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La réunion budgétaire annuelle d’une grande banque belge venait de se terminer mais, à voir

l’expression de leur visage, il était évident que Théo van Bock et Léo van Memeke étaient très perturbés
par ce qu’il en était sorti. Théo avait la responsabilité du service des prêts et Léo était directeur du
personnel. En sortant de la réunion, Léo lança : « Il nous prend pour qui, pour des surhommes ? »
« Je comprends ce que vous voulez dire, » lui répondit Théo. « Même si la demande est inférieure à ce
que j’ai prévu, j’ai malgré tout besoin de ces fonds. »
Lorsqu’il se rencontrèrent à la cantine le lendemain, Théo lui fit une suggestion : « Vous connaissez mon
frère, Etienne, le vendeur ? Je lui ai parlé de notre problème et il m’a répondu que la plupart des
vendeurs qu’il connaît gonflent leurs prévisions de 10 ou 20 pour cent. Nous devrions peut-être faire la
même chose. De cette façon, s’ils nous les réduisent, nous en aurons encore plus que ce que nous avons
maintenant. Et puis, la demande peut être supérieure à la normale. Et si ce n’est pas le cas, je suis sûr que
l’on pourra trouver des explications convaincantes. »
« Je ne sais pas si ce serait astucieux » lui répondit Léo. « Vous savez bien que le patron étudie de près
tous les chiffres avant les réunions. Je n’aimerais pas qu’il me demande publiquement des explications.
Mais je vais vous dire une chose. », poursuivit-il, « Si la demande augmente de façon significative, alors
nous pourrions être vraiment coincés et, le temps que nous réagissions, nos concurrents nous auront pris
une bonne partie de nos comptes. » « C’est un métier bien difficile, une fois », répondit Théo.
Question : Que pensez-vous de la suggestion de Théo ?
Théo et Léo : Eléments de réflexion
• Problématiques imbriquées
- Peut-on confondre « Prévision de vente » et « Objectif de vente » ?
- Quelle position adopter par rapport à l’erreur de prévision ?
- La majoration systématique des prévisions par les vendeurs a-t-elle un effet (bon ou
mauvais) ou pas d’effet du tout sur le système en amont ?

• Prévision et Objectif
- Une prévision est une évaluation objective de la demande ou d’une consommation future
(par extrapolation du passé et/ou avec prise en compte des remontées d’informations du
marché)
- Un objectif de vente est une cible volontariste qu’on se fixe, souvent sur-évaluée, destinée
en général à motiver une équipe de vente. La traduction en « ventes probables et prévisibles
» n’est pas certaine et, de toutes façons, différée.
• Erreur de prévision (et confiance…)
- Sauf très rares cas (d’entreprise ou de secteur industriel - lié à ses pratiques commerciales), aucune prévision n’est certaine
“à 100%”.
- Dans tous les cas, il est préférable de tout organiser par anticipation sur base d’une prévision moyenne, A CONDITION -
simultanément - de bien connaître et de caractériser l’erreur de prévision.
- On sera ainsi en mesure de se protéger contre cette incertitude par des solutions adéquates (p. ex. un stock de sécurité, ou des
mesures de dépannage d’urgence et d’adaptations). C’est sous cette condition que tout manager aura confiance dans la
prévision émise (partagée par tous).
- ET dans tous les cas, plus la prévision est erronée, plus le système doit être flexible (capacité de s’adapter à court-terme à des
évolutions du marché).

• Majoration des prévisions


• Attitude « classique » de vendeurs face à d’éventuels problèmes récurrents d’approvisionnement…
• Réponse générique :
- Cette attitude privilégie donc le « taux de service au client » (avec un objectif implicite de « 100% de couverture » de la
demande). Il ne prend pas en compte les conséquences en termes de surcoûts réels et de risques de surplus.
- De ce fait, il n’est pas tolérable pour un DG (qui recherche souvent un objectif de performance global par minimisation d’un
coût global « probabilisé »).
- Cette attitude – prolongée et systématique – se caractérise par une « boucle d’amplification » pouvant aboutir à un blocage du
système ! (voir page suivante)
Revenons à Théo et Léo…
- Théo a donc tort…
- Suggestion sur la bonne approche :
- Estimation objective des fonds nécessaires (prévision moyenne mensualisée à horizon d’un an)
- - Proposition explicite et commentée des scénarios - optimiste et pessimiste -AVEC proposition
d’actions palliatives selon l’évolution des demandes réelles La DG comprendra et suivra cette
approche
- - Mise en place d’une prévision à court-terme réactualisée (en cours de période budgétaire) avec
ajustement des besoins en crédits à la hausse OU à la baisse (permettant une meilleure gestion de
trésorerie à court-terme)
- - Si le patron « demande des explications en cours de période», il aura eu les infos prévisionnelles
pour anticiper,…. et surtout il aura confiance dans les chiffres annoncés.

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