Vous êtes sur la page 1sur 11

INTRODUCTION

Friedrich Von Schiller est un penseur et écrivain allemand appartenant au siècle dit des
« Lumières ». Auteur d’une grande précocité intellectuelle et artistique, son œuvre est
souvent classée parmi les grands classiques de la culture allemande. C’est ainsi que,
dans son ouvrage intitulé Lettres sur l’éducation esthétique de l’homme, Schiller mène
une réflexion profonde sur la Beauté et sur la nature de son influence dans la vie de
l’homme. Et dans les chapitres 17 à 27, Schiller décrit la manière dont le Beau permet
à l’homme de surmonter toutes ces limitations, et le conduit à un état de liberté et de
dignité qu’il appelle « l’état esthétique ». Mais alors, quelles sont ces limitations dont
l’homme souffre ? Comment la beauté permet-elle de les surmonter ? Qu’est-ce que
l’état esthétique ? Pour répondre à ces questions, nous allons tout d’abord mettre en
lumière les limitations de « l’homme physique », c’est-à-dire en défaut d’équilibre (I),
ensuite nous cristalliserons notre attention sur l’homme esthétique (II), et enfin nous
nous livrerons à une lecture critique de la pensée de Schiller développée ici (III).

1
I- L’HOMME PHYSIQUE

Il s’agit ici pour nous de montrer que l’homme physique est, pour Schiller, celui-là
qui souffre d’un certain nombre de limitations (A) qui ne peuvent être annihilées ou
surmontées que par la Beauté apaisante (B).

A- Les limitations de l’homme physique

Pour Schiller, la perfection de l’homme consiste en une harmonieuse vigueur


de ses forces sensibles et spirituelles 1. De ce fait, d’après lui, l’homme ne peut
manquer à cette perfection que par défaut d’harmonie ou par manque de vigueur.

D’après Schiller, en effet, l’homme souffre de disharmonie lorsqu’il est « en


tension », lorsqu’il est « tendu ». Telle est la première limitation dont il souffre.
Schiller affirme que l’homme est « tendu » quand il est dominé, soit par sa dimension
sentimentale, soit par sa dimension intellectuelle ou spirituelle. C’est en effet dans la
collaboration harmonieuse de ces deux dimensions que l’homme trouve son équilibre.
Aussi, cet équilibre est rompu par le fonctionnement unilatéral de ces deux
dimensions, laissant ainsi l’homme dans un état de déséquilibre ou de « tension ». Ce
faisant, l’homme perd sa liberté et son harmonie intérieure, et il se retrouve ainsi dans
un état de et il se retrouve ainsi dans un état de contrainte et de violence. Aussi, pour
Schiller, la liberté se trouve en fait dans une collaboration étroite entre ces deux
dimensions. Précisément, l’homme dominé unilatéralement par ses sentiments, c’est-à-
dire tendu sensiblement, est détendu et recouvre sa liberté grâce à de la Forme. De
l’autre côté, celui qui est dominé unilatéralement par les Idées, c’est-à-dire tendu
spirituellement, est détendu et mis en liberté par de la matière.
De l’autre côté, nous avons l’homme en manque de vigueur, c’est-à-dire
profondément marqué par une inactivité simultanée de ses forces sensibles et
spirituelles. Dans ce second cas, on retrouve également une certaine rupture de cette
collaboration vitale entre les natures physique et spirituelle de l’homme. Tout l’enjeu

1
Friedrich Von Schiller, Lettres sur l’éducation esthétique de l’homme, Paris, Aubier, P. 152.

2
ici pour l’homme consiste à recouvrer cette vigueur, cette énergie qui est la
manifestation même d’une activité conjointe des forces sensibles et spirituelles de
l’homme.
Il faut dire qu’ici Schiller insiste sur le fait que ces limitations ne sont pas dues
à la Beauté, mais s’expliquent par le fait que cette beauté trouve une matière déjà
pervertie et réfractaire. Voilà pourquoi, dit Schiller, cette beauté n’apparaîtra jamais
dans la réalité comme un genre pur, comme une totalité. C’est d’ailleurs là une idée
qu’on pouvait déjà retrouver dans la pensée de Platon. Ici, la beauté se manifeste plutôt
comme étant seulement une espèce particulière et limitée. C’est donc l’homme qui
transmet à la beauté des imperfections, d’où la nécessité pour lui de bénéficier des
bienfaits de la beauté apaisante.

B- La beauté apaisante comme source d’harmonie pour l’homme


Nous avons dit plus haut que, pour Schiller, l’homme est en proie à deux grandes
limitations. En effet, d’après Schiller, il est soit « tendu », c’est-à-dire qu’il souffre
d’un fonctionnement unilatéral d’une de ses deux natures (sensible et spirituelle), soit
alors il est « détendu », dans la mesure où il souffre d’un relâchement de ses deux
natures, ce qui lui fait perdre en vigueur. Dans une telle perspective, l’homme est dans
un sérieux état de déséquilibre, et la beauté présente en lui ne peut se manifester dans
tout son éclat, dans toute sa splendeur, dans toute sa pureté.
Toutefois, d’après Schiller, c’est bel et bien la beauté qui peut rétablir cet
équilibre dans la vie intérieure et concrète de l’homme. En effet, Schiller affirme que,
dans le cas de figure où elle vient agir dans une âme « tendue », elle peut être qualifiée
« d’apaisante ». Dans un autre cas de figure, c’est-à-dire celui où elle agit dans une
âme « détendue », « relâchée », elle peut être qualifiée « d’énergique ». Dans un
premier temps, en tant qu’agissant dans une âme « tendue », la beauté apaisante se
manifestera comme forme calmant le tumulte de l’âme et élevant les sentiments aux
pensées. Dans un second temps, elle se manifeste comme « image vivante », en armant

3
de force sensible la forme abstraite. La beauté apaisante, en faisant cela, ramène selon
Schiller, « le concept à l’intuition et la loi au sentiment »2.
Schiller affirme qu’en élevant en l’homme les sentiments jusqu’aux pensées, la
beauté rétablit l’équilibre chez l’homme qu’il appelle « l’homme de la nature ». De
même, en rapprochant les pensées de la sensibilité, la beauté apaisante rétablit
l’harmonie chez « l’homme artificiel ».
Ajoutons ici que, pour Schiller, ces deux natures de l’homme (sensible et
spirituel) correspondent ou alors sont là manifestation de deux instincts fondamentaux
par lesquels l’homme accèderait réellement ou effectivement à l’humanité. De fait, à
travers l’instinct sensible, l’homme fait l’expérience la son existence, c’est-à-dire de
son inscription concrète dans le monde. En outre, à travers l’instinct raisonnable,
l’homme accède à la conscience de soi, c’est-à-dire à la personnalité. Et c’est ainsi que
la beauté apaisante, en établissant une collaboration active entre ces deux instincts
fondamentaux contraires, apporte à l’homme harmonie et vigueur. A présent,
intéressons-nous à l’homme esthétique, qui est pour Schiller l’homme accompli.

II- L’HOMME ESTHETIQUE


Pour comprendre ce qu’est « l’homme esthétique » chez Schiller, il convient de
lever un pan de voile sur deux concepts, en l’occurrence l’état esthétique (A) et
l’apparence esthétique (B).

A- L’Etat esthétique
L’état esthétique est, chez Schiller, comme une conformation de tout l’être de
l’homme à la beauté. En d’autres, dans l’état esthétique, l’homme laisse la beauté
redonner à toutes les dimensions de son être cet équilibre extérieur et intérieur qu’elles
avaient perdu du fait des limitations dont elles faisaient l’objet.
Pour Schiller, l’état esthétique est d’abord et avant tout une négation, plus
précisément la négation d’une quelconque détermination spéciale. Autrement dit, à
l’état esthétique, l’homme n’est dominé, ni par le fonctionnement unilatéral de la
sensibilité, ni par l’empire exclusif de la raison. C’est pourquoi Schiller affirme que,

2
Ibid., P. 154.

4
dans cet état, l’homme est un néant3, en ceci que cet état ne produit aucun résultat
particulier. Aucun effet spécial. Cet état esthétique ne procure à l’homme aucune
aptitude notable, aussi bien sur le plan intellectuel que sur le plan moral.
Toutefois, d’après Schiller, cet état esthétique est en même temps une sorte de «
plénitude » ou alors d’ouverture à la plénitude, car elle confère à l’homme libéré de
toute limitation la liberté de faire ce qu’il veut et d’être ce qu’il doit être, c’est-à-dire
un homme au sens le plus noble du terme. C’est pourquoi Schiller pense et affirme que
le premier don que l’état esthétique fait à l’homme, c’est le don de l’humanité 4. Cette
humanité, dit Schiller, est virtuellement présente chez l’homme, avant que celui-ci ne
subisse toutes sortes de déterminations ou de limitations. Toutefois, du fait de ces
dernières, l’homme perd en quelque sorte son humanité, laquelle ne peut lui être
rendue que par la vie esthétique. Schiller pense donc ainsi qu’il est permis, à la fois
métaphoriquement et philosophiquement, d’appeler la beauté « notre deuxième
créateur »5, dans la mesure où elle nous donne la possibilité ou la capacité d’être
véritablement hommes ou de redevenir hommes, à la manière même où nous
l’entendons l’être ou le redevenir.
L’état esthétique est donc celui-là par lequel la beauté redonne à l’homme un
plein équilibre ontologique. Désormais, toutes les dimensions de son être (sensible et
spirituelle) sont simultanément actives et ne souffrent d’aucune espèce de limitation.
C’est ainsi que l’homme esthétique, affranchi qu’il est de quelque limitation que ce
soit, peut désormais faire preuve d’une grande productivité ou d’une grande efficacité,
aussi bien intellectuelle que morale. De fait, ces deux grandes dimensions de la vie de
l’homme s’ouvrent désormais à l’infini et se découvrent ainsi des horizons illimités.
En outre, pour Schiller, même la dimension artistique de l’homme doit se laisser
transcender par cette extraordinaire liberté que lui apporte l’état esthétique. En
d’autres, pour Schiller, une œuvre artistique est véritablement belle, non pas du fait du
contenu que l’artiste y met ou alors du fait du sujet qu’il traite en réalisant son œuvre,
mais plutôt par sa capacité à laisser l’esprit esthétique informer son œuvre par sa
beauté infinie.

3
Ibid., P. 172.
4
Ibid., P. 172.
5
Ibid., P. 173.

5
Ainsi, l’état esthétique est comme une submersion de tout l’être de l’homme par la
beauté, ce qui le conduit au final à l’apparence esthétique.

B- L’apparence esthétique
Parvenu à l’état esthétique, l’homme accède en quelque sorte, d’après Schiller,
à une « nouvelle création ». Mieux encore, il devient lui-même, en quelque sorte, un «
nouveau créateur ». De l’avis la Schiller, l’homme esthétique accède à une certaine
totalité. Il devient capable d’énoncer des jugements et d’accomplir des actes qui ont ou
qui auront une portée universelle.
L’état esthétique, d’après Schiller, permet de réaliser une véritable harmonie
de tout son être. De manière plus précise, il surmonte la contradiction de nature et
d’effets entre la vie sensible et la vie spirituelle. De ce fait, il devient capable, à travers
l’usage ou le déploiement de sa vie physique, de se frayer un chemin vers une certaine
liberté spirituelle. Cette liberté spirituelle n’est pas la licence de poser des actes
hasardeux ou inconsidérés, mais l’exercice raisonnable de ce « pouvoir de création »
que lui a conféré la beauté. L’état esthétique n’est donc pas une sorte d’anéantissement
de la vie physique ou sensible de l’homme et des désirs y relatifs. En réalité, l’homme
esthétique parvient à transcender, à ennoblir, à assumer ses instincts physiques vers
des perspectives plus belles, plus grandes, plus universelles.
Pour Schiller, comme nous le relevions plus haut, l’homme qui se trouve à
l’état esthétique accède à une certaine « totalité ». Ce faisant, il devient capable, à
travers l’usage de sa liberté, de se soustraire au monde et au temps. D’après Schiller, il
se soustrait au monde à travers la contemplation , encore appelée réflexion 6. Il s’agit
ici, effectivement, d’un mouvement de liberté qui permet à l’homme d’échapper ou de
se soustraire à l’empire des passions. En d’autres termes, la contemplation ou réflexion
permet à l’homme de s’émanciper de la férule aliénante de la nature. En outre, la
contemplation permet à l’homme de se soustraire au temps, car le mouvement de la
conscience constitue, d’après Schiller, l’acte par lequel l’homme esthétique projette un
reflet de l’infini sur les choses passagères7.
6
Ibid., P. 194.
7
Ibid.

6
L’état esthétique est donc, pour Schiller, l’accession de l’homme à la pleine,
réelle et effective humanité. Et le critère qui manifeste ou qui consacre l’accession
d’un homme à l’humanité, c’est l’apparence esthétique 8. L’apparence esthétique est en
effet, d’après Schiller, cette capacité de l’homme à s’élever au-dessus du réel, de
donner une forme au réel. L’apparence esthétique consacre l’aptitude de l’homme à «
créer », à modeler ou à remodeler un monde qui correspond mieux à la Beauté pure à
laquelle il s’est conformé. L’apparence esthétique est une prise de distance par rapport
à la matière, une force intérieure qui se met en mouvement chez l’homme
indépendamment de la réalité. Elle est, pour Schiller, un instinct de jeu 9 qui permet à
l’homme d’inventer, d’innover, de recréer.
Ainsi, l’apparence est donc cette capacité de l’homme à produire, à refaire un
monde plutôt que de subir les lois de celui dans lequel il se trouve, d’où l’affirmation
de Schiller selon laquelle « une âme qui se délecte de l’apparence prend plaisir, non
plus à ce qu’elle reçoit, mais à ce qu’elle fait »10.

III- LECTURE CRITIQUE DE LA PENSEE DE SCHILLER


Il s’agit ici d’émettre quelques réserves relativement à la pensée de Schiller
(A), tout en la réinterprétant (B).

A- Réserves sur la pensée de Schiller


Comme nous l’avons vu plus haut, Schiller pense que l’homme esthétique,
c’est-à-dire en réalité l’homme accompli ou en voie d’accomplissement, achève son
itinéraire de perfectionnement ou d’humanisation dans ce qu’il appelle « l’apparence
esthétique ». Pour lui, l’homme esthétique doit préférer cette monde de l’apparence à
celui du réel. En fait, même si nous entendons bien que, pour Schiller, cette apparence
esthétique dont il parle n’est pas synonyme d’illusions, on peut tout de même
s’interroger sur une pensée qui tend à privilégier l’apparence au détriment du réel.

8
Ibid., P. 201.
9
Ibid., P. 202.
10
Ibid., P. 201.

7
En outre, Schiller prescrit à l’homme le fait d’être ou de devenir une sorte de
« législateur de la nature »11. Une telle prescription nous rappelle à l’évidence la
volonté de Descartes de rendre l’homme « maître et possesseur de la nature ».
Toutefois, on peut s’interroger la l’opportunité pour l’homme d’établir entre lui et la
nature un rapport de dominant-dominée ? N’est-ce pas là une des principales sources
des malheurs de l’homme contemporain ? Une telle pensée est-elle écologique, et donc
esthétique, au sens les plus nobles de ces termes ?
Ainsi, il nous semble opportun d’émettre quelques réserves relativement à
certains aspects de la pensée de Schiller, ce qui n’enlève rien sa pertinence.

B- Réinterprétation de la pensée de Schiller


La pensée de Schiller nous semble être d’une grande pertinence dans ses
plus grands traits. A titre d’exemple, on peut admirer le grand équilibre dont elle fait
preuve quand elle invite l’homme à se servir conjointement de sa sensibilité et de sa
dimension spirituelle. De fait, dans un monde, en l’occurrence la nôtre, où on a
l’habitude de choisir l’une de ses deux dimensions en délaissant ou en négligeant
l’autre, Schiller nous invite à envisager notre personne humaine dans sa totalité.
On peut également saluer chez Schiller cette invitation qu’il nous fait à
transcender le monde dans lequel nous vivons. Pour lui, être un homme, ce n’est pas
subir les lois du monde, mais c’est recréer sans cesse un monde plus digne, plus noble,
plus humain, à travers une contemplation joyeuse et profonde de la beauté pure 12,
contemplation qui élève l’homme au-delà du temps 13, et qui le perfectionne, le faisant
passer de la puissance à l’acte14.

11
Ibid., P. 195.
12
Platon, Le Banquet, Paris, GF Flammarion, 2007, P. 158.
13
Aristote, Ethique à Nicomaque, Paris, Librairie Philosophique J. Vrin, 1990, P. 514.
14
Ibid., La Métaphysique Tome II, Paris, J. Vrin, 1962, P. 500.

8
CONCLUSION
L’objet de notre travail aura consisté à réfléchir sur le propos de Schiller depuis le
Chapitre 17 jusqu’au chapitre 27 de son ouvrage intitulé Lettres sur l’éducation
esthétique de l’homme. Comme nous l’avons noté ou relevé plus haut, Schiller montre
que l’homme fait tout d’abord l’objet ou souffre d’un certain nombre de limitations qui
empêchent à la beauté de manifester tout son éclat en lui. Ensuite, nous avons vu que,
pour Schiller, c’est l’esthétique qui rétablit l’homme dans un équilibre total qui
l’introduit ou qui le consacre dans un état de liberté et de dignité. Enfin, nous avons
fait état du fait qu’en dépit des quelques limites qu’on peut y déceler, la pensée de
Schiller est indéniablement porteuse d’une grande pertinence, car elle nous rappelle à
quel point notre être est fait pour le Beau, et à quel point son équilibre dépend de ce
même Beau.

9
BIBLIOGRAPHIE

Aristote, Ethique à Nicomaque, Paris, Librairie Philosophique J. Vrin, 1990.

Ibid., La Métaphysique Tome II, Paris, J. Vrin, 1962.

Platon, Le Banquet, Paris, GF Flammarion, 2007.

Schiller F. V., Lettres sur l’éducation esthétique de l’homme, Paris, Aubier.

10
TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION.................................................................................................................................1
I- L’HOMME PHYSIQUE...............................................................................................................2
A- Les limitations de l’homme physique..............................................................................2
B- La beauté apaisante comme source d’harmonie pour l’homme....................................3
II- L’HOMME ESTHETIQUE......................................................................................................4
A- L’Etat esthétique...............................................................................................................4
B- L’apparence esthétique....................................................................................................6
III- LECTURE CRITIQUE DE LA PENSEE DE SCHILLER......................................................7
A- Réserves sur la pensée de Schiller...................................................................................7
B- Réinterprétation de la pensée de Schiller........................................................................8
CONCLUSION......................................................................................................................................9
BIBLIOGRAPHIE..............................................................................................................................10

11

Vous aimerez peut-être aussi