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Université de Lubumbashi
Faculté des Sciences Sociales, Politiques et Administratives
Département de Sociologie et Anthropologie
Anthropologie Générale
Notes de cours
Premiers Graduats Sociologie et Anthropologie
Introduction
1. Plan du cours
I. La formation de l’anthropologie
1. Les préliminaires
2. La configuration
V. L’anthropologie culturelle
1. L’Objet
2. La méthodologie
3. Les orientations
4. La culture
5. Le structuro-fonctionnalisme
6. Le culturalisme
7. Le dynamisme
2. Objet du cours
Objectif général
L’enseignement du cours d’Anthropologie Générale vise à expliquer la substance de la
science anthropologique.
Objectifs spécifiques
A l’issue de ce cours, chaque étudiant doit être capable :
a) de présenter l’objet de l’anthropologie ;
b) d’esquisser l’histoire de cette science ;
c) d’interpréter les théories anthropologiques ;
d) d’appliquer la méthodologie, les concepts et les notions de l’anthropologie.
4. Bibliographie
14) POIRIER, Jean (sous la direction), Ethnologie générale, Gallimard, Paris, 1968.
15) POIRIER, Jean, Histoire de l’Ethnologie, PUF, Paris, 1969.
16) SAPIR, Eduard, Anthropologie, Seuil & Minuit, Paris, 1973.
5. Stratégie pédagogique
6. Volume horaire
Chapitre I
La formation de l’Anthropologie
A. Antiquité (de la fin de la Préhistoire au Vème siècle avant J.C.: siècles de Périclès)
En effet, des documents écrits, il n’y a que les traces des Grecs et des Romains.
1) La Grèce antique
En Grèce, la pensé est dominée par la philosophie. Les étrangers sont considérés
comme des barbares à dompter. Ils leur menaient alors des guerres à l’issue desquels
certains d’entre eux écrivaient des souvenirs. Des écrivains grecs de l’Antiquité, nous
citons Hérodote, Thucydide et des philosophes.
a) Hérodote
Hérodote a vécu au Vème siècle avant Jésus-Christ. Il s’est distingué par sa quête de
l’information sociale dans ses écrits où il décrit les mœurs, les coutumes et les traditions
des peuples qu’ils rencontrent lors de ses voyages. C’est, par exemple, les Mèdes, les
Perses et les Egyptiens.
Mais, il est reproché à cet auteur de mêler l’ethnocentrisme à l’observation. Il
considérait notamment comme barbares tous les peuples non Grecs. Ce qui traduit des
préjugés sur les étrangers, qu’on croyait inférieurs aux Grecs.
b) Thucydide
Thucydide est contemporain à Hérodote ; il a vécu au Vème siècle av. J.C. Il est le
père de l’histoire à cause de son effort d’expliquer les phénomènes observés. Il s’est fait
remarquer en plus par son raisonnement analogique, c’est-à-dire par la comparaison.
c) Les philosophes
On entend par philosophes ici les penseurs qui, sans s’enquérir méthodiquement
des faits, ont seulement cherché à dégager les « règles de l’organisation de la société ».
C’est, entre autres, les sophistes, Platon et Aristote.
Anthropologie Générale -G1 Soc & G1 Anthr
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1° Les sophistes : sont des penseurs du Vème et du IVème siècle av. J.C., qui ont
réfléchi sur la société et sur la vie politique. Ils recouraient à l’observation et à
l’expérimentation, mais qui n’étaient que rudimentaires. Ils sont parvenus à dénoncer les
survivances des valeurs contenues dans les institutions athéniennes qui étaient
inadaptées au développement commercial et intellectuel de la cité grecque.
3° Aristote (384-322 av. J.C.) : Disciple de Platon, il était réaliste, soit l’opposé de
son maître. Dans son ouvrage intitulé « La politique », il introduit les méthodes inductive,
d’observation et comparative. Il avait un plus grand souci d’informations et s’efforçait à
classifier les faits sociaux et politiques observés. Il avait en plus un sens élevé du
relativisme. En effet, jadis, la société humaine et le pouvoir politique étaient conçus
comme une émanation de Dieu.
2) La Rome antique
Les Romains étaient plus pratiques que spéculatifs. Ils considéraient les étrangers
comme des « sauvages » à qui imposer leur « civilisation » par des guerres. Les guerres
leur fournissaient les occasions d’étudier les institutions et les mœurs de ces dernières.
Ainsi :
1) César fait des commentaires sur les Gaulois
2) Tacite : écrit sur les Germains
3) Saint Augustin : réfléchit sur la chute de l’empire romain à la lumière du christianisme
naissant professant l’amour du prochain et la paix. En plus, dans son ouvrage intitulé
« Cité de Dieu », il synthétise des données sur les valeurs humaines, sur les civilisations
et sur l’apport du christianisme.
4) Pline l’Ancien : écrit sur l’Histoire naturelle
5) Tacite : présente les mœurs des Germains
6) Strabon : écrit sur la Géographie et décrit la pratique de la couvade
7) Polybe : présente l’Histoire générale.
- B. Le Moyen âge (Vème siècle avant J.C. - 1453 : Chute de l’Empire romain d’Orient)
La société est féodale et chrétienne. Elle est marquée par l’égocentrisme et le
théocentrisme, la théorie prime sur la pratique sociale.
1° Le Moyen âge chrétien : la pensée est dominée par la perfectibilité de l’homme dans la
société. Cette idée a été mise à profit en dehors du clergé et « laïcisée » au point de
générer une autre idée, celle du « progrès de l’Humanité ».
Mais, les dogmes et les traditions interdisent l’éveil de l’esprit scientifique. Ils
empêchent également d’inventorier le réel. Le théocentrisme marque la pensée et le
dogmatisme est chrétien. Parmi les écrivains de ce temps, nous citons Saint Thomas et
Thomas More.
1) Saint Thomas : il propose la construction de la cité de Dieu,
2) Thomas More : il écrit sur la cité idéale.
2° Le Moyen âge islamique : la pensée est marquée par le triomphe de la volonté d’Allah.
Deux auteurs peuvent être cités ici, il s’agit d’Ibn Khaldoum et Marco Polo.
a) Ibn Khaldoum (1332-1406) a écrit les « Prolégomènes à l’Histoire », où il rejette la
généralisation au profit du relativisme et défend la théorie des cycles en notant que :
- Le changement social dépend de la cohésion sociale ; c’est-à-dire que le degré de
variations de la cohésion sociale ou son intensité (forte ou faible) explique les
changements sociaux.
- L’esprit de corps est la source de l’intégration sociale : la solidarité ou le fait que les
individus comptent les uns sur les autres permet à ceux-ci d’assurer leur
subsistance et leur défense. Mais, par-dessus tout, le mode de vie dépend du
facteur géographique : vie dure, âpre, exigeant la solidarité et la force de caractère
dans le désert.
b) Marco Polo : il a écrit des récits de ses voyages à l’Extrême Orient. Il avait séjourné
pendant 25 ans en Asie. De ses voyages, il a non seulement acheté l’Or et les épices,
mais aussi et surtout a écrit sur la philosophie et sur la pensée chinoise en prouvant
que les chinois ne sont pas des « sauvages »
c) Al Biruni : l’Inde et ses habitants
d) Ibn Batuta : l’Afrique et les africains.
Par ailleurs, en Asie, les civilisations sont mal connues des Européens, alors qu’elles
sont vraiment riches en idées sur les questionnements de l’homme sur les hommes.
Exemple :
1) Hiuang Tsang : moine bouddhiste chinois envoyé aux Indes, il fit rédiger son «
mémoire sur les contés occidentaux » en 646. Il y décrit la civilisation, la religion et les
mœurs des Indiens.
2) Yi- Tsing : il écrit deux mémoires : l’un sur le Bouddhisme et l’autre sur les
Occidentaux. Ce dernier est une relation des éminents moines qui partirent à la
découverte de la loi en Occident.
3) Yu- Yang- Tsa- Tsu : après un voyage en Somalie au 19 ème siècle, il décrit la terre
africaine pour la première fois de manière désintéressée ainsi que les habitudes
juridiques des Somaliens. A ce titre, il est considéré comme précurseur de l’ethnologie.
- C. Le 16ème siècle : la Renaissance (du 16ème siècle au 18ème siècle : Révolution française
en 1789)
a) Les caractéristiques
Si le Moyen- Age a péché par l’égocentrisme, il a son côté positif dans la
connaissance de l’Afrique. A partie du 14 ème siècle, l’égocentrisme tend à disparaître, les
premiers schismes s’opèrent et l’on pense à la diaspora. Celle- ci concerne les pays à
vocation maritime tels qu’Espagne, le Portugal, l’Angleterre et la Hollande.
b) Les facteurs
Les facteurs qui ont favorisé le déclenchement de la Renaissance sont les suivants :
1) La réforme : elle amène à la vulgarisation des connaissances humaines par
l’imprimerie grâce à laquelle les philosophes percent la remise en question de la
théocratie. Les textes sacrés sont divulgués et, à la limite, chaque fidèle est prêtre
de sa religion en famille.
- La technologie : elle se dote des appareils optiques. Ce qui permit à Copernic de
remettre la position de la terre en déplaçant le centre de l’univers ; à Kepler
d’élaborer les premières lois de la mécanique céleste.
depuis que la chrétienté est coupée en 1453 des lieux saints). Des présupposés d’origine
mythologique ou théologique se mêlent encore aux documents concrets. Le mythe du noir
s’élabore avec des thèmes variés dont :
1) Le thème tératologique : hérité des fabulations médiévales. Il met en scène un
bestiaire humain auquel on attache une crédibilité sans nuance.
2) Le thème du bon sauvage : né en Italie et en France au début du 15 ème siècle. Il est
davantage exalté par J. J Rousseau. Il accapare la pensée de beaucoup de
missionnaires et constitue la base de la remise en question de la civilisation des
non-Occidentaux.
3) Le thème mythologique : dessine un état de nature sous des couleurs idéalisées.
C’est déjà le début de la déculturation avec délices. L’Eden perdu et la félicité de
l’âge idyllique se retrouvent exploités au bout du monde. Exemple : la fontaine de
Jouvence, El Dorado, l’Age d’or.
c) Les implications
Les retombées des idées-forces du Moyen Age sont nombreuses, parmi elles, nous citons
les suivantes :
1) Henri Estienne : décrit pour la première fois les indigènes en 1512 à travers la
chronologie d’Eusèbe. Les indigènes en question étaient le sept hommes amenés
d’Amérique à Rouen en 1509, avec un canon des vêtements et des armes. D’autres
naturels ont été ramenés par des explorateurs en Espagne et en Angleterre
2) Déjà, à partir du 14 ème siècle, apparaissent les premières collections de Grands
voyages :
- en Italie : Ramascoi,
- en Allemagne : De Bry
- en Angleterre : Raleigh.
selon laquelle : « On dit ce qui est et non ce qui devrait être ». Il fait usage de la
description objective et de la méthode comparative notamment des mœurs et des
gouvernements. Il élabore une théorie essentielle qui constitue des prémisses de
l’ethno- psychologie. Cf. ses œuvres comme : - L’Esprit des lois, - Les lettres
persanes, - Considération sur les causes de la gradeur et de la décadence des
Romains.
6) L’Eglise projette d’évangéliser les sociétés exotiques même au prix de martyr. Bien
que l’unité fondamentale de l’humanité demeure implicite, on considère que le
sauvage converti devient l’égal de tout autre chrétien. Mais, le principe de la
diversité humaine et de la variabilité de l’homme n’est pas accepté. L’esclavage est
justifié en arguant que le noir sort du schéma de la création des fils de Dieu. Alors,
il était légitime d’avoir des nègres en toute propriété et de les traiter aussi
humainement qu’un autre domestique : sas châtiment corporel excessif.
7) La littérature de voyages : Les découvertes enregistrées lors des voyages
alimentent une abondante littérature de voyages, qui développe le relativisme et
qui soutient les études comparatives.
- d’associer toutes les recherche pour cerner de près les diverses variables de l’homme ;
- de programmer des recherches et coordonner plusieurs disciplines.
Depuis 1839, les sciences en général connaissent une évolution. Des recherches
spécialisées deviennent de plus en plus nombreuses. Il y a notamment :
- La préhistoire avec Bouchay ;
- L’Anthropologie physique avec Broca ;
- La Linguistique avec Humboldt.
- Les premiers Traité d’Histoire naturelle et d’Ethnologie comparée apparaissent
aussi.
e. Le 20ème siècle
De 1930 à 1945, les chercheurs se multiplient. L’anthropologie se divise en
plusieurs branches dont l’Anthropologie physique (Darwin), l’Anthropologie sociale (Tylor)
et l’Anthropologie culturelle (Malinowski).
Chapitre II
Le statut scientifique l’Anthropologie
Le mot « anthropologie » peut être défini selon son origine étymologique ou selon
sa signification scientifique.
- Définition étymologique
Le terme « anthropologie » dérive de deux mots grecs suivants :
- « Anthropos », qui signifie « homme », et
- « Logos », souvent traduit par « étude, discours, traité ou
science ».
Ainsi, d’après son étymologie, anthropologie veut dire « étude de l’homme » ou
« science de l’homme ».
- Définition scientifique
Le mot anthropologie est apparu dans la littérature latine au 16 e siècle. Mais, A. C.
Haddon (History of Anthropology, London 1910) le fait remonter à des auteurs grecs et
romains de l’Antiquité. Parmi ceux-ci, Hardon cite Aristote qui l’utilisait dans le sens de
l’homme qui parle de lui-même. La référence est aussi faite à ce propos à Antropology
Astracted, un livre collectif des auteurs anonymes publié en 1915. Ce livre traite des
matières comme l’histoire de la nature humaine et de l‘idée de la nature humaine
reflétée dans les croyances philosophiques et dans les collections anatomiques.
A proprement parler, c’est De Quatre Fages qui a fabriqué ce concept. Dès la fin
du 18ème siècle, le mot anthropologie est entré dans le vocabulaire scientifique pour désigner
l’ensemble des questions concernant l’origine, les ressemblances et les différences des
diverses société alors recensées.
bien que les cultures se transforment. Cependant, c’est à partir de la deuxième moitié du
19e siècle qu’il renvoie à une discipline scientifique.
méthodes scientifique, la série des questions qui défient la curiosité humaine depuis les
propriétés de la cave paléolithique jusqu’à la merveille des grattes ciel urbain.
a) L’autre
L’anthropologie est une formalisation scientifique du questionnement permanent de
l’homme sur lui-même à cause de sa curiosité habituelle ; mais elle est surtout une
expression historique de la société européenne marquant le rapprochement de l’Europe
capitaliste avec les sociétés étrangères non industrielles.
De prime abord et longtemps avant, sur base des données technologiques ou
seulement matérielles, l’Européen avait considéré l’ « autre » comme différent de lui à
tous points de vue.
b) Le sauvage
L’intérêt au « sauvage » est né au 18ème siècle suite à l’exploration de l’Asie du
Nord-est et de l’intérieur de l’Afrique. L’entrée en contact avec leurs populations a
relancé la réflexion philosophique de jadis sur les peuples étrangers. Elle a mis au jour
l’idée d’une évolution de l’humanité qui se serait développé à partir d’un état de nature
originel jusqu’aux formes les plus complexes de la société industrielle. Des auteurs
célèbres ont eu à exploité ce thème mué en celui de « bon sauvage ».
c) Le primitif
La mise en application de la science anthropologique est intervenue au moment où
l’Europe voulait exploiter l’Afrique moyennant une stratégie bien réfléchie. Celle-ci a
consisté à connaître et dominer les populations à exploiter en vue d’accéder aux matières
précieuses que regorgent leurs sols et sous-sols. Ladite stratégie a pris corps dans
l’anthropologie grâce au financement des capitalistes qui s’étaient engagés dans
l’entreprise coloniale.
large traitement dans ses œuvres. Le primitif était conçu comme étant le prototype des
ancêtres des Européens.
- 3ème extension : les sociétés urbaines et les entreprises. Chapple étudie par exemple, aux
U.S.A ; les symboles significatifs, les réseaux de relations dans une entreprise.
C’est pour cela qu’Eric Wolf définit l'anthropologie comme la plus scientifique des
sciences humaines, et la plus humaine des sciences de la nature. Par là, il montre à quel
point les contributions de l'anthropologie s'insèrent au cœur de toutes les autres sciences.
a) L’anthropologie britannique
En Grande Bretagne ainsi que dans les autres pays anglo-saxons, l’anthropologie
est dite sociale. Elle est définie ou attendue comme étant proche de la sociologie. A ce
titre (la proximité entre anthropologie et sociologie), l’anthropologie est attendue comme
étant une réflexion sur les origines des phénomènes sociaux. Elle s’emploie à étudier les
relations sociales. Ainsi elle étudie particulièrement les religions et les croyances dites
primitives, le système de parenté, le mariage, les rituels, les institutions et les relations
sociales à travers le temps.
Par ailleurs, l’anthropologie britannique privilégie l’enquête sur terrain. Elle saisit
l’organisation sociale, le fonctionnement du pouvoir, la réglementation des conflits, la
réciprocité, l’échange économique et l’évolution des sociétés.
a) L’anthropologie française
Elle démarre en 1950 à titre de science naturelle de l’espèce humaine. Elle va vite
se déclarer conservatrice parce que naturaliste. Elle s’est crée une ethnologie qui s’est
voulu comparatiste pour étudier les différents systèmes culturels et sociaux de manière
objective. Elle est une science de terrain, qui s’intéresse à l’étude des sociétés dites
« primitives » à travers deux principales orientations : d’une part, l’orientation structurale
et d’autre part, l’orientation marxiste. Elle utilise les approches psychologique, politique et
comparative.
b) L’anthropologie américaine
Elle se définit comme une anthropologie culturelle et s’affiche comme une
discipline de synthèse. Elle a une définition large du mot culture : englobant la
technologie, les objets matériels, la psychologie, la religion, la magie, les rites, etc. Pour
elle, la culture est une totalité. Son l’objet est :
- La nature des sociétés à petite taille (démographiquement), la religion, la politique,
l’économie des sociétés.
- Le projet d’étude des origines de l’homme, de la croissance et du développement des
cultures.
- Les relations entre les sciences sociales et la biologie, soit l’interaction entre les
influences biologiques et les influences socioculturelles, l’importance de la culture
dans le comportement humain, l’exploration des disciplines limitrophes comme la
psychologie, la psychanalyse et la linguistique.
- L’étude des corrélations statistiques entre les formes d’organisation sociale, le mode
de subsistance, les pratiques religieuses et le système politique.
- L’étude de l’acculturation à cause du culturalisme, qui consiste en une étude
matérialiste et comparatiste de l’histoire sociale.
Chapitre III
L’anthropologie biologique
3.1. La genèse
3.2. L’objet
L’anthropologie biologique porte sur les traits physiques et sur la biologie de
l’homme, autant que la zoologie étudie les animaux du point de leur morphologie et de
leur mode de vie. Elle se sert des connaissances sur les hommes fossiles à travers la
paléontologie humaine ou la paléoanthropologie et la préhistoire.
Jadis, elle était dénommée « anthropologie physique ». Elle ne recouvre pas à
toutes les branches de la biologie humaine, elle n’en retient qu’une partie à savoir :
l’anatomie, la physiologie, la génétique. Elle considère moins l’individu que le groupe : elle
s’occupe tantôt du groupe humain dans sa totalité par rapport aux primates, tantôt des
groupes humains entre eux.
Cette discipline met l’accent sur les caractères différentiels plutôt que sur ce qui
est commun, sur ce qui sépare plutôt que sur ce qui unit. C’est pourquoi, elle utilise
l’anatomie comparée, la génétique anthropologique. Etant donné l’intérêt porté sur
l’étude des groupes, des collections d’individus, la notion de « moyenne » s’impose : les
savants chiffrent en pourcentage ce que, ailleurs, on observe seulement
En somme, l’anthropologie biologique est ce que Broca a appelé « l’histoire
naturelle du genre humain ». C’est la science des variations humaines ; qui décrit les
groupes humains et explique leurs différences. Son objet consiste à :
- Etudier les groupes humains
- Comparer les données recueillies sur un groupe avec celles d’un autre groupe
- Les confronter avec le milieu environnant naturel (mésologie ou écologie) et humain
- Inventorier les milieux et les groupes humains voisins ou de référence.
Le milieu humain est plus complexe que le milieu naturel ; car il inclut tous les
facteurs sociaux par lesquels l’homme agit, sans se rendre compte de leurs effets sur sa
biologie. Par exemple : malgré la domestication du feu, l’homme mange des aliments crus
qui influencent sa morphologie faciale. Les mâchoires et les dents n’ont plus besoin d’être
puissantes à cause des aliments cuits.
La confrontation de l’homme avec son milieu permet d’isoler la part des caractères
humains non influencés par le monde extérieur, c’est-à-dire innés et non adaptatifs. Delà,
on conçoit certains caractères comme apparaissant par hasard : ils sont éliminés s’ils sont
néfastes, conservés s’ils ne gênent pas, mais ils se développent et se propagent s’ils ont
une influence bénéfique, parfois en présence de tel milieu particulier.
Si Darwin a affirmé la survivance du plus apte, la « survivance préférentielle de la
plus féconde » est l’interprétation actuelle du rôle de la sélection naturelle sur les petites
mutations qui se produisent constamment de façon imperceptible. D’où l’importance de
la démographie dans les études anthropologiques.
Ainsi, l’on sait que, par rapport aux autres Primates, tous les hommes forment un
même groupe, appartiennent à la même espèce. Pour preuve : ils se marient entre eux et
sont interféconds. Ils constituent des groupes humains naturels, c’est-à-dire ceux où les
sujets se marient entre eux, ou peuvent le faire normalement. Il s’agit des isolats.
Le plus souvent, on emploie le terme le plus général de Population. Les limites en
sont un peu conventionnelles, car il y a toujours des mariages accidentels hors du groupe.
Une population anthropologique diffère d’une population en général (population scolaire,
africaine, congolaise) par la nature des mariages, le plus souvent par la fréquence des
mariages à l’intérieur du groupe. Or les sujets qui se marient entre eux parlent
habituellement la même langue et ont les mêmes coutumes.
Une population diffère d’une nation, mais se rapproche beaucoup de l’ethnie ou
groupe socioculturel. Certes, il existe des populations des métis, cependant à l’intérieur
d’un grand groupe, on distingue des subdivisions correspondant à des cercles de mariages
plus ou moins restreints. Exemple : province, district, territoire, etc.
L’anthropologie définit les populations qu’elle étudie selon les critères
ethnologiques (anthropologie sociale et culturelle), sociologiques et linguistiques voire
même démographique (fréquence ou non de la consanguinité, fécondité et mortalité
différentielle). Bref, elle se sert de tous les indicateurs portant sur l’hérédité des
caractères anthropologiques, dont la conscience et la fluctuation font l’objet de l’étude.
L’explication et l’interprétation des variations humaines sont une tâche difficile
pour l’anthropologie. Celle-ci s’occupe mieux de l’accroissement séculaire de stature et la
brachycéphalisation. Il lui reste, par exemple, d’étudier pourquoi:
- Tel groupe sanguin prédomine-t-il dans telle population ?
- Les Pygmées sont-ils petits ?
- Les Noirs ont-ils la peau plus foncée ?
1) L’archéologie
2) La Préhistoire
L’étude des objets du passé permet de déterminer les modes de vie de premiers
hommes, d’une part, et de classifier leurs industries d’autre part. Ainsi, l’on a identifié :
- Le Paléolithique : l’homme apparaît sur la Terre
- Le Mésolithique : l’homme commence la chasse et la cueillette
- Le Néolithique : l’homme se sédentarise, domestique et polit la pierre.
3) La paléontologie
L’on distingue quatre groupes de fossiles qui représentent les formes antérieures de
l’homme actuel. Il s’agit de :
a. Les Australopithèques
b. Les Pithécanthropiens
c. Les Néanderthaliens
d. L’Homo Sapiens Fossilis.
du tégument est due à la présence d’un pigment nommé la mélanine. Lorsque celle-ci
est :
a. Abondante : la peau est sombre ou noire
b. Moindre : la peau est jaunâtre
c. Rare : la peau est claire ou blanche.
La mélanine varie entre les groupes et même à l’intérieur d’un même groupe. La
transmission de ce caractère est héréditaire. En plus de ce caractère, il existe un
facteur pigmentaire général qui colorie et les cheveux et les yeux. Lorsque celui-ci fait
défaut, le sujet est dit « albinos » : sa peau et ses cheveux sont blancs, ses pupilles sont
roses.
Ce caractère est adaptatif (loi de Gloger). Car les populations les plus pigmentées
sont concentrées dans les régions du globe les plus ensoleillées. Mais, il n’est pas
suffisant pour définir les races, les autochtones de l’Australie par exemple ne sont pas
dits nègres, alors qu’ils sont aussi pigmentés que les Noirs d’Afrique. Les Peules du
Sahel ont la peau relativement claire et les cheveux crépus, alors que les populations
de l’Inde méridionale ont la peau foncée et les cheveux lisses.
4. Les caractères digito-palmaires : il s’agit des empreintes des extrémités des membres
supérieurs (les mains) et inférieurs (les pieds). Ils consistent dans des traces dont la
forme et le nombre des lignes sont spécifiques à chaque individu.
Ce caractère n’est pas adaptatif : il est inné.
Les caractères mesurables sont très nombreux. Ils s’étudient en valeur absolue
ou en valeur relative. Dans ce dernier cas, on confectionne un indice égal à cent fois le
rapport d’une dimension à une autre. La valeur absolue est une mesure de référence,
supposée fixe. Un indice exprime les proportions d’un sujet ou de telle partie de son
corps. Ainsi, un sujet dit gros ou maigre, quand le rapport de son poids à sa taille déborde
les limites normales. Il s’agit d’une valeur relative, destinée à comparer les sujets de petite
et de grande taille.
Les dimensions les plus usuelles sont :
- La taille ou la stature
- Le poids
- Les longueurs des membres
- Les six dimensions céphalo-faciales, à savoir : La longueur et la largeur de la tête, de
la face et du nez.
Le poids et les longueurs des membres sont souvent rapportées à la taille, alors
que les six dimensions céphalo-faciales sont groupées deux à deux et fournissent les
classiques indices céphalique, facial et nasal.
L’étude ne s’effectue pas par pourcent. Les valeurs individuelles des mesures et les
indices permettent plutôt des calculs de moyennes et d’écart-type. D’où on apprécie dans
quelle mesure deux populations diffèrent l’une de l’autre pour tel ou tel caractère. On
cherche également des corrélations des mesures entre elles, ou avec les caractères
descriptifs, ou avec les éléments du milieu (profession, climat, consanguinité).
- La stature : c’est la somme des hauteurs de la tête, du cou, du tronc et des membres
inférieurs. Elle varie avec les races, les sexes et même avec les données
socioprofessionnelles. C’est un caractère anthropologique de choix à cause de sa
sensibilité aux influences extérieures et à la facilité de sa mesure.
La stature varie avec l’âge. Son maximum est atteint vers 25 ans, puis elle décroit
avec la sénescence surtout à cause de la diminution de la hauteur du tronc. En moyenne,
les citadins sont plus grands que les ruraux, les étudiants plus grands que les ouvriers. La
femme a une stature inférieure à celle de l’homme avec une différence moyenne de 10
cm.
La capacité crânienne
Le tonus sub-orbitaire
Le développement du menton
Le volume et les proportions des dents.
Chapitre IV
La lignée humaine
1) L’anthropologie raciale
Le concept de « race » est discutable. Il y a même controverse et contradiction
sur les nombreuses classifications raciales. Mais, les uns et les autres concordent à
distinguer trois races : les Noirs, les Jaunes et les Blancs. Les métis ou les groupes
intermédiaires ne sont pas pris en compte dans cette taxonomie humaine rigide.
L’étude des groupes sanguins est importante ici. Les sérologistes ont
notamment attesté que les populations non Européennes ont une proportion plus grande
des groupes sanguins A-B-O. Mais, pour distinguer la race, il convient, en plus des groupes
sanguins, de considérer la stature, la couleur de la peau et d’autres particularités
morphologiques. On notera ce qui sépare, on en fera une moyenne pour exprimer la
« distance » entre deux populations.
Cependant, l’établissement de la race sur base des restes osseux est difficile :
seuls le sexe et l’âge peuvent être déterminés.
2) L’anthropologie constitutionnelle
C’est l’étude des types, à l’intérieur d’un même groupe, basés sur les
proportions du corps et non de la tête. Ces types morphologiques sont aussi nombreux
que les types raciaux, car ils dépendent aussi des conventions des auteurs.
Anthropologie Générale -G1 Soc & G1 Anthr
36
3) L’anthropologie et croissance
Les mensurations anthropologiques sont souvent utilisées concurremment aux
techniques biométriques pour résoudre certains problèmes. Celui de la croissance en est
un banal. L’on distingue la croissance globale et la croissance des parties du corps. L’on
établit des relations entre les types de croissance.
Par exemple : à tel âge, tel segment croît plus rapidement qu’un autre. La
différence de taille entre homme et femme est due à une puberté féminine plus précoce,
avec arrêt de la croissance à un moment donné.
conservent difficilement : la momification naturelle est rare, même pour les périodes
récentes. La conservation des parties osseuses nécessite un enfouissement rapide dans un
sédiment, car un squelette exposé à l’air devient friable pour finalement disparaître. Mais,
le sédiment doit être suffisamment compact et son pH ne doit pas être acide pour éviter la
dissolution de l’os.
Les dents sont les parties les plus facilement conservées. Pour les restes humains
récents, on utilise dans la mesure du possible l’empreinte génétique fournie par l’ADN des
mitochondries ou celui du chromosome Y pour établir la filiation d’un groupe d’individu à
l’autre. Cependant, les restes humains sont très rares, souvent ils sont incomplets et
fragmentés. D’où il est difficile d’établir des relations d’un spécimen à l’autre. C’est
pourquoi, la chronologie classique de la Préhistoire a d’abord été établie à l’aide des
restes d’industries laissés par les hommes.
Dates -4,2 à 2,5 Ma -2,4 à 1,6 Ma -1,9 Ma à -350.000 à -35.000 -35. 000 ans
-300.000 ans ans
Genre et Australopithèque Homo Habilis Homo Erectus Homme de Homo
Espèce Neandertal sapiens
Crâne 300 <V<530 cm³ 550<V<750 cm³ 700<V<1300 cm³ 1200<V<1750 cm³ V= 1350 cm³
Les restes osseux trouvés sont incomplets : quelques dents, une mâchoire,
quelques os longs, rarement un fragment de tête osseuse, exceptionnellement une tête
complète ou un squelette presque complet. Les individus sont isolés et il n’y a pas de trace
de sépulture. C’était des chasseurs nomades de petits gibiers, peut être mêmes de
charognards, eux-mêmes proies des grands carnivores (comme les singes actuels). Leur
durée de vie ne devait pas excéder 30 ans. La structure de leur larynx déduite des restes
osseux ne semble pas compatible avec un langage articulé. Les traces de cendres de bois
associées à Homo erectus laissent penser que ces hommes savaient utiliser le feu.
B. Homo rudolfensis
Les restes de l’Homo rudolfensis ont été trouvés en Afrique orientale (Lac
Rodolphe au Kenya). Ils indiquent des individus plus robustes et corpulents que les Homs
habilis. Ils possèdent de fortes mâchoires et une face solide.
C. Homo ergaster
Homo ergaster vivait en Afrique, entre 2,2 millions d’années et 1 million d’années
avant notre ère. Il descendrait directement d’Homo Habilis. Son cerveau atteint 850 cm³,
Homo ergaster utilisait des outils en pierre taillée sur les deux faces (biface
caractéristique de l’Acheuléen). Ses membres inférieurs plus longs que ceux d’Homo
habilis en faisaient un bon marcheur. Les hanches des femelles restent par contre plus
larges que celles de l’Homo sapiens femelle. Il était capable de marcher avec endurance et
de courir le corps parfaitement redressé.
Leur technique de taille des silex est plus précise et caractérise le Paléolithique
moyen ; les éclats prélevés sur les galets sont retouchés en fonction d’utilisation
spécifique (racloirs, pointes).
des traces d’ADN de ses os pour les comparer à ceux d’Homo sapiens, mais les empreintes
génétiques obtenues sont pour l’instant incomplètes. Certains auteurs pensent que les
deux espèces ne se sont pas rencontrées, entre autres à cause du faible effectif des
populations, du lieu de vie difficile…
La disparition des néandertaliens vers -30 000 ans a longtemps été expliquée par
sa décimation par l’homme moderne. On pense plutôt maintenant à des causes
génétiques (maladies congénitales, stérilités) ou des épidémies dont les vecteurs ont été
apportés par l’homme moderne (comme par exemple l’épidémie de variole apportée au
16ème siècle en Amérique par les premiers européens).
Le plus ancien Homo sapiens connu jusqu’à présent a été découvert dans le
gisement d’Omo Kibish (Ethiopie) daté à -195 000 ans. Il aurait migré largement pour
finalement occuper tous les continents. Son représentant européen le plus connu est
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42
Chapitre V
L’anthropologie culturelle
5.1. L’objet
4.2. La méthodologie
La méthodologie générale de l’anthropologie sociale et culturelle est référée au
mode d’observation et de description objectives. L’accent est mis sur les données
documentaires de l’expérience vécue dans un temps et dans un espace déterminé.
Pour ce faire, les analyses sont basées sur le mode d’observation en profondeur,
communément appelé « observation participante ». Elle met le chercheur en contact
direct et prolongé avec la vie quotidienne du groupe observé (ethnique ou autre). Elle
implique le dépaysement qui permet la confrontation critique des déterminants socio-
culturels du chercheur avec ceux des groupes qu’il observe.
Les données sont récoltées en considérant la culture comme une structure, c’est-à-
dire comme une totalité. Après leur récolte, les données sont traitées suivant les
méthodes qu’utilise l’ensemble des sciences humaines. Leur traitement est rendu efficient
par l’usage d’une approche en tant que modalité d’accès à l’objet d’étude. Celle- ci peut
être culturaliste, linguistique, comportementale, etc.
4.3. Les orientations scientifiques
4.4. La culture
A. Le concept
Le terme « culture » est emprunté à l’allemand « Kultur », sitôt après la naissance
de l’anthropologie en tant que discipline scientifique à la fin du 19 ème siècle. De l’Allemand,
il est d’abord passé en Anglais avant d’être traduit en Français à cause de l’ampleur de
l’anthropologie en Grande Bretagne.
Au début, ce terme relevait du langage courant et désignait l’exploitation agricole
d’un espace terrestre. C’est à la fin du 18 ème siècle que ce concept est appliqué en sciences
humaines. D’abord chez Voltaire, il a signifié l’idéologie d’une nation ou la philosophie de
l’histoire humaine envisagée dans son ensemble (Esprit de peuple). Dans un autre écrit
(Essai sur les mœurs et l’esprit des nations), cet auteur l’utilise pour stigmatiser la
différenciation des groupes humains.
B. Définition
a) Définitions descriptives
La culture est entendue comme étant un ensemble des valeurs qui consistent dans
la création de l’homme en tant que membre d’une société. En définitive, cet ensemble des
valeurs finissent par être des traits remarquables de ladite société.
-Herskovits : C’est cette partie de l’environnement total de l’homme qui inclut les objets
matériels de fabrication humaine, les techniques, les fabrications sociales, les points de
vue et les buts sanctionnés qui sont les facteurs immédiats de conditionnement sous-
tendant le comportement humain.
b) Définitions historiques
Selon certains auteurs, la culture consiste dans les modalités de survie d’une
population, lesquelles modalités constituent la matière que la société transmet à ses
membres à travers les temps.
c) Définitions psychologiques
Ici, la culture est ramenée à l’ensemble des comportements qui sont acceptés au
sein du groupe social.
-Morris (1946) : Il la conçoit comme étant les moyens caractéristiques qui permettent aux
individus dans une société de satisfaire leurs besoins fondamentaux.
-Hart et Panzer (1925) : c’est toutes les formes de comportements acquises socialement et
transmises socialement.
Somme toute, l’idée générale qui se dégage de toutes ces définitions est que la
culture est l’ensemble des stratégies adoptées par l’homme et le groupe en vue d’assurer
la pérennité et l’identité de celui-ci à travers les générations. Elle est la totalité des
résultats positifs et constructifs des expériences collectives d’une société. Ces résultats
2°) L’aspect immatériel: La culture consiste dans les institutions qui visent la prise en
charge par le groupe de la manière de vivre et de concevoir, le monde. Par exemple :
- La famille plus particulièrement les parents ont le devoir d’assurer la santé et
d’éducation des enfants ;
- L’Etat a entre autres, le devoir d’assurer la vie et la sécurité des individus vivant sous
son contrôle ;
Anthropologie Générale -G1 Soc & G1 Anthr
49
3°) L’aspect social: La culture consiste dans tout ce que l’homme élabore et produit en
transformant les simples éléments de la nature. Par là, la culture tient à la négation de la
nature et vise au regroupement humain et à l’élaboration des réseaux des relations
interhumaines. Par exemple : la communication sociale, le dialogue, la visite (le contact),
la consolation, l’ouverture d’esprit, la collaboration, la sollicitude, le jeu, le loisir, la
courtoisie, la créativité, la responsabilité, l’alliance, le mariage, l’association, etc.
D. Les caractéristiques
La culture est inconsciente, idéale, totalisante et permanente.
1) Inconsciente : à l’issue d’un certain apprentissage, la culture s’installe dans la zone
inconsciente et en épouse la nature. La conscience, elle, n’y puise que ce qui est
nécessaire comme réponse à un stimulus précis ou à une situation donnée.
Par exemple: Répondant à votre demande, l’individu X vous explique le
cérémonial de la prestation de serment. Pourtant, quelques instants avant cela, le
savoir ainsi exprimé était dans les oubliettes, dans les « profondeurs » de la
personne.
2) Idéale : la culture est réelle, parce qu’elle se traduit par ce qui est palpable, concret et
matérialisation tel que la quotidienneté sociale. Par exemple, la manière de vivre en
famille, à l’école, à l’église, dans l’entreprise, au sein de son état ; bref, dans une
quelconque institution ou organisation sociale. Mais, la culture est idéale dans la
mesure où elle constitue un modèle théorique, une grille de référence, un guide, de
l’institution, de la société.
comme celui du détournement des fonds dans une entreprise, ou encore de l’indiscipline
à l’école, etc. sont éloquents.
3) Totalisante: la culture est « super-organique », parce qu’elle confère une identité à la
société, en assure la vie ou le fonctionnement. Elle n’est pas l’affaire d’un individu ou
d’un groupe quelconque d’individus.
4) Permanente : la culture n’est pas éphémère, elle est toujours présente et jamais en
vacance. Comme institution, elle subsiste au-delà du passage des hommes y compris
ceux qui l’ont fondée ou amendée. Pour cela, elle est trans-générationnelle. Ainsi dit-
on avec raison : « les hommes passent et les institutions restent ». Mais, la
permanence de la culture ne signifie pas un statu quo, immuabilité, c’est simplement
une négation du vide, de la rupture.
2. Société et Culture
Il ne convient pas de confondre la société à la culture. Ces deux concepts ne sont ni
identiques ni non plus opposés. Ils sont plutôt interdépendants. Société est certes un
concept de base de la sociologie; alors que les anthropologues, eux, ont tendance à
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51
utiliser le terme « groupe culturel» ou « groupe ethnique» dans le sens d’une population
culturellement distincte ou ethnologiquement plus ou moins unique.
Mais chez les analystes anthropologues anglo-saxons, le terme société est
considéré comme aussi principal que celui de culture, cependant ce dernier est beaucoup
plus vieux que le premier. La société se distingue par ce qu’elle désigne davantage le
peuple qui pratique des mêmes coutumes. C’est pour cela que Linton spécifie que la
société est une collection permanente des hommes vivants, tandis que la culture est
l’ensemble des institutions grâce auxquelles les hommes vivent.
Geerts conclut que la culture est la structure, le tissu ou la charpente de la
signification en termes de ce dont les hommes vivants se servent pour interpréter leurs
expériences et pour orienter leurs actions. Il s’en suit que la structure sociale est la forme
que prend l’action humaine.
En somme, la culture et la structure sociale sont des abstractions différentes d’un
même phénomène. La relation essentielle entre les deux débouche sur l’usage d’une
expression linguistique complexe qu’est le socioculturel. En effet, tout fait social est
culturel et inversement : il est bidimensionnel. Il repose d’une part sur les relations aux
modèles d’action ou à la culture et, d’autre part, sur les relations entre les individus
membres d’un groupe donné.
Il n’existe donc pas de société sans culture. Aussi une culture ne peut exister sans
qu’il y ait une société qui l’a sécrétée ou transpirée. L’implication de cette situation est ce
qu’on appelle la réalité socioculturelle. Hogpin la conçoit mathématiquement dans
l’équation suivante : Société Humaine = Culture + Population. C’est dire que la culture et
la société sont comme les deux faces d’un papier carbone.
En somme, la réalité socioculturelle est l’articulation effective des valeurs de la
société sous forme de culture matérielle, d’organisation économique, d’organisation
sociale, d’organisation politique, du contrôle social, des conceptions du monde, de l’art et
des loisirs ainsi que de la langue.
1° la culture matérielle : les aliments et les habitudes alimentaires, les vêtements et les
parures, le logement et le milieu de vie, les moyens de transport, les instruments et les
armes, l’artisanat et les usines (poterie, textile, métallurgique).
2° L’organisation économique : le comportement économique ou la relation entre
l’homme et le matériel, les systèmes de production (division de travail, direction et usages
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de travail, les systèmes d’échange (circulation des biens entre hommes et entre groupes),
l’adaptation aux exigences du moment, la distribution du produit et du surplus (la faille
engendre la guerre).
3° Le contrôle social : la définition de la morale, de l’éthique et du droit, les forces de la
conformité sociale (facteurs normatifs, régulateurs et juridiques), les prédispositions
institutionnelles et définitions culturelles du crime et du criminel, la codification de la
punition.
4° La conception du monde : incluant : la connaissance, les croyances, les origines et les
fonctions de la religion, les systèmes religieux (caractéristiques des mythes et ses autres
croyances religieuses, types d’organisations et rite),la conception de la magie et de ses
relations avec la religion.
5° L’art et les loisirs : la conception de la recréation, les caractéristiques de la sublimation,
les perspectives esthétiques, l’orientation de l’art.
6° La langue : origine et développement du système de communication, structure et
fonctionnement de la langue, distribution et dynamique de la langue, la métalinguistique
(relations entre langues et les conceptions du monde), formes et histoire de l’écriture.
3. Société et individu
Les rapports entre l’individu et la société impliquent:
- La survie collective : morale, matérielle et culturelle.
- L’éducation : transmission culturelle assurée aux cadets par les aînés, de génération
en génération
- Le mariage : conçu de manières diverses et diversifiées (patrilinéat/matrilinéat ;
monogamie/polygamie). Du mariage naissent nécessairement de nouveaux rapports.
(cf. les systèmes de parenté africains).
En somme, il en découle que les rapports entre l’individu et les membres de la
société constituent une évidence. En effet, les individus jouent des rôles au sein de la
société. Ils sont hiérarchisés et classés en fonction de leurs rôles respectifs, de leurs âges
(biologique, social), ainsi que leurs classes sociales (niveau de vie). Ces rapports se
confondent parfois avec la parenté. Dans ce cas, la survie est assurée par des systèmes de
parenté.
1° La personnalité
Selon Beaglehole, la personnalité est une organisation dynamique des besoins et
des émotions que les membres d’un groupe culturel particulier vivent en commun et qui
permettent à chaque personne de répondre adéquatement aux principales valeurs ou aux
attentes sociales du groupe. Dès lors, elle implique la continuité des forces fonctionnelles
et des formes qui sont manifestées à travers les moments capitaux de l’existence,
notamment lors de la naissance, de la mort, du passage des statuts etc. (cf. Kluckohn et
Murray).
C’est en somme les actions, les pensées et les sentiments caractéristiques d’un
individu (Honigmann). En étudiant la personnalité l’anthropologie soulève deux
problèmes :
-la manière dont les contextes socioculturels modèlent des types différents de la
personnalité.
-l’importance et la signification des variations, des écarts par rapports aux types de
comportements normaux.
Ce faisant, R. Linton, trouve que les membres d’un groupe fondent leurs
comportements sur la personnalité de base. Celle-ci est le type de personnalité dominant
considéré comme normal. La normalité est à considérer au regard :
- de la position sociale (miliaire, pasteur, prêtre, professeur, chef politique)
- de la gamme des variations ou dynamique de la personnalité suivant l’âge et le sexe
- des déterminations biologiques : la race, par exemple.
- des déterminations sociales : le niveau de vie et de culture
- du rôle : Responsabilité et action.
2° La civilisation
Selon son sens étymologique, civilisation, qui provient du latin Civitas, désigne la
vie dans la cité. En Anthropologie, ce terme est utilisé en référence aux valeurs
3° L’éducation
Tout groupe humain se fixe comme principale préoccupation de préparer l’individu
à assumer adéquatement des rôles dans la société, c’est-à-dire à fournir des réponses
culturellement prescrites et attendues de la société. Il le soumet pour ce faire à une
enculturation, c’est-à-dire à un processus d’intégration à la culture du groupe.
L’éducation est assurée à travers :
- le système de parenté représenté à la base par la Famille : A ce niveau l’éducation vise
l’ensemble des activités de la vie sociale que l’individu apprend par l’observation et
l’imitation de ses initiateurs ou éducateurs. Il s’agit ici d’une éducation informelle et
définitive, qui se transmet de générations en générations ;
- l’école : dont l’éducation se caractérise par des aspects formels (durée), des faits de
spécialisation (orientation de la formation) et des mécanismes de sélection des
candidats (Pibbington).
- les confessions religieuses : dont les prédications sont fondées sur une certaine
doctrine et qui influencent la personnalité ou la culture du croyant,
- l’Etat : en tant qu’institution ayant en sa charge l’impérieuse mission de la gestion des
citoyens. En Afrique généralement, il est l’élévation à assumer la tâche de la formation
de la nation par l’élévation du niveau de vie et de culture de ses citoyens. Cependant
quelle que soit sa gestion, il a de l’impact sur la personnalité du citoyen ;
- la communication sociale : qui se réalise par les mass médias, les conférences, les
animations des groupes culturels et tant d’autres mécanismes ;
- l’individu lui-même qui doit, en dernière instance, s’assurer et se tracer une ligne de
conduite en tant que membre du groupe, de la communauté ou de la société et non
isolement ou socialement.
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3. La dynamique culturelle
A l’instar des autres formes de réalités, la culture est soumise à la condition du
mouvement. Ses mouvements se manifestent par sa dynamique constante, qui lui assure
la continuité et les changements.
La dynamique culturelle est interne et externe. D’une part, elle peut se manifester
par des raisons propres à la culture concernée ; et, d’autre part, elle peut résulter d’un
contact avec une ou plusieurs autres cultures. L’ensemble de la dynamique de la culture
constitue des processus culturels généraux au sein desquels on distingue des mécanismes
culturels propres à chaque dynamique. A chaque mécanisme culturel correspond des
formes différentes à travers lesquels les manifestations ont lieu.
Chapitre V
Tout au long de son histoire, l'anthropologie a été marquée par quelques grandes
tendances, dont les chercheurs aujourd'hui se réclament à savoir: l'évolutionnisme, le
matérialisme, le diffusionnisme, le fonctionnalisme, le structuralisme, le culturalisme et le
dynamisme.
Nous entendons par théorie anthropologique un corps de pensée travers lequel
des anthropologues saisissent et étudient de manière particulière l’objet de leur pratique.
Ce faisant, il existe plusieurs courants en anthropologie. Nous les présentons suivant dans
l’ordre de leur apparition ; sans pour autant insinuer que la sortie d’une nouvelle théorie
disparaître totalement la précédente. Il arrive plutôt que les deux coexistent sur le marché
de l’opinion scientifique.
1. L’évolutionnisme
1° Postulats
L’évolutionnisme est né de suite de l’influence de la théorie de « Sélection
naturelle » du naturaliste anglais Charles Darwin sur la théorie de l’évolution des espèces,
grâce aux résultats de l’archéologie préhistorique. Il s’entend comme une réponse
corrective de l’anthropologie à la théorie du racisme qui fait valoir la supériorité des
« blancs » sur les autres. Il exploite la variable temps pour expliquer la nature des sociétés
et des cultures humaines.
1. L’espèce humaine est une : la race ne l’influence aucunement.
2. L’humanité évolue de façon unilinéaire : de la société primitive on tend vers la
civilisation.
3. Toutes les civilisations convergent vers un même point
4. Les différences entre les cultures sont dues aux conditionnements.
5. L’évolution s’opère en trois stades depuis que le cerveau de l’homme a atteint la
capacité de 600 cm3. Les trois stades sont: la sauvagerie, la barbarie et la civilisation.
Chaque stade s’étend en trois périodes : une ancienne, une moyenne et une récente.
Primitifs Nègres Chinois Arabes Indiens Europe Est Europe Occ USA
2. Le diffusionnisme
Elle est une réaction ou une opposition à l’évolutionnisme : elle considère la
variable espace et rejette celle du « temps » pour interpréter les sociétés et les cultures.
Elle prend comte l’expansion et l’état de la civilisation à cause de l’emprunt, la diffusion
et le contact des éléments culturels. L’on distingue deux écoles diffusionnistes: une
germano-autrichienne et une autre américaine.
a. L’école germano-autrichienne
1° Postulats :
1° L’homme invente rarement mais les inventions circulent rapidement.
2° La distance géographique n’est pas un obstacle à la diffusion.
3° Le développement culturel résulte principalement de la diffusion à partir de l’Asie.
4° Le développement est multiple et non unilinéaire.
5° Les divers éléments culturels forment une constellation et voyagent toujours ensemble.
6° L’emprunt n’est pas automatique, mais immédiat.
3. Le fonctionnalisme
Le fonctionnalisme conteste la référence au passé (évolutionnisme) et au voisinage
(diffusionnisme) pour expliquer la nature des cultures et des sociétés actuelles. Il prône de
considérer la culture ou la société par rapport à elle-même. Elle estime que la société et la
culture sont comme des organismes vivants.
1° Postulats :
1) Chaque culture a son explication logique en elle-même : elle est une totalité organique
et ne peut pas être comparée à une autre.
2) Tout élément culturel joue un rôle déterminé par rapport à l’ensemble: rien n’est
gratuit dans la société.
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4. Le structuralisme
Cette école analyse les sociétés dans leur globalité en s’inspirant des méthodes de
la linguistique (sémiologie) et de la géologie (les couches). Il s’en suit le traitement des
faits culturels comme des messages, des modes de communication et d’échange à travers
des réseaux sociaux.
1° Postulats :
1) Il y a unité fondamentale de l’esprit humain.
2) L’homme naturel n’existe pas : l’homme est porteur de culture.
3) Les modèles culturels sont des schémas organisateurs de la société : ils sont en
nombre limité et peuvent être inventoriés.
4) Le modèle peut être conscient ou inconscient : entre le conscient et l’inconscient, c’est
l’inconscient qui est le plus significatif.
5) La culture repose sur un code (sa signification) et un codage (message symbolique,
illisible à déchiffrer).
2° Représentant : Claude Lévi-Strauss (1908-2008).
5. Le structuro-fonctionnalisme
Le structuro-fonctionnalisme est la tendance selon laquelle les actions sont
comprises au regard de leur fonction dans la structure sociale.
1° Postulats
1) L’action suppose un agent, « un acteur ».
2) L’action doit avoir une « fin » : elle est tournée vers un état futur des choses qui
oriente son processus de déroulement.
3) L’action doit avoir lieu dans un cadre qui diffère, en tout ou en partie, de l’état des
choses vers lequel est tendue la réalisation de cet acte. Deux types d’éléments
portent cette situation, à savoir : les conditions de l’action ou les éléments que
l’acteur ne modifie pas ou ne peut empêcher leur modification ; et les moyens ou les
éléments sur lesquels l’acteur a un contrôle.
4) L’action suppose des relations entre tous ses éléments.
5) Le système de l’action sociale se décompose en quatre sous-systèmes,
interdépendants, classés selon un degré de complexité décroissant évaluée en
termes d’information et non d’énergie : le sous-système culturel, social, de la
personnalité (psychique) et de l’organisme (biologique ou adaptatif).
6) Chaque sous-système prend place au travers des valeurs, des normes, des collectivités
et des rôles.
7) Chaque sous-système remplit une fonction particulière, appelée « impératif
fonctionnel ».
6. Le culturalisme
Cette école est en rapport avec le fonctionnalisme et en continuité avec le
diffusionnisme aménagé et approfondi par la psychologie, la psychiatrie et la
psychanalyse dans un esprit interdisciplinaire qui se développe aux Etats-Unis. Elle est
appelée groupe de culture et personnalité dont l’objet est double :
-Cerner les différences entre les cultures
-Cerner le rapport entre telle culture et telle type de personnalité.
Cette école a le mérite de démontrer que la thèse de « Complexe d’Œdipe »
développée par S. Freud dans Totem et Tabou n’est pas suffisante. Cette thèse n’a fait que
poser en des termes nouveaux les traumatismes sociaux, les frustrations et la question de
l’origine de la culture. D’ailleurs, ce complexe est relatif et non universel (Malinowski).
1° Postulats.
1) La culture se spécifie par la structuration de ses institutions.
Par ex. : Selon les études de R. Benedict : -La culture Apollinienne est marquée par
le conformisme, le ritualisme et les manifestations émotionnelle excessives. –La
dionysiaque est caractérisée par l’individualisme, l’exubérance, la guerre, le passage
de la dépressivité à l’excessivité.
2) La culture est sous-tendue par l’éducation et c’est elle qui forme la personnalité : on
ne naît pas femme, femme on le devient.
3) La personnalité de base ne fonde qu’une partie des comportements culturels, car il y a
aussi la personnalité de statut qui intervient.
2° Représentants: Edward Sapir, M. Mead, R Benedict, K. Linton, C. Dubois, A. Kardiner, B.
Malinowski.
7. Le dynamisme
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