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Paix-Travail-Patrie Peace-Work-Fatherland
MINISTERE DE L’ENSEIGNEMENT MINISTRY OF HIGHER
SUPERIEUR EDUCATION
UNIVERSITE DE DOUALA UNIVERSITY OF DOUALA
FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES ET POLITIQUES FACULTY OF LAW AND POLITICAL SCIENCES
Sous la Supervision de :
Prof. Jean GATSI
Agrégé international des facultés de droit
Professeur titulaire des Universités
Chef de département de droit des affaires
et la Direction de :
Dr. BEGNI BAGAGNA
Chargé de cours
Année académique :
2012/2013
DEDICACE
A nos parents :
M. TONFO André
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REMERCIEMENTS
Qu'il nous soit permis d'exprimer notre gratitude à Monsieur le Professeur Agrégé
Jean GATSI, dont les qualités ont suscité en nous l'amour de la science et qui, malgré ses
nombreuses occupations, n’a ménager aucun effort pour superviser ce travail.
Nous ne saurons clore cette page de reconnaissances, sans avoir remercié sincèrement
tous les camarades de la promotion pour l'esprit de partage et d'échange durant toute la
formation, ainsi que toutes les âmes de bonne volonté, qui directement ou indirectement ont
contribué à la réalisation de ce mémoire.
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AVERTISSEMENT
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LISTE DES ABREVIATIONS
API : Agence de Promotion des Investissements
ATS : Admission Temporaire Spéciale
BAD : Banque Africaine de Développement
BEAC : Banque des Etats de l’Afrique Centrale
BESC : Bordereau Electronique de Suivi des Cargaisons
BIC : Bénéfice Industriel et Commercial
BSTP : Bourse de la Sous-Traitance et partenariat
CAC: Centime Additionnel Communal
CARPA: Conseil d’Appui à la Réalisation de contrats de Partenariat
CBF: Cameroon Business Forum
CCIMA : Chambre de Commerce ; des Industries, des Mines et de l’Artisanat
CDI : Centre Divisionnaire des Impôts
CEMAC : Communauté Economique et Monétaire des Etats de l’Afrique Centrale
CFCE : Centre de Formalités de création d’Entreprise
CGA : Centre de Gestion Agréé
CGI : Code Général des Impôts
CIME : Centre des Impôts des Moyennes Entreprises
CNPS : Caisse Nationale de la Prévoyance Sociale
CONAC : Commission Nationale Anti-Corruption
CRI : Centre Régional des Impôts
CSI : Centre Spécialisé des Impôts
DGI : Direction Générale des Impôts
DGI : Direction Générale des Impôts
DSCE : Document Stratégique de la Croissance et de l’Emploi
DSV : Déclaration Spéciale des éléments de Valeur
ECAM : Entreprises du Cameroun
FMI : Fonds Monétaire International
GE : Grandes Entreprises
GICAM : Groupement Inter patronal du Cameroun
GIE : Groupement d’intérêt économique
GNL : Gaz Naturel Liquéfié
GPS : Global Proximity System
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GUCE : Guichet Unique des opérations du Commerce Extérieur
IDE : Investissement Direct Etranger
INS : Institut National des Statistiques
IRCM : Impôt sur le Revenu des capitaux mobiliers
IRPP : Impôt sur le Revenu des Personnes Physiques
IS : Impôt sur les Sociétés
LF : Loi de Finances
ME : Moyennes Entreprises
MECAM : Mouvement des Entrepreneurs du Cameroun
MINFI : Ministère de Finances
OCDE : Organisation de coopération et de développement économiques
OHADA : Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires
ONG : Organisation Non Gouvernementale
ONZFI : Office Nationale de la Zone Franche Industrielle
OTVP: Occupation Temporaire de la Voie Publique
PFI : Point Franc Industriel
PIB : Produit Interne Brut
PME : Petites et Moyennes Entreprises
PPTE : Pays Pauvre Très Endetté
PVD : Pays en Voie de Développement
PVI : Programme de Vérification d’Importation
RGE : Recensement Général des Entreprises
SA : Société Anonyme
SARL : Société à responsabilité limitée
TCI : Taxe Communautaire d’Intégration
TEC : Tarif Intérieur Commun
TPE : Très Petites Entreprises
TSR : Taxe Spéciale sur le Revenu
TSR : Taxe Spéciale sur le Revenu
TVA : Taxe sur la Valeur Ajoutée
UDEAC : Union Douanière et Economique d’Afrique Centrale
UEAC : Union Economique d’Afrique Central
ZFI : Zone Franche Industrielle
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RESUME
L’une des préoccupations constantes des pouvoirs publics, est de rendre l’économie
plus performante et plus compétitive. Dans cette perspective, le Cameroun veut faire du
secteur privé la locomotive de la croissance économique ; c’est ainsi qu’il fait recours de
manière tout aussi constante à une politique fiscale très incitative vis-à-vis des investisseurs
privés. Mais, en dépit de cette ambition affichée de mettre sa fiscalité à contribution pour
dynamiser l’activité économique et relancer l’investissement, le pays reste toujours en retrait
dans la quête des Investissements Directs Etrangers (IDE).
L’étude de l’attractivité fiscale et l’implantation des investisseurs privés étrangers au
Cameroun vient résolument soulever la question de la sécurité juridique des IDE à travers les
incitations fiscales. En effet, améliorer la sécurité du droit fiscal camerounais et sa réputation
afin de renforcer l'attractivité du territoire pour les investissements étrangers est un souci
consubstantiel à l’administration fiscale.
En revanche, l’efficacité de l’attractivité de notre système fiscal se heurte aux
obstacles endogènes qui se résument en mauvaise gouvernance, tracasseries fiscales, manque
de transparence, instabilité fiscale, etc. Ainsi, afin d’améliorer le climat des affaires, les
pouvoirs publics devraient prendre des mesures fortes non seulement pour éradiquer ces
obstacles, mais aussi pour endiguer les chocs exogènes que sont la concurrence fiscale
dommageable et le phénomène de « paradis fiscal ».
ABSTRACT
One of the pre-occupations of public authorities is to make the economy more
performant and more competitive. From this perspective, Cameroon wants to make of the
private sector the locomotive of the economic growth. It is in this light that it makes constant
recourse to a fiscal policy that would really incite or attract private investment. Despite this
ambition to make its fiscality a contributing factor in re-dynamising economic activity and
relaunching investment, the country still lags behind in its quest for Direct Foreign Investment
(DFI).
The study of the fiscal attractiveness and the implantation of private foreign investors
in Cameroon resolutely raises the question of the juridical or legal security of DFIs trough
fiscal incentives. In fact, ameliorating the security on Cameroon fiscal law and its reputation
in order to highlight the country’s attractiveness for foreign investment is an important cause
for concern to the fiscal administration.
In return, the efficiency of our fiscal system bumps against inherent obstacles which
consists, in a nutshell, of bad governance, fiscal harassment, lack of accountability or
transparency, fiscal instability, etc. Therefore, in order to ameliorate the business climate,
public authorities ought to take stiff measures not only aimed at eradicating these obstacles
but also serving to stem the tide of external shock consisting notably of damaging fiscal
competition and the phenomenon of “fiscal paradise” or “tax haven”.
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SOMMAIRE
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INTRODUCTION GENERALE
A- Le contexte historique
Dans le dessein d’implémenter sa politique d’attractivité en matière d’investissements,
les pouvoirs publics camerounais ont immédiatement après l’indépendance, mis en place un
cadre légal régissant les investissements au Cameroun. Ainsi, deux lois ont été
successivement promulguées : la loi N° 60/64 du 27 juin 1960 (amendée et complétée par la
loi N° 66/LF-5 du 10 juin 1966) et la loi N° 84/3 du 4 juillet 1984 instituant le code des
investissements du Cameroun. Chacun de ces textes reflétait l’environnement économique du
moment et visait la mise en œuvre d’un plan de développement économique préconisé par le
gouvernement.
Jusqu’aux années 1980, comme dans bon nombre de pays en voie de développement
(PDV), la politique d’investissement et de développement au Cameroun est marquée par
l’interventionnisme économique1. Les entreprises à capitaux publics sont gérées par l’Etat, la
1
Extrait de « Termes de référence diner-débat du GICAM du 12 mars 2014 » voir www.legicam.org
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quasi-totalité des projets d’investissements sont publics et représentent environ 15% du
PIB. Mais cette politique d’Etat interventionniste ne va pas durer longtemps, car le Cameroun
va connaître au milieu de la décennie 1980, une crise budgétaire liée à une baisse considérable
des recettes attendues des ressources naturelles, minières et pétrolières.
Pour faire face à cette crise économique, l’Etat entreprend des mesures palliatives,
notamment le recours aux bailleurs de fonds internationaux pour le financement des déficits
publics2 cumulés. C’est ainsi que le 19 septembre 1988, le Cameroun signe son premier
accord avec les institutions de BrettonWoods3 et est alors placé sous programme d’ajustement
structurel. Ce programme consiste notamment à octroyer des prêts à long et à court termes,
qui vont permettre selon le FMI, aux Etats parties de répondre avec efficience aux difficultés
financières et monétaires qui entravent les projets de développement.
En outre, les dirigeants vont envisager des mesures internes de réduction des dépenses,
et des réformes économiques soutenues par la communauté internationale :
Sur le plan politique, l’Etat revisite profondément son rôle en matière économique. On
note ainsi le recul progressif de l’interventionnisme au profit d’une vision nouvelle axée sur le
libéralisme économique. Cette politique économique néolibérale se matérialise par la
définition du nouveau rôle de l’Etat dans l’économie. En effet l’Etat doit se réduire à la
fonction de régulation des activités économiques et de mise en place d’un cadre législatif et
réglementaire propice au développement des activités économiques. Dans le même ordre
d’idée les dirigeants procèdent à la privatisation, à la concession ou encore à l’affermage de
certaines entreprises publiques. Ainsi, l’Etat se retire et abandonne progressive sa fonction de
créateur de richesse et de pourvoyeur d’emplois. Les pouvoir publics vont donc modérer
l’investissement public et initier une nouvelle politique fiscale.
Sur plan fiscal, le Cameroun dispose d’un potentiel énorme en ressource fiscale. Afin
de garantir le financement du budget de l’Etat, les réformes économiques doivent non
seulement prendre en compte l’élargissement de l’assiette fiscale, mais également intégrer les
potentialités contributives dissimulées. C’est ainsi que l’Etat oriente sa politique économique
vers « une perspective de recherche, de collecte et de maximisation des recettes fiscales pour
2
Dépassement des dépenses budgétaires définitives sur les ressources fiscales et assimilées, voir GATSI (Jean) :
« Nouveau dictionnaire juridique », 2ème édition 2010, Presses Universitaires Libres, p.104.
3
BrettonWoods, conférence de, nom donné à la conférence monétaire et financière des Nations unies qui se tient
du 1er au 22 juillet 1944 à BrettonWoods (États-Unis). La conférence, qui réunit 44 nations, a pour objet de
poser les bases d’un nouveau système monétaire international plus stable. Afin de veiller à son bon
fonctionnement, deux organismes sont créés : le Fonds monétaire international et la Banque internationale pour
la reconstruction et le développement (la Banque mondiale), organismes chargés respectivement d’accorder des
crédits à court et à long termes pour financer la reconstruction des économies ruinées par le second conflit
mondial. Microsoft. Voir Encarta Histoire économique.
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couvrir les charges publiques. »4 Cette idée de maximisation des recettes fiscales aboutit non
seulement à la suppression ou à la limitation des exonérations et autres dispositifs d’incitation
fiscale alors en vigueur, mais aussi à la création des mécanismes de relèvement des taux
d’imposition existants.
Toutefois, ces réformes vont connaître des limites, car elles amènent l’Etat à fonder
l’objectif de sa fiscalité sur la collecte des recettes pour faire face aux dépenses publiques.
Or, au-delà de ce rôle générateur de recettes, l’impôt est un instrument des plus importants en
matière de politique économique et sociale. Vers la fin des années 1980, persuadé de la
faillite de sa nouvelle politique économique qui fait de la fiscalité un outil de financement
budgétaire, l’Etat entreprend de nouvelles initiatives à travers la mise en place des dispositifs
incitatifs à l’investissement privé. En effet, les dirigeants veulent utiliser la fiscalité comme
«un véritable levier de politique économique et non seulement comme un moyen de collecter
des recettes pour rembourser la dette»5. Dans cet élan, l’Etat va concevoir un modèle
économique particulier.
4
DJOMENI KOLOKO (Elvice), La fiscalité des investissements et l'optimisation fiscale : cas du Cameroun,
Mémoire de Master II professionnel en fiscalité appliquée, Université de Douala 2008, p.7
5
KAMTO (Maurice), « Politique économique », Mutations n°1210 du lundi 09 août 2004, p.3.
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A côté de cette avancée significative du système fiscal camerounais, la politique
économique de façon globale, va connaître un certain affranchissement avec l’atteinte du
point d’achèvement de l’initiative dite PPTE le 28 avril 2006, marquant ainsi la fin du
programme d’ajustement structurel. Cette arrivée au bout du « tunnel » pour le Cameroun
traduit « plus de liberté d'action, plus de marge de manœuvre dans la conception et la mise en
œuvre de ses politiques publiques, notamment celle fiscale.»6 Afin de jouir des retombées de
ce point d’achèvement, le gouvernement va élaborer à partir de la loi de finances 2007, une
nouvelle politique fiscale plus ou moins souveraine.
Du point de vue théorique, cette fin de programme d’ajustement structurel concède à
l’Etat camerounais une certaine autonomie, du moins en matière de conception et de mise
œuvre d’un plan de développement économique. C’est à travers cette politique économique
« libre » que les dirigeants vont renforcer le cadre du dispositif fiscal incitatif édifiant ainsi
une réelle fiscalité d’investissement ayant pour mission d'améliorer le climat des affaires,
d'inciter et d'accompagner les investissements privés, d'élargir l'assiette fiscale, de lutter
contre le chômage, de faciliter le transfert des technologies et des capitaux, et enfin, relancer
durablement la croissance de l'économie. Pour y parvenir, l’Etat procède en permanence aux
aménagements législatifs incitatifs dont le texte phare est la Loi N° 2013 / 004 du 18 avril
2013 fixant les incitations à l’investissement privé en République du Cameroun.
A l’écoute des investisseurs, le gouvernement camerounais, au travers de ces
aménagements a élaboré des régimes fiscaux dérogatoires visant à attirer et à encourager les
investissements dans les secteurs stratégiques pour l’accélération de la croissance. Ces
objectifs sont clairement énoncés par la Loi du 18 avril en ces termes : « la présente loi
a pour objectifs de favoriser, de promouvoir et d’attirer les investissements productifs en vue
de développer les activités orientées vers la promotion d’une croissance économique forte,
durable et partagée, ainsi que de l’emploi »7.
6
TONGA (Dieudonné), Les politiques française et camerounaise face au défi de la mondialisation. Une analyse
comparée de la période 2007-2010, Mémoire de Master en Affaires Publiques, ENA/Paris-Dauphine 2011, p.6
7
Voir Loi N° 2013/004 du 18 avril 2013 fixant les incitations à l’investissent privé en République du Cameroun
Article 1 alinéa 2
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II- LA DEFINITION DES CONCEPTS ET L’OBJET DE L’ETUDE
Une définition des concepts dégagés du sujet de notre étude permet de mieux
appréhender son objet.
8
EIGBE ODIANOSEN est l’auteur d’un article intitulé «How attractive are the Fiscal Regimes of the
Deepwater Offshore West Africa to Foreign Investment? », cité par OUM Alvine Rolande dans son article
intitule: « De l’attractivité des régimes fiscaux pétroliers africains. » Voir www.afritaxes.com
9
LOPEZ (Christian) , « La fiscalité comme vecteur de l'attractivité du territoire », in Mondialisation et fiscalité,
la globalisation fiscale (sous la dir.), l’harmattan, collection financière, pub. 2006, pp 245-262
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l’implantation traduit la disposition des bâtiments et organisation de l'emplacement des
machines dans un atelier, du mobilier dans un bureau, etc., afin d'assurer la meilleure
circulation possible des flux.10
L’implantation peut être entendue comme l’installation, l’établissement, la
sédentarisation, la fixation etc. C’est à travers ces synonymes que l’usage de ce terme trouve
sa justification dans le contexte de notre étude. En effet, ici, par implantation des
investisseurs, il faut sous-entendre le placement, l’emploi des fonds, plus précisément l’action
d’engagement des capitaux dans une entreprise en vue d’un profit à court ou à long terme.11
Investisseur : c’est celui qui réalise un investiment. Il peut s’agir d’une personne
physique ou morale, de droit privé ou de droit public. Selon l’esprit de la loi du 18 avril 2013,
c’est une personne physique ou moral camerounaise ou étrangère, résidente ou non résidente,
qui acquiert un actif au titre de l’exercice de ses activités en prévision d’un rendement.
Investisseur direct étranger : C’est une personne physique, une entreprise publique ou
privée ayant ou non la personnalité morale, un gouvernement, un groupe de personnes
physiques liées entre elles ou un groupe d’entreprises ayant ou non la personnalité morale et
liées entre elles qui possède une entreprise d’investissement direct (c’est-à-dire une filiale,
une société affiliée ou une succursale) opérant dans un pays autre que le ou les pays de
résidence de l’investisseur ou des investisseurs direct(s) étranger(s).12
Investissement : Selon Petit LAROUSSE13, ce terme vient du mot
anglais « investment » qui veut dire emploi des capitaux visant à accroitre la production d’une
entreprise ou à améliorer son rendement.
Pour le législateur du 18 avril 2013, il s’agit d’un actif détenu et/ou acquis par un
investisseur (entreprise, actions, parts de capital, obligations, créances monétaires, droits de
propriété intellectuelle, droits au titre des contrats, droits conférés par la loi et les règlements,
tout autre bien corporel ou incorporel, meuble ou immeuble, tous connexes de propriété).
Le lexique financier14 quant à lui définit l’investissement comme étant une dépense
ayant pour but de modifier durablement le cycle d'exploitation de l'entreprise ; à la différence
d'une charge, il n'est pas détruit par celui-ci. Investir revient en effet pour celui qui s'y décide
à renoncer à une consommation immédiate pour accroître ses recettes futures. Bien entendu,
le surcroît de recettes occasionné par cet investissement devra être suffisant pour assurer sa
10
www.larousse.fr/dictionnaires/français/implantation/41906, consulté le 23 mai 2014
11
CORNU (Gérard), Vocabulaire juridique, PUF, 8ième édition, février 2000, p 479
12
Définition de référence de l’OCDE pour les investissements directs internationaux (troisième édition)
13
Voir Petit Larousse Grand Format, Edition Larousse, 21 Rue MONTPARNASSE 75 283 Paris CEDEX 06
2001, p.558
14
Voir www.lesechos.fr/financemarches/vernimmen/definition_investissement.html?lbD0FJ6Y9vd16e6r.99
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rentabilité prévisionnelle. L'investissement est donc un processus fondamental dans la vie de
l'entreprise, qui engage durablement celle-ci. Si dans un premier temps, il grève fréquemment
les états financiers de l'entreprise, lui seul lui permet d'assurer sa croissance à long terme.
Investissements directs étrangers : encore appelés investissements directs à l'étranger
(IDE en abrégé, traduction de l'acronyme anglais FDI pour Foreign Direct Investment),
également appelés investissements directs internationaux (IDI) par l'OCDE, sont les
mouvements internationaux de capitaux réalisés en vue de créer, développer ou maintenir une
filiale à l’étranger et/ou d’exercer le contrôle (ou une influence significative) sur la gestion
d'une entreprise étrangère.
Élément moteur de la multinationalisation des entreprises, les IDE recouvrent aussi
bien les créations de filiales à l’étranger que les fusions-acquisitions transfrontières ou les
autres relations financières (notamment les prêts et emprunts intra-groupes).
Deux motivations principales sont à l’origine des IDE :
- la réduction des coûts (exploitation de ressources naturelles coûteuses, voire impossibles à
transporter ; utilisation d’une main d’œuvre moins onéreuse, d’où la crainte que les IDE
puissent participer au mouvement de délocalisation ; optimisation fiscale etc.) ;
- la conquête de nouveaux marchés, difficiles à pénétrer par les seules exportations.
Si l’effet des IDE est généralement considéré comme positif sur la croissance des pays
d’accueil (notamment grâce aux transferts de technologie induits), il est plus discuté et
ambigu sur le commerce international, sur l’emploi dans les pays investisseurs, sur les
conditions de travail et sur l’environnement.
Mesurés par les statistiques issues de la balance des paiements, les IDE ont connu une
très forte progression depuis le milieu des années 1980 et contribuent de façon déterminante à
la mondialisation des économies.
Les IDE constituent également l’un des principaux indicateurs de l’attractivité
économique des pays.15
L’explication de ces concepts n’est pas anodine, car elle participe à l’appréhension de
l’objet de l’étude.
B- L’objet de l’étude
Une politique fiscale attractive apparaît comme un moyen de stimulation de la
croissance économique pour plusieurs gouvernements aussi bien dans les pays développés
que dans ceux en développement. C’est d’ailleurs dans ce sens que Jean Claude
15
Le dico du commerce international, voir www.glossaireinternationale.com/page/tous-les-
termes/investissement-direct-a-l-etranger-ide.html
Page 15
DISCHAMPS affirme que la fiscalité agit sur le milieu économique au moins autant qu’elle
réagit à lui.16 En raison de ce rôle indéniable de la fiscalité dans le développement de
l’économie, les pouvoirs publics camerounais recherchent en permanence diverses mesures
d’incitation fiscale dans l’espoir d’attirer les investisseurs privés et de stimuler la croissance
économique.
Au demeurant, la question se pose à savoir si ces objectifs assignés au régime fiscal
incitatif produisent les effets escomptés, à l’instar d’attirer les investisseurs privés étrangers et
de stimuler la croissance économique. Une tentative de réponse à cette question constitue
l’objet de notre recherche.
L’objet étant circonscrit, il nous reste à motiver le choix de notre sujet ou encore à
définir l’intérêt de notre recherche, avant de déterminer la problématique de cette étude.
A- L’intérêt de l’étude
Notre travail présente un intérêt multiple :
D’abord sur le plan didactique, le traitement de ce sujet nous permet de scruter
l’univers de la fiscalité d’investissement afin d’en acquérir quelques notions.
Sur le plan théorique, notre étude vise à amener l’opinion publique à ne plus considéré
la fiscalité exclusivement comme un outil de financement du budget de l’Etat, mais également
comme un instrument qui attire et encourage les investissements privés sans lesquels il n’y
aurait pas d’emploi, ni développement, ni même de recettes pour couvrir les dépenses
publiques.
Sur le plan pratique, notre démarche participe aux actions des pouvoirs publics
engagés à soutenir la croissance et le développement durable du Cameroun à travers une
fiscalité attractive et conductrice des investissements. Aussi, le repérage des problèmes liés à
la sécurité fiscale des investissements au Cameroun pourrait permettre aux autorités de
prendre des mesures visant l’amélioration du climat des affaires, afin de rendre plus attractif
le territoire camerounais garantissant ainsi l’implantation d’un nombre important
d’investisseurs privés sur notre territoire.
Enfin, le regroupement des données empiriques relatives aux mesures fiscales
favorables à l’investissement privé, contribuerait à informer et à sensibiliser les opérateurs
16
DISCHAMPS (Jean-Claude), Comportements économiques et distorsions fiscales, Paris, Presse Universitaire de
France, 1960, 408 p.
Page 16
économiques sur les grands axes de la nouvelle politique fiscale camerounaise orientée vers la
promotion de l’investissement et la croissance économique.
B- La problématique
En matière d’attractivité des investissements directs étrangers, le Cameroun est classé
168ième, soit un rang moindre que celui de la Guinée équatoriale ou du Gabon, deux autres
pays de la sous-région CEMAC17. En 2013, les flux des IDE qui ont progressé au niveau
mondial de 10,9%, le Cameroun par contre n’en a reçu que 0,01%, soit environ 250 milliards
de FCFA seulement.18 Ces chiffres reflètent la mauvaise image du climat des affaires qui
règne au Cameroun. Selon la Banque Africaine de Développement (BAD), la fiscalité est
considérée comme une contrainte majeure par les opérateurs économiques, tant les entreprises
que les investisseurs19.
Dans le même sens, il ressort du rapport thématique de l’INS sur l’environnement des
affaires au Cameroun que pour 59% des chefs d’entreprises, la fiscalité demeure de loin le
premier obstacle à l’entreprenariat au Cameroun. Les chefs d’entreprises de nationalité
américaine sont ceux qui se plaignent véritablement des pratiques fiscales au Cameroun,
suivis des Français et des autres Européens20.
Face à cette situation de climat morose des affaires, discrédité par le poids des
contraintes la fiscales, l’on peut s’interroger sur la sécurité juridique des contribuables ou des
investisseurs. Il découle de cette interrogation une question principale : les incitations fiscales
à l’investissement direct étranger sont-elles de nature à garantir la sécurité juridique ?
En d’autres termes notre système fiscal incitatif peut-il faire de notre pays une
destination privilégiée pour l'implantation des investisseurs étrangers ?
17
Rapport Banque Mondiale « Doing Business 2013»
18
Extrait de l’article de Blaise Nnang, Publié en association avec Le Quotidien de l’Economie, voir
http://cemacbusiness.com/cameroun-comment-seduire-les-etrangers-how-to-attract-foreigners/
19
GROUPE BANQUE AFRICAINE DE DEVELOPPEMENT, Département Régional de l’Afrique Centrale :
«Environnement de l’Investissement Privé au Cameroun 2013»
20
INS : Rapports thématiques, Partie I : Environnement des affaires et compétitivité des entreprises
camerounaises « Recensement Général des Entreprises (RGE 2009) »
Page 17
IV- L’HYPOTHESE ET LA DEMARCHE METHODOLOGIQUE
Afin d’élaborer une structure appropriée à notre recherche, une formulation des
hypothèses et une construction méthodique s’avèrent nécessaire. Il nous convient donc
d’énoncer l’hypothèse avant d’envisager l’approche méthodologique de notre étude.
A- L’hypothèse
Nous entendons par hypothèse, une « proposition de réponse à la question posée. »21
Notre étude est sous-tendue par une hypothèse générale qui peut être énoncée comme
suit : La fiscalité demeure de loin le premier obstacle à l’entreprenariat au Cameroun. L’on
remarque que les investisseurs privés étrangers sont ceux qui se plaignent avec insistance des
contraintes fiscales au Cameroun22. Les problèmes de l’instabilité fiscale, du manque de
transparence et de lenteur des procédures ainsi que du harcèlement sont ceux qui sont les plus
évoqués par les opérateurs économiques23. A la suite de cette affirmation, for est de constater
que la sécurité juridique des incitations à l’investissement direct étranger est loin d’être un
acquis. Certes, les pouvoirs publics s’investissent de manière remarquable pour offrir un cadre
juridique propice à la promotion de l’investissement privé, mais ces efforts se heurtent à un
certains nombre d’obstacles.
Il nous convient donc au cours de notre analyse de nous appuyer sur des méthodes
scientifiques, en vue de rechercher des preuves tangibles pour démontrer la véracité de notre
affirmation.
21
ALBARELLO (Luc), Apprendre à chercher. L’acteur social et la recherche scientifique. Bruxelles, De Boeck,
1999
22
Il ressort du rapport thématique de l’INS sur l’environnement des affaires au Cameroun que pour 59% des
chefs d’entreprises, la fiscalité demeure de loin le premier obstacle à l’entreprenariat au Cameroun. Les
investisseurs de nationalité américaine sont ceux qui se plaignent véritablement des pratiques fiscales au
Cameroun, suivis des Français et des autres Européens.
23
Rapport BAD op. cit.
24
Cours-de-droit.jimdo.com/2013/03/28/chapitre-v-la-méthode-juridique/
Page 18
affirmaient leur respect absolu pour le texte de la loi, les exégètes ont souvent été considérés
comme des partisans du positivisme légaliste. Cette méthode nous a servi de point de départ
pour notre étude, car elle nous a facilité l’analyse du cadre juridique (légal et règlementaire)
en matière d’investissement privé au Cameroun, notamment en matière de fiscalité
d’investissement.
La méthode sociologique : science des faits sociaux, elle nous a permis de recueillir
les réactions des acteurs de terrain et des institutions (contribuables, entreprises, GICAM,
API, Administrations etc.)
La méthode comparative (le droit fiscal comparé) : Science de la comparaison des
droits, le droit comparé a pour objet de rechercher et d'expliquer les différences entre les
divers ordres juridiques. Cette méthode nous a permis de dressé une étude comparée du
système fiscal camerounais avec celui des autres pays de l’Afrique Subsaharienne tel
l’Afrique du Sud et certains pays de la zone CEMAC en l’occurrence le Gabon et la Guinée
Equatoriale.
Cette étude a nécessité des techniques précises d’investigation à savoir : la recherche
documentaire et l’enquête de terrain
La recherche documentaire : elle consiste en une revue littéraire qui nous a permis non
seulement de revisiter le cadre législatif et règlementaire sur l’attractivité fiscale et son
influence sur l’économie de manière globale, mais aussi de consulter tous écrits traitant des
questions de fiscalité, d’économie et de développement à l’instar des ouvrages généraux et
spécifiques, des articles , des thèses de doctorat, des mémoires de soutenances, des textes
législatifs et règlementaires, des rapports des travaux des organismes tels le GICAM, l’INS, la
BAD, l’OCDE, le FMI, la Banque Mondiale etc.
L’enquête de terrain : elle se rapporte à la collecte des données empiriques issues des
textes, images, données statistiques, sondages, interviews, entretiens ou de l’observation
directe de la réalité à étudier. Les villes de Douala et de Yaoundé ont constitués nos
principaux terrains d’investigations.
A Douala, notre enquête a été diligentée au centre d’information de la Chambre de
Commerce ; des Industries, des Mines et de l’Artisanat (CCIMA) ; au Groupement Inter-
patronal de Cameroun (GICAM) ; l’Agence de Promotion des PME, au Guichet Unique des
opérations du Commerce Extérieur, (GUCE), etc.
A Yaoundé, notre enquête nous a conduit à l’Agence de Promotion des
investissements (API) ; au MINFI, au MINEPAT, à l’Institut National des Statistique (INS),
etc.
Page 19
La démarche consistera en fin à présenter la structure de notre travail. Celui-ci est
élaboré en deux parties :
La première partie nous permet d’explorer le cadre juridique des incitations en faveur
des investissements directs étrangers. Il s’agit de montrer ici, les mesures fiscales incitatives
de droit commun (Chapitre premier), et les mesures fiscales particulières de soutien à
l’investissement privé (Chapitre deuxième).
La deuxième partie quant à elle dresse une étude en termes d’évaluation du cadre
juridique de l’implantation des investisseurs privés étrangers. Il s’agit d’abord de faire
l’aperçu des obstacles d’ordre fiscal (Chapitre premier), avant d’envisager les propositions
pour l’amélioration de la sécurité du droit fiscal (Chapitre deuxième).
Page 20
PREMIERE PARTIE :
LE CADRE JURIDIQUE DES INCITATIONS
EN FAVEUR DES INVESTISSEMENTS
DIRECTS ETRANGERS
25
NGOUHOUO (Ibrahim), Les investissements directs étrangers en Afrique centrale : attractivité et effets
économiques, Thèse pour le Doctorat de Sciences Économiques présentée et soutenue le 26 mars 2008, Faculté
de Sciences Économiques et de Gestion, Université du Sud Toulon-Var
26
François Walter « Note sur divers procédés d'incitation fiscale à l'investissement » In: Revue économique.
Volume 7 n°4, 1956. pp. 552-567.
Page 21
CHAPITRE I :
LES MESURES FISCALES INCITATIVES DE
DROIT COMMUN
Page 22
une commune une activité économique, commerciale ou industrielle, ou toute autre profession
non comprise dans les exemptions déterminées par la loi partant fiscalité locale, est assujettie
à la contribution des patentes27. Le même livre dans son chapitre des exemptions et des
exonérations énonce clairement que les entreprises nouvelles bénéficient d’une exonération de la
contribution des patentes pour une période d’an28.
Ainsi, il est délivré aux entreprises nouvelles exonérées, sur leur demande, un titre de
patente portant la mention « EXONERE »29. Cette exonération temporaire à compter de la
création de l’entreprise, n’exempte pas le contribuable de la déclaration durant les deux années
requises à cet effet. En effet toutes personnes exerçant une activité soumise à la contribution des
patentes, même en cas d’exonération, sont tenues d’en faire la déclaration par écrit, au centre des
impôts compétent dans les dix (10) jours suivant le démarrage de l’activité30.
Page 23
est effectué en partie pur et simple et en partie à titre onéreux. Son enregistrement est
gratis pour la partie constituée des apports purs et simples. L’autre partie subit le sort
fiscal réservé aux apports à titre onéreux.
Outre l’incitation à l’investissement à travers des allègements liés à la création
d'entreprises, les mesures fiscales communes aux investissements nationaux et étrangers ont
également pour vocation d’accompagnent les entreprises au cours de la phase d'exploitation.
32
Article 562 de l'Acte uniforme OHADA portant sur le droit des sociétés commerciales
33
Article 456 (A) alinéa 6 du CGI
34
Le fonds de roulement est ce qui reste des ressources durables lorsqu'elles ont financés les actifs immobilisés.
Il doit non seulement être positif, mais être capable de financer le besoin de financement de l'entreprise. Dans le
cas contraire, l'entreprise sera tenue de procéder à des emprunts pour couvrir ce besoin. Voir André NZAKOU:
Difficultés comptables et fiscales, Tome 1, pp. 58-60.
35
Article 546 (B) alinéa 5 du CGI
Page 24
qu'elles soient matérialisées par un acte ou qu'elles découlent d'un constat sur les opérations
de l'entreprise, ces conventions ne sont plus astreintes à la formalité d'enregistrement. Cette
mesure est incitative aux investissements en ce sens qu’elle permet de réduire le coût des
charges financières et fiscales. En effet, le taux d'intérêt appliqué est généralement très faible
comparé à celui appliqué par les institutions financières. Les charges d'intérêts y relatives sont
déductibles du résultat fiscal dans la limite du taux de la BEAC majoré de deux points.
Mais, la loi des Finances 2014 apporte un bémol à ce principe en précisant que :
« Toutefois, cette déduction n'est possible, en ce qui concerne les associés qui possèdent
directement ou indirectement 25% au moins du capital ou des droits de vote de la société, que
dans la mesure où :
- les sommes mises à disposition n'excèdent pas, pour l'ensemble desdits associés, une
fois et demie le montant des capitaux propres36. Dans le cas contraire, les intérêts afférents à
la fraction excédentaire ne seront pas déductibles ;
- les intérêts servis auxdits associés n'excèdent pas 25% du résultat avant impôt sur les
sociétés et avant déduction desdits intérêts et des amortissements pris en compte pour la
détermination de ce même résultat. Dans le cas contraire, la fraction excédentaire des intérêts
n'est pas déductible. »37
Généralement, pour accorder les prêts aux entreprises, les établissements de crédit
exigent une mesure de sûreté qui garantit le remboursement à l'échéance. Lorsque cette
mesure porte sur un bien immeuble, on parle d'hypothèque38. Lorsqu'elle porte sur un bien
meuble, on parle de nantissement39.
Conformément à l'article 546, alinéa A-5 du CGI, «les prêts sur nantissement et sur
hypothèque passés avec les établissements de crédits ou de micro-finance, ainsi que les mains
levées, cautionnements et garanties y relatifs » font l’objet d’un « enregistrement gratis. »
Néanmoins, les actes d’enregistrement de ces prêts sont soumis au droit de timbre gradué.40
36
D’après la circulaire d’application de la Loi de Finances 2014, sont considérés comme capitaux propres
conformément au droit comptable OHADA, la somme algébrique des apports (capital, primes liées au capital),
des écarts de réévaluation, des bénéfices autres que ceux pour lesquels une décision de distribution est
intervenue, des pertes, des subventions d'investissement et des provisions réglementées
37
Voir Loi N° 2013/011 du 1 0 décembre 2013, portant loi de finances de la République du Cameroun pour
l'exercice 2014 ou Article7(B) CGI
38
Article 117 de l'Acte uniforme OHADA portant organisation des sûretés.
39
Ibid., article 63.
40
Article 585 du CGI
Page 25
2- L’allègement de l’impôt sur le revenu des sociétés
Les contribuables assujettis à l’impôt sur les sociétés (IS) sont tenus de souscrire une
déclaration des résultats obtenus dans leur exploitation au cours de la période servant de
base à l'imposition au plus tard le 15 mars.41 Dans le cadre de ces travaux qui visent à
arrêter les comptes annuels, le législateur a prévu plusieurs mesures d'allègement des charges
fiscales. En vertu de l’article 7 du CGI, le bénéfice net imposable est établi sous déduction de
toutes charges nécessitées directement par l’exercice de l’activité imposable au Cameroun et
notamment : les frais généraux ; les charges financière ; les pertes proprement dites ; les
amortissements ; les provisions ; les créances et dettes libellées en devises. Ces mesures
d’allègement portent également sur le régime de faveur des opérations de scission, de fusion
ou d'apport partiel d'actif et les avantages fiscaux au profit d'acquéreurs d'entreprises en
difficulté.
Ce régime de faveur est visé à l’article 9 du CGI qui dispose que : Les plus-values
autres que celles réalisées sur les marchandises résultant de l'attribution gratuite d'actions, de
parts bénéficiaires, de parts sociales ou d'obligations, à la suite de la fusion des sociétés
anonymes même unipersonnelles, des sociétés à responsabilité limitée même unipersonnelles,
sont exonérées de l'impôt frappant les bénéfices réalisés par ces sociétés, à condition que la
société absorbante ou nouvelle ait son siège social au Cameroun ou dans un autre Etat de la
CEMAC.
Le même régime est applicable lorsqu'une société anonyme, ou une société à
responsabilité limitée apporte l’intégralité de son actif à deux ou plusieurs sociétés constituées
à cette fin (cas de scission) ou une partie de ses éléments d'actif à une société constituée sous
l'une de ces formes (cas d'apport partiel) à condition que :
- La ou les sociétés bénéficiaires de l'apport aient leur siège social au Cameroun ou
dans un autre Etat de la CEMAC ;
- Les apports résultant de ces conventions prennent effet à la même date pour les
différentes sociétés qui en sont bénéficiaires et entraînent dès leur réalisation (en cas de fusion
ou de scission) la dissolution immédiate de la société apporteuse.
Toutefois, l'application des dispositions de cet article 9 est subordonnée à l'obligation
(constatée dans l'acte de fusion ou d'apport) de calculer, en ce qui concerne les éléments
autres que les marchandises comprises dans l'apport, les amortissements annuels à prélever
sur les bénéfices, ainsi que les plus-values ultérieures résultant de la réalisation de ces
41
Article 18 CGI
Page 26
éléments d'après le prix de revient qu'ils comportaient pour les sociétés fusionnées ou les
sociétés apporteuses, déduction faite des amortissements déjà réalisés par elles.
Cette obligation incombe dans le cas de la fusion, à la société absorbante ou nouvelle
et, dans le cas d’apport partiel, soit respectivement aux sociétés bénéficiaires des apports
proportionnellement à la valeur des éléments d'actif qui leur sont attribués, soit à la société
bénéficiaire de l'apport.
Ces déductions faites préalablement au calcul de l’IS, constituent des mesures visant à
encourager l’investissement tout comme l’allègement du coût de discipline fiscale.
42
Le paiement par voie électronique s'entend tout paiement effectué à l'aide d'un procédé électronique à l'instar
des paiements faisant appel à l'usage du téléphone portable (mobile money), d'internet (télépaiement) ou de tout
autre support informatique.
Page 27
des Impôts ou d’un Centre Départemental des Impôts (CDI), d'un Centre Spécialisé des
impôts (CSI) ou des unités de gestion spécialisées, notamment les Centres des Impôts des
Moyennes Entreprises (CIME) et la Direction des Grandes Entreprises (DGE).
Les entreprises ou contribuables relevant d’un Centre Divisionnaire des Impôts ou
d’un Centre Départemental des Impôts (CDI) peuvent payer leurs impôts en espèces, par
chèque certifié ou par voie électronique (mobile money) selon que le montant est inférieur ou
supérieur à cent mille (100 000) FCFA.
Pour les impôts dont le montant est inférieur à cent mille (100 000) FCA, les
contribuables relevant des structures fiscales susvisées peuvent effectuer le paiement en
espèce, par chèque certifié, ou par mobile money auprès de la recette des impôts contre
délivrance d'une quittance.
S'agissant des impôts dont le montant est égal ou supérieur à cent mille (100 000)
FCFA, les paiements sont exclusivement effectués par chèque certifié, par mobile money ou
par virement. Aussi, ledit chèque est établi au nom du receveur des impôts du centre de
rattachement.
Le paiement des impôts, droits et taxes pour les contribuables relevant des CSI, des
CIME et de la DGE est exclusivement effectué par ordre de virement ou par voie
électronique, quel que soit le montant.
Page 28
Le contribuable relevant de la DGE qui conteste les impositions mises à sa charge peut
introduire une requête auprès du Directeur des Grandes Entreprises, lorsque sa réclamation
porte sur un montant inférieur ou égal à cent (100) millions de FCFA en principal. Lorsque ce
montant est supérieur cent (100) millions de FCFA, la réclamation est adressée au DGI.
Le contribuable non satisfait de la réponse donnée par le Chef de Centre Régional des
Impôts, le Directeur des Grandes Entreprises ou le Directeur Général des Impôts suite à sa
réclamation, peut introduire un deuxième recours au MINFI dans un délai de trente (30) jours
à partir de la réception de la décision contestée.
Les délais de réclamation sont ramenés de 60 à 30 jours pour la réponse du DGI et de
90 à 60 jours pour la réponse du MINFI.
Page 29
dans les démarches de création d’entreprises ; l’Agence de promotion des investissements
(API) qui « a pour mission, en liaison avec les autres Administrations et Organismes publics
et privés concernés, de contribuer à l'élaboration et à la mise en œuvre de la politique du
Gouvernement dans le domaine de la promotion des investissements au Cameroun »43 ;
l’agence de promotion des PME et le Conseil d’appui à la réalisation de contrats de
partenariat (CARPA). Dans le cadre de la mise en œuvre du DSCE, divers textes ont été
promulgués. Ils visent à améliorer le climat des affaires, en réformant le fonctionnement des
institutions publiques directement impliquées dans l’investissement, notamment les douanes
et les impôts. Les développements qui suivent passent en revue les progrès introduits sur la
période récente.
A côté de ces institutions publiques, le Cameroun a entrepris de renforcer les cadres
d’intermédiation et de dialogue. Ainsi, le gouvernement a contribué à la dynamisation de la
Chambre de commerce, d’industrie, des mines et de l’artisanat du Cameroun (CCIMA) et a
mis en place, sous l’autorité directe du premier ministre, le Cameroon Business Forum (CBF),
qui est une plateforme de dialogue avec les segments les plus dynamiques du secteur privé,
notamment le Groupement Inter-patronal de Cameroun (GICAM), le Mouvement des
entrepreneurs camerounais (MECAM), les Entreprises du Cameroun (ECAM), la Bourse de
sous-traitance et de partenariat (BSTP) etc.
43
Article 4 (nouveau) (1) du Décret n° 2013/296 du 09 septembre 2013, modifiant et complétant certaines
dispositions du Décret n° 2005 /310 du 1er Septembre 2005, portant organisation et fonctionnement de l’Agence
de Promotion des investissements.
Page 30
En matière d’amélioration technologique, deux faits sont à souligner : l’introduction
du Sydonia et le recours au système Nexus pour suivre les marchandises en transit. La
nouvelle version du Sydonia permet l’accélération du processus de dédouanement, en même
temps qu’une mise en réseau des bureaux de douanes à travers le territoire national. Elle
introduit davantage de transparence et permet le contrôle et le suivi de la gestion automatique
de toutes les étapes de la chaîne de dédouanement. Le recours au système Nexus consiste à
équiper les véhicules de transport de marchandises de GPS, ce qui permet leur géolocalisation
et le suivi des marchandises. L’intérêt de tels développements est évident, dans la mesure où
il devient possible de suivre en temps réel les opérations d’importation.
Des rencontres d’information et de concertation sont organisées régulièrement, et des
contrats de performance sont établis au profit des opérateurs performants. Cela permet une
meilleure mise en œuvre du système défini dans le traitement douanier
Le troisième volet a trait au contrôle interne et à la formation du personnel des
douanes. Des efforts sont menés dans ce sens, avec la mise en place de contrats de
performance fondés notamment sur la réactivité et le temps de traitement des dossiers. Ils sont
assortis de la sensibilisation du personnel sur les questions de transparence et de gouvernance.
Un comité de promotion de l’éthique et de la gouvernance, chargé du suivi des progrès
réalisés sur le terrain, a été mis en place. Deux tiers de ses membres sont des personnes
extérieures aux services de douanes.
Les premiers résultats obtenus et ceux escomptés portent à croire qu’à terme, le
système douanier pourra constituer un atout supplémentaire dans les efforts pour améliorer
l’attrait des investisseurs étrangers, afin de faciliter l’implantation des groupes de sociétés qui
bénéficient des mesures incitatives particulières sur le sol camerounais.
Page 31
En revanche, sur le plan du contrôle fiscal, l’établissement stable tout comme la filiale
dispose d’une personnalité fiscale. Par conséquent, ils sont traités pareillement par
l’administration fiscale qui dispose du pouvoir de redresser les transactions effectuées entre le
siège et l’entité étrangère. Toutefois, la détermination du résultat fiscal est plus complexe
dans l’établissement stable que dans la filiale, compte tenu de l’unicité de la personnalité
morale qui exige la ventilation des charges et des produits entre le siège et l’établissement
stable.
Afin de garantir l’attrait et la compétitivité des entreprises à vocation internationale, le
Cameroun répond à la question de la territorialité de l’impôt, en instituant les méthodes
d’imposition des IDE sous forme d’établissement stable (paragraphe 1) et le régime
d’imposition des sociétés mères et filiales (paragraphe 2).
1- La méthode d’imputation
L’imputation est une méthode utilisée par l’Etat de résidence pour procéder à la
régularisation de l'impôt retenu par l'Etat de source du revenu. La méthode d’imputation
requiert deux techniques : la déduction et le crédit d’impôt. Elle consiste pour l’Etat de
résidence du contribuable à accorder à celui-ci, une déduction ou une réduction fiscale au titre
de l’impôt payé dans l’Etat de source. L’imputation peut être totale ou partielle.
Page 32
L’imputation est dite totale ou intégrale, lorsque le crédit d’impôt dont bénéficie le
contribuable dans l’Etat de résidence correspond à l’impôt prélever par l’Etat de source quel
qu’en soit le montant. L’Etat de résidence impute cette somme dans l’impôt qu’il doit
percevoir et accepte de perdre un gain au profit du contribuable.
Dans l’imputation partielle ou limitée, le crédit d’impôt accordé par l’Etat de résidence
ne peut excéder la fraction de son propre impôt correspondant au revenu imposable trouvant
source dans l’autre Etat.
L’imputation s’accompagne de la réintégration d’une quote-part des dépenses de
direction et des frais de siège. Cette méthode n'est applicable que dans le cadre d'une
convention fiscale visant l’élimination la de double imposition44 entre l'Etat de source du
revenu et l'Etat de résidence du contribuable.
Aujourd’hui, le Cameroun compte très peu de conventions fiscales ratifiées, mais
plusieurs autres sont en cours de négociation, notamment avec l’Afrique du Sud et le Maroc.
Au nombre des conventions fiscales ratifiées figurent celles avec le Canada, le France, la
Tunisie et la CEMAC, tendant à empêcher la double-imposition et à réduire la charge fiscale
entre les Etats membres, sauf en matière de transfert de dividendes45.
2- La méthode d’exonération
Le principe de l’exonération consiste pour l’Etat de résidence à renoncer l’imposition
du revenu d’origine étrangère déjà imposé dans l’Etat de source. L’exonération trouve son
fondement dans le principe de territorialité qui a été d’ailleurs consacré par le code général
des impôts en son article 5, lorsqu’il dispose que : « Les bénéfices passibles de l'impôt sur les
sociétés sont déterminés en tenant compte uniquement des bénéfices obtenus dans les
entreprises exploitées ou sur les opérations réalisées au Cameroun, sous réserve des
dispositions des conventions internationales. »
La convention Cameroun-France privilégie l’exonération en son article 26 qui énonce
dans le cas de la France, que les revenus qui proviennent du Cameroun et qui sont imposables
ou ne sont imposables que dans cet Etat sont pris en compte pour le calcul de l’impôt français
lorsque leur bénéficiaire est domicilié en France et qu’ils ne sont pas exemptés de l’IS en
application de la législation française. Dans ce cas l’impôt Camerounais n’est pas déductible
de ces revenus, mais le bénéficiaire a droit au crédit d’impôt français.
44
Il s’agit d’un ensemble d'accords qui régit deux Etats dans le souci d'éliminer la double imposition des
revenus, de protéger les contribuables qui effectuent des opérations à l`international et de coopérer dans le cadre
de l'exercice de leur pourvoir de contrôle.
45
Acte CEMAC n°5/66 du 13 décembre 1966
Page 33
En vertu de cet article, dans le cas du Cameroun les revenus perçus par les personnes
domiciliées au Cameroun sont exonérées des impôts camerounais lorsque ces revenus sont
exclusivement imposables en France.
De même, l’acte n°5/66-UDEAC-49 du 13 décembre 1966 portant adoption d’une
convention tendant à éliminer les doubles impositions et lutter contre la fraude et l’évasion
fiscale prévoit l’exonération comme méthode d’élimination et d’atténuation de la double
imposition.
Outre l’élimination de la double imposition qui est une mesure visant à supprimer les
obstacles de nature fiscale susceptibles de de freiner le mouvement des investisseurs, ces
derniers bénéficient également des incitations prévues dans un cadre conventionnel visant à
leur garantir une sécurité juridique dans leurs états de résidence.
1- Le principe de non-discrimination
Le principe de non-discrimination ou clause d'égalité de traitement trouve son
fondement en droit communautaire.
En zone CEMAC, l’article 27 (a) de la convention UEAC interdit les discriminations
fondées sur la nationalité ( libre circulation des travailleurs ou chercheurs d’emploi), tandis
que l’article 5 de l’Acte n°5/66-UDEAC-49 du 13 décembre 1966 portant convention fiscale
de la CEMAC inspiré de l’article 24 de la convention modèle OCDE interdit les
discriminations fiscales fondées sur l’égalité des contribuables. L'avenant du 31 mars 1994 à
la Convention Fiscale Cameroun-France a consacré également le principe de non-
discrimination fondée sur la nationalité d'une personne physique ou morale.
Toutefois, l’esprit de ce principe voudrait que sous condition de réciprocité, les
nationaux d'un Etat contractant soient traités dans les mêmes conditions que les nationaux de
l’autre Etat contractant. Ainsi, sous condition de réciprocité, une filiale française exerçant au
Cameroun sera traitée dans les mêmes conditions que les entreprises de droit camerounais.
Page 34
2- La réduction du taux d’imposition
La réduction du taux d’imposition concerne particulièrement la Taxe Spéciale sur le
Revenu (TSR). En vertu de l’article 225 du CGI il s’agit est d’un impôt retenu sur les revenus
servis aux personnes morales ou physiques domiciliées hors du Cameroun, par des entreprises
ou établissements situés au Cameroun, l’Etat ou les collectivités territoriales décentralisées au
titre :
- des droits d’auteurs concernant toutes les œuvres du domaine littéraire ou artistique quels
qu’en soient le mode, la valeur, le genre ou la destination de l’expression,
- des rémunérations versées pour l’usage ou la concession de l’usage des logiciels, entendus
comme applications et programmes informatiques relatifs à l’exploitation ou au
fonctionnement de l’entreprise.
- de la vente ou de la location de licence d’exploitation de brevets, marques de fabrique,
procédés et formules secrets ;
- de la location ou du droit d’utilisation des films cinématographiques, des émissions ou des
films de télévision ;
- des rémunérations pour fournitures d’informations concernant les expériences d’ordre
industriel commercial ou scientifique ainsi que pour la location d’équipements industriels,
commerciaux ou scientifiques ;
- des rémunérations pour études, consultations, assistance technique, financière ou
comptable;
- des rémunérations versées aux entreprises effectuant des travaux de forage, de recherche
ou d’assistance pour le compte des compagnies pétrolières, et de manière générale les
prestations ponctuelles de toutes natures lorsque ces entreprises renoncent à l’imposition
d’après la déclaration
- des prestations audiovisuelles à contenu numérique ;
- d’une manière générale, des sommes versées à l’étranger, en rémunération des prestations
de toute nature fournies ou utilisées au Cameroun.
Le taux global de la TSR est de 15% et son versement doit s’effectuer dans les 15 jours
qui suivent le fait générateur à la caisse du comptable du Trésor du lieu du siège social.
La réduction du taux de cet impôt comme moyen d’incitation fiscale reste jusqu’ici
conventionnelle et n’est retenu que dans le cadre de la Convention fiscale Cameroun-France.
Cette réduction est visée à l'article 20 (4) de ladite convention qui ramène ce taux à 7.5% dans
le cadre des rémunérations pour études, assistances techniques, financières ou comptables.
Page 35
L’ensemble de ces mesures incitatives s’appliquent aussi bien aux établissements
stables qu’aux filiales. Mais compte tenu de la personnalité dont jouissent ces dernières vis-à-
vis de la société mère, la double imposition qui subsiste lors de la distribution des dividendes
est palliée grâce aux mesures incitatives liées au régime des sociétés mères et filiales.
46
COZIAN (Maurice), Précis de fiscalité des entreprises, 38ième édition LexisNexis, Septembre 2014, 960 p.
Page 36
La rupture de cet engagement est sanctionnée par l'imposition des revenus indûment
exonérés sans préjudice des pénalités applicables pour insuffisance de déclaration.
Page 37
- les actions ou parts d’intérêts attribuées à l’émission soient toujours restées inscrites au
nom de la société participante, ou s'il ne s'agit pas de titres souscrits lors de leur émission,
que celle-ci prenne l’engagement de les conserver pendant deux années consécutives au
moins sous la forme nominative.
La rupture de cet engagement est sanctionnée par l’imposition des revenus indûment
exonérés sans préjudice des pénalités applicables pour insuffisance de déclaration.
47
Voir article 70 du CGI.
Page 38
CHAPITRE II :
LES MESURES FISCALES PARTICULIERES DE
SOUTIEN A L’INVESTISSEMENT PRIVE
Les mesures fiscales particulières incitatives aux investissements sont des dispositions
spéciales prévues par la réglementation pour susciter et encourager les investissements privés.
La particularité de ces mesures vient du fait qu’elles sont disposées dans des textes ou codes
spéciaux, et qu’elles ciblent des activités, des opérations ou des secteurs spécifiques. Très
souvent, le recours à ces mesures est conditionné par la détention d'un titre d'agrément obtenu
auprès des autorités compétentes. Le législateur camerounais a depuis la décennie 90 mis sur
pied un dispositif assez important des incitations fiscales. Ces mesures fiscales incitatives sont
contenues dans des textes telles la loi du N° 2013/004 du 18 avril 2013 fixant les incitations à
l’investissement privé et l’ordonnance N°90/001 du 29 janvier 1990 créant le régime des
zones franches (section I). En dehors de ces deux régimes, le cadre incitatif camerounais
regorge plusieurs autres mesures spécifiques de promotion des investissements (section II).
Page 39
que de l’emploi »48. Ce texte prévoit de multiples incitations fiscales et douanières dont
peuvent bénéficier les investisseurs qui font l’implantation d’entreprises nouvelles (A). Les
secteurs prioritaires et les entreprises existantes bénéficient quant à eux des incitations
spécifiques prévues par cette loi (B).
48
Article 1(2) de la Loi N° 2013/004 du 18 avril 2013 fixant les incitations à l’investissement privé en
République du Cameroun
49
Article 3 de la Loi N° 2013/004 du 18 avril 2013, Op. cit.
Page 40
- L’enlèvement direct des équipements et matériels liés au programme d’investissement lors
des opérations de dédouanement.
Page 41
- chiffre d’affaires réalisé par la société de transformation ;
- toute taxe sur le transfert, l’achat ou la vente de devises, et toute taxe indirecte à la
consommation dont la taxe spéciale sur les produits pétroliers.
L’investisseur peut aussi bénéficier des avantages ci-après :
- le report des déficits jusqu’au cinquième exercice suivant celui de leur survenance;
- l’exemption au paiement de droits, taxes, et redevances de douane, sur les importations de
biens d’équipement destinés à être affectés et utilisés pour son programme
d’investissement.
- La réduction ou l’exemption des droits de douane applicables à l’exportation
d’équipements de construction et d’équipements des usines de transformation ;
Au terme de la période de dix ans visée ci-dessus, l’investisseur est reversé d’office au
droit commun. En revanche tout investisseur peut bénéficier d’un crédit d’impôt à condition
de remplir l’un des critères ci-après :
- embaucher au moins cinq (5) jeunes diplômés de l’Enseignement supérieur par an;
- lutter contre la pollution ;
- développer des activités sportives, culturelles ou sociales ;
- développer des activités d’intérêt public dans les zones rurales.
Les mesures fiscales incitatives de la loi du 18 avril 2013 ne se limitent pas seulement
aux entreprises nouvelles. Elles s’étendent également aux investissements dans les secteurs
spécifiques et dans les entreprises existantes.
Page 42
halieutique; du développement de l’offre touristique et des loisirs, de l’écotourisme social et
de l’artisanat ; du développement de l’habitat et du logement social ; de la promotion de
l’agro-industrie, des industries manufacturières, de l’industrie lourde, des matériaux de
construction, de la sidérurgie, de la construction métallique, des activités maritimes et de
navigation; du développement de l’offre de l’énergie et de l’eau ; de l’encouragement du
développement des régions et de la décentralisation ; de la lutte contre la pollution et la
protection de l’environnement ; de la promotion et du transfert des technologies innovantes et
de la recherche-développement ; de la promotion des exportations et de la promotion de
l’emploi et formation professionnel.
Sur le plan fiscal, toute entreprise qui envisage de réaliser les investissements
permettant d’atteindre les objectifs prioritaires susvisés peut prétendre, selon le cas au
bénéfice des incitations communes ci-après :
- L’exonération de TVA sur les crédits relatifs au programme d’investissement ;
- L’exonération de la taxe foncière sur les immeubles bâtis ou non, faisant partie du site
dédié à l’unité de transformation et de tous prolongements immobiliers par destination ;
- L’enregistrement au droit fixe;
Au niveau de la douane les avantages accordés sont les suivants :
- L’admission temporaire spéciale des équipements et matériels industriels susceptibles de
réexportation ;
- L’exonération du droit de sortie sur les produits manufacturés localement ;
- Le régime du perfectionnement actif prévu par le code des douanes.
Les deux dernières incitations ci-dessus citées sont spécialement accordées aux
entreprises qui réalisent des opérations d’exportation50.
50
Article 16 de la Loi N° 2013/004 du 18 avril 2013 fixant les incitations à l’investissement privé en République
du Cameroun
Page 43
douanes applicables à l’exportation des équipements de construction et des équipements des
usines de transformation, tout impôt, redevance, taxes sur le chiffre d’affaire réalisé par la
société de transformation…
Ces incitations sont celles dont bénéficient les entreprises nouvelles en phase
d’exploitation. Une entreprise existante ne peut en bénéficier que lorsque son programme
d’investissement assure une augmentation de la production des biens ou des services ou du
personnel camerounais à concurrence de 20% au moins51.
Ces incitations de la loi du 18 avril 2013 viennent s’ajouter aux autres instruments
ayant pour vocation la promotion des investissements et des exportations à l’instar du régime
des zones et points francs industriels.
51
Ibid. article 17
52
Article 1 (a) de l’Ordonnance N° 90/001 du 29 janvier 1990 créant le régime de la Zone Franche au Cameroun.
53
Ibid. Article 2 (a) et (a)
Page 44
1- Les exonérations pendant les dix premières années d’exploitation
Pendant leurs dix premières années d’exploitation, les entreprises installées dans les
ZFI bénéficient de l'exonération totale des impôts et taxes directes et/ou indirectes en vigueur
ou à créer ainsi que des droits d'enregistrement et de timbre de quelque nature que ce soit.54
Ces entreprises sont donc exonérées de l'impôt sur le revenu, de la taxe foncière, des droits
d'enregistrement et des timbres, de la contribution de patente et de la licence etc.
En revanche, les opérations réalisées par les entreprises agréées au régime de la zone
franche demeurent assujetties à la TVA, en vertu de l’article 127 (8) et l’article 263 (3) du
CGI.
Page 45
1- Les exonérations liées aux importations et aux exportations
En vertu de l’article 18 de l’Ordonnance n° 90/001 du 29 janvier 1990, les entreprises
de la ZFI sont exonérées de tous droits et taxes de douane actuels et futurs. Toutes les
importations d'une entreprise de la ZFI, y compris les biens d'équipement, le mobilier de
bureau, le matériel de bureau, les matériaux de construction, les outils, les pièces détachées,
les matières premières, les produits intermédiaires, les fournitures, les biens de
consommation, sont exonérées de tous droits et taxes de douane et de tous autres impôts,
droits et taxes directs et/ou indirects, actuels et futurs. Toutefois, les voitures de tourisme et le
carburant entrant dans la Zone ne bénéficient pas de cette exemption.
En outre, toutes les exportations d'une entreprise de la ZFI sont exonérées de
tous droits et taxes de douane et de tous autres impôts, droits et taxes directs et/ou indirects,
actuels et futurs. En revanche, les redevances pour services rendus en matière d'importation et
d'exportation sont dues et payées par les entreprises de la ZFI bénéficiaires de ces services.
Les Entreprises des zones et points francs industriels sont exemptées du Programme de
Vérification des Importations (PVI).
L’article 19 quant à lui prévoit que les ventes locales de matières premières, de
produits intermédiaires, semi-finis ou finis par des parties locales résidant sur le territoire
douanier national à une ZFI s'effectue en exonération de l'impôt sur le chiffre d'affaires
intérieur, de la taxe unique, de la taxe intérieure à la production, et de tous autres impôts,
droits et taxes de même nature, actuels et futurs. Toutefois, l'acheteur en ZFI paie tous ses
articles, matières premières, matériels ou autres produits précisés ci-dessus dans la monnaie
qui a cours légal au Cameroun ou dans toute autre monnaie d'échange convertible, arrêtée
d'accord parties entre l'acheteur et le vendeur.
Page 46
marchandises entre deux ou plusieurs ZFI, entre une Zone Franche Industrielle et un Point
Franc Industriel, ou entre deux Points Francs Industriels.
Ce même article prévoit que les services des douanes inspectent les exportations d'une
entreprise de la Zone Franche Industrielle sur son site afin d'établir qu'elles ne contiennent pas
d'articles, produits ou matériels interdits, et sont conformes aux documents y relatifs. A l'issue
de cette inspection, les exportations sont transférées sous scellées et sous escorte douanière
jusqu'au point d'embarquement sans autre inspection ou intervention douanière.
L’article 20 prévoit enfin que les services des douanes disposent d'un bureau dans
chaque Zone Franche Industrielle ainsi que dans les Points Francs Industriels, pour accomplir
leurs tâches conformément à la présente ordonnance, bureau dont les coûts de fonctionnement
sont supportés par chaque promoteur ou opérateur de ZFI ou de Point Franc Industriel.
Les pouvoirs publics ont institué ces allègements pour que les promoteurs nationaux et
étrangers se mobilisent pour créer de nouvelles entreprises orientées vers l'exportation et la
création d’emplois. C’est dans cette optique que l’Etat étend son cadre incitatif aux activités
extractives et aux opérations spécifiques.
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A- Les exonérations liées aux activités minières et gazières
Les exonérations liées aux activités minières et gazières sont disposées dans la loi n°
2001/001 du 16 avril 2001 portant code minier (1) et dans la loi n° 2012/006 du 19 avril 2012
portant code gazier (2).
56
Article 95 de la loi n° 2001/001 du 16 avril 2001 portant code minier
57
Article 94 Ibid.
Page 48
Pendant la phase d’exploration, sous réserve des avantages spécifiques accordés ci-
après, le titulaire de permis d’exploitation est soumis au régime fiscal de droit commun 58.
Toutefois, jusqu’à la date de la première production, il est exonéré de la TVA à l’importation
sur les matériels et équipements dans des conditions prévues à l’article 96 (1).59 Les
entreprises et sociétés minières demeurent également exonérées de la contribution à la patente
et des droits d’enregistrement relatifs aux opérations minières, à l’exclusion de ceux afférents
aux baux et locations à usages d’habitation.
Elles bénéficient également de l’étalement sur un an, du paiement des droits
d’enregistrement sur les actes de création de société, de prorogation et d’augmentation de
capital. Leurs produits destinés à l’exportation sont soumis au taux zéro de la TVA lorsque
lesdits produits sont assujettis à cette taxe. Toutefois, les produits mis à la consommation sur
le marché local sont soumis à cette taxe.
Pendant la durée de validité d’un permis d’exploitation, les taux et règles d’assiette des
impôts, droits et taxes seront stabilisés au niveau où ils se trouvaient à la date d’attribution du
permis d’exploitation.60
En revanche, toute disposition favorable d’un nouveau régime fiscal et douanier de
droit commun sera étendue aux titulaires de permis d’exploitation.
Au plan douanier, les titulaires d’un permis d’exploitation bénéficient pendant la
phase de construction de la mine telle que spécifiée dans la convention minière, de
l’exonération des taxes et des droits de douane sur les matériels, matériaux, intrants et biens
d’équipement nécessaire à la production ainsi que sur le premier lot des pièces de rechange
qui devrait accompagner l’équipement de démarrage ; à l’exception des véhicules de
tourisme, des matériels et fournitures de bureau.
Ils bénéficient également de l’exonération des droits et taxes suivants :
- des taxes et droits de douane sur l’équipement de remplacement en cas d’incident
technique et sur l’équipement devant servir à une extension de l’exploitation ;
- des taxes et droits de douane sur l’importation des intrants. Cette exonération est totale
jusqu’à la date de la première production commerciale constatés conjoints du ministre
chargé des mines et du ministre chargé des finances.
58
Article 97 Code minier
59
Extrait de l’art. 96 du code minier : « …les matériels, matériaux, intrants et biens d’équipement nécessaire à la
production ainsi que sur le premier lot des pièces de rechange qui devrait accompagner l’équipement de
démarrage ; à l’exception des véhicule de tourisme, des matériels et fournitures de bureau. »
60
Article 99 Code minier
Page 49
- des droits et taxes de douane sur l’importation des matériaux et matériels nécessaires à la
construction des bâtiments, jusqu’à la date de la première production commerciale
constatée par arrêtés conjoints du ministre chargé des mines et du ministre chargé des
finances ;
- des taxes et droits de douane sur les lubrifiants spécifiques.
61
Article 56 (1) Code gazier.
Page 50
droits d’enregistrement et timbres ; droits de douane ; tout impôt, redevance, taxe ou frais de
quelque nature que ce soit calculés sur le chiffre d’affaire réalisé par la société de
transformation ou sur les volumes unitaires de GNL à la production, la vente ou l’exportation;
toute taxe sur le transfert, l’achat ou la vente des devises, et toute taxe indirect à la
consommation dont la taxe spéciale sur les produits pétroliers.
Au-delà de la période d’exemption ci-dessus visée, sociétés de transformation de gaz
naturel seront passibles d’un IS à un taux réduit compris entre 15 et 30%, CAC inclus dont les
modalités de l’assiette seront définies par la convention gazière.
Toutefois, l’Etat pourra accorder, selon des modalités et conditions à définir dans la
convention gazière, le bénéfice de certaines exonérations fiscales aux actionnaires, bailleurs
de fonds, porteurs et autres co-contractants des opérateurs gaziers par voie contractuelle62.
Pendant les cinq (5) premières années de leur exploitation, les sociétés gazières
peuvent bénéficier des avantages douaniers suivants :
A l’importation :
- taux global réduit des droits de douane, sur les équipements, machines, matériaux et
outillage ainsi que les produits chimiques, les parties et pièces détachées destinées aux
machines et équipements nécessaires aux opérations gazières ;
- admission temporaire normale ou spéciale selon le cas, sur les équipements, machines, et
outillage, directement nécessaires aux opérations gazières, lorsque lesdits matériels sont
destinés à être réexportés après utilisation ;
- dispenses d’inspection avant embarquement, sous réserve de la levée obligatoire de la
déclaration d’importation.
A l’exportation :
- exonération des droits de sortie sur les hydrocarbures issus de la transformation du gaz
naturel.
Toutefois, au-delà de la période susvisée, les importations des équipements et
matériels relatifs aux opérations gazières sont soumises au régime commun63.
62
Article 56(3) du Code gazier
63
Article 56(4) Ibid.
Page 51
Ce code pétrolier accorde aux opérations pétrolières des incitations tant au plan de la fiscalité
interne qu’au niveau de la fiscalité de porte.
64
Selon l’article 93 du Code Pétrolier, les titulaires de contrats pétroliers ou les entreprises qui leur sont
associées dans le cadre des protocoles ou accords, sont assujettis à l’IS à raison de des bénéfices nets qu’ils
retirent de l’ensemble de leurs activités de recherche et d’exploitation sur le territoire camerounais qu’ils s’y
livrent seuls ou en association avec d’autre entreprises.
Page 52
d’enregistrement relatifs aux prêts, cautionnements et contrat liées directement aux opérations
pétrolières.
Le titulaire demeure également soumis à toutes les obligations d’assiette et de
paiement relatifs aux impôts et taxes prélevés à la source pour le compte du trésor public,
notamment en matière d’impôts sur les salaires, les bénéfices, les revenus, d’impôts fonciers,
à l’exception de tous impôt et taxe sur les intérêts payés à des prêteurs non-résidents pour les
fonds concernant les investissements de développement.
En revanche, le titulaire demeure assujetti aux taxes ou redevances perçues en
contrepartie de services rendues, et d’une manière générale, à tous les prélèvements autres que
ceux à caractère fiscal.
Page 53
Au-delà de la période de cinq (5) ans visée ci-dessus, les produits et matériels relatifs
aux opérations pétrolières sont soumis au régime du droit commun. Pour l’application de cette
disposition, une liste de matériels, matériaux, machines et équipement pouvant bénéficier du
régime préférentiel est établi par le ministre chargé des finances après avis du ministre chargé
des hydrocarbures. Cette liste fait l’objet d’une révision périodique, compte tenu de
l’évolution technologique.68
Les importations et exportations assujetties à toutes les formalités requises par
l’Administration des Douanes. Toutefois, le ministre chargé des finances peut en tant que de
besoin et après consultation des intéressés prendre certaines mesures particulières tendant à
accélérer les procédures de leur dédouanement.
Les titulaires des contrats pétroliers sont soumis au paiement de redevance
informatique lors de leurs importations, au taux réduit de 0,5%, sous réserve des exceptions
prévues par le Code pétrolier. Les sous-traitants bénéficient des mêmes avantages, sous
réserve du visa de leurs importations par le titulaire.
Les titulaires peuvent exporter en exonération de tous droits et taxes de sortie, la
fraction des hydrocarbures leur revenant au titre de leurs contrats pétroliers.69
En plus de la promotion des activités spécifiques que sont les opérations minières,
gazières et pétrolières, l’Etat dans sa politique incitative à prévu également des régimes
fiscaux particuliers pour des opérations spécifiques tels les marchés publics, le secteur
boursier etc.
A- Les avantages fiscaux liés aux régimes des marchés publics et des contrats de
partenariat public-privé
Les avantages fiscaux liés au régime des marchés publics sont contenus dans le CGI
aux articles 113 à 116 ter. Les avantages fiscaux du régime des contrats de partenariat public-
68
Article 106 du code pétrolier
69
Article 107 du Code pétrolier
Page 54
privé quant à eux, sont prévus par la loi n°2008/009 du 16 juillet 2008 fixant le régime fiscal,
financier et comptable applicable aux contrats de partenariat.
1- Les avantages fiscaux liés au régime des marchés publics (113 à 116 ter du CGI)
Le régime des marchés publics est une innovation de la loi N° 2013/017 du 16
décembre 2013 portant loi de Finances pour l’exercice 2014. Ce régime vient remplacer celui
des projets structurants institué par la loi de finances 2008. A travers le régime des marchés
publics, le gouvernement voudrait inciter davantage les investisseurs privés à prendre part à la
réalisation des grands projets de l’Etat.
Les marchés publics sont conclus toutes taxes comprises. Ils sont soumis aux impôts,
droits et taxes prévus par la législation en vigueur à la date de leur conclusion, notamment la
taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et les droits d’enregistrement. En aucun cas, les marchés
entièrement financés sur ressources propres de l’Etat ne feront l’objet d’une exonération de
droits et taxes ou d’une prise en charge desdits droits et taxes par l’Etat.
Par conséquent, le maître d’ouvrage est tenu de prévoir dans son budget les crédits
destinés à couvrir les droits et taxes qu’il est appelé à supporter dans le cadre des marchés
publics.
Pour les marchés publics à financement extérieur ou conjoint, les droits et taxes liés
sont à la charge de l’adjudicataire. Toutefois, lorsque pour ce type, la convention de
financement ne prévoit pas la prise en charge de la TVA, celle-ci est prise en charge par les
fonds de contrepartie prévus dans le budget du maître d’ouvrage ou du ministère bénéficiaire.
La TVA, objet de la prise en charge, est celle afférente aux acquisitions de biens et
services directement liés à la mise en place du projet, à l’exclusion des dépenses indirectes,
notamment celles liées à l’acquisition de véhicules de tourisme, à l’hébergement, à la
restauration, aux honoraires et autres dépenses d’études et de conseils, aux charges
administratives et managériales. La prise en charge est matérialisée par une attestation
délivrée par l’Administration fiscale sur la base des factures pro forma ou des déclarations
d’importation fournies par l’adjudicataire.
La somme des prises en charge sollicitées ne peut être supérieure à celle qui résulterait
de l’application du taux légal de la TVA au montant du marché.
Ne sont pas concernés par la prise en charge : les droits et taxes normalement dus par
l’attributaire du marché ou de la lettre-commande ; les impôts et taxes résultant d’un marché
ou d’une lettre-commande financés par la contrepartie camerounaise en dépenses réelles.
Page 55
Les « droits et taxes normalement dus par l’attributaire » s’entendent : des droits
d’enregistrement ; de l’impôt sur le revenu ; de la TVA applicable aux carburants et aux
dépenses indirectes visées à l’article 115 ; de la taxe spéciale sur les rémunérations versées à
l’étranger ; de la taxe spéciale sur les produits pétroliers et toutes les autres taxes du secteur
pétrolier ; de la taxe à l’extraction, la redevance superficiaire et toutes les autres taxes du
secteur minier ; de tous autres impôts et taxes mis à la charge de l’attributaire par la
législation fiscale en vigueur.
Ne sont pas considérés comme ressources extérieures pour l’exécution de la prise en
charge, les fonds issus de la remise ou de l’annulation de la dette de l’État du Cameroun
70
Article 4 de La loi n°2008/009 du 16 juillet 2008 fixant le régime fiscal, financier et comptable applicable aux
contrats de partenariat
Page 56
- les conventions et actes passés par le cocontractant sont enregistrés gratis durant les
cinq premières années d’exploitation.71
- le déficit fiscal au terme d’un exercice peut être reporté successivement jusqu’au
cinquième exercice qui suit celui de sa réalisation.
En ce qui concerne les avantages douaniers, ils sont accordés uniquement en phase de
construction et d’installation.
Les matériels et équipements importés, destinés aux projets d’investissement
réalisés en contrats de partenariat, bénéficient de la mise à la consommation avec prise
en charge des droits et taxes de douane par le budget de la personne publique contractante.72
Ces droits et taxes comprennent, outre le tarif extérieur commun (TEC) applicable aux
projets concernés, la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) devant être supportée à l’importation,
les centimes additionnels communaux (CAC), la taxe communautaire d’intégration (TCI), la
contribution communautaire d’intégration (CCI), la taxe sur l’Organisation pour
l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (TAXE OHADA), à l’exception des
redevances pour services rendus.
Les matériels et équipements visés ci-dessus doivent être accompagnés
obligatoirement des documents ci-après: connaissements ou lettres de transport aérien,
factures, notes de fret et déclaration d’importation libellés au nom du titulaire du contrat et
reprenant le numéro du contrat.
Les matériels et équipements provisoirement importés, destinés à la réalisation des
projets d’investissement réalisés en contrats de partenariat, bénéficient du régime de
l’Admission Temporaire Spéciale (ATS) avec prise en charge par le budget de l’Etat ou de la
personne publique contractante, des droits et taxes correspondant au séjour du matériel
sur le territoire national. Ces matériels et équipements peuvent bénéficier, lors des opérations
de dédouanement, de la procédure d’enlèvement direct telle que prévue par les textes en
vigueur.
Les demandes d’enlèvement direct comprennent, outre les documents d’importation
énoncés ci-dessus, la déclaration spécifique des éléments de la valeur (DSV) et le bordereau
électronique de suivi des cargaisons (BESC)73.
Les importations de matériels et d’équipements, destinés aux projets d’investissement
réalisés en contrats de partenariat peuvent être dispensés d’inspection avant embarquement, à
71
Article 10 de La loi n°2008/009 du 16 juillet 2008, Op. cit.
72
Article 5 Ibid.
73
Article 7 (2) de La loi n°2008/009 du 16 juillet 2008, Op. cit.
Page 57
la demande du cocontractant de la personne publique. La demande de dispense d’inspection
est adressée à l’Administration en charge des douanes. Cette dernière dispose d’un délai de
cinq (5) jours pour y donner suite, faute de quoi la demande est réputée acceptée74.
Les matériels et équipements ayant bénéficié des avantages ci-dessus font l’objet
d’un contrôle non intrusif par l’Administration.75
74
Article 8 (2) Ibid.
75
Article 9 Ibid.
76
Article 107 du CGI
Page 58
réinvestissements admis, dans la limite du quart du bénéfice déclaré au cours de l'année
fiscale considérée.
Les réinvestissements éligibles concernent :
- la construction ou extension d’immeubles bâtis en matériaux définitifs à usage industriel,
agricole, forestier, touristique ou minier, bureaux techniques compris ainsi que celles
destinées au logement gratuit du personnel salarié ;
- l’acquisition de matériel industriel, agricole, minier ou touristique scellé au fonds à
perpétuelle demeure ;
- l’acquisition de matériel spécialisé d’exploitation non susceptible d’un autre emploi pour
les entreprises relevant du secteur des nouvelles technologies de l’information et de la
communication ;
- l’acquisition de tracteurs ou matériel mécanique lourd spécialisé à un usage agricole,
forestier ou minier ;
- l’acquisition, renouvellement ou installation des équipements de production,
transformation, conditionnement et conservation dans les activités agro-alimentaires ;
l’acquisition d’engins lourds de transport industriel, forestier, maritime ou aérien ;
- les dépenses de préparation du sol, d’ensemencement de plantations industrielles, à
l’exclusion des dépenses d’entretien ou tout réinvestissement à caractère social.
2- Les avantages fiscaux des régimes du secteur boursier et des centres de gestion
agréés (CGA)
Les avantages fiscaux du régime du secteur boursier sont disposés dans les articles 108
à 112 du CGI.
Les sociétés qui procèdent à l’admission de leurs actions ordinaires à la cote de la
bourse du Cameroun bénéficient de l’application des taux réduits d’Impôt sur les Sociétés
suivants :
- 20 % pendant trois (3) ans, pour les augmentations de capital représentant au moins 20 %
du capital social ;
- 25 % pendant trois (3) ans, pour les cessions d’actions représentant au moins 20 % du
capital social ;
- 28 % pendant trois (3) ans à partir de la date d’admission pour les augmentations ou
cessions en deçà du seuil de 20 % du capital social ;
Toutefois, dans le cas où le taux d’augmentation ou de cession de 20 % de titres cotés
n’est pas atteint lors de la première introduction en bourse, mais au cours de la période de trois
Page 59
(3) ans, les deux premières réductions visées ci-dessus s’appliquent pour la durée résiduelle de
ladite période. Cette réduction est accordée aux sociétés dont l’admission à la côte de la
bourse intervient dans un délai de trois (3) ans à compter du 1er janvier 2012.
Pour les sociétés qui émettent des titres sur le marché obligataire de la bourse du
Cameroun, il leur est appliqué un taux réduit d’Impôt sur les Sociétés de 30 % pendant trois
(3) ans, à compter de l’année d’émission. Cette réduction est accordée aux sociétés dont
l’émission à la cote de la bourse intervient dans un délai de trois (3) ans à compter du 1er
janvier 2008.
Les sociétés qui sont réputées faire appel public à l’épargne conformément aux
dispositions de l’Acte Uniforme de l’OHADA relatif aux sociétés commerciales et les
Groupements d’intérêt économique et qui consentent à admettre et échanger tout ou partie de
leurs titres de capital et leurs titres de créance à la cote de la bourse des valeurs mobilières du
Cameroun, bénéficient de l’application d’un taux réduit d’impôt sur les sociétés de 30 %
pendant trois ans, à compter de la date d’admission des titres.
Par dérogation aux dispositions de l’article 70 du code général des impôts77, le taux
d’imposition des dividendes et intérêts des obligations à moins de cinq (5) ans de maturité
ainsi que les autres rémunérations provenant des valeurs mobilières des personnes physiques
ou morales, admises à la cote de la bourse du Cameroun est fixé à 10 %.78
Ce taux est fixé à 5 % pour les rémunérations des obligations des sociétés privées ou
publiques à échéance de cinq (5) ans ou plus.
Toutefois, sont exonérés de l’impôt sur les sociétés, de l’impôt sur les revenus de
capitaux mobiliers, ou de tout autre prélèvement de même nature les produits suivant : les
intérêts des obligations de l’Etat ; les intérêts des obligations des collectivités territoriales
décentralisées ; les plus-values nettes réalisées par des personnes physiques ou morales sur le
marché des valeurs mobilières du Cameroun.79
Les conventions et actes portant cession des titres cotés sur le marché de valeurs
mobilières sont exonérés des droits d’enregistrement.
77
Article 70 du CGI : « Pour le cas spécifique des revenus des capitaux mobiliers, il est appliqué un taux de 15
% sur le revenu imposable. »
78
D’après l’article 70 du CGI, pour le cas spécifique des revenus des capitaux mobiliers, il est appliqué un taux
de 15 % sur le revenu imposable. Ce taux est réduit à 10% en cas d’imposition des dividendes et intérêts des
obligations à moins de cinq (5) ans de maturité ainsi que les autres rémunérations provenant des valeurs
mobilières des personnes physiques ou morales, admises à la cote de la bourse du Cameroun
79
Pour l’application de cette disposition, la plus-value s’entend du prix de cession diminué du prix d’acquisition
et des frais de gestion des titres cédés.
Page 60
En ce qui concerne les Centres de Gestion Agréés, ils apportent une assistance en
matière de gestion et encadrent les adhérents dans l’accomplissement de leurs obligations
fiscales. Les avantages fiscaux accordés à ces centres sont disposés aux articles 118 et 119 du
CGI.
Suivant les dispositions de l'article 118 (2) du CGI, peuvent être adhérents aux Centres
de Gestion Agréés, les personnes physiques ou morales réalisant un chiffre d’affaires annuel
hors taxes inférieur ou égal à cent (100) millions de francs CFA.
Les adhérents aux CGA bénéficient d’un abattement de 50% du bénéfice fiscal
déclaré. L’adhérent perd le droit aux avantages prévus ci-dessus lorsque sa déclaration des
résultats ou des revenus n’est pas souscrite dans les délais.
Après avoir exploré le cadre légale des incitations fiscales à l’investissement privé, le
constat est sans appel, le Cameroun dispose d’un arsenal assez fourni des mesures visant à
garantir l’implantation des capitaux étrangers sur son territoire. Mais, malgré ce dispositif
séduisant, le Cameroun reçoit peu d'investissements directs étrangers (de l'ordre de 500
millions d'USD en 2013) avec des flux nets d'IDE ne représentant qu'un modeste pourcentage
du PIB80. En effet, l'économie camerounaise qui a les potentiels pour être l'une des plus
prospères et des plus disposées à recevoir des investissements directs étrangers du continent
africain, est actuellement situé dans le bas du tableau en termes d'attractivité des IDE à causes
de nombreux obstacles.
80
www.planet-expert.com/fr/pays/cameroun/investissement-direct-etranger-ide, consulté le 29 octobre 2014
Page 61
SECONDE PARTIE :
L’EVALUATION DU CADRE JURIDIQUE DE
L’IMPLANTATION DES INVESTISSEURS PRIVES
ETRANGERS
Malgré la pléthore des mesures incitatives instituées par les pouvoirs publics en vue
d’encourager l’initiative privée et d’attirer les investissements directs étrangers (IDE),
l’évaluation du climat des affaires laisse entrevoir que le Cameroun est jugé médiocre en
matière d’attractivité des investissements. La contre-performance du pays dans le classement
Doing Business 2013 de la Banque mondiale, intitulé : « Comprendre les réglementations
pour les petites et moyennes entreprises » en atteste. En effet, comparé au rapport 2012, le
Cameroun passe de la 162ième place (sur 185 pays classés) au 168ième rang, cette fois, sur 189
pays et affiche zéro au chapitre des réformes81. En 2013, les flux des IDE qui ont progressé au
niveau mondial de 10,9%, le Cameroun par contre n’en a reçu que 0,01%, soit environ 250
milliards de FCFA seulement82.
A l’écoute des investisseurs, les heurts les plus cités concourant à la dégradation du
climat des affaires au Cameroun sont par ordre d’importance la fiscalité ; la corruption ;
l’accès au crédit ; les formalités administratives ; les infrastructures ; le coût de financement
de crédit etc. En outre, il ressort du rapport thématique de l’INS sur l’environnement des
affaires au Cameroun que pour 59% des chefs d’entreprises, la fiscalité demeure de loin le
premier obstacle à l’entreprenariat au Cameroun. Les chefs d’entreprises de nationalité
américaine sont ceux qui se plaignent véritablement des pratiques fiscales au Cameroun,
suivis des Français et des autres Européens83.
Cette hypothèse est reprise par le rapport de la Banque africaine de développement84
selon lequel la fiscalité est considérée comme une contrainte majeure par les opérateurs
81
Extrait de « Cameroun: Encore du travail pour améliorer le Climat des affaires », article publié par Cameroon
tribune. Voir www.cameroon-tribune.cm
82
Selon la directrice générale (Dg) de l'Agence de promotion des investissements du Cameroun (Api), Marthe
Angeline Mindja, le Cameroun capte seulement 0,01% des investissements directs étrangers (Ide) dans le monde,
dont la majorité est orienté vers le secteur extractif, notamment l'exploitation pétrolière. La Dg de l'Api a fait
cette révélation lors de la toute première réunion du comité interministériel chargé de la mise en place d'une
politique nationale des investissements au Cameroun. Voir http://cemacbusiness.com/cameroun-comment-
seduire-les-etrangers-how-to-attract-foreigners/
83
INS/Rapports thématiques/Recensement Général des Entreprises (RGE 2009)/Partie I : Environnement des
affaires et compétitivité des entreprises camerounaises
84
GROUPE BANQUE AFRICAINE DE DEVELOPPEMENT, Département Régional de l’Afrique
Centrale : « Environnement de l’Investissement Privé au Cameroun »
Page 62
économiques, tant les entreprises que les investisseurs. Indépendamment du poids de la
fiscalité, jugé trop lourd, les problèmes de l’insécurité fiscale, du manque de transparence et
des lenteurs des procédures ainsi que du harcèlement sont ceux qui sont les plus évoqués par
les opérateurs économiques. Ainsi l’aperçu des obstacles liés à la pratique fiscale fera l’objet
du chapitre I de cette partie de l’étude. Le chapitre II quant à lui sera consacré aux
propositions pour l’amélioration de la sécurité du droit fiscal.
Page 63
CHAPITRE I:
Le constat est clair que la contrainte fiscale demeure le premier obstacle à l’attrait des
Investissements Directs Etrangers dont le Cameroun a besoin pour booster sa croissance.
Dans une publication récente du GICAM85, les impôts et taxes absorbent 49,1 % des
bénéfices des entreprises. Celles-ci effectuent en moyenne 44 paiements par an, en y
consacrant 654 heures. Les problèmes liés à la pratique fiscale portent sur l’insécurité fiscale
(Section I) et les tracasseries fiscales (section II).
85
Le Bulletin du GICAM n°52 de juin 2012
Page 64
SECTION I : L’INSECURITE FISCALE
En réalité, c’est un concept pluriel qui recouvre des aspects très divers et dont le
champ varie selon l’interlocuteur. Notons, à cet égard, qu’il concerne à la fois les
contribuables et l’administration. Cette notion se définit peut-être plus aisément par réaction à
un sentiment d’insécurité qui recouvre des ressorts très différents, certains renvoyant à des
éléments tangibles, concrets et réels, d’autres à des impressions, des perceptions, voire des
projections plus irrationnelles. Au Cameroun, l’insécurité fiscale revêt plusieurs formes. Elle
est en premier lieu légale, par l’instabilité de la loi fiscale liée aux changements intervenant
dans la loi de finances d’un exercice à l’autre (paragraphe 1). Elle résulte également de la
multiplicité et la complexité des textes non concordants et parfois contradictoires prêtant ainsi
à diverses interprétations souvent à l’origine d’une injustice ou encore d’une iniquité fiscale
(paragraphe 2).
Page 65
procèdent régulièrement à la révision du dispositif du code général des impôts par la loi de
finances.
Pour les régimes fiscaux incitatifs, depuis l'élaboration des ordonnances de 1990
relatives au Code des investissements et à la ZFI, les investisseurs n'ont jamais cessé de
dénoncer les incohérences dans l'application concrète des textes sur le terrain. C'est le constat
qui ressort des résultats d'enquête. Des investisseurs interrogés, 51,2% estiment que cette
fiscalité est instable au Cameroun. Ils dénoncent que ces avantages fiscaux sont constamment
modifiés par l'Administration fiscale86. A titre d’exemple, on peut noter :
- le régime des projets structurants institué par la loi des finances 2007 a été remplacé dans
le code général des impôts au travers de la loi de finances 2014 par le régime des marché
publics.
- la loi de finances de 2011 est venue suspendre l’ensemble des mesures incitatives et les
avantages accordés aux investisseurs par la loi de finances de 2010. Celle de 2010 a
rapporté une grande partie des mesures favorables, contenues dans le code des
investissements, que la loi de finances de 2009 avait maintenues ;
- la suppression du régime de réinvestissement du Code des investissements dans la Loi de
Finances 2003 et sa réintroduction dans la Loi de Finances 2007.
La fiscalité incitative connait quelques turbulences au cours de ces dernières années au
Cameroun. En effet, la charte des investissements instituée par la loi n°2002-004 du 19 avril
2002, modifiée par la loi n°2004-20 du 22 juillet 2004 et par l’ordonnance n°2009-001 du 13
mai 2009 ainsi que la loi du 18 avril 2013 fixant les incitations à l’investissement privé au
Cameroun font l’objet d’un embrassement de la part des investisseurs, car aucune disposition
légale ou règlementaire ne fait la précision sur le remplacement ou l’abrogation de ladite
charte par la loi du 18 avril 2013 fixant les incitations à l’investissement privé.
L’instabilité fiscale s’étend également au changement du dispositif règlementaire à
l’instar de la doctrine administrative en matière fiscale. En effet, les contribuables décrient
l'absence de protection législative contre le changement de la doctrine administrative. Or,
outre le fait que celle-ci peut être préjudiciable au contribuable avec ses interprétations qui
débordent parfois les textes originaux, elle l'est encore plus quand le contribuable se trouve
astreint à subir les changements éventuels de cette dernière. Dans ce contexte, il est choquant
de voir un contribuable qui a organisé sa situation financière et fiscale en fonction d'une
86
DJOMENI KOLOKO (Elvice) Op. cit.
Page 66
interprétation donnée d'un texte par l'administration, imposé plus sévèrement selon une
nouvelle interprétation émanant de la même administration.
L’autre conséquence funeste de l’instabilité fiscale, c’est la rétroactivité des lois
fiscales. En effet, pour ce qui est de la loi de finances, elle entre en vigueur à compter du
premier janvier de l'année qui suit son adoption. En matière d'IS par exemple, la loi considère
que la date d'entrée en vigueur vise les déclarations à déposer au plus tard le quinze janvier et
non les revenus réalisés à partir du premier janvier. Ce qui équivaut à une application
rétroactive de la loi de finances à l'exercice précédente.
Ces turbulences que connait la législation fiscale, notamment la fiscalité
d’investissement, déroutent et laissent l’investisseur en porte-à-faux et à la merci des agents
de l’administration fiscale.
Page 67
De ce constat, l’on peut avouer sans risque de se tromper que l’éloignement des
investisseurs se justifie en partie par cet état d’insécurité liée à la fluctuation et à l’absence de
transparence de notre système fiscale, incommodant ainsi l’intelligibilité de la norme fiscale.
87
ROBBEZ-MASSON (Charles) : La notion d'évasion fiscale en droit interne français, Paris, economica 1991,
(encyclopédie de finance publique tome1) page 854
Page 68
Parfois, les textes d’application référents à ces mesures sont non concordants ou
contradictoires avec les textes de base. Dans certains cas, ces textes d’application n’existent
même pas, et l’interprétation demeure du ressort de l’agent ou du service qui est en charge du
dossier, ce qui peut ouvrir la brèche à toutes sortes de pratiques plus ou moins délictueuses.
C’est le cas avec la Charte des investissements, qui date de 2002 et dont les textes
d’application n’ont toujours pas été finalisés, tout comme la loi du 18 avril 2013 fixant les
incitations à l’investissement privé qui attend encore la publication de ses textes
d’application, car l’Arrêté n°00000366/MINFI/SG/DGI/DGD du 19 novembre 2013 précisant
les modalités des avantages fiscaux et douaniers de cette loi a été contesté par les
investisseurs.
C’est d’ailleurs dans ce contexte que Frédéric Portalis pense que « lorsque les progrès
ont accru les besoins, diversifié les transactions et multiplié les intérêts, il arrive toujours un
moment chez une nation, où le grand nombre de lois rendues pour y satisfaire ne présente plus
qu'un inextricable labyrinthe, où l'esprit du juge s'égare au milieu d'un nombre infini de
dispositions en désordre, souvent opposées entre elles. »88 Ce foisonnement de textes ouvre
ainsi la brèche à diverses interprétations.
88
Portalis (Frédéric), "essais sur l'utilité de la codification, et comparaison des différents projets de code civil",
Paris, librairie de la cours de cassation, 1844
89
ESMEIN, Note relative à des décisions données par la cour de cassation en matière fiscale, Paris, 1927,
1932,1934.
Page 69
son rôle simplement interprétatif pour légiférer en matière fiscale, devenant ainsi une source
indépendante du droit fiscal. C’est le cas avec le recueil de doctrine fiscale qui est une
référence incontournable dans la pratique fiscale au Cameroun.
L'interprétation administrative peut parfois aller au-delà de l’esprit du texte interprété,
en déformant son contenu et imposant une vision distincte de celle du législateur. Cette
pratique, bafoue la légalité.90 D’où l’intervention du juge fiscal.
En effet, le juge fiscal est compétent pour contrôler la légalité de l'interprétation
administrative en matière fiscale, et en proposer une interprétation plus neutre et surtout plus
stricte91. Mais l’intervention du juge est conditionnée par sa saisine. En d’autres termes, le
juge de l’impôt ne pourrait se prononcer qu’au cas où il aurait été saisi pour connaître d’un
litige dont l’objet porte sur l’application de la législation fiscale. Toutefois, sa décision n’est
opposable qu’aux parties au procès. Néanmoins, lorsque cette décision fait l’objet d’une
jurisprudence, son application peut s’avérer « erga omnes ». Pour ce dernier cas,
l’interprétation du juge a la même portée que celle du législateur.
L’interprétation du législateur a lieu lorsque ce dernier constate qu’une disposition
légale prête à équivoque. Dans ce cas, il intervient pour apporter des clarifications à travers
une nouvelle loi dite " loi interprétative " qui fait corps avec l’ancienne loi.
Cette diversité d’interprétations relative à la multiplicité des textes fiscaux à caractère
complexe n’est pas de nature à garantir l’équité fiscale.
90
MARCHESSOU (Philippe) : L'interprétation des textes fiscaux, Paris, édition: économica 1980.
91
DOUET (Frédéric) : Contribution à l'étude de la sécurité juridique en droit fiscal interne français, édition
LGDJ, paris 1997, page 160
Page 70
investissements des entreprises existantes (1) et les avantages accordés en raison de certains
objectifs spécifiques (2).
92
Guy Honoré TCHENTE intervenait en qualité de président de la commission des affaires juridiques et fiscales
de cette institution. Il est par ailleurs le Président de l’Ordre National des Conseil Fiscaux.
93
Extrait des propos de Guy Honoré TCHENTE lors du « Dîner débat du GICAM » le 12 mars 2014.
94
Ibid.
Page 71
douaniers aux investissements, qu’ils émanent des entreprises nouvelles ou des entreprises
existantes.
95
Cf. Articles 9 et 10 de l’Arrêté N° 366/MINFI/SG/DGI du 19 novembre 2013 précisant les modalités précisant
la mise en œuvre des avantages fiscaux et douaniers de la loi N° 2013/004 du 18 avril 2013 les incitations à
l’investissement privé en République du Cameroun
Page 72
Cette discrimination viole non seulement le principe de légalité, mais décourager
plusieurs entreprises et investisseurs, les poussant ainsi à se réfugier dans le secteur informel,
caractérisé par l’absence de fiscalisation.
96
GAUTIER (Jean-François), RAKOTOMANANA (Faly), ROUBAUD (François) « La fiscalisation du secteur
informel : recherche impôt désespérément. » In: Tiers-Monde. 2001, tome 42 n°168. pp. 795-815.
97
http://cameroon-info.net/stories/0,31417,@,fiscalite-la-tva-suspendue-pour-les-petites-entreprises.html
Page 73
question de l’absence de fiscalisation de ce secteur, ou même d’un niveau de fiscalisation
manifestement inférieur à la normale.
98
Voir Rapport BAD op. cit.
Page 74
aussi bien au niveau des impôts et de la parafiscalité qu’au niveau des douanes. Cette lourdeur
est caractérisée par une lenteur spectaculaire des administrations fiscales et douanières. Ces
tracasseries se manifestent également par la multiplicité des contrôles fiscaux inopinés qui
sont parfois à l’origine des pratiques de la corruption et de l’arnaque (paragraphe 2).
Les tableaux ci-après dressent une comparaison des contraintes liées aux procédures
de paiement des impôts et taxes entre le Cameroun, le Gabon, la Guinée Equatoriale et
l’Afrique du Sud.
99
Rapport Banque Mondiale, Doing Business 2013
100
Parmi ces impôts, l’on recense l’impôt sur le revenu, la TVA, les taxes douanières, les droits d’accises, les
taxes des services (SGS, ONPC, CNCC, CENADI), l’impôt sur les revenus des capitaux mobiliers (LRCM), la
taxe spéciale sur les revenus (TSR), les droits d’enregistrements, les droits de contributions (CNPS). La fiscalité
locale recouvre l'ensemble des droits et taxes dont les recettes sont affectées aux collectivités territoriales
décentralisées : contribution des patentes, licence, impôt libératoire, taxe sur le bétail, centimes additionnels
communaux, et taxes communales directes et indirectes.
101
Les pratiques informelles dont il est question, ici sont entre autres le trafic d’influence, la corruption et
l’octroi des faveurs de toute nature prohibées par la règlementation en vigueur.
102
Enabling Environment for Sustainable Enterprises
103
Rapport BIT, Evaluation de l’environnement des affaires au Cameroun 2013
Page 75
1- Tableau comparatif des nombres de procédures
Page 76
B- La lourdeur des procédures au niveau des services de douanes
Malgré les efforts remarquables entrepris par les services de douanes pour améliorer
leur performance, la simplification des procédures et la meilleure gouvernance des activités
douanières restent préoccupantes. En effet, l’inefficacité du fonctionnement de
l’administration douanière (1) et l’utilisation des méthodes peu modernes au niveau du GUCE
(2) sont mises en cause par les investisseurs.
104
Rapport Bureau International du Travail : « Évaluation de l’environnement des affaires au Cameroun 2013 »
105
Ibid.
106
Ibid.
Page 77
2- L’utilisation des méthodes peu modernes au sein du GUCE
Le Guichet Unique des Opérations du Commerce Extérieur (GUCE)107 à Douala a
pour rôle de collecter les rentrées financières issues des procédures douanières et de réduire
les délais et formalités pour le passage des marchandises au port. Or, l’organisation, de ce
guichet est encore basée sur des modalités peu modernes qui utilisent encore beaucoup de
formulaires en papier. Ceci s’ajoute à la longueur du passage des marchandises au port de
Douala. Pour résoudre ce problème, la Banque mondiale travaille sur la mise en place d’un
système d’opération électronique visant à faciliter les procédures. Le projet de
dématérialisation des procédures a pour but de mettre en place un guichet unique doté d’une
administration sans interruption.
Concrètement, il s’agit de donner aux usagers l’accès à un certificat électronique
basé sur six systèmes d’information comprenant la gestion de la traçabilité des produits à
l’export, du fret terrestre, des affaires maritimes et des voies navigables, du certificat
d’origine, du commerce extérieur pour le cacao et le café, et du suivi financier du commerce à
l’import et à l’export. Pour les entreprises, l’essentiel serait de connaître la prédictibilité des
procédures, des délais et des coûts.
Moderniser le commerce du Cameroun requiert une utilisation croissante d’un système
électronique de procédures douanières pour permettre à court terme non seulement l’abandon
des procédures en papier108, mais aussi d’éviter la multiplicité de contrôles inopinés et les
pratiques d’arnaque et de corruption.
107
Le guichet regroupe plusieurs services : surveillance, phytosanitaire, douane, trésor, services de changes,
banques.
108
Rapport Bureau International du Travail, Op. cit.
109
Voir Rapport de la BAD sur « L’environnement de l’investissement privé au Cameroun en 2013 »
Page 78
A- La complexité de la parafiscalité et la pratique de l’arnaque
Il convient ici de faire une analyse de la complexité de la parafiscalité (1) avant
d’observer la pratique de l’arnaque à l’occasion des recouvrements des droits, taxes et
redevances constitutifs de cette obligation fiscale (2).
1- La complexité de la parafiscalité
La parafiscalité est constituée notamment des taxes communales, de la contribution au
Fonds national de l’emploi (FNE), de la contribution au Crédit foncier, de la redevance
audiovisuelle, des cotisations à la Caisse nationale de prévoyance sociale (CNPS).
En effet, Selon les statistiques des impôts, une entreprise camerounaise paie en
moyenne 44 taxes par an, et la parafiscalité qui ne représente que 0,70 % des impôts collectés
hors hydrocarbures, inclut plus de 35 catégories110.
Par ailleurs, la réglementation de la parafiscalité au Cameroun est éparse, compte tenu
non seulement de multiplicité et complexité des textes régissant les différentes taxes et
redevances, mais également à cause du nombre sans cesse croissant de ces dernières. Ainsi, il
devient difficile pour le chef d’entreprise de maitriser les contours en matière de déclaration et
de paiement de ces taxes et redevances.
Dans ce cas, l’investisseur se trouve en porte-à-faux et à la merci des agents de l’État,
qui se servent de la situation pour justifier toutes sortes de contrôles et de harcèlement dont
sont victimes les opérateurs économiques. C’est ainsi que régulièrement ces derniers subissent
la visite de plusieurs structures en charge de la collecte des taxes et peuvent voir à tout
moment leurs entreprises mises sous scellée pour défaut de paiement de telle ou telle autre
taxe.
110
Voir rapport BAD op. cit.
Page 79
souvent de leurs droits auprès des faux agents. Et se trouvent ainsi en train de payer plusieurs
fois les mêmes droits et taxes.
A titre d’illustration, nous avons au cours de notre enquête rencontré des responsables
des PME qui sont régulièrement victimes de l’arnaque en matière des droits relatifs à
l’occupation temporaire de la voie publique (OTVP). En effet la loi de 2009, portant fiscalité
locale énonce clairement que pour être assujetti à l’OTVP, l’occupation de la voie publique ou
de ses emprises doit être effective111. Par ailleurs, ne sont pas assujettis aux droits
d’occupation temporaire de la voie publique : les stations-services, les véhicules et les
supports publicitaires.
Néanmoins, dans la pratique les agents chargés du recouvrement de ces droits, ont
tendance à les collecter même aux entreprises qui ne font pas objet d’occupation de la voie
publique, ni même de ses emprises. Cet aspect d’insécurité est dû au mutisme administratif en
matière de parafiscalité, ouvrant ainsi la voie toutes sortes pratiques délictueuses à l’instar de
la corruption.
B- La pratique de la corruption
La pratique de la corruption est un des facteurs favorisant l’insécurité des
contribuables. Avant de poser le diagnostic de la corruption dans les rapports contribuable-
administration (2), il s’avère nécessaire de tenter une définition de ce terme « corruption » (1).
111
Article C 91 (2) du CGI
112
Transparency International est une Organisation Non Gouvernementale de lutte contre la corruption. En 1998
et 1999, elle a hissé le Cameroun à la première place du panthéon mondial des pays ayant le plus grand indice
de perception de la corruption dans le monde.
113
Rapports thématiques de l’INS, OP. cit.
Page 80
corruption. Le président de l'ONG camerounaise « SOS corruption » déclare quant à lui que
l’État du Cameroun perd en moyenne 400 milliards de francs CFA par an à cause de la
corruption. Selon une enquête menée par Greenpeace, Forest Monitor et le Centre pour
l’Environnement et le Développement (CED), l’État perdrait en moyenne 100 milliards de
francs CFA chaque année dans le secteur forestier, du fait de l’exploitation illégale (60
milliards pour Global Witness). Toutefois, ce montant ne fait pas la part entre le coût dû à la
corruption et celui dû à la fraude classique114.
Page 81
par la corruption affectent négativement les charges supportées par les entreprises, ce qui
accroît le coût unitaire de production et nuit ainsi à la compétitivité.
En dépit des réforme engagées par les pouvoirs publics pour améliorer
l’environnement des affaires au Cameroun, en vue de promouvoir les investissements et
d’attirer le grand nombre possible des IDE nécessaires à la croissance économique, la
perception du climat des affaires présente encore beaucoup de failles, notamment sur le plan
de la pratique fiscale. Le gouvernement gagnerait à réaménager son système fiscale à fin de
faire de la fiscalité un moyen efficace à l’attrait des IDE. C’est ainsi que la suite de notre
exposé sera consacré aux propositions pour l’amélioration de la sécurité fiscale des
investissements privés de manière générale et des investissements privés étrangers en
particulier.
Page 82
CHAPITRE II:
Un régime fiscal stable, transparent et équitable est ressenti par les investisseurs
comme un signe d’une primauté du droit bien établie117. Mais l'examen de l'état actuel de
notre système fiscal est révélateur de plusieurs atteintes au principe de sécurité juridique. Pour
autant, comment définir la notion de sécurité juridique ? Olivier Fouquet rappelle la définition
donnée par la Cour de justice des Communautés européennes dans les termes suivants : « le
principe de sécurité juridique impose la clarté et la précision des règles de droit et des actes
individuels qui constituent à un certain moment le cadre juridique dans lequel les autorités
exercent leurs compétences et les particuliers leurs activités ».118
Le problème de sécurité juridique notamment en matière fiscale est d’autant plus
préoccupant que le GICAM souligne la nécessité pour l’État camerounais de « restaurer sa
crédibilité » en respectant les engagements pris, à commencer par ceux visant à mettre un
terme à l’insécurité fiscale.119 En outre, s’il faut s’exprimer sur la question de sécurité fiscale
comme Brigitte Néel, « le constat effectué n'est guère rassurant : l'insécurité juridique nous
menace bien plus que la sécurité juridique du droit fiscal pourrait nous rassurer… »120
En effet, pour qu’un système fiscal soit utilisé comme un instrument d’attrait aux
investisseurs, il faut qu'il soit internationalement compétitif. D’où la nécessité pour le pays
d’améliorer la sécurité du droit fiscal, afin de renforcer l’attractivité du territoire. Pour ce faire
plusieurs mesures peuvent être proposées tant en ce qui concerne le renforcement de la
protection des droits et garanties des contribuables (section 1), que pour le réaménagement de
la politique fiscale (section 2) de manière globale.
117
Stone (Andrew) « De l’efficacité des incitations fiscales », Le Programme MENA – OCDE pour
l’Investissement et le Ministère du Développement et de la Coopération Internationale, Tunisie Hôtel El Mourdi
Gammarth -Tunis 10-11 Avril 2008
118
Voir Conclusions de l’avocat général Fintan-Duff, 15 février 1996. En ce sens, CJCE, 16 juin 1993, aff. C-
325/91, France c/Commission, §26, Rec.1993, p.I-3283 cité par Jean-Pierre LIEB « La sécurité juridique à
travers les prises de position et la documentation de l’administration » Gestion & Finances Publiques / N° 12 -
Décembre 2011
119
Le Bulletin du GICAM n°52 de juin 2012. Op. cit
120
Néel (Brigitte), préface de l'ouvrage: "Contribution à l'étude de la sécurité juridique en droit fiscal interne
français" de Frédéric Douet
Page 83
SECTION I: LE RENFORCEMENT DE LA PROTECTION DES DROITS ET
GARANTIES DES CONTRIBUABLES
La sécurité juridique, concept complexe dont les contours ont évolué au cours des
années, est aujourd’hui clairement au cœur des préoccupations consubstantielles de
l’administration fiscale et des contribuables.121 Elle consiste d’ailleurs à garantir à ces
derniers une protection effective de leurs droits. Dès lors, la sécurité fiscale des contribuables
dépend du degré d'application des principes fondamentaux du droit fiscal. En effet si la mise
en œuvre de l'impôt comporte des actes de puissance publique, créant des obligations
unilatérales à la charge des contribuables, des garanties doivent être accordées à ceux-ci pour
les protéger de l'arbitraire. Ces garanties découlent des différents principes de droit et en
premier lieu de la notion de légalité qui domine certes les rapports entre l'Etat et les citoyens
dans les nations modernes. La sécurité juridique des contribuables suppose à la fois
l’institution d’une protection législative des contribuables (paragraphe 1) et la simplification
de la norme fiscale (paragraphe 2).
121
LIEB (Jean-Pierre) « La sécurité juridique à travers les prises de position et la documentation de
l’administration » Gestion & Finances Publiques / N° 12 - Décembre 2011
Page 84
effectif de la constitutionnalité des lois. Au Cameroun, l'effectivité de ce contrôle est du
ressort du Conseil Constitutionnel. Cette instance est instituée par la loi constitutionnelle du
18 janvier 1996. Cependant, ce Conseil Constitutionnel n’est pas encore mis place par les
pouvoirs publics. Ainsi le contrôle de constitutionnalité des lois est conféré à la Cour
Suprême qui siège en lieu et place du Conseil Constitutionnel.
L’on est en droit de s’interroger sur l’efficacité de la Cour Suprême en matière de
contrôle constitutionnel des lois. D’où l’urgence pour les pouvoirs publics, de mettre en place
les organes compétents de ce Conseil, afin de garantir aux contribuables une sécurité juridique
certaine.
Cette démarche favorise le renforcement de l'Etat de droit et des institutions, la
garantie de la primauté de la Constitution, le respect du principe de légalité et donc la
souveraineté de la loi. Ce serait un pas important vers la consécration du principe de sécurité
juridique. Mieux encore, il importe d'instituer un véritable droit des contribuables. Ainsi, il
faudrait donc constitutionnaliser le principe de sécurité fiscale, à l'instar de l’Espagne,
notamment à travers l'article 9-3 du titre préliminaire de sa constitution du 27 décembre 1978.
Cet article dispose que l'un des objets de la constitution est de garantir la sécurité juridique.122
122
COLAS (Dominique), Textes constitutionnels français et étrangers, textes essentiels", Paris, Larousse, 1994,
page 335.
Page 85
constitutionnel varie en fonction de la catégorie de loi de finances concernée. Concrètement, il
est plus étendu sur les lois de finances initiales et rectificatives que sur les lois de règlement.
Mais pour que la sécurité juridique des contribuables soit bien une réalité, il faut
encore que cette dernière ne soit plus menacée par les abus de l’administration fiscale.
123
Conseil-des-impôts de France, dixième rapport au président de la république 2001, "relations
contribuable/administration" publié.
124
Conseil-des-impôts de France, Op.cit
Page 86
réparation d’erreurs commises dans l’assiette ou le calcul des impositions, soit du bénéfice
d’un droit résultant d’une disposition législative ou réglementaire.125 Or, au regard des abus
auxquels font face les contribuables aujourd’hui, le législateur aurait pu garantir leur sécurité
en mettant en place des textes ayant pour objectif d’étendre la protection des droits et
garanties des contribuables, notamment en prévoyant des sanctions spécifiques contre les abus
de l’administration fiscale. Ces mesures législatives permettraient également d’encadrer le
pouvoir discrétionnaire de l’Administration en matière de contrôle fiscal.
125
Article L 115 du CGI
126
Jean-Pierre LIEB Op. Cit.
127
DJOMENI KOLOKO (Elvice), Op. Cit. Cf résultats d’enquête (ANNEXE I)
128
DIARRA (Eloi) : « Le Code des investissements du Sénégal d'août 1987 : un bref aperçu », revue juridique
africaine N°2, 1990, p.10. cité par DJOMENI KOLOKO (Elvice), Op. Cit.
129
LIEB (Jean-Pierre) Op. Cit.
Page 87
fraudeur. Par ailleurs, les contribuables conscients de leurs devoirs fiscaux, se trouveraient
face à une forme de solidarité citoyenne et ne se plaindraient plus de l’oppression de leurs
droits. Cela contribuerait au développement d'un certain civisme fiscal.
Mais la protection des contribuables serait encore mieux aperçue si les pouvoirs
publics procédaient de manière constante à la simplification de la norme fiscale.
Page 88
pour les entreprises, cela va réduire le nombre d’heures nécessaires pour régler les impôts
et améliorer ainsi leur compétitivité);
- Pratiquer l’amortissement accéléré afin de permettre aux investisseurs de récupérer
rapidement leurs investissements et l’exonération des droits d’enregistrement ;
- Instituer un régime de réévaluation légale des immobilisations sur une certaine périodicité
afin d’améliorer les capacités d’emprunt ;
- Mettre en place auprès des instances communautaires de la CEMAC, un taux réduit de
TVA pour les opérations financières, la restauration, l’hébergement et les opérations
immobilières ;
- Etc.
130
Journal de la Chambre de commerce du Cameroun des mois d'Avril - Mai - Juin 2009, p.36.
Page 89
B- La clarification de la réglementation fiscale
Dans un souci de compréhensibilité et de clarté de nos textes fiscaux, il serait
important de procéder régulièrement à la publication des exposés de motifs des lois fiscales
(1), au même titre que ces dernières, ou encore à la réécriture de lois fiscales complexes (2).
131
) Cf. Conseil-des -impôts de France, dixième rapport au président de la république 2001, "relations-
contribuable/administration" publié.
132
Conseil-des -impôts de France ; op. cit.
Page 90
- une réécriture à droit constant ;
- une structure des textes plus clairs et logiques ;
Les principales préconisations sont :
- la proposition des méthodes de simplification de la norme fiscale, notamment avec des
exemples concrets,
- l’utilisation d'une langue accessible, avec des phrases plus courtes et/ou des méthodes
d'écriture plus modernes,
- le meilleur usage des définitions,
- etc.
Cette démarche a fait l’unanimité d’une large communauté fiscale britannique.
Plusieurs organes se sont mis en place. Ils ont travaillé conjointement et la première loi de
simplification, suivant cette procédure, a été déposée à la chambre des communes en janvier
2001, et a été adoptée en mars 2001.
Une telle démarche dans notre contexte nous permettrait non seulement de rehausser
l’intelligibilité et la clarté de notre norme fiscale, mais également d’enclencher le processus
de codification totale du droit fiscal, limitant ainsi le champ à toutes sortes d’atteintes aux
droits des contribuables. Pour y arriver, l’Etat devrait procéder au réaménagement de la
politique fiscale.
Page 91
Paragraphe 1 : La gouvernance des incitations fiscales et l’amélioration de la qualité des
débats publics
L’importance du problème de la gouvernance des incitations fiscales a été soulevée en
2011 par le FMI, l’OCDE, les Nations unies et la Banque mondiale dans un rapport conjoint
destiné au G-20 et consacré à l’appui et la mise en place de systèmes fiscaux plus efficaces
dans les pays en développement.133 Afin de relever ce défi d’efficacité, le gouvernement
camerounais se doit de procéder davantage à l’administration et au contrôle des incitations
fiscales (A) et à l’amélioration de la qualité des débats publics (B).
133
L’importance du problème de la gouvernance des incitations fiscales a été soulevée en 2011 par le FMI,
l’OCDE, les Nations unies et la Banque mondiale dans un rapport conjoint destiné au G-20 et consacré à l’appui
à la mise en place de systèmes fiscaux plus efficaces dans les pays en développement
Page 92
fiscale (ou d’en faire état dans la législation fiscale) favorise la transparence et revient à
investir l’administration fiscale du pouvoir de les gérer. Les incitations fiscales devraient être
aussi simples que possible à appliquer tant pour les candidats demandant à en bénéficier que
pour les services chargés de les gérer134.
Le principe voudrait également que les pouvoirs publics s’efforcent de publier une
liste de toutes les incitations fiscales à l'investissement mentionnant les objectifs auxquels
elles obéissent à l’intérieur du cadre, en régissant le fonctionnement. Ainsi ils devraient avoir
à justifier leur adoption et à indiquer les coûts et les bénéfices à en attendre. Ces données
devraient être communiquées dans un rapport régulièrement mis à jour, pouvant servir de
référence pour évaluer les résultats obtenus, mettre en évidence les situations où les mesures
d’incitation se recoupent ou font double emploi, et permettre aux pouvoirs publics de rendre
compte de leurs décisions en matière d’incitations fiscales.135
134
OCDE, FISCALITE DE DEVELOPPEMENT « Projet de principes pour améliorer la transparence et la
gouvernance des incitations fiscales à l’investissement dans les pays en développement ». Voir
http://www.oecd.org
135
Masters (Andrew) « Étude de cas sur les incitations fiscales », Présenté au séminaire de haut niveau sur la
réalisation du potentiel d’investissement rentable en Afrique, Organisé par l'Institut du FMI en coopération avec
l'Institut multilatéral d'Afrique, Tunis, Tunisie, 28 février – 1er mars 2006
Page 93
investissements. Les mesures fiscales en faveur de l’investissement donnent de bons résultats
dans certains pays, mais pas dans d’autres (en la matière, les décisions doivent être prises en
fonction des conditions propres à chaque pays). Les gouvernements africains tendent à
exagérer les avantages des mesures en faveur de l’investissement et à en sous-estimer le coût.
Il convient en premier lieu de renforcer les capacités d’analyse de la politique fiscale
(préalablement à la mise en œuvre et au suivi de la mise en œuvre des mesures).
Par ailleurs, il est important d’éviter un taux d'imposition nul : le succès de la plupart
des projets d'investissement ne dépend pas des exonérations d’impôt. En effet les congés
fiscaux sont moins rentables que les autres mesures. Car, les conséquences qui en découlent
ne sont pas moins négligeables. Il s’agit entre autres : des pertes de recettes élevées ; des
investissements temporaires favorisés au détriment des investissements durables ; du risque
d’évasion fiscale de grande ampleur ; etc.
Selon Andrew Masters136, les incitations fiscales les plus efficaces sont le crédit
d’impôt pour investissement et les déductions initiales pour investissement. Ces mesures ont
pour corolaire une forte réduction des taux marginaux d'imposition effectifs 137 par rapport aux
pertes de recettes fiscales. Aussi, ces mesures favorisent la réduction au minimum de la
complexité administrative. Les investissements qui dépendent de leur emplacement et qui sont
fondamentalement viables (surtout les projets portant sur les ressources naturelles) ne
devraient pas bénéficier d’avantages fiscaux particuliers. Au contraire, les gouvernements
doivent s’efforcer de négocier une part équitable des rentes tirées des ressources naturelles.138
La réussite d’une telle négociation est conditionnée par l’amélioration de la qualité du
débat public en matière fiscale.
136
Masters (Andrew) op. cit.
137
Les taux d’imposition marginaux effectifs se définissent généralement comme une différence entre les taux de
rendement interne des investissements avant et après l’impôt. Voir Nguenda Anya Saturnin Bertrand « Taux
Marginal d’Imposition Effectif au Cameroun », Rapport de Recherche du FR-CIEA N0. 10/12, Fonds de
Recherche sur le Climat d’Investissement et l’Environnement des Affaires (FR-CIEA) www.trustafrica.org/icbe
138
Masters (Andrew), ibid.
Page 94
1- L’amélioration des relations entre l’administration fiscale et les contribuables
Afin d’améliorer les relations entre l’administration fiscale et les entrepreneurs, une
Commission paritaire a été créée en 2007. Elle est composée de responsables de
l’administration et de chefs d’entreprises. Sa mission consiste à proposer les voies et moyens
d’améliorer le système fiscal camerounais, afin de mettre en place une fiscalité simple,
efficace, équitable, susceptible d’impulser le développement, en mesure de concilier
l’optimisation des ressources fiscales et l’incitation à l’investissement privé.
Malgré l’existence de cette commission paritaire, l’on a pu remarquer que le débat
public sur les sujets fiscaux est très limité. La modernisation des procédures d'élaboration des
normes fiscales, peut se faire à l'instar des Etats-Unis ou du Royaume-Uni par la création
d'organismes indépendants chargés de produire des analyses sur les questions fiscales.
Pour la Grande Bretagne cet organisme est le British Institute for Fiscal Studies, crée à
la fin des années 60. Il est composé par une équipe permanente d'une trentaine de personnes,
majoritairement économistes. Il utilise les possibilités de communication les plus développées
par Internet et joue depuis sa création un rôle prépondérant en matière de qualité de la norme
fiscale dans ce pays.
Aux Etats-Unis, l'organisme est encore plus ancien, le National Tax Association crée
en 1907. Il assure la continuité d'une réflexion indépendante sur les questions fiscales. Ses
moyens de communications sont très développés et donnent lieu à une publication d'une revue
très connue (National Tax Journal), l'organisation de colloques annuels et un site Web
développé (www.ntanet.org).
Notre pays gagnerait aussi à mettre sur pied de tels organismes de débat public en
matière fiscale, afin de renforcer nos moyens d'étude et de réflexion dans le domaine fiscal.
En effet, comme le souligne Albert DIKOUME, Il serait souhaitable d’arriver à une véritable
commission technique de politique fiscale et douanière, où l’intérêt de la politique publique
prévaudrait, où serait bannît la discrimination entre fonctionnaire et civil, administration
fiscale et groupement.
Cette Commission technique regrouperait les représentants de tous ces corps, et serait
le véritable architecte de la politique fiscale. Les administrations fiscales ne devraient
intervenir que pour la mise en œuvre de la politique définie. Pour cela, elles devraient faire
passer toutes leurs idées novatrices par ladite commission technique, qui les reprendraient à
Page 95
son compte. Une commission technique forte et bien structurée pourrait amener à parler
véritablement de politique fiscale au Cameroun.139
Une politique fiscale qui serait encore mieux efficace si la commission technique
intégrait également dans les mesures de réforme fiscale, l’implication de la société civile à
l’éducation des contribuables et leur volonté à payer l’impôt.
139
DIKOUME (Albert Léonard) « CAMEROUN, QUELLE POLITIQUE FISCALE »
http://www.afritaxes.com/lettresdocs/74.pdf
Page 96
Paragraphe 2 : L’adoption des mesures de résistance aux chocs exogènes
Par chocs exogènes, il faut sous-entendre des éléments externes qui viendraient à
altérer l’efficacité de l’attractivité de notre système fiscal. La concurrence fiscale
dommageable et le phénomène « paradis fiscale » en sont quelques illustrations. L’Etat
gagnerait donc à intensifier la coopération régionale afin de prévenir la concurrence fiscale
dommageable (A) et à mettre en œuvre les mesures visant à lutter contre le phénomène
« Paradis fiscale » (B).
140
Définition du conseil des impôts - rapport du CAE - page 30. file:///G:/Concurrence fiscale Wikipédia.htm
141
OCDE
Page 97
l’épargne des autres pays et diminuer ainsi leurs recettes fiscales. Certains pays vont modifier
leur système fiscal afin d’attirer l’épargne venue d’ailleurs pour élargir leur part de base
imposable mondiale et exporter ainsi leur fardeau fiscal vers d’autres pays142
Selon l’OCDE et l'Union Européenne, la concurrence fiscale dommageable est un
concept qui désigne les pratiques fiscales non transparentes, qui diffèrent fortement des
pratiques fiscales habituellement acceptées, qui sont offertes à certaines entreprises seulement
et/ou qui ne sont pas en rapport avec une activité réelle.
Afin de faire face à ces pratiques fiscales non transparentes, nos pouvoirs publics
devraient contribuer à l’harmonisation fiscale dans la lutte contre la concurrence fiscale
dommageable.
142
ASSIMACOPOULOU (Elli), L’harmonisation de la fiscalité de l’épargne dans les pays de la Communauté,
Bibliothèque de science financière, tome 37, Paris, LGDJ, 2000, p.10
143
Andrew Masters op. cit
Page 98
non fiscaux jouent un rôle beaucoup plus important que les mesures fiscales dans la
détermination du niveau et de la qualité des flux d’investissement.
La coopération régionale ne mérite pas se limiter simplement à la prévention de la
concurrence fiscale dommageable. Elle devrait également étendre ses mesures préventives au
phénomène de paradis fiscal, qui est plus qu’un phénomène de surenchère fiscale, un fléau
mondial, source d’une injustice fiscale internationale et d’autres problèmes tels l’évasion
fiscale et le blanchiment d’argent.
144
fr.wikipédia.org/wiki/paradis-fiscal, consulté le 5 novembre 2014
145
Réseau pour la justice fiscale, Introducing the Financial Secrecy Index [archive] [archive], 2009. Cité par
wikipédia.
146
http://www.lemonde.fr/organisations-internationales/article/2009/04/02/paradis-fiscaux-la-liste-noire-de-l-
ocde-comprend-le-costa-rice-et-l-uruguay_1176043_3220.html [archive] [archive], consulté le 9 novembre 2014
Page 99
le montant de leurs impôts sur les bénéfices par rapport à leur pays d'origine, échappant de
cette manière à une fiscalité qu'elles jugent excessive.
Un pays peut être considéré comme un refuge fiscal au regard de certaines situations
ou opérations particulières ; certaines dispositions législatives (zones franches) peuvent
également créer une sorte de paradis fiscal à l'intérieur d'un pays à forte fiscalité.
Les critères de définition d'un paradis fiscal restent relatifs : la Suisse est un paradis
bancaire, mais n'est en général pas considérée comme un paradis fiscal; le Royaume-Uni ou
les États-Unis ne sont pas non plus considérés comme un paradis fiscal bien que, en pratique,
ils puissent offrir les mêmes avantages aux particuliers (statut de résident non domicilié au
Royaume-Uni) comme aux entreprises (sociétés non résidentes aux États-Unis). La France
n'est pas considérée comme un paradis fiscal mais, dans certains secteurs géographiques, les
zones franches permettent aux entreprises de réduire de façon drastique leur charge fiscale.
Ces exemples, qui ne sont pas exhaustifs, nous indiquent que les régimes dérogatoires existent
en tous lieux et que les États qui dénoncent les paradis fiscaux ne sont pas en la matière d'une
pureté immaculée147.
147
fr.wikipédia.org/wiki/paradis-fiscal, consulté le 5 novembre 2014
148
La Tribune, 16 octobre 2008, page 32
Page 100
En effet cette organisation applique des critères149 assez restrictifs pour déterminer le
caractère de paradis fiscal d'un pays. Au premier plan, le fait que le pays concerné applique
des impôts inexistants ou insignifiants, mais ce critère n'est pas suffisant car l'OCDE
reconnaît que tout Etat souverain a le droit de décider d'appliquer ou non des impôts directs
et, dans l'affirmative, de déterminer le taux d'imposition approprié.
Les autres facteurs nécessaires pour qu'un territoire soit considéré comme un paradis
fiscal par l'OCDE sont une absence de transparence dans l'application de la loi fiscale,
l'absence d'échange de renseignements à des fins fiscales avec les autres administrations, et le
fait que l'absence d'activités substantielles soit admise.150 Nos pouvoirs publics gagneraient à
prendre en compte ces critères afin d’arrimer notre système fiscal aux standards
internationaux.
149
Voir le site de l'OCDE , www.ocde.org [archive], consulté le 20 mars 2014
150
fr.wikipédia.org/wiki/paradis-fiscal, consulté le 5 novembre 2014
Page 101
CONCLUSION GENERALE
Depuis deux décennies, le Cameroun tout comme la majorité des gouvernements des
pays en développement (PVD), est entré dans une concurrence accrue en vue d’attirer les flux
d’IDE sur son territoire. Cet engouement des PVD envers l’IDE tient à diverses raisons : la
création d’emplois, l’accumulation du capital, la promotion des exportations, la possibilité de
diffusion technologique dans le tissu industriel local, etc.151
Toutefois, les IDE représentent un enjeu majeur pour les pays qui ont jusque-là
bénéficiés davantage de l'implantation des investisseurs étrangers, l'entrée des capitaux y est
une condition pas de moindre importance à un financement stable de la balance courante. De
façon plus spécifique, les IDE jouent dans ces pays, un rôle déterminant dans le processus de
réforme structurelle, en termes de mondialisation des économies et de stimulation de la
croissance.152
Le constat ne laisse aucun doute sur la volonté du Cameroun d'instrumentaliser la
fiscalité pour un meilleur ancrage dans la mondialisation. Mais, au regard de la position
inquiétante qu’occupe ce pays ces dernières années dans la quête des IDE, il s’est avérer
nécessaire que cette étude se penche sur la question de sécurité juridique des investissements
privés étrangers au Cameroun, précisément sur le plan des incitations fiscales. En effet la
sécurité juridique des investissements suppose à la fois, la souplesse et la clarté des textes
régissant la matière fiscale. Or le constat tiré de cette étude, n'est guère rassurant.
En examinant le cadre juridique des incitations en faveur des IDE, il importe de
signaler l'existence d'un arsenal volumineux de textes fiscaux favorables à l’implantation des
investisseurs étrangers au Cameroun. Le législateur en élaborant des mesures d'allègement et
d'exonération des charges fiscales a prévu les mesures fiscales incitatives de droit commun et
les mesures particulières de soutien à l’investissement privé tant national qu’étranger. Ces
mesures sont contenues dans une multitude des textes dont les plus récents sont la Loi N°
151
NGOUHOUO (Ibrahim), Les investissements directs étrangers en Afrique centrale : attractivité et effets
économiques. Thèse de Doctorat de Sciences Économiques, présentée et soutenue le 26 mars 2008, Université
du Sud Toulon-Var, OP. Cit.
152
NJOUM NGUENIN (Martial), L'analyse des déterminants de l'investissement direct étranger au Cameroun.
Mémoire de D.E.A en Economie Industrielle. Présenté et soutenu en avril 2009. Faculté des Sciences
Economiques et de Gestion Appliquée, Université de Douala.
Page 102
2013 / 004 du 18 avril 2013 fixant les incitations à l’investissement privé en République du
Cameroun et la loi sur les zones économiques.
A la lecture de nos analyses, il n'est plus question de contester que les facilités fiscales
consenties par le Cameroun pour promouvoir les investissements constituent réellement une
garantie pour l’attrait des investisseurs étrangers. Mais il s’y dégage un bilan mitigé. Il est
toutefois urgent de reconnaitre que la pratique fiscale dans ce pays présente encore beaucoup
de failles. L’attractivité du territoire camerounais vis-à-vis des IDE fait face à de multiples
obstacles dont l’insécurité fiscale.
L’insécurité fiscale prend plusieurs formes : l’instabilité de la loi fiscale ; le manque
de transparence ; la lourdeur des procédures ; la complexité et la multiplicité des textes ; etc.
En effet, le productivisme juridique153 engendre une matière fiscale complexe dont les normes
sont difficilement compréhensibles aux usagers, rendant ainsi la pratique fiscale obscure et
surtout instable. Or la transparence et la stabilité juridique sont constitutives des déterminants
fondamentaux de la décision d’investissement.
Toutefois, cette situation de complexité fiscale embrasse les contribuables et facilite
les pratiques délictueuses et l’exercice d’autres formes de pression quasiment quotidiennes
sur les entreprises154, par des agents véreux de l’administration fiscale. Ces pratiques sont
largement établies et reconnues comme tracasseries fiscales. Elles se traduisent par des
niveaux de corruption élevés155. A ce niveau, la question de la gouvernance interne des
structures concernées de l’État et de leur performance gagnerait à être abordée. Les efforts
engagés au niveau des douanes et dans une certaine mesure par la Direction générale des
impôts méritent d’être approfondis et renforcés.
Ainsi, l'amélioration de la norme fiscale interpelle tant les pouvoirs publics que les
investisseurs. En effet, les réformes entreprises par l’Etat depuis l’année 2013 commencent à
porter des fruits. Le rang qu’occupe le Cameroun dans la dernière publication du classement
Doing Business de la banque mondiale l’atteste. De la 168ième place en 2013, le pays passe au
158ième rang sur 189 pays classés en 2014. Afin de rendre davantage crédible notre
environnement des affaires, l’Etat gagnerait à intensifiées les réformes pour écarter les chocs
endogènes que sont l’instabilité juridique, la complexité de la norme fiscale, la mauvaise
gouvernance etc. Pour ce qui concerne les chocs exogènes tels la concurrence fiscale ou le
153
Par productivisme juridique, il faut entendre ici l’inflation ou la multiplicité des textes juridiques.
154
Rapport de la BAD op. cit.
155
Ibid.
Page 103
phénomène de « paradis fiscale », afin de mieux les endiguer, l’intensification des
coopérations régionales ou internationales s’impose à l’Etat du Cameroun.
Quant aux investisseurs, ils devraient accompagner le gouvernement dans cette
politique en évitant de développer des attitudes telles la fraude et l'évasion fiscale qui tendent
plutôt à ralentir les ambitions de l’Etat qui voudrait passer d’une fiscalité répressive à une
fiscalité incitative.
Page 104
ANNEXES
- Comparaison internationale de la protection des investisseurs en 2014
Page 105
BIBLIOGRAPHIE :
I- OUVRAGES :
A- OUVRAGES GENERAUX
1. ALBARELLO (Luc), Apprendre à chercher. L’acteur social et la recherche
scientifique. Bruxelles, De Boeck, 1999, 193 p.
2. ASSIMACOPOULOU (Elli), L’harmonisation de la fiscalité de l’épargne dans les
pays de la Communauté, Bibliothèque de science financière, tome 37, Paris,
LGDJ, 2000, 265 p.
3. BOUVIER (Michel), Introduction au droit fiscal général et à la théorie de l'impôt,
Lextenso-LGDJ, 2012, 11ème édition, 316 p.
B- OUVRAGES SPECIALISES :
1. CHAMBAS (Gérard), Fiscalité et développement en Afrique Subsaharienne,
Ministère de la coopération, Economica, 1994, 152 p.
2. COZIAN (Maurice), Précis de fiscalité des entreprises, 38ième Edition, LexisNexis,
Septembre 2014, 960 p.
3. DISCHAMPS (Jean-Claude), Comportements économiques et distorsions fiscales,
Paris, Presse Universitaire de France, 1960, 408 p.
4. DOUET (Frédéric), Contribution à l'étude de la sécurité juridique en droit fiscal
interne français, édition LGDJ, paris 1997, 416 p.
5. ROBBEZ-MASSON (Charles), La notion d'évasion fiscale en droit interne
français, Bibliothèque de science financière, édition LGDJ, Paris, 1990, Tome 29,
504 p.
Page 106
II- DICTIONNAIRES ET AUTRES LEXIQUES :
1. CORNU (Gérard): Vocabulaire juridique, PUF, 8ième édition, février 2000, p 479
2. GATSI (Jean) : Nouveau dictionnaire juridique, Presses Universitaires Libres, 2ième
édition, 2010
3. Petit Larousse Grand Format, Edition Larousse, 21 Rue MONTPARNASSE 75
283 Paris CEDEX 06 2001, p.558
IV- ARTICLES :
1. GAUTIER (Jean-François), RAKOTOMANANA (Faly), ROUBAUD (François) :
« La fiscalisation du secteur informel : recherche impôt désespérément. » in Tiers-
Monde. 2001, tome 42 n°168. pp. 795-815.
2. GUTMANN (Daniel) : « Droit fiscal et efficacité économique », in BOLLEE (S.),
Yves-Marie LAITHIER, Cécile PERES, L'efficacité économique en droit,
Economica, 2010, pp 111-120
3. KAMTO (Maurice) : « Politique économique », Mutations n°1210 du lundi 09
août 2004 ;
Page 107
4. LOPEZ (Christian) : « La fiscalité comme vecteur de l'attractivité du territoire », in
Mondialisation et fiscalité, la globalisation fiscale (sous la dir.), l’Harmattan,
collection finance publique, pub. 2006, pp 245-262
5. Masters (Andrew) « Étude de cas sur les incitations fiscales », Présenté au
séminaire de haut niveau sur la réalisation du potentiel d’investissement rentable
en Afrique, Organisé par l'Institut du FMI en coopération avec l'Institut
multilatéral d'Afrique, Tunis, Tunisie, 28 février – 1er mars 2006
6. MIGNOT (Gabriel) : « La fiscalité dérogatoire : pour un réexamen des dépenses
fiscales », synthèse du 21ème Rapport du Conseil des impôts, in RFFP n°84,
décembre 2003, p 205- 218
7. PERES (Cécile): « Rapport introductif », in BOLLEE (S.), Yves-Marie
LAITHIER, Cécile PERES, L'efficacité économique en droit, Economica, 2010,
pp 1-22
8. WALTER (François): « Note sur divers procédés d'incitation fiscale à
l'investissement » in Revue économique. Volume 7 n°4, 1956. pp. 552-567.
Page 108
10. Loi N° 2013/011 du 1 0 décembre 2013, portant loi de finances de la République
du Cameroun pour l'exercice 2014
11. Loi n°2008/009 du 16 juillet 2008 fixant le régime fiscal, financier et comptable
applicable aux contrats de partenariat
12. Loi n°99/013 du 22 décembre 1999 portant code pétrolier
13. Ordonnance N° 90/001 du 29 janvier 1990 créant le régime de la Zone Franche au
VI- RAPPORTS
- Rapport BAD : Environnement de l’Investissement Privé au Cameroun 2013
- Rapport BIT : Évaluation de l’environnement des affaires au Cameroun 2013
- Rapport GTZ, GICAM, SNV : Perception des Entreprises sur le Climat des
Investissements et des Affaires au Cameroun 2007
- Rapport INS : Rapports thématiques/Recensement Général des Entreprises (RGE
2009)/Partie I : Environnement des affaires et compétitivité des entreprises
camerounaises
- Rapport MINEPAT : Etude sur le climat des affaires au Cameroun en 2013 : impact
des reformes de création d’entreprises
- Rapports Banque Mondiale : Doing Business 2012 ; 2013 et 2014.
VII- WEBOGRAPHIE :
- Cours-de-droit.jimdo.com/2013/03/28/chapitre-v-la-méthode-juridique/
- file:///G:/Concurrence fiscale - Wikipédia.htm
- fr.wikipédia.org/wiki/paradis-fiscal,
- http//www.francais. rwpcontentuploadsdownloads201110politique_eco.pdfcci-paris-
idf.f
- http://aed.fede-ulg.org/cours/Droit fiscal(04-05)2.pdf [archive]
- http://aed.fede-ulg.org/cours/Droit%20fiscal(04-05)2.pdf [archive]
- http://cameroon-info.net/stories/0,31417,@,fiscalite-la-tva-suspendue-pour-les-petites-
entreprises.html
- http://cemacbusiness.com/cameroun-comment-seduire-les-etrangers-how-to-attract-
foreigners/
- http://www.afritaxes.com/lettresdocs/74.pdf
- http://www.oecd.org
- www.afritaxes.com
Page 109
- www.cameroon-tribune.cm
- www.glossaire internationale.com/page/tous-les-termes/investissement-direct-a-l-
etranger-ide.html
- www.investiraucameroun.com/conditions-d-investissement/2701-2920-une-fiscalite-
attractive
- www.larousse.fr/dictionnaires/français/implantation/41906,
- www.legicam.org
- www.lesechos.fr/financemarches/vernimmen/definition_investissement.html?lbD0FJ6
Y9vd16e6r.99
- www.planet-expert.com/fr/pays/cameroun/investissement-direct-etranger-ide
- www.questions-economiques.com
Page 110
TABLE DES MATIERES
REMERCIEMENTS ............................................................................................................................ 3
LISTE DES ABREVIATIONS .......................................................................................................... 5
RESUME ............................................................................................................................................... 7
ABSTRACT .......................................................................................................................................... 7
SOMMAIRE ......................................................................................................................................... 8
INTRODUCTION GENERALE ........................................................................................................ 9
I- CONTEXTE HISTORIQUE ET CONSIDERATIONS PARTICULIERES DE
L’ATTRACTIVITE FISCALE AU CAMEROUN ................................................................... 9
A- Le contexte historique ................................................................................................................. 9
B- Les considérations particulières ................................................................................................ 11
II- DEFINITION DES CONCEPTS ET OBJET DE L’ETUDE ............................................... 13
A- Définition des concepts : ........................................................................................................... 13
B- Objet de l’étude ......................................................................................................................... 15
III- INTERET DE L’ETUDE ET PROBLEMATIQUE .......................................................... 16
A- Intérêt de l’étude........................................................................................................................ 16
B- Problématique............................................................................................................................ 17
IV- L’HYPOTHESES ET LA DEMARCHE METHODOLOGIQUE .................................. 18
A- L’hypothèse ............................................................................................................................... 18
B- L’approche méthodologique de l’étude ..................................................................................... 18
PREMIERE PARTIE : ....................................................................................................................... 21
LE CADRE JURIDIQUE DES INCITATIONS EN FAVEUR DES INVESTISSEMENTS
DIRECTS ETRANGERS ................................................................................................................. 21
CHAPITRE I : ..................................................................................................................................... 22
LES MESURES FISCALES INCITATIVES DE DROIT COMMUN ...................................... 22
SECTION I : LES MESURES FISCALES COMMUNES A L’IMPLANTATION DES
INVESTISSEURS NATIONAUX ET ETRANGERS ................................................................... 22
Paragraphe 1 : Les allègements visant la réduction de la charge fiscale ....................................... 22
A- Les exonérations liées à la création d'entreprises .............................................................. 22
Page 111
2- L’allègement de l’impôt sur le revenu des sociétés ....................................................... 26
1- Le principe de non-discrimination................................................................................. 34
CHAPITRE II : ................................................................................................................................... 39
LES MESURES FISCALES PARTICULIERES DE SOUTIEN A L’INVESTISSEMENT
PRIVE .................................................................................................................................................. 39
SECTION I : LES MESURES DE LA LOI DU 18 AVRIL 2013 ET DU REGIME DES ZONES
FRANCHES INDUSTRIELLES .................................................................................................... 39
Page 112
Paragraphe 1 : Les incitations fiscales et douanières de la Loi N° 2013/004 du 18 avril 2013
fixant les incitations à l’investissement privé en République du Cameroun ................................. 39
A- Les mesures incitatives relatives à l’implantation des entreprises nouvelles .................... 40
B- Les mesures incitatives spécifiques aux secteurs prioritaires et aux entreprises existantes
…………………………………………………………………………………………..42
Paragraphe 2 : Les régimes des marchés publics, des contrats de partenariat, du réinvestissement,
du secteur boursier et des Centre de Gestion Agréé (CGA) .......................................................... 54
A- Les avantages fiscaux liés aux régimes des marchés publics et des contrats de partenariat
public-privé ............................................................................................................................... 54
1- Les avantages fiscaux liés au régime des marchés publics (113 à 116 ter du CGI) ...... 55
2- Les avantages fiscaux liés au régime des contrats de partenariat public-privé ............. 56
Page 113
B- Les avantages fiscaux liés aux régimes du réinvestissement, du secteur boursier, et des
Centres de Gestion Agréés (CGA) ............................................................................................ 58
1- Les avantages fiscaux du régime de réinvestissements (art. 105 à 107 du CGI) ........... 58
2- Les avantages fiscaux des régimes du secteur boursier et des centres de gestion agréés
(CGA) .................................................................................................................................... 59
1- Les disparités des avantages accordés aux investissements des entreprises nouvelles et
aux nouveaux investissements des entreprises existantes ..................................................... 71
2- Les distorsions nées des différences de taxation entre secteurs formels et informels ... 74
Page 114
2- Tableau comparatif des nombres d’heures .................................................................... 76
Page 115
SECTION II : LE REAMENAGEMENT DE LA POLITIQUE FISCALE ................................... 91
Paragraphe 1 : La gouvernance des incitations fiscales et l’amélioration de la qualité des débats
publics ........................................................................................................................................... 92
A- L’administration et le contrôle des incitations fiscales ..................................................... 92
B- La mise en œuvre des mesures de lutte contre le phénomène « Paradis fiscal » ............... 99
Page 116