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« Anticiper, c’est prévoir pour agir »

Sommaire
15 mai 2010

1- Perspective
Crise systémique globale – Du « coup d'Etat de l'Eurozone » à l'isolement tragique du
Royaume-Uni, la dislocation géopolitique mondiale accélère son rythme
Les récentes décisions prises par les dirigeants de la zone Euro confirment les anticipations de LEAP/E2020,
inverses du discours dominant de ces derniers mois, sur le fait que non seulement l'Euro n' « exploserait pas » à
cause du problème grec, mais qu'au contraire la zone Euro sortirait renforcée de cette étape de la crise. On peut
même estimer que depuis la décision de la zone Euro, sorte de « coup d'Etat de l'Eurozone » soutenu par la Suède
et la Pologne, de créer ce vaste dispositif de protection des intérêts de 26 Etats membres de l'UE, la donne
géopolitique en Europe a radicalement changé... (page 2)
2- Telescope
USA - La pseudo-reprise est un acte de foi déconnecté de toute réalité économique
Loin de refléter la réalité, cette reprise correspond plus exactement à une « déprise » pour traduire l'excellent titre
de l'article de Michael Panzner, « the unrecovery », publié le 27/04/2010 dans Seeking Alpha ; ou peut-être en
Français pourrait-on l'appeler la « méprise », sauf qu'elle est bien intentionnelle de la part de Washington et Wall
Street... (page 10)

Du nécessaire coup d'Etat de l'Eurozone à la bonne gouvernance de l'Euroland : Le défi


européen des six prochains mois
L'équipe de LEAP/E2020 estime que les décisions européennes du week-end des 8/9 Mai 2010 consistant à
simultanément affirmer une totale solidarité de l'Eurozone et à placer cette dernière aux commandes de l'UE sont
les bonnes. Elles s'inscrivent parfaitement dans les anticipations et les recommandations publiées dans GEAB depuis
2006 ; et elles reflètent les attentes d'une très large majorité de citoyens de l'Eurozone comme le prouve depuis
quatre ans la quasi-unanimité des réponses au GlobalEuromètre en ce qui concerne la nécessité d'une telle
gouvernance... (page 18)
3- Focus
Recommandations stratégiques et opérationnelles
Devises, Bourses, Or, cash, métaux précieux, banques… (page 22)
4- Le GlobalEurometre
Résultats & Analyses
Le Royaume-Uni apparaît désormais pour 95% des Européens comme un pays qui plonge dans une crise
généralisée… (page 24)

Lettre confidentielle ‘GlobalEurope Anticipation Bulletin’ N°45 - 15 mai 2010


© Copyright Europe 2020 / LEAP – 2010 - ISSN 1951-6177 - Tous droits réservés –
1- Perspective

Crise systémique globale – Du « coup d'Etat de


l'Eurozone » à l'isolement tragique du
Royaume-Uni, la dislocation géopolitique
mondiale accélère son rythme

Comme anticipé par LEAP/E2020 dans les GEAB N°40 (Décembre 2009) et N°42 (Février 2010), le
Printemps 2010 marque bien un point d'inflexion de la crise systémique globale, caractérisé par son
aggravation brutale du fait de l'ampleur insoutenable des déficits publics (voir GEAB N°39, Novembre
2009) et de l'inexistence de la reprise tant annoncée (voir GEAB N°37, Septembre 2009). Les dramatiques
conséquences sociales et politiques de ces évolutions reflètent par ailleurs bien le début du processus de
dislocation géopolitique mondiale, comme anticipé dans le GEAB N°32 (Février 2009). Enfin, les récentes
décisions prises par les dirigeants de la zone Euro confirment les anticipations de LEAP/E2020, inverses du
discours dominant de ces derniers mois, sur le fait que non seulement l'Euro n' « exploserait pas » à
cause du problème grec, mais qu'au contraire la zone Euro sortirait renforcée de cette étape de la crise 1.
On peut même estimer que depuis la décision de la zone Euro, sorte de « coup d'Etat de l'Eurozone »
soutenu par la Suède et la Pologne, de créer ce vaste dispositif de protection des intérêts de 26 Etats
membres de l'UE2, la donne géopolitique en Europe a radicalement changé. Parce qu'elle va à l'encontre
des préjugés qui façonnent leur vision du monde, il va bien entendu falloir quelques mois à la plupart des
médias et opérateurs pour se rendre compte que derrière l'apparence d'une décision budgétaro-financière
purement européenne, il s'agit d'une rupture géopolitique à l'impact mondial.

1
La faiblesse très relative de l'Euro par rapport au Dollar US constitue un énorme avantage compétitif pour les exportations de
l'Eurozone et handicape au contraire les tentatives américaines de réduire le déficit commercial du pays (d'ailleurs le déficit
commercial US s'est accru en Mars 2010). Les prochains mois vont voir cette détérioration s'accentuer. Source : AP/NDTV,
12/05/2010
2
Le Royaume-Uni s'est en effet de facto placé hors de cette protection. Pour notre équipe, c'est une étape de plus franchie par le
Royaume-Uni en direction de la crise historique dans laquelle il va se débattre, tout seul, à partir de l'été 2010. Même le Financial
Times s'est fait l'écho de ce risque croissant. S'il faut faire une comparaison avec la crise du système bancaire de 2008, le Royaume-
Uni ressemble de plus en plus à Lehman Brothers, pilier d'un système qui refuse de s'avouer qu'un opérateur si central puisse être
aussi dangereusement affaibli et qui finit par provoquer un effondrement du système lui-même. Pour pousser l'analogie une étape
plus loin, demandez vous qui va jouer le rôle d'AIG dans les semaines et mois qui suivront ? Source : CNBC, 11/05/2010
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reproduction, la modification, la diffusion ou la re-publication sans l'autorisation préalable et écrite de LEAP (Laboratoire Européen
d'Anticipation Politique) est strictement interdite et constitutive d'une contrefaçon sanctionnée pénalement.
Accroissement actuel des dettes nationales pour les USA, le Royaume-Uni, l'Euroland et le Japon (en
vert : % de la dette par rapport au PIB / en rouge : augmentation prévue de la dette pour 2009 et 2010 / en jaune :
données pour l'Allemagne) - Source : Commission européenne, 2010

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d'Anticipation Politique) est strictement interdite et constitutive d'une contrefaçon sanctionnée pénalement.
Coup d'Etat de l'Eurozone à Bruxelles : Les Etats fondateurs de l'UE en reprennent le
contrôle

Nous analysons donc en détail dans ce GEAB N°45 les nombreuses conséquences pour les Européens et
pour le monde de ce qui peut être appelé le « coup d'Etat » de l'Eurozone au sein de l'UE : face à
l'aggravation de la crise, les Seize ont effet pris le contrôle des leviers de l'UE, construisant de nouveaux
outils qui ne laissent plus d'autre choix aux autres membres que de suivre ou de s'isoler dangereusement.
Dix des onze autres Etats membres ont décidé de suivre, à l'image des deux plus importants d'entre eux,
la Suède et la Pologne qui ont choisi de participer activement au dispositif mis en place par l'Eurozone (les
huit autres sont actuellement, soit en train de négocier leur entrée dans la zone Euro comme l'Estonie dès
20113, soit assistés directement par la zone Euro comme la Lettonie, la Hongrie, la Roumanie, …). C'est
une (r)évolution que notre équipe avait bien anticipée depuis plus de trois ans. Récemment nous avions
même précisé qu'il fallait s'attendre à une évolution rapide de la position de la zone Euro une fois les
élections régionales allemandes et l'élection législative britannique passées. Cependant, nous n'avions pas
imaginé qu'elle se ferait en quelques heures, ni avec une telle audace quantitative (son montant de 750
Milliards €, soit 1.000 milliards USD) et qualitative (prise de contrôle de l'UE par l'Eurozone4 et bond en
avant en terme d'intégration économique et financière).

Toujours est-il que, sans le savoir et sans qu'on leur ait demandé leur avis, 440 millions d'Européens
environ viennent d'entrer dans un nouveau pays, l'Euroland, dont certains partagent déjà la monnaie,
l'Euro, et dont tous partagent désormais l'endettement et les moyens communs de surmonter les
problèmes importants qu'il pose dans le contexte de la crise systémique globale. Les choix budgétaires et
financiers effectués lors du Sommet du week-end du 8 Mai en termes de réponse à la crise de
l'endettement public européen peuvent être appréciés différemment selon l'analyse que l'on fait de la
crise et de ses causes. Et LEAP/E2020 développe ses propres analyses en la matière dans ce GEAB N°45.
Mais, il n'est plus discutable qu'une rupture radicale de la gouvernance de l'Europe vient de prendre
place : une gouvernance collective continentale vient d'émerger brutalement, ironiquement, 65 ans
exactement après la fin de la Seconde Guerre Mondiale, célébrée d'ailleurs en grande pompe à Moscou le
même jour5 et au moment de la célébration de la fête de la création de la Communauté Européenne du
Charbon et de l'Acier, l'ancêtre commun de l'UE et de l'Euroland. Cette simultanéité n'est pas une
coïncidence6 et marque une étape importante dans la dislocation géopolitique mondiale et la
reconstitution de nouveaux équilibres globaux. Sous la pression des évènements déclenchés par la crise,
l'Eurozone a ainsi entrepris de prendre son indépendance par rapport au monde anglo-saxon dont les
marchés financiers restent encore l'expression. Ces 750 Milliards € et cette nouvelle gouvernance
européenne (des 26) constituent la mise en place d'un rempart contre les prochaines tempêtes générées
par l'endettement insupportable de l'Occident, et qui vont affecter le Royaume-Uni puis les Etats-Unis (cf.
GEAB N°44), créant des désordres dont la « crise grecque » n'aura donné qu'un faible aperçu.

3
C'est en Juillet 2010 que la décision finale sera prise. Source : France24, 12/05/2010
4
Le 9 Mai 2010, les 27 ministres des finances de l'UE ont en effet été sommés d'endosser les décisions du sommet de l'Eurozone qui
avait réuni la veille les seize chefs d'Etat et de gouvernement de la zone Euro, faute de quoi l'Eurozone agirait seule et laisserait
donc les onze autres pays dépourvus de protection face à la crise financière. Seul le Royaume-Uni, par réflexe et du fait de sa crise
politique, a refusé le « diktat » mais sans être en mesure de s'y opposer comme il aurait pu le faire il y a encore un an, avant que
son influence ne commence à s'effondrer.
5
Source : RFI, 09/05/2010
6
Non pas que Moscou ait quoique ce soit à voir avec les décisions prises à Bruxelles les 8 et 9 Mai
4
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Le FME privera à terme le FMI de 50% de sa principale contribution, celle des
Européens

A ce propos, LEAP/E2020 souhaite rappeler une vérité que la plupart des médias ignorent depuis plusieurs
semaines : contrairement au discours dominant, le FMI c'est d'abord et avant tout de l'argent
européen. En effet, un Dollar sur trois du FMI est apporté par les Européens, contre seulement un sur
six pour les USA (leur part a été divisée par deux en 50 ans). Et l'une des conséquences des décisions
européennes de ces derniers jours, c'est que cela ne sera plus le cas très longtemps. Notre équipe est
convaincue que d'ici trois ans au plus tard, quand il sera temps de pérenniser en Fonds Monétaire
Européen le fonds d'intervention créé les 8 et 9 Mai 2010, l'UE réduira d'autant sa contribution au FMI. On
peut estimer dès maintenant que cette réduction de la contribution européenne (hors UK) sera d'au moins
50% : cela permettra au FMI de devenir plus global en rééquilibrant automatiquement les parts des BRIC,
et en obligeant dans la foulée les USA à abandonner leur droit de veto7 ; mais cela contribuera également
à le marginaliser fortement puisque l'Asie a déjà créé son propre fonds d'intervention d'urgence. C’est un
exemple qui illustre combien les décisions européennes du début mai 2010 sont grosses de changements
géopolitiques d'envergure à l'échelle des toutes prochaines années. Il est d'ailleurs peu probable que la
plupart des décideurs impliqués dans le « coup d'Etat de l'Eurozone » aient bien compris les implications
de leurs décisions. Mais personne n'a jamais dit que l'Histoire était principalement écrite par des gens qui
comprenaient ce qu'ils faisaient.

Evolution des contributions au FMI par pays/zone (1948-2001) - Source : FMI / Danmarks National
Bank - 2001

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Source : Bretton Woods Project, 19/03/2008
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Le Royaume-Uni : isolé désormais face à une crise historique

L'une des causes et des conséquences à la fois de cette évolution, c'est la complète marginalisation du
Royaume-Uni. Son affaiblissement accéléré depuis le début de la crise, concomitant à celui de son parrain
américain, a créé la possibilité d'une reprise en main complète et sans concessions de l'évolution du projet
européen par les Continentaux. Et cette perte d'influence renforce en retour la marginalisation de la
Grande-Bretagne puisque les élites britanniques sont piégées dans le déni de réalité qu'elles ont
également fait partager à leur peuple. Aucun des partis britanniques, pas même à ce stade les Libéraux-
Démocrates pourtant plus lucides que les autres forces politiques du royaume, ne peut envisager revenir
sur des décennies de discours accusant l'Europe de tous les maux et affublant l'Euro de toutes les tares.
En effet, même si leurs dirigeants se rendaient compte de la folie d'une stratégie consistant à isoler
chaque jour un peu plus la Grande-Bretagne alors même que la crise mondiale passe à la vitesse
supérieure, ils se heurteraient à cet euroscepticisme public qu'ils ont entretenu au cours des années
passées. L'ironie de l'Histoire a encore été bien présente au cours de ce week-end historique des 8/9 Mai
2010 : en refusant de se joindre aux mesures défensives et protectrices communes de l'Eurozone, les
élites britanniques ont de facto refusé d'attraper la dernière bouée de sauvetage qui passait à leur
portée8. Le continent européen va maintenant se contenter de les regarder essayer de trouver les 200
Milliards € dont leur pays a besoin pour boucler le budget de cette année9. Et si les dirigeants londoniens
pensent que les spéculateurs de la City auront des états d'âmes pour briser la Livre sterling et vendre les
Gilts, c'est qu'ils n'ont pas bien compris l'essence même de la globalisation financière10, ni consulté les
nationalités de ces mêmes opérateurs11. Entre Wall Street qui est prêt à tout pour attirer les capitaux
mondiaux (il suffit de demander à la place suisse ce qu'elle pense de la guerre que se livrent les places
financières mondiales), Washington qui se démène pour aspirer toute l'épargne mondiale disponible et un
continent européen qui s'est dorénavant placé sous la protection d'une monnaie et d'un endettement
communs, les jeux sont déjà faits. Nous n'en sommes toujours qu'à l'étape du drame, car les principaux
acteurs anglais n'ont pas encore compris le piège dans lequel ils se sont enfermés ; d'ici quelques
semaines, nous passerons à la tragédie britannique car, à l'été, tout le Royaume-Uni aura identifié le
piège historique dans lequel le pays s'est placé tout seul.

8
A ce sujet, LEAP/E2020 voudrait tordre le cou à la fable monétaire qui circule à longueur de médias économiques et reprise en
cœur par la plupart des économistes : le fait de pouvoir dévaluer sa monnaie à « volonté » n'est pas du tout un facteur
d'indépendance, ni un instrument constructif de sortie de crise ; bien au contraire. D'une part, ces dévaluations sont imposées par
les « marchés », c'est-à-dire par des forces extérieures au pays dont la dernière préoccupation est l'intérêt du peuple concerné par
la dévaluation ; d'autre part, ces dévaluations conduisent inévitablement à un appauvrissement du pays et à sa dépendance
croissante vis-à-vis de ses partenaires aux devises plus fortes qui, dans un système de libre circulation des capitaux, peuvent acheter
les « bijoux de famille » du pays à peu de frais. Le processus en cours dans l'Eurozone, qui impose en effet de difficiles cures
d'austérité, est entrepris dans un cadre collectif avec pour objectif de permettre aux Etats concernés de rétablir des finances
publiques saines tout en préservant les grands équilibres du modèle socio-économique européen. Face à l'Eurozone, le FMI n'est
qu'un acteur secondaire, qui n'est là que pour apporter un peu d'expertise technique et quelques dizaines de milliards d'Euros
d'appoint, dizaines de milliards qui sont une part bien modeste de la grosse contribution des Européens au FMI en 2010 : plus de
30% du total, contre à peine plus de 15% pour les Etats-Unis.
9
Et ce n'est pas parce que c'est un Français qui le dit publiquement, à savoir Jean-Pierre Jouyet, président de l'Autorité française
des Marchés Financiers et ancien ministre des Affaires européennes, que c'est nécessairement faux. Source : Le Figaro, 11/05/2010
10
Comme le souligne fort justement Paul Mason dans son article publié sur la BBC le 11/05/2010, les réactions des marchés vont
affecter le Royaume-Uni et, en matière d'obligations, à la différence des actions, la taille des opérateurs peut faire toute la
différence.
11
Il va être très intéressant de suivre le conflit avec la City que la coalition au pouvoir à Londres déclare vouloir ouvrir en annonçant
qu'elle va morceler les grandes banques britanniques d'ici un an. Source : Telegraph, 12/05/2010
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d'Anticipation Politique) est strictement interdite et constitutive d'une contrefaçon sanctionnée pénalement.
Carte d'une Europe réorganisée en fonction de tendances lourdes actuelles vues par The Economist
(significativement, The Economist place le Royaume-Uni dans la zone des PIGGS du fait de sa situation économique,
budgétaire et financière, avec une dérive vers l'Afrique) - Source : The Economist, 29/04/2010

Ainsi, au moment où l'Euroland émerge à Bruxelles, le Royaume-Uni se débat avec un Parlement indécis,
l'obligeant à passer par un gouvernement de coalition qu'il n'a pas connu depuis 1945 et qui conduira le
pays à de nouvelles élections d'ici la fin 2010.

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Des élites et un peuple britannique dans la difficulté qui vont devoir « penser
l'impensable »

Quoiqu'en disent les protagonistes de la coalition qui s'installe à la tête du Royaume-Uni, LEAP/E2020
estime en effet très improbable que cette alliance puisse durer plus de quelques mois. La structure très
disparate des deux partis concernés (les Conservateurs comme les Libéraux sont très divisés sur nombre
de sujets), conjuguée aux décisions impopulaires, conduit cet attelage tout droit vers des crises internes à
chaque parti et donc à une chute du gouvernement. Les Conservateurs vont d'ailleurs jouer cette carte
car, à la différence des Libéraux-Démocrates, ils ont les moyens financiers de « se payer » une nouvelle
campagne électorale d'ici fin 201012. Mais, l'écueil sous-jacent le plus dangereux est d'ordre intellectuel :
pour éviter la tragédie qui s'annonce, le Royaume-Uni va devoir « penser l'impensable », reconsidérer ses
convictions profondes sur son identité insulaire, sa « nature » trans-atlantique, son rapport à un continent
désormais en voie d'intégration complète, lui qui depuis des siècles pense le continent en terme de
division. Pourtant la problématique est simple : si le Royaume-Uni a toujours estimé que sa puissance
dépendait de la division du continent européen, alors en toute logique, au vu des évènements en cours, il
doit désormais reconnaître qu'il s'achemine vers l'impuissance … et en tirer les conclusions pour lui aussi
effectuer un « saut quantique ». Si Nick Clegg semble équiper intellectuellement pour faire ce saut, ni les
Conservateurs de David Cameron, ni les élites britanniques dans leur ensemble ne paraissent encore
mûres. Dans ce cas, la Grand-Bretagne devra hélas en passer par la case « tragédie »13.

En tout état de cause, ce week-end des 8/9 mai 2010 en Europe plonge nombre de ses racines
directement dans la Seconde Guerre Mondiale et ses conséquences14. C'est d'ailleurs l'une des
caractéristiques de la crise systémique globale telle qu'annoncée par LEAP/E2020 en Février 2006 dans le
GEAB N°2 : elle met « fin à l'Occident tel qu'on le connaît depuis 1945 ».

Une autre de ces caractéristiques est l'envolée du cours de l'or (en particulier par rapport au Dollar US),
face à la crainte croissante concernant l'ensemble des monnaies fiduciaires (voir GEAB N°41, Janvier
2010)15 ; car, pendant que tout le monde parle de l'évolution de l'Euro par rapport au Dollar US, le Dollar
reste à ses niveaux historiques les plus bas quand il est mesuré par rapport à ses principaux partenaires
commerciaux (voir graphique ci-dessous), signe de la faiblesse structurelle de la devise américaine. Dans
les mois à venir, comme anticipé par GEAB, l'Euro va retrouver son niveau d'équilibre de moyen terme,
au-dessus de 1,45$/€.

Dans ce numéro, avant de présenter ses recommandations concernant les devises, la bourse et l'or,
LEAP/E2020 analyse ainsi plus en détail la pseudo-reprise américaine qui est essentiellement une vaste
opération de communication destinée en interne à faire repartir la consommation des ménages (tâche
impossible désormais) et en externe à éviter l'affolement des créditeurs étrangers (au mieux ce seront
quelques trimestres de gagnés). Les Etats-Unis prétendent ainsi pouvoir échapper à une brutale cure
d'austérité, comme les autres pays occidentaux ; alors qu'en fait de reprise, c'est une « déprise » ou une
« unrecovery » comme le titre avec humour Michael Panzner dans un article exemplaire publié le
27/04/2010 dans Seeking Alpha.

12
Source : DailyMail, 04/05/2010
13
Et nous ne nous attardons même pas sur l'émergence croissante de la « question anglaise » au sein d'un Royaume de plus en plus
désuni suite aux « dévolutions » successives qui autonomisent de plus en plus l'Ecosse, le pays de Galles et l'Ulster. Il faut lire à ce
sujet le très intéressant article de Tim Luckhurst, publié le 09/05/2010 dans The Independent.
14
Et même au-delà puisque David Cameron (43 ans) est le plus jeune premier ministre britannique depuis 200 ans et George
Osborne (38 ans) le plus jeune Chancelier de l'Echiquier depuis 125 ans. Cela suffira-t-il ? Rien n'est moins certain puisque les
lecteurs du GEAB savent que nous estimons que la crise remet en cause un ordre du monde établi il y a près de quatre cents ans,
instituant la City de Londres comme place financière mondiale. Peut-être faudra-t-il aller chercher des dirigeants britanniques aux
qualités inconnues depuis plus de quatre cents ans ? Source : Telegraph, 12/05/2010
15
Signe des temps, l'Emirates Palace, l'hôtel le plus luxueux d'Abou Dhabi, vient de mettre en place le premier distributeur
automatique de mini-lingots d'or, en lieu et place des traditionnels distributeurs de billets. Source : CNBC, 13/05/2010
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Evolution du Dollar Index rapporté aux principaux partenaires commerciaux, et de l'index des hausses
et baisses cumulées du Dollar par rapport aux huit devises principales - Source : BCA Research,
Bloomberg, JP Morgan Chase, 04/2010

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2- Telescope

USA - La pseudo-reprise est un acte de foi


déconnecté de toute réalité économique

Dans ce numéro 45 du GEAB, notre équipe a décidé de dévoiler le caractère totalement fictionnel de la
pseudo-reprise américaine. Loin de refléter la réalité, cette reprise correspond plus exactement à une
« déprise » pour traduire l'excellent titre de l'article de Michael Panzner, « the unrecovery », publié le
27/04/2010 dans Seeking Alpha ; ou peut-être en Français pourrait-on l'appeler la « méprise », sauf
qu'elle est bien intentionnelle de la part de Washington et Wall Street.

En effet, cette pseudo-reprise est fondamentalement une vaste opération de communication destinée en
interne à faire repartir la consommation des ménages (tâche pourtant impossible désormais) et en
externe à éviter l'affolement des créditeurs étrangers (au mieux ce seront quelques trimestres de
gagnés). Les Etats-Unis prétendent ainsi pouvoir échapper, à la différence des autres pays occidentaux, à
une brutale cure d'austérité car eux bénéficieraient d'une croissance, même faible.

On est bien loin des promesses de retour rapide à une croissance forte qui accompagnaient le lancement
du plan de stimulation économique de Barack Obama il y a un peu plus d'un an. Mais le plus important
est que même cette « croissance molle » n'est pas au rendez-vous. Les Etats-Unis continuent à s'enfoncer
dans la crise16 qui est devenue une « dépression socio-économique » depuis déjà de très longs mois.
Avec la chute des bourses ces dernières semaines, même Wall Street est maintenant rattrapé par la
réalité, supprimant ainsi le seul facteur (la remontée des cours des actifs financiers) qui avait permis de
faire varier positivement certains indicateurs US.

Sauf à croire que la crise grecque fait à elle seule s'effondrer les bourses US17, c'est bien l'inquiétude sur
l'état désastreux de l'économie US elle-même qui nourrit cette nouvelle dégringolade boursière. D'ailleurs,
le Dollar US a perdu plus de 10% par rapport à l'or en moins de deux semaine : un indicateur fiable de
l'érosion rapide de la confiance dans le Dollar et donc dans la valeur de son garant, l'économie
américaine, qui est en fait insolvable18.

16
Dans le GEAB N°46, notre équipe va analyser en détail l'état réel du PIB américain, car nous estimons qu'il est désormais très en-
dessous des chiffres officiels actuels.
17
Mais dans ce cas, il faut croire que tous les Grecs ont la puissance des dieux anciens ; auquel cas, franchement, leur dette n'est
pas un problème.
18
Il faut lire l'article très documenté à ce sujet posté sur le remarquable blog « Economie et crise aux USA », un blog visiblement
tenu par un expert en la matière.
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d'Anticipation Politique) est strictement interdite et constitutive d'une contrefaçon sanctionnée pénalement.
Evolution du chômage de longue durée aux Etats-Unis (1948 – 2010) (en jaune : nombre de chômeurs
depuis plus de 27 semaines / en rouge : en pourcentage de la population active) - Source : St Louis Fed / BLS /
Clusterstock / Agorafinancial, 05/2010

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Caterpillar, General Motors et le Trésor US : A l'avant-garde de la manipulation
médiatique autour de la pseudo-reprise

Mais, pour bien comprendre l'ampleur du problème et mesurer le fossé croissant entre les déclarations
des décideurs politiques et économiques américains et la couverture médiatique d'une part, et l'évolution
réelle de l'économie des Etats-Unis d'autre part, analysons des cas concrets.

Ainsi, revenons à l'article exemplaire de Michael Panzner cité précédemment. Outre le jeu de mot très
pertinent autour de la pseudo-reprise, il montre, documents à l'appui, comment les grands médias
financiers américains manipulent l'information économique en prenant l'exemple des récents résultats de
Caterpillar, le géant mondial du matériel de construction. Ces résultats ont été présentés dans les médias
comme l'indice d'une reprise en cours suite à une déclaration en ce sens de James Owens, le patron de
Caterpillar, alors que les chiffres de l'entreprise prouvent exactement le contraire : les chiffres du premier
trimestre montrent ainsi une baisse de 21% des résultats de Caterpillar sur le marché nord-américain
alors même que l'année 2009 avait déjà été une année terriblement mauvaise pour l'entreprise. A part
l'Asie, tous les autres continents montrent une forte baisse également. Dommage pour la fiabilité de
l'information que les médias se soient contentés de répercuter les opinions du PDG au lieu d'analyser les
chiffres. Pour compléter cette information, ajoutons que le même James Owens avait déclaré en Avril
2007 qu'il était très confiant dans l'avenir et voyait Caterpillar atteindre sans problème ses objectifs pour
2010 : un vrai prophète professionnel comme on peut le constater !

Si vous avez aimé la manipulation autour des résultats de Caterpillar, vous allez adorer celle autour du
« remboursement » des prêts à General Motors car elle illustre parfaitement la complicité entre les
grandes entreprises, les médias et le gouvernement fédéral pour créer l'impression d'une pseudo-reprise.
Ainsi le 21/04/2010, le nouveau patron de General Motors, Ed Whitacre, annonce via le Wall Street
Journal que son entreprise va tellement mieux qu'elle est en mesure de rembourser 5,8 milliards USD au
Trésor américain. Aussitôt, la presse et le gouvernement américain trompettent l'information pour illustrer
l'efficacité de la politique de l'administration Obama et prouver l'indéniable reprise en cours. En Europe,
les médias qui se contentent de copier-coller les communiqués des agences de presse, reprennent tout
cela d’un seul homme, ajoutant au passage le couplet obligatoire sur la « formidable capacité de rebond
de l'économie US »19. General Motors lance même un clip vidéo pour bien faire passer le message.
Merveilleux, Hollywood n’aurait pas mieux fait ! Hélas, la vérité est bien différente car, en fait, non
seulement GM oublie de préciser qu'il s'agit d'un prêt très secondaire comparé au principal de 49,6
Milliards USD, dont le remboursement est lui renvoyé aux calendes ... grecques. Mais surtout, ce
remboursement est effectué par GM en utilisant un autre prêt fédéral : ce dont le Trésor est bien entendu
conscient alors qu'il participe à la communication sur ce fameux remboursement. En résumé, toute cette
information sur GM remboursant le peuple américain, preuve de la reprise, est un mensonge complet,
mais qui a néanmoins été largement médiatisé aux Etats-Unis et en-dehors, et sert donc à alimenter
l'illusion20.

19
Cela fait partie de leur catéchisme.
20
Shikha Dalmia décrit remarquablement les détails de cette affaire dans un article de Forbes du 23/04/2010.
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d'Anticipation Politique) est strictement interdite et constitutive d'une contrefaçon sanctionnée pénalement.
Immobilier, bons de nourriture, collectivités locales, chômage, prêts, défense, … :
douze exemples récents qui décrivent une économie US en perdition

Les cas Caterpillar et General Motors illustrent le quotidien des informations diffusées sur l'état de
l'économie américaine. Voici quelques autres exemples en vrac :

. 40 millions d'Américains utilisent désormais les bons de nourriture21

. les saisies immobilières stagnent à un niveau très élevé … mais cette stagnation, présentée comme un
signe positif de stabilisation de la crise immobilière malgré son niveau record, n'est en fait que le résultat
d'un embouteillage administratif dans le système judiciaire américain. Il y a tellement de saisies que la
justice a un retard de plusieurs mois dorénavant pour instruire les nouveaux dossiers de saisies
immobilières. Donc, loin d'être un signe positif, c'est en fait l'indicateur d'une double dégradation de la
situation : d'une part l'immobilier continue à se détériorer22 (ainsi, même les biens de plus d'un million
USD sont désormais fortement touchés par les saisies 23), d'autre part le système judiciaire américain
commence à ne plus être capable de faire face aux conséquences de la crise.

Evolution des prêts immobiliers US - Source : T2 partners / Agorafinancial, 10/2009

21
Source : Reuters, 07/05/2010
22
Pour ceux qui se fient aux chiffres récents marquant une légère amélioration, il faut lire cet article publié par CNBC le 23/04/2010
et qui explique comment la fin des crédits fiscaux en Avril va faire replonger le marché.
23
Source : CNBC, 07/05/2010
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d'Anticipation Politique) est strictement interdite et constitutive d'une contrefaçon sanctionnée pénalement.
. les collectivités locales (états fédérés, comtés, villes24) licencient à tour de bras25 alors même qu'elles
bénéficient pour quelques semaines encore des fonds du plan de stimulation économique initié il y a un
an26. New York prévoit le licenciement de 14.000 enseignants d'ici l'été. Et l'Etat de New York vient
d'autoriser le chômage technique sans salaire un jour par semaine pour 100.000 fonctionnaires, soit la
moitié des employés de l'Etat27. L'Illinois ne paye même plus ses factures28. La Californie tombe en
morceaux : 23.000 enseignants en passe d'être licenciés, de nombreux programmes d'aide sociale
annulés, des prisons, postes de police, de pompiers supprimés à travers tout l'Etat, … 29 Des centaines de
villes à travers tout le pays vendent leurs réseaux d'eau potable et d'égouts à des entreprises privées
pour faire des économies de court terme30.

. Ces mêmes collectivités locales multiplient les initiatives encourageant les casinos, les jeux, les ventes
d'alcool ou de marijuana, … afin de générer de nouvelles rentrées fiscales31.

. Les licenciements continuent à se multiplier dans tout le pays32 ; et, dès cet été, 2,5 millions d'emplois
créés ces derniers mois par le recensement vont disparaître … un détail ! La Californie atteint un taux de
près de 25% de chômeurs et personnes sous-employées33.

. les quasi-monopoles fédéraux de prêts immobiliers, les fameuses GSE Freddie, Fannie, ... n'arrêtent pas
de perdre de l'argent trimestre après trimestre, obligeant le gouvernement fédéral à les financer sans fin.
Encore près de 20 Milliards USD à la charge du contribuable pour le seul dernier trimestre. En deux ans et
demi, Fannie Mae tout seul a ainsi coûté à Washington plus que le plan de sauvetage de la Grèce prévu
sur trois ans, soit 136,8 Milliards USD34.

. le secteur de la construction continue à se détériorer avec cependant des informations « à la


Caterpillar ». Ainsi l'effet d'annonce est fait sur une hausse de 0,2% des dépenses en Mars 2010
(nouveau signe de la fameuse « reprise »), mais pour découvrir ensuite que le chiffre de Février a été
fortement révisé à la baisse et que même le chiffre de Mars est en trompe-l'oeil puisqu'en dehors des
dépenses publiques, le secteur connaît un recul de 0,9%, soit la plus faible dépense depuis 11 ans en ce
qui concerne les constructions privées35.

. même la Fed reconnaît que la consommation, nourrie par le crédit, est bien mal partie puisque les
banques US prévoient une baisse des demandes de prêt de la part des consommateurs et des
entreprises36.

. quand à ceux qui pensent que l'Euro à 1,25 USD est une faiblesse pour la zone Euro, ils devraient
réfléchir au coup que cela porte aux espoirs américains de relance des exportations. Plusieurs
multinationales US préparent déjà le terrain pour des chiffres très décevants dans les prochains mois37.

. l'appauvrissement des ménages américains du fait de la crise est phénoménal (100.000 USD en
moyenne entre 2008 et 2009) et il pèse directement sur tout l'avenir économique et social du pays. La
rechute actuelle des bourses va accentuer à nouveau cette évolution38.

24
Forbes décrit ainsi dix grandes villes américaines en « chute libre » dans un article du 10/04/2010.
25
Sources : New York Times, 11/05/2010
26
Comme le titre de manière éloquente CNNMoney du 09/05/2010, « Goodbye stimulus. Hello State Budget cuts », la suite
s'annonce encore plus douloureuse pour des millions d'Américains. Et dans le New York Times du 28/04/2010, Gail Collins crée une
nouvelle catégorie d'Etats à côté des « Rouges » et des « Bleus », Républicains et Démocrates, à savoir les « En Faillite ».
27
Source : New York Times, 10/05/2010
28
Source : CNBC, 13/05/2010
29
Source : BusinessInsider, 11/05/2010
30
Source : USAToday, 21/04/2010
31
Source : Wall Street Journal, 11/05/2010
32
Le site Daily Jobs Cuts constitue un instrument utile de suivi au quotidien des licenciements à travers tous les Etats-Unis.
33
Source : DoctorHousingBubble, 18/04/2010
34
Sources : Bloomberg, 10/05/2010 ; FoxNews, 05/05/2010
35
Source : MarketWatch, 03/05/2010
36
Source : CNBC, 03/05/2010
37
Source : Bloomberg, 29/04/2010
38
Source : Bloomberg, 28/04/2010
14
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. et pour couronner le tout en matière de déficits incontrôlés, même le New York Times, pourtant très
pro-Obama, reconnaît que la nouvelle loi sur la santé va en fait accroître le montant des dépenses de
santé … sachant que personne ne sait comment elle sera financée in fine39.

Quand à l'état fédéral, il développe déjà un discours d'austérité, mais déguisé en discours de
« modernisation ». Le cas le plus éloquent est le secteur de la défense où Robert Gates, Secrétaire à la
Défense, commence à mettre en musique un fait très simple, anticipé dans GEAB depuis plus de trois
ans : les Etats-Unis n'ont plus les moyens de se payer leur immense appareil militaire 40. Ainsi, Robert
Gates annonce-t-il qu'il faut désormais se débarrasser des « vieilles idées » qui font reposer la puissance
militaire US sur de coûteux systèmes d'armes comme par exemple les porte-avions 41 et les sous-marins
nucléaires42 ; et donc que les militaires américains doivent préparer des coupes sombres dans tous les
grands systèmes d'armement. Dans l'Histoire cela a un nom : cela s'appelle théoriser le déclin.

Evolution des déficits budgétaires US (2009-2019) (en marron : prévisions de l'administration Obama / en gris
: estimations du Congress Budget Office) - Sources : Chrisamico / US Treasury / CBO, 05/2010

39
Concernant l'impasse budgétaire du pays, il peut être intéressant de lire la parabole sur la ruine d'une nation parue dans Slate du
21/02/2010.
40
Avec le niveau de revenus fiscaux le plus bas depuis 1950, Washington est sans le sou. Source : USAToday, 12/05/2010
41
Source : Defense News, 03/05/2010
42
Source : Armed Force Journal, 05/2010
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La pseudo-reprise économique US : Un acte de foi qui perd de plus en plus de
croyants chaque jour

Ces exemples pointent tous vers un paramètre très important pour anticiper les chocs des prochains
mois : la reprise n'est pas un fait, mais un acte de foi. Tout l'édifice économique, financier et budgétaire
américain (et donc mondial) repose désormais uniquement sur des facteurs psychologiques. S'il y en a
que cela rassure parce qu'ils y voient la preuve que des manipulations efficaces permettront au système
actuel de survivre, LEAP/E2020 n'est pas de ceux-là. Pour notre équipe, c'est la preuve que désormais
l'ensemble du système international est à la merci d'un vent de panique, à l'image de la chute historique
de 10% du New York Stock Exchange du 6 Mai 2010. Personne ne comprend exactement ce qui s'est
passé. Visiblement les pare-feux automatiques empêchant les baisses trop fortes de Wall Street n'ont pas
fonctionné et il a fallu avoir recours d'urgence à la Plunge Protection Team (car la hausse tout aussi
brutale survenue deux heures après la chute n'a rien de « naturelle » non plus). Soixante-dix pour cent
des volumes de Wall Street correspondant désormais à des ordres informatiques gérés uniquement par
des systèmes automatisés, les variations de cours n'ont plus qu'un très lointain rapport avec la réalité. Et
on peut imaginer très sérieusement, lors du prochain grand choc, un scénario à la « Terminator », les
ordinateurs détruisant les bourses mondiales parce que la complexité du système est telle que personne
ne comprend les interactions en cas de situation imprévue. Avec plus de 1.000 Milliards USD envolés en
dix minutes, il faut avoir beaucoup de courage ou d'inconscience dans les mois à venir pour confier sa
fortune aux bourses mondiales … même si on est un ordinateur (peut-être en compte-t-on désormais
parmi les lecteurs de GEAB, d’ailleurs !)

Au-delà de l'économie, et parallèlement à ces évolutions, le tissu socio-politique des Etats-Unis se déchire
de plus en plus avec le renforcement des tendances sécessionnistes43. On a en effet désormais dépassé
en la matière la phase de la simple émergence décrite par LEAP/E2020 il y a plus de deux ans : les forces
centrifuges s'exercent maintenant publiquement et sont sorties des marges de la politique américaine.
Chris Hedges, journaliste reconnu, récompensé par un prix Pulitzer, montre bien l'importance de cette
évolution dans le remarquable article « The New Secessionists » publié par ThruthDig le 26/04/2010. La
moitié des Etats américains sont désormais affectés par l'activisme croissant de ces mouvements qui se
dégagent du traditionnel réflexe « sudiste » pour toucher des parties du pays totalement étrangères à la
Guerre de Sécession du XIX° siècle. Ils se nourrissent d'un rejet d'un système fédéral perçu désormais
comme une marionnette des grandes entreprises américaines et sont donc également porteurs d'une
revendication sociale qui trouve un écho certain dans un pays où des dizaines de millions de gens sont
sans emploi. Entre la mouvance à tendance d'extrême-droite des Tea Parties et ces nouveaux
sécessionistes qui compteront dans nombre d'élections en Novembre prochain, LEAP/E2020 confirme que
ce sont ces nouveaux acteurs qui vont déterminer le cours des évènements à partir de la fin 2010 ; et
non pas les rapports de force traditionnels Démocrates/Républicains. En période de crise, ce sont les
marges dynamiques qui font l'agenda. En l'occurrence, ce sont tous ces mouvements qui ont perdu la foi
dans la reprise économique américaine.

43
Et nous ne faisons que mentionner le phénomène nouveau et en plein développement du renoncement à la nationalité américaine
par les expatriés américains. Source : New York Times, 25/04/2010
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Evolution de l'épargne nette du gouvernement fédéra US (1986 – 2016) en fonction du meilleur
scénario de reprise (en rouge : montant en milliards USD / en bleu : en pourcentage du PIB) - Source : Itulip,
2009

Pour conclure, il nous paraît utile de citer cette analyse: « Il y a trois ou quatre scénarios possibles qui
feront chuter l'empire. Une possibilité est une guerre avec l'Iran. Une autre est que les Chinois arrêtent
d'acheter les Bons du Trésor US. Même si cela n'arrive pas, l'infrastructure du pays est en pleine
décadence. C'est un processus plus lent. Et les problèmes de l'économie ne sont pas du tout résolus : ce
n'est qu'écrans de fumée et mirages. C'est pour cette raison que le prix de l'or est si élevé. L'économie et
l'incapacité à arrêter les guerres seront suffisantes à elles seules pour nous faire tomber. Il n'y a pas
d'échappatoire à notre sur-extension impériale ». Elle est formulée par Thomas Naylor, professeur
d'économie à l'université Duke et l'un des théoriciens du nouveau sécessionisme. Et le fait qu'elle recoupe
certaines des anticipations de LEAP/E2020 ne veut pas dire que nous sommes des sécessionnistes
américains, ni qu'il soit un spécialiste européen d'anticipation politique, mais que deux points de vue très
différents arrivent aux mêmes conclusions. Ce qui n'est pas une preuve de véracité, mais doit être pour le
moins un motif de réflexion sérieuse. D’ailleurs, Edmund Conway, peu suspect d’hostilité à Washington,
ne dit pas autre chose dans son éditorial publié dans le Telegraph du 15/05/2010 sous le titre « Les
Etats-Unis vont affronter l’une des plus grandes crises budgétaires mondiales ».

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Du nécessaire coup d'Etat de l'Eurozone à la
bonne gouvernance de l'Euroland : Le défi
européen des six prochains mois

Soyons très clair : l'équipe de LEAP/E2020 estime que les décisions européennes du week-end des 8/9
Mai 2010 consistant simultanément à affirmer une totale solidarité de l'Eurozone et à placer cette dernière
aux commandes de l'UE sont les bonnes. Elles s'inscrivent parfaitement dans les anticipations et les
recommandations publiées dans GEAB depuis 200644. Et elles reflètent les attentes d'une très large
majorité de citoyens de l'Eurozone comme le prouve depuis quatre ans la quasi-unanimité des réponses
au GlobalEuromètre en ce qui concerne la nécessité d'une telle gouvernance. Mais les mesures
économiques et financières prises ne sont qu'une première étape tandis qu'au niveau politique, les
dirigeants des pays de la zone Euro ont six mois pour apprendre à devenir des gouvernants crédibles de
l'Euroland.

Revenons rapidement sur le contexte : face au choc de l'endettement public occidental qui va marquer
dans les mois à venir une étape cruciale de la dislocation géopolitique mondiale, il était urgent que
l'Eurozone, et autour d'elle les membres de l'UE à même de le faire 45, se dégage de leur dépendance du
monde anglo-saxon, épicentre du séisme en cours. Même si cela crée de puissants remous, il était
nécessaire de se dégager des parages du navire en train de sombrer que sont les Etats-Unis et de poser
un ultimatum suivi de conséquences radicales aux pays européens qui refuseraient une telle politique. En
toute logique, cela a abouti à la marginalisation institutionnelle du Royaume-Uni (reflétant son
affaiblissement structurel depuis le début de la crise). La principale conséquence politique est que les pays
fondateurs du projet communautaire en reprennent les rênes afin de pouvoir tenir le bon cap dans la
tempête : le cap des intérêts collectifs de 440 millions d'Européens, et non pas de celui de quelques
milliers d'opérateurs financiers à Wall Street et à la City46.

C'est ce qui a été fait le week-end des 8 et 9 Mai 2010. La tournure de plus en plus violente que prend la
« guerre de velours » intra-occidentale47 autour de l'accès aux financements des déficits publics ne laissait
plus d'autre choix aux dirigeants de la zone Euro. Le seul regret de LEAP/E2020 est qu'ils n'aient pas agi
plus tôt, comme nous le recommandions. C'est d'ailleurs un des grands défis qui les attend dans les mois
à venir : apprendre à anticiper les évolutions pour l'Euroland, car gouverner c'est prévoir. Et il va donc
falloir que les dirigeants européens apprennent à prévoir pour l'ensemble de l'Euroland et du continent
européen, en considérant qu'ils sont dans un environnement conflictuel, y compris avec leurs « alliés »
occidentaux. Nous avons conscience qu'il s'agit d'une révolution intellectuelle pour la plupart d'entre eux ;
mais elle est la conséquence logique du « coup d'Etat » des 8/9 Mai 2010.

Attardons-nous sur cinq conséquences stratégiques essentielles de cette rupture historique:

1. En expulsant le Royaume-Uni de la gouvernance européenne (par le simple fait de créer cette


dernière) et en édifiant une muraille de solidarité continentale européenne autour de l'Eurozone,
les dirigeants européens ont de facto « relevé le gant » que leur avaient jeté la City et Wall Street
(et derrière eux Londres et Washington). Face à la tentative de briser l'Eurozone, et ainsi tout le
projet d'intégration européenne, les Européens continentaux ont répondu : « Hors de question !
Et nous franchissons d'ailleurs une nouvelle étape irrévocable dans l'intégration en mutualisant
notre endettement et nos risques budgétaires ». Cette réponse est évidemment considérée
comme particulièrement insolente par des puissances habituées à traiter l'Europe continentale
comme une vassalité depuis plus de soixante ans. Et elle entraine (et entraînera pour encore
quelques mois) des tentatives de rétorsions brutales. On ne sort pas d'un Empire en toute
impunité; ni en croyant qu'il n'y a pas un combat à livrer. Or, c'est bien d'une sortie de l'Empire
44
Et, par exemple, nous nous félicitons du chœur de dirigeants européens appelant depuis une quinzaine de jours à la création
d'une agence de notation européenne comme nous le recommandions fortement il y a un mois dans le GEAB N°44.
45
C'est-à-dire tous sauf le Royaume-Uni.
46
Pour LEAP/E2020, ce sont eux qui désormais détiennent l'essentiel de la réalité du pouvoir américain et britannique, avec à
Washington une participation active du pouvoir militaire. Et si, hélas pour elles, les populations américaines et britanniques ne
peuvent pas s'en libérer, il n'y a aucune raison pour que les Européens continentaux ne le fassent pas de leur côté.
47
Voir GEAB N°44
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américain qu'il s'agit, et du rejet de son représentant local, le Royaume-Uni. Les dirigeants de
l'Euroland doivent donc être préparés à faire face à des attaques sur l'Euro (on est en plein
dedans), à des attaques médiatiques sur les dirigeants européens, à des tentatives de diviser les
opinions publiques européennes48, … La domination anglo-saxonne sur la sphère médiatique
mondiale oblige à considérer cet aspect comme particulièrement important car, non seulement
elle offre une audience très grande à ces rumeurs, mais en plus nombre de pays européens ont
une grande presse qui se contente de répéter les informations qu'elle diffuse. Le cas français est
en particulier très critique : le centralisme parisien cumulé avec l'américanisme au pouvoir dans
les élites parisiennes depuis quelques années a fait de la presse française la plus américaniste
d'Europe. Les principaux médias hexagonaux n'ont de fait pratiquement plus aucun sens critique
face aux informations diffusées par Washington. Les Européens, et les Français en particulier,
doivent donc réapprendre à avoir une presse indépendante et critique. Que les chefs d'Etat et de
gouvernement de l'Euroland, les Ministres des Finances, les patrons de banques centrales, … et
les grands groupes médiatiques européens, prennent bien conscience de cela : quand on veut
être un acteur mondial indépendant, il faut s'en donner les moyens. Et s'assurer que sa propre
presse ne « roule » pas pour des intérêts adverses est essentiel. Il s'agit ici de permettre au cœur
du métier de journalisme européen la notion d'indépendance intellectuelle et d'esprit critique.

2. Nous faisons confiance à la technostructure communautaire pour produire d'ici la fin de l'année
une série de recommandations institutionnelles et procédurales mettant en forme la gouvernance
de l'Euroland49. Cette technostructure est en effet très stimulée par cette nouvelle opportunité
d'accroître son influence tout en remplissant son destin programmatique : faire progresser
l'intégration européenne. Le défi institutionnel ne repose donc pas sur la machinerie
administrative : il est de nature politique et démocratique. Le « coup d'Etat » des 8/9 Mai est
aussi un bond en avant politique qui s'est effectué sans mandat démocratique alors même qu'il lie
irrémédiablement le destin de 440 millions d'Européens. Même si LEAP/E2020 est convaincu qu'un
tel acte était nécessaire, nous sommes tout aussi convaincus qu'il aurait pu être préparé
politiquement pour y associer au moins le Parlement européen ; surtout qu'il va falloir associer les
citoyens européens à la mise en place de la gouvernance européenne qui en résulte. Sans un tel
ancrage démocratique, cette gouvernance restera fragile et sera incapable de faire face aux chocs
des prochaines années de la dislocation géopolitique mondiale. Il s'agit donc d'un impératif en
termes d'efficacité tout autant qu'en termes de morale politique. Les deux grandes options qui
s'offrent en la matière sont d'une part la création d'un Parlement de l'Euroland, constitué pour les
décisions spécifiques à l'Euroland, des seuls membres du Parlement européen issus des Etats
appartenant à l'Euroland; et d'autre part, la tenue d'un référendum trans-Euroland en 2011/2012
pour valider les grands équilibres de la gouvernance de la zone telle qu'elles seront définies d'ici la
fin 2010. Les dirigeants européens doivent avoir conscience que contrairement à ce que répète un
grand nombre de médias et d'experts, la très grande majorité des citoyens de la zone Euro (y
compris en Allemagne) sont en faveur d'une gouvernance de l'Euroland, mais à condition qu'ils
soient impliqués via un processus démocratique. Il s'agit cette fois-ci de ne pas répéter les erreurs
du projet de Constitution européenne dont E2020 avait anticipé l'échec des référendums français
et néerlandais dès Octobre 2004 : il faudra cette fois-ci un référendum trans-Euroland (et non pas
des ratifications nationales dispersées) et un texte très court et compréhensible intégrant un
contrôle électoral démocratique par les citoyens.

3. En terme de communication, il est urgent que les dirigeants de l'Euroland prennent la parole pour
expliquer les décisions des 8/9 mai derniers aux populations de l'UE. Selon LEAP/E2020, pour
qu'elles soient efficaces, il est nécessaire que ces communications se fassent en tandem ou trio
européens (Merkel-Sarkozy-Zapatero, Trichet-Barroso-Van Rompuy, ..., par exemple) afin
d'illustrer la solidarité européenne et la nouvelle gouvernance commune. Et ces communications
doivent déjà mettre en perspective l'intégration de processus démocratiques de contrôle à la
nouvelle gouvernance européenne en gestation, afin de susciter l'adhésion forte des citoyens.

48
La rhétorique traditionnelle visant à essayer de diviser les pays plus riches des plus pauvres, à interpréter une communauté de
destin comme un jeu à somme nulle où certains paient et d'autres profitent, à valoriser les égoïsmes … En clair, l'arsenal habituel de
la propagande politique de temps de guerre : plusieurs responsables de LEAP/E2020 se souviennent de tentatives identiques par
l'URSS dans les années 1980 quand cette dernière sentait sa fin proche. Rien de nouveau sous le soleil en la matière !
49
Le Spiegel du 12/05/2010 a déjà des idées allemandes très précises sur la question.
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d'Anticipation Politique) est strictement interdite et constitutive d'une contrefaçon sanctionnée pénalement.
4. La meilleure défense étant l'attaque, les dirigeants européens doivent se préparer à prendre deux
types d'initiatives qui leur sont totalement étrangères. D'une part, ils doivent signaler clairement à
Washington et à Londres que toute attaque directe en direction de l'Euroland sera sanctionnée
immédiatement. Etant donné l'état réel du Dollar et de l'économie US, comme celui de la Livre et
de l'économie britannique, quelques déclarations brutales et bien ciblées à leur sujet par des
responsables éminents de l'Euroland suffiront à calmer les ardeurs des dirigeants de Wall Street
ou de la City. Il est par exemple inacceptable que Paul Volker, conseiller économique du président
américain, se permette de faire des commentaires publics négatifs sur la pérennité de l'Euro
comme il vient de le faire à Londres le 14/05/201050. Cette sortie illustre le degré d'agressivité qui
existe désormais à Washington face à la sortie des Européens hors de l'orbite US. Mais elle ne
doit pas être tolérée par l'Euroland. Un message clair doit être passé. Et si cela se reproduit, il
faut que les Européens disent clairement qu'ils estiment que la reprise économique US n'est que
de la poudre aux yeux et que le plan de stimulation d'Obama a échoué. Une seule déclaration de
ce type calmera très vite les esprits à Washington 51. L'Euro n'a pas d'amis à Washington et
Londres. C'est ce que Merkel, Sarkozy et autres doivent vite comprendre. Après avoir nié que
l'Euro puisse exister, puis qu'il puisse être une devise plus forte que le Dollar US, et enfin qu'il
puisse survivre à une crise forte, les élites anglo-saxonnes enragent aux décisions du week-end
dernier et redoublent donc d'agressivité. Surtout que nombre d'opérateurs de Wall Street et de la
City perdent actuellement beaucoup d'argent du fait de leur pari perdu sur une rupture de la zone
Euro. La BCE a très bien joué début Mai en faisant croire qu'elle n'assouplirait pas les conditions
de prise en pension des actifs de l'Eurozone, provoquant du coup une surenchère des
spéculateurs, pris ensuite au dépourvu quand elle a finalement fait le contraire à l'issue du week-
end du 8/9 Mai. D'ailleurs, les taux sur les emprûnts grecs, espagnols, portugais, ... sont
redevenus normaux d'un seul coup ; et c'était bien l'objectif des décisions européennes 52.
L'actuelle baisse de l'Euro résulte des conséquences de cette opération comme nous l'analysons
dans nos recommandations. Autre exemple d'actions à lancer rapidement par l'Euroland pour
renforcer son indépendance et sa capacité d'action : la tenue d'un sommet Euroland/BRIC pour
discuter de la future gouvernance mondiale. Ce type de signaux ramènera beaucoup de monde à
la raison.

5. Last but not least, en termes financiers et budgétaires, les mesures prises n'ont pas encore
intégré l'ampleur de la crise en cours. LEAP/E2020 avait anticipé dans les GEAB précédents les
effets inévitables du « nœud coulant » des déficits publics. L'austérité n'était pas évitable et ceux
qui sont surpris aujourd'hui par cette évolution devraient arrêter immédiatement d'écouter ou de
lire leurs médias et experts habituels53. La croissance n'est pas au rendez-vous de l'Histoire des
prochaines années : ni en Europe, ni aux Etats-Unis, et probablement pas tant que cela en Asie.
Mais ces mesures d'austérité (que Washington sera forcé de prendre aussi d'ici l'hiver 2010/2011)
ne suffiront pas car, en Europe, il est essentiel de préserver la cohésion sociale et donc le socle
des services publics et sociaux. D'ici la fin 2010, les impôts directs sur les hauts revenus vont être
augmentés54 car ne pas le faire sera intenable politiquement et socialement et car ces mêmes
hauts revenus n'auront pas vraiment d'alternatives puisque ce sera un phénomène général. Les
dirigeants européens doivent cesser d'accorder la moindre importance aux recommandations de
l'OCDE ou du FMI en la matière qui n'ont aucune compréhension des contraintes politiques et
sociales générées par la crise. S'ils veulent être réélus et rétablir la santé des finances publiques
de leurs Etats respectifs, les dirigeants européens doivent s'engager sur cette voie dès la fin de
cette année.

50
Et nous ne parlons même pas des déclarations de Barack Obama sur la nécessaire austérité en Espagne alors que lui même
enfonce son pays dans un endettement toujours plus ingérable et qu'il n'a engagé aucune réforme de fond pour supprimer la
dépendance à l'endettement de l'économie US. Là aussi un petit rappel européen serait utile. Sources : CNBC, 14/05/2010 ; Reuters,
11/05/2010 ; Le Monde, 04/05/2010
51
Il est ainsi significatif de la crainte croissante des dirigeants américains concernant leur dette que Paul Krugman se sente obligé de
faire un éditorial dans le New York Times du 13/05/2010 intitulé « Nous ne sommes pas la Grèce » … qui suscite d'ailleurs une
masse de commentaires concluant exactement l'inverse.
52
Source : MarketWatch, 14/05/2010
53
Pour un état des lieux concernant les plans d'austérité en Europe, voir Le Monde du 13/05/2010
54
Le débat français sur le « bouclier fiscal » devient ainsi surréaliste. Il n'a aucun avenir et conduit tout droit le parti au pouvoir à
des défaites électorales successives comme celles des dernières élections régionales. Source : Reuters, 11/05/2010
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d'Anticipation Politique) est strictement interdite et constitutive d'une contrefaçon sanctionnée pénalement.
Ainsi pour LEAP/E2020, la zone Euro a choisi les grandes orientations stratégiques qu'il fallait en ce mois
de Mai 2010. Elles témoignent d'une accélération de la crise géopolitique mondiale et d'une fragmentation
accélérée de l'Occident en des camps désormais adverses. Ces décisions marquent une (r)évolution de la
gouvernance européenne et une nouvelle étape de l'intégration du continent, qui doit être accompagnées
par un processus démocratique pour être efficace et durable. Les mois et trimestres qui viennent vont
notamment être marqués par un fort durcissement des relations entre l'Europe continentale et les Etats-
Unis.

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3- Focus

Recommandations stratégiques et
opérationnelles

Nous rappelons que nos recommandations ne sont pas à but spéculatif, donc de court terme, qu'elles ne
visent pas à gagner plus, mais plutôt, à perdre moins (voire pas du tout) car dans le cas d'une crise
systémique globale comme celle que nous connaissons, c'est le seul objectif rationnel.

Devises : La tempête va se renforcer – ne pas confondre les vagues avec la marée !


Comme annoncé dans le GEAB précédent, la tempête fait rage sur le marché des devises ; et elle va
s'accentuer. Au sein d'une tempête, personne ne peut prévoir avec précision la taille de chaque vague, ni
si nous sommes au milieu de ces vagues en terme de devises.
Nous estimons en effet que nous sommes parvenus à un point crucial de la crise (le nouveau point
d'inflexion annoncé en Décembre 2009 pour le Printemps 2010) et que cette transition vers un nouvel état
du système international génère des turbulences monétaires majeures. A court terme, les évolutions sont
déterminées par la spéculation des grands opérateurs et la guerre psychologique conduite via les grands
médias financiers. La zone Euro a réussi à « mater » la tentative de briser sa cohésion du fait de l'envolée
du coût de l'argent pour les pays du Sud de l'Europe. Elle doit maintenant faire face à une double attaque
conduite notamment par les spéculateurs (hedge funds et grandes banques US et britanniques) qui
avaient pris d'énormes positions contre l'Euro avant le Sommet des 8/9 Mai, pensant que l'Eurozone serait
incapable de s'organiser efficacement. Or, ces dernières ont été prises totalement à contrepied par les
décisions européennes et elles sont donc actuellement à la manœuvre pour se débarrasser de ces paris
ratés. Quand on a leurs moyens pour influencer le marché à court terme, on a une option idéale :
maintenir artificiellement la tendance quelques temps encore afin de disposer d'un nombre suffisant de
« pigeons » pour parier sur l'Euro à la baisse et en profiter pour se repositionner sur la monnaie
européenne à la hausse. Ceux qui se souviennent de l'évolution du cours du pétrole en 2008
comprendront très bien le mécanisme.
L'autre vecteur de l'agression sur la monnaie unique européenne vient de Washington et Londres. Cette
dernière, pour masquer le plus longtemps possible l'impasse complète dans lequel se trouve le Royaume-
Uni ; et Washington, car le financement de son endettement devient de plus en plus problématique, avec
en plus, pour certains dirigeants US, la fureur de voir la zone Euro s'indépendantiser. Deux bonnes raisons
d'en rajouter sur la situation et/ou la pérennité de l'Euro.
Mais, le problème, c'est que le Dollar perd de la valeur par rapport à l'or et aux principales devises de ses
partenaires commerciaux (Australie ou Canada par exemple, une baisse de 10% depuis le début 2010).
Pour notre équipe, on assiste donc actuellement à une variation totalement déconnectée de la tendance
longue Euro/Dollar, qui n'a aucune raison de durer. Le taux d'équilibre actuel se situe autour de 1,45 et
nous estimons qu'il sera retrouvé d'ici la fin 2010. A partir de l'hiver 2010/2011, au moment où les Etats-
Unis seront rattrapés par la crise de leur endettement et où la marée des flux financiers internationaux se
retirera, le Dollar plongera à nouveau vers des plus bas historiques.
Dernière remarque sur le court terme : le taux actuel Euro-Dollar est un facteur de fort dynamisme pour
les exportations européennes et va créer à l’inverse une dégradation accrue du déficit commercial US ; ce
qui en soi illustre déjà l'un des moteurs de la prochaine remontée de l'Euro

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Les boursiers en danger
Notre conseil en la matière est très simple : sortez du marché des actions pour les mois à venir ; quittez
les bourses. Plusieurs phénomènes se conjuguent pour que nous émettions un conseil si radical et si
général :
. l'exemple récent du NYSE et sa baisse « mystérieuse » de 10% en quelques minutes démontre que les
bourses mondiales sont devenues tellement automatisées en quelques années que plus personne ne peut
prévoir leurs évolutions en cas de situations critiques ou limites. Or la crise est justement caractérisée par
le fait qu'elle multiplie ce type de situations. Le degré d'imprévisibilité des mouvements boursiers va donc
s'accroître dans les prochains mois.
. les projets législatifs de contrôle des banques et des opérateurs financiers, actuellement en discussion
ou en promulgation un peu partout dans le monde, génèrent des attitudes très menaçantes des
principaux opérateurs concernés qui tentent de faire reculer les législateurs en alimentant l'instabilité
boursière, tout en l'attribuant aux projets législatifs en discussion. Cette instrumentalisation des bourses
au service des intérêts des gros opérateurs rend donc encore plus imprévisible leurs évolutions. Et la
quasi-certaine mise en place de réglementations plus strictes des marchés financiers conduit à penser que
la rentabilité des opérations financières sera fortement réduite, sans même évoquer leur inévitable
taxation accrue pour financer les déficits publics. Ce n'est donc pas seulement le secteur financier qui est
à fuir, mais toute l'activité boursière, sauf si on veut spéculer et prendre de gros risques.

L'or, le cash, les métaux précieux et les banques


L'or et les métaux précieux sont bien entendu les placements par excellence actuellement. Mais toujours
uniquement sous forme physique, pas de certificats ! Et le cash redevient roi tant que les rémunérations
d'autres placements ne remontent pas.
Attention aux banques : on entre à nouveau dans une période où elles certaines d'entre elles vont devoir
reconnaître qu'elles sont insolvables ; et pas seulement aux Etats-Unis où les faillites bancaires
s'accélèrent.

Evolution des faillites des banques US assurées par la FDIC (2007 - 04/2010) (en gris : nombre de
faillites / en marron : capital cumulé / en rose : montant cumulé des dépôts bancaires) - Sources : JY Bourmaud /
FDIC / LEAP, 05/2010

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4- Le GlobalEurometre 55

GlobalEurometre de Mai 2010 - RESULTATS

Oui Non Ne sait


GlobalEurometre 05-2010 % % pas
%
1. Pensez-vous qu’un secrétariat politique et économique permanent 90
10 0
de la zone Euro devrait être instauré ? (98)56
2. Trouvez-vous que le gouvernement de votre pays reflète les
14 84 (99) 2
attentes de votre peuple en matière de construction européenne ?
3. Pensez-vous que des forces anti-démocratiques soient en
95 (75) 13 2
augmentation dans l’Union européenne ?
4. Dans les mois à venir, échangeriez-vous vos Euros contre l’une de
9 80 (96) 11
ces monnaies : Dollar US, Yen japonais, Livre britannique ?
5. Dans les mois à venir, échangeriez-vous vos Euros contre de l’or ? 42 52 (58) 6
6. Pensez-vous que la Banque Centrale européenne va commencer à
31 45 (65) 24
relever son taux d’intérêt principal au cours des six prochains mois ?
7. Pensez-vous que l’inflation est de retour dans votre pays ? 51 (45) 37 12
8. Craignez-vous de perdre votre emploi dans les prochains mois à
11 81 (64) 8
cause de la crise globale ?
9. Craignez-vous de perdre de l’argent dans les prochains mois à
75 (66) 23 2
cause de la crise globale ?
10. Pensez-vous que le dollar va continuer à baisser par rapport à
53 (70) 30 17
toutes les grandes devises ?
11. Pensez-vous que les Européens et les Asiatiques devraient créer
91 (99) 9 0
leurs propres agences internationales de notation ?
12. Croyez-vous que les dettes publiques vont déclencher une
87 8 5
nouvelle phase de la crise au cours des prochains mois ?
13. Pensez-vous que le Royaume-Uni a commencé à plonger dans
une crise politique, économique, budgétaire et monétaire 95 1 4
généralisée ?
14. Constatez-vous des signes tangibles d’embellie économique dans 83
14 3
votre pays ? (69)
15. Craignez-vous l’apparition de troubles politico-sociaux dans votre
45 (45) 42 13
pays ?

55
Chaque mois, l’équipe de GEAB consulte pour vous 200 leaders d’opinion européens
56
En bleu, résultats du mois dernier.
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GlobalEuromètre de Mai 2010 - ANALYSE

Gouvernance UE : Quasi-unanimité en faveur de la mise en place d'une gouvernance


économique de la zone Euro d'ici fin 2010 / Baisse du fort décalage entre attentes des
peuples et actions des leaders de l'UE / Forte progression de la majorité estimant que les
forces anti-démocratiques montent en puissance dans l'UE / Baisse de la majorité estimant
désormais que la BCE n'augmentera pas son principal taux d'intérêt dans les six prochains
mois / Hausse de la majorité estimant que l'inflation est de retour dans leur pays / Recul
de l'inquiétude de perte d'emploi du fait de la crise / Renforcement de la majorité craignant
une perte d'argent à cause de la crise systémique globale / Forte hausse de la majorité
constatant l'absence d'amélioration de la situation économique dans leur pays / Stabilité
de la majorité inquiète de troubles sociaux et politiques dans leur pays
Les dirigeants européens sont plébiscités pour leur récente action solidaire face aux crises budgétaires puisque 90%
des Européens estiment qu'il faut mettre en place une gouvernance économique de la zone Euro d'ici la fin de
l'année. D'ailleurs, on constate une baisse significative de la très forte majorité traditionnellement mécontente en ce
qui concerne l'action européenne des gouvernements par rapport aux attentes de leurs peuples : 84% en Mai
contre 99% en Avril et en Mars.
En revanche, on assiste à une forte augmentation de la majorité estimant que les forces anti démocratiques
montent en puissance dans l'UE (95% contre 75% en Avril dernier). Les résultats des élections hongroises et
françaises ont certainement pesé.
S'il y a une baisse significative de la majorité concernant la possibilité que la BCE augmente son principal taux
d'intérêt dans les six mois à venir (45% contre 65% en Avril), cette opinion reste néanmoins dominante (puisque
seulement 31% pensent le contraire). Cette forte variation continue néanmoins à illustrer la très forte incertitude
des sondés sur l'état réel de l'économie et des marges de manœuvre de la BCE.
Ce mois-ci on constate en revanche un renforcement de la majorité (51% contre 45% en Avril) qui estime
désormais que l'inflation est de retour dans leur pays. Cela met fin au mouvement de pendule de ces derniers mois.
La crainte de perdre son emploi à cause de la crise globale continue à reculer légèrement à 11% (contre 13% en
Avril). La peur de perdre de l'argent à cause de la crise repart en revanche à la hausse puisque le nombre de
personnes affirmant être inquiètes à ce sujet passe à 75% (contre 66% en Avril).
La reprise reste toujours invisible pour la grande majorité des Européens ; et cette majorité augmente fortement
après trois mois consécutifs de baisse, passant de 69% en Avril à 83% en Mai à ne voir aucun signe d'amélioration
économique.
On constate une stabilité de la majorité concernant l'éventualité de désordres politiques et sociaux dans leur pays :
ceux qui craignent une telle évolution restent faiblement majoritaires (45% contre 42% qui pensent le contraire).

Relations UE/Reste du monde : Baisse de la forte majorité préférant conserver ses Euros
face au $, ¥ et £ / Légère baisse de la majorité d'Européens ne souhaitant pas convertir ses
€ en or / Forte diminution de la majorité s'attendant à un effondrement du Dollar US dans
les prochains mois / Légère baisse de la très forte majorité en faveur de la création
d'agences de notation européennes et asiatiques / Très forte majorité estimant que les
dettes publiques vont déclencher une nouvelle phase de la crise / Quasi-unanimité pour
estimer que le Royaume-Uni est en train de sombrer dans une crise généralisée
A 80% (contre 96% en Avril), on constate une baisse de la majorité des Européens continuant à voter pour l'Euro
contre le Dollar US, le Yen japonais et la Livre britannique en refusant l'idée de changer leurs Euros dans ces
devises : malgré le matraquage médiatique sur la « crise grecque », devenue une soi-disant « crise de l'Euro », les
européens n'ont pas l'air très inquiets pour leur devise. Cette confiance dans l'Euro se reflète également dans la
faible baisse de la majorité d'opinions préférant garder ses Euros plutôt que de les changer en or (52% contre 58%
le mois dernier). Cela dénote néanmoins un regain d'appétit pour l'or.
En toute logique, avec 53% des sondés (contre 70% en Avril, et 58% en Mars) s'attendant à un effondrement du
Dollar US dans les mois à venir, on constate là aussi que l'effet de la campagne agressive de communication autour
de la Grèce et de l'Euro contribue à masquer le sentiment de la fragilité structurelle du Dollar sans pour autant
l'inverser.
En revanche, le Royaume-Uni apparaît désormais pour 95% des Européens comme un pays qui plonge dans une
crise généralisée.
Enfin, les sondés continuent à souhaiter massivement (91%, en légère baisse par rapport aux 99% d'Avril dernier)
la création d'agences de notation européennes et asiatiques, pour ne plus dépendre du bon vouloir des Moody's,
Fitch et Standard & Poor's.

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