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Revue de la Trésorerie Générale du Royaume - N° 8 Août 2011

REFORME COMPTABLE DE L’ETAT

Texte du serment
M. Noureddine BENSOUDA, Trésorier Général du Royaume
des Oumana des douanes au séminaire de l’ Association Internationale des Services du Trésor (AIST), sous le thème :
au XIXème siècle « la qualité des comptes publics », les 25 et 26 novembre 2010 à Ljubljana en Slovénie

Des enjeux au coeur de la réforme


de l’administration

Une dimension indissociable


de la réforme budgétaire
SOMMAIRE
2 • Editorial
4 • La réforme de la comptabilité de l’Etat : des enjeux au
cœur de la réforme de l’administration

6 • Les normes comptables internationales du secteur


public « IPSAS » : une gouvernance en devenir

10 • La matrice du référentiel comptable de l’Etat : tel qu’il


a été adopté par le Conseil National de la Comptabilité

11 • Le bilan d’ouverture : prélude d’une évolution majeure


dans le dispositif comptable de l’Etat

15 • La réforme de la comptabilité de l’Etat : pour une


lecture avisée des états financiers

18 • Le système d’information comptable : un levier incon-


tournable pour la réforme de la comptabilité de l’Etat

23 • La qualité comptable : plus qu’une composante, une


finalité et un objectif majeur de la réforme

27 • La réforme comptable de l’Etat : une dimension


indissociable de la réforme budgétaire

29 • La réforme comptable des collectivités locales :


la réforme nécessaire
Editorial

M. Noureddine BENSOUDA
Trésorier Général du Royaume

Notre pays vient de connaître un véritable tournant historique à travers l’adoption d’une nouvelle constitu-
tion, qui consacre un meilleur équilibre des pouvoirs et une nouvelle organisation des modes de gestion des
affaires publiques ainsi que la consécration des principes de transparence, de responsabilité et de reddition
des comptes.

Cette constitution est appelée à être consolidée par la mise en place d’une nouvelle loi organique des
finances, à l’effet de donner une nouvelle impulsion à la modernisation de l’Etat par le renforcement de la
transparence des finances publiques et par la réorientation de la gestion financière d’une optique de moyens
à une logique fondée sur les résultats et la performance.

La réforme du cadre comptable de l’Etat et le passage d’une comptabilité des flux (comptabilité budgétaire)
à une comptabilité d’exercice fondée sur les droits constatés qui englobe tous les engagements de l’Etat et
comportant une forte valeur ajoutée patrimoniale constitue un levier incontournable pour asseoir la culture
d’évaluation des politiques publiques.

Au-delà même des enjeux d’ordre technique, financier et comptable, cette entreprise recèle une dimension
culturelle stratégique pour notre pays, dimension qui consiste à assurer un ancrage réel de la culture de
résultat et de performance devant désormais, régir la stratégie de réalisation des politiques publiques.

L’importance du chantier de réforme de la comptabilité de l’Etat réside sans nul doute, dans les enjeux que
cette entreprise véhicule en termes de reconfiguration du système comptable pour une meilleure visibilité
financière, une plus grande maîtrise du processus de préparation, d’exécution et de contrôle du budget de
l’Etat et surtout, pour une amélioration substantielle de l’information financière au bénéfice notamment, du
gouvernement, du parlement, du juge des comptes et surtout des citoyens.

La réforme de la comptabilité de l'Etat a également pour ambition, de permettre à notre pays d'intégrer le
club restreint de pays qui adoptent la comptabilité d'exercice et par delà même cet objectif, de satisfaire
les exigences liées à la comparabilité de l'information financière, dès lors, que l’attractivité d’un pays se
mesure beaucoup plus par la disponibilité d’une information transparente et fiable des comptes qui répond
aux besoins des investisseurs, des bailleurs de fonds et de l’ensemble des utilisateurs, que par les avantages
économiques qu’elle offre.

La présentation des comptes de l’Etat selon des normes harmonisées en facilitera la lecture par les acteurs
de la gouvernance financière et permet surtout la comparaison entre les Etats.

Il reste entendu, qu'une telle réforme demeure un processus d'amélioration continue, qui doit nécessairement
s'inscrire dans le temps, à travers une trajectoire et une démarche d'optimisation qui tiennent compte de
la réalité du contexte de gestion, du cadrage ainsi que du soutien à apporter aux utilisateurs pour leur en
faciliter l'appropriation.

L’objectif d’une telle entreprise est d’aligner notre système de la comptabilité de l’Etat sur les normes comp-
tables internationales en vigueur pour le secteur public, d’assurer une consolidation des données relatives
aux composantes du secteur public (Etat, établissements publics et collectivités locales) et de permettre, in
fine, la certification des comptes qui devraient impacter automatiquement les appréciations des agences
internationales de notation. En effet, la comptabilité publique et la comptabilité privée ont un destin com-
mun, à savoir la production d’une information comptable fiable et pertinente pour les décideurs.

2
Texte du serment des Oumana des douanes au XIX ème siècle *

Je jure par Dieu, celui qui n’existe point de Dieu que Lui, Connaisseur de l’invisible et du visible, qui fit parvenir le Livre Saint
(Coran) à son messager, le Probe et Loyal, ainsi que par tous les serments :
• de ne pas trahir la confiance dont le makhzen m’a investi en matière d’argent et de valeurs, de recettes et de dépenses ;
• de ne pas tolérer ni consentir à la disparition d’un quelconque objet issu des biens du makhzen ;
• de ne faire montre envers personne de complaisance dans le dédouanement et l’estimation d’une marchandise ;
• de n’épargner aucun effort pour prodiguer au makhzen les conseils relatifs à ce dont il m’a investi en matières de vente,
d’achat et de traitement des affaires ou litiges ;
• de ne ménager aucun effort dans l’exécution de mon travail avec assiduité et de ne négliger les tâches qui mont été assi-
gnées ;
• de ne pas tolérer qu’un proche ou serviteur s’empare sans droit ni titre d’un objet si minime soit-il issu des biens du makhzen ;
• de n’utiliser aucun employé du makhzen pour exécuter un travail personnel, serait-ce l’enfoncement d’un clou ;
• de ne recueillir de cette mission noble et bénie, ainsi que de tout ce qui s’y rapporte, aucun revenu autre que ma rémunéra-
tion fixée, et ce ni à mon profit ni en faveur de mes proches ou amis, tant au présent qu’au futur.

* El Mnouni : Madhahir yaqadat Al Maghrib


SPECIAL
PLAN COMPTABLE

La réforme de la comptabilité
M. Abdelkrim GUIRI
Directeur de la réglementation et
de la normalisation comptable

de l’Etat
Des enjeux au cœur de la réforme de l’administration

A carrefour du dispositif d’exécution peut induire par rapport à un système LA REFORME DE LA


des opérations financières publiques, fondé sur une logique de caisse pour se
COMPTABILITE DE L’ETAT, UN
la Trésorerie Générale du Royaume s’est faire une idée de l’ampleur des enjeux
engagée depuis plus de cinq ans, dans dont la réforme de la comptabilité de GAGE DE TRANSPARENCE ET
une dynamique ambitieuse de réno- l’Etat est porteuse et des innovations DE BONNE GOUVERNANCE
vation des processus d’exécution des majeures qu’elle est en mesure d’impul- FINANCIERE
finances publiques, dynamique matéria- ser dans l’organisation, le fonctionne-
lisée par le lancement d’un vaste projet ment et les rouages de l’appareil de
de modernisation multi- dimensionnelle l’Etat d’une manière générale et du sys- La mise en place d’une véritable comp-
mené dans le cadre d’une vision inté- tème de gestion des finances publiques tabilité d’exercice privilégiant la consta-
grée de l’ensemble des déterminants et de manière particulière. tation des droits et des obligations de
des leviers d’action et par le lancement l’Etat offre une opportunité à tous ceux
de réformes d’envergure nationale, à L’appréhension des enjeux de la réforme qui veulent connaitre les prestations
dimension interministérielle et à fort de la comptabilité de l’Etat par le biais rendues par l’appareil productif de l’Etat
potentiel de modernisation. des seuls leviers technico-financiers ne de se faire une idée précise sur la réalité
saurait être que réductrice si elle n’est financière de l’Etat.
A ce titre, le chantier de réforme de la pas couplée à une vision plus straté-
comptabilité de l’Etat a été identifié gique qui touche le système de gou- Elle offre une opportunité à tous ceux
comme projet prioritaire dans le cadre vernance des finances publiques et la qui veulent connaître les prestations
de l’agenda de modernisation et d’opti- réforme du fonctionnement de l’appa- rendues par l’appareil productif de
misation du système de gestion des reil de l’Etat. l’Etat qu’ils soient décideurs, corps de
finances publiques en raison des enjeux contrôle, bailleurs de fonds, représen-
qui transcendent le système financier et La comptabilité rénovée de l’Etat, au-de- tants de la nation ou juges financiers, de
comptable pour impacter l’organisation là de son caractère technique, constitue, se faire une idée précise sur l’enrichisse-
et le fonctionnement de l’administration en réalité un outil de modernisation de ment ou l’appauvrissement de l’Etat.
publique au bénéfice de la réforme de l’Etat en raison des changements et des
l’Etat. mutations profondes qu’elle implique Cette dimension de transparence se
en matière d’amélioration de la bonne trouve consolidée à travers le large
LE NOUVEAU DISPOSITIF gouvernance dans la sphère publique. spectre d’informations financières que
COMPTABLE, UN LEVIER AU la nouvelle comptabilité permet de
Le nouveau système régissant la comp- dégager, dès lors qu’il ne s’agit plus seu-
BENEFICE DE LA REFORME DE tabilité de l’Etat constitue à ce titre, un lement de savoir ce que l’Etat a dans
L’ETAT véritable pari de l’innovation/créativité ses caisses, logique qui prévaut dans le
au sein de l’administration publique, et système actuel, mais d’apprécier ce que
Au-delà du système financier et comp- participe à la création d’un nouvel état sont ses richesses, ses dettes et les enga-
table qui s’en trouverait largement d’esprit devant dés lors, animer les diffé- gements qu’il peut être amené à hono-
rénové, modernisé et en convergence rents intervenants dans le processus de rer afin de mieux appréhender les résul-
parfaite avec les normes et standards préparation, d’exécution et de contrôle tats dégagés et la situation financière
internationaux, la réforme de la comp- des finances publiques. à moyen et à long termes des finances
tabilité de l’Etat touche au cœur même publiques.
du fonctionnement de l’institution éta- La réforme de la comptabilité de l’Etat
tique. revient en somme, à une véritable dyna- Elle se trouve également fortement
mique à enclencher dans l’organisation renforcée par la prise en compte des
Il suffit d’avoir à l’esprit le changement et les modes de fonctionnement de l’ap- éléments d’actifs enrichis au niveau du
de cap qu’une comptabilité d’exercice pareil étatique.

4
recensement et de l’évaluation des im- Elle permettra d’offrir les éclairages La nouvelle comptabilité de l’Etat pré-
mobilisations corporelles, incorporelles nécessaires de pilotage décisionnel figure en outre, la mise en place d’une
et financières et par la prise en consi- et stratégique pour faire ressortir les véritable comptabilité d’analyse des
dération des stocks, aspects totalement principaux agrégats financiers et leur coûts, comptabilité appelée à émerger
absents dans le système comptable évolution d’un exercice à l’autre, mais en vue de valoriser l’information issue
actuel. également les marges de manœuvre, de la comptabilité budgétaire et de la
les éléments d’arbitrage de gestion ainsi comptabilité générale de l’Etat et par-
Voulue au plus proche des standards in- que les risques potentiels susceptibles tant, augurer d’une véritable mesure de
ternationaux tout en étant respectueuse de mettre en cause la soutenabilité bud- la performance des différentes adminis-
des spécificités de l’action de l’Etat, la gétaire et financière de l’Etat. trations.
nouvelle comptabilité ambitionne de
prendre également en considération les L’application du nouveau référentiel
risques potentiels, les opérations à rat- comptable qui procède d’une logique
CONCLUSION
tacher, les charges futures ainsi que les de refonte du dispositif de tenue et de
La réforme de la comptabilité de l’Etat
engagements hors bilan, éléments qui présentation des comptes de l’Etat selon
constitue une occasion de rénovation du
confortent si besoin est, une vision plus une vision aussi proche des entreprises
débat du débat budgétaire et financier,
fidèle, plus exhaustive et plus transpa- et des standards internationaux que le
débat qui gagnerait inéluctablement en
rente de la situation financière et patri- permettent le statut de l’institution éta-
visibilité, en clarté et en transparence
moniale de l’Etat et partant, un enrichis- tique et les spécificités de son action,
que pourrait lui apporter la comptabi-
sement considérable des informations est de nature à fournir une informa-
lité d’exercice pour trancher les grands
véhiculées par la comptabilité budgé- tion plus riche, plus homogène et plus
choix budgétaires et financiers et arrêter
taire par des éléments d’évolution et de significative pour les gestionnaires, leur
les stratégies de gestion des finances
perspectives dépassant le cadre annuel permettant d’apprécier et d’analyser en
publiques.
et la logique statique des flux financiers. connaissance de cause l’évolution de la
richesse de l’Etat d’un exercice à l’autre.
Elle vient enfin, à point nommé pour
LA REFORME COMPTABLE renforcer les principes de transparence,
La mise en place de nouveaux états
DE L’ETAT, UN VECTEUR AU financiers avec une vue globale, exhaus-
de responsabilité financière, d’éthique
SERVICE DE LA PREVISION ET tive et transparente sur l’activité et le
et de reddition des comptes à travers
une approche concrète, pragmatique et
DU PILOTAGE DES FINANCES patrimoine de l’Etat permettra en effet,
adossée sur la réalité de l’exécution chif-
PUBLIQUES d’améliorer de manière significative le
frée des finances de l’Etat.
contenu des informations comptables
La nouvelle comptabilité de l’Etat a été et financières au bénéfice des diffé-
conçue de manière à constituer un véri- rents utilisateurs des comptes de l’Etat
table outil de suivi, d’évaluation et de et d’offrir des indicateurs complémen-
mesure de la performance de l’action taires pour la stratégie de maîtrise des
publique, de pilotage et d’aide à la déci- finances publiques.
sion pour les gestionnaires et d’informa-
tion pour les citoyens, la représentation
nationale et le juge financier.

Youssoufi, 10 dirhams

Revue de la Trésorerie Générale du Royaume 5


SPECIAL
PLAN COMPTABLE

Les normes comptables


M. Fouad BELLAOURI KOUTBI
Trésorier Préfectoral de Tanger
Direction régionale de Tanger

internationales du secteur public


« IPSAS »
Une gouvernance en devenir
A l’instar des normes International Finan- Pertinence Importance relative
cial Reporting Standards1 (IFRS) qui ont
été élaborées pour les entreprises privées, Une information est pertinente si elle La pertinence de l’information dépend
de nouvelles normes comptables et fi- est en relation avec les données analy- de sa nature et de son importance rela-
nancières, International Public Sector Ac- sées et peut aider les utilisateurs à éva- tive. L’information est significative si
counting Standards (IPSAS), ont été pu- luer les événements passés, présents ou son omission ou son inexactitude peut
bliées progressivement pour être mises futurs ou encore à confirmer ou corriger avoir une incidence sur les décisions ou
en application dans le secteur public. des évaluations passées. Pour être per- les évaluations des utilisateurs. L’impor-
Actuellement, les normes IPSAS publiées tinente, l’information doit également tance relative dépend de la nature ou de
par le Conseil des Normes Comptables être présentée en temps opportun. la portée de l’élément ou de l’erreur, ju-
Internationales du Secteur Public sont gée dans les circonstances particulières
au nombre de 32. Fiabilité de son omission ou de son inexactitude.

Le processus de normalisation comp- Une information fiable est une infor- Image fidèle
table, engagé par le Conseil des Normes mation exempte d’erreur et de biais
Comptables Internationales du Secteur significatifs et à laquelle les utilisateurs Les états financiers doivent présenter
Public (IPSAS Board)2, constitue une peuvent faire confiance pour présenter une image fidèle de la situation finan-
véritable révolution, plus importante une image fidèle de ce qu’elle est cen- cière, de la performance financière et
que celle des normes IFRS pour les sée présenter ou ce que nous pourrions des flux de trésorerie d’une entité.
entreprises privées, puisque les entités nous attendre raisonnablement à la voir L’application appropriée des normes
publiques adopteront des normes qui présenter. comptables internationales du secteur
synthétisent les pratiques internatio- public accompagnée de la présentation
nales d’excellence, fondées principale- Comparabilité d’informations supplémentaires lorsqu’il
ment sur les techniques spécifiques aux s’avère nécessaire, conduit, dans qua-
entreprises privées L’information contenue dans les états fi- siment toutes les circonstances, à des
nanciers est comparable lorsque les uti- états financiers qui donnent une image
LES CARACTERISTIQUES lisateurs sont en mesure d’identifier les fidèle.
QUALITATIVES DE similitudes et les différences entre cette
information et l’information contenue Prééminence de la substance sur
L’INFORMATION FINANCIERE dans d’autres documents. la forme
Pour être pertinente et fiable, l’infor-
La comparabilité s’applique au niveau Cette caractéristique de l’information,
mation financière fournie dans les états
spatial entre des états financiers d’enti- retenue par l’IPSAS Board, signifie que
financiers doit répondre aux caractéris-
tés différentes et au niveau temporel les opérations comptables et financières
tiques qualitatives (ou principes fonda-
entre des états financiers de la même soient retracées et présentées confor-
mentaux) qui sont au nombre de dix :
entité. mément à leur substance et à leur réa-
lité économique et non pas seulement
Intelligibilité Un des objectifs de la comparabilité selon leur forme juridique.
est l’information des utilisateurs des
L’information fournie dans les états fi- méthodes comptables utilisées pour
nanciers doit être immédiatement com- Neutralité
la préparation des états financiers ainsi
préhensible des utilisateurs supposés que de tout changement apporté à ces
avoir une connaissance raisonnable de L’information est neutre si elle est
méthodes. exempte de parti pris. Les états finan-
la comptabilité. Ceci n’exclut cependant
pas une information relative à des sujets ciers ne sont pas neutres si l’information
Parce que les utilisateurs souhaitent qu’ils contiennent a été sélectionnée
complexes qui doivent figurer dans les comparer la performance d’une entité
états financiers en raison de la perti- ou présentée d’une manière destinée à
au cours du temps, il est important que influencer les prises de décisions ou le
nence de ces informations par rapport les états financiers donnent l’information
aux besoins de prise de décision. jugement afin d’obtenir un résultat ou
correspondante des exercices précédents. une issue prédéterminé.
1) Ex «IAS «, changement de dénomination en 2001
2) Rattaché au « Comité Permanent de la Féderation Internationale des Comptables » (IFAC).
6
Prudence • Le principe du patrimoine qui permet • Formation des groupes de travail ;
l’enregistrement des immobilisations • Publication d’un exposé-sondage à
La prudence est l’appréciation raison- à l’actif du bilan et leur amortissement soumettre aux commentaires du pu-
nable des faits afin d’éviter le risque de chaque année ; blic qui nécessite généralement une
transfert sur l’avenir d’incertitudes pré- • Le principe de prudence, qui impose période de quatre mois au moins ;
sentes susceptibles de grever le patri- que l’on comptabilise des provisions ; • Prise en considération de tous les com-
moine et les résultats de l’entité. • Et surtout, l’obligation de présenter mentaires reçus sur les documents de
des états financiers au nombre de cinq discussion et sur les exposés-sondages
Autrement dit, les incertitudes présentes à savoir, le bilan (ou état de la situa- pendant la période de commentaires
raisonnablement évaluées, de nature à tion financière), le compte de résultat et réalisation des modifications aux
entraîner un accroissement des charges (appelé état de la performance finan- projets de normes ;
ou une diminution des produits de cière), le tableau des flux de trésorerie, • Publication, enfin, d’une IPSAS qui
l’exercice, doivent être prises en compte le tableau de variation de la situation récapitule les conclusions des études,
dans la détermination du résultat dudit nette et des notes aux états financiers rappelle les étapes du processus d’éla-
exercice. ou annexes. boration de la norme et justifie les
choix arrêtés.
Exhaustivité LE PROCESSUS D’ELABORATION
La publication d’un exposé-sondage ou
DES NORMES IPSAS des «Appels à commentaire» destinés
L’information contenue dans les états fi-
nanciers doit être exhaustive autant que au public, nécessitent un vote positif
La mission d’élaborer les normes IPSAS
le permettent le souci de l’importance d’au moins deux tiers des membres du
a été confiée au Conseil des Normes
relative et celui du coût. Conseil des Normes Comptables Inter-
Comptables Internationales du Secteur
nationales du Secteur Public.
Public (IPSAS Board), qui est un organe
En pratique, un équilibre ou un arbitrage supranational qui agit sous l’autorité de
entre les caractéristiques qualitatives est Il faut préciser que ce conseil donne aux
la Fédération Internationale de la Comp-
souvent nécessaire. Généralement, le parties intéressées3 la faculté de com-
tabilité (IFAC). Il est l’équivalent pour le
but poursuivi est d’atteindre un équi- menter les normes IPSAS. Il se concerte
secteur public (les Etats, les collectivi-
libre approprié entre les caractéristiques également avec le groupe consultatif sur
tés locales et autres entités publiques)
afin d’atteindre les objectifs des états les principaux projets, les questions tech-
de l’International Accounting Standards
financiers. niques et les priorités du programme de
Board (IAS Board) qui élabore les normes
travail.
internationales pour le secteur privé
LES OBJECTIFS DES NORMES (IFRS).
COMPTABLES INTERNATIONALES LA PRESENTATION DES IPSAS
Le processus d’élaboration des normes
(IPSAS) IPSAS est complexe de sorte que, l’éla- Les IPSAS énoncent des dispositions re-
boration d’une norme peut exiger plu- latives à la comptabilisation, l’évaluation,
Les principaux objectifs recherchés à
sieurs années. Ainsi, la norme IPSAS rela- la présentation et aux informations à
travers l’élaboration des normes comp-
tive aux impôts et transferts a nécessité fournir pour les opérations et les événe-
tables internationales du secteur public,
quatre années de travail. ments dans les états financiers à usage
peuvent être déclinés comme suit :
général.
• l’instauration d’un langage comptable La publication d’une norme IPSAS est
Les normes IPSAS, élaborées selon la
commun à l’échelle internationale ; précédée d’une série d’études (publiées
• la mise à la disposition des organi- par le Conseil des Normes Comptables méthode de la comptabilité d’exercice,
ont deux caractéristiques principales :
sations publiques de normes comp- Internationales du Secteur Public -IPSAS
tables qui synthétisent les pratiques Board-) qui portent sur des sujets contro-
d’excellence internationales en ma- versés, sur la définition, les critères de • Elles convergent avec les normes inter-
nationales d’information financière
tière d’information financière des reconnaissance et les bases de la comp-
(IFRS) publiées par l’International Ac-
organismes publics ; tabilité. Lesdites études explorent égale-
counting Standards Board (IASB) avec
• l’introduction de la comptabilité d’en- ment, les pratiques de plusieurs pays et
adaptation, le cas échéant, au contexte
treprise dans le secteur public. confrontent des analyses approfondies
du secteur public. Dans ce processus, le
de concepts et de solutions.
traitement comptable et le texte origi-
Avec les normes IPSAS, ce sont les
Le processus d’élaboration des normes nal des IFRS sont maintenus sauf dans
principes et les méthodes de base de
IPSAS peut être décliné comme suit : les cas où les spécificités du secteur
la comptabilité d’entreprise qui s’ap-
pliquent à la gestion des organisations • Etude des dispositions et des pra- public justifient des dérogations ;
publiques nationales et internationales : tiques comptables nationales et
échange de vues sur les questions • Elles traitent les informations finan-
• Le principe de la comptabilité d’exer- avec les normalisateurs comptables cières du secteur public qui n’ont pas
été traitées de manière exhaustive dans
cice d’abord qui se superpose à la nationaux ;
les IFRS, ou pour lesquelles l’IASB n’a
comptabilité budgétaire de trésorerie ; • Etude des positions officielles de pas élaboré d’IFRS.
l’IASB, des normalisateurs comptables
nationaux, etc. ;
3) Notamment les organismes membres de l’IFAC, les auditeurs, les préparateurs, (y compris les Ministères des Finances) , les normalisateurs et les comptables.
Revue de la Trésorerie Générale du Royaume 7
SPECIAL
PLAN COMPTABLE

L’IPSAS Board a consacré une norme par- Depuis le 1er janvier 2010, l’IPSAS Board soit à travers l’adoption ou l’adaptation
ticulière à la méthode de la comptabi- a entrepris de travailler sur les projets des normes nationales (Canada, France,
lité de trésorerie qui comprend des cha- suivants : Australie, Nouvelle-Zelande, Maroc…).
pitres relatifs aux informations à fournir,
obligatoires et facultatives. Cette norme
• le traitement comptable des conces-
En effet, l’IPSASB reconnaît le droit des
sions de services publics (Service
vise à encourager les entités publiques à Concession Arrangement) ; États et des normalisateurs comptables
publier volontairement des informations nationaux à établir des directives et des
selon la méthode de la comptabilité
• les regroupements d’entités (Entity
normes comptables pour l’information
combination) ;
d’exercice, même si ses états financiers financière à fournir dans leurs juridic-
de base sont préparés selon la méthode • la revue de la norme IPSAS sur la
tions.
comptabilité de caisse (Cash Basis
de la comptabilité de caisse. IPSAS) ;
Une entité qui passe de la méthode de la
• la soutenabilité budgétaire (Long Certaines normes IPSAS comportent des
dispositions transitoires qui accordent
term Fiscal Sustainability) ;
comptabilité de caisse à la méthode de aux entités publiques, un délai sup-
la comptabilité d’exercice peut souhai-
• le cadre conceptuel (Conceptual Fra-
plémentaire pour se conformer à l’en-
mework).
ter inclure des informations particulières semble des dispositions d’une norme
basées sur la méthode de la comptabi- IPSAS spécifique basée sur la méthode
lité d’exercice pendant ce processus. L’ADOPTION DES IPSAS PAR de la comptabilité d’exercice ou prévoir
LES ENTITES PUBLIQUES une dérogation relative à certaines dis-
La situation (informations auditées ou positions lors de l’application initiale
non, par exemple) et l’emplacement Les IPSAS sont destinés à toutes les enti- d’une norme IPSAS.
des informations supplémentaires (par tés publiques nationales autres que les
exemple dans les notes aux états finan- entreprises publiques (les Etats, les col- Une entité peut à tout moment déci-
ciers ou dans un chapitre supplémentaire lectivités locales, les cantons,…) et inter- der d’adopter la méthode de la comp-
séparé du rapport financier) dépendront nationales (UNESCO, OMS, …). tabilité d’exercice conformément aux
des caractéristiques de l’information (par normes IPSAS. A ce stade, l’entité appli-
exemple, leur fiabilité et leur exhaustivi- Plus d’une cinquantaine de pays apparte- quera toutes les normes IPSAS selon la
té) ainsi que de la réglementation régis- nant aux cinq continents ainsi que les or- méthode de la comptabilité d’exercice
sant l’information financière au sein de la ganisations internationales et régionales, et pourra choisir d’appliquer des dis-
juridiction. ont adopté ou sont en voie d’adopter les positions transitoires dans une norme
normes IPSAS soit par l’introduction directe IPSAS individuelle selon la méthode de
des IPSAS (OCDE, OTAN, ONU, Suisse,…), la comptabilité de trésorerie.

Obligation de Cent Mille Francs au porteur


Avril 1955
8
Liste des normes IPSAS
publiées par le Conseil des Normes Comptables
International du Secteur
IPSAS Intitulé

IPSAS 1 Présentation des états financiers


IPSAS 2 Tableaux des flux de trésorerie
IPSAS 3 Solde net de l'exercice, erreurs fondamentales et changements de méthodes comptables
IPSAS 4 Effets des variations des cours des monnaies étrangères
IPSAS 5 Coûts d’emprunt
IPSAS 6 États financiers consolidés et comptabilisation des entités contrôlées
IPSAS 7 Comptabilisation des participations dans des entités associées
IPSAS 8 Information financière relative aux participations dans des coentités
IPSAS 9 Produits des opérations avec contrepartie directe
IPSAS 10 Information financière dans les économies hyperinflationnistes
IPSAS 11 Contrats de construction
IPSAS 12 Stocks
IPSAS 13 Contrats de location
IPSAS 14 Événements postérieurs à la date de reporting
IPSAS 15 Instruments financiers : informations à fournir et présentation
IPSAS 16 Immeubles de placement
IPSAS 17 Immobilisations corporelles
IPSAS 18 Information sectorielle
IPSAS 19 Provisions, passifs éventuels et actifs éventuels
IPSAS 20 Information relative aux parties liées
IPSAS 21 Dépréciation d'actifs non générateurs de trésorerie
IPSAS 22 Présentation de l'information dans les états financiers
IPSAS 23 Produits des opérations sans contrepartie (impôts et transferts)
IPSAS 24 Présentation de l'Information sur les Budgets dans les états financiers
IPSAS 25 Avantages sociaux
IPSAS 26 dépréciation des actifs générateurs de trésorerie
IPSAS 27 Agriculture
IPSAS 28 Instruments financiers : présentation
IPSAS 29 Instruments financiers : reconnaissance et mesure
IPSAS 30 Instruments financiers : informations
IPSAS 31 Actifs incorporels
IPSAS de Caisse Information financière sous la méthode de comptabilité de caisse

Revue de la Trésorerie Générale du Royaume 9


SPECIAL
PLAN COMPTABLE

Le référentiel comptable de l’Etat au Maroc


Tel qu’il a été adopté par le Conseil National de Comptabilité
Le cadre conceptuel fixe
• Les choix directeurs, les principes fondamentaux et les objectifs assignés à la comptabilité de l’Etat
• Les règles d’évaluation de la comptabilité de l’Etat (évaluation initiale, évaluation postérieure et règles de rattachement à
l’exercice).

Les normes comptables

Normes Contenu

Norme 2 : Immobilisations incorporelles Brevets, marques, licences, procédés, logiciels


Norme 3 : Immobilisations corporelles Terrains, constructions et bâtiments, ouvrages d’infrastruc-
tures, installations techniques, matériel de transport…etc
Prêts et avances, participations, dotation en capital, droits
d’adhésion aux organismes internationaux
Norme 5 : Stocks Biens acquis et détenus pour la consommation ou la revente
Norme 6 : Créances de l’actif circulant Créances sur les clients, créances sur les redevables
Norme 7 : Composantes de la trésorerie de l’Etat Trésorerie actif (disponibilité…), trésorerie passif (bons du
trésor, dépôts de fonds…)
Dette intérieure/Dette extérieure
Obligation juridiques ou reconnues par l’Etat vis-à-vis des
tiers
Norme 10 : Produits liés à l’exercice de la souveraineté de Produits requis par voie d’autorités sans contrepartie directe
l’Etat
Norme 11 : Produits non liés à l’exercice de la souveraineté Produits non liés à l’exercice de la souveraineté générés par
de l’Etat l’activité ordinaire
Norme 12: Charges

Norme 13 : Engagements hors-bilan Engagements, accords découlant de la responsabilité de


l’Etat, pris dans le cadre des retraites

Le Plan de comptes
Comptes de bilan
Classe 1 Situation nette et comptes de financement permanent
Classe 2 Comptes d’actif immobilisé
Classe 3 Comptes d’actif circulant (hors trésorerie) et comptes de liaisons internes
Classe 4 Comptes de passif circulant (hors trésorerie)
Classe 5 Comptes de trésorerie
Comptes de charges et de produits
Classe 6 Comptes de charge
Classe 7 Comptes de produits
Classe de comptes pour engagements
Classe 8 Engagement hors bilan
Classe pour présentation budgétaire de loi de finances, loi de règlement et comptes d’ordre
Classe 9 Comptabilité analytique budgétaire, loi de règlement et compte d’ordre
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Le bilan d’ouverture
Mohamed KABELMA
Chef du service de l’organisation
et de la normalisation comptables
Direction de la réglementation
et de la normalisation comptable
Prélude d’une évolution majeure dans
le dispositif comptable de l’Etat

L’intensification des échanges et la glo- Il s’agit ensuite, de couvrir l’ensemble lever l’impôt par la durée assez longue
balisation des économies dans le monde des obligations de l’Etat constituées par de certains biens et la difficulté et la
ont propulsé l’information comptable et le passif en l’occurrence, les moyens ou complexité liée au recensement et à la
financière au centre des préoccupations les sources de financement de l’actif de valorisation de certaines composantes
des pouvoirs publics. l’Etat. de son patrimoine.

Les exigences de la mondialisation et le Cette évolution marque ainsi, une rup- Ainsi et en tenant compte de ces spéci-
développement des marchés de capitaux ture par rapport à un système caractérisé ficités, une présentation du bilan d’ou-
se sont traduits ainsi, par une convergence jusqu’alors par une comptabilité tenue verture de la comptabilité de l’Etat de
des normes comptables appliquées dans exclusivement en termes d’encaissements manière similaire à celle des entreprises
le monde avec comme objectif de mettre et de décaissements. et qui mettrait en relation l’actif et le
à la disposition des tiers une information passif de l’Etat ne saurait être justifiée et
qui aide à la prise de décision. La préparation du bilan d’ouverture pertinente et partant, donner lieu à une
constitue le prélude à une grande réforme interprétation identique des résultats.
Comprenant la nécessité de s’arrimer à comptable et consacre l’entrée du Maroc
un environnement international marqué dans le giron des pays qui ont introduit Pour marquer cette différence, la norme
par des mutations profondes en matière les règles de la comptabilité d’exercice 1 « états financiers » du référentiel comp-
de comptabilité, la Trésorerie Générale dans la gestion des finances publiques. table de l’Etat retient une présentation
du Royaume a entrepris en 2008 une ré- bilancielle sous la forme d’un tableau de
forme comptable s’inspirant des normes Le bilan d’ouverture constitue un chan- la situation nette.
comptables internationales applicables tier de grande envergure dans lequel
l’Etat ne sera pas seulement confronté De même et conformément au format de
au secteur public (IPSAS : International
à un changement de référentiel comp- présentation préconisé par les normes
Public Sector Accounting Standards),
table, mais il doit également changer de IPSAS, les états financiers seront présen-
afin de faire de la comptabilité de l’Etat
système comptable en passant d’un sys- tés, de manière à respecter le principe
un outil privilégié de bonne gouver-
tème de caisse à un système de compta- de pertinence, en ce sens qu’ils ne retra-
nance et de répondre aux exigences
bilité d’exercice. ceront que les informations qui ont une
des instances financières internationales
importance significative et qui pour cette
en matière d’information comptable et
L’enjeu est donc, de reconstituer com- raison doivent nécessairement figurer au
financière.
plètement la comptabilité de l’Etat en bilan de l’Etat.
L’introduction des principes de la comp- y intégrant des actifs et des passifs qui
n’avaient jamais été comptabilisés. Dans ce cadre, les concepteurs des
tabilité générale dans la gestion de la
normes comptables internationales et
sphère publique a, de toute évidence,
ceux du référentiel de la comptabilité
des conséquences majeures sur le péri- DE QUELQUES SPECIFICITES de l’Etat marocain convergent pour une
mètredes activités financières de l’Etat DE L’ETAT DANS LA présentation de l’information financière
ainsi que sur le mode de management
de son patrimoine.
PRESENTATION DE SON et comptable qui soit déclinée en étapes.
ACTIVITE BILANCIELLE Autrement dit, l’information est beaucoup
plus globale et agrégée au niveau du bi-
En effet, il s’agit d’appréhender la comp-
Les opérations de l’Etat se caractérisent lan ou tableau de la situation nette mais
tabilité sur un champ beaucoup plus large
par un certain nombre de spécificités très détaillée, justifiée et argumentée au
dans lequel la comptabilité budgétaire ne
par rapport aux entreprises se traduisant niveau des notes aux états financiers.
constitue qu’un sous produit. Autrement
dit, il s’agit d’appréhender l’ensemble des notamment par le fait qu’il est d’abord,
Voilà donc les principales spécificités
droits et obligations de l’Etat. investi de missions régaliennes, que ses
et principes directeurs retenus par les
activités ont pour objectif fondamental
normes comptables internationales en
Il s’agit en effet, d’appréhender de prime d’assurer le service public et que contrai-
vigueur pour le secteur public et rete-
abord, l’intégralité des droits de l’Etat rement aux entreprises, il ne dispose pas
nues par le référentiel de la comptabilité
constitués par son actif qui retrace les de capital initial.
de l’Etat qui tracent si on peut dire, les
investissements réalisés ou possédés, les contours de la présentation bilancielle
stocks, les créances et les liquidités. L’Etat est en outre, détenteur d’un actif
très particulier, caractérisé par un actif des comptes de l’Etat et qui en struc-
incorporel spécifique lié à sa capacité à turent l’architecture du bilan d’ouverture.
Revue de la Trésorerie Générale du Royaume 11
SPECIAL
PLAN COMPTABLE

DE LA STRUCTURE GLOBALE En hors bilan, seront constatés les enga- Les données chiffrées appelées à être in-
gements qui feront l’objet également d’un tégrées au bilan d’ouverture concernent
DU BILAN D’OUVERTURE DE
recensement pour donner une image fi- d’abord, le parc immobilier appréhendé
LA COMPTABILITE DE L’ETAT dèle de la situation patrimoniale de l’Etat. sur la base de données communiquées
par la Direction des Domaines et éva-
Le bilan d’ouverture de la comptabilité luées au prix du marché par les commis-
de l’Etat sera structuré autour des com- DES TRAVAUX PREALABLES
sions constituées au niveau local et com-
posantes suivantes, retracées dans le ENGAGES A L’OCCASION DE posées de représentants de la Trésorerie
cadre du modèle retenu pour la présen- LA PRESENTATION DU BILAN Générale du Royaume, de la Direction
tation bilancielle.
D’OUVERTURE des Domaines de l’Etat et de la Direction
Générale des Impôts.
Il découle des différents éléments consti-
tutifs du bilan d’ouverture de la comp- Il convient de prime abord, de préciser
que l’établissement du premier bilan Elles portent également, sur d’autres com-
tabilité de l’Etat, que le tableau de la
d’ouverture de l’Etat est un processus posantes du bilan recueillies, enrichies et
situation nette est présenté en actif et
partenarial qui doit nécessairement et fiabilisées en relation avec l’ensemble des
en passif :
inéluctablement, s’inscrire dans une tra- intervenants. C’est le cas notamment des
• L’actif immobilisé représente ainsi, la jectoire d’amélioration continue, comme immobilisations financières, des infrastruc-
grande composante dont la maîtrise le préconisent d’ailleurs, les normes tures, des stocks et des engagements hors
reste tributaire du degré d’implication comptables internationales en vigueur bilan.
d’acteurs externes au ministère des pour le secteur public et le référentiel
finances notamment, les services ges- comptable de l’Etat. Le bilan d’ouverture s’inscrit en outre,
tionnaires. En outre, l’actif circulant dans une trajectoire continue d’amélio-
est enrichi par la variable stocks qui Le chantier initié par la Trésorerie géné- ration, d’enrichissement et de fiabilisa-
dépend elle aussi, des informations rale du Royaume à ce titre interpelle tous tion, en ce sens que les spécificités de
collectées auprès desdits services ; les acteurs notamment, les ordonnateurs l’Etat ainsi que les contraintes liées au
• Le passif distingue quant à lui, entre qui interviennent dans la gestion des af- recensement de certaines composantes
les dettes de fonctionnement et les faires publiques. Le degré d’engagement du patrimoine notamment, les immobili-
dettes de transfert pour faire ressortir ou d’adhésion desdits acteurs à l’opéra- sations, impose nécessairement que l’opé-
le rôle redistributeur de l’Etat et par- tion de recensement de leur actif condi- ration de fiabilisation du bilan d’ouverture
tant, prendre en compte les risques tionne dans une large mesure la réussite soit inscrite dans la durée. Les normes
potentiels concrétisés par la consta- de cette entreprise. comptables internationales préconisent à
tation des provisions pour risques et ce titre, 5 ans pour la fiabilisation des don-
charges. nées y afférentes.

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Le bilan d’ouverture gagnera ainsi en Il reste entendu que les immeubles bâtis Engagements de l’Etat
fiabilisation au fur et à mesure de l’avan- et terrains construits ont été compta-
cement des travaux de la réforme comp- bilisés à la valeur du marché et feront Les engagements de l’Etat corres-
table et du parachèvement de l’opéra- l’objet d’une réévaluation, et que les pondent à des passifs éventuels et
tion de recensement et de valorisation règles d’évaluation ont été adaptées à consistent soit, en une obligation poten-
de l’intégralité des composantes du patri- certains biens spécifiques, tels que les tielle de l’Etat à l’égard de tiers résultant
moine de l’Etat. infrastructures routières qui seront éva- d’évènements dont l’existence ne sera
luées au coût de remplacement à neuf, confirmée que par la survenance d’évè-
Les travaux engagés à l’occasion de la tenant compte de la dépréciation liée à nements futurs incertains et qui ne sont
préparation du bilan d’ouverture de la leur état. pas totalement sous le contrôle de l’Etat,
comptabilité de l’Etat ont porté respec- soit, en une obligation de l’Etat à l’égard
tivement, sur le recensement et la valo- Immobilisations financières de tiers dont il n’est pas probable ou cer-
risation des immobilisations corporelles tain qu’elle se traduira par une sortie de
et incorporelles, des immobilisations Les immobilisations financières ayant fait ressources sans contrepartie au moins
financières, des stocks, des engagements l’objet du bilan d’ouverture de la comp- équivalente attendue de celui-ci.
de l’Etat ainsi que sur la reprise des soldes. tabilité de l’Etat ont porté sur les prêts et
avances, les participations de l’Etat, les La norme s’applique également aux
Immobilisations corporelles et dotations en capital aux établissements engagements reçus qui sont enregistrés
incorporelles publics ainsi que sur les droits d’adhé- et évalués de la même manière que les
sion aux organismes internationaux. engagements donnés.
Par dérogation aux normes IPSAS qui
retiennent le critère de contrôle pour La valeur des immobilisations financières Ces engagements reçus ou donnés
inscrire les biens dans le bilan, le critère qui va figurer au bilan d’ouverture sera sont regroupés au niveau du recueil
retenu pour la comptabilité de l’Etat au retenue à partir des bilans sociaux ou des normes en trois catégories cor-
Maroc reste le critère de propriété comme consolidés des établissements publics respondant respectivement, aux en-
principe permettant l’enregistrement des tenus au niveau de la Direction des En- gagements résultant d’accords bien
biens au niveau du tableau de la situation treprises Publiques et de la Privatisation définis, aux engagements résultant de
nette. pour ce qui est des participations de l’Etat la mise en jeu de la responsabilité de
et des dotations en capital et des chiffres l’Etat ou d’une obligation reconnue
Cette dérogation s’explique par les comptables disponibles au niveau de la par l’Etatainsi qu’aux engagements
contraintes liées à la tenue de la comp- Trésorerie Générale du Royaume et de de retraites, à savoir les engagements
tabilité dans le secteur public. En effet, la Direction du Trésor et des Finances résultant des régimes non cotisants
l’examen de ladite comptabilité a permis Extérieures pour les autres compo- ou des régimes spéciaux de retraite.
de constater qu’un certain nombre d’ac- santes des immobilisations financières.
teurs tiennent encore leur comptabilité Les engagements reçus ou donnés vont
selon le référentiel comptable national Stocks figurer en hors bilan et ils feront l’objet
qui privilégie l’approche juridique sur d’un recensement auprès des acteurs
l’approche économique. Les stocks sont les biens acquis et déte- concernés. Un examen des engage-
nus pour la revente ou la consomma- ments non réglés doit être effectué pour
Pour éviter tout risque de double comp- tion. Ils comprennent les matières et déterminer ceux pour lesquels les pres-
tabilisation et par souci de prudence, fournitures consommables, les pièces de tations avaient néanmoins été fournies
l’enregistrement des opérations comp- rechange pour des immobilisations cor- au 31 décembre de l’année précédant
tables au niveau de la comptabilité de porelles, les stocks stratégiques destinés l’année d’établissement du bilan d’ou-
l’Etat sera effectué selon le principe de à faire face aux catastrophes naturelles, verture.
propriété juridique en attendant que tout les supports didactiques et matériels pé-
le secteur public soit aligné aux normes dagogiques, les produits en cours ainsi Arrêté des comptes et reprises des
comptables internationales (IPSAS) pour que les marchandises ou autres produits soldes
pouvoir faire évoluer l’approche d’une destinés à la vente ou à la distribution
vision juridique basée sur le critère de pour des prix symboliques ou nuls. L’arrêté des comptes est une validation
propriété à une logique économique qui fige, à une date donnée, les écritures
fondée sur le critère de contrôle des Le bilan d’ouverture sera alimenté en comptables sachant que Le bilan d’ou-
biens. premier lieu, par les données communi- verture de l’Etat doit découler directe-
quées par les départements ministériels ment de l’arrêté des comptes définitifs à
Les règles d’évaluation adoptées pour dont le stock est important. L’opération la fin de l’exercice.
les immobilisations corporelles et incor- sera généralisée à l’ensemble des minis-
porelles lors de leur entrée dans le patri- tères au fur et à mesure de l’avancement L’objectif est de calculer les soldes d’ou-
moine de l’Etat, ont porté sur le coût des travaux de la réforme comptable et verture au 1er janvier de l’année d’adop-
d’acquisition pour celles acquises à titre dans les délais prévus par les normes tion du bilan d’ouverture conformément
onéreux, sur le coût de production pour comptables internationales. aux normes IPSAS, car la fiabilité et la
celles produites par les services de l’Etat précision des montants figurant dans
et sur la valeur du marché, pour celles les états financiers, en fin d’exercice, dé-
acquises à titre gratuit. pendent de la précision de ces soldes.

Revue de la Trésorerie Générale du Royaume 13


SPECIAL
PLAN COMPTABLE

L’établissement du bilan d’ouverture sera CONCLUSION Grâce au nouveau système comptable,


matérialisé par la reprise des soldes des l’Etat disposerait d’un outil de gestion qui
opérations comptables tirées de la comp- La mise en place d’un système comptable va lui permettre d’accompagner la dyna-
tabilité actuelle ainsi que de celles exploi- inspiré des meilleures pratiques interna- mique, en cours, dans la société maro-
tées à partir des opérations de recense- tionales améliorera la qualité de l’informa- caine en général et dans le domaine
ment du patrimoine. tion comptable, renforcera la crédibilité de des finances publiques en particulier.
l’image du Maroc vis-à-vis des organismes L’établissement d’un bilan d’ouverture
Cette opération concerne aussi bien les internationaux et constituera, à coup sûr, conforme aux standards internationaux
comptes de l’actif circulant, les comptes une grande rénovation du paysage des permettra ainsi, à notre pays d’inaugu-
du passif circulant, les comptes de dettes finances publiques au Maroc. rer une nouvelle ère dans la gestion des
ainsi que les comptes de trésorerie ; finances publiques.
il s’agit de l’opération de clôture de
l’exercice au 31 décembre de l’année
précédant celle d’adoption du bilan
d’ouverture avec prise en compte des
opérations constatées jusqu’au 31 mars
de l’année du bilan d’ouverture mais
correspondant à l’exercice précédent.

14
La réforme
M. Abdelkrim GUIRI
Directeur de la réglementation et
de la normalisation comptable

de la comptabilité de l’Etat
Pour une lecture avisée des états financiers

Les états financiers retenus dans le cadre de gestion à caractère réglementaire, -porelles, immobilisations corporelles,
de la réforme de la comptabilité de l’Etat sachant que la lecture et la compréhen- immobilisations financières) et de l’actif
sont au nombre de quatre, à savoir : sion des états financiers issus de la nou- circulant (hors trésorerie) : stocks, créances
velle comptabilité de l’Etat doivent être fiscales et assimilées, créances non fis-
• le bilan présenté sous la forme d’un faites en se détachant du « prisme » lié cales, autres créances.
tableau de la situation nette ;
aux états financiers de l’entreprise.
• le compte de résultat présenté sous la Il comprend en outre, le passif de l’Etat
forme d’un tableau comprenant les
produits, les charges et le solde des LE BILAN DE L’ETAT OU composé des dettes financières (dette in-
térieure, dette extérieure), des dettes du
opérations de l’exercice ; TABLEAU DE LA SITUATION
• le tableau des flux de trésorerie ; NETTE
passif circulant (hors trésorerie) : dettes
de fonctionnement, dettes de transfert,
• les notes aux états financiers. autres dettes ainsi que des provisions
En termes d’objectifs, le bilan permet de pour risques et charges (provisions pour
Les objectifs communs assignés aux faire ressortir à la fin de chaque exercice risques, provisions pour charges).
états financiers consistent à ce que ces la situation patrimoniale de l’Etat en
états présentent une source d’informa- actifs et en passifs. La structure retenue Le tableau de la situation nette présente
tion synthétique et comparative au ser- pour le bilan en fait un outil pertinent également des particularités par rapport
vice des gestionnaires, des organes de de connaissance et d’analyse du patri- au bilan de l’entreprise dans la mesure
contrôle, du parlement et du citoyen et à moine de l’Etat et surtout, de son évolu- où le poste situation nette ne peut être
leur donner une meilleure connaissance tion dans le temps. rapproché des capitaux propres d’une
de la situation financière et patrimoniale
entreprise puisqu’il ne comporte ni capi-
de l’Etat (identification et valorisation De par le modèle retenu, le bilan donne tal initial ni équivalent du capital initial,
des immobilisations, prise en compte une meilleure signification des données le poste situation nette est déterminé
des stocks, comptabilisation des risques générées par le système comptable et par différence entre l’actif et le passif et
potentiels, vision des charges futures …). les données qu’il recèle, permettent à le poste situation nette qui est composé
cet état financier d’appréhender ulté- du report à nouveau, des écarts de réé-
Les états financiers retenus constituent rieurement la mesure des coûts dans le valuation et d’intégration et du solde
à ce titre, des outils d’appréciation et cadre d’une approche de justification des opérations de l’exercice.
d’analyse de l’évolution de la richesse de des crédits, d’arbitrages de gestion et de
l’Etat (amélioration et enrichissement de mesure des performances. En ce qui concerne l’interprétation du
la lisibilité sur les actifs et les passifs de
bilan ou du tableau de la situation nette,
l’Etat) et des instruments au service de Pour ce qui est des caractéristiques et il sied de noter que le bilan de l’Etat est
la prévision et du pilotage des finances de la logique de présentation, cet état certes, établi conformément aux grands
publiques en termes d’éclairage sur les financier obéit à une présentation bilan- principes de la comptabilité d’exercice
marges de manœuvre, d’arbitrages bud- cielle sous la forme d’un tableau de la en vigueur pour le secteur public et pri-
gétaires et d’impact sur la soutenabilité situation nette qui recense, comme un vé, il ne saurait pour autant donner lieu
des finances publiques. bilan d’entreprise classique, les actifs pré- à une interprétation identique à celle du
alablement identifiés et comptabilisés et bilan de l’entreprise.
Les caractéristiques communes des diffé- les passifs tels qu’ils ont été identifiés et
rents états financiers retenus s’articulent comptabilisés. En effet, il n’existe pas de capital initial ou
autour du fait que ces états sont conçus
capital social, faute de date de création
de manière à présenter la situation fi- Le tableau de la situation nette est pré- et d’établissement de première situation
nancière et patrimoniale de l’Etat sur la senté sous forme de liste en fin d’exer- pour l’Etat et la notion d’actif telle que
base de données chiffrées et non chif- cice retraçant la différence entre l’actif retenue pour l’entreprise ne rend pas
frées (notes aux états financiers) et qu’ils et le passif de l’Etat, selon une approche parfaitement compte de la situation de
sont structurés de manière à permettre comparative sur deux exercices. l’Etat.
une comparaison sur deux années (N et
N-1). S’agissant de son contenu, le bilan ou L’Etat possède un «actif incorporel» très
tableau de la situation nette comprend particulier, à savoir la souveraineté et son
Les états financiers ne sont pas exclusifs l’actif de l’Etat qui est composé de l’actif corollaire, la capacité de lever l’impôt.
d’autres états de synthèse et situations immobilisé (immobilisations incor-

Revue de la Trésorerie Générale du Royaume 15


SPECIAL
PLAN COMPTABLE

En outre, le nombre et la diversité des établi à la fin de l’exercice selon une pré- qu’ils sont par principe, non affectés aux
droits et des obligations de l’Etat conduit sentation en liste et que les charges et charges (principe de non affectation et
forcément à ne retenir que les éléments les produits y soient présentés et détail- de non compensation).
ayant un impact notable sur la situation lés par catégorie et par nature.
financière. Néanmoins, la variation du résultat au
Pour ce qui est du contenu, le compte de cours des exercices renseigne sur l’im-
Par ailleurs, le rôle «d’assureur en dernier résultat de l’Etat comprend trois parties, pact et les conséquences des politiques
ressort» conduit l’Etat à inscrire les types à savoir les produits, les charges et le budgétaires du fait notamment, du res-
d’engagements hors bilan sur la note solde de l’exercice. pect des règles de comptabilisation des
aux états financiers. De même, l’activité charges et des produits et de l’applica-
bilancielle de l’Etat est caractérisée par la Les produits sont composés des produits tion du principe de permanence des
difficulté d’évaluation des actifs à longue de fonctionnement qui correspondent méthodes.
durée de vie et la valorisation de certains à l’ensemble des produits issus de l’acti-
éléments en dirham symbolique. vité ordinaire de l’Etat (produits fiscaux, La non correspondance des produits
produits non fiscaux et autres produits et des charges a, pour conséquence
L’analyse et l’interprétation du bilan ou de transfert qui se composent essen- logique, que le niveau de résultat de
du tableau de la situation nette revêt tiellement, des contributions reçues de l’Etat ne correspond pas a une perte ou
toutefois, un intérêt capital pour les utili- tiers (fonds de concours, dons et legs …) à une création de valeur par rapport aux
sateurs, dès lors que pour l’actif, elle per- et des produits financiers qui résultent moyens engagés (comme dans le cas
met d’en suivre l’évolution de la valeur notamment, des immobilisations finan- d’une entreprise). Un résultat net néga-
et d’en apprécier la manière dont l’Etat cières, de la trésorerie, des créances tif ne signifie pas forcément une diminu-
en gère les différents éléments et que financières, de la gestion active de la tion de la richesse de l’Etat.
pour le passif, le bilan fournit des infor- dette (participations, autres produits
mations importantes pour apprécier financiers). LE TABLEAU DES FLUX DE
la soutenabilité des politiques budgé-
taires sachant que cette information est Les charges sont composées des charges
TRESORERIE
enrichie par les engagements hors bilan de fonctionnement (frais de personnel,
Les objectifs assignés au tableau des
portés sur les notes aux états financiers. achat des biens, services, subventions
flux de trésorerie consistent à identifier
pour charge de service public ….), des
et à présenter pour un exercice consi-
Par ailleurs et pour les produits fiscaux, charges de transfert qui sont des verse-
déré les entrées et les sorties des diffé-
leur suivi sur une base autre que l’encais- ments de l’Etat motivés par sa mission
rents éléments de la trésorerie de l’Etat
sement permet de mieux mesurer le ren- de régulateur économique et social (bé-
(trésorerie actif et trésorerie passif ). Les
dement du système fiscal et de fournir néficiaires : ménages, entreprises, col-
informations concernant les flux de tré-
des données pour l’amélioration de la lectivités locales, EEP, …) et des charges
sorerie permettent d’établir comment
gestion des recettes et de leur prévision. financières (intérêts et commissions,
l’entité a généré la trésorerie nécessaire
Il en est de même pour la trésorerie, dès dette intérieure et extérieure ….).
au financement de ses activités et com-
lors que le bilan permet de donner les
ment cette trésorerie a été utilisée.
éléments nécessaires à une meilleure Le solde de l’exercice est obtenu par dif-
maîtrise de la trésorerie de l’Etat (actif et férence entre le total des produits et le
L’information relative aux flux de tréso-
passif ). total des charges.
rerie permet aux utilisateurs des états
financiers de prédire les besoins de tré-
LE COMPTE DE RESULTAT DE L’interprétation du compte de résul-
sorerie de l’entité, sa capacité à générer
tat de l’Etat et la signification du solde
L’ETAT de l’exercice doivent être effectuées
de la trésorerie à l’avenir et de financer
les changements dans l’étendue et la na-
avec une certaine prudence, du fait
Le compte de résultat de l’Etat a pour ture de ses activités. Le tableau des flux
d’un certain nombre de spécificités de
principaux objectifs de renseigner sur de trésorerie fournit également à l’entité
l’Etat à prendre en compte comme par
le niveau du résultat des comptes de un moyen de justifier les entrées et les
exemple, la difficulté de rattachement
l’Etat par comparaison entre le total des sorties de trésorerie pendant l’exercice.
des charges et des produits. En effet et
produits et des charges, de donner une
contrairement à l’Etat, pour l’entreprise,
idée précise sur la variation du résultat Pour ce qui est des règles et principes
ce principe de rattachement permet de
de l’Etat d’un exercice à l’autre et sur de présentation du tableau des flux de
mettre en rapport les charges et les pro-
plusieurs exercices et de délivrer une trésorerie, il convient de préciser que le
duits (notion de profit).
information importante sur les impacts tableau des flux de trésorerie classe les
et les conséquences des politiques bud- activités en activités opérationnelles, en
L’Etat dispose d’un certain nombre de
gétaires. activités d’investissement et en activités
spécificités à prendre en compte notam-
de financement.
ment, le fait que les produits ne corres-
Les principes et les règles d’établisse-
pondent pas pour l’essentiel à la vente
ment du compte de résultat de l’Etat Cette présentation vise à faciliter le
de biens et services produits par l’activi-
consistent à ce que cet état regroupe la rapprochement entre la comptabilité
té ayant engendré les charges (pouvoir
totalité des charges et des produits d’un budgétaire et la comptabilité générale.
de lever l’impôt), que les produits sont
exercice comptable considéré, qu’il soit Elle permet de relier les flux de tréso-
largement indépendants des charges et
rerie liés à l’activité opérationnelle et
16
d’investissement aux opérations bud- unique peut inclure des flux de trésore- partie intégrante des états financiers,
gétaires et les flux de trésorerie liés aux rie classés dans différentes catégories. auxquels elles ne peuvent se substituer.
activités de financement aux opérations Exemple, lorsque le remboursement en Elles complètent et commentent les
de trésorerie non budgétaires. trésorerie d’un emprunt porte à la fois états financiers et sont assujetties aux
sur les intérêts et le capital, l’élément in- mêmes exigences que les autres états
Les notions de recettes et de dépenses térêts peut être classé en tant qu’activité financiers en matière de vérification
sont utilisées dans le tableau des flux opérationnelle, tandis que, l’élément comptable.
de trésorerie pour être distinguées des capital est classé en tant qu’activité de
produits et des charges. Il s’agit des pro- financement. Elles font l’objet d’une présentation or-
duits encaissés ou des charges versées ganisée et systématique regroupant des
par l’Etat au cours d’un exempleercice Par ailleurs, le montant des flux de tré- informations chiffrées ou non chiffrées
déterminé. sorerie nets découlant d’activités opé- et présentent les informations de ma-
rationnelles est un indicateur clé de la nière numérotée pour faciliter le renvoi
En terme de contenu, le tableau des flux mesure selon laquelle les opérations de aux commentaires et tableaux corres-
de trésorerie présente les entrées et les l’entité sont financées, soit par voie d’im- pondants qui y sont développés.
sorties des éléments de la trésorerie de pôts (directement et indirectement),
l’Etat, classés selon trois catégories, à sa- soit par les destinataires des biens et des S’agissant des règles et principes d’éta-
voir les flux de trésorerie liées à l’activité, services fournis par l’entité. blissement des notes aux états finan-
les flux de trésorerie liées aux opérations ciers, les informations fournies dans la
d’investissements et les flux de trésore- En outre, le montant des flux de tréso- cadre de ces notes doivent contribuer à
rie liées aux opérations de financement. rerie nets contribue également à mon- donner une image fidèle du patrimoine,
trer la capacité de l’entité à maintenir sa de la situation financière et des résultats
Les flux de trésorerie liés à l’activité capacité opérationnelle, à rembourser de l’Etat.
comprennent les encaissements et les ses emprunts, à verser des dividendes à
décaissements liés aux opérations de ses contributeurs et à consentir de nou- Ces informations doivent détailler cer-
fonctionnement et de transfert (hors veaux investissements sans recourir à tains renseignements permettant d’ex-
opération d’investissement et de finan- des sources externe de financement. pliquer ou de préciser le contenu de
cement) et les encaissements et les certains postes des états financiers. Elles
décaissements liés aux charges et aux Enfin, les flux de trésoreries opération- doivent produire toutes les données
produits financiers. nelles consolidées à l’échelon central, significatives susceptibles d’influencer
fournissent une indication de la mesure le jugement des utilisateurs (notion de
Les flux de trésorerie liés aux opérations selon laquelle l’Etat a financé ses activi- seuil de signification d’une information).
d’investissements comprennent les en- tés courantes par voie de taxation et de
caissements et les décaissements liés aux prélèvement. Pour ce qui est de leur contenu, les notes
opérations d’acquisition et de cession aux états financiers comprennent no-
immobilières. LES NOTES AUX ETATS tamment, les informations relatives aux
règles et méthodes d’évaluation comp-
FINANCIERS table et les changements de méthodes
Les flux de trésorerie liés aux opéra-
tions de financement comprennent les d’évaluation et de présentation des
En termes d’objectifs, les notes aux
encaissements et les décaissements liés comptes.
états financiers constituent un outil de
aux opérations de financement de l’Etat.
compréhension et d’interprétation des
Elles comportent en outre, le détail des
états financiers, un instrument d’expli-
Le tableau des flux de trésorerie com- informations concernant les montants
cation (règles et méthodes d’évaluation
porte en outre, trois autres postes, à sa- apparaissant dans le tableau de la situa-
/ détail des données des états financiers,
voir les variations de trésorerie, la tréso- tion nette, dans le compte de résultat et
tableaux de passage) et un mécanisme
rerie en début de période et la trésorerie dans le tableau des flux de trésorerie,
d’information complémentaire (engage-
en fin de période. notamment, les variations des éléments
ments hors bilan).
de l’actif et du passif durant l’exercice, le
Les variations de trésorerie sont égales détail des immobilisations corporelles,
Elles ont pour objectifs de fournir l’en-
aux flux de trésorerie liés à l’activité, incorporelles et financières, les informa-
semble des informations utiles à la com-
plus, les flux de trésorerie liés aux tions relatives aux effectifs de l’Etat et le
préhension et à l’interprétation des don-
opérations d’investissement auxquels détail des charges et des produits dont
nées contenues dans les états financiers,
s’ajoutent les flux de trésorerie liés aux les charges de personnel et les produits
de préciser, expliquer, éclaircir et com-
opérations de financement. fiscaux.
menter les états financiers, de compléter
les informations fournies dans le cadre
Les variations de trésorerie sont éga- Elles comprennent enfin, les informa-
des états financiers et d’assurer l’articu-
lement égales à la trésorerie en fin de tions qui ne figurent pas dans les autres
lation entre les différentes composantes
période, moins la trésorerie en début de états financiers mais qui néanmoins,
de la comptabilité de l’Etat (comptabilité
période. doivent être mentionnées et explici-
générale / comptabilité budgétaire), en
tées (engagements hors bilan ….) ainsi
identifiant les écarts et en les expliquant.
En ce qui concerne l’interprétation du ta- que les informations relatives à l’articu-
bleau des flux de trésorerie, il convient de lation entre la comptabilité générale et
Pour ce qui est des caractéristiques des
noter de prime abord, qu’une opération la comptabilité budgétaire (tableaux de
notes aux états financiers, celles-ci font
passage).
Revue de la Trésorerie Générale du Royaume 17
SPECIAL
PLAN COMPTABLE

Le système d’information
Mohamed El Amine SEGHROUCHNI
Chef de la Division du
développement Informatique

comptable Direction de l’appui et de la gestion


des ressources

Un levier incontournable pour la réforme de la comptabilité de l’Etat


La Trésorerie Générale du Royaume a LES OBJECTIFS ASSIGNES AU Il est de nature enfin, à éclairer les ré-
entrepris durant ces dernières années sultats obtenus et la performance des
SYSTEME D’INFORMATION
un vaste chantier de modernisation de futurs responsables des programmes,
l’ensemble de ses métiers, notamment la COMPTABLE en relation avec la nouvelle approche
réforme du système comptable de l’Etat. budgétaire axée sur les résultats.
La mise en œuvre de cette importante Le Système d’information dédié à la
nouvelle comptabilité de l’Etat traite les
réforme repose indéniablement sur la LE PERIMETRE FONCTIONNEL
mise en place d’un système d’informa- processus comptables conformément
au référentiel de la comptabilité de l’Etat CIBLE DU SYSTEME
tion performant, levier fondamental et
outil incontournable dans tout proces- adopté par le Conseil National de la D’INFORMATION COMPTABLE
sus de réforme et de modernisation, Comptabilité, le 16 décembre 2008.
Le système d’information comptable a
notamment lorsqu’il s’agit d’une refonte été bâti sur la base d’une solution pou-
en profondeur du dispositif régissant la Le système d’information comptable a
pour vocation de veiller à l’application vant gérer un périmètre fonctionnel
comptabilité et les comptes de l’Etat. élargi. Le schéma, ci-après, illustre ce
des principes de la nouvelle réforme
comptable de l’Etat en termes de pré- périmètre tout en précisant ce qui a été
LA REFORME COMPTABLE sentation et de fonctionnement des retenu dans le cadre du projet actuel
EN TANT QUE CHANTIER DE comptes, de tenue de la comptabilité ainsi que les périmètres d’évolution fu-
MODERNISATION D’ENVERGURE budgétaire des dépenses et des recettes turs du système.
NATIONALE et de la comptabilité générale en droits
Le périmètre fonctionnel du système
constatés, avec une préfiguration de la
d’information de la comptabilité de
Le cadre comptable actuel, formé d’une comptabilité d’analyse des coûts, de la
l’Etat couvre toutes les dimensions de la
simple nomenclature de comptes dont gestion prévisionnelle de la trésorerie et
nouvelle comptabilité, en l’occurrence
l’origine remonte aux années trente, se de la consolidation des comptes publics.
la comptabilité budgétaire fondée sur
limite à l’enregistrement des opérations les encaissements et les paiements, la
budgétaires et de trésorerie dans la Ledit système vise en outre, à fédérer
toutes les fonctions comptables de l’Etat comptabilité générale fondée sur le
seule optique «encaissements décaisse- principe de la constatation des droits et
ments». dans une seule application comptable
commune à tous les gestionnaires et à des obligations et la comptabilité analy-
Aussi et afin de remédier aux insuffi- tous les comptables publics de manière tique destinée à analyser les coûts des
sances de ce cadre et de répondre aux à fournir plus de lisibilité à l’emploi des différentes actions engagées dans le
besoins en matière d’information, de crédits budgétaires ouverts par l’autori- cadre des politiques publiques.
mesure des performances et de dévelop- sation parlementaire, à simplifier et mo-
Le périmètre fonctionnel du système
pement d’analyses financières, à même derniser les circuits comptables de l’Etat
d’information dédié à la comptabilité de
d’éclairer les autorités supérieures dans notamment, les processus de centralisa-
l’Etat comporte également une dimen-
la prise de décision, la Trésorerie Géné- tion comptable et à améliorer les délais
sion liée à la comptabilité auxiliaire des-
rale du Royaume a élaboré un nouveau de traitement des opérations comp-
tinée à développer certaines opérations
plan comptable, en s’inspirant du code tables de l’Etat et de production des
comptables particulières comme celles
général de normalisation comptable. états de synthèses budgétaires (loi de
relatives aux clients, aux fournisseurs et
règlement), comptables (bilan, compte
Le nouveau plan comptable de l’Etat éventuellement aux stocks.
de résultat,..) et des situations de gestion
s’inspire également des normes IPSAS (tableaux de bord comptables). Il couvre en outre, un ensemble d’opé-
(International Public Sector Accoun- rations liées à la gestion de la trésorerie
ting Standards), qui sont les nouvelles Il vise également à renforcer le contrôle de l’Etat et à la confection de situations
normes comptables et financières in- et la sécurisation des opérations comp- se rapportant à la gestion prévisionnelle
ternationales du secteur public, et qui tables de manière à contribuer à la de la trésorerie ainsi que l’ensemble du
sont en train de s’imposer dans toutes consolidation de la qualité des comptes dispositif lié au reporting réglementaire
les entités publiques du monde entier et de la piste d’audit, à optimiser la et de gestion relatifs au système comp-
(États, municipalités et établissements productivité du personnel des services table de l’Etat.
publics). Produites par l’IFAC (Interna- comptables de l’Etat, à faciliter les tra-
tional Federation of Accountants), ces vaux des auditeurs internes et à réussir Il comporte enfin, les mécanismes se
normes imposent à tous les organismes par conséquent, la transition vers une rapportant au reporting nécessaire à la
publics de fournir des états financiers en première certification des comptes de consolidation des comptes publics et
convergence avec ceux du secteur privé. l’Etat. l’analyse financière y afférente.
18
Comptabili 1

Analytique (Ordonnateurs) 2

3 Recettes Dette et
de l'Etat de l'Etat Portefeuille

Gestion de

Référentiels
La

Centralisation
1 2
1

Reporting, pilotage
1

Reporting pour la consolidation des comptes de l'


'Etat et des
2 1
1

1 : Périmètre-Projet 2 et 3 : périmètre-cible

LA GENESE DU CHOIX DE LA Les principes directeurs ayant prévalu • Les questions/entretiens complémen-
tout au long de cette étude ont fonda- taires avec les éditeurs ;
SOLUTION PROGICIEL
mentalement porté sur l’adoption d’un • La rédaction des fiches d’analyse pour
périmètre fonctionnel cible élargi «think chaque progiciel/éditeur ;
L’étude lancée par la Trésorerie Générale
du Royaume pour son schéma directeur
big», la définition d’une trajectoire de • La synthèse générale et l’établisse-
mise en œuvre progressive «start small», ment de la liste des progiciels éligibles.
informatique et des télécommunica-
le choix de paliers fonctionnels visant la
tions pour la période allant de 2004 à
maîtrise du périmètre, des délais ainsi Cette étude a ensuite porté sur la pro-
2006 a préconisé le recours à une solu-
que l’appropriation du système par duction d’un «RFI (Request For Informa-
tion de type progiciel pour la comptabi-
les utilisateurs et surtout, l’intégration tion)», sous forme d’un appel à manifes-
lité de l’Etat et la centralisation.
du nouveau système dans le schéma tation d’intérêt, à l’effet de consulter les
d’urbanisation dans une perspective de éditeurs pour en sélectionner les deux
Ainsi et en vue d’approfondir cette re-
cohérence globale et de rationalisation meilleures offres. Cette démarche a par
commandation, la Trésorerie Générale
des coûts de la mise en œuvre et de la la suite, donné lieu à la réalisation d’un
du Royaume a adopté une démarche en
maintenance. prototype par chacun des éditeurs –
deux étapes clés :
intégrateurs présélectionnés, en vue de
Le schéma suivant présente les princi- vérifier les réponses aux RFI, visualiser
La 1èreétape, d’une durée de 5 mois,
pales phases de l’étude de définition du les solutions proposées face aux besoins
a consisté en une étude préalable de
système d’information dédié à la nou- techniques et fonctionnels exprimés
définition et de choix d’une solution
velle comptabilité de l’Etat. et valider le degré de motivation des
progiciel, en faisant appel à une exper-
tise externe sur les plans méthodolo- concurrents pour la réalisation du projet.
Confiée à un cabinet d’experts, cette
gique, fonctionnel et technique en vue
étude a consisté tout d’abord à étudier Cette étude a été couronnée par la ré-
d’accompagner les équipes de la Tré-
les solutions de type progiciel du mar- daction d’un cahier des charges d’appel
sorerie Générale du Royaume dans les
ché et à en déterminer une «Short List», d’offre «RFP (Request For Proposal)»
choix d’une solution du marché, apte
ce qui s’est déroulée selon les étapes pour la fourniture, l’installation et la
à satisfaire les besoins de la comptabi-
décrites, ci-après : mise en œuvre de la solution progiciel
lité, à traiter les processus comptables
de l’Etat conformément à la nouvelle • Le choix des progiciels à comparer et présélectionnée.
réforme comptable et à respecter les leur présélection ;
orientations technologiques du schéma • Une première analyse fonctionnelle et L’élaboration d’un prototype par les
deux candidats présélectionnés a per-
directeur informatique. Cette étude a technique des progiciels ;
mis à la Trésorerie Générale du Royaume
permis de définir une stratégie d’appel • L’étude documentaire et l’analyse dé- d’approfondir l’analyse des besoins et
d’offres impliquant les éditeurs. taillée des solutions ;
Revue de la Trésorerie Générale du Royaume 19
SPECIAL
PLAN COMPTABLE



  


  
 




  


  






de préciser le cahier de charge du futur La 1ère phase, d’une durée de 2 mois La 3ème phase, d’une durée de 4 mois,
marché. Elle a également contribué au et demi, a permis la définition, l’étude a regroupé les parties relatives à la réa-
partage de la problématique de la comp- détaillée ainsi que l’analyse et la concep- lisation et à l’intégration de la solution,
tabilité et de la centralisation et partant, tion du système. Elle a englobé un en- notamment la préparation des utilisa-
à favoriser une réflexion commune sur semble de prestations liées notamment, teurs pour les tests, la validation des
les conditions de mise en œuvre de la à la préparation de l’environnement de business flows de bout en bout, incluant
nouvelle comptabilité de l’Etat. Elle a en- travail, la mise en place du plan d’assu- les interfaces, les données issues des ou-
fin, largement aidé à l’appropriation des rance qualité, la formation de l’équipe tils de chargement, les états spécifiques
concepts des solutions de type PGI (Pro- projet, la modélisation initiale, à travers et les personnalisations du logiciel, le
giel de Gestion Intégrée), de leur apport l’étude de convergence et l’analyse des déroulement des scénarios de tests ainsi
et de leurs conséquences sur le pilotage écarts entre les besoins et la solution que l’expérimentation de la solution en
et le suivi de la réforme. proposée ainsi que la définition des ar- conditions réelles de fonctionnement.
chitectures conceptuelle, organisation-
Par ailleurs, le prototypage a été une op- nelle et technique de la solution. La 4ème et dernière phase, d’une durée
portunité pour approfondir la percep- de 3 mois, qui inclut la migration des
tion des travaux à réaliser pour effectuer La 2ème phase, d’une durée de 5 mois licences, la transition et la mise en pro-
le passage au nouveau plan comptable. et demi, a englobé le paramétrage, le duction, a comporté les prestations de
développement des fonctionnalités spé- type migration des licences fournies
Dans une 2ème étape, et suite à une sé- cifiques à la comptabilité de l’Etat ainsi lors de la première phase de « Licences
rie de négociations ardues avec les édi- que la définition des itérations de tests. Utilisateurs » vers « Licences Entreprise
teurs présélectionnés, la Trésorerie Gé- Cette phase a permis de réaliser le para- », paramétrage de l’environnement de
nérale du Royaume a conclu un marché métrage de la solution réceptacle, des production, définition d’une procédure
négocié avec la société qui présentait la schémas comptable au niveau de l’inter- technique de déploiement, réalisation
meilleure offre sur les plans fonctionnel, préteur comptable afin d’intégrer les de la reprise des données nécessaires au
technique et financier. comptes rendus des événements issus démarrage de l’exploitation au niveau
des applications métiers, l’affinage de des postes comptables, formation des
LES ETAPES DE MISE EN la solution en complétant l’étude détail- formateurs et mise en œuvre de la solu-
lée des besoins, le développement des tion dans des sites.
OEUVRE DE LA SOLUTION scénarios de test/recette et l’affinage
PROGICIEL de l’architecture technique. Elle a éga-
lement, permis l’étude des interfaces
Le projet de mise en œuvre du système et workflows avec les applications et
d’information comptable a été entamé logiciels existants et les interfacesavec
le 25 mai 2009. Il s’est déroulé selon les les partenaires ainsi que l’étude de la re-
4 phases suivantes : prise des données et des états de sortie.

20
Applications remettantes Applications remettantes assimilées Fichiers Excel
Ecritures comptables des événements
Événement 1 Événement 2 Événement ... Événement n Morasse budgétaire Fichiers des partenaires (Ex : RAF)
hors applications remettante

ODI :
Extraction ou chargement des fichiers des événements à Oracle Web ADI : traitement des
comptabiliser (y compris les morasses budgétaires) opérations non couvertes par
les applications remettantes
BPEL
Structuration de l’évènement

Oracle Finance : Ouverture / Clôture de Création des Créer la comptabilisation Consulter / Editer des
Comptabilité Journée comptable événements (Interprétation comptable) états
auxiliaire

FAH : Interpréteur comptable des événements

Oracle Finance :
Comptabilité
Ouverture / Clôture du Imputation des pièces Consulter / Editer des
Générale, Mois comptable états Fin du cycle
Lettrage des comptes
budgétaire (Calendrier GL)
et engagement
GL : Comptabilité Budgétaire, Générale et d’Engagement

L’ARCHITECTURE GLOBALE (FAH) ou General Ledger (GL), à savoir les Enfin, la couche General Ledger corres-
contrôles de la validité des informations pond au progiciel comptable, qui est le
DU SYSTEME D’INFORMATION
(valeurs de la clé comptable flexible réceptacle final des opérations comp-
DE LA COMPTABILITE existantes, respect des règles de sécurité tables dans la solution. Elle reçoit les
et la validation croisée). opérations comptables définitivement
Le schéma, ci-dessus, présente l’archi- validées, émanant de FInancial Accoun-
tecture globale du système d’informa- Une autre couche est prévue dans la so- ting Hub.
tion dédié à la réforme de la comptabi- lution. Elle correspond à BPEL (Business
lité de l’Etat. Process Execution language) et consti- LES FACTEURS CLE DE REUSSITE
tue la composante de la solution desti-
Il ressort de ce schéma que les systèmes née à effectuer les contrôles de confor-
DU SYSTEME D’INFORMATION
remettants, composés des applications mité nécessaires à l’acceptation des COMPTABLE
métiers gérant des événements ayant Comptes Rendus d’Evénements (CRE)
un impact comptable ainsi que des qui sont générés à partir des opérations Le système d’information comptable est
fichiers reçus des comptables rattachés ayant un impact comptable, récupérés un système multidimensionnel qui a un
(receveur de l’administration fiscale, re- par Oracle Data Integrator à partir des impact aux niveaux fonctionnel, tech-
ceveurs de la douane et secrétaires gref- applications informatiques métiers de la nique et organisationnel. Sa réussite né-
fiers), sont les sources d’alimentation Trésorerie Générale du Royaume et des cessite une appropriation par les utilisa-
principale du progiciel comptable. comptables rattachés. teurs et une bonne maîtrise des risques.

Oracle Data Integrator (ODI) est la Les événements rejetés par BPEL à cause Pour cela, un vaste programme de
couche technique permettant d’extraire des erreurs de conformité font l’objet conduite du changement a été entrepris
les opérations qui ont un impact comp- d’un rapport d’erreur. dans le but de favoriser l’adhésion de
table (recouvrement d’un impôt, paie- tous les responsables et acteurs concer-
ment d’une dépense, etc.), à partir de Les événements sont ensuite, gérés au nés en procédant notamment, à une
ces systèmes. Pour les opérations non niveau de la couche de l’interpréteur communication continue sur les objec-
encore couvertes par les applications comptable, point d’entrée unique vers le tifs et l’état d’avancement du projet,
informatiques, une couche nommée progiciel. Cette couche dénommée FAH l’implication et la formation des utilisa-
« Web ADI », a été prévue. Il s’agit d’un (Financial Accounting Hub), prend en teurs clés dès le début du projet, la mise
outil de la solution permettant d’utiliser charge les schémas comptables arrêtés en œuvre de la documentation du projet
un tableur (Excel) pour saisir des pièces par la Trésorerie Générale du Royaume (support de formation, manuel utilisa-
comptables et en charger le contenu pour toutes les opérations exécutées par teurs, …), l’organisation du passage à la
dans les applications de la solution pro- les comptables publics, qui ont un im- cible de façon graduelle à travers, un dé-
giciel. pact comptable. Elle assure la fonction ploiement progressif de la solution basé
de traduction des événements métiers sur la définition d’une stratégie de bas-
La saisie dans le fichier Excel est sou- en écritures comptables, moyennant les culement adéquate ainsi que l’assistance
mise aux mêmes contrôles que la saisie règles et les modalités qui y sont implé- soutenue au démarrage de la solution.
directe dans FInancial Accounting Hub mentées.
Revue de la Trésorerie Générale du Royaume 21
SPECIAL
PLAN COMPTABLE

Par ailleurs, pour une bonne gestion des d’en assurer une bonne gouvernance et Actuellement, la solution est installée au
risques du projet, la Trésorerie Géné- un pilotage par le métier. La structure niveau des sites pilotes des circonscrip-
rale du Royaume a veillé à une bonne de cette organisation a été, par ailleurs, tions financières de Rabat et de Casa-
maîtrise du périmètre fonctionnel en construite sur la base d’une équipe pro- blanca. Sa généralisation s’opère de fa-
visant une cible élargie avec une mise jet commune entre la Trésorerie Géné- çon progressive pour couvrir l’ensemble
en œuvre par paliers successifs stables rale du Royaume et le prestataire de des postes comptables relevant de la
en vue d’une bonne gestion des délais service en veillant à une définition claire Trésorerie Générale du Royaume, tant
et des coûts du projet. des rôles et responsabilités entre les au niveau national qu’à l’étranger.
deux parties.
Enfin, une attention particulière a été
accordée à l’organisation du projet afin

Obligation au porteur, N° 175,260


17 mai 1910
22
La qualité comptable
Rachid Amghar
Chef de la Division de la normalisation
Direction de la réglementation
et de la normalisation comptable
Plus qu’une composante, une finalité
et un objectif majeur de la réforme
La qualité comptable peut être définie demeure la qualité comptable puisque des informations comptables et d’assu-
soit par son objet, soit par son objectif. ces réformes s’inscrivent dans un contexte rer la réflexion d’une image fidèle des
Dans l’acception du premier, elle est d’exigences croissantes en termes de comptes publics.
présentée comme étant l’ensemble des qualité de l’information financière et
principes, des normes et des contrôles comptable. Il s’agit des principes de prudence, de
qui encadrent l’enregistrement et le trai- clarté, d’importance significative et de
tement des opérations comptables de- C’est pour cela d’ailleurs, qu’il est aisé de régularité et de sécurité, qui doivent
vant permettre la restitution de l’image constater que les réformes de la comp- concourir à assurer la qualité comptable
fidèle de l’information financière et tabilité sont toujours couplées à l’exi- aux informations financières et comp-
comptable. gence de certification des comptes qui, tables produites dans les comptes de
in fine, n’est autre que le contrôle de la l’Etat.
Sous l’angle du second, elle est censée qualité de l’information comptable par
apporter une réponse aux exigences dé- un auditeur externe. Le principe de prudence
cisionnelle de la gouvernance publique
en permettant une meilleure informa- L’auditeur externe est, en effet, amené En vertu de ce principe les incertitudes
tion comptable des décideurs et par- dans le cadre de sa mission de certifica- présentes susceptibles d’entraîner un
tant, faciliter l’exercice de la comparabi- tion à déterminer si le formalisme, impo- accroissement des charges ou une dimi-
lité et de l’évaluation. sé par les référentiels comptables et qui nution des produits de l’exercice doivent
est le garant de la qualité comptable, a être prises en considération dans le
Ainsi et si la qualité comptable a été été appliqué sans altération majeure calcul du résultat de l’exercice.
considérée depuis toujours comme un dans la tenue des comptes.
attribut permanent de tout système de Le principe de clarté
comptabilité, elle devient, aujourd’hui, LES DETERMINANTS ET
une exigence majeure dans le cadre de Selon ce principe, les opérations et les
la comptabilité patrimoniale, dans la
PRINCIPES FONDAMENTAUX informations sont inscrites dans les
mesure où celle-ci est construite autour LIES A LA QUALITE COMPTABLE comptes sous la rubrique adéquate, avec
d’un dispositif réglementaire et tech- la bonne dénomination et sans compen-
nique qui s’appuie sur des principes fon- La comptabilité en droits constatés met sation entre elles. Ainsi, les éléments
damentaux comme le principe de pru- l’accent sur la transparence et la qualité d’actifs et de passifs sont évalués sépa-
dence, le principe de clarté, le principe de l’information et ce, au travers du res- rément et les éléments des états finan-
de régularité et de sincérité…etc. et sur pect d’un formalisme normatif rigou- ciers sont inscrits dans les postes appro-
des notions-maîtresses comme celles de reux et des outils ayant trait à la perfor- priés sans aucune compensation entre
qualité des comptes, d’image fidèle ou mance des systèmes d’information et ces postes.
de certification. des procédés de contrôle de la qualité.
Le principe d’importance significative
Dans cette ligne, nous pouvons recen-
LES ENJEUX DE LA QUALITE
ser quatre éléments fondamentaux qui En vertu de ce principe, les états finan-
COMPTABLE constituent les déterminants majeurs de ciers doivent révéler tous les éléments
la qualité comptable, puisqu’ils contri- dont l’importance peut affecter les
La comptabilité en droits consacrés est buent à la définition de celle-ci. Il s’agit évaluations et les décisions, sachant
exigeante en matière de qualité comp- des principes fondamentaux, des normes que demeure considérée comme signi-
table, dans la mesure où elle revêt une comptables, du système d’information et ficative, toute information susceptible
certaine complexité du fait qu’elle im- du dispositif de contrôle interne et d’au- d’influencer l’opinion que les utilisateurs
plique la comptabilisation des actifs, des dit interne. des états financiers peuvent avoir sur le
passifs, des provisions, des charges…
patrimoine, la situation financière et le
etc., ce qui implique un contrôle rigou- Les principes comptables fondamen- résultat.
reux des données et des informations et taux participent à la fixation du cadre
une maîtrise des risques devant prévenir normatif devant contribuer à la préser- Le principe de régularité et de
les erreurs significatives. vation de la qualité de l’information fi- sincérité
nancière. Sous cet angle, les référentiels
Le benchmark international montre que comptables comprennent des principes En application de ce principe, la comp-
l’enjeu majeur des réformes comptables fondamentaux dont certains d’entre eux tabilité de l’Etat est tenue confor-
s’inspirant des normes internationales, ont pour finalité de garantir la fiabilité mément aux règles et procédures
Revue de la Trésorerie Générale du Royaume 23
SPECIAL
PLAN COMPTABLE

prévues par la réglementation en Dans ce cadre, le contrôle interne consti- il est judicieux d’aménager une large
vigueur. Celles-ci sont appliquées de tue un dispositif de maîtrise des risques, place aux enjeux de développement des
manière à traduire avec sincérité, la notamment ceux qui peuvent avoir un systèmes d’information car dans la ligne
connaissance que les responsables de impact significatif sur la qualité comp- des missions nouvelles crées par la nou-
l’établissement des comptes de l’Etat table. Il contribue à ce titre, à donner velle comptabilité en matière de qualité
ont de la réalité et de l’importance des une assurance raisonnable sur la sincé- comptable, de sincérité des enregistre-
événements enregistrés. rité et l’image fidèle des comptes. ments et de respect des normes et des
procédures, les systèmes d’information
L’élaboration d’un référentiel comp- Dans son organisation, il s’appuie sur jouent un rôle déterminant dans la fia-
tables adapté aux spécificités de l’action trois piliers, à savoir : la formalisation bilité de l’information, sa disponibilité,
étatique constitue la clé de voûte de des normes de contrôle interne, l’élabo- son actualité, sa pertinence et sa mise en
la réforme de la comptabilité de l’Etat, ration d’une cartographie des risques corrélation avec d’autres informations.
puisque ce sont ces normes qui défi- comptables et enfin, la mise en place
nissent les règles applicables pour l’éla- d’un dispositif d’audit interne permet- La qualité des comptes est à ce titre, tri-
boration des états financiers et qui per- tant d’évaluer l’efficacité du dispositif de butaire de la traçabilité des opérations
mettent de donner une vue globale du contrôle interne et la mise en œuvre des financières et de la piste d’audit dont
patrimoine et de l’activité de l’Etat. mesures prises pour corriger les risques l’organe en charge de la certification des
identifiés. comptes a grandement besoin et que
Le recueil des normes est nécessaire pour seul un système d’information comp-
définir un cadre normatif clair, selon les Ainsi, nous pouvons être amenés à table pertinent peut générer et assurer.
règles duquel, les opérations financières, constater que la bonne application des
patrimoniales et leur enregistrement en règles comptables repose, en grande CONCLUSION
comptabilité doivent s’insérer. La bonne partie, sur la qualité des dispositifs de
application des règles comptables est contrôle interne et d’audit interne mis En conclusion de cette contribution, il
essentielle pour l’appréciation des situa- en place, car comme dans toute dé- s’avère que les nouvelles exigences en
tions financières et comptables de l’Etat, marche de qualité, l’évaluation des pro- matière de gouvernance des finances
dans la mesure où ces règles constituent cédures mises en place constitue l’une publiques renforcent l’importance des
le référentiel par rapport auquel les des mesures clés visant la garantie de la systèmes d’information financiers et
comptes de l’Etat vont être certifiés par qualité comptable. comptables et surtout l’intérêt que revêt
l’organe habilité.
la qualité des comptes publics.
Pour prendre corps, les nouveaux réfé-
LE DISPOSITIF DE CONTROLE rentiels comptables doivent s’adosser L’actualité internationale récente a
DE QUALITE à un système d’information dédié qui mis en évidence les conséquences, les
peut les prendre en charge et gérer les risques et les enjeux de la qualité des
La qualité comptable est une condition changements qu’ils impliquent tant au comptes, en général et des comptes
de la fiabilité des comptes car la pré- niveau de la conception que des exi- publics, en particulier et surtout les
sentation d’états financiers réguliers et gences techniques. coûts liés au risque de non qualité des
sincères nécessite une fiabilisation de la comptes.
chaîne d’enregistrement des opérations Dans l’optique de la qualité comptable,
qui ne peut être assurée par les seuls il est nécessaire d’avoir conscience que
contrôles opérés en aval par le comp- dans le contexte de réforme des systèmes
table public. comptables de dernière génération,

24
La réforme Comptable de l’Etat
Rachid LAHRACH
Chef du Service de l’arbitrage
en matière des finances locales
Direction de la réglementation
et de la normalisation comptable
Une dimension indissociable
de la réforme budgétaire

De par le monde, les réformes budgé- A ce titre, nous pouvons remarquer LA REFORME BUDGETAIRE,
taires axées sur les résultats et la per- que les réformes engagées ont abouti
UNE MUTATION DANS LA
formance ont toujours et de manière à l’accélération du rythme de réalisation
systématique, été accompagnées par des grands chantiers d’infrastructures, GOUVERNANCE DES FINANCES
la réforme du cadre comptable devant le lancement de grands projets structu- PUBLIQUES
servir à la mesure des résultats et des rants permettant de créer des pôles de
performances. compétitivité régionaux et l’adoption de Si l’actuel dispositif juridique régissant
stratégies ambitieuses embrassant des l’élaboration et l’exécution du budget
En effet, la dimension comptable de- secteurs inscrits dans le cadre de plans de l’Etat a globalement répondu aux
meure à l’international, une composante pluriannuels, tel que le Plan Azur, Rawaj, objectifs qui lui étaient assignés par
fondamentale et complémentaire de la le Plan d’urgences, le Plan vert, la Vision ses concepteurs, il n’en demeure pas
dimension budgétaire dans les réformes 2020,....etc. moins cependant, que les évolutions
des lois fondamentales régissant la ges- qui ont suivi son adoption commandent
tion des finances de l’Etat. Ces résultats n’ont d’ailleurs pas man- aujourd’hui, sa refonte pour répondre à
qué de recevoir un satisfecit de la part des exigences nouvelles qui ne peuvent
Cette constante ne saurait être mise de d’organismes internationaux qui n’ont trouver leur répondant dans le substrat
côté dans le cadre de la refonte de la loi pas hésité d’encourager le Maroc à ap- de l’actuel texte.
organique des finances au Maroc, sous profondir encore plus ses réformes, no-
peine de compromettre les fondamen- tamment dans le domaine des finances En effet, le contenu de l’actuel dispositif
taux de la réforme, à savoir une nouvelle publiques. organisant le système budgétaire a pour
approche budgétaire axée sur les résul- souci majeur de préserver et de veil-
tats, la performance et la transparence. Pour la consolidation de ces réformes et ler à la régularité des opérations et des
l’amélioration du climat et de l’environ- procédures budgétaires et à la confor-
La vérification de constat dépend jus- nement de l’économie et des finances mité aux textes en vigueur des actions
tement de la manière dont le projet de publiques marocaines, il est devenu publiques, en négligeant les dimensions
refonte de la loi organique des finances impératif d’aller de l’avant en améliorant liées à la performance et aux résultats
devrait intégrer le processus enclenché le cadre général des finances publiques, des politiques publiques.
depuis quelques années déjà, visant la d’où la nécessité apparue pour engager
mise en place d’une comptabilité d’exer- la refonte de la loi organique relative à De même, ce dispositif est souvent dé-
cice à vocation de droits constatés et à la loi de finances en tant qu’instrument crié par les parlementaires eux-mêmes,
forte valeur ajoutée patrimoniale. privilégié pour mieux cadrer les actions à raison du manque d’un véritable pou-
publiques et améliorer le processus voir d’information et de contrôle de l’ins-
UN ENVIRONNEMENT FINANCIER de l’autorisation, de l’exécution et du titution parlementaire. Il suffit de rappe-
contrôle des politiques publiques. ler à ce titre, que le mot « commission
ET ECONOMIQUE FAVORABLE parlementaire » n’y est cité que deux fois
A UNE REFORME BUDGETAIRE Toutefois, la réforme budgétaire serait et que les mots « information » ou « éva-
ET COMPTABLE sans consistance si elle ne prend pas luation » n’y sont jamais cités4.
en compte les mécanismes de mise en
Les réformes engagées par le Maroc œuvre qui lui permettent de prendre Le projet de réforme en cours a pour
durant cette dernière décennie n’ont forme et d’être déclinée dans la pratique, objet de combler les carences relevées
pas manqué d’avoir des effets posi- à savoir la mise en œuvre d’un système et de répondre aux besoins d’une nou-
tifs sur l’assainissement des politiques comptable fiable, à même de permettre velle option de gestion des politiques
publiques et la gestion des finances pu- la bonne exécution des prévisions de la publiques, en s’inscrivant dans la ten-
bliques, en particulier. Elles constituent loi de finance et de mettre en place un dance mondiale lancée dans un élan de
des acquis indéniables ayant permis aux système d’information dédié aux des- bonne gouvernance imprégnée par l’ap-
finances publiques marocaines de béné- tinataires de l’information financière, proche de performance et la recherche
ficier d’une meilleure maîtrise des évolu- à savoir les citoyens, les décideurs, les de résultats, dans lequel le Maroc s’ins-
tions budgétaires et financières. organes de contrôle, la représentation crit volontairement en veillant à assurer
nationale et les organismes financiers un ancrage réel de la culture de résultat
internationaux. et de performance, culture devant ren-
forcer la bonne gouvernance de son sys-
tème de gestion des finances publiques.
4 ) Mohamed KARIM, in « Viabilité budgétaire et financière au Maroc », Première édition, 2010
Revue de la Trésorerie Générale du Royaume 25
SPECIAL
PLAN COMPTABLE

Ce projet intervient d’ailleurs, à un L’atteinte de cet objectif est tributaire société civile et surtout des représen-
moment propice où le Maroc a adopté de la reconfiguration des démarches tants de la nation.
une réforme constitutionnelle qui est de programmation, d’exécution et de
en passe de remodeler le paysage de contrôle budgétaire dans le sens du En effet, dans son rapport d’initiative
gouvernance des affaires publiques dont renforcement de la responsabilité des parlementaire sur la réforme de la loi or-
la loi organique, relative aux lois de gestionnaires, de l’institution d’une nou- ganique des finances, les auteurs ont mis
finances, constitue la pierre angulaire. velle culture de performance, de reddi- l’accent dans leur 7ème proposition sur la
En somme, une constitution financière tion des comptes et de développement nécessité d’introduire « trois comptabili-
à même de décliner les grands principes de la transparence. tés pour mieux lire le budget ». Il s’agit
et règles énoncés par la grande loi fon- en ce sens « d’introduire et de mieux
damentale. La transparence et la performance des définir les contours des trois compta-
politiques publiques demeurent pour bilités à tenir par l’exécutif », à savoir
Il est indéniable, en effet, qu’une ré- leur part, subordonnées à la refonte de une comptabilité budgétaire classique
forme en profondeur des institutions ne la comptabilité de l’Etat qui constitue (comptabilité de caisse), une comptabi-
puisse se conjuguer à l’apport substan- à ce titre, une composante essentielle lité générale proche de la comptabilité
tiel du cadre institutionnel des finances de la refonte de la loi organique des des entreprises et une comptabilité ana-
publiques dont la traduction suprême finances et une dimension indissociable lytique qui permet d’évaluer les coûts
réside dans l’élaboration de la consti- de la réforme budgétaire. des programmes.
tution financière qu’est la loi organique
des finances. La revendication des parlementaires
LA COMPTABILITE DE L’ETAT,
part du constat que la comptabilité ac-
En outre, la réforme du cadre de gestion UNE COMPOSANTE ESSENTIELLE tuellement en vigueur, suffit à répondre
budgétaire est appelée à constituer une DE LA REFORME BUDGETAIRE au besoin de l’actuelle loi organique
opportunité pour donner une nouvelle «puisque celle-ci ne précise aucune
impulsion à la modernisation de l’Etat Les principes et règles énoncés par la exigence relative à l’information sur le
et au renforcement de la performance loi organique des finances en matière patrimoine de l’Etat et ses variations, ni
de la gestion publique, à modifier en budgétaire ne sauraient produire leur sur l’analyse des coûts des différentes
profondeur l’ensemble du dispositif plein effet s’ils ne trouvent pas leur tra- politiques publiques»6.
budgétaire pour plus d’efficacité et une duction au niveau de l’exécution de la
plus grande responsabilisation des ges- loi de finances, à travers les opérations Il s’agit en fait, de permettre à la société,
tionnaires publics. de recettes et de dépenses dont l’enre- à travers ses représentants, de connaître
gistrement est matérialisé par la comp- ce que l’Etat possède, comment il modi-
La réforme en cours de la loi organique tabilité de l’Etat. fie son patrimoine suite aux différentes
des finances aura pour objectif, de
décisions budgétaires et ce que sont les
dépasser une culture budgétaire dont Pour répondre à cette exigence, le projet coûts réels des politiques publiques.
l’essence est de privilégier une gestion de loi organique des finances devrait in-
basée sur une logique de moyen, can- tégrer un chapitre relatif aux comptes de C’est la raison pour laquelle, la compta-
tonnée dans des réflexes juridiques vers l’Etat, à l’effet de fixer le cadre général de bilité budgétaire doit être adossée à une
une approche basée sur la logique de ré- la comptabilité de l’Etat et les principes comptabilité générale décrivant la situa-
sultat, privilégiant la démarche managé- directeurs de cette comptabilité. tion du patrimoine de l’Etat et se pro-
riale, dont le souci majeur réside dans la
longeant vers une évaluation des coûts
recherche de l’efficacité et de l’efficience Ainsi, la réforme de la loi organique rela- des actions publiques, déclinées dans le
de l’action publique. tive aux lois de finances devrait mettre cadre d’une comptabilité analytique.
l’accent sur la distinction entre une
En fait, il s’agit de dépasser une approche
comptabilité budgétaire ayant pour mis- Au-delà du souci de la bonne gouver-
où le budget est exécuté sur la base «
sion la mise en exécution et le respect de nance des finances publiques, l’objec-
d’une logique axée sur la consomma-
l’autorisation parlementaire concernant tif ultime est de rendre compte à la
tion des crédits » pour rejoindre la ten-
la réalisation des recettes et la consom- société et au citoyen, par le biais de la
dance mondiale consistant à réformer la
mation des crédits et une comptabilité représentation nationale qui a autorisé
présentation budgétaire orientée vers la
générale d’essence patrimoniale ayant le gouvernement à initier et à exécuter
performance5.
pour objet la constatation des droits et les politiques publiques, de la réalité de
La recherche de la performance doit des obligations de l’Etat, sans oublier la l’exécution du budget de l’Etat.
tendre essentiellement à bien exécuter possibilité de mettre en évidence l’éva-
les opérations issues des autorisations luation in fine, des opérations finan- Cette «inquiétude» de remise d’infor-
du législateur afin de réaliser l’excellence cières de l’Etat, à l’instar des mécanismes mation paraît être l’un des soucis des
des résultats et par ricochet, de rehaus- utilisés dans l’entreprise du secteur pri- parlementaires marocains, puisqu’ils
ser le rôle de contrôle du Parlement vé, à savoir l’analyse des coûts en intro- indiquent qu’il convient «de signaler
sur les politiques publiques et partant, duisant la comptabilité analytique. que les intentions du gouvernement en
atteindre la modernisation du dispositif termes de diffusion des données comp-
budgétaire dans le sens de plus de per- Cette exigence concorde d’ailleurs tables sont encore floues» en poursui-
formance et de transparence. avec les sollicitations des acteurs de la vant «qu’en effet lors d’un récent colloque
5) Ibid
6) Ibid
26
organisé par la Trésorerie Générale du doter les pouvoirs publics d’un instru- comptabilité générale et la comptabilité
Royaume en septembre 2010 la diffu- ment privilégié de bonne gouvernance, budgétaire.
sion au public des états de synthèse d’améliorer l’élaboration et l’évaluation
(bilan et compte de résultat) a été men- des politiques publiques et de don- L’ARTICULATION ENTRE LA
tionné mais comme possibilité, et non ner aux citoyens et aux organismes de
COMPTABILITE BUDGETAIRE
comme nécessité»7. contrôle, une information transparente
sur les finances de l’Etat et son patri- ET LA COMPTABILITE GENERALE
En effet, si le projet de nouvelle consti- moine. DE L’ETAT
tution financière est en cours de fina-
lisation, la comptabilité générale de Sa mise en place répond à la nécessité La reconfiguration de la comptabilité de
l’Etat est une réforme en phase d’être d’appréhender l’ensemble des activi- l’Etat n’a pas seulement pour objectif de
déployée, puisqu’elle a été entamée tés de l’Etat et de son patrimoine, avec moderniser et d’améliorer l’enregistre-
depuis 2008, ce qui lui permet d’être en l’exigence d’une information comptable ment des opérations comptables, mais
parfaite symbiose avec la prochaine loi normalisée permettant la comparabilité elle se mesure par sa répercussion sur la
organique relative aux lois des finances de l’information financière au plan inter- mise en œuvre réelle de la réforme des
et avec la mise en exécution des prin- national et l’adéquation de cette infor- mécanismes budgétaires.
cipes et règles comptables qu’elle est mation aux besoins de transparence et
sensée consacrer. de reddition des comptes. En effet, sans une articulation ration-
nelle entre la comptabilité budgétaire
LA NOUVELLE COMPTABILITE La consécration de la comptabilité et la comptabilité générale, on risque
d’exercice au niveau du projet de refonte d’aboutir à des résultats différents, du
DE L’ETAT OU LA MISE EN de la loi organique des finances permet- fait que les objectifs assignés à cha-
EVIDENCE DES PRINCIPES tra de donner une vision économique cune des deux comptabilités sont dif-
COMPTABLES FONDAMENTAUX et financière des actions publiques sa- férents, « sans compter les incertitudes
chant qu’une «simple conformité avec qui peuvent s’ensuivre dans les rap-
L’actuel système comptable, toujours le budget n’est plus une preuve d’effica- ports de l’Etat avec les tiers… Ainsi par
en vigueur, lors de cette phase de tran- cité» du fait que la profession comptable exemple, la compensation des créances
sition, a été conçu depuis les années a le même objectif dans le secteur public réciproques entre l’Etat et un tiers est
trente et refondue depuis 1960 pour que dans le secteur privé. interdite en comptabilité budgétaire et
répondre à une logique de gestion de qu’elle est admise sans réserve dans la
l’Etat providence assurant juste les flux En effet et de par le monde, l’adoption comptabilité générale »10.
en moins et/ou en plus de la caisse dans d’une comptabilité d’exercice inspirée
une optique purement budgétaire. des normes comptables internationales Les lois de finances doivent en effet, pré-
en vigueur pour le secteur public a mo- senter de façon sincère l’ensemble des
La nouvelle comptabilité générale de difié profondément le cadre comptable ressources et des charges de l’Etat. La
l’Etat s’est par contre, détachée de cette de l’Etat. Les dispositifs prévus comme sincérité des ressources et des charges
approche pour adopter un système de la logique générale qui sous-tend la loi de l’Etat doit s’apprécier compte tenu
comptabilité d’exercice en vue de cerner organique des finances correspondent des informations disponibles au mo-
la dimension patrimoniale, constatant à l’objectif d’une plus grande transpa- ment de leur établissement et des pré-
les droits et les obligations de l’Etat, d’où rence des comptes ainsi qu’une meil- visions devant raisonnablement en
la consécration de la transparence et de leure maîtrise des coûts publics. La découler.
la performance. comptabilité y est conçue comme un
véritable outil d’information, de gestion Or les informations disponibles ne
Les principes qui devraient être consa- et d’aide à la décision8. peuvent l’être que par le biais d’une
crées au niveau de la constitution finan- comptabilité générale basée sur le prin-
cière du pays permettent de mettre au La comptabilité budgétaire même amé- cipe des droits constatés.
diapason la comptabilité budgétaire liorée, ne saurait atteindre son objectif
avec la comptabilité générale. Si la pre- d’assurer une bonne exécution du bud- Autrement dit, la sincérité budgétaire
mière a pour souci le suivi de l’exécution get de l’Etat sans le couplage avec une va de pair avec les principes de sincérité
de la loi de finance et la vérification de comptabilité générale d’exercice pour des comptes et d’image fidèle du patri-
la conformité des opérations de recettes correspondre au mieux à la réalité de moine de l’Etat et de sa situation financière.
et de dépenses aux autorisations par- l’exécution du budget et assurer une
lementaires, la comptabilité générale a meilleure lisibilité immédiate sachant Le projet de réforme de la loi organique
pour objectif de retracer les opérations qu’une comptabilité d’exercice est plus des finances devrait en effet, consacrer
au titre de l’exercice auquel elles se rat- appropriée à la mise en place d’un le principe que les comptes de l’Etat
tachent dans le cadre d’une comptabi- contrôle de gestion et à une évaluation doivent être réguliers, sincères et don-
lité de droits constatés. de la performance9. . ner une image fidèle de son patrimoine
et de sa situation financière, tout en
Cette réforme participe à la refonte de D’où l’intérêt qui se fait sentir pour responsabilisant les comptables publics
l’approche budgétaire axée sur les résul- une articulation plus aboutie entre la sur la sincérité et la transparence des
tats et la performance en permettant de comptes publics.
7) Ibid
8) « Finances publiques », M. Bouvier et M-C Esclassan, J-P Lassale, Manuel, LGDJ, édition 2010
9) Ibid.
10) Ibid.
Revue de la Trésorerie Générale du Royaume 27
SPECIAL
PLAN COMPTABLE

UN SYSTEME DE «REDEVABILITE» Par conséquent, nous devons rompre l’efficacité et l’efficience d’exécution des
avec une logique de rendre compte politiques publiques.
RESPONSABILISANT, REDDITION
d’une exécution financière et comptable
ET CERTIFICATION DES COMPTES motivée par les moyens et le respect L’objectif de reddition des comptes et
des crédits alloués pour une rubrique son corollaire la transparence et la sin-
Rendre des comptes, voilà l’un des piliers budgétaire donnée, pour évoluer vers cérité comptable ne sauraient toutefois
d’une société démocratique où ceux à une logique redditionnelle où l’atteinte se concevoir, sans la consécration au
qui nous avons «délégué» la gestion des des objectifs et des résultats convenus niveau du projet de refonte de la loi or-
affaires publiques doivent justifier ou prime pour juger la conformité des ré- ganique des finances, de la certification
expliquer leurs actions et leur gestion sultats par rapport aux objectifs. des comptes par le corps de contrôle
de la chose publique. Cette exigence suprême qui est la Cour des Comptes.
peut être à la fois d’essence constitution- Aujourd’hui, les concepteurs du projet
nelle, légale ou même morale sachant de la nouvelle constitution financière L’objet de la certification des comptes pu-
que la nouvelle constitution marocaine du pays devraient mettre en évidence le blics est de formuler une opinion écrite
consacre les principes de responsabilité rôle primordial de la nouvelle compta- et motivée sur les comptes de l’Etat,
et de reddition des comptes. bilité de l’Etat en matière d’information mission comparable à celle qu’exercent
financière, de transparence dans la ges- les commissaires aux comptes dans les
Si jusqu’à récemment, rendre compte se tion publique, de responsabilité et de entreprises.
vérifiait juste par rapport à la conformité reddition des comptes.
des règles budgétaires, l’évolution du En effet, «l’institution de la certification
rôle des institutions publiques implique Pour qu’elle ait sa pleine légitimité, la des comptes pour l’Etat et l’essor de ce
le dépassement de cette acception pour reddition des comptes doit se baser sur dispositif est particulièrement exem-
la recherche d’une autre forme de légi- des principes et des règles financières et plaire du nouveau système de gestion
timité, basée sur la bonne gouvernance comptables claires, permettant à un large publique qui se développe aujourd’hui,
politique, économique et financière. public d’en comprendre le sens, pour en illustrant à quel point la culture finan-
mesurer la qualité de gestion et surtout, cière publique se rapproche désormais
de la culture financière de l’entreprise»11.

11 ) Ibid.

28
La réforme comptable
Rachid Amghar
Chef de la Division de la normalisation
Direction de la réglementation

des collectivités locales


et de la normalisation comptable

La réforme nécessaire

Ce serait une évidence facile à démon- LA REFORME COMPTABLE, UN Et de ce fait, elle nous fait prendre
trer que de souligner la place centrale conscience de la nécessité qu’il y a au-
ELEMENT INCONTOURNABLE
qu’occupent aujourd’hui les collectivités jourd’hui de défendre l’option de «la cohé-
locales dans le processus de mise à ni- DANS LA STRATEGIE DE rence» entre les systèmes comptables :
veau enclenché par l’Etat, dans le cadre MODERNISATION DES national et local car d’un point de vue
de sa stratégie globale de modernisa- COLLECTIVITES TERRITORIALES pratique, rien ne justifierait aujourd’hui
tion. une différenciation entre les principes
Le retour en force des collectivités qui régissent la comptabilité de l’Etat et
A cet égard, il faut reconnaître que c’est locales et l’importance accordée à la ceux qui encadrent celle des collectivi-
dans le cadre de cette vision moderni- décentralisation ouvre une perspective tés locales.
satrice que s’enserrent les principales singulière en faveur de l’intégration de
réformes dont sont sujettes aujourd’hui la question locale dans l’approche des De même qu’elle nous fait toucher l’im-
les collectivités territoriales (aménage- stratégies nationales. portance de certains de ces aspects qui
ment du cadre organisationnel, réforme impliquent «une connectivité» de plus
du cadre financier, refonte du système Dans le contexte actuel, la réussite de en plus grande entre les différents sys-
comptable, etc…). cette vision dépend de la capacité de tèmes financiers, dans le cadre «d’une
l’Etat central à faciliter et à promouvoir logique de réseau» dominante et incon-
Il faut reconnaître également, que ces la modernisation des niveaux territo- tournable. La réforme comptable reflè-
réformes sont mues par une apprécia- riaux et à organiser les dynamiques terait la prise de conscience de tous ces
tion intelligente et fondée de l’environ- locales avec des approches renouvelées enjeux.
nement et des enjeux de demain, et se s’appuyant sur des principes de perfor-
proposent, en conséquence, d’atténuer mance et de transparence. Sur un autre plan, il faut souligner que
l’impact de ces changements, sinon la réforme de la comptabilité des collec-
d’agir sur eux. Mais, au préalable, il reste incontour- tivités locales, répond également à un
nable de créer les conditions nécessaires enjeu de bonne gouvernance car ayant
Et, nous nous devons d’admettre au- à la mise en place «d’un environnement une optique différente, des objectifs
jourd’hui, que le phénomène de mon- de gouvernance stratégique», lequel de- différents et répondant à des choix dif-
dialisation s’accompagne d’un mou- meure tributaire, lui-même, de la nature férents, elle permet d’installer un nouvel
vement profond de décomposition/ des réformes qu’il faut entreprendre et élément culturel dans la sphère de la
recomposition qui impacte non seu- des outils qu’il faut s’approprier. gestion locale.
lement les Etats, en les contraignant à
revisiter leurs stratégies économique, De ces réformes et de ces outils, le sys- Il faut reconnaître que la logique budgé-
financière et institutionnelle, mais se tème d’information et le système bud- taire actuelle a entretenu durablement
profile également, avec des enjeux plus gétaire et comptable sont, sinon, les le mythe de la consommation des cré-
prononcés dans la sphère des collectivi- plus déterminants dans l’entreprise de dits tels que fixés par les autorisations
tés locales. modernisation, du moins, ils comptent budgétaires et encadrés par les règles
parmi les plus importants dans ce projet. de la comptabilité publique, et qu’il est
Ces facteurs appellent, sans aucun temps aujourd’hui de favoriser «l’esprit
doute, des ajustements, des adaptations de gestion» sur «l’impératif de la logique
et parfois de sérieuses remises en cause
LES ENJEUX DE LA REFORME budgétaire» qui a prévalu jusqu’à pré-
pour pouvoir accompagner ce mouve- COMPTABLE DES COLLECTIVITES sent.
ment global rythmé par de profonds LOCALES
bouleversements, et réussir le passage Or, c’est cet aspect même de la gestion
du temps de la rupture au temps de la Il est vrai que la mondialisation peut publique locale auquel la réforme comp-
transition inhérents à l’évolution des être porteuse d’enseignements divers table entend remédier, en implémentant
systèmes et des institutions. La réforme et riches. Pour l’objet qui nous intéresse, les ingrédients nécessaires à l’éclosion
comptable des collectivités locales, ferait elle nous enseigne l’importance de la d’une nouvelle culture de gestion. Ce à
magistralement fonction de trait d’union «cohérence» des systèmes comptables, quoi, elle peut contribuer en mettant à
entre ces deux temps. au niveau international certes, mais aussi la disposition des gestionnaires locaux
à l’intérieur du territoire d’un même Etat. des outils, des indicateurs et un système
d’information qui leur permettent le
pilotage de la performance.

Revue de la Trésorerie Générale du Royaume 29


SPECIAL
PLAN COMPTABLE

De manière plus concrète, en améliorant Dans le fond, la nouvelle réforme comp- Ainsi, dans cette optique, les engage-
la connaissance des gestionnaires, en table s’adosse à un référentiel composé ments pris par la collectivité (ex : dette
mettant à leur disposition une informa- de quatre documents clés : envers des fournisseurs) autant que les
tion fiable, sincère et fidèle de la situa- droits qui lui sont acquis (ex : impôts
tion financière et patrimoniale de la • un cadre conceptuel qui constitue le dus) vont pouvoir être constatés et inté-
document qui définit l’orientation gé-
collectivité locale, le nouveau système grés dans sa comptabilité. Ce principe
nérale du nouveau cadre comptable,
comptable enclenche, sans nul doute, le est complété par un autre principe, non
à travers l’identification des objectifs,
cercle vertueux du changement. moins important que le premier à savoir
l’énonciation des choix directeurs et
celui de la spécialisation des exercices.
la définition des principes fondamen-
Bref, pour toutes ces raisons, la réforme
taux ;
comptable des collectivités locales ne Dans cette optique, seuls les produits
pouvait que véhiculer des enjeux plu- • un corpus de normes qui constitue des correspondant à l’exercice (y compris
règles de conduite concernant chaque
riels : enjeu de modernisation, enjeu ceux à recevoir) et les charges (y com-
composante de la comptabilité géné-
d’un meilleur pilotage des finances pris celles correspondant aux charges à
rale (règles relatives aux immobilisa-
locales, enjeu de transparence et de payer et aux provisions pour risques et
tions, aux stocks, aux produits, aux
qualité comptable certes, mais aussi et charges) seront comptabilisées au titre
charges…) ;
surtout, elle enserre un enjeu culturel de d’un exercice donné.
taille. • un plan de comptes qui constitue la
traduction comptable des normes ;
La consolidation pratique de ces prin-
• une instruction comptable définissant cipes se fera par l’application de la mé-
LA CONFIGURATION GENERALE les modalités de fonctionnement des
thode dite de rattachement des produits
DE LA NOUVELLE COMPTABILITE comptes.
(recettes) et des charges (dépenses) à
DES COLLECTIVITES LOCALES l’exercice, en vertu de laquelle nous pro-
Dans le même ordre d’idées, il faut souli- cédons, en fin d’exercice comptable, au
Si la possibilité d’introduire des règles gner que la trame de la nouvelle réforme rattachement des opérations qui créent
s’inspirant du plan comptable général reprend à son compte les principes des droits ou des obligations à l’exercice
a été reconnue depuis 1976 aux auto- comptables généraux de continuité auquel elles se rapportent.
rités de tutelle (Ministère des Finances d’exploitation, de permanence des mé-
et Ministère de l’Intérieur), il aura fallu thodes, de spécialisation des exercices, Enfin, il faut préciser que dans cet édi-
attendre l’année 2008 pour que la «pos- de prudence, de clarté, de transparence, fice, la clé qui permet de procéder à ces
sibilité» devienne une réalité concrète, de coût historique et d’importance si- opérations et qui détermine, plus parti-
avec la recommandation faite par le gnificative. culièrement, leur rattachement à l’exer-
Conseil National de la Comptabilité cie est celle du «fait générateur» c’est-
(CNC), lors de la réunion de son comité Tous ces principes viennent restructurer à-dire l’événement qui crée un droit ou
permanent tenue le 15 juillet 2008, la comptabilité des collectivités locales une obligation pour la collectivité.
d’adosser le projet de plan comptable avec pour objectif central la restitution
des collectivités locales et de leurs grou- de « l’image fidèle » de la situation patri- Le respect de ces règles et techniques
pements aux normes et standards inter- moniale et financière desdites collectivi- va contribuer sans nul doute, à l’appli-
nationaux. tés. cation des principes de transparence et
de clarté et à restituer l’image fidèle que
Il faut reconnaître que cette nouvelle Cependant, les évolutions ne sont pas
doit refléter la comptabilité des collecti-
orientation du projet, que le Conseil uniquement garanties par l’énonciation
vités locales.
National de la Comptabilité a exprimé, des principes, elles résultent principale-
a été le résultat d’un effet d’entraîne- ment de l’application de règles pratiques
A titre de comparaison entre la comp-
ment certain, exercé par l’adoption du qui leur assurent une teneur réelle. C’est
tabilité budgétaire et la comptabilité
nouveau plan comptable de l’Etat, dont dans ce cadre que la nouvelle architec-
générale, il faut souligner que dans l’op-
le corpus des normes s’inspire principa- ture de la comptabilité des collectivités
tique de la première, les recettes budgé-
lement des normes internationales IFRS locales et de leurs groupements, fait de
taires sont prises en compte au titre du
et IPSAS. certains principes et règles, comme le
budget de l’année au cours de laquelle
principe des droits constatés ou celui de
elles sont encaissées, et les dépenses
Tout en constituant une réforme d’en- la spécialisation des exercices, la pierre
sont enregistrées au titre du budget de
vergure dans le champ de la gestion angulaire de la nouvelle construction
l’année au cours de laquelle elles sont
financière et comptable des collectivités comptable.
payées. Alors que dans l’optique de la
locales, le projet n’en fait pas pour au- comptabilité générale et en vertu du
En effet, consacré comme principe fon-
tant un motif de rupture brutale puisque principe de la constatation des droits
damental de la comptabilité patrimo-
dans le fond, les préoccupations fonda- et obligations, lesdites opérations sont
niale, le principe des droits constatés fait
mentales de la comptabilité publique ne prises en compte au titre de l’exercice
obligation aux collectivités d’enregistrer
sont pas perdues de vue le contrôle de auquel elles se rattachent, indépendam-
au cours d’un exercice donné les droits
caisse des fonds publics, le contrôle de ment de leur date d’encaissement ou de
et les obligations dès leur naissance et
l’exécution du budget et la surveillance paiement.
non lorsqu’ils se dénouent en trésorerie.
réciproque ordonnateur / comptable,
pour ne s’en tenir qu’à l’essentiel.

30
Dans ce schéma global, la comptabi- Toutefois, la lecture de ces documents Et, au-delà, permettre l’appréciation ob-
lité d’une collectivité locale doit pouvoir ne doit pas être opérée dans la même jective de la qualité du management lo-
retracer et restituer comptablement la logique que celle d’une entreprise pri- cal à travers l’évaluation des différentes
totalité des opérations financières nées vée. Les collectivités locales ne sont pas facettes de l’action publique locale
au cours d’un exercice comptable. des entreprises et leur mission n’est pas (financement, coût, opportunité, retour
de réaliser des profits. sur investissement…).
En résumé, il paraît aisé de souligner
que ce corset de normes et de principes La mission d’intérêt général, avec toutes La recherche de cet objectif ne veut pas
contribuera à la clarté et à la transpa- ses variations, n’a pas d’équivalent dans dire que le respect des règles norma-
rence des comptes des collectivités le monde des entreprises. Autant de dif- tives serait sacrifié mais il sous-entend,
locales qui verront leurs situations finan- férences et de spécificités qui militent néanmoins, un nécessaire reprofilage à
cières et patrimoniales restituées fidèle- en faveur d’une lecture différenciée la faveur d’une reconsidération du sys-
ment par le truchement d’une grille de des comptes d’une collectivité locale et tème actuel.
données comptables reproduisant l’en- d’une entreprise privée.
semble des éléments que possède une L’enjeu pour l’avenir est d’opérer la tran-
collectivité (terrains, immeubles, logi- Enfin, il ne serait pas vain d’insister sur sition vers des systèmes qui, concur-
ciels, matériels de transport, créances… le fait que l’objectif recherché à tra- remment avec le contrôle de régularité,
etc.,.) et l’ensemble de ce qu’elle doit vers ce projet de réforme n’est pas tant permettent l’appréciation du résultat
(emprunts, dettes). d’adopter une comptabilité d’entreprise, et la mesure de la performance. Pour ce
la comptabilité privée n’est pas une fin faire, il est temps pour notre modèle de
La synthèse de ces informations est en soi, que d’emprunter les meilleures décentralisation d’opérer sa mue à tra-
déclinée dans des situattions et docu- pratiques qui permettent d’améliorer la vers la mise en place de deux réformes
ments de la comptabilité générale, à gouvernance locale. nécessaires : la réforme budgétaire et la
savoir : réforme comptable.
• le bilan, constitué d’un tableau de la CONCLUSION Ce n’est qu’autour d’une vision renou-
situation nette décrivant l’évolution
des actifs, de la trésorerie, des dettes, velée, assise sur ces deux réformes que
En conclusion, il faut reconnaître que la
des provisisons et des autres passifs de nous pouvons contribuer à la moder-
fin des anciens systèmes comptables est
la collectivité ; nisation de la gestion locale et instal-
annoncée par les meilleurs oracles qui
ler une nouvelle culture se souciant de
• le compte de résultat, constitué de prédisent pour l’avenir une reconfigu-
l’évaluation, du coût et de performance.
trois parties retraçant les charges de ration des systèmes locaux avec la pro-
fonctionnement (les charges de per- motion des principes de bonne gouver-
sonnel ou les dotations aux amortis- Enfin, gageons que dans la voie ouverte
nance, de redevabilité, de comparabilité
sements et aux provisions), les charges par la réforme de la loi organique rela-
et de reproting.
d’intervention (les transferts aux entre- tive aux lois de finances, actuellement
prises, aux associations..) et les charges en cours et qui va réformer en profon-
Dans la ligne de cet esprit, nous devons
financières (intérêts de la dette…). Ces deur le budget, la comptabilité et la ges-
être sensibles à l’importance du rôle que
charges sont présentées en regard des tion de l’Etat ainsi qu’à travers le chantier
doit jouer l’outil comptable dans le pro-
ressources de la collectivité ; de la régionnalisation avancée, puisse
jet de modernisation de la gestion lo-
s’engager dans la même dynamique ver-
• le tableau des flux de trésorerie liés à cale. Ce rôle implique qu’il puisse trans-
tueuse pour le monde des collectivités
l’activité, aux opérations d’investisse- cender la fonction et l’objectif limités
ment et aux opérations de finance- locales, qui ferait souffler sur ces der-
de la régularité pour s’ériger en un outil
ment ; nières un vent de renouveau irrésistible,
privilégié d’information, d’évaluation et
les poussant à faire de la réforme bud-
• une note aux états financiers, qui pré- de pilotage de la performance.
gétaire et comptable, la réforme néces-
sente les engagements financiers hors
bilan ( ex : les charges futures). saire, par excellence.

Revue de la Trésorerie Générale du Royaume 31


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