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PROCÉDÉS CHIMIE - BIO - AGRO

Ti452 - Opérations unitaires. Génie de la réaction chimique

Industrialisation des procédés


et usine du futur

Réf. Internet : 42602

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III
Cet ouvrage fait par tie de
Opérations unitaires. Génie de la réaction
chimique
(Réf. Internet ti452)
composé de  :
Industrialisation des procédés et usine du futur Réf. Internet : 42602

Innovations en génie des procédés Réf. Internet : 42487

Modélisation en génie des procédés Réf. Internet : 42328

Thermodynamique et cinétique chimique Réf. Internet : 42323

Transfert de matière en génie des procédés Réf. Internet : 42326

Catalyse et procédés catalytiques Réf. Internet : 42325

Opérations unitaires : évaporation et séchage Réf. Internet : 42316

Opérations unitaires : techniques séparatives sur membranes Réf. Internet : 42331

Opérations unitaires : distillation et absorption Réf. Internet : 42324

Opérations unitaires : extractions fluide/fluide et fluide/ Réf. Internet : 42332


solide

Opérations unitaires : séparation de phases, décantation Réf. Internet : 42484


et filtration

Opérations unitaires : tri et traitement des liquides et des Réf. Internet : 42446
solides

Opérations unitaires : traitement des gaz Réf. Internet : 42485

Opérations unitaires : agitation et mélange Réf. Internet : 42486

Réacteurs chimiques Réf. Internet : 42330

Électrochimie Réf. Internet : 42322

Génie des procédés et protection de l'environnement Réf. Internet : 42327

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IV
Cet ouvrage fait par tie de
Opérations unitaires. Génie de la réaction
chimique
(Réf. Internet ti452)

dont les exper ts scientifiques sont  :


Jean-Claude CHARPENTIER
Professeur et directeur de recherches CNRS au Laboratoire Réactions et Génie
des Procédés à l'ENSIC-Nancy, Ancien directeur de l'ENSIC-Nancy, de l' ESCPE
Lyon et du département Sciences pour l'ingénieur du CNRS, Past-président de
la Fédération européenne de génie chimique (EFCE)

Jean-Pierre DAL PONT


Président de la Société Française de Génie des Procédés (SFGP), Secrétaire
Général de la Fédération Européenne du Génie Chimique (EFCE), Président de
la Société des Experts Chimistes de France (SECF)

Jean-François JOLY
Ingénieur de l'École supérieure de chimie industrielle de Lyon, Ingénieur-
docteur de l'Université de Lyon, Directeur expert à l'IFP Énergies Nouvelles

Olivier POTIER
Responsable du Groupe Thématique de la Société Française de Génie des
Procédés (SFGP), Laboratoire Réactions et Génie des Procédés (CNRS UMR
7274, Université de Lorraine, Nancy), École Nationale Supérieure en Génie des
Systèmes et de l'Innovation (ENSGSI - Université de Lorraine)

Marie-Odile SIMONNOT
Professeur en Génie des procédés à l'Université de Lorraine (Nancy)

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V
Les auteurs ayant contribué à cet ouvrage sont :

Joëlle AUBIN Jean-Pierre DAL PONT Xavier JOULIA


Pour l’article : IN94 Pour l’article : J8000 Pour l’article : J1022

Catherine AZZARO-PANTEL Alain DESROCHES Jean LE BISSONNAIS


Pour les articles : J8000 – Pour l’article : SE2040 Pour les articles : AG3150 –
AG3010 – AG3011 AG3153
Pierre DEVALAN
Bernard BARTHÉLÉMY Pour l’article : AG2231 Alain NAVARRO
Pour l’article : AG1100 Pour l’article : G2000
Adrian DIETZ
Béatrice BELLINI Pour l’article : AG3011 François V. PATHY
Pour l’article : G6010 Pour l’article : AG4100
Serge DOMENECH
Pascal BERRUET Pour l’article : AG3011 Jean-François PETIN
Pour l’article : AG3510 Pour l’article : AG3510
Dominique ESTAMPE
Roy BILLAM Pour l’article : AG5000 Luc PIBOULEAU
Pour l’article : AG4100 Pour l’article : AG3011
Pascal EYMERY
Christophe BLAVOT Pour l’article : AG5000 Fabien RIGAUD
Pour l’article : G2008 Pour l’article : AG3510
Christel FIORINA
Jean-Claude BOEGLIN Pour l’article : G8510 Jean-Louis ROUBATY
Pour l’article : G1210 Pour l’article : G1210
Renaud GICQUEL
Sylvain CAILLOL Pour l’article : BE8047 Armand TOGUYENI
Pour l’article : J4920 Pour l’article : AG3510
José GRAMDI
Bernard CHARAVEL Pour les articles : AG4112 – Yvan VÉROT
Pour l’article : AG4650 AG4110 Pour l’article : AG4605

Jean-Claude CHARPENTIER Cyrille HARPET Catherine XUEREB


Pour l’article : J500 Pour l’article : G2008 Pour l’article : IN94

Marie-Christine CHARRIER Marc JANIN Éric ZAMAÏ


Pour l’article : AG3300 Pour l’article : G6010 Pour l’article : AG3510

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VI
Industrialisation des procédés et usine du futur
(Réf. Internet 42602)

SOMMAIRE

1– Introduction Réf. Internet page

Usine du futur. Nouvelles approches dans les industries des procédés J8000 11

2– Management de l'entreprise industrielle Réf. Internet page

Enjeux de la chaîne logistique - Supply Chain management AG5000 19

Architectures de pilotage de procédés industriels AG3510 21

3– Gestion de projet et ingénierie Réf. Internet page

Gestion des risques d'un projet SE2040 27

Réalisation de projets dans une société d'ingénierie AG3300 31

Management de projet. Les processus (d'après ISO 10006) AG3150 35

Management de projet. Cas d'une rainerie de pétrole AG3153 39

4– Développement de produits Réf. Internet page

L'écoconception  : un outil d'innovation pour une chimie durable J4920 47

Simulateurs de procédés J1022 51

5– Gestion des risques Réf. Internet page

Gestion globale des risques AG1100 59

Démarche générale de maîtrise du risque dans les industries de procédé AG4605 65

Système de management de la sécurité : mise en place sur site AG4650 67

6– Développement durable et outils industriels Réf. Internet page

Génie des procédés, développement durable et innovation . Enjeux et perspectives J500 73

Mettre en oeuvre une démarche écoresponsable : objectifs, méthodes et exemples G8510 77

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VII
Écoconception : état de l'art des outils disponibles G6010 81

Pollution industrielle de l'eau. Caractérisation, classiication, mesure G1210 89

Approche systémique des déchets G2000 93

Écologie industrielle : gestion des matières premières secondaires dans le G2008 95


métabolisme territorial - illustrations
Progiciel Thermoptim . Boîte à outils pour l'énergétique BE8047 101

7– Production Réf. Internet page

Lean Management et excellence industrielle AG4112 111

Ordonnancement et conception d'ateliers discontinus AG3010 115

Ordonnancement et conception d'ateliers. Applications AG3011 119

Microréacteurs pour l'industrie IN94 123

8– Management du changement, progrès continu et Réf. Internet page

innovation
Amélioration continue dans l'entreprise AG4100 129

Excellence industrielle AG4110 133

Innovation. Concepts clés AG2231 137

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Industrialisation des procédés et usine du futur
(Réf. Internet 42602)


1– Introduction Réf. Internet page

Usine du futur. Nouvelles approches dans les industries des procédés J8000 11

2– Management de l'entreprise industrielle

3– Gestion de projet et ingénierie

4– Développement de produits

5– Gestion des risques

6– Développement durable et outils industriels

7– Production

8– Management du changement, progrès continu et


innovation

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Usine du futur. Nouvelles approches


dans les industries des procédés

par Jean-Pierre DAL PONT
Président de la Société française de génie des procédés SFGP
Secrétaire Général de la Fédération Européenne de Génie Chimique EFCE
Président de la Société des Experts Chimistes de France SECF
et Catherine AZZARO-PANTEL
Professeur des Universités
Laboratoire de génie chimique UMR CNRS 5503 Université de Toulouse ENSIACET INPT

1. Situation industrielle de la France ................................................... J 8 000 - 2


2. Industries de procédé .......................................................................... — 3
3. Entreprise industrielle et ses moyens de production ................. — 3
3.1 Entreprise vue par ses flux....................................................................... — 3
3.2 Produit vu par le fabricant et le client ..................................................... — 3
3.3 Analyse stratégique de l’entreprise sous ses aspects industriels ........ — 5
4. Industrialisation, outils classiques .................................................. — 7
4.1 Notions de base ........................................................................................ — 7
4.2 Simulateurs de procédés ......................................................................... — 8
4.3 Prise en compte des impératifs du développement durable ................ — 9
4.4 Principes de la chimie verte et de l’ingénierie verte .............................. — 9
4.5 Indicateurs, indices et métriques de développement durable en génie
des procédés ............................................................................................. — 10
4.6 Recyclage et économies circulaires ........................................................ — 13
5. Usine de demain, nouvelles approches .......................................... — 13
5.1 Innovation au cœur de l’entreprise ......................................................... — 14
5.2 Nouvelles approches d’industrialisation : vers une écologie
industrielle................................................................................................. — 14
5.3 Maîtrise des opérations industrielles ...................................................... — 18
5.4 Lean manufacturing – Progrès continu................................................... — 18
5.5 Management du changement.................................................................. — 18
5.6 Vers la société numérique........................................................................ — 19
5.7 Gestion industrielle pour l’entreprise de demain .................................. — 19
5.8 Ingénieur de procédés pour l’usine de demain...................................... — 19
6. En terme de conclusion....................................................................... — 19
Pour en savoir plus ......................................................................................... Doc. J 8 000

es Éditions techniques de l’ingénieur sont riches d’articles sur le mana-


L gement de l’entreprise, l’ingénierie de procédés, les techniques de
production, la maîtrise des risques sans oublier tout ce qui a trait aux maté-
riaux, à la mesure, au contrôle...
L’évolution considérable du système productif de la France et de beaucoup
de pays a abouti au lancement d’une nouvelle base documentaire
« Industrialisation des procédés : défis et nouvelles approches » qui doit per-
p。イオエゥッョ@Z@、←」・ュ「イ・@RPQS

mettre aux lecteurs de se forger une idée sur l’évolution des concepts de
développement de produits, d’industrialisation, de gestion industrielle, dans
l’esprit d’un développement durable.

Copyright © – Techniques de l’Ingénieur – Tous droits réservés J 8 000 – 1

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USINE DU FUTUR. NOUVELLES APPROCHES DANS LES INDUSTRIES DES PROCÉDÉS _____________________________________________________________

Cette base est une suite logique à caractère plus industriel de la collection
Génie des procédés (GP), défini comme une science d’intégration de multiples
techniques, chimie, biotechnologie, physique, mathématiques... Le rôle de
l’ingénieur en GP est de concevoir, construire, diriger et faire fonctionner et
améliorer les outils des industries éponymes, rôle grandissant dans les
domaines aussi importants que l’énergie, l’eau, l’alimentation, et de sa
contribution au bien-être dans une société qui se cherche.

Q Or, la solution à ces problématiques se trouve en partie dans les outils de


production, dans les ateliers. Ce n’est que depuis quelques années que les
sociétés des pays industrialisés s’interrogent à des titres divers sur l’avenir de
leurs usines. Cette interrogation provient pour l’essentiel de la montée du chô-
mage, de l’augmentation incontrôlable de la dette publique due, entre autres, à
l’invasion de produits provenant des pays émergents tels les BRIC (Brésil,
Russie, Inde, Chine) auxquels il faut ajouter à ce jour l’Afrique du Sud devenus
les BRICS. La Chine est devenue l’Atelier du monde.
L’objectif de cet article est plus d’induire une réflexion que des articles
complémentaires du traité « Opérations unitaires. Génie de la réaction
chimique » viendront conforter, que d’apporter des solutions toutes faites à
une problématique extrêmement vaste et complexe.

1. Situation industrielle La recherche scientifique (R&D) qui a été à l’origine et qui a sou-
tenu l’éclosion d’industries nouvelles performantes comme le
de la France nucléaire, le téléphone, les transports (AIRBUS, TGV...) à côté de
quelques « couacs » économiques comme le Concorde, semble
s’essouffler et tourner à vide : sans industrie, plus de R&D.
La France n’échappe pas à cette problématique à laquelle il faut L’Innovation n’est alors plus au rendez-vous : en 2012 notre
ajouter ce qui semble être un manque de compétitivité, fait très capacité à innover se classait 24e dans le monde et seulement 18e
grave s’il perdure. Le manque de compétitivité ne permet plus de en Europe (selon le Global Innovation Index de l’INSEAD).
conquérir des parts de marché tant sur les marchés intérieurs qu’à
l’exportation. À cela s’ajouterait un manque d’attractivité définie Dans les années 1980, la France a misé sur les services et a
comme la capacité à attirer en France des investissements étran- commencé à négliger son outil industriel méconnaissant le fait que
gers créateurs d’emploi et les garder. la richesse se crée dans les ateliers avant que les services ne la
redistribuent ! « On misait alors sur la société post-industrielle »,
Des pans entiers de notre industrie ont disparu ; audiovisuel, « la nouvelle économie », « l’entreprise sans usine ».
électronique, chimie lourde, métallurgie et avec eux un savoir faire
de plusieurs décennies. À son tour l’automobile est aujourd’hui Adam SMITH ne l’avait-il déjà pas pressenti dans son livre
dans le rouge. « Richesse des nations » paru en 1776 ?
Les relocalisations d’outils de production dans ces pays ou L’INSEE fixe effectivement le début de la « désindustrialisation »
depuis des années la croissance avoisine ou dépasse les deux chif- en France aux années 1980. L’emploi manufacturier est alors passé
fres entraînent désordre social et interrogations quant à la situa- de 5,1 millions en 1980 à un peu moins de 2,9 millions aujourd’hui
tion matérielle des générations futures. soit une perte de 2 millions en trente ans. Parallèlement, la part de
l’industrie manufacturière dans la valeur ajoutée s’est réduite de
L’exportation de biens à haute technologie (AIRBUS, chimie fine, 20,6 % à 10 % environ.
pharmacie, luxe) et de produits agroalimentaires ne compense pas
le déséquilibre commercial. Le développement des industries ver- L’avènement du concept Développement durable dont nous cré-
tes reste encore marginal. ditons Rachel CARSON [1] a mis l’accent sur la nécessité de res-
pecter l’environnement tant pour les outils de production, sources
La France pays traditionnellement agricole a connu après la
de nuisances, que pour les produits qui en sont issus.
deuxième guerre mondiale une période (les « Trente Glorieuses »
de 1950 à 1980) qui en a fait un pays doté d’une forte infrastructure L’exploration spatiale a eu une conséquence inattendue : elle a
industrielle. fait prendre conscience aux Terriens que notre planète « bleue »
est un monde fini aux ressources limitées. Ressources d’autant
Cette transformation s’est accompagnée d’une amélioration du
plus limitées que la population continue d’augmenter.
niveau de vie considérable : l’électroménager, l’audiovisuel, la voi-
ture pour ne citer que quelques exemples, ont transformé une La médiatisation parfois outrancière (médiacratie ?), la révolu-
société qui s’est enrichie, s’est habituée aux loisirs alors qu’en tion apportée par INTERNET qui n’a pas de précédent dans l’his-
même temps s’améliorait son éducation grâce à l’augmentation toire de l’humanité sinon peut-être l’invention de l’imprimerie, qui
sans précédent du nombre de diplômés. fait que tout se sait, a modifié notre approche des phénomènes,
des situations politiques.
La baisse de la croissance a réduit considérablement les inves-
tissements physiques et même les investissements de maintien : Nous sommes à la fin d’une période que l’on peut qualifier
l’outil industriel a vieilli. Il apparaît aujourd’hui que l’appareil de d’industrielle née avec la révolution éponyme au XVIIIe siècle qui a
production des pays concurrents est dans un bien meilleur état vu son apogée et sa structuration au XIXe siècle et qui s’est prolon-
que le nôtre. gée jusqu’à la période actuelle.

J 8 000 − 2 Copyright © – Techniques de l’Ingénieur – Tous droits réservés

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______________________________________________________________ USINE DU FUTUR. NOUVELLES APPROCHES DANS LES INDUSTRIES DES PROCÉDÉS

C’est dans ce contexte de turbulences et d’incertitude que sont


apparus un certain nombre de vocables tels que : usine du futur, 3. Entreprise industrielle et
usine durable, usine de demain, usine flexible, usine avec un futur,
usine pérenne, usine performante...
ses moyens de production
Le présent article essaie d’aborder le sujet en le replaçant dans
le contexte de la société d’un pays développé comme la France, 3.1 Entreprise vue par ses flux
acteur encore important dans le monde bien que sa population
La figure 1 schématise l’outil industriel né très souvent de travaux


n’en représente qu’un centième, dans le contexte de l’entreprise
qui risque ses capitaux pour construire un outil de production. de recherches. Sa matérialisation au niveau de l’entreprise ressort
de la conversion de capitaux en un investissement physique
(CAPEX Capital Expenditures) ; c’est le résultat du processus
d’industrialisation qui est détaillé plus loin. Les frais de fonctionne-
2. Industries de procédé ment (OPEX Operating Expenditures) incluent les dépenses liées
directement au produit tels les achats de matières premières MP et
les dépenses liées au fonctionnement propre de l’outil telles les frais
Nous nous intéressons essentiellement aux industries de procé-
de main-d’œuvre MO, l’énergie, la maintenance etc.
dés, industries de transformation de la matière et de l’énergie par
voie chimique, physique, biologique, telles les industries de la Une vision systémique de l’atelier de production met en
chimie, de la pharmacie, la métallurgie, la papeterie, la cimenterie, évidence différents flux :
les industries agroalimentaires... – flux de matière (matières premières, produits finis incluant
Elles sont le pendant de l’autre grande catégorie d’industries transport, stockage et distribution, déchets, rejets) ;
que sont les industries manufacturières qui fabriquent des objets – flux d’énergie ;
discrets comme l’industrie automobile, l’électroménager, l’aéro- – flux financiers (achats, ventes de produits et services, frais de
nautique... fonctionnement, investissements de maintien...) ;
Ce sont généralement des industries capitalistiques qui exigent – flux de personnes : entrée, sortie du personnel de l’entreprise,
des efforts importants en investissement et dont le retour sur des sous-traitants, des livraisons, des expéditions, des visiteurs...) ;
investissement est généralement long, de plusieurs années. Cela – flux d’information (gestion des flux précédents, contrôle de
nuit souvent à leur attractivité. l’outil au sens le plus large).
Ce sont des industries fortement basées sur la recherche et le déve- La gestion des flux fait appel aux ERP (Entreprise Resources
loppement (R&D) dont le coût peut atteindre les 10 à 14 % du chiffre Planning ) en français PGI (Progiciel de Gestion Intégré), logiciels qui se
d’affaires, des industries en évolution constante à la recherche sont développés considérablement à partir des années 1990. L’entre-
d’innovation pour mettre sur le marché des produits nouveaux prise allemande SAP détient une part très importante de ce marché.
De ce fait, ce sont des industries à risque : c’est le cas de la pharma-
cie ou la commercialisation d’un nouveau médicament est de l’ordre Le concept de Supply Chain inventé par CHRISTOPHER [9]
de 8 à 10 ans pour un coût qui peut dépasser le milliard d’euros. s’attache au management des produits et marchandises avec
comme objectif final la satisfaction du client (figure 2).
Leur impact sur l’environnement est souvent important, à la
source de pollution des eaux, de l’air (gaz à effet de serre GES),
avec des besoins en énergie élevés pour la chimie dite de base ou Le concept de supply chain sous-tend une vision dynamique des
chimie lourde (chimie des engrais, des matières plastiques...). flux.
Il est important de noter que les industries chimiques sont à C’est de l’analyse des flux produit que Taiichi OHNO a inventé le
l’amont de nombreuses industries qui ont besoin de leurs JIT (Just In Time), base du système TOYOTA d’élimination des
produits. Il suffit d’examiner les pièces d’équipement qui rentrent stocks.
dans une voiture : pare-brise, sièges, tableau de bord, tuyauteries,
sans parler des pneumatiques, des carburants, des huiles...
Déjà sous les aspects scientifiques Thomas A. Edison disait que 3.2 Produit vu par le fabricant et le client
la chimie est la mère de toutes les sciences.
On pourrait presque dire que les industries qu’elle a engendrées Au lendemain de l’entrée en guerre des États-Unis en 1942,
sont la mère de bien d’industries. Laurent MILES a inventé l’analyse fonctionnelle, l’analyse de la
valeur AV probablement une des avancées majeures en mana-
Nous avons estimé qu’aborder un thème aussi complexe que gement du XXe siècle [10] [11].
l’usine de demain nécessitait en premier lieu de comprendre la struc-
ture de l’entreprise qui en est à l’origine, le fonctionnement basique
d’un atelier de production sous l’aspect des flux, de l’interaction avec L’analyse de valeur AV est une méthode pour concevoir des
la société et la prise en compte du développement durable. produits nouveaux ou améliorer des produits existants afin de
satisfaire le(s) client(s) au moindre coût. Il s’agit de créer de la
Dans un deuxième temps, un retour sur le processus d’industria-
valeur, non pas au sens financier, mais pour rendre service au
lisation, c’est-à-dire le passage de la R&D à un outil de production
client et lui offrir ce qu’il est prêt à payer. L’AV repose sur la
délivrant un ou des produits à valeur d’usage permet de revenir
notion de fonction définie comme l’action d’un produit ou de
aux principes fondamentaux de conception et de réalisation.
l’un de ses constituants [DAL03a].
Le processus d’industrialisation met en œuvre un grand nombre
de techniques – concept de la boîte à outils (tool box) – parmi
lesquels les outils d’évaluation du procédé qu’ils soient d’ordre Définir une fonction, c’est répondre aux attentes du client. Parmi
financier, donc lié à la rentabilité, de sécurité, de fonctionnement les différentes fonctions, la fonction de service est primordiale ; un
et aujourd’hui d’évaluation de l’impact sur l’environnement au porte-mine sert à laisser une trace sur un support, à écrire.
sens le plus large. Fonction technique, fonction d’estime, fonction de contrainte...
C’est à partir de l’analyse de ces critères, de ces concepts et sont les éléments clés de l’AV.
modes de travail que sont dégagés un certain nombre de principes Du point de vue industriel, il est intéressant de constater que la
qui permettent de différencier l’usine de demain, l’usine gagnante perception du produit par l’utilisateur et le producteur est
de celles qui l’ont précédé. différente. C’est ce qu’illustrent les figures 3 et 4.

Copyright © – Techniques de l’Ingénieur – Tous droits réservés J 8 000 – 3

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USINE DU FUTUR. NOUVELLES APPROCHES DANS LES INDUSTRIES DES PROCÉDÉS _____________________________________________________________

Recherche

Industrialisation


création de l’outil
industriel

Frais de
fonctionnement
Capitaux (MO, maintenance,...)
Source Source Clients
MP MP MP inconnus
Produits Conditionnement Clients
Énergie Énergie Outil industriel Distribution
Formulation connus
Energie fins Emballage Utilisation
méconnue

Déchets Déchets Déchets

Amont parfois Supply chain du transformateur Aval parfois


méconnu (bornes de son système) méconnu

Figure 1 – Vision systémique de l’entreprise

Flux d’information

Calcul des besoins Prévisions commandes

Stock Stock
Fournisseurs matières Production produits Clients
premières finis

Approvisionnements Manutentions Livraisons

Flux de produits

Figure 2 – Usine vue sous l’angle de la supply-chain

MARKETING FONCTIONNALITÉ

PRIX D’ACHAT SERVICE


R&D / INGÉNIERIE PRODUCTION
(délai, qualité ...)
LOGISTIQUE

Figure 3 – Produit vu par le fabricant Figure 4 – Produit vu par le client

J 8 000 – 4 Copyright © – Techniques de l’Ingénieur – Tous droits réservés

QT
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______________________________________________________________ USINE DU FUTUR. NOUVELLES APPROCHES DANS LES INDUSTRIES DES PROCÉDÉS

3.2.1 Clé du succès au niveau de l’entreprise


Ventes
Au niveau du producteur, la clé du succès commercial repose Phase Croissance Maturité Déclin
sur le « trépied » constitué par Marketing, R&D&Ingénierie, de
Production & logistique (figure 3) : lancement

– le marketing, a pour but l’analyse des marchés afin de détecter


les besoins des clients ;
– la recherche et développement (R&D) est chargée de concevoir
le produit et l’ingénierie (bureau d’études) doit définir l’outil indus-
triel et le faire construire ;
– la production et la logistique ont pour mission la réalisation du

produit et sa mise à la disposition du client, c’est la distribution.
Le succès nécessite la bonne coordination de tous ces moyens.
Temps
Si un « pied » du « trépied » est défaillant le succès commercial a cycle de vie d’un produit
est en péril.
Ventes

3.2.2 Produit vu par le client


Ce que le client veut c’est une ou des fonctionnalités. Il veut Ventes totales
également un produit le moins cher possible, être aidé en cas de Produit B
difficulté ne serait-ce que lors de sa mise en œuvre (figure 4).
Cette synergie producteur/client est relativement récente tout du Produit A Produit Produit
Produit
moins en France. Elle nécessite de la part du fournisseur de C E
D
connaître les métiers de ses clients, les technologies mises en
œuvre pour autant qu’elles lui sont accessibles ou qu’elles lui
soient dévoilées avec des clauses de confidentialité. Temps
Pour les spécialités et les produits de performance, les critères de
qualité nécessitent, en plus de la conformité à des critères phy- b part des produits dans le chiffre d’affaires d’une entreprise
sico-chimiques classiques (le bulletin d’analyse) et à des critères de
présentation (emballage), la satisfaction de tests de performance. Figure 5 – Couple produit-marché
Ces tests ne sont pas toujours accessibles au fournisseur : c’est
une difficulté supplémentaire.
L’analyse produits/marchés implique outre l’évaluation des CA,
On constate que si un pied de ces deux trépieds n’est pas solide, l’analyse de la pénétration (% des ventes/marché), l’analyse des
il y a contre-performance marges, l’analyse de la concurrence sans oublier la projection dans
La majorité des produits fournis par les industries de procédé le temps (évolution des marchés).
subissent souvent une transformation ultime et de ce fait sont les L’analyse est généralement conduite par pays, les pays en fort
composants de produits finis. développement présentant des cibles préférentielles et des risques
C’est ce que met en avant BASF le premier chimiste mondial : à évaluer.
on ne nous voit pas ! L’analyse de l’outil industriel est complexe, souvent difficile sur
le plan humain car elle implique parfois l’avenir d’employés qui
ont consacré de nombreuses années à leur entreprise.
3.3 Analyse stratégique de l’entreprise Il s’agit de voir l’adéquation entre les besoins commerciaux à
sous ses aspects industriels court, moyen et long terme et ce que l’outil industriel est capable
de fournir. Les aspects suivants sont à prendre en considération
L’entreprise baigne dans un milieu socio-économique aujourd’hui (figure 6).
mondial et de plus en plus incertain. Son objectif essentiel, c’est la
pérennité qui ne peut se concevoir sans juste profit. Le profit est non ■ Aspects produits
seulement indispensable pour rétribuer les actionnaires qui ont pris Ils répondent ou ne répondent pas aux besoins du marché en
des risques d’investissement, mais également et sinon plus pour qualité en volume.
faire évoluer, adapter les structures en permanence.
Ils ont un avantage concurrentiel, ont vieilli et la concurrence fait
Les investissements stratégiques et les investissements de main- mieux.
tien (pour garder les outils en bon état de marche) représentent une
part importante de l’activité de la fonction industrielle [12]. Ils sont conformes aux normes en vigueur (REACH, par
exemple). Ils sont condamnés à terme et il faut trouver des
Le couple produit-marché est à la base de l’analyse stratégique. produits de substitution. Ils sont fabriqués près ou loin des centres
L’entreprise faut-il le rappeler met sur des marchés les plus d’utilisation.
divers : cosmétique, pharmacie, aéronautique, BTP, transports,
alimentation... des produits censés répondre à des besoins. ■ Outil industriel, aspect moyens de production
Tout produit a une vie ; il naît, il vit, il meurt (figure 5). La caractéristique essentielle d’un atelier dépend du procédé uti-
lisé. Cependant, un bon procédé ne signifie pas obligatoirement
Le chiffre d’affaires CA d’une entreprise est constitué de produits une bonne usine. Le procédé mis en œuvre est au top niveau, il a
à des différents stades de leur vie. un avantage concurrentiel en terme de prix de revient ; il utilise
Il est intéressant de noter que l’efficacité de la R&D d’une entre- des matières premières renouvelables. Son empreinte écologique
prise peut se mesurer à l’aune de la contribution des nouveaux (gaz à effet de serre GES, rejets, déchets) est acceptable... ou
produits dans le CA. Une analyse plus fine détermine leur contri- l’inverse. Il a ou n’a pas la taille suffisante ou il a une capacité lar-
bution au bénéfice éventuel. gement excédentaire qui peut entraîner des frais fixes exorbitants

Copyright © – Techniques de l’Ingénieur – Tous droits réservés J 8 000 – 5

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Industrialisation des procédés et usine du futur
(Réf. Internet 42602)

1– Introduction R
2– Management de l'entreprise industrielle Réf. Internet page

Enjeux de la chaîne logistique - Supply Chain management AG5000 19

Architectures de pilotage de procédés industriels AG3510 21

3– Gestion de projet et ingénierie

4– Développement de produits

5– Gestion des risques

6– Développement durable et outils industriels

7– Production

8– Management du changement, progrès continu et


innovation

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agUPPP

Enjeux de la logistique

par Pascal EYMERY


Ancien élève de l’École polytechnique et de l’École des Mines de Paris


Ancien président de l’Aslog (Association française pour la logistique)
Partner d’Accenture

1. Évolution de la démarche logistique ................................................. AG 5 000 - 2


2. Les dimensions de la performance logistique ................................ — 3
3. Les modes opératoires de la chaîne logistique .............................. — 4
3.1 Planification................................................................................................. — 5
3.2 Réapprovisionnement et calcul des besoins............................................ — 5
4. Les systèmes d’information logistiques........................................... — 6
5. Les organisations de la logistique ..................................................... — 6
5.1 La logistique comme fonction ................................................................... — 6
5.2 L’externalisation .......................................................................................... — 7
Pour en savoir plus .......................................................................................... Doc. AG 5 000

a logistique est un enjeu stratégique majeur des entreprises industrielles et


L commerciales engagées dans des secteurs concurrentiels. C’est un véritable
gisement de valeur ajoutée auprès des clients sous forme de qualité de service,
de performance en délai et en réactivité. En outre, la logistique est un des lieux
principaux où se joue la rentabilité de l’entreprise, par l’optimisation des capa-
cités de production, des stocks et des coûts de distribution. Jadis, elle était
considérée comme une simple intendance nécessaire qui devait suivre la pro-
duction et permettre d’acheminer les produits. Désormais, elle est au centre des
projets de configuration des systèmes de production, de sourcing et de vente,
pour permettre leur compétitivité globale.
Cette tendance est encore renforcée par le contexte économique, dans lequel
les exigences se renforcent, où la mondialisation des échanges suscite des
réseaux internationaux, où les produits se diversifient et où leur cycle de vie
se raccourcit, où les partenariats de cotraitance entre entreprises se dévelop-
pent. En parallèle, de nouvelles opportunités sont offertes par l’évolution des
technologies et des méthodologies, en particulier en ce qui concerne les systè-
mes d’information qui tendent à renouveler les problématiques et les solutions.
Le présent article retrace l’évolution de la démarche logistique, pour ensuite
exposer les concepts de chaîne logistique ou « supply chain ». Il situe alors les
enjeux de la performance logistique. Le système d’information logistique est
abordé, ainsi que les composantes de l’organisation de la fonction logistique.
Le concept logistique est vu sous l’angle des phases successives du cycle de
vie des produits.
p。イオエゥッョ@Z@。カイゥャ@RPQS

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ENJEUX DE LA LOGISTIQUE ______________________________________________________________________________________________________________

1. Évolution Si la logistique prend du poids, c’est aussi en raison des évolutions


du contexte où se trouvent les entreprises : mondialisation et euro-
de la démarche logistique péanisation – d’où accroissement des échanges sur des distances
de plus en plus longues, offre plus riche en produits et services
variés, rapidité des délais exigés, modification des localisations de
Toute activité industrielle ou commerciale doit nécessairement production –, alors que, dans le même temps, les marges de manœu-
traiter des processus logistiques : enregistrer les commandes des vre pour gagner de la compétitivité se réduisent dans certains sec-
clients, distribuer les produits finis, gérer des stocks, planifier la pro- teurs en matière d’investissement, de différenciation technologique,
duction, s’approvisionner chez les fournisseurs. Quelle entreprise de productivité. À cela s’ajoutent des cycles de vie des produits de
n’est pas contrainte d’y consacrer des ressources importantes ? Et plus en plus courts, un impact toujours plus fort des cycles de la
ce depuis qu’il y a des entreprises et même depuis qu’il y a des conjoncture économique, des compétences technologiques plus
activités artisanales, industrielles ou commerciales, même si l’on ne spécifiques et plus internationales...
parle pas encore de logistique. L’origine du mot est militaire : la


Aussi l’évolution des organisations, des technologies, des stratégies
logistique des armées, c’est la mise en œuvre de l’ensemble des logistiques est-elle nécessaire pour, au-delà des modes et des
ressources matérielles pour soutenir les opérations. concepts habillés de nouveaux vocables, permettre aux entreprises de
La logistique [1] a longtemps été considérée, par les entreprises, progresser dans leur contexte concurrentiel, et aller toujours davan-
comme une fonction secondaire, limitée aux tâches d’exécution tage vers une logistique envisagée dans son ensemble, dans la globa-
dans des entrepôts et des quais d’expédition. Progressivement a lité de la chaîne, du premier des fournisseurs au consommateur final.
été mis en évidence son rôle clé de lien opérationnel entre les La chaîne logistique ou supply chain concerne un ensemble
différentes activités de l’entreprise, assurant la cohérence et la fia- d’entreprises clientes et fournisseurs les unes des autres, mais on
bilité des flux, en vue d’un service aux clients de qualité tout en peut aussi parler de supply chain interne à une entreprise pour
permettant l’optimisation des ressources et la réduction des coûts. l’ensemble des opérations successives qu’elle doit réaliser sur ses
Dès lors, la logistique est devenue plus conceptuelle et systémi- flux internes de produits : approvisionnement, transformation,
que, avec ensuite une sémantique nouvelle : chaîne logistique ou stockage, manutention, transport (figure 1)... Une certaine gestion
supply chain, c'est-à-dire chaîne complète d’approvisionnement, des flux existe dès que la moindre activité économique voit le jour,
chaîne de service. même artisanale. Mais ce sont les approches, organisations et tech-
Priorité désormais stratégique des entreprises industrielles et nologies qui diffèrent fortement d’une entreprise à l’autre et qui
commerciales, la supply chain recouvre l’ensemble de la chaîne de ont été marquées par une accélération forte des transformations
flux et des services permettant à une filière d’activité économique au cours de ces dernières années.
de satisfaire les besoins des consommateurs. Le concept de chaîne logistique permet un regard sur l’activité qui
Une enquête [2] a montré que 90 % des dirigeants des grandes ne se contente pas d’apprécier les choses à l’intérieur du seul
entreprises mondiales considèrent que la chaîne logistique périmètre d’une usine, par exemple, mais qui prend également en
est essentielle pour la réussite de leur entreprise. Ce degré d’impor- compte les clients et les fournisseurs pour trouver des solutions plus
tance est en augmentation durant ces trois dernières années pour optimales du point de vue de l’ensemble de la chaîne logistique :
87 % d’entre eux. meilleurs coûts, flexibilité, délais, qualité de service (figure 2).

Entreprise Entreprise Entreprise


amont aval

Atelier Atelier
Magasin amont Expédition
aval

Figure 1 – Chaîne locale

Centre de
distribution

Usine fournisseur Usine client

Usine

Entreprise

Sous-traitants
Dépôt fournisseur Magasin client

Figure 2 – Entreprise « virtuelle » ou étendue

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AG 5 000 − 2 © Techniques de l’Ingénieur

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Architectures de pilotage
de procédés industriels
par Pascal BERRUET


Maître de Conférences à l’Université de Bretagne Sud

Jean-François PETIN
Maître de Conférences au Centre de recherche en automatique de Nancy CRAN-UMR 7039
Nancy Université, CNRS

Fabien RIGAUD
Ingénieur commercial – ARC Informatique

Armand TOGUYENI
Professeur des Universités à l’École Centrale de Lille (EC Lille)

et Éric ZAMAÏ
Maître de Conférences HDR à l’Institut National Polytechnique de Grenoble

1. Architectures de contrôle et de commande..................................... AG 3 510 - 3


1.1 Éq uipements d’acquisition et de traitement ............................................. — 3
1.2 Réseaux informatiques ............................................................................... — 3
1.3 IHM................................................................................................................ — 3
1.4 Architectures de conduite ........................................................................... — 3
1.4.1 Architecture monoposte..................................................................... — 3
1.4.2 Architecture multiposte en parallèle ................................................. — 4
1.4.3 Architecture client-serveur................................................................. — 4
1.4.4 Architecture client-serveurs multiples .............................................. — 5
1.4.5 Architecture clients banalisés via WTS ............................................. — 5
1.4.6 Architecture clients Web banalisés.................................................... — 5
2. Système de pilotage de la production MES ..................................... — 6
2.1 Définition et objectifs d’un MES................................................................. — 6
2.2 Fonctions du MES........................................................................................ — 7
2.3 Flux d’informations ..................................................................................... — 8
2.4 Architectures d’intégration ......................................................................... — 9
3. Réactivité face à des pannes ................................................................ — 10
3.1 Commande................................................................................................... — 11
3.2 Surveillance.................................................................................................. — 11
3.3 Supervision .................................................................................................. — 11
3.4 Organisation des modules.......................................................................... — 11
3.5 Terminologie surveillance, supervision, commande................................ — 11
3.5.1 Fonctions de la surveillance [17] ....................................................... — 11
3.5.2 Fonctions de la supervision ............................................................... — 11
3.5.3 Fonctions de la commande................................................................ — 12
3.5.4 Récapitulatif des fonctions................................................................. — 12
4. Processus de reconfiguration............................................................... — 12
4.1 Définition ...................................................................................................... — 12
4.2 Contexte de la reconfiguration ................................................................... — 12
4.3 Mise en œuvre du processus de reconfiguration au niveau
de la commande .......................................................................................... — 13
4.3.1 Étape décisionnelle............................................................................. — 13
4.3.2 Étape opérationnelle .......................................................................... — 14
5. Conclusion ................................................................................................. — 16
p。イオエゥッョ@Z@ェオゥャャ・エ@RPPW

Références bibliographiques ......................................................................... — 19

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ARCHITECTURES DE PILOTAGE DE PROCÉDÉS INDUSTRIELS ____________________________________________________________________________________

epuis ces trente dernières années, le souci principal des industriels s’est
D porté sur une automatisation à outrance des procédés industriels afin
d’améliorer sans cesse la performance de l’outil de production. Tirant parti des
progrès technologiques dans le domaine de la communication, des
automatismes industriels (interfaces ou services Web embarqués dans les auto-
mates programmables industriels) ou encore dans les domaines de l’électroni-
que et de l’informatique (RFID, réseaux de capteurs, composants logiciels
embarqués...), ces systèmes automatisés intègrent aujourd’hui une part de plus
en plus importante de technologies de l’information et de la communication
distribuées au cœur même des processus de production et des produits. Mais
cette automatisation a un prix, celui de la complex ité du syst pilotage/  "
R tant sur le plan des éléments matériels hétérogènes (calculateurs dédiés,
réseaux de communication, chaînes d’actions et de captage...) qui le compose
que sur celui des fonctions logicielles (ordonnancement, commande, suivi,
diagnostic, reconfiguration, supervision...) qu’il abrite. Aussi, le besoin de
méthodes, ou au moins de retours d’expertises, permettant de mettre en
relation l’ensemble de ces éléments afin qu’ils contribuent encore à améliorer
les performances des entreprises devient prépondérant.
Afin de répondre à un tel besoin d’intégration de ces composants industriels,
le concept d’architecture de pilotage a été proposé.
Aussi, dans ce dossier, le lecteur découvre dans une première partie une
analyse de la nature même des architectures de contrôle et de commande de
procédés industriels. La deuxième partie décrit quant à elle les différentes
fonctions qui interviennent au cœur de ces architectures afin de contribuer au
processus global de pilotage temps réel. La troisième partie se focalise sur une
des facettes de ce processus de pilotage à savoir sa capacité à réagir aux aléas
de fonctionnement. Enfin, la quatrième partie donne un aperçu des approches
à ce jour proposées pour donner au processus de pilotage des capacités à
reconfigurer toute ou une partie de l’architecture physique et logicielle de
pilotage.

(0)

Sigle Développé Sigle Développé

AMR Advance Manufacturing Research OPC OLE (Object linking and Embedding) for Process
Control
B2B Business to Business
PID Proportionnel Intégral Dérivé
B2MML Business to Manufacturing Markup Language RDC Remote Desktop Connection

CIM Computer Integrated Manufacturing RdP Réseau de Petri

CPV Central Process Unit RTC Réseau téléphonique commuté

CRM Customer Relationship Management SCADA Supervisory Control and Data Acquisition

SCM Supply Chain Management


EAI Enterprise Application Integration
SFP Systèmes flexibles de production
ERP Enterprise Resource Planning
SIL Software Integration Level
IHM Interface Homme-Machine
TOR Tout ou rien
MES Manufacturing Execution System
UML Unified Modeling Language
MESA MES Association WSDL Web Services Description Language
MRPII Manufacturing Resources Planning II WTS Windows Terminal Serveur

OAGIS BOD Open Application Group Integration Specification, XML SOAP eXtended Markup Language Simple Object Access
Business Objects Definition Protocol

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___________________________________________________________________________________ ARCHITECTURES DE PILOTAGE DE PROCÉDÉS INDUSTRIELS

1. Architectures de contrôle de pesée dialoguant sur InterBus-S...). Ces informations sont


ensuite traitées cycliquement et séquentiellement par la partie
et de commande intelligente de l’automate (CPU) et mises à disposition dans une
table d’échange.
Le traitement, basé généralement sur un langage compatible
Piloter un processus automatisé, surveiller une gestion avec la norme IEC 61131-3 (Grafeet, Iadder... [22]), sera par exemple
technique centralisée, contrôler une ventilation de tunnel, un PID pour assurer la régulation de température d’un four, ou plus
superviser une détection incendie, voilà de nombreux cas parmi simplement une action directe sur un organe de conduite (démar-
tant d’autres où il est nécessaire de définir quelle architecture de rage moteur, pompe...). Les informations remontées dans notre
contrôle/commande [14] il est nécessaire de mettre en place. exemple seront donc la température du four ou l’état du moteur et
de la pompe (on/off). C’est ensuite la partie coupleur de communi-
cation de l’automate qui va jouer l’interface avec le réseau infor-


Mais tout d’abord faut-il définir ce que l’on entend par architec- matique pour faire circuler l’information vers les interfaces de
ture de contrôle/commande. Nous décrivons dans un premier conduites (superviseur, Panel PC...).
temps la partie automate ou plus généralement l’équipement qui
fait l’acquisition des informations terrains (vitesse d’un moteur,
position d’une vanne, état d’un ventilateur...) pour ensuite apporter 1.2 Réseaux informatiques
quelques précisions sur le réseau informatique permettant de faire
circuler l’information depuis l’automate jusqu’à un ou des PC. Il y a encore cinq ans nous aurions listé dans ce paragraphe de
Nous parlons ensuite de cette partie IHM (Interfaces Homme- nombreux types de réseaux informatiques permettant de
Machine) permettant d’afficher l’information, de l’enregistrer, de la connecter les équipements d’acquisition aux interfaces de
diffuser, de la traiter... Cette brève description de l’environnement conduite. L’arrivée au niveau industriel du réseau Ethernet TCP/IP
nous permet ensuite de dresser le portrait des architectures de est venue simplifier grandement la définition de ce paragraphe !
contrôle/commande que l’on retrouve dans l’industrie. En effet, ce réseau a fait son arrivée massive dans le monde indus-
Toute la difficulté lors de la conception d’un système de triel pour plusieurs raisons, entre autres le coût hardware du point
contrôle/commande est de choisir la bonne architecture permettant de connexion, la fiabilité et la disponibilité des matériels, la bana-
de respecter les multiples contraintes imposées par l’installation. lisation dans les PC standards de la connectique Ethernet...
Parmi les contraintes « habituelles », nous pouvons lister de façon La plupart des installations sont donc maintenant réalisées avec
non exhaustive : ce type de réseau, mixant éventuellement les protocoles couche 7
— les contraintes budgétaires ; du modèle ISO suivant les constructeurs d’automates [S 7 574].
— les contraintes d’exploitations (combien d’opérateurs pilotent
l’installation, de quel endroit, 24 h/24 h ou avec des phases
d’arrêts...) ; 1.3 IHM
— les contraintes fonctionnelles (tel traitement sécuritaire possi-
ble avec tel automate, taux de disponibilité de l’installation, capa- L’IHM (Interface Homme-Machine) est la définition que l’on
cité de gérer les modifications en ligne, unicité des bases de donne pour tout équipement (PC, Panel PC, pupitre opérateur, affi-
données automate/ supervision, rapidité et déterminisme du cheur multiligne...) capable d’afficher des informations sur le pro-
réseau de terrain...) ; cess en provenance du terrain. Pour assurer cette première
— la volonté d’utiliser les technologies les plus modernes des fonction de récupération des données, tous ces IHM ont une carac-
principaux systèmes d’exploitation comme Microsoft ou Linux afin téristique commune, celle d’intégrer un protocole de communica-
de garantir un maximum de pérennité de l’installation... tion sur réseau informatique (Ethernet ou autres). Ensuite, on
Malgré toutes ces contraintes, la définition de l’architecture de distingue, de par les fonctions couvertes par l’équipement, diffé-
contrôle/commande serait encore relativement simple si dans la rents niveaux de complexités et d’ouvertures.
plupart des cas toutes ces contraintes ne s’interposaient pas les L’équipement le plus simple est l’afficheur multiligne, ensuite le
unes contre les autres. pupitre opérateur qui peut afficher des synoptiques plus
Exemple : nous retrouvons souvent la volonté de piloter l’installa- complexes, gérer des alarmes, des courbes de tendances... Enfin,
tion depuis plusieurs postes ou de gérer une redondance mais le b ud- le superviseur, qui fonctionne sur un PC, est lui capable d’archiver
get ne le permet pa s... a
lors q
uelere sponsa ble qua
lité l’impose !! des informations, de fonctionner en clients/serveurs, de s’interfa-
cer avec un système niveau 3...
Nous nous attachons malgré tout dans ce dossier à lister les
architectures les plus fréquemment rencontrées dans le monde
industriel. Les architectures de contrôle/commande que nous décrivons
dans le paragraphe 1.4 sont donc celles mises en place avec un
Toutefois, il est à signaler que les technologies de l’informatique superviseur industriel.
grand public, évoluant à très grande vitesse, imposent un rythme
élevé d’innovations et d’évolutions qui se répercutent directement
dans le monde industriel, faisant donc évoluer jour après jour les
architectures de contrôle/commande ! 1.4 Architectures de conduite
Après avoir donc introduit les différents éléments qui composent
1.1 Équipements d’acquisition ces architectures de contrôle/commande, il devient intéressant de
et de traitement présenter comment ces éléments peuvent s’interconnecter, échan-
ger de l’information tout en respectant les contraintes listées en
introduction.
API, PLC, Automates [S 8 015]... tous ces termes désignent le
même objet : l’équipement d’acquisition et de traitement. Ces équi-
pements récupèrent l’information terrain via des cartes d’Entrées/ 1.4.1 Architecture monoposte
Sorties Analogique ou TOR (Tout ou rien) ou directement sur des
organes de conduites communiquant sur un bus de terrain (varia- Historiquement, la plus simple mais aussi la plus communément
teur de vitesse communicant sur Profibus DP ou Modbus, système utilisée parce qu’elle répond déjà à de nombreux critères cités en

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ARCHITECTURES DE PILOTAGE DE PROCÉDÉS INDUSTRIELS ____________________________________________________________________________________

Réseau informatique - MessagerieTCP/ IP


Superviseur

Serveur Client Client


Réseau industriel

Réseau
industriel

Automates

R Figure 1 – Architecture monoposte Automates

Figure 3 – Architecture client-serveur


Réseau informatique - Messagerie TCP/IP

1.4.2 Architecture multiposte en parallèle


SCADA SCADA
Pour répondre aux contraintes de disponibilité, il peut être néces-
saire de disposer de plusieurs postes de conduite (figure 2). Il s’agit
Réseau de la façon la plus simple et la moins onéreuse de fournir un mode
industriel
redondant. Plusieurs superviseurs banalisés, formant en général
une association, assurent la supervision et la conduite du procédé.
Des applications identiques s’exécutent en parallèle sur chaque
poste. Afin de garder une synchronisation entre les postes de super-
vision, les actions opérateurs (passage de commande, passage de
Automates consigne) et les acquis d’alarmes sont diffusés vers tous les postes
de l’association sur TCP/IP via le réseau local informatique.
SCADA Supervisory Control and Data Acquisition

Figure 2 – Architecture multiposte en parallèle Avantages de cette architecture :


— très bonne disponibilité par la redondance des postes ;
— plusieurs opérateurs peuvent conduire l’installation ;
introduction, l’architecture monoposte se définit de la façon — assez simple à mettre en œuvre.
suivante (figure 1) : Inconvénients :
— un superviseur ou pupitre opérateur ; — le protocole utilisé entre la supervision et les automates
— un ou plusieurs automates ; doit être multimaître ;
— l’ensemble interconnecté via un réseau de terrain de type — légèrement plus coûteux qu’une architecture monoposte ;
Ethernet par exemple. — des archives/historiques qui peuvent être désynchro-
nisées quand un des postes est arrêté.
Dans une configuration traditionnelle monoposte, le superviseur
gère l’ensemble des données automates ainsi que les opérations
de contrôle-commande opérateur. Le superviseur supporte en
général une base de données de plusieurs dizaines de milliers de 1.4.3 Architecture client-serveur
variables sur un seul poste.
L’architecture client-serveur est une solution pour les applica-
L’acquisition de données se fait grâce aux protocoles standards tions nécessitant plusieurs postes opérateurs, mais avec une seule
du marché principalement sur Ethernet TCP/IP mais également via connexion aux réseaux industriels (figure 3).
des Serveurs OPC (OLE for Process Control) du commerce.
Le serveur est un producteur de données qui communique avec
Dans des situations où les événements doivent être horodatés à les automates et diffuse les informations vers les postes clients
la source comme par exemple la supervision de distribution élec- souvent appelés postes consommateurs. La communication inter-
trique, le superviseur doit gérer des protocoles de communication postes TCP/IP fonctionne idéalement en mode événementiel et
véhiculant les données et leurs horodates avec une précision de la transmet par paquets les informations significatives.
milliseconde.
Le poste serveur peut être un poste d’exploitation ou un simple
Pour ce type d’architecture, au niveau du poste de conduite la frontal de communication, cela afin d’assurer un traitement rapide
majeure partie des éditeurs utilisent un environnement Microsoft des échanges avec le terrain. Il exécute tous les traitements
type Windows XP Pro. communs à l’application.

Avantages de cette architecture : Avantages de cette architecture :


— un coût réduit pour des fonctionnalités avancées par — capacité de gérer un process étendu physiquement avec
rapport à un pupitre opérateur ; plusieurs opérateurs de conduite ;
— une mise en œuvre simple et généralement robuste ; — réseau de communication entre le serveur et les automates
— une solution toutefois évolutive en fonction des produits moins chargé car un seul poste de supervision communique sur
utilisés. celui-ci.
Inconvénients : Inconvénients :
— une disponibilité relative faible (le PC hors service — un peu moins simple à mettre en œuvre ;
entraîne la perte de la supervision, l’installation) ; — point critique si le serveur est hors service car tous les
— un seul opérateur à la fois peut contrôler le process. postes clients deviennent « aveugles ».

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Industrialisation des procédés et usine du futur
(Réf. Internet 42602)

1– Introduction

2– Management de l'entreprise industrielle



3– Gestion de projet et ingénierie Réf. Internet page

Gestion des risques d'un projet SE2040 27

Réalisation de projets dans une société d'ingénierie AG3300 31

Management de projet. Les processus (d'après ISO 10006) AG3150 35

Management de projet. Cas d'une rainerie de pétrole AG3153 39

4– Développement de produits

5– Gestion des risques

6– Développement durable et outils industriels

7– Production

8– Management du changement, progrès continu et


innovation

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Gestion des risques d’un projet

par Alain DESROCHES


Professeur à l’École centrale Paris
Ex-expert en gestion des risques au Centre national d’études spatiales
Membre du Conseil scientifique de l’INERIS


1. Généralités ................................................................................................. SE 2 040 - 2
1.1 Définition de l’activité de projet .................................................................. — 2
1.2 Plan de développement d’un projet ........................................................... — 3
1.3 Description du processus de gestion des risques d’un projet ................. — 3
2. Gestion des risques génériques ........................................................... — 4
2.1 Définition des risques génériques acceptables ......................................... — 4
2.1.1 Éléments d’évaluation ........................................................................ — 4
2.1.2 Éléments de décision .......................................................................... — 4
2.2 Analyse, évaluation et traitement des risques .......................................... — 5
2.2.1 Identification des situations dangereuses......................................... — 5
2.2.2 Analyse des situations dangereuses et des risques associés ......... — 7
2.2.3 Définition et consolidation des actions résultantes
en réduction des risques ............................................................................. — 7
2.2.4 Gestion du risque résiduel ................................................................. — 8
2.3 Construction des cartographies des risques génériques ......................... — 8
2.3.1 Présentation......................................................................................... — 8
2.3.2 Cartographies des risques génériques relatifs
aux classes de danger ................................................................................. — 9
2.3.3 Cartographies des risques génériques relatifs
aux classes d’impact.................................................................................... — 9
3. Gestion des risques calendaires .......................................................... — 9
3.1 Définition des risques calendaires acceptables......................................... — 10
3.2 Évaluation des risques calendaires ............................................................ — 11
3.2.1 Évaluation des risques calendaires structurels ................................ — 11
3.2.2 Évaluation des risques calendaires conjoncturels ........................... — 12
4. Gestion des risques financiers ............................................................. — 14
4.1 Définition des risques financiers acceptables ........................................... — 14
4.2 Évaluation des risques financiers ............................................................... — 15
4.2.1 Évaluation des risques financiers structurels ................................... — 15
p。イオエゥッョ@Z@ッ」エッ「イ・@RPPX@M@d・イョゥ│イ・@カ。ャゥ、。エゥッョ@Z@ェオゥャャ・エ@RPQU

4.2.2 Évaluation des risques financiers conjoncturels .............................. — 16


4.2.3 Évaluation du risque financier global................................................ — 17
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. SE 2 040

oute entreprise pour exister et assurer sa pérennité, sinon sa survie, se


T doit d’entretenir des activités récurrentes et des activités nouvelles sous
forme de projets de recherche et développement aboutissant à la réalisation
et/ou à l’exploitation de produits.
La gestion d’entreprise, la gestion de projets, la gestion d’une installation ou
l’utilisation d’un produit génère des risques par les aléas mêmes du processus
de gestion. Ces risques, qu’ils soient positifs (on dit aussi spéculatifs), c'est-à-
dire volontairement pris par suite des gains espérés, ou qu’ils soient négatifs
par suite des nuisances engendrées et subies, dépendent essentiellement de la
nature de l’activité concernée et de la maturité du management. On peut
considérer qu’ils sont susceptibles d’influer sur tout ou partie de son déroule-
ment et en final sur ses objectifs.

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est strictement interdite. – © Editions T.I. S E 2 0 4 0 – 1

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GESTION DES RISQUES D’UN PROJET ___________________________________________________________________________________________________

Ainsi :
– pour une entreprise, les risques positifs induits par les décisions de ses
dirigeants pour son développement ou les risques négatifs qu’elle subit de par
son défaut d'organisation, la concurrence... peuvent améliorer ou contrarier
ses résultats et plus globalement sa pérennité ;
– pour un projet, les risques structurels induits par la mauvaise prise en
compte des exigences, la mauvaise organisation ou une technologie insuffi-
sante et les risques conjoncturels liés aux aléas du déroulement et à la
conduite du projet, peuvent contrarier l’atteinte de ses objectifs en termes de
performances, coûts et délais ;
– pour un produit, les risques induits par sa nature, son utilisation ou son
exploitation (installation) peuvent contrarier ses objectifs de vente ou de pro-
ductivité associés ou non à des objectifs de sécurité non tenus.
Le produit est le résultat d’un projet. L’exploitation elle-même peut être, en tout ou en partie, assimilée à une gestion
d’entreprise.

S Dans le cadre d’une politique industrielle existante, la gestion de projet est


l’activité associée au processus itératif mettant en interaction des ressources
techniques, financières et humaines pour atteindre des objectifs spécifiés par
le client en termes de performances techniques et opérationnelles et de sécu-
rité du produit associées au coût et au délai du projet.
Dans les grands projets, les objectifs de performances ne couvrent généralement que les exigences fonctionnelles et opé-
rationnelles (hors sécurité) du produit (par exemple sa disponibilité). Le niveau de sécurité du produit est défini par un
objectif spécifique et fait l’objet d’études particulières.

La stratégie mise en place par le responsable de projet pour y parvenir doit


prendre en compte les facteurs de risques, c’est-à-dire les incertitudes, les
sources de danger ou les perturbations qui existent structurellement avant et
au démarrage du projet et/ou qui peuvent survenir conjoncturellement
pendant son déroulement, en recherchant et maîtrisant celles susceptibles
d’entraîner l’échec de son projet.
Au démarrage d’un projet, les risques structurels sur le coût à l’achèvement et les délais prévus sont définis à partir des
performances spécifiées du système et de l’environnement contractuel de son développement.

La gestion des risques d’un projet vise à maîtriser l’ensemble de ces risques.
Suivant leur criticité, le traitement est individuel et spécifique ou, plus généra-
lement, global à travers les « marges ou provisions pour aléas » prises sur les
quatre composantes caractérisant les objectifs du projet. Il est complété par le
transfert financier des risques vers « un tiers » par la prise d’assurances
spécifiques.
Les analyses de risques sont concrétisées, en final, par l’élaboration de carto-
graphies des risques relatives aux neuf classes de dangers génériques,
présentés plus loin et de cartographies des risques des impacts sur les objec-
tifs du projet. La hiérarchisation des risques peut être alors faite sous forme de
« top ten des risques du projet » servant de base pour un traitement cohérent.
Un danger est un potentiel de dommage ou de préjudice pour les éléments du système et son environnement.

Ce guide présente la méthodologie de gestion globale des risques d’un


projet réalisé dans tout secteur d’activité industrielle.

1 . Généralités Suivant la nature et l’importance du produit à développer, plu-


sieurs types de projet sont possibles quant à leur organisation
interne, aux intervenants externes et à la gestion des interfaces
contractuelles.
1.1 Définition de l’activité de projet
De façon générale, une activité de projet peut être définie
comme un système formé de cinq sous-systèmes (ou interve-
Contrairement à une activité d’entreprise dont l’arrêt n’est pas nants pour quatre d’entre eux) :
programmé, une activité de projet a des dates, généralement
– le client : entité décisionnelle qui finance le projet ; elle peut
contractuelles, de début et de fin programmées. Un des objectifs
être le maître d’ouvrage ou l’autorité programme ;
du projet est alors de respecter ces dates.

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___________________________________________________________________________________________________ GESTION DES RISQUES D’UN PROJET

– le groupe projet : il est constitué des supports internes et/


ou externes et est placé sous la responsabilité d’un chef de pro- Décide et finance
jet désigné par une autorité de la compagnie ; 1’
– les industriels contractants (maîtres d’œuvre industriels et Utilisateurs 11’ Client 1
les sous-contractants) ; Exploitent
– le ou les sites d’installation du produit développé par le 21’ 2 12
groupe projet ; Organise
– l’utilisateur : il s’agit de l’exploitant du système que le client et conduit
met à disposition à la fin du développement, après la qualifica- Groupe 13
41’ projet
tion opérationnelle (QO). L’utilisateur qui a un rôle consultatif
peut faire partie ou non de l’entité client, mais il est inclu dans 14
Réalisent
le périmètre « client » dans la mesure où il exprime des 24 23
besoins agréés et financés par le client. Réalisent
Un système est l’ensemble d’éléments humains, techniques, 4
Industriels 35
Sites d’exploitation 34
financiers, commerciaux ou budgétaires... en interaction, orga- 5
3 Sous-
nisé pour réaliser un produit défini par ses fonctions et ses contractants
Accueillent
objectifs de performances dans des conditions économiques et
calendaires et des contraintes environnementales données.

Ce système est illustré figure 1.



interface contractuelle

1.2 Plan de développement d’un projet


interface non contractuelle
Les phases couvertes par l’analyse des risques sont celles du
développement classique du projet, regroupées dans le tableau 1.
Nota : les phases de développement d’un projet couvrent les activités et tâches Figure 1 – Organisation contractuelle d’un projet
suivantes :
0. Expressions du besoin ;
1. Spécifications et CdCF (cahier des charges fonctionnel...) ;
2. Contrats ;
3. Fournitures initiales ou en cours du client ;
4. Gestion de projet ; Tableau 1 – Phases de développement
5. Études ; d’un projet industriel
6. Réalisation ;
7. Assurance produit et sécurité ;
8. Réception usine – site d’exploitation du système ;
9. Qualification technique (QT) par des essais de validation techniques sur site des élé- Phases de projet
ments du système ;
10. Qualification opérationnelle (QO) par des essais de validation du système dans sa Objectif de la phase
configuration opérationnelle.
Nom Intitulé

1.3 Description du processus Définir le besoin et les exigences


Analyse de la
de gestion des risques d’un projet 0
mission
fonctionnelles et opérationnelles
du client
■ La gestion des risques d’un projet est globalement fondée sur
l’application systématique des cinq actions séquentielles Appréciation par le groupe projet de
suivantes : la faisabilité technique, financière et
A Faisabilité
– définir une stratégie de développement répondant à l’ensemble calendaire (dont les risques a priori )
des objectifs du projet ; du système
– identifier les problèmes liés à sa mise en œuvre ;
– évaluer leur impact sur le déroulement du projet ; Définition
Définir une version préliminaire
– définir et consolider les solutions appropriées ; B et conception
du système
– contrôler leur application dans le temps, jusqu’à une date défi- préliminaire
nie à l’avance.
Plus précisément, au regard des objectifs du projet préalable- Définir une version détaillée
Définition et
ment définis, la gestion des risques du projet est identique dans et prototypée du système montrant
C conception
son principe au processus classique (et invariant), en cinq étapes, que toutes les fonctions visées
détaillée
de la gestion des risques techniques et opérationnels, à savoir : seront réalisées
(1) Définition des objectifs ;
(2) Identification des incertitudes et analyse des risques associés ; Développement Réaliser, intégrer, valider et qualifier
D1
(3) Évaluation et hiérarchisation de leurs impacts ; et qualification une version industrielle du système
(4) Réduction des risques : définition et consolidation des actions D
de diminution des risques, évaluation et décision d’acceptabilité Développement Réaliser la version définitive
D2
des risques résiduels ; et fabrication du système
(5) Gestion des risques résiduels : le suivi et le contrôle de leur
application, que ce soit au niveau des sous-systèmes définis plus Exploitation Organiser et optimiser l’exploitation
E
haut ou de leurs interfaces (contractuelles ou non). ou production du système
L’activité de gestion des risques doit être initiée et maintenue
jusqu’à l’obtention de l’assurance que les risques résiduels évalués Démantèlement
Définir et réaliser le démantèlement
sont en cohérence avec les objectifs du projet. Le processus asso- F ou retrait
du système
cié à cette démarche est visualisé par la figure 2. de service

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GESTION DES RISQUES D’UN PROJET ___________________________________________________________________________________________________

2.1.1.1 Échelle de gravité


Identification
(2)
d’un facteur de risque
La gravité est une mesure des conséquences d’un événe-
ment indésiré contrariant la réussite des objectifs du projet ou
(3) Évaluation Évaluation de l’efficacité celui de l’étape considérée.
de la criticité du risque et de la pertinence de l’action

(1)
(4) Elle est définie de façon qualitative par une échelle (adaptable) à
Objectifs Criticité non Engagement d’une action cinq niveaux caractérisés, chacun, par un « index de gravité ». Elle
du projet acceptable ? de maîtrise des risques sert à caractériser les dégradations de performance ou les pertes
relatives au glissement des délais (retard) et des coûts (surcoût
oui technique et surcoût planning) par rapport au cahier des charges
ou aux spécifications. Un exemple d’échelle est donné dans le
(5) Gestion des risques résiduels
tableau 2.

Figure 2 – Étapes du processus de gestion des risques d’un projet 2.1.1.2 Échelle de vraisemblance


La vraisemblance est une mesure de la confiance dans
■ La gestion globale des risques d’un projet comprend quatre acti-
l’occurrence d’un événement indésiré, contrariant dans un scé-
vités distinctes et complémentaires :
nario la réussite des objectifs du projet.
– l’identification, l’analyse et le traitement des risques génériques
sur le processus même du projet relativement à l’ensemble des Elle est définie de façon qualitative par une échelle (adaptable) à
dangers auxquels sont soumises les étapes de son déroulement. cinq niveaux caractérisés, chacun, par un « index de vraisem-
Cette analyse de nature événementielle est semi-quantitative ; blance ». La valeur de cet index, subjective, est définie par un groupe
– l’identification, l’analyse et le traitement des risques sur les d’experts. Elle peut être associée à la fréquence ou à la probabilité
performances techniques et la sécurité du produit développé. d’occurrence de l’événement indésiré relativement à un ensemble
Cette partie correspond aux études d’ingénierie et de sûreté de de projets bien que les conditions de répétition soient difficiles à
fonctionnement (fiabilité, maintenabilité, disponibilité et sécurité). garantir. Un exemple d’échelle est présenté dans le tableau 3.
Elle est quantitative et ne sera pas abordée ici car développée dans
de nombreux ouvrages ;
– l’identification, l’analyse, l’évaluation et le traitement des 2.1.2 Éléments de décision
risques calendaires sur le processus de déroulement du projet ;
Les décisions sont prises à partir de la donnée de la criticité du
– l’identification, l’analyse, l’évaluation et le traitement des
risque, du tableau de criticité et des efforts à faire pour maîtriser le
risques financiers sur le processus de déroulement du projet.
risque.
De plus, le processus de gestion des risques doit être mis en Nota : la criticité du risque est la fonction implicite du risque (G, V) ; à ne pas
œuvre avant le démarrage du projet pour minimiser les risques confondre avec l’index de risque moyen, IR , évalué par le produit de l’index de gravité
structurels et son application à la maîtrise des risques par l’index de vraisemblance (IG , IV).
conjoncturels doit permettre de converger vers un risque accep-
table en fin de projet. 2.1.2.1 Classes de criticité
Nota : seules les valeurs des caractéristiques des événements futurs peuvent être La criticité du risque est une fonction du couple
considérées comme aléatoires. Il s’ensuit que toute valeur d’une caractéristique d’un évé- « vraisemblance-gravité » qui caractérise l’importance objective et
nement passé ou présent doit être considérée comme certaine et donc sans aléa.
subjective du risque donnée par la gouvernance du projet à ce
couple. Elle correspond à un niveau de risque préétabli par les
autorités de gouvernance de la compagnie ou la direction du pro-
jet auquel sont associées des décisions explicites (tableau 4).
2. Gestion des risques
génériques 2.1.2.2 Tableau de criticité
À partir des cinq classes de vraisemblance placées en ordonnées
et des cinq classes de gravité placées en abscisses, ainsi que de
La gestion des risques génériques a pour but d’identifier, d’ana- l’échelle de criticité, est élaboré le « tableau de criticité » ou
lyser, d’évaluer et de maîtriser les risques d’échec du projet asso- « tableau d’acceptabilité des risques » (cette action est faite par la
ciés au processus même de la gestion de projet. gouvernance du projet ou de l’entreprise qui l’héberge) ; ce
Les cinq étapes de réalisation de l’analyse des risques du projet tableau permet de définir a priori la criticité d’un événement
introduites plus haut sont précisées ci-dessous. redouté sur le projet à partir de sa vraisemblance et de sa gravité.
Un exemple de tableau de criticité est donné (tableau 5).
Nota : la différence entre criticité et index de risque moyen est visualisée dans le
2.1 Définition des risques génériques tableau 5 où la criticité du risque (G5, V2) est C3 et celle du risque (G2, V5) est C2.

acceptables
2.1.2.3 Classes d’efforts
Comme déjà mentionné précédemment, les objectifs de perfor- Pour réduire et contrôler les risques, les actions mises en œuvre
mance, de sécurité, financiers et calendaires doivent être atteints nécessitent des efforts pouvant aller du contrôle au changement de
en fin de projet. Leur définition est généralement faite à partir du stratégie et à la réorganisation du projet et des moyens. Ces efforts
retour d’expérience sur des projets antérieurs de même nature. passent généralement par des financements complémentaires à
ceux prévus et nécessaires au déroulement nominal du projet. Il est
clair qu’en fonction de l’effort défini en termes de bénéfice/risque
2.1.1 Éléments d’évaluation une action est décidée plutôt qu’une autre.
Les évaluations sont faites à partir des échelles de gravité et de Un exemple d’échelle d’efforts génériques est donné dans le
vraisemblance des risques. tableau 6.

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Réalisation de projets
dans une société d’ingénierie

par Marie-Christine CHARRIER


Ingénieur principal
Division Procédés et Technologies, société Technip

1. Rôle de l’équipe de projet...................................................................... AG 3 300 - 2



1.1 Organisation de base et principes d’exécution......................................... — 3
1.2 Activités au siège de la société d’ingénierie ............................................. — 3
1.3 Activités sur le site....................................................................................... — 5
2. Métiers et méthodes de l’ingénierie de projet ................................ — 6
2.1 Équipe Projet (phase ingénierie) ................................................................ — 7
2.2 Équipe Procédés .......................................................................................... — 7
2.2.1 Étude de base...................................................................................... — 7
2.2.2 Étude des utilités ................................................................................ — 10
2.2.3 Suivi ..................................................................................................... — 10
2.2.4 Démarrage........................................................................................... — 10
2.3 Division Études ............................................................................................ — 10
2.3.1 Département Coordination des études............................................. — 10
2.3.2 Département Équipements ................................................................ — 10
2.3.3 Département Installation et tuyauterie ............................................. — 11
2.3.4 Département Bâtiment et génie civil................................................. — 11
2.3.5 Département Instrumentation et automatismes.............................. — 11
2.3.6 Département Électricité...................................................................... — 11
2.3.7 Département Sécurité/Environnement industriel ............................ — 11
3. Principaux documents élaborés par une société d’ingénierie .... — 14
Références bibliographiques ......................................................................... — 15

L es entreprises industrielles possèdent, la plupart du temps, les installations


nécessaires pour fabriquer les produits qui mettent en œuvre leur
savoir-faire. Qu’il s’agisse de construire un nouvel atelier, de monter une usine
à l’étranger pour se rapprocher des marchés, de développer une usine exis-
tante ou de la diversifier, le maître d’ouvrage est confronté au dilemme
suivant :
— faire soi-même, c’est-à-dire devenir son maître d’œuvre, mettre en œuvre
pendant de nombreux mois les ressources dont il ne dispose pas la plupart du
temps en totalité, se lancer dans une aventure qui demandera une mobilisation
de moyens considérables et qu’il n’aura peut-être pas l’occasion de réemployer
après le démarrage de l’installation ;
— s’en remettre à une société d’ingénierie dont le métier est de savoir gérer
des corps de métiers différents, acheter, approvisionner, diriger des sous-trai-
tants, des chantiers, démarrer ou aider à démarrer.
Dans le premier cas, le maître d’ouvrage pourra et devra s’entourer des per-
sonnes qui ont participé au développement du produit ou qui connaissent les
techniques mises en œuvre. Dans le second, il remettra son « sort » entre les
p。イオエゥッョ@Z@ェ。ョカゥ・イ@RPPQ

mains d’une société d’ingénierie, en principe, en totalité s’il s’agit d’un contrat

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RÉALISATION DE PROJETS DANS UNE SOCIÉTÉ D’INGÉNIERIE __________________________________________________________________________________

dit clef en main. Dans ce cas, en effet, le maître d’œuvre est tenu de garantir
un résultat au risque de lourdes pénalités.
C’est la vocation des sociétés d’ingénierie de mettre à la disposition de leurs
clients :
— un savoir-faire dans leur domaine d’activité, qu’il s’agisse de raffinage,
pétrochimie, chimie, cimenteries, usine de transformation de plastiques, etc. ;
— des méthodes de travail éprouvées en management de projet. Rappelons
qu’un projet désigne en général l’exécution d’un objet unique (raffinerie, fabri-
que d’engrais, etc.) ;
— des ressources humaines dans une vingtaine de corps de métiers tels
qu’ingénieurs de procédés, ingénieurs de projets, spécialistes en génie civil, ins-
trumentation, électricité, tuyauterie...

S Les méthodes de travail, issues pour la plupart des États-Unis, qu’il s’agisse
de la mise en œuvre d’outils de planification (ordonnancement des tâches) ou
de contrôle des coûts, font de plus en plus appel à l’informatique aussi bien
pour la résolution de problèmes techniques ou de problèmes de management.
Il est important que le client comprenne comment fonctionne une société
d’ingénierie.
Le document de base (basic engineering) contient son savoir sous forme de
schémas de principe, de description du procédé, de spécifications simplifiées
du matériel principal.
C’est le travail de la société d’ingénierie de passer de ce document à une
usine qui fonctionne en sécurité, avec les performances garanties et cela dans
un temps minimal et au moindre coût.
Comprendre ce qui se passe « derrière le rideau », pourquoi il faut une mul-
titude de plans, pourquoi il faut commander de modestes boulons à côté de
matériels sophistiqués, c’est pénétrer le travail des sociétés d’ingénierie dont
le succès tient, entre autres, à l’attention portée au moindre détail.
L’objet de cet article est de « démystifier » ce travail difficile, parfois réalisé
dans des conditions rendues délicates par le lien de construction mais travail
passionnant.
Pour ce faire, nous prendrons comme exemple, tout au long de cet exposé,
le cas d’une section de strippage (stripping) d’essence courante dans l’industrie
du raffinage du pétrole, afin de présenter différents plans de réalisation élabo-
rés pendant les projets d’ingénierie.
Nous espérons que cet article aidera à améliorer la coopération client-société
d’ingénierie pour leur profit mutuel.

Dans cet article, nous donnons systématiquement entre parenthèses et en italique les termes
anglais couramment utilisés dans la profession.

1. Rôle de l’équipe de projet C’est le rôle essentiel des sociétés d’ingénierie de gérer les dif-
férents corps de métiers nécessaires pour réaliser le projet dans le
temps prévu, pour le prix demandé et pour la qualité requise, ces
trois données ayant été âprement négociées entre le client et la
Une société d’ingénierie est le maître d’œuvre chargé par un société d’ingénierie lors de la phase commerciale qui a précédé la
client, maître d’ouvrage, de réaliser des projets industriels extrê- signature du contrat.
mement variés aussi bien par leur montant, qui peut aller de
Si l’un de ces critères n’est pas respecté à l’issue du projet, le
quelques millions à plusieurs milliards de francs, que par leur
client pourra exiger des compensations financières en accord avec
complexité technique.
le contrat qui stipule les pénalités en cas de retards, de surcoûts
Tout projet important met en œuvre une grande palette de corps ou de mauvais fonctionnement.
de métiers pour la conception, les études de détail, l’achat et C’est le rôle clé de l’équipe de projet, mobilisée au début du
l’approvisionnement du matériel, la construction sur le site et, contrat, de piloter l’exécution du projet sur la base de principes
enfin, le démarrage de l’installation [1]. d’organisation, de gestion et de maîtrise d’œuvre.

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__________________________________________________________________________________ RÉALISATION DE PROJETS DANS UNE SOCIÉTÉ D’INGÉNIERIE


Représentant
du client

Client

Direction de la Administration
Directeur de projet
société d'ingénierie Autorités locales
(project director)
(management) (external authorities)

Responsable
administratif
Responsable qualité
(project
Société d'ingénierie

(quality manager)
administration
manager)

Estimateur contrôle
des coûts
(project controls
Secrétariat
(project secretariat)

manager)

Responsable Responsable de la Responsable Coordinateur Responsable


approvisionnement sous-traitance ingénierie de projet construction sur site Responsable
construction au siège
(project procurement (project subcontracts (project engineering (construction démarrage
(home office
manager) manager) manager) manager) (commission/
construction
start up manager)
coordinator)

Entre parenthèses sont indiqués les termes anglais, couramment utilisés dans la profession.

Figure 1 – Organisation générale d’un projet de réalisation

1.1 Organisation de base ■ Études de conception et de détail : élaboration de la


schématique
et principes d’exécution
Dans cette phase, les principaux spécialistes de la société d’ingé-
nierie interviennent de façon très organisée avec une gestion des
Dès que le contrat entre en vigueur, un directeur de projet est interfaces entre services assurée par le directeur de projet. Les
désigné pour diriger toutes les étapes du projet industriel. Il principales activités mises en œuvre (figure 3) sont les suivantes :
s’entoure d’une équipe de projet pour mener à bien toutes les pha- — le procédé (process ) ;
ses, conformément aux spécifications, à l’assurance qualité et aux — les études des équipements et de la tuyauterie ;
règles de sécurité. La figure 1 illustre une composition type. C’est — le génie civil et l’étude des structures ;
de sa responsabilité d’établir un plan d’exécution qui souligne les — l’instrumentation ;
points clés et les événements critiques du projet. Il se doit égale- — l’électricité ;
ment de définir une stratégie d’exécution qui permet de minimiser — la sécurité.
les risques et d’atteindre parfaitement les demandes contrac-
tuelles. Un projet industriel s’exécute en plusieurs étapes, d’abord Les différents acteurs de cette phase essentielle du design
dans les bureaux de la société d’ingénierie, puis sur le site de la élaborent les documents clés comme, par exemple, les spécifica-
construction. tions du matériel, les dossiers pour appel d’offres, les dossiers
pour achat et tous les plans, tracés et schémas nécessaires à la
En même temps, des spécialistes sont sélectionnés pour appor- définition de l’installation industrielle. Tous ces documents sont
ter leur savoir-faire au projet au moment voulu. Un planning d’exé- révisés au cours de l’étude jusqu’au stade final, appelé « bon pour
cution qui montre l’enchaînement des différentes étapes est alors exécution ».
établi ; la figure 2 en donne un exemple.
Chaque discipline est organisée et gérée par un manager spécia-
liste qui est responsable de la découpe des tâches, du bon dérou-
lement et du transfert d’informations entre la direction de projet et
les autres services.
1.2 Activités au siège de la société
d’ingénierie ■ Études liées à la sécurité et à l’environnement
Dès le début de l’exécution du contrat, les aspects sécurité et
environnement sont examinés par les spécialistes. Les différents
Les phases de dimensionnement (design phase ) et d’achat du
travaux de design sont régulièrement soumis à un audit interne
matériel (procurement ) sont généralement réalisées dans les
pour s’assurer du respect des normes concernant les spécifications
bureaux de la société d’ingénierie (home office activities ).
et la sécurité. Une analyse des plans de circulation des fluides (PID,
Les activités suivantes y sont exécutées. piping and instrumentation diagram ) représentant fidèlement l’ins-

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Management de projet
Les processus (d’après ISO 10006)
par Jean LE BISSONNAIS
Ingénieur de l’École centrale de Paris. Génie maritime (civil)
Président d’honneur de l’AFITEP
Ancien directeur de projet et responsable du contrôle de projets
dans plusieurs sociétés d’ingénierie

1. Périodes principales du projet ............................................................. AG 3 150 - 2 S


2. Principes de classement ........................................................................ — 3
2.1 Classement par nature des processus ....................................................... — 3
2.2 Classement suivant le cycle de vie du projet ............................................ — 4
3. Processus stratégiques .......................................................................... — 4
4. Processus de management des objectifs.......................................... — 5
4.1 Objectif de contenu ..................................................................................... — 5
4.2 Objectif de coût............................................................................................ — 6
4.3 Objectif de délai ........................................................................................... — 7
4.4 Objectif de qualité........................................................................................ — 7
5. Processus de management des moyens............................................ — 9
5.1 Management de la communication ........................................................... — 9
5.2 Management des ressources financières et matérielles .......................... — 10
5.3 Management des relations humaines ....................................................... — 10
5.4 Management des processus d’acquisition ................................................ — 11
6. Management des processus techniques ........................................... — 12
7. Management des processus d’intégration........................................ — 13
8. Management des risques ....................................................................... — 15
9. Conclusion ................................................................................................. — 16

Pour en savoir plus ............................................................................ AG 3 155

ans les ouvrages traitant du management en général, la place accordée au


D management de projet est assez modeste. Bien qu’il soit pratiqué implicite-
ment depuis des siècles, il y est d’ailleurs souvent présenté comme une nova-
tion. Cela est dû à la multiplication récente des projets, imposée par l’accrois-
sement de la concurrence et la complexité des nouvelles techniques. On a, dès
lors, distingué, dans le management de l’entreprise, le mode opérationnel et le
mode entrepreneurial [AG 10]. Néanmoins, peu d’auteurs soulignent que, entre
ces deux modes, il existe une différence de nature.
Le management opérationnel est destiné à pérenniser un organisme, en lui
donnant les moyens d’une stabilité (souvent lentement évolutive), reposant sur
la répétition d’actions connues et optimisées, ce qui permet d’acquérir une cer-
taine sécurité.
Le management de projet se fixe au contraire pour objectif le passage pour
l’entreprise d’un état stable à un autre, espéré meilleur : il agit dans un contexte
incertain, avec des moyens temporaires. Il y a discontinuité.
p。イオエゥッョ@Z@ェ。ョカゥ・イ@RPPP

Entre les deux modes de management existe la même différence qu’en physi-
que entre l’étude des régimes transitoires et celle des phénomènes permanents.

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SU
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MANAGEMENT DE PROJET ______________________________________________________________________________________________________________

Les deux ne relèvent pas de la même logique. Le management opérationnel


relève d’une logique déterministe ou, au moins, statistique ; le management de
projet se situe dans un contexte le plus souvent imprévisible et plutôt chaotique.
La caractéristique essentielle d’un projet est donc d’être une activité tem-
poraire, avec un début et une fin, un objectif de résultat identifiable et des res-
sources permettant un bilan individuel (déconnecté du bilan général de
l’entreprise). Le projet est également singulier (deux projets ne sont presque
jamais identiques), novateur et plus ou moins complexe (nombre et imbrication
des parties prenantes).
Il s’inscrit néanmoins dans le développement d’un programme de manage-
ment de l’entreprise, entre les phases de recherche et celles de production.
Le lecteur pourra se reporter utilement à l’article [T 7 700] Gestion de projet et pour les diffé-
rents modes de management à l’article [AG 10] L’entreprise industrielle.


1. Périodes principales ● Dans beaucoup de secteurs industriels, le directeur de projet
est appelé représentant du maître d’ouvrage, le (ou les) chef(s) de
du projet projets, représentant(s) du maître d’œuvre.
Dans le cas particulier du BTP (Bâtiment - Travaux publics), la loi
« MOP » (Maîtrise d’ouvrage publique), définit précisément le rôle
■ Le projet se présente souvent comme une séquence d’événe-
et les responsabilités de l’un et de l’autre, et interdit la confusion des
ments et d’activités qui ne sont pas nécessairement exécutées
rôles, ce que l’on rencontre quelquefois dans les projets privés,
par les mêmes opérateurs. On peut, presque toujours, distinguer :
surtout les petits.
— une première période, qui va de l’idée initiatrice du projet à la
décision formelle de le réaliser ; Cette distinction est également souvent nécessaire dans les
— une seconde période, qui va de cette décision à la mise en uti- autres secteurs d’activité. On peut la schématiser par la figure 1, qui
lisation du résultat. montre les phases du projet. Chaque période peut d’ailleurs se frac-
Il peut y avoir recouvrement entre ces deux périodes. tionner en un plus grand nombre de phases que sur le schéma.
● La première période est entièrement menée sous la responsabi-
lité de l’organisme qui va en décider, qui en sera souvent (mais pas ■ Par ailleurs, si la première période est sensiblement analogue
toujours) le propriétaire et l’exploitant (directement ou non). Diffé- dans tous les types de projets, (cohérence, pertinence, consistance
rentes parties prenantes peuvent participer à cette décision qui doit du projet) la seconde période est assez différente selon que l’on se
conduire, entre autres, à la définition plus ou moins élaborée des trouve dans un projet « ouvrage » ou dans un projet « produit ».
objectifs du projet et à la désignation d’un représentant officiel du
● Le projet d’ouvrage a pour objectif la construction d’un objet
groupe décisionnel, le directeur du projet.
unique, pour un maître d’ouvrage unique, par un maître d’œuvre
Beaucoup de projets ont achoppé sur ce point, lorsque le direc- unique ; le rapport client-fournisseur très personnalisé qui s’ensuit
teur de projet n’est pas investi de pouvoirs suffisants et clairs vis-à- doit aboutir à une réalisation qui portera toute son existence la cica-
vis de ses mandataires. trice d’éventuels « ratés » (même corrigés) du projet.
● La seconde période couvre l’activité des réalisateurs, qui
œuvrent à l’exécution sous la responsabilité d’un ou plusieurs chefs C’est le cas des ouvrages d’infrastructure, des installations indus-
de projet. trielles, des navires, des logiciels spécifiques, etc.

Étude préliminaire Décision Développement – Réalisation Utilisation


Fin du
Idée de
1re période 2de période projet
réaliser

Validation par
le client

Service
Cohérence après-vente
Cahier des Études Document Réalisation Produit
Opportunité Action
charges d'exécution d'exécution Mise en service utilisable
Faisabilité

Désignation
Accord du
de l'équipe
client
de projet

Figure 1 – Phases du projet

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______________________________________________________________________________________________________________ MANAGEMENT DE PROJET

dans le projet, d’en « pousser » certains jusqu’à la rupture, etc., pour


Historique obtenir un modèle aussi parfait que souhaité.
C’est le cas des productions d’appareils électromécaniques, des
■ Les managers et les gestionnaires de projet se sont regrou-
véhicules de série, des produits de grande consommation, des
pés depuis une quarantaine d’années en associations profes-
progiciels commercialisés, etc.
sionnelles, ayant pour objectif de faire reconnaître l’originalité
des métiers nouveaux, apparus en raison des spécificités expo- ● Les phases que l’on peut distinguer dans la seconde période
sées dans le paragraphe 1. pour ces deux cas sont différentes, mais leur approche relève
cependant de la même méthode. Il y a donc lieu de réfléchir aux
● Au niveau international, l’IPMA (International Projet Mana-
traits généraux de cette méthode et de l’expliciter.
gement Association) regroupe 40 000 personnes, adhérentes à
27 associations nationales ; elles consacrent leur activité au L’article [T 7 700] expose le déroulement général du projet, le
management de projet, considéré essentiellement sous l’angle présent fascicule aborde le problème sous l’angle des processus.
stratégie et direction. Le texte qui suit est inspiré du livre « Mise en application de la
Parallèlement, l’ICEC (International Cost Engineering Council ) norme ISO 10006 », [6].
est une fédération de 26 associations nationales se réclamant de
plus de 60 000 adhérents ; leur programme est principalement
tourné vers la gestion de projet.


● En France, l’AFITEP (association francophone de manage-
ment de projet) représente ces deux fédérations internationales, 2. Principes de classement
avec, à ce jour, plus de 1 000 membres.
● Plus spécifiquement américain, bien qu’ayant essaimé dans
beaucoup d’autres pays, le PMI (Project Management Institute)
poursuit des objectifs similaires. 2.1 Classement par nature des processus
■ Toutes ces associations ont réfléchi à la nature complexe du
management de projet et ont publié des analyses et des descrip-
tions de ses composants. ■ L’originalité et l’intérêt de la norme ISO 10006 viennent de ce que
Ces études ont trouvé leur aboutissement dans un document ce document analyse tout projet comme un système complexe de
émis par l’ISO (International Standard Organization), relayé processus interactifs, que l’on peut étudier individuellement ou
dans chacun des pays membres par l’organisme national de considérer dans leur ensemble, par leurs résultats.
normalisation (en France, l’AFNOR). Ce document porte la réfé- ● Chaque processus (figure 2) est lui-même un sous-système
rence ISO 10006 Lignes directrices pour la qualité en manage- temporaire qui fournit des éléments sortants (extrants : produits,
ment de projet. documents, instructions) à partir d’éléments d’entrée (intrants :
matériaux ou information) grâce à des outils, des méthodes et des
● Le projet de produit a pour but la mise au point d’un objet
ressources, et sous l’impulsion d’un responsable pilote.
(matériel ou immatériel) qui sera ensuite réalisé en plus ou moins Les extrants d’un processus sont les intrants des processus
grande quantité sur le modèle du prototype choisi, après mise au suivants, jusqu’à l’extrant final, qui est l’ouvrage produit par le
point. On peut se permettre d’inclure plusieurs prototypes différents projet.

Pilotage du processus

Mise en œuvre du processus :


Entrées (input, intrants) Produit (output, extrant)
outils et méthodes


Contraintes :
– de temps
– de lieu Moyens (ressources) :

– humains
– physiques
– financiers
– matériels

Figure 2 – Notion de processus


Contraintes d'environnement
appliquée à tous types
d’activités

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MANAGEMENT DE PROJET ______________________________________________________________________________________________________________

Référenciel :
modélisation Prévision de l'état
Début Comparer
des objectifs final des objectifs
(planification)

Décision du chef de Compte-rendu des


projet : résultats

– tout va bien
Vérifier la – modifier l'action Action de l'équipe
possibilité – modifier la référence projet
– arrêter le projet

S Fin de projet
Figure 3 – Cycle d’exécution
d’une phase

● Cette présentation très conceptuelle et banale s’éclaire et conclusion, constatant la fin du projet (figure 3). Ce cycle peut se
devient utile dès que l’on aborde le contenu des processus. Ceux-ci répéter plusieurs fois au cours de la vie d’un projet.
ont été regroupés par nature d’activités : La particularité du projet, régime temporaire comme nous
— des processus stratégiques (§ 3), qui permettent de décider l’avons dit dans l’introduction, est que la comparaison entre le
des projets et de les piloter ; réalisé et le planifié, à un instant intermédiaire, est d’un intérêt
— des processus de management des objectifs (§ 4), pour main- médiocre. On souhaite savoir où l’on arrivera, si l’on continue sur la
tenir les projets dans le cadre (contenu, coût, délai, qualité) défini trajectoire actuelle, et l’écart possible par rapport à l’objectif prévu.
pour répondre aux besoins qui les ont suscités ; La gestion de projet n’est donc, par nature, pas seulement factuelle,
— des processus de management des moyens (§ 5), (financiers, mais surtout prévisionnelle. D’où la nécessité d’utiliser des
humains et matériels, acquisitions et communication), pour les utili- éléments virtuels, pour anticiper l’évolution et, en particulier, les
ser avec une efficience maximale ; interactions des processus les uns sur les autres, ainsi que le retour
— des processus de management technique (§ 6), spécifiques à éventuel sur la planification, par itérations successives.
la nature du projet ;
— des processus d’intégration (§ 7), qui donnent cohérence et
efficacité aux processus opérants ; C’est sur la base de cette double classification des processus,
— des processus de management des risques (§ 8), pour piloter par systèmes fonctionnels et par situation opérationnelle, que
la réalisation sans encombre. l’ISO et les professionnels du management de projet ont expli-
cité les divers processus, dont on rappelle brièvement les carac-
■ L’ouvrage résultant du projet peut être comparé à un satellite qui téristiques principales, pour aider à l’interprétation des cas,
doit être mis en orbite par un lanceur, qui serait le projet. traités dans les fascicules suivants. Le codage utilisé pour les
Pour que le satellite soit exploitable, il faut évidemment qu’il soit processus est, à quelques ajouts près, celui de la norme
bien conçu. ISO 10006, il ne correspond pas tout à fait à la logique de
l’exposé, mais l’auteur a cru devoir le respecter.
Il faut aussi que le lanceur fonctionne correctement entre le top du
A chaque processus, on indique les intrants et extrants princi-
départ et la mise en orbite ; mis à feu par les décisions prises au
paux, ainsi que leur finalité et les moyens nécessaires à leur
cours des processus stratégiques, il est animé par l’équipe de projet
exécution.
qui assure l’intégration et la coordination des diverses activités qui
alimentent le moteur : tâches techniques, tâches de gestion des
objectifs, tâches de gestion des moyens.
Le guidage est assuré par le management des risques.
3. Processus stratégiques
2.2 Classement suivant le cycle de vie
La figure 4 montre le développement des processus stratégiques,
du projet de l’idée initiale au lancement de la réalisation.
Tout projet naît d’une idée qui a germé au sein d’une cellule suffi-
On peut envisager le cycle d’une phase de gestion de projet sous samment influente auprès des organes décisionnels : service
un autre angle. En effet, d’une façon générale, gérer, c’est comparer commercial, R et D (Recherche et Développement), comités stratégi-
la réalité avec le programme que l’on souhaitait réaliser, et prendre ques, etc.
les actions correctives en cas d’écart. ■ L’idée ne devient projet qu’après être reçue, et se doit d’être sou-
Dans le cas du projet, la gestion, après un processus de lance- mise à une analyse ou examen de cohérence (processus 2.1) :
ment, comporte donc des processus de planification, pour préciser conformité avec les objectifs stratégiques de l’entreprise, avec ses
ce que l’on attend du projet, des processus d’exécution, pour le moyens actuels, avec son marché, son environnement et avec la
réaliser, et des processus de maîtrise, pour comparer le réalisé au concurrence d’autres projets, pour l’affectation des moyens néces-
planifié, et, s’il le faut, réagir ; le tout doit aboutir à un processus de saires à son développement. Le processus à ce niveau est essentiel-

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Management de projet
Cas d’une raffinerie de pétrole
par Jean LE BISSONNAIS
Ingénieur de l’École Centrale de Paris – Génie maritime (civil)
Président d’honneur de l’AFITEP
ex-Directeur de projet et Responsable de contrôle de projets dans plusieurs sociétés
d’ingénierie

1. Exposé du contexte ................................................................................. AG 3 153 – 2 S


1.1 Description de l’ouvrage à réaliser et du site............................................ — 2
1.2 Répartition préliminaire des tâches ........................................................... — 4
2. Lancement du projet ............................................................................... — 4
3. Planification du projet............................................................................ — 6
3.1 Organigramme des tâches (OT).................................................................. — 6
3.2 Planification d’ensemble et ordonnancement des tâches
(Master schedule) ........................................................................................ — 7
3.3 Budget et ressources................................................................................... — 8
3.4 Planifications des achats ............................................................................. — 12
3.5 Plan de communication .............................................................................. — 13
3.6 Plan qualité................................................................................................... — 13
3.7 Plan de management des risques .............................................................. — 14
4. Lancement de la réalisation.................................................................. — 14
5. Déroulement du projet ........................................................................... — 14
5.1 Études générales et coordination de projet .............................................. — 14
5.2 Sous-ensemble génie civil/BTP .................................................................. — 14
5.3 Sous-ensemble « atelier procédés » .......................................................... — 15
5.4 Sous-ensemble « ateliers utilités » ............................................................ — 15
5.5 Sous-ensemble « stockages »..................................................................... — 15
5.6 Rapport d’avancement ................................................................................ — 15
6. Conclusion ................................................................................................. — 17
7. Annexe 1. OTP des sous-ensembles.................................................... — 18
8. Annexe 2. Exemples de fiches descriptives de lots de travaux .. — 20
9. Annexe 3. Exemples de fiches signalétiques de risque ................. — 24

our illustrer le cas d’un grand projet, nous avons choisi un projet assez
P important et complexe, le cas d’une raffinerie de pétrole, qui représente un
bon exemple des problèmes auxquels se trouve confrontée l’équipe en charge
du projet. Dans un tel projet, on rencontre nécessairement tous les processus
décrits dans l’article [AG 3 150].
Nous ne reprendrons pas la description détaillée des opérations courantes, qui
sont suffisamment illustrées dans les articles [AG 3 151] et [AG 3 152], traitant
respectivement des cas d’un petit projet et d’un projet de taille moyenne tirés de
situations réelles. Il est bien évident qu’elles doivent être réalisées également
pour le cas des grands projets, avec souvent un degré de complexité bien supé-
rieur. En particulier, les opérations qui précèdent la décision de réalisation ne
sont pas décrites : analyses de faisabilité, administrative, commerciale, écono-
p。イオエゥッョ@Z@ッ」エッ「イ・@RPPQ

mique, financière, géographique, juridique, sociologique, technique. En effet, les


tâches les plus caractéristiques et les plus difficiles dans le cas étudié sont celles

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MANAGEMENT DE PROJET ______________________________________________________________________________________________________________

d’organisation, de planification et de lancement, que nous approfondirons


(autant que faire se peut dans le cadre d’un article comme celui-ci).
Nous prenons le projet au moment où le Conseil d’administration, au vu du
résultat positif des analyses ci-dessus, a décidé de lancer la construction de la
raffinerie et a désigné un chef de projet (qui peut porter le titre de directeur).
Dans un projet d’une telle dimension, le rôle de l’équipe de projet, et en premier
lieu de son chef, est beaucoup plus relationnel et politique que d’intervention per-
sonnelle et d’opérations directes, qu’elles soient techniques ou administratives.
Néanmoins, pour remplir correctement leur rôle, les membres de cette équipe
doivent connaître suffisamment la nature des questions techniques qui se pré-
sentent. C’est pourquoi nous donnons quelques précisions sur le contenu phy-
sique du projet. Chacune de ces précisions représente une hypothèse, donc un
risque potentiel, à analyser dans la phase de management des risques.
Dans un autre cas, il faudrait procéder à une analyse du même genre, avec le

S même souci de comprendre l’environnement technique. C’est donc l’ensemble


des tâches propres au chef de projet et à son équipe directe qui sont étudiées dans
cet article, à l’exclusion des tâches du maître d’ouvrage et des autres intervenants.
Le lecteur se reportera à l’article [AG 3 150] « Les processus » (d’après ISO 10 006)
pour la définition et présentation des divers processus, qui seront rappelés par [pro-
cessus x] dans ce fascicule.
Il se reportera également aux articles :
[AG 3 151] « Cas d’une coopérative agricole » (de petite taille)
[AG 3 152] « Cas d’un projet en joint-venture » (de taille moyenne)
pour l’illustration des opérations courantes (faisabilité, rentabilité…).

1. Exposé du contexte turbée pendant les deux mois de la saison des pluies (juillet/août) ;
il arrive même que les crues du Solianka coupent la route entre
Kumpt Harbour et le site.
● Outre le terrain nécessaire à l’implantation de la raffinerie, la
1.1 Description de l’ouvrage à réaliser PhilékistanTypol Co a acquis une zone contiguë suffisante pour le
et du site stockage du matériel et les installations provisoires de chantier
(bureaux, ateliers, camp pour la main-d’œuvre de construction). La
La société pétrolière Typol, au vu des études de faisabilité et de ville de Kumpt Harbour ne disposant pas de ressources suffisantes,
rentabilité, a décidé la construction d’une raffinerie nouvelle, pour le elle a également acquis dans l’arrière-pays des terrains bâtissables
compte de l’une de ses filiales (Philékistan Typol Co), dont le siège pour des logements prévus, dans un premier temps, pour le person-
est au Philékistan ; cette raffinerie sera implantée sur un site vierge, nel de supervision de la construction (expatriés Typol et principaux
à proximité de Kumpt Harbour, port important disposant d’un quai sous-traitants, responsables locaux) et, ultérieurement, pour le per-
et de moyens de manutention suffisants pour le déchargement de sonnel d’exploitation.
tout le matériel importé. Il a été convenu avec les autorités locales ● Ce personnel sera essentiellement recruté au Philékistan, mais
que le pétrole brut pourrait ultérieurement être également déchargé devra être formé ; en particulier, il faudra prévoir pour l’encadre-
à Kumpt Harbour, sur un quai disponible, mais actuellement non ment des stages de six mois à 1 an dans les raffineries métropoli-
équipé à cet effet ; il faudra construire un oléoduc du port au site, ce taines de la Typol.
qui ne représente pas de difficultés, les emprises ayant été rése-
● La route entre le port et le site ne présente pas d’obstacles pour le
rvées depuis longtemps. Les produits finis devront être évacués par
la route, par les camions des distributeurs locaux. transport des colis lourds et hors gabarit, et ne nécessite pas de ren-
forcements spéciaux, mais les transports exceptionnels doivent faire
■ Le site choisi pour la raffinerie présente des caractéristiques de l’objet d’une autorisation administrative demandée 3 mois à l’avance.
sol à priori satisfaisantes, mais à vérifier, et une sismicité normale ; ● On trouve au Philékistan des matériaux de construction
Il est relativement bosselé et doit être nivelé ; la couche superficielle (ciment, sable, agrégats) en quantité et qualités convenables, mais
de terre arable sera récupérée pour être utilisée à la fin des travaux les aciers de ferraillage et de charpente, les équipements sanitaires,
dans l’aménagement de l’environnement. Le niveau moyen est à serrurerie, menuiseries métalliques, etc., doivent être importés.
+ 10 m au-dessus du niveau normal du fleuve Solianka, donc à l’abri
de ses débordements fréquents en saison des pluies ; le débit du ■ En reprenant le découpage classique d’une usine complexe en
Solianka permet d’assurer une alimentation sûre en eau industrielle quatre zones (figure 1), celles-ci sont constituées des installations
et eau incendie ; la réglementation locale est très stricte en ce qui suivantes.
concerne la pollution chimique, donc impose un traitement des 1) Zone « procédés en limites de batterie ».
rejets, mais n’impose pas de normes quant à leur température (donc La figure 2 donne le schéma de fonctionnement simplifié de la
pas de réfrigérants atmosphériques). raffinerie ; qui comprend les ateliers de :
Les conditions météorologiques permettent des travaux exté- — distillation atmosphérique ;
rieurs durant 10 mois de l’année, mais l’activité est fortement per- — hydrotraitement des essences ;

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______________________________________________________________________________________________________________ MANAGEMENT DE PROJET

— stabilisation et fractionnement des essences ;


— traitement des gaz de pétrole ;
— reformage catalytique ;
3 Eaux Réfrigération Vapeur Électricité Air comprimé — hydrodésulfuration ;
— préparation des brais ;
Utilités
ainsi que le traitement des effluents.
2) Zone « stockages, manutention et liaisons ».
2 Limites de Elle est constituée des installations suivantes :
batterie — installation de déchargement au port ;
Procédés
1 — oléoduc entre port et site (installations off-site) ;
Stockage, manutention
et liaisons
— stockages de brut ;
— stockages de produits liquides intermédiaires ;
— stockages des hydrocarbures liquides commerciaux ;
Ateliers — stockage et embouteillage des gaz liquéfiés ;
Laboratoires Bureaux Cafétéria
Magasins — aire de chargement de camions ;
— ponts de tuyauteries et câbles entre unités et avec les utilités.
Routes


3) Zone « utilités »
4 Services auxiliaires On y trouve les installations suivantes :
— une station de pompage en rivière (eau brute et eau incendie,
On trouve également les installations « off-sites » suivantes : installation off-site) ;
— installations portuaires — un poste de traitement des eaux brutes (fournissant l’eau
— oléoduc port-raffinerie industrielle de refroidissement, l’eau potable, l’eau déminéralisée) ;
— bâtiments d'habitation — une chaufferie, fournissant la vapeur, par combustion des gaz
— station de pompage en rivière et résidus ;
— une sous-station électrique, alimentée par le réseau national ;
— une station diesel-électrique de secours ;
Figure 1 – Découpage par zones de la raffinerie — une station d’air comprimé.

Propane
Zone « procédés » Gaz Traitement des
gaz de pétrole Butane
liquéfiés (LPG)

Essences Stabilisation
Hydrotraitement et Gaz
fractionnement

Essences Reformage
catalytique

Kérosène
Distillation atmosphérique

Hydrodésulfuration
Gasoil

Arrivée Stockages
du brut intermédiaires
Fioul

Stockages
de brut
Lourds Brais Mélanges
Traitement
et
des lourds
expéditions

Les produits commerciaux sont des mélanges des divers produits de la raffinerie et d'additifs en proportions variables.
Ces mélanges se font juste avant l'expédition.

Figure 2 – Schéma de fonctionnement simplifié de la raffinerie de Kumpt Harbour

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4) Zone « services auxiliaires » Dans le contexte de ce projet, le maître d’ouvrage est la Philékis-
Elle regroupe les bâtiments suivants : tan Typol Co (désignée dans la suite par PTC). La direction et l’admi-
nistration de PTC doivent s’assurer des ressources financières
— administratifs ; nécessaires, recruter le personnel d’exploitation et réceptionner
— médico-social ; l’ouvrage (sans doute avec le support de la société mère, Typol).
— laboratoire et contrôle ;
● PTC constitue à cette fin un comité de pilotage (« steering
— poste de gardiennage et de sécurité ;
— restaurant ; commitee »). Le comité de pilotage réunit des représentants des
— garage ; organismes décideurs : Typol elle-même, PTC et aussi les autres
— ateliers d’entretien, magasins de pièces de rechange. participants éventuels associés au capital de PTC.
Ce comité charge un rapporteur de suivre au jour le jour le projet
■ Les voies et réseaux divers comporteront : et d’incarner le maître d’ouvrage.
— les aires de stationnement et les routes intérieures ; Le mode de prise de décision doit être précisé dans l’accord « joint-
— les réseaux souterrains (égouts, canalisations des eaux incen- venture » qui a officialisé la création de PTC. La fiabilité des instruc-
dies et industrielles) ; tions données à l’équipe de projet et, souvent, le résultat de tout le
— les clôtures et protections diverses ; projet, dépendent du bon fonctionnement de ce comité, et de la per-
— l’aménagement paysager de l’environnement. sonnalité du rapporteur, qui peut être normalement désigné sous le
titre de directeur de projet. Dans la pratique c’est lui qui analyse et


résume pour le comité de pilotage, les informations sur l’avancement
et le déroulement du projet, et suscite les décisions stratégiques.
1.2 Répartition préliminaire des tâches ● L’équipe de projet choisie au sein du service des travaux neufs de
Typol joue le rôle de maître d’œuvre. Le responsable d’un projet de
cette importance porte souvent le titre de directeur, mais nous le
Nota : on se reportera au [processus 8.1] (cf. [AG 3 150], figure 11). désignons dans la suite comme chef de projet, CP, pour le distinguer
■ La répartition envisagée est celle qui résulte des procédures habi- du représentant du comité de pilotage. Leur rôle est en effet très diffé-
tuelles d’un grand groupe pétrolier. Pour réaliser cette raffinerie, rent.
Typol dispose d’un service de travaux neufs, avec bureau d’études Le CP doit organiser les tâches de nombreux intervenants, inter-
(BE), qui est en mesure d’assurer la direction générale du projet, nes et surtout externes à Typol, les coordonner, informer, négocier
ainsi que les études et la coordination de l’ensemble. Ainsi qu’il en avec toutes les parties prenantes, arbitrer leurs conflits, et rendre
a l’habitude, ce service sous-traite l’ensemble des études de base et compte lui aussi au comité de pilotage. Il doit aussi animer et moti-
de détail des unités de procédés à une société d’engineering spécia- ver son équipe, directe et indirecte.
lisée, qui en assure la réalisation selon un contrat PMG (prix maxi-
mal garanti), à l’exception de l’exécution du génie civil. On prévoit
de confier la réalisation et les études du génie civil à la société Le bon fonctionnement du management de projet impose
Fouchtra, dont la filiale locale a déjà une certaine expérience des tra- l’existence distincte de ces deux rôles et la définition claire de
vaux industriels. Les travaux de terrassement et de nivellement sont leurs pouvoirs respectifs.
confiés à une entreprise locale, qui exécute également les voies et
réseaux divers, sur la base des études du BE de Typol.
Les installations de déchargement au port et le chargement des
camions sont traités de la même manière que les unités process
avec une entreprise spécialisée ; celle-ci fournit également le maté-
2. Lancement du projet
riel spécifique nécessaire, dans le cadre d’un contrat forfaitaire
« étude et fourniture ». ■ Il est éminement souhaitable que le CP participe plus ou moins à
Il en est de même de l’ensemble des stockages, d’une part, et de la phase stratégique, à tout le moins qu’il soit informé de sa nomi-
chacune des utilités, d’autre part. nation prévue bien avant la décision finale de réaliser ce projet. Cela
Les liaisons entre unités, stockages et utilités sont étudiées par les lui laisse le temps nécessaire pour prendre connaissance des condi-
services techniques de Typol et leur réalisation confiée à une entre- tions générales et du contexte de l’opération.
prise internationale de montage. La fourniture du matériel est assu- Il est effectivement nécessaire que le CP puisse choisir les métho-
rée par le service approvisionnements de Typol. des qu’il va appliquer et faire appliquer dans le cas précis de cette
Le réseau incendie est étudié par une société spécialisée et réalisé raffinerie, pour tenir compte de l’environnement et des évolutions
par cette même entreprise. prévisibles du projet. Cela entraîne que sa Direction lui accorde,
dans le cadre des règles générales de gestion de Typol, une autono-
Enfin, les bâtiments auxiliaires « on-site » et les logements mie de gestion correspondant à ses responsabilités.
du personnel, dont l’étude est confiée à un bureau d’architecture,
sont construits par un entrepreneur local qui y installera les équipe- Cette autonomie est obligatoirement définie par une « note de
ments définis et acquis par le service achat de Typol. Compte tenu mission » émise par la Direction Générale de Typol à l’adresse de
des problèmes de liaison avec le Philékistan, un transitaire unique tous les services auxquels le CP devra avoir recours. Cette note est
aura la responsabilité du transport de l’usine au site de la totalité du un « sésame » souvent nécessaire, mais pas toujours suffisant, pour
matériel à importer dans ce pays. surmonter les réticences internes. Le CP ne répond de ses décisions
que devant le comité de pilotage.
La Direction de Typol a décidé le 1er janvier, que la raffinerie devra
être mise en service dans 42 mois. Ce point étant acquis, le CP peut constituer son équipe. Il souhaite
toujours en choisir lui-même les membres, mais il est assez fréquent
que les hiérarchies des services lui désignent les collaborateurs
Cette organisation, assez complexe, mais classique permet de qu’ils vont détacher dans l’équipe de projet. Ce ne sont pas forcé-
réfléchir sur les modalités d’exécution d’à peu près tous les ment ceux que le CP aurait souhaités. Toutefois, il doit conserver au
types de contrats d’entreprise en sous-traitance. moins le droit de pouvoir récuser des personnes avec lesquelles il
sait ne pas pouvoir travailler en toute confiance ; il doit aussi pou-
voir écarter de l’équipe ceux qui se révèlent inadaptés, au cours de
■ La figure 3 schématise les relations entre les intervenants et avec la réalisation du projet. Cela est d’autant plus vrai quand les person-
l’équipe de projet. nes concernées appartiennent à son équipe directe.

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TR
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agSQUS

______________________________________________________________________________________________________________ MANAGEMENT DE PROJET

Partenaires
Typol
d'entreprise

PTC
Maître d'ouvrage
Autorités
Comité de pilotage Banques
locales
Directeur du projet
(Rapporteur)

Formation
Bailleur(s)
des exploitants
de licence


PTC

Équipe de projet Typol


Maître d'œuvre
• Chef de projet CP
• Adjoint opérationnel
Organismes Services techniques Ingénieries
de contrôle Directeur « Travaux neufs » spécialisées : process,
Ingénieur
locaux de Typol utilités, stockages
en chef
chantier Chef des
approvisionnements

Architecte et Bureau d'études


entreprises de Inspecteurs Bâtiment-Génie Civil
bâtiments Fouchtra

Entreprise de Vendeurs
travaux publics Équipementiers
Fouchtra Matériel

Entreprises locales
Transporteur
Montage, voies et
Transitaire
réseaux divers, off-sites

Relation contractuelle ou légale. Responsabilité


Circulation d'informations ou de biens matériels

Figure 3 – Relation entre les intervenants

■ On peut, en effet, considérer que l’équipe de projet comporte — Un ingénieur en chef est chargé de coordonner les problèmes
trois niveaux. techniques des différentes zones, avec un ingénieur de projet par
● Un premier niveau est constitué par les personnels détachés zone, assurant le suivi des études et spécifications dans les diffé-
dans l’équipe, sous la dépendance hiérarchique (à titre temporaire) rents services (procédés, implantations, réquisitions de commandes
du CP. Cette équipe directe se compose ici de quatre adjoints au CP de matériel, etc.).
(figure 3), assistés de spécialistes, également rattachés à l’équipe. — Un chef des approvisionnements supervise et/ou confirme les
— Un adjoint opérationnel (ou administrateur de projet) intègre les opérations confiées à des entreprises extérieurs à Typol : comman-
activités des personnels affectés aux questions de gestion : trésorerie, des d’équipements et de matériaux, marchés de services et de tra-
facturation, planification, coûtenance, contentieux, logistique docu- vaux, transit, inspections, relances ; temporairement, plusieurs
mentaire, archivage, retour d’expérience. La plupart de ces spécialis- acheteurs lui sont affectés directement. Le chef des approvisionne-
tes font partie intégrante, à titre permanent, de l’équipe de projet, et ments doit pouvoir décider, en accord avec le CP, du choix des four-
leur tâche doit être proactive (c’est-à-dire dont l’activité est de prévoir nisseurs et sous-traitants et du découpage des contrats et
et de précéder les problèmes), beaucoup plus que de contrôle. commandes.

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TS
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agSQUS

MANAGEMENT DE PROJET ______________________________________________________________________________________________________________

— Un chef de chantier (appelé directeur de chantier), désigné Il définit, en particulier, le niveau de détail que le CP souhaite
bien avant le démarrage des travaux sur site pour pouvoir les prépa- contrôler et explicite les critères de son choix.
rer, résidera à Kumpt Harbour dès l’ouverture des travaux. Il est
assisté de superviseurs techniques expatriés et de personnels admi-
nistratifs, pour la plupart recrutés localement. Encadré 1 – Extrait des procédures internes de Typol,
pour la part relative à l’organigramme des tâches
● Un deuxième niveau est l’équipe indirecte constitué des divers-
membres de Typol maintenus dans leurs structures d’origine, sous du projet (OTP)
l’autorité de leurs hiérarchies fonctionnelles respectives, non L’organigramme des tâches est conçu comme suit.
dépendantes du CP, mais travaillant sur le projet. — La décomposition en systèmes, sous-systèmes et équipe-
● Le troisième niveau est l’équipe élargie, formée par les person- ments sera d’un niveau plus détaillé que les sous-projets ; c’est-
nels des fournisseurs et des sous-traitants participant au projet, et, en à-dire que la fourniture « unités process », par exemple, devra
premier lieu, les équipes de projet des bureaux d’études spécialisés. être décomposée en ses divers éléments.
— Les phases suivantes devront clairement apparaître, et ce, à
chaque niveau de décomposition : spécification, étude, dossiers
L’un des soucis majeurs du CP et de susciter et de maintenir de consultations, approvisionnements, montage et construction,
l’esprit d’équipe aux deuxième et troisième niveaux. mise en route.
— On fera apparaître nettement les fournitures locales, et leur

S ■ Avec l’aide de ceux des membres principaux de son équipe monnaie de payement.
directe qui sont concernés, le CP procède à l’analyse préliminaire — Les principaux points de contrôle prévus, les interfaces
des tâches à accomplir et des risques. Il les répartit grosso modo ainsi que les revues de projet seront mentionnés.
en sous-ensembles plus aisément contrôlables et prévoit de les — La logistique de l’intégration et du rebouclage sur les spé-
affecter à des responsables internes du Typol, qui en piloteront la cifications sera explicitée.
réalisation en interne ou en sous-traitance. Il repère les dates jalons — L’ensemble s’appuiera sur un planning GANTT (planning à
et fixe des objectifs de développement prioritaires et des objectifs barres).
d’ensemble à affiner ultérieurement.
● Les préparatifs rapidement accomplis, il convoque une réunion Il sera nécessaire avant de bâtir l’OTP (encadré 1) de choisir un
de lancement, qui réunit les responsables des services fonctionnels mode d’organisation du projet, en particulier, comment et à quel
auxquels il devra avoir recours, pour leur présenter le projet et niveau gérer :
recueillir leurs commentaires. Cette réunion de lancement (Kick-off — la qualité ?
meeting) est fondamentale pour le bon déroulement du projet : — le contrôle de projet ?
c’est souvent là que le CP trouve l’occasion d’inspirer confiance et — la formation du futur exploitant ?
de montrer sa compétence et sa maîtrise et donc sa crédibilité. Il — la documentation technique ?
s’appuie pour cela sur un ordre du jour précis, accompagné des piè-
ces nécessaires à la réflexion des intervenants, qu’il sait faire res- ■ Cet OTP permet de mettre en évidence tous les lots de travaux qui
pecter, en durée et en contenu. Il est impératif que ne participent à doivent être sous-traités ou exécutés par Typol, selon le mode d’orga-
cette réunion que des responsables ayant pouvoir d’engager leurs nisation choisi ; le planning GANTT fait apparaître les interfaces.
services respectifs. Un OTP d’ensemble est présenté sur la figure 4. Les responsables
En effet, de cette réunion découlent les planifications des divers de sous-ensembles préparent également chacun un OTP plus
domaines et le PMP (Plan de Management de Projet, (cf. [AG 3 150], détaillé pour leur partie. Ces organigrammes sont présentés en
§ 7) qui les résume. Les responsables des services opérationnels Annexe 1.
sont réputés l’avoir accepté, et, s’ils ont des réserves, ils doivent les Le CP et ses quatres adjoints directs s’assurent que toutes les
formuler avant son officialisation ; les points litigieux sont négociés, tâches nécessaires ont bien été attribuées, sans redondance.
résolus et intégrés dans le PMP. ■ Chaque lot de travaux fait l’objet d’une fiche de tâche (proces-
sus 4.3), dont quelques exemples sont présentés dans l’Annexe 2.
On peut alors passer à la phase de planification, en gardant Les dates et les valeurs budgétaires ne figurent pas dans cette pre-
à l’esprit que cette planification est susceptible d’évoluer avec mière émission, avant lissage, nivellement, estimation et arbitrages.
les imprévus, qu’elle ne peut être précise que pour les objectifs Un intervenant peut être responsable de plusieurs lots, mais chaque
les plus proches, et que l’équilibre entre laxisme et dirigisme est lot ne peut avoir qu’un responsable.
difficile à maintenir, bien que nécessaire. La fiche de tâche est, en quelque sorte, un contrat interne entre le
CP et le responsable de Typol chargé de l’exécution du lot.
■ L’organigramme permet, dans un premier temps, de déterminer
des lots qui vont être mis en appel d’offre ; les noms d’entreprises,
3. Planification du projet fantaisistes, qui sont citées dans les organigrammes de détail
(Annexe 1) ont pour but de souligner la diversité et le nombre de
consultations à mener.
La première étape est de savoir assez précisément ce que l’on Une codification complète est établie, identifiant toutes les tâches
veut faire et comment. C’est pourquoi nous insistons particuliè- suivies en planning.
rement sur l’organigramme des tâches. Les divers lots vont être ensuite négociés avec les entreprises les
mieux-disantes, après établissement des comparatifs de consulta-
tion faisant apparaître, outre le prix, les conditions de payement, les
3.1 Organigramme des tâches (OT) références et la charge actuelle des soumissionnaires, leur volonté
apparente de bien traiter leur lot, leurs implantations locales, etc.
Nota : on se reportera dans le fascicule [AG 3 150] aux processus 4.1 et 4.2. Les comparatifs sont établis en commun par les ingénieurs res-
L’OT doit être aussi exhaustif que possible. Il comprend absolu- ponsables de zone (figure 1) et les acheteurs correspondants, qui
ment toutes les tâches de toutes natures liées plus ou moins direc- mènent ensemble la négociation.
tement à la réalisation du projet. Il permet de répartir les Pour les lots les plus importants, le CP est impliqué dans la négo-
responsabilités entre les intervenants. ciation. Dans tous les cas, c’est lui qui donne son accord final sur le

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TT
Industrialisation des procédés et usine du futur
(Réf. Internet 42602)

1– Introduction

2– Management de l'entreprise industrielle

3– Gestion de projet et ingénierie



4– Développement de produits Réf. Internet page

L'écoconception  : un outil d'innovation pour une chimie durable J4920 47

Simulateurs de procédés J1022 51

5– Gestion des risques

6– Développement durable et outils industriels

7– Production

8– Management du changement, progrès continu et


innovation

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L’écoconception : un outil
d’innovation pour une chimie durable
par Sylvain CAILLOL
Dr université de Bordeaux, ingénieur ENSCM
Chef de projets CNRS, délégué général Chaire ChemSuD

1. L’industrie chimique mobilisée face à des bouleversements..... J 4 920 - 2


1.1 Enjeux démographiques ............................................................................ — 2
1.2 Nouvelles contraintes pesant sur la chimie industrielle.......................... — 2
2. Analyse du cycle de vie, outil de l’écoconception – définitions
et concepts................................................................................................ — 3
2.1 Écoconception : quelques définitions ....................................................... — 3
2.2
2.3
2.4
Analyse de cycle de vie : historique ..........................................................
Analyse de cycle de vie : définitions et concept.......................................
Définition des objectifs et cadre de l’analyse de cycle de vie .................



3
4
5

2.5 Analyse de l’inventaire du cycle de vie ..................................................... — 5
2.6 Évaluation de l’impact du cycle de vie ...................................................... — 6
2.7 Interprétation du cycle de vie..................................................................... — 8
2.8 Logiciels d’ACV ........................................................................................... — 9
3. Exemple d’écoconception..................................................................... — 9
3.1 Exemple : ACV des sacs de caisse de la distribution ............................... — 9
3.2 Définition, analyse de l’inventaire ............................................................. — 9
3.3 Évaluation, résultats ................................................................................... — 10
4. Limites de l’outil...................................................................................... — 12
4.1 De l’importance des hypothèses ............................................................... — 12
4.2 De la pertinence des données d’inventaire............................................... — 13
4.3 De l’influence des règles d’allocations...................................................... — 13
4.4 Du choix du recyclage ................................................................................ — 13
5. Conclusion : le futur de l’écoconception ......................................... — 14
Pour en savoir plus .......................................................................................... Doc. J 4 920

otre société a pris conscience tout récemment – à l’échelle de l’humanité –


N qu’elle hypothéquait son avenir collectif pour satisfaire son appétit de
richesses individuelles. Tant que nous n’étions que quelques centaines de millions
d’habitants sur Terre à nous partager la majorité des richesses et à générer, par
voie de conséquence, la majeure partie des pollutions anthropiques, l’équilibre –
critiquable, certes – se maintenait. Mais avec l’arrivée dans les dernières décennies
de près de trois milliards d’individus qui prétendent – fort justement – à un niveau
de consommation élevée, et avec les prospectives d’accroissement de la popula-
tion mondiale dans les années à venir, la communauté internationale en appelle
au développement durable pour permettre d’instaurer un nouvel équilibre, vérita-
blement durable ou soutenable. Cet équilibre doit reposer sur une utilisation
raisonnée de nos ressources, quelles qu’elles fussent, dans la mesure où la notion
de capacité de renouvellement de toute ressource est intimement assujettie à la
vitesse de sa consommation. Ces notions déterminent donc en partie les fonde-
ments d’un développement durable défini par :
– un rythme de consommation des ressources renouvelables qui n’excède
pas celui de leur capacité de régénération ;
p。イオエゥッョ@Z@ュ。ゥ@RPQQ

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est strictement interdite. – © Editions T.I. J 4 920 – 1

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L’ÉCOCONCEPTION : UN OUTIL D’INNOVATION POUR UNE CHIMIE DURABLE ___________________________________________________________________

– un rythme de consommation des ressources non renouvelables qui n’excède pas celui du
développement de ressources de substitution ;
– une production de quantité de déchets et de pollution qui n’excède pas celle que peut
absorber l’environnement.
Et ces notions de rythmes soutenables de consommation de ressources et de production de
déchets se retrouvent en réalité dans l’approche holistique de l’écoconception qui vise à la
réduction à la source des impacts environnementaux d’un produit ou d’un procédé.

1. L’industrie chimique gaz à effet de serre (GES), responsables de l’élévation des températu-
res moyennes du globe.
mobilisée face à des Ces questions s’érigent comme autant de contraintes qui pèsent
sur l’industrie et en particulier sur l’industrie chimique – l’industrie
bouleversements des industries, dans la mesure où plus de deux tiers de ses produits
sont destinés à des industries aval [3]. Et à travers ces contraintes,
l’industrie chimique subit une révolution qui s’articule autour de :
1.1 Enjeux démographiques – l’anticipation de l’épuisement des matières premières issues
de ressources fossiles, accompagnée d’une forte volatilité des prix.
Le XXe siècle a été marqué par un accroissement extraordinaire


Et la répartition inégale de ces ressources fossiles, en particulier
de la population mondiale, qui est passée de 1,6 milliards d’indivi- du pétrole, donne lieu à d’importantes spéculations qui compro-
dus à 6,1 milliards, augmentation qui s’est produite à raison de mettent un approvisionnement stable (figure 2). Cette contrainte
80 % depuis 1950. Et la population mondiale devrait continuer de pèse sur l’ensemble des ressources fossiles, même non carbonées
s’accroître. En se fondant sur la variante moyenne de fécondité, comme le lithium. En effet ce métal est non seulement faiblement
l’ONU prévoit que la population mondiale atteindra 9 milliards de présent sur Terre (autour de 12 Mt de lithium exploitables), mais
personnes en 2040 et 9,3 milliards en 2050. Cependant, des écarts
réduits mais soutenus des taux de fécondité peuvent influencer
l’effectif de la population à long terme. Ainsi, un scénario de fécon-
dité élevé dans lequel la fécondité est supérieure d’un demi-enfant 300
au scénario de fécondité moyenne donne un effectif de Gigabarils
10,9 milliards d’individus en 2050. 250

L’urbanisation constitue également une autre tendance d’impor- 200


tance. En effet, alors que d’ici 40 ans la population mondiale risque de
doubler, la population urbaine, forte aujourd’hui de 3 milliards d’indi- 150
vidus, devrait atteindre 6 milliards, provoquant un doublement de la
population urbaine, avec des besoins énergétiques qui vont eux aussi 100
s’accroître considérablement. Cet accroissement démographique
attendu dans les années à venir va également s’accompagner d’un 50
accroissement de la consommation par individu. Au premier chef de
ces consommations, on recense la consommation énergétique. Ainsi, 0
les estimations de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) laissent 1900 1920 1940 1960 1980 2000 2020* 2040*
ainsi envisager un doublement de la consommation énergétique –
par rapport aux 11 Gtep consommées en 2007 – à l’horizon 2030 [1]. * prévisions
Certes, la précision de tous ces calculs prospectifs peut être contestée,
mais une chose est certaine : nous sommes en pleine bulle, et Figure 1 – Découvertes annuelles de pétrole, en milliards de barils
équivalent pétrole (Source : IHS Energy/Shell, 2005)
l’humanité vit désormais à crédit [2].
Nota : gigatonnes d’équivalent pétrole (Gtep)

90
81
80
1.2 Nouvelles contraintes pesant 70
sur la chimie industrielle 60
50
Par ailleurs, notre société actuellement est fondée sur l’utilisation 41 41
quasi exclusive de ressources fossiles, en particulier pour son appro- 40
32
30 28
visionnement énergétique et de biens de consommation. La question
n’est pas de savoir s’il y aura un pic de production mais plutôt quand 20
12 14
il aura lieu. En effet, pratiquement tous les experts s’accordent sur la 9
10
quantité et la durée de nos réserves globales en pétrole, charbon, gaz, 0
combustible nucléaire… en fonction de notre vitesse de consomma-
Amérique
du Nord
Amérique
latine
Ex-Union
Soviétique

Europe

Moyen-Orient

Afrique

Asie-Océanie

Monde

tion actuelle et des découvertes de gisements réalisées (figure 1).


Ainsi, à la fin de ce siècle, nous aurons épuisé la totalité des réserves
terrestres que la nature a mis des millions d’années à constituer. Or
cette exploitation de ressources énergétiques fossiles – de carbone
fossile – s’accompagne d’un transfert de matière, d’un transfert de
carbone, qui se retrouve sous forme de CO2 dans notre atmosphère, Figure 2 – Stocks de pétrole dans le monde, en années de produc-
s’accumule et contribue à l’élévation de la concentration des fameux tion 2005 (Source : BP Statistical Review, 2007)

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____________________________________________________________________ L’ÉCOCONCEPTION : UN OUTIL D’INNOVATION POUR UNE CHIMIE DURABLE

environnementaux. Or la prise en compte de tous les impacts envi-


7 ronnementaux au cours du processus de fabrication, et pas seule-
Gigatonnes de carbone émis par an

Total ment la mesure de l’empreinte carbone ou des émissions de CO2,


revient à intégrer l’écoconception aux processus classiques de
6
conception, et également au processus d’innovation par voie de
conséquence. Ce processus d’innovation subit ainsi d’importantes
5 mutations. On n’attend plus simplement de lui une réponse rapide
mais on s’autorise le temps de la réflexion pour apporter une réponse
4 exhaustive concernant l’environnement, une réponse écoconçue. Par
ailleurs, l’écoconception fait partie intégrante des recommandations
3 Pétrole du grenelle de l’Environnement qui s’est tenu en 2007, à travers
l’engagement n° 217 qui encourage les démarches d’analyse environ-
2 nementale des produits et l’écoconception [11]. Enfin, l’écoconception
Charbon relève désormais d’une obligation règlementaire avec la directive
cadre pour l’écoconception [12]. Cette directive a été renforcée par
1
une directive fixant des exigences d’écoconception pour les produits
Gaz
suivants [13] : chaudières à eau chaude alimentées en combustibles
0 liquides ou gazeux, réfrigérateurs, congélateurs et appareils combinés
1800 1850 1900 1950 2000
électriques à usage ménager et ballasts pour l’éclairage fluorescent.
L’écoconception commence dès lors à devenir une obligation. Elle est
Figure 3 – Émissions de carbone fossile depuis 1800 également une réponse aux attentes des consommateurs. En effet,
(Source : G Marland, TA Boden, and RJ Andres, 2003) les utilisateurs finaux sont désormais en attente de produits respec-


tueux de l’environnement. En effet, selon le baromètre IRSN, depuis
également très mal réparti (80 % des réserves de lithium mondia- 2006, la dégradation de l’environnement figure dans les trois principa-
les sont situées dans trois pays d’Amérique du Sud) [4] ; les préoccupations des Français [14].
– une obligation de réduction drastique des émissions polluan-
tes des procédés chimiques et en particulier de la libération des
gaz à effet de serre (CO2, NOx…). L’évolution et le niveau d’appro- L’écoconception est ainsi une démarche globale, centrée sur
visionnement de ressources fossiles ont accru considérablement le produit. Dans son principe, elle consiste à prendre en compte
les quantités de CO2 fossile émis chaque année dans l’atmosphère les critères environnementaux et humains dès la phase de
(figure 3). conception d’un produit. Ces critères concernent généralement
l’ensemble des phases suivies par un produit, la production, la
Le cycle du CO2, en équilibre à l’échelle planétaire, est remis en distribution, l’utilisation et la fin de vie, à savoir : le cycle de vie
cause par l’activité anthropique qui émet des quantités considéra- du produit (figure 4). Dans sa finalité, l’écoconception est un
bles de CO2 d’origine fossile. L’Agence internationale de l’énergie processus préventif multicritère qui cherche à identifier et à
prévoit une augmentation de 48 % des émissions de gaz à effet de réduire à la source tous les impacts sur l’environnement.
serre d’ici 2030 si aucune mesure de réduction n’est engagée [5] ;
– des pressions fortes émanant des sphères sociétale et règle-
mentaire. En effet les contraintes règlementaires concernant la Le concept d’écoconception s’appuie sur un outil puissant
toxicologie et l’écotoxicologie liées à l’utilisation des matières pre- d’identification des impacts environnementaux : l’analyse de cycle
mières, d’intermédiaires de synthèses et de produits de l’industrie de vie – ACV.
chimique se sont renforcées au cours du XXIe siècle, avec notam-
ment le règlement REACH [6], la directive cadre sur l’eau (DCE) [7],
mais également de nombreuses directives européennes concer- 2.2 Analyse de cycle de vie : historique
nant la fin de vie des matériaux (directives véhicule hors d’usage
(VHU) [8], déchets équipements électriques et électroniques (DEEE)
[9], directive sur les composés organiques volatils (COV) [10] émis L’analyse de cycle de vie telle qu’elle est pratiquée est en réalité
par les vernis, peintures et produits de retouche de véhicules, etc.). une analyse environnementale de cycle de vie dans la mesure où
les impacts évalués sont essentiellement des impacts environne-
Ainsi, couvrir les besoins de l’humanité (nourriture, énergie,
mentaux (figure 5).
soins…) en respectant notre environnement est le challenge qui nous
attend et que la chimie va devoir relever dans les années futures. La pensée « analyse de cycle de vie » est un courant de pensée
holistique qui vise la prise en compte de tous les impacts, environ-
nementaux, sociaux et économiques sur tout le cycle de vie du
produit ou du service. Cette façon de penser doit permettre d’évi-
2. Analyse du cycle de vie, ter que des améliorations locales ne résultent en un déplacement
des problèmes (pollutions, conditions sociales…).
outil de l’écoconception –
définitions et concepts
Utilisation Recyclage

2.1 Écoconception : quelques définitions Distribution Fin de vie


Cycle
Les productions de biens et de service sont désormais sous Extraction ressources
de vie
contrainte. Il ne va donc plus suffire de répondre à un cahier des char-
ges par une voie technique dans le respect des coûts impartis, il va Transport
falloir dorénavant intégrer le respect de l’homme et de Fabrication
l’environnement ; ce qui signifie réduire la consommation de ressour-
ces fossiles, limiter les émissions de gaz à effet de serre, se conformer
aux contraintes environnementales – cela revient à limiter les impacts Figure 4 – Le cycle de vie

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Simulateurs de procédés

par Xavier JOULIA


Professeur à l’École nationale supérieure des ingénieurs en arts chimiques
et technologiques (ENSIACET)

1. Objectifs des simulateurs ...................................................................... J 1 022 - 2


2
. Simulateurs orientés module et orientés équation ........................ — 2
3. Étude de cas............................................................................................... — 3
Modèle du procédé – Approche modulaire .......................................


4. — 4
4.1 Définition des courants................................................................................ — 6
4.2 Modèles des unités – Modules ................................................................... — 6
4.3 Équations de connexions ............................................................................ — 12
4.4 Interfaces graphiques – Diagramme de simulation .................................. — 15
5. Résolution séquentielle – Problème de simulation......................... — 16
5.1 Ensemble des données standard................................................................ — 16
5.2 Absence de recyclage .................................................................................. — 16
5.3 Décomposition en réseaux cycliques maximums RCM ........................... — 16
5.4 Formulation du problème niveau procédé ................................................ — 17
6. Problème de conception ........................................................................ — 21
6.1 Définition ...................................................................................................... — 21
6.2 Spécification locale ...................................................................................... — 21
6.3 Spécification délocalisée ............................................................................. — 21
6.4 Formulation du problème niveau procédé ................................................ — 21
6.5 Approche modulaire simultanée ................................................................ — 22
7
. Conclusion.................................................................................................. — 24
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. J 1 022

a mondialisation de l’économie, les contraintes d’environnement et de


L sécurité, la dynamique du marché exigent une très grande rigueur dans la
conception et la conduite des procédés. Dans ce contexte, on a de plus en plus
souvent recours à l’informatique pour concevoir rapidement et économique-
ment de nouveaux procédés plus rentables, plus propres, plus sûrs et plus
flexibles, en un mot « durables », mais également pour analyser et optimiser le
fonctionnement des installations existantes ou pour aider à la conduite de ces
installations. Ce domaine d’activité, désigné par le terme « d’ingénierie des
proc édés assistée par ordinateur », a connu un essor très important dans de
nombreux secteurs de l’industrie pétrolière, chimique et parachimique grâce
aux simulateurs de procédés qui constituent l’objet de cet article.
Les simulateurs de procédés sont les outils de base des techniciens et des
ingénieurs de procédés, car ils permettent d’établir aisément et avec rigueur
les bilans matière et énergie sur les procédés. Cet article vise à en définir les
objectifs, les éléments constitutifs, les concepts fondateurs et à fournir au
lecteur les connaissances nécessaires au bon usage des simulateurs. Nous
traiterons ainsi des points suivants :
– les données nécessaires à une simulation. Ces données permettent de
définir le système matériel (constituants, profil thermodynamique, réactions
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SIMULATEURS DE PROCÉDÉS _________________________________________________________________________________________________________

chimiques), la structure du procédé et les paramètres de dimensionnement et


de fonctionnement des appareils ;
– les deux concepts fondateurs des simulateurs orientés module : module et
courant ;
– l’approche modulaire séquentielle : décomposition du procédé en
réseau(s) cyclique(s) maximum(s) ; pour chaque RCM, choix d’un ensemble de
courants coupés (recyclages), détermination d’une liste de calcul des modules
et résolution séquentielle de ces modules par une procédure itérative ;
– les modèles et modules associés aux opérations unitaires de base : mélan-
geurs, diviseurs, séparateurs simples, pompes, compresseurs et turbines,
échangeurs de chaleur, réacteurs, flashes, procédés de séparation diphasique
(absorption, distillation, extraction liquide-liquide...).
Le lecteur devrait ainsi être capable de résoudre via un quelconque simula-
teur orienté module (OM) :
– un problème de simulation pure, c’est-à-dire simuler le fonctionnement
d’un procédé de structure donnée et pour lequel les courants d’alimentation
Xo (matières premières) et les paramètres de dimensionnement et de fonction-
nement P des modules sont spécifiés ;

T – un problème de conception, c’est-à-dire utiliser les degrés de liberté du


procédé pour satisfaire des spécifications de design.
Il pourra alors mettre toutes ses compétences scientifiques et techniques au
service de la conception et de la conduite des procédés assistée par ordinateur.
Un tableau des symboles et abréviations se trouve en fin d’article.

1. Objectifs des simulateurs 2. Simulateurs orientés


Les objectifs majeurs des simulateurs de procédés sont les
module et orientés
suivants : équation
– résoudre les équations de bilans matière et énergie pour
l’ensemble des appareils du procédé ; L’aspect fondamental pour la simulation des procédés est l’iden-
– calculer les caractéristiques (débit, composition, température, tification des composants élémentaires dont l’assemblage permet
pression, propriétés physiques) pour tous les fluides qui circulent de construire le modèle du procédé. Au niveau conceptuel, et
entre les appareils ; comme conséquence directe au niveau numérique, deux approches
– fournir les éléments nécessaires au dimensionnement des s’opposent : l’approche dite « orientée module » (OM) et l’approche
équipements, tels que les quantités de chaleur échangées ou les dite « orientée équation » (OE).
débits internes d’une colonne.
À ces objectifs, s’ajoutent : ■L’approc
he OM a été adoptée par la majorité des simulateurs
commerciaux. Citons les plus largement utilisés : Aspen Plus,
– l’estimation des coûts d’investissement et de fonctionnement Chemcad, Aspen HYSYS, Pro/II et ProSimPlus.
et, dans un contexte de développement durable, de l’impact sur
l’environnement et la sécurité ; Dans l’approche OM, l’élément de base pour construire le
– l’optimisation des conditions de fonctionnement du procédé. modèle du procédé est le modèle d’opération unitaire appelé
« module ». Cette approche correspond à la vision classique et
Les simulateurs permettent d’établir, de manière efficace et naturelle du procédé qui résulte de l’agencement d’opérations uni-
rigoureuse, les bilans matière et énergie sur les procédés, taires dédiées à une fonction précise telle que réaction ou sépara-
déchargeant ainsi l’ingénieur de calculs fastidieux et répétitifs. On tion. L’utilisateur sélectionne les modules élémentaires
comprend alors aisément pourquoi ils constituent les outils de standardisés à partir de la bibliothèque du simulateur, fournit leurs
base pour la conception des procédés assistée par ordinateur. Les paramètres de fonctionnement et de dimensionnement et les relie
autres applications des simulateurs concernent l’analyse du fonc- entre eux par des c ourants représentant les flux de matière,
tionnement d’une unité existante ou l’étude des modifications à d’énergie et d’information circulant entre les appareils du procédé
apporter pour adapter l’unité à un nouveau contexte industriel : réel. Le procédé est alors vu comme un graphe orienté dont les
adaptation à la demande du marché ou à de nouvelles réglementa- nœuds sont les modules et les arcs les courants. La simulation est
tions concernant l’environnement ou la sécurité. L’utilisation, non réalisée par appel séquentiel des modules suivant une liste de cal-
plus hors ligne, mais en ligne des simulateurs est du ressort de la cul qui respecte le sens de circulation des fluides dans le procédé.
conduite optimale d’un procédé assistée par ordinateur. Ce
domaine devrait connaître un essor très important dans les années ■À l’opposé, les simulateurs OE, tels qu’Aspen Dynamics ou
à venir. Pour terminer cet aperçu des utilisations potentielles des gPROMS, sont spécifiquement dédiés à la simulation dynamique
simulateurs de procédés, il convient de citer la formation des opé- des procédés. Ces simulateurs apparaissent avant tout comme des
rateurs et l’aide au démarrage et à l’arrêt des installations. solveurs de systèmes d’équations algébriques et différentielles

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_________________________________________________________________________________________________________ SIMULATEURS DE PROCÉDÉS

Tableau 1 – Caractéristiques des alimentations


de l’unité de production de cyclohexane
Interface utilisateur
Alimentation Alimentation
Caractéristiques benzène hydrogène
Opérations
unitaires
(liquide) (vapeur)

Débits partiels
Serveur de
– hydrogène ......... (kmol/h) – 1 383,83
Prédimensionnement
des équipements

– méthane............. (kmol/h) – 39,13


des coûts
Évaluation
Base de
données – benzène.............. (kmol/h) 370,44 –

– cyclohexane....... (kmol/h) – –

Débit total ............ (kmol/h) 370,44 1 422,96


propriétés
Température ................. (K) 311,00 311,00
Utilitaires
numériques Pression ..................... (atm) 37,735 37,735

Le cyclohexane est produit par hydrogénation catalytique du ben-



zène en phase vapeur à partir de deux alimentations en matières
premières : une alimentation en benzène et une alimentation en
Figure 1 – Éléments constitutifs d’un simulateur de procédés hydrogène qui renferme 2,75 % molaire de méthane. Les caracté-
ristiques des alimentations du procédé sont données dans le
tableau 1.
intégrés dans un environnement offrant un langage de modélisa- Le mélange réactionnel entre dans le réacteur en phase vapeur ;
tion avancé. Ils sont d’ailleurs réputés plus efficaces sur le plan il est mis en contact avec un catalyseur au nickel sur silicium. Il se
numérique, car basés sur une approche globale au niveau de la produit alors la réaction suivante :
résolution. Par contre, les bibliothèques de modèles de ces simula- C6H6 + 3H2 → C6H12
teurs ne peuvent satisfaire totalement la diversité technologique ;
à charge de l’utilisateur de jouer le rôle de modélisateur en codant Le taux de conversion du benzène dans le réacteur est de 99,9 %
le modèle spécifique de son procédé. Dans l’approche OE, l’élé- molaire. L’écoulement dans le réacteur est de type piston et les
ment de base de construction du modèle de procédé est l’équation conditions opératoires sont telles que l’isomérisation du cyclo-
et la variable, soit une vision très numérique de la modélisation. hexane en méthyl-cyclopentane n’a pas lieu. La chaleur dégagée
Cette vision très fine et numérique limite l’accès de ces simula- par la réaction est utilisée pour produire de la vapeur d’eau.
teurs à un petit groupe d’experts et non à l’ingénieur de procédé Les vapeurs à la sortie du réacteur préchauffent l’alimentation
lambda. du réacteur. Elles sont ensuite refroidies avant d’entrer dans un
ballon de séparation liquide-vapeur. L’hydrogène partiellement
Nous nous limiterons ici à une présentation des simulateurs
séparé est ensuite recyclé. Une partie est purgée afin d’éviter
basés sur une approche orientée module et dédiés à la simulation
l’accumulation de méthane (composant inerte présent dans le cou-
des procédés en régime permanent. Ces simulateurs sont
rant d’hydrogène alimenté). Par ailleurs, le liquide du séparateur
constitués de trois éléments essentiels : au cœur du système la
est envoyé dans une colonne à distiller afin de séparer les légers
base de données et le serveur de propriétés physico-chimiques sur
du cyclohexane qui est obtenu au résidu.
lequel repose la bibliothèque de modèles d’opérations unitaires et
enfin des utilitaires numériques ou solveurs. S’ajoutent à cet ■ Conditions opératoires complémentaires
ensemble des outils d’évaluation des coûts et de dimensionne-
ment des équipements (figure 1). • Pertes de charge
Les pertes de charge dans les différents échangeurs (notés E) et
L’article comporte essentiellement deux parties. La première
le réacteur (noté RX) sont prises égales aux valeurs fournies dans
s’intéresse aux aspects de modélisation d’un procédé alors que la
le tableau 2.
deuxième partie présente la stratégie utilisée pour résoudre les
équations du modèle et donc simuler le fonctionnement du pro- • Compresseur
cédé. Une unité de production de cyclohexane (UPC) nous servira
Le rendement isentropique du compresseur est égal à 0,75.
d’exemple illustratif. Les simulations seront effectuées avec le
simulateur de procédés en régime permanent ProSimPlus. • Colonne de distillation T1
La colonne de distillation est équivalente à 14 plateaux théori-
ques, condenseur et bouilleur compris. Les conditions de fonction-
nement de la colonne sont :
3. Étude de cas – taux de reflux molaire égal à 1 ;
– taux de récupération du cyclohexane au résidu égal à 99,99 %
molaire.
■ L’étude de cas utilisée comme exemple illustratif correspond au
procédé d’ARCO Technology Inc. de production de cyclo- • Spécification de design
hexane [1]. La figure 2 montre le schéma du procédé et certaines Le taux de purge sera ajusté de manière à obtenir un débit
des conditions opératoires spécifiées. molaire total égal à 5 000 kmol/h à l’entrée du réacteur RX1.

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SIMULATEURS DE PROCÉDÉS _________________________________________________________________________________________________________

Légers

34 atm
Purge 15,6 atm

422 K 28,9 atm

16 atm


497 K 19,7 atm
Benzène

322 K 322 K
Hydrogène
Cyclohexane

Figure 2 – Flowsheet de l’unité de production de cyclohexane (UPC)

Tableau 2 – Pertes de charges dans les différents


4. Modèle du procédé –
appareils du procédé Approche modulaire
Perte de charge L’objectif de ce paragraphe est de présenter comment modéliser
Appareil un procédé suivant l’approche modulaire. Cette approche, la plus
(atm)
intuitive car très proche de la vision de l’ingénieur de procédés, est
à la base des stratégies utilisées dans la plupart des simulateurs
E1 (courant chaud) 0,34 pour formuler et résoudre les problèmes de simulation de pro-
cédés en régime permanent. La présentation reposera sur l’étude
E1 (courant froid) 0,68 de cas dont la description a été donnée dans le paragraphe 3.
D’une manière générale, le fonctionnement en régime permanent
E2 sortie 0,34 d’un procédé peut être représenté par un modèle mathématique écrit
sous la forme d’un système d’équations algébriques non linéaires :

E3 sortie 0,34 f (x ) = 0 (1)


avec f fonction vectorielle,
E4 (courant chaud) 1,36 x vecteur des variables.
Pour un procédé industriel, le système d’équations (1) peut
E4 (courant froid) 1,36 contenir quelques milliers, voire des dizaines de milliers d’équa-
tions. Pour établir ce modèle, il est alors nécessaire d’adopter une
approche méthodique. Celle-ci consiste à écrire séparément, pour
E5 0,68 chaque unité du procédé, les équations traduisant les lois fonda-
mentales de la physique et de la chimie, telles que la conservation
RX1 1,02 de la masse et de l’énergie, les équilibres chimiques et les équili-
bres entre phases.

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1 seul appareil 2 unités monofluides

Échangeur de chaleur
entre deux fluides Transfert de chaleur
entre les 2 fluides

3 appareils 1 seule unité T


1 condenseur

Unité de distillation
1 colonne

1 bouilleur

Figure 3 – Distinction entre appareils et unités

Ces unités sont reliées entre elles par des tuyaux, des fils ou des
Le terme « unité » désigne ici un appareil, un groupement media (par exemple une paroi). Les équations relatives au modèle
d’appareils ou une partie d’un appareil du procédé. du procédé complet peuvent alors être classées en trois groupes :
– les équations des modèles des unités ;
La figure 3 donne deux exemples illustrant la distinction entre – les équations de connexions des unités entre elles ;
unité et appareil : – les équations de spécifications traduisant des contraintes de
– une unité de distillation qui comporte, au minimum, trois qualité ou de production du procédé.
appareils : un bouilleur, une colonne et un condenseur ; Dans un premier temps, nous nous placerons en l’absence
– un échangeur tube-calandre qui peut, quant à lui, être vu pour d’équations de spécifications, ce qui correspond à un problème de
sa modélisation comme constitué de deux unités séparées, la simulation pure. La présence de contraintes supplémentaires sur
calandre et les tubes, avec un transfert de chaleur entre ces deux le procédé conduit à un problème de conception qui sera traité
unités. dans un deuxième temps.

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UV
Industrialisation des procédés et usine du futur
(Réf. Internet 42602)

1– Introduction

2– Management de l'entreprise industrielle

3– Gestion de projet et ingénierie

4– Développement de produits

5– Gestion des risques Réf. Internet page

Gestion globale des risques AG1100 59

Démarche générale de maîtrise du risque dans les industries de procédé AG4605 65

Système de management de la sécurité : mise en place sur site AG4650 67

6– Développement durable et outils industriels

7– Production

8– Management du changement, progrès continu et


innovation

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UW

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Gestion globale des risques


par Bernard BARTHELEMY
Gérant ARISKAN

1. Méthodologie de la GGR ...................................................................... AG 1 100v2 - 2


1.1 Notion de risque ........................................................................................ — 2
1.2 Concept fondamental de la GGR.............................................................. — 3
1.3 Identification des risques.......................................................................... — 5
1.4 Quantification et qualification des risques — 5
1.5 Maîtrise des risques .................................................................................. — 6
1.6 Gestion de la cartographie des risques — 11
2. Risques des principaux processus .................................................... — 12
2.1 Management de l’organisation ................................................................ — 12
2.2 Information ................................................................................................ — 13
2.3 Recherche et développement................................................................... — 14
2.4 Marketing ................................................................................................... — 15


2.5 Achats......................................................................................................... — 15
2.6 Production.................................................................................................. — 16
2.7 Vente........................................................................................................... — 17
2.8 Risques professionnels ............................................................................. — 17
2.9 Risque social .............................................................................................. — 19
2.10 Autres fonctions ........................................................................................ — 20
Pour en savoir plus ........................................................................................ Doc. AG 1 100v2

érer et agir, c’est prendre des risques. Si les risques n’existaient pas, il n’y
G aurait ni succès, ni échec. Il n’y aurait pas d’action et les objectifs des
organisations, publiques ou privées, ne seraient pas atteints ! Risque et oppor-
tunité sont d’ailleurs identiques. Le même symbole chinois signifie risque et
opportunité. Le premier est craint, le second est recherché, mais ce ne sont
que les deux catégories des conséquences inéluctables d’un futur incertain.
Agir, ce n’est pas prendre n’importe quels risques. C’est prendre
consciemment des risques mesurés et maîtrisés. Gérer ses risques, c’est savoir
les identifier, les quantifier, les réduire de façon économique, puis éventuelle-
ment financer leur gravité résiduelle.
Toute organisation (entreprise, collectivité, association) a des objectifs et des
obligations. Les premiers sont fixés et attendus par ses actionnaires, clients,
membres. Les secondes le sont par la société et s’expriment par l’expression
des besoins des citoyens, la loi et la responsabilité pénale qui découle de cette
dernière.
La Gestion globale des risques (GGR) fournit une réponse globale et cohé-
rente à ces deux préoccupations, car gérer ses risques, c’est savoir identifier,
quantifier et maîtriser les évènements susceptibles d’avoir des impacts néga-
tifs sur ces deux catégories d’enjeux.
Toutes les fonctions de l’organisation sont des sources de risques. Ces
risques affectent tout ou partie des ressources humaines, matérielles ou finan-
cières de l’organisation. Ils naissent du caractère aléatoire des facteurs internes
et externes qui régissent la vie de l’organisation.
La GGR se définit donc comme une démarche transversale reposant sur la
recherche systématique de la variance de ces facteurs. Ainsi, naît une méthode
p。イオエゥッョ@Z@。カイゥャ@RPQS

stochastique de management, qui refuse de ne considérer que la valeur

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GESTION GLOBALE DES RISQUES ______________________________________________________________________________________________________

moyenne des facteurs de prise de décision, mais essaye d’envisager les varia-
tions possibles de ces facteurs, en termes d’intensité et de probabilité.
Un exemple simple illustre cette définition quelque peu théorique ; la réus-
site d’un investissement industriel dépend de nombreux facteurs :
– coût de recherche et développement ;
– résultats des essais ;
– marché potentiel ;
– prix de revient du produit ;
– disponibilité des installations industrielles ;
– concurrence ;
– fluctuation des indicateurs économiques ;
– réglementation, etc.
Chacun de ces facteurs est une grandeur aléatoire qui se définit par sa
moyenne et sa variance. Ne raisonner que sur les moyennes est une hérésie
mathématique et une faute de gestion : la tête dans le réfrigérateur et les pieds
dans le four, en moyenne on se sent bien !
La GGR est une démarche d’analyse de ces facteurs, puis de leur synthèse,
permettant d’éclairer le décideur sur les conséquences de ses décisions. La
mise en œuvre de moyens de réduction des fluctuations ou de leurs
conséquences permet ensuite de réduire la fourchette d’incertitude sur le
résultat final.


Nous parlons ici d’organisations, et non plus seulement d’entreprises, car la GGR concerne
aussi les associations ou les collectivités publiques.

1. Méthodologie de la GGR
L’objectif de la GGR n’est pas d’éviter les risques, mais de savoir
quels risques valent la peine d’être pris (figure 1).
La Gestion globale des risques ne doit pas non plus se
confondre avec la conformité aux règles et règlements imposés
par la loi.

Exemple
La meilleure illustration de cette différence est peut-être l’image
suivante : dans une culture de conformité, quand on arrive à un
passage pour piétons, on s’arrête lorsque le rouge piéton clignote, il
n’est pas question de traverser.
Dans une culture de gestion des risques, on regarde le feu pour les
véhicules, on regarde à gauche et à droite pour voir si des véhicules
arrivent, et si la voie est libre, on traverse !

La Gestion globale des risques, dans sa dualité économique et


sociale, ce n’est pas se poser la question « Puis-je faire cela ? »,
c’est-à-dire « Est-ce légal, dans les limites des lois et Figure 1 – Jusqu’où aller pour cueillir le fruit sans tomber ?
règlements ? », mais « Devrais-je agir ainsi ? », c’est-à-dire « Est-ce
en accord avec mes principes, pourrai-je me regarder demain dans
un miroir, si ma décision fait la une des journaux, pourrai-je 1.1 Notion de risque
regarder en face mes collègues, mes collaborateurs, mes amis,
mon conjoint, mes enfants ? » Le risque est un concept bien mal défini et encore plus galvaudé !
De cette définition découle une méthodologie que l’on peut On utilise ce même mot pour désigner une situation
résumer comme suit : dommageable, tout ou partie des causes de cette situation, ses
– identifier les risques ; conséquences, voire même la victime potentielle.
– en quantifier les impacts et la probabilité d’occurrence ; On pourra ainsi dire :
– tenter de réduire ces derniers lorsque le risque est jugé – il y a un risque d’orage (situation) ;
inacceptable en l’état, en mettant en œuvre des moyens techniques, – la machine risque une surcharge électrique (cause) ;
organisationnels ou juridiques à la fois efficaces et efficients. – je risque de perdre mon investissement (conséquence) ;
Ce qui suit explicitera cette définition quelque peu ésotérique ! – cette installation est un risque majeur pour ses assureurs (victime).

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______________________________________________________________________________________________________ GESTION GLOBALE DES RISQUES

On classera aussi parmi les risques « purs » tous ceux générés


Nous adopterons la définition suivante du risque : un risque par l’environnement de l’organisation à un niveau :
est un évènement aléatoire, trouvant son origine dans l’organi-
sation ou hors de celle-ci, et qui affecte une ou plusieurs – social (grèves, émeutes, lobbying) ;
ressources – matérielles ou immatérielles, humaines, possé- – juridique et politique (lois et décrets, protectionnisme, normes,
dées ou non – et a un impact négatif sur la performance ou les règlements) ;
obligations sociétales de l’organisation. – géographique (pollution, tempêtes, etc.) ;
– économique et commercial (fluctuation des marchés, variation
des indices) ;
Certains risques peuvent avoir des effets positifs. Ce sont ceux – technique (nouveaux procédés, flux tendus, automatisation,
que l’organisation recherche. concentration).
D’autres risques ont certainement des effets négatifs. Ce sont ■ Risques endogènes
ceux que l’organisation craint.
Certains risques sont donc directement générés par l’activité de
■ Risques négatifs l’organisation. On les qualifie d’endogènes. D’autres naissent dans
Les risques négatifs sont, bien sûr, les catastrophes naturelles l’environnement de l’organisation et l’affectent par contrecoup. On
ou humaines : les appelle exogènes.
– Seveso ; Tous ces risques n’ont évidemment pas la même acuité.
– Tchernobyl ; Certains sont négligeables pour une organisation, majeurs pour
– Amoco Cadiz ; une autre. Certains naissent, d’autres disparaissent avec les évolu-
tions de l’organisation et de son contexte. Ils ne sont pas non plus
– Bhopal ;
indépendants, et nous verrons que les mesures prises pour traiter
– AZF, etc.
l’un d’entre eux peut avoir des effets sur d’autres, voire en faire
Ce sont aussi des risques moins catastrophiques, mais tout naître de nouveaux.
aussi dramatiques pour leurs victimes, tels que :
– les divers incendies et autres dommages aux biens ou à
l’environnement ;
1.2 Concept fondamental de la GGR

– les cambriolages ;
– les accidents du travail ;
– les sinistres informatiques, etc. Il ne faut pas confondre risque et danger : le premier naît
Ce sont encore des risques auxquels on pense moins, tels que lorsque le second est susceptible de menacer une ressource de
par exemple : l’organisation. Un danger n’a pas d’étiquette. Le danger est
– les pertes de savoir-faire ; l’évènement déclencheur du scénario de risque. Ce peut être une
erreur, un dysfonctionnement, ou tout autre évènement interne ou
– les conséquences de l’absence de veille technologique,
externe à l’organisation, dont l’occurrence perturbera le fonction-
commerciale ou réglementaire ;
nement normal de cette dernière.
– les défaillances des fournisseurs ou des clients ;
– les engagements de responsabilité civile ou pénale de l’organi- Un danger ne nous concerne que s’il affecte une ressource,
sation ou de ses dirigeants ; c’est-à-dire un élément matériel ou immatériel nécessaire à la
– la malveillance ; réalisation du processus considéré. Si le danger impacte une
– les défaillances de la logistique et des transports ; ressource, le scénario de risque se réalisera et aura des impacts de
– la contrefaçon. natures différentes.
Ce n’est qu’en identifiant le scénario de risque qu’un danger
peut générer que l’on peut imaginer, puis estimer les dommages
Ces risques sont qualifiés de « purs » par les assureurs, par qu’il causera en frappant une ressource. Ce processus est illustré
opposition aux risques dits « spéculatifs » qui découlent des sur la figure 2 qui résume à elle seule la méthodologie d’identifica-
choix de l’organisation. tion et de quantification des risques.
Cette distinction, est discutable, car la frontière entre les On notera qu’un même scénario a des impacts de natures très
deux types de risques est mal définie. Quelle est, par exemple, différentes :
la part de la fatalité dans un choix imprudent d’un fournisseur – dommages aux biens, aux personnes, à l’environnement ;
peu fiable ? Pourtant, la « carence fournisseur » peut s’assurer.
– pertes financières ;
– altération de la réputation ;
– engagements de responsabilité, etc.
■ Risques purs
La cartographie globale des risques permet de réunir les
La plupart des risques qualifiés de « purs » sont peu ou prou démarches historiquement cloisonnées par nature d’impact. En
exacerbés par les activités de l’organisation et la façon dont elle effet, les préoccupations ont évolué en fonction des enjeux :
les gère. Bien sûr, un incendie a pour origine un évènement aléa- – qualité et sécurité incendie dans les années 1950 ;
toire, la plupart du temps non souhaité. Mais l’exposition de – environnement ;
l’organisation au sinistre dépend de sa stratégie industrielle et – sécurité informatique ;
commerciale : – intrusion ;
– choix des procédés et des flux (juste-à-temps) ; – gestion des ressources humaines ;
– externalisation et sous-traitance ; – image ;
– localisation de l’activité ; – responsabilités sociétales.
– sensibilité des marchés, etc. Dans chaque domaine, se sont développées des compétences et
Les assureurs du risque de dommages ne s’y trompent d’ailleurs des systèmes de gestion spécifiques, l’organisation a désigné un
pas ; leurs visites dépassent largement la seule vulnérabilité des responsable qui développe ses propres méthodes d’identification
installations, mais abordent de plus en plus la sensibilité de l’orga- et de maîtrise des risques et ignore les dommages collatéraux
nisation à l’indisponibilité de ses ressources. dans les domaines qui ne le concernent pas.

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GESTION GLOBALE DES RISQUES ______________________________________________________________________________________________________

Dommage
Qualité de continuité
des services et
fournitures

Dommage
L’audit décèle Dommages aux
des scénarios personnes
de risque

Dommages matériels

Barrières de protection : moins graves


Impact
Barrières de prévention : moins probables

Atteintes à
l’environnement

Pertes financières
Dommage

U Scénario de risque

Responsabilités
civiles ou pénales

Pertes d’image

Les processus utilisent des


Des dangers ressources matérielles,
existent, immatérielles, humaines, L’occurrence du scénario
internes et externes financières, mises à cause des dommages
à l’organisation disposition, puliques etc. de différentes natures et gravités

Figure 2 – Logigramme fondamental de la GGR

Exemple
Elle est en accord avec la norme ISO 31000 qui, dans son
Un accident du travail cause un dommage corporel identifié dans le introduction, précise bien son objet :
cadre du Document Unique requis par la loi, mais le chargé de sécu-
rité en charge de cette analyse ne mesure généralement pas les « Les organismes de tous types et de toutes tailles sont
conséquences pénales éventuelles, les dommages aux biens, ou confrontés à divers risques susceptibles d’affecter l’atteinte de
encore l’impact médiatique de cet accident. leurs objectifs. Ces objectifs peuvent concerner un ensemble
d’activités de l’organisme, depuis ses initiatives stratégiques
jusqu’à ses activités opérationnelles, ses processus et ses pro-
Ce cloisonnement a été renforcé par l’élaboration successive et jets, et se décliner en termes de résultats et d’impacts stratégi-
indépendante des normes, référentiels et autres outils de gestion ques, opérationnels et financiers ainsi que de réputation.
des risques. On aura ainsi les référentiels ISO 9001, ISO 14001,
Toute activité d’un organisme implique des risques. Le mana-
OHSAS 18001 (ou ILO-OSH 2001) pour la qualité, la sécurité et
gement du risque apporte une aide à la prise de décision par la
l’environnement, mais aussi des recommandations APSAD pour la
prise en compte de l’incertitude et de son effet sur l’atteinte des
préservation des biens, la norme ISO 27002 pour les systèmes
objectifs, et à l’évaluation de la nécessité de chaque action (...).
d’information, etc.
La même approche de management du risque peut être
Ce cloisonnement est source de doublons, d’oublis, de adoptée pour toutes les activités d’un organisme, y compris les
gaspillage d’énergie et d’argent, et d’actions conflictuelles. projets, les fonctions spécifiques, les actifs et les produits ou
activités, renforçant ainsi la liaison entre ces activités et les
La GGR apporte cohérence et performance à ces démarches que
objectifs globaux de l’organisme ».
seule l’histoire a séparées.

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______________________________________________________________________________________________________ GESTION GLOBALE DES RISQUES

1.3 Identification des risques


Le risque naît à la rencontre d’un danger et d’une ressource.
L’identification des risques commence donc par une carto-
graphie des processus dans laquelle sont précisées les entrées et
les sorties, la contribution aux objectifs fondamentaux de l’organi-
sation et les ressources utilisées.
Entretiens avec Visite des
Base de données les responsables installations et
Ce dernier élément mérite d’être précisé : une ressource est de retour de processus et entretiens avec
un élément matériel, immatériel ou humain, possédé ou non, d’expérience des collaborateurs les opérateurs
interne ou externe, permettant de réaliser le processus. Ce sera
tout aussi bien :
– les machines ;
– le personnel et son savoir-faire ; Scénarios de
– les procédures ; risque
– les brevets ;
– les services publics ; Figure 3 – Processus d’identification des risques
– le contexte réglementaire.

1.4 Quantification et qualification


Une fois ces processus identifiés, le diagnostic sera conduit
selon deux axes complémentaires : les processus, d’une part, et
des risques
les installations, d’autre part. Le premier permet d’identifier les
■ Quantifier un scénario de risque, c’est lui donner une valeur
insuffisances ou les dysfonctionnements de l’organisation. Le
représentant sa probabilité et sa gravité totale (somme des
second cible les failles dans la conception, l’adéquation, l’opéra-
gravités sur les différents types de dommages concernés).


tion, l’entretien ou la maintenance des installations. Cette double
approche requiert que l’auditeur ait, à la fois la compétence tradi- ■ Qualifier un scénario de risque, c’est lui donner des attributs per-
tionnelle du consultant, capable d’analyser les processus, et une mettant des requêtes et des tris parmi tous les scénarios identifiés.
connaissance technique suffisante pour comprendre les installa-
tions, en elles-mêmes et en regard des modes opératoires. Cette
double compétence est rare. Le choix des auditeurs – internes ou 1.4.1 Quantification des risques
externes – est donc primordial. La quantification d’un scénario de risque repose sur deux
À quel niveau de l’organisation le diagnostic doit-il être conduit ? grandeurs :
– la probabilité d’occurrence de l’évènement redouté, c’est-à-dire
Selon Machiavel, « ce que l’on a prévu est presque toujours
de l’impact du danger sur une ressource ;
sans risque ». L’auditeur doit donc conduire un exercice de
– la somme des dommages pour chaque typologie de dommage.
maïeutique au plus près du terrain, tant il est vrai que seuls ceux
qui vivent la réalité des opérations peuvent en percevoir les Des grilles d’évaluation doivent être définies : peu importe
risques. L’encadrement pense qu’il faut écrire des modes qu’elles soient justes, il suffit qu’elles soient fidèles et reflètent la
opératoires et en imposer le strict respect, alors que les opérateurs hiérarchie des préoccupations et des valeurs de l’organisation.
savent que les modes opératoires ne peuvent pas toujours être Le tableau 1 donne un exemple de grille de quantification de la
respectés, et qu’ils doivent souvent s’en affranchir pour bien probabilité d’occurrence du scénario redouté.
produire. En outre, l’expérience montre que l’affirmation de
Machiavel, et la négation subjective du risque qu’elle suppose, Le tableau 2 donne un exemple de grilles de quantification des
croît avec la position hiérarchique, reconnaître une prise de risque dommages. Les typologies de dommages sont bien entendu à
dans les activités que l’on gère étant trop souvent perçu comme adapter à chaque organisation, de même que les valeurs données
un aveu d’incompétence. à chaque niveau de dommage pour chaque typologie, en fonction
de l’importance relative pour l’organisation de chaque typologie et
L’auditeur ira donc sur le terrain, rencontrera les opérateurs et des niveaux choisis.
les chefs d’équipe, se fera expliquer comment le travail est fait et
C’est pourquoi le choix de ces grilles est un acte de manage-
visualisera simultanément les lieux et les équipements concernés.
ment qui doit être validé au plus haut niveau de l’organisation.
Sans aucune censure quant à leur réalité, il collectera ainsi des
scénarios de risques, saynètes exprimant avec leurs mots les
craintes des hommes de la production, et qui toujours auront les Tableau 1 – Exemple de grille de probabilité
trois composantes énoncées plus haut : le danger, les ressources
affectées, et la nature des conséquences. N’est pas impossible au vu des
La figure 3 résume les trois composantes du diagnostic de risque. Très improbable 1 connaissances actuelles, mais non
encore observé à l’échelle mondiale
S’est déjà produit, mais dans des
Improbable 2
On y notera le retour d’expérience. Il est en effet très impor- conditions corrigées depuis lors
tant de constituer une base de données de retour d’expérience,
même si le passé ne se répète jamais à l’identique et si les don- S’est déjà produit dans des
nées techniques et économiques changent très rapidement. Probable 4 conditions comparables à celles
observées
Volontairement ou non, les mauvaises expériences sont
rapidement effacées de la mémoire collective, car elles sont Peut raisonnablement se produire,
vécues comme des échecs. Or, une organisation qui ne valo- Très probable 3 et/ou s’est déjà produit pour ce type
rise pas ses échecs se met elle-même en situation d’échec. d’activité ou d’installation

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est strictement interdite. – © Editions T.I. AG 1 100v2 – 5

VS

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Démarche générale de maîtrise


du risque dans les industries de procédé

par Yvan VÉROT


Directeur Hygiène-Sécurité-Environnement Industrie chez ATOFINA

1. Éléments de maîtrise des risques ...................................................... AG 4 605 – 2


1.1 Principes généraux et définitions............................................................... — 2
1.2 Approche générale de la conception à la mise sur le marché................. — 3
2. Démarche appliquée dans les industries de procédé .................. — 4
2.1 Spécificités des industries de procédé ...................................................... — 4
2.2 Risques et inconvénients associés aux activités ...................................... — 4


2.3 Approche globale. Processus continu ....................................................... — 5
2.4 Tactique de maîtrise des risques ................................................................ — 5
2.5 Identification des risques ............................................................................ — 5
2.6 Système de management ........................................................................... — 7
2.6.1 Éléments de base................................................................................ — 7
2.6.2 Approche managériale....................................................................... — 7
2.6.3 Système de management .................................................................. — 7
2.6.4 Système « harmonisé »...................................................................... — 8
Références bibliographiques ........................................................................
— 9

out au long de son histoire, pour sa survie et son développement, l’humanité


T s’est affrontée aux risques naturels ainsi qu’à ceux résultants de ses activi-
tés. Toute action, toute initiative comporte une part de risque et d’incertitude.
Pour tout être, le risque est consubstantiel à l’existence.
Par l’évolution importante et rapide, dans un passé récent, des sciences et des
techniques, les pays industrialisés ont atteint un niveau élevé de développement
qui a permis d’accéder à une longévité et à un état sanitaire jamais atteints,
d’améliorer considérablement notre niveau de vie et de bien être, de répondre,
et au-delà, aux besoins en nourriture en dépit de l’accroissement démogra-
phique.
Bien que source de déchets, ce « progrès », essentiellement matériel a été glo-
balement accepté dans le présupposé qu’il devait, corrélativement, s’accompa-
gner d’un progrès social et moral. Il est désormais l’objet de doutes et de
discussions. Il est source d’interrogations, voire d’inquiétudes, sur les inconvé-
nients et nuisances liés au développement résultant de cet accroissement des
connaissances et de cette amélioration des techniques.
Toute activité industrielle comporte des risques. Ceux-ci suscitent, tant de la
part du public que des acteurs de l’entreprise, des interrogations, des attentes,
des exigences. Ceci fait donc obligation à tout industriel, dont les activités sont
porteuses d’inconvénients et de risques, d’apporter des réponses aux interroga-
tions ainsi exprimées :
— en tout premier lieu, il lui revient de montrer que l’initiative ou le projet
envisagé (nouveau produit, nouvelle activité), s’inscrit dans un contexte d’amé-
p。イオエゥッョ@Z@ェオゥャャ・エ@RPPQ

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VU
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DÉMARCHE GÉNÉRALE DE MAÎTRISE DU RISQUE DANS LES INDUSTRIES DE PROCÉDÉ ______________________________________________________________

lioration, c’est-à-dire de recherche d’un « bien », d’un « mieux », d’un « plus » et


que les « bienfaits » attendus sont bien en mesure de compenser les
« inconvénients » qui peuvent en résulter ;
— il convient ensuite de montrer que, dans le cadre des connaissances et des
techniques du moment, les risques associés à l’activité envisagée (ou à l’usage
du produit) ont été correctement identifiés et que les dispositions pour en assu-
rer la maîtrise ont été définies et mises en œuvre.
On peut, sur la base d’un certain nombre d’éléments scientifiques et techni-
ques, se donner une image « technique » répondant aux critères « d’objectivité »
du risque associé à une activité. La notion de risque revêt, cependant, également
une composante subjective liée aux composantes socioculturelles « du moment
et du lieu ». Ce « risque perçu », résultante des appréciations individuelles et col-
lectives, est un construit « social ».
Le présent document a pour objet de présenter les dispositions généralement
adoptées dans les industries de procédé pour la gestion globale des risques.
Dans une première partie seront présentés les éléments génériques constitutifs
de la démarche générale de maîtrise des risques dans un contexte industriel.
Dans la deuxième partie les concepts précédemment évoqués seront illustrés
par les dispositions retenues dans les industries de procédé en insistant notam-
ment sur l’approche globale et le processus continu dans la maîtrise des risques,
sur les éléments de tactique de maîtrise des risques et sur la mise en place de
systèmes de management.


1. Éléments de maîtrise
des risques Rassembler les connaissances

Évaluation du risque
1.1 Principes généraux et définitions
Se former un jugement
Pour une société exerçant des activités industrielles, vouloir assu-
rer la maîtrise des risques liés à ses activités signifie, au premier
chef, que les préoccupations correspondantes figurent au nombre
de ses objectifs et sont déclarées comme telles.
De façon générale, cela signifie qu’en premier lieu l’entreprise se
Prendre une décision
dote en la matière :
— d’abord, d’une politique définissant les valeurs et objectifs Gestion du risque
correspondants ;
— ensuite, d’une organisation et de moyens ; Assurer la mise en œuvre
— enfin, d’un ensemble de méthodes et procédures.
Par ailleurs, prétendre avoir la maîtrise d’un système suppose que
l’on dispose des connaissances nécessaires pour en avoir une com-
préhension convenable et que l’on a su définir et mettre en œuvre Figure 1 – Gestion du risque industriel
les dispositions techniques et organisationnelles permettant d’en
contrôler le fonctionnement et de réagir aux événements imprévus.
Ainsi de façon générale, vouloir assurer la maîtrise des risques
liés à un nouveau projet (nouveau produit, nouvelle activité) sup-
pose dans l’ordre que : Dans le présent document nous utiliserons les définitions sui-
— l’on dispose des connaissances nécessaires ; vantes (figure 2) :
— l’on se soit formé un jugement au regard de ces connais- — danger : propriété intrinsèque à une substance, à un sys-
sances, de règles (internes ou externes) établies et d’un système de tème qui peut conduire à un dommage ;
valeurs (internes ou externes) existant ; — situation de danger : situation caractérisée par la coexis-
— l’on adopte en conséquence une décision ; tence, éventuellement temporaire, d’un élément de danger en
— l’on procède ensuite à la mise en œuvre de cette décision, dans interaction potentielle avec un « élément vulnérable » suscep-
le respect des éléments qui y ont conduit. tible de subir des dommages ;
— risque accidentel : il caractérise la survenue du dommage
Les deux premières étapes constituent les éléments de ce que l’on
potentiel lié à une situation de danger. Il est habituellement
appelle l’évaluation du risque ; les deux dernières étapes consti-
défini par deux éléments : la probabilité de survenue du dom-
tuent les éléments de ce que l’on appelle la maîtrise du risque
mage et la gravité des conséquences.
(figure 1).

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Système de management de la sécurité :


mise en place sur site

par Bernard CHARAVEL


Ingénieur de l’École supérieure de chimie de Marseille (ESCM) et de l’Institut
de pétroléochimie et de synthèse organique (IPSOI), docteur en sciences physiques
Ancien directeur sécurité, environnement, hygiène industrielle de Rhône-Poulenc Agro
Ancien Corporate Manager of Safety and Environment d’Aventis CropScience

1. Nécessité de la mise en place d’un SMS........................................... AG 4 650 - 2


1.1 Démarche volontaire et création de valeurs.............................................. — 2
1.2 Prérequis ...................................................................................................... — 3
1.3 SMS et réglementation locale .................................................................... — 3
1.4 SMS dans l’entreprise ................................................................................. — 3
2.
2.1
Aspects organisationnels ......................................................................
Organigramme du site ................................................................................


4
4

2.2 Responsable ou coordinateur sécurité ...................................................... — 4
2.3 Engagement de la direction........................................................................ — 4
2.4 Définition de fonctions ................................................................................ — 5
2.5 Objectifs........................................................................................................ — 5
2.6 Formation du personnel et de l’encadrement........................................... — 8
2.7 Comité ou représentants sécurité (HSE).................................................... — 8
2.8 Préparation aux situations d’urgence ........................................................ — 8
2.9 Communication ........................................................................................... — 8
2.10 Documentation ............................................................................................ — 9
3. Mesure des performances ..................................................................... — 9
3.1 Indicateurs.................................................................................................... — 9
3.2 Analyse des accidents/incidents................................................................. — 10
3.3 Mesure des écarts. Actions correctives ..................................................... — 12
4. Revues de direction................................................................................. — 15
5. Vers l’amélioration continue des performances ............................. — 15
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. AG 4650

es activités industrielles n’échappent pas au besoin de sécurité qui a tou-


L jours habité les hommes et les sociétés, plus ou moins ressenti suivant les
époques et les types d’activités. Le besoin de travailler en toute sécurité peut
être perçu de différentes manières selon que l’on évoque des activités telles que
le nucléaire, la production d’explosifs, la chimie ou bien d’autres activités appa-
remment moins dangereuses comme les transports, le bâtiment ou la
mécanique. Et pourtant, les statistiques nationales montrent qu’il existe de gran-
des différences en matière d’accidents du travail entre ces activités. À titre
d’exemple, le taux de fréquence des accidents du travail avec arrêt (TF1) pour
toute l’industrie française est d’en v  v
  
     
 
vités BTP et seulement de 10 pour la chimie, avec quelques leaders comme
Rhône-Poulenc, Rhodia et DuPont (TF1 allant de 3 à 0,3).
Pourquoi une telle disparité ? Nonobstant la dangerosité de certaines activités,
p。イオエゥッョ@Z@ェ。ョカゥ・イ@RPPR

il est un fait certain que les entreprises obtenant les meilleurs résultats de sécu-

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SYSTÈME DE MANAGEMENT DE LA SÉCURITÉ : MISE EN PLACE SUR SITE _________________________________________________________________________

rité sont celles qui ont pris conscience de la nécessité de s’occuper de sécurité à
tous les niveaux et dans tous les domaines. Elles ont pour la plupart mis en place
des systèmes de management de la sécurité (SMS) faisant partie intégrante du
management global.
Il est extrêmement rare de voir de nos jours des entreprises ou des sites indus-
triels qui ne se sentent pas concernés par les questions de sécurité, mais il est
beaucoup plus courant de voir certaines de ces entreprises ne prendre en
compte qu’une partie du problème, très souvent la « partie visible de l’iceberg »
et d’être confrontées un jour à un accident grave que personne n’avait prévu.
L’objectif de cet article est de donner le minimum d’informations nécessaires,
jugées indispensables à qui dirigeant d’entreprise, responsable de site, respon-
sable sécurité, veut mettre en place un système de management de la sécurité
global, simple, efficace, qui conduira certainement l’entreprise à une améliora-
tion continue de ses résultats.
Alain Gayon, dans l’article AG 4 600, démontre clairement l’importance de la
sécurité dans les entreprises. Nous allons ici exposer les moyens pour y parvenir
à travers la mise en place d’un système de management intégré à la marche de
l’entreprise et/ou du site industriel.

1. Nécessité de la mise Un accident peut arriver à n’importe quel stade du processus


industriel et pas seulement au stade de la production, mais aussi
en place d’un SMS dans les autres étapes telles que la livraison et le stockage des

U matières premières et des produits finis, les opérations de mainte-


nance, le transport et l’utilisation des produits finis, etc. Le système
de management de la sécurité doit donc s’attacher à analyser tous
Le principe de base d’un système de management de la sécu- les aspects des processus concernant l’activité industrielle.
rité (SMS) est de se préparer à l’éventualité de tout accident.

La notion de sécurité est trop souvent associée à une situation où 1.1 Démarche volontaire et création
tout accident est totalement impossible. Le dictionnaire Larousse en
donne même la définition suivante : « sécurité : situation où l’on n’a
de valeurs
aucun danger à craindre ». Cette définition est trop restrictive car
elle ne correspond pas à ce concept de management retenu par les
principales sociétés industrielles. La notion de sécurité dans les entreprises a fortement évolué ces
dernières années. Dans les années 1960, la sécurité était perçue
De nombreux exemples montrent clairement que des accidents comme une contrainte imposée par les organismes extérieurs,
sont arrivés alors que les acteurs industriels pensaient être en totale essentiellement administratifs, chargés de mettre en œuvre des
sécurité. Citons quelques cas d’une liste extrêmement longue de réglementations et très souvent interprétées par l’industriel comme
catastrophes survenues au XXe siècle : coûteuses et sans valeur ajoutée par rapport à une assurance.
– naufrage du Titanic en 1912 ;
– Challenger en 1986 (explosion de la navette américaine au Fort heureusement, ces contraintes administratives existent tou-
décollage) ; jours pour certaines activités industrielles dites à risques et sont
incontournables. À titre d’exemple, la nouvelle directive Seveso II
– Flixborough au Royaume-Uni en 1974 (incendie causé par une (2000) impose aux sites concernés de mettre en place un système
fuite de cyclohexane) ; de management de la sécurité [AG 4 600].
– Three Miles - Island en 1979 (émissions radioactives dans une
centrale nucléaire américaine) ; Depuis les années 1980, les analyses d’accidents avec leurs con-
séquences directes et indirectes ont clairement fait apparaître que la
– Bhopal en Inde en 1984 (fuite de méthyl isocyanate) ;
plupart des accidents peuvent être évités si un minimum de moyens
– Tchernobyl en Ukraine en 1986 (explosion d’un réacteur techniques et/ou organisationnels sont mis en place. Le coût d’un
nucléaire) ; accident, pour une entreprise, est très largement supérieur à ce que
– Sandoz en Suisse en 1984 (incendie d’un magasin de stockage) ; n’importe quelle compagnie d’assurance peut garantir pour ce type
– Mexico (explosion de type BLEVE – boiling liquid expansion d’accident. On estime à 10 % environ du coût total d’un accident
vapor explosion – survenu sur un stockage de propane liquéfié) ; (coûts direct + coûts indirects) la somme remboursée par une com-
pagnie d’assurance suite à un accident grave. De plus, les consé-
– port Herriot sur le Rhône à Pierre-Bénite en 1989 (incendie puis quences d’un accident pour une entreprise sont parfois très
explosion de cuves de stockage d’hydrocarbures). sérieuses, pouvant entraîner sa disparition pure et simple.
L’article [SE 1 045] analyse certains de ces accidents, en donne les Exemple : l’accident de Bhopal en 1984 a entraîné la disparition de
causes et les conséquences. la compagnie Union-Carbide.
L’analyse de ces accidents montre qu’un minimum de manage-
ment aurait très certainement réduit leur probabilité d’occurrence. Ainsi, maîtriser les risques accidentels revient à diminuer les
Nota : le Bureau des analyses des risques de pollution industrielle (BARPI), qui dépend pertes humaines et financières, en limitant l’atteinte à l’intégrité
du ministère de l’Industrie, analyse pour la France la plupart des accidents survenus dans des personnes et en évitant un déficit d’image de marque et des
les activités industrielles, qu’il s’agisse d’industries de procédé, de transports ou d’indus-
tries manufacturières.
pertes de parts de marchés.

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________________________________________________________________________ SYSTÈME DE MANAGEMENT DE LA SÉCURITÉ : MISE EN PLACE SUR SITE

1 5
13,8
12,8 12,8
12,3
12
12 11,6

9
8
7,2 7,2

6
5,1 5 5

3
3 2,6
2,1
1,3
1 1
0,6
0,3 0,28
0
1 993 1994 19 9 5 1996 1997 1998 1999

TF1 TF2 ROP/CA %

ROP résultats opérationnels


Figure 1 – Résultats sécurité et économiques
CA chiffre d'affaires de Rhône-Poulenc Agro entre 1993 et 1999

À partir de ces constatations, la mise en place d’un système de 1.3 SMS et réglementation locale

management de la sécurité (SMS) intègre aujourd’hui une nouvelle
notion qui est celle de la création de valeur. Il est très généralement
admis aujourd’hui qu’un SMS efficace et optimal contribue à La globalisation et la distribution mondiale des produits entraîne
l’amélioration de la rentabilité de l’entreprise. Cela est confirmé par aujourd’hui une internationalisation des sites de production. Un
une étude réalisée en 1994 par le Centre européen des fabrications SMS quel qu’il soit ne peut ignorer les réglementations locales aux-
de l’industrie chimique (CEFIC) qui montre clairement qu’il existe quelles l’industriel doit se soumettre.
une relation entre la rentabilité propre d’une entreprise et les taux Si une réglementation existe dans le pays concerné et que certai-
de fréquence des accidents (TF1, TF2, § 3.1) : les entreprises les plus nes demandes sont plus contraignantes que le système développé,
performantes économiquement sont celles qui ont les meilleurs c’est la réglementation locale qui s’applique.
résultats de sécurité. Une étude analogue aux États-Unis réalisée
par le Chemical Manufacturers of America (CMA) confirme ces Si aucune réglementation locale n’existe ou si cette réglemen-
résultats. tation est moins contraignante que le système de management
défini par l’entreprise, c’est ce dernier qui s’applique.
Il en va de même pour l’amélioration des résultats économiques
qui suivent très sensiblement l’amélioration des résultats de sécu- Les recommandations données par la suite pour l’établissement
rité (figure 1). Cette corrélation tient au fait que la mise en place d’un d’un SMS sur un site industriel doivent être considérées comme exi-
SMS est étroitement liée au management global de l’entreprise. gences minimales dans les cas où aucune réglementation locale ne
Bien manager la sécurité équivaut à bien manager l’entreprise et vient s’ajouter ou se substituer à celle-ci.
réciproquement. C’est pourquoi certaines entreprises, comme
DuPont (États-Unis) considèrent que les performances de sécurité
doivent être prises comme indicateur prioritaire. 1.4 SMS dans l’entreprise

Le système de management de la sécurité s’apparente de très


1.2 Prérequis près au système de management de la qualité totale (SMQT), que
l’on trouve aussi très souvent sous l’appellation anglo-saxonne de
total quality management (TQM). En sécurité, la non qualité est un
L’entreprise, convaincue de la nécessité de la mise en place d’un
dysfonctionnement qui peut conduire à un accident.
SMS, doit s’assurer que les points suivants sont bien pris en
compte : En effet, qu’est ce qu’un accident ? Nous pourrons admettre la
— connaissance exhaustive de l’ensemble des risques d’acci- définition suivante : « événement subit, indésirable, résultant de la
dents dus à toutes les activités du site ; combinaison d’un certain nombre de causes, pouvant entraîner des
— mise en place des moyens nécessaires pour en diminuer la pertes humaines (fatalités, atteinte à l’intégrité des personnes),
gravité et la probabilité d’occurrence à un niveau acceptable ; matérielles (destruction d’appareils, perte de production, produit
— réaction possible dans les plus brefs délais en cas de situation non conforme), environnementales (pollution accidentelle remédia-
accidentelle ; ble ou non, nuisances) ou économiques (perte de parts de marché,
— mise en place d’un système de communication interne et atteinte de l’image de marque), chez le producteur ou chez un client
externe et un système de formation approprié ; (mauvaise utilisation du produit) ».
— objectifs fixés à court, moyen et long termes, prenant en Et comment estimer si un accident peut survenir ou pas ? C’est la
compte les résultats obtenus, avec comme principe l’amélioration notion de risque accidentel qui prend en compte la probabilité
continue des performances. d’occurrence (§ 3.3.1.4).

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SYSTÈME DE MANAGEMENT DE LA SÉCURITÉ : MISE EN PLACE SUR SITE _________________________________________________________________________

Le terme de sécurité englobe en fait un ensemble communément tion sur les principes de base qu’il faut absolument suivre si l’on
appelé H S E pour hygiène, sécurité, environnement : veut obtenir un système de management efficace et bénéfique pour
— hygiène : risques pour la santé, suite à des expositions chroni- le site et pour l’entreprise.
ques pour les personnes travaillant sur le site industriel ou pour les
utilisateurs des produits commercialisés ;
— sécurité : risques accidentels, sur les personnes, les biens et
l’environnement ;
2. Aspects organisationnels
— environnement : protection de l’environnement immédiat ou
lointain vis-à-vis des émissions chroniques du site. Dans un premier temps, il est nécessaire de clarifier l’organi-
gramme du site (§ 2.1) et de nommer un responsable (§ 2.2). L’enga-
Certaines entreprises de dimension internationale ont développé gement de la hiérarchie, et de la direction en particulier, à tous les
et mis en place des SMS types qu’ils proposent sur le marché. niveaux est essentiel (§ 2.3). La mise en place du SMS suppose non
Exemples : seulement de définir les fonctions de chacun (§ 2.4) et de fixer les
objectifs (§ 2.5), mais aussi d’établir le système de formation qui
■ DuPont propose les produits suivants : l’accompagne (§ 2.6).
— système de management basé sur douze éléments considérés
comme fondamentaux ;
— STOP (safety training observation program), basé sur l’étude du 2.1 Organigramme du site
comportement des opérateurs ;
— BST (behaviour safety training) basé aussi sur le comportement ;
■ DNV (Der Norske Veritas) développe et commercialise des systè- Un organigramme du site montre les fonctions et services, avec le
mes intégrés de management : ISRS (International Safety Rating Sys- nom des responsables. La fonction de chaque personne et le ratta-
tem) [1], IERS (International Environment Rating System), IQRS chement à sa hiérarchie doivent apparaître dans l’organigramme.
(International Quality Rating System). Dans le cas d’un site important, l’organigramme peut être en plu-
sieurs parties : un organigramme montrant l’ensemble du site et un
D’autres entreprises ont développé leur propre système de mana- organigramme détaillé pour chaque fonction et/ou service.
gement.
Sur tout document concernant l’organigramme doivent figurer la

U ■ Rhône-Poulenc : SIMSERP, système intégrant le management de la


sécurité et de l’environnement chez Rhône-Poulenc, composé de
vingt-quatre éléments.
date de mise à jour ainsi que la signature du responsable hiérarchi-
que, chef d’établissement ou chef d’entreprise pour un organi-
gramme général de site, chef de service pour un organigramme de
fonction ou de service.
■ Rhodia : 3 R HSE, règles et recommandations de Rhodia pour le
management HSE. Les différents postes sont décrits dans des notes de définition de
fonction qui doivent inclure l’aspect « sécurité ».
■ Groupe SNPE : système de management constitué autour de qua- Nota : lorsque l’administration effectue une enquête suite à un accident ou à un événe-
tre éléments. ment grave survenu sur un site, l’organigramme est très souvent le premier élément
demandé et consulté par les enquêteurs.
■ ESSO : OIMS, operations integrity management system qui repose
sur onze éléments.
■ Département GME (grande masse Europe) d’Air Liquide : sys- 2.2 Responsable ou coordinateur sécurité
tème basé sur les normes ISO 9002 et ISO 14001.
■ EPSC (European Process Safety Centre) : Safety Management Cette personne doit apparaître sur l’organigramme, de préférence
System, Sharing Experience in Process Safety, système principale- rattachée au plus haut niveau hiérarchique. Cela peut être le chef
ment développé pour la sécurité des procédés [2] [3]. d’établissement (directeur d’usine, président de la société si le site
et l’entreprise sont confondus) ou une personne qui lui est directe-
La norme anglaise BS 8750, relative aux systèmes de mana- ment rattachée.
gement de la sécurité, concerne principalement la protection Parler d’un responsable ou d’un coordinateur n’est pas innocent ;
des travailleurs dans le domaine de la prévention des accidents cela signifie que la personne en question représente l’entreprise
du travail. En 2001, cette norme n’a pas encore été reprise par auprès de l’administration et des tribunaux. La notion de responsa-
l’ISO. bilité intègre donc la notion de pouvoir de décision. Ce pouvoir
implique d’avoir à disposition des moyens financiers et humains. Si
Les entreprises qui ont développé et mis en place des systèmes ce n’est pas le cas, cette personne ne pourra qu’être qu’un coordina-
de management de la sécurité ont bien entendu pris en compte les teur sécurité. Le véritable responsable de la sécurité sera alors son
spécificités de leurs métiers. Toutefois, tous reposent sur les princi- supérieur hiérarchique, le chef d’établissement.
pes fondamentaux suivants, que nous allons développer dans la
suite de l’article : Cette notion essentielle de responsabilité doit être clairement
— connaissance exhaustive de l’ensemble des activités ; explicitée dans la définition de fonction.
— principe de l’amélioration continue ;
— recherche de performances optimales ;
— intégration du SMS au management de la qualité totale ;
2.3 Engagement de la direction
— application de la règle de la roue de Deming, PDCA (plan, do,
check, action). Il existe de nombreux exemples positifs dans le cas d’un engage-
ment, et négatifs dans les cas où les directions ne se sont pas impli-
Il n’est pas question de retranscrire et d’analyser ici l’ensemble
quées qui confirment cette nécessité. C’est un acte volontaire de la
des systèmes de management de la sécurité développés dans le
part du management.
monde, qu’ils soient associés ou non avec d’autres tels ceux qui
intègrent le management de l’environnement et/ou de la qualité, La direction du site, son directeur ou toute l’équipe de direction,
mais de donner au lecteur qui désire se lancer sur son site industriel s’engage par écrit sur un certain nombre de points concernant
dans la mise en place d’un management de la sécurité, une informa- l’amélioration des performances de sécurité (encadré 1).

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AG 4 650 − 4 © Techniques de l’Ingénieur, traité L’entreprise industrielle

WP
Industrialisation des procédés et usine du futur
(Réf. Internet 42602)

1– Introduction

2– Management de l'entreprise industrielle

3– Gestion de projet et ingénierie

4– Développement de produits

5– Gestion des risques

6– Développement durable et outils industriels Réf. Internet page



Génie des procédés, développement durable et innovation . Enjeux et perspectives J500 73

Mettre en oeuvre une démarche écoresponsable : objectifs, méthodes et exemples G8510 77

Écoconception : état de l'art des outils disponibles G6010 81

Pollution industrielle de l'eau. Caractérisation, classiication, mesure G1210 89

Approche systémique des déchets G2000 93

Écologie industrielle : gestion des matières premières secondaires dans le G2008 95


métabolisme territorial - illustrations
Progiciel Thermoptim . Boîte à outils pour l'énergétique BE8047 101

7– Production

8– Management du changement, progrès continu et


innovation

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jUPP

Génie des procédés, développement


durable et innovation
Enjeux et perspectives

par Jean-Claude CHARPENTIER


Professeur et directeur de recherche CNRS
Ancien directeur de l’ENSIC, de l’ESCIL et de l’ESCPE Lyon et du département sciences pour
l’ingénieur du CNRS
Past-president de la fédération européenne de génie chimique
Laboratoire réactions et génie des procédés CNRS/ENSIC/Université de Lorraine

1. Globalisation des marchés et conscience sociétale....................... J 500 - 2


2. Intensification des procédés et fabrication des propriétés
d’usage des produits ............................................................................... — 3
2.1 Chimie lourde ............................................................................................... — 3
2.2 Chimie fine.................................................................................................... — 3
3.
4.
Approche multiéchelle de temps et d’espace ..................................
Développement durable .........................................................................


3
6

4.1 Contrôle total multiéchelle du procédé ...................................................... — 6
4.2 Intensification des procédés ....................................................................... — 6
4.3 Génie du produit : élaboration des propriétés d’usage
et fabrication du produit .............................................................................. — 8
4.4 Génie du procédé : modélisation et simulation informatique ................. — 9
5. Conclusions................................................................................................ — 14
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. J 500

e génie des procédés concerne l’ensemble des sciences et technologies qui


L permettent les transformations physico-(bio)chimiques optimales des
matières premières et des énergies en produits utiles aux consommateurs.
Pour répondre aux besoins des industries chimiques et annexes qui doivent
satisfaire à la fois des demandes économiques changeantes et rester mondia-
lement compétitives, le génie des procédés moderne doit appréhender à la fois
la demande des marchés pour des produits à propriétés d’usage définies aux
nano et micro-échelles de temps et d’espace et les contraintes sociales et envi-
ronnementales des procédés industriels aux échelles méso et macro de
production. Il doit répondre au défi de proposer des procédés comportant des
technologies durables pour des produits verts « sustainable technology for
green product ».
Nous verrons que cela requiert une démarche scientifique comportant une
approche système intégré multidisciplinaire et multiéchelle de longueur et de
temps, appliquée aux différents processus moléculaires et de transferts
souvent couplés qui interviennent aux différentes échelles de la chaîne de pro-
p。イオエゥッョ@Z@ウ・ーエ・ュ「イ・@RPQS

duction chimique : c’est-à-dire bien comprendre comment les phénomènes à


une échelle déterminent les propriétés et comportements à l’échelle supérieure
et ce, depuis l’échelle moléculaire jusqu’aux échelles du site de production.

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est strictement interdite. – © Editions T.I. J 500 – 1

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GÉNIE DES PROCÉDÉS, DÉVELOPPEMENT DURABLE ET INNOVATION _________________________________________________________________________

Nous verrons aussi que cette approche multiéchelle, l’approche verte du génie
des procédés qui combine à la fois un attrait des marchés (« market pull ») et
une demande d’innovation technologique (« technology push ») est menée avec
quatre objectifs principaux qui sont fortement mobilisés sur l’intensification des
procédés et sur le génie du couple « produits verts/procédés verts ».
Le but est de produire beaucoup plus et mieux en consommant beaucoup
moins, et de produire des molécules plus durables possédant des enjeux envi-
ronnementaux et économiques avec des technologies et procédés innovants
conduisant à une meilleure utilisation des matières premières et de l’énergie.

1. Globalisation des marchés Toutes ces feuilles de route attirent l’attention sur une inquié-
tude globale planétaire où le génie des procédés devra jouer un
et conscience sociétale rôle crucial : durabilité, santé, sécurité et environnement, énergie,
eau, nourriture et boisson, génie des bio systèmes, énergie solaire,
fusion nucléaire, etc. Et enfin, ces feuilles de route « militent » pour
Face à la globalisation des marchés, à l’accélération des partena- faire évoluer le génie des procédés vers un génie des procédés
riats et des demandes d’innovation, connaître les produits et les moderne volontairement concerné par le développement
procédés qui seront compétitifs dans l’actuelle économie mondia- durable [2] [8] [12] [31] [43] [63] [69] [106]. Ainsi les procédés
lisée est la première des exigences adressées à la recherche et à existant et les nouveaux procédés doivent et devront être progres-
l’innovation en génie chimique et plus généralement en génie des sivement adaptés aux principes de la « chimie verte ».
procédés. De fait, si au début des années 1970, la durée de
demi-vie d’innovation de produit (temps d’accès au marché) était ■ La seconde exigence est directement liée à la demande évolutive
d’environ 10 ans, aujourd’hui une année est souvent considérée des marchés qui conduit à un double défi. Dans les pays en dévelop-
comme un temps long, conséquence de la compétition croissante pement où la main-d’œuvre est bon marché, les contraintes locales
qui règne sur les marchés. En outre, plus de 14 millions de dans la régulation de la production sont moindres et par suite les
composés chimiques peuvent être synthétisés, 100 000 peuvent coûts de production sont faibles et très compétitifs. Les pays indus-
être trouvés sur le marché, mais seulement quelques pourcents trialisés quant à eux connaissent une croissance rapide dans la
d’entre eux se trouvent dans la nature et donc la plupart doivent demande client pour des produits à propriétés d’usage ciblées et en


être délibérément conçus, formulés, synthétisés et fabriqués pour même temps des contraintes issues du public et des médias portant
répondre au besoin de l’humanité, pour tester une idée ou bien sur les procédés dans les domaines de la sécurité et de l’environne-
encore pour satisfaire notre soif de connaissance. Ainsi, un grand ment, combinées à des outils de réglementation comme l’analyse
nombre de demandes du XXIe siècle concernent : du cycle de vie du produit « du berceau à la tombe » [voire par
– le développement de biomatériaux ; exemple la norme européenne pour les produits chimiques Regula-
– la préparation de nanoparticules ; tion, Evaluation, Authorization of CHemicals (REACH)].
– le relargage contrôlé de médicaments, les bionanotechnologies ; Pour répondre à une telle demande sociétale de développement
– la conversion de la biomasse ; durable (durabilité) et offrir une contribution au combat contre la
– l’utilisation des liquides ioniques et systèmes aqueux biphasiques ; destruction environnementale et le comportement « non durable »
– la dynamique de relaxation des composés moléculaires de la production mondiale actuelle où il apparaît que seulement un
complexes ; quart des richesses extraites de la Terre se retrouve sous forme de
produits et de services (figure 1), la chimie et le génie des procé-
– la fabrication de microréacteurs polyphasiques pour des
dés sont désormais confrontés à de nouveaux défis portant sur
réactions sélectives, c’est-à-dire, fluoration.
des systèmes complexes à la fois à l’échelle des molécules, à
Toutes ces demandes sont clairement focalisées sur des l’échelle des produits et à l’échelle des procédés.
exigences sociétales, comme :
– la séquestration du CO2 ;
– la combustion chimique en boucle ;
– le reformage et l’oxydation catalytique partielle du méthane
pour produire du gaz de synthèse ;
– la synthèse des biocarburants ou la production d’hydrogène.
Produits et Pollution, déchets
Ressources et perturbations
La plupart de ces sujets sont répertoriés dans des « feuilles de naturelles Services
environnementales

route » publiées depuis une quinzaine d’années, telles :


Seulement
– les 12 principes de la chimie verte [3] ; 25 % poids de ce
– les 12 principes de l’ingénierie verte [4] ; qui entre dans le
– les 12 grands défis pour l’ingénierie énoncés par l’Académie tuyau sort sous
Nationale Américaine d’Ingénierie (NAE USA 2008) ; forme de produits
et services
– la feuille de route de l’IChemE 21st Century Chemical
Engineering (IChemE roadmap (UK) 2007) ;
– la feuille de route des 10 domaines de recherche à développer
Besoin d’améliorer l’efficacité des procédés
en ingénierie verte pour l’industrie pharmaceutique et la chimie de production d’un :

F
F2*!#$% &'()*++,-..01
fine (site ACS Green Chemistry institute) ; • FACTEUR 4 (Von Weizsacker, 1998)
– la feuille de route européenne pour l’intensification des procé-
dés pour les quatre secteurs industriels : (a) PETCHEM pour pétro-

• *#+$-21
chimie et chimie lourde ; (b) FINEPHARM pour chimie de
spécialités et pharmacie ; (c) INFOOD pour ingrédients nutrition- Figure 1 – Comportement non durable de l’humanité
nels et (d) CONFOOD pour consommation d’aliments. (doc. World Rechearch Institute)

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J 500 − 2 est strictement interdite. − © Editions T.I.

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__________________________________________________________________________ GÉNIE DES PROCÉDÉS, DÉVELOPPEMENT DURABLE ET INNOVATION

2. Intensification sation de solvants verts comme les liquides ioniques ou les fluides
supercritiques et fluorés) au sein de réacteurs microstructurés [55]
des procédés et élaboration [56] [57]. Cette approche qui porte sur l’intensification de la
conception du procédé à la fois par une intensification de la trans-
des propriétés d’usage formation chimique et par une intensification des phénomènes de
transfert de chaleur et de masse dans un réacteur microstructuré
est fortement portée par le projet de la Commission européenne
2.1 Chimie lourde de l’usine du futur F3 FACTORY, 2009.

En effet, pour les produits de commodités et pour les produits


intermédiaires à forts tonnages supérieurs à 1 000 t/an (ammoniac, 2.2 Chimie fine
acide sulfurique, carbonate de calcium, ethylène, aldéhydes, métha-
nol, ethanol, benzène, butadiène, acide adipique, amines...) qui Par ailleurs, la chimie fine, la chimie de spécialités et la
représentent encore aujourd’hui un secteur majoritaire de l’écono- production de principes actifs et de matériaux hautement spéciali-
mie (40 % des marchés) et pour lesquels les brevets ne portent pas sés avec les industries correspondantes (santé, cosmétique, agro-
habituellement sur les produits, les procédés ne peuvent plus être alimentaire) mettent en jeu l’interface chimie/biologie. Cette chimie
durablement sélectionnés sur les seuls critères de l’exploitation éco- de spécialités implique également l’upgrading et la conversion des
nomique « comptable ». Au contraire, il faut établir une bruts lourds pétroliers et des intermédiaires, la conversion des
compensation avec à la fois une sélectivité accrue et des économies produits dérivés du charbon ou des gaz de synthèse en fuel,
liées au procédé lui-même. Le défi est de produire d’énormes quan- hydrocarbures et produits oxygénés.
tités au moindre coût et le problème devient complexe parce que
des facteurs tels que la sécurité, la santé, les aspects environnemen- Pour un consommateur qui n’apprécie généralement plus (ou pas
taux (incluant la raréfaction des matières premières et de l’énergie seulement) un produit pour ses spécifications techniques, mais plu-
et le recyclage des produits et sous-produits ainsi que la demande tôt pour ses critères de qualité (morphologie, couleur, esthétique,
de technologies non polluantes) doivent être pris en compte car le stabilités chimique et biologique, dégradabilité, activité thérapeuti-
client achète un procédé qui ne pollue pas (ou pollue peu) et qui est que, propriétés de surface/colloïdales, propriétés sensorielles...) et
parfaitement sécurisé et automatisé. pour ses fonctions (adhésion, lavage, assainissement...), le contrôle
de ces valeurs d’usage (end-use properties), l’expertise dans la
De plus, n’oublions pas que les capacités de production mondiale conception du procédé, l’ajustement continuel aux demandes chan-
doivent s’accroître d’un facteur 6 d’ici à 2050, si l’on suppose un geantes du consommateur, et la rapidité de la réaction et de la
taux de croissance de l’économie mondiale de 4 % par an. Ainsi, réponse aux conditions du marché sont les éléments dominants
tendre vers des équipements pour une production à l’échelle mon- économiques qui sont et devront de plus en plus être pris en compte
diale pourra bientôt nécessiter un changement partiel ou total de par le génie des procédés moderne. Pour les produits où la valeur


technologie, sachant que les technologies actuelles ne peuvent plus ajoutée est une nanostructure spécifique, le consommateur paiera
être mises en œuvre dans un esprit « on construit toujours plus un surcoût pour une telle fonction, qu’elle soit dans un aliment, une
gros », si l’on doit appréhender des capacités de production encore poudre de lavage, une peinture ou dans un enduit, ou bien encore
jamais rencontrées dans les industries chimiques et connexes. dans un additif pour carburant. Le facteur clé pour la production de
On est ainsi confronté à la nécessité d’une intensification des pro- produits pharmaceutiques ou cosmétiques n’est pas le coût, mais le
cédés de production conduisant à un changement dans les techno- temps d’arrivée sur le marché, c’est-à-dire, la rapidité de la décou-
logies afin d’extrapoler de façon fiable de nouveaux procédés, en verte et de la production de ces produits. Tous ces produits ciblés à
passant d’une échelle intermédiaire à une très grande échelle pour haute valeur ajoutée, à court temps de vie et à grandes marges
laquelle nous n’avons pas d’expérience antérieure. Cela nécessite bénéficiaires, conçus « sur mesure » pour le consommateur en ce
d’adapter la structure, l’architecture et les équipements du procédé qui concerne leur formulation et leur fabrication requièrent aussi
aux conditions des transformations physico-(bio)chimiques plutôt une intensification des procédés avec de nouveaux équipements
que d’adapter la chimie et les conditions opératoires aux équipe- dont la conception dépasse le seul objectif de produire un unique
ments existants et à leurs limites inhérentes d’utilisation. produit de bonne qualité et à bas coût. Au contraire, le besoin
exprimé aujourd’hui porte sur des équipements de production poly-
Le projet européen IMPULSE (Integrated Multiscale Process Units valents, de petites dimensions, facilement lavables, désencrassa-
with Locally Structured Elements) de 2009. Le but de ce projet qui bles, désinfectables, transformables et opérationnels pour d’autres
compte la participation de nombreuses sociétés industrielles et sociétés fabrications (productions flexibles, procédés continus ou en batch,
de services européennes en collaboration avec des centres de recherche conceptions modulaires) [13].
académiques est d’obtenir une amélioration radicale des productions à
grande échelle grâce à une intégration ciblée au sein des unités de pro-
Les considérations précédentes sur la demande et la
duction, d’équipements innovants de petites tailles et microstructurés
conception des produits à propriété d’usage désirées et de leurs
pour fournir les conditions opératoires locales requises pour la transfor-
procédés de production intensifiés doivent être prises en compte
mation chimique en augmentant le mélangeage et le transfert de cha-
dans la définition et l’évolution scientifique du génie des procé-
leur, ce qui augmente la productivité et peut augmenter la sélectivité.
dés moderne, mais comment et avec quelle approche ?
Ainsi, les unités de production à grande échelle peuvent être créées par
intégration et interconnexions d’éléments divers, localement structurés
à petite échelle au sein des unités de macroproduction à grande échelle,
c’est-à-dire la diminution du nombre d’équipements dans l’usine, la
réduction des tailles d’équipement et une meilleure prédiction de l’extra- 3. Approche multiéchelle
polation de la taille des équipements [54] [62] [ 7 4 ] [ 8 8 ] .
de temps et d’espace
Ou bien encore on est confronté à la nécessité d’intensification
des procédés en « intensifiant la chimie (novel process windows) » Le but du génie des procédés est le développement de concepts,
par une accélération de la cinétique chimique pour réduire de méthodologies et de technologies pour mieux comprendre,
considérablement le temps de la réaction. Cela implique, par concevoir, dessiner et faire fonctionner de façon optimale les procé-
exemple, la mise en œuvre de conditions très sévères de fonction- dés de transformations physico-chimiques et biologiques de la
nement (températures et pressions extrêmes, concentrations très matière première et de l’énergie en des produits utiles au
importantes pour les réactifs, absences de solvants ou bien utili- consommateur.

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GÉNIE DES PROCÉDÉS, DÉVELOPPEMENT DURABLE ET INNOVATION _________________________________________________________________________

Mais, comme nous l’avons souligné précédemment, l’accent mis mique) pour la compréhension, la conception et le fonctionnement
aujourd’hui sur l’élaboration des propriétés d’usage de certains pro- optimal de tous les processus physico-bio-chimiques complexes
duits nécessite l’utilisation d’une large variété de technologies qui interviennent aux différentes échelles d’espace et de temps
incluant notamment le nouveau rôle des microtechnologies, rencontrées dans ce qui est défini comme la chaîne de production
c’est-à-dire l’utilisation de micromélangeurs, de micro-échangeurs de chimique chemical supply chain (figure 2). Cela va des échelles
chaleur et de matière, et de réacteurs microstructurés pour l’intensifi- nano (voir pico) et micro pour les processus moléculaires, les
cation de certains procédés de production. 60 % de tous les produits usines cellulaires, les clusters, les particules et pour les couplages
vendus par les industries chimiques et connexes sont des solides entre réactions (bio) chimiques et phénomènes de transport et de
cristallins, amorphes ou polymériques. Ces matériaux doivent avoir transferts de matière et de chaleur jusqu’aux échelles méso, macro
une forme clairement définie pour posséder les qualités d’usage sou- et méga des unités et du site de la production industrielle du pro-
haitées. Il en va de même pour les produits pâteux et les émulsions. duit, et ce, avec des procédés continus ou en batch, bien contrôlés
La production de tous ces produits concerne globalement des maté- et non polluants.
riaux hautement spécialisés, des principes actifs et des produits de Pour illustrer, la figure 3 présente schématiquement une vision
chimie de spécialité qui sont en fait beaucoup plus complexes en ter- multi-échelle d’un procédé catalytique à lit fluidisé avec la locali-
mes de structure moléculaire et de nano et microstructures que les sation des différentes échelles de longueur où interviennent de
produits traditionnellement fabriqués par la chimie lourde. façon très liée les phénomènes caractérisant la physico-chimie, le
Voilà pourquoi le génie des procédés moderne est concerné par génie du produit, le génie du procédé de production, le génie des
le développement de procédures systématiques (approche systé- systèmes de production et même le cycle écologique.

Temps
Mois
Entreprise
Site
Jour
Usines
h
Unités de procédé
min Systèmes simple
s ou multiphases
Particules,
films minces petit
ms intermédiaire


Cluster Échelle
ns grand
chimique
Molécules
ps

1 pm 1 nm 1 µm 1 mm 1m 1 km Longueur
Aujourd’hui le génie des procédés moderne est concerné par la compréhension,
la conception, l’expérimentation, la modélisation et simulation, et le
fonctionnement optimal de tous les processus complexes qui interviennent aux
différentes échelles de « la chaîne de production chimique », depuis les échelles
des nano et microsystèmes où les composés chimiques doivent être synthétisés
et caractérisés au niveau moléculaire (chimie verte) jusqu’aux échelles
industrielles des procédés durables fonctionnant en continus ou en batch
(procédés verts).

Figure 2 – Multiéchelle de la chaîne de production chimique

MICRO MESO MACRO

Bouilleur
CO2

Air
Cendres
En
gra
is

n
h arbo
et c
asse
Biom

Air Pulvérisation Approvisionnement


nanostructure élément agrégats équipement unités de
molécules assemblage (~ 1 µm) ~ 1 mm) (~ 1 cm) (~ 1 cm) production (~ 1 cm)

Chimie et physique Génie des procédés Systèmes écologiques


Génie du produit Génie du système de procédés

Figure 3 – Différentes échelles hydrodynamiques d’un procédé à lit fluidisé

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Mettre en œuvre une démarche


écoresponsable : objectifs,
méthodes et exemples
par Christel FIORINA
Chef de projet en environnement et développement durable
Chargée de cours à l’université de Nancy
Formatrice en écoresponsabilité pour l’Institut de formation en environnement (IFORE)
Enseignante à l’École nationale supérieure des mines de Paris

1. Définition et origines du concept d’écoresponsabilité........... G 8 510 – 2


1.1 Du verdissement à l’écoresponsabilité ............................................. — 2
1.2 Lien entre écoresponsabilité et stratégie nationale
de développement durable 2010-2013 ............................................... — 3
2. Quelques éléments préalables au lancement de la démarche — 4
2.1 Guides, outils et formations à la disposition du chef de projet ....... — 4
2.1.1 Guides dédiés à la mise en œuvre d’une démarche
écoresponsable ........................................................................ — 4
2.1.2 Normes et certifications .......................................................... — 5
2.1.3 Se former : le dispositif de formation à l’écoresponsabilité
du ministère du Développement durable ............................... — 5
2.2 Réaliser un benchmarking et se constituer un réseau ...................... — 5
3.
3.1
3.2
Lancer la démarche écoresponsable dans son organisation..
S’engager dans la démarche .............................................................
Réaliser un état des lieux ou un diagnostic ......................................



5
7
7

3.3 Définir le périmètre d’intervention et les objectifs ........................... — 7
3.3.1 Cerner un périmètre d’intervention à partir de l’état
des lieux ................................................................................... — 7
3.3.2 Communiquer sur les résultats de l’état des lieux et le futur
périmètre de la démarche ....................................................... — 9
3.3.3 Fixer des objectifs : quand le mieux est l’ennemi du bien .... — 10
4. Déployer la démarche .................................................................... — 11
4.1 Constituer la ou les équipe(s) projet(s) ............................................. — 11
4.2 Structurer le plan d’actions ............................................................... — 11
4.2.1 Déterminer les actions à mettre en œuvre ............................. — 11
4.2.2 Choisir les bons indicateurs .................................................... — 11
4.3 Assurer le suivi des actions : quand le chef de projet devient chef
d’orchestre .......................................................................................... — 12
4.4 Communiquer et former en continu .................................................. — 12
4.5 Intégrer l’écoresponsabilité dans le rapport de développement
durable................................................................................................ — 14
5. Quelques exemples de démarches dans les administrations
d’État et collectivités..................................................................... — 14
5.1 Exemple dans une administration d’État : la direction
départementale des territoires de l’Orne .......................................... — 14
5.2 Exemple dans un établissement public : la Bibliothèque nationale
de France (BnF) .................................................................................. — 15
5.3 Exemple d’une collectivité : la ville de Chalon-sur-Saône ................ — 15
6. Conclusion........................................................................................ — 15
Pour en savoir plus.................................................................................. Doc. G 8 510
p。イオエゥッョ@Z@ッ」エッ「イ・@RPQQ

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METTRE EN ŒUVRE UNE DÉMARCHE ÉCORESPONSABLE : OBJECTIFS, MÉTHODES ET EXEMPLES ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

vec l’émergence des notions de « responsabilité environnementale »,


A « sociale » et « sociétale » des organisations, les démarches écoresponsa-
bles se développent dans les administrations et établissements publics, comme
dans le monde de l’entreprise. Pour ces organismes, l’objectif est de tendre vers
l’exemplarité tant dans leurs activités quotidiennes que dans leurs stratégies
d’investissement. Néanmoins, l’intérêt de déployer une politique d’écorespon-
sabilité dépasse ces seuls items. En effet, de par ses impacts sur le fonctionne-
ment interne et les processus de travail, elle s’avère être un formidable outil de
management et de conduite du changement, dans une époque marquée par
une montée des préoccupations environnementales et sociales, qui se traduit
par un renforcement de la législation dans ces domaines. Elle génère en outre
des économies évidentes et, in fine, permet de gagner en efficience. Enfin,
l’écoresponsabilité améliore sensiblement l’image de l’entreprise ou de l’insti-
tution dans laquelle elle est déployée, au regard d’une opinion publique de plus
en plus sensible à ces questions.
En conséquence, de nombreux acteurs publics et privés se lancent dans l’éco-
responsabilité. Dans les services dépendant de l’État, une circulaire datant de
décembre 2008 oblige les administrations et établissements à mettre en place,
suivre et évaluer des plans administration exemplaire. De même, de nombreux
agendas 21 et plans climat territoriaux voient le jour dans les collectivités (vil-
les, communautés d’agglomération, conseils généraux, régions). Enfin, certai-
nes entreprises lancent, quant à elles, des actions volontaristes en matière de
développement durable et communiquent fortement sur le sujet.
Toute démarche écoresponsable réussie repose sur son management, met-
tant en adéquation des objectifs clairement identifiés et portés au plus haut
niveau avec des moyens humains, techniques et financiers mobilisés. Elle
requiert la participation de tous et une communication en continu. Il s’agit


donc d’un projet à part entière, qu’il convient de manager avec rigueur et
conviction. Cet article fait le point sur les étapes clés d’une telle entreprise, pro-
pose des éléments de méthode et présente quelques initiatives menées dans
les secteurs publics comme privés.

entreprises doivent se montrer responsables dans plusieurs domai-


1. Définition et origines nes : environnement, social, sociétal et économique.
du concept L’écoresponsabilité comporte donc des thématiques plus larges
que le verdissement. Il s’agit non seulement de préserver et de
d’écoresponsabilité mettre en valeur l’environnement, mais également de contribuer à
l’amélioration des conditions de travail et au développement
économique.

1.1 Du verdissement Bien que les collectivités et établissements publics soient les
principaux concernés, cette démarche de développement durable
à l’écoresponsabilité peut aussi être mise en œuvre dans les entreprises privées, quelle
que soit leur taille.
Le concept d’écoresponsabilité a succédé à celui de verdisse-
ment, adopté en 1995 lors d’une réunion d’un G7 au Canada. Le Ses intérêts sont en effet multiples :
verdissement était alors conçu comme un ensemble d’actions – se positionner comme un acteur exemplaire ;
essentiellement techniques, visant à la maı̂trise des impacts du – repenser l’organisation pour gagner en efficience ;
fonctionnement courant d’une organisation sur l’environnement. – anticiper un renforcement de la législation et de la
Aujourd’hui, le principe d’écoresponsabilité s’inscrit dans une réglementation ;
approche plus globale de prise en compte des enjeux du dévelop- – répondre aux préoccupations croissantes des citoyens et
pement durable. En effet, compte tenu de la sensibilité croissante consommateurs ;
de l’opinion, les administrations, établissements publics et – développer son image de marque.

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–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– METTRE EN ŒUVRE UNE DÉMARCHE ÉCORESPONSABLE : OBJECTIFS, MÉTHODES ET EXEMPLES

décliné la SEDD en 2003 dans sa stratégie nationale du développe-


Le G7 d’Halifax de juin 1995 et le verdissement ment durable (SNDD) [1], couvrant la période 2003-2008. Sa ver-
de l’économie sion actualisée a été éditée en juillet 2010 par les services du Pre-
mier ministre, pour une durée de trois ans (2010-2013) [2] [3].
Le G8 (ou « groupe des 8 ») est une organisation informelle
réunissant les huit principales puissances économiques mon- Dans ce document d’une soixantaine de pages, l’État propose
diales : les États-Unis, le Canada, le Japon, le Royaume-Uni, aux acteurs publics comme privés un cadre de travail dans lequel
la France, l’Allemagne, l’Italie et la Russie. Cette dernière a inté- s’inscrire, grâce à la mise en œuvre d’actions concrètes. Les prota-
gré le groupe en 1998. C’est la raison pour laquelle on parlait gonistes sont ainsi invités à s’engager dans neuf défis.
de G7 jusqu’à cette date. & Défi n 1 : consommation et production durables. L’objectif est
Les dirigeants des nations concernées se réunissent chaque
d’orienter les « modes de production et de consommation vers
année, selon un agenda prédéfini qui ne concerne pas unique-
une économie plus durable, alliant compétitivité, maı̂trise des
ment les questions économiques. Ainsi, le sujet du développe-
impacts sur l’environnement, qualité de vie et progrès social ».
ment durable a été abordé lors de la rencontre des chefs de
Avec ce défi, les principes de développement durable ont vocation
gouvernement à Halifax en juin 1995. Outre des mesures liées
à interagir sur le marché de l’offre et de la demande : modifier la
à l’abaissement de la dette des pays les plus pauvres et à la
demande grâce à une sensibilisation accrue des citoyens aux pro-
réduction de la précarité, la promotion d’un mode de dévelop-
blèmes sociaux et environnementaux mais aussi transformer l’offre
pement plus respectueux de l’environnement a été au centre
en poussant les entreprises à proposer des produits écoresponsa-
des débats. En conséquence, le G7 a déclaré dans un commu-
bles. Dans ce cadre, une expérimentation sur l’étiquetage environ-
niqué : « Nous travaillerons de concert avec les organisations
nemental de certains produits [5] est menée depuis le 1er juillet
et tous leurs membres à ce que les institutions multilatérales
2011. L’originalité de la démarche vient de la volonté d’informer le
[banque mondiale, FMI, agence mondiale de garantie des
consommateur sur le bilan écologique global du produit, ajoutant
investissements, etc.] fassent du développement durable un
par exemple à la traditionnelle empreinte carbone des indications
objectif central de leurs politiques et de leurs programmes, y
sur la qualité de l’eau ou encore la quantité de ressources utilisées.
compris en intensifiant et en approfondissant l’intégration des
168 entreprises ont répondu à l’appel à candidatures lancé par le
considérations environnementales dans tous les aspects de
ministère du Développement durable fin 2010. L’expérimentation
leurs programmes ».
durera un an.
C’est à cette occasion que le G7 a demandé aux organisations
de prendre en compte les répercussions environnementales et & Défi n 2 : société de la connaissance. Il s’agit de favoriser l’inser-
sociales de tous leurs programmes et, notamment, de cesser tion économique des actifs grâce à la formation initiale et continue,
de soutenir des projets destructeurs dans les domaines du promouvoir les programmes de recherche et de développement en
pétrole, du gaz, des mines et des barrages. C’est ce qu’on entreprise et diffuser la culture et les savoirs académiques au sein
appelle le « verdissement », c’est-à-dire l’ensemble des du grand public. Les thèmes liés au développement durable sont
actions, essentiellement techniques, qui visent à la maı̂trise bien entendu au centre de ces politiques. La loi n 2009-1437 du


des impacts du fonctionnement de l’administration sur l’envi- 24 novembre 2009 relative à l’orientation et à la formation profes-
ronnement (figure 1). sionnelle tout au long de la vie, qui relance le droit individuel à la
formation (DIF) est, par anticipation, une des mesures relevant de
ce défi.
1.2 Lien entre écoresponsabilité & Défi n 3 : gouvernance. Il s’adresse plus spécifiquement aux
et stratégie nationale décideurs publics et promeut un système de prise de décision
de développement durable 2010-2013 fondé sur le principe de subsidiarité, de transparence et de concer-
tation avec les acteurs locaux. Les plans climat-énergie territoriaux
En Europe, l’écoresponsabilité a été impulsée par la stratégie (PECT), institués par la loi dite « Grenelle 2 » du 12 juillet 2010 et
européenne de développement durable (SEDD), officialisée en élaborés actuellement par de nombreuses collectivités territoriales
2001 et programmée sur une durée de cinq ans (2005-2010). Ses afin d’établir des stratégies d’adaptation au changement clima-
résultats sont en cours d’évaluation, dans l’optique d’une nouvelle tique, reposent sur les préceptes de ce défi par le biais d’une large
stratégie à paraı̂tre dans quelques mois. La France a, quant à elle, concertation.

1995 2001 2010


G7 d'Halifax Stratégie européenne Nouvelle stratégie européenne
du développement durable du développement durable
Verdissement (2005-2010)
des économies Écoresponsabilité (en cours d'élaboration)

1987 1992 1997 2002 2010 2012

Rapport Sommet Protocole Sommet Conférence Sommet


Burndtland de Rio de Kyoto de Johannesbourg de Copenhague de Rio
Définition Agenda 21 : Réduction Plan d'actions : Renégociation
du développement – Changement climatique des émissions – Eau du protocole
durable – Biodiversité de gaz à effet – Énergie de Kyoto
– Lutte contre la désertification de serre – Productivité agricole (échec)
– Santé
– etc.

Figure 1 – Chronologie des négociations internationales sur le développement durable depuis le sommet de Rio

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METTRE EN ŒUVRE UNE DÉMARCHE ÉCORESPONSABLE : OBJECTIFS, MÉTHODES ET EXEMPLES ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

& Défi n 4 : changement climatique et énergies. Il vise à réduire


4. Part des femmes dans les instances décisionnelles.
de façon significative les rejets de gaz à effet de serre, notamment 5. Émissions totales de gaz à effet de serre.
dans les secteurs, fortement émetteurs, du bâtiment et des dépla- 6. Empreinte carbone.
cements. La lutte contre la précarité énergétique entre dans ce 7. Part des énergies renouvelables dans la consommation
cadre. d’énergie finale.
& Défi n 5 : transport et mobilités durables. Il vise à diminuer les 8. Consommation d’énergie des transports et PIB.
kilomètres parcourus en voiture par habitant en promouvant les 9. Indice d’abondance des populations d’oiseaux communs.
modes alternatifs (train, transports en commun en site propre, co- 10. Artificialisation des sols.
voiturage, vélo) mais aussi à doubler d’ici 2025 la part modale des 11. Espérance de vie et espérance de vie en bonne santé à la
frets ferroviaire et fluvial. naissance.
12. Taux de pauvreté monétaire après transferts sociaux.
& Défi n 6 : conservation et gestion durable de la biodiversité et 13. Taux d’emploi des personnes âgées de 55 à 64 ans.
des ressources naturelles, prolongé par la stratégie nationale pour 14. Insertion des jeunes (16-25 ans) hors emploi et hors
la biodiversité. L’objectif est de déployer rapidement des mesures formation.
vigoureuses de conservation des espèces et écosystèmes menacés 15. Aide publique au développement.
(zones humides, captages d’eau potable, littoraux) et d’établir des À ceux-ci s’ajoutent 4 indicateurs de contexte :
corridors biologiques permettant le développement des êtres 1. Revenu national net et PIB/habitant.
vivants. 2. Taux de chômage et taux de sous-emploi.
3. Distribution des revenus.
& Défi n 7 : santé publique, prévention et gestion des risques. Il
4. Démographie : taux de fécondité.
repose sur la connaissance des risques naturels et techniques, l’in- Chaque année, les administrations doivent faire remonter les
formation du public et la réalisation du plan national santé environ- indicateurs les concernant auprès de leur ministère de tutelle.
nement 2009-2013 publié le 9 juillet 2009. Un haut-fonctionnaire au développement durable, chargé
& Défi n 8 : démographie, immigration et inclusion sociale. L’objet notamment de « préparer la contribution de son administration
est de réduire les inégalités sociales et de rétablir des équilibres à à la SNDD, de coordonner l’élaboration des plans d’action cor-
la fois territoriaux et intergénérationnels. Il préconise, par exemple, respondants et d’en suivre l’application » [4], évalue la perfor-
la généralisation de clauses sociales dans les marchés publics. mance du dispositif à partir des indicateurs collationnés. Il pré-
sente ensuite le bilan à un délégué interministériel au
& Défi n 9 : défis internationaux en matière de développement développement durable, qui prépare le rapport annuel du gou-
durable et de pauvreté dans le monde. Cet item vise, notamment, vernement au Parlement prévu par l’article 1er de la loi du
à assurer la sécurité alimentaire et énergétique, à renforcer la coo- 3 août 2009, dite « loi Grenelle 1 ».
pération entre les pays ou à lutter contre le changement climatique
et à renforcer le respect des droits de l’homme dans le monde.


Concrètement, toute administration ou entreprise souhaitant
s’engager dans une démarche écoresponsable peut se référer à un 2. Quelques éléments
ou plusieurs de ces défis. La hiérarchisation des thèmes à traiter
dépend de sa politique, de ses objectifs stratégiques, de sa dimen- préalables au lancement
sion, de son fonctionnement interne ou encore de sa présence à
l’international ou non. À titre d’exemple, une entreprise possédant de la démarche
des filiales ou des sous-traitants dans les pays émergents aura tout
intérêt à travailler sur des cibles entrant dans le champ du défi n 9.
Dans un autre domaine, un organisme de sécurité sociale accor- La démarche écoresponsable est un projet à part entière qui fait
dera sans doute une grande importance aux défis n 7 et 8. évoluer à la fois les modes de pensée, les comportements et l’orga-
Il paraı̂t donc intéressant, dès le lancement de la démarche, de nisation. À ce titre, il est particulièrement important de définir, dès
passer en revue les grands items de la stratégie nationale du déve- son lancement, le cadre d’intervention et la méthodologie de mise
loppement durable afin de vérifier en quoi les objectifs fixés locale- en œuvre. Sa réussite est ainsi conditionnée par le respect de quel-
ment dans le cadre de l’écoresponsabilité permettent de répondre ques points clés, de l’état des lieux en passant par le déploiement
aux défis globaux identifiés au niveau national. En effet, des indica- des actions et la communication des résultats.
teurs de suivi et de performance ont été déterminés pour chaque
défi et font l’objet d’un tableau de bord, mis à jour annuellement.
2.1 Guides, outils et formations
En conclusion, il existe aujourd’hui une volonté réelle d’inciter à la disposition du chef de projet
les différents organismes à entrer dans des démarches écores-
ponsables. Le lancement de la nouvelle SNDD a été 2.1.1 Guides dédiés à la mise en œuvre
accompagné de la mise en place d’un reporting structuré, d’une démarche écoresponsable
notamment devant le Parlement, ce qui favorise le retour
d’expérience voire le benchmarking. Outre les manuels habituels sur la gestion de projet et le déve-
loppement durable, les porteurs de démarches écoresponsables
peuvent s’appuyer sur des guides dédiés spécifiquement à cette
problématique. Le plus connu d’entre eux est le Guide des adminis-
Le reporting annuel de la stratégie nationale trations et établissements publics éco-responsables [7] de
du développement durable [2] l’ADEME, disponible à l’adresse : http://www.administrations-eco-
Le reporting de la stratégie nationale du développement responsables.ademe.fr/.
durable repose sur 15 indicateurs phares : Rédigé avec des chefs de projets écoresponsables, il comprend
1. Productivité des ressources et consommation de matières/ de nombreux liens vers des outils, tableurs, grilles d’analyse ainsi
hab. que des fiches pratiques et de retours d’expérience. Il s’agit donc
2. Sorties précoces des 18-24 ans (sans diplômes du d’un document précieux, à utiliser tout au long de la démarche.
secondaire).
Pour les collectivités territoriales, l’ADEME publie également un
3. Part de la dépense intérieure en recherche et développement
fascicule, Les collectivités et l’éco-responsabilité [8], qui insiste
dans le PIB.
notamment sur les enjeux territoriaux d’une telle démarche.

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Écoconception : état de l’art


des outils disponibles
par Béatrice BELLINI
Docteur en sciences de gestion
Maı̂tre de conférences, laboratoire REEDS, université de Versailles Saint Quentin
en Yvelines

et Marc JANIN
Docteur en génie industriel
Manager, consultant en développement durable, PricewaterhouseCoopers Advisory

1. Approches des outils d’écoconception ...................................... G 6 010v2 – 3


1.1 Approche principale : objectifs d’évaluation et de préconisation .... — 3
1.2 Autres approches ............................................................................... — 3
1.3 Cartographie des outils ...................................................................... — 3
2. Présentation des outils d’évaluation et de préconisation ...... — 5
2.1 Analyse du cycle de vie ..................................................................... — 5
2.2 Approches monocritères .................................................................... — 11
2.3 Approches matricielles ....................................................................... — 12
2.4 Approches qualitatives ....................................................................... — 13
2.5 Listes ................................................................................................... — 15
2.6 Normes ............................................................................................... — 17
2.7 Guides................................................................................................. — 19
3.
3.1
3.2
Présentation d’autres outils .........................................................
Approches organisationnelles ...........................................................
Outils de communication ...................................................................



20
20
21

4. Intégration des outils dans la démarche d’écoconception .... — 23
4.1 Intégration selon le degré de maturité en matière d’écoconception — 23
4.2 Quels outils pour quelle étape de la démarche ? ............................. — 23
4.3 Quels outils pour quel acteur ? ......................................................... — 23
5. Conclusion........................................................................................ — 23
6. Annexes............................................................................................. — 25
6.1 Liste noire, grise et blanche de Volvo ............................................... — 25
6.2 Exemples de listes de contrôle .......................................................... — 29
6.3 Guidelines de Philips ......................................................................... — 30
6.4 Liste non exhaustive de logiciels d’ACV et de préconisations
d’écoconception ................................................................................. — 32
Pour en savoir plus.................................................................................. Doc. G 6 010v2

e contexte réglementaire, normatif et la pression des marchés conduisent


L de plus en plus d’entreprises à approfondir une démarche caractérisée par
l’intégration de l’environnement dès la conception des produits. Cette approche
permet, en effet, la minimisation des impacts à la source dans une optique de
prévention des pollutions. Elle est largement préférable à l’approche curative,
actuellement majoritaire au sein de la culture industrielle, traduite le plus sou-
vent par un report de la pollution, par exemple l’épuration des eaux qui mène à
la formation de boues qu’il faut ensuite traiter.
L’écoconception est définie dans le rapport technique ISO/TR 14062 comme
étant « l’intégration des aspects environnementaux dans la conception et le
développement de produits ». Cette prise en compte de l’environnement dès
la conception du produit* est en plein développement aujourd’hui, et les entre-
p。イオエゥッョ@Z@ッ」エッ「イ・@RPQQ

prises perçoivent de plus en plus l’écoconception comme un enjeu

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ÉCOCONCEPTION : ÉTAT DE L’ART DES OUTILS DISPONIBLES ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

concurrentiel et une source d’innovation. Cependant, la démarche se retrouve


de manière plus modeste dans les petites et moyennes entreprises dont les
capacités financières sont réduites.
Nota : le produit est considéré comme produit, service ou système.

À noter qu’il est nécessaire de ne pas confondre les approches liées à un site
et les approches liées au produit. En effet, de nombreux outils de management
de site existent, et même s’ils abordent parfois la question du produit, elle est
rarement centrale et orientée sur une approche tout au long de son cycle de vie
de fait multisite.
En agissant au niveau de la conception des produits, les performances envi-
ronnementales ont toutes les chances d’être optimales. Ainsi, jusqu’à 80 % des
nuisances d’un produit tout au long de son cycle de vie sont déterminées dès la
phase de conception [8]. Il est donc important de réfléchir à l’intégration de la
donnée écologique dès cette étape. Les efforts en matière d’écoconception peu-
vent d’ailleurs porter sur une ou plusieurs des phases du cycle de vie du
produit :
– la phase de développement du produit avec, par exemple, l’utilisation de
matériaux renouvelables ou moins énergivores ;
– la phase de fabrication avec, par exemple, l’emploi de procédés nécessitant
moins de matériaux, moins d’énergie ;
– la phase de distribution avec, par exemple, la diminution du volume ou du
poids des emballages ;
– la phase d’utilisation avec, par exemple, une moindre consommation
d’énergie, un accroissement de la durée de vie ;
– la phase de fin de vie avec, par exemple, une aide au désassemblage ou à la
préservation de la qualité des matériaux en vue d’un recyclage matière.
L’intégration de l’écoconception du produit peut s’avérer être une source


d’opportunités concurrentielles. Brezet [4] et Janin [21] ont ainsi défini quatre
niveaux d’écoconception qui traduisent la maturité de la démarche :
– niveau 1 : amélioration environnementale progressive de produits existants ;
– niveau 2 : reconception de produits différents, basée sur une technologie
existante, mais améliorée ;
– niveau 3 : nouveau concept présentant la même fonctionnalité mais avec
fonctions techniques différentes (par exemple : passage d’énergie fossile à
l’énergie renouvelable) ;
– niveau 4 : nouveau système productif avec passage d’une logique produit à
une logique service (par exemple : location de surface de moquettes).
Le niveau d’écoconception va impliquer chez l’industriel une remise en cause
croissante des modes de pensée, d’action et d’organisation.
Selon une étude BVA pour l’ADEME [6], 62 % des entreprises sont sensibili-
sées à l’écoconception, dont 20 % ont des approches systématiques et 13 %
débutent. Mais une des difficultés relevées dans la mise en place de la démar-
che vient d’une profusion d’outils d’écoconception difficile à appréhender. En
effet, la dynamique du Grenelle de l’environnement, avec, en particulier le pro-
jet d’affichage environnemental des produits de grande consommation, a
entraı̂né une augmentation de l’offre d’outils. Cet article propose une cartogra-
phie des outils d’écoconception afin d’aider les entreprises à effectuer un choix
de l’outil qui leur est le mieux adapté.
Dans un premier temps sont exposés les types d’approches, avec une carto-
graphie reprenant certains outils. Une présentation plus spécifique de chaque
type d’outil est ensuite réalisée dans un second temps. Enfin, une dernière par-
tie est consacrée à une approche plus pragmatique de ces outils en fonction des
étapes de développement des produits, mais également des acteurs suscepti-
bles de les utiliser dans une démarche d’écoconception de l’entreprise.

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–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– ÉCOCONCEPTION : ÉTAT DE L’ART DES OUTILS DISPONIBLES

1. Approches des outils complément des analyses ponctuelles des produits, une approche
globale à développer tout au long de la démarche est ainsi proposée.
d’écoconception 1.2.2 Outils de communication
Ces outils peuvent s’adresser à des publics différents à des fins
1.1 Approche principale : objectifs de communication interne et externe.
d’évaluation et de préconisation & Par rapport à la communication interne, les outils peuvent être
utilisés :
Il existe majoritairement deux catégories principales d’outils.
– pour sensibiliser la direction aux enjeux de l’écoconception et à
& Une première catégorie concerne des outils plutôt destinés à l’intérêt de l’intégrer dans la stratégie de l’entreprise ;
établir un profil environnemental du produit en vue d’améliorer – pour former à l’écoconception les équipes projet internes ;
ses performances écologiques : il s’agit d’outils d’évaluation. Ils – pour sensibiliser globalement le personnel à l’écoconception et
nécessitent une quantité d’informations suffisantes, pertinentes et aux démarches pratiques à développer sur le site pour aider sa
adaptées sur le produit afin d’évaluer les impacts sur l’environne- mise en place.
ment pour chaque phase du cycle de vie : extraction des matières
premières, fabrication, distribution, utilisation, fin de vie, ainsi que Le contenu de ces outils peut être variable : définitions, concepts
toutes les étapes de transport. Les résultats des évaluations indi- principaux, enjeux, démarches possibles, aides financières, orga-
quent les points sensibles du produit étudié, points sur lesquels nismes et bureaux d’études à qui s’adresser, etc. Ils peuvent revêtir
devra agir le concepteur. Ces points peuvent concerner une étape des formes également diverses : CD, DVD, guides papier ou même
de cycle de vie spécifique du produit ou des impacts environne- de plus en plus des portails Internet.
mentaux sur lesquels il est important d’agir. Ces outils peuvent & Par rapport à la communication externe, les outils ont pour
être distingués selon qu’ils reposent sur des évaluations de type objectif de promouvoir les produits écoconçus par rapport aux
quantitatif ou de type qualitatif. publics externes à l’entreprise : fournisseurs, clients mais égale-
& Une seconde catégorie concerne des outils qui sont plutôt desti- ment grand public (consommateurs). Ces outils peuvent prendre
nés à aider le concepteur dans la recherche de solutions, suite à la forme d’écolabels, de déclarations environnementales, de rap-
l’évaluation, en l’aidant à élaborer des axes d’amélioration pour le ports environnementaux, etc.
produit à concevoir : il s’agit d’outils de préconisation. Les straté-
gies à poursuivre dépendront des objectifs et des priorités fixées 1.3 Cartographie des outils
par la direction de l’entreprise.
Chacun des outils peut être caractérisé selon son niveau d’éva-
luation et son niveau de préconisation, qui sont les deux principa-
1.2 Autres approches

les approches.
Par rapport à l’assistance possible en matière d’écoconception, Les tableaux 1 et 2 établissent une grille de notation de 1 à 5 des
sont également inventoriés des outils visant à aider l’entreprise : approches d’évaluation et de préconisation.
– dans la mise en œuvre pratique d’une démarche d’écoconcep- La figure 1 présente les outils existants en fonction de leurs notes
tion : il s’agit d’outils organisationnels ; attribuées selon leurs niveaux d’évaluation et de préconisation.
– dans la sensibilisation des différents publics susceptibles d’être Le niveau de grisé des cases indique la facilité d’appréhension de
impliqués dans la démarche (communication interne) et la commu- l’outil.
nication des résultats vers l’extérieur aux consommateurs, clients, Dans le paragraphe 2 consacré à la présentation détaillée de
fournisseurs… : il s’agit d’outils de communication. chaque outil, il sera également précisé, pour chacun d’eux, leur
niveau de « validité scientifique », à savoir :
1.2.1 Outils organisationnels – pour une note de 3 : de nombreux travaux scientifiques ont été
Lorsqu’une entreprise souhaite mettre en place une démarche publiés sur l’outil / la méthode ;
d’écoconception, il est nécessaire de franchir des étapes correspon- – pour une note de 2 : quelques travaux scientifiques sont en
dant à des stades de maturité différents : l’approche est progressive. développement ;
Certains outils ont pour objet d’accompagner de manière pragma- – pour une note de 1 : peu ou pas de travaux scientifiques ont été
tique l’entreprise dans la mise en œuvre de sa démarche. En réalisés.

Tableau 1 – Mode d’attribution des notes aux outils d’évaluation en fonction


de leurs caractéristiques (d’après Janin [21])

Approche de l’outil
Niveau Qualitative Quantitative
Nombre de phases du cycle de vie Nombre de critères environnementaux

1 X 1 ou plusieurs Monocritère

2 X 1 ou plusieurs Multicritère

3 X Cycle de vie complet Multicritère

1 ou plusieurs
4 X Mono ou multicritère
ou cycle de vie complet

5 X Cycle de vie complet Multicritère

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Tableau 2 – Mode d’attribution des notes aux outils de préconisation en fonction


de leurs caractéristiques (d’après Janin [21])

Niveau Types de préconisation

Peu de recommandations particulières. Préconisations limitées car seuls les résultats d’évaluation indiquent les
1 aspects environnementaux significatifs (points faibles) du produit sans proposer pour autant de solutions d’améliora-
tion.

Quelques préconisations plus compréhensibles par l’équipe projet puisque le mode d’évaluation se base sur une
2
approche accessible au plus grand nombre et permet déjà d’entrevoir des axes d’amélioration.

Préconisations basées sur des résultats d’évaluation directement exploitables pour améliorer la conception en termes
3 de matériaux (notamment les listes de matériaux), d’assemblage (listes de contrôle)… Permet à l’équipe projet de se
poser les bonnes questions.

Préconisations assez complètes et pragmatiques classées par thématiques ou objectifs de conception. L’équipe projet
4
est guidée facilement selon les axes d’amélioration souhaités.

Préconisations très complètes et illustrées avec des exemples (Success stories) pour sensibiliser l’équipe projet et
5
l’aider pas à pas dans sa démarche tout au long du processus de développement.

5 Guides

Normes

V 4 Lignes
directrices
Niveau de préconisation

3 Listes de substances Listes de contrôle

ESQCV

2
Indice
écologique

Approches
1 matricielles
Approches ACV
monocritères : Approches
simplifiées ACV
- empreinte eau Approche
complète
Bilan
- empreinte carbone Produit

1 2 3 4 5

Niveau d’évaluation

Pour tout type de public sans connaissance environnementale particulière

Pour public déjà sensibilisé ou formé aux problématiques environnementales

Pour public expert ayant une formation ou une expérience dans le domaine de l’écoconception

Figure 1 – Classement d’outils selon leur niveau d’évaluation et de préconisation (d’après Janin [21])

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2. Présentation des outils Des entreprises en nombre croissant s’intéressent à cette appro-
che pour analyser leurs produits dans de multiples secteurs : auto-
d’évaluation mobile, électrique-électronique, chaussures, produits liés au sport,
banque… Cet engouement actuel s’explique, en partie, par l’obliga-
et de préconisation tion d’affichage environnemental sur les produits de grande
consommation programmée lors du Grenelle de l’environnement
en 2007. Des groupes de travail se sont ainsi constitués au sein de
Ce paragraphe est consacré à la présentation des outils classés la plate-forme « affichage environnemental » gérée par l’ADEME et
dans le tableau 3. l’AFNOR. Entretemps, l’obligation a été décalée mais les travaux
démarrés se poursuivent. Ces travaux, la plupart du temps, s’amor-
çaient via la réalisation ou la capitalisation d’analyses de cycle de
2.1 Analyse du cycle de vie vie de produits, participant ainsi à la diffusion du concept d’écocon-
ception et d’analyse de cycle de vie.
2.1.1 ACV avec approche complète multicritère & L’ACV, une méthode pour s’améliorer
Dans une perspective d’écoconception, l’ACV peut permettre de
Niveau déterminer « les points chauds » ou sensibles d’un produit, et
Niveau d’évaluation Validité scientifique
de préconisation donc identifier les opportunités d’améliorations environnementa-
les [10] [18]. Les options de conception et leur analyse peuvent
5 1 3 être limitées en rapport aux hotspots mis en avant, le hotspot
étant un aspect considéré comme significatif de par une contribu-
tion importante aux impacts environnementaux ou par rapport à
En termes d’évaluation des impacts environnementaux, l’outil ou la vulnérabilité de l’impact (milieu sensible ou utilisation de matiè-
méthode le plus reconnu au niveau international est l’analyse du res rares).
cycle de vie (ACV). C’est en effet la seule méthode ayant fait
l’objet de travaux de normalisation internationale : il s’agit des nor- & Une intégration des impacts environnementaux non exhaustive
mes ISO 14040 et ISO 14044. L’ACV donne l’impression d’être exhaustive quant à l’intégration
L’ACV se décline en quatre étapes : des impacts environnementaux mais la complexité de leur modéli-
sation limite la représentativité des indicateurs choisis. D’autre
– définition des objectifs et du domaine d’application : figurent
part, certains impacts ne sont pas encore intégrés, par exemple la
dans cette partie, entre autres, les limites et l’unité fonctionnelle ;
biodiversité.
– inventaire (ICV) : bilan quantitatif des flux entrants et sortants
du système délimité par des frontières (produit). Ces flux sont listés & Les bases de données
et classés, la plupart du temps, selon cinq facteurs d’impact :
Pour réaliser une ACV, des informations pointues sont nécessai-


consommations de matières premières et d’énergie, rejets atmos-
res aux calculs. La plupart des logiciels d’ACV contiennent leur pro-
phériques et aqueux, déchets solides ;
pre base de données, comme DEAM, la base de données du logi-
– évaluation des impacts : classification des flux par critère
ciel d’ACV TEAM (Ecobilan, F) ou KCL EcoData, celle du logiciel
environnemental (qualitatif : appauvrissement de la couche
d’ACV KCL-ECO (Fi).
d’ozone, effet de serre, acidification de l’atmosphère, consomma-
tion d’énergie, épuisement des ressources naturelles, production Quelques bases de données sont reprises dans le tableau 4. Pour
de déchets, eutrophisation de l’eau), caractérisation (quantitatif) pallier la diversité de qualité des nombreuses bases de données
et évaluation ; disponibles, l’Union européenne développe une base de données
– interprétation, dont les aspects communication avec la revue commune, ELCD II, accessible gratuitement. Elle est constituée en
critique. vue de contribuer aux données européennes clés pour le futur
réseau international de données ILCD.
Nota : en 2011, un groupe de travail sur ce dernier thème a été lancé à l’AFNOR.
L’analyse du cycle de vie est multi-étapes car elle concerne toutes Une liste de plusieurs bases de données actuellement existan-
les phases du cycle de vie. Elle est également multicritère car elle tes est accessible à l’adresse suivante :
intègre différents problèmes environnementaux. http://lca.jrc.ec.europa.eu/lcainfohub/databaseList.vm
En matière d’ACV, il existe de multiples méthodes de calcul des
impacts environnementaux. On peut notamment citer les métho-
des CML (Pays-Bas), EPS (Suède), ReCiPe (NL), Impacts 2002+ 2.1.2 ACV avec approche simplifiée multicritère
(CH), USEtox (NL)… De nombreux logiciels développés dans le
monde reposent sur ces différentes voies d’évaluation (cf.
tableau 17 et suivants au § 6.4). Niveau
Niveau d’évaluation Validité scientifique
Cependant certains critères ne sont pas encore répertoriés, de préconisation
comme les impacts sur l’eau* ou la biodiversité, par manque de
données ou de méthodes ; des recherches sont en cours pour déve- 4 1 2
lopper des approches plus exhaustives.
Nota : * en référence aux travaux développés sur l’empreinte eau du produit.
La réalisation d’une analyse du cycle de vie avec une approche
L’analyse du cycle de vie s’applique sur un produit, un service ou complète étant lourde et coûteuse, certains lui préfèrent une appro-
un procédé, et constitue un outil comparatif pour des systèmes à che simplifiée.
fonctionnalité(s) équivalente(s) :
Cette simplification peut être réalisée en fonction :
– un produit / service / procédé nouveau par rapport à son
prédécesseur ; – du nombre de critères environnementaux considérés : la
– un produit / service / procédé par rapport à son concurrent ; consommation de matières, la consommation d’énergie, l’effet de
– un produit / service / procédé par rapport à des objectifs précis. serre, l’eutrophisation de l’eau… L’empreinte carbone par exemple
est un outil permettant d’évaluer l’énergie consommée par un pro-
Dans le cas fréquent d’une reconception, la comparaison des duit sur l’ensemble de son cycle de vie. Des travaux de normalisa-
résultats du produit existant avec ceux du nouveau va permettre tion sont actuellement en cours sur l’empreinte carbone produit
de vérifier si les alternatives choisies sont écologiques. (ISO 14067) et sur l’empreinte eau de produits, procédés et

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Tableau 3 – Panel d’outils d’évaluation et de préconisation


Évaluation
Préconi-
Outils Quali- Quan- Noms des outils (ou méthodes) Caractéristiques principales
sation
tative titative
Méthode CML (NL)
Évaluation écologique du produit multicritères : dégradation de
Analyse du Méthode Eco-indicator 99 (NL)
la couche d’ozone, acidification atmosphérique, effet de serre…
cycle de vie Méthode ReCiPe (NL)
Approche X
complète Méthode EPS (Suède)
multicritère Nombreux logiciels basés sur ces méthodes de calcul des indi-
Méthode Impact 2002+ (CH)
cateurs d’impact (voir tableau au § 6 Annexe).
Méthode USEtox (NL)
Logiciel on line gratuit permettant à un novice ou un confirmé
d’évaluer les impacts de son produit.
– pour un novice : approche qualitative
– pour un confirmé : approche quantitative et évaluation sur la
ECOMAT
X X X base de critères d’impacts.
(CARMA*, F, 2010)
Pour les deux, préconisations d’améliorations en fonction des
résultats d’évaluation.
Analyse du Accessible à l’adresse :
cycle de vie http://www.ecomat2.info
Approches
simplifiées Bilan Produit Logiciel on line à accès gratuit : approche quantitative mais
X
multicritères (ADEME, F, 2008) simplifiée au niveau modélisation et base de données.
Comparaison de types d’emballages en fonction de trois indi-
BEE cateurs : effet de serre, consommation d’eau et quantité de
(bilan environnemental des em- déchets ultimes d’emballages.
X
ballages) Accessible uniquement aux adhérents d’Eco-Emballages à


(Eco-Emballages, F, 2009) l’adresse :
http://www.ecoemballages.fr/entreprises
Empreinte carbone produit
X (normes ISO 14067-1 et 14067-2,
en préparation) Évaluation des impacts sur tout le cycle de vie du produit mais
Approches
sur un seul critère environnemental (les équivalences en émis-
monocritères Empreinte eau sions de carbone ou les pollutions et consommations d’eau).
X (norme ISO 14046, en prépara-
tion)
Évaluation environnementale basée sur le calcul d’une
ERPA matrice 5x5. Une des dimensions de la matrice contient les
(Environmentally Responsible étapes du cycle de vie du produit alors que l’autre contient les
X X
Product Assessment) aspects environnementaux suivants : choix des matériaux,
(AT&T, USA, 1998) utilisation de l’énergie, rejets gazeux, rejets liquides, rejets
Approches solides.
matricielles
MET
Évaluation sur trois critères :
(Material cycle, Energy use and
– consommation de matières
X Toxic emissions)
– consommation d’énergie
(Brezet & van Hemel, NL,
– émissions de substances toxiques
1997) [5]
MECO
(Matériaux, Énergie, Chimiques, Tableau décrivant la consommation de matériaux et d’énergie,
Others) les risques reliés aux produits chimiques et d’autres impacts en
X
(Danish Institute for Product fonction des différentes étapes du cycle de vie du produit étu-
Development & dk-Teknik, Dk, dié.
2000) (Wenzel et al., 2000) [36]

Calcul d’un indice par rapport à des critères sélectionnés, avec


Indice écologique
X X attribution de pénalités. Méthode utilisée par Renault dans le
(Ventère J.P., F, 1995) [32]
cadre de l’évaluation de ses emballages
Approches
qualitatives ESQCV Grille d’évaluation succincte pour identifier les points défavo-
(Évaluation simplifiée et quali- rables du produit (ou aspects environnementaux significatifs)
X X
tative du cycle de vie) pour lesquels une analyse plus approfondie pourra être réali-
(Ventère J.P., F, 1998) [33] sée.

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Tableau 3 – Panel d’outils d’évaluation et de préconisation (suite)

Évaluation
Préconi-
Outils Quali- Quan- Noms des outils (ou méthodes) Caractéristiques principales
sation
tative titative
Liste de questions classées par axe stratégique d’écoconcep-
tion, avec lignes directrices possibles ; visualisation sur une
Eco-Estimator cible de la position du produit pour chaque axe.
Fast Five Awareness Eco-Estimator : évaluation d’un produit existant avec liste de
X
(Meinders, PHILIPS, NL, questions précises dont les réponses servent à établir une
1997) [25] notation.
Fast Five Awareness : évaluation d’un produit en cours de
conception (cinq questions).
Liste de critères classés par thèmes et décrits selon trois situa-
Design for Recycling
X tions possibles : situation idéale, situation acceptable, besoin
(Steinhilper, D, 1995) [31]
d’agir.
Ecodesign Strategy Wheel ou
Roue des stratégies d’écocon- Roue des huit stratégies d’écoconception qui permet, sur la
X
ception base de questions, de trouver des solutions d’amélioration.
(Brezet, NL, 1997) [4]
Liste de critères pour l’attribu-
Liste de critères écologiques à respecter pour l’obtention d’un
X tion d’écolabels européens ou
Listes de label reprenant les impacts majeurs par produit.
nationaux (F, D… …)
contrôle
(check-lists) Méthode basée sur la capitalisation d’expériences de résolution
de problèmes techniques liés à l’innovation dans divers sec-
teurs. Méthode facilitant la créativité.
TRIZ
X Un des outils de la méthode : matrice TRIZ = matrice de
(Altshuller et al., USA, 2005) [1]
40 principes permettant de résoudre des contradictions,
notamment maintenir la qualité du produit tout en améliorant
sa performance environnementale.
Outil qui permet de déterminer une stratégie pertinente pour

Ecodesign Pilot chaque produit, en fonction des impacts environnementaux
X X
(TU Vienne, ADEME, A/F, 2001) qu’il génère à chaque étape de son cycle de vie.
Une partie est consacrée à des définitions, des concepts.
Listes pour aider les fabricants des secteurs électronique et
mécanique à écoconcevoir.
Plusieurs types de listes selon les équipements. Chacune est
Smart Ecodesign Checklists
X déclinée en trois parties : check-list relative aux exigences
(CfSD**, UK, 2002-2007)
réglementaires + clients, check-list relative aux écodéclarations
et check-list pour mettre en place une démarche d’écoconcep-
tion.
Lignes direc-
Guidelines PHILIPS Liste des recommandations succinctes classées par axe straté-
trices X
(Philips, NL, 1998) gique d’écoconception.
(Guidelines)
Annexe XIV : liste de substances chimiques soumises à autori-
sation.
Règlement REACH, annexes XIV Annexe XVII : liste des substances relative aux restrictions
X X
Listes de et XVII (2011) applicables à la fabrication, à la mise sur le marché et à l’utili-
substances sation de certaines substances et certains mélanges et articles
dangereux.
Listes noire, grise et blanche Listes de matériaux à bannir (noire) ou à limiter (seuil, grise) ou
X X
(Volvo, S, 2008-2010) à substituer (blanche) en fonction de la réglementation.
Approche générale
« Guide pour l’introduction des aspects environnementaux
X Guide ISO 64
dans les normes de produit ».

Normes « Management environnemental – Intégration des aspects


X ISO/TR 14062 environnementaux dans la conception et le développement de
produit »
« Systèmes de management environnemental – Lignes directri-
X ISO/DIS 14006
ces pour incorporer l’écoconception ».

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Tableau 3 – Panel d’outils d’évaluation et de préconisation (suite)

Évaluation
Préconi-
Outils Quali- Quan- Noms des outils (ou méthodes) Caractéristiques principales
sation
tative titative
Approche sectorielle : secteur automobile

« Traitement des véhicules hors d’usage (VHU). Dépollution et


X R 10-401
désassemblage des pièces non métalliques ».

« Véhicules routiers – Conception des véhicules en vue de


X XP R 10-402
Normes l’optimisation de leur valorisation en fin de vie ».

« Véhicules routiers – Recyclabilité et valorisabilité – Méthode


X NF ISO 22628
de calcul ».

Approche sectorielle : secteur de la mécanique


X XP E01-005 « Produits mécaniques – Méthodologie d’écoconception ».
Approche sectorielle : secteur électrique / électronique
« Aspects liés à l’environnement – Prise en compte dans les
X IEC Guide 109
normes électrotechniques de produits ».
« Environmental design considerations for electronics
X ECMA-341
products ».
« Écoconception pour les produits électriques et
X NF EN 62430
électroniques ».
Approche sectorielle : secteur du bâtiment
« Bâtiments – Qualité environnementale des produits de cons-


truction et des bâtiments – Partie I : cadre méthodologique pour
X NF P 01-020-1
la description et la caractérisation des performances environ-
nementales et sanitaires des bâtiments ».
Approche sectorielle : secteur de l’emballage
« Emballage – Exigences relatives à l’utilisation des normes
X NF EN 13427 européennes dans le domaine de l’emballage et des déchets
d’emballage ».
« Emballage – Exigences spécifiques à la fabrication et à la
X NF EN 13428
composition – Prévention par la réduction à la source ».
X NF EN 13429 « Emballage – Réutilisation ».
« Emballage – Exigences relatives aux emballages valorisables
X NF EN 13430
par recyclage matière ».
« Emballage – Exigences relatives aux emballages valorisables
X NF EN 13431 énergétiquement, incluant la spécification d’une valeur calori-
fique inférieure minimale ».
« Emballage – Exigences relatives aux emballages valorisables
X NF EN 13432 par compostage et biodégradation – Programme d’essai et cri-
tères d’évaluation de l’acceptation finale des emballages ».
Approche sectorielle : secteur de la plasturgie
« Matières plastiques – Aspects liés à l’environnement – Lignes
X ISO 17422 directrices générales pour leur prise en compte dans les nor-
mes ».
Approche générale
Écoconception : une approche
prometteuse pour une production
X Guide pédagogique très complet pour informer, éduquer.
et une consommation soutenable
Guides
(Brezet et al., NL, 1997) [5]
Conception intégrant le cycle de
X vie – un manuel pour PME Guide pragmatique plus spécifiquement destinés aux PME.
(Behrendt et al., NL, 1997) [2]

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Pollution industrielle de l’eau


Caractérisation, classification, mesure
par Jean-Claude BOEGLIN
Ingénieur chimiste, Docteur ès sciences
Président d’honneur de l’Institut de recherches hydrologiques (IRH)-environnement, Nancy
Conseiller scientifique de l’Institut de promotion industrielle (IPI)-environnement
industriel, Colmar
Expert International du NANCIE (Centre international de l’eau de Nancy)
et revu par Jean-Louis ROUBATY
Docteur en chimie, Docteur ès Sciences
Directeur Activités Environnement SGS France
Professeur associé des Universités

1. Caractérisation des eaux résiduaires industrielles..................... G 1 210v2 – 2


1.1 Différents types de rejets industriels ......................................................... — 2
1.2 Nocivité et effets de la pollution sur les milieux naturels ........................ — 3
2. Inventaire sommaire de la pollution. Essais de classification .... — 5
3. Mesure et contrôle de la pollution industrielle .......................... — 5
3.1 Prélèvement. Échantillonnage. Conservation des échantillons ............... — 5
3.2
3.3
3.4
Mesures des débits des eaux résiduaires industrielles............................
Paramètres de la pollution..........................................................................
Notion d’équivalent habitant ......................................................................



9
9
10

4. Conditions de rejet des eaux résiduaires industrielles............... — 11
Références bibliographiques ............................................................. — 12

’histoire du développement industriel s’est construite en partenariat avec


L l’eau. Les usines sont toujours implantées au bord de l’eau (rivière, canal ou
mer) pour des raisons diverses :
— les commodités de transport de matières premières et de produits finis ;
— la possibilité de faire accomplir à l’eau des tâches industrielles multiples et
variées : toute l’histoire des techniques industrielles est liée à l’utilisation de l’eau ;
— les commodités de rejet de sous-produits ou de déchets générés au cours
des opérations de fabrication.
L’eau réunit un ensemble exceptionnel de propriétés physiques et chimiques ;
elle peut devenir solvant, fluide thermique ou simplement liquide facile à mani-
puler. Ces propriétés expliquent pourquoi l’eau est impliquée dans toutes les
grandes activités industrielles ; les usines utilisent l’eau de manière répétée au
cours des stades successifs de la chaîne de fabrication.
Pour la plupart des techniques et opérations de fabrication, l’eau entre en contact
avec des matières premières minérales ou organiques. Elle les dissout partielle-
ment, voire totalement ou les entraîne à l’état de suspensions colloïdales.
Utiliser l’eau, c’est pratiquement accepter de la polluer... En effet, toute activité
industrielle engendre des rejets polluants qui renferment tous les sous-produits et
les pertes de matières premières qui n’ont pu être récupérées ni recyclées.
Dans ce dossier, nous procéderons à :
— la caractérisation de la pollution des rejets industriels et à l’étude de leur
p。イオエゥッョ@Z@ェ。ョカゥ・イ@RPPW

nocivité et effets sur le milieu naturel ;

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POLLUTION INDUSTRIELLE DE L’EAU _______________________________________________________________________________________________________

— l’inventaire sommaire de la pollution industrielle avec des essais de


classification ;
— l’évaluation quantitative de la pollution des rejets industriels, car la lutte
contre la pollution industrielle passe obligatoirement, dans un premier stade,
par une meilleure connaissance, par la mesure et le contrôle, de la production
polluante.
Le lecteur pourra se reporter également à l’article G 1 220 Pollution industrielle de l’eau. Stra-
tégie et méthodologie.

1. Caractérisation des eaux Il ne faut pas oublier que certains de ces rejets sont occasionnels,
et peuvent correspondre, par exemple, à des fuites accidentelles de
résiduaires industrielles produits lors de leur manutention ou de leur stockage.

1.1.3 Eaux de fabrication


1.1 Différents types de rejets industriels
La nature de ces eaux est très variable d’une industrie à l’autre ; la
plupart des procédés industriels conduisent à des rejets polluants
Nous comprendrons, sous le vocable eaux résiduaires indus- qui proviennent du contact de l’eau avec des solides, des liquides ou
trielles, toutes les eaux qui sont en principe rejetées par l’usine des gaz.
dans le milieu extérieur, après avoir contribué à la fabrication, au
nettoyage, au transport, au refroidissement, etc., en excluant C’est dans l’industrie alimentaire, l’industrie chimique, celle des
généralement les eaux pluviales sauf si elles sont polluées par des pâtes et papiers, ainsi que dans certaines branches de l’industrie
eaux de ruissellement suite aux lessivages des toitures d’usines à textile qu’on trouve l’essentiel de la pollution organique dissoute,
l’origine d’une forte pollution atmosphérique (par exemple, qui peut avoir un caractère plus ou moins biodégradable et un degré
cimenteries, centrales thermiques, etc.) ou des sols de sites indus- de pollution plus ou moins important.
triels en activité ou à l’abandon, contaminés par des substances
En outre, certaines eaux de fabrication contiennent des produits


diverses (composés azotés, hydrocarbures, sels métalliques).
toxiques dont la présence peut masquer la valeur réelle de la pollu-
tion biodégradable.
D’une façon générale, ces eaux résiduaires industrielles se diffé-
Les rejets polluants sont soit continus, soit discontinus. Ils peu-
rencient, en fonction de l’utilisation de l’eau dans l’usine, en diffé-
vent même n’être produits que durant quelques mois par an (cam-
rentes catégories [1] [2].
pagne dans l’industrie agroalimentaire : deux mois en sucrerie de
betteraves, par exemple).
1.1.1 Eaux des circuits de refroidissement Il est souvent judicieux et conseillé d’assurer à la source la sépa-
ration de certains rejets concentrés en polluants soit en vue d’un
Abondantes et généralement pas polluées, car elles ne sont pas traitement spécifique permettant éventuellement leur récupération,
en contact avec les produits fabriqués, elles peuvent être recyclées, soit en vue de leur collecte dans un bassin de stockage pour être
l’appoint indispensable pouvant être fourni par de l’eau traitée. réinjecté ultérieurement à débit pondéré dans le circuit de traite-
ment. C’est le cas par exemple :
Plus délicat est le problème posé par le rejet des purges des cir-
cuits d’eau de réfrigération, souvent très minéralisées et pouvant — des bains de décapages et galvanoplastie, des bains de soude
contenir une quantité plus ou moins grande de produits chimiques usée, des eaux ammoniacales de cokerie ;
ayant servi à leur traitement. — des condensats de papeterie, des eaux mères de l’industrie
L’on retrouve ainsi, dans les rejets, aussi bien des produits desti- agroalimentaire ;
nés à lutter contre le tartre et la corrosion des installations (inhibi- — des rejets toxiques concentrés, en général, des industries de
teurs de corrosion : orthophosphates, polyphosphates, traitement de surface, de chimie ou d’automobiles.
molybdates... ; antitartres organiques : polyacrylates, polymaléates,
phosphonates plus ou moins complexes ; dispersants des particules
en suspension ; produits désinfectants de synthèse : carbamates, 1.1.4 Rejets des services généraux
DBNPA... ou minéraux, le plus souvent de l’eau de javel). Il ne faut
pas oublier aussi les rejets biologiques associés aux purges. Cel-
les-ci peuvent aussi bien contenir des amibes que des légionelles. Ce sont essentiellement les eaux usées domestiques de l’usine qui
présentent des caractéristiques particulières et sont biodégradables.
La présence de chasses automatiques peut entraîner une dilution
1.1.2 Eaux de lavage des sols et machines assez forte ; en revanche, il faut noter des pointes très accentuées,
dues aux rejets des cuisines et cantines, généralement très chargés en
Au contraire des rejets précédents, la qualité et le débit des eaux graisses et débris très hétérogènes, produits au moment des repas.
de lavage sont très variables. Ces eaux sont chargées de produits Il faut prendre en compte, également, dans les différents effluents
divers : matières premières ou liqueurs de fabrication, hydrocarbu- de services généraux :
res et huiles de machines, produits détergents, bactéricides ou bac-
tériostatiques utilisés en désinfection. La production et le degré de — les eaux de chaufferie (purge de chaudière, éluat de
pollution de ces effluents résiduaires sont souvent importants à la régénération) ;
fin de la période de travail et au cours des nettoyages de fin de — les boues du traitement des eaux d’appoint et les purges
semaine et des périodes de congés. d’eaux de réfrigération.

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G 1 210v2 − 2 est strictement interdite. – © Editions T.I.

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_______________________________________________________________________________________________________ POLLUTION INDUSTRIELLE DE L’EAU

1.2 Nocivité et effets de la pollution 1.2.2 Pollution toxique


sur les milieux naturels
On rappellera tout d’abord que la toxicité résulte d’un ensemble
de phénomènes complexes mettant en jeu des substances néfastes
Nous rappellerons tout d’abord que polluer l’eau d’une réserve pour le développement normal des organismes vivants.
superficielle ou profonde, c’est modifier ses caractéristiques (phy- Des effets pourront être directement perceptibles (mort, appari-
sico-chimiques et biologiques) en y rejetant certaines substances tion de malformations ou de tumeurs...) ou plus sournois, telles des
soit à l’état insoluble (matières en suspension, en particulier), soit à difficultés de reproduction, la disparition de certaines espèces
l’état dissous susceptible : animales ou végétales peu visibles, voire la perte des facultés de
— de perturber, à plus ou moins brève échéance, l’équilibre biolo- concentration et de réflexions ou la survenance de stress chez
gique du milieu en rendant toute vie animale et végétale aléatoire ; l’homme. Ces effets peuvent être décelés au niveau cellulaire
— de rendre l’eau impropre à toute réutilisation ultérieure (pro- (dégénérescence de membranes...), sur l’organisme entier (difficulté
duction d’eau destinée à la consommation humaine, à l’usage de se mouvoir), sur l’espèce (diminution du nombre d’individus) et
industriel...). enfin sur tout le système écologique (disparition de prédateurs et
L’activité industrielle génère des polluants divers susceptibles de déséquilibre des groupes vivants).
créer des nuisances importantes. La toxicité peut être générée par de nombreuses substances
On peut considérer d’une manière générale, que les eaux résiduaires chimiques présentes dans l’eau à très faible concentration (infé-
industrielles (ERI) sont des mélanges hétérogènes comprenant : rieure au mg/L).
— des matières à caractère minéral ou organique qui sont entraî- Pour être dangereux, ces micropolluants requièrent trois caractè-
nées par le courant liquide sous forme de composés insolubles : res indispensables :
particules solides en suspension à l’état grossier, finement dispersé — la toxicité ;
ou colloïdal et substances liquides à l’état dispersé ou émulsions — la bioaccumulation dont les facteurs de concentration peuvent
(graisses, huiles, goudrons, hydrocarbures) ; atteindre plusieurs dizaines de milliers ;
— et, en proportion plus ou moins grande, des composés en dis- — la rémanence, afin que ces molécules ne soient pas détruites ni
solution dans l’eau (pollution soluble). rejetées par l’organisme.
On peut classer qualitativement la pollution en plusieurs catégo-
Les produits toxiques sont nombreux. Ils peuvent avoir un carac-
ries, en fonction de sa nature, sa nocivité et des effets néfastes des
tère minéral :
rejets sur le milieu naturel.
— métaux lourds toxiques : mercure, cadmium, nickel, cuivre,
zinc, chrome, etc. ;


1.2.1 Pollution insoluble (avec une phase polluante — cyanures, arsenic, sulfures, etc. ;
solide ou liquide voire mixte) — produits présentant une acidité ou une basicité élevées.
Ils peuvent avoir aussi un caractère organique : produits phytosa-
■ La pollution particulaire est constituée par des matières en sus- nitaires, pesticides, hydrocarbures polycycliques aromatiques,
pension, grossières décantables, finement dispersées ou à l’état composés phénolés..., solvants chlorés, etc.
colloïdal, dont les dimensions sont indiquées sur la figure 1. Les mécanismes de la toxicité ne sont pas tous élucidés. Les subs-
La pollution particulaire sera à l’origine : tances peuvent agir à toutes les étapes de la vie d’une cellule, de sa
— de nuisances esthétiques et de dépôts et envasements nuisi- multiplication (par atteinte du patrimoine génétique) à sa matura-
bles à la navigation, en favorisant les inondations ; tion (en touchant les stades de production d’énergie, de maintien
— du colmatage éventuel des voies respiratoires des poissons des équilibres osmotiques, etc.).
entraînant leur mortalité ; Certaines substances présentent une toxicité aiguë, c’est le cas en
— et enfin et surtout de l’augmentation de la turbidité de l’eau, particulier des cyanures et des chromates à l’origine d’une mortalité
gênant ainsi la pénétration des rayonnements lumineux, c’est-à-dire très rapide des êtres vivants, d’autres sont toxiques à long terme
le phénomène de photosynthèse. avec des effets néfastes qui apparaissent progressivement avec le
temps (troubles de la reproduction, du système nerveux et du méta-
■ La pollution par une phase liquide insoluble (huiles, graisses,
bolisme). Ce type de pollution reste très difficile à appréhender. Il est
hydrocarbures), surnageant à la surface de l’eau, aura essentielle-
lié à la nature des molécules organiques concernées en l’occurrence
ment pour conséquence une diminution des transferts d’oxygène
essentiellement les organohalogénés de l’industrie chimique qui
atmosphérique avec une incidence notable sur la qualité biologique
possèdent des effets d’accumulation et de toxicité différés.
de l’eau superficielle définie en réalité par la quantité d’oxygène
qu’elle contient.
1.2.3 Pollution organique

Bon nombre de rejets industriels, en particulier, ceux issus de


200 µm
100 µm
100 nm
0,1 nm

20 µm
10 µm
10 nm

1 mm
2 mm

l’industrie agroalimentaire, renferment des matières organiques


2 µm
1 µm
1 nm

1 cm

non toxiques par elles-mêmes, mais dont la dégradation par voie


bactérienne consommera l’oxygène dissous dans le cours d’eau en
entraînant la mort des poissons par asphyxie et le développement
Matières Matières Matières
dissoutes colloïdales en suspension (par le dépôt des matières organiques au fond des rivières) de fer-
Argiles < Limons > Sables mentations anaérobies (putréfaction) génératrices de nuisances
olfactives.
< fin > <moyen><gros>
Il faut considérer qu’une eau de surface polluée par des matières
Bactéries Pollens Plancton organiques arrive à la suite de transformations physiques, chimi-
Fumées Brouillard Brume Pluie ques et biologiques à se débarrasser spontanément des éléments
Aérosols nocifs qu’elle contient. C’est le phénomène de l’autoépuration qui
parvient à préserver le milieu tant que la pollution demeure en des-
Figure 1 – Dimensions des particules sous d’un seuil critique [4].

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Approche systémique des déchets

par Alain NAVARRO


Professeur émérite à l’Institut national des sciences appliquées de Lyon

1. Le système déchets ................................................................................. G 2 000 – 2


2. Les stratégies de gestion des déchets............................................... — 4
2.1 Connaissance analytique des déchets ....................................................... — 4
2.2 Stratégies de gestion des déchets ............................................................. — 5
3. Filières de traitement des déchets...................................................... — 6
4. Filières dédiées et centres collectifs.................................................. — 8
5. Dimensions non technologiques des déchets ................................. — 8
6. Conclusion ................................................................................................. — 8

a nécessaire maîtrise des impacts environnementaux est actuellement un


L objectif capital au niveau de la gestion des activités industrielles. Il en va
d’ailleurs de même au niveau des collectivités locales qui ont en charge les V
conséquences environnementales des multiples activités liées à la vie urbaine.
Cette contrainte résulte pour l’essentiel des évolutions constatées dans les
activités de production et de consommation :
— forte augmentation quantitative de la production ;
— diversification qualitative avec le développement des matériaux synthéti-
ques et de produits de plus en plus complexes et, de surcroît, à courte durée de
vie ;
— prise de conscience, au niveau des populations, des risques écologiques et
sanitaires et des impératifs de l’hygiène et de la sécurité.
La maîtrise des impacts environnementaux est encadrée par un important
arsenal réglementaire et elle nécessite d’importants moyens techniques ; de ce
fait, elle a un poids significatif dans l’économie des activités industrielles.
Avant d’aborder les aspects techniques de la maîtrise des impacts, il est utile
de rappeler que ces impacts peuvent être regroupés en trois catégories :
— l’épuisement progressif des ressources naturelles renouvelables ou non :
p。イオエゥッョ@Z@。カイゥャ@RPPS@M@d・イョゥ│イ・@カ。ャゥ、。エゥッョ@Z@ュ。イウ@RPQV

combustibles fossiles, métaux, forêt... ;


— les désordres écologiques : les milieux physiques (eau, air, sol) et les
milieux vivants (animaux, végétaux) sont fortement perturbés, ce qui se traduit
par de nombreux effets négatifs qui vont de la perte de la biodiversité au chan-
gement climatique, en passant par la déforestation et les différentes formes de
la pollution urbaine et agricole ;
— la dispersion de substances toxiques et/ou écotoxiques : ces substances
sont directement ou indirectement responsables de risques avérés pour la santé
des individus.
C’est dans ce cadre que la recherche de solutions a mobilisé, ces dernières
décennies, une forte activité scientifique et technique, qui a donné naissance au
secteur des éco-industries. Ce secteur occupe désormais une place très signifi-
cative dans le paysage industriel. Cela va des bureaux d’études aux multinatio-
nales en passant par un fort contingent de PME, couvrant un large spectre de

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APPROCHE SYSTÉMIQUE DES DÉCHETS ____________________________________________________________________________________________________

spécialités. Enfin, les entreprises traditionnelles et les collectivités locales sont


de plus en plus nombreuses à se doter de spécialistes à même de définir et de
piloter, en interne, la stratégie et les actions à mener en matière de gestion
environnementale.
Sous l’angle technologique, les principaux secteurs concernés par la maîtrise
des impacts environnementaux sont ceux des économies d’énergie, de la dépol-
lution des eaux, du traitement des effluents gazeux et de la gestion des déchets.
C’est ce dernier secteur qui nous préoccupe ici.
Avant de l’aborder de la façon la plus exhaustive possible dans cette rubrique
et sur le CD-Rom Déchets industriels, nous en ferons une présentation, dans une
approche systémique, qui doit donner de la cohérence à un problème, souvent
présenté comme foisonnant et démuni de toute logique.
En effet, alors que les économies d’énergie, les traitements de l’eau et de l’air,
ont rapidement été rangés par les spécialistes dans des cadres méthodologiques
structurés, force est de constater que la gestion des déchets est souvent abordée
un peu « en aveugle », par tâtonnement. Cela tient probablement à plusieurs rai-
sons : le mot même de déchet induit des connotations négatives qui n’inci-
tent peut-être pas à une approche raisonnée comme c’est le cas pour l’eau ou
l’air, éléments vitaux par excellence. En outre, contrairement à l’eau ou à l’air,
les déchets ne correspondent pas à une typologie unique. La pollution de
l’eau et de l’air résulte, pour l’essentiel, de l’apport de substances étrangères à
un milieu bien identifié et, par conséquent, la dépollution consiste à extraire ces
substances indésirables. C’est parfois très difficile à faire mais l’enjeu est clair.
À l’inverse, les déchets regroupent toute la variété des espèces chimiques
minérales ou organiques, naturelles ou synthétiques, seules ou en mélange. On
peut considérer que chaque famille, parfois chaque déchet au sein de la


famille, constitue une entité spécifique. C’est probablement cette particula-
rité qui complique une approche systémique des déchets. La tâche est encore
accrue par le fait que les déchets relèvent pour l’essentiel du domaine des soli-
des particulièrement propices à l’hétérogénéité. De surcroît, on est souvent dans
« l’inutile, l’indésirable, la non-valeur ».
Tous les travaux scientifiques conduits ces dernières décennies permettent
pourtant de proposer une approche systémique de l’entité déchet dans sa défi-
nition la plus générale. Cette présentation doit permettre au lecteur de mieux
s’orienter au moment de choisir entre les multiples stratégies et techniques qui
lui sont proposées. Cela est également utile, dans le cadre des réflexions, au
niveau de la conception même des produits et des procédés.

1. Le système déchets —

A : déchets et sous-produits de la fabrication ;
B : déchets de la dépollution de l’eau et de l’air ;
— C : déchets associés à la vie du produit ;
— D : produits en fin de vie ;
La plupart des produits industriels sont issus de processus de
plus en plus complexes. À l’origine, il y a toujours prélèvement de — E : déchets du traitement des déchets.
matières premières, d’eau et d’air et, à l’issue de chaque étape de la À la fin de ce cycle, une fraction de ces déchets sera valorisée
transformation, émission de sous-produits, d’eau et d’air plus ou sous des formes diverses et rejoindra les circuits de production, la
moins pollués. De plus, chaque étape est consommatrice d’énergie. fraction restante sera soit rejetée dans le milieu naturel lorsqu’il n’y
Au stade de sa consommation, le produit industriel, surtout lorsqu’il a pas de risques d’impact, soit confinée avec le statut de déchet
est complexe (cas de l’automobile, par exemple), est à son tour ultime.
consommateur d’eau, d’air, d’énergie, de pièces de rechange, et
tout cela contribue également à différentes formes de l’impact ■ Déchets et sous-produits (A)
environnemental. Enfin, au stade ultime de son utilisation, le pro- On trouve, dans cette catégorie, tous les déchets qui ont participé
duit devient à son tour un déchet dont il faudra assurer la gestion. à l’élaboration des produits mais qui ne se retrouvent pas dans le
Une vision globale se doit donc d’aborder les problèmes posés à produit final. Il s’agit des sous-produits de réaction chimique, des
tous les stades de ce que l’on appelle le cycle de vie : résidus de certains traitements (peinture, traitements de surface...),
Création du produit ---> Utilisation du produit ---> Fin de vie du produit des emballages plus ou moins souillés, des matières enlevées à
l’issue d’opérations mécaniques (usinage, moulage, polissage...) et
On observe, sur la figure 1, que les déchets apparaissent à tous des loupés de fabrication. On classe généralement ces déchets en
les stades du cycle de vie, avec des natures très variées. On peut trois catégories : les déchets industriels spéciaux (DIS) ou dange-
classer ces déchets en cinq familles principales : reux, les déchets industriels banals (DIB) et les déchets inertes.

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Écologie industrielle : gestion


des matières premières secondaires
dans le métabolisme territorial –
illustrations
par Cyrille HARPET
Professeur associé de l’Institut National des Sciences Appliquées de Lyon (INSA Lyon)
Diplômé de l’INSA de Lyon (management environnemental)
Centre des Humanités, laboratoire STOICA
Éthique et développement durable pour les ingénieurs

et Christophe BLAVOT
Gérant-cofondateur d’Écologie Industrielle Conseil (EIC)
Ingénieur et MBA IMD (Lausanne)
Entrepreneur en écologie industrielle

1. Écologie industrielle et territoriale (EIT).................................... G 2 008 – 2


1.1 Origine du concept d’écologie industrielle et territoriale ................. — 2
1.2 Notions et principes scientifiques ..................................................... — 3
1.3 Définition des échelles et périmètres ................................................ — 4


2. Bilan et cartographie des flux matières-énergie ...................... — 6
3. Des déchets aux ressources : les matières premières
secondaires ...................................................................................... — 10
3.1 Cas des déchets de la construction ................................................... — 10
3.2 Cas des synergies énergétiques ........................................................ — 12
3.3 Cas d’une biocénose industrielle ....................................................... — 16
4. Bouclage des cycles de production............................................. — 18
4.1 Aboutissement d’une gestion territoriale intégrée ........................... — 19
4.2 La symbiose industrielle de Kalundborg ........................................... — 19
4.3 Écoparcs industriels ........................................................................... — 21
4.4 Modèle écologique et écoconception des activités industrielles ..... — 23
5. Conclusion générale ....................................................................... — 23
Pour en savoir plus.................................................................................. Doc. G 2008

’écologie industrielle et territoriale (EIT) s’applique à l’ensemble des activi-


L tés humaines : il s’agit d’une approche globale et systémique. En
s’appuyant sur les principes de compréhension du fonctionnement des écosys-
tèmes naturels, l’écologie industrielle et territoriale a pour ambition de transpo-
ser ces principes par analogie au fonctionnement des systèmes artificiels. Par
« écologie industrielle », il faut entendre au préalable une application spécifi-
quement orientée sur la sphère d’activité industrielle conçue et établie depuis
l’ère industrielle de la fin du XVIIIe siècle, dans le sens d’une concentration des
moyens d’exploitation de ressources, de leur transformation à hauts rende-
ments de production. La conséquence en est la production massive de déchets,
d’effluents et plus généralement de polluants affectant l’ensemble des milieux
naturels récepteurs (atmosphère, aquifère, lithosphère, biosphère), sur des
échelles de temps et d’espaces élargis (processus de mondialisation). Le pro-
cessus d’industrialisation est orienté essentiellement vers l’expansion d’une
société de consommation et de démultiplication des échanges économiques,
p。イオエゥッョ@Z@ェ。ョカゥ・イ@RPQQ

couvert par la notion de « croissance » (dont l’indicateur principal est le PIB,

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ÉCOLOGIE INDUSTRIELLE : GESTION DES MATIÈRES PREMIÈRES SECONDAIRES DANS LE MÉTABOLISME TERRITORIAL – ILLUSTRATIONS ––––––––––––––––

produit intérieur brut), en négligeant les limites propres aux écosystèmes natu-
rels, tant sur le versant « ressources » que celui des milieux dits « récepteurs ».
L’écologie industrielle et territoriale se prononce d’abord au titre d’une néces-
saire adéquation entre « écologie scientifique » et « activités économiques et
industrielles », de façon à rétablir les niveaux de dépendance dans les capacités
de gestion de ces ressources, à la fois sur le plan matériel et immatériel. Le
rapprochement entre « écologie » et « industrie » procède de cette volonté
d’intégrer, d’une part, l’économie à l’échelle de l’écosystème global et, d’autre
part, les paramètres écologiques dans la conception des systèmes industriels.
Le présent article propose donc de situer l’écologie industrielle et territoriale
dans l’ingénierie de l’environnement en tant que domaine de conception et
d’application en vue d’optimiser la gestion des ressources énergétiques et de
matières premières, de réduire la production de déchets à la source, de rendre
systématique la valorisation des rejets en tant que matières premières secon-
daires dans d’autres processus de production.
La limite de l’exercice tient à la fois à la nouveauté de cette approche, du fait
de travaux au demeurant récents (depuis les années 1990), de la complexité des
systèmes industriels et territoriaux existants, lesquels n’ont, somme toute, pas
eu cette vision intégrative dès leur conception, enfin du nombre encore restreint
d’expériences réelles à l’échelle des territoires.
Il faut toutefois souligner que, dès à présent, ce domaine de recherche et
d’application trouve des développements conséquents, du fait des tensions
actuelles sur les coûts des matières premières, des risques écologiques globaux
et majeurs (émissions de gaz à effet de serre, pollution des eaux, des sols, éro-
sion de la biodiversité), voire des risques sanitaires liés aux dégradations des
milieux.


colloque, organisé sur le sujet par la National Academy of Science
1. Écologie industrielle (Académie Nationale de Science), en 1991, et la publication, dès
et territoriale (EIT) 1997, d’une revue spécialisée intitulée The Journal of Industrial Eco-
logy, publiée par le MIT Press (Le Journal de l’Écologie
Industrielle [2]).
La perspective de l’écologie industrielle correspond à un change-
1.1 Origine du concept d’écologie ment de paradigme, donc de système de représentation de
industrielle et territoriale l’homme par rapport au monde industriel et à l’environnement. En
effet, la nature servirait de modèle dont on imite les cycles et le
Le terme d’« écologie industrielle » tel qu’accepté par la commu- fonctionnement des écosystèmes, et ne serait plus considérée
nauté des praticiens de l’écologie industrielle trouve sa référence comme un « réservoir » fournissant des ressources, mais imposant
dans la parution d’un article scientifique de la revue Scientific Ame- des limites biophysiques [3]. L’approche revendiquée par les « éco-
rican. Les auteurs, Frosch et Gallopoulos [1], formulent l’hypothèse logues industriels » sort de l’approche conventionnelle qui sépare
que la conception de notre système industriel gagnerait à s’inspirer le monde de l’industrie de la biosphère, laquelle traite les impacts
du fonctionnement des écosystèmes naturels pour atteindre un des activités humaines en « bout de chaı̂ne » (« end of pipe »), de
stade « mature » d’évolution quant à la gestion des ressources et façon cloisonnée et linéaire, par addition de dispositifs techniques
à la réduction des impacts environnementaux. L’association des et de manière incrémentale, par petites améliorations graduelles,
deux termes « écologie » et « industrielle », communément perçus comme le souligne Suren Erkman [4]. Les limites de cette vision
comme contradictoires, traduit la volonté de concilier deux domai- réductrice du fonctionnement des systèmes industriels sont désor-
nes développés jusqu’à ce jour avec des logiques indépendantes, mais observables, même si des approches préventives de type
celui d’une science de l’environnement et celui des productions « analyse de cycle de vie des produits et procédés », « écoconcep-
techniques d’origine humaine et susceptibles de dégrader l’envi- tion des produits », « technologies propres et sobres », les systè-
ronnement. En réunissant ces deux termes, il s’agit justement de mes de gestion de type « management environnemental » concou-
renverser les perspectives, en appréhendant les systèmes indus- rent à en corriger les effets. Car l’approche intégrée, globale et
triels (appareil de production, de distribution, de consommation, systémique qui repose sur la conception de bouclages des échan-
services publics et privés, agriculture, etc.) comme autant d’écosys- ges, de cycles complets des flux de matières et d’énergie, de
tèmes particuliers en interaction entre eux et avec la biosphère. recherche de dématérialisation des fonctions de production et de
L’idée soutenue par ces deux vice-présidents de recherche chez consommation, sur la lutte contre la dissipation au cours de toute
General Motors est que le modèle industriel pourrait être plus effi- la chaı̂ne extraction-production-consommation et sur la diminution
cace s’il s’inspirait du fonctionnement des écosystèmes naturels. de l’utilisation du carbone fossile ou des nitrates chimiques, exige
L’écologie industrielle a commencé à être reconnue à partir d’un une révision radicale des complexes industriels et de l’organisation

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––––––––––––––––– ÉCOLOGIE INDUSTRIELLE : GESTION DES MATIÈRES PREMIÈRES SECONDAIRES DANS LE MÉTABOLISME TERRITORIAL – ILLUSTRATIONS

TYPE I

Ressources Déchets
non limitées non limités

TYPE II
Énergie et Déchets
ressources limitées limités

Composants de Énergie TYPE III


l’écosystème (solaire)
industriel

Flux de matières quasi cycliques

Figure 1 – Représentation des écosystèmes industriels de type I, II et III définis par Braden R. Allenby

territoriale des activités humaines. Comment former des « biocéno- institutionnels, elle-même caractérisée par des rapports de hiérar-
ses industrielles », inspirées des associations caractéristiques chie, de domination, de solidarité, de complémentarité…
d’organismes vivants, ou encore des « chaı̂nes trophiques » similai-


res unissant des entités industrielles d’extraction de ressources, de En outre, le territoire tel qu’il peut être appréhendé dans une
producteurs primaires et secondaires, puis de consommateurs et démarche d’écologie industrielle, pourra être décrit d’après les
de décomposeurs selon une autorégulation par des cycles d’échan- flux d’échanges et les stocks de matières et d’énergies selon les
ges à faible entropie ? Comment concevoir un écosystème indus- principes et les lois fondamentales de la thermodynamique. C’est
triel et territorial dont les séquences de transformations des res- grâce à Braden Allenby [7], l’un des premiers chercheurs à explorer
sources et des sous-produits formeraient des cycles autorégulés, le concept d’écologie industrielle, que l’on peut esquisser un
où tout déchet constitue une ressource ? schéma de fonctionnement et d’évolution de la société industrielle
au regard de l’évolution de la biosphère.
Mais loin de ramener systématiquement l’enjeu à la dimension
Pour reprendre la terminologie de cet auteur, le processus d’évo-
du secteur industriel, c’est aussi à l’échelle des territoires que
lution d’un système suit trois principaux stades, ceux dits de type I,
l’approche de l’écologie offre une révision radicale de l’organisa-
II et III (figure 1). L’écosystème de type I se caractérise par un pro-
tion des activités humaines. Que ce soit un espace forestier, un
cessus linéaire dans lequel les matières premières et les déchets
massif montagneux, une zone littorale, une tourbière, un site
sont produits de façon illimitée sans aucun dispositif de régulation
industriel, un quartier urbain, il s’agit dans tous les cas d’appréhen-
ou de recyclage, pour finir dans l’environnement. Dans l’écosys-
der ces divers systèmes naturels et artificiels comme autant d’éco-
tème de type II, les entités ou organismes vivants sont interdépen-
systèmes dont le fonctionnement requiert des ressources, des
dants et forment des réseaux d’interactions complexes. L’efficacité
organismes de production, de transformation, de consommation
de cet écosystème dépasse le type I sans toutefois être viable à
et de décomposition.
long terme : la diminution de ressources (matières premières)
Nous pouvons définir un territoire à partir de l’analyse de géo- contraste avec l’augmentation inexorable des déchets. Enfin, un
graphes [5] posant le « territorial » par différence avec le niveau écosystème de type III est formé par un processus cyclique où le
global. La notion de « territoire » recouvre ainsi trois dimensions principal intrant est l’énergie solaire, inépuisable, et dont les trans-
différentes mais complémentaires [6] : formations biophysico-chimiques sont compatibles avec les éco-
– une dimension identitaire. Le territoire correspond alors à une systèmes naturels.
entité spatiale dotée d’une identité propre. L’identité du territoire Nous allons procéder désormais à l’examen des différents
est caractérisée par son nom, ses limites, son histoire et son patri- concepts scientifiques ayant contribué à forger une véritable appro-
moine, mais aussi par la manière dont les groupes sociaux qui che scientifique des organisations innovantes que proposent les
l’habitent se le représentent, se l’approprient et le font exister au tenants de l’écologie industrielle et territoriale.
regard des autres ;
– une dimension matérielle. Le territoire est conçu comme un
espace doté de propriétés naturelles définissant des potentialités 1.2 Notions et principes scientifiques
ou des contraintes de développement, ou de propriétés matérielles
résultant de l’aménagement de l’espace par les sociétés (armature L’écologie industrielle puise ses concepts dans le lexique de
urbaine, réseau de desserte…). Ces propriétés physiques des terri- l’écologie scientifique pour décrire et qualifier le fonctionnement
toires sont caractérisées par leurs structures et leurs dynamiques de systèmes artificiels par analogies.
temporelles et spatiales ; Aussi en reprenant la définition de Ernst Haeckel (1866) : « L’éco-
– une dimension organisationnelle. Le territoire est défini comme logie est la science qui traite des relations entre les organismes et
une entité dotée d’une organisation des acteurs sociaux et leur environnement et plus généralement de toutes les conditions

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ÉCOLOGIE INDUSTRIELLE : GESTION DES MATIÈRES PREMIÈRES SECONDAIRES DANS LE MÉTABOLISME TERRITORIAL – ILLUSTRATIONS ––––––––––––––––

(néguentropie). Les biologistes semblent s’entendre sur le fait que


SOLEIL ATMOSPHÈRE ÉCOSYSTÈME FEUILLE LAPIN CHASSEUR le théorème d’accroissement d’entropie s’applique à l’ensemble de
5 000 000 1 000 000 500 000 2 000 200 la biosphère et qu’aucun système vivant ne peut être assimilé à un
système isolé, mais plutôt à un système ouvert, échangeant de
Figure 2 – Représentation du transit des flux énergétiques (en Kcal/
l’énergie et de la matière avec le monde extérieur. L’accroissement
m2 par an), quantification simplifiée d’entropie du système complet serait parfaitement compatible avec
la diminution d’entropie au sein du système vivant se formant lors
de la formation de structures organisées. Le concept de « néguen-
de vie », l’écologie industrielle propose-t-elle d’étudier l’ensemble
tropie » a été introduit par le physicien autrichien Erwin Schrödin-
des systèmes, naturels et artificiels comme autant de systèmes
ger (1944) pour expliquer la présence de l’« ordre » à l’intérieur des
complexes à travers lesquels circulent et transitent des flux de
êtres vivants, puis développé avec les travaux de Claude Shannon
matières et d’énergie. Dans un écosystème naturel, un transfert de
matière organique s’effectue le long d’une chaı̂ne alimentaire par le physicien français Léon Brillouin [10]. Les auteurs de l’écolo-
(chaı̂ne trophique) d’une espèce à l’autre (du producteur vers un gie industrielle s’appuient sur ces théories qui ont servi à constituer
consommateur par exemple), circulation régie par l’énergie. La pre- l’approche systémique retrouvée en sciences de la communication,
mière source énergétique, celle du soleil, fait transiter un flux en biologie, en écologie, et plus fondamentalement dans la théorie
continu et subit des déperditions au long des chaı̂nes organiques des systèmes complexes.
(figure 2). Trois phases de conversion correspondent à chaque fois Nota : la néguentropie est le facteur d’organisation des systèmes physiques, et éven-
tuellement sociaux et humains, qui s’oppose à la tendance naturelle à la désorganisation :
à une déperdition, lors du passage de l’énergie solaire en énergie l’entropie (ou désordre d’un système).
végétale (photosynthèse), de la consommation par les herbivores
Les systèmes industriels et territoriaux forment des ensembles
puis du transfert des consommateurs primaires vers ceux dits
plus ou moins complexes dont les entités, organismes ou éléments
« secondaires » (carnivores) [8].
(usine de fabrication de pâte à papier, site de production d’énergie
Il est utile alors de rappeler les grandes lois d’organisation et électrique, station d’épuration, centrale thermique, etc.) coexistent
d’évolution de la physique qui s’appliquent aux systèmes biologi- dans un espace défini. Par analogie, les écologues industriels utili-
ques et écologiques pour comprendre l’analogie constante mainte- sent parfois pour les désigner le terme de « biocénose industrielle »,
nue dans l’approche en écologie industrielle et territoriale. Parmi au sens de « ensemble des êtres vivants qui peuplent un écosys-
ces grandes lois, celles de la thermodynamique, et tout spéciale- tème donné ». Lorsque les échanges entre ces entités créent une
ment le second principe, jouent un rôle central. interdépendance forte entre elles, les écologues industriels
Le premier principe de la thermodynamique affirme la conserva- emploient le terme de « symbiose » (relation écologique obliga-
tion de l’énergie pour tous les systèmes. L’accroissement de l’éner- toire qu’entretiennent des organismes d’espèces différentes vivant
gie au sein du système est égal à l’énergie reçue par celui-ci. Le en contact direct les uns avec les autres). Autrement dit, au niveau
second principe indique qu’un système isolé (sans aucun échange du fonctionnement des systèmes, le lexique des écologues sert à
d’énergie et de matière avec le monde extérieur au système) évolue désigner la nature et la force des relations et interactions établies


spontanément vers un état d’équilibre qui correspond à l’entropie entre les organismes ou entités :
maximale, c’est-à-dire au plus grand désordre. Sur la base de ces – relations de mutualisme (association bénéfique entre deux
deux principes de la thermodynamique classique, nous pouvons espèces vivantes, facultative dans le cas d’une proto-coopération,
décrire la plupart des systèmes. ou obligatoire dans la symbiose) ;
Nota : en thermodynamique, l’entropie est la mesure du degré de désordre d’un sys- – relation de concurrence (interaction indirecte, de type compéti-
tème au niveau microscopique ou de variation d’une fonction d’état à un niveau macro- tion pour une ressource insuffisante pour deux espèces occupant
scopique (mesurée en joule/kelvin).
une même niche écologique) ;
L’écologie industrielle et territoriale applique ces deux principes à – relation de commensalisme (association entre deux espèces
l’échelle de l’ensemble des écosystèmes naturels et artificiels, dont une seule tire profit sans pour autant nuire à l’autre) ;
considérant que la biosphère fonctionne comme un système – relation de parasitisme (association étroite entre deux espèces
fermé qui voit la conservation de l’énergie (aux rayonnements vivantes dont l’une dénommée l’hôte héberge la seconde qui vit à
absorbés moins les rayonnements émis après) sur une échelle de ses dépens au plan trophique) ;
temps de longue durée. Le principe de limite biogéophysique glo- – relation de neutralisme (absence d’interaction concurrentielle
bale sert de postulat selon lequel toute activité humaine tend à dis- ou mutualiste entre deux espèces ; ni le bénéfice, ni le détriment
siper un stock d’énergie de durée limitée (d’origine fossile) [9]. Le d’une espèce sur l’autre ne sont mesurables).
principe de limitation des ressources, admis dans la communauté
scientifique, ne tient pas seulement compte des quantités disponi- Comme décrits plus haut, les niveaux d’intégration de relations
bles (même si certains minerais et matières fossiles constituent des d’échanges que peuvent adopter les écosystèmes industriels, cor-
stocks limités) mais vise les perturbations observées en termes de respondent à des niveaux de « maturation » selon notamment la
capacité d’absorption des pressions anthropiques et de restaura- théorie d’Allenby [7]. Les trois niveaux de maturation, dits de type I,
tion des équilibres des écosystèmes (résilience). II et III caractérisent une évolution marquée par la formation de
Nota : la résilience est la capacité d’un écosystème, d’un habitat, d’une population ou réseaux d’interactions complexes jusqu’à un stade dit « mature »
d’une espèce à se reconstituer, à retrouver un fonctionnement et un développement nor- où les cycles d’échanges sont quasi complets et fermés. C’est
mal après avoir subi une perturbation importante. alors qu’un état dit d’« équilibre instable » des systèmes peut être
Par ailleurs, toute activité des organismes vivants tend à connaı̂- qualifié de « niveau climacique », à l’image du climax des écosys-
tre une dissipation énergétique qui les amène à se décomposer à tèmes naturels. Ce concept, énoncé par le géobotaniste danois
terme. Le deuxième principe de la thermodynamique affirme la Eugenius Warming [11], désigne l’état d’aboutissement d’une suc-
dégradation de l’énergie : l’énergie d’un système passe nécessaire- cession écologique d’organismes vivants, la formation la plus
ment et spontanément de formes concentrées et potentielles à des variée et la plus apte à se perpétuer, à rester stable.
formes diffuses et cinétiques (frottement, chaleur, etc.). Il introduit Nota : le climax désigne l’état final (théorique) d’une succession écologique, l’état le
ainsi la notion d’« irréversibilité » d’une transformation et la notion plus stable dans les conditions abiotiques existantes.
d’« entropie ». Il affirme que l’entropie d’un système isolé – laissé
livré à lui-même donc – augmente.
1.3 Définition des échelles et périmètres
À l’échelle des organisations vivantes, la croissance en organisa-
tion, la formation de structures et de fonctions complexes et diffé- Pour entreprendre une analyse en écologie industrielle et territo-
renciées pourraient constituer, dans l’hypothèse de l’écologie riale, force est de s’en tenir non seulement aux principes et concepts
industrielle et territoriale, un processus susceptible de réduire énoncés dans les domaines de la physique et de l’écologie, mais
l’entropie thermodynamique, voire d’en inverser le sens aussi à ceux requis en géographie. L’un des critères essentiels dans

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––––––––––––––––– ÉCOLOGIE INDUSTRIELLE : GESTION DES MATIÈRES PREMIÈRES SECONDAIRES DANS LE MÉTABOLISME TERRITORIAL – ILLUSTRATIONS

la méthode est de définir d’emblée l’échelle d’analyse des flux et (production et consommation). C’est la perspective globale de
stocks « matières-énergie » susceptibles de servir la mise en place l’écologie industrielle ;
de synergies. La pertinence de l’échelle choisie peut être relative – à l’échelle interfirmes : cela concerne la symbiose industrielle
aux zones d’activités, mais aussi à la taille, à la densité et à la spéci- (parcs éco-industriels), le cycle de vie des produits et toutes initiati-
ficité d’acteurs économiques présents. L’inventaire des ressources et ves au niveau du secteur industriel ;
gisements disponibles, de l’ensemble des composantes d’un sys- – à l’échelle de la firme ou des unités de production : il est ques-
tème peut s’établir à une échelle nationale (politiques et program- tion des chaı̂nes de procédés de production et fabrication de pro-
mes d’un pays), à l’échelle d’une région (dans le cadre d’un plan de duits en intégrant une approche d’écoconception, de procédés pro-
gestion de déchets), au niveau d’un bassin de vie et d’emploi, au pres et sobres, voire de meilleures technologies disponibles (MTD).
niveau enfin d’un site industriel ou d’activité agro-forestière. Les tail-
les des périmètres varient en fonction de la finalité de l’étude. Il est Pour représenter les trois niveaux d’échelle d’appréhension des
classique de distinguer trois grands niveaux d’analyse : écosystèmes industriels et territoriaux, selon une approche inté-
– macro-écologique ; grée, nous recourons au cas d’une huilerie en Afrique.
– méso-écologique ; Dans une approche « ascendante » (bottom up), il s’avère utile de
– micro-écologique. considérer un premier niveau, celui des fonctionnalités des procé-
Pour le niveau dit « macro », ce peut être à l’échelle d’un pays, dés (figure 3). C’est le niveau idéal sur le plan technique d’une
d’une région ou d’un état (d’un Länder en Allemagne), voire d’un démarche d’écologie industrielle car les flux vont rester inchangés
continent. (hors dissipation) d’un procédé à l’autre. Mais, il est pratiquement
ingérable de par la multiplicité technique et la structuration des
Pour le niveau « méso », ce peut être à l’échelle d’un bassin acteurs socio-technico-économiques. Dans le schéma présenté, il
d’activité, d’une zone industrielle, d’une zone portuaire. est à noter qu’un bouclage de flux est réalisé à ce niveau en utili-
Pour le niveau « micro », ce sera à l’échelle d’un site industriel, sant les coques de graines de coton pour alimenter une chaudière à
voire d’un atelier ou d’une chaı̂ne de production. combustion.
Selon Robert U. Ayres et Leslie Ayres [12], le découpage peut Le deuxième niveau (figure 4) est celui des sites d’usines qui pré-
s’opérer selon les niveaux suivants : sentent une unité managériale et technique cohérente. Les opportu-
– à l’échelle régionale/globale : il s’agit d’améliorer l’efficacité nités d’échanges de flux matières-énergie ressortent avec une plus
matérielle et énergétique dans l’ensemble de l’économie grande clarté et lisibilité.


Graines Réception Eau de
51 504 t (pesage et stockage) forage
de coton
Graines Stockage
de coton coques de coton 3
179 882 m
44 611 t

Coques de coton Production Cendres


Nettoyage - Décorticage 21 750 t d’utilités 160 t Cendres
Graines ?
58 t
de coton
décortiquées Eau chargée
Linter
Déchets 22 768 t
solides Hexane Vapeur Turbine
Écailles process électrique
? Préparation - Pressage ?
111 m3
(Aplatissage - cuisson -
Granulés
? pressage - granulation)
Huile brute Pellets
? Extraction ? Pelletisation 16 717 t
pression (tourteaux)
? Farines

Huile brute ?
Pieds de presse Filtration 7 807 t extraction
111 m3
Gâteaux de filtration Hexane Ammoniaque
réutilisé

Acides
?
gras
? Polyéthylène 136 t Étiquettes, colle,
HD / BD savon, carton

Solution Raffinage
131 t
de soude (Neutralisation - Huile Huile de coton
décoration - ? Conditionnement 5 700 t raffinée
raffinée
Eau désodorisation)
?
chaude
Eau usées
65,6 t Eau chargée 17,3 t 34,53 t
Réservoirs de Emballages Emballages
Terre de stockage neufs recyclés
décoloration d’huile raffinée

Figure 3 – Représentation des échelles d’écosystèmes industriels : niveau I (source : Écologie Industrielle Conseil (EIC) – Nioto (Togo) – 2005)

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ÉCOLOGIE INDUSTRIELLE : GESTION DES MATIÈRES PREMIÈRES SECONDAIRES DANS LE MÉTABOLISME TERRITORIAL – ILLUSTRATIONS ––––––––––––––––

ATMOSPHÈRE

Pluie
(dont 13 300 m3 Fumées Chaleur Hexane
récupérables)

63 000 m3

111 m3
7 m3

7
Graines coton
44 611 t
(Nord Togo, Burkina Faso)
9 148 t Coques de coton
Amandes de karité 18 323 t (Lomé)
(Nord Togo, Ghana, Burkina Faso, Mali)
8 349 t Farine de karité
Polyéthylène HD/BD
136 t (Lomé)
(Yougoslavie)
Soude 131 t Déchets de nettoyage
(Europe) ?t Déchets
(Lomé)
Hexane Sous-produits
Matière
(Europe via Côte d’lvoire) 111 m3 solides
?t Linter
Terres de décoloration 66 t (Lomé)
(Europe)
Lubrifiant
(Lomé) 20 m3 220 t
Gâteaux de filtration
(Non contrôlé)
Ammoniac 8,1 t
(Belgique via France)
Déchets de filtration
Graisse USINE NIOTO ?t
3,7 t (Non contrôlé)
(Lomé)
Électricité 4 259 600
Togo Électricité (TE) kWh

Oxygène
(Lomé) 392 m3 Stocks
Énergie
Bâches
Acétylène Eaux usées
(Lomé) 107 m3 Bâtiments (78 000 m3) ? m3
(Lomé)
Véhicules
Gazole Effluents
140 m3 Arbres
(Lomé) Eau salée (osmose)
Eau pompée 13 998 m3
179 882 (Lomé)
(Lomé) m3
Eau
Eau
Togolaise des Eaux (TdE) 2 625 m3


16 717 t
7 386 t

7 350 t

Autres territoires Autres territoires


160 t

?t

Beurre Huile Pellets Cendres Acides


de karité de coton gras

Afrique
Europe de l’Ouest Togo

MARCHÉ

Figure 4 – Représentation des échelles d’écosystèmes industriels : niveau II (source : Écologie Industrielle Conseil (EIC) – Nioto (Togo) – 2005)

Le troisième niveau (figure 5) est celui de la région ou du terri- Cette phase spécifiquement analytique et descriptive consiste à
toire, niveau où s’expriment le mieux les pouvoirs politiques et les appliquer le principe d’un bilan des flux et stocks de matières et
acteurs socio-économiques. d’énergies transitant par le système considéré.
La diversité des initiatives des territoires et des variations Les spécialistes invoqueront le terme de « métabolisme indus-
d’échelles d’applications en écologie industrielle rend la tâche triel » en référence à la terminologie des écologues, et recourent à
encore difficile à ce jour de définir l’échelle pertinente. Sabrina ce qu’il est communément admis d’appeler une analyse des flux
Brullot [13] a toutefois recensé une quinzaine de projets de façon matières énergie (AFME).
à les ordonner dans un tableau exposant à la fois les niveaux
La finalité visée est de comprendre la dynamique du fonctionne-
d’échelles et les initiateurs de démarches relevant de l’écologie
ment du système, depuis l’origine des ressources matérielles
industrielle (tableau 1).
(matières premières), de leur extraction à leur transformation en
produits finis, jusqu’à leur retour et dissipation dans les processus
biogéochimiques ou les milieux récepteurs.
2. Bilan et cartographie Le bilan dit « AFME » s’établit en cinq étapes majeures :
des flux matières-énergie – inventorier les acteurs du territoire dans le périmètre prédéfini ;
– conduire une série d’entretiens individualisés avec les repré-
Une fois définis les niveaux d’échelle d’application de la démar- sentants des activités du territoire (sur site industriel, auprès des
che d’écologie industrielle et territoriale, la seconde étape consiste collectivités locales) ;
à établir un bilan et une cartographie des flux de matières et d’éner- – dresser la liste des rubriques de matières et de ressources éner-
gies. L’étude dite du « métabolisme industriel » constitue une étape gétiques potentielles ;
décisive. En effet, l’inventaire détaillé de l’ensemble des composan- – identifier les usages des ressources matérielles et
tes biophysiques du système industriel permet de dresser la « carto- énergétiques ;
graphie des flux physiques ». – établir la synthèse des flux et stocks des activités.

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Progiciel Thermoptim
Boîte à outils pour l’énergétique

par Renaud GICQUEL


Professeur
Mines ParisTech
Cet article est la réédition de [BE 8 047v2] paru en 2009

1. Principales caractéristiques du progiciel ....................................... BE 8 047v3 - 3


1.1 Objectifs de Thermoptim.......................................................................... — 3
1.2 Principales fonctionnalités du simulateur............................................... — 5
1.3 Les cinq environnements de travail de Thermoptim... .......................... — 5
1.4 Principe de construction des modèles... ................................................. — 7
2. Éléments de base du progiciel........................................................... — 8
2.1 Noyau du progiciel.................................................................................... — 8
2.2 Mécanisme d’extensions... ....................................................................... — 12
2.3 Exemples de modèles construits avec Thermoptim... ........................... — 18
3.
3.1
3.2
Fonctions avancées ..............................................................................
Méthode d’optimisation systémique.......................................................
Pilotage de Thermoptim... ........................................................................



19
19
20

3.3 Dimensionnement technologie................................................................ — 21
3.4 Comportement en régime non-nominal... .............................................. — 24
3.5 Éditeur de structures productives............................................................ — 28
4. Conclusion............................................................................................... — 30
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. BE 8 047

odéliser des systèmes thermodynamiques est un exercice considéré


M comme particulièrement difficile pour de nombreuses raisons, du fait que :
– la discipline fait appel à certains concepts fondamentaux délicats à maî-
triser, comme l’énergie interne, l’enthalpie ou l’entropie ;
– les calculs à effectuer sont presque toujours complexes, tant sur le plan
formel que numérique, notamment en système fermé ;
– les lois même les plus simples sont fortement non linéaires.
De surcroît, lorsque l’on approfondit un peu les choses, on est amené à
distinguer deux niveaux dans les modèles :
– les modèles phénoménologiques qui donnent accès au calcul des cycles
thermodynamiques, indépendamment du choix d’une technologie de
composant particulière ;
– les modèles de dimensionnement technologique et de simulation en
régime non nominal qui fournissent non seulement les mêmes résultats que
les précédents, mais, grâce à la prise en compte d’équations complémentaires
spécifiques aux technologies choisies, permettent en plus de dimensionner
précisément les divers composants puis, une fois ce travail réalisé, d’étudier le
comportement du système considéré en dehors des conditions de fonctionne-
p。イオエゥッョ@Z@ッ」エッ「イ・@RPQS

ment pour lesquelles il a été dimensionné.

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PROGICIEL THERMOPTIM ____________________________________________________________________________________________________________

Cette seconde classe de modèles n’a été jusqu’ici que peu étudiée, bien
qu’elle soit la seule qui permette de vraiment répondre aux questions que se
posent la plupart des modélisateurs. Cette situation un peu paradoxale pro-
vient de ce que de tels modèles sont beaucoup plus difficiles à écrire et à
résoudre que les calculs de cycles, ces derniers étant déjà souvent assez
complexes. Faute de disposer d’outils appropriés, les modélisateurs ont
jusqu’ici été contraints de limiter leurs ambitions en la matière.
Précisons bien que ce que nous appelons régime non nominal correspond au
fonctionnement stabilisé d’une installation pour des conditions opératoires diffé-
rentes de celles pour lesquelles elle a été dimensionnée : il ne s’agit pas d’étudier
le régime transitoire rapide résultant par exemple des actuateurs d’une régulation.
Le progiciel Thermoptim a été bâti pour faciliter et sécuriser la modélisation
des technologies de conversion de l’énergie. Ses fonctionnalités lui permettent
dorénavant d’effectuer aussi bien des é t u d e s d e c y c l e s que d’aborder la simu-
lation en régime non nominal de divers systèmes, comme nous le montrons
dans cet article.
Utilisé dans plus de 120 établissements d’enseignement et par de nombreux
industriels, Thermoptim permet ainsi de profondément renouveler la modéli-
sation en thermodynamique appliquée.
L’intérêt qu’il a suscité depuis sa diffusion initiale en 1998 par les Techniques
de l’Ingénieur sous le nom de ThermoCalc a justifié la mise au point de nom-
breuses ressources pédagogiques numériques destinées à faciliter sa prise en
main et son utilisation, qui sont aujourd’hui rassemblées dans le portail Ther-
moptim-UNIT auquel nous renvoyons le lecteur.

V Principaux symboles et acronymes Principaux symboles et acronymes (suite)


Symbole Définitions (unités) Symbole Définitions (unités)
A surface (m2) v volume massique (m3 · kg–1)
Cp capacité thermique massique (kJ·kg–1 ·K–1)
Vɺ débit-volume (m3 · s–1)
différence de température moyenne logarithmique
DTML Vs cylindrée (m3 ou L)
(°C ou K)
dh diamètre hydraulique (m) w humidité spécifique (kg d’eau · kg–1 d’air sec)
e épaisseur (m) x titre en vapeur
ex exergie massique (kJ · kg–1) xh exergie massique (kJ · kg–1)
f facteur de surface
xq exergie-chaleur massique (kJ · kg–1)
h ou H enthalpie massique (kJ · kg–1)
η rendement, efficacité
h coefficient d’échange convectif (W · K–1 · m–2)
λ rendement volumétrique
ɺ ou m
m débit-masse (kg · s–1)
λ conductivité thermique (W · K–1 · m–1)
N vitesse de rotation (tr · min–1)
τ puissance utile (kW)
NUT nombre d’unités de transfert
P pression (Pa ou bar) COP coefficient de performance

Q puissance thermique (kW) CEFC courbe des écarts des facteurs de Carnot

q′ enthalpie spécifique (gaz humides) (kJ · kg–1) HRSG Heat Recovery Steam Generator
s entropie massique (kJ · kg–1 · K–1) SPT serveurs de propriétés thermodynamiques
R rapport (mCp)min/(mCp)max librairie de calcul des propriétés
T température thermodynamique (°C ou K) thermodynamiques du Laboratoire
TEP Lib
de Thermodynamique des Equilibres de Phase
t température (°C ou K) de Mines ParisTech
U coefficient d’échange thermique (W · K–1 ·m–2) UPD unité productive ou dissipative

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_____________________________________________________________________________________________________________ PROGICIEL THERMOPTIM

1. Principales caractéristiques – le système complet est modélisé par assemblage de ces types
grâce à une interface visuelle interactive.
du progiciel Le simulateur de Thermoptim calcule pas à pas les différents
éléments d’un projet. Il s’agit d’un mode de calcul séquentiel, qui
le distingue d’autres environnements de modélisation (matriciels)
1.1 Objectifs de Thermoptim dans lesquels l’ensemble des équations du problème est résolu
simultanément. Cette manière de faire présente l’avantage qu’il est
Thermoptim constitue une boîte à outils logicielle dont le noyau beaucoup plus facile de calculer successivement les éléments un
intègre de manière profondément interconnectée plusieurs envi- par un que de résoudre le système complet d’un seul coup. En
ronnements de modélisation : revanche, elle induit deux difficultés :
– un éditeur de schémas/écran synoptique (figure 1) ; – d’une part, il peut être nécessaire d’itérer les calculs un certain
– des fonctions de simulation et des diagrammes thermodyna- nombre de fois pour trouver la bonne solution, notamment si le
miques interactifs (figure 2). système est couplé ;
Étant donné que les technologies énergétiques se présentent – d’autre part, pour un projet un peu complexe, la question se
comme des assemblages de composants reliés entre eux, Ther- pose de savoir dans quel ordre les calculs doivent être effectués.
moptim combine approche systémique et démarche analytique Pour résoudre cette dernière difficulté, un ensemble d’algorith-
et/ou empirique classique : mes a été mis au point. Appelé le moteur de recalcul automatique
– chaque élément fonctionnel est représenté par un type primitif de Thermoptim, il constitue un élément clé du progiciel. Le choix
approprié de Thermoptim (corps, point, transformation, nœud, de ce vocable vient de ce qu’il n’est généralement utilisé qu’après
échangeur) possédant des caractéristiques propres modifiables et qu’un premier paramétrage ait été effectué à la main composant
des variables de couplage ; par composant.

Fichier Édition Spécial Composants Aide

chaudière V
m ∆H = 242 287,17 m ∆H = 193 129m ∆H = 191 526,32 m ∆H = 100 226,88
3a 3a 3 4a 3c

eau eau
eau
m = 215 (kg/s) m = 215 (kg/s)
économiseur vaporiseurT = 349,83˚C m = 215 (kg/s)
surchauffeur résurchauffe
T = 349,83˚C T = 560˚C
P = 165 bar P = 165 bar turbine HP
P = 165 bar
H = 1 670,52 kJ/kg H = 2 568,79 kJ/kg
H = 3 459,61 kJ/kg
eau
eau
m = 215 (kg/s)
Cycle à vapeur avec resurchauffe et prélèvement m = 182,75 (kg/s)
T = 318,67˚C
T = 318,67˚C
P = 30 bar
P = 30 bar
eau Bilan H = 3 043,14 kJ/kg
H = 3 042,14 kJ/kg
m = 215 (kg/s) puissance utile : 307 552 (kW)
eau
T = 126,73˚C puissance payante : 727 169 (kW) prélèvement m = 182,75 (kg/s)
P = 165 bar efficacité : 0,4229 T = 560˚C
H = 543,6 kJ/kg
P = 30 bar
B H = 3 590,58 kJ/kg
4a

eau eau eau


m = 215 (kg/s) m = 32,25 (kg/s) m = 32,25 (kg/s)
mélange prélèvement
T = 125,56˚C T = 318,67˚C T = 318,67˚C
compression liq 2
P = 30 bar eau P = 30 bar P = 30 bar
H = 529,28 kJ/kg m = 182,75 (kg/s)
H = 3 042,14 kJ/kg H = 3 042,14 kJ/kg
T = 19,79˚C 1 4
P = 30 bar
H = 85,84 kJ/kg eau
eau
m = 182,75 (kg/s)
m = 182,75 (kg/s)
condenseur T = 19,75˚C
T = 19,75˚C
compression liquide m ∆H = - 419 617,36 P = 0,023 bar turbine BP
P = 0,023 bar
H = 2 378,96 kJ/kg
H = 82,84 kJ/kg
x = 0,9353

source froide

Figure 1 – Synoptique d’un cycle à vapeur avec resurchauffe et prélèvement

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PROGICIEL THERMOPTIM ____________________________________________________________________________________________________________

E p = 250 bar
G
p = 150
p = 40
800 p = 10
p = 2,5
p=1
p = 0,2
p = 0,05
p = 0,01
700 h = 3 600 kJ/kg
h = 3 450
h = 3 300
h = 3 150
D h = 3 000
C h = 2 850
Température T (K)

h = 2 700
600 F h = 2 550
h= 2 400
v = 4,5 m3/kg
v = 1,8
s sat l v = 0,75
B I v = 0,3
500 v = 0,12
s sat v v = 0,05
v = 0,02
v = 0,0075
v = 0,00317
x = 0,9
400 x = 0,8
x = 0,7
x = 0,6
x = 0,5
x = 0,4
A x = 0,3
300 H x = 0,2
x = 0,1

0 2 4 6 8 10
Entropie s (kJ · kg–1 · K–1)

Les valeurs indiquées en légende sont croissantes de bas en haut pour p, h et v et de gauche à droite pour x.
En tiretés, le cycle à vapeur

V Figure 2 – Cycle à vapeur dans un diagramme entropique

Alors que traditionnellement, on considère la thermodynamique – pouvoir piloter Thermoptim à partir d’une autre application,
comme une matière ardue et l’étude des technologies énergé- soit pour guider un utilisateur (tuteur intelligent), soit pour
tiques comme difficile, on simplifie grandement les choses si on contrôler l’exécution du code (pilotage ou régulation, accès aux
commence par dissocier la représentation globale du système, bibliothèques thermodynamiques).
généralement assez simple, de l’étude de ses différents
C’est ce mécanisme d’extension qui confère à Thermoptim le
composants considérés individuellement.
statut de véritable boîte à outils logicielle pour l’énergétique :
La représentation d’ensemble se révèle très utile sur le plan
– la version de base bâtie autour du noyau permet d’effectuer
qualitatif : elle est visuelle et permet de bien comprendre le rôle
des calculs de cycles (modélisation purement phénoménologique
joué par chaque composant dans le système complet. Sur le plan
de nombreux systèmes classiques) ;
didactique, elle est essentielle pour bien assimiler les principes de
conception de ces technologies. – des composants externes peuvent être ajoutés à ce noyau
pour élargir les études de ce type réalisables ;
Si l’on dispose d’un environnement graphique approprié comme – enfin des écrans de dimensionnement technologique viennent
celui de Thermoptim, la structure interne du système peut être compléter ce dispositif pour prendre en compte les caractéristi-
décrite très facilement. On obtient ainsi une représentation visuelle, ques des composants utilisés, et des pilotes externes autorisent la
très parlante pour l’ingénieur, qu’il ne reste plus ensuite qu’à quanti- résolution des équations de couplage qui prennent place entre ces
fier en paramétrant les propriétés thermodynamiques des différents composants dans les machines réelles, permettant ainsi d’étudier
composants puis en les calculant. Grâce à cette démarche séparant leur comportement non nominal.
les aspects qualitatifs et quantitatifs, Thermoptim permet à ses uti-
lisateurs de calculer très facilement des cycles thermodynamiques En complément, Thermoptim fournit à ses utilisateurs deux
même complexes, et cela sans avoir à écrire une seule équation ou environnements de travail complémentaires (méthode du
programmer une ligne de code s’ils utilisent les composants prédé- pincement, automatisation de l’établissement des bilans exergé-
finis dans le noyau du progiciel, qui permettent de représenter de tiques grâce aux structures productives) pour effectuer des études
nombreuses technologies énergétiques, mais pas toutes. exergétiques, qui sont de plus en plus considérées comme parmi
les mieux adaptées pour optimiser les systèmes énergétiques, car
L’interfaçage de Thermoptim avec des classes (éléments de code elles permettent de tenir compte aussi bien des quantités d’éner-
Java) externes permet d’étendre les possibilités du progiciel et faci- gie mises en jeu que de leur qualité.
lite son interopérabilité avec l’extérieur, notamment avec d’autres
applications, développées ou non sous Java. Son intérêt est double : Ses fonctionnalités font de Thermoptim un outil particulièrement
– pouvoir réaliser des extensions de Thermoptim à partir du bien adapté à l’étude des systèmes thermodynamiques mis en œuvre
noyau commun, en ajoutant des modules externes reconnus par le dans les technologies énergétiques, et lui permettent ainsi de :
progiciel, qui définissent des éléments qui apparaissent automati- – motiver les débutants en évitant qu’ils ne soient rebutés par
quement dans ses écrans de manière transparente pour l’utili- les difficultés calculatoires tout en leur permettant de traiter des
sateur. C’est ainsi qu’un utilisateur peut ajouter ses propres corps exemples complexes et réalistes (il est utilisé dans plus de cent
ou des composants non disponibles dans le noyau ; vingt établissements d’enseignement supérieur) ;

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QPT
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_____________________________________________________________________________________________________________ PROGICIEL THERMOPTIM

– offrir à des utilisateurs confirmés un environnement de calcul faces particulières, l’intégration la plus poussée étant réalisée
puissant et convivial leur permettant de construire visuellement entre le simulateur et l’éditeur de schémas d’une part, et entre le
des modèles de nombreux systèmes énergétiques, des plus simulateur et la méthode d’optimisation d’autre part.
simples comme un réfrigérateur aux plus complexes comme des
centrales électrogènes à cycle combiné à gazéification de charbon
intégrée mettant en jeu plusieurs centaines d’éléments. 1.3.1 Éditeur de schémas

Non seulement une telle manière de faire simplifie nota- L’éditeur de schémas (figure 1) permet de décrire qualitati-
blement la démarche de modélisation et facilite ultérieu- vement le système étudié.
rement l’utilisation et la maintenance du modèle, mais surtout
elle sécurise sa construction en automatisant l’établissement
des couplages entre les différents éléments qui le composent Il comporte une palette présentant les différents composants
et en garantissant leur cohérence. représentables, et un panneau de travail où ces composants sont
placés et interconnectés par des liens vectoriels. Cet environ-
nement graphique offre une convivialité particulièrement intéres-
1.2 Principales fonctionnalités sante pour visualiser et contrôler les connexions des grands
projets. Il permet de surcroît de simplifier l’entrée des données lors
du simulateur de la création d’un nouveau projet.
Thermoptim permet de calculer automatiquement l’état complet
(température, pression, volume massique, enthalpie, énergie 1.3.2 Simulateur
interne, entropie, exergie, titre) de différents fluides, qui peuvent
être considérés comme des gaz idéaux ou des vapeurs
condensables. Ces fluides peuvent subir diverses transformations,
Le simulateur permet de quantifier puis de résoudre le
comme les suivantes incluses dans le noyau commun :
modèle décrit qualitativement dans l’éditeur de schémas.
– des compressions et des détentes, en système ouvert ou
fermé. Elles peuvent être adiabatiques ou polytropiques, et sont
caractérisées par leur rendement isentropique ou polytropique ; Son écran principal (figure 3) donne accès aux écrans de para-
– des combustions, en système ouvert ou fermé, à pression métrage des propriétés (logiques et thermodynamiques) des
imposée, volume imposé ou température constante. Le différents éléments (les types primitifs de Thermoptim) mis en jeu
combustible peut être introduit dans la chambre de combustion dans les modèles générés.
séparément du comburant, ou bien prémélangé. La dissociation du


dioxyde de carbone peut être prise en compte ; Pour peu qu’un projet un peu complexe ait été créé, il peut
– des détentes sans travail ou laminages isenthalpiques ; mettre en jeu un grand nombre d’éléments comme des points, des
– des échanges de chaleur entre fluides, le noyau du progiciel transformations désignées plus simplement par « transfos » ou
pouvant calculer le produit UA du coefficient d’échange thermique des nœuds. L’utilisation de l’éditeur de schémas offre généra-
par la surface de l’échangeur, pour des configurations à lement une bonne garantie en ce qui concerne la cohérence des
contre-courant, cocourant, à courants croisés ou du type (p-n), la connexions entre ces éléments, mais elle ne permet pas d’assurer
valeur de U étant ensuite calculable grâce aux écrans de dimen- que ceux-ci ont été bien paramétrés. Des outils de diagnostic
sionnement technologique. permettent de le faire.
Pour représenter les réseaux de fluides auxquels on a recours, on
définit des nœuds, en pratique des mélangeurs, des diviseurs ou Enfin, le simulateur permet d’effectuer des analyses de sensi-
des séparateurs, assurant la conservation du débit et celle de bilité relativement simples, en faisant varier certains débits,
l’enthalpie. Les autres composants peuvent leur être aisément pressions ou températures.
connectés. Des mélanges de fluides peuvent ainsi être réalisés,
conduisant à la création de corps composés, considérés comme des
gaz idéaux dans la mesure où leur état thermodynamique le permet. 1.3.3 Diagrammes thermodynamiques
Thermoptim permet de plus de traiter les gaz humides,
mélanges d’un gaz sec et de vapeur d’eau susceptible de se
condenser, et propose six types de transformations particulières à Les diagrammes thermodynamiques interactifs peuvent être
ce genre de mélange (chauffage, refroidissement, humidification utilisés pour visualiser les cycles thermodynamiques calculés
adiabatique ou non, soufflage, dessiccation), permettant ainsi par par le simulateur. Ils permettent, sur simple clic souris, d’affi-
exemple de faire des études de climatisation. cher l’état thermodynamique complet d’un fluide, et facilitent
Le progiciel possède une base de données des propriétés ther- ainsi l’obtention des valeurs désirées.
modynamiques des corps les plus couramment rencontrés en
pratique, et peut être couplé à des utilitaires externes pour en
calculer d’autres. Signalons parmi ceux-ci la bibliothèque TEP Lib, Les diagrammes suivants sont disponibles :
qui permet de modéliser des mélanges de fluides réels représentés 1) des diagrammes de vapeurs, qui présentent les zones liquide,
par une équation d’état cubique ([Doc. BE 8 047]). équilibre liquide-vapeur et vapeur d’une quinzaine de corps purs,
dont l’eau (figure 2).
1.3 Les cinq environnements de travail Pour les vapeurs, les diagrammes suivants sont disponibles (en
fonction du corps) :
de Thermoptim
– le diagramme (h, lg P) dit des frigoristes, avec l’enthalpie en
Deux environnements de travail dédiés aux méthodes exergé- abscisse et la pression en ordonnée ;
tiques (une méthode d’optimisation et un éditeur de structures – le diagramme entropique (T, s), avec l’entropie en abscisse et
productives) complètent ceux du noyau (l’éditeur de schémas, le la température en ordonnée ;
simulateur et les diagrammes thermodynamiques interactifs). Les – le diagramme de Clapeyron (P, v), pour l’eau uniquement,
couplages entre ces environnements sont réalisés par des inter- avec le volume en abscisse et la pression en ordonnée ;

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PROGICIEL THERMOPTIM ____________________________________________________________________________________________________________

(kJ)
(kJ)

V Figure 3 – Écran du simulateur

– le diagramme de Mollier (h, s), avec l’entropie en abscisse et 1.3.4 Méthode d’optimisation systémique
l’enthalpie en ordonnée ;
– le diagramme exergétique (h, xh) ou (h, ex), avec l’enthalpie en
abscisse et l’exergie en ordonnée ;
Le quatrième environnement de travail de Thermoptim est sa
– le diagramme exergétique (s, xh), avec l’entropie en abscisse et méthode d’optimisation par intégration systémique, qui est une
l’exergie en ordonnée ; extension au cas des systèmes énergétiques (centrales de
– des diagrammes de mélanges externes qui permettent de repré- production d’électricité, de cogénération...) de la méthode du
senter de manière simplifiée des mélanges de vapeurs calculés par pincement développée dans le cadre du génie chimique pour
un serveur de propriétés thermodynamiques autre que Thermop- optimiser la configuration de très gros réseaux d’échangeurs
tim. Ces diagrammes sont simplifiés par rapport aux autres en ce (comme par exemple ceux d’une raffinerie). Elle permet de
sens qu’ils ne présentent que les courbes de bulle et de rosée, ainsi réduire les irréversibilités par hétérogénéité de température
qu’un seul jeu d’isovaleurs, les isobares pour le diagramme entropi- qui existent dans des systèmes mettant en jeu des échangeurs
que, et les isothermes pour le diagramme des frigoristes. recyclant de la chaleur en leur sein.
2) des diagrammes des gaz idéaux, permettant de faire varier la
nature du gaz (pur ou composé) :
Commençons par introduire cette notion de pincement.
– le diagramme entropique (T, s) ; Considérons pour cela la représentation graphique d’un double
– le diagramme de Clapeyron (P, v). échangeur composé d’un économiseur suivi d’un évaporateur,
dans le diagramme (T, ∆H) où l’on porte en ordonnée la tempé-
3) des diagrammes psychrométriques pour les gaz humides rature et en abscisse les enthalpies mises en jeu (figure 4).
(mélanges d’eau et d’un gaz idéal), qui permettent de faire varier,
d’une part, la nature du gaz sec (air, mais aussi gaz purs ou Le fluide qui s’évapore est représenté par la courbe inférieure
composés, notamment gaz de combustion) et, d’autre part, la (1-2-3), qui présente un point anguleux 2 correspondant au début de
pression : l’ébullition. Le fluide chaud se refroidit quant à lui de 4 à 5, par dimi-
nution de sa chaleur sensible. On voit apparaître au niveau du point
– le diagramme psychrométrique ou de Carrier (w, t), avec la 2 sur le diagramme un minimum P dans l’écart de température entre
température de bulbe sec en abscisse et l’humidité spécifique en les deux fluides, appelé pincement. Ce point joue un rôle fondamen-
ordonnée ; tal dans le dimensionnement des échangeurs, puisqu’il représente
– le diagramme de Mollier humide (w, q′) ou (w, h), avec l’humi- le plus faible écart de température dans l’installation, et correspond
dité spécifique en abscisse et l’enthalpie spécifique en ordonnée. donc à la zone la plus contrainte du système.

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_____________________________________________________________________________________________________________ PROGICIEL THERMOPTIM

peu compliqué peut se révéler difficile en pratique, d’autant plus


T 4 que, les bilans exergétiques n’étant pas conservatifs, vérifier la
cohérence du bilan obtenu n’est pas une tâche aisée.
Il se trouve qu’il est possible d’automatiser l’établissement de
5 ces bilans, même pour des systèmes complexes, en introduisant
P un nouveau type de schéma appelé structure productive, qui est
2 3 un graphe permettant de représenter les produits ou
consommations d’exergie des différents composants du système.
1
Le cinquième environnement de travail de Thermoptim est
∆H un second éditeur de schémas dont la palette comporte les
différents éléments utilisés pour représenter de telles struc-
Figure 4 – Pincement dans un échangeur tures (figure 5).

La méthode du pincement est une méthode exergétique, qui 1.4 Principe de construction des modèles
distingue les irréversibilités propres aux composants de celles qui
proviennent de leur arrangement au sein du système proprement Construire avec Thermoptim le modèle d’un système thermo-
dit. Elle permet de visualiser de manière physiquement très parlante dynamique est très simple et se fait en deux étapes :
les zones critiques du système, et de mettre en évidence les irréver- – on commence par en faire une description qualitative en le
sibilités systémiques irrémédiables. En identifiant les pincements, représentant graphiquement comme un ensemble de composants
elle montre les endroits du système dont la conception doit faire (plus généralement de fonctionnalités) connectés entre eux par
l’objet d’un soin particulier, et constitue pour cela un guide précieux des liens vectoriels représentant les canalisations de fluide ou les
là où auparavant étaient employées des méthodes heuristiques échangeurs de chaleur ;
nécessitant parfois de nombreuses itérations. – on quantifie ensuite le modèle ainsi défini en paramétrant les
différents types primitifs qu’il met en jeu pour pouvoir en calculer
1.3.5 Éditeur de structures productives les performances
L’éditeur de schémas permet de réaliser l’étape qualitative : l’uti-
L’analyse des performances des diverses technologies conduit lisateur ne fournit dans un premier temps que le minimum d’infor-
de manière classique à calculer leurs bilans énergétiques. En mations nécessaire à la définition logique du projet qu’il construit
complément, notamment lorsque l’on cherche à optimiser un (implicitement les types de composants qu’il sélectionne, et expli-
système, l’établissement de leurs bilans exergétiques présente un


citement leur nom et celui du point de sortie et du corps qui leur
grand intérêt, car ils permettent de quantifier les irréversibilités. sont associés, ainsi que la valeur du débit qui les traverse).
Pour les cycles simples, dresser un bilan exergétique ne pose Ensuite, lorsqu’il connecte entre eux ces composants, certaines de
pas de difficulté particulière mais demande déjà à être fait avec ces informations sont automatiquement propagées de l’amont
grand soin faute de quoi des erreurs peuvent être commises. En vers l’aval (par exemple, le point d’entrée du composant aval
revanche, l’établissement du bilan exergétique d’un système un devient le même que celui de sortie du composant amont).

Figure 5 – Éditeur de structures productives

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Industrialisation des procédés et usine du futur
(Réf. Internet 42602)

1– Introduction

2– Management de l'entreprise industrielle

3– Gestion de projet et ingénierie

4– Développement de produits

5– Gestion des risques

6– Développement durable et outils industriels

7– Production Réf. Internet page W


Lean Management et excellence industrielle AG4112 111

Ordonnancement et conception d'ateliers discontinus AG3010 115

Ordonnancement et conception d'ateliers. Applications AG3011 119

Microréacteurs pour l'industrie IN94 123

8– Management du changement, progrès continu et


innovation

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Lean Management et excellence


industrielle

par José GRAMDI


Enseignant-chercheur à l’université de technologie de Troyes
Responsable de l’Usine-École de l’établissement
Expert en modélisation, optimisation et pilotage de la performance globale des entreprises

1. Excellence industrielle et performance globale .............................. AG 4 112 - 2


2. Vitesse et performance industrielle globale..................................... — 4
3. Esprit « Lean Management » ................................................................ — 5
4. Démarche Lean Management en cinq étapes récursives.............. — 6
5. Outils du Lean Management ................................................................. — 7
6. Généralisation du Lean Management ................................................. — 12
7. Exemple d’application ............................................................... — 13
8. Conclusion ................................................................................. — 14
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. AG 4 112


es années fastes d’Après-Guerre, baptisées les « Trente Glorieuses » par
L Jean Fourastié, ont conduit nos industriels à élaborer, expérimenter et
valider un certain nombre de règles de gestion parfaitement adaptées à ce
contexte. Ces règles ont par la suite été embarquées dans les progiciels de
gestion intégrée, les ERP, qui équipent désormais la majorité de nos entreprises.
La situation a pourtant aujourd’hui radicalement changé : la demande est
inférieure à l’offre qui s’est mondialisée, les produits ont des cycles de vie
extrêmement courts et les clients sont de plus en plus exigeants en termes de
prix, de personnalisation et de services associés. Dans un tel contexte, ces
règles productivistes ne donnent plus les résultats auxquels nous nous étions
habitués et les industriels, un peu déboussolés, se tournent vers de nouvelles
approches.
Parmi celles-ci, le Lean Management constitue une réponse tout à fait perti-
nente à la nouvelle mouvance économique puisqu’il se focalise davantage sur
la réactivité de l’entreprise.
Cette approche est issue du Toyota Production System élaboré chez le
constructeur automobile japonnais dès le début des années 1970 sous l’impul-
sion, notamment, des ingénieurs Taïchi Ohno et Shigeo Shingo. Elle a ensuite
été re-packagée par deux chercheurs américains du MIT (Massachussetts Insti-
tute of Technology) : James Womack et Daniel Jones, et c’est sous cette forme
que le Lean Management a fait son apparition en France et en Europe vers le
milieu des années 1990.
Nous pouvons cependant déplorer qu’au passage et au fil du temps, le TPS
initial ait été quelque peu amputé d’un de ses piliers fondamentaux : l’humain.
L’autre problème réside dans la nécessaire remise en question d’un certain
nombre de présupposés, de mécanismes décisionnels et d’indicateurs issus
des Trente Glorieuses, que beaucoup d’industriels ont énormément de mal à
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appréhender et à opérer.

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LEAN MANAGEMENT ET EXCELLENCE INDUSTRIELLE ______________________________________________________________________________________

1. Excellence industrielle Sur un horizon donné, il est intéressant de comparer cette valeur
ajoutée générée aux charges fixes d’exploitation de l’entreprise. Le
et performance globale point mort est atteint lorsque la valeur ajoutée couvre les charges fixes.
Au-delà, l’entreprise fait du bénéfice ; en deçà elle perd de l’argent.

Remarque : ce paragraphe résume l’article [AG 4 110] de la


présente collection.
1.2 Performance industrielle globale
en trois dimensions
La performance globale de ce système industriel peut alors être
1.1 Approche systémique de l’entreprise appréhendée à travers trois dimensions fondamentales :
industrielle – débit de valeur ajoutée : c’est-à-dire la quantité de valeur ajou-
tée générée par unité de temps ;
Dans son ouvrage Le Macroscope [1], Joël De Rosnay définit un – vitesse de valeur ajoutée : c’est-à-dire le temps écoulé entre
système comme un « ensemble d’éléments en interaction dynami- l’arrivée dans le système des éléments incorporés dans le produit
que structurés en fonction d’un objectif ». Un système est ainsi fini et la livraison de celui-ci au client ;
caractérisé par le processus qu’il héberge, un processus étant – qualité de valeur ajoutée : c’est-à-dire la satisfaction ressentie,
défini dans la norme ISO 9000 comme un « ensemble d’activités ou mesurée, des clients destinataires des produits finis.
corrélées ou interactives qui transforment des éléments d’entrée
en éléments de sortie ». Les éléments d’entrée provenant de four- Nous pouvons à présent comparer ce système entreprise à un
nisseurs et les éléments de sortie étant destinés à des clients, deux simple tuyau dont les caractéristiques physiques vont correspondre
entités fondamentales à identifier. aux dimensions de la performance évoquées juste avant (figure 1) :
– la section du tuyau correspond au débit de valeur ajoutée ;
– la longueur du tuyau correspond à la vitesse de valeur ajoutée ;
Deux principes forts soutiennent la pensée systémique :
– la porosité du tuyau correspond à la qualité de valeur ajoutée.
– principe de synergie : le tout est plus que la somme de ses
parties ; À partir de cette représentation macroscopique, le mouvement
– principe de totalité (corollaire) : la somme des optima d’amélioration continue de la performance globale du système
locaux n’aboutit pas à l’optimum global. « entreprise » consistera « simplement » à augmenter la section du
tuyau, à réduire sa longueur, et à colmater ses fuites.

Toute entreprise industrielle peut ainsi être abordée comme un


système dont l’objectif est de transformer des éléments d’entrée
1.3 Génération de valeur
(les matières premières, les consommables) en éléments de sortie en cinq processus
(les produits finis conditionnés et livrés).
Pour atteindre ces objectifs, il convient d’entrer un peu plus
dans le détail de ce système « entreprise ». Nous pouvons alors

W Cette transformation physico-chimique se traduit financiè-


rement par la valeur ajoutée brute, à savoir la différence entre
le prix de vente du produit fini et le prix d’achat des matières
identifier les cinq processus fondamentaux dans la génération de
valeur ajoutée (figure 2) :
– processus vente, qui transforme une demande potentielle du
premières et consommables incorporés. marché en commande ferme pour l’entreprise ;

Valeur ajoutée

! VA = RV − DA !
Longueur

Matières Produits
premières finis

Porosité PF
MP
Fournisseur

Section

SYSTÈME
Client

« ENTREPRISE »

! DA ! ! RV !
Dépenses Recettes
des achats des ventes

! CE !

Charges d'exploitation

Figure 1 – Représentation systémique de l’entreprise industrielle

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______________________________________________________________________________________ LEAN MANAGEMENT ET EXCELLENCE INDUSTRIELLE

Valeur ajoutée

! VA = RV − DA !

Matières Produits
premières finis
VENTE CONCEPTION
PF
MP
Fournisseur

Client
PRODUCTION
! DA ! ! RV !

Dépenses Recettes
des achats ACHAT LOGISTIQUE des ventes

! CE !

Charges d'exploitation

Figure 2 – Cinq processus de génération de valeur ajoutée

Lean

ES
Fournisseur

EE

Client
TOC

6!


Élément Élément
d'entrée de sortie

Processus identifié

Figure 3 – Amélioration des caractéristiques opérationnelles des processu

– processus conception, qui transforme un besoin exprimé (ou tème global. Nous avons vu que cet objectif était de transformer
non) par le client en une solution technique opérationnelle et des éléments d’entrée (les matières premières, les consommables)
industrialisable ; en éléments de sortie (les produits finis conditionnés et livrés)
– processus achat, qui transforme un besoin interne de matière pour générer de la valeur ajoutée et avec, pour voies d’amélio-
première ou de consommable en une référence disponible ; ration, l’augmentation de son débit, de sa vitesse et de sa qualité.
– processus production, qui transforme les matières premières Un diagnostic global de notre système va alors nous permettre
et consommables en produit fini ; d’identifier le processus et la caractéristique (section, longueur ou
– processus logistique, qui transforme une commande en pro- porosité) de ce processus ayant le plus fort impact sur la perfor-
duit fini conditionné et livré. mance globale de l’entreprise, à savoir le débit, la vitesse et la qua-
Ces cinq processus sont à leur tour assimilables à des tuyaux lité de la valeur ajoutée. Le problème étant localisé et identifié, il
avec leurs propres caractéristiques en termes de section, longueur « suffit » maintenant de le traiter. Pour cela, nous disposons de
et porosité. Ils ont également leurs propres clients et fournisseurs. trois formidables boîtes à outils dédiées chacune à l’une de leur
Nous sommes bien dans un modèle fractal, c’est-à-dire un modèle typologie (figure 3) :
dans lequel un élément présente la même géométrie et les mêmes – pour les problèmes de débit, nous appliquerons les préceptes
caractéristiques que l’ensemble auquel il appartient. et outils de la théorie des Contraintes [AG 4 111] ;
– pour les problèmes de vitesse, nous appliquerons les
préceptes et outils du Lean Management, que nous allons déve-
1.4 Amélioration continue et durable lopper dans le présent article ;
de la performance industrielle globale – pour les problèmes de porosité, nous appliquerons les
préceptes et outils du Six Sigma [AG 4 113].
Ces cinq processus constituent en fait les « éléments en interac- Dans la suite de l’article, nous utiliserons respectivement les
tion dynamique structurés en fonction d’un objectif » de notre sys- abréviations TOC, lean et 6s pour désigner ces trois approches.

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Ordonnancement et conception
d’ateliers discontinus

par Catherine AZZARO-PANTEL


Maître de Conférences à l’ENSIACET-INPT, Habilitée à Diriger des Recherches
Laboratoire de Génie Chimique UMR CNRS 5503

1. Définitions et concepts .......................................................................... AG 3 010 - 2


1.1 Notion d’atelier polyvalent ou flexible....................................................... — 2
1.2 Production par campagnes......................................................................... — 2
1.3 Structures monoproduit et multiproduit ................................................... — 3
1.4 Description d’un atelier discontinu ............................................................ — 3
2. Ordonnancement d’ateliers .................................................................. — 5
2.1 Définition ...................................................................................................... — 5
2.2 Méthodes classiques de résolution du problème d’ordonnancement ... — 6
2.2.1 Approches par optimisation .............................................................. — 6
2.2.2 Techniques de simulation .................................................................. — 7
2.2.3 Couplage simulation-optimisation.................................................... — 8
3. Conception d’ateliers discontinus ...................................................... — 9
3.1 Introduction à la conception et au remodelage ........................................ — 9
3.2 Formulation du problème de conception .................................................. — 9


3.3 Formulation classique du problème de conception d’atelier
multiproduit ................................................................................................. — 10
3.4 Méthodes classiques d’optimisation monocritère.................................... — 11
3.5 Vers une conception intégrée de procédés ............................................... — 11
4. Conclusions et perspectives................................................................. — 12
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. AG 3 010

ans le domaine du génie des procédés, les ateliers discontinus concernent


D des secteurs industriels aussi variés que la chimie fine, les biotechno-
logies, l’élaboration des matériaux ou la fabrication de composants électro-
niques... Les procédés discontinus présentent l’avantage de pouvoir produire
plusieurs composés, souvent à forte valeur ajoutée, à partir d’équipements
standards et de s’adapter à des variations de nature et de qualité des matières
premières, ainsi qu’à des fluctuations fréquentes du marché. Chaque produit
possède en général son propre mode de fabrication qui consiste en une
succession d’étapes liées entre elles par des contraintes techniques ou des
relations d’antériorité.
Les caractéristiques spécifiques des industries de procédés ont conduit les
spécialistes du génie des procédés à s’intéresser depuis plusieurs années aux
problèmes liés à l’ordonnancement et à la conception d’ateliers discontinus, qui
contribuent à la maîtrise de la chaîne logistique (supply chain management).
Cet article fait le point sur les méthodes utilisées tant en ordonnancement
qu’en conception d’ateliers pour des industries de procédés et présente les
enjeux actuels.
p。イオエゥッョ@Z@ェオゥャャ・エ@RPPU

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ORDONNANCEMENT ET CONCEPTION D’ATELIERS DISCONTINUS _______________________________________________________________________________

1. Définitions et concepts 1.2 Production par campagnes


Un atelier discontinu présente l’avantage de pouvoir élaborer, par
1.1 Notion d’atelier polyvalent ou flexible campagnes, plusieurs composés, souvent à forte valeur ajoutée, à
partir d’équipements standards et de s’adapter à des variations de
Les ateliers discontinus concernent traditionnellement des pro- nature et de qualité des matières premières, ainsi qu’à des
duits à forte valeur ajoutée, de l’ordre de 5 à 500 €/kg [1]. Les fluctuations fréquentes du marché (en jouant, par exemple sur le
quantités produites annuellement sont relativement modestes, de nombre et la longueur des campagnes).
l’ordre de quelques centaines de tonnes. Dans ces conditions, une
installation dédiée à la fabrication d’un seul produit est confrontée Il n’existe pas un consensus général sur la définition d’une
au dilemme suivant : campagne de production. Certains auteurs [2] englobent les notions
de campagne et d’horizon total de la production à long terme. Ils
— fonctionner toute l’année, ce qui conduit à de faibles volumes
considèrent que la production totale s’effectue en une seule fois, en
d’équipement et entraîne des frais de main-d’œuvre élevés ;
négligeant les problèmes de gestion à court terme.
— ou fonctionner quelques mois par an : en résultent des
volumes plus importants et des frais de main-d’œuvre plus suppor- D’autres auteurs [3] envisagent des campagnes de longue durée
tables, mais des investissements plus difficiles à amortir ; pendant lesquelles un seul produit est élaboré (campagnes dites
— la durée de vie des produits est très variable, généralement « monoproduits »). La succession de plusieurs campagnes
imprévisible, souvent brève ; ils n’ont habituellement qu’un monoproduits assure le niveau de production de plusieurs pro-
nombre limité d’applications (parfois une seule) et sont facilement duits.
remplacés par un produit nouveau offrant d’autres avantages ;
— les produits sont souvent préparés au moyen de synthèses Une autre approche fréquemment rencontrée dans la littérature
complexes nécessitant plusieurs étapes. concerne l’élaboration simultanée de plusieurs produits à condition
qu’ils ne partagent pas des équipements (campagnes dites
Ces contraintes ont donc fait naître le besoin d’ateliers de fabri- « multiproduits ») [4].
cation assez souples, dits polyvalents ou flexibles, pour pouvoir
prendre en charge, en l’état ou moyennant des modifications Une approche classique consiste à diviser l’horizon de production
mineures, des procédés non prévus lors de la phase de conception. en campagnes identiques (figure 1). La politique de production par
Ils permettent ainsi de réagir rapidement aux demandes du marché campagnes cycliques permet ainsi de réduire la complexité de la
et de satisfaire les attentes des clients selon le concept du « juste gestion et le contrôle de l’atelier en opérant d’une manière cyclique
à temps ». dans laquelle un ensemble de tâches est répété régulièrement [5].
La flexibilité peut être définie comme l’aptitude à répondre à une Ce fonctionnement assure une production périodique de chaque
variation de la demande et peut être envisagée sous l’angle de : produit et permet une meilleure utilisation des ressources en favo-
risant la polyvalence des équipements.
— la flexibilité vis-à-vis des produits. Elle caractérise la capacité
d’un système de production à élaborer différents produits sans Une contrainte particulière (surtout pour les produits de chimie
modification substantielle du système. Ce type de flexibilité est par- fine ou de spécialités) concerne la nécessité de nettoyer systéma-
ticulièrement important pour la production de familles de produits tiquement et facilement les équipements, ce qui doit être prévu dès
(flexibilité de variantes, de type, de produits) ; les phases de conception et de construction de l’unité. L’objectif du

W — la flexibilité structurelle. On peut distinguer une flexibilité de


transformation (le système de production, spécialisé pour un pro-
duit, peut être adapté rapidement à une autre fabrication via des
nettoyage entre la fabrication de deux produits est d’éviter la
contamination du produit suivant B par les résidus du produit A
issu du lot précédent (prévention du phénomène de contamination
changements de connexions entre ses éléments) ainsi qu’une flexi- croisée). L’efficacité du nettoyage peut être évaluée en termes de
bilité au sens large (le système de production peut servir, simul- critères physiques, biologiques ou chimiques. Dans l’industrie de
tanément, pour des fabrications de produits très différents). Un la chimie fine, cette exigence est imposée par les « bonnes prati-
intérêt des ateliers discontinus est également de pouvoir mettre en ques de fabrication », d’où la nécessité d’intégrer la phase de net-
œuvre très rapidement des procédés nouveaux ; toyage au sein du procédé. En particulier, elle consiste pour des
— la flexibilité vis-à-vis de la capacité. Un tel système peut ateliers monoproduits à réaliser ces nettoyages lors de phases
s’adapter à des demandes différentes en capacité. d’intercampagnes.

Horizon de production

1 2 Campagnes : n

...

Production par lots

Production souhaitée : Produit 1 (20 %) Produit 2 (30 %) Produit 3 (50 %) Figure 1 – Division de l’horizon de production
en campagnes cycliques

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_______________________________________________________________________________ ORDONNANCEMENT ET CONCEPTION D’ATELIERS DISCONTINUS

Encadré 1 – Caractéristiques d’une « tâche »


A
B 1 2 3 4
À chacune des opérations sont associés les éléments
C suivants.
a atelier multiproduit
1. Un temps opératoire (pour les appareils discontinus) ou un
débit (pour les appareils semi-continus), généralement fonction
du type spécifique d’équipement ou de la quantité de produits à
traiter… On désigne par Tij le temps nécessaire au traitement du
lot de produit i à l’étape j pour produire une quantité unitaire de
A
produit i.
B 1 2 3 4
C 2. Une liste d’équipements admissibles pour effectuer
l’opération ; à ce niveau, l’éclatement ou le regroupement de lots
de produits peut être envisagé sur certains appareils. On appelle
b atelier multiobjectif facteur de taille Sik la capacité requise à l’étape k pour produire
une quantité unitaire de produit i (en volume, mole ou masse).
Figure 2 – Atelier multiproduit et atelier multiobjectif 3. Un bilan matière qui détermine la quantité de matière
traitée par opération conduisant à une quantité unitaire d’un
produit final. Pour produire un lot Bi de produit i à l’équipement
k, un équipement de volume Bi Sik et un temps opératoire Tik
1.3 Structures monoproduit sont nécessaires.
et multiproduit De façon plus générale si l’on se fixe une consigne de produc-
tion Bi pour chaque produit i, on cherche à calculer le produit
On rencontre classiquement deux types de configurations limitant pour chaque opération. On peut écrire cette capacité Vk
d’ateliers : comme étant :
— ateliers multiproduits ou flowshop (figure 2a ) ; V k = max { S ik B i }, k ∈ K
— ateliers multiobjectifs ou jobshop (figure 2b ). i ∈ᐉ
Le premier cas correspond à un cheminement unique où tous les
avec ᐉ le sous-ensemble des produits fabriqués,
produits suivent la même séquence opératoire. La production est
généralement réalisée en une série de campagnes monoproduits. K le sous-ensemble des opérations.
Dans le second cas (c’est-à-dire multiobjectifs ou jobshop ), il 4. L’état final caractérisé par la composition, la phase, la
s’agit d’ateliers à cheminements multiples où chaque famille de température ou d’autres variables appropriées.
produits possède une séquence d’élaboration spécifique. 5. Une condition de stabilité ou d’instabilité d’un produit.
L’atelier multiobjectif est bien évidemment plus polyvalent que Différents cas de figures peuvent être envisagés (figure 4) :
l’atelier multiproduit. — le produit doit immédiatement être traité (politique
d’attente nulle) ;


Notons que les études recensées dans la littérature traitent majo- — le produit peut être stocké en temps limité (stabilité
ritairement du cas de l’atelier multiproduit. limitée) ;
Il faut signaler que la frontière entre procédés multiproduits et — le produit peut être stocké en temps illimité (stabilité
multiobjectifs n’est pas toujours très rigide, dans la mesure où les illimitée).
divers auteurs, qui ont mené des recherches sur la conception et 6. Une condition de stockage qui reflète la politique à adop-
la gestion d’ateliers discontinus, affectent les exemples à l’une ou ter après traitement de l’opération :
l’autre des catégories selon la similitude des processus d’élabo- — stockage au sein même de l’équipement qui a servi à
ration des produits et le partage ou non des équipements pour une l’étape active du procédé ;
même campagne de production. — stockage dans un (ou plusieurs) bac(s) externe(s) ;
La figure 3 présente les types de problèmes généralement — stockage externe en volume illimité.
abordés dans la littérature, en fonction de leur complexité et de 7. Les temps de nettoyage de l’équipement si l’opération sui-
leur flexibilité (notons que la plupart des exemples se situent entre vante, à traiter dans l’équipement, le nécessite.
les catégories 2 et 4). 8. Les temps de chargement et déchargement des produits
et éventuellement, des temps de mise en régime.
9. Les spécifications en ressources nécessaires pour effec-
1.4 Description d’un atelier discontinu tuer l’opération (plusieurs voies peuvent être envisageables).

Un procédé discontinu peut être décrit comme une séquence


conditions opératoires. Un équipement Eqk peut être utilisé à un
d’événements chimiques, physiques ou biologiques à partir
stade j 1 dans la production du produit P 1 , mais peut aussi être uti-
desquels on obtient un nouveau produit.
lisé à l’étape j 2 de la production du produit P 2 .
● Un ensemble de produits à élaborer et des spécifications sur
Cette définition très générale est indépendante du type d’atelier leur demande.
dans lequel on mettra en œuvre ce procédé. La quantité de produit
● Un ensemble de ressources consommables (matières pre-
qui résulte du procédé discontinu est appelée lot.
mières, réactifs...) ou renouvelables (opérateurs, électricité, utilités
■ Un atelier discontinu peut être décrit en faisant intervenir les de chauffage ou refroidissement).
éléments suivants. ● Des « tâches » : il s’agit des opérations élémentaires de trans-
● Un ensemble d’équipements (unités de procédés, bacs de formation physique ou chimique qui nécessitent un type d’équipe-
stockage, unités de transport, lignes de connexions entre équipe- ment particulier (encadré 1 et figure 4).
ments) au sein d’un atelier. Les équipements sont généralement ● Un ensemble de « recettes » : la recette est définie comme
adaptés à un large spectre de propriétés de produits et de l’ensemble complet et univoque d’instructions contenant l’infor-

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Ordonnancement et conception
d’ateliers. Applications

par Catherine AZZARO-PANTEL


Professeur à l’ENSIACET-INPT
Laboratoire de Génie Chimique UMR CNRS 5503
Adrian DIETZ
Maître de Conférences à l’ENSIC-INPL
Laboratoire des Sciences du Génie Chimique
Serge DOMENECH
Professeur à l’ENSIACET-INPT
Laboratoire de Génie Chimique UMR CNRS 5503
Luc PIBOULEAU
Professeur à l’ENSIACET-INPT
Laboratoire de Génie Chimique UMR CNRS 5503

1. Avant-propos ............................................................................................. AG 3 011 - 2


2. Exemple support en ordonnancement et conception ................... — 2
3. Développement du modèle de simulation de l’atelier................... — 3
4. Simulation du fonctionnement de l’atelier ...................................... — 3
4.1 Entrées-sorties typiques.............................................................................. — 3
4.2 Informations sur les conditions opératoires ............................................. — 4


4.3 Fonctionnement global de l’atelier ............................................................ — 5
4.3.1 Comparaison intra – extracellulaires
avec campagnes monoproduits ........................................................ — 5
4.3.2 Simulation de campagnes multiproduits ......................................... — 5
5. Conception d’ateliers ............................................................................. — 7
5.1 Contexte ....................................................................................................... — 7
5.2 Données nécessaires à la conception ........................................................ — 7
5.3 Résultats typiques ....................................................................................... — 9
5.3.1 Conception monocritère : minimisation du coût d’investissement — 9
5.3.2 Conception multicritère (coût, environnement) ............................... — 10
6. Remodelage d’ateliers ............................................................................ — 11
6.1 Contexte ....................................................................................................... — 11
6.2 Présentation de l’exemple .......................................................................... — 11
6.3 Formulation des recettes de production.................................................... — 12
6.3.1 Remodelage monocritère .................................................................. — 13
6.3.2 Remodelage bicritère :
coût d’investissement – nombre d’équipements différents............ — 14
7. Conclusion ................................................................................................. — 15
Références bibliographiques ......................................................................... — 15

L ’objectif de ce dossier est de montrer à travers deux exemples d’application


tout l’intérêt des techniques de simulation et d’optimisation en ordonnan-
cement et conception d’ateliers, dans un contexte où le développement et la
commercialisation d’un nouveau produit impliquent des activités de recherche
et développement complexes et coûteuses : ainsi, dans le domaine pharma-
p。イオエゥッョ@Z@ェ。ョカゥ・イ@RPPV

ceutique, on peut mentionner des contraintes strictes liées à la nécessité

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ORDONNANCEMENT ET CONCEPTION D’ATELIERS. APPLICATIONS ______________________________________________________________________________

d’établir les dossiers d’autorisation de mise sur le marché et l’abandon de très


nombreux produits au cours du développement, après avoir subi des essais
cliniques. Les outils de simulation et d’optimisation de procédés discontinus
constituent donc une aide efficace tout au long du cycle de vie du dévelop-
pement du procédé, de la production et de la commercialisation du produit. Les
cas d’études retenus concernent un atelier de production de protéines, qui sert
de fil rouge pour les études en ordonnancement et conception ainsi qu’un
atelier industriel multiproduit de chimie fine pour une application en
remodelage.

1. Avant-propos 2. Exemple support


Dans le premier article [AG 3 010] dédié à la présentation des
en ordonnancement
méthodes utilisées tant en ordonnancement qu’en conception et conception
d’ateliers pour des industries de procédés, nous avons fait le point
sur les principales approches retenues et qui ont abouti au déve-
loppement d’outils. L’idée de l’article n’est pas ici de focaliser la La figure 1 montre le diagramme de flux de l’atelier discontinu
présentation sur les potentialités particulières et comparatives de pour la production de protéines recombinantes.
différents produits logiciels mais plutôt de dégager les points Cet atelier comporte huit étapes : la première étape est une fer-
essentiels concernant les informations auxquelles ce type d’outils mentation suivie de sept étapes de séparation. Parmi les produits,
permet d’accéder et qui constituent une aide à la décision pour le deux sont des protéines thérapeutiques, l’insuline humaine et la
praticien. vaccine pour l’hépatite B. Les deux autres concernent une protéine
Le premier exemple d’illustration concerne le domaine des bio- de qualité alimentaire, la chymosine, et une enzyme utilisée
procédés à travers un atelier de production de protéines. Nous comme détergent, la protéase cryophylique.
montrons quelques applications d’un simulateur à événements Cet exemple est issu des travaux de Montagna et al. [1] qui ont
discrets permettant de décrire le fonctionnement global de l’atelier. « standardisé » le procédé dans le but d’obtenir un atelier
Le simulateur est ensuite couplé à un algorithme d’optimisation générique.
pour déterminer des stratégies de conception. Au niveau supérieur, Les quatre protéines sont produites par culture cellulaire.
l’optimiseur est ainsi chargé de proposer différentes configurations
d’ateliers, ainsi que des conditions opératoires pour certains pro- La vaccine et la protéase sont des protéines intracellulaires, la

W cédés clés, tandis qu’au niveau inférieur, le simulateur d’ateliers


vérifie les contraintes de production et calcule les critères de
performance (coût d’investissement, impact environnemental, ...).
première étape de microfiltration est utilisée pour concentrer la
solution, qui est ensuite dirigée vers l’homogénéisateur pour la
destruction des parois des cellules et la libération des protéines
d’intérêt. La seconde microfiltration a pour rôle d’enlever les débris
Le second exemple est un atelier multiproduit de chimie fine, pour de cellules de la suspension. La première étape d’ultrafiltration
lequel un remodelage est envisagé. Pour cet atelier, les conditions permet de concentrer la solution et ainsi minimiser la taille de
opératoires et donc les recettes de production sont figées. l’extracteur liquide-liquide. La seconde étape d’ultrafiltration
Délibérément, nous ne détaillerons pas les outils utilisés dont le concentre la solution avant la séparation par chromatographie.
principe a été évoqué dans l’article [AG 3 010]. Nous incitons le L’insuline et la chymosine sont considérées comme des produits
lecteur à se reporter aux publications et ouvrages mentionnés au extracellulaires qui se retrouvent dans le perméat lors de la micro-
cours de la présentation. filtration où les cellules sont séparées. Pour réduire les pertes dans
Tous les concepts utilisés ont été définis dans ce premier article. le rétentat, on ajoute de l’eau. Ces produits n’ont besoin ni de

I
V
C
Mf1 Mf2 Uf1 Uf2
P Hom Chr
Ext
Fer
Produits Équipements
I = insuline Fer = fermenteur Uf1 = premier ultrafiltre
V = vaccine Mf1 = premier microfiltre Ext = extracteur
C = chymosine Hom = homogénéisateur Uf2 = deuxième ultrafiltre
P = protéase Mf2 = deuxième microfiltre Chr = colonne chromatographique

Figure 1 – Diagramme de flux de l’atelier pour la production de protéines

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l’homogénéisateur pour être libérés, ni du second microfiltre et vont


directement à l’étape du premier ultrafiltre. Les étapes d’extraction
liquide-liquide par polyéthylène glycol (PEG), ultrafiltration et Produit 1
Étape A Étape B Étape C
Produit 1
séparation chromatographique sont en revanche communes à tous
les produits. La chymosine, protéine utilisée dans le domaine LOT LOT LOT
alimentaire, et la protéase cryophilique, détergent d’usage courant, Produit 2 Produit 2
ne nécessitent pas un degré de purification élevé. Pour les protéines
thérapeutiques, l’insuline et la vaccine, plusieurs étapes de sépa-
ration chromatographique sont nécessaires pour obtenir le niveau Figure 2 – Agencement de lots dans un atelier de production
de pureté requis. Cependant, des techniques modernes de chimie
combinatoire rendent possible l’obtention, dans le cas de l’insuline,
de ligands spécifiques donnant un produit virtuellement pur et un
rendement élevé avec une seule étape de traitement.
Superviseur

3. Développement du modèle Objets de l’atelier


de simulation de l’atelier
Évènements
Le simulateur utilisé est un prototype de recherche développé au
Laboratoire de Génie Chimique [2] qui intègre des modèles d’opé-
rations unitaires suffisamment représentatifs des phénomènes au
sein du fonctionnement global de l’atelier. À notre connaissance, la Moteur
plupart des simulateurs existants et mentionnés dans la littérature, de simulation
considèrent que les performances des équipements sont figées.
Parties génériques (SED + atelier)
Cette approche conduit dans la majeure partie des cas à un sur-
dimensionnement. Or, dans le contexte économique actuel et en Parties spécifiques (domaine étudié)
raison des normes environnementales de plus en plus strictes, il
est fondamental de prendre en compte, dès le stade de la Figure 3 – Architecture du simulateur à événements discrets
conception d’un atelier, l’influence des conditions opératoires. A
contrario, d’autres approches visent à modéliser finement certaines
opérations unitaires afin d’analyser les phénomènes physico- Une méthodologie de développement de simulateur a été pro-
chimiques impliqués. Mais, la complexité des modèles nécessite posée dans [3] selon une approche multicouche (figure 3) et a été
généralement des résolutions numériques sophistiquées et des adoptée ici.
temps de calcul trop importants pour envisager, à un niveau
Le moteur de simulation générique chargé d’ordonner et d’acti-
supérieur, l’optimisation des conditions opératoires.
ver les événements est le noyau commun à tout SED. Les événe-
Un des points clés du simulateur concerne donc l’inclusion des
modèles simplifiés pour la modélisation des opérations unitaires.
Cette approche permet, d’une part, de mettre en évidence la dépen-
ments de la couche suivante sont, pour la plupart, génériques à
tous les simulateurs d’ateliers discontinus, et servent à décrire les
changements du système modélisé ; seuls quelques cas spécifi-

dance du temps de procédé des conditions opératoires et, d’autre ques peuvent imposer la définition d’événements particuliers. Par
part, d’avoir une description détaillée des flux (concentration, rapport aux objets modélisés dans le simulateur, un nombre res-
composition, etc.) dans le procédé. treint est commun à tous les types d’ateliers (bacs de stockage,
réacteur simple, etc.), les autres sont à définir pour chaque pro-
La forme générale des modèles est présentée par la relation (1). blème particulier. Le niveau supérieur où la gestion de conflits est
s
L’objectif est de calculer les taille ( V lot ) , concentration ( C i ) et
s résolue, correspond au superviseur : les actions à mettre en œuvre
au cours d’une simulation peuvent être différentes selon les cas et
s
composition du lot ( X i , i = insuline, vaccine, chymosine, protéase) imposent d’être adaptées.
en sortie ainsi que des effluents de l’étape en fonction du lot en Dans le cas présent, les objets particuliers au fonctionnement de
e e e l’atelier de bioprocédés ont été modélisés et le superviseur a été
entrée ( V lot ,C i ,X i ) et des conditions opératoires : étendu à la gestion des événements correspondants (pour plus de
détails, se reporter à [2]).
s s s e e e
( V lot ,C i ,X i ,effluents ) = f i ( V lot ,C i ,X i ,conditions opératoires ) (1)

Pour une description fonctionnelle des étapes de traitement ainsi


que les modèles d’opérations unitaires associés, on peut se 4. Simulation
reporter à [2].
du fonctionnement
Le problème à traiter consiste à modéliser la circulation des lots
de produits dans un atelier de production (figure 2). Les données de l’atelier
disponibles sont la quantité à produire pour le (ou les) produit(s),
la configuration de l’atelier (nombre et taille des équipements pour
chaque étape de traitement) et les conditions opératoires de 4.1 Entrées-sorties typiques
chaque étape, pour chaque produit. La simulation par événements
discrets (SED) est particulièrement adaptée pour traiter le pro- Dans cette partie, on s’intéresse à l’analyse du fonctionnement
blème, car il peut être facilement décrit en fonction de deux types d’un atelier existant. L’intérêt d’utilisation d’un simulateur est de
d’événements, d’une part, le chargement ou la libération des lots trouver le mode d’exploitation de l’atelier qui vérifie certaines
dans les équipements et, d’autre part, le traitement de lots dans les contraintes, notamment le respect d’un horizon de temps pour
équipements de chaque étape. élaborer une quantité donnée de produits. (0)

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INNOVATION

Microréacteurs pour l’industrie


par Joëlle AUBIN et Catherine XUEREB

Les microréacteurs ouvrent des possibilités nouvelles pour les industries. Ils
s’inscrivent dans une démarche de qualité, de sécurité, de créativité et d’in-
tensification des procédés. À ce titre, ils constituent une des briques de l’usine
du futur. Transformations chimiques ou physiques y sont mises en œuvre. Les
phénomènes et principes de base sont décrits, ainsi que certaines initiatives
industrielles, tout en pointant les limites d’application de ces technologies
innovantes.

et non l’inverse, ce qui est souvent le cas dans les pro-


Joëlle AUBIN est ingénieur en génie chimique cédés classiques à macro-échelle.
de l’université de Sydney, docteur de l’INPT
et de l’université de Sydney. Elle est chargée Les longueurs des appareils sont très variables, et
de recherche au CNRS. sont conditionnées par le calcul du temps de séjour
qui est nécessaire pour mener à bien l’opération. Il
Catherine XUEREB est ingénieur de l’École faut alors vérifier quel est le phénomène limitant qui
nationale supérieure d’ingénieurs de génie chi- conditionne le dimensionnement : mélange, transfert
mique de Toulouse et docteur de l’INPT. Elle est thermique, cinétique chimique…
directrice de recherche au CNRS.
Toutes deux exercent au laboratoire de Génie
chimique de Toulouse UMR 5503 INPT/CNRS/UPS.
1.2 Avantages liés
à ses caractéristiques

Des petites dimensions des canaux découlent les
spécificités des microréacteurs.
1. Enjeux de la miniaturisation & La première caractéristique qui présente un intérêt,
Miniaturiser n’est pas un acte naturel chez un ingé- essentiellement en terme de sécurité, c’est le très
nieur de procédé. Culturellement, la démarche faible volume de produit manipulé, le fonctionne-
consiste plutôt à partir de mécanismes, de transfor- ment en continu autorisant néanmoins des capacités
mations, de réactions, qui sont obtenus à petite de traitement honorables. Ce mode de travail permet,
échelle – en général celle de la paillasse – puis de réa- par exemple, d’envisager la production à la demande
et sur place de substances intermédiaires présentant
liser une extrapolation, souvent en passant par des
un danger potentiel lors de leur stockage ou de leur
étapes sur pilotes, pour arriver à proposer une instal-
transport. Fabriquées pour être à leur tour transfor-
lation industrielle de grande capacité.
mées, il est envisageable de localiser leur production
Pourtant, les enjeux de la miniaturisation sont nom- sur le site de leur consommation.
breux, et nous allons voir en quoi les spécificités des
microréacteurs permettent d’ouvrir de nouvelles pers- Citons par exemple le phosgène, réactif bien
pectives en termes de propriétés et de qualité des connu pour ses nombreuses applications et sa dan-
produits, de sécurité industrielle, d’efficacité, et de gerosité. En cas d’incident, les quantités mises en
développement durable. jeu sont très faibles.
En contre-partie, les lieux où des incidents peu-
1.1 Caractéristiques vent se produire sont ainsi multipliés : une dissémi-
d’un microréacteur nation du danger, mais avec une forte diminution
du degré de dangerosité.
Un microréacteur est un système fabriqué par des
techniques de microfabrication, car ses dimensions & Les petites dimensions du microréacteur sont
caractéristiques le nécessitent. On fait référence, en également exploitées pour la maîtrise qu’elles offrent
p。イオエゥッョ@Z@ウ・ーエ・ュ「イ・@RPPX

général, à des largeurs ou diamètres allant de 1 à sur la manipulation physique des produits. Les tailles
1 000 mm. Les nombreuses micro-techniques disponi- de canaux sont de l’ordre de grandeur que l’on peut
bles aujourd’hui autorisent des géométries variées et souhaiter pour des inclusions, de type bulles, gouttes
complexes. La fabrication des unités est souvent ou solides. C’est ainsi que l’on fabrique des émulsions
encore réalisée de façon quasi-artisanale, ce qui per- rigoureusement monodisperses, ou des polymères à
met d’adapter exactement la géométrie à l’opération, surface contrôlée…

9 - 2008 © Editions T.I. IN 94 - 1

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INNOVATION

& Une propriété fondamentale du microréacteur est la avantage majeur : celui de passer directement de
valeur extrêmement élevée du rapport entre sa l’échelle des essais, à l’échelle de la production, sans
surface et son volume. À titre d’exemple, des hypothèse lourde sur les facteurs d’extrapolation. Ceci
canaux de section carrée de 100 mm ou 1 mm présen- permet, d’une part, de limiter les risques intrinsèques
tent, respectivement, un rapport surface/volume de à tout changement d’échelle (dégradation de qualité
40 000 ou 4 000 m2/m3. Les phénomènes de paroi du produit, perte des performances énergétiques,
sont ainsi intensifiés ; en particulier, le transfert mauvaises estimations des durées opératoires, dys-
thermique est largement augmenté par rapport aux fonctionnements hydrodynamiques,…) et, d’autre
installations de taille classique, et le transfert de part, de réduire le temps qui sépare la mise au point
matière avec la paroi n’est plus négligeable. du produit de sa phase de fabrication industrielle. Cet
Cette propriété peut ainsi être utilisée pour des opé- élément peut être majeur lorsqu’il s’agit de mettre
rations de réaction catalytique par exemple, où la rapidement sur le marché un produit très sensible au
paroi constitue le support sur lequel le dépôt de cata- contexte concurrentiel.
lyseur est réalisé. Une alternative à la parallélisation consiste à utiliser
& Les débits de fluide qui sont associés aux micro- des réacteurs microstructurés. Ces outils, de taille
plus classique, permettent au fluide de circuler dans
réacteurs se situent dans une gamme allant de
des espaces de très petite dimension, d’environ 0,5 à
0,1 mL/h à quelques L/h pour les canaux dont
2 mm. Ils sont conçus pour s’intégrer sans souci de
les dimensions se situent autour du millimètre. Ceci
raccordement dans la chaîne classique du procédé à
permet d’envisager des applications, qui vont de la
macro-échelle. Ils autorisent des débits pouvant aller
manipulation d’échantillons pour analyse par exem-
jusqu’à plusieurs tonnes par heure.
ple, jusqu’à de la production industrielle de faible
tonnage. Ces débits sont associés à des vitesses La diminution d’échelle de taille, l’augmentation des
d’écoulement lentes, voire très lentes, selon le capacités de transfert, la diminution des temps
diamètre hydraulique de l’appareil. caractéristiques, la limitation de la formation de
sous-produits, permettent de situer les microréac-
Dans les plus petits canaux où le diamètre hydrau-
teurs dans la catégorie des appareils qui œuvrent
lique est de l’ordre d’une dizaine de microns, le fluide
dans le sens d’une intensification des procédés
peut progresser à moins de 1 mm/s, tandis que l’ordre
dans un contexte général de développement durable.
de grandeur est d’une dizaine de cm/s dans les
canaux autour du millimètre. Ces caractéristiques
entraînent un régime d’écoulement de type laminaire, 2. Exemples d’appareils
que l’on travaille avec des gaz ou des liquides. Du fait
de l’absence de turbulence dans l’écoulement, on est Parmi les différents types d’appareils miniaturisés,

W souvent amené à concevoir le réacteur de telle façon


que la géométrie génère des perturbations qui sup-
pléent la turbulence en promouvant le mélange.
nous pouvons distinguer deux classes principales :
— les mélangeurs et contacteurs ;
— les réacteurs-échangeurs.
Dans certaines applications au contraire (par exem-
ple en électrochimie), on pourra tirer avantage du 2.1 Mélangeurs et contacteurs
non-mélange des courants juxtaposés sous la forme diphasiques
de filaments ou de lamelles.
& Les microréacteurs sont également utilisés pour les Les micromélangeurs et microcontacteurs ont
faibles temps caractéristiques qu’ils présentent. pour but premier de mettre en contact deux flui-
Comme nous le verrons dans le § 3, la manipulation des miscibles ou immiscibles afin de les homo-
de faibles quantités de fluide dans des géométries généiser rapidement, de favoriser le transfert de
structurées permet un temps de mélange très court, matière ou une réaction, ou bien de créer une
malgré le caractère laminaire de l’écoulement. Dans dispersion à propriétés contrôlées. Ils peuvent
ce cas, la dispersion axiale est limitée, et on peut être également associés à un système de trans-
donc piloter bien mieux qu’à macro-échelle le temps fert de chaleur (voir [21]).
Sur les mélanges de
fluides et le transfert
de contact entre les réactifs. Ceci permet, avec un
de chaleur : contrôle d’excellente qualité de la température, d’aug- & La géométrie et le type de mise en contact des
menter la sélectivité de nombreuses réactions, fluides définissent la performance de l’appareil.
Convection naturelle.
Aspects théoriques lorsque des sous-produits apparaissent via des méca- Pour mélanger des fluides miscibles, la performance
[AF 4 080] de G. Lauréat nismes de réactions consécutive-compétitive par du micromélangeur est liée directement à la distance
exemple, ou dans le cas de réactions parallèles aux caractéristique entre les espèces, généralement
cinétiques différenciées. déterminée par la géométrie du micromélangeur.
Des améliorations du rendement sont également Dans le cas du mélange de fluides immiscibles, les
attendues, dans la mesure où le contrôle de la tempé- dimensions caractéristiques du contacteur ont aussi
rature, et la capacité d’évacuer de la chaleur, permet- un rôle très important. Couplées avec les conditions
tent de fonctionner dans des gammes opératoires que opératoires, elles contrôlent les caractéristiques phy-
les règles de sécurité interdisent à macro-échelle. siques de la dispersion : le régime d’écoulement et la
taille de goutte ou de bulle.
1.3 Un outil adapté aussi & Aujourd’hui, il existe des nombreux types de
à la production micromélangeurs/contacteurs sur le marché (exem-
Afin d’atteindre des capacités importantes de traite- ple les appareils commercialisés par IMM, Ehrfeld BTS,
ment, la démarche consiste à paralléliser les unités LTF, Mikroglas Chemtech, Corning, Velocys…) pour des
(« numbering-up »). Cette méthode présente un applications de mélange de fluides miscibles,

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immiscibles, ou gaz-liquide. Les mécanismes de mise en direction de l’écoulement (figure 1(d)). En rétrécis-
contact de fluides employés reposent essentiellement sant la largeur du microcanal de manière abrupte ou
sur l’énergie de l’écoulement et la structure géométrique progressive, le mécanisme de convergence hydrody-
de l’appareil, plus rarement sur une source d’énergie namique permet de diminuer le temps de mélange
externe pour faciliter le processus de mélange. en forçant les filaments de fluide par un orifice plus
De vastes possibilités existent et dépendent des étroit, ce qui réduit la distance caractéristique pour la
technologies de fabrication retenues. À titre d’exem- diffusion ;
ple, les modes de mise en contact de fluides les plus — division et recombinaison des courants
courants sont (figure 1) : (figure 1(e)). Les fluides subissent des phases d’étire-
— contact de deux courants en T ou en Y (figu- ment, de découpage et de recombinaison, afin d’aug-
res 1(a)-1(b)). Si les dimensions du microcanal sont menter la surface de contact entre les lamelles de
suffisamment petites, le processus de mélange par dif- fluide et de diminuer leurs épaisseurs. Souvent, les
fusion peut être rapide car la distance caractéristique écoulements générés avec ce mécanisme ont des
du système est très faible. Cependant, pour mélanger caractéristiques chaotiques qui permettent un
rapidement dans des microcanaux plus grands, le débit mélange rapide et efficace ;
traversant doit être suffisamment élevé afin d’induire — mécanismes de mélange chaotique lorsqu’une
des effets instationnaires dans l’écoulement ; perturbation périodique est appliquée à l’écoulement.
— multilamination par l’introduction de multiples L’écoulement chaotique est favorable au mélange
courants de deux composants, souvent de manière puisqu’il permet de séparer à une vitesse exponen-
interdigitale (figure 1(c)). Le temps de mélange est tielle deux quantités infinitésimales de fluides initiale-
donc dépendant de la largeur de chaque filament de ment très proches et d’augmenter ainsi l’interface
fluide, déterminée par la dimension des microcanaux. entre les espèces. Il peut être généré par une géomé-
Dans le cas où la largeur de chaque canal est relative- trie tri-dimensionnelle et périodique (figure 1(f)), ou
ment importante (> 100 mm), le mélange par diffusion lors d’une perturbation périodique dans le temps
moléculaire étant peu efficace, le temps de mélange créée par une source externe (exemple l’injection
peut être diminué en couplant la multilamination périodique d’un courant normal à l’écoulement princi-
avec le mécanisme de convergence hydrodynamique ; pal ou l’application de potentiels électriques non-uni-
— convergence hydrodynamique par la diminu- formes sur les parois du microcanal dans le cas d’un
tion de la distance diffusionnelle, normale à la écoulement électro-osmotique).

B
B Mélange

A W
A
A

Mélange
Mélange
a contacteur en T b contacteur en Y c multilamination

Étirement
A
A B
B
A
A B Division
B B
A Recombinaison A

Mélange
Étirement

Recombinaison Division

Mélange

d convergence e division et recombinaison f élément d’une géométrie


hydrodynamique itératives des courants tridimensionnelle pour la
création d’un écoulement
chaotique

Figure 1 – Mécanismes de mise en contact de fluides dans les microréacteurs

9 - 2008 © Editions T.I. IN 94 - 3

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Industrialisation des procédés et usine du futur
(Réf. Internet 42602)

1– Introduction

2– Management de l'entreprise industrielle

3– Gestion de projet et ingénierie

4– Développement de produits

5– Gestion des risques

6– Développement durable et outils industriels

7– Production

8– Management du changement, progrès continu et Réf. Internet page



innovation
Amélioration continue dans l'entreprise AG4100 129

Excellence industrielle AG4110 133

Innovation. Concepts clés AG2231 137

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Amélioration continue
dans l’entreprise

par Roy BILLAM


et François V. PATHY
Associés principaux de l’Institut Renault

1. En quête de productivité ....................................................................... AG 4 100 – 2


2. L’entreprise industrielle évolue............................................................ — 2
3. Système de production au plus juste ............................................... — 2
4. Démarche Six Sigma............................................................................... — 4
5. L’entreprise au plus juste....................................................................... — 5
6. Approche processus et re-engineering.............................................. — 6
6.1 Approche processus.................................................................................... — 6
6.2 Re-engineering des processus ................................................................... — 7
7. Supply chain intégrée............................................................................. — 8
8. Les nouvelles technologies de l’information,
une arme stratégique.............................................................................. — 10
8.1 Enterprise resource planning ..................................................................... — 10
8.2 e-business .................................................................................................... — 10
8.3 Partage du savoir......................................................................................... — 11
9. L’entreprise industrielle devient entreprise de service ................ — 11


10. De la nécessité d’une vision stratégique .......................................... — 11
10.1 Approche Quantum Sigma ......................................................................... — 12
10.2 Mesure des résultats : quels indicateurs ? ............................................... — 12
Bibliographie ...................................................................................................... — 14

vec leurs connaissances pratiques d’un grand nombre d’industries et de


A commerces (chimie, électronique, automobile, grande distribution...)
champs d’action de l’Institut Renault – les auteurs nous font part de leur point de
vue sur l’évolution de l’entreprise passée, présente et à venir. Interprétant les
avancées dans la philosophie du management, en quête constante d’accroisse-
ment de productivité et partant du modèle fordien de production de masse, ils
décrivent les tendances actuelles, notamment l’importance de la mondialisation,
le rôle grandissant du profit aval, l’entreprise au plus juste et au-delà, la contri-
bution croissante de la capitalisation et de la transmission du savoir, l’impact du
e-business et le poids grandissant de la bourse dans les stratégies d’entreprise.
Les petites et moyennes entreprises subissent les mêmes pressions que les
grands groupes internationaux. Bien souvent, elles en sont les fournisseurs.
Elles font donc partie intégrante des « supply chain » plus ou moins étendues.
La mise en œuvre des principes développés ici sera illustrée par l’étude de cas
concrets dans un autre article des mêmes auteurs.
p。イオエゥッョ@Z@。カイゥャ@RPPR

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© Techniques de l’Ingénieur, traité L’entreprise industrielle AG 4 100 − 1

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AMÉLIORATION CONTINUE DANS L’ENTREPRISE _____________________________________________________________________________________________

1. En quête de productivité ché et aux pressions de la concurrence. C’est ce que l’on a appelé la
révolution industrielle, qui a commencé au milieu du XVIIIe siècle
pour se « terminer » vers les années 1950, cédant la place à l’ère des
Au cours du XXe siècle, l’accélération du développement techno- technologies de l’information. L’apogée de l’ère industrielle est
logique et les méthodes de management en constante évolution ont caractérisée par le système fordien de production de masse, don-
permis au consommateur moyen de bénéficier des gains considéra- nant naissance à des entreprises intégrées verticalement, depuis
bles de productivité réalisés dans les différents secteurs économi- l’exploitation des matières premières jusqu’au produit fini non diffé-
ques. Abstraction faite de l’inflation, ces gains sont évidents. rencié.
Exemple : en 1900, le prix de revient d’une voiture construite de
Exemple : l’industrie automobile
façon artisanale était de 1000 $. Dans les années 1920, l’introduction
des méthodes de production de masse fait descendre ce prix à moins Au début de son ère, le nombre de modèles disponibles était très
de 300 $ – la fameuse Ford T. Au cours des dernières décennies du diversifié et souvent, chaque modèle était adapté aux exigences de
XXe siècle, alors que la qualité et les performances des véhicules auto- son futur propriétaire. À l’arrivée de la Ford T noire fabriquée en masse,
mobiles progressent à pas de géant, leur prix réel enregistre une les volumes de production s’élevèrent jusqu’à deux millions d’unités
baisse de 50 % [1]. Cette même tendance s’applique à tous les pro- par an. Cette progression fut accompagnée d’une chute brutale du
duits industriels de consommation. nombre de constructeurs artisanaux et d’une nette réduction dans la
variété des modèles disponibles.
Dans les deux dernières décennies du XXe siècle, dans cette Europe
récente qui s’éveille aux multinationales, les « grands patrons » sont
jugés sur leur capacité à délocaliser leurs entreprises, les restructurer, Ce nouveau changement de la structure industrielle fut accompa-
les décentraliser et en réduire les niveaux organisationnels. Autrement gné d’une autre conception de l’organisation, notamment la spécia-
dit, leur rôle principal est de faire subir aux organisations souffrant lisation des aptitudes et des métiers, illustrée de main de maître par
d’une obésité chronique des cures d’amaigrissement draconiennes Charlie Chaplin dans son film Les Temps modernes. Ce fut la grande
dont les effets, aujourd’hui bien connus, sont des plus mitigés : époque de Taylor aux États-Unis, de Fayol en France avec ses théo-
ries sur l’organisation scientifique du travail, et de Max Weber en
— améliorations éphémères des résultats financiers ; Allemagne, chantre incontesté de l’organisation bureaucratique.
— perte des compétences clés s’évaporant au fil des program- C’était une période où la capacité de fabrication était insuffisante
mes de licenciement, souvent soutenus par des aides étatiques ; pour répondre à la forte demande des consommateurs. En consé-
— accroissement du chômage. quence, les stratégies d’entreprise n’avaient pas lieu d’intégrer l’élé-
Certes, le corps donne une impression superficielle de santé mais ment concurrentiel et la préoccupation du client.
il est exsangue et l’état d’esprit reste trop souvent inchangé [2]. Cependant, la croissance de la concurrence internationale, l’enri-
Si l’on en croit Peter E. Drucker, l’entreprise type du futur se fon- chissement du consommateur et ses exigences grandissantes don-
dera sur le partage des connaissances, y compris la connaissance de nèrent naissance à une gamme plus importante de produits
l’autre à travers le travail en équipe. Les organisations essentielle- différenciés et au développement d’une réserve abondante de nou-
ment faites de spécialistes autodéterminés se nourriront des échan- veaux concepts. Durant les années 1970 et 1980, l’une des réponses
ges structurés entre collègues, clients et direction de l’entreprise. à cette évolution, sous la poussée grandissante de la concurrence
Aujourd’hui, la mission principale des dirigeants est de conduire japonaise, fut la « personnalisation » de masse, sur des outils de
cette métamorphose et d’inventer de nouveaux modes de manage- production souvent inadaptés et peu flexibles, représentant des
ment qui sont à des années lumière des programmes de producti- investissements monstrueux [3].
vité barbares d’un passé, quelque part, toujours présent. Troquant C’est aussi à ce nouveau paradigme que l’on doit toutes les
l’armure du conquistador contre la toge du leader charismatique, ils méthodes caractérisant la production au plus juste. Il est illusoire de
deviennent les mentors de cette nouvelle culture. penser que la production au plus juste a sonné le glas de la produc-

X Les entreprises de classe mondiale, et il y en existe aujourd’hui de tion artisanale ou de la production de masse. Ces systèmes
multiples exemples, semblent avoir trouvé une voie leur permet- aujourd’hui coexistent et continueront à coexister du fait d’une part
tant de métamorphoser des organisations affaiblies par les cures de la diversité des marchés, et d’autre part, de leurs qualités intrin-
d’amaigrissement successives, en entreprises agiles. Quelles sont sèques [4]. Le tableau 1 présente un comparatif de ces trois systè-
les caractéristiques de ces entreprises ? Bien sûr, elles pratiquent mes.
toutes le juste à temps physique, héritage des systèmes de type
Toyota, bien sûr elles ont (comme Volvo) amélioré ce système ;
mais au-delà, elles essaient de mettre en place le juste à temps des
idées au sein de tous leurs processus clés au travers de nouveaux
modes organisationnels, sous-tendus par l’utilisation stratégique 3. Système de production
des technologies de l’information. Cela donne à des entreprises de
toute taille, des « David » et des « Goliath », cette réactivité leur per-
au plus juste
mettant d’être concurrentielles dans un environnement de plus en
plus turbulent, conséquence fatale de la globalisation.
À l’aube d’un nouveau siècle, dans ce monde sans pitié, encore Pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale, la crise
profondément marqué par la fatalité darwinienne de la survie du pétrolière de 1973 entraîne une réduction de la demande et provo-
plus fort, là se trouvent des gisements féconds de productivité et de que pour les industriels de sérieuses difficultés économiques, en
compétitivité. particulier au Japon. Bien que l’approche américaine de production
de masse ait porté ses fruits pendant la période de croissance rapide
de l’après-guerre, a contrario, dans une période de faible croissance
générale de la consommation, les économies d’échelle liées à cette
2. L’entreprise industrielle approche atteignent leur limite. La conviction que les lots de pro-
évolue duction doivent être le plus grand possible afin de réaliser ces éco-
nomies d’échelle, et que tout ce que l’on produit peut être vendu,
implique dès lors des risques considérables. Au Japon, Toyota sem-
L’organisation des entreprises n’a pas cessé d’évoluer depuis ses ble faire face mieux que les autres, grâce à une nouvelle philosophie
origines préindustrielles et artisanales, à l’époque de l’Antiquité de gestion de la production connue aujourd’hui sous le nom de sys-
égyptienne, afin de répondre aux conditions changeantes du mar- tème de production Toyota.

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_____________________________________________________________________________________________ AMÉLIORATION CONTINUE DANS L’ENTREPRISE

(0)

Tableau 1 – Comparaison des trois systèmes de production


Production de masse
Production artisanale Production au plus juste
des années 1950
Marché Niche Vaste et homogène Vaste et hétérogène
Hautement personnalisé Hautement standardisé Hautement diversifié
Produit/Service Petit volume Volume énorme Grand volume
Outil de production Simple et flexible Complexe et rigide Complexe et flexible

Philosophie de production Charge maximale des ouvriers Charge maximale de l’outil de Charge optimale en fonction
production de la demande
Investissement Faible Énorme Moyen
Hautement qualifiée
Main-d’œuvre Qualifiée et versatile en ingénierie et faiblement Qualifiée et polyvalente
qualifiée en production
Coûts Élevés Bas Bas
Organisation des activités intégrée Cloisonnée Travail collectif d’équipe
Clairement identifiées
Compétences clés et optimisées
Diffuses Identifiées et développées

Structure d’organisation Rigide et plate Rigide et pyramidale Communicante et plate


Hautement cloisonné Orienté vers l’avantage
Processus stratégique Non formalisé
et endogène concurrentiel

Client Constamment présent Anonyme et passif Étroitement intégré depuis


les étapes de conception
Autocratique
Fondée sur la confiance Autocratique Partage de pouvoir
Philosophie de management Sens intuitif de la qualité
Fondée sur la méfiance Décloisonnement
Travail en « silo métier » Travail en équipe transversale
et la loyauté
Métaphore L’équipage L’État féodal L’orchestre symphonique

La production de masse, axée sur l’utilisation maximale du maté- juste. Bon nombre d’entreprises ont enregistré des progrès considé-
riel et de la main-d’œuvre, engendre une abondance de stocks. En rables en adoptant ces méthodes ; cependant, elles restent insuffi-
revanche, le système de production Toyota, parfois nommé la pro- santes et sont appliquées seulement au processus de production.
duction au plus juste, vient de l’idée qu’un excès de production est


un gaspillage et provoque des coûts superflus, en particulier le coût Exemple : à ce jour, des sections importantes de l’industrie aéros-
de la création et de la possession de stocks. D’après Toyota, les patiale du Royaume-Uni et des États-Unis participent à une initiative de
stocks excédentaires créés par la surproduction cachent toutes sor- production au plus juste de ce type, dans une tentative d’émulation de
tes d’inefficacités telles que : l’industrie automobile, et des programmes similaires voient le jour
— le manque de fiabilité et le faible rendement de l’outil de dans d’autres secteurs industriels européens incluant la chimie et
production ; l’électronique.
— des prévisions et une planification inadéquates ;
— des matériaux défectueux ;
— des flux de matières inutiles ; Bien que les principes de production au plus juste soient frappés
— des transports inefficaces. au coin du bon sens et faciles à comprendre, il peut être difficile d’en
imaginer l’application dans un contexte instable et manquant de
Le système Toyota [5] se fonde sur deux principes fondamentaux : la
cohérence caractérisé par :
production juste à temps et le tirage par l’aval des activités de l’amont.
Dans l’idéal du juste à temps, chaque opération de production doit — une forte turbulence de la demande ;
prendre juste ce dont elle a besoin de l’opération précédente, sans — une grande diversité de produits ;
plus. De même, le poste en amont ne doit pas produire plus que la — des outils de production manquant de flexibilité et de fiabilité.
quantité requise par l’opération en aval. À l’inverse du paradigme de Comme en témoignent un grand nombre d’industriels, cette
production de masse où la production est poussée depuis l’amont afin situation est pourtant la plus commune. Les obstacles ne sont pas
de maintenir l’outil de production à la charge maximale, le système insurmontables, mais l’évolution vers la production au plus juste
Toyota est tiré de l’aval à un rythme réglé par les besoins du client. À implique une volonté d’amélioration continue partagée par tous les
l’extrême, le niveau des stocks et des en-cours tend vers zéro : pas acteurs. Cette volonté se traduit par :
d’excédent de production, pas d’excédent de stock. — l’établissement d’une meilleure communication entre les
Bien sûr, la production au plus juste est un idéal, et les approches acteurs tout au long du processus de production ;
pratiques pour le mettre en œuvre varient en fonction du type — la fiabilisation des prévisions permettant une meilleure
d’industrie, de la nature des opérations, des risques et des coûts anticipation ;
associés à la possession des stocks et des coûts de chaque activité — l’application de techniques de réduction du temps de change-
du processus. Bien qu’âgés d’environ trente ans, les objectifs de ment d’un type de produit à l’autre ;
cette approche restent toujours une exigence très pertinente pour — l’utilisation de méthodes permettant d’augmenter la fiabilité et
l’industrie d’aujourd’hui, c’est le système de production au plus la flexibilité de l’outil de production.

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Excellence industrielle

par José GRAMDI


Enseignant-chercheur à l’université de technologie de Troyes
Responsable de l’Usine-École de l’établissement
Expert en modélisation, optimisation et pilotage de la performance globale des entreprises

1. Évolution du contexte technico-économico-industriel ................. AG 4 110 - 2


1.1 Les trente Glorieuses (1944-1974) .............................................................. — 2
1.2 Les vingt « périlleuses » (1975-1995).......................................................... — 2
1.3 Les vingt « déterminantes » (1995-2015) ................................................... — 2
1.4 Héritage des Trente Glorieuses .................................................................. — 3
2. Approche systémique de l’entreprise industrielle .......................... — 3
2.1 Émergence d’un nouveau mode de pensée .............................................. — 3
2.2 L’entreprise industrielle vue comme un système ..................................... — 4
3. Trois dimensions de la performance industrielle globale............. — 5
3.1 Débit .............................................................................................................. — 5
3.2 Vitesse........................................................................................................... — 5
3.3 Qualité........................................................................................................... — 5
3.4 Survie, santé et pérennité ........................................................................... — 6
3.5 Le système entreprise vu comme un tuyau............................................... — 6
4. Cinq processus de génération de valeur ........................................... — 6
5. Amélioration continue et durable de la performance
industrielle globale .................................................................................. — 6
5.1 Amélioration continue ................................................................................. — 6
5.2 Amélioration durable ................................................................................... — 7
6. Théorie des « contraintes »................................................................... — 8
6.1 Origines......................................................................................................... — 8
6.2
6.3
Concept .........................................................................................................
Démarche......................................................................................................


8
8 X
7. Lean Management .................................................................................... — 8
7.1 Origines......................................................................................................... — 8
7.2 Concept ......................................................................................................... — 8
7.3 Démarche...................................................................................................... — 9
8. Six Sigma .................................................................................................... — 9
8.1 Origines......................................................................................................... — 9
8.2 Concept ......................................................................................................... — 9
8.3 Démarche...................................................................................................... — 9
9. Management de l’amélioration continue........................................... — 9
9.1 Vision ............................................................................................................ — 9
9.2 Valeurs .......................................................................................................... — 10
9.3 Management ................................................................................................ — 10
9.4 Objectifs ........................................................................................................ — 10
10. Conclusion.................................................................................................. — 10
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. AG 4 110

es années fastes d’après-guerre, baptisées les « Trente Glorieuses » par


L
p。イオエゥッョ@Z@ェ。ョカゥ・イ@RPQS

Jean Fourastié, ont conduit nos industriels à élaborer, expérimenter et


valider un certain nombre de règles de gestion parfaitement adaptées à ce

Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie


est strictement interdite. – © Editions T.I. AG 4 110 – 1

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EXCELLENCE INDUSTRIELLE __________________________________________________________________________________________________________

contexte. Ces règles ont, par la suite, été embarquées dans les progiciels de
gestion intégrée, les ERP, qui équipent désormais la majorité de nos entreprises.
La situation a pourtant aujourd’hui radicalement changé : la demande est infé-
rieure à l’offre qui s’est mondialisée, les produits ont des cycles de vie
extrêmement courts et les clients sont de plus en plus exigeants en termes de
prix, de personnalisation et de services associés. Dans un tel contexte, ces règles
productivistes ne donnent plus les résultats auxquels nous nous étions habitués
et les industriels, un peu déboussolés, se tournent vers de nouvelles approches
comme le Lean Management, le Six Sigma ou encore la Théorie des Contraintes.
Ce mouvement peut sembler prometteur. Nous assistons pourtant à un
grand nombre de contresens et de maladresses concernant le management de
ces démarches, le déploiement des outils attenants, la définition des objectifs
visés et la mesure des performances obtenues. La principale cause de cette
situation peut être attribuée à la non remise en cause, indispensable dans le
contexte actuel, d’un certain nombre des présupposés en place, relatifs notam-
ment à la quête de performances locales.
Ce comportement est sans aucun doute l’héritage le plus tenace et le plus
néfaste des « Trente Glorieuses ». Il est donc urgent d’inventer de nouveaux
modèles, paradigmes managériaux et administratifs pour déployer harmonieu-
sement et efficacement ces démarches, et se préparer à aborder le monde
turbulent dans lequel nous entrons.

1. Évolution du contexte 1.2 Les vingt « périlleuses » (1975-1995)


technico-économico- Après le premier choc pétrolier de 1973, l’économie mondiale
accuse le coup et l’euphorie se transforme peu à peu en
industriel morosité [2]. L’équilibre entre offre et demande est atteint. La pro-
ductivité ne suffit plus, il faut désormais se soucier de la qualité
des produits et de la satisfaction des clients, qui, n’étant plus cap-
1.1 Les trente Glorieuses (1944-1974) tifs, peuvent désormais s’en aller chez un concurrent. Le chômage
fait son apparition. Le prix de revient unitaire calculé reste le vec-
Après la Seconde Guerre Mondiale, la France a connu une crois- teur de mesure de la performance des entreprises industrielles.


sance historique. Tout est à reconstruire, les Français sont habités
d’une nouvelle joie de vivre et d’une envie frénétique de
consommer, de s’équiper, de vivre mieux. Avec le soutien des Le concept MRP (Material Requirements Planning ou
États-Unis, la France connaît une effervescence économique avec, « planification des besoins matière ») de Joseph Orlicky
chaque année, une croissance à faire pâlir nos économistes connaît ses premiers développements pour :
actuels. La demande est largement supérieure à l’offre et, dans ce – calculer les besoins matière (MRP0) ;
contexte, un seul mot d’ordre s’impose pour nos entreprises – équilibrer les flux de production (MRP1) ;
industrielles : productivité. – planifier les achats et la production en prenant en compte
En effet, les industriels sont assurés que chaque produit fabriqué les capacités de toutes les ressources de production (MRP2 qui
va trouver acheteur et prennent conscience que, par conséquent, devient Manufacturing Resources Planning, « planification des
chaque minute perdue sur une machine est synonyme de perte de ressources de production »).
chiffre d’affaire. Les consommateurs, quant à eux, sont tributaires
des producteurs et ne peuvent par conséquent pas se montrer par-
ticulièrement exigeants en terme de délai, personnalisation et prix Ces algorithmes de calculs s’appuient essentiellement sur des
d’achat. Les prix de vente sont donc confortablement établis à par- prévisions de vente dont la nécessité est de plus en pressante
tir des premiers calculs de prix de revient, et ce sont ces calculs de dans ce nouveau contexte où tout ce qui sera produit ne sera plus
prix de revient unitaires qui permettent de faire le lien avec la forcément vendu. Les premiers ordinateurs permettent de suppor-
productivité : « Le prix de revient est la productivité mesurée par ter ces calculs qui deviennent de plus en plus gourmands.
rapport à l’unité monétaire de dépense : combien obtient-on de tel
produit par unité de dépense ? » [1]. C’est ainsi que le prix de
revient unitaire devient peu à peu le principal (unique) vecteur de 1.3 Les vingt « déterminantes »
mesure de performance industrielle, et que les méthodologies (1995-2015)
pour l’estimer le plus finement possible se multiplient.
C’est également dans ce contexte que les travaux de Taylor sur Les ERP (Enterprise Resources Planning), progiciels de gestion
l’organisation scientifique du travail, et de Fayol sur l’administration intégrée font leur apparition et équipent massivement les entrepri-
industrielle et générale, connaissent leurs plus importants ses industrielles. Ils embarquent les modèles MRP et les mécanis-
déploiements : Taylor pour ce qui est de la parcellisation des tâches et mes de comptabilité analytique permettant de calculer précisément
des fonctions, et Fayol pour l’organisation hiérarchique pyramidale. des prix de revient complets en intégrant l’ensemble des ressources

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___________________________________________________________________________________________________________ EXCELLENCE INDUSTRIELLE

■ Les plans de production sont élaborés de façon à atteindre les


Offre rendements nominaux sur les équipements. On lance pour cela
des lots économiques de fabrication basés sur des prévisions de
vente, ce qui a pour conséquence d’entrainer des stocks impor-
tants sur certaines références et des manquants sur d’autres. Les
Productivité Qualité Agilité surstocks courent le risque d’avarie, de péremption ou d’obsoles-
cence.
Abondance
■ Les expéditions sont également traitées par lots économiques
Demande de façon à obtenir les meilleurs coûts unitaires de transport au
détriment de la ponctualité de livraison et au risque d’expédier des
produits non attendus.

■ Le vecteur décisionnel dominant reste le prix de revient unitaire


calculé et les arbitrages pour vendre, acheter, produire, expédier,
délocaliser sont toujours articulés autour de cette seule dimension,
entraînant des comportements inadaptés à notre nouveau
contexte.
Pénurie ■ Cette vision monodimensionnelle de la performance se traduit
au niveau de l’organisation par un cloisonnement des fonctions,
1945 1975 1995 que nous désignons par l’approche silos (figure 2), avec pour
objectif d’atteindre le meilleur coût d’obtention de celles-ci et, au
Figure 1 – Évolution du contexte économico-industriel final, le meilleur prix de revient complet (PRC) des produits. La
conséquence de cette approche est que chaque acteur se retrouve
focalisé sur ses performances individuelles, souvent au détriment
physiques et humaines de l’entreprise. Les technologies de l’infor- de celles de ses collaborateurs, en oubliant ainsi la finalité de
mation progressent à une vitesse vertigineuse, les échangent se l’entreprise dont les performances globales se trouvent donc
mondialisent. Les industriels, en se basant sur les prix de revient dégradées.
calculés de leurs produits, trouvent intérêts à délocaliser leurs pro-
La seule façon d’améliorer une organisation ainsi compartimen-
ductions dans les pays à faible coût de main d’œuvre, et cela, au
tée est d’en réduire localement et indépendamment tous les coûts,
mépris des dommages collatéraux :
« toutes choses égales par ailleurs ! »
– augmentation du chômage donc des charges sociales ;
– baisse du pouvoir d’achat ; Nous voici donc dans une situation où nos entreprises n’ont
– augmentation du déficit du commerce extérieur. jamais été aussi avancées d’un point de vue technologique et
informatique, mais où nous croulons pourtant toujours sous les
La mondialisation entraine une concurrence accrue et une suren- retards, les stocks, la non-qualité et maintenant les données. Ces
chère permanente en termes d’innovation et de réduction des prix. attitudes et cette conception de la performance ne correspondent
Les cycles de vie des produits se réduisent drastiquement, et nous plus au nouveau contexte turbulent que nous avons décrit (§ 1.3).
entrons dans un mouvement de surconsommation et de renouvel- De nouvelles règles de gestion, de nouvelles attitudes managéria-
lement accéléré des équipements. L’offre devient largement supé- les et de nouveaux indicateurs sont à adopter pour négocier cette
rieure à la demande et dans ce contexte, les consommateurs, mutation technico-économico-industrielle. Ce n’est qu’à cette
conscients de leur position dominante, sont de plus en plus exi- condition que les démarches et outils de l’amélioration continue,


geants, en terme de personnalisation de leurs produits, de délai de actuellement déployés dans le paradigme « Trente Glorieuses »,
livraison et, bien-sûr, de prix d’achat qu’ils comparent désormais prendront tout leur sens et livreront tous leurs bénéfices.
en temps-réel sur internet.
Nous sommes, en quelques années, passés d’un système de
production de masse vers un système de personnalisation de
masse [3]. La productivité et la qualité ne suffisent plus pour faire
face à cette nouvelle situation. La condition de survie réside à pré-
2. Approche systémique
sent dans l’aptitude à piloter dans la turbulence, et à s’adapter en
permanence aux perturbations et aux événements extérieurs :
de l’entreprise industrielle
c’est ce que nous appelons l’agilité [2].
La figure 1 synthétise l’évolution que l’on vient de décrire. 2.1 Émergence d’un nouveau mode
de pensée
1.4 Héritage des Trente Glorieuses
Une alternative à cette approche cartésienne et l’une des voies
Les règles de gestion établies pendant les Trente Glorieuses, et les plus prometteuses pour aborder cette mutation sans précédent
validées par leurs résultats extraordinaires, ont donc toujours un résident très probablement dans l’approche systémique. L’appro-
impact considérable sur les comportements actuels des décideurs che réductionniste et analytique de Descartes nous a enseigné
industriels. que, pour aborder une situation complexe, il convient « de diviser
chacune des difficultés que j’examinerais en autant de parcelles
■ Les installations sont toujours conçues pour des productions de qu’il se pourrait et qu’il serait requis pour les mieux résoudre. [...]
masse avec des équipements permettant d’atteindre de très hauts de faire partout des dénombrements si entiers et des revues si
rendements. générales que je fusse assuré de ne rien omettre » [4].
■ Les achats sont déclenchés de façon à obtenir les meilleurs prix C’est ce précepte qui est appliqué littéralement dans l’approche
et à ne surtout pas occasionner d’arrêt de production. Ils sont esti- silos décrite ci-dessus, mais plus généralement dans nos adminis-
més à partir de prévisions. On constate ainsi souvent des surs- trations, notre système d’enseignement et de recherche, notre
tocks de matières premières, soit énormément de trésorerie médecine... Nous sommes donc tous les héritiers de la pensée car-
immobilisée. tésienne.

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Innovation
Concepts clés

par Pierre DEVALAN


Expert en conduite et évaluation de projets d’innovation
Ancien Directeur des programmes de R&D du CETIM

1. Historique ................................................................................................... AG 2 231 - 2


1.1 Approche économiste.................................................................................. — 2
1.2 Approche managériale ................................................................................ — 2
2. Terminologie .............................................................................................. — 3
2.1 Définition « officielle » de l’innovation....................................................... — 3
2.2 Définition « normalisée » ............................................................................ — 3
2.3 Invention : un point de départ..................................................................... — 3
2.4 Science, technique et technologie .............................................................. — 4
2.5 R&D ............................................................................................................... — 4
2.6 Transfert de technologie ............................................................................. — 5
2.7 Innovation technologique – Recherche scientifique ................................. — 5
2.8 Entreprise porteuse...................................................................................... — 5
2.9 Innovation ouverte ....................................................................................... — 5
3. Concepts à retenir.................................................................................... — 6
3.1 Évolution du concept d’innovation............................................................. — 6
3.2 Processus d’innovation ............................................................................... — 6
3.3 Concepts liés à l’innovation ........................................................................ — 6
3.4 Entreprise innovante.................................................................................... — 6
3.5 Besoin d’innover en partenariat ................................................................. — 7
4. Conclusion..................................................................................................
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. AG 2 231
— 7 X

l s’agit ici de replacer l’innovation dans son contexte historique, de manière


I à aboutir à sa définition dans son acception actuelle qui la considère comme
un processus générateur de valeur pour l’entreprise, et de la situer par rapport
à des activités périphériques, telles que l’invention, la R&D, la technologie, le
transfert de technologie...
Ces activités périphériques sont souvent amalgamées au processus d’innova-
tion parce que l’on confond souvent l’entreprise, c’est-à-dire l’organisation qui
va mettre en œuvre l’innovation et bénéficier de la valeur générée (économique,
environnementale ou sociétale), aux inventeurs (ou autres organisations) péri-
phériques à ce processus d’innovation, tels que centres de recherche,
organismes de soutien à l’innovation et, plus largement, des prestataires de
conseil.
Ces quelques éclaircissements permettent ainsi de mettre en exergue un
certain nombre de concepts clés, caractéristiques de l’innovation.
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INNOVATION ______________________________________________________________________________________________________________________

1. Historique Encadré 1 – Principales étapes de la pensée


des économistes
L’« innovation » est un terme ancien dont l’origine se situe au
XIIIe siècle, tout comme l’« invention », les deux termes étant à • La notion d’innovation apparaît dès les origines de l’ana-
cette origine des synonymes se caractérisant par la création et la lyse économique (Adam Smith, D. Ricardo) mais demeure
nouveauté. Cependant, la notion d’innovation a fortement évoluée imprécise : on parle de « croissance économique », elle est
au cours des années. Elle s’est ainsi progressivement enrichie et aussi restrictive. On la nomme « progrès technique ».
transformée, surtout au cours du XIXe siècle.
• J.A. Schumpeter en 1942, définit l’innovation comme un
On distingue schématiquement deux approches historiques : changement qualitatif au sein de l’entreprise : « destruction
– économiste depuis les origines de la révolution industrielle ; créatrice qui révolutionne incessamment de l’intérieur la struc-
– managériale dans les dernières décennies du XXe siècle. ture économique en détruisant continuellement ses éléments
vieillis et en créant des éléments neufs ».
• Dans les années 1960, une nouvelle conception de l’inno-
1.1 Approche économiste vation apparaît, débordant le strict cadre de l’innovation tech-
nologique (innovation organisationnelle, innovation
Dans l’approche des économistes, la notion d’innovation appa- marketing...) compte tenu du développement d’apprentissages
raît dès les origines de l’analyse économique mais demeure divers au sein de l’entreprise.
imprécise : on parle de « croissance économique ». Elle est aussi • Des années 1980 à 2000, l’innovation est définie comme la
restrictive, on la nomme « progrès technique » (voir encadré 1). réalisation de la nouveauté, alors que l’invention se limite à
La pensée des économistes consiste notamment à identifier et l’idée nouvelle sans réelle confrontation au besoin qu’elle
comprendre les facteurs qui déterminent les transformations de la entend satisfaire.
structure de l’économie à partir de son entité élémentaire : l’entre-
prise.
■ Adam Smith, dans son ouvrage sur la richesse des nations, est
apparemment le premier, au XVIe siècle, à constater que la Encadré 2 – Principales étapes de la pensée
richesse de la nation est le fruit de l’ensemble des produits qui managériale
agrémentent la vie de la nation toute entière, c’est-à-dire de toutes
les classes et de toutes leurs consommations. L’or et la monnaie • Premiers travaux significatifs dans les années 1970-1980
ne constituent donc plus la richesse, elles n’ont en elles-mêmes sur le management de la technologie.
aucune autre utilité que celle d’intermédiaire. • Différentes modélisations du processus d’innovation au
Pour lui, l’origine de la richesse est le travail des hommes. Il sein de l’entreprise, de 1980 à 2000, qui ont comme point
pose ainsi les bases de la doctrine de la valeur travail, qui sera commun de montrer un processus qui se situe d’abord au
pleinement théorisée au siècle suivant par David Ricardo. La révo- niveau stratégique, puis au niveau opérationnel un processus
lution industrielle apporte au siècle suivant le progrès technique basé sur une démarche de projet comportant des spécificités :
qui est alors identifié comme le principal moteur de l’évolution de – feed-backs durant le processus ;
l’économie. – relation avec les sphères de la science (pour l’innovation
technologique) et celle du marché.
■ C’est en 1942 que l’économiste J.A. Schumpeter [1], définit
l’innovation comme un changement qualitatif au sein de • L’ouverture progressive vers l’innovation ouverte,


l’entreprise : « destruction créatrice qui révolutionne inces- notamment du partenariat entre les entreprises et/ou des
samment de l’intérieur la structure économique en détruisant centres de R&D pour mener des projets d’innovation en
continuellement ses éléments vieillis et en créant des éléments collaboration qui induisent des modes de gouvernance parti-
neufs ». culiers.

■ Dans les années 1960, une nouvelle conception de l’innovation


apparaît, notamment dans les travaux d’Edith Penrose [2]. Il s’agit laquelle « il suffisait de produire pour que le consommateur
du courant évolutionniste qui montre que l’innovation nait à partir achète »,) c’est-à-dire à partir des années 1970. L’innovation
du développement d’apprentissages de natures diverses (scienti- devient alors une véritable préoccupation des managers, compte
fique, technique, organisationnelle...) à différents endroits de tenu d’une croissance qui s’essouffle et de la montée en puissance
l’entreprise (laboratoire de R&D, bureau d’études, atelier de pro- de la concurrence de pays émergents (voir encadré 2).
duction, réseau de commercialisation...). L’innovation dépasse de
ce fait le cadre de l’innovation technologique (innovation organisa- Dans l’approche managériale, centrée au départ sur la technolo-
tionnelle, marketing...). gie, il s’agit de répondre à la question plus opérationnelle qui est
celle d’organiser, et de faire fonctionner, l’entreprise afin qu’elle
■ Enfin, à partir des années 1980, l’innovation est considérée innove et crée de la valeur, nécessaire au maintien de sa
comme la réalisation de nouveauté avec une sanction écono- compétitivité. Les premiers travaux significatifs du début de cette
mique, alors que l’invention se limite à un dispositif technique ori- période portent sur le management de la technologie, en particu-
ginal sans réelle confrontation au besoin qu’il entend satisfaire, et lier le management des ressources technologiques [3], notion
sans donner lieu à des échanges sur un marché. Le manuel introduite par Jacques Morin en 1985 qui propose des outils de
d’OSLO de l’OCDE est représentatif des travaux menés dans cette gestion du patrimoine technologique de l’entreprise, en particulier
période. la mise en place de six fonctions-clés qui sont :
– inventaire des technologies ;
– évaluation ;
1.2 Approche managériale – optimisation ;
L’approche managériale est plus récente. Elle prend principa- – enrichissement ;
lement naissance à la fin des « trente glorieuses » (période d’une – surveillance ;
trentaine d’années après la seconde guerre mondiale durant – sauvegarde.

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