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Du tournoi au couronnement.

Les hérauts
d’armes et les formules rituelles au Moyen Âge
Henri Simonneau

(IRHIS – Université Lille 3 – France)

At the end of the Middle Ages, heralds of arms are recognized as being the
specialists in the formulas. They appear on tournaments and jousts that were at
their peak at that time, and gradually get into the royal ceremonials, funerals
and coronation. The medieval nobility considers them as guarantors of tradition
and honour of the aristocracy. But if heralds become important characters in these
rituals, it is not so much due to their origin than what they represent. They are the
voice of the prince, the voice of this society of honour organized around celebrations
and royal ceremonies.

« Or est venuz qui l’aunera ! Or est venuz qui l’aunera ! » C’est par ces mots
que, pour la première fois, un héraut apparaît dans la littérature1. Vêtu de sa
seule chemise – il a laissé sa cotte d’armes en gage à l’auberge – le jeune garçon
court à travers le campement de Noauz afin d’attirer l’attention de la foule sur
Lancelot, dont il est le seul à connaître l’identité. Il n’est guère au Moyen Âge
de personnage pour qui les formules, conventionnelles ou rituelles, font autant
partie intégrante de ses fonctions, lors des tournois, des pas d’armes, mais aussi
des ambassades, des duels judiciaires, des couronnements ou des funérailles2.

1 Chrétien de Troyes, Lancelot ou le chevalier de la charrette, J.-C. Aubailly (éd.), Paris : Flammarion,


1991, v. 5563-5564.
2 Le colloque tenu à Lille en 2005, à l’initiative de B. Schnerb, fait le point sur les différentes fonctions
du héraut et propose de nombreuses pistes de recherche  : Le héraut, figure européenne (xive-xvie  siècle),
Revue du Nord, 88, n°366-367 (2006). Sur les hérauts à la fin du xve siècle, voir H. Simonneau, Grandeur
et décadence d’une institution aulique. Les hérauts d’armes dans les Pays-Bas bourguignons (1467-1519), thèse

La formule au Moyen Âge, II, éd. par Isabelle Draelants et Christelle Balouzat-Loubet, Turnhout,
2015 (Atelier de Recherches sur les Textes Médiévaux, 23), p. @@@-@@@
©FHG 10.1484/M.ARTEM-EB.5.103362
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Pourtant, rien au xiie  siècle ne prédestine les officiers d’armes à endosser les
responsabilités d’un maître de cérémonie, détenteur d’une parole protocolaire.
Les premiers hérauts, issus du monde des ménestrels et des jongleurs dont ils
ont toutes les peines du monde à se distinguer, sont des personnages qui ren-
contrent bien peu de considération3. Ils se déplacent de tournois en tournois
pour assurer la promotion de ces événements et cherchent à s’attirer les faveurs
des concurrents en clamant leur nom et leur cri d’armes à leur entrée sur les
lices. Mais au xve  siècle, ils sont projetés sur le devant de la scène politique.
Ils deviennent les détenteurs d’une parole sacrée, les porte-voix du prince et
les conservateurs d’une certaine éthique de la noblesse. Ainsi, aux funérailles
de Charles VI célébrées à la basilique Saint-Denis en 1422, à la suite de la for-
mule traditionnelle : « Priez pour l’âme de très excellent prince Charles VI,
roi de France », c’est un héraut qui crie : « Vive Henri par la grâce de Dieu,
roi de France et d’Angleterre », ce à quoi tous les officiers présents répondent
en chœur : « Vive le roi Henri4 ! ». Cette innovation, mise en place par la
monarchie franco-anglaise pour asseoir sa légitimité sur le continent, fut par
la suite reprise dans le cérémonial français durant toute l’époque moderne.
Il existe une étroite corrélation entre l’émergence des hérauts sur la scène
politique et leurs fonctions de porte-parole, de « spécialiste de la formule ».
Ces paroles, devenues des monuments de la puissance souveraine, sont mises
en scène par les officiers d’armes au nom de la monarchie et pour les besoins de
celle-ci. Les hérauts deviennent alors les porte-voix du prince, se faisant l’écho
d’un discours stéréotypé dont les origines remontent aux joutes et aux tournois
des siècles précédents5.

sous la direction de B.  Schnerb, Lille  3, 2010  ; sur toute la littérature qui entoure l’office d’armes, voir
T. Hiltmann, Spätmittelalterliche Heroldskompendien. Referenzen adeliger Wissenskultur in Zeiten gesell-
schaftlichen Wandels, München : Oldenbourg, 2011 ; P. Contamine, « Office d’armes et noblesse dans la
France de la fin du Moyen Âge », Bulletin de la Société nationale des antiquaires de France, (1994), p. 310-322,
reste une très bonne introduction ; J.-C. Blanchard, « Les officiers d’armes de René II : des emblèmes
vivants au service de la construction de l’État », Lotharingia, 16 (2010), p. 53-69 propose une intéressante
étude régionale de l’office.
3 M. Pastoureau, Traité d’héraldique, Paris : Picard, 1993, p. 61-63. Voir aussi les écrits de ménestrels
comme Henri de Laon ou Baudouin de Condé qui considèrent les hérauts comme de redoutables concur-
rents : H. de Laon, Le dits des hérauts, A. Lângfors (éd.), Romania, 43 (1914), p. 216-225 ; B. de Condé,
Li conte des hiraus, in Dits et contes de Baudouin et de Jean de Condé, A. Scheler (éd.), Bruxelles : Victor
Devaux, 1866, t. I, p. 153-173 ; J. Bretel, Le tournoi de Chauvency, M. Delbouille (éd.), Liège-Paris :
Droz, 1932 ; J.-C. Blanchard, « Pour ce qu’il suet parler a moi d’armes et chevalerie : hérauts et héraldique
dans le Tournoi de Chauvency », in Lettres et musique en Lorraine du xiiie au xve siècle. Autour du Tournoi
de Chauvency (Ms Oxford, Bodl. Douce 308). Actes du colloque international de Metz, 27 février-1er mars 2007,
M. Chazan et N. Freeman Regalado (éd.), Genève : Droz, 2012, p. 279-305.
4 R. Giesey, Le roi ne meurt jamais : les obsèques royales dans la France de la Renaissance, Paris : Flammarion,
1987, p. 203.
5 Les réflexions qui suivent ont été initiées et inspirées par la lecture d’un certain nombre d’auteurs devenus
classiques. Il s’agit tout d’abord des écrits de Ralph Giesey (cf. note précédente) et d’Ernst Kantorowicz sur
les funérailles des rois de France : E. Kantorowicz, Les Deux corps du roi. Essai sur la théologie politique
au Moyen Âge, in Œuvres, Paris : Gallimard, 2000, p. 643-1222. Johan Huizinga a très tôt démontré le rôle

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1 – L’atmosphère sonore des tournois

À propos du « Or est venuz qui l’aunera », Chrétien de Troyes précise que
le jeune héraut est le premier à avoir prononcé cette formule6. Néanmoins,
Jean Frappier a montré que cette expression était déjà proverbiale et largement
utilisée lors des tournois7. L’officier d’armes, quand il apparaît dans les sources
littéraires, entretient donc déjà des relations étroites avec les formules qui sont
prononcées pour stimuler la compétition, encourager ou identifier les cheva-
liers. Il remplit le rôle d’intermédiaire entre les combattants, conférant une
certaine solennité à ces combats souvent critiqués pour leur violence ou leur
vanité. Dans le Chevalier de la Charrette, il est celui qui provoque l’esclandre,
qui crée une tension dramatique. Il endosse ici la même fonction que les invec-
tives que se lancent mutuellement les chevaliers avant de s’affronter8.
Les lices sont en effet le lieu de prédilection des hérauts depuis au moins la
fin du xiie siècle. Mais l’office d’armes se développe moins avec les tournois à
proprement parler, mêlées qui opposent deux groupes, particulièrement appré-
ciés dès le xie siècle, qu’avec l’émergence de la joute, c’est-à-dire de l’affronte-
ment individuel de deux concurrents. Si la mission première des hérauts est
d’annoncer les joutes à travers les villes et les châteaux, d’identifier les chevaliers
recouverts de leur armure, d’assurer une atmosphère de compétition et la publi-
cité de ces événements, il s’agit aussi de promouvoir l’honneur des chevaliers
présents devant le public rassemblé et au-delà9.

de matrice que tient le jeu dans la culture : J. Huizinga, Homo Ludens. Essai sur la fonction sociale du jeu,
Paris : Gallimard, 1988. Enfin, sur l’importance du personnage du héraut dans la performativité de la parole,
les réflexions de Pierre Bourdieu sont peut-être les plus éclairantes, même si elles n’évoquent pas la période
médiévale : P. Bourdieu, Ce que parler veut dire. L’économie des échanges linguistiques, Paris : Fayard, 1982.
Je tiens par ailleurs à remercier tout particulièrement Laurent Hablot pour ses remarques sur le présent
article.
6 Chrétien de Troyes, Lancelot ou le chevalier de la charrette, v. 5572-5574 : Notre mestre an fu li hyra |
qui a dire le nos aprist | car il premieremant le dist.
7 Id., Le chevalier de la charrette : Lancelot, J. Frappier (éd.), Paris : Champion, 1967, p. 189.
8 Si l’on consulte des chroniques du début du xiie siècle, comme celle de Geoffroy Gaimar, on peut observer
à plusieurs reprises des épisodes dans lesquels deux chevaliers s’invectivent mutuellement avant de s’affron-
ter, dans le but évident de dramatiser la scène. Johan Huizinga, dans Homo Ludens, avance l’idée que les
hérauts, à travers leur rôle de commentateur, élogieux envers les vainqueurs mais aussi railleurs envers les
vaincus, relatant les récits des hauts faits et des exploits individuels, remplirent cette fonction d’émulation,
de compétition, que la noblesse des concurrents les empêchaient de prendre en charge eux-mêmes, tant on
leur reprochaient de faire preuve d’un orgueil peu compatible avec leur statut : F. Michel (éd.), Chroniques
anglo-normandes. Recueil d’extraits et d’écrits relatifs à l’histoire de Normandie et d’Angleterre pendant les xie
et xiie  siècles, Rouen : Édouard Frère, 1836, t. I, p. 52 et suivantes ; J. Huizinga, Homo Ludens…, p. 106.
Voir aussi les remarques de Dominique Barthélémy sur le rôle du héraut dans le Chevalier de la Charrette :
D. Barthélemy, La Chevalerie. De la Germanie antique à la France du xiie siècle, Paris : Fayard, 2007, p. 438.
9 Sur les tournois au Moyen Âge, voir P. Contamine, « Les tournois en France à la fin du Moyen Âge », in
J. Fleckenstein (éd.), Das ritterliche Turnier im Mittelalter. Beiträge zu einer vergleichenden Formen- und
Verhaltensgeschichte des Rittertums, Göttingen : Vandenhoeck & Ruprecht, 1985, p. 425-449 ; R. Barber et
J. Barker, Les tournois, Paris : Cie 12, 1989 ; R. Barber, The Knight and chivalry, Woodbridge : Boydell &
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Cette ambiance sonore, marquée par le cri des hérauts, est tout à fait percep-
tible dans des œuvres comme Le tournoi de Chauvency de Jacques Bretel. Sur
les 4 563 vers de l’œuvre, plus de mille concernent directement les faits et les
dits des hérauts d’armes10. À de nombreuses reprises, ceux-ci clament à travers
le campement les cris d’armes des chevaliers :

A haute vois escrioit on :


Los ! Chini ! Aixe ! Aspremont !
Passe Avant ! Boloigne ! Blanmont !
Lambour ! Hainnau ! Monjoie ! Aras !
Hastat ! La fu Warnier Conrat !
De tous costez et de touz cens
Acoururent plus de cinq cens11.

Ces cris, loin d’être spontanés ou désordonnés, structurent les tournois,


créent de l’ordre, sur les lices comme sur le champ de bataille12. Ils servent
certes à désigner les jouteurs, mais permettent aussi de rassembler les chevaliers
qui s’allient ou s’affrontent. Ils sont la vox preconia, la voix publique des hérauts
qui accompagne la mise en scène des combats13. Ces cris sont un des plus ancien
signe de reconnaissance militaire et sont désignés en ancien français sous le
terme générique d’« enseigne », au même titre que le blason ou la bannière,
autre domaine de prédilection de l’office d’armes14.

Brewer, 1995, p. 115-224 ; D. Crouch, Tournament, London-New York : Hambledon and London, 2005 ;
D. Barthélémy, La Chevalerie…, p. 289-371 ; E. Van den Neste, Tournois, joutes, pas d’armes dans les
villes de Flandre à la fin du Moyen Âge (1300-1486), Paris : École des Chartes, 1996.
10 M.  Stanesco «  Le héraut d’armes et la tradition littéraire chevaleresque  », Romania, 106 (1985),
p. 238.
11 J. Bretel, Le tournoi de Chauvency, v. 4094-4100.
12 Sur la question du cri de guerre, voir l’article « cri » du Dictionnaire de la France médiévale, J. Favier
(dir.), Paris  : Fayard, 1981, p.  323  ; M.  Pastoureau, Traité d’héraldique, p.  215-218  ; I.  Guyot-Bachy,
« Cris et trompettes. Les échos de la guerre chez les historiens et les chroniqueurs », in Haro ! Noël ! Oyez.
Pratiques du cri au Moyen Âge, D. Lett et N. Offenstadt (éd.), Paris : Publications de la Sorbonne, 2003,
p. 109-112 ; J.-C. Blanchard, « Pour ce qu’il suet parler a moi d’armes et chevalerie », p. 294 ; L. Hablot,
« Les cris écrits. L’apparition des cris, mots emblématiques et sentences dans l’héraldique médiévale, un
regard sur la voix et l’écrit », Pris-ma XXIII, 45-46 (2007), p. 22-52 ; id., « Jurons, cris de guerres et cris
d’armes. La place de l’emblème sonore sur le champ de bataille médiéval » in L. Vissière et L. Hablot
(éd.), Cris, jurons, chansons, entendre les paysage sonores à la fin du Moyen Âge, Rennes : Presses Universitaires
de Rennes, à paraître. Sur la question de la devise, voir L. Hablot, La devise, mise en signe du prince, mise
en scène du pouvoir. L’emblématique des princes en Europe à la fin du Moyen Âge, Thèse s. dir. M. Aurell et
M. Pastoureau, Université de Poitiers, 2001.
13 C’est par cette expression que le Religieux de Saint-Denis évoque le héraut : M. Pintoin, Chronique du
Religieux de Saint-Denys, contenant le règne de Charles VI de 1380 à 1422, M.-L. Bellaguet et B. Guénée
(éd.), Paris : Éditions du Centre des travaux historiques et scientifiques, 1994, t. I, p. 218.
14 F. Godefroy, Dictionnaire de l’ancienne langue française et de tous ses dialectes du ixe au xve siècle,
Genève-Paris : Slatkine reprint, 1982, t. III, p. 230.

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Ce ne sont pas les seules proclamations qui sont confiées aux hérauts. Les
différentes étapes des tournois et des joutes sont rigoureusement codifiées et
les formules que prononcent les officiers d’armes ponctuent leur déroulement.
Une fois les chevaliers prêts au combat, c’est un héraut qui leur donne le signal
du départ. Quand il crie : « Lacez ! Lacez ! », les concurrents doivent se coiffer
de leur heaume et se rendre sur les lices.

A cest mot s’est aparilliez


Uns hiraut tous entortilliez
En la crupiere a un cheval
En la salle est entrez aval
Et escrie : « Laciez ! Laciez15 ! »

Les formules des hérauts d’armes au xiiie  siècle sont les mêmes que celles
en usage deux siècles plus tard, alors que le statut de ces officiers a sensible-
ment évolué. Si dans les décennies qui suivent leur apparition, les hérauts sont
assimilés à des ménestrels ou à des jongleurs, cherchant des subsides à travers
les nombreux tournois qui sont organisées, ils se sont progressivement séden-
tarisés et sont au xve siècle des officiers de cour. Philippe le Bon et Charles le
Téméraire en avaient régulièrement une dizaine à leurs côtés. Des hommes
comme Jean Lefèvre de Saint-Rémy ou Gilles le Bouvier, le héraut Berry, sont
des conseillers du prince et des chroniqueurs reconnus. Si leur statut social
s’est considérablement élevé, leur rôle aux bords des lices reste strictement le
même. Dans les Hauts faits de Jacques de Lalaing, Georges Chastellain décrit
un environnement sonore toujours marqué par les cris des hérauts : Et lors les
trompettes de sonner et bondir si fort qu’on n’eust pas oy Dieu tonner, car de tous
costés heraults et poursuivans s’efforçoient de crier : « Lalaing ! »16. De même,
un des manuels sur l’organisation des joutes les plus célèbres du Moyen Âge,
Le livre des tournois de René d’Anjou, rédigé au milieu du xve  siècle, insiste
sur le rôle des hérauts dans l’arène : Item, est à savoir que, pendant que lesdits
tournoyeurs se combattront, les hérauts poursuivants seront entre les deux lices, et
les trompettes aussi, qui ne sonneront point, mais crieront les cris des tournoyeurs
de ceux qui voudront17. Lorsque les hérauts annoncent la tenue d’une joute, ils
doivent tout d’abord se rendre dans un lieu public, où ils peuvent être enten-
dus par le plus grand nombre. Ils commencent alors leur discours par la for-
mule traditionnelle « Or oyez, or oyez, or oyez ! princes, seigneurs, chevalliers et
escuyers ». Puis ils lisent les chapitres, c’est-à-dire les détails du déroulement du
tournoi en question, la date, le lieu, le prix et les règles à suivre, définis par les

15 J. Bretel, Le tournoi de Chauvency, v. 3119-3123.


16 G.  Chastellain, œuvres de Georges Chastellain, J.  Kervyn de Lettenhove (éd.), Bruxelles  :
Devaux, 1866, t. VIII, p. 29-30.
17 René d’Anjou, Le livre des tournois du roi René, F. Avril (éd.), Paris : Herscher, 1986, p. 73.
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organisateurs18. Là encore, cette manière de faire reste immuable tout au long


des derniers siècles du Moyen Âge. En octobre 1285, le roi d’armes Maignien
était tenu par son maître Louis de Looz, le comte de Chimay, de proclamer en
divers lieux la tenue du tournoi de Chauvency19. Dans le Roman du Châtelain
de Coucy, contemporain du précédent, les hérauts sont aussi chargés de tout
le protocole20. Lors des joutes organisées par Claude de Salins à Malines en
1481, ce sont à nouveau deux officiers d’armes, Salins et Malines, qui lisent les
chapitres aux chevaliers qui se présentent devant eux21.
Les paroles des hérauts restent tout au long du Moyen Âge extrêmement for-
malisées, rigoureusement codifiées et sont progressivement compilées dans des
manuels à l’usage des officiers d’armes, les compendia, dont le plus célèbre reste
celui du héraut Sicile, rédigé vers 145022. Celles qui concernent les tournois
sont rassemblées dans une ordonnance, intitulée C’est l’ordonnance du tour-
noy à présent scelon l’usage de France, qui comprend ad ce, Haynnau, Brabant,
Flandres, Hollande, Zéelande, et ce qui est par deçà le Rhein, Savoye, le Daul-
phiné, Langhedoc et Prouvence23. Sont ainsi reproduites les formules relatives
aux annonces sur les places publiques, aux différentes étapes du tournoi ou de
la joute, ainsi qu’aux remerciements des officiers d’armes devant l’organisateur
de l’événement. Elles sont identiques à celles des romans du xiiie siècle :

Item, quant ce vient al hoeure de none, lesditz officiers d’armes au commandement du


souverain banneret s’en vont tous montés à cheval parmy la ville de hostel en hostel, où
ilz scevent que les tournoyeurs sont logiés, et cryent tous ensemble par trois fois : « Allez
lacier gentilz-hommes, allez lacier gentilz-hommes, allez lacier gentilz-hommes ». Et
c’est à entendre que les gentilz-hommes voisent lacier leurs heaulmes pour monter à
cheval.
Item, quant il est hoeure qu’ilz voisent sur les rengz, lesditz officiers d’armes vont tout
à cheval comme devant cryer à leurs hostelz : « Yssiez gentilz-hommes, yssiez gentilz-
hommes, yssiez gentilz-hommes » ; c’est à entendre qu’ilz yssent de leurs hostelz et
voisent sur les rengz pour faire leur debvoir24.

18 J.  Courtois, Héraut Sicile, Parties inédites de l’œuvre de Sicile, héraut d’Alphonse V, roi d’Aragon,
P. Roland (éd.), Mons : Dequesne-Masquillier, 1867, p. 186-189 ; T. Hiltmann, « Un État de noblesse et
de chevalerie sans pareilles ? Tournois et hérauts d’armes à la cour de Bourgogne », in W. Paravicini (éd.),
La cour de Bourgogne et l’Europe. Le rayonnement et les limites d’un modèle culturel, Ostfildern : Thorbecke,
2013, p. 253-288.
19 J. Bretel, Le tournoi de Chauvency, v. 2664-2680.
20 Jakemes, Le roman du castelain de Couci et de la dame de Fayel, M. Delbouille (éd.), Paris : Société
des Anciens Textes Français, 1936, v. 1010-1016 et 1050-1054.
21 J. Molinet, Chroniques de Jean Molinet, G. d’Outrepont et O. Jodogne (éd.), Bruxelles : Académie
Royale de Belgique, 1936, t. II, p. 226.
22 Pour une étude rigoureuse du traité de Sicile, voir T. Hiltmann, Spätmittelalterliche Heroldskompendien,
p. 57 et suivantes.
23 J. Courtois, Héraut Sicile…, p. 184.
24 Ibid., p. 194-195.

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H. SIMONNEAU – DU TOURNOI AU COURONNEMENT 449

Il est intéressant de constater que l’ordonnance, qui n’est ni datée ni signée,


souhaite ancrer cette pratique dans une réalité ancienne et immuable. Elle fait
explicitement référence à une autre ordonnance, reproduite plus haut dans
le traité de Sicile, prétendument rédigée par le roi Arthur en personne, dans
laquelle les formules proférées sont rigoureusement les mêmes. Dans l’intro-
duction de l’ordonnance « selon l’usage de France », il est rappelé que, si les
pratiques du tournoi ont évoluées, si les grandes mêlées ont laissé place aux
joutes individuelles, le rôle du héraut, lui, n’a pas changé, « il se fait comme il
se faisoit anciennement »25. Le héraut se présente ici surtout comme le conser-
vateur des pratiques et coutumes de la chevalerie, et le respect des formules
anciennes apparaît comme l’une de ses prérogatives26.
L’officier d’armes, né simultanément sur le champ de bataille et sur les
lices, assume donc rapidement la fonction de maître de cérémonie dans les
joutes, à la fois chargé d’annoncer ces événements, de veiller au respect du
protocole mais aussi d’en assurer l’ambiance sonore. Les raisons de cette pro-
motion sont multiples. La reconnaissance des armoiries, souvent évoquée,
n’est sans doute qu’un aspect de leur fonction. Le héraut prend une place
importante dans la mise en scène du combat en tant que tel, à la fois en tant
que promoteur de l’honneur et comme le garant du respect des traditions
anciennes. Mais le jeu devenu cérémonie, reflet des valeurs de la chevalerie,
les officiers d’armes ont vu leur importance croître et leur proximité avec la
noblesse a participé à leur rapide ascension sociale. À partir du xive  siècle,
l’ensemble de la profession se structure définitivement. Les rois d’armes
deviennent les chefs d’une marche d’armes, responsables du bon déroule-
ment des fêtes dans leur juridiction. Ils prennent des noms de territoire, de
devises, et certains, comme Montjoye ou Malo, officier du duc de Bretagne,
de cris d’armes27. Les poursuivants, quand ils sont promus, doivent prêter
serment : ils jurent alors de ne dire que la vérité et de relater avec exactitude
les hauts faits des seigneurs et de leur lignée. Intégrés dans les cours prin-
cières, ces officiers deviennent les gardiens d’un ethos chevaleresque et les
formules ancestrales deviennent un patrimoine à conserver précieusement.
C’est alors que leur rôle dans les cérémonies princières tend à prendre une
place croissante.

25 Ibid., p. 185.
26 T. Hiltmann, « Information et tradition textuelle. Les tournois et leur traitement dans les manuels
des hérauts d’armes au xve siècle », in Information et société en Occident à la fin du Moyen Âge. Actes du col-
loque tenu à l’Université du Québec à Montréal et à l’Université d’Ottawa (9-11 mai 2002), Cl. Boudreau et
al. (éd.), Paris : Publications de la Sorbonne, 2004, p. 219-231.
27 L. Hablot, « Les cris écrits », p. 47 ; M. Jones, « Malo et Bretagne, rois d’armes de Bretagne », in
Le héraut, figure européenne, p. 599-615.
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2 – De la formule ludique à la formule politique

S’il est une formule qui marque bien la transition de la sphère du tournoi à
celle de l’État, c’est celle de « Largesse ! ». Depuis l’origine de l’office, les rému-
nérations des hérauts sont très largement constituées de dons qu’ils reçoivent
tout d’abord des compétiteurs, puis quand ils se sédentarisent, des princes en
personne. On en trouve déjà de nombreux exemples dans les romans de che-
valerie du xiiie  siècle. Dans le Roman de la Rose, Guillaume de Dole rentre
sans le sou car il a tout donné aux hérauts qui crient largesse28. En retour, il
peut se targuer que ses aventures sont connues de par le monde, à l’égal d’un
Alexandre ou d’un Perceval. Au moment de la réception du prix par le vain-
queur du tournoi, les hérauts crient le nom du champion qui en retour les
couvre de présents, faisant par là publiquement preuve de sa générosité. Ce
lien entre la noblesse et l’office d’armes est essentiel. C’est ce qu’Olivier de
la Marche a résumé dans une formule (« L’office d’armes doibt honourer les
nobles, et la noblesse les doibt nourrir, soustenir et porter »29) et ce que Georges
Duby a synthétisé en : « Gentillesse est nourrie sur l’hôtel de largesse30 ». Au
xve siècle, les traités de hérauts rappellent qu’à l’occasion de toutes les grandes
fêtes princières, et notamment lors des banquets, les officiers d’armes doivent
clamer haut et fort le nom des membres de l’assistance. En retour, les nobles
présents doivent leur faire largesse, répartie par moitié entre les hérauts d’une
part, les ménestrels et les trompettes d’autre part31. À la même époque, cette
pratique connaît une évolution significative : les hérauts ne sont plus seulement
les destinataires de la largesse du prince mais les vecteurs de cette libéralité.
Ainsi, lors du mariage du comte de Genève et d’Anne de Chypre, en 1433, le
duc de Savoie remet de l’argent aux officiers d’armes pour qu’ils crient largesse,
non plus à leur compte, mais à destination de la foule assemblée, au nom de leur
prince32. De même, en 1515, le jeune roi d’Espagne, le futur Charles Quint, fait

28 J. Renart, Le Roman de la rose ou de Guillaume de Dole, J. Dufournet et F. Lecoy (éd.), Paris :


Champion, 2008, v. 2875-2878.
29 O. de la Marche, Mémoires d’Olivier de la Marche, H. Beaune et J. d’Arbaumont (éd.), Paris :
Renouard, 1888, t. IV, p. 67.
30 G. Duby, Guillaume le Maréchal ou le meilleur chevalier du monde, Paris : Gallimard, 1984, p. 108. Cette
relation entre les nobles et les hérauts a souvent fait réagir les contemporains qui ne voyaient là que des
chevaliers en quête d’une vanité mal placée et qui critiquaient ouvertement cette trop large libéralité. Ainsi,
Philippe de Mézières, dans Le Songe du vieux pèlerin, regrette la trop forte présence des hérauts à la cour et
conseille au prince de s’en séparer pour conserver ces dons pour des œuvres pieuses : P. de Mézières, Le
Songe du vieux pèlerin, J. Blanchard (éd.), Paris : Pocket, 2008, p. 705-711.
31 Voir par exemple le traité de Thomas Isaac, roi d’armes de la Toison d’Or entre 1493 et 1537 (Wien,
Österreichische Nationalbibliothek 7223, f. 150 r°-v°) : Item si aulcungs officiers d’armes se treuvent en une
feste generale ou festin de nobles seigneurs, ilz doibvent anoncer l’estat d’iceulx […]. Et tel prince ou seigneur
leurs doibt donner dons de largesses qui se doibt remercier et crier par trois foys et nommer le tiltre du seigneur
qui a faict ledit don, lequel don doibt estre repartir la moytié aulx herauldtz et l’aultre moytié aux trompettes
et menestriers qu’ilz ont sonnez.
32 J. Lefèvre de Saint-Rémy, Chronique, F. Morand (éd.), Paris : Renouard, 1881, t. II, p. 291-292.

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son entrée solennelle dans les villes des Pays-Bas. Ce sont ses hérauts qui jettent
de l’argent aux populations urbaines, en criant en chœur : « Largesse33 ! ». Il
y a bien ici un basculement du sens de l’expression. Le don n’est plus destiné
aux hérauts ou aux chevaliers, mais au peuple, aux sujets du prince. La largesse
est avant tout l’exaltation d’une des vertus princières, la libéralité, et ceux qui
en sont les principaux bénéficiaires deviennent les acteurs de cette tradition en
tant qu’officiers du prince.
À la fin du Moyen Âge, les hérauts d’armes apparaissent aussi dans cette
forme particulière de règlement des conflits que sont les duels judiciaires34. Ils
y jouent un rôle similaire à celui qui est le leur lors des tournois. Ils appellent
les deux adversaires sur les lices, leur demandent la raison pour laquelle ceux-ci
requièrent le duel et leur rappellent la rigueur de la sanction divine. Les deux
hommes se présentent ensuite devant le prince et prêtent serment en affirmant
que leur combat est juste. Le héraut crie alors : « Laissez aller les champions et
faites vos devoirs ! » Cette dernière formule n’est pas spécifique au duel, elle
est aussi utilisée lors des tournois35. Plus que la proximité entre la joute et le
duel judiciaire, dont le déroulement est similaire, c’est la soudaine apparition
du héraut d’armes qui est remarquable. Auparavant, ces paroles sont pronon-
cées par d’autres officiers du prince, et notamment le maréchal. Or, les hérauts
prennent progressivement leur place, désignés naturellement pour se faire les
porte-voix de la justice souveraine et l’écho de la voix du prince. Ainsi, en 1431,
lors du duel qui oppose Maillotin de Bours et Hector de Flavy à Arras, les deux
hommes s’accusant mutuellement de tentative de trahison, le roi d’armes est

33 Lille, archives départementales du Nord, B 2242, f. 339 r° : A Thoison d’Or, la somme de cinquante livres
dudit pris que par l’expres commandement et ordonnance de mondit seigneur ledit receveur general luy a baillé
et delivré comptant, laquelle somme, apres que icelluy seigneur eust fait sa joyeuse entrée en la ville de Louvain,
recue icelle et le pais de Brabant et fait les seremens et autres ceremonies accoustumées, il sema sur le grand
marchié audit Louvain en criant Largesse. Cela devient la norme à l’époque moderne : T. Brero, Les bap-
têmes princiers. Le cérémonial dans les cours de Savoie et de Bourgogne (xve-xvie siècle), Lausanne : Université
de Lausanne, 2005 (Cahiers lausannois d’histoire médiévale 36), p. 260 ; Y. Junot, « Grand-place et vie
urbaine dans les Pays-Bas du Sud au xvie siècle : l’exemple de Valenciennes », in L. Baudoux-Rousseau,
Y. Carbonnier et P. Bragard (éd.), La place publique urbaine du Moyen Âge à nos jours, Arras : Artois
Presses Université, 2007, p. 66.
34 Sur le rôle des hérauts dans les duels judiciaires, voir T. Hiltmann et U. Israel, « Laissez-les aller.
Die Herolde und das Ende des Gerichtskampf in Frankreich », Francia, 34/1 (2007), p. 65-84, ainsi que
H. Simonneau, « Le cri du héraut, la clameur de la foule et la conception aristocratique de la justice médié-
vale », in Clameurs publiques, émotions judiciaires de l’Antiquité à nos jours, Rennes : Presses Universitaires
de Rennes, 2013, p. 51-61.
35 En 1405, Enguerrand de Monstrelet relate le déroulement d’une joute, à Valence, et le chroniqueur
n’omet pas de mentionner cette formule qui marque le début du combat  : Finablement, après plusieurs
paroles portées d’un costé et d’autre, fut conclud qu’ilz commenceroient ensemble la bataille, et lors furent faiz
de par le Roy les cris acoustumez, et tantost après le roy d’armes d’Arragon s’escria en hault : « Que les champions
dessusdiz feissent leur devoir ! ». La chronique d’Enguerran de Monstrelet, éd. L. Douët d’Arcq, Paris :
Renouard, 1857, t. I, p. 78.
452 VIE PRATIQUE, MAGIE ET MÉDECINE – PRAGMATICS, MAGIC AND MEDICINE

l’ordonnateur de ce combat judiciaire, sous le regard du duc de Bourgogne,


juge suprême36.
Les hérauts, spécialistes incontestés du monde des tournois et de la cheva-
lerie, de la noblesse et de l’honneur, deviennent ainsi des officiers au service de
la justice princière. Car que ce soit dans le cadre de la joute ou dans celui du
duel judiciaire, le combat est une question d’honneur. Lors des joutes, « Faites
vos devoirs » se réfère à la mission première de la chevalerie, se sublimer dans
le combat. Se battre, participer aux tournois, acquérir de l’honneur, sont des
éléments indispensables de la condition noble. Les récits des hauts faits des che-
valiers, sur le champ de bataille ou sur les lices, mis en forme et diffusés par les
hérauts, participent à l’affirmation de l’autorité de la chevalerie médiévale. Dans
le cadre des duels judiciaires, le devoir consiste à réparer une atteinte à l’honneur
quand la justice traditionnelle n’a pas réussi à imposer le droit. Mais ici, l’hon-
neur qui est en jeu, ce n’est pas seulement la réputation individuelle dont les
officiers d’armes, Froissart le rappelle, sont les « justes inquisiteurs37 ». C’est
aussi le service du prince, dont le héraut s’est imposé comme le représentant.
Ce sont donc les mêmes formules, issues des tournois, qui vont s’imposer
dans les cérémonies d’ordre politique. Johan Huizinga, dans son essai sur la
fonction sociale du jeu, analyse ce processus en l’élargissant chronologiquement
et géographiquement. Il montre en effet que le jeu, fondement de la culture, est
créateur d’ordre et de loi. La communauté y exprime son interprétation de la vie
et du monde, dans laquelle la victoire est importante : gagner, c’est manifester
sa supériorité, et l’honneur qui en résulte profite à l’ensemble du groupe38.
Il est indubitable que les tournois et les joutes qui se développent à partir du
xie siècle ont été une matrice pour toute la culture aristocratique de la fin du
Moyen Âge. Vertu, honneur, gloire, libéralité sont les enjeux de ces rencontres.
Mais afin de solenniser l’événement, il faut des maîtres de cérémonie, et les
hérauts se présentent comme les gardiens de cette culture. Quand le prince
souhaite y réaffirmer son autorité suprême, le héraut devient son représentant,
son porte-parole39. Or c’est dans ces formules que ces valeurs – devoir, honneur,
largesse – se cristallisent.

36 Georges Chastellain, éd. J. Kervyn de Lettenhove, t. II, p. 197-198 : Et le roy d’armes, par com-
mandement du duc, soy mettant haut sur les quatre cornières du champ, commencha à cryer alors : « Que tout
homme vuidast les lices, sur le hart, sinon ceux qui estoient commis à les garder, et que nul, sur peine pareille,
ne fist cry, ne signe pour un, ne pour autre, ne pour nulle rien qui advenist, et que chascun se contenist sans faire
noyse, ne bruit quelconque. » Et ce fait, en telle fachon que chascun le pouvoit entendre et oïr, crya de rechief :
« Laissez aller les champions et faites vos devoirs ».
37 J. Froissart, œuvres, J. Kervyn de Lettenhove (éd.), Osnabrück : Biblio reprint, 1967, t. II, p. 2.
38 J. Huizinga, Homo Ludens…, p. 74 et 95.
39 L’office d’armes est évoqué dès les premières tentatives de réglementation des tournois par le roi d’An-
gleterre, dans le Statutum Armorum, au xiiie siècle. A. Wagner, Heralds of England. A history of the office
and College of arms, London : Her Majesty’s Stationery Office, 1967, p. 3 ; N. Young-Denholm, Studies
of medieval history, presented to Frederick Maurice Powicke, Oxford : Clarendon Press, 1948, p. 240-268 ;
D. Crouch, Tournament, p. 202.

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H. SIMONNEAU – DU TOURNOI AU COURONNEMENT 453

Ce processus qui place le héraut au cœur des cérémonies princières, chargé


de prononcer à voix haute les formules consacrées, atteint sans doute son degré
ultime dans les funérailles royales et le couronnement des rois. Jusqu’au début
du xve siècle, nous n’avons guère de récit détaillé de funérailles princières, mais
les hérauts ne semblent pas y jouer de rôle déterminant avant 142240. À cette
date, lorsque Charles VI meurt, la situation politique de la France est complexe.
À Paris, Henri VI, conformément aux décisions du traité de Troyes, se déclare
roi de France et d’Angleterre tandis que de son côté, le Dauphin réclame la
couronne de son père. Le détail des funérailles de Charles VI nous est connu
à travers plusieurs témoignages. Le récit d’Enguerrand de Monstrelet, le plus
précis, nous décrit une cérémonie dans laquelle le héraut prend une place nou-
velle et tout à fait centrale41 :

Et après que le service fu fait et achevé en icelle église de Saint-Denis et que le Roy fut
mis en sépulture emprès ses prédécesseurs de France, icelle patriarche fist la bénéicion,
comme il est de coutume. Et adonques les huissiers d’armes dudit roy qui estoient là
presens, rompirent leurs petites verges et les gectèrent dessus la fosse, et puis mirent
leurs maces en bas ce dessoubz dessus. Et lors le roy d’armes de Berry accompaigné de
plusieurs héraulx et poursuivans cria dessus la fosse : « Dieu vueille avoir pitié et mercy
de l’âme de très excellent, très hault et très puissant prince, Charles, roy de France, vie
de ce nom, naturel et souverain seigneur ». Et après ce, cria de rechef le dessusdit roy
d’armes : « Dieu doint bonne vie à Henry, par la grâce de Dieu roy de France et d’Angle-
terre, nostre souverain seigneur ». Lequel cry acompli, les sergens d’armes dessusdiz
redrécèrent leurs maces, les fleurs de liz dessus, en criant tous à une voix, Vive le roy !
Vive le roy ! Vive le roy42 !

Cette nouveauté doit beaucoup au contexte troublé de la succession royale.


Les Anglais, en 1422, voient leur autorité vaciller à Paris. Dès l’annonce de la

40 Sur les funérailles princières, voir R. Giesey, Le roi ne meurt jamais… ; id., Cérémonial et puissance
souveraine. France, xve-xviiie  siècle, Paris  : Armand Colin, 1987  ; C.  Beaune, «  Mourir noblement à la
fin du Moyen Âge », in La mort au Moyen Âge. Colloque de l’Association des historiens médiévistes fran-
çais, Strasbourg : Istra, 1975, p. 125-143 ; N. Pollini, La mort du Prince. Rituels funéraires de la Maison de
Savoie (1343-1451), Lausanne : Université de Lausanne, 1994 (Cahiers lausannois d’histoire médiévale 9) ;
M. Gaude-Ferragu, D’or et de cendres. La mort et les funérailles des princes dans le royaume de France au
bas Moyen Âge, Lille : Septentrion, 2005 ; F. Espanol, « El “correr les armes”. Un aparte caballeresco en
las exequias medievales hispanas », Anuario de estudios medievales, 37/1 (2007), p. 867-905 ; P. Tucoo-
Chala, « Les honneurs funèbres chez les Foix-Béarn au xve siècle », in Annales du Midi, 90 (1978), p. 331-
351  ; E.-L.  Lory, «  Les obsèques de Philippe le Bon, duc de Bourgogne, mort à Bruges en 1467  », in
Mémoires de la Commission des Antiquités du département de la Côte-d’Or, 7 (1865-1869), p. 215-246.
41 R. Giesey, Le roi ne meurt jamais …, p. 197-206.
42 Éd. L.  Douët d’Arcq, t.  IV, p.  123-124. Ralph Giesey lui préfère un autre texte, le Cérémonial de
Charles VI (Ms. Paris, BnF, fr. 18674, f°116 et suivants). Celui-ci comporte quelques différences. Ce n’est
pas le roi d’armes de Berry qui dirige la cérémonie, mais un héraut dont nous ne connaissons pas l’identité.
En outre, c’est un « crieur de corps » qui prononce la dernière prière pour le roi défunt, et non l’officier
d’armes lui-même.
454 VIE PRATIQUE, MAGIE ET MÉDECINE – PRAGMATICS, MAGIC AND MEDICINE

mort de son père, Charles VII s’était fait déclarer roi de France. Il fallait donc
qu’aux funérailles succède immédiatement la désignation du nouveau roi. Cette
cérémonie synthétise en fait deux traditions : d’une part, la dernière messe pour
le roi défunt et d’autre part, l’acclamation du nouveau roi. Le héraut, officier
royal, assure la transition entre les deux moments. Les autres officiers, pour
marquer la permanence de la monarchie, relèvent alors leur masse d’armes et
acclament le nouveau roi. Cette pratique va progressivement se condenser et
l’ensemble du rituel va être accompli par le héraut. Ainsi, lors des obsèques
de Charles VII, en 1461, le héraut prend la parole en criant : « Or oyez ! ».
Puis, l’évêque de Bayeux ayant jeté une poignée de terre sur le cercueil royal, il
reprend : « Priez pour l’âme du très excellent, très puissant et très victorieux
prince le roi Charles, viie de ce nom ! » Il pose sa masse contre la bière, la relève
et proclame : « Vive le roi ! », cri repris en chœur par les autres officiers43. La
relation de ces obsèques, consignée dans des manuels à l’usage de la chancellerie
et dans des recueils de formules et d’usage, a participé à la constitution d’une
mémoire écrite, d’un patrimoine de la monarchie française44.
Les hérauts sont aussi les maîtres de cérémonie d’un des moments importants
des funérailles princières, l’offrande chevaleresque. Au moment des obsèques de
Charles VI, cette pratique est déjà ancienne et les hérauts se l’approprient très
rapidement45. Au xive siècle, l’offrande chevaleresque est déjà attestée chez les
grands féodaux, mais elle s’implante profondément dans les mentalités et les
pratiques de la noblesse européenne, en Angleterre, en Bourgogne, en Lorraine
ou en Savoie46. Cette cérémonie consiste, lors des funérailles, à apporter auprès
du corps du défunt ses « pièces d’honneur », c’est-à-dire tous les attributs de la
guerre et des tournois, chevaux, épées, heaume, armure, bannières et écussons.
Ces objets sont portés par des proches ou des parents du défunt. Le héraut, à
travers sa parole, rythme cette cérémonie qui insiste sur l’ethos noble, défini par
le maniement des armes, la grandeur du lignage et l’exaltation de l’honneur.
Le monde du tournoi et de la guerre reste la référence centrale de l’offrande
chevaleresque. Le héraut, vêtu de sa cotte d’armes, brandissant les armoiries du
défunt, est le symbole des vertus guerrières et chevaleresques de la noblesse. Il
est, lors des funérailles, l’« unique image emblématique du prince » : il assure

43 M.  d’Escouchy, Chronique, G.  du Fresne de Beaucourt (éd.), Paris  : Renouard, 1863, t.  II,
p. 443-444.
44 F. Autrand, Charles VI, Paris : Fayard, 1986, p. 599.
45 Les compendia des hérauts font très souvent référence au rôle des officiers d’armes dans l’offrande cheva-
leresque. Voir notamment le traité du père de Gilles Nockerscot, roi d’armes de Flandre à la fin du xve siècle
(Paris, BnF, ms. fr. 1280, f° 131 r°-134 r°). Les descriptions des obsèques de Louis de Male (1384), Gilles de
Mortagne (1391) ou Bertrand du Guesclin (1391) sont souvent recopiées et considérées comme des modèles
à suivre.
46 M. Gaude-Ferragu, D’or et de cendres…, p. 208-213.

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le lien conceptuel entre le prince et l’État, ainsi que la transition entre le roi
défunt et celui qui assure sa succession47.

3 – Le héraut, porte-voix des formules rituelles

L’apogée des hérauts d’armes sur la scène politique se situe très clairement
au xve siècle. Dans les siècles précédents, ce sont des officiers peu considérés,
très proches des ménestrels48. Au xvie siècle, concurrencé par d’autres formes
de communication politique, l’office connaît un rapide déclin. En revanche,
dans le dernier siècle du Moyen Âge, il n’est de grande cérémonie sans héraut,
précédant le prince, se faisant le détenteur d’une parole protocolaire. Avec la
« cérémonialisation accrue de la vie courtoise et publique », pour reprendre
l’expression de Gert Melville, le héraut devient cet expert des gestes et paroles
rituelles dont la monarchie a besoin49.
Les hérauts sont des hommes tout désignés pour accomplir ces missions,
car la fonction est entourée de toute une construction symbolique qui fait de
l’office une autorité morale reconnue. Tout d’abord, le héraut ne ment pas.
Quand il prête serment, il jure de ne dire que la vérité et il est reconnu comme
tel dans la société médiévale, y compris par les chroniqueurs. Il est celui qui sait
voir et qui dont la parole fait autorité. Il est le « voir-disant », selon l’expres-
sion médiévale consacrée50. Il connaît les codes particuliers à la noblesse et
sait s’exprimer en public. Ainsi, dans certains manuels de hérauts, des pages
entières sont consacrées à la façon de s’adresser à l’empereur, au pape, au roi de
France, au roi d’Angleterre, à un chevalier ou à un simple écuyer, à la manière
de formulaires51, et de nombreux textes sont rédigés (et recopiés) sur la façon

47 L. Hablot, « Revêtir le prince. Le héraut en tabard, une image idéale du prince. Pour une tentative
d’interprétation du partage emblématique entre prince et héraut à la fin du Moyen Âge à travers le cas
bourguignon », in Le héraut, figure européenne, p. 773 et suivantes.
48 M.  Clouzot, «  Rois des ménestrels, ménestrels du roi  ? Statuts, fonctions et modèles d’une autre
royauté aux xiiie, xive et xve  siècles », in T. Hiltmann (éd.), Les « autres » rois. Études sur la royauté
comme notion hiérarchique dans la société du bas Moyen Âge et au début de l’époque moderne, München :
Oldenbourg, 2010, p. 32-33.
49 G. Melville, « Pourquoi des hérauts d’armes ? Les raisons d’une institution », in Le héraut d’armes,
figure européenne, p. 498 : « La cérémonialisation accrue de la vie courtoise et publique, mais aussi le besoin
de diffusion propagandiste des hauts faits chevaleresques ainsi que leur enregistrement par des experts, exi-
geaient des maîtres formés aux signes visuels et actions symboliques, des observateurs et annonceurs entrai-
nés à de telles actions symbolisant les valeurs nobles. »
50 T.  Hiltmann, «  Vieux chevaliers, pucelles, anges  ? Fonctions et caractères principaux des hérauts
d’armes d’après les légendes sur l’origine de l’office d’armes au xve siècle », in Le héraut, figure européenne,
p. 503-525 ; C. Boudreau, « Messagers, rapporteurs, juges et voir-disant. Les hérauts d’armes vus par eux-
mêmes et par d’autres dans les sources didactiques (xive-xvie siècles) », in Information et société en Occident
à la fin du Moyen Âge, p. 233-245.
51 Voir notamment le traité de Franquevie, héraut de Valenciennes : Ms. London, British Library, Egerton
1644, f. 79 et suivants.
456 VIE PRATIQUE, MAGIE ET MÉDECINE – PRAGMATICS, MAGIC AND MEDICINE

dont doit se tenir un tournoi ou doivent être célébrées des funérailles, selon les
différentes traditions et le rang social de l’intéressé52.
Mais le héraut de cour n’est pas un officier comme les autres. Il est un avatar
du prince. Quand il accède à l’office, il perd son patronyme et est rebaptisé pour
prendre le nom d’un territoire ou d’une devise. Dans tous ses déplacements, il
est protégé par son immunité. Le roi d’armes, degré suprême de l’office, porte
une couronne lors des cérémonies. Il brandit sa masse, ou vergette, qui rappelle
le skeptron d’Homère qu’on remet aux orateurs53. Vêtu de son tabard aux armes
du souverain, il est une incarnation de l’État princier. Il porte ainsi les insignes
de la royauté qui font son autorité. Il est la voix de l’honneur du prince et de
la noblesse.
Le discours du héraut dans toutes ces cérémonies est fondamentalement
performatif et est mis en scène comme tel. L’officier d’armes publie les traités
de paix dans toutes les provinces du royaume, déclare la guerre, souvent à la
première personne, au nom du prince. Le règne du roi commence au moment
où le héraut crie : « Vive le roi ! ». Sa parole vaut promulgation. Le héraut au
Moyen Âge correspond tout à fait à l’analyse que faisait Pierre Bourdieu, dans
Ce que parler veut dire, de la performativité de la parole. Ce qui fait l’autorité
du héraut et l’efficacité de son discours, c’est moins la personnalité de l’homme
que le « mystère du ministère ». Il est, au travers de tous ses attributs symbo-
liques, le représentant d’un groupe, la noblesse, et parle en son nom. « Groupe
fait homme, il personnifie une personne fictive, qu’il arrache à l’état de simple
agrégat d’individus séparés, lui permettant d’agir et de parler, à travers lui,
« comme un seul homme ». En contrepartie, il reçoit le droit de parler et
d’agir au nom du groupe, de « se prendre pour » le groupe qu’il incarne, de
s’identifier à la fonction à laquelle « il se donne corps et âme », donnant ainsi
un corps biologique à un corps constitué. Status est magistratus, « l’État, c’est
moi »54.
Le contexte du xve siècle est favorable à l’émergence des hérauts sur la scène
politique. Un texte bien connu, Le débat des hérauts d’armes de France et d’An-
gleterre, rédigé au milieu du siècle, résume bien l’utilité sociale des officiers
d’armes : ils doivent « départir les honneurs a qui ilz appartiennent », tant sur
le champ de bataille, sur les lices, que lors des « hautes et pompeuses festes et
obsèques »55. Plus qu’un observateur, le héraut est un acteur institutionnel de
toutes ces cérémonies. Si l’apogée de l’office d’armes se situe à l’extrême fin du
Moyen Âge, c’est que la demande sociale est forte : de la part de la noblesse,

52 T. Hiltmann, Spätmittelalterliche Heroldskompendien, p. 292-300.


53 L. Hablot, « Bâtons et pouvoirs au Moyen Âge », in M. Pastoureau (éd.), Actes du colloque « Des
signes dans l’image, Usages et fonctions de l’attribut dans l’iconographie médiévale, du Concile de Nicée
au Concile de Trente », Genève : Droz, à paraître.
54 P. Bourdieu, Ce que parler veut dire…, p. 101.
55 Le débat des hérauts de France et d’Angleterre suivi du The debate between the herald of England and
France by John Cook, L. Pannier et P. Meyer (éd.), Paris : Firmin-Didot, 1877, p. 2.

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qui a besoin qu’on glorifie, qu’on médiatise ses hauts faits et le prestige de sa
lignée, à savoir ce qui fait son honneur, ce qui justifie son rang social ; avec
le développement d’une société de cour concentrée autour de la personne du
souverain, ces officiers sont mobilisés par ce dernier pour participer à la mise
en scène de cette culture festive des joutes et des pas d’armes, ainsi que pour
réguler cette communication du prince au moyen des rituels et des cérémonies
qui se figent, affirmant par là la prédominance royale et distribuant au passage
les honneurs et la place de chacun dans l’ordre social. Les hérauts, devenus les
experts de toute cette construction symbolique, participent à la codification
des rituels dont les formules, paroles performatives par excellence, se révèlent
déterminantes et deviennent le fondement de leur autorité.

* * *
À la fin du Moyen Âge, le héraut d’armes est donc à travers les rituels qu’il
conduit et les formules qu’il prononce un des arbitres des relations sociales
d’une société de l’honneur qui se met en scène dans les grandes cérémonies
princières. Il répond en cela à une demande de la noblesse, qui a besoin qu’on
justifie son statut social, et de la couronne qui établit définitivement les rituels
de l’institution monarchique. Il devient un des agents de la communication
princière, comptant « avec le choc du son et avec le travail de mise en scène »56,
mais contrairement à l’analyse de Luc Morelle sur les sentences d’excommuni-
cation, l’autorité du héraut ne vient pas de la scénographie et de la lecture de
l’écrit mais bien de son statut et de la force des formules rituelles qui, dans la
bouche du héraut, ont valeur de droit57.

56 L.  Morelle, «  Les chartes dans la gestion des conflits (France du Nord, xie-début xiie  siècle)  »,
Bibliothèque de l’École des Chartes, 155 (1997), p 288-289.
57 C’est cette fonction qui lie indéfectiblement l’office d’armes à la monarchie tout au long de l’époque
moderne. En effet, tandis que le héraut disparaît progressivement du paysage européen, les quelques officiers
d’armes encore entretenus à la cour sont chargés des proclamations publiques. Louis XIII est le dernier à
déclarer la guerre par voix de héraut en 1653. En revanche, les officiers d’armes se font les porte-paroles de
la paix jusqu’en 1830. Ils étaient aussi présents en tant qu’huissier pour l’ouverture des États généraux en
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