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Chapitre 1 : Introduction à la psychologie du travail

1. La personne et le travail

Qu’est-ce qu’un travail ? Qui travaille ?

Est-ce qu’un artisan, un artiste, un étudiant ou un bénévole travaillent ? Ces questions nous
amènent à considérer que si un artiste ou un bénévole travaille, cela lui donne le droit aux
services sociaux réservés aux travailleurs. Une activité n'est pas considérée comme un travail.
Ce qu’on appelle travail présente un caractère de contrainte, «activité forcée» (H. Wallon).

La notion de contrainte recouvre deux sens : - Nous sommes contraints au travail: caractère
forcé, obligation de travailler qui est à la fois une obligation financière, morale, sociale. On
considère que c'est normal d'aller travailler. De plus, nous subissons des contraintes au travail:
cadre contraignant du contexte, de la nature du travail. On doit se lever tous les matins, suivre
des horaires, avoir un chef, des normes de production etc.

1.1. Historique et évolution

Durant l'antiquité, les Grecs méprisaient le travail, les citoyens ne travaillent pas, seuls les
esclaves travaillent. Les citoyens faisaient de la politique. Au temps des Romains, le travail
était une tâche dégradante. Dans la culture judéo-chrétienne, le travail renvoie à la punition
que Dieu aurait infligée à l’homme de «gagner son pain à la sueur de son front», se donner de
la peine. C’est à partir de la Révolution industrielle, et avec l’affirmation de valeurs issues du
protestantisme et du libéralisme économique, que le travail aurait acquis une image positive.
Pour les protestants, l'oisiveté est bannie. Le travail devient un devoir, une obligation. Au
XIXème siècle: le travail est ce qui crée de la richesse, la richesse pour celui qui génère du
travail pour les autres et de la richesse pour lui. On a pu voir s’affronter au cours du XXème
siècle des courants de pensée divergents sur la valeur «travail». Pour la pensée chrétienne, le
travail est une activité fondamentale de l’homme, il est d’utilité sociale, travailler permet la
charité. Pour la pensée humaniste, le travail comme lieu de socialisation, de la formation de
l’identité individuelle et collective. Pour la pensée marxiste, le travail est fondamentalement
social. Opposition entre le vrai travail (essence de l’homme – façonner la nature par le travail)
et la réalité aliénée du travail.

1.2. Centration sur les personnes

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La psychologie dans le travail est centrée sur les personnes, leur activité, leurs conduites et
leurs représentations en relation avec le travail. L’approche se distingue de celles de la gestion
et de la sociologie au sens où elle ne part pas du fonctionnement d’un système d’organisation
en lui-même mais des individus qui le composent et qui évoluent dans ce cadre.

Dans l’entreprise le psychologue s’occupe donc des personnes qui y travaillent et cherche à
saisir comment elles vivent leurs relations avec les autres et avec elles-mêmes dans
l’organisation. Il intervient pour que ces relations se modifient, s’améliorent ou soient
redéfinies par les intéressés. Le psychologue intervient aussi auprès des personnes qui
souhaitent travailler et recherchent un soutien pour mieux définir leurs intérêts et leurs
compétences.

1.3. Définitions du travail

Goguelin (1998): le travail est une activité professionnelle et rétribuée, organisée à l’intérieur
d’un groupe social et exercée de manière réglée. Louche (2001): le travail est une activité
consistant à mobiliser de l’énergie pour produire un bien ou délivrer un service et qui est
contrainte par un cadre social et technique. Karnas (2002): le travail dont traite la psychologie
du travail se définit comme l’activité d’un homme ou d’une femme dans un cadre
organisationnel, social, défini utilisant des outils particuliers, aux fins d’atteindre des objectifs
de production donnés.

1.4. Le sens du travail

Le sens du travail peut être défini comme étant l’orientation vers le travail, ce que le sujet
recherche dans son travail et les mobiles qui guident ses actions. Le sens qu’on donne au
travail serait intimement lié aux valeurs qu’il est censé actualiser. Le concept d’orientation au
travail (work orientations) définit les motivations qui déterminent les valeurs associées au
travail (Roberson, 1990).

1.4.1. Le sens du travail est un concept multidimensionnel


L’équipe du « Meaning of Work » définit le sens du travail par 5 composantes :

1.4.1. La centralité relative et absolue du travail : C’est le degré d’importance qu’a


le travail dans la vie d’un individu. On distingue une centralité absolue d’une centralité
relative.

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1.4.1.1. La centralité absolue du travail est appréhendée par la « question de la loterie »
elle consiste à demander aux répondants ce qu'ils feraient s'ils gagnaient une
somme suffisamment importante pour ne plus avoir à travailler ils doivent indiquer
s'ils continueraient à travailler dans les mêmes conditions s'ils continueraient dans
d'autres conditions ou s'ils arrêteraient de travailler définitivement.
Les réponses varient d’un pays à l’autre et ont tendance devenir de plus en plus
négatives avec le temps. Cette proportion est de 93% de oui chez les japonais.
Alors qu’elle n’est que de 69% chez les britanniques. Au début des années 1980,
70% des allemands répondaient oui. Cette proportion baissait à 64.4% à la fin de
cette même décennie. Seulement 14% des gagnants américains à la loterie cessent
de travailler (Harpazet Hui, 2001).
1.4.1.2. La centralité relative du travail renvoie à la place occupée par le travail par
rapport à la place que l'individu accorde à d'autres activités (vie familiale, vie
sociale, Vie personnelle). Dans le modèle du "meaning of work", l'importance
relative est appréciée en demandant aux sujets de répartir 100 points entre les
différents domaines de vie en fonction de l'importance qu'ils leur accordent. Le
travail occupe la première place (travail, famille, loisir, communauté, religion) au
Japon et en Yougoslavie. Le travail occupe la seconde (famille, travail, loisir,
communauté, religion) en Belgique, aux USA, en Israël, en République fédérale
d’Allemagne, au Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, en
Russie (Alexandre Ardichvili, 2005).

1.4.2. L'importance attachée à différents aspects du travail


Le travail comporte plusieurs aspects. On sépare en général les aspects expressifs, liés
au contenu (Variété, autonomie, intérêt...) des aspects instrumentaux, liés au contexte
(sécurité de l'emploi, salaire, horaire).

1.4.3. L'objectif général poursuivi dans le travail


Il s'agit des motifs par lesquels l individus travaille (statut, prestige, servir la société
avoir des contacts, avoir une occupation...).

1.4.4. La position par rapport aux normes sociales

Ces normes concernent les droits et les devoirs de l'individu par rapport au travail (droits :
responsabilité de la société qui se doit de fournir du travail; devoirs : obligation sociale de
travailler).

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1.4.5. L'identification au rôle professionnel
Cette identification peut concerner la tâche, l'entreprise, le produit fabriqué ou le
service rendu, la profession...

Estelle Morin définit le sens du travail par trois dimensions:

- la signification : elle entend par signification la représentation du travail et sa


centralité.

- l'orientation: l'orientation comporte deux aspects ce que l'on recherche dans le


travail, les raisons pour lesquelles on travaille.

- la cohérence: il s'agit de l'équilibre que l'individu trouve en lui-même grâce aux


expériences de travail.

2. La psychologie du travail

La psychologie du travail comme discipline concerne :

- Les finalités c-à-d l’objectif que l’on veut atteindre.


- Les modalités c-à-d la manière avec laquelle on conçoit les finalités.
- Les domaines et les champs de recherche de recherche et d’intervention de la
discipline.
2.1. Finalités

L’objectif de la psychologie du travail est de créer un cadre de travail fondé sur une
harmonie entre l’homme et le travail et entre l’homme et son activité professionnelle.
Améliorer la qualité de vie au travail aura des effets positifs sur son rendement et sur la
productivité.

Il existe une opposition entre le travail comme « peine » et le travail comme « expression
de soi ». Cette opposition est essentielle à l’objectif poursuivi de la psychologie du travail
puisqu’elle renvoie à une distinction entre le travail comme contrainte (pénibilité) et le
développement de la personne au travail et par le travail. Il y a donc une double finalité: le
bien-être et la production. La première finalité est de réduire la pénibilité du travail,
limiter la fatigue, améliorer le bien-être au travail, augmenter la satisfaction à l’égard du
travail,… Et la seconde est d'améliorer les performances, accroître l’efficacité, la
productivité, la qualité, la rentabilité. La psychologie du travail vise donc aussi
l'amélioration des performances.
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2.2. Modalités

Quel est le champ d’action de la psychologie du travail ? Le psychologue doit-il agir sur
les hommes ou sur les structures organisationnelles ou sur les deux ? Selon J. Leplat, la
question centrale est une question de couplage optimal entre l’homme et le travail, les
tâches qu’on lui donne.

Activité

Agent Couplage Tâche

Figure 1.1. Éléments essentiels de l’analyse du travail (d’après Leplat, 1997)

L'activité est la conséquence du couplage. La question des modalités peut être abordée de
deux manières diamétralement opposées (mais non exclusives!) Soit adapter le travail à
l’homme, soit adapter l’homme au travail.

2.3. Domaine de recherche et d’intervention

Dans une agence bancaire travaillent des hommes et des femmes qui réalisent différentes
tâches de type administratif. Les guichetiers doivent réaliser un certain nombre de tâches
spécifiques correspondant aux opérations demandées par les clients: versement, change,
ouverture compte… Pour ce faire, ils utilisent un ordinateur (outil), traitent des documents,
appliquent des règles, des procédures, etc… Leur travail est organisé pour satisfaire aux
exigences commerciales de la banque. Imaginons que certains guichetiers commettent des
erreurs très importantes qui peuvent compromettre le bon fonctionnement de l’agence: il
s’agit d’erreurs touchant à des opérations financières: erreurs de codification, opérations
erronées, fautes dans des montants… Le psychologue doit s’interroger sur les causes possibles
des erreurs, il est appelé à intervenir et pourra envisager plusieurs thématiques
d’intervention… Quels en sont les grands axes?

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Voici quelques pistes d’intervention: s’interroger sur leurs motivations au travail, s’interroger
sur leur formation, s’interroger sur l’attitude des supérieurs hiérarchiques, revoir les
processus de sélection (choix de personnes non adéquates au poste), revoir leurs outils
informatiques, s'interroger sur l'environnement de travail…

- Caractéristiques personnelles : Les personnes concernées ont-elles les qualités


requises pour exécuter le travail demandé? Intelligence, attention… Connaissances
bancaires, de la banque, informatique ? Des aspects relatifs aux caractéristiques de vie
des personnes seraient-ils susceptibles d’influencer le cours du travail?
- Recrutement et sélection : Le recrutement, la sélection ont-ils été correctement
effectués?
- Formation : Les personnes concernées ont-elles reçu une formation adéquate qui leur
permet de faire face aux exigences réelles de travail? Ce qu'on apprend est-il utilisable
dans la pratique? Ceci implique-t-il les processus de formation? S’agit-il de
l’opérationnalisation des contenus de formation sur le terrain?
- Motivation : La motivation des agents est-elle en cause? Trouvent-ils le travail
ennuyeux ou ne trouvent-ils pas du sens, ou les perspectives de carrière souhaitées? Ils
peuvent ne pas percevoir l'utilité, le sens de leur travail.
- Relations : Est-ce que les relations entre les personnes sont en cause? N’existe-t-il pas
des conflits interpersonnels qui influencent leur implication au travail? Les erreurs ou
les dysfonctionnements seraient-ils révélateurs d’un malaise, s’agissant d’un moyen
d’exprimer les problèmes et/ou de les entretenir? Les relations avec les supérieurs
hiérarchiques ne sont-elles pas responsables d’un climat peu favorable à un travail de
qualité?
- Conditions de travail : Les conditions de travail sont-elles réunies pour effectuer
correctement le travail attendu? Les exigences de production n’entraînent-elles pas un
conflit rapidité-précision, plaçant les personnes dans une situation où toute tentative de
satisfaire l’exigence de rapidité amènerait à prendre des risques pour la précision du
travail?
- Environnement de travail : Le cadre est-il bien propice au travail? Quelles seraient
les nuisances (bruits) susceptibles de provoquer les erreurs? La conciliation vie au
travail et vie hors travail pourrait-elle être problématique et entraîner des difficultés
personnelles?

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En résumé, il faudrait envisager plusieurs «causes», plusieurs axes de recherche et
d’intervention. Une analyse préalable des circonstances et des faits sera indispensable
avant de s’orienter vers certains axes. Il faudra étudier quel type d'erreur est fait et à quel
moment. Est-ce qu'elles sont faites par tout le monde? Les conditions sont-elles
différentes pour les différentes personnes.

Il y a trois grands champs d'intervention:

Ø La psychologie du personnel: les personnes


Ø La psychologie des organisations: motivation, ligne hiérarchique...
Ø La psychologie ergonomique: outils, situation de travail...

2.3.1. Le domaine de la psychologie du personnel : C'est le domaine centré sur l'individu, il


se définit par des interventions de la psychologie du travail centrées directement sur le
travailleur ou le salarié. Ces interventions visent tantôt à connaître, à évaluer le travailleur
(diagnostic et pronostic), tantôt à le «faire évoluer» (au niveau de ses connaissances, de ses
comportements), tantôt à gérer son insertion et son devenir dans l’entreprise (gestion des
carrières) . On s’intéressera ici au recrutement, à la sélection, à l’évaluation, à la promotion, à
la mutation, à la formation, à la gestion de la carrière etc. Modalité → Adaptation de
l’individu au travail.

2.3.2. Le domaine de la psychologie des organisations : Ce domaine renvoie au constat de


l’importance de la dimension «organisationnelle» du travail. Le travail se déroule dans le
cadre d’une organisation qui définit des rôles, des statuts, des échanges entre les acteurs. Ces
notions renvoient à des aspects fonctionnels (les tâches à réaliser) autant qu’à des aspects
relationnels, psychosociaux. On s’intéressera ici aux structures organisationnelles et
motivationnelles, aux relations entre les travailleurs, aux structures hiérarchiques, aux
processus de communication, de participation, de négociation, de médiation etc. Ainsi,
l’intérêt est porté sur les interactions entre les individus et les composantes de l’organisation
et aux répercussions des interactions sociales dans lesquelles les personnes peuvent être
impliquées.

Modalités → Adaptation du travail à l’homme : chercher à connaître le «fonctionnement


humain» pour y adapter des structures d’organisation et déterminer quel serait l’homme
«adapté» à telle forme d’organisation.

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→ Adaptation de l’homme au travail : définir comment amener tel individu à
s’insérer dans celle-ci, à adhérer aux valeurs qu’elle défend.

2.3.3 Le domaine de la psychologie ergonomique : Ce domaine s’intéresse par définition à


la réalisation effective du travail, à l’activité du travail. Ses préoccupations: les aspects
opératoires et techniques du travail, les tâches, leur définition, leur cadre environnemental
(physique, organisationnel, social...), y compris les risques afférents. Une préoccupation
marquée pour les aspects opératifs et cognitifs liés à l'exercice de l'activité professionnelle
proprement dite. On s’intéresse à la conception des outils et des méthodes de travail, aux
conditions de travail, aux interfaces homme-machine, homme-ordinateur, à la sécurité et aux
risques professionnels. Modalités → Adaptation du travail à l’homme.

Adaptation du travail à l’homme Adaptation de l’homme au travail

Ergonomie Organisation Formation Sélection

Actions de Ergonomie de correction. Réorganisation, Formation continue Mutation, promotion.


correction- Ex. conditions de travail, aménagements. Ex : techniciens Ex. réaffectation,
dysfonction logiciels etc. Ex. commandement, Hauts potentiels outpalcement
communication,
motivation

Actions de Ergonomie de conception Organisation, lancement. Formation initiale. Recrutement.


conception- (design). Ex. création Ex. introduction d’un Ex. formation des Ex. organisation d’un
normativité d’un poste de conduite système d’évaluation du jeunes travailleurs recrutement de
personnel jeunes diplômés à
travers une
information dans les
écoles

Il y a deux axes verticaux: l'adaptation du travail à l'homme et l'adaptation de l'homme au


travail. Il y a deux axes horizontaux, la correction et la conception, ils ne sont pas en
opposition, on agit sur les deux. Pour la correction, on ajuste ce qui existe, on étudie les

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dysfonctionnements, par exemple, l'étude du stress au travail. Pour la conception, c'est
anticiper une situation (recrutement de nouvelles personnes, achat de logiciels).

2.3.4 Les autres domaines et champs

L’insertion socio-professionnelle de profils bien particuliers : des personnes faiblement


qualifiées, des demandeurs d’emploi longue durée, des personnes présentant une incapacité.
La sécurité routière via les accidents du travail, donc des risques, de la perception des
risques et de l'adaptation des comportements, la psychologie des transports (aviation).
La psychologie économique, l’étude du comportement du consommateur...

3. Psychologie du personnel

3.1. Introduction

Le travail est la rencontre entre deux «systèmes»: l’individu et l’organisation du travail. Ces
«systèmes» sont animés de principes intégrateurs (ils essaient de s'adapter l'un à l'autre) et ces
deux «systèmes» sont en constante évolution.

3.1.1 Vision GRH, Capital humain

3.1.1.1 Vision stratégique de la Gestion des Ressources Humaines (GRH)

En raison des limites des systèmes traditionnels de gestion du personnel dans les années 50-60
(gestion du salaire), à la concurrence accrue sur le marché du travail (l'organisation essaie de
capter les travailleurs qu'elle souhaite et de les garder), à une redéfinition des fonctions
d’encadrement (la façon dont le chef doit encadrer ses subordonnés: ce que le chef doit
attendre et demander à ses travailleurs et inversement) et à l'influence de l’actionnariat (forte
introduction de l'économie, rentabilité, une plus grande productivité), on en arrive à une
vision stratégique de la gestion des ressources humaines. C'est une nécessité interne pour
l'entreprise mais elle subit aussi des conséquences externes.

3.1.1.2 RH – Capital humain

Le terme ressource humaine est apparu dans les années 70-80. A côté des ressources
matérielles, on veut considérer le personnel comme une ressource « humaine » en opposition
avec « matérielle » que l'on veut garder mais qui est aussi modifiable, supprimable. C'est un
concept économique introduit par Schultz (1961) et repris par Becker (1975-1993). Ce
concept désigne les connaissances, les qualifications, les compétences et les autres qualités

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que possède un individu et qui intéressent l’activité économique (définition de l'OCDE=
l’Organisation de Coopération et de Développement Economiques). C'est un capital qui
s’acquiert (éducation, scolarité), qui s’entretient (formation, prévention) et qui produit des
bénéfices pour l’organisation et pour l’individu. Le travail n’est pas une évidence, il est
incertain, les postes changent, les compétences demandées évoluent. Pour garder son emploi
et le type d'emploi que l'on veut, il faut une formation continue, on évolue au cours de la
carrière. Il y a des processus psychologiques influençant les choix professionnels et les
comportements associés: le sentiment de compétence, l'estime de soi, actualisation de soi etc.

3.1.2 Les grandes phases tout au long de la carrière

- Le recrutement est la partie qui va jusqu'à la sélection.

- L'analyse du travail est l'identification du poste.

- La sélection consiste à faire le tri, choisir la personne parmi beaucoup d'autres.

- La décision est celle de l'engagement ou du non engagement.

- La vie au travail, c'est la carrière.

- Il y a des évaluations des conditions de travail.

- Une mutation est un changement de poste.

- Une récompense est une augmentation de salaire ou une prime.

La psychologie du personnel comprend donc le recrutement et la sélection du personnel,


l'évaluation du personnel, la formation et l’entraînement du personnel, des actions ciblées sur
certaines catégories de travailleurs, la gestion de la carrière.

3.1.3 Profil du psychologue du personnel

Dans l’entreprise, le psychologue s’occupe des personnes qui y travaillent ou souhaitent y


travailler (embauche et suivi tout au long de la carrière). Hors organisation, le psychologue
s’occupe de l'orientation professionnelle, bilan de compétences, (ré) insertion professionnelle,
formations… et des missions externalisées (recrutement, formation, évaluation,…) On oppose
une action contextualisée à une action externalisée. Un psychologue interne connait la société,
un externe est neutre, a une meilleure connaissance du marché et une vision plus transversale.
On choisit en fonction du type de poste que l'on cherche. Le psychologue connait des

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techniques spécifiques, a des compétences et des approches spécifiques et étudie des objets
spécifiques. Il a un intérêt pour la personne.

3.2 Le recrutement

3.2.1 Les étapes du recrutement

Il y a plusieurs étapes dans le recrutement:

• Identification du poste vacant en le positionnant dans la structure: il faut identifier le besoin,


savoir si on crée une nouvelle fonction, si on veut remplacer quelqu'un qui part ou s'il y a un
surplus de travail.

• Analyse du travail et identification des qualités nécessaires à la réussite professionnelle:


quels sont les éléments clés du poste?

• Fixation des procédures de recrutement: choix des modalités de recrutement


(interne/externe: ouvrir le poste à l'extérieur ou chercher quelqu'un dans l'organisation),
rédaction d’une annonce (quel critère mettre dans l'annonce?), méthodologie et procédures de
sélection (mise à l'épreuve, test, entretien, le choix est fonction du poste, du contexte et du
nombre de candidatures).

• Réception et tri (critères) des candidatures (premier tri à partir de contraintes tel que le
niveau de formation)

• Examen des candidatures: méthodes de sélection

• Décision et transmission des informations (aux décideurs et aux candidats): qui décide? Le
psychologue, le supérieur, le patron, C'est en fonction de la structure. L'employeur est
responsable du travailleur. Le psychologue a t-il la connaissance du terrain, du métier? Il faut
un expert dans le domaine mais il ne faut pas pour autant passer outre l'avis du psychologue.
Lorsque c'est un psychologue externe, c'est l'employeur qui décide. L'idéal est de trouver un
consensus.

3.2.2 Les objectifs d'optimalisation du recrutement

Les objectifs sont le développement de la motivation au travail, la réduction des accidents de


travail, la limitation de l’absentéisme, la limitation du turn-over (taux de rotation du
personnel), la constitution d’équipes harmonieuses et efficaces (c'est un défi, faut-il

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rassembler des personnes différentes ou de même profil?), l'augmentation de la satisfaction au
travail (si le travailleur est sur-qualifié, il ne sera pas satisfait), l'amélioration du climat social.

3.3 La sélection

3.3.1 Choix des critères de sélection

La sélection constitue une étape clé du processus de recrutement. Comment choisir le


candidat, la personne qui répond le mieux aux caractéristiques du poste et aux attentes de
l’organisation pour ce poste? Doit-on arriver forcément à une embauche et prendre le meilleur
candidat ou si on n'en trouve pas, relancer le processus dès le départ ? Certains critères sont
fixés a priori: conditions primordiales, légales (tri CV : niveau, diplômes, expériences si
exigées). D’autres critères influencent la décision lors de la comparaison des candidats, ce
sont des avantages, le score absolu n'a pas d'importance, c'est la comparaison entre candidats
qui comptes. Il y a un processus de diagnostic (ex: répondre aux conditions d’emploi:
diplômes, titre requis (psychologue, ingénieur, comptable, financier etc.), âge minimum (être
majeur), taille, permis de conduire, distance domicile-travail, niveaux de connaissances en
langues, …). C'est ce que la personne possède aujourd'hui, ce sont les conditions minimums.
Et aussi le processus de pronostic, relatif à la réussite professionnelle ultérieure (ex: diplômes,
qualifications, séjour à l’étranger, années expérience, activités loisirs,…). On estime la chance
de réussite professionnelle dans le poste. Les activités de loisirs sont surtout prises en compte
lorsqu'il n'y a pas d'expérience professionnelle. On regarde les compétences utiles pour
l'avenir professionnel.

3.3.2 Le pronostic

Comment observer de façon fiable des caractéristiques stables pouvant prédire certains
comportements futurs? Il faut posséder des instruments de «mesure» de caractéristiques
«utiles». Il faut pouvoir mettre ces caractéristiques en relation avec le travail, et plus
particulièrement avec des indicateurs d’adaptation et de réussite au poste (critères).

3.3.3 Les tests

Les tests psychotechniques supposent un matériel standardisé (même test pour tout le monde),
des conditions de passation standardisées (temps, consigne), une notation standardisée (pas de
subjectivité), des qualités psychométriques déterminées, une «validité», un étalonnage: le
score obtenu aux tests n’a de sens qu’en le comparant à ceux d’une population de référence.

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La performance est relative à celles de la population apparentée. On est soit au dessus, soit
dans, soit en dessous de la moyenne, celle-ci change d'une population à l'autre. Les tests
mentaux sont apparus fin du 19ème siècle avec le développement de la psychologie
scientifique. Binet et Simon (début 20è) ont déterminé l’âge mental des enfants afin de
prévoir leur capacité à suivre l’enseignement élémentaire «ordinaire» (donc pronostique). Ils
définissent une dimension unique Intelligence que l’on peut mesurer par un ensemble
d’épreuves. On peut situer les scores par rapport à une population de référence (courbe
normale de distribution). Cette dimension est prédictive de l’adaptation scolaire. Cattell
(début 20è): identification de différences individuelles stables dans des épreuves. Le score aux
épreuves est stable. Ceci est valable pour les tests psychotechniques ( tests utilisés par les
psychologues de travail pour évaluer les compétences des personnes pour un poste donné).
C'est une mesure de caractères psychologiques pour prédire l’adaptation à des postes de
travail.

Selon Pichot, un test mental est une situation expérimentale standardisée servant de stimulus à
un comportement. Ce comportement est évalué par une comparaison statistique avec celui
d'autres individus placés dans la même situation, permettant ainsi de classer le sujet soit
quantitativement, soit typologiquement.

3.3.3.1 La qualité métrique des tests du point de vue des candidats

L’acceptabilité: validité apparente,

L’équité: ils sont traités de la même façon que les autres candidats,

L’impartialité: objectivité,

L’utilité: ça change quelque chose pour l'engagement.

La perception de justice dépend pour les candidats de la possibilité que les différentes
méthodes offrent de montrer leurs points forts et de leur pertinence par rapport à l'emploi à
pourvoir.

3.3.3.2 La qualité métrique des tests du point de vue de l’entreprise

L’utilité: (qui dépend par exemple d’une évaluation coûts-bénéfices et intègre donc la
question de la validité)

3.3.3.3 La classification des tests: aptitudes cognitives, personnalités, autres outils

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3.3.3.3.1 Les tests relatifs aux aptitudes cognitives

1. Aptitude mentale générale - intelligence générale: capacité d’un individu à apprendre


avec rapidité et exactitude une tâche, un sujet et/ou une habileté dans des conditions optimales
d’apprentissage (Salgado, 2001). Il existe une multitude de tests: matrice progressive de
Raven, Cattell, tests de domino, … Validité prédictive de ces tests: l'estimation de la
performance au travail, la réussite en formation professionnelle, l'apprentissage professionnel,
le statut professionnel.

2. Aptitudes cognitives et perceptives mobilisées dans les tâches professionnelles.

• Aptitude verbale: comprendre la signification des mots et du langage

• Aptitude numérique: traiter des opérations numériques avec rapidité et exactitude

• Aptitude spatiale: percevoir la représentation d’objets tridimensionnels à partir de leur


représentation en 2 dimensions

• Aptitude mécanique: comprendre et résoudre des problèmes de physique

• Attention sélective: se concentrer sur une tâche sans se laisser distraire. Par exemple,
corriger des textes.

• Aptitude mnémonique: se souvenir et reconnaître des informations présentées sous


diverses modalités sensorielles.

• Aptitude perceptive: comparer rapidement et avec exactitude des objets.

3. Aptitudes spécifiques (négociation, vente, organisation). Ce sont les aptitudes


directement liée à l'activité professionnelle afin de prédire la réussite professionnelle.

3.3.3.3.2 Tests de personnalité en sélection

Personnalité: l’orientation habituelle des comportements et des conduites. Les dimensions


explicatives (facteurs) de la personnalité sont les «traits».

Reuchlin (Bernaud, 1998): La personnalité est une caractéristique relativement stable et


générale de la manière d’être d’une personne dans sa façon de réagir aux situations dans
lesquelles elle se trouve.

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Traits: dispositions durables, reflétant des différences individuelles qui manifestent une
relative stabilité temporelle et une relative consistance trans-situationnelle. Ils différencient
les individus. On doit faire les inventaires de personnalité en psychologie du travail, les tests
sont spécifiques au monde du travail, ce ne sont pas des tests cliniques qui visent à déceler des
pathologies. Ce sont des questionnaires, il en existe une grande quantité dont le modèle Big-
Five (modèle en 5 facteurs): facteurs avec une grande stabilité dans le temps et qui se
retrouvent dans différentes cultures. Les 5 dimensions sont l'extraversion/introversion
(opposant sociable à timide, énergique à réservé), la stabilité émotionnelle (opposant calme à
nerveux, équilibré à vulnérable), l'ouverture intellectuelle (opposant curieux à sans
imagination, intérêts variés à peu cultivé), l'amabilité (opposant affectueux à inamical,
aimable à agressif), la conscience (opposant consciencieux à inorganisé, actif à négligent). On
compare toujours les dimensions par rapport à un groupe.

3.3.3.3.3 Les autres outils de sélection

Les tests sont des instruments de mesure qui ont l’avantage de se référer à des critères
explicites, définis, vérifiables. Ils sont généralement complétés par d’autres outils tels que les
questionnaires biographiques (comme un CV mais présenté différemment et/ou avec d'autres
informations), les entretiens (interviews) individuels ou en groupe, les tests de simulation
(exercices de mise en situation, tests «in-basket», «in-tray»), les centres d’évaluation
(assessmentcenters). Les trois objectifs des entretiens sont de faire connaissance avec le
candidat, de l'informer et de recueillir des informations utiles pour l'évaluation. Lors des tests
«in-basket», on remet au candidat une pile de courrier avec des informations, le candidat doit
gérer toutes ces informations. Le test se fait d'abord seul puis les résultats sont présentés
devant un jury. Pour évaluer ce type de test, il faut déterminer les éléments à considérer en
priorité pour résoudre le problème, les différentes actions possibles et leur valeur. Les centres
d'évaluation permettent de tester les compétences professionnelles en situation de groupe, on
mesure le leadership, la gestion de conflit, la relation interpersonnelle. Cela donne un
pronostique sur les compétences futures. La validité des centres d'évaluation est bonne.

3.3.3.4. La remise en question de la perspective classique

Critiques du modèle classique de validation des outils de sélection en termes de validité


pronostique, prise en compte des facteurs situationnels, intérêt du test en tant qu’outil de
diagnostic. Certains rejettent les tests. L'entretien est donc fondamental mais sa validité peut
être mise en cause car il est subjectif.

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Aspects de «négociation sociale»: Rôle des attentes et valeurs du candidat, le candidat peut
demander des informations sur l’emploi postulé, il a un contrôle personnel sur la procédure, il
doit être écouté. Une certaine transparence des tests et autres techniques utilisées, la
possibilité de recevoir un feed-back, une garantie d’objectivité de la sélection, l'assurance
d’être traité humainement, le respect de la vie privée et la confidentialité. La critique du
principe d’une sélection qui ne soit fondée que sur l’application de tests a donné une place à
l’entretien de sélection, au développement de tests «in-basket», aux centres d’évaluation mais
aussi à l'utilisation de méthodes non validées scientifiquement comme la graphologie,
l'astrologie, la numérologie qui sont faits par des non-psychologues. Le candidat peut rejeter
les tests standardisés car ils semblent ne pas avoir de rapport direct avec le poste, les
entretiens sont mieux perçu par les candidats.

3.3.4 Quelques principes déontologiques

L'investigation doit être limitée aux seules perspectives professionnelles (critères fixés au
départ), ainsi que les décisions liées aux dimensions à investiguer. Les critères doivent être
non discutables, non discriminatoires. Les informations sur les épreuves doivent être données
aux candidats. La prise d’informations – références professionnelles ne peut pas être faite à
l'insu de la personne et elle pose la question de la loyauté de l'ancien employeur. Les résultats
sont confidentiels (seul le fait que le résultat est positif ou négatif est transmis au supérieur
hiérarchique). Les décisions doivent être motivées, le candidat a le droit de connaitre les
raisons de son non-engagement. La vie privée doit être protégée.

3.3.5 La discrimination à l'embauche

3.3.5.1 Discrimination F/H à l'embauche

Déséquilibre entre le nombre de secteurs masculins et le nombre de secteurs féminins. Par


«secteur masculin», il faut entendre un secteur où la part d’hommes est supérieure à la part
des femmes dans l’emploi total.

3.3.5.2 Lutte contre la discrimination

La loi: tous les chercheurs d'emploi doivent être traités de la même manière dans leur
recrutement. Lorsque les critères de sélection manquent de justification objective et
raisonnable, il peut y avoir discrimination. On parle de discrimination lorsque la différence de

16
traitement est directement fondée sur le sexe, une prétendue race, la couleur, l'ascendance,
l'origine nationale ou ethnique, l'orientation sexuelle, l'état civil, la naissance, la fortune, l'âge,
la conviction religieuse ou philosophique, l'état de santé actuel ou futur, un handicap ou une
caractéristique physique. Tout processus de discrimination est formellement interdit par la loi
et est un obstacle important sur le marché de l'emploi. Quels sont les mécanismes qui amènent
à la discrimination? Certains peuvent penser qu'on travaille mieux s'il y a peu de différence
dans les équipes. Ça peut aussi être une soumission, on ne veut pas prendre le risque de
déplaire aux clients si on prend quelqu'un de différent mais la diversité peut augmenter la
performance des équipes. Y a-t-il des conditions ou contraintes objectives et incontournables?
Y a-t-il des métiers de femmes et d’hommes? Y a-t-il des limites d’âge propres au poste?
Origine ethnique, nationalité, la couleur, la «race», situation familiale (état civil): y a-t-il une
incompatibilité avec des conditions horaires, géographiques?

Orientation sexuelle, fortune, état de santé actuel ou futur, handicap, une


caractéristique physique: jusqu’où va l’incompatibilité?

Mode de vie: quelqu’un qui ne boit pas d’alcool peut-il représenter une société vinicole?
Conviction religieuse ou philosophique: doit-on tenir compte des orientations personnelles
pour travailler dans des organismes «religieux»? On voit donc l'importance de l’analyse
objective préalable du poste vacant. Par exemple, un handicapé s'est présenté à un poste de
call-center. Ses membres supérieurs étaient trop courts. Il a du passer un test supplémentaire
par rapport aux autres candidats: on a mesuré sa vitesse de frappe. C'est discriminatoire car les
tests doivent être les mêmes pour tous, on n'a pas le droit d'augmenter le niveau d'exigence
pour discriminer. Qu’en est-il du point de vue du candidat? étude Amadieu/Adia (agence
intérim) (2005). 1.950 CV, accompagnés de lettres de candidature, ont été envoyés pour
répondre à 325 offres d'emploi de commerciaux de niveau bac + 2. Six profils ont été
élaborés: un homme blanc de 33 ans, un homme handicapé (mais son handicap, léger, n'a pas
été mentionné sur son CV), un homme de 50 ans, un homme Antillais, un homme obèse, une
femme maghrébine. Sur base du CV, le jeune homme blanc et la personne handicapée (non
déclarée): 54% des réponses positives (respectivement 30 et 24%), le candidat antillais reçoit
21% de réponses positives, le candidat obèse 10%, la candidate maghrébine, pourtant dotée
d'un meilleur CV et résidant en banlieue, 9%, l'homme de 50 ans 6%. Dans la deuxième phase
de l'enquête, 44 entretiens ont été réalisés par cinq candidats (le candidat obèse n'a pas
participé). Taux de succès: le jeune homme blanc: 91,6% (12 entretiens), la candidate
d'origine maghrébine: 66,6% (9 entretiens), le candidat antillais: 66.6% (3 entretiens), le

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handicapé (son handicap a été révélé lors de l'entretien): 46,6% (15 entretiens), le candidat de
50 ans: 20% de réponses positives (5 entretiens) Amadieu recommande de rendre anonyme
les CV, de rendre les entretiens d'embauche moins discriminatoires en intégrant des tests
professionnels, de former les candidats à la technique de l'entretien.

3.3.6 La recherche en sélection du personnel

Le but de la recherche est de valider les méthodes déjà existantes, d'améliorer les qualités
psychométriques des tests et autres méthodes, d'étudier l'usage du testing assisté par
ordinateur afin de mieux contrôler le temps, la développement de tests «adaptatifs», d'étudier
les biais de sélection – ou du sélectionneur, l'usage des TIC: recrutement en ligne, cela permet
le recrutement à distance. Les tests adaptatifs sont des tests d'intelligence dont le niveau
s'adapte en fonction de la réponse, les questions deviennent de plus en plus difficile si on
répond bien et inversement. Cela permet de réduire le temps de passation, le nombre d'item et
de supprimer les items trop difficiles. Cela augmente la validité et diminue la lassitude.

3.4 La socialisation organisationnelle

3.4.1 Accueil des nouveaux engagés

L'individu recruté va intégrer une organisation. On leur donne des informations sur
l’organisation, les mesures de sécurité, les pratiques… Et on les initie aux processus de
socialisation (valeurs, réseaux).

Wanous (1992) décrit 4 étapes dans la phase de socialisation :

• Confrontation et acceptation de la réalité organisationnelle: les attentes de l'individu


rencontrent la réalité organisationnelle.

• Clarification du rôle: familiarisation avec la tâche, définition des rôles et des relations aux
autres.

• Positionnement dans l'ensemble de l'organisation: apprentissage des comportements


acceptés, intégration des valeurs.

• Étape finale: sentiment d’intégration, de réussite professionnelle, acceptation partagée.

3.4.2 Une orientation centrée sur les dispositifs d’insertion

18
Les organisations peuvent mettre en œuvre des procédures susceptibles de favoriser
l'intégration des nouveaux. Delobbe et Vandenberghe (2002) décrivent et comparent des
dispositifs de formation:

• Cours destinés à apporter des connaissances et des compétences utiles à l’exercice du rôle
organisationnel

• Le tutorat, accompagnement par un ancien du jeune recruté

• L’auto-formation, acquisition des connaissances à l’aide de supports écrits, informatiques


fournis par l’entreprise

• Les stages, courtes périodes de travail au sein de différents services

Les formations les plus efficaces sont les dispositifs à forte composante sociale (interaction de
groupe): stage > cours > tutorat > auto-formation. Les résultats montrent que les cours et les
stages s'accompagnent d'une augmentation significative de l'engagement organisationnel et de
la satisfaction.

3.4.3 Une orientation centrée sur le nouvel entrant considéré comme un acteur

On considère ici les stratégies développées par les nouveaux venus dans l'organisation.
Nicholson (1984) propose une théorie des changements des rôles dans les organisations
permettant de décrire les modes d’ajustement des individus à un nouvel environnement de
travail. Deux paramètres sont importants: l'individu obéit aux pressions de l'environnement ou
manipule celui-ci pour faire passer ses vues et changement personnel de l'individu ou pas. Le
croisement de ces deux paramètres aboutit à quatre stratégies:

• Situation de reproduction: passivité c'est-à-dire subir l'environnement et ne pas changer.

• Situation d’exploration: changement de rôle (changer l'environnement) et changement


personnel

• Situation d’absorption: changement personnel, adoption de rôle, la personne évolue pour


rentrer dans le rôle, il n'essaie pas de changer l'environnement.

• Situation de détermination: changement de rôle (il essaie de changer l'environnement),


maintien personnel

3.5 L’évaluation au cours de la carrière

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3.5.1 La place de l'évaluation dans le contexte organisationnel

Pourquoi veut-on évaluer, contrôler les performances des personnes? Aujourd'hui,


l’organisation est orientée vers l’atteinte d’objectifs, il faut être efficace. Il faut donc vérifier
que les buts sont réalisés (modèles néo-rationalistes proposant une gestion non routinière –
non bureaucratique). Avant, dans les sociétés industrielles bureaucratiques, il y avait contrôle
en amont, contrôle de la présence, de la soumission aux consignes, aux ordres. Il y avait une
relation autorité-soumission, le chef décidait et l'employé exécutait selon le principe
Taylorien. Aujourd'hui, le contrôle est en aval sur le résultat, on a un encadrement du travail,
le supérieur est présent pour faciliter le travail. Pour être capable d'évaluer, il faut donc des
outils (grilles, critères, référentiels). Les travailleurs se contraignent par rapport à une norme.
Ils se fixent leurs propres objectifs et assimilent la norme.

3.5.2 Les objectifs et les enjeux de l'évaluation

- Il y a trois types d'objectifs :

• Objectifs administratifs: ce sont des objectifs de gestion: recrutement, promotion,


licenciement, primes, salaires (aide à la décision organisationnelle) → les enjeux sont
économiques, on risque de perdre son emploi.

• Objectifs développementaux: où en est la personne dans son parcours? Faut-il lui donner
des formations? C'est un bilan de compétence. → les enjeux sont personnels, c'est le
travailleur qui se remet en question.

• Objectifs de recherche et validation: le but est d'évaluer les tests et voir s'ils prédisent bien
la performance au travail. Contexte, lieux et professionnels: soit dans l’organisation, soit hors
de l’organisation. → les enjeux sont externes et sont importants pour celui qui a développé
l'outil.

Certaines évaluations sont initiées par l’organisation en vue de primes, augmentations,


avancements et certaines sont initiées par l’individu dans le but d'un changement
d’orientation, d'un bilan personnel ou d'une promotion.

Critères d’évaluation: quelles tâches sont exécutées et à quel degré d’efficacité? (en lien
avec l’analyse du poste). C'est la même chose pour les études, quels sont les critères pour
évaluer si on est diplômable? Le critère ultime est la somme totale des performances de
l’individu (Lévy-Leboyer 2000).

20
3.5.3 Les méthodes d’évaluation

Certaines méthodes sont dites objectives comme le chiffre de vente, d'autres subjectives.

3.5.3.1 Les méthodes objectives

Les méthodes objectives sont par exemple, le nombre d'accidents par an pour un chauffeur-
livreur, le nombre d'incidents par an, le nombre de jour de retard par an, les montants des
ventes. Pour un travailleur de production, le nombre de pièces produites, pour un enseignant à
l'université, le nombre de publications, pour un avocat, le nombre d’affaires ou nombre
d’affaires gagnées, pour un chirurgien, le nombre d’opérations…

3.5.3.2 Les méthodes subjectives: individuelles, comparatives, multiples

Les évaluations individuelles (subjectives): elles sont réalisée soit au moyen d’échelles
standardisées (répondre à des questions à choix multiple sur l'exactitude par exemple: le
travail est d'excellente qualité, les erreurs très rares...) soit par l'utilisation de canevas de
référentiel de compétence. Dans ce dernier cas, le but est de mettre en place une certification
pour un métier donné. Les évaluations individuelles (subjectives) sont aussi réalisées soit par
l’utilisation de canevas d’observation des comportements, soit par la rédaction libre d’une
description des qualités et faiblesses du travailleur évalué. Ces deux derniers éléments sont
plus qualitatif. Le canevas d'observation des comportements est une check-list remplie pour le
poste quand une personne travaille, on note le comportement précis, chaque organisation a sa
propre grille.

Les évaluations comparatives (les travailleurs d’une équipe, service, département, sont classés
entre eux) ont pour but d'évaluer la performance du groupe. Les techniques d’évaluation par
plusieurs évaluateurs (exemple: le supérieur, les subordonnés, les clients, un consultant) ou
«l’évaluation à 360 degrés» dans laquelle une évaluation est fournie par le supérieur, les
subordonnés, les pairs ou les clients et l’évalué lui-même.

3.6 La formation

En période de crise, il y a 2 secteurs de la psychologie du personnel qui sont touchés: la


formation et la sélection. Par contre le processus d'évaluation augmente.

3.6.1 Les objectifs de la formation

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Meignant (2003) considère que la formation peut répondre à trois objectifs différents.
Consolider l’existant: formation directement liée au travail, connaissances complémentaires,
combler une faiblesse, s’adapter à des changements, maintenir à jour les compétences des
personnes principalement dans les domaines complexes où il y a souvent des nouvelles
normes.

Préparer l’avenir: planifier le changement, faire face aux évolutions, à la transformation des
métiers, aux restructurations de l’organisation du travail, à l’implantation de nouvelles
technologies.

Accompagner les mouvements individuels: insertion (le processus de socialisation à


l'arrivée), mobilité professionnelle (changement de job), promotion, suivi d’une procédure
d’évaluation. La formation devient un élément très important car c'est un processus continu
qui accompagne la personne tout au long de sa carrière.

3.6.2 La mise en place d’actions de formation

Il faut une analyse préalable de la demande; une analyse de la situation de travail; une
définition du besoin de formation (par le chef ou par le formé), des objectifs (des besoins de la
formation); une définition de l’action de formation (nature de l’intervention), la formation est
différente de celle reçue à l'école: andragogie (pédagogie des adultes), contextualisation,
étude de cas car la formation à un objectif à court terme en terme d'usage, on ne veut pas
devoir faire de transfert vers le terrain, e-learning (étude au travers des technologies de
l'information et de la communication) principalement pour les langues.

L'évaluation du processus de formation est important (le travailleur est-il content? Intéressé?
Le formateur était-il bon? Est-ce que le travailleur a appris quelque chose? Quel est
l'efficacité de la formation appliquée au champs professionnel? Celle-ci est liée à la
formation, au travailleur et à l'environnement.).

3.6.3 La compétence «Ensembles stabilisés de savoirs, de savoir-faire, de conduites-types,


de procédures-standards, de types de raisonnement, que l’on peut mettre en œuvre sans
apprentissage nouveau» (Leplat & de Montmollin, 2001) ou l’ensemble des savoirs
mobilisables et mobilisés en situation de travail (Joras, 2001).

3.6.3.1 Définition des compétences

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Au contraire de la performance, qui est une action efficiente dans une situation donnée, la
compétence est un potentiel d'action efficiente dans un ensemble de situations. Si on est
compétent, on devrait être performant. On ne peut parler de compétence que lorsque ces
ensembles de ressources sont mises en œuvre dans l’action. La compétence est relative à une
situation ou à un but préétabli. La compétence est invisible; elle est en quelque sorte sous-
jacente à l’activité observable. La performance est visible. Être compétent, c’est faire face à
l’imprévu, c’est parvenir à naviguer dans la complexité. La compétence n’est pas une somme
de savoirs, comme une simple addition. Il s’agit d’une combinatoire où chaque élément se
modifie en fonction des caractéristiques du travail à accomplir. C'est donc combiner ses
savoirs pour résoudre un problème. La compétence est la combinaison de trois facteurs :

• Le savoir agir qui suppose de savoir mobiliser et combiner des ressources pertinentes
(connaissance, savoir, réseaux…)

• Le vouloir agir qui se réfère à la motivation personnelle de l’individu et du contexte plus ou


moins incitatif dans lequel il intervient.

• Le pouvoir agir qui renvoie à l’existence d’un contexte, d’une organisation du travail, de
choix de management, de conditions sociales qui rendent possibles et légitimes la prise de
responsabilité et la prise de risque par l’individu. Le contexte rend légitime l'exercice de la
compétence.

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Références bibliographiques

Psychologie du travail

Traité de psychologie du travail, C. Levy-Leboyer, J-C Sperandio/Ed. PUF - 1987

Les représentations, Numéro Spécial de "Psychologie Française" - 1985

Introduction à la psychologie du travail, J. Leplat, X. Cuny/Ed. PUF - 1977

L'évolution des système de travail, A. d'Iribarne/Ed. Cereq-CNRS - 1981

Changer le travail. Les expériences, les méthodes, les conditions de l'expérimentation sociale,
O. Ortsmann/Ed. Dunod - 1978

L'acteur et le système, M. Crozier, E. Friedberg/Ed. Seuil - 1977

L'organisation du travail et ses formes nouvelles, ouvrage public CEREQ - 1976

Les systèmes hommes-machines, introduction à l'ergonomie, M. de Montmollin - PUF - 1967

La direction scientifique des entreprises, W. Taylor - ED. Dunod – traduction française 1965

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