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TC 146

GRAND ANGLE

Stress chronique : panorama


et focus sur de nouveaux
indicateurs biologiques et
biomécaniques

AUTEUR :
en M. Mouzé-Amady, laboratoire Physiologie-mouvement-travail (LPMT), département Homme au travail, INRS
résumé

Après quelques MOTS CLÉS


rappels de base sur les Stress / risque
mécanismes neuro-psycho- psychosocial /
immunologiques impliqués maladie « D’un point de vue biologique, le physiologique d’alarme (astreinte)
dans la réponse de stress chronique stress est l’interaction entre dom- de l’organisme face à une sollici-
et les notions d’acuité mages et défenses, au même titre tation contraignante (le stresseur)
et de chronicité, deux qu’en physique la tension ou la [2]. Souvent, le mot stress désigne
nouveaux indicateurs de pression représente l’interface indistinctement le ou les stimuli
stress sont présentés : le entre une force et la résistance qui à l’origine de cette réaction et la
cortisol endogène capillaire lui est opposée » [1]. réponse proprement dite de l’orga-
(CeC) et le Syndrome algo- nisme. Il est donc recommandé, par
dysfonctionnel de l’appareil souci de clarification, de distinguer
manducateur (SADAM). les deux concepts. À l’origine, la
Les travaux sur le CeC et le INTRODUCTION réponse de stress a été considérée
SADAM sont abordés en lien comme non-spécifique par Selye :
avec des situations de stress Cet article fait le point sur l’un des quel que soit le stresseur (stimulus
chronique. La pertinence aspects du stress au travail : la phy- nociceptif, effort physique, pres-
de ces derniers, en matière siopathologie de sa chronicité, et sion temporelle…), ce dernier pro-
de prévention et de donc sur son dépistage et/ou sa duit, outre des effets spécifiques
perspectives de recherche en surveillance à l’aide de nouveaux (brûlure, douleurs… selon la nature
santé au travail, est discutée. indicateurs biologiques et biomé- de l’agression), une réponse non-
caniques. Pour mémoire, selon l’Or- spécifique d’adaptation. Cette ré-
ganisation mondiale de la santé ponse non-spécifique aiguë résulte
(OMS), le stress apparaît chez une de l’activation de circuits et média-
personne dont les ressources et teurs biologiques spécifiques, innés
stratégies de gestion personnelles et réflexes (figure 1). Par réflexe,
sont dépassées par les exigences il faut entendre « réponse incon-
qui lui sont posées (pour le travail, ditionnelle » (au sens du condi-
que ce soit en termes de surcharge tionnement pavlovien) : ainsi un
ou de sous-charge). stimulus inconditionnel provoque
C’est à Hans Selye (en 1936) que une réponse inconditionnelle (si
l’on doit, initialement, la descrip- le doigt s’approche trop près de
tion scientifique de cette réponse la flamme, la main recule…). Si le

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Figure 1 : Modèle psychoneuroimmunologique de la réponse de stress (adapté gique humain, la réponse de stress
de Maier et Watkins [3]). Initialement, les études portaient principalement a lieu (figure 1).
sur les circuits A1-B1 (axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien), puis A-B. La
psychoneuroimmunologie a intégré le circuit C (immuno-neural) : la production Du point de vue de la prévention
de cytokines est non seulement périphérique mais également intra-cérébrale du stress (aigu ou chronique), le
permettant une communication bi-directionnelle entre système immunitaire et seuil de déclenchement peut être
nerveux.
modulé par de nombreux facteurs
individuels ou psychosociaux :
personnalité, degré de résilience,
niveau de soutien social, tech-
niques de gestion du stress, envi-
ronnement social protecteur…
Par ailleurs, la psychologie cogni-
tive, en particulier, a modéré la
vision « mécaniste » de Selye en
soulignant le rôle chez l’Homme
de l’évaluation psychologique, le
degré d’activation émotionnelle, le
style de coping (to cope with = faire
face) [5] dans le déclenchement ou
non de la réponse de stress.
Historiquement, ces réponses
adaptatives non-spécifiques ont
été modélisées par Selye sous la
dénomination de Syndrome géné-
ral d’adaptation (SGA) [1]. L’intérêt
de ce modèle triphasique est qu’il
intègre la notion de temps d’expo-
sition et donc de chronicité. Dans la
phase d’alarme, l’organisme mobi-
lise le maximum de ressources (y
compris immunitaires) pour faire
face au(x) stresseur(s). Dans le meil-
leur des cas, cette première réaction
permet de s’épargner des effets
nocifs du stresseur (par évitement
par exemple) ou de s’y soustraire
(par la fuite par exemple [6]). Dans
un scénario plus pessimiste, l’indi-
vidu n’a pas le choix, ses marges
de manœuvres sont limitées et il
doit faire face (deuxième phase).
Selon le contexte et les ressources
(physiques, psychologiques et/ou
sociale) disponibles, cette phase de
résistance peut être plus ou moins
longue, fructueuse (retour à l’état
de non-stress) ou peut échouer.
caractère linéaire [4] de la cascade sont évoquées ici, encore faut-il Dans les deux premières phases
de libération des médiateurs et des qu’il y ait activation au départ : (alarme et résistance), le coût psy-
hormones impliqués est souligné autrement dit si le système d'adap- chobiologique pour l’organisme
et si leurs caractéristiques de spé- tation se déclenche, alors, compte peut être non négligeable, voire
cificité, d’hérédité et de réflexivité tenu du « câblage » neurobiolo- délétère, surtout si ces situations

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se réitèrent fréquemment. Dans le clenchée : l’axe hypothalamo-hy-
pire des scénarios, chronicité d'ex- STRESS AIGU ET STRESS pophyso-surrénalien (HHS) (figure
position, la phase d’épuisement CHRONIQUE 1) est activé, la fréquence cardiaque
est atteinte : la somatisation est s’élève brutalement, la tension
exacerbée, le système immunitaire À l’examen de l’abondante littéra- musculaire augmente… Si l’envi-
se dérégule, le burnout ou épui- ture sur le stress psychobiologique ronnement redevient calme, la RO
sement professionnel [7], voire le (en laboratoire, au travail, dans le et le SGA cessent. Ainsi, un stres-
karōshi [8] ou sport, lors d’événements de vie…), seur aigu a provoqué une réponse
« mort par excès de travail » la majorité des travaux porte sur de stress aiguë.
peuvent survenir, ce dernier étant l’étude des effets des stresseurs lors À l’inverse, on parle de « stress
reconnu comme maladie profes- d’une exposition aiguë à côté de chronique » lorsque l’exposition à
sionnelle au Japon depuis 1995 [9]. ceux étudiant les effets lors d’expo- l’agent stresseur persiste et/ou se
En 1973, Selye [10] affine son mo- sitions chroniques. Il est dès lors répète fréquemment. Un consen-
dèle physiologique en introdui- important de donner une définition sus existe dans la littérature scien-
sant deux nouveaux concepts, opérationnelle au stress aigu et au tifique selon lequel le stress aigu
les réponses syntoxique et cata- stress chronique. Cette question participe à une réaction adap-
toxique, pour expliciter « les pro- n’est que très rarement abordée tative de l’organisme face à une
cessus physiologiques coordonnés dans la littérature. Du point de vue menace réelle ou anticipée. Dans
qui maintiennent la majorité des de la santé, et de la santé au tra- la phase d’alarme du SGA, les neu-
états stables dans l’organisme » ou vail en particulier, une morbidité rotransmetteurs (catécholamines,
« homéostasie » définie pour la plus importante semble associée sérotonine) et les peptides (corti-
première fois par Cannon en 1932 au stress chronique [12]. Par ail- colibérine, arginine-vasopressine)
[11]. Il soutient que cette homéosta- leurs, dans les années à venir, avec ont un déclenchement très rapide
sie repose sur ces deux types de ré- l’allongement de la carrière profes- (quelques secondes), alors que la
ponses pouvant caractériser le SGA. sionnelle, il sera nécessaire de rester libération des hormones glucocor-
Afin de s’adapter aux différents attentif aux effets éventuels liés au ticoïdes est plus tardive (minimum
stresseurs, l’organisme va tenter de stress chronique. Cela étant, encore 20 à 30 minutes), leurs actions per-
réguler ses réactions par le biais de faut-il disposer d’outils adéquats durent aussi plus longtemps (plu-
messagers neuro-hormonaux qui de dépistage, voire de surveillance, sieurs heures) [4]. Dans la phase de
« calmeront » (ex : l’action anti-in- d’indicateurs infracliniques. résistance, l’état de stress peut se
flammatoire des glucocorticoïdes) On parle de « stress aigu » lorsque chroniciser. Dans une méta-ana-
ou « inciteront » (ex : cytokines sti- l’agent stresseur survient brus- lyse de plus de 300 articles empi-
mulant des anticorps, des macro- quement et provoque une réponse riques, Segerstrom et Miller [14]
phages…) au combat. Les messa- d’adaptation rapide et brève : dans décrivent la relation entre stress
gers syntoxiques agiraient en tant un bureau calme, sursauter au psychologique et paramètres im-
que « tranquillisants cellulaires » claquement d’une porte en est un munitaires en adoptant la taxono-
conduisant à un état de tolérance exemple trivial. Pour le psycho- mie d’Elliot et Eisdorfer [15]. Cette
passive, une sorte de coexistence logue cognitiviste, le « claquement classification distingue cinq caté-
pacifique avec les agents stresseurs. de porte » est un stimulus « prosexi- gories de stresseurs :
À l’inverse, les messagers cata- gène » (qui éveille l’attention) qui O les stresseurs aigus limités dans
toxiques produiraient des attaques va déclencher une réaction d’orien- le temps (5 - 100 min) sont typique-
actives (principalement par le biais tation (RO) immédiate : tourner la ment des situations de laboratoire
d’enzymes cataboliques) vis-à-vis tête en direction de la source du où le protocole expérimental repose
de l’agent pathogène. bruit. Cette RO s’accompagne d’une sur des opérations d’arithmétique
focalisation de l’activité senso- mentale imposées, des scénarios de
L’objet de cet article est de faire le rielle (ici, visuelle et auditive), puis prise de parole en public... ;
point sur l’actualité des connais- d’une immobilisation transitoire O les stresseurs naturels brefs sont
sances sur la physiopathologie du du corps afin de minimiser toute constitués par exemple par le fait
stress chronique et de présenter de stimulation « parasite » de celle de devoir passer un examen acadé-
nouveaux indicateurs en mesure de vers laquelle l’organisme s’oriente mique, un entretien d’embauche… ;
refléter spécifiquement sa dimen- [13]. Pour le physiologiste, la phase O les séquences d’événements stres-
sion temporelle. d’alarme du SGA de Selye est dé- sants peuvent être par exemple la

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perte d’un proche, une catastrophe tion pharmacologique). L’allostasie, ractions étroites entre les sys-
naturelle majeure vécue… ; quant à elle, définit la santé comme tèmes nerveux (central et périphé-
O les stresseurs chroniques sont un état répondant (« a state of res- rique) et le système immunitaire,
des événements qui envahissent ponsiveness ») avec des fluctuations O de souligner le rôle de l’appren-
la vie de l’individu au point de le anticipées et optimales à des fins tissage dans l’immunomodula-
contraindre à restructurer son iden- d’adaptation [19]. Le modèle allos- tion que peut subir l’organisme, et
tité ou son rôle social (chômage de tatique accentue l’aspect dyna- notamment en présence de stres-
longue durée, maladie chronique, mique en admettant que, dans un seurs.
exil politique et/ou conflit armé, but adaptatif, les paramètres phy-
prise en charge d’un proche lourde- siologiques peuvent fluctuer (tem- Selon Ader [22], les expériences les
ment handicapé…). La particularité porairement) au-delà des valeurs plus anciennes sur les relations
de ces stresseurs est leur « stabi- normales. On parle de charge allos- entre cerveau et système immuni-
lité » et le fait que l’individu n’a tatique (CA) lorsqu’il y a répétition taire remontent au début du XXe
aucune information sur la durée de de réponses allostatiques telles que siècle [23]. Dans les années 70, les
l’exposition, et ignore même si elle celles activées lors de situations premières études modernes sur les
cessera un jour ; stressantes [20]. Les taux de glu- relations apprentissage-immunité
O les stresseurs distants se mani- cocorticoïdes et de cytokines (im- sont publiées. L’expérience princeps
festent par des traumatismes (re) munomédiateurs) constituent les porte sur l’immunosuppression
surgissant tardivement (plusieurs biomarqueurs primaires de la CA. par conditionnement comporte-
mois ou années après l’exposition) Les biomarqueurs secondaires sont mental [24] chez le rat. Historique-
en raison des séquelles cognitives métaboliques (insuline, glucose, ment, Garcia et al. [25] observent
et émotionnelles persistantes cholestérol…), cardiovasculaires que des rats développent une aver-
(abus sexuel durant l’enfance, viol, (pression artérielle…) et immu- sion conditionnée à la saccharine
prisonnier de guerre…), aussi ap- nitaires (fibrinogène, protéine C- s’ils sont exposés après ingestion
pelé stress post-traumatique (ap- réactive…). Lorsque ces paramètres de l’eau saccharinée à des rayons
paru dans la nomenclature DSM dépassent les seuils infra-cliniques, gamma (lesquels provoquent d’im-
III en 1980)[16]. l’étape finale de la CA est la sur- portants troubles gastriques) et ce,
charge allostatique aux consé- en un seul essai. Cette observation
Même si cette taxonomie est dis- quences délétères (correspondant est à l’origine de l’hypothèse d’Ader
cutable, elle a le mérite d’exister. à la phase d’épuisement du SGA de et Cohen : une immunosuppression
Il est également constaté que si Selye). peut également être conditionnée
les deux premières catégories ré- comportementalement. Dans leur
sultent en une réponse adaptative, expérience, les auteurs ont associé
ce n’est pas le cas des suivantes de la saccharine (Saach) mélan-
qui, elles, sont délétères. PSYCHONEUROIMMUNO- gée à l’eau de boisson chez des rats
LOGIE ET STRESS suivie d’une seule injection intra-
Une autre conceptualisation du CHRONIQUE péritonéale de cyclophosphamide
stress fait appel à « l’allostasie » ou « (CY) pour le groupe expérimental
stabilité à travers le changement », Parler de stress chronique, et donc et de solution physiologique (NaCl)
terme introduit par Sterling et Eyer de ses effets sur la santé, nécessite pour le groupe contrôle. Trois jours
en 1988 [17]. C’est le processus par de connaître les apports fonda- après, tous les animaux reçoivent
lequel un organisme maintient sa mentaux d’une discipline récente, par injection un antigène, seul le
stabilité physiologique en modi- introduite en 1981 par R. Ader [21] : la groupe Saach + CY (groupe expé-
fiant ses paramètres internes pour « psychoneuroimmunologie » (PNI), rimental) ne présente pas d’anti-
qu’ils s’accordent aux demandes relevant de ce que les anglo-saxons corps spécifique à l’antigène reçu à
environnementales. Dans le mo- appellent « Behavioral Medicine ». l’inverse du groupe contrôle Saach +
dèle classique de l’homéostasie [11, La PNI a fourni les principales bases NaCl. Le groupe expérimental a non
18], la santé est définie comme un scientifiques et expérimentales à ce seulement développé une aversion
état dynamique dans lequel tous l’on qualifiait jadis de symptômes conditionnée à la Saach (réduction
les paramètres physiologiques « psychosomatiques ». Les contribu- de la consommation d’eau aroma-
opèrent dans une « fourchette » de tions majeures de la PNI ont été : tisée), mais voit son taux de morbi-
valeurs normales (sans interven- O de démontrer l’existence d’inte- dité (voire de mortalité) corrélée po-

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sitivement avec le volume de Saach terleukine-2 (IL-2) et l’interféron-a cologique, la boisson aromatisée
originellement consommée, et ce (IFN-a). L’étude porte sur des volon- mimant l’action de l’immunodé-
jusqu’à deux mois après l’unique taires humains sains (34 hommes, presseur et donc son effet antirejet.
injection de CY. Ces résultats [21] ont 26,7 ± 4,2 ans) sur une durée de 2 se- À noter que dans leur expérimen-
été confirmés par de nombreuses maines. Durant les 3 premiers jours tation sur l’Homme, les auteurs ob-
autres études. (j 1 - j 3), le groupe expérimental (n = tiennent un conditionnement de
18) reçoit 1 dose de CsA sous forme l’activité immunitaire de manière
Deux conclusions majeures peuvent de gélules (2,5 mg.kg-1) toutes les 12 classique (c’est-à-dire par répéti-
être tirées de ces observations : heures associées à du lait aroma- tion), et non pas en un seul essai
O d’un point de vue théorique, ces tisé de couleur verte (150 mL). Cinq comme décrit dans les expériences
résultats remettent en cause un jours plus tard (j 8), les sujets sont de Ader et Cohen [24] chez l’animal.
principe fondateur du conditionne- « réexposés » à la boisson mais Mais dans ces dernières, le CY pro-
ment pavlovien ou classique : l’ap- avec des gélules placebo, jusqu’au duisait des effets nociceptifs indui-
prentissage par répétition. Dans le jour 10. Le groupe contrôle (n = 16) sant l’aversion, ce qui n’est pas le
cas présent, l’exposition unique est « traité » selon un protocole cas dans l’expérience sur l’Homme.
à un stresseur physiologique a temporel similaire, mais n’ingère
conduit à chroniciser un compor- que des gélules placebo. Tous les IMPLICATIONS EN
tement d’évitement ; sujets sont informés que l’admi- RECHERCHE EXPÉRIMENTALE
O ce n’est pas uniquement la ré- nistration éventuelle de la CsA se Les implications théoriques de
ponse comportementale qui a été fera dans la semaine 1 ou 2 sans ce type d’études ont stimulé la
conditionnée (ne plus boire d’eau plus de précision. Un bilan sanguin recherche en PNI. En effet, pour
sucrée), mais également l’altéra- est réalisé le premier jour avant le expliquer l’interaction entre com-
tion des défenses immunitaires début de l'expérimentation et les portements et défenses immuni-
induites par l’agent immunosup- jours 3 et 10 afin de déterminer les taires, il est nécessaire de poser
presseur. L’exposition unique à un paramètres immunologiques. Les l’hypothèse selon laquelle les sys-
stresseur cellulaire a aussi conduit résultats montrent que le groupe tèmes physiologiques concernés
à chroniciser la dégradation d’une expérimental présente, par rapport communiquent entre eux. De nom-
immunocompétence, c'est-à-dire au groupe contrôle, une réduction breux travaux ont démontré le rôle
à pérenniser une immunodépres- significative de l’expression d’IL 2 crucial joué par les cytokines, tant
sion. Cette expérience est remar- et d’IFN-a durant la période de au niveau du système nerveux
quable non seulement par le carac- conditionnement. Plus important, périphérique qu’au niveau central
tère unique de l’exposition mais la « réexposition » à la boisson (revue dans [29]).
aussi par l’immunosuppression seule produit chez le groupe expé- Par la suite, le modèle psychobio-
induite et maintenue par l’absorp- rimental les mêmes altérations logique des réactions de stress a
tion d’eau sucrée seule. Autrement immunitaires et ce, en l’absence de été complété. Le concept de stress
dit un comportement conditionné toute trace résiduelle de CsA dans a également changé de statut : de
en un seul essai peut induire des le sang. Par ailleurs, le condition- pathophysiologique (en général),
déficits immunitaires sévères et nement ne porte pas uniquement il devient une réaction adaptative
persistants, avec pour conséquence sur les cytokines (IL-2 et IFN-a) mais anticipée afin de promouvoir la ré-
une moindre résistance aux agents également sur la production de cer- cupération de l’organisme [3], d’où
pathogènes. tains lymphocytes T (CD3+ et CD4+) l’implication du système immu-
Chez l’homme, la première étude dont la population est réduite. nitaire. Mais au-delà du réseau de
de conditionnement comporte- communication bidirectionnelle
mental de l’immunosuppression IMPLICATIONS entre système nerveux et système
est relativement récente [26]. Dans THÉRAPEUTIQUES immunitaire qu’autorisent les
cette étude, l’agent immunosu- Un chercheur de cette équipe a cytokines, c’est vers un système
presseur est la cyclosporine A (CsA, également montré [27, 28] que ce global d’intégration des apprentis-
substance utilisée dans la pré- modèle de conditionnement, au sages d’adaptation que s’orientent
vention des rejets des allogreffes). moins chez les rongeurs, permet- les recherches en PNI [30].
La CsA affecte les lymphocytes T tait d’augmenter la survie suite à De plus chez l’homme, ces re-
en réduisant sélectivement leurs des allogreffes cardiaques avec une cherches ont également contribué
sécrétions de 2 cytokines : l’in- substantielle économie pharma- à souligner la modulation que des

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facteurs individuels (ex. la person- IMPLICATIONS EN [« stress, tracas ET événements


nalité) pouvaient avoir sur la ré- RECHERCHE SUR LE TERRAIN de vie » ET « immune »] sur la pé-
ponse au stress psychologique [31]. Kiecolt-Glaser et al. [35] ont me- riode 1960-2001. Ils obtiennent
De fait, si on peut démontrer une re- suré les variations de l’activité 300 articles qu’ils trient selon la
lation entre agents stresseurs « ob- du système immunitaire chez taxonomie de stresseurs d’Elliot
jectifs » et immunité, les résultats 75 étudiants (dont 26 étudiantes) et Eisdorfer [15] : aigu, naturel bref,
sont contradictoires entre « stress en première année de médecine événement de vie, chronique et
perçu » et réponses physiologiques. avant et pendant les examens de distant. L’analyse bibliométrique
L’étude de Tomaka et al., en 1997 fin d’année. Ils observent une di- indique des altérations immuni-
[32], constitue l’une des premières minution de l’activité des cellules taires différentielles selon le type
et rares expérimentations où la NK (les Natural Killer cells sont des de stresseur considéré (synthèse
variable « stress perçu » est mani- lymphocytes de l’immunité innée tableau I).
pulée. Selon les théories sur l’éva- non T et non B) durant les exa-
luation cognitive du stress et des mens par rapport aux niveaux de Une forme de stress dont il n’a pas
émotions (revue dans [33]), l’évalua- base mesurés 1 mois avant. En 1987, encore été question ici est l’état de
tion subjective précède les réponses l’équipe de Kiecolt-Glaser observe stress chronique « passif ». Deux
physiologiques, à l’inverse des théo- une réduction des lymphocytes études [40, 41] ont examiné l’impact
ries « périphéralistes » (Théorie de T (immunité acquise) chez 34 pa- psychopathologique et immuni-
James-Lange) qui postulent que rents-soignants de proches atteints taire chez des populations résidant
« l’éveil » physiologique produit de maladie d’Alzheimer, comparati- près d’une centrale nucléaire. Dans
par un stimulus induit l’expérience vement à une population contrôle l’étude de Baum et al. [40], 38 per-
1. Une version d’une émotion spécifique 1.. Dans les de même effectif [36]. Dans une sonnes habitant près de la centrale
moderne de cette expériences de Tomaka, les résultats autre étude concernant le person- de Three Mile Island [TMI], où un
théorie est celle
montrent que, selon les instructions nel hospitalier [37], une popula- grave accident nucléaire s’est pro-
des marqueurs
somatiques de données aux sujets pour faire face à tion de 60 infirmières remplit des duit en 1979, sont comparées à un
Damasio [34] une situation expérimentale stres- questionnaires de stress perçu groupe (n = 32) résidant près d’une
qui postule sante (opérations d’arithmétique (Nurse stress index [38]) et de santé centrale nucléaire sans accident, à
que durant mentale à haute voix, seules ou en mentale Symptom Checklist-90-R un groupe (n = 24) proche d’une cen-
un processus
association à une tâche physique (SCL-90-R [39]). Deux échantillons trale thermique et à des résidents
décisionnel,
l’organisme est selon les protocoles), on observe sont constitués : les personnes (32) (n = 27) vivant « hors-centrale ». Les
influencé par la des résultats qui corroborent tan- déclarant un haut niveau de stress outils de comparaison sont les ques-
perception de son tôt l’une, tantôt l’autre des théories et un « score psychopathologique » tionnaires SCL-90-R et BDI (Beck De-
état somatique [32]. Si les instructions données aux élevé et celles (28) déclarant un pression Inventory) [42], des tests de
contemporain
participants privilégient l’impor- faible niveau de stress et un « score performances cognitives, le dosage
et que ces
perceptions sont tance de l’exactitude des réponses psychopathologique » faible. Dans des catécholamines, le titrage des
mémorisées en parce qu’elle va donner lieu à une le groupe haut niveau de stress, on lymphocytes B et T, des cellules NK…
association à la notation individuelle, c’est l’évalua- observe une augmentation signi- Les principaux résultats montrent
décision (bonne tion cognitive (mesurée par ques- ficative des lymphocytes T et une des symptômes de stress plus éle-
ou mauvaise) qui
tionnaire avant la réalisation de la diminution des cellules NK par vés, ainsi qu’un taux de catéchola-
est sélectionnée.
tâche) qui prévaut sur l’activation rapport au groupe bas niveau de mines supérieur chez les habitants
physiologique (pression artérielle et stress. Les auteurs font l’hypothèse TMI par rapport aux autres groupes,
fréquence cardiaque enregistrée en qu’en présence de stress chronique et ce, plus d’un an après l’accident
continu). Si, au contraire, les instruc- dans l’activité, des mécanismes [40]. Six ans plus tard, dans un sous-
tions données aux participants sou- psychologiques distincts sont asso- échantillon TMI (n = 12), on observe
lignent le défi à relever et le souci ciés à des dérégulations immuni- que les paramètres de l’immunité
de faire au mieux, c’est l’activation taires spécifiques. Dans une méta- adaptative et innée sont diminués
physiologique qui va prévaloir sur analyse bibliométrique de 2004, par rapport à un groupe contrôle
l’évaluation cognitive de l’effort Segerstrom et Miller [14] inter- [41]. En 2007, Cohen et al. montrent
demandé. rogent deux grandes bases de don- pour la première fois qu’une récu-
nées scientifiques (MEDLINE et Psy- pération immunitaire est possible
cINFO) avec l’équation de recherche lorsque le stresseur chronique cesse

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,Tableau I

> PRINCIPALES VARIATIONS OBSERVÉES DE L’ACTIVITÉ IMMUNITAIRE SELON LE TYPE DE


STRESSEUR (d’après Segerstrom et Miller [14]).
Stresseur Aigu Naturel bref Événement de vie Chronique Distant

Immunité innée B(IL-6, NK, IgA) ?(NK) ?(cas : décès conjoint) ? ?

Immunité acquise ? (IFNa) ?(Lymphocytes T) B (cas : catastrophe ? ?


naturelle)

Légende : B augmentation, ? diminution, ? résultats non stabilisés.


IFNa = interféron, IL6 = interleukine6, NK = natural killer cells, IgA= immunoglobulines A

[43]. Ils ont étudié 100 chômeurs O les employés de bureau, avec une terme les défenses immunitaires.
(48 hommes et 52 femmes ; 29-45 exigence de travail faible, et les Ces résultats importants reposent
ans ± 4,62, période de chômage artisans avec un niveau d’anxiété néanmoins sur des mesures physio-
allant de 2 à 19 mois) et 100 autres bas et une latitude de décision logiques invasives et ponctuelles.
personnes ayant un travail stable élevée montrent une activité NK
(groupes contrôles appariés selon supérieure aux précédents,
l’effectif, le genre, le niveau socio- O les administratifs hospitaliers
professionnel…) durant quatre mois. présentent, quant à eux, un profil CORTISOL CAPILLAIRE :
Une prise de sang mensuelle était NK intermédiaire. NOUVEL INDICATEUR
réalisée afin de doser le taux de cel- BIOLOGIQUE DE STRESS
lules NK cytotoxiques. Les auteurs Les auteurs en concluent que le CHRONIQUE
observent une activité NK signi- type d’emploi, en relation avec le
ficativement inférieure chez les niveau de stress au travail, affecte Dans la plupart des études sur le
chômeurs comparés aux employés l’activité des cellules NK circu- stress, y compris chronique, seuls
(pas d’effet de genre). Pour les per- lantes. Ils préconisent la surveil- étaient disponibles jusqu’à pré-
sonnes retrouvant un emploi, une lance biologique de l’activité NK sent des indicateurs discrets et
« récupération » immunitaire de chez « les sujets à risques » [44]. ponctuels pour quantifier l’inten-
44 à 72 % est observée par rapport sité des effets et extrapoler leur
aux valeurs des groupes contrôles. En conclusion, les réponses de durée. Le très classique dosage
Plus récemment, en 2012, Boscolo stress, lorsqu’elles sont déclenchées, plasmatique du cortisol pour me-
et al. [44] ont étudié les conditions sont le produit de systèmes inté- surer l’activité de l’axe HHS (figure
de travail et leurs effets sur le sys- grés (psycho-neuro-hormonaux et 1), du fait de son prélèvement par
tème immunitaire de 134 travail- immunitaires) qui communiquent ponction veineuse, peut être dis-
leurs exerçant dans 5 branches entre eux via les cytokines. Un ap- cutable dans un protocole d’étude
d’activités différentes. À l’aide des prentissage réalisé par l’un peut im- sur le stress. Il devient rédhibitoire
échelles STAI 1 et 2 (State-Trait-An- pacter l’autre (ex. conditionnement en situation réelle hors labora-
xiety Inventory) [45], l’échelle STAI 1 d’une réponse immunitaire). Dans toire. Les avancées technologiques
concernant l’anxiété transitoire, certaines conditions extrêmes, des en matière de dosage permettent
STAI 2 l’anxiété en temps que trait conséquences délétères peuvent se aujourd’hui d’utiliser des échantil-
de personnalité, du questionnaire chroniciser après cessation de l’ex- lons salivaires comme substituts
de Karasek [46] relatif au contenu position à l’agent stresseur qu’il soit acceptables quels que soient les
du travail, puis d’une prise de sang physique ou psychologique. Dans contextes de recueil (laboratoire,
(pour les dosages immunitaires), les le monde du travail, la nature de vie quotidienne). Il n’en demeure
auteurs observent que : l’activité, voire son absence (période pas moins qu’il s’agit d’une quan-
O les travailleurs du secteur indus- de chômage), peut affecter l’immu- tification instantanée, qu’il faut
triel et du bâtiment qui déclarent nocompétence de l’individu. Un répéter dans le temps et en tenant
un travail à astreinte forte pré- stresseur psychosocial semble donc compte du rythme nycthéméral de
sentent le niveau d’activité NK le capable d’activer de manière dif- sécrétion propre au cortisol (revue
plus bas, férentielle puis de déprimer à long dans [47]) pour pouvoir l'interpré-

MARS 2014 — RÉFÉRENCES EN SANTÉ AU TRAVAIL — N° 137 37


GRAND ANGLE
Stress chronique : panorama et focus
sur de nouveaux indicateurs biologiques
et biomécaniques

ter. Toutefois, si l’on modifie la mé- Par ailleurs, leurs taux de CeC de 1470-1532 ap. J.-C.). Sur les dix
thode de recueil en choisissant un étaient significativement plus éle- individus dont le CeC a pu être
médium plus adéquat, il devient vés après qu’avant déplacement. Le analysés (longueur de cheveux :
possible de contourner l’aspect retour aux niveaux de base de CeC 9-27 cm), les anthropologues ont
instantané de la quantification. a été observé 35 semaines après le pu corréler le taux de cortisol avec
C’est à la toxicologie que l’on doit changement de lieu. De plus, chez les expériences individuelles ou
les principaux apports analytiques 16 animaux entraînés au préalable collectives de stress vécues (décès
dans le domaine des dosages ca- à des prélèvements salivaires, les par maladie, conflits tribaux), se-
pillaires (cheveux, poils). auteurs ont observé un triplement lon les sites et le moment du décès
Le cheveu a une croissance du taux de cortisol salivaire 2 se- (CeC maximal dans le segment
moyenne d’un centimètre par mois maines après le déménagement proximal, c'est-à-dire la partie la
chez l’Homme. Il a la propriété par comparé à la semaine précédant plus récente du cheveu).
ailleurs de stocker nombre de mo- ce dernier. Par ailleurs, pour ces 16 L’une des premières études met-
lécules de par son implantation. Il macaques, CeC et cortisol salivaire tant en relation CeC et travail date
s’agit donc d’un médium aux pro- étaient corrélés positivement de de 2010 [54]. Les auteurs com-
priétés temporelles intéressantes : manière significative (p < 0,001). Ils parent le CeC de 61 chômeurs (31
il constitue une fenêtre de détec- en concluent que le CeC est un indi- hommes, 30 femmes) de longue
tion plus longue (3 cm = 3 mois, cateur pertinent d’un état de stress durée (plus de 12 mois consécutifs)
6 cm = 6 mois…) que le prélèvement chronique. à celui recueilli chez 44 employés
sanguin ou plasmatique ponctuel. En 2009, Kirschbaum et al. [52] ont (28 hommes et 16 femmes) sur
Par ailleurs, la conservation de son mesuré le CeC chez des femmes 3 segments (3 cm) de cheveux. Ils
intégrité est remarquable : des mé- avant, pendant et après leur gros- observent un taux de CeC supé-
taux lourds (plomb, mercure…) sont sesse, ainsi que chez un groupe rieur dans la catégorie « chômeurs
détectables plusieurs siècles après « contrôle » n’ayant pas encore eu de longue durée ». Ce taux élevé
la croissance initiale du cheveu. d’enfants en prélevant des mèches de CeC serait le reflet du niveau de
Pour les substances organiques, de cheveux (4 segments de 3 cm) stress accompagnant cet « événe-
la première extraction capillaire correspondant temporellement à ment de vie » qu’est le chômage.
d’opioïdes chez des héroïnomanes une période rétrospective de 0-3, En ce qui concerne le travail posté,
a été réalisée en 1979 par Baumgar- 3-6, 6-9 et 9-12 mois. La popula- des différences ont également été
tner et al. ([48] cité par [49]). À par- tion étudiée était composée de observées selon le type d’activités
tir des années 2000, le dosage des 3 échantillons : mères de nouveaux- (nocturne ou diurne). Manenschijn
glucocorticoïdes exogènes chez des nés âgés de 2 à 4 jours (n = 103), et al., en 2011 [55], comparent 33
sportifs est réalisé lors de contrôles mères de nourrissons de 3 à 9 salariés nocturnes (SN) à 89 sala-
anti-dopages. Le premier dosage de mois (n = 19) et femmes nullipares riés diurnes (SD) : le CeC des SN
cortisol endogène capillaire (CeC) (n = 20). Les auteurs observent un est significativement plus élevé
chez l’Homme date de 2004 [50]. déclin monotone du CeC interseg- que celui des SD (47,32 pg.mg-1 vs
En 2006, la première expérience [51] ments (p < 0,0001) plus marqué 29,72 pg.mg-1). De plus si l’on dis-
portant sur CeC et stress chronique chez les nullipares. Dans le groupe tingue les SN selon l’âge médian,
est menée chez des macaques de mères de nouveaux-nés, le taux les « jeunes » ont un CeC supérieur
Rhésus. Il s’agit en fait d’une expé- maximum de CeC est atteint au aux « anciens » (48.53 pg.mg-1 vs
rience invoquée 2, les chercheurs 2. Dans une troisième trimestre de la grossesse. 26.42 pg.mg-1). Les auteurs ob-
ont en effet profité du déménage- expérience De plus, pour le premier segment servent également que l’indice de
ment programmé de l’animalerie invoquée, le (0-3 mois), le taux de CeC des mères masse corporelle (IMC) chez les
chercheur n’est
pour doser le CeC dans les poils de nouveaux-nés est le double de « jeunes » SN est supérieur à celui
pas à l’origine de
de 20 singes adultes (de 8 à 22 ans, la variation de la celui du groupe contrôle (nulli- des « jeunes » SD (IMC : 27,2 vs 23,7).
moyenne = 14,4) avant et après ou des variables pares). Par ailleurs la corrélation est signi-
déménagement (14 semaines). En indépendantes, Dans une toute autre probléma- ficativement positive entre CeC et
dépit de conditions d’habitat amé- à l’opposé d’une tique, une équipe canadienne [53] IMC. Toutefois, il n’est pas exclu, ici,
expérience
liorées dans leur nouvelle anima- a réussi à doser du CeC à partir de que des facteurs liés à la « pénibi-
provoquée où c’est
lerie, les animaux ont manifesté lui qui agit sur la « cheveux archéologiques » re- lité » du travail de nuit ou à la chro-
de nombreux troubles comporte- ou les variables. cueillis sur 5 sites péruviens clas- nobiologie (rythmes sécrétoires du
mentaux suite au déménagement. sés (datant de 550-1000 ap. J.-C. et cortisol), voire un syndrome méta-

38 N° 137 — RÉFÉRENCES EN SANTÉ AU TRAVAIL — MARS 2014


bolique chez les sujets en surpoids, de tout le matériel enzymatique fonction structurelle, biochimique
interviennent également sur l’aug- nécessaire à la production locale de ou « psychique » de la musculature
mentation du CeC [55]. cortisol sans intervention de l’axe masticatrice et/ou de l’articula-
HHS, de même le cold stress test tion temporomandibulaire. Très
INTÉRÊTS POUR LA (épreuve au froid) provoque, in vivo, longtemps cantonnée à un trouble
PRÉVENTION ET LA une production localisée de cortisol biomécanique « purement » arti-
MÉDECINE DU TRAVAIL au niveau du membre ou segment culaire, son étiologie a évolué pour
De récentes revues [56, 57] confir- corporel refroidi. Selon certains au- inclure de potentiels facteurs « psy-
ment l’intérêt du CeC dans l’étude teurs [58], cette production locale chiques ». Sa symptomatologie est
du stress chronique. Le CeC couvre de cortisol présente un avantage en très variée. En premier lieu c’est la
en effet une période de sécrétion termes de sélection naturelle : l’ac- sphère bucco-pharyngée qui est
étendue (3 cm de cheveux ≈ 3 mois tion anti-inflammatoire est plus concernée :
de sécrétion), le recueil du médium rapide, donc plus efficace, que celle O douleurs mandibulaires : articu-
est non invasif et discret (10 mg/ du cortisol libéré plus tardivement laires, limitation d’ouverture buc-
segment), il peut être stocké à dans la circulation sanguine. Mais cale, bruits articulaires, blocages…,
température ambiante et sur une cette possibilité de sécrétion locale O douleurs buccales : dentaires,
durée longue, transiter par voie semble être limitée aux stresseurs gingivales, inaptitude au port de
postale, le facteur de confusion physiques, voire thermiques, de prothèses,
chronobiologique est minimisé plus elle est transitoire [62]. Tou- O douleurs pharyngées, voire
(rythme nycthéméral lissé), enfin le tefois, il s’agit de garder à l’esprit troubles vocaux,
recueil est adapté aux exigences de ce type de biais, notamment pour O douleurs faciales et oculaires.
terrain (perturbations minimales les salariés travaillant au froid ou
de l’activité). ceux dont certaines manipulations Mais d’autres symptômes peuvent
Néanmoins, les avantages du CeC sont susceptibles de créer des chocs être présents :
en tant que marqueur de stress thermiques locaux. Enfin, il est né- O migraine : douleurs temporales,
chronique ne demeurent que si cessaire de s’assurer de l’absence pariétales, frontales ou occipitales,
quelques précautions méthodolo- de tout apport de cortisol exogène O gênes auriculaires : acouphènes,
giques sont respectées. En effet : (corticothérapie…). sensations d’oreilles bouchées,
O la pilosité varie selon le genre, O vertiges,
le site de recueil (scalp, membres O douleurs cervicales,
supérieurs ou inférieurs), l’âge O douleurs de l’épaule.
(revue dans [58]) ; SADAM : NOUVEL
O les rayonnements UV, certains INDICATEUR La première classification interna-
produits cosmétiques contenant BIOMÉCANIQUE DE tionale du SADAM a été publiée en
des glucocorticoïdes, la pollution… STRESS CHRONIQUE 1992 [64]. Sa version francophone
peuvent dégrader le CeC [59] ; validée est la classification CDR/
O concernant le mode de prélève- Le syndrome algo-dysfonctionnel DTM (critères diagnostiques de
ment, les ciseaux sont préférables de l’appareil manducateur (SA- recherche des désordres temporo-
au rasoir afin d’éviter une pollu- DAM) a été décrit pour la première mandibulaires [65]). Elle repose sur
tion locale avec d’autres sources ; fois par James B. Costen en 1934 [63] trois parties : la première comporte
O les méthodes analytiques de dans une étude clinique de onze un questionnaire recueillant un
dosage sont diverses (ELISA ou cas. Actuellement, de nombreux grade de douleur chronique, une
Enzyme-Linked Immunosorbent synonymes du SADAM existent : liste des incapacités de la mâchoire,
Assay, RIA ou Radio-ImmunoAssay, dysfonction cranio-mandibulaire les symptômes de dépression et
HPLC-MS ou High Performance Li- (DCM), troubles ou désordres tem- autres symptômes non-spécifiques,
quid Chromatography-Mass Spec- poro-mandibulaires (TTM ou DTM), des données démographiques
trometry…) avec des performances, syndrome de Costen… Dans les et le statut socioéconomique. La
des spécificités et un rapport qua- pays anglophones, le terme le plus deuxième consiste en un examen
lité/prix variables [49, 60] ; usité est « temporomandibular di- clinique détaillé, la troisième est
O des biais potentiels existent : cer- sorders » (TMD). Le SADAM est un résumée dans le tableau II page sui-
tains travaux [61] ont montré, in vi- ensemble de troubles douloureux vante.
tro, que le follicule capillaire dispose et non douloureux dus à une dys-

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Stress chronique : panorama et focus
sur de nouveaux indicateurs biologiques
et biomécaniques

Cette classification est reprise au 98 % au moins un signe clinique. questionnaire comportait 12 items
niveau européen dans les recom- Chez les non-combattants sans (annexe 1) : 4 relatifs aux symp-
mandations de l’EACD (European SPT, 24 % déclaraient au moins un tômes de SADAM sur des échelles
Academy of Craniomandibular symptôme subjectif et 52 % avaient de Likert, les 8 autres concernaient
Disorders) à l’usage des dentistes au moins un signe clinique de la durée quotidienne d’activité (tra-
généralistes, avec un accent sur la SADAM. Pour les auteurs, ces obser- vail informatique, conduite auto-
prise en charge « cognitivo-com- vations confortaient l’hypothèse mobile, tâches à dextérité manuelle
portementale et psychologique » de Laskin [76] : l’hyperactivité mus- fine, tâches physiques lourdes, réu-
[66]. culaire chronique et récurrente en- nions, trajet domicile-travail, temps
À partir des années 70, un certain dommage progressivement l’arti- à domicile, heures de sommeil). Sur
nombre de travaux a exploré plus culation qui, avec le temps, devient la base d’un score médian total de 5
particulièrement l’aspect psycho- symptomatique. Une étude de obtenu en réponses aux items 1-4,
social de ces désordres cranio-man- 2004 [77] a examiné les liens entre deux groupes ont été constitués :
dibulaires [67 à 71]. Les personnes alexithymie 3 - dépression - SADAM les personnes avec un score ) 7
3. Alexithymie :
se déclarant stressées présentent et travail posté. Dans une société difficultés (« SADAMFaible », n = 1 524) et celles
un risque accru d’occurrence et/ou de radiodiffusion, 750 salariés en à exprimer ayant un score * 8 (« SADAMÉlevé »,
de progression du SADAM, et leurs travail posté irrégulier ont été com- verbalement n = 445). L’analyse statistique (par
symptômes augmentent lors de parés à 750 autres en travail diurne ses émotions et régression logistique) montre que
communément
situations jugées stressantes [72]. régulier. Les résultats du ques- observées chez
le genre (féminin en l’occurrence)
Parallèlement, certains auteurs tionnaire de santé et une analyse les patients et le temps de travail sur ordina-
[73] ont observé une élévation du par régression logistique sur les présentant des teur sont les variables significatives
cortisol salivaire significativement variables étudiées montrent une symptômes de l’occurrence de symptômes de
plus importante chez des sujets association positive et significative psychosomatiques. SADAM : la durée de travail sur
atteints du SADAM et soumis à un entre alexithymie et symptômes ordinateur est plus longue chez
stress expérimental (Trier Social SADAM non douloureux, une as- le groupe SADAMÉlevé. Par ailleurs
Stress Test) [74] par rapport à un sociation négative et significative chaque période de 2 heures addi-
groupe témoin soumis au même entre alexithymie et genre (les tionnelles sur ordinateur augmente
stresseur. Dans une étude de 2003 femmes étant plus expressives), la morbidité d’un facteur de 2,23
[75], un groupe d’hommes (n = mais pas d’association entre alexi- (odds ratio (OR)). On peut s’inter-
100) de 25 à 50 ans ayant com- thymie ou troubles dépressifs et roger sur la fiabilité de n’utiliser
battu durant la guerre de Croatie travail posté. Plus récemment, une que 4 items du questionnaire pour
(1990-1995) et présentant un stress étude japonaise [78] s’est penchée qualifier les 2 groupes à risques. En
post-traumatique (SPT) avéré a sur l’influence des conditions de tra- fait ces 4 items ont été extraits d’un
été comparé à un groupe de non- vail sur l’incidence du SADAM. Dans questionnaire de diagnostic à 20
combattants (n = 100) indemnes une société de fabrication de com- items préalablement administré à
de SPT. Chez les combattants SPT, posants électroniques, 1 969 salariés 2 360 patients en consultation
82 % présentaient au moins un ont renseigné un questionnaire lors d’otondologie. La sensibilité, la
symptôme subjectif de SADAM et de la visite médicale annuelle. Le spécificité et le taux de faux posi-

,Tableau II

> CLASSIFICATION CDR/DTM [64]. PARTIE III.


Axe I : Diagnostic des DTM (Axe somatique)
Groupe I : Désordres musculairesAcaractérisation douleur myofaciale…
Groupe II : Déplacements du disque articulaireAcaractérisation du bruit articulaire…
Groupe III : Recherche d’arthralgie, d’arthrite, d’arthrose

Axe II : Incapacités reliées à la douleur et au statut psychosocial (Axe psychosocial)


Grade de douleurs chroniques
Scores aux échelles de dépression, anxiété, résilience et symptômes non-spécifiques
CDR/DTM Critères Diagnostiques de Recherche des Désordres Temporomandibulaires. Version francophone validée
[65].

40 N° 137 — RÉFÉRENCES EN SANTÉ AU TRAVAIL — MARS 2014


tifs étaient respectivement de de la visite médicale notamment.
0,746, 0,811 et 0,189 [79]. Compte CONCLUSION Toutefois, il apparaît encore néces-
tenu de ces excellentes pro- saire de poursuivre des travaux de
priétés psychométriques, ces Suite à ces descriptions de mar- recherche pour appuyer la perti-
4 items ont été retenus par l’équipe queurs biologiques et bioméca- nence, en santé au travail, de ces
de Nishiyama, ce qui constitue une niques, quel usage peut-il en être indicateurs de stress chronique.
économie substantielle en temps fait tant d’un point de vue pratique Ainsi à un niveau plus ambitieux,
de passation du questionnaire. qu’en termes de recherche ? l’intégration du recueil de ces indi-
Les relations entre symptômes Le concept de « marqueur biolo- cateurs biologiques et/ou bioméca-
d’anxiété, de dépression et de SA- gique/biomécanique du stress » niques au sein d’études épidémio-
DAM ont également été examinées constitue un raccourci épistémolo- logiques longitudinales pourrait
sur le long terme chez des postu- gique et langagier sur le plan scien- être envisagée.
lants à l’admission universitaire tifique. La production de cortisol
[80]. Un échantillon de 153 étu- (par exemple) n’est qu’un indica-
diants (82 femmes et 71 hommes) teur (parmi d’autres) de l’activité de
de 16 à 31 ans (moyenne = 18,2 ± l’axe HHS. De même, la fréquence
2,6) suivaient des cours prépara- cardiaque n’est qu’un indicateur
toires d’admission à l’université (parmi d’autres) de l’activité du sys-
Remerciements à A. Aublet-
entre août et novembre 2009. Les tème cardio-vasculaire… La seule
participants renseignaient un dérégulation de ces activités ne Cuvelier (HT), L. Claudon (LPMT),
questionnaire de symptomatologie suffit pas à caractériser un état de I. Salmon (GS) et M. Favaro (GS)
SADAM (annexe 2) issu des recom- stress aigu ou chronique. Le stress pour leur relecture constructive.
mandations de l’EACD et l’échelle étant un concept psychobiolo-
HAD (Hospital Anxiety and Depres- gique, il n’en existe donc pas de
sion scale [81]) à T1 (août 2009) et T2 « marqueur biologique ». Ces pré-
(novembre 2009). Les résultats font cautions intellectuelles prises, il est
apparaître une association symp- quand même possible d’exploiter
tômes SADAM et dépression de les indicateurs de ces dérégulations
16 % à T1 et de 26 % à T2 (significa- physiologiques dans le contexte de
tif à p = 0,001). Par ailleurs, le risque la prévention du stress chronique
moyen de symptômes SADAM pré- au travail, pour peu que ceux-ci
sents si anxiété déclarée est de 5,6 soient accompagnés et croisés avec
(OR), avec un intervalle de confiance d’autres données (psychosociales,
à 95 % de 2,6 à 12,0 au moment T1. cliniques…). Des « marqueurs »
Cet OR passe à 2,6, avec un inter- tel le cortisol endogène capillaire
valle de confiance à 95 % de 1,3 à 5,2 peuvent renseigner sur la durée de
au moment T2. Pour les auteurs, la l’exposition à un ou plusieurs stres-
présence de symptômes du SADAM seurs, car celui-ci intègre le conti-
reflète l’état de stress chronique res- nuum d’exposition. Cet indicateur,
senti par les sujets et majoré en cas malgré la simplicité de son recueil,
d’anxiété déclarée. nécessite toutefois une « logistique
L’ensemble de ces résultats souligne analytique » souvent hors de por-
ainsi l’évolution de l’étiologie du tée du préventeur de terrain ou du
SADAM : d’une origine purement médecin du travail. Le diagnostic et
biomécanique au départ elle a, au fil le suivi de symptômes du SADAM
POINTS À RETENIR, BIBLIOGRAPHIE ET ANNEXES
des observations, intégré l’influence quant à eux, qu’ils soient complets EN PAGES SUIVANTES
des facteurs de risque psychoso- par l’utilisation de la classification
ciaux. Cependant, aucune étude n’a CDR/DTM ou plus « légers » par
été publiée en France à ce jour sur l’usage de questionnaires simpli-
les relations entre stress au travail fiés mais validés, constitueraient à
et SADAM, de même qu’entre stress ce jour une option d’investigation
au travail et CeC. opérationnelle en entreprise, lors

MARS 2014 — RÉFÉRENCES EN SANTÉ AU TRAVAIL — N° 137 41


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Stress chronique : panorama et focus
sur de nouveaux indicateurs biologiques
et biomécaniques

POINTS À RETENIR
Les réponses de stress aiguës ont une valeur adaptative à l’inverse des réponses chroniques.
La psychoneuroimmunologie a montré que les systèmes nerveux et immunitaire sont des
composants intégrés disposant d’un mode de communication via les cytokines.
L’exposition unique à un stresseur peut conduire à chroniciser des réponses physiologiques et
comportementales.
L’apprentissage acquis par le système nerveux peut « se transférer » au système immunitaire.
Dans le monde du travail, la nature de l’activité, voire son absence, peut affecter
l’immunocompétence de l’individu.
Les quantifications physiologiques classiques (cortisol salivaire, plasmatique…) du stress ne
permettent pas d’explorer les expositions chroniques, car elles sont trop ponctuelles.
Le dosage du cortisol endogène capillaire (CeC) permet, à partir d’un seul prélèvement de
cheveux, de couvrir une période de sécrétion étendue (1 cm ≈ 1 mois, 3 cm ≈ 3 mois…).
L’indicateur CeC présente une facilité de recueil et de stockage propice aux investigations de
terrain.
L’étiologie du SADAM (syndrome algo-dysfonctionnel de l’appareil manducateur) a évolué d’une
origine purement biomécanique à l’intégration du rôle des facteurs de risques psychosociaux.
Les personnes se déclarant chroniquement stressées présentent un risque accru d’occurrence
et/ou de progression du SADAM.
Il existe des questionnaires de dépistage de ce trouble biomécanique chronique utilisables en
santé au travail.

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MARS 2014 — RÉFÉRENCES EN SANTÉ AU TRAVAIL — N° 137 43


GRAND ANGLE
Stress chronique : panorama et focus
sur de nouveaux indicateurs biologiques
et biomécaniques

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44 N° 137 — RÉFÉRENCES EN SANTÉ AU TRAVAIL — MARS 2014


ANNEXE 1
Questionnaire (traduit) utilisé par Nishiyama et al.,
dans une étude sur le SADAM [78].

Item Forme abrégée

Q1* Si vous ouvrez la bouche au maximum, pouvez-vous y Ouverture buccale limitée


introduire 3 doigts superposés ?

Q2* Éprouvez-vous une douleur au niveau du visage, de la Ouverture buccale douloureuse


mâchoire, des tempes ou à l’avant des oreilles lorsque vous
ouvrez et fermez la bouche ?

Q3* Pouvez-vous ouvrir la bouche sans aucune déviation ? Ouverture buccale déviée

Q4* Éprouvez-vous une douleur au niveau du visage, de la Douleur induite par mastication
mâchoire, des tempes ou à l’avant des oreilles lorsque vous
mangez des aliments à mastiquer comme de la viande
séchée, de la seiche séchée ou du poulpe ?

Q5 Combien d’heures par jour travaillez-vous sur ordinateur ? Utilisation ordinateur


(h)

Q6 Combien d’heures par jour passez-vous à conduire un Conduite de véhicule


véhicule au travail ? (h)

Q7 Combien d’heures par jour pratiquez-vous une tâche de Travail de précision


précision manuelle dans votre travail ? (h)

Q8 Combien d’heures par jour vous faut-il pour vous rendre sur Transports
votre lieu de travail ? (h)

Q9 Combien d’heures par jour passez-vous à la maison avant Avant coucher


d’aller dormir ? (h)

Q10 Combien avez-vous d’heures de sommeil par nuit ? (h) Sommeil

Q11 Combien d’heures par jour passez-vous en réunion de Réunions


travail ?

Q12 Combien d’heures par jour passez-vous à la réalisation de Travail physique


tâches physiques au travail (h)

* Les sujets répondent aux items 1 à 4 sur une échelle de Likert en 5 points où: 1 = Tout à fait d’accord ; 2 = D’accord ;
3 = Sans opinion ; 4 = En désaccord ; 5 = Pas du tout d’accord.

MARS 2014 — RÉFÉRENCES EN SANTÉ AU TRAVAIL — N° 137 45


GRAND ANGLE
Stress chronique : panorama et focus
sur de nouveaux indicateurs biologiques
et biomécaniques

ANNEXE 2
Questionnaire (traduit) utilisé pour détecter la présence
d’un SADAM [66].
Test de dépistage
Afin de détecter la présence d’un SADAM, il est recommandé de réaliser un protocole de
dépistage systématique. Le protocole peut inclure les 4 questions suivantes (les plus validées) :

1° Avez-vous mal lorsque vous ouvrez grand la bouche ou lorsque vous mastiquez, une fois par semaine ou
plus ?

2° Avez-vous mal aux tempes, au visage, aux articulations de la mâchoire, une fois ou plus par semaine ?

3° Avez-vous ressenti récemment un blocage de la mâchoire ou une impossibilité d’ouvrir grand la bouche ?

4° Avez-vous souvent la migraine plus d’une fois par semaine ? Une réponse positive peut faire orienter le
patient chez un neurologue en premier lieu.

Si le patient répond « OUI » à l’une des 4 questions, une anamnèse et un examen clinique détaillés sont
souhaitables.

46 N° 137 — RÉFÉRENCES EN SANTÉ AU TRAVAIL — MARS 2014

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