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Échange d’ions

Principes de base
par François de DARDEL
Ingénieur-chimiste de l’École Polytechnique Fédérale de Zürich
Rohm and Haas France SA

1. Structure des divers types d’échangeurs d’ions ............................. J 2 783 - 2


1.1 Squelettes ..................................................................................................... — 2
1.2 Groupes fonctionnels................................................................................... — 2
1.3 Résines adsorbantes .................................................................................... — 5
1.4 Résines inertes.............................................................................................. — 5
2. Propriétés générales des résines ......................................................... — 6
2.1 Taux de réticulation et porosité du squelette............................................. — 6
2.2 Capacité d’échange ...................................................................................... — 6
2.3 Stabilité et longévité .................................................................................... — 7
2.4 Masse volumique ......................................................................................... — 9
2.5 Granulométrie............................................................................................... — 9
2.6 Rétention d’humidité.................................................................................... — 9
3. Réactions d’échange d’ions ................................................................... — 10
3.1 Échange cationique ...................................................................................... — 10
3.2 Échange anionique....................................................................................... — 11
3.3 Diagramme récapitulatif .............................................................................. — 11
3.4 Équilibre de l’échange d’ions ...................................................................... — 12
3.5 Cinétique d’échange..................................................................................... — 14
3.6 Résultats pratiques de l’équilibre et de la cinétique.................................. — 16
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. J 2 785

L ‘échange d’ions est un procédé dans lequel les ions d’une certaine charge
contenus dans une solution (par exemple des cations) sont éliminés de cette
solution par adsorption sur un matériau solide (l’échangeur d’ions), pour être
remplacés par une quantité équivalente d’autres ions de même charge émis par
le solide. Les ions de charge opposée ne sont pas affectés.
L’échangeur d’ions est un sel, un acide ou une base, solide et insoluble dans
l’eau, mais hydraté, c’est-à-dire gonflé d’eau comme une éponge. La teneur en
eau d’un matériau apparemment sec peut être de plus de 50 % de sa masse
totale et les réactions d’échange se déroulent dans cette eau, dite eau de gonfle-
ment ou d’hydratation, à l’intérieur de l’échangeur.
L’échange d’ions est à la base d’un grand nombre de procédés chimiques qui
peuvent se classer en trois catégories principales : substitution, séparation et éli-
mination.

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1. Structure des divers types Dans ce dernier cas, on obtient directement un échangeur
d’anions en une seule étape.
d’échangeurs d’ions
1.2 Groupes fonctionnels
Définitions

Substitution 1.2.1 Échangeurs de cations sulfoniques


Un ion noble (par exemple le cuivre) est récupéré dans la ou carboxyliques fortement acides
solution et remplacé par un autre sans valeur. De façon analo-
gue, un ion nocif (par exemple un cyanure) est retiré de la solu-
Les billes chimiquement inertes de polystyrène sont traitées par
tion et remplacé par un autre inoffensif.
de l’acide sulfurique ou sulfochlorique concentré. On obtient alors
Séparation un sulfonate de polystyrène réticulé (figure 3). Ce produit est la
Une solution contenant un certain nombre d’ions différents résine échangeuse de cations la plus courante.
(par exemple Li+, Na+, K+, Rb+, Cs+, tous sous forme de chloru-
res) est passée au travers d’une colonne de billes de résine. Les Exemples : Amberlite IR120, Dowex HCRS, Duolite C 20, Lewatit
ions sont séparés et émergent par ordre croissant d’affinité pour S 100, etc.
la résine.
Élimination
En utilisant une combinaison de résine échangeuse de cations CH2 CH2
(sous forme H+) et de résine échangeuse d’anions (sous forme CH CH
OH−), tous les ions sont enlevés et remplacés par de l’eau
(H+OH−). La solution est ainsi déminéralisée. Ceci est en réalité Styrène Divinylbenzène
une variante particulière de la substitution. (S) (DVB)
CH
CH2
Nota : bien que substitution et élimination puissent être réalisées en discontinu sans S S DVB
agitation, le procédé en colonne compacte utilisé pour la séparation est le plus souvent
adopté pour les trois types d’applications, en raison de la meilleure efficacité des deux pha-
ses du cycle d’échange, à savoir la fixation et l’élution.
Nous examinerons tout d’abord les différents types de squelette
puis les groupes fonctionnels.

1.1 Squelettes
S S S Polystyrène réticulé

Figure 1 – Polymérisation du styrène et réticulation


1.1.1 Squelette polystyrénique par le divinylbenzène

La polymérisation du styrène (ou vinylbenzène), sous l’influence


d’un catalyseur d’activation, le plus souvent un peroxyde organique,
CH2 CH2 CH2 CH2
produit un polystyrène linéaire, matière plastique malléable, trans-
parente, soluble dans certains solvants, avec une température de CH CH CH CH
H CH2
ramollissement définie. Si une certaine proportion de divinylben-
zène (DVB) est mélangée au styrène, le polymère se réticule et C + COOCH3 COOCH3
devient alors totalement insoluble (figure 1).
COOCH3
Dans la fabrication des résines échangeuses d’ions, la polyméri- CH CH
sation se fait généralement en suspension. Des gouttelettes d’oligo- CH2 CH2
mère se forment dans ce milieu et croissent jusqu’à devenir des Acrylate Polyacrylate
billes dures et sphériques de polymère. de méthyle DVB de méthyle réticulé

Figure 2 – Exemple de squelette polyacrylique

1.1.2 Squelette polyacrylique

En polymérisant un acrylate, un méthacrylate ou de l’acrylonitrile CH2 CH2


que l’on peut réticuler avec du divinylbenzène (comme le styrène), CH CH CH
on obtient par exemple le squelette de la figure 2. H2SO4
Polystyrène
réticulé
(cf. figure 1) SO3H SO3H SO3H
1.1.3 Autres types de squelettes CH2 CH2 CH
CH CH CH2 CH
Les autres types sont moins courants, mais il faut citer :
— les résines formophénoliques mentionnées dans l’historique ;
— les résines polyalkylamines obtenues à partir de polyamines SO3H SO3H SO3H
(par exemple la diéthylènetriamine) par condensation avec de l’épi-
chlorhydrine. Figure 3 – Structure de sulfonate de polystyrène réticulé

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1.2.3 Échangeurs d’anions


H CH2 CH2 CH2
C CH CH CH 1.2.3.1 Polystyréniques
[NaOH ou H2SO4]
CN CN CN CN Des billes de polystyrène réticulé sont traitées avec du chloromé-
Acrylonitrile CH2 CH2 thyl méthyl éther CH2Cl—O—CH3, en milieu anhydre en présence
CH CH CH d’un catalyseur, AlCl3 ou SnCl4. On obtient du polystyrène chloro-
méthylé (figure 5).
COOH COOH COOH
Au cours d’une seconde étape, on peut remplacer le chlore du
groupe chlorométhylé par une amine ou même de l’ammoniac.
[NaOH ou H2SO4] Selon le réactif choisi, on obtient un échangeur d’anions plus ou
H CH2 CH2 CH2
moins fortement basique (figure 6).
C CH CH CH
Alors que les échangeurs de cations courants se divisent en deux
COOCH3 COOCH3 COOCH3 COOCH3 classes seulement selon leur groupe actif :
Acrylate — fortement acide (groupe sulfonique),
de méthyle Pour simplification, le divinylbenzène n'est pas représenté.
faiblement acide (groupe carboxylique),
Figure 4 – Préparation d’un échangeur de cations carboxylique
CH2 CH2 CH2 CH2
1.2.2 Échangeurs de cations faiblement acides CH CH CH CH
+ 2 CH2CI-O-CH3 + 2 CH3OH

Ceux-ci sont pratiquement toujours obtenus à partir d’un sque-


lette polyacrylique que l’on hydrolyse. On peut partir de polya- CH2Cl CH2Cl
crylate de méthyle ou de polyacrylonitrile (figure 4).
Figure 5 – Préparation du polystyrène chlorométhylé
Exemples : Amberlite IRC86, Lewatit CNP 80, Relite CC, etc. à partir de polystyrène réticulé

Historique

■ Les précurseurs Aujourd’hui encore, l’échange d’ions est le seul procédé capable
La découverte de l’échange d’ions date du milieu du XIXe siècle : de produire la qualité d’eau requise pour les chaudières à haute
Thompson [1] et Way [2] remarquèrent que du sulfate d’ammo- pression et pour la fabrication des semi-conducteurs.
nium, après percolation à travers un tube rempli de terre, se trans-
formait en sulfate de calcium. ■ La troisième génération : résines macroporeuses
En 1905, Gans [4] adoucit de l’eau pour la première fois en la fai- Pour faire face à deux problèmes d’exploitation, l’empoisonne-
sant passer sur un aluminosilicate de sodium. Celui-ci pouvait être ment des résines par les acides organiques naturels présents dans
régénéré avec une solution de chlorure de sodium. En 1935, les eaux de surface et les contraintes mécaniques provenant des
Liebknecht [4] et Smit [5] découvrirent que certains charbons pou- débits de plus en plus élevés des installations, trois producteurs
vaient être sulfonés pour donner un échangeur de cations chimique- indépendants [9], [10], [11]inventèrent des résines plus fortement
ment et mécaniquement stable. Par ailleurs, Adams et Holmes [6] réticulées mais contenant des pores artificiels ouverts, sortes de
inventèrent les premiers échangeurs de cations et d’anions synthé- canaux d’un diamètre allant jusqu’à 150 nm, qui permettaient
tiques, produits de la polycondensation du phénol avec du formal- l’adsorption de molécules de grande taille. Par convention, on
déhyde d’une part, avec une polyamine d’autre part. La appelle résines macroporeuses celles où le polymère est gonflé arti-
déminéralisation devenait alors possible. ficiellement par addition d’une substance dite porogène, qui est
Aujourd’hui, les silicoaluminates et les résines formophénoliques soluble dans le monomère mais ne polymérise pas (§ 2.1.4). Les
sont réservés à des cas particuliers et le charbon sulfoné a été rem- autres résines sont dites de type gel.
placé par le polystyrène sulfoné.
■ La deuxième génération : résines polystyréniques ■ La quatrième génération : échangeurs d’anions polyacryliques
C’est en 1944 que d’Alelio inventa la première résine à base de Entre 1970 et 1972, un nouveau type de résines échangeuses
polystyrène [7], fabriquée selon le procédé décrit dans le para- d’anions à squelette polyacrylique apparut sur le marché. Ces pro-
graphe 1. Deux ans plus tard, Mc Burney [8] produisait les échan- duits ont une résistance exceptionnelle à l’empoisonnement orga-
geurs d’anions correspondants, par chlorométhylation et amination nique et une très bonne stabilité mécanique due à l’élasticité du
du même type de squelette. polymère, et leur utilisation va en augmentant.
Les échangeurs d’anions connus jusqu’alors étaient faiblement
basiques et ne fixaient que les acides minéraux. Les nouvelles rési- ■ Nouveaux développements
nes produites selon le procédé de Mc Burney, de plus forte basicité, La technologie de fabrication des résines a atteint une certaine
permirent l’adsorption des acides faibles tels que le dioxyde de car- maturité ; l’effort des fabricants porte aujourd’hui davantage sur la
bone ou la silice. On pouvait maintenant déminéraliser totalement stabilité des résines et sur l’uniformité de leur distribution granulo-
l’eau et produire une pureté que l’on n’obtenait précédemment que métrique (§ 2.5) que sur la recherche de nouveaux polymères ou de
par distillation multiple dans du platine. groupes fonctionnels inédits.

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CH2 Exemples
CH

CH3 Cl
+ N(CH3)3
+ Duolite
Triméthylamine
CH2 N CH3 A 101

CH3 (type 1)
CH2
CH

CH3 Cl
+ N(CH3)2CH2CH2OH
+ Duolite
Diméthyléthanolamine CH2 N CH2CH2OH A 102

CH3
(type 2)

CH2
CH2 CH
CH
+ NH(CH3)2
CH3
Diméthylamine Duolite
CH2 N
CH3 A 378
CH2 Cl
(tertiaire)
CH2
CH
+ NH2CH3
Méthylamine
CH2 NHCH3
(secondaire)
CH2
CH
+ NH3
Duolite
Ammoniac A 365
CH2 NH2
(primaire)

Figure 6 – Préparation des échangeurs d’anions polystyréniques

une variété bien plus grande existe pour les échangeurs d’anions, Les résines faiblement basiques les plus utilisées sont celles à
dont la basicité peut être choisie sur mesure en raison du grand fonction amine tertiaire. Elles fixent les acides forts présents dans la
nombre d’amines disponibles. Les échangeurs d’anions représentés solution à traiter mais ni les sels neutres, ni les acides faibles.
dans les réactions de la figure 6 sont classés par ordre de basicité
décroissante. Les fabricants n’indiquent pas toujours la structure chimique dans
leur documentation, même détaillée. Il faut donc se garder de consi-
Les résines ayant des groupes ammonium quaternaire sont tou- dérer comme chimiquement identiques des résines ayant simple-
tes fortement basiques. Par convention, on appelle : ment des caractéristiques générales voisines.

— type 1, les groupes benzyltriméthylammonium, les plus forte-


ment basiques ; 1.2.3.2 Polyacryliques

— type 2, les benzyldiméthyléthanolammonium, dont la basicité Leur fabrication, représentée sur la figure 7, est analogue à celle
est légèrement plus faible. des résines polystyréniques : on prépare des billes à partir d’un
ester acrylique et de divinylbenzène copolymérisés en suspension
Les résines de type 1 sont utilisées là où l’élimination totale de avec un catalyseur d’activation par radical libre. Le polyester acryli-
tous les anions, même ceux d’acides faibles (silice), est que ainsi formé est alors activé par réaction avec une polyamine
indispensable ; celles de type 2, de basicité légèrement plus faible, contenant au moins une amine primaire et une amine secondaire ou
sont toutefois assez basiques pour éliminer tous les anions et se plus fréquemment tertiaire. L’amine primaire produit une aminolyse
régénèrent plus facilement à la soude caustique ; elles donnent de l’ester du polymère et le transforme en amide, tandis que l’autre
donc une capacité d’échange élevée avec un meilleur rendement de extrémité de la polyamine ainsi fixée au squelette forme le groupe
régénération (§ 3.6.1) ; en contrepartie, elles sont moins stables chi- actif de l’échangeur d’anions. On obtient toujours par cette méthode
miquement et produisent une fuite en silice plus élevée que les rési- un échangeur faiblement basique que l’on peut, par la suite, rendre
nes de type 1. quaternaire au moyen de chlorure de méthyle ou de sulfate de dimé-
thyle pour obtenir un échangeur fortement basique.
On appelle généralement faiblement basiques les résines dont le
groupe actif est une amine. Cependant, leur basicité peut varier En principe, on peut obtenir une gamme très étendue d’échan-
considérablement : les amines tertiaires sont parfois appelées geurs d’anions en faisant varier l’ester choisi au départ et la polya-
moyennement basiques, alors que les amines primaires, d’ailleurs mine utilisée pour l’activation. En pratique, la disponibilité et le coût
rarement utilisées, ont une basicité très faible. des matières premières disponibles tend à limiter cette variété.

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H CH2 CH2 CH2


CH3
C Polymérisation CH CH
+ NH2CH2CH2N
COCH2CH3 COCH2CH3 CH3 C CH3
O O n O NHCH2CH2N n
Diméthylamino-
CH3
éthylamine
Acrylate Polyester + n CH3CH2OH
d'éthyle acrylique

CH2 CH2
CH + CH3Cl CH −
CH3 Cl
C CH3 [ou (CH3)2SO4] C +
O NHCH2CH2N O NHCH2CH2N CH3
n n
CH3
CH3
Amine tertiaire Ammonium quaternaire
faiblement basique fortement basique

Exemples : Amberlite IRA 67, Duolite A 375 Amberlite IRA 458, Duolite A 132
Pour simplification, le divinylbenzène n'a pas été représenté.

Figure 7 – Préparation des échangeurs d’anions polyacryliques

1.2.4 Autres types d’échangeurs


Groupe actif Nom chimique Exemple
En utilisant des techniques de polymérisation et d’activation ana-
logues à celles décrites ci-avant, on peut greffer sur un polymère
CH2 donné une grande variété de groupes fonctionnels, parmi lesquels
CH ceux qui permettent la fixation sélective des métaux (figure 8) :
Thiol ou mercaptan Imac TMR
— le groupe thiol, qui forme des liaisons très stables avec cer-
tains métaux, en particulier le mercure ;
SH — les groupes iminodiacétique, aminophosphonique et amido-
xime qui forment avec les métaux des complexes dont la stabilité
dépend notamment du pH de la solution : en faisant varier celui-ci,
on peut donc fixer sélectivement certains métaux (on appelle rési-
CH2 nes chélatantes ou complexantes ces derniers types).
CH

Iminodiacétique Lewatit TP 207


CH2COOH
CH2N 1.3 Résines adsorbantes
CH2COOH

Bien que ces résines ne soient pas à proprement parler des échan-
geurs d’ions, elles s’y apparentent de si près qu’il est indispensable
CH2
de les mentionner ici. On peut les classer par polarité décroissante :
CH
Aminophosphonique Duolite C 467 — adsorbants ionisés, en fait échangeurs fortement basiques uti-
lisés sous la forme de chlorures, par exemple : Amberlite IRA900 ;
CH2CH2PO3H
CH2NH — adsorbants phénoliques, à fonction phénol ou faiblement basi-
ques, par exemple : Duolite XAD761, A561 ;
— adsorbants inertes, copolymères macroporeux de styrène et
de DVB à très haute réticulation et forte porosité, par exemple :
CH2 Amberlite XAD4, XAD16.
CH

N OH
C
Amidoxime Duolite ES 346 1.4 Résines inertes
NH2

Des polymères sans groupes actifs peuvent être utilisés pour


Figure 8 – Principaux groupes actifs permettant la fixation sélective séparer soit deux couches de résines entre elles (cas du Triobed),
des métaux soit une résine d’un réseau de reprise (cas du lit flottant).

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2. Propriétés générales
des résines

2.1 Taux de réticulation


a Résine type gel b Résine macroporeuse
et porosité du squelette
Figure 9 – Structure schématique et configuration des mailles
des résines de type gel et macroporeuse
2.1.1 Nécessité de la réticulation

En augmentant le taux de réticulation (pourcentage de DVB dans On peut, par exemple, utiliser comme agent porogène :
le monomère, en masse), on obtient une résine de plus en plus dure,
donc de moins en moins élastique. Les résines plus réticulées résis- — l’heptane ;
tent mieux aux milieux oxydants qui ont tendance à déréticuler le — des acides gras saturés ;
polymère. Toutefois, au-delà de 10 à 12 % de DVB, la structure — des alcools ou polyalcools en C4 à C10 ;
devient trop rigide et compacte. L’activation devient difficile car — des oligomères linéaires du styrène.
l’accès au cœur de la bille est entravé par la densité du squelette. L’agent porogène forme au sein de la bille des canaux qui consti-
Par ailleurs, les tensions osmotiques, dues à des forces de gonfle- tuent une porosité artificielle. On appelle donc macroporeuses les
ment très élevées, ne peuvent plus être absorbées par l’élasticité du résines qui contiennent ces canaux ; les autres résines dont la poro-
squelette et font éclater la bille. Enfin, la vitesse d’échange est sité est naturelle sont dites de type gel (figure 9).
d’autant plus grande que les ions peuvent circuler à l’intérieur de la En pratique, les résines macroporeuses sont plus fortement réti-
bille d’échangeur ; une structure trop dense ralentit le mouvement culées que les résines de type gel, afin de compenser par une soli-
des ions et diminue donc la capacité utile de la résine (§ 2.2.2). dité accrue du squelette les vides laissés par l’agent porogène. En
Pour les résines sulfoniques, on obtient ainsi une capacité totale agissant sur deux paramètres :
(§ 2.2.1) maximale vers 8 % de DVB. — le taux de réticulation ;
— la quantité d’agent porogène ;
on peut ajuster la porosité et la résistance physique de la résine.
2.1.2 Réticulation et affinité
Les pores d’une résine macroporeuse ont un diamètre de l’ordre
Plus grande est la mobilité des ions dans la structure, moins la de 100 nm alors que ceux d’une résine de type gel sont de l’ordre du
résine aura tendance à privilégier une espèce ionique par rapport à nanomètre. Ces macropores forment des sortes de canaux remplis
une autre de même charge. Lorsqu’on veut accroître la différence d’eau libre. Les grandes molécules pénètrent donc facilement à
d’affinité entre plusieurs ions, il est donc nécessaire d’augmenter la l’intérieur des résines macroporeuses jusqu’au cœur de la bille. Les
réticulation de la résine. ions, en général, ont un chemin bien plus court à parcourir pour
atteindre un groupe actif, une fois qu’ils ont pénétré la structure. Ce
En traitement d’eau, les résines de type polystyrène sulfoné ont chemin est de l’ordre de 0,1 µm pour les résines macroporeuses,
presque toujours un taux de DVB aux alentours de 8 %. Des résines tandis qu’il peut atteindre 250 µm pour les résines de type gel.
légèrement plus réticulées (10 à 12 %) sont parfois utilisées pour L’échange est donc rapide pour une résine macroporeuse.
augmenter la rétention des ions minéraux dans la production d’eau
de très haute pureté. Par contre, des résines légèrement moins réti- Les résines macroporeuses ont une résistance élevée aux con-
culées (5 à 7 %) peuvent être choisies lorsque l’on veut avoir une traintes physiques. Elles ont aussi, dans l’ensemble, un très bon
désorption plus facile, donc une meilleure régénérabilité, particuliè- comportement à l’égard des chocs osmotiques qu’elles absorbent
rement en adoucissement d’eau. bien. Elles sont donc utilisées dans les systèmes où des contraintes
mécaniques et osmotiques soumettraient les résines de type gel à
une dégradation rapide :
2.1.3 Irrégularités du squelette — systèmes continus à circulation de résine ;
— lits fluidisés ;
Nous verrons dans le paragraphe 2.6 que la réticulation des poly- — débits élevés (par exemple en traitement de condensats) ;
mères réduit la rétention d’eau des résines échangeuses d’ions. On — milieux oxydants ;
convient d’appeler porosité le volume rempli par cette eau à l’inté- — températures élevées (de 70 à 120 oC).
rieur du squelette. La réticulation des résines par du DVB est irrégu- Enfin, on se sert de résines macroporeuses lorsque l’on veut
lière, parce que la réaction de polymérisation DVB + DVB est plus adsorber réversiblement des molécules de grande taille sans empoi-
rapide que la réaction DVB + styrène. Le début de la polymérisation sonner la résine. Les adsorbants décrits dans le paragraphe 1.3 ont
a lieu autour des molécules de catalyseur. La croissance du poly- une macroporosité sur mesure pour fixer sélectivement certains
mère se fait à partir de sites qui s’enrichissent en DVB plus vite types de molécules.
qu’en styrène. Il s’ensuit qu’un matériau à 8 % de DVB en moyenne
contient des régions microscopiques contenant plus de 20 % de
DVB alors que d’autres régions en ont moins de 4 %.
2.2 Capacité d’échange
2.1.4 Résines macroporeuses
2.2.1 Capacité totale
Dans l’historique, nous avons mentionné ces résines dites de la
troisième génération. Au moment de la polymérisation, on ajoute au La capacité totale d’échange d’une résine, exprimée en équiva-
mélange de monomères une substance porogène qui se mélange lents par unité de masse (ou de volume), représente le nombre de
intimement avec eux, mais ne polymérise pas (c’est donc un solvant sites actifs disponibles. Dans le cas d’un échangeur polystyrénique,
des monomères dans lequel le polymère insoluble précipite). le maximum de sites actifs correspond à la greffe d’un groupe actif

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Les documents publiés par tous les fabricants de résines échan-


geuses d’ions permettent de calculer la capacité des échangeurs et
de dimensionner les installations en fonction de toutes les variables
Sens S Résine saturée du problème.
du flux

2.3 Stabilité et longévité


Z
Zone de réaction

Les résines échangeuses d’ions doivent assurer plusieurs années


de service. Leur stabilité dans le temps est donc primordiale.
R Résine régénérée

2.3.1 Stabilité chimique du squelette


0 Saturation 100 %
Les résines disponibles industriellement ont un taux de réticula-
Figure 10 – Front de saturation dans une colonne de résine
tion suffisant pour assurer leur parfaite insolubilité. Lorsqu’une
en percolation
résine est neuve, elle peut relarguer dans la solution traitée d’infi-
mes quantités de bas-polymères ou d’autres substances solubles,
mais ce phénomène disparaît rapidement. Il s’agit d’ailleurs plus
par noyau benzénique. La capacité est exprimée en éq/kg de résine d’un décrassage que d’une dissolution de la résine.
sèche (capacité-masse Cp) ou en éq/L de résine humide (capacité-
Par contre, des conditions très oxydantes (chlore, acide chromi-
volume CV).
que) peuvent éventuellement attaquer le squelette et le déréticuler :
échangeur de cations de type polystyrène sulfoné, réticulé à 8 %
DVB, est insensible à 0,2 mg/L de chlore à température ambiante ;
2.2.2 Capacité utile par ailleurs, il résiste parfaitement à une température 120 oC. Cepen-
dant, 1 mg/L de Cl2 à 80 oC provoque une oxydation du polymère,
Par définition, c’est la partie de la capacité totale réellement utili- dont l’effet est d’endommager la réticulation et de faire gonfler la
sée au cours de l’échange d’ions. La capacité utile peut représenter résine jusqu’à ramollissement, et crée des pertes de charge exces-
une partie plus ou moins grande de la capacité totale ; elle est déter- sives. En présence d’oxydants, on a donc intérêt à utiliser des rési-
minée par un grand nombre de paramètres : nes très réticulées, telles que les résines macroporeuses qui résis-
— concentration et type d’ions à fixer ; tent mieux à l’oxydation.
— débit de percolation ; Toutefois, dans les conditions habituelles du traitement de l’eau,
— température ; les résines peuvent fonctionner en permanence durant des années
— hauteur du lit de résine ; (parfois jusqu’à vingt ans) sans perdre leurs propriétés physiques
— type, concentration et dosage du régénérant. ou chimiques.
Pour plus de clarté, nous ferons ici référence à l’utilisation des
résines échangeuses d’ions par percolation dans des colonnes rem-
plies de résine compacte. D’autres systèmes à circulation de résine 2.3.2 Stabilité des groupes actifs
seront décrits.
Dans une colonne, la réaction entre les ions de la solution et ceux Le groupe sulfonique est extrêmement stable. Par contre, les rési-
de la résine, tant en service qu’en régénération, a lieu dans une zone nes échangeuses d’anions sont sensibles à la température. Sous
bien définie du lit de résine, appelée zone de réaction. l’effet de la chaleur, la réaction dite de dégradation d’Hoffmann peut
Lorsque la sélectivité d’une résine pour un ion en solution est transformer les ammoniums quaternaires (bases fortes) en amines
favorable (§ 3.4), un front d’échange net se forme au cours de la tertiaires (bases faibles), ou même dégrader le groupe actif tout
phase de saturation (fixation des ions de la solution), se déplace entier. Cette réaction se produit en milieu alcalin ; c’est pourquoi les
vers la sortie de la colonne et permet une utilisation optimale de la échangeurs d’anions sont plus stables sous forme de sel que sous
résine. La longueur de la zone de réaction dépend alors de facteurs forme basique.
tels que le débit et les concentrations ioniques, mais ne dépend pas Les résines fortement basiques de type 1 sont les plus stables. À
de la longueur de la colonne. température ambiante, elles peuvent durer de 5 à 7 ans ou plus. La
Lorsque la sélectivité est défavorable, un front diffusant se déve- réaction de dégradation d’Hoffmann type 1 (figure 11a) ne se pro-
loppe. La longueur de la zone de réaction dépend alors du coeffi- duit de façon notable qu’au-dessus de 50 oC.
cient de sélectivité (§ 3.4.1) mais aussi de la hauteur du lit : plus la Les résines de type 2, plus sensibles en raison du groupe éthanol
colonne est longue, plus la zone de réaction est grande et plus la qui affaiblit la liaison, se dégradent suivant la réaction d’Hoffmann
capacité utile de la résine est élevée. La figure 10 en est une type 2 représentée sur la figure 11b). À température ambiante, ces
illustration : le haut de la colonne contient de la résine S totalement résines perdent environ 50 % de leurs fonctions fortement basiques
saturée, tandis que la zone de réaction Z contient de la résine partiel- en 5 ans. À 50 oC, la dégradation se produit en 1 ou 2 ans.
lement saturée ; la pointe inférieure de cette zone, à un moment Nota : une résine qui a perdu 50 % de ses fonctions fortement basiques, mais en les
donné, atteint le bas de la colonne. C’est généralement à ce convertissant en groupes faibles, conserve souvent sa capacité de travail, car ces groupes
moment-là, où les ions à fixer percent en sortie de colonne, que l’on faiblement basiques sont tout à fait capables de fixer les acides minéraux.
considère la phase de fixation comme terminée. On voit sur la
figure 10 qu’une certaine proportion de la résine ne sera pas satu-
rée au moment du percement. Dans la pratique, la résine n’est 2.3.3 Stabilité mécanique
jamais régénérée à 100 % au début du cycle. La capacité utile repré-
sente donc la différence entre la capacité disponible au début cycle Les résines de polycondensation fabriquées en masse puis
et celle qui reste au moment de l’arrêt. Le facteur le plus important broyées en grains irréguliers sont relativement fragiles et sont utili-
est la quantité de régénérant utilisée pour convertir la résine sous sées seulement dans les installations à lits fixes. Les résines poly-
forme souhaitée au début de l’opération (forme régénérée R). styréniques et polyacryliques, fabriquées par polymérisation en sus-

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CH2 CH2
CH CH

CH3 OH Par chauffage
+ CH3
CH2 N CH3 CH2 N + CH3OH
CH3
CH3

a Type 1

CH2 CH2
CH CH

CH3 OH Par chauffage
+ CH3 CH2OH
CH2 N CH2CH2OH CH2 N +
CH3 CH2OH
CH3
Figure 11 – Réactions de dégradation
b Type 2
d’Hoffmann

pension, sont des sphères parfaites et peuvent être utilisées dans Par exemple, l’échangeur carboxylique de type gel décrit précé-
des installations d’échange d’ions en continu avec circulation de demment ne sera jamais utilisé en échange H—Na : les billes se cas-
résine, sans trop de dommage. Cependant, la résistance mécanique seraient en morceaux après deux ou trois cycles. Par contre, en
peut varier considérablement d’un produit à l’autre et les billes de échange H—Ca, le gonflement est bien moindre et la résine peut
résines qui, au microscope, révèlent de nombreuses fissures inté- effectuer des centaines de cycles sans dommage. Les meilleures
rieures sont plus sujettes à se casser en cas de contraintes mécani- résistances mécanique et osmotique sont obtenues avec des résines
ques que celles qui ne sont pas fêlées. dont le squelette est suffisamment solide pour résister aux chocs
Les résines échangeuses d’anions de type gel sont généralement physiques (attrition) et suffisamment souple et poreux pour se
moins résistantes que les résines échangeuses de cations et, en par- déformer sans se briser sous l’effet de chocs osmotiques. Certaines
ticulier, résistent mal aux forces de compression. En conséquence, il résines macroporeuses réunissent ces deux qualités.
est important de conserver le lit propre car la pression exercée par
l’eau sur une couche de fins débris peut être de plusieurs dixièmes La connaissance précise du gonflement des résines est
de bar. aujourd’hui importante lorsqu’il s’agit de construire des installa-
Les résines acryliques sont plus élastiques que les résines poly- tions dites à lit compact, c’est-à-dire à colonnes pleines, sans espace
styréniques et résistent généralement à toutes les contraintes méca- libre pour détasser la résine par soulèvement.
niques que l’on trouve en pratique.
Les valeurs courantes de gonflement sont les suivantes : de ces
Les résines macroporeuses sont souvent les plus solides et sont résines sont données dans le tableau 1.
utilisées de manière générale dans les conditions les plus dures.
Les résines les moins élastiques, c’est-à-dire les plus réticulées
(type gel à plus de 8 % de DVB, résines macroporeuses à plus de 2.3.5 Résistance au séchage
15 % de DVB) ont l’inconvénient, lorsqu’elles finissent par se casser,
d’exploser littéralement en miettes, alors que les autres résines se
cassent en deux ou trois morceaux qui peuvent continuer à fonc- Le séchage et la réhydratation répétés conduisent à des tensions
tionner. (analogues à celles dues aux chocs osmotiques) et à la rupture de la
plupart des résines de type gel. Il y a donc lieu de toujours conserver
les résines à l’état humide.
2.3.4 Gonflement et stabilité osmotique

Au cours de l’échange d’ions, la configuration autour de chaque Tableau 1 – Valeurs courantes de gonflement
groupe actif de la résine se modifie. des résines (1)
L’ion fixé n’a, en général, ni la même taille ni surtout la même cou-
Type d’échangeur Gonflement Ions échangés
che d’hydratation que l’ion déplacé. La bille de résine peut donc
(%)
gonfler ou se contracter considérablement au cours de la réaction
(certains échangeurs carboxyliques doublent de volume entre la
Cations fortement acides 6 à 10 Na+—H+
forme —COOH et la forme —COONa). Les tensions que subit la
résine au moment de ces changements de volume sont appelées Cations faiblement acides 15 à 20 H+—Ca++
forces osmotiques. Ces tensions sont extrêmement fortes et peu-
vent conduire localement à une pression de plusieurs dizaines de 50 à 100 H+—Na+
bars, voire plusieurs centaines, soit bien plus que les forces pure-
ment mécaniques auxquelles les billes peuvent être soumises. Anions fortement basiques 15 à 30 Cl−—OH−
Pour être utilisables industriellement, les résines doivent pouvoir Anions faiblement basiques 10 à 40 base libre—Cl−
résister à des centaines de cycles de saturation et de régénération.
La nature et donc la force des chocs osmotiques varient selon les (1) Ces valeurs s’entendent pour conversion complète d’une forme ionique
espèces ioniques en solution et concentration. à l’autre.

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2.4 Masse volumique Pourcentage passant au tamis


(en volume)
99,9
La densité des résines (ou masse volumique des grains) est une
caractéristique importante, car elle conditionne leur comportement 99,5
hydraulique dans le cas de flux ascendant. La densité de chaque 99,0
résine s’inscrit habituellement dans les fourchettes suivantes (entre 98,0
parenthèses, la valeur la plus courante des résines standards) : 96,0
— échangeurs de cations fortement acides : 90,0
80,0
1,18 à 1,38 (1,27) g/cm3
70,0
— échangeurs de cations faiblement acides : 60,0 Diamètre moyen
50,0
40,0
1,13 à 1,20 (1,17) g/cm3 30,0
— échangeurs d’anions fortement basiques : 20,0
Taille effective
10,0
1,07 à 1,12 (1,09) g/cm3
5,0
— échangeurs d’anions faiblement basiques : 3,0
1,0
1,02 à 1,10 (1,05) g/cm3 0,5
En jouant sur la granulométrie, on peut ainsi placer dans une 0,1
même colonne des échangeurs de plusieurs types différents et 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,7 0,9 1,2 1,5
s’assurer de leur séparation, si besoin est, par un courant d’eau Ouverture de tamis (mm)
ascendant. Cette propriété est utilisée principalement dans les lits
superposés ou mélangés. Analyse granulométrique
(ouvertures de tamis en mm)
On peut théoriquement augmenter la densité des résines en
alourdissant le squelette, par exemple en y fixant des atomes de Total non cumulé Total cumulé
chlore ou brome. De cette façon, on peut obtenir des échangeurs (entre tamis) (passant au tamis)
d’anions de haute densité, utiles lorsque l’on veut travailler en lit mm % mm %
fluidisé. De telles résines ont été produites à échelle industrielle, < 0,315 0,2 < 0,315 0,2
mais n’ont pas rencontré de succès commercial. 0,315 à 0,40 1,3 < 0,40 1,5
0,40 à 0,50 8,5 < 0,50 10,0
0,50 à 0,63 30,8 < 0,63 40,8
0,63 à 0,80 33,3 < 0,80 74,1
0,80 à 1,00 20,4 < 1,00 94,5
2.5 Granulométrie 1,00 à 1,25 4,9 < 1,25 99,4
> 1,25 0,6 > 1,25 0,6
Taille effective : 0,50 mm
En utilisation industrielle, la taille des particules résulte d’un com- Diamètre moyen : 0,68 mm
promis entre la vitesse de réaction d’échange, qui est d’autant plus 0,73
Coefficient d'uniformité = 1,46
élevée que les billes sont fines, et les débits élevés nécessitant de 0,50
grosses particules pour limiter la perte de charge. Les résines cou-
rantes ont des particules de 0,3 à 1,2 mm de diamètre, mais des cou- Figure 12 – Analyse granulométrique typique d’une résine courante
pes granulométriques plus resserrées peuvent être obtenues, par
exemple pour améliorer la séparation dans les lits superposés ou
mélangés.
Plus le coefficient d’uniformité est proche de 1, plus la courbe de
Lors de la polymérisation dans un réacteur agité, la nature du Gauss est étroite, plus la granulométrie est donc resserrée. En poly-
milieu de suspension, la concentration des monomères et la vitesse mérisation classique, on obtient des coefficients d’uniformité de
d’agitation conditionnent la taille des gouttelettes de polymère et l’ordre de 1,7. Par tamisage du polymère avant activation, on peut
donc celle des billes de résine. En pratique, on obtient toujours un créer des coupes granulométriques plus étroites, avec des coeffi-
certain étalement granulométrique et non pas des billes d’une taille cients d’uniformité de 1,3 à 1,5.
unique. La distribution granulométrique du nombre de billes répond
approximativement à la loi de Gauss. La distribution en masse (ou Certains fabricants, utilisant d’autres procédés de polymérisation,
en volume) est une fonction logarithmique de la distribution en en particulier selon une technique dite de jetting, ont mis sur le mar-
nombre, et on la représente donc souvent sous forme d’une droite ché des résines à granulométrie très uniforme, c’est-à-dire ayant un
dans un système de coordonnées gaussologarithmiques CU de l’ordre de 1,1.
(figure 12). L’avantage de ces résines réside surtout dans leurs propriétés
La granulométrie, si l’on accepte l’hypothèse d’une distribution de hydrauliques, permettant une meilleure séparation de lits mélangés
Gauss, est parfaitement définie par : et produisant une perte de charge légèrement inférieure à diamètre
moyen égal. Chimiquement, elles apportent une légère augmenta-
— le diamètre moyen (ou médiane), correspondant au tamis lais-
tion de la capacité utile et de meilleures performances en phase de
sant passer 50 % des billes ;
rinçage.
— le coefficient d’uniformité CU égal au rapport de l’ouverture
(côté de la maille carrée) du tamis laissant passer 60 % des billes à on utilise parfois la taille moyenne harmonique, encore appelée moyenne
celle du tamis laissant passer 10 % des billes. Ce dernier tamis théo- réciproque,au lieu du diamètre moyen défini ci-dessus ; en effet, cer-
rique est aussi appelé taille effective : taines propriétés de la résine, telles que la perte de charge ou la
cinétique, sont étroitement reliées avec cette valeur.
x 60 %
CU = ------------- Exemple : les plus connues de ces résines sont les Amberjet et les
x 10 % Dowex Monosphere.

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Dans tous les cas, il est important de mentionner la forme ionique


Rétention d'humidité considérée au moment de la mesure.
(% H2O)
100

80
3. Réactions d’échange d’ions
60

40 3.1 Échange cationique


20
3.1.1 Échange général
0
0 4 8 12 16 20 Ce procédé est utilisé en général pour éliminer des ions indésira-
Taux de réticulation (% DVB) bles d’une solution sans changer la concentration ionique totale ou
Capacité totale le pH. La résine peut être utilisée sous de nombreuses formes ioni-
(éq/L) ques, mais, en pratique, la forme sodium est presque universelle-
4 ment employée, à cause de la relativement faible affinité de la résine
pour le sodium, qui facilite la fixation des autres métaux, et du coût
3 peu élevé du chlorure de sodium comme régénérant :

R −Na+ + K+Cl− £ R −K+ + Na+Cl− (1)


2
2R −Na+ + Ca++ ( HCO
Ð
£ (R −) Ca++ + 2Na+
Ð
3 )2 2 HCO 3 (2)
1

0 Notation : par souci de simplicité, on représentera toujours la


0 4 8 12 16 20 résine par la lettre R ; on n’indiquera le groupe actif que lorsqu’il
Taux de réticulation (% DVB) sera important pour la compréhension.

Figure 13 – Variations de la rétention d’humidité et de la capacité


totale, en fonction du taux de réticulation d’une résine La réaction (1) illustre par exemple le traitement du vin tel qu’il est
de polystyrène sulfonée sous forme Na pratiqué dans certains pays. L’équation (2) illustre le procédé bien
connu d’adoucissement de l’eau.
Dans chaque cas, la régénération est accomplie en utilisant une
solution de chlorure de sodium dans une réaction telle que l’inverse
2.6 Rétention d’humidité de (1).

Une fois activées, les résines portent des ions fixes et des ions 3.1.2 Résines fortement acides :
mobiles. Ces ions sont toujours environnés de molécules d’eau au échange d’hydrogène
sein même des billes de résine. Cette capacité de rétention d’humi-
dité des résines est une grandeur essentielle pour la compréhension
des propriétés d’une résine échangeuse d’ions : cinétique, capacité Dans ce procédé, il n’y a pas de changement fondamental de prin-
d’échange et solidité de la résine en dépendent étroitement. cipe, mais une différence majeure du résultat : le remplacement
d’un ion métallique par un ion hydrogène provoque une réduction
On définit la rétention d’humidité h comme le rapport : du total des solides en solution et, en même temps, la production
d’acide libre :
masse résine hydratée Ð masse résine séchée
h = --------------------------------------------------------------------------------------------------------
- R −H+ + Na+Cl− £ R −Na+ + HCl (3)
masse résine hydratée
Cette réaction est utilisée comme première étape de la déminéra-
lisation de l’eau et d’autres solutions. La régénération se fait au
La teneur en eau d’une résine échangeuse d’ions est une fonction moyen d’un acide minéral, par réaction inverse de (3) qui est parfois
inverse du taux de réticulation, à moins que l’on n’augmente artifi- appelée coupure de sels, bien que cette expression ne soit pas très
ciellement la porosité ou la réticulation du polymère (résines macro- heureuse car un sel est toujours dissocié en solution.
poreuses).
La figure 13 montre la variation de la rétention d’eau en fonction 3.1.3 Résines faiblement acides :
du taux de DVB pour les résines sulfoniques polystyréniques de échange d’hydrogène
type gel.
Une autre valeur utile est la matière sèche (exprimée générale- Les résines carboxyliques sont des acides faibles donc très peu
ment en g/L), définie par : ionisés en milieu acide. Par ailleurs, ces résines ont une si forte affi-
nité pour les métaux divalents qu’en leur présence elles sont obli-
masse résine séchée gées de se dissocier et demeurent donc actives en milieu
MS = -----------------------------------------------------
- légèrement acide jusqu’à un pH d’environ 4,5.
volume résine hydratée
Cependant, les résines carboxyliques sous forme H+ ne peuvent
pas fixer des quantités importantes de métaux dans des solutions
Matière sèche et rétention d’humidité, bien qu’étroitement liées, de sels neutres, car les acides minéraux produits abaissent rapide-
n’ont pas entre elles de relation arithmétique simple. ment le pH et empêchent l’échange de se poursuivre.

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En fait, c’est la basicité de l’anion en solution qui conditionne 3.2.2 Fixation d’acides : résines fortement
l’échange dans ce cas. Un anion fortement nucléophile arrachera basiques
l’hydrogène du groupe carboxylique. Lequel fixera en échange le
cation associé, tandis qu’un anion stable ne produira aucune réac-
tion significative : C’est la forme la plus courante d’échange anionique ; cet échange
a lieu en aval d’un échange d’hydrogène (§ 3.1.2) pour compléter le
2R COOH + Mg(OH)2 (R COO)2 Mg + 2H2O (4) processus de déminéralisation :
2 R COOH + Na2CO3 2 R COONa + H2O + CO2 (5)
R +OH− + H+Cl− → R +Cl− + H2O (16)
R COOH + NaCl pas de réaction (6)
2 R COOH + CaCl2 (R COO)2 Ca + 2HCl (7) + – + =
2 R OH + CO 2 → ( R ) 2 CO 3 + H 2 O (17)
En ce qui concerne les hydrogénocarbonates, comme l’affinité de
la résine est très bonne pour les ions divalents (effet de complexa- Le produit de la réaction étant ici de l’eau, cette réaction n’est pas
tion), mais médiocre pour les ions monovalents, on aura une bonne directement réversible.
capacité pour la fixation du calcium et du magnésium, mais une
capacité faible pour la fixation du sodium à partir d’une solution
d’hydrogénocarbonate. En effet, la formation d’acide carbonique
suffit à empêcher l’échange d’ions monovalents :
3.2.3 Fixation d’acides : résines faiblement
basiques
R COOH + NaHCO3 R COONa + H2O + CO2 (8)

2 R COOH + Ca(HCO3)2 (R COO)2Ca + 2H2O + 2CO2 (9) Les résines faiblement basiques, dont les groupes actifs sont
généralement des amines, n’ont pas de forme hydroxyde propre-
Les échangeurs carboxyliques (faiblement acides) sont sélectifs : ment dite. Elles ne sont ionisées qu’en milieu acide :
ils fixent de préférence les cations divalents ou trivalents et, cela,
jusqu’à concurrence des anions alcalins présents dans la solution.
RN(CH3)2 + HCl £ R N+H(CH3)2Cl− (18)

3.1.4 Résines faiblement acides et complexantes : Sous forme alcaline, elles existent en tant que bases libres. Elles
échange sélectif fixent donc les acides sous forme d’hydrates d’amine (chlorhydra-
tes, sulfhydrates, etc.). Le chlorhydrate d’amine peut être considéré
comme le chlorure de l’ammonium correspondant. Dans la prati-
Comme les résines carboxyliques fixent bien mieux les cations que, on parle généralement de la forme chlorure. Les résines faible-
polyvalents que les cations monovalents et qu’elles se régénèrent ment basiques ne peuvent fixer que les acides forts [réaction (18)].
très bien, on peut les utiliser pour fixer sélectivement des métaux En effet, les sels neutres ne sont pas coupés :
divalents ou trivalents, même en présence concentrée de cations
alcalins. Pour ce faire, on met d’abord l’échangeur sous forme R N(CH3)2 + NaCl pas de réaction (19)
monovalente :
R COOH + NaOH → R COONa + H2O (10) car, dans ce cas, la base nucléophile n’a pas d’ion H+ à qui donner
ses électrons comme dans la réaction (18) pour équilibrer l’anion.
Sous cette forme, l’échange de sels neutres est possible, par
exemple : De même, les acides faibles, qui n’ont pas non plus de proton dis-
socié, ne sont pas ou très peu fixés :
2 R COONa + ZnSO4 → (R COO)2 Zn + Na2SO4 (11)

En fin de cycle, on régénère la résine normalement, avec l’acide : R N(CH3)2 + SiO2 pas de réaction (20)
(R COO)2 Zn + H2SO4 → 2 R COOH + ZnSO4 (12)
R N(CH3)2 + CO2 + H2O R N+H(CH3)2 + HCO3− (21)

Les échangeurs faiblement basiques peuvent être régénérés à


3.2 Échange anionique l’aide d’ammoniac ou de carbonate d’ammonium :

R N(CH3)2HCl + NH4OH £ R N(CH3)2 + NH4Cl + H2O (22)


3.2.1 Échange général
R N(CH3)2HCl + Na2CO3 → R N(CH3)2 + NaCl + NaHCO3 (23)
C’est l’analogue anionique du procédé d’adoucissement. On l’uti-
lise pour éliminer les acides naturels organiques (par exemple En effet, ces régénérants sont des bases assez fortes pour neutra-
l’acide humique) et les nitrates des sources d’eau, et également en liser le chlorhydrate de la résine saturée.
hydrométallurgie pour la fixation sélective des métaux qui forment
des complexes anioniques. La résine mise en œuvre est le plus sou-
vent un échangeur fortement basique sous forme de chlorure :
3.3 Diagramme récapitulatif
R +Cl− + Na+NO 3 £ R +NO 3 + Na+Cl−
Ð Ð
(13)

nR +Cl− + (Na+)n humate n− £ (R +)n humate n− + nNa+Cl− (14)


La figure 14 rassemble les différentes formes d’échange décrites
R +Cl− + Na+ [Au(CN)2]− £ R + [Au(CN)2]− + Na+Cl− (15) précédemment.

Les résines sont régénérées dans chaque cas, en inversant les Les éléments de l’analyse d’eau sont décrits dans les articles qui
réactions au moyen de chlorure de sodium. suivent.

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Eau brute Eau traitée


3.4 Équilibre de l’échange d’ions
Cations Anions + +
+ + AF Ca+ Mg+ 3.4.1 Échange mono-monovalent
Ca+ Mg+
Cl- Cl-
Cl- À la réaction d’échange :
- Na+
Na+ NO3
- – + +
R H + Na ←→ R – Na + + H + (24)
SO3 SiO2
SiO2 Acides organiques
on applique la loi d’action de masse :
Acides organiques

[ Na ] γ Na
+
[ Na ] γ Na
+
CF HCO3 ---------------- ----------- = K --------------
- --------- (25)
[H ] γ H [H ] γ H
+ +
Na+
Cl-
Na+ - où [Na+] et [H+] sont les concentrations équivalentes des ions dans
NO3
- le liquide, tandis que γ Na et γ H sont les coefficients d’activité corres-
SO4 pondants. Les termes surlignés représentent les grandeurs considé-
SiO2 rées dans la phase solide.
Acides organiques
Donc :

CM CO2 γ Na γ H +
[ Na ] [ H ]
+
+ + K --------- --------- = ---------------- --------------- (26)
H+ Ca+ Mg+ γ H γ Na +
[ H ] [ Na ]
+
Cl-
-
NO3
Na+ -
En première approximation, on considère que les coefficients
SO4 d’activité sont constants, d’où :
SiO2
Acides organiques [ Na ] Na [ Na ]
------------ = K H ------------ (27)
[H] [H]

CO2 (Nous omettons les signes + par souci de simplification.)


CF
Na
H+ Cl- On appelle K H coefficient de sélectivité pour l’échange Na+/H+.
-
H+ NO3 Les coefficients de sélectivité sont fonction des différents couples
- d’ions, parce que l’affinité de la résine pour un ion est régie par la
SO4
dimension de l’ion hydraté. Plus la taille de cet ion est grande, plus
SiO2 la bille de résine doit se gonfler pour loger l’ion dans la structure. Le
Acides organiques gonflement est contrarié par la tension du squelette et les grands
ions ont besoin d’une force plus grande pour pénétrer dans la
résine.
AM CO2
base Le tableau 2 donne les sélectivités relatives des résines sulfoni-
libre ques pour divers cations et le tableau 3 celles des résines fortement
basiques des types 1 et 2 pour des anions monovalents. La diffé-
H2O rence de sélectivité augmente avec le taux de réticulation ; inverse-
ment, toutes les valeurs tendent vers 1 pour un taux de réticulation
égal à 0.
SiO2
Acides organiques Dans n’importe quelle résine, le taux de réticulation n’est pas uni-
forme. Il s’ensuit qu’un ion pénétrant dans la résine cherche d’abord
les régions les plus favorables. Ce phénomène est général et toutes
les réactions d’échange deviennent de moins en moins faciles au fur
AF et à mesure qu’elles progressent vers leur achèvement. Les consé-
quences pratiques sur la vitesse d’échange, la capacité et la fuite des
OH- échangeurs seront examinées dans les articles suivants.
H2O

3.4.2 Échange mono-divalent


(cas de l’adoucissement d’eau)
Échangeurs :
– d'anions forts : AF – de cations forts : CF Pour la réaction d’échange :
– d'anions faibles : AM – de cations faibles : CM

2 R Na + Ca
+ ++
→ ( R – ) 2 Ca ++ + 2Na +
← (28)
Figure 14 – Diagramme récapitulatif des différentes formes
d’échange d’ions

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Tableau 2 – Sélectivités relatives des résines sulfoniques Tableau 3 – Sélectivités relatives des échangeurs
pour divers cations ammonium quaternaire pour divers anions monovalents.
Taux de réticulation Résines
(% DVB) Anion considéré
type 1 type 2
4 8 12 16
OH− Hydroxyde (1) 1,0 1,0
H (1) 1,0 1,0 1,0 1,0 C6 H5—SO3− Benzénesulfonate >500 75
Li 0,90 0,85 0,81 0,74 HO—C6H4—COO− Salicylate 450 65
Na 1,3 1,5 1,7 1,9 I− Iodure 175 17
NH4 1,6 1,95 2,3 2,5 C6H5O− Phénate 110 27
Cations
monovalents K 1,75 2,5 3,05 3,5 HSO4− Hydrogénosulfate 85 15
Rb 1,9 2,6 3,1 3,4 ClO3− Chlorate 74 12
Cs 2,0 2,7 3,2 3,45 NO3− Nitrate 65 8
Cu 3,2 5,3 9,5 14,5 Br− Bromure 50 6
Ag 6,0 7,6 12,0 17,0 CN− Cyanure 28 3
Mn 2,2 2,35 2,5 2,7 HSO3− Hydrogénosulfite 27 3
Mg 2,4 2,5 2,6 2,8 BrO3− Bromate 27 3
Fe 2,4 2,55 2,7 2,9 NO2− Nitrite 24 3
Zn 2,6 2,7 2,8 3,0 Cl− Chlorure 22 2,3
Co 2,65 2,8 2,9 3,05 HCO3− Hydrogénocarbonate 6,0 1,2
Cu 2,7 2,9 3,1 3,6 IO3− Iodate 5,5 0,5
Cations
divalents Cd 2,8 2,95 3,3 3,95 HCOO− Formate 4,6 0,5
Ni 2,85 3,0 3,1 3,25 CH3—COO− Acétate 3,2 0,5
Ca 3,4 3,9 4,6 5,8 CH3—CH2—COO− Propionate 2,6 0,3
Sr 3,85 4,95 6,25 8,1 F− Fluorure 1,6 0,3
Hg 5,1 7,2 9,7 14,0 (1) Référence.
Pb 5,4 7,5 10,1 14,5
Ba 6,15 8,7 11,6 16,5
(1) Référence. Dans le cas d’un échange ne faisant intervenir que deux ions, par
exemple :

L’équation de la loi d’action de masse est : [T ] = [Na] + [Ca] en solution (33)

ou encore
[ Ca ] γ Ca [ Ca ] γ Ca
- = K --------------- --------
--------------- -------- - (29)
2 2 2 2
[ Na ] γ Na [ Na ] γ Na XNa + XCa = 1 (34)

Donc, en considérant que les coefficients d’activité sont cons- et la même chose dans la résine.
tants, il vient :
L’équation (30) devient donc :
[ Ca ] Ca [ Ca ]
--------------- = K Na --------------- (30)
2
[ Na ]
2 X Ca [ T ] X Ca
[ Na ] -------------------------- Ca --------------------------------
- = K Na - (35)
2 2
( 1 Ð X Ca ) [ T ] ( 1 Ð X Ca )
On définit la fraction équivalente Xi , d’un ion i dans une solution
de concentration ionique totale T par : Na
[ T ] est constant, K H est approximativement constant pour de fai-
[i] bles concentrations. L’expression (35) montre que plus la solution
X i = -------- (31) est diluée (T faible) pour une proportion constante de calcium (XCa
[T]
constant, plus le membre de gauche, donc X Ca est grand : la résine
fixe d’autant mieux le calcium que la concentration totale de la solu-
De même, la fraction équivalente de cet ion i dans la résine :
tion en cations est faible. Ce phénomène est illustré par la figure 15
qui représente les courbes d’équilibre pour une résine donnée, à
[i] diverses concentrations totales de la solution.
X i = -------- (32)
[T]
Chaque point de la courbe considérée représente la fraction équi-
À noter que [ T ] , la concentration totale d’ions dans la résine (en valente en calcium de la résine à l’équilibre, c’est-à-dire la propor-
éq/L), n’est autre que la capacité totale de cette résine définie dans tion des sites actifs de la résine sous forme Ca++, en fonction de la
le paragraphe 2.2.1. proportion de calcium dans la solution.‘

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Au fur et à mesure que l’on se déplace vers le bas de la courbe,


XCa l’équilibre devient moins favorable : alors qu’au point R, 95 % de la
5N solution de chlorure de sodium est consommée pour régénérer la
1 0,00 résine (puisque XCa = 0,95), au point S, il ne s’agit déjà plus que de
60 % et, au point T, de 25 %. À ce point, la résine est régénérée à
N
01 60 % (puisque X Ca = 0,4 ), et l’on arrête la régénération ici. En effet, il
0, N faudrait pour redescendre au point O des quantités croissantes de sau-
1
0, mure dont une faible fraction serait réellement utilisée pour la régéné-
ration. On rince donc la résine au point T et l’on change à nouveau de
phase pour un second cycle qui commencera au point P et permettra à
N
1 nouveau d’adoucir l’eau presque totalement. Tous les cycles ultérieurs
suivront la trajectoire PQRT.
0,5 On rappelle Comme on vient de le voir, chaque point de la courbe RSTO permet
que 1 N = 1 éq/L d’évaluer le rendement de régénération en ce point, c’est-à-dire le
N
pourcentage de saumure échangé. Entre les points R et T, la moyenne
5 s’établit à 60 %.
Comme on a régénéré entre X Ca = 0,9 et X Ca = 0,4 , on a donc
rendu disponible la moitié de la capacité totale de la résine. Si celle-ci
est de 2,0 éq/L, on a donc une capacité utile de 1 éq/L. En considé-
rant un rendement de régénération de 60 %, on a donc consommé
1/0,6 = 1,67 éq de NaCl soit 97,5 g par litre de résine.
Sur la figure 15, on remarque que, si la salinité totale de l’eau est
0 0,05 0,5 1 plus élevée (courbe 0,1 N), la forme du cycle conduira à une capacité
XCa
utile plus faible et à une qualité inférieure de l’eau traitée.
Figure 15 – Courbes d’équilibre mono-divalent
pour les différentes valeurs de [T ] indiquées sur les courbes

XCa 1

Exemple : Exemple pratique de l’adoucissement de l’eau 0,9 Q R


0,005 N
Prenons le cas d’une eau contenant 5 méq/L de salinité totale, soit 0,8 (Phase de
saturation)
[T ] = 0,005 N. 0,7
S 2N
On voit sur la figure 15 qu’une eau ne contenant que 5 % de Ca++ 0,6 (Phase de
(XCa = 0,05 ou [Ca] = 0,25 méq/L) est en équilibre avec une résine 0,5 régénération)
chargée à 95 % en calcium ( X Ca = 0,95 ) . En d’autres termes, la P T
résine est capable d’éliminer le calcium de l’eau, même si celle-ci n’en 0,4
contient que 5 % (XCa = 0,05), tant que la résine contient plus de 5 % 0,3
de sodium ( X Ca < 95 % ) .
0,2 P'
On voit, sur cette même figure, que l’affinité de la résine pour le cal-
0,1
cium décroît puis s’inverse à forte concentration ; c’est ce phénomène
qui permet la régénération de la résine.
O 0,2 0,4 0,6 0,8 1
La figure 16 représente, sous forme d’équilibres successifs, le cycle XCa
complet de l’adoucissement et de la régénération avec une saumure à
12 % (environ 2 N en NaCl. Figure 16 – Équilibres successifs du cycle d’adoucissement

Au point O, on démarre avec une résine 100 % régénérée (sous


forme Na). Au contact avec de l’eau contenant du calcium, eau dont la
salinité totale (Na + Ca) est de 5 méq/L (0,005 N), l’équilibre qui se pro- Les considérations ci-dessus s’appliquent généralement aux
duit conduit à charger la résine en Ca en éliminant ce calcium de l’eau. échanges entre deux ions monovalents et un ion divalent. Les
Ce déplacement de l’équilibre est symbolisé sur la courbe par une pre- échanges entre ions monovalents sont décrits par des courbes indé-
mière flèche ascendante. On arrive ainsi à un nouvel équilibre au point pendantes de la salinité totale.
P ′, où la résine chargée à 20 % en calcium est en équilibre avec une
eau totalement adoucie. Au point P, la résine chargée à 40 % en cal-
cium est encore en équilibre avec une eau totalement adoucie,
jusqu’au point Q où la résine contient 90 % de Ca, en équilibre avec 3.5 Cinétique d’échange
une eau adoucie à environ 98 % (XCa = 0,02) et contenant donc
0,02 × 5 = 0,1 méq/L de Ca.
3.5.1 Principes
À ce point, appelé point d’arrêt, on change de phase, car continuer
conduirait à une moins bonne élimination du calcium, et on régénère.
On se trouve alors sur l’autre courbe au point R car la concentration est Les équations de la loi d’action de masse s’appliquent seulement
passée de 0,005 N à 2 N. À ce point R, la résine est en équilibre avec aux systèmes qui sont en équilibre. Dans la pratique industrielle où
une solution contenant environ 95 % de Ca. Elle a donc tendance à la solution percole à travers la résine, l’équilibre n’est pas atteint et
rejeter des ions Ca pour réaliser cette concentration dans le liquide. les résultats sont influencés par des considérations cinétiques.
C’est la régénération. Ce faisant, la résine se remet progressivement La figure 17 montre la fixation d’ions Na+ par une bille de résine
sous forme Na en échangeant les ions Ca qu’elle a fixés pendant la pre- sous forme H+. Dans l’ensemble de la solution, il y a un fort excé-
mière phase contre les ions Na de la saumure de régénération. dent d’ions Na+ disponibles, dont la concentration globale est cons-

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Diffusion Concentration de l'ion


au sein d'une considéré
particule
Na+
Na+

H+ Na+ Na+ Sens d'écoulement Concentration dans C' B' A' P Q R


H+ Z
de la solution l'eau brute
H+
H+

Na+ H+
Na+ Na+
H+
Na+ Na+
H+
H+
Fuite maximale H G F
M
admissible
Diffusion à O C B A
travers un film Volume percolé

Figure 18 – Cinétique de film : courbes de saturation et volumes


Figure 17 – Diffusion à travers un film et au sein d’une particule
percolés à la fuite

tante. Autour de la bille, il y a une couche statique de solution, dite


film de Nernst, au travers de laquelle les ions sodium peuvent diffu- Dès que la vitesse augmente, l’équilibre n’est plus atteint et l’on
ser. La vitesse de diffusion, indépendante de la nature de la résine, observe une courbe de saturation OGQ ; si l’on poursuit l’opération
est proportionnelle à la concentration en sodium de la solution. au-delà du point de percement G jusqu’au point Q, la surface OGQ Z
L’épaisseur du film, qui détermine aussi la vitesse de diffusion, est mesure aussi la capacité totale de la résine. Mais si l’on arrête au
une fonction inverse de la vitesse d’écoulement de la solution. point G, on n’a utilisé que la capacité mesurée par OGB ′Z, inférieure
à la capacité totale.
On verra ci-dessous que les résines fortement fonctionnelles ont
Si l’on augmente encore la vitesse, on observe un profil du type
un type de cinétique différent des résines faiblement fonctionnelles.
OHR, et l’on obtient au nouveau point de percement H une capacité
En raccourci, les résines faiblement acides et basiques sont beau-
utile encore plus faible.
coup plus sensibles à la vitesse de percolation des ions.
L’épaisseur du film de Nernst étant une fonction inverse du débit
(ou de la vitesse), le film devient plus mince lorsque le débit aug-
3.5.2 Résines fortement acides ou basiques mente. Le doublement de la vitesse ne conduit donc pas à un étale-
ment double de la courbe de fuite. Dans une cinétique de film, la
capacité dépend peu de la vitesse de présentation des ions, que l’on
3.5.2.1 Cinétique de film appelle charge ionique horaire (produit du débit par la concentration
dans la solution à traiter). Si l’effet cinétique était tout à fait nul, la
Aux salinités inférieures à 10 méq/L et aux vitesses d’écoulement capacité utilisée serait indépendante du débit, donc la durée de la
inférieures à 120 m/h utilisées dans le traitement de l’eau, les vites- phase de saturation serait inversement proportionnelle à la charge
ses de diffusion au sein des résines sont beaucoup plus grandes ionique. On a vu dans le paragraphe 3.4.2 que la capacité utile
qu’au travers du film environnant. Ce film détermine donc la vitesse dépendait essentiellement de la quantité de régénérant. À une quan-
d’échange et le procédé présente une cinétique de film. Quand une tité donnée correspond une capacité disponible donnée inférieure à
solution de NaCl passe à travers une colonne de résine préalable- la capacité totale.
ment mise sous forme H+, la concentration de l’ion considéré dans
la solution effluente se présente comme sur la figure 18. Si le temps de saturation est trop court, la capacité utile est infé-
rieure à la capacité disponible. On notera que cette réduction de
Si la vitesse d’écoulement est assez lente, l’équilibre pourra s’éta- capacité (qui en pratique s’applique essentiellement aux échan-
blir au fur et à mesure que la solution atteint une couche de résine geurs d’anions fortement ou faiblement basiques) peut augmenter
neuve. La concentration de l’effluent sera alors décrite par la courbe lorsque la résine vieillit, en raison du blocage partiel des pores par
OFP. Au point F, appelé point de percement, cette concentration des matières organiques adsorbées au cours des années de service
atteint le maximum admissible et l’on arrête la percolation. Si l’on car cet empoisonnement retarde la diffusion des ions. Il est donc
poursuivait jusqu’au point P, où la concentration dans l’effluent est recommandé, lorsque l’on calcule un projet d’installation de démi-
égale à celle de la solution brute, on aurait saturé la résine à 100 %. néralisation, de vérifier que la colonne d’échange d’anions ait une
capacité suffisante pour fonctionner pendant au moins 8 h au débit
Dans la pratique industrielle, on arrête la percolation lorsque la maximal.
teneur de l’ion considéré dans l’effluent atteint un faible pourcen-
tage de la teneur dans la solution brute, disons 1 %.
3.5.2.2 Cinétique de particule
Au point F, on a percolé un volume A de solution. La capacité uti-
lisée est mesurée par la surface OFA ′Z, peu différente de la surface Tandis que la concentration des ions en solution augmente, la
OFPZ mesurant la capacité totale de la résine. vitesse du transfert de masse à travers le film augmente jusqu’au
point où elle excède la vitesse de diffusion à travers les billes de
On peut aussi se représenter cette même figure 18 comme la pro- résine. Cette dernière devient alors le facteur limitatif et l’on dit du
gression du front de saturation le long d’une colonne de résine. système qu’il a une cinétique de particule ou de gel. Ce type de ciné-
Dans le cas que nous venons de décrire (percolation lente), ce front tique se présente notamment durant la régénération des résines au
est à peine diffus, chaque couche successive de résine se trouvant moyen de solutions 1 à 3 N. Les courbes d’épuisement sont sembla-
presque entièrement saturée avant que n’apparaisse la fuite. bles à celles de la figure 18 sauf que la longueur de la vague est une

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fonction linéaire du débit. Par suite du fort gradient de concentration


10
dans la résine, le processus complet est beaucoup plus rapide que Fuite ionique
celui de l’épuisement. Un équilibre pratiquement total peut être (µg/L) 5
obtenu en 15 min mais, si l’on utilise un temps de régénération plus
court, il peut y avoir une réduction significative de la capacité utile. 2
De petits adoucisseurs d’eau automatiques ont cependant parfois D
des temps d’injection de saumure de l’ordre de 5 min. 100

Il est ainsi parfois avantageux d’utiliser des résines relativement 5


E
fines, ou du moins ne contenant pas de grosses billes, pour aug-
menter la capacité utile du système. 2

10-1

3.5.3 Résines faiblement acides ou basiques 5 x 10-2


0 100 200 300 400
Charge volumique (h-1)
La situation de ces résines est différente, en ce sens qu’elles ne
sont pas (ou très peu) ionisées sous la forme régénérée. En consé- Figure 20 – Fuite ionique cinétique pour deux résines D et E
quence, le processus d’adsorption comprend non seulement la dif-
fusion au travers de la résine, mais aussi la construction ou la
destruction d’une liaison covalente, qui sont des réactions plus len- 3.5.4.2 Fuite ionique cinétique
tes.
On appelle fuite ionique la concentration d’ions non retenus par la
La vitesse d’échange de ces résines est donc déterminée par la résine qui passent dans la solution traitée, et charge volumique le
diffusion lente à travers les particules (cinétique de particule ou de rapport du débit de la solution à traiter au volume de résine mis en
gel) et l’on ne peut pas saturer la résine dans un temps aussi court œuvre [unité : (m3/h)/m3 ou h−1].
qu’avec les échangeurs fortement ionisés. On mesure, en fonction de la charge volumique, la fuite ionique
cinétique pour une solution donnée percolant à travers divers
Les résines faiblement fonctionnelles sont dites à cinétique lente ;
échangeurs (figure 20). Ces valeurs extrêmement faibles de fuite
leur capacité dépend étroitement de la charge ionique.
ionique ont été obtenues dans des conditions proches de celles ren-
contrées en traitement de condensats.
Ce type de mesure est utile, par exemple lorsque l’on veut obtenir
3.5.4 Courbes de cinétique une eau de très haute pureté (traitement de condensats). La résine E
peut ici fonctionner à des débits très élevés sans que les ions fuient
Comme pour l’équilibre ionique, la cinétique d’échange ne se dans l’effluent.
laisse que difficilement appréhender de façon purement mathémati-
que. Par contre, on peut comparer les vitesses d’échange de plu-
sieurs résines dans les mêmes conditions. 3.6 Résultats pratiques de l’équilibre
et de la cinétique
3.5.4.1 Vitesse de fixation d’un ion (saturation)
Nous avons montré dans le paragraphe 3.5 que, dans des condi-
On mesure, dans des conditions normalisées (à débit, concentra- tions pratiques, le processus d’échange est toujours incomplet, à la
tion, température fixés). La vitesse de saturation d’une résine à tra- fois pendant la phase de saturation et pendant celle de régénération,
vers laquelle une solution déterminée percole. On porte en abscisse et que la capacité totale de la résine ne peut donc jamais être utili-
le temps et en ordonnée la fraction saturée X i de la résine sée.
(figure 19), en considérant en général un seul ion. On voit dans Par ailleurs, la fuite ionique, c’est-à-dire la teneur dans le liquide
l’exemple considéré que en 3 h, la résine A est saturée à 95 %, la traité des ions non retenus sur la résine, dépend d’une part de la
résine B à 85 % et la résine C à 60 % seulement. La résine C est donc composition de la résine (fuite à l’équilibre) et d’autre part de la
paresseuse dans les conditions de l’expérience. vitesse d’échange (fuite cinétique).

3.6.1 Capacité utile, rendement


1 et taux de régénération
Xi A
Le calcul de la capacité utile est gouverné par un grand nombre de
facteurs :
B
— analyse de l’eau à traiter ;
0,5 — qualité de l’eau à obtenir (fuites admises) ;
C
— débit en service ;
— température de l’eau à traiter ;
— type de régénérant ;
— quantité de régénérant ;
— débit de régénération ;
0 1 2 3 4 5 6 — température du régénérant ;
Temps (h)
— durée du cycle souhaitée.
Figure 19 – Vitesse de fixation d’un ion pour différentes résines A, B La notion de capacité utile a été introduite dans le para-
et C graphe 2.1.1 et développée dans le paragraphe 3.4.2 dans le cas par-

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ticulier de l’adoucissement de l’eau (équilibre Na+—Ca++). On est 3.6.2 Fuite permanente


parti dans les deux cas d’une résine régénérée à 100 %. Dans la pra-
tique, cela est très rarement le cas, car il faudrait utiliser une quan- Le calcul des équilibres de réaction permet de déterminer la fuite
tité de régénérant énorme (théoriquement infinie) pour éluer de la minimale théorique que l’on peut obtenir. En pratique, cette fuite
résine tous les ions fixes au cours du cycle précédent. La variable minimale sera augmentée par les phénomènes de cinétique.
qui a l’effet le plus important sur la capacité utile est donc la quan-
tité de régénérant mise en œuvre. 3.6.2.1 Résines fortement fonctionnelles
Le rendement de régénération est défini comme le rapport de la On vient de le voir : après régénération, les résines fortement
capacité utile (en éq/L) à la quantité de régénérant (en éq/L). basiques ou acides sont toujours remises en service alors qu’elles
ne sont que partiellement sous la forme régénérée. Lorsque la régé-
L’inverse du rendement est appelé taux de régénération (par rap- nération a lieu à co-courant, c’est-à-dire le flux étant dirigé dans le
port à la quantité stœchiométrique). Il est toujours supérieur à 1. même sens qu’au cours de la phase de saturation, c’est souvent la
couche inférieure, au travers de laquelle la solution traitée sort de la
Nota : en pratique, ces grandeurs sont souvent exprimées en pour-cent. colonne, qui est le plus mal régénérée. Cela a un effet sur la qualité
de la solution traitée. La figure 22 est un diagramme simplifié des
Pour la plupart des résines fortement acides ou basiques, il est réactions d’échange qui ont lieu au sein de la colonne en cours de
rarement possible d’utiliser plus de 60 % de capacité totale de ces saturation, les sels de la solution (représentés ici par NaCl) sont rete-
résines. Ainsi, par exemple, la capacité totale de la résine fortement nus sur les couches régénérées de la résine. Chaque ion Na+ fixe
basique de type 1 représentée sur la figure 21 est de l’ordre de éjecte un ion H+ de la résine. Lorsque ces ions H+ continuent leur
1,2 éq/L. On voit immédiatement d’après la forme de la courbe qu’il chemin dans la colonne, ils atteignent une partie de résine régéné-
est illusoire de vouloir la régénérer totalement. Une quantité de 60 g rée seulement en partie et l’échange inverse a lieu (autorégénéra-
de soude par litre de résine permettra d’obtenir une capacité utile de tion), conduisant à une fuite d’ions Na+ dans l’eau traitée. Cet effet
base de 0,46 éq/L (avant les corrections dues à d’autres facteurs). Le peut être fortement minimisé par la régénération à contre-courant.
rendement de régénération, égal à 0,46/(60/40), dépasse à peine
30 % dans ce cas. En réalité, le lit de résine, après régénération et en cours de satu-
ration, ne contient pas une zone totalement régénérée et une zone
En doublant la quantité de régénérant, c’est-à-dire en faisant pas- totalement saturée, mais se trouve à un degré variable de régénéra-
ser 120 g de soude par litre de résine, on atteint une capacité utile de tion.
base de 0,615 éq/L, soit un tiers de plus seulement et le rendement
de régénération tombe à 21 %. Il est donc très rare que l’on fasse 3.6.2.2 Résines faiblement fonctionnelles
fonctionner une telle résine à plus de 50 % de sa capacité totale. Il
Le cas est ici plus simples : les résines sont régénérées à près de
faut toutefois noter que ce type de résine, très fortement basique, se
100 % au début de la phase de saturation, mais leur vitesse
laisse moins facilement régénérer que le type 2 (tableau 3). Les rési-
d’échange, relativement lente, permet à quelques ions de
nes faiblement fonctionnelles, au contraire, se laissent totalement
s’échapper sans avoir été fixés. Il s’agit donc d’une fuite cinétique
régénérer, mais c’est leur mauvaise cinétique qui limite leur capacité
(cf. § 3.5.4.2).
utile (§ 3.5.3).

NaCl
0,70
Haut de colonne
40 %

30 %

25 %

5%

Capacité utile
R – – Na+ R – – H+ + NaCl
20 %

(éq/L)
17,

0,65
%
15

0,60 R – – Na+ + HCl


%
2,5


R – H+
R – – Na+ + HCl
=1

0,55
R
ρ

0,50
R – – H+ + NaCl
R – – Na+
Bas de colonne
0,45
HCl + NaCl
0,40 0 XNa 1
80 100 120 140 160 180 200
60
NaOH (g/L résine) Ceci est l'image de la colonne en début de phase de production, la résine
ρR = Rendement de régénération
ayant été régénérée à co-courant, le bas de la colonne contient encore
beaucoup de sodium.
Figure 21 – Capacité utile d’une résine fortement basique de type 1,
en fonction de la quantité de régénérant utilisée (soude) Figure 22 – Fuite ionique due à l’autorégénération

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Échange d’ions R
Principes de base E
par François de DARDEL N
Ingénieur-chimiste de l’École Polytechnique Fédérale de Zürich
Rohm and Haas France SA

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