle est
contraignante, tout manquement est constitutif d’une faute. Si cette faute cause préjudice à autrui,
ou est susceptible d’en provoquer, alors c’est aussi une faute civile. La difficulté, c’est qu’en même
temps que la jurisprudence développe les sanctions pour manquement à la loi, elle développe aussi
la présomption de préjudice en cas de faute, alors elle s’écarte aussi des dispositions de l'article
1240 qui refuse toute présomption.

Il est des hypothèses ou la loi, pour protéger les opérateurs, impose des contraintes à chacun d’entre
eux. Dans certaines hypothèses, le législateur oublie de prononcer les sanctions. Il édicte des
obligations sans sanctions spécifiques ce qui laisse croire à des opérateurs qu’il n’y a pas de
sanction et donc que la loi n’est pas contraignante, sauf action en concurrence déloyale.

Il est des autres hypothèses ou la sanction est lourde, avec des conditions de mise en oeuvre
complexes, longues, et donc aléatoires ou risquées. La loi sanctionne par exemple pénalement les
pratiques opérateurs. On serait tenter d’envisager la loi voie pénale pour obtenir la cessation des
pratiques illicites. L’opérateur pourrait déposer plaintes, ou saisir les autorités de contrôle. Mais
dans ces deux hypothèses, l’action est soumise à l’appréciation par l’autorité de poursuite de
l’opportunité des poursuites. Le Président de la DGCCRF peut décider que des poursuites ne sont
pas opportunes. Par ailleurs, la procédure pénale est longue, la sanction ne sera prononcée que
tardivement voir pas du tout, et ce n’est pas toujours intéressant pour le concurrent qui ne pense
qu’à faire cesser la pratique illicite. Mais durant la procédure, l’opérateur va continuer la pratique. Il
faudrait donc saisir en référé pour faire cesser la pratique, il serait donc plus intéressant d’agir en
concurrence déloyale.

Les manquements à la loi :

- L’atteinte à un monopole légal : une personne exerce une activité qu’elle n’est pas autorisée à
effectuer.

- Le manquement à des contraintes légales : on peut exercer l’activité mais on se soustrait aux
contraintes pour réaliser des économies.

- Les pratiques expressément interdites : on analyse en terme d’interdit. Si je réalise je commets


un manquement à la loi et une pratique déloyale.

a) L'atteinte à un monopole légal.

C’est une concurrence illicite qui ne devrait pas exister, l’activité est réglementée, exercée par
quelqu’un expressément autorisé mais qui peut voir d’autres opérateurs qui n’ont pas cette
autorisation exercer la même activité. On le voit par exemple avec les officines de pharmacie ou des
faux médecins. Ce sont des exercices illicites.

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i. Exemple des officines de pharmacie.

Les officines de pharmacie sont soumises à une autorisation d’approbation par l’autorité
administrative. Le but est de garantir la qualité du service, et assurer un maillage suffisant du
territoire (on veut éviter une grande concentration). Il arrive pourtant que des pharmaciens
continuent d’exercer alors qu’ils ne sont plus autorisés à le faire car ils ont fait l’objet d’une
sanction administrative ou de l’ordre. Dans ces hypothèses, la pratique est illicite et sera
sanctionnée, mais elle est aussi déloyale car quelqu’un exerce son activité sans y être autorisé. On
pourra agir sur le fondement de la concurrence déloyale (Com 1er décembre 1987).

L’exemple des officines est intéressant car se pose un contentieux récurrent sur la parapharmacie,
un monopole existe sur certains produits seulement et tout ce qui est annexe (produits libres)
peuvent être commercialisés par des non-pharmaciens. C’est ce qu’a rappelé la jurisprudence (Com
16 janvier 2001 Leclerc Parapharmacie) : il s’agit du contentieux de la commercialisation de
produits libres habituellement commercialisés par des pharmaciens par des non pharmaciens. Ces
produits ne font pas l’objet d’autorisation pour le commerce (pansements, produits d’hygiène qui ne
sont pas des médicaments). Le contentieux en l’espèce porte sur les grandes surfaces qui vendent
ces produits dans des parapharmacies. L’arrêt de 2001 nous dit que tant qu’il n’y a pas de risque de
confusion, il n’y a pas d’atteinte au monopole légal des pharmaciens. Donc même si l’activité est
concurrente des pharmaciens, elle est licite. L’emploi de la blouse blanche permet simplement de
commercialiser les produits, car sans elle on aurait moins confiance mais ce n’est pas une
confusion.

C’est la liberté du commerce qui prime, toute exception à cette liberté ne peut être entendue que de
manière restrictive. Dès lors on peut concurrencer les pharmaciens sur des produits qu’ils vendent
s’ils ne sont pas concernés par le monopole du pharmacien.

ii. En ce qui concerne le contentieux des VTC et des Taxis.

Les taxis ont un monopole, c’est le droit de prise en charge sous entendu la prise en charge sans
autorisation préalable. Le taxi peut prendre en charge une personne qui lève la main dans la rue. La
licence donne des prérogatives : droit de stationnement sur les emplacements de taxis, droit de
circuler sur les voies de bus (selon la collectivité). Le taxi peut donc assurer le transport sans
autorisation préalable.

Le VTC est aussi autorisé à transporter des personnes mais il faut une autorisation préalable, une
réservation. Concrètement, le client doit être passé par l’intermédiaire d’une plateforme pour
réserver son véhicule. Il faut comprendre que le VTC n’est pas nécessairement une atteinte au
monopole du taxi.

Mais il y a quelques années, Uber a eu l’idée d’assurer une sollicitation préalable immédiate avec
une appli qui permet un accès direct à un VTC. Ce n’est pas déloyal tant que le VTC n’exerce pas
les prérogatives du taxi. C’est terrible pour les taxis qui ont payé une licence.

Le comportement déloyal des VTC serait la prise en charge des clients comme les taxis sans
réservation préalable. L’hypothèse récurrente avec le contentieux le plus lourd c’est celle des lieux
de prise en charge : les gares et aéroports. Des actions en concurrence déloyale sont souvent
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exercées contre les VTC qui viennent se garer sur les aires de taxis ou sur les parking commun en
entrant dans les gares et aéroports pour demander qui a besoin d’un VTC. C’est de la concurrence
déloyale.

iii. La profession d’avocat

L’avocat fait face à des difficultés, et notamment une concurrence exercée par d’autres
professionnels qui ne sont pas avocats et qui vont avoir des charges moindres. Il est dans une
situation de monopole puisqu’il peut seul représenter en justice à titre professionnel ; il est le seul à
pouvoir donner des conseils individualisés à l’exception de certaines professions (enseignants
chercheurs en droit, moindre mesure les experts-comptables).

Les avocats se sont faits manger une part de leur activité par des experts-comptables (contrat de
travail, procédure de licenciement).

S’est développé un contentieux contre les plateformes de conseil en ligne. Les ordres professionnels
et le conseil national du barreau ont agi au titre d’une atteinte du monopole de l’avocat (CA
Versailles 14 novembre 2017 023779). Il s’agissait d’un site qui permettait de produire de manière
automatique des requêtes en annulation de suspension de points. Ça a été considéré comme de la
concurrence déloyale car les documents étaient personnalisés et ils consistaient à un conseil au cas
par cas ce qui relève de la compétence des avocats. En revanche, les conseils généralisés ne sont pas
de l’ordre du monopole des avocats. Tous les sites qui donnent une information générale sans
proposer une activité personnalisée sont autorisés.

b) Le manquement à des contraintes légales.

C’est une condition posée dans l’exercice d’une activité réservée. Tout le monde peut exercer cette
activité sous réserve de respecter des contraintes légales. Ceux qui ne respectent pas ces conditions,
risquent des sanctions spécifiques qui peuvent être pénales ou administratives. C’est aussi le cas des
sanctions civiles car le fait de ne pas respecter les contraintes légales crée une distorsion de
concurrence, une inégalité dans l’exercice de la concurrence. Ceux qui respectent l’autorisation
peuvent agir contre ceux qui ne respectent pas les conditions.

La première hypothèse c’est celle ou l’action individuelle permet la régulation du marché,


l’opérateur qui engage l’action se substitue à l’Etat pour faire respecter la loi. L’action en
concurrence déloyale sert donc de plus en plus à faire respecter la loi à la place de l’Etat et des
autorités de contrôle.

L’action en concurrence déloyale va permettre aussi d’instaurer une double peine, voir une peine
efficace. Il se peut tout à fait que le manquement à la loi soit sanctionné par une amende mais que le
montant de celle-ci soit limité et trop peu dissuasif. Il fut un temps ou le contentieux des pratiques
commerciales déloyales permettait une sanction de l’ordre de 300.000 euros ce qui est énorme pour
un petit commerce, mais ce n’est rien pour un groupe énorme. L’action en concurrence déloyale
permet d’ajouter à la peine une sanction pour compenser le préjudice subit par les concurrents.

Les exemples :

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Classiquement c’est l’exemple du défaut de paiement des charges fiscales des commerçants. Parfois
c’est volontaire, et parfois ça ne l’est pas. Le fraudeur commet un manquement à la loi, il va être
lourdement sanctionné et la sanction de l’administration pourrait être dissuasive. Dans certaines
hypothèses, on est pas dans le cadre de la fraude consciente mais dans une difficulté de
qualification. C’est ce qu’on appelle le para-commerçant (Crim 10 juin 1990 : une association édite
des cartes et des livres, mais elle le fait sans payer les charges fiscales → elle est condamnée à titre
pénale pour défaut de paiement de ses charges fiscales, mais aussi au titre d’une concurrence
déloyale à l’égard des autres opérateurs).

On trouve aussi l’exemple de la TVA, une entreprise qui ne fait pas payer à ses clients la TVA ou
qui fait payer une TVA à taux réduit, elle fraude l’Etat mais commet aussi une concurrence déloyale
car elle va réaliser une marge plus importante et fournir des prix plus bas à ses clients que la
concurrence ne pourrait le faire en faisant payer normalement la TVA.

Il y a fréquemment un contentieux sur l’auto-entrepreneur, ce statut permet au donneur d’ordre


d’échapper à certaines charges sociales dont celles sur les salariés. Une auto école employait ses
collaborateurs sous le statut d’auto-entrepreneur pour réaliser des économies de charges sociales.
On le voit aussi dans le contentieux des livreurs des plateformes numériques. Est ce que ces
plateformes fraudent la loi ? Si le contrat de travail est retenu alors qu’il taff en tant qu’auto-
entrepreneur, l’URSAF peut faire un redressement et les opérateurs honnêtes qui assument toutes
les charges pourront agir en concurrence déloyale.

Autre, on trouve aussi le défaut de licence ou l’utilisation de la mauvaise licence. Ce contentieux se


trouve notamment dans le débit de boissons (Com 9 avril 1991). Pour la délivrance d’alcool, il faut
l’autorisation administrative 4. La plus petite licence (I) ne peut commercialiser que des boissons
sans alcool ou faiblement alcoolisées. Ce qui arrive parfois, c’est que le concurrent qui est un
restaurant qui n’a pas le droit de commercialiser sans que le client ne consomme aussi du solide
(bouffe) mais qui délivre quand même de l’alcool. Celui qui a une autorisation pour cela pourrait
agir contre celui qui commercialise sans l’autorisation sur le fondement de la concurrence déloyale.

On pense aussi aux conditions d’ouverture des locaux commerciaux. Dans cette hypothèse, le
principe est celui pour les salariés du repos hebdomadaire. Il y a de nombreuses exceptions, et le
dimanche est un chiffre ou on peut faire du chiffre. Mais il faut une autorisation préfectorale si on a
des salariés et qu’on ouvre le dimanche. Les syndicats agissent parfois et les concurrents aussi. Le
spécialiste c’est monsieur bricolage qui ouvrait le dimanche avec des salariés et qui se faisait
attaquer par des syndicats. La parade ultime c’est les caisses automatiques qui permettent
d’échapper aux exigences du droit du travail parce qu’il n’y a pas de salariés et qu'on affecte un
personnel de sécurité qui n’est pas soumis à l’interdiction de travailler le dimanche. Ils ne peuvent
pas faire le travail de caissier, mais ils peuvent surveiller. On pourrait envisager une action en
concurrence déloyale en cas de violation de ces interdictions.

Tout obligation légale est une contrainte, avec un cout, celui qui ne respecte pas réduit ses couts et
ne joue pas le jeu normal de la concurrence. Parfois, certains particuliers ne respectent pas les
contraintes, ils peuvent avoir des activités concurrentes à des commerçants (achat-revente d’objets
par exemple). Si l’activité est régulière, avec des sources de revenus suffisants, la question pourrait
se poser de la paracommercialité. C’est l’hypothèse du particulier qui sans se déclarer va avoir une
activité économique, et souvent une activité commerciale. L’achat pour revendre c’est un acte de

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commerce qui, passé un certain seuil, permettra de passer de l’activité licite à l’activité irrégulière si
elle n’est pas déclarée. Le particulier ne sera pas inscrit au registre du commerce, n’aura pas déclaré
ses revenus, n’aura pas payer les charges sociales, fiscales… On se retrouve dans une hypothèse de
concurrence déloyale vis à vis d’un déclaré. Les exemples sont nombreux. Le travail dissimulé
pourrait être retenu, car l’activité ne serait pas enregistrée hors on est dans l’obligation de payer les
cotisations. Un particulier avait été sanctionné car il s’était livré à de la revente à perte. C’est à la
fois un acte illicite au sens du Code de commerce et acte de concurrence déloyale.

On trouve aussi le contentieux AIRBNB mais peu de procédures en concurrence déloyale grâce aux
collectivités territoriales qui ont des pouvoirs. Mais les hôtels ont des difficultés lorsque les
particuliers mettent en location leur bien à des tarifs plus intéressant que les hôtels. Pour l’hôtel
c’est une perte de clientèle. Louer son appartement n’est pas en soi un acte de concurrence déloyale
mais ça pourra l’être si le particulier vient à manquer à des règles expresses de droit positif comme
par exemple la non déclaration des revenus tirés de la location, s’il ne déclarait pas la taxe de séjour,
ou encore s’il louait un Airbnb alors qu’un arrêté de la Mairie lui en empêcherait. De plus, un
appartement en location en Airbnb peut rapporter plus que s’il était mis en bail de location, et dans
certaines zones il devient impossible de se loger sur long terme à cause des Airbnb, donc les mairies
peuvent limiter les conditions de location en Airbnb.

Au delà du non respect des contraintes il peut y avoir des pratiques purement interdites.

c) Les pratiques expressément interdites.

La pratique interdite est souvent plus facile à caractériser. On trouve notamment :

i. En droit de la consommation

C’est le premier contentieux en volume et c’est du droit de la consommation. Ce droit peut avoir
deux ou trois objectifs :

- Protection des consommateurs


- Régulation
- Protection de la concurrence

Souvent, lorsqu’il y a manquement aux dispositions protectrices du consommateur, on pourrait


avoir une action de leur part ou de leur représentant, mais aussi avoir une action en concurrence
déloyale par les concurrents. Les enjeux sont que souvent les consommateurs n’agissent alors
que les concurrents l’enjeux est majeur.

Par exemple, je produits du soda de 1,5L. Sur ces bouteilles, pour compenser une hausse des prix, je
remplis un peu moins les bouteilles. Le consommateur ne va pas forcément agir en justice car son
préjudice va être minime. Mais pour le concurrent c’est un gros préjudice car celui qui diminue le
litrage des bouteilles va économiser des sommes énormes si tout est cumulé. De ce fait, le
concurrent va avoir un intérêt à agir car lui il remplit à 100% ses bouteilles et donc il ne peut pas
faire d’économies.

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Mais la concurrence déloyale n’est pas invocable dans toutes les situations. La Cour de cassation en
chambre criminelle a une vision restrictive des conditions de l’action en responsabilité civile
(fondement de la concurrence déloyale) et notamment de l’intérêt à agir (Crim 22 novembre 2016
n°02.483). Comme toutes les juridictions pénales, elle peut tirer les conséquences civiles de
l’infraction en indemnisant les victimes, et considère que l’action civile en réparation d’un
dommage causé par un crime/délit/contravention appartient à tout ceux qui ont personnellement
soufferts du dommage directement causé par l’infraction. On est proche du Code de procédure
civile et de la qualification de l’intérêt à agir conditionné à un intérêt personnel et direct. Mais la
crim et la civ ont des interprétations différents :

- Pour la chambre criminelle, seul le consommateur pourrait discuter ou se prévaloir d’un


préjudice personnel et direct. Selon cette jurisprudence, le préjudice du concurrent n’est
qu’indirect et ne peut donner lieu à indemnisation. Il est toujours possible de saisir le juge civil
de faits pénalement sanctionnables sans lui demander de poursuivre pénalement. Le but étant
d’obtenir une sanction civile, donc une indemnisation et la cessation de la pratique illicite.

- Pour la chambre commerciale considère que tout manquement à la loi cause nécessairement un
préjudice. En matière de consommation, ces manquements sont d’ordre divers :

• Les fraudes et falsifications (Com 12 novembre 2006 ; mars 2007 n°24).

• Des pratiques commerciales déloyales (L121-1 ; L121-4 du Code de la consommation →


pratiques irréfragablement abusives) : publicité mensongère → le concurrence est encore
plus affecté par cette situation que le consommateur (Com 11 mars 2014 n°2014-004482 :
un site de vente en ligne commerciale différents produits de différents fournisseurs. Le
client qui cherche un produit va avoir une liste de ces produits et un algorithme définit
l’ordre des présentations. Ceux qui payent sont en haut, donc triche car le consommateur
croit que c’est une présentation par ordre de pertinence). On trouve aussi les faux prix
affichés…

• Prix du livre : contentieux du prix du livre. La loi Lang de 1981, a posé une exception à la
liberté des prix pour fixer le prix du livre. L’éditeur fixe le prix auquel le livre est distribué.
Le prix est imprimé sur la couverture. Le distributeur ne peut pas opérer une diminution de
plus de 5% pour assurer une large diffusion du livre et bien rémunérer les éditeurs. Il y a
tout un contentieux car certains opérateurs cherchent à opérer une réduction de prix soit en
offrant les frais de port (les frais de port gratuit sont contraires à la vente car ça baissait le
prix du livre), en opérant des remises directe ou à terme (Com 20 novembre 2007).
Plusieurs libraires ont été condamnés à ce titre. Mais Amazon a trouvé la parade par la
souscription à un abonnement Prime, on dit que la livraison n’est pas totalement gratuite.

• La protection de l’environnement : de plus en plus de contentieux en concurrence


déloyale. L’entreprise qui ne respecterait pas les obligations en terme de dépollution pourrait
réduire ses couts ce qui pourrait réduire une distorsion de concurrence par rapport aux autres
entreprises du secteur. Il ne s’agit pas uniquement de réduction des charges : le
greenwashing : un produit polluant va être présenté comme non polluant. Dans cette
hypothèse, il est possible que les concurrents en application des principes de protection de
l’environnement engagent une action en concurrence déloyale contre cet acteur (Crim 5

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décembre 2006). Dans d’autres hypothèses, c’est une utilisation prohibée de certains
produits illicites (Com 21 janvier 2014) ou le défaut de certains qui justifie une action en
concurrence déloyale.

• Les procédures collectives : le droit des procédures collectives impose des contraintes aux
entreprises à l’ouverture de la procédure et tout au long de celle-ci. Une entreprise avait
acquis les actifs d’une société liquidée en contradiction avec les règles du Code de
commerce et plus particulièrement L142-2. Elle ne pouvait pas acquérir l’activité qu’elle
avait pourtant obtenue de la part du tribunal. La position de la Cour de cassation c’est de
constater que ce refus de respecter la loi crée un déséquilibre significatif dans la
concurrence. La Cour de cassation rappelle que outre les sanctions spécifiques, constitue un
acte de concurrence déloyale le non respect des réglementa ons dans l’exercice d’une
ac vité commerciale qui induit nécessairement un avantage concurren el indu pour son
auteur (Com 17 mars 2021 n°19-10.414). Le simple manquement à la loi du code de
commerce, induit nécessairement un avantage concurrentiel indu pour son auteur et s’il y a
nécessairement un avantage concurrentiel indu, il y a nécessairement un préjudice souffert
par la victime ce qui fait peur aux tribunaux de commerce car la ou le manquement à la loi
peut faire l'objet de poursuites par la collectivité : dans ces hypothèses, le concurrent peut
directement engager une action contre le concurrent déloyal étant entendu que s’il y a
manquement à la loi, la Cour de cassation considère qu’il y a un nécessairement un avantage
concurrentiel indu et donc un préjudice réparable. Attention, la Cour ne se prononce pas sur
le quantum du préjudice. On pourrait voir un préjudice moral sanctionné de manière
symbolique.

Il faut faire la part des choses entre les usages d'opportunité et les usages qui ne le sont pas.

ii. Déloyauté par manquement aux usages.

Un usage est une pratique à laquelle se plie consciemment ou non les opérateurs d’un marché.

Ces usages du commerce sont reconnus comme des sources du droit invocables devant le
juridictions. En matière de concurrence, l’usage peut aussi avoir un effet pervers. Certaines
pratiques sont parfaitement légitimes et sont le fruit du travail pour satisfaire les contraintes du
commerce. Mais certaines hypothèses dans la pratique qui vont avoir un effet anticoncurrentiel : le
juge va refuser d'appliquer cette usage car il est contraire à la liberté du commerce.

→ Usages codifiés :

Par exemple avec les codes de déontologie. On peut en avoir de plusieurs types, le plus reconnu est
celui approuvé par décret. Il aura valeur réglementaire, on renvoi donc aux manquements à la loi ci-
dessus.

d’autres codes ne sont pas approuvés par décret et n’ont de valeur qu’entre des professionnels qui y
sont liés. Ce sont souvent le produit de groupements, de syndicats, d’associations professionnelles.
Le simple manquement à ces codes est-il nécessairement un acte de concurrence déloyale ? : le juge
n’est pas lié puisque la règle en cause n’a pas valeur réglementaire, le juge va devoir apprécier
l’opportunité. On a eu une évolution de la jurisprudence. Avant que le code ne soit adopter par
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décret, le code déontologie des experts comptables comportait des stipulations qui pouvaient poser
difficulté parce qu’elles avaient un effet anticoncurrentiel : exemple du transfert de dossiers, on est
sur des contrats à exécution successive. Si un confrère récupérait le dossier, il fallait qu’il demande
à l’ancien expert comptable une autorisation avec une justification que toutes les factures avaient
été payées à l’ancien. Donc pour changer d’expert comptable, le nouvel expert devait vérifier que
son prédécesseur avait été complètement payé. Pendant un temps, la Cour de cassation avait admis
que le manquement à ce code de déontologie était déloyal. En réalité, cette norme à un effet
anticoncurrentiel car le but est de compliquer la passage d'un expert à un autre, car l’expert qui ne
veut pas que son client parte, il a juste à éviter la facture, ou dire qu’il n’a pas été payé. Ou alors par
exemple le litige c’est le montant de ses honoraires, le client veut changer car il paie trop, mais pour
payer moins cher, il doit avoir l’autorisation de l’ancien pour changer. Aujourd’hui, ça n’existe plus
dans le code des experts comptables, ça a été abrogé par décret. La Com est aussi revenue sur sa
jurisprudence et de considérer comme un usage opposable l’obligation d’acquitter toutes les
factures avant de pouvoir solliciter un autre expert (Com 10 septembre 2013).

Un manquement à un usage professionnel n’est pas nécessairement un acte déloyal contrairement


au manquement à la loi. Il faudra apporter la preuve d’un préjudice.

Il y a une particularité sur les manquements aux usages : la tendance jurisprudentielle


contemporaine considère que si’l y a un acte de concurrence déloyale il y a un préjudice. Mais pour
les manquements aux usages on tempère depuis un arrêt (Com 10 février 2021 n°19-10.919) : un
manquement à une règle de déontologie dont l’objet est de fixer les devoirs des membres d’une
profession et qui est assortie de sanctions disciplinaires, ne constitue un acte de concurrence
déloyal par détournement de clientèle que s’il était établi que ce manquement est à l’origine
du transfert de clientèle allégué. Cette jurisprudence mène à considérer que l’acte de concurrence
déloyal n’est établi que que si on rapporte la preuve de son effet, donc la preuve du lien de causalité
entre l’acte déloyal et le détournement de clientèle. C’est la stricte application de la théorie de la
responsabilité délictuelle. Dans le cadre d’un manquement à la loi, il y a préjudice. Pour les usages
c’est plus complexe, l’acte de concurrence déloyale n’entrainera responsabilité que s’il établit qu’il
y a des conséquences. C’est un arrêt d’espèce mais ça pose des questions.

→ Usages non-codifiés :

Au delà de ces codes, on peut avoir des usages écrits ou non écrits. Dans le cadre d’un
contentieux il faudra pour les qualifier, les établir s’ils sont non écrits, et à l’inverse les contester
s'ils sont écrits (ex : par un syndicat professionnel qui a codifié des usages ; ou codifiés dans des
chartes ; des outils comportementaux). S’il est vrai que la jurisprudence et méfiante à l’égard de ces
usages, dans les secteurs les plus techniques, elle leur accorde une certaine valeur. Il ne faut pas
oublier que le magistrat n’a pas toutes les compétences (Crim 17 janvier 1996 : les juges de la Cour
de cassation considèrent qu’en matière de fraude commerciale portant sur un produit non
réglementé, les juges du fonds ont tout pouvoir pour reconnaitre ou dénoncer l’existence d’un
usage). Dans cet arrêt, il s’agissait de producteurs français qui dénonçaient des pratiques déloyales
étrangères. Mais c’était un domaine technique, donc les juges avaient besoin des usages pour
comprendre le litige.

CA Dijon 7 septembre 2006 : un charcutier ne faisait pas des fromages de tête comme ses confrères.
Un syndicat avait agi en justice je comprends pas pourquoi. Il n’y a pas de définition légale du

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fromage de tête. Les juges ont sollicité l’avis du syndicat professionnel car il représente une partie
de la profession. Si l’usage avait pour objet de limiter la concurrence ou d’interdire l’accès au
marché à certains opérateurs, alors il ne pourrait pas être consacré. Dans le fromage de tête on n’a
pas considéré qu’il y a avait une atteinte.

B°) Déloyauté par la désorganisation.

La désorganisation c’est l’hypothèse ou plutot que de s’attaquer à la perception que la marché ou la


clientèle a du concurrent, on va s’attaquer aux moyens mis en oeuvre par le concurrent pour exercer
son activité.

Pour briser son concurrent, on va récupérer ses forces vives. On trouve trois pratiques dont deux qui
nous intéressent :

- Débauchage de salariés ou de préposé concurrent


- Création d’une entreprise concurrente par un ancien salarié

1°) Le débauchage.

Débaucher le salarié d’un concurrent ce n’est pas mal en droit. C’est même autorisé, c’est un mode
de promotion en externe. Mais dans certaines hypothèses il pose difficulté, notamment s’il y a une
clause de non concurrence, ou encore si on embauche avec le fichier clients de l’ancien employeur.

Le principe de recrutement des salariés d’une entreprise concurrente, c’est le principe de liberté du
travail et d’embauche, on peut embaucher qui l’on souhaite y compris celui d’une entreprise
concurrente. Concrètement, l’hypothèse ou il pourrait y avoir sanction du débauchage n’est
qu’exceptionnelle. Il appartient à celui qui voit partir son salarié chez la concurrence de rapporter la
preuve de la déloyauté de la pratique. Le seul fait qu’un salarié soit partie chez la concurrence
n’emporte aucune présomption de faute du nouvel employeur.

Il existe la pluriactivités, sans pour autant que des activités concurrentes soient possibles. On est
tenu par une obligation de fidélité. La Cour de cassation précise que seul l’exercice effectif d’une
activité concurrente de celle de l’employeur par un salarié constitue un acte de concurrence déloyale
(Com 13 mars 2001). C’est d’autant plus vrai que le débauchage, fut-il massif, ne suffit pas en soi
à caractériser un comportement déloyal.

La déloyauté est un acte intentionnel qu’il faut caractériser (CA Paris 22 juin 2021 n°1826391).
Un créateur de vêtement avec une image de marque, une société concurrente avait recruté les
stylistes du créateur. En soi, ce n’est pas déloyal, il est normal pour un opérateur d’aller chercher
chez les concurrents les personnes les plus compétentes, celles qui apportent une plus-value. La
Cour de cassation nous dit que c’est normal au regard de la liberté du travail, si cela est interdit
alors il n’y aurait plus de promotion interentreprise. La Cour nous dit « qu’il n’y a pas de
concurrence déloyale : l’embauche par une société concurrente de salariés démissionnaires,
auxquels sont a ribuées des fonc ons iden ques, en sont pas révélatrices en soi de manœuvres
déloyale, toute entreprise pouvant en principe pro ter du savoir faire acquis dans une autre
entreprise par les salaires qu’elle recrute ».

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La pratique sera déloyale si la débauche permet de caractériser des comportements déloyaux.

Com 23 juin 2021 : la CA avait caractérisé le débauchage. Les juges voient leur solution approuvée
à deux titres :

- Le mode de recrutement est un procédé dont il ne peut être admis qu’il constitue un mode de
recrutement.

- La désorganisation ainsi causée au service concerné.

Il faut retenir que pour qu’il y ait débauchage déloyal, il faut rapporter la preuve de la
désorganisation, et que ça a un effet sur la société l’empêchant de continue à offrir une offre
pertinente ou passer des contrats. Il faut aussi qualifier la déloyauté à partir du mode de
recrutement.

Dans le mode de recrutement, il faut regarder l’intention. La jurisprudence semble admettre le


débauchage lorsqu’il semble admis qu’il n’y a pas l’intention de profiter des compétences des
personnes qu’il recrute, mais de priver le concurrent des compétences nécessaires à son activité.

Par exemple : Lorsqu’on recrute un salarié qui était lié par une clause de non concurrence dont on
connaissait l’existe ou dont on ne pouvait pas ignorer l’existence de par la pratique courante en la
matière.

En revanche, pour des salariés libres, la jurisprudence admet le débauchage que pour des cas très
spécifiques : lorsque la seule intention de l’auteur de l’acte est de capter sans effort les forces du
concurrent pour le déstabiliser (Com 20 septembre 2016 : sanction au titre du débauchage déloyal
car embauche ciblée de salariés qui occupent des fonctions stratégiques dans l’entreprise
concurrente). Une fonction stratégique, c’est les salariés qui ont des connaissances privilégiés sur la
clientèle, ou qui ont un savoir-faire.

2°) La création d’une entreprise concurrente par un ancien salarié.

Le principe c'est la liberté d’entreprendre. C’est au coeur du système que de préserver l’entreprise
entrepreunariale et de permettre à un salarié de quitter une entreprise pour fonder sa boite, c’est
saint et c’est voulu.

Ça sera déloyal si les procédés de création sont déloyaux. L’essentiel du contentieux porte sur des
démarchages de la clientèle de l’ancien employeur. L’ancien salarié va créer une société pour créer
une activité dans son domaine, il va forcément avoir y concurrence et sollicitation de clientèle
identique. Ce n’est pas illicite si le démarchage de l’ancien employeur n’est pas systématique. Les
procédés ne doivent pas être déloyaux.

Ça sera déloyal si le démarchage est systématique : le salarié tire un bénéfice indu de la


connaissance qu’il a de son ancienne entreprise. C’est par exemple l’hypothèse ou le salarié part
avec le fichier client de l’entreprise. Mais il faut que ça soit un fichier client qui permet d’avoir des
informations privilégiés par rapport à la concurrence. C’est aussi le fait d’entretenir la confusion, en
se faisant passer ou en laissant croire au client qu’on est toujours la société de l’ancien employeur.
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Ça marche aussi si c’est un renvoi d’appel du numéro de l’entreprise initiale vers son entreprise. On
trouve aussi l’hypothèse ou l’ancien salarié prépare son départ de l’entreprise en commençant à
exercer son activité pour son compte.

Point actualité Soc 26 octobre 2022 n°21-19.075 : arrêt qui concerne les pouvoirs des inspecteurs
du travail en matière de repos dominical. Un inspecteur du travail avait enjoint un supermarché de
cesser d’employer des vigiles pour gérer les caisses de ce supermarché le dimanche après 13H. On
est pas dans le cas d’un arrêt qui traite de concurrence déloyale mais on peut sentir l’enjeux : un
concurrent qui ne respecte par le repos dominical en employant ses salariés en dehors ses salariés en
dehors des heures dérogation licites (13h pour les magasins) et qui utilisent des vigiles pour cela,
pour la Cour de cassation, comme ils font le même travail c’est contraire au Code du travail et c’est
donc un manquement à la loi qui est le cas échéant passible de concurrence déloyale. Dans cette
circonstance, les sanctions pourraient être pénales, administratives (fermeture du magasin), civiles
(indemnisation du préjudice des salariés en question).

3°) Le dénigrement :

C’est le fait de dire du mal du concurrent. Il y a des difficultés parfois, car on trouve de temps en
temps des cas explicites de dénigrement, mais on trouve aussi des cas moins explicites, avec des
actes de dénigrement dans des situations plus complexes. Par exemple, non pas en tenant des propos
directement sur le service concurrent, mais en tenant des propos sur son propre service, on ne dit
pas directement du mal de l’autre mais on dit du bien de soit.

Dans certains hypothèses, le fait de dire du bien de soi pourra être assimilé à du dénigrement car on
déduit a contrario que l’autre n’a pas les qualités. Ce type de dénigrement est aussi entendu comme
un acte de dénigrement.

Le dénigrement s’est aussi étendu au delà d’un rapport de concurrence. Traditionnellement, le


dénigrement c’est l’hypothèse du poissonnier qui dit que son concurrent qui vend du poisson pas
frais. Mais ça pourrait être une association, une municipalité. Dans certaines hypothèses, la notion
et le régime du dénigrement a évolué. La jurisprudence en tient de plus en plus compte, car le
dénigrement est difficilement réparable.

Concrètement, si on cherche une définition du dénigrement, ça va être le fait de porter une forme
de discrédit à l’encontre d’autrui, pas forcément du concurrent, en lançant des informa ons
erronées, exagérées ou infondées ; sur une entreprise, ses produits, ses employés, ses services, sa
solvabilité, sa sécurité, ses ac onnaires ou ses dirigeants ou encore sur l’ensemble d’une
profession.

Mais alors pour qu’il y ait dénigrement, il faut caractériser une cible, un auteur du dénigrement, et
un propos donc l’acte lui même.

a) Une cible

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ti
ti
Cette personne est une entreprise, cette cible doit être identifiée ou identifiable, donc
identifiable ça peut ne pas être nommer quelqu’un mais dans l’esprit du public cette personne
pourrait être clairement d’identifiée et donc il pourrait y avoir dénigrement (ex : vieilles affaires sur
les nouveaux entrants sur un marché avec des publicités comparatives. On l’a vu avec le marché de
la téléphonie fixe. Un téléphone était beau, et un autre était moche ; les nouveaux entrants faisaient
une pub crachant sur le vieux téléphone qui était en fait France télécom).

Il ne suffit pas que le concurrent soit identifié, il faut que dans l’esprit du public il soit aussi
identifié.

Ça peut aussi être un groupe de personnes, comme un groupe de services, de produits…

Sur les propos dénigrants à l’encontre de services généraux : affaire des lessives sans phosphate :
publicité le Chat qui promouvait une lessive sans phosphate. Le grand fabriquant de phosphate avait
lancé une campagne d’affichage qui disait « par quoi remplaçait vous le phosphate » en montrant
des poissons morts et en montrant bien que les autres produits utilisés n’étaient pas bien. Donc
sanction.

b) Un auteur dénigrant.

Il faut un auteur dénigrant. Le but est de dénigrer pour avoir un transfert de clientèle. Avant, pour
une action en concurrence déloyale, il fallait que l’auteur du dénigrement et sa victime soit en
situation de concurrence. On a depuis longtemps dépassé cette restriction de situation de
concurrence et il arrive que des non concurrents soient condamnés au titre d’une concurrent
déloyale pour propos dénigrants.

Ça a été le cas pour des associations de consommateurs qui boycottaient de manière intempestive
(Tribunal correctionnel de Paris 3 octobre 1995). Plus récemment, on a un contentieux au titre des
nouveaux entrants sur le marché de nouveaux produits ou encore de tiers certificateurs, ou de tiers
association ou autres. Ces tiers vont se donner pour mission d’informer le consommateur sur
différents types de produits (article Malaury Vignal CCC décembre 2021 commentaire n°178 :
affaire Yuka : application de notation des denrées alimentaires, qui va avoir une influence sur la
perception du consommateur quant à la qualité du produit. Mais alors quelle valeur doit être
accordée à la liberté d’information et à la liberté d’expression. Personne ne doute que Yuka en tant
que tiers doit être libre d’informer les consommateurs. Mais si les informations sont injustifiées,
erronées, ou dépasse ce qui est nécessaire, alors c’est du dénigrement).

Plusieurs jugements de TC de Paris et de Marseille, sanctionnent Yuka pour dénigrement d’abord


parce qu’à coté de la notation figure des informations complémentaires qui vont au delà de
l’objectivité, en portant un jugement de valeur disqualifiant sur la qualité des produits. Le problème
de Yuka selon les TC, c’est que l’application accompagnait les notes d’appel à participer à des
pétitions contre l’emploi des nitrites et d’autres produits dégueulasses dans l’alimentation. Le
dénigrement consiste non pas à présenter une note sur le produit, et une information objective sur la
présence de nitrite, mais dans les propositions accompagnants ces informations objectives qui elles
selon les TC sont des dénigrements.

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Il faut retenir que, même si les tiers non-concurrents invoquent une mission d’intérêt général son
plus libre que les concurrents, ils peuvent néanmoins, lorsque les propos ne sont pas purement
objectifs, encourir des sanctions au titre de la concurrence déloyale.

c) Un propos dénigrant.

Le dénigrement est facilement assimilé à un intention, 100% du temps le dénigrement ne se fait que
sur l'article 1240 du Code civil. Les informations exactes ne constituent pas du dénigrement pour
autant que leur présentation ne soit pas trompeuse ou dénigrante à l’égard du concurrent.

L’exemple même du dénigrement, c’est de présenter comme une exclusivité, ce qui est en réalité
une généralité, et l’information exacte sous entend que l’autre personne n’a pas ces qualités.
L’information est exacte mais parfois trompeuse.

On trouve un contentieux : difficulté qui tient à la cible du propos : beaucoup d’opérateurs


assimilent au dénigrement la diffamation et demandent parfois une requalification. Au titre de la loi
de 1881 car la diffamation est un dénigrement public et la prescription n’est que de trois mois après
la diffusion des propos dénigrants. Ce n’est pas forcément dès la connaissance par la victime, mais
dès la diffusion. Alors que dans le cas d’une action en responsabilité classique la prescription sera
de 5 ans, donc certains acteurs cherchent la requalification pour que l’action soit prescrite (ex : CA
Montpellier 19 janvier 2021 : avis négatifs sur trip advisor : un restaurateur découvre sur ce site un
avis très négatif publié par un consommateur qui critique la nourriture et les tarifs, et conseille
d’aller dans d’autres resto de la région. Il cherche à savoir qui a publié cela. Il comprend que sous le
pseudonyme se cache le beau frère du voisin du restaurant. Visiblement, il y a des tensions avec ce
restaurateur. Le restaurateur assigne en dénigrement cette personne devant le TC. Un appel est
interjeté. La CA de Montpellier considère les critiques mettant en cause la qualité des prestations
fournies, même si elle vise une société désignée ou son dirigeant, ne relève du dénigrement que
dans la mesure ou ces critiques émanent d’une société concurrente de la même spécialité, dans le
même secteur, et pour en détourner la clientèle).

C’est un arrêt d’espèce mais il est spécial car il considère que pas de dénigrement entre non-
concurrents. Ça ne pourrait ainsi être que de la diffamation avec la prescription de trois mois.
L’ensemble de la doctrine a critiqué cet arrêt contraire à la jurisprudence de la Cour de cassation. La
première difficulté et échappatoire pour éviter un dénigrement c’est donc de viser des rapports de
non-concurrence avec une prescription de 3 mois, ce qui est très court et ce qui fait tomber presque
toutes les demandes.

On trouve aussi le contentieux entre deux salles de Judo à Toulouse CA Toulouse 17 février 2021
: une association de judo exerçait dans une salle municipale. Le dirigeant de l’association l’avait
quitté et avait pris la direction d’un nouveau club et avait donc été remplacé. Le premier dirigeant
du club avait de bons liens avec la municipalité, et son nouveau club avant obtenu la location de la
salle. Ça n’a pas plu à l’ancienne association, elle n’a pas contesté au fond la décision mais s’est
livrée à la communication de propos malveillants en évoquant le casier judiciaire de son rival pour
faire naitre des doutes sur l’honorabilité du Monsieur. L’erreur de l’ancien dirigeant a été d’assigner
sur le fondement de la concurrence déloyale le nouveau dirigeant pour des propos dénigrant. La CA
de Toulouse rejette la demande sur la prescription en considérant qu’il y a diffamation car
« l’application de la responsabilité de droit commun est expressément limitée au dénigrement des
produits et services des concurrents, excluant tout recours à l’application de l'article 1240 du Code
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civil lorsque les faits constituent des atteintes à l’honneur, la réputation ou l’honnêteté du dirigeant
d’une personne morale ». On est vraiment dans le jeu de la diffamation.

Beaucoup des opérateurs assignés cherchent donc à obtenir la requalification en diffamation pour le
délai de prescription court pour assigner. Ils vont y parvenir sous deux hypothèses :

- La position de la CA de Montpellier qui n’est pas conforme à celle de la Cour de cassation :


lorsque l’on est pas dans un rapport de concurrence, alors c’est de la diffamation.

- La position de la CA de Toulouse qui est plus proche de la Cour de cassation : il y a


dénigrement si on vise la société, ses produits et ses services, mais il y a diffamation si on prote
atteinte à l’honneur, à la réputation du dirigeant d’une personne morale.

Si on écarte la diffamation, il faut qualifier l’acte de dénigrement :

i. Qualification de l’acte de dénigrement.

Il est possible de critiquer de manière modérée, objective et neutre.

On trouve notamment cela dans les publicités comparatives, elles mettent en rapport les qualités et
les défauts des produits ou services du concurrent. Dans ces hypothèses, la jurisprudence considère
que seule une mise en rapport objective peut exclure la qualification de dénigrement. Au delà des
interprétations subjectives, permettront de qualifier la situation de dénigrement.

Parfois les propos mis en avant sont manifestement malveillants (ex : CA Versailles 10 juin 2021
RG 1906770 : deux sociétés partenaires sont spécialisés dans la construction d’ascenseur et l’aide
aux personnes coincées. Elles ont rompu leur relation de manière pas cool. L’un des deux
partenaires qui avait un fichier client commun, avait adressé à tous les clients communs une
circulaire les informants que l’autre entreprise donnait des consignes à ses employés de faire des
pannes pour que les gens soient bloqués afin qu’ils appellent la seconde. Ce dénigrement est
efficace car il fait naitre un double doute : à la réception de la lettre par le client, il va y croire car
plus c’est gros plus ça passe. Dans un deuxième temps, celui qui est bloqué dans l’ascenseur va se
dire que c’est de la faute de la société qui a saboté l’ascenseur. La Cour a retenu le dénigrement et
une indemnisation à hauteur de 20K).

En ce qui concerne la comparaison, pendant longtemps, la jurisprudence français a considéré que


le seul fait de comparer des produits et des services, même de manière objective, était du
dénigrement. Cette jurisprudence a été maintenue jusqu’en 1986, et un arrêt du 22 janvier 1986 qui
traitait d’un publicité comparative sur les prix : pour l’arrêt c’est un outil concurrentiel majeur à
l’époque ou en France l’inflation était forte. Une loi en 1992 a rendu la publicité comparative licite
sous réserve des articles L121-1 et suivants du Code de la consommation. Pour qu’elle soit licite :

- Elle doit comparer objectivement des biens ou services répondant aux mêmes besoins et avec les
mêmes objectifs.

La publicité ne peut comparer qu’objectivement une ou plusieurs caractéristiques essentielles,


pertinentes, vérifiables et représentatives de ces biens et services dont le prix peut faire partie. Le
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contentieux en la matière se déplace : on ne veut pas savoir si elle est possible, car ça l’est sous
réserver de critères d’objectivité et de clarté, mais il va y avoir sanction sur le critère de
l’objectivité. Je ne peux pas présenter des services et des produits et les comparer sans critère
objectif. Un publicitaire ne peut pas, par exemple, noter la beauté ou le goût d’un produit, car ce
sont des éléments subjectifs. Je ne peux pas non plus prétendre que des produits ont le même goût,
avec un qualité identique et comparer les prix des deux produits (ex : Lidl présentait des
consommateurs dans une chambre noire qui goutaient des produits : des produits d’une marque et
des produits MDD → le consommateur disait c’est pareil. Mais derrière Lidl exposait que son
propre produit était moins cher que celui de la marque. La comparaison portait indirectement sur
des éléments subjectifs, et la publicité avait été considérée comme étant une publicité comparative
illicite).

On va ajouter à cela des difficultés quant à la représentativité des produits. Par exemple, dans les
premières pubs comparatives : A disait ce produit est moins cher que mon concurrent B. Ces
produits répondaient aux memes besoins et aux mêmes objectifs, il y avait bien une identité de
produits. On en est venu a comparer le produit de marque au produit MDD. C’est possible si on
rapporte la preuve qu’ils répondent à des mêmes besoins et objectifs.

Autre contentieux difficile, le caddie classique représentatif des achats des consommateurs pour
prouver que les prix sont moins chers que chez les concurrents. Mais il y a eu de lourds contentieux
en disant que la publicité comparative de la sorte ne respectait pas les articles L121-1 et suivants du
Code de la consommation.

Il peut y avoir dénigrement si les informations sont inexactes. Une célèbre affaire d’un concurrent
qui avait envoyé un courrier à ses clients distributeurs qualifiant les produits d’un autre fournisseur
de piquette à peine buvable. La défense de l’auteur était de fournir des attestations en montrant que
c’était effectivement à peine buvable. Mais les juges ont dit que le terme employé suffisait à
caractériser le dénigrement en raison de propos excessifs et des qualifications manifestement
dénigrantes employées. Le caractère outrancier des propos suffit à caractériser le dénigrement. Le
concurrent aurait dû comparer la qualité respective des produits pour dire que les produits ne sont
pas qualité équivalente.

Affaire Renault vs Volkswagen : des propos objectifs accompagnés de propos subjectifs, mais pas
forcément dénigrants. Renault disait que deux fois plus de véhicules étaient immatriculés en France
que ceux de VW. Un message accompagnait cela en disant que ce n’était pas un hasard au regard de
la qualité des produits proposés. Renault a été condamné pour dénigrement.

Hypothèse des actions en justice : quand on agit en justice contre un concurrent, peut-on en
informer les concurrents ou clients qu’on agit contre telle personne ?. Pas de dénigrement à
informer tout le monde d’une décision de justice contre un concurrent, mais faire diffuser par un
internet une information évoquant une action en contrefaçon contre une société concurrente alors
qu’aucune condamnation n’a encore été prononcée à l’encontre de ce concurrent, est un
comportement déloyal (ex : CA Paris 16 mai 2003 et Com 20 septembre 2016).

Parfois, il faut bien informer la clientèle de l’existence d’un contentieux, ne serait-ce que pour
préserver ses droits, notamment sur une action pour conserver ses droits sur un brevet… on ne peut
le faire que si préserve mesure et sérieux dans les propos, en exposant la situation judiciaire exacte

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sans traiter l’autre de contrefacteur. Quand on adresse un courrier aux distributeurs de produits
qu’on estime contrefaits, si on évite toute outrance et qu’on limite le propos à ce qui est strictement
nécessaire à la préservation des droits alors c’est possible (CA Paris 9 avril 2021, 1910941). Ça
pourra valoir que si on expose bien les motivations sans dénigrer.

ii. Diffusion du message

Le dénigrement peut-être opéré de biens des manières s’il y a eu diffusion du message en dehors de
l’entreprise, pour avoir un effet sur l’activité de l’entreprise concurrente. Mais dès qu’il est diffusé,
même s’il est peu consulté, on considère que c’est du dénigrement car il peut y avoir un public à
cela. On pourrait même avoir une diffusion par voie orale (ex : un opérateur qui avait le même
banquier que son concurrent, avait tenu des propos dénigrants quant à la solvabilité de son
concurrent auprès du banquier. En conséquence, la capacité d’emprunt de ce concurrent a été
éludée).

4°) La déloyauté par confusion et par parasitisme.

C’est la dernière déloyauté, à titre du prof, il l’assimile au parasitisme car c’est ce que fait la
jurisprudence. La confusion s’opérerait entre concurrents alors que le parasitisme entre non
concurrents. En réalité, c’est plus un obstacle, un élargissement du domaine mais qui reste de la
confusion.

Le problème c’est qu’aujourd'hui les éléments attractifs de clientèle sont de mieux en mieux
valorisés et connus du public. Tellement valorisés que certains éléments attractifs conservent leur
capacité d’attraction au delà de leur domaine de spécialité. Ça veut dire par exemple qu’une marque
comme Coca même pour vendre autre chose que du Coca. Pareillement que l’appellation
Champagne permet aussi de vendre d’autres produits.

L’intérêt de signes distinctifs : distinguer les produits ou les services d’un opérateur de ceux d’un
autre opérateur. La CJUE va dire que ça assure une seconde fonction : ils vont avoir pour mission
de garantir une origine ou une qualité aux produits et aux services. En outre, cette marque et ce
signe distinctif est synonyme de qualité, donc le consommateur est rassuré même si la marque sort
de son domaine de compétence. L’emploi de cette marque en dehors de son domaine par des
concurrents pourrait être intéressant, notamment lorsque l’on peut opérer une confusion sur ces
signes distinctifs pour que celui qui n’en est pas titulaire puisse lui aussi en profiter.

Il faut entendre la variété des signes distinctifs. Une marque confère un droit d’exploitation
exclusif, c’est ce qui fait que pour le domaine de spécialité, le titulaire peut interdire à quiconque
d’utiliser la marque. La contrefaçon ce n’est pas seulement l’imitation, c’est aussi l’utilisation de
l’image de marque sans en avoir l’autorisation, donc sans avoir une licence de marque.

Il y a d’autres éléments de distinction qui ont une valeur économique que d’autres opérateurs
peuvent être tentés d’employer, comme une appellation d’origine, les noms de domaine (signe
distinctif d’un site internet). Mais la différence, c’est que la marque est protégée par la PI. Dès lors,
l’ayant droit est protégé, et peut agir sur le fondement du droit commun de la responsabilité civile
délictuelle, et la contrefaçon en soi est une faute ; alors que la confusion en elle-même n’est pas
forcément une faute.

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Par exemple, si je crée un site internet avec un nom de domaine qui se rapproche d’une marque de
luxe. Le simple fait que j’évoque cette marque est une faute et donc une contrefaçon. Cependant, si
je reprends un signe distinctif non protégé par la propriété intellectuelle, ça n’est pas en soi une
contrefaçon et donc ça n’est pas sanctionnable si on ne démontre pas la contrefaçon.

Il faut donc une faute, la volonté de tirer partie de la notoriété d’autrui pour, indûment, tirer la
couverture à soi. On fonde cette action sur les articles 1240 et 1241 du Code civil, et la faute va
consister à s’appuyer sur les efforts d’autrui en se plaçant dans son sillage et sans bourse
déliée.

Il y a donc un leader et un suiveur, qui profite des investissements du premier, pour profiter du
travail d’autrui. Mais ce premier ne tire aucun avantage de ce squat.

Un arrêt de la CA de Paris de 1989 sur les Parfums Nougarot :

Il faut évidemment un leader car on en copie que ce qui marche. Il faut identifier une entreprise qui
a une valeur qui octroi un avantage concurrentiel. Cette valeur peut-être parfois tellement grande
qu’elle peut présenter de l’intérêt pour d’autres produits ou services que ceux qu’elle représente, ce
qui a conduit à une extension de la confusion : les agissements parasitaires. La doctrine distingue
concurrence parasitaire et agissement parasitaire :

- La concurrence parasitaire suppose une confusion et une erreur dans l’esprit du public qui,
pensant acheter le produit de la marque, achète ne réalité le produit du concurrent. C’est aussi
l’hypothèse celle du concurrent qui propose à un prix moins élevé son produit en reproduisant les
signes distinctifs de la marque au prix élevé (ex : contentieux Louboutin).

- L’agissement parasitaire a aussi été admis par l’affaire Champagne. Les agissements
parasitaires consistent à la reprise d’une valeur d’autrui. Cela suppose que cette valeur soit
concurrentielle. Le champagne fait figure de produit de luxe et de qualité. C’est ce que la
doctrine a parfois qualifié d’agissement parasitaire, lors de l’utilisation de l’appellation.

La jurisprudence ne reprend pas forcément cette distinction, et parle de l’un ou de l’autre


indifféremment.

L’autre point qui a fait débat, c’est le droit de PI. Les spécialistes de PI tirent la sonnette d’alarme
en disant que le principe en droit est celui de la liberté, et que si le législateur avait pris soin de créer
un régime de droit de propriété intellectuelle en soumettant le régime à ces conditions, c’était bien
pour le réserver à un certain nombre de cas. Dans l’esprit du législateur, on ne va pouvoir réserver
cette protection que si on répond à un certains nombre de conditions. Une grande partie de la
doctrine a alerté contre le risque de la liberté circulation des idées.

La jurisprudence a rappelé que les droits de PI bénéficient d’un régime singulier, exclusif, qui se
caractérise par le fait que la simple utilisation de l’image d’autrui est fautive. Si on n’est pas dans le
cadre d’un droit de PI, la seule copie servile, donc la simple reprise de l’image d’autrui ne suffit pas
à caractériser la confusion ou le parasitisme, il faudra au sens de l'article 1240 caractériser une
faute. La faute ne réside pas dans la simple utilisation et reprise de l’image d’autrui.

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Tout ça a été synthétiser dans un arrêt Cartier du 22 octobre 2002 : la société métro commercialise
des produits pour les professionnels de la restauration. Pour fidéliser ces clients, elle leur faisait des
cadeaux et elle a repris la Tank de cartier (montre iconique de Cartier) pour en faire des cadeaux
avec une montre qui ressemble. La Cour de cassation dit que ça ne suffit pas a caractériser une faute
de faire une montre rectangle si le design n’est pas déposé. Il faut que cette reprise soit
accompagnée d’une faute. Cette faute consiste en le fait qu’on va copier l’idée de l’autre et la
dévaloriser. Si je ne nuis pas à l’autre alors pas de difficulté, mais dans cet arrêt la Cour dit que la
montre Cartier est de haute renommée avec un pouvoir attractif et prestigieux. L’offre faite à la
clientèle d’une copie servile, porte nécessairement atteinte à l’image de marque de cette montre,
qu’elle vulgarise et rabaisse à simple gadget publicitaire.

Les idées personne ne peut se les approprier. Si tout le monde peut reprendre les idées de l’autre, ce
n’est que par exception que l’on peut définir cette reprise de confusion ou de parasitisme. Le simple
fait de prouver qu’une idée est identique chez un concurrent et que cette idée est postérieure à celle
que l’on a eu, ne suffit pas à caractériser l’acte déloyal.

Pour qu’il y ait acte déloyal, il faut rapporter la preuve que l’ambition de l’auteur de l’acte est de
tirer indûment profit de la réussite d’autrui. C'est-à-dire réaliser des économies grâce à l’effort que
autrui a fourni et qui lui a couté. Concrètement, il va falloir un produit ou un prestataire leader dont
on a va s’approprier la paternité. C’est tout l’exemple de la notoriété de la jurisprudence champagne
pour laquelle les juges ont considéré que Yves Saint Laurent avait détourné la notoriété dont seul les
producteurs et négociants champagnes pouvaient se prévaloir, pour commercialiser leur champagne,
à son profit.

La confusion ou parasitisme permet de retrouver factuellement des comportements identiques ou


des faits objectifs qui en eux-mêmes ne sont pas discutables. Pour autant, dans la manière dont les
idées sont présentées, dans le contexte qui les caractérise, il va y avoir manifestement volonté de
tirer profit de la réputation d’autrui pour réaliser des économies.

Exemple 1 : est ce que le fait d’inviter une jeune femme célèbre à venir dans une soirée spéciale en
boite de nuit est original ? : non, ce n’est pas rare. On fait venir une star, et on fait en sorte qu’elle
motive la clientèle pour venir. Si on donne le nom de cette star et je précise qu’elle est participante à
un jeu de télé-réalité. Je cite ce jeu de télé-réalité. Dans cette affaire, un club invite une candidate de
télé-réalité en donnant plus que son nom, en indiquant le jeu pour lequel elle a participé et en
s’appuyant sur la notoriété de la société de production du jeu. C’est tirer profit de la réputation
d’autrui, la société de production de jeu. Il y a parasitisme (CA Montpellier 5 février 2008).

Exemple 2 : est ce que je peux réaliser un documentaire sur les chorales dans les écoles ? : oui, mais
si je le fais de manière concomitante avec le film les choristes, en utilisant l’image de ce film etc
alors je fais du parasitisme. PARLE FRANÇAIS FDP. On se place dans le sillage du film les
choristes en publiant le documentaire sur une chorale d’école, donc pas possible car parasitisme.

Il y a des situations ou c’est admissible, s’il n’y a pas de placement dans le sillage notamment s’il
n’y a pas de rappel de la situation d’autrui. Par exemple, la coupe du monde du Qatar est utilisée
pour vendre des produits. Mais si on est un distributeur et qu’à l’occasion de la coupe du monde on
propose d’acheter un téléviseur, ce n’est pas du parasitisme à partir du moment ou on utilise pas des
signes distinctifs qui marquent la confusion.

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Exemple 3 : Com 17 mai 1982 : est ce qu’une entreprise est libre de s’installer ou elle veut ? : oui
sous réserve d’exceptions. Est ce qu’une cristallerie peut s’installer à Bakara ? (Cristallerie célèbre
qui porte le nom du village). Quelqu’un a fondé une autre cristallerie en s’installant dans le village.
En principe, c’est possible, mais il faut que cette installation ne tire pas indument profit de la
cristallerie qui porte le nom du village. L’installation doit être faite sans aucune confusion possible.
La Cour de cassation approuve la CA d’avoir retenu la confusion alors même que la distinction
entre le nom commercial et le nom de la ville était parfaitement clair et dépourvu de toute
ambiguïté.

Exemple 4 : CA Versailles : on est dans l’hypothèse de l’exploitation simplifiée d’un fichier client.
Un concurrent l’exploite. Le titulaire du fichier client assigne son concurrent pour parasitisme. Et la
CA doit déterminer si les conditions du parasitisme sont ou non remplies. La CA nous dit que le
demandeur à l’action doit rapporter cumulativement la preuve :

- 1°) De l’investissement réalisé pour la confection ou l’exploitation de la valeur usurpée (cet


investissement n’est pas nécessaire qu’il soit financé, ça peut être un investissement humain).

- 2°) De l’existence de la valeur économique résultant de l’investissement s’agissant d’une valeur


non rentabilisée ayant une consistance particulière. La valeur non rentabilisée n’est pas définie,
mais l’idée derrière c’est que l’investissement doit être valorisée, il doit procurer un avantage
concurrentiel qui doit permettre de capter plus de clientèles, réaliser plus de profits…

- 3°) Que l’imitation n’est pas justifiée par une exigence légale ou l’intérêt général. C’est ce qu’on
appelle l’emprunt nécessaire. Il y’a des hypothèses ou pas le choix que de reprendre la solution à
un autre pour développer son service. C’est l’exemple des codes couleurs dans les produits de
santé par exemple. On doit choisir le blanc pour vendre car c’est comme ça que le client
reconnait (ex : voir arrêt Leclerc).

- 4°) De la volonté de l’auteur de tirer profit de la notoriété de la demanderesse.

Tous ces éléments sont cumulatifs et doivent être rapportés. Dans cet arrêt de Montpellier, deux
sociétés avaient des coordinateurs commerciaux d’agent commerciaux. Il était rapporté la preuve
que l’essentiel du CA concurrent auteur d’un acte déloyal présumé avait été réalisé grâce à
l’utilisation du fichier (environ 65%). Mais, la CA nous dit que la demanderesse à l’action n’a pas
rapportée la preuve des investissements réalisés pour constituer le fichier. Elle nous dit que l’effet
de parasitisme qui suppose qu’un investissement soit réalisé n’est pas acquis.

C°) Le fait générateur

Il faut caractériser la faute, et donc le fait générateur sur le fondement de l’article 1240. Ioann fait
l’aveugle et veut pas écrire ça. Il a raison. La jurisprudence est tout à fait conforme à l’application
classique des dispositions de l’article 1240. Il faut une faute et elle doit être prouvée sans
présomption de faute préalable.

Pour l’action en concurrence déloyale, en agissements déloyaux, il y a une stricte orthodoxie.

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II / Un dommage.

L’existence d’un préjudice s’impose. C’est l’exemple typique de l’article 1240. Néanmoins, il faut
retenir que le préjudice est présumé selon la jurisprudence. La jurisprudence considère qu’il s’infère
nécessairement à un préjudice de l’acte déloyal. Donc dès qu’il y a un acte déloyal, il y a un
préjudice présumé. Il n’y a pas de fumé sans feu.

1°) Ripert.

C’est une chose de dire qu’il y a un préjudice, mais quel en est le quantum ? Il faut s’interroger sur
la nature du préjudice pour comprendre son évaluation. En théorie, chez le Doyen Ripert, c’est la
dérive de client. Il considère que l’action en concurrence déloyale a essentiellement pour objet
d’indemniser une perte de clientèle qui est attachée au fonds de commerce.

C’est très critiquable, car c’est contradictoire. La clientèle, dans la théorie du fonds de commerce la
loi considère que la clientèle fait partie du fonds de commerce.

Il n’y a pas d’acte de concurrence déloyale affectant la clientèle, il n’y a pas forcément de baisse de
CA mais il peut y avoir une perte de chance. Donc juridiquement la théorie n’est pas forcément
vraie. La clientèle peut rester, mais le dénigrement peut décourager des personnes à devenir de la
clientèle. Donc si j’ai une baisse de CA entre l’émission du propos et le moment ou je demande
indemnisation, est ce que je peux dire que c’est mon préjudice ? C’est complexe car il peut y avoir
pleins de faits à l’origine de la perte. Le dénigrement peut être vrai, si par exemple le produit
dénigré est vraiment mauvais.

Il peut aussi y avoir un acte de concurrence déloyale sans baisse de CA. Et dans ce cas la, ça peut
poser problème. Car il peut y avoir dénigrement sans pour autant une baisse de CA et même
émettons que je progresse. La théorie de Ripert ne fonctionnerait pas car je ne peux pas dire avoir
perdu de clientèle car je n’en ai pas perdu. On revient donc à l’hypothèse de la perte de chance, s’il
n’y avait pas eu dénigrement, j’aurais peut-être eu une progression plus importante.

Il est donc très difficile d’évaluer le préjudice. Si on peut caractériser l’existence d’un préjudice, il
faut aussi en évaluer le quantum, donc être capable de proposer au tribunal saisi une évaluation.

2°) Banalisation du signe

Je peux évoquer la banalisation du signe qui va dévaloriser le produit et ses signes. On parle de
signes distinctifs, mais un signe qui se banalise c’est un signe qui n’est plus distinctif. Le risque
c’est que tout le monde profite des efforts ce qui est discutable et moralement répréhensible. Le
signe en lui-même se déprécie. Il perd sa force et sa valeur.

C’est la banalisation de l’image de marque qui s’opère. Une affaire est intéressante et reprend en
partie la jurisprudence Christian Dior : c’est le problème des produits de luxe distribués au milieu
des produits pas luxe (Com 1 juillet 2003 99-17.183) : un opérateur place des produits de luxe et
présente au même endroit des produits de gamme basique. C’est notamment le cas avec Dior au
milieu de produit qui ne sont pas hauts de gamme. Tout ce qui briserait l’exception du luxe et de

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l’originalité entrainerait une perte de valeur. C’est aussi le même problème de l’arrêt Métro -
Cartier.

Le préjudice peut être considérable, il va falloir l’évaluer et chercher à déterminer le montant des
efforts nécessaires pour reconstruire l’image de marque ou bien encore évaluer le montant des
investissements qui ont été nécessaires à la réalisation ou à la valorisation de l’image de marque. La
Cour de cassation a aussi admis d’autres modes de calcul.

3°) La perte de savoir faire.

Le préjudice peut résulter d’une perte de savoir faire. Si on détient un savoir-faire et que le
concurrent, par des procédés déloyaux, récupère ce savoir-faire, et prive donc l’entreprise de son
avantage concurrentiel. Dès lors qu’il y a un véritable savoir-faire, il y a un préjudice si ce savoir-
faire est perdu. La particularité ce n’est pas qu’il est perdu au sens ou on ne peut plus l’exploiter
mais au sens ou tout le monde l’exploite et donc on perd l’avantage concurrentiel.

La encore, il sera difficile d’apprécier le montant de l’indemnisation qui sera due.

III / Un lien de causalité.

Si on se fonde toujours sur l'article 1240 du Code civil, le lien de causalité doit être établit et
prouvé. Il faut apporter la preuve que c’est le fait générateur de la responsabilité qui est l’origine du
préjudice.

Sur la même difficulté, s’agissant de l’existence et du quantum : il est facile de démontrer que l’acte
déloyal a causé un préjudice et la Cour le rappelle fréquemment, établissant que le lien de causalité
puisse être établit par présomption. Mais dans l’hypothèse ou une multitude de causalités possibles,
il est plus complexe d’établir que la déloyauté est la cause unique du dommage dont on a souffert.

Le problème c’est toujours d’établir que c’est bien la faute qui est à l’origine de l’ensemble du
dommage subit. En pratique c’est impossible. Ce qu’il se passe dans les faits, c’est qu’on organise
une présomption de causalité de l’acte déloyal qui cause nécessairement un préjudice. Il appartient à
la partie défenderesse, qui ne veut pas entendre parler de concurrence déloyale, de contester la
causalité en avançant par exemple les différentes causes possibles de perte de CA.

Mais alors quelles peuvent être les causes de sanction de la concurrence déloyale.

§2) Le régime de la concurrence déloyale / traitement de l’acte de déloyauté.

Si on fait référence à l’article 1240 du Code civil, on envisage la responsabilité civile délictuelle et
sans doute une indemnisation.

Il y a longtemps que la jurisprudence applique l’adage : il vaut mieux prévenir que guérir. Donc si
un fait quelconque oblige à réparer, il faut aussi que ce fait s’arrête. L’acte fautif doit cesser. On a
deux actions possibles qui peuvent se cumuler dans certaines hypothèses. Ces actions sont :

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- L’action en cessation
- L’action en indemnisation.

I / La cessation de l’acte illicite.

A°) L’acte.

Le juge admet d’être saisi pour qu’il ordonne la cessation d’acte déloyaux ou d’actes préparatoires.
On peut alors le susciter pour faire cesser une pratique, enjoindre de ne pas faire, enjoindre d’arrêter
toutes les pratiques déloyales. Parfois, faire cesser une activité concurrentielle si celle-ci est par
nature déloyale. Aussi, on peut demander au contraire de faire cesser le dommage en enjoignant au
délinquant de faire, de diffuser par exemple un propos rectificatif, de modifier une présentation qui
est confondante…

B°) Juge compétent.

En ce qui concerne le juge et la juridiction compétente, les tribunaux de commerce sont le plus
souvent saisis pour la concurrence déloyale et même par des anciens dirigeants sociaux qui ne sont
plus commerçants.

En revanche, si le défendeur n’a pas la qualité de commerçant, ce sont d’autres juridictions qui
seront compétentes. Par principe, le tribunal judiciaire et par exception le conseil de prud’homme si
l’auteur des actes est un salarié ou un ancien salarié a qui l’on reproche d’avoir indument tiré profit
de sa position privilégiée (ex : le salarié est parti avec le fichier client).

Tous ces éléments permettent de déterminer la juridiction compétente. Mais parfois il y a un cumul
de qualité, et donc un salarié peut parfois être mandataire social. Il n’est pas rare que le gérant d’une
société soit rémunérer au titre d’une activité salariée. À ce titre, celui qui se livre à un acte déloyal
peut à la fois être attrait devant le tribunal de commerce ou devant le conseil des prud’hommes. La
alors, la question n’est pas véritablement tranchée par la jurisprudence sur quelle juridictions saisir.

C°) La forme de l’action.

Autre hypothèse, c’est celle de la forme de l’action. Soit au fond, soit au référé ? : une action au
fond est possible mais elle est longue et ne va pas permettre de faire cesser en temps opportun le
trouble dont souffre la victime. On va préférer alors l’action en référé invoquant un trouble
manifestement illicite ou un dommage imminent. S’agissant du dommage imminent, la
jurisprudence est restrictive. Il faut rapporter la preuve avec suffisamment d’éléments de la
déloyauté.

Il y a des exemples fréquents d’actions en référé, notamment sur l’hypothèse du dénigrement, il est
plutôt simple lorsqu’il y a une captation des propos d’agir en concurrence déloyale et d’obtenir la
cessation de la pratique illicite. Il y a aussi beaucoup de contentieux sur la violation d’une clause de
non-concurrence, et donc comme l’autre à une activité concurrente le trouble est manifestement
illicite, à moins de contester la clause de non-concurrence.

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Beaucoup d’actions ont été opérées pour protéger le repos hebdomadaire des salariés. Il est en
théorie possible de solliciter du juge l’allocation d’une provision donc le paiement d’une indemnité
compensatrice du préjudice qui sera ensuite révisée au fond le cas échéant.

II / L’action en indemnisation : la réparation du préjudice.

Ça se fait essentiellement devant le juge du fond. Au regard néanmoins des difficultés déjà
exposées, on se heurte à des difficultés d’indemnisation. Un arrête du Com 17 mars 2021 rappelle
qu’en matière de concurrence déloyale, il s’infère nécessairement un préjudice de l’existence d’un
acte déloyal. La chambre commerciale de la Cour de cassation casse les arrêts de juge du fond qui
considèrent qu’il y a déloyauté mais que la preuve du préjudice n’est pas rapportée. Il appartient
aux juges du fond d’évaluer le montant de ce préjudice.

S’il y a déloyauté, il doit évaluer le montant du préjudice. La Cour de cassation laisse aux juges du
fond le pouvoir souverain le montant de ce préjudice. La situation reste complexe, on sait qu’il y
aura indemnisation, on peut imaginer une indemnisation symbolique, on peut imaginer un tarif en
cas de déloyauté. Il ne serait pas fonction du préjudice souffert par la victime mais de la gravité de
la faute commise par l’auteur. C’est ce que l’on retrouve dans des formules qui impose la
qualification d’un préjudice fut-il seulement moral.

Le problème c’est que l’atteinte en responsabilité civile de la société est complexe à définir. Cette
atteinte, ce préjudice moral est aussi quantifié de manière abstraite, quantitative en fonction de la
gravité des manquements et donc on est loin d’une action en indemnisation, on est dans le cadre
d’une action sanction symbolique.

La Cour de cassation a recherché de nouvelles pistes pour permettre au juges du fond d’évaluer
différemment le montant du préjudice. Un arrêt de la Com 12 février 2020 n°17-31.614 : idée des
vases communicants, on pourrait évaluer le préjudice souffert par la victime à l’aune de l’avantage
obtenu par l’auteur de l’acte déloyal. On ponctionne à celui qui a fauté une part des profits que cette
faute a engendré : il faut prendre en compte l’avantage indu que s’est octroyée l’auteur des actes de
concurrence déloyale au détriment de ses concurrents mais modulé à proportion des volumes
d’affaires respectifs des parties affectées par ses actes. Donc par exemple, dans un secteur d’activité
j’ai une entreprise qui se livre à des actes illicites qui sont forcément déloyaux : le préjudice souffert
par la victime qui agit en justice : si elle n’arrive pas à établir son préjudice, elle peut demander une
indemnisation qui serait le résultat d’une formule : « profit indu par l’auteur de l’acte déloyal » X
les parts de marché de la victime. Donc on multiplie le profit indu avec les parts de marché de la
victime.

Un autre arrêt est intéressant Com 17 mars 2021 19-10.414 : si on arrive pas a évaluer le préjudice
direct de la perte, on va chercher une évaluation des efforts qui ont été perdus. Les pratiques
consistants à parasiter les efforts et les investissements intellectuels, matériels ou promotionnels,
d’un concurrent, en ce qu’elles permettent à leur auteur de s’épargner une dépense induisent un
avantage concurrentiel indu dont les effets préjudiciables peuvent être évalués en prenant en
considération cet avantage. Le préjudice va être fonction du l’économie réalisée par l’auteur de
l’acte déloyal. On va s’interroger sur les efforts qu’il aurait dû effectuer pour parvenir à cette même
fin sans acte déloyal. Cet arrêt nous dit qu’on peut aussi se placer du coté de l’auteur de l’acte
déloyal et de l’avantage concurrentiel qu’il a perçu, on est pas dans 1240 mais on veut rendre à

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autrui l’avantage qu’il a perdu. Donc on se demande quel est le montant perçu par ce concurrent
déloyal et ce qu’il devra restituer à la victime de l’acte.

C’est une avancée jurisprudentielle forte pour faciliter une indemnisation, la Cour de cassation
considère que s’il y a déloyauté il y a nécessairement préjudice, donc cette technique permet de le
faire.

Sec on 2 : Aménagements conven onnels à l’exercice de la concurrence.

Si les parties essayent d’aménager les conditions de la concurrence. Un partenaire, quelque soit son
statut, doit être dévoué parce qu’il est dangereux, et s’il part il est tout aussi dangereux car il part
avec une connaissance de notre entreprise qui lui octroi un avantage concurrentiel. C’est par
exemple un super commercial qui connait tous les clients, tous les produits, toutes les marges et si il
partait chez la concurrence, il saurait comment avantager les produits concurrents par rapport aux
miens. On pourrait démontrer un acte déloyal, mais il faudrait démontrer un acte de déloyauté ce
qui est complexe. Pour éviter à avoir à rapporter cette preuve, on peut éviter qu’il y ait concurrence,
donc on interdit à cette personne de concurrencer cette entreprise. C’est potentiellement une atteinte
très sérieuse aux libertés économiques. Ce genre de clause est encadrée strictement par la
jurisprudence.

Il est fréquent qu’un contrat prévoit les conditions dans lesquelles pourraient s’exercer une activité
concurrentielle du stipulant une fois parvenu au terme du contrat. C’est une clause de non
concurrence post-contractuelle. Il faut se poser trois questions :

- La validité d’une telle clause : ça fait l’objet d’un lourd contentieux, il est fréquent qu’un
cocontractant après le terme du contrat ne respecte pas la clause de non concurrence et qu’il se
voit opposer cette obligation de non concurrence. Pour y échapper, il obtient parfois que soit
prononcée la nullité de la clause en question. Devant ce constat, la pratique a cherché des
alternatives. Elle a cherché des clauses moins attentatoires et moins dangereuses face à
l’annulation. La stipulation contractuelle qui permet de revenir au même résultat sans les
désavantages

- Les alternatives de la clause de non concurrence.

- Le régime de la clause de non concurrence valide.

§1) Le modèle de la clause de non concurrence.

Elle interdit au débiteur de l’obligation de la clause d’exercer une action concurrente de celle du
créancier de la clause. Elle fréquemment rédigée à son bénéfice. Il y a aussi d’autres formules qui
ont le même sens, s’agissant des cessions de fonds de commerce avec les clauses de non
rétablissement. Dans les contrats de cession de fonds libéraux, on parle d’une clause de non
réinstallation. Changer le nom de la clause ne change pas sa nature et donc son régime s’applique.

On distingue deux types de clauses :

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ti
ti
- La clause précise une obligation de non-concurrence d’origine légale. Elle apporte plus de
sécurité aux parties. Par exemple, un contrat de cession de fonds de commerce comprend la
cession de l’activité, on cède les éléments attractifs. La jurisprudence fait application de la
garantie d’éviction du fait personnel du Code civil et considère que le cédant est tenu de ne pas
évincer le cessionnaire. On ne peut pas s’établir à proximité avec la même activité. Mais
proximité c’est un terme générique, et ça n’est pas définit. Donc la clause de non concurrence
permet de préciser tout cela. Elle permet de définir clairement les limites de l’activité déterminée,
la zone de non réinstallation, le domaine géographique réservé. C’est pour pallier à l’aléa
judiciaire. C’est plus protecteur que la loi et l’interprétation du juge. Cette clause ne fait
qu’aménager une obligation légale de non concurrence, cette clause ne fait que préciser la portée
des obligations.

- La clause qui existe d’elle-même sans préalable légal : c’est l’exemple de la clause de non
concurrence pour un salarié. Quand un salarié quitte l’entreprise est normalement libre d’exercer
une activité concurrente sous réserve de ne pas être déloyal. Le salarié négocie rarement son
contrat de travail, cette clause peut être déséquilibrée. Cette clause post-contractuelle impose de
ne pas concurrencer la où la loi ne l’avait pas prévue. Donc la jurisprudence est stricte la dessus.

R2CUP les 10 premières mins.

La validité de la clause de non-concurrence, la question se pose des intérêts opposés du créancier et


du débiteur de la clause. La grille d’interprétation est en quelque sorte la liberté du débiteur. On
admet qu’il puisse être porté atteinte au débiteur de la clause de non concurrence mais dans une
certaine limite et uniquement dans certains cas. La jurisprudence traitant de la validité de telles
clauses a cherché à lutter à la fois contre le recours abusif à la clause de non concurrence, et contre
le recours excessif à la clause de non concurrence.

On distingue abusif et excessif :

- Abusif : hypothèse même ou une clause de non concurrence est impossible.


- Excès : hypothèse ou la clause de non concurrence est en théorie possible mais son objet au sens
large est excessif.

A°) La lutte contre le recours abusif à la clause de non concurrence.

Le recours abusif c’est l’hypothèse ou l’insertion de la clause de non concurrence elle-même pose
difficulté car la jurisprudence française rappelle que la liberté du commerce, du travail, sont des
libertés à valeur constitutionnelle. Elles sont fondamentales.

1°) L’intérêt légitime.

De ce fait, il n’est pas possible de les prévoir de manière systématique, automatique, et ce n’est
possible que dans certains cas. C’est l’hypothèse ou le créancier de la clause justifie d’un intérêt
légitime. Cet intérêt légitime c’est le risque que présente le débiteur de la clause. Il faut la voir
comme une arme de protection qui ne peut être employée que si la personne qui en est la débitrice
est dangereuse. C’est ce qui a été affirmé dans un arrêt du Laveur de vitre (Soc 14 mai 1992 Bull.
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n°309). Le débiteur doit présenter un risque véritable pour le créancier pour qu’une clause de non
concurrence soit possible. L’employeur ne pourra insérer une clause de non concurrence dans le
contrat de travail que s’il justifie que le salarié en question présente un risque pour l’entreprise. Ça
ne vise que les hypothèses ou la situation du salarié au sein de l’entreprise lui a permis d’accéder à
un avantage concurrentiel. Dans l’espèce, le laveur de vitre n’avait aucun contacte avec la clientèle,
pas de connaissance de la clientèle, pas un savoir-faire particulier propre à l’entreprise. Donc cette
personne, par la concurrence n’était pas plus dangereuse qu’un autre employé.

On se demande donc si la personne part à la concurrence avec des informations qui lui permettront
d’être plus compétitifs que les autres : les besoins, des tarifs, les pratiques de la clientèle.

L’arrêt nous dit donc que la clause de non concurrence permet avant tout d’éviter tout détournement
de clientèle, mais pour qu’elle soit légitime, il faut prouver que le débiteur peut plus facilement
qu’un autre détourner la clientèle par la connaissance qu’il a de l’entreprise. On pense à tout ce qui
permet d’avoir une connaissance approfondie de l’entreprise, c’est essentiellement le cas du savoir-
faire particulier.

Une clause de non concurrence doit pouvoir être justifiée, et cela au regard du débiteur, par du
créancier de la clause. On fait de la casuistique pour l’analyse, cela veut aussi dire que la clause de
non concurrence ne sera valable que pour certains postes de l’entreprise et qui feraient naître un
avantage concurrentiel. Cette clause peut être justifiée a posteriori lorsqu’il y a un contentieux,
mais il est plus prudent de la faire a priori. Il faudra déterminer un cadre d’application de la clause
pour justifier son existence.

Au delà du contrat de travail, il y a d’autres hypothèses. Il faudra justifier en quoi le cocontractant


peut-être dangereux. Il y a un contentieux lourd en matière de contrats de franchise. La
jurisprudence a pu considérer le recours à une clause de non concurrence abusif car le franchisé
débiteur n’avait pas bénéficié d’un savoir-faire suffisamment consistant (Com 14 novembre 1995).
Un franchiseur apprenait à son franchisé comment gérer son stock et ses livraisons. Ce n’est pas un
savoir-faire mais une compétence, donc le franchisé qui part à la concurrence n’est pas plus
dangereux qu’un autre qui aurait suivi des cours en la matière.

2°) La contrepartie financière en droit du travail.

Il faut donc adapter l'objet de la clause à hauteur du risque. La chambre Sociale de la Cour de
cassation a une jurisprudence particulière. Elle pose des conditions supplémentaires à la validité de
la clause de non concurrence (arrêts Soc 10 juillet 2002) : elle doit nécessairement faire l’objet
dans un contrat de travail d’une contrepartie financière.

À ce jour, l’exigence d’une contrepartie financière n’a été posée qu’au bénéfice du salarié, donc il
n’y a que la chambre sociale qui a posé cette condition en condition essentielle. Mais une partie de
la doctrine avait, depuis les années 1980, posé le principe de la contrepartie financière pour la
validité de la clause pour deux raisons :

- On considérait que puisqu’on imposait une obligation à l’une des parties, cela ne pouvait se faire
sans contrepartie. Mais c’est tombé à l’eau car pas de nécessité d’une contrepartie en particulier
car on regarde l’équilibre du contrat.

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- Dans la mesure ou la clause de non concurrence était facilement imposée par le créancier qui est
toujours dans une situation dominante, il l’imposait à titre gratuit et en outre de manière
systématique (avant 2002). Dès lors, la meilleure façon de limiter l’emploi d’une clause de non
concurrence était de la rendre payante. Une partie de la doctrine proposait donc la contrepartie
financière.

3°) La contrepartie dans les autres contrats.

Beaucoup de partenaires économiques ont tenté d’obtenir cet avantage financière. Mais la Cour de
cassation a répondu non, il n’y a pas d’obligation d’une contrepartie financière pour être valable
hors du contrat de travail.

En revanche, lorsque la jurisprudence de la chambre sociale s’applique, elle est particulièrement


contraignante et lourde. Par une série d’arrêts, la chambre sociale a renforcé l’analyse de validité de
la clause de non concurrence au regard de la contrepartie financière :

D’abord parce qu’elle considère que toute contrepartie dérisoire est assimilable à une absence totale
de contrepartie. La clause de non concurrence est valide que si elle constitue donc une source de
revenus. Elle doit être fonction d’une proportion de la rémunération de l’ancien employeur. Souvent
pas en dessous de 10% de la rémunération annuelle, et certains conventions collectives fixent un
seuil.

4°) La présomption irréfragable de préjudice en l’absence de contrepartie financière.

Le respect d’une clause de non concurrence annulable faute de contrepartie financière lui cause
nécessairement un préjudice qu’il pourra faire réparer (Soc 11 janvier 2006). Donc celui qui la
respecte n’a pas à prouver l’existence d’un préjudice, il y a une présomption irréfragable de
préjudice. C’est fait pour éviter qu’un employeur inscrive une clause de non concurrence sans
contrepartie financière, le salarié pourra en demander paiement. Tout est fait pour inciter
l’employeur à réserver l’inscription d’une clause de non concurrence dans le contrat de travail aux
situations exceptionnelles ou limitées.

Cela demeure dû même si le salarié a retrouvé un emploi, s’il a un meilleur salaire, et quelque soit
la partie à l’origine du contrat de travail (émettons que le salarié démissionne ou commet une faute).

5°) Nullité de la clause abusive.

Dès lors qu’il y a un recours abusif à la clause de non concurrence, s’il n’y a pas d’intérêt légitime à
protéger ou s’il n’y a pas de contrepartie financière, la sanction c’est la nullité de la clause. Le
contrat de travail demeure, sauf la clause de non concurrence. On n’en révise pas le montant, la
durée, l’objet, elle est nulle.

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B°) La lutte contre le recours excessif à la clause de non concurrence.

1°) Le contrôle de proportionnalité de la clause.

Si on envisage l’excès car le recours à la clause est légitime mais on va se livrer à un contrôle de
proportionnalité. La mesure de protection doit être proportionnée au risque. Plus le risque est
important, plus l’interdiction portée par la clause de non concurrence peut être grande.

La clause de non concurrence doit être limitée dans son objet, le temps et l’espace mais uniquement
dans le contrat de travail (jurisprudence de 2002) ➢ il a vrillé le couz.

Le prof préfère envisager une exigence de proportionnalité (? = pareil non?). Quelques arrêts
valident une clause de non concurrence pas limitée à l’objet, le temps et l’espace. Mais elle doit être
proportionnelle. Selon lui, la formule de limitation dans l’objet, le temps et l’espace est tronquée car
elle laisserait croire que la clause est donc conforme ?

Il a fumé du crack le pauvre. On reprend : une clause peut être limitée aux trois conditions, mais
elle peut ne pas l’être suffisamment, ou au contraire trop et donc disproportionnée.

Le tout doit être proportionné au risque présenté par le débiteur : dans quel domaine est-il
dangereux ? À quel endroit est-il dangereux ?

La clause de non concurrence doit cependant permettre au débiteur de retrouver une activité
conforme à sa formation et ses compétences (Soc 4 mars 1970).

2°) Clause de non concurrence et droit de la concurrence.

L’article L134-14 du Code de commerce, concernant les agents commerciaux elle est limitée à deux
ans, au secteur géographique, au domaine. Ce sont des dispositions pus protectrices qui n’excluent
pas forcément le droit commun.

En outre, il faut comprendre que la clause de non concurrence, comme elle atteint un principe à
valeur constitutionnelle, ne peut recevoir qu’une interprétation stricte. À défaut de stipulation
précise, l’interprétation retenue par le juge sera souvent la plus favorable au débiteur, donc la moins
attentatoire à sa liberté du travail (Com 14 mars 2006). Dans cet arrêt, un réseau de franchise avec
des exclusivités territoriales concédées au franchisé. La clause de non concurrence ne visait pas le
site internet, donc le franchisé a fini par être autorisé à commercialiser sur internet sur d’autres
territoires, sans faire de ventes actives.

Une clause de non concurrence sur le fondement du droit des contrats peut interdire une
commercialisation par internet (attention pas en droit de la concurrence). Les clauses de non
concurrence sont soumises au grand droit de la concurrence. Elles peuvent avoir un effet
anticoncurrentiel car on interdirait à une partie de venir concurrence l’autre. l’Autorité de la
concurrence a déjà eu à envisager ces hypothèses et s’est livrée comme les juges du fond à une
analyse en deux temps (décision 17D451 21 juin 1997) :

- Elle recherche la justification du recours à la clause de non concurrence


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- Elle recherche les effets de la clause de non concurrence.

Selon l’Autorité, il ne peut y avoir de clause de non concurrence en l’absence d’un intérêt légitime
du cocontractant à préserver. Ensuite, l’atteinte doit être proportionnée à l’intérêt légitime à
protéger, mais l’intérêt en cause n’est plus celui du débiteur de la clause mais c’est le
fonctionnement du marché. L’Autorité de la concurrence se moque de la situation du débiteur, mais
elle va analyser en quoi la clause porte atteinte au jeu normal du marché et l’effet multiplicateur de
la clause qui va être insérée dans plusieurs contrats. Dans des arrêts, l’Autorité annule la clause.

En revanche, devant le juge de droit commun, s’il considère que la clause est par principe valide
mais que l’objet de l’interdiction est trop large (quant à l’activité interdite, quant au temps de
l’interdiction, quant à la zone interdite), il n’annule pas la clause, il l’a révise et donc modifie les
conditions en réduisant les interdictions (il n’augmente jamais).

3°) La recherche de solutions pratiques.

Les praticiens et opérateurs économiques ont cherché de nouveaux mécanismes pour continuer à
préserver leur activité en restreignant celle d’autrui. L’alternative est la suivante : soit ils
maintiennent la clause de non concurrence en réduisant la portée ; soit ils cherchent des alternatives
avec d’autres mécanismes qui cherchent à parvenir aux mêmes effets sans les mêmes
inconvénients :

- Clause de confidentialité
- Clause de non réafilliation.
- Promesse de porte fort.

§2) Les dérivés de la clause de non concurrence.

Elles sont attentatoires à la liberté, mais parfois moins que la clause de non concurrence.

A°) La clause de non-réaffiliation.

Par exemple, « la société s’interdit d’exploiter une ac vité commerciale concurrente sous une
enseigne ayant une notoriété na onale ou régionale, et à ne pas o rir à la vente des produits dont
les marques sont liés à ce e enseigne ».

La clause de non-réaffiliation se distingue de la clause de non concurrence pas un objet plus limité.
On peut considérer que dans un même contrat avec une clause de non concurrence et une clause de
non-réaffiliation, la clause de non concurrence peut être annulée et la clause de non-réaffiliation
maintenue (CAA Douai 15 octobre 2001 RJDA 2002). La clause de non-réaffiliation ne fait
qu’interdire une modalité de l’activité concurrente, en l’occurrence l’activité en réseau, donc elle est
plus douce.

L’activité n’est pas interdite, l’objet de la clause de non-réaffiliation est plus limité que celui de la
clause de non concurrence. Elle peut aussi être limitée dans le temps et l’espace. La clause de non-
réaffiliation, en revanche, la jurisprudence a considéré qu’elle devait aussi répondre, même avec

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tt
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ff
moins de rigueur, au principe de l’intérêt légitime que l’on trouve dans la clause de non
concurrence. Il va falloir légitimer cette clause, soit par un savoir-faire, une image de marque à
préserver. Dans les réseaux de distribution demeure la question du rattachement de la clientèle : à
personne ou aux deux. La jurisprudence a refusé de considérer que la clientèle appartenait
effectivement à une personne en particulier.

En outre, la clause de non-réaffiliation doit aussi être proportionnée à l’intérêt légitime qui est
invoqué. Le risque que l’ancien membre du réseau présente par rapport à l’ancien réseau, c’est celui
d’un détournement de clientèle par une perte de savoir-faire ou des comportements déloyaux
(dénigrement, confusion). C’est fréquent dans le cadre d’un départ d’un membre d’un réseau qui
maintient la confusion : s’il n’y a pas de clause de dépôt d’enseigne. Par exemple, un franchisé de
pizzeria qui arrive au terme de son contrat de franchise doit normalement déposer tous les signes du
contrat de franchise. Ça supposerait de repeindre le local, de tout changer etc. Souvent ça ne se fait
et il reste un risque de confusion. La clause de non-réaffiliation doit être proportionnée au risque du
débiteur. C’est donc la même exigence que dans le cadre d’une clause de non concurrence.

En principe, la clause de non-réaffiliation est moins attentatoire que la clause de non concurrence. Il
reste néanmoins que dans certaines hypothèses, l’effet de la clause de non-réaffiliation est identique
à celle de la clause de non concurrence. C’est l’hypothèse ou seule l’activité en réseau est une
activité économiquement viable. Par exemple, j’ai un supermarché, et je me mets sous enseigne. Le
client voit l’image de marque et vient pour une raison en particulier. Si je ne souhaite plus être lié à
cette enseigne, et m’affilier à une autre enseigne. La clause de non concurrence m’interdit purement
et simplement d’exercer la même activité. La clause de non-réaffiliation m’empêche de mettre ma
propre enseigne. Mais dans ce cas la, ça risque de casser l’activité car l’enseigne est un gage de
confiance de la clientèle, de plus le réseau permet un pouvoir de négociation avec les fournisseurs,
et donc la viabilité économique est tout autre. La clause de non concurrence a donc les mêmes effets
que la clause de non-réaffiliation dans ce cas, de ce fait la jurisprudence pourra l’assimiler à une
clause de non concurrence et lui donner le même régime.

B°) La clause de non-sollicitation.

On retrouve cette clause dans l’hypothèse d’un contrat de travail, mais avec des singularités. On en
distingue deux types :

- Clause de non-sollicitation nouvelle.


- Clause de non-sollicitation de clientèle.

1°) Clause de non-sollicitation de clientèle

Proche de la clause de non concurrence. Ça n’interdit pas l’activité concurrente, mais ça prohibe au
débiteur de solliciter la clientèle du créancier. En règle générale, la jurisprudence assimile cette
clause avec une clause de non concurrence (Soc 12 décembre 2002 n°98-45.939 ou 4 octobre 2007
n°06-41.975).

Les effets sont donc presque les mêmes que la clause de non concurrence. Certaines de ces clauses
sont plus douces : si la clientèle est déterminée de manière exhaustive, comme par exemple celle

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des avocats. On liste la clientèle du créancier et qu’il se réserve. C’est plus protecteur des débiteurs
de la clause, car ça aménage une obligation légale.

2°) Clause de non-sollicitation nouvelle.

C’est une clause qu’on retrouve dans les contrats de travail mais elle ne lie pas un employeur à un
employé. Elle va lier celui qui est le potentiel futur employeur. Dès lors qu’elle est inscrite dans un
contrat entre deux professionnels, elle ne lie pas le salarié et la jurisprudence de la chambre sociale
de la Cour de cassation ne s’applique pas. Dès lors, il n’y a pas de contrepartie financière exigée. Il
faut trouver qui peut employer le salarié.

Par exemple une entreprise effectue des prestations de services avec mise à disposition de
personnel. Et celui qui reçoit les employés propose à l’un de venir travailler chez lui. Il y a un
risque pour la société de prestation de perdre ses employés, elle fait donc rédiger une clause de non-
sollicitation de personnel dans le contrat de prestation de services : « les par es s’engagent à ne pas
solliciter, ni faire travailler, directement ou indirectement, tout collaborateur ou mandataire de
l’autre par e même si la sollicita on ini ale est formulée par le collaborateur, sauf accord
préalable écrit entre les par es ».

Ce qui est intéressant c’est de comprendre que des parties ont cherché à y échapper et qui ont
embauché les collaborateurs visés par la clause en question. Si la clause est licite, alors les sanctions
pleuvent contre l’entreprise qui a embauché en violation de la clause.

Le débiteur de cette obligation a déjà invoqué la nullité de la clause car elle était attentatoire à la
liberté du travail. Il s’agissait d’un contrat commercial, donc la chambre commerciale a été saisie.
Elle a répondu en deux temps :

- Elle a affirmé que seul le salarié peut se prévaloir du trouble qu’est susceptible de lui causer une
clause de non-sollicitation ne comportant pas de contrepartie financière (Com 10 mai 2006).

- Elle affirme que la clause ne constitue pas une clause de non concurrence, dont elle n’est ni une
variante, ni une précision de celle-ci (Com 11 juillet 2006).

La conséquence c’est que cette clause de non-sollicitation n’est pas soumise aux conditions de
validité de la clause de non concurrence. Cela veut dire que le salarié ni étant pas partie, une
contrepartie financière au profit du salarié n’est pas nécessaire. Cette clause n’est pas une clause de
non concurrence car elle interdit seulement au salarié de rejoindre un employeur en particulier.

Mais ce contrat restreint les droits d’un tiers. C’est la raison pour laquelle la chambre commerciale
(Com 10 mai 2006) considère que seul le salarié peut se prévaloir du trouble que cause une clause
de non-sollicitation, mais à ce jour aucun salarié n’est allé jusqu’en cassation pour cela.

C°) Clause de confidentialité.

C’est la clause la plus conciliante pour le débiteur, mais c’est aussi celle qui est la moins protectrice
du créancier. Cette clause de confidentialité se trouve sous plusieurs appellations : clause de secret,
de non divulgation ou de savoir-faire, know-how, non-disclosure agreement.
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La clause de secret est aussi une clause de ne pas faire mais qui plus précise que la clause de non
concurrence et la clause de non-réaffiliation. Le problème de cette clause, c’est que le simple fait
que le résultat qu’on a cherché a évité ne permet pas de caractériser le manquement. Il est simple de
comprendre le résultat souhaité, pas d’activité concurrence du débiteur, mais il est complexe de
savoir si l’information a été ou non transmise à la concurrence. Comme prouver le manquement du
débiteur ? Le simple fait que l’information réservée est connue de la concurrence ne suffit pas à
caractériser le manquement.

Il y a beaucoup de causes autres de révélation à la concurrence du secret. Donc pour prouver le


manquement du débiteur et obtenir indemnisation de sa part, il ne suffit pas de rapporter la preuve
que l’information a été transmise, mais il faut apporter la preuve que c’est bien le débiteur qui l’a
transmise donc c’est très complexe.

L’intérêt de la clause n’est pas de protéger, à titre certain, le créancier contre toute révélation. Mais
c’est plutôt une clause qui va permettre de réserver un secret et de déterminer dans l’entreprise ce
que elle-même considère comme fondamental et à préserver. La signature, par le créancier, de la
clause va lui permettre de reconnaitre qu’il veut protéger un savoir-faire, et ça permet d’établir, dans
le cadre d’un contentieux en concurrence déloyale, que l’information était une information réservée
pour le créancier de la clause. Il faut encore qu’il y ait un véritable savoir-faire ou une véritable
information.

Il ne faut pas que la clause interdise au débiteur d’exercer ses compétences (Com 11 février 2003).
Mais je peux interdire au débiteur d’exercer son savoir-faire.

On fait la différence entre le savoir commun et le savoir-faire, on distingue ce qui relève de


l’entreprise directement et qui se transmet que par l’entreprise, et ce qui relève du domaine public
ou de l’accessible.

Si le savoir-faire est singulier, la clause de confidentialité, simplement justifiable et peu attentatoire


à la liberté du commerce, permettra au débiteur d’avoir une activité concurrent mais permettra au
créancier de rappeler au débiteur que certaines informations sont protégées. Dans une action en
concurrence déloyale, il sera plus simple d’affirmer au juge que le débiteur a employé un savoir
réservé.

D°) La promesse de porte-fort.

Il faut envisager cela comme un complément des obligations de non-concurrence. C’est une atteinte
à l’effet relatif des contrats.

C’est le fait pour un promettant de se porter-fort pour l’engagement d’un tiers, sauf si le tiers ne
s’exécute pas et ainsi à devoir indemnisation au bénéficiaire de la promesse.

La personne dont on se porte-fort n’a rien promis. Le tiers n’est pas lié par la promesse du
promettant. Mais le promettant est tenu par sa promesse et doit indemnisation au bénéficiaire de la
promesse qui n’a pas été respectée, mais il ne doit qu’une indemnisation.

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L’intérêt de cette promesse, c’est qu’elle vient en complément d’une clause, comme une clause de
non concurrence, pour attraire des tiers dans l’obligation de non concurrence ou apporter au
créancier une garantie. Par exemple, j’achète des parts sociales sans inscrire de clause de non
concurrence. Puis je rachète d’autres parts et je prévois ici une clause de non concurrence pour que
le cédant ne concurrence pas la société dont j’ai acquis les parts. Mais alors comment me protéger
contre l’activité du premier ? En soumettant la cession à une promesse de porte-fort. S’il
concurrence, le cédant devra indemnisation.

Autre exemple : activité exercée à plusieurs dans un fonds de commerce, mais cédant unique. Celui
qui cède le fonds est seul tenu d’une obligation de non concurrence, pourtant les autres ont aussi
exploité le fonds, et ils pourraient s’installer juste à coté. L’intérêt de la promesse de porte-fort ça va
être de stipuler qu’outre le cédant sont tenus de ne pas faire concurrence les autres exploitants (ex :
l’épouse et les enfants).

Autre exemple : entre partenaires économiques, la promesse de porte-fort peut être intéressante pour
s’assurer que le débiteur va prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter la survenance du
dommage. On trouve cela dans les contrats de licence de savoir-faire ou des partenariats. Un savoir-
faire est soit partagé, soit transmis de l’un à l’autre. Le partenaire s’engage à préserver le savoir-
faire et à ne pas créer de société concurrente exploitant le savoir faire. Pour s’assurer que le salarié
de l’entreprise partenaire ne le fera pas non plus, alors il est intéressant d’inscrire dans le contrat
une promesse de porte-fort pour les salariés. L’employeur se porte-fort que les anciens salariés
n’utiliseront pas le savoir-faire. Ça a un double avantage :

- Si le salarié communique le savoir-faire ou l’exploite, alors le partenaire est indemnisé.

- Ça incite le partenaire à prendre les mesures nécessaires pour éviter la diffusion du savoir-faire
(donc clause de non concurrence dans les contrats des salariés qui vont avoir à connaitre le
savoir-faire + clause de secret + clause de porte-fort dans leurs contrats de travail).

§3) La mise en oeuvre de la clause de non concurrence.

On est dans la mise en oeuvre des obligations nées de la clause de non concurrence. Comme sa
formulation le laisse entendre, pour l’essentiel l’obligation de non concurrence relève d’une
obligation de ne pas faire.

Il n’est pas rare que la clause de non concurrence, directement ou non, soit assortie d’une
contrepartie et notamment une contrepartie financière. Dans ce cas, l’obligation de non concurrence
pèse sur le contractant ou l’ancien contractant, mais son cocontractant est tenu d’une obligation de
faire et plus précisément une obligation de verser une somme d’argent (en droit du travail). C’est
une condition de validité en droit du travail.

Il faut donc envisager l’hypothèse d’une activité concurrente par le débiteur de la clause, mais aussi
l’hypothèse du défaut de paiement de la contrepartie par le créancier.

En droit du travail c’est simple, si la contrepartie financière n’est pas versée, la sanction / c’est la
nullité de la clause de non concurrence. Mais attention, ce n’est pas la seule option à la disposition
du débiteur de la clause. Le défaut de versement de la contrepartie est un manquement à une
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obligation contractuelle et donc il va aboutir à différentes options mais essentiellement deux au
regard du droit des contrats :

Résolution du contrat pour manquement grave : la clause de non concurrence est une clause
accessoire, souvent pour la période postérieure au contrat donc généralement le manquement ne
justifie pas la résolution.

- L’exécution forcée : c’est le fait pour le débiteur de l’obligation de non concurrence qui, en
contrepartie a droit au versement d’une somme d’argent, d’exiger le paiement de cette somme.
On peut assigner le créancier devant le juge pour obtenir paiement. C’est intéressant en droit du
travail (Soc 19 février 1991 n°87-41.491).

- L’exception d’inexécution : le débiteur peut préférer l’exception d’inexécution et s’estimer


libéré de son engagement de ne pas concurrencer le créancier (Soc 3 octobre 1991 n°89-43.375).
La difficulté est que l’exception d’inexécution n’est pas de plein droit, elle ne peut être ordonnée
ou validée par le juge que si le manquement de l’employeur/créancier de la clause est
suffisamment grave pour justifier la suspension de ses obligations (Soc 26 mai 2010 n°08-43.105
: arrêt qui a semé le doute car après le départ du salarié de l’entreprise qui avait été dispensé
d’exécuter son préavis, le salarié avait entrepris une activité concurrente mais l’entreprise n’avait
pas versé la contrepartie financière. La Cour de cassation approuve une CA d’avoir apprécié la
gravité au regard du temps écoulé. La CA avait considéré que ce délai ne suffisait pas à libérer le
salarié de son obligation qu’il avait aussitôt méconnue en passant au service d’une entreprise
concurrente). Donc le défaut de paiement de la contrepartie peut justifier une exception
d’inexécution mais ce n’est qu’une possibilité. Si le manquement est grave, le salarié sera libéré.
S’il n’est pas suffisamment grave, il ne sera pas libéré. Cette jurisprudence nous apprend que la
gravité s’apprécie de manière relative, le manquement à l’obligation de contrepartie s’apprécie
dans la sphère post-contractuelle, au regard de la seule clause de non concurrence. Un retard de
paiement, selon la Cour, n’est pas nécessairement suffisamment grave, il faut une absence de
paiement. Il y a, de la part de la Cour de cassation, une volonté de laisser aux juges du fond tout
leur pouvoir d’appréciation. C’est eux qui établiront à partir de quand le retard de paiement vaut
en réalité absence de paiement. Il faut bien comprendre que le débiteur de la clause qui se pose la
question du respect de celle-ci face à une obligation réciproque, contrepartie réciproque, du
créancier, doit se poser la question de savoir s’il veut se libérer de la clause ou s’il veut paiement
de la contrepartie financière, auquel cas il sera tenu de respecter la clause de non concurrence
sous réserve qu’elle soit valide. En pratique, il y aura sans doute une situation différente : celle
du salarié parti à la concurrence et qui se défend en invoquant une absence de contrepartie.

Hors les contrats de travail, la question de la contrepartie ne se posera que si les parties ont stipulé
une contrepartie financière.

Le régime de la clause de non concurrence relève de deux autres questions :

A°) La caractérisation de la violation.

Il faudra d’abord déterminer le contenu de l’obligation.

1°) Le contenu de l’obligation de non concurrence.

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Il y a deux hypothèses :

- Soit on a rédigé parfaitement la clause de non concurrence (termes claires et précis) : il n’y a
pas lieu de l’interpréter, les juge sont tenus par la clause au risque de la dénaturation du contrat.

- Soit il y a des ambiguïtés : les juges vont avoir un pouvoir d’interprétation s’il y a des
ambiguïtés. Elles apparaissent souvent de l’objet de l’interdiction, donc pour l’activité en cause.
Plus rarement sur la durée ou l’espace. La jurisprudence a connu une évolution, s’il faut
interpréter, on peut trouver deux méthodes :

• Méthode téléologique/fonctionnelle : on sera dans le sens de l’intérêt du créancier de la clause.


On trouve cela dans des hypothèses où les juges cherchent à assurer la pleine efficacité de la
clause. Notamment sur des termes larges, visant une activité concurrente voir une activité
similaire. L’activité similaire ce n’est pas forcément l’activité concurrente, elle ne peut être
considérée comme un terme clair et précis.
Par exemple, je prends un fonds de commerce : je stipule que le cédant ne peut exercer
d’activité similaire pendant tant d’années et dans le secteur. Mais similaire c’est trop large, ça
ne définit par l’interdiction en cause.
Des arrêts vont chercher à protéger le créancier contre le risque présenté par le débiteur de la
clause. Dans la cession d’un fonds de commerce avec le risque de détournement de clientèle,
le juge va interpréter la clause pour qu’elle ne facilité pas la récupération par le cédant de la
clientèle qu’il est réputé avoir cédé (Com 23 avril 1985 n°83-15.631). La jurisprudence
évoquait une activité qui était indiscutablement de nature à créer une confusion dans l'esprit de
la clientèle et à la détourner au préjudice de l’acquéreur du fonds vendu.

• Méthode d’interprétation libérale : elle sera plus protectrice des intérêts du débiteur. Elle est
protectrice de la liberté du débiteur, mais elle est restrictive. La logique contemporaine voit la
liberté économique comme une liberté fondamentale, elle ne peut recevoir d’exception que
dans des conditions strictes. S’il y a une ambiguïté, elle ne peut être tranchée au préjudice du
bénéficiaire de cette liberté car ce serait porter atteinte encore plus à la liberté fondamentale.
C’est cette méthode qui est essentiellement retenue par les juges, on fait prévaloir la liberté du
débiteur (Soc 20 novembre 2013 n°12-20.074). Cette interprétation a été confortée par des
jurisprudences au visa de l’article 1190 du Code civil. Il pose les règles de l’interprétation du
contenu des stipulations contractuelles en présence d’une ambiguïté : il distingue le contrat de
gré à gré du contrat d’adhésion. Dans ces deux contrats, les deux règles d’interprétation sont :

• Gré à gré : l’interprétation se fait contre le créancier et en faveur du débiteur.

• Adhésion : l’interprétation se fait à l’encontre de celui qui a proposé le contrat.

Le prof est plus favorable à l’interprétation restrictive qui préserve la liberté des salariés. On trouve
parfois en jurisprudence des décisions contraires qui retiennent la conception téléologique avec
l’idée d’assurer l’efficacité de la clause. On est dans l’hypothèse d’une interprétation contre la
mauvaise foi du débiteur. Face à des débiteurs de mauvaise foi, qu’ils ont détourné la règle, la
jurisprudence est moins favorable (Soc 11 janvier 2017 n°15-20.780). L’arrêt est explicite de la
volonté des juges : « la sa sfac on e ec ve de l’intérêt du créancier passe par une protec on
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e cace contre la dangerosité poten elle du cédant (du fonds de commerce), laquelle se manifeste
souvent sous les formes les plus sournoises ».

Le principe c’est une conception restrictive, et donc s’agissant de la nature de l’activité interdite, on
a aucune extension. En revanche, s’agissant des moyens de cette concurrence on peut avoir une
interprétation du juge plus contraignante pour le débiteur. Donc si j’ai une formule large
d’interdiction d’exercer une activité concurrente de l’activité du cessionnaire, on aura une
interprétation stricte de l’objet si c’est précisé et donc protectrice du débiteur de la clause. On peut
concevoir l’interprétation avec la formule « sous quelque forme que ce soit ». Il existe même une
extension à l’activité des proches, alors même parfois que la clause ne précise pas l’activité directe
ou indirecte d’un proche.

Il y a des situations ou se pose la question de la l’interprétation de la clause et il faudra se poser ces


questions. L’appréciation de la violation de la clause relève de l’appréciation souveraine des juges
du fond. Ce sont eux qui devront déterminer s’il y a une activité concurrente ou pas. Ça n’est pas la
même chose que participer aux activité d’une entreprise concurrente et la jurisprudence le rappelle à
plusieurs titres.

2°) L’activité concurrente.

Il ne s’agit pas de savoir si le débiteur est partie à la concurrence, il faut s’interroger sur le fait de
savoir s’il est partie à la concurrence mais pour faire quoi ? Il peut partir à la concurrence sans
réaliser dans la concurrence une activité concurrence. Par exemple, dans l’hypothèse d’entreprises
avec plusieurs domaines d’activités, il se peut que le débiteur exercer dans tel domaine, et chez la
concurrence pour un autre domaine.

a) Concurrence réelle.

De la même manière, les juges sont libres de déqualifier, les précautions prises par les parties pour
écarter a priori la qualification d’entreprise concurrente ne lie pas les juges (Soc 20 novembre 2013
n°12-20.074). La Cour de cassation approuve la CA qui a examiné les nouvelles fonctions exercées
par l’intéressé dans l’entreprise, sans s’arrêter à leur dénomination, ni étendre le champ
d’application de la clause au delà de ces prévisions, et a relevé qu’elles étaient de même nature et
correspondaient à celles exercées par le salarié à titre d’ingénieur commercial. C’est la concurrence
réelle qui est prise en compte.

À l’inverse, la Cour de cassation a déjà cassé des arrêts pour manque de base légale au motif que
l’activité concurrente n’était pas établie. Concrètement, c’était des hypothèses où il était admis que
le débiteur avait intégré une entreprise concurrente mais il n’était pas établi qu’il y avait exercé une
activité concurrente. Ça vaut donc pour les entreprises complexes, celles qui exercent une multitude
d’activités ou de fonctions. C’est aussi l’hypothèse d’un salarié qui change de fonction.

Sur cette difficulté voir : Soc 18 décembre 1997 n°95-42.201. Donc il faut rechercher une réelle
situation de concurrence. La simple embauche par un fonds concurrent ne suffit pas à caractériser la
violation de la clause de non concurrence (Soc 12 mai 2004 n°02-40.490).

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b) Risque de concurrence future.

En revanche, un simple risque de concurrence peut suffire s’il y a identité d’activité. Il faut prouver
que le débiteur va se livrer à une concurrence effective mais pas forcément qu’il s’y est déjà livré.
C’est toutes les hypothèses d’un préjudice futur que les juges entendent empêcher.

c) Charge de la preuve.

La charge de la preuve de la violation appartient au créancier qui se prévaut de la clause de non


concurrence. Ça veut donc dire qu’il doit rapporter la preuve de la participation à l’activité
concurrence effective. On ne peut pas juste prouver le départ dans une autre société ou activité,
mais il faut bien démontrer l’activité concurrente et que c’est cette activité qu’exerce le débiteur.

B°) Les sanctions de la violation de la clause de non concurrence.

Les sanctions sont en théorie diverses. Il y a des sanctions générales et des particulières.

1°) Les sanctions spécifiques.

Relatives au droit du travail, si le salarié exerce une activité interdite par une clause de non
concurrence. Dans cette hypothèse, le salarié ne peut pas prétendre au paiement de la contrepartie
financière (Soc 5 mai 2004 n°01-46. 261). Ça veut dire que si l’employeur ne l’a pas encore versée,
le juge saisi pourrait avoir à trancher la question de savoir si ce défaut de paiement est suffisamment
tardif de manière à ce que ça tombe. S’il considère que le paiement n’est pas si tardif ou que le
salarié, avant qu’il soit possible à l’employeur de payer, s’est livré à une activité concurrente, alors
il n’a pas à verser la contrepartie. S’il l’a déjà versée, et que le salarié se livre à une activité
concurrente, l’employeur peut demander restitution de la contrepartie.

Au delà de ces hypothèses, les options pour l’employeur ou le créancier de la clause de non
concurrence :

2°) Sanctions générales.

Il peut invoquer la responsabilité contractuelle du débiteur. Il va pouvoir demander l’exécution


forcée aussi, le but étant d’obtenir l’exécution directe. Pourquoi pas aussi la résolution du contrat.

a) L’exécution par équivalent : responsabilité contractuelle.

Le créancier d’une obligation contractuelle peut obtenir du débiteur qui ne s’est pas exécuté des DI
qui sont la conséquence de l’inexécution. Ces dispositions générales figurent à l'article 1231-1 du
Code civil. Une question demeure : responsabilité contractuelle ou exécution en équivalent ? :

- Si responsabilité contractuelle : on indemnise du préjudice donc il faut un préjudice.

- Si exécution par équivalent : on est pas dans le cadre d'un préjudice mais d’une modalité
d’exécution de l’obligation. Il y aura paiement d’une indemnité même s’il n’y a pas de préjudice.
Pendant longtemps la Cour appliquait l’article 1145 ancien du Code civil qui énonçait que si
l’obligation est de ne pas faire, celui qui y contrevient doit des DI par le seul fait de la
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contravention. La Civ 1ère, au visa de cet article cassait un arrêt d’appel qui concernant la
situations de médecins qui avaient constitué une société d’exercice, les statuts prévoyant une
obligation de non concurrence post contractuelle, et un des médecins est parti et s’est installé à
400 m des locaux. La CA avait considéré que si la violation de la clause de non concurrence avait
constitué une faute susceptible d’engager la responsabilité contractuelle du médecin, aucun
préjudice consécutif n’était établi et la simple contravention à la clause ne saurait le constituer.
La CA a violé l’article du Code civil.

Les dispositions du Code civil ont été modifiées sans que l’article 1145 ne soit maintenu. L’article
1231-1 du Code civil est aujourd'hui la retranscription de l’interprétation restrictive de l’ancien
1145. À moins que l’inexécution soit définitive, les DI ne sont dûs que si le débiteur a
préalablement été mis en demeure de s’exécuter dans un délai raisonnable. Il ne reprend pas l’idée
d’une indemnisation systématique puisqu’il y a une mise en demeure. La jurisprudence a pu
considérer depuis 2018 que le cocontractant qui invoque un manquement contractuel de l’autre, doit
en outre établir le principe et le montant de son préjudice (Com 7 mai 2019 n°18-11.128).

Dans la clause de non concurrence avec l’obligation de ne pas faire entre les parties, le manquement
ne cause pas nécessairement un préjudice et donc il n’y aura pas nécessairement une indemnité
versée. Pour une large part, cette question est théorique car si l’article 1231-2 du Code civil dispose
que l’indemnité est fonction de la perte faite par la victime et du gain dont elle a été privée, c’est un
détournement de clientèle futur. On a toujours une difficulté à évaluer le montant de ce
détournement. La où la situation est hypocrite, c’est que la jurisprudence admet que dans le cadre de
la violation d’une clause de non concurrence, il existe un préjudice moral évalué de manière
forfaitaire (Com 15 mai 2012 n°11-10.278).

De ce flou théorique, il faut savoir se préserver en étant rédacteur de clauses explicites. Il est
intéressant d’insérer dans la clause de non concurrence une clause pénale prévoyant le montant
prévisible du préjudice dont souffrirait le créancier de la clause. La clause pénale permet de
déterminer à l’avance le montant de l’indemnité due par le débiteur d’une obligation contractuelle
dans l’hypothèse d’un manquement à celle-ci (enculé de merde avec ta définition).

Les clauses pénales sont licites et largement admises (Civ 1ère 30 janvier 2019 n°17-27.147). Le
montant de l’indemnité fixé n’a pas à être fonction du préjudice, il peut être fonction d’autres
critères pour renforcer l’effet comminatoire. Des clauses pénales vont être proportionnées au
paiement d’une somme réalisée (ex : un certain nombre de mois correspondant à la prestation).
Selon l’article 1231-5 du Code civil, le montant de la clause pénale peut cependant être révisé par le
juge si ce montant apparait manifestement excessif ou à l’inverse manifestement dérisoire (Com 27
septembre 2011 n°07-10.113), étant entendu que la Cour de cassation considère que le juge est libre
d’apprécier le montant de la révision de manière souveraine. Pour en justifier, il n’est pas nécessaire
qu’il fasse référence au montant du préjudice. Il n’a pas à motiver sa décision de révision, la Cour
de cassation considère que le montant n’est pas nécessairement égal à la réparation du préjudice
résultant de l’inexécution d’une clause contractuelle (Soc 13 décembre 2000 n°98-46.384).

Le juge peut avoir d’autres repères que le montant du préjudice. S’il révise il n’est pas nécessaire
qu’il révise à la hauteur du préjudice subi. S’il révise à la baisse, il pourra tenir compte des
conséquences manifestement excessives que la mise en oeuvre de la clause pénale pourrait avoir si

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la situation du débiteur (ex : cessation des paiements subséquente). Au contraire, il pourra
augmenter une clause pénale si elle n’est pas suffisamment dissuasive pour l’exécution du contrat.

Il n’est pas rare aussi d’avoir des décisions de justice qui condamnent au titre de la clause pénale et
à une indemnisation. Les deux peuvent se cumuler. Cette clause pénale est importante à stipuler car
elle a un effet comminatoire et incite de le débiteur à respecter la clause de non concurrence. Elle
rappelle un tarif au débiteur.

b) L’exécution forcée.

Il ne s’agit pas d’indemniser, mais de faire exécuter la prestation. C’est l'article 1222 du Code civil
qui prévoit cela. Il octroi au créancier d’une obligation de détruire ce qui a été fait et par exemple de
demander la fermeture d’un fonds de commerce ou la cessation d’une activité. Pour que cela soit
efficace, il convient de prendre la précaution d’assortir ou de demander que l’interdiction qui sera
faite au débiteur soit assortie d’une astreinte. On va demander au débiteur de fermer son fonds sous
peine d’une astreinte au delà de la date limite fixée.

Les juges sont tenus, dès que le créancier en fait la demande et qu’il y a violation, d’ordonner la
cessation de l’activité ou la fermeture du fonds. Dans un arrêt ancien (Com 20 janvier 1981
n°79-16.521), la Cour cassait un arrêt d’appel à propos d’une concurrence exercée par un ancien
salarié au motif que la convention liant les parties prévoyait une clause pénale, et dès lors le juge ne
pouvait prononcer que des DI. La Cour dit non et dit que le droit commun s’applique et donc le juge
est tenu, si le créancier lui en fait la demande, d’ordonner la cessation du comportement qui viole
une obligation de non concurrence.

c) Le sort de la clause de non concurrence en cas de résolution ou d’annulation du contrat.

Le Code civil prévoit des dispositions particulières dans l’hypothèse d’une résolution du contrat.
Pendant très longtemps, la jurisprudence a restreint la survivance des clauses au delà du contrat au
seules clauses qui ont pour objet l’inexécution du contrat et la procédure de contestation. Elle a, à
plusieurs reprises, considéré qu’une partie ne pouvait demander l’exécution d’aucune des
stipulations d’un contrat mis à néant même s’il s’agit de la clause de non concurrence. C’était
considéré comme singulier car l’objet de ces clauses est souvent de prévoir l’après contrat, donc le
contrat mis à néant pour l’avenir par exemple ou de manière rétroactive.

Mais l’ordonnance de 2016 a modifié les choses, l’article 1230 du Code civil dispose, s’agissant de
la résolution, que la résolution n’affecte ni les clauses relatives aux règlements des différents, ni
celles destinées à produire effet même en cas de résolution telles les clauses de confidentialité et de
non concurrence. Ces clauses, même en cas de conflit, subsistent même s’il y a anéantissement
rétroactif du contrat.

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Chapitre 3 : le DIP de la concurrence.

Le DIP de la concurrence est une formule qui relève du raccourci car selon dont il s’agit, ce sont les
règles de compétence et d’applicabilité des lois au contentieux de la concurrence. Il n’y a pas a
proprement parlé de règles spécifiques, générales, au DIP de la concurrence.

Il n’y a que très peu de règles substantielles internationales de concurrence. On en retrouvent


quelques unes, notamment pour les règles internationales d’organisation et d’ouverture des
marchés. L’organisation internationales c’est en particulier l’OMC qui gère cela, comme instituée
par les accords de Marrakech de 1994 (création de l’OMC). C’est la poursuite d’un ensemble de
conventions internationales dont le GATT en premier lieu.

Le GATT est institué en 1947, au sortir de la guerre l’économie est forte mais fragile, avec un poids
politique majeur des USA. Toutes les transactions commerciales se sont faites dans le sens des
USA. Les américains ont voulu assurer un nouvel ordre mondial (doctrine Monroe) et un grand
marché ouvert aux entreprises américaines, en particulier pour rentabiliser les ouvertures d’usines
durant la guerre. Ça a permis aux USA de sortir de la grande dépression.

L’ouverture des marchés va être mise en place. Sur la plan politique on va organiser l’ONU,
l’OMC, l’OMS etc. L’administration américaine a aussi développé l’idée d’une organisation
internationale du commerce (OIC). Cela se négocie à la Havane. Le Sénat américain refuse de
valider. Dès lors, l’idée d’une organisation internationale du commerce tombe à l’eau. Il n’en
ressort que le GATT (general agreement on tarif and trade). Il pose des positions tarifaires par
catégories de services et de produits. Les Etats parties au GATT s’accordent sur une limitation des
droits de douane. On commence par refuser des restrictions quantitatives et ensuite les restrictions
qualitatives (par type de produits ou services). Donc si un Etat supprime une restriction, il doit
l’accorder à toutes les parties au GATT.

En 1994, on commence à discuter de la possibilité d’une véritable organisation qui aurait un


pouvoir de règlement des conflits entre les parties contractantes. Ce règlement des conflits est très
limité. On est loin du système de règlement intégré de l’UE. Le contentieux Boeuf aux hormones en
Europe : l’UE décide d’interdire l’importation de viandes bovines et d’autres Etats autres que l’UE.
Les USA décident d’un embargo sur tout le boeuf de l’UE. l’Europe va donc procéder à des
contrôles sur le boeuf américain. S’en suit un contentieux devant l’organe de règlement des
différents de l’OMC qui finira par la condamnation de l’UE. Il faut comprendre que dans le système
de règlement des différents de l’OMC, il n’est jamais accordé que des mesures de compensation,
parfois qualifiées de mesures de rétorsions. Ce système ne fonctionne que sur un principe de bonne
volonté de la part des Etats. L’idée c’est qu’une fois qu’un Etat est sanctionné, les autres Etats
membres peuvent prendre des mesures de compensation pour convaincre l’Etat de revenir sur sa
décision, mais il n’y a pas d’amende, d’astreinte ou autre. Si un Etat refuse purement et simplement
de jouer le jeu, alors tout tombe à l’eau et c’est ce qui s’est produit avec l’administration Trump. Il a
refusé d'appliquer les mesures de l’OMC, et depuis les accords de l’OMC sont moribonds.

En droit de la concurrence, on trouve cependant des mesures qui s’appliquent encore, avec l’accord
ATPIC. Il a des répercussions sur tous les droits internes des parties contractantes et leur impose de
transposer en droit interne des principes qu’il contient. C’est la transposition des accords de l’union

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de Paris sur la propriété industrielle et intellectuelle pour lutter contre la concurrence déloyale. La
Chine a dû par exemple intégrer la concurrence déloyale dans ses lois.

En outre, beaucoup de contentieux sur les aides d’Etat, avec toutes les subventions par un Etat de
ses opérateurs économiques. Le principe est que les textes de l’OMC prohibent les subventions
directes ou indirectes aux exportations. Un domaine y a toujours échappé : celui des politiques
agricoles et produits agricoles, avec un réel contentieux entre les USA et l’Europe en
subventionnant. Les USA subventionnent l’exportation et l’UE subventionne la production pour
avoir des quantités produites. D’autres subventions sont accordées à certaines industries,
notamment en ce moment avec la question des subventions de l’aéronautique (contentieux Boeing -
Airbus).

À partir du moment ou Trump et son administration n’ont plus respecté les accords de l’OMC, il
n’y a plus d’avancés et de droit substantiel de la concurrence.

Mais il y a toujours des contentieux internationaux de droit de la concurrence. Mais ils ne sont plus
entre Etats, mais plutôt qui naissent de conflits de territorialité. Les règles de la concurrence sont
établies et fixées sur des territoires déterminées alors que les marchés s’internationalisent et ne
connaissent pas les limites des frontières. Cela pour deux raisons :

- Les entreprises importantes sont établies dans de nombreux Etats : on se pose la question de
l’échelle d’édiction de ces règles et des sanctions efficaces. On pense à la différence entre
l’appréciation de l’atteinte au marché selon que l’entreprise est établie sur le territoire de
l’autorité de contrôle ou sur un autre territoire. Dans l’affaire microsoft, l’entreprise a une
position dominante sur un marché, ça peut être positif pour les USA mais pas pour l’UE. En
Europe se pose toujours la question de savoir s’il faut s’autoriser à avoir des champions, donc
des entreprises dominantes sur un marché. Dans l’exemple Microsoft, le droit de la concurrence
américain se fout de savoir si microsoft a une position dominante en Europe.

- Le marché des entreprises s’internationalise du fait de l’économie digitale et numérique : en


matière de concurrence, se développe sur internet une capacité à dématérialiser le marché et donc
à contourner les règles de non concurrence contractuelles etc. Chacun peut avoir accès au marché
mondial. De ce fait, l’entreprise qui s’internationalise est susceptible de commettre des pratiques
sur plusieurs territoires (ex : concurrence déloyale, dénigrement…) et donc d’atteindre des
concurrents dans le monde entier. En matière de DIP de la concurrence, des questions complexes
se posent sur la compétence.

La règle de compétence.

La première question qui se pose en DIP de la concurrence c’est donc la règle de compétence. On se
demande donc quel est le tribunal compétent. Qu’est ce qu’on fait en cas de conflit de juridiction ?
On trouve cette question dans le contentieux public, privé et semi public ou privé.

Pour le grand droit de la concurrence.

C’est la question de la mise en oeuvre des règles du grand droit de la concurrence. Concrètement,
on va avoir des questions pratiques qui vont se poser notamment pour le pouvoir d’enquête. Une
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autorité d’un pays est limitée pour enquêter sur des territoires tiers, il faut obtenir la coopération des
autorités de l’autre pays, ce qui arrive très peu.

En matière de private enforcement, donc dans le contentieux privé, ça va être les conséquences des
PAC entre personnes de droit privé. C’est ce qu’on appelle les actions de suivi (follow on). Elles
suivent, ou sont concomitantes, à une procédure engagée devant une autorité nationale de contrôle.
Ça va être la question du droit a indemnisation des victimes des PAC.

Par exemple, une ou deux entreprises dans l’UE ont commis des PAC. L’autorité de contrôle
sanctionne. Comment les victimes obtiennent indemnisation ? Elles ouvrent des procédures privées
(follow on) mais on se demande toujours devant quelle juridiction et quelle est la loi applicable ?.
Ce contentieux se développe dans les PAC.

On se pose donc deux questions en DIP :

- Conflit de juridictions
- Conflit de lois

Les deux questions sont distinctes. On va chercher à la fois à obtenir du juge qu’il se déclare
compétent et qu’il applique notre loi.

Sec on 1 : Con it de juridic ons.

3 corps de lois sont applicables :

- Règlement Bruxelles I BIS de 2012 qui remplace Bruxelles I.


- Convention de la Haye
- Règles de conflit internes (42 et suivants du Code de procédure civile).

On se demande donc ce qu’on applique et ce qu’on met en oeuvre. Le DIP commun ne s’applique
qu’à titre subsidiaire, donc quand aucune convention multilatérale ou bi-latérale n’est applicable.
Dans le droit de la concurrence, il n’y a que des conventions multilatérales (Bruxelles et la Haye).

L’applicabilité d’une loi de police n’est pas, par principe, un chef de compétence du juge français.
Le simple fait qu’une loi de police soit applicable au contentieux n’implique pas en droit interne ou
européen, la compétence du juge de l’Etat dont relève cette loi de police (Civ 1ère 22 octobre 2008
n°07-15.823).

On se demande donc s’il y a une volonté des parties (implicite après coup, ou expresse a priori).
Implicite c’est je me présente devant la juridiction même si elle n’est pas compétente, alors que
expresse c’est la clause qui stipule la compétence. Si rien n’est stipulé c’est bien sur l’application
des dispositions générales.

§1) La prorogation volontaire de compétences.

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Hypothèse ou le défendeur ne s’oppose pas à la compétence du juge saisi alors que pourtant il
pourrait s’y opposer. En la matière, dans les règles de droit interne du règlement Bruxelles I Bis de
2012, article 26, il est admis la prorogation volontaire de compétences (CJUE 17 mars 2016 affaire
C175-15) et en application de l’article 74 du Code de procédure civile (Civ 1ère 7 juillet 1981).

Ce qui est admis c’est le fait de se présenter et de conclure sans soulever l’incompétence. Si le
défendeur ne se présente pas, ça pose problème car on ne peut pas comprendre une prorogation
tacite de compétence. On conseil donc, dans l’hypothèse d’un contentieux ou le demandeur saisit
une juridiction étrangère qu’on estime incompétente, c’est de saisir la juridiction compétente, ou se
présenter devant la juridiction saisie en soulevant une exception d’incompétence, mais pas de faire
silence et de ne pas se présenter.

§2) La clause d’élection de for (attributive de compétence).

Le règlement Bruxelles I Bis n’est pas toujours applicable. Si une clause attribue compétence à une
juridiction, et que le contentieux peut être rattaché à un Etat membre de l’UE, alors il n’est pas
nécessairement applicable et tout dépendra de la convention de la Haye.

Si l’une des parties au litige réside dans un Etat partie à la convention de la Haye, mais pas membre
de l’UE, alors c’est cette convention qui s’applique car l’UE est signataire de la convention qui
prime sur le règlement européen.

Si les deux parties au litige résident dans un Etat partie à la convention de la Haye, et membres de
l’UE, alors c’est le règlement Bruxelles I bis qui s’applique.

Si l’une des parties réside dans un Etat membre et que les autres parties résident hors UE mais dans
un Etat non membre de la Haye, le règlement Bruxelles I bis s’applique aussi.

Enfin, quelque soit les qualités des parties, si la clause désigne les juridictions d’un Etat tiers à
l’UE, le règlement Bruxelles I Bis ne s’applique pas.

§3) Le lieux de résidence des parties.

Il est donc important de déterminer les lieux de résidence des parties. On a des règles spéciales pour
cela.

S’il n’y a pas d’élection du for, I Bis s’applique, aussi le droit commun et la Haye, le principe c’est
que la juridiction compétente est celle du domicile du défendeur.

Si le règlement n’est pas applicable, l’article 42 du Code de procédure civile qui s’applique et qui
pose aussi ce principe, sauf exceptions.

Il faut intégrer une nuance, les règles étendues du droit interne posent simplement le principe.
Bruxelles I Bis, pour certains contentieux il y a des options. La partie à l’initiative de l’action va
pouvoir opter pour d’autres juridictions. C’est la formule du lieu du dommage survenu ou
susceptible de survenir.
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Pour autant le principe du domicile du défendeur est le principe ouvert au demandeur dans toutes
hypothèses.

Il faut donc déterminer quel est le domicile. On distingue selon que le défendeur est une personne
physique ou une personne morale. Le problème c’est que I Bis et La Haye ne donnent pas
d’information sur les personnes physiques.

I / Personne physique.

Il revient au juge saisi de déterminer quel est le domicile de la personne physique. Comme il n’y a
pas de dispositions internationales, il va pouvoir le faire qu’en vertu de ses lois nationales. Cela peut
paraitre simple, mais c’est parfois complexe notamment s’il y a des personnes physiques qui ont
plusieurs domiciles.

II / Personne morale.

A°) Règles générales.

On trouve des éléments. Le règlement Bruxelles I bis dans ses définitions préliminaires, donne des
éléments soumis à interprétation du juge et donc potentiellement des divergences.

Les sociétés et personnes morales sont domiciliés :


- À leur siège statutaire (social)
- La résidence peut être l’administration centrale de la société
- La résidence de leur établissement principal

S’il y a un siège social et pas plusieurs établissements, alors ça sera le siège social dans l’Etat ou
elle sera immatriculée. Il est des hypothèses ou plus que le siège social, le siège réel peut être
considéré comme le domicile de cette personne morale. Donc concrètement la juridiction nationale
va être tentée de se déclarer compétente, même si le siège social est établit à l’étranger, car
l’entreprise a sur le territoire national un établissement principal.

Attention car la Civ 1ère 22 février 2017 n°16-12.408 a considéré que le principal établissement
doit être entendu de manière stricte. Ça n’est pas un établissement, mais bien le principal. Le seul
fait que la personne morale ait un établissement en France et qu’elle y soit immatriculé ne suffit pas
à caractériser l’existence d’un établissement principal. Ce qui définit l’établissement principal c’est
la question de l’activité de la société. Le principal de l’activité est réalisé par cet établissement
(+50%).

En l’occurrence, l’arrêt de la Cour de cassation visait un contentieux sur une indemnisation de


transports de professionnels. Deux personnes professionnelles avaient réservées des biais d’avion
sur AirCanada. Elles avaient souffert de retard et on voulait savoir la juridiction compétente pour
indemniser : France ou Canada. La Cour de cassation relève que la société AirCanada a son
établissement principal en France car elle exerce son activité principalement au Canada.

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Au titre des dispositions générales des règles de compétence, il faut retenir le principe de la possible
extension de la procédure aux co-défendeurs. L'article 8 de Bruxelles I Bis et l’article 42 aliéna 2 du
Code de procédure civile prévoient que la compétence de la juridiction peut être étendue à l’égard
des co-défendeurs établis dans d’autres Etats.

Pour connaitre le droit applicable, on distingue selon que les co-défendeurs sont établis sur le
territoire de l’UE (Bruxelles I bis qui s’applique : CJUE 11 avril 2013 C645-11) et s’ils ne sont pas
établis dans l’UE, le juge français saisi fera application de l’article 42 du Code de procédure civile
qui permettra la même chose. Cette extension n’est possible que si c’est bien le juge français qui est
compétent au regard de Bruxelles I Bis. Si le règlement n’est pas applicable car les co-défendeurs
ne sont pas dans un Etat membre, ce sont les règles de conflit interne.

Il existe des règles spécifiques qui vont s‘appliquer en matière de concurrence, en vertu des articles
7 et suivants de Bruxelles I BIS. Deux hypothèses :

- Matière contractuelle : le défendeur peut privilégier le lieu d’exécution de l’obligation qui sert
de base à la demande. Bruxelles I BIS distingue entre la vente et les prestations de services. Pour
la vente c’est le lieu de livraison du bien. Pour les services, c’est le lieu ou le service est fourni.
Si c’est un contrat mixte, le juge européen cherche à qualifier l’obligation essentielle, donc qui
économiquement est la plus importante en général.

- Matière extracontractuelle/délictuelle : le juridiction compétente est celle du ressort du lieu ou


le fait dommageable s’est produit ou risque de se produire. On est dans les hypothèses d’actions
en cessation et d’indemnisation. Il y a une difficulté, les délits complexes : il se peut que le
dommage se produise sur un marché dématérialisé, sans qu’il soit circonscrit de manière précise.
Dans certains hypothèses on distingue la compétence des juridictions du lieu de l’acte, ou les
juridictions du lieu du dommage (CJUE 28 janvier 2015 C375-13 Kolassa). Si le dommage est
susceptible d’être ressenti dans plusieurs Etats membres ou autres Etats, on distingue encore
l’acte générateur et le lieu du dommage. L’acte générateur est localisé dans le lieu de
l’établissement de la personne dont la responsabilité est engagée. En matière de PAC, on retrouve
cela, mais une nuance s’il s’agit d’une entente ou d’un abus de position dominante, car l’entente
suppose plusieurs acteurs alors que l’autre non.

• Entente : lieu de conclusion de l’entente jugé déterminante par la CJUE (CJUE 21 mai 2015
C352-13 CDC Hydrogen). Cette jurisprudence pose problème car on ne peut pas
nécessairement déterminer le lieu de la conclusion de l’entente. Si c’est un contrat signé entre
les parties avec le lieu alors c’est simple, mais la plupart du temps ce n’est pas un contrat, c’est
dématérialisé, non formalisé et donc c’est complexe. La Cour retient dans cet arrêt que la
juridiction compétente est celle du lieu ou l’entente concernée a été définitivement conclue ou
le cas échéant du lieu ou un arrangement spécifique et identifiable, comme étant à lui seul
l’évènement causal du dommage allégué, a été pris.

• Abus de position dominante : CJUE 5 juillet 2018 C27-17 Lituanian Airlines : l’acte
générateur du dommage peut être localisé soit au lieu de conclusion de l’accord si la pratique
litigieuse s’entend comme une entente contraire au 101 TFUE, soit au lieu où les prix
prédateurs ont été proposés et appliqués s’il s’agit d’un abus au sens de l'article 102 TFUE.
C’est donc le lieu de mise en oeuvre de la pratique, et non pas le lieu de prise de décision qui

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importe. On est plus prêt du lieu de détermination du marché affecté, du lieu où le dommage a
été subi, on est plus conforme au droit de la concurrence.

Plusieurs arrêts français ont retenu le lieu de survenance du dommage pour la juridiction
compétente. C’est un arrêt de la Civ 1ère, 1er février 2012 n°10-24.843.

Il faut bien distinguer le lieu de survenance du dommage et le lieu d’affectation du marché. Ce n’est
pas le lieu du préjudice personnel subit par les victimes (CJUE arrêt Marinarie 19 septembre 1995
C364-93). Le fait dommageable « doit être interprété en ce sens qu’il ne vise pas le lieu où la
victime prétend avoir subi un préjudice patrimonial consécutif à un dommage initial survenu et subi
par elle, dans un autre Etat contractant ».

Plus récemment (CJUE 5 juillet 2018 C27-17), ce n’est pas le lieu d’affectation patrimoniale mais
le lieu de la matérialisation d’un manque à gagner consistant en une perte de ventes, c'est-à-dire le
lieu du marché affecté par ledit comportement.

Le lieu de l’acte on le trouve surtout pour des PAC, et le lieu du dommage plutôt dans des
hypothèses de concurrence déloyale.

Pour ces derniers arrêts sur le dommage, c’est bien le lieu du marché affecté et pas forcément le lieu
de dommage de la victime.

Ex : société espagnole qui opère en France, avec aussi une société allemande. Société allemande
accusée de commettre des actes déloyaux (dénigrent qui fait baisser les ventes) sur marché français.
Le lieu du dommage patrimonial personnel c’est l’Espagne car c’est la où je perçois mes revenus,
mais le lieu du dommage au marché c’est la France car c’est la où je vais avoir des pertes de ventes,
donc le juge compétent est le juge français.

B°) Les ventes en ligne.

Les choses se complexifient lorsqu’il y a plusieurs territoires impacté notamment depuis internet.
En droit de la concurrence, certains demandent des règles spéciales pour les ventes électroniques
sur plusieurs marchés. Lorsque des dommages concurrentiels sont commis en ligne, ils peuvent
affecter plusieurs marchés, et la détermination de la juridiction compétente est plus complexe :

Une première règle de l’accessibilité du site avait été posée. On se demandait d’où le site était
accessible, depuis quel territoire. S’il était accessible en France, alors on pouvait considérer que la
pratique était commise en France et donc compétence du juge français. Mais cette règle est peu
efficace car les sites ne se limitent pas à un pays et à une langue. Les systèmes intégrés de
traduction permettent de généraliser les traductions des offres. Dès lors, le site internet n’est plus
uniquement accessible aux francophones, mais sur l’ensemble du monde.

Il va alors falloir généraliser la problématique et se poser la question du marché affecté et de la


règle pertinente de compétence. En ce sens, CJUE 21 décembre 2016 C618-15, qui traite
d’Amazon. Amazon était accusé de faire de la revente hors réseau et d’être un facilitateur de la
vente hors réseau. La question qui se posait c’était la juridiction compétente car cette revente se
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faisait dans plusieurs pays. La CJUE considère que l’article 5.3 du règlement Bruxelles I (pas bis
mais maintenant c’est 7 Bruxelles I BIS) doit être interprété en ce sens que le lieu ou le dommage
s’est produit doit être le territoire de l’Etat membre qui protège ladite interdiction de vente au
moyen de l’action en question, territoire sur lequel le demandeur prétend avoir subi une réduction
de ses ventes. La chambre commerciale (Com 5 juillet 2017 n°14-16.637) était incompétente en
l’espèce car le site de distribution du produit ne visait pas le public de France.

On trouve la règle de l’accessibilité, mais la Cour de cassation nous dit qu’en réalité les demandeurs
demandaient application de règles d’autres Etats membres et donc le dommage résulte de la
violation de ces règles. (Incompréhensible sale fdp).

La difficulté est encore plus grande si les règles en question sont des règles du droit de l’Union, qui
intègrent pleinement le droit interne des Etats membres car ici, il y a violation potentielle des règles
internes de plusieurs Etats : soit le juge retiendrait une option et la compétence possible de chaque
Etat membre (donc la victime déterminerait la juridiction compétente), soit il faudrait de nouveaux
éléments pour trancher le litige.

Sec on 2 : Le con it de lois.

On entend ça au sens large, le système légal applicable, ce qui inclu la loi et l’interprétation possible
qui peut être retenue de celle-ci. C’est donc le droit applicable et la question de savoir qu’elles sont
les dispositions légales que le juge saisi devra appliquer.

S’il y a un élément d’extranéité, il y a de fortes chances pour que le juge saisi applique son propre
système légal, mais si on distingue car il y a des hypothèses dans lesquelles le juge pourrait être
contraint d’appliquer la loi étrangère. La question classique du droit applicable permet de nous
poser 3 sous questions : les lois de police, la règle de conflit en matière extracontractuelle et en
matière contractuelle. Par le jeu des règlements européens et notamment de Rome II, ça s’applique
à tout ce qui n’est pas contractuel.

S’il y a loi de police, c’est cette loi qui indépendamment de la règle de conflit trouvera à
s’appliquer.

I / Les lois de police.

Rome I et II considèrent les lois de police. Rome I article 9§1 en donne une définition : « Une loi de
police est une disposi on impéra ve dont le respect est jugé crucial par un pays pour la sauvegarde
de ses intérêts publics, tels que son organisa on poli que, sociale ou économique, au point d'en
exiger l'applica on à toute situa on entrant dans son champ d'applica on, quelle que soit par
ailleurs la loi applicable au contrat d'après le présent règlement ».

La loi de police échappe aux règles de compétence, elle prime, et s’applique en amont (non jure la
vie de ta mère). Elle se distingue par la volonté de l’Etat membre pour la sauvegarde de ses intérêts.

On trouve deux hypothèses :

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- En matière économique avec une similarité dans tous les Etats membres : les PAC sont
prévus par le droit de l’UE. Mais pour les PRC on trouve des règles particulières et ces pratiques
sont considérées comme une spécificité française. Dès lors si la loi n’existe qu’en France, la
question se pose de savoir si la loi française est une loi de police. Pas de réponse directe donnée
par les juridictions françaises pour les PRC. On a des solutions pour les PAC (CA Paris 19 mai
1993).

On considère dans le droit de l’UE que la loi de police n’est pas la directive car elle n’est pas
directement applicable, ça ne pourrait être qu’un règlement ou une décision, et donc ce qui pourrait
être considéré comme un loi de police c’est les lois nationales de transposition (CJUE 9 novembre
2000 affaire C380-98 Ingmar).

Pour le reste, l’ensemble de la doctrine considère que les PRC pourraient être considérées comme
des lois de police. Un arrêt qui permet de l’envisager : CJUE 9 novembre 2000 affaire C380-98
Ingmar et 16 février 2017 C507-15 Agro foreign trade : admet que la loi Belge de transposition
d’une directive sur les agents commerciaux écarte de son champ d’application les agents établis en
Turquie. On avait un élément d’extranéité. Question était posée de savoir si loi Belge pourrait être
considérée comme loi de police : CJ répond en deux temps :
- Oui ça peut une loi de police s’agissant d’une PRC
- Critère spatial : marché affecté n’est pas le Belge, et donc elle valide la position Belge qui
refusait d’appliquer le droit belge à une situation turque.

On en déduit que la loi de police ne trouve application que pour autant que le marché affecté est
celui de la loi de police en question. Dès lors, une loi de police française ne pourrait s’imposer au
juge dans la matière économique que si le marché affecté par la pratique est bien le marché français.

La jurisprudence française et le législateur lui-même ont une position incertaine. Ex : loi du 30


octobre 2018 Egalim 1 : prohibition de certaines méthodes de vente etc… le sénat avait pour
certaines dispositions expressément disposé que la loi en question était une loi de police. On avait
une précision du CA de la loi de police : la loi égalim devait s’appliquer à tout contrat visant à
l’approvisionnement pour la revente sur le territoire français. Si on avait un distributeur français
s’approvisionnait auprès d’un fournisseur étranger alors la loi aurait dû s’appliquer. Mais
l’assemblée nationale a retiré cette disposition de la loi, donc elle ne serait plus une loi de police.
On pourrait donc penser que les lois en matière de PRC échappent à la qualification de loi de police.

1) En matière contractuelle.

Le règlement Rome I va permettre au juge de faire application de la loi de police même si la règle
générale de compétence désigne une autre loi. On distingue selon que la loi en question est celle du
for ou selon si elle ne l’est pas.

- Loi de police du for : loi nationale de la juridiction compétente.


- Loi de police étrangère : loi d’un autre Etat qui considérée dans cet Etat comme une loi de
police. Le juge n’est pas tenu dans ce cas pour faire application de la loi étrangère dans la mesure
ou cette loi de police rend l’exécution du contrat illégale.

2) En matière extracontractuelle.

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La règle de conflit correspond normalement à la loi de police car c’est le marché affecté.

II / Matière extracontractuelle.

C’est le règlement Rome II qui s’applique. La particularité de Rome II c’est qu’à coté de la règle de
conflit générale, il y a une règle de conflit spéciale notamment concernant le contentieux de la
concurrence déloyale et des actes restrictifs de concurrence.

La règle spéciale figure à l’article 6 du règlement : elle est impérative. Elle s’impose au juge et en
contentieux, la Cour de cassation a déjà censuré un arrêt d’appel qui en matière de concurrence
déloyale n’avait pas fait application du règlement (Civ 1ère 26 mai 2021 n°19-15.102). Cet article
vise la concurrence déloyale et les actes restreignants la concurrence. « La loi applicable à une
obliga on non contractuelle résultant d'un acte de concurrence déloyale est celle du pays sur le
territoire duquel les rela ons de concurrence ou les intérêts collec fs des consommateurs sont
a ectés ou suscep bles de l'être. ».

Mais on trouve des exceptions particulières :


- §2 : « Lorsqu'un acte de concurrence déloyale a ecte exclusivement les intérêts d'un concurrent
déterminé, l'ar cle 4 est applicable » : l'article 4 c’est le principe général.

- §3 : « La loi applicable à une obliga on non contractuelle résultant d'un acte restreignant la
concurrence est celle du pays dans lequel le marché est a ecté ou suscep ble de l’être ».

- Et « Lorsque le marché est a ecté ou suscep ble de l'être dans plus d'un pays, le demandeur en
répara on qui intente l'ac on devant la juridic on du domicile du défendeur peut choisir de
fonder sa demande sur la loi de la juridic on saisie (loi du for) […] Lorsque le demandeur,
conformément aux règles applicables en ma ère de compétence judiciaire, cite plusieurs
défendeurs devant ce e juridic on, il peut uniquement choisir de fonder sa demande sur la loi
de ce e juridic on si l'acte restreignant la concurrence auquel se rapporte l'ac on intentée
contre chacun de ces défendeurs a ecte également de manière directe et substan elle le
marché de l'État membre de ce e juridic on ».

- §4 : vise une interdiction de déroger à la loi applicable par la volonté des parties : « Il ne peut
être dérogé à la loi applicable en vertu du présent ar cle par un accord tel que men onné à
l'ar cle 14 ».

La notion de concurrence déloyale ou d’acte restreignant la concurrence doit être entendue de


manière large. La notion est autonome de l’expression de concurrence déloyale au sens interne,
donc trouve ce concept en matière de manquements économiques qui viendraient affecter le
marché. On y inclut les pratiques commerciales déloyales (dénigrements, confusions, pratiques
déloyales à l’égard du consommateur, manquements à la loi).

On va intégrer tout comportement déloyal ou contraire à la loi susceptible d’affecter le marché (ex :
des manquements aux règles de protection des consommateurs, fait de ne pas respecter le droit
interne de la consommation est un acte déloyal : CJUE 28 juillet 2016 C191-15 Amazon : clauses
abusives contraires au droit de la consommation).

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On inclut donc toutes les PAC, la déloyauté, et les PRC sous réserve que ça ne soit pas des lois de
police.

L’article 6 dispose qu’est applicable la loi du pays ou les relations de concurrence, les intérêts
collectifs de consommateurs sont affectés ou susceptibles de l’être. C’est donc le marché affecté que
l’on prend en compte et ce n’est pas le lieu du fait générateur mais bien le territoire sur lequel le fait
générateur produit effets. On peut avoir un manquement sur un territoire A mais qui a des autres
effets sur un territoire B. C’est logique car ce marché affecté correspond au lieu de survenance du
dommage et donc à la règle générale. Ça n’est pas le lieu du préjudice mais le lieu de survenance du
dommage.

Attention la désignation de l’article 6 prévoit une règle exclusive, impératives. Le §4 de cet article
impose qu’on ne puisse pas déroger à la règle.

Il y a des exceptions prévues au §2 et 3 :

- Le 2 envisage l’hypothèse ou le préjudice survient ou risque de survenir en affectant les intérêts


d’un concurrent déterminé. Dans les hypothèses c’est le lieu de survenance du dommage pour le
concurrent déterminé. Ça a donné lieu à une interprétation difficile car si on a un marché affecté
mais un seul concurrent visé qui n’est pas établit dans ce marché, est ce que cette signifie qu’on
ne prend plus la règle du marché affecté mais la règle de l’Etat dans lequel est installé le
concurrent victime de la pratique ? La Cour de cassation chambre commerciale avait refusé de
faire jouer l'article 6 §2 approuvant les juges du fond qui avaient considéré que si un seul
concurrent avait été affecté par la pratique, le marché affecté n’était pas celui du territoire sur
lequel le concurrent était établi.
La Cour de cassation a été très critiquée car elle prive de tout effet le §2 de l’article 6. Un autre
arrêt de la Cour (Com 8 novembre 2007 n°16-10.850). Pour le juge interne français, le §2 a une
portée limitée.

- Il reste l’exception visée au §3 : s’il y a restriction de la concurrence, c'est-à-dire limitation


même d’avoir une activité concurrente, il faudra prévoir explicitement la loi applicable du
marché atteint. Le b) est différent et vise l’hypothèse ou plusieurs marchés sont affectés ou
susceptibles de l’être. Le choix de la juridiction compétente va avoir une incidence sur la loi
applicable. Rome II permet de demander application de la loi de la juridiction saisie. Dès lors, le
juge saisi fera application de sa propre loi. Il y a des conditions d’application du texte :
• La juridiction saisie doit être celle du défendeur
• Il faut que le marché du juge saisi soit parmi ceux qui sont affectés de manière directe par la
restriction en cause.
Ce n’est que dans ces conditions qu’on pourra demander application de cette loi. Donc si je suis
français et que j’ai saisi une juridiction allemande en matière de concurrence. Dans quelles
hypothèses je vais pouvoir demander la loi allemande ? Compétence générale = marché affecté =
marché allemand. Mais si marché affecté = marché français , je demanderais à l’allemand
d’appliquer le droit français.
Si je demande à l’allemand de poursuivre pour plusieurs marchés affectés, le juge allemand ne
pourra appliquer sa loi que si les consommateurs allemands ont été atteints par l’acte déloyal.

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III / En matière contractuelle.

C’est le règlement Rome I. Étant entendu que celui de 2008 ne pose pas de règles spéciales en
matière de concurrence mais des règles spéciales en matière de contrat de travail. Il y a un principe
et une exception en droit du travail ce qui nous intéresse pour les clauses de non concurrence par
exemple :

- Le principe : les parties peuvent choisir la loi applicable aux relations contractuelles (loi de
l’autonomie) en partie ou totalement. On peut avoir un démembrement de la règle de conflit dans
le contrat.

- L’exception : à défaut de choix, on va considérer le lieu de rattachement du contrat : Débiteur de


la prestation caractéristique. Pour le contrat de vente c’est la loi du pays de résidence du vendeur,
pour la prestation de service c’est le lieu de celui qui exécute la prestation. Pour le contrat de
franchise ou de distribution c’est la loi de résidence du franchisé.

Il y a des règles spécifiques fixées à l’article 8 du règlement. Il pose une limite à la liberté
contractuelle, c’est le §1 qui pose le contrat individuel de travail est régit par la loi choisie par les
parties. Ce ne choix ne peut avoir pour effet de priver le travailleur de la protection que lui assure
les dispositions auxquelles il ne peut être dérogé en vertu de la loi nationale qui aurait été applicable
selon les §2 §3 §4. La liberté de choix de la loi applicable est possible que si elle ne déroge pas aux
solutions de la loi désignée par les articules suivants et qui sont impératifs.

§2) à défaut de choix par les parties, le contrat de travail est régi par la loi du pays dans lequel ou, à
défaut, à partir duquel le travailleur, en exécution du contrat, accomplit habituellement son travail.
Donc c’est le lieu d’exécution du contrat, présence physique du travailleur pour l’exécution du
contrat. Le pays dans lequel le travail est habituellement accompli n'est pas réputé changer lorsque
le travailleur accomplit son travail de façon temporaire dans un autre pays.

Donc si le travailleur exerce son contrat à titre exceptionnel dans un autre Etat, on reste sur la règle
de l’habitude. Si la loi applicable ne peut être déterminée sur la base du paragraphe 2, le contrat est
régi par la loi du pays dans lequel est situé l'établissement qui a embauché le travailleur. S'il résulte
de l'ensemble des circonstances que le contrat présente des liens plus étroits avec un autre pays que
celui visé au paragraphe 2 ou 3, la loi de cet autre pays s'applique.

Matière sans TD exam : 4 questions de 5 points chacune, deux de destours et deux du fou. Faut
répondre aux 4.

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