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L’étude du langage dans le champ

scientifique. De la philologie à la
pragmatique

Conformation du champ des sciences


du langage dans le domaine des savoirs scientifiques

Antonio Gaspar Galán. Lingüística francesa III.


Universidad de Zaragoza
Création d’une discipline
• Règles, méthodes...
• Objectif.
• Acceptation par le groupe.
Conformation progressive générale des
champs disciplinaires
• Redéfinition permanente des limites disciplinaires: Rupture ou
continuité et innovations; tâtonnements et retours en arrière.
• Différentiation: objets et démarche méthodologique.
• Fixation de limites plus ou moins instables.
• Utilisation de nouvelles perspectives.
• Institutionnalisation.
Les sciences du langage

Rupture ou continuité et innovations; tâtonnements et


retours en arrière

1. Ferdinand de Saussure. Cours de linguistique générale


(1916).  Idée de signe
2. Noam Chomsky. Aspects of the Theory of Syntax (1965).
 Grammaire de Port Royal
3. L’article
L’article.

Homo lupus est


L’homme est un loup
El hombre es un lobo
Ο άνθρωπος είναι ένας λύκος

a. Aristóteles (Poética).
b. Henri Estienne. Traité de la conformité du langage
français avec le grec (1565).
c. Elio Antonio de Nebrija. Grammatica castellana (1492).
Complexité du phénomène

1. Les composantes du champ des sciences du langage

1° Le facteur humain (Rapport langue/usagers)

2° La langue, système de signes (la langue par elle-même)

3° La réalité extralinguistique ou référentielle (rapport


langage/réalité)
Complexité du phénomène

2. Les apports des autres champs

• Domaine de la religion: Panini, traduction de la bible...


• Domaine de la philosophie.
• Domaine de la géographie.
• Domaine de l’enseignement (latin, langues
vernaculaires…)
• Etc.
Complexité du phénomène

3. La structuration grecque des domaines dans le champ du


langage

a. Rhétorique (art de convaincre par la parole).


b. Grammaire (étude des unités de la langue) dont la
syntaxe (bonne construction).
c. Logique (art de bien raisonner) et/ou Dialectique
(recherche des connaissances par l'examen successif de
positions distinctes voire opposées).
Le problème du monde référentiel

Relation arbitraire entre la chose et


le nom = relation directe non
motivée entre le monde et la
langue

mɛzɔ̃
Le problème du monde référentiel

Aristote: rapport direct entre le monde et langage. Le langage est le reflet


fidèle de la réalité: le langage est vériconditionnel.

Trois manifestations de la réalité:

1. Substance et accidents: Dans le monde il y a la substance


(essence) et l’accident (qualité).

2. Processus: Dans le monde, il se passe des choses (activités,


phénomènes…).

3. Jugements: Il est possible de faire des jugements sur la


substance ou les processus.
Le problème du monde référentiel

La philosophie spéculative des modistes (XIIIe siècle): Trois


manifestations de l’existence, dont la plus importante est la troisième.

• Modus essendi: la manière d’être, les propriétés de l’être.


• Modus intelligendi: la manière de comprendre, l’existence de l’être
dans la pensée.
• Modus significandi: la manière de signifier, l’existence de l’être
dans la voix, dans la grammaire.
Le problème du monde référentiel
R. Descartes (1596-1650):
« Lorsqu'on apprend une langue, on joint les lettres ou la prononciation de
certains mots, qui sont des choses matérielles, avec leurs significations,
qui sont des pensées ».

Saussure:

Le signe linguistique unit non pas une chose


et un nom, mais un concept et une image
acoustique. Concept et image acoustique
sont des entités psychiques, non
matérielles.

Étude immanente de la langue: séparation


nette entre langue et réalité.
Le champ des sciences du langage.
Perspective historique

1.- Évolution dans le domaine du langage :

I. Philologie (qui va perdre du terrain au cours du XXe s. :


• Textes sacrés
• Documents anciens (gravures, papyrus, manuscrits...).
• Œuvres littéraires

I. Linguistique/Sémiologie :
• Phrases
• Productions orales
• Productions écrites (sans prestige littéraire)
Le champ des sciences du langage.
Perspective historique

2.- Structuralisme (XXe siècle)

a. La langue en elle-même et par elle-même.


b.La langue est un système indépendant.
c. Le monde reste à l’extérieur de ce système.
d.Considération exclusive du système, du locuteur et du message.
e. Étude immanente de la langue par disciplines internes:
phonétique, sémantique…
3.- Le tournant linguistique de la philosophie
Crise philosophique qui a eu lieu entre la fin du XIXe siècle et le début du
XXe siècle: la langue comme constituante de la pensée.

Ch. S. Peirce (1867): « La pensée n’est autre chose qu’un tissu de signes.
Les objets sur lesquels porte la pensée sont des signes ».
E. Husserl (1859-1938): La subjectivité comme constituante du savoir.
Ex: Le cancer est une maladie terrible
G. Frege (1848-1925): Dans toute proposition, il existe un contenu asserté
et un contenu présupposé.
Ex: L’ami de Monique est parti ce matin (on présuppose que Monique a un ami,
qu’il était là avant…)
J. L. Austin (1911-1960): L'usage de la parole comme modalité d'agir.
Ex: Quand tu seras malade, je te promets de venir te voir.
3.- Le tournant linguistique de la philosophie

Conséquences:

1.Importance du locuteur, de l’interlocuteur et des conditions


du processus de communication.

2.Rupture des limites de la phrase.

3.Capacité du langage pour agir : le langage comme clé de la


pensée, de la compréhension et de la création.
3.1. Importance de l’interlocuteur

1. Enjeu: savoir comment un auditeur peut comprendre en


contexte des choses différentes de celles qui sont
explicitement encodées dans les mots et les phrases.
2. Importance de l’interlocuteur: qui construit le sens?
3. La remise en valeur de la rhétorique (Olbrechts-Tyteca,
Meyer, Amossy, Reboul, etc.)
3.2. Rupture des limites de la phrase

Comment se construit-il le sens d’entités plus grandes que l’énoncé,


comme le texte ou le discours.
• La rupture des limites de la phrase : naissance du texte
(linguistique du texte).
• Notions de cohérence, d’orientation (d’intentionnalité, donc de
présence des locuteur-interlocuteur), de structure (séquence,
paragraphe…), plusieurs voix, plusieurs énonciateurs, etc.
• Philosophes, sociologues et linguistes: M. Foucault, P. Bourdieu,
O. Ducrot, C. Kerbrat-Orecchioni, P. Charaudeau, Jean-Michel
Adam, D. Maingueneau…
3.3. Capacité du langage pour agir

1) Les produits linguistiques sont une combinaison de Dire et de


Faire.

2) Tout échange langagier correspond à une interaction


d’intentionnalités.

3) Toute activité langagière est le fait de pratiques sociales et de


représentations imaginaires de la communauté à laquelle les
interlocuteurs appartiennent.
Revenons à la base...

1° Le facteur humain (Rapport langue/usagers)


2° La langue, système de signes (la langue par elle-même)
3° La réalité extralinguistique ou référentielle (rapport
langage/réalité)
La clé de voûte: le rapport langue/monde
M. Foucault (1969): « Notre tâche consiste à ne pas —à ne plus— traiter
le discours comme des ensembles de signes (d’éléments signifiants
renvoyant à des contenus ou à des représentations) mais comme des
pratiques qui forment systématiquement les objets dont ils parlent. »

G. Lakoff (1999): « Nos capacités cognitives sont telles que nous


sommes capables de traiter les éléments de l’expérience
communicationnelle qui résistent à l’opération de catégorisation, c’est-à-
dire, trouver du sens à tout prix ».

P. Charaudeau (2007): « […] les imaginaires sont engendrés par les


discours qui circulent dans les groupes sociaux, s’organisent en systèmes
de pensée cohérents créateurs de valeurs, jouant le rôle de justification de
l’action sociale et se déposant dans la mémoire collective »
Les frontières à l’intérieur des
sciences du langage

1. Le langage en soi-même: structure et rapports entre les éléments du


système. Étude immanente de la langue.

2. Le rapport langage/monde référentiel: rôle de représentation,


d’explication, de compréhension, de création/construction...

3. Le rapport du langage avec les sujets intervenants: intentions et


collaboration (stratégies)

Base de travail: le produit langagier, c’est-à-dire le discours (énoncé,


prose, poème, échange verbal, conférence…)

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