Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
PLAIES ET CICATRISATION 19
Sommaire
• Les soins
Quand l’équilibre est rompu
• Les pansements
De plus en plus actifs
• Le patient diabétique
Une prise en charge globale
• Les plaies de la main
À ne jamais négliger
• Les brûlures
Quel degré d’urgence ? Quel soin ?
© Burger/Phanie
• Les escarres
Ce n’est pas une fatalité
© Garo/Phanie
Plaies et cicatrisation
Des schémas de soins
toujours différents
Une plaie se définit par une rupture de la continuité des Une immaturité des cellules, une acti-
tissus de l’enveloppe corporelle. On distingue divers vité cellulaire insuffisante, tout
comme une croissance exubérante
types de plaies. Aiguës ou chroniques, superficielles ou entravent ou empêchent le déroule-
profondes, les plaies sont associées à divers objectifs de ment de la phase suivante. Le but
>> DOSSIER
soins et risques d’infection. Le premier objectif est la d’un traitement de plaie bien conduit
reconstitution tissulaire : la cicatrisation, phénomène sera d’intervenir par une action régu-
biologique naturel de réparation du tissu après une lésion. latrice ou stimulante sur les diffé-
rentes phases de la cicatrisation. Le
L
es tissus humains sont répétée systématiquement afin de pansement devra correspondre aux
capables, en effet, de réparer reconnaître les phases successives besoins de la plaie au cours de cha-
des lésions localisées par des normales d’une guérison spontanée, cune de ses phases.
processus de réparation et de régé- ou de détecter à temps des anoma- La cicatrisation commence par l’appa-
nération qui leur sont propres. lies pour apporter une correction rition de phénomènes inflammatoires
Cependant, cette capacité reste sou- rapide et appropriée. précoces suivis par des sécrétions à
mise à de nombreuses variations. De partir de vaisseaux sanguins et lym-
ce fait, le traitement et les soins d’une Les différentes phases phatiques. La coagulation est induite
plaie n’obéissent jamais au même La cicatrisation d’une plaie se déroule par activation de la thrombokinase qui,
schéma. Même en présence de en trois phases. Dans la pratique cou- libérée, permet la formation de fibrine.
lésions d’étiologie identique, le pro- rante, ces trois phases sont appelées Après environ 10 minutes, débutent
cessus de cicatrisation pourra se respectivement phase de détersion, l’exsudation, qui va assurer la défense
dérouler de façon totalement diffé- de bourgeonnement et d’épithéliali- contre l’infection, et la détersion de la
rente selon les personnes. sation. Chacune de ces phases est plaie. Au cours de cette phase, les
Pour cette raison, un bon concept caractérisée par des activités cellu- mitoses augmentent en nombre au
thérapeutique débutera toujours par laires spécifiques qui font progresser niveau de la plaie. Alors que la déter-
une analyse et une appréciation pré- le processus de réparation selon des sion de la plaie se poursuit encore, les
cises, pour évaluer tant les caractéris- séquences chronologiques précises, fibroblastes se multiplient sous l’im-
tiques locales de la plaie que les fac- mais imbriquées les unes dans les pulsion des macrophages. Ces fibro-
teurs généraux du sujet atteint. Cette autres. La durée et l’intensité de cha- blastes effectueront par la suite un tra-
évaluation devra également être cune des phases sont variables. vail de reconstruction. >>
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 52 • janvier-février 2004
Dossier 23/02/04 15:49 Page 20
20 DOSSIER
>> Environ 4 jours après la blessure, l’or- Il existe différentes lésions de la peau
Quel type de plaie ?
ganisme commence à combler la dont l’aspect varie en fonction de la
La plaie correspond à :
perte de substance par un nouveau cause. Ainsi, les abrasions trauma-
• un érythème ;
tissu. Dans ce but, les fibroblastes tiques de la peau sont provoquées • une phlyctène ;
produisent, en premier lieu, des par le frottement d’une surface • une dermabrasion ;
mucopolysaccharides qui serviront de mobile contre la peau ou une friction • une nécrose sèche.
matrice à l’élaboration des fibres col- sur une surface rugueuse (escarres). La plaie est-elle :
>> DOSSIER
lagènes du tissu conjonctif. La destruction peut être superficielle, • fibrineuse ± exsudative ;
La fibre collagène, définitive et inso- intermédiaire ou profonde. • cavitaire ± exsudative ?
La plaie est-elle :
luble, sera incorporée dans la matrice Indiquée pour le traitement des
• cavitaire ± bourgeonnante ;
mucopolysaccharide. lésions épidermiques, la dermabra- • bourgeonnante ± exsudative ;
Dans le même temps, des néoca- sion en traitement chirurgical est réa- • bourgeonnante ± épidermisée ;
pillaires vont progresser dans cette lisée avec une brosse métallique ou • hyperbourgeonnante ?
matrice pour assurer la nutrition du une meule (petit instrument rotatif).
tissu nouvellement formé. En pré- Elle met à nu le derme superficiel
sence de pertes de substance plus pour améliorer l’aspect esthétique de
importantes, les capillaires se pré- la cicatrice. Son traitement est iden-
sentent à la surface de la plaie tique à celui d’une brûlure de même Facteurs pouvant
avec un aspect de granulation profondeur. avoir un effet néfaste
rouge vif. La plaie par avulsion peut provoquer sur la cicatrisation
Une couche de sécrétions fibrineuses des lésions du tissu conjonctif souple
✓ Obésité : diminution de la
apparaît à la surface du tissu néo- sous-jacent.
vascularisation du tissu adipeux
formé. Des bourgeons vasculaires et Dans le cas d’une plaie par contusion et augmentation de la tension
des cellules du tissu conjonctif y traumatisme contondant, les lèvres dans la plaie.
pénètrent et vont, à leur tour, pro- de la plaie sont dévitalisées. ✓ Tabagisme : diminution de
duire une nouvelle couche de sécré- Dans le cas d’une coupure provo- l’oxygénation de la plaie et ano-
tions. Par ce mécanisme, ils font pro- quée par un objet tranchant, les malies de la coagulation dans les
gresser lentement le bourgeon- lèvres sont lisses, intactes. petits vaisseaux sanguins.
✓ Âge : affaiblissement des
nement et, ainsi, combler progressi- Souvent produite par des forces de
défenses immunitaires et dimi-
vement la plaie. cisaillement (morsure), la lacération nution de la résistance aux germes
Entre le 6e et le 10e jour en moyenne, est, elle, une plaie déchiquetée, irré- pathogènes.
commence la maturation des fibres gulière. ✓ Diabète : dysfonctionnement
collagènes. La plaie se rétracte sous Les plaies chroniques surviennent leucocytaire, à cause de l’hyper-
l’influence des myofibroblastes. En généralement sur des tissus déjà cica- glycémie. Risque d’ischémie
s’appauvrissant progressivement en trisés. Elles peuvent être favorisées par régionale en raison d’une oblité-
ration vasculaire ou de l’épais-
eau et en contenant de moins en une mauvaise fixation de l’épiderme
sissement de la membrane basale
moins de vaisseaux, le tissu de granu- sur le derme ou des anomalies vascu- des capillaires.
lation devient plus ferme. Il se trans- laires ou métaboliques. Elles sont sou- ✓ Autres : mauvaise circula-
forme en tissu cicatriciel qui, à son vent caractérisées par une importante tion/hypoperfusion, malnutrition,
tour, favorisera la rétraction cicatri- quantité de collagène qui réduit la vas- médicaments immunosuppres-
cielle. L’épithélialisation marque la fin cularisation et l’apport d’oxygène. Les seurs, irradiation de la lésion,
de la cicatrisation. brûlures, enfin, sont des lésions aiguës stress important, déficit sensitif
dans la région de la plaie, corti-
mais, pour certaines, les soins peuvent
coïdes.
Plaies aiguës durer longtemps.
Focus ... et plaies chroniques Andrée-Lucie Pissondes
La rapidité Les plaies aiguës et les plaies chro-
et la qualité niques diffèrent notamment par le
de la cicatrisation temps nécessaire à l’achèvement de
d’une plaie l’épithélialisation.
dépendent Les plaies aiguës sont créées par un
de l’état général agent traumatique dans un tissu sain.
de l’organisme
La cicatrisation se déroule normale-
atteint, de l’étiologie
ment si le tissu est bien vascularisé.
de la lésion, de l’état
et de la localisation Mais les plaies aiguës comme les
© Raguet/Phanie
PLAIES ET CICATRISATION 21
Les soins
Quand l’équilibre est rompu
Toute plaie doit être évaluée de façon à adapter les soins Les infections
et le pansement. L’évaluation se fait à partir de la couleur Dès que la peau est lésée, les bacté-
ries pénètrent dans l’organisme.
de la plaie, de sa dimension, de sa profondeur, de sa Selon les possibilités de défense du
quantité d’exsudat. Par exemple, les plaies chroniques patient, elles peuvent avoir un pou-
étant rarement monochromes (rouges, jaunes ou noires), voir pathogène alors que, parallèle-
ment, se déclenche le processus de
leur traitement sera adapté à la couleur dominante. cicatrisation.
Tout d’abord, il existe un certain
M ais dès qu’une lésion cuta-
née, même minime, entraîne
une brèche dans les défenses antimi-
Les dérivés chlorés sont bactéricides
sur Gram (+) et Gram (–). Leur
action est rapide (moins d’une
consensus : pas d’antibiothérapie
locale. On traite par voie générale et,
parfois, uniquement lorsque la plaie
crobiennes de la peau, des bactéries minute), non bactéricide sur les provoque une bactériémie. L’analyse
pénètrent dans l’organisme... Pour mycobactéries, dont le BK à cette bactériologique d’une plaie est inutile,
soigner une lésion aiguë de la peau, il concentration, leur action sporicide on pratique plutôt des hémocultures
faut, en premier lieu, éliminer les discutée et leur action virucide pro- en cas de fièvre.
débris organiques (sang, nécrose) qui bable. Comme la chlorhexidine, ils Les plaies chroniques sont colonisées
constituent un milieu idéal pour la sont incompatibles avec les savons et par une flore bactérienne issue de la
flore cutanée, des flores commen-
prolifération des bactéries et retar- les matières organiques (pus, sang,
sales des cavités voisines, de l’envi-
dent la cicatrisation. Le rinçage se fait protéines), d’où la nécessité d’un rin-
ronnement hydro-aérien. Cette flore
au sérum physiologique. En présence çage soigneux. évolue au cours des différentes
de signes d’inflammation ou d’infec- Les ammoniums quaternaires, qui étapes du processus de cicatrisation.
tion, la plaie sera ensuite nettoyée sont des produits tensio-actifs catio- Au stade de la détersion, les Gram (+)
avec un antiseptique aqueux en res- niques, sont bactériostatiques sur commensaux de la peau saine dispa-
pectant le temps de contact spéci- Gram (+) et Gram (–), ont un raissent au profit de Gram (–).
fique de l’antiseptique choisi. spectre étroit, sont non sporicides, Au fur et à mesure de la détersion, on
fongistatiques et ont une activité viru- note une disparition progressive des
Les antiseptiques cide variable. Gram (–) et une réapparition des
L’utilisation d’un antiseptique en solu- Les carbanilides ont un spectre très Gram (+). Dès que ceux-ci devien-
>> DOSSIER
tion alcoolique (cytoxique) est à pros- étroit sur les bactéries Gram (+) et nent majoritaires, on peut considérer
crire sur une plaie. certains champignons comme trichlo- que l’on est en phase de cicatrisation ;
Les produits iodés ont une activité phyton. Ils ne doivent pas être utilisés la guérison ne sera totale que lorsque
bactéricide rapide sur Gram (+) et chez le nouveau-né, lors d’un accou- les Gram (–) auront complètement
Gram (–), sur les mycobactéries, une chement ou sur une muqueuse, et disparu et que la peau aura retrouvé
activité fongicide, mais aucune activité sont incompatibles avec les savons. sa flore à Gram (+).
sporicide, et une activité virucide discu- Les dérivés mercuriels en solutions
tée actuellement. Il ne faut pas les utili- aqueuse ou diluée et en solution Colonisation ou infection ?
ser chez l’enfant de moins de 30 mois, alcoolique sont bactériostatiques sur Comment faire la différence entre
chez les brûlés à plus de 30 %, chez Gram (+). De nombreux germes colonisation et infection d’une plaie
les insuffisants rénaux, en cas d’intolé- sont résistants à ce produit aujour- chronique ? La simple multiplication
rance à l’iode, et ils sont incompatibles d’hui (Pseudomonas, entérobacté- locale de bactéries ayant adhéré à la
avec les dérivés mercuriels. ries, staphylocoques). plaie est appelée colonisation par
La chlorhexidine est un bactéricide, Traitement d’appoint des affections opposition à l’infection définie comme
plus actif sur Gram (+) que sur cutanées infectées ou susceptibles une invasion plus profonde de la
Gram (–), inactif sur les mycobacté- de le devenir, ils ne doivent pas être plaie et des tissus sains, entraînant
ries, non sporicide, virucide sur le utilisés chez le prématuré, chez le une réponse immunitaire de l’hôte et
VIH, virus herpès, non virucide sur le nouveau-né, sur peau lésée, brûlée, des signes cliniques : douleur, rou-
virus de l’hépatite B, fongistatique. sur une muqueuse, avant prélève- geur, pus, fièvre, polynucléose.
Elle est incompatible avec les savons, ment ou injection et en cas d’hyper- En pratique, la différence entre colo-
il faut donc soigneusement rincer sensibilité aux dérivés mercuriels. Ils nisation et infection est difficile à faire,
entre le savonnage et l’application de présentent de nombreuses incom- car la colonisation est un état d’équi-
l’antiseptique. Tout flacon ouvert doit patibilités (matières organiques, libre entre le patient et sa flore micro-
être utilisé immédiatement et ne pas autres antiseptiques, dérivés chlorés, bienne. C’est la rupture de cet équi-
être conservé. dérivés iodés…). libre qui conduit à l’infection, dont les >>
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 52 • janvier-février 2004
Dossier 23/02/04 15:49 Page 22
22 DOSSIER
>> facteurs tiennent vraisemblablement Un autre procédé consiste à prélever sition. On considère que cet examen
plus à l’hôte qu’à la bactérie. Un fais- au moyen de dispositifs utilisés en est positif à partir de 105 bactéries/g
ceau de présomptions à la fois cli- hygiène pour le contrôle des sur- de tissu. Mais dans les plaies chro-
niques et biologiques peut aider, et le faces. Il s’agit d’une boîte de Petri de niques, souvent atones, la réaction à
résultat de l’analyse bactériologique conformation particulière, dont le polynucléaires n’existe pas toujours.
doit être interprété en fonction du fond est quadrillé afin de faciliter le La morphologie bactérienne et le
contexte clinique et de l’état du compte des colonies. Gram peuvent être difficiles à déter-
>> DOSSIER
patient, de l’examen microscopique, Le prélèvement biopsique sera effec- miner. Enfin, il existe des discor-
des espèces cultivées (cultures mono- tué au scalpel ou avec un trocart cali- dances dans les résultats quelquefois
microbienne ou plurimicrobienne). bré, après lavage de la plaie et rin- faussement positifs et inversement
çage à l’eau distillée. Ce type de [les Gram (–) étant plus difficiles à
Les prélèvements prélèvement permettrait de mettre repérer que les Gram (+)].
L’écouvillonnage est la technique la en évidence la flore bactérienne infil- ALP
plus simple, la moins coûteuse et la trée dans la profondeur des tissus.
plus ancienne. On peut utiliser égale- Cependant, outre le coût du trocart
ment une compresse de gaze, tou- calibré à usage unique, beaucoup de
jours de la même taille pour un cliniciens hésitent à “faire une plaie
même protocole. La compresse sera dans la plaie”.
humectée de sérum physiologique L’examen microscopique présente
stérile et déposée sur la plaie pen- l’avantage de visualiser la présence
dant un temps donné. Le résultat des de polynucléaires et fournit une
cultures bactériennes sera exprimé appréciation sur l’importance de la
en UFC/cm2. population bactérienne et sa compo-
© Burger/Phanie
Les pansements
De plus en plus actifs
Pour une bonne cicatrisation de la plaie, le pansement colloïdes contiennent en outre de la
doit permettre de conserver l’humidité, favoriser les pectine ou de la gélatine. La couche
externe est une mousse ou un film
échanges gazeux, procurer une isolation thermique et
de polyuréthane, semi-perméable. Ils
mécanique, être une barrière bactériologique, absorber sont adhésifs sur toute leur surface,
les exsudats. Les pansements sont indissociables du avec parfois un renforcement en
traitement. périphérie. La plupart d’entre eux
existent en plusieurs dimensions et
tionnels”, ont vu le jour ces dernières composée de carboxyméthylcellu- la peau autour de la plaie en cas de
années, notamment ceux dits “biolo- lose (CMC) sodique, noyée dans plaie très exsudative (sans réelles
giquement actifs”. une masse adhésive. Certains hydro- conséquences pour la cicatrisation).
PLAIES ET CICATRISATION 23
>> DOSSIER
15 fois leur poids) et ont des capa- escarres sacrées et sous forme de peu absorbants et nécessitent d’être
cités hémostatiques ainsi que des coussinet destiné aux plaies creuses. changés quotidiennement. Ils sont
propriétés bactériostatiques. Ils se Contrairement aux hydrocolloïdes, ils utiles, notamment dans les plaies
présentent sous plusieurs formes ne se délitent pas au contact de la postchirurgicales, les dermabrasions
(compresse non adhésive, mèches). plaie et ne dégagent pas d’odeur et les plaies de grande taille ou cir-
Les alginates ne se délitent pas désagréable. L’absence de délitement conférentielles. Ils ne contiennent pas
dans la plaie. Au contact des exsu- du pansement et la possibilité de de produit allergisant, contrairement
dats, l’alginate de calcium se trans- formes non adhésives diminuent le aux tulles médicamenteux.
forme en alginate de sodium gélifié risque d’altération de la peau autour
et le retrait du pansement n’est pas de la plaie. Les pansements siliconés
douloureux. Il s’agit d’un tricot de polyamide élas-
Les hydrogels tique enduit de silicone. C’est un
Les hydrofibres Les hydrogels nécessitent un panse- pansement inerte, souple, s’adaptant
Les hydrofibres, bien que de compo- ment secondaire, si possible peu à tous les contours anatomiques.
sition très différente, sont regroupés absorbant (plaque d’hydrocolloïde ou Son intérêt essentiel est de ne pas
dans la même classe que les algi- film de polyuréthane), et sont indi- coller à la plaie, permettant un retrait
nates en raison de leur importante qués en phase de détersion. Ils ont la non douloureux. Il adhère sans créer
capacité d’absorption et de leur aspect. capacité de relarguer l’eau qu’ils de lésions au niveau de la peau
Ils sont constitués d’une fibre de CMC contiennent dans la plaie, et sont autour des plaies. Ses indications
très absorbante (compresse ou mèche) donc particulièrement adaptés à la sont ciblées (dermabrasion, plaies
qui se transforme en gel cohésif au phase de détersion et de bourgeon- des épidermolyses bulleuses, brû-
contact de la plaie. Un pansement nement des plaies sèches ou peu lures, plaies chirurgicales, au stade de
secondaire est nécessaire, de préfé- exsudatives comme des plaies pré- bourgeonnement). Il nécessite un
rence un hydrocolloïde ou un film, sentant des croûtes ou des plaques pansement secondaire (compresses,
pour conserver l’humidité. de nécrose sèche. Il ne faut pas les bandes tissées). >>
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 52 • janvier-février 2004
Dossier 23/02/04 15:49 Page 24
24 DOSSIER
PLAIES ET CICATRISATION 25
Le patient diabétique
Une prise en charge globale
Les lésions du pied des diabétiques nécessitent souvent Aucun topique n’a fait la preuve de
des hospitalisations prolongées en milieu spécialisé. son efficacité.
La mise en décharge est indispen-
Elles mènent encore trop souvent à l’amputation. Il exis- sable à obtenir en cas de plaie plan-
te peu de centres spécialisés en France pour la prise en taire. Elle est assurée par le port de
charge de ces lésions. chaussures à appui partiel, soit talon-
nier (Barouk), soit antérieur (Sanital).
>> DOSSIER
complété au lit du malade par une si l’équilibre est parfait en présence lution clinique et les données des
étude des pressions avec un doppler de plaies superficielles, non infectées. antibiogrammes. Sa durée est déter-
de poche ou, mieux, par une véloci- Dans les autres cas, on doit avoir lar- minée par l’extension du sepsis, et
métrie doppler. L’infection est évi- gement recours à l’insulinothérapie, notamment l’atteinte osseuse, qui
dente dans les cas extrêmes de gan- même en cas de diabète de type 2. peut faire poursuivre ce traitement
grène gazeuse, phlegmon, cellulite de L’indication de cette insulinothérapie durant plusieurs mois.
l’arrière-pied, ou plus torpide et plus et de son mode requiert l’avis En ce qui concerne le pied chirurgical
profonde, à suspecter quand le son- diabétologique. ischémique, les possibilités d’une
dage au stylet révèle un pertuis, un revascularisation doivent être discu-
contact osseux, ou provoque un Le pied chirurgical tées avant tout geste d’exérèse.
écoulement purulent... Parfois, l’infec- non infecté L’atteinte du trépied jambier est fré-
tion est superficielle, notamment en Pour soigner une plaie non infectée quente, mais les artères sont souvent
cas de mycose. Le bilan de la neuro- et non ischémique (grade I de la clas- perméables au niveau de la cheville
pathie est effectué mais n’a aucune sification de Wagner) dans un pied et du pied, permettant la réalisation
incidence sur la décision thérapeu- chirurgical non infecté, les soins de pontages distaux. Les résultats de
tique immédiate. locaux doivent être réalisés par un ces procédures de revascularisation
Toute suspicion d’atteinte artérielle ou personnel infirmier entraîné. Ils sont sont actuellement comparables entre
d’infection profonde doit faire prati- largement dominés par le débride- diabétiques et non-diabétiques. Quand
quer des examens spécialisés : bilan ment de la plaie au bistouri (décor- aucun geste de revascularisation n’est
artériel, bilan infectieux, radiographies nage, pelage). Le pansement doit se possible, les différents traitements
des pieds face et profil (ostéite ou limiter à des antiseptiques et ne doit médicaux tels que les anticoagulants,
ostéo-arthropathie ?) et, dans certains pas être agressif pour les tissus, ni les vasoactifs même injectables, les
cas difficiles, le diagnostic d’ostéite masquer leur aspect (pas de colorant, prostacyclines (AMM pour la maladie
peut être aidé par la pratique d’une pas d’antibiotiques locaux, pas de de Buerger) ou l’hémodilution n’ont
IRM ou d’une scintigraphie aux leuco- sparadrap collé sur la peau...). pas une efficacité démontrée. >>
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 52 • janvier-février 2004
Dossier 23/02/04 15:49 Page 26
26 DOSSIER
>> L’hyperbarie a quelques indications, – s’enquérir du statut vaccinal du froid, éviter les produits qui colorent
mais elle est peu disponible. patient (tétanos), (éosine),
Ces traitements ne doivent en aucun – préférer une détersion “chimique” – en cas de fissure et de macération,
cas retarder l’heure de l’amputation adaptée si une composante artéri- appliquer des compresses de Mélolin
si cette dernière s’avère inéluctable. tique est présente, ou de Multidress pour sécher et favo-
Il faut, en effet, opérer les patients – en cas d’hyperappui, éviter les riser la fermeture des fissures (après
quand ils sont encore en bon état semelles avec un vide, préférer un désinfection) et procéder ensuite
>> DOSSIER
général. coussinet, comme précédemment.
Une amputation peut s’imposer – mettre les plaies plantaires en Il ne faut pas employer d’adhésif sur
devant des lésions évoluées et décharge (Barouk, Sanital, béquilles). la peau (risque de plaie à l’ablation)
putrides, une douleur difficile à maîtri- De même, pour les escarres talon- mais utiliser une bande et mettre une
ser, une aggravation rapide des nières, préconiser des dispositifs noc- compresse entre les orteils pour évi-
lésions ou de l’état général. turnes. Pour les plaies d’autres locali- ter la macération et protéger les
Une consultation auprès d’un méde- sations, supprimer les frottements, orteils des ongles sous le pansement.
cin podologue doit être programmée – inspecter soigneusement les chaus- Les pansements primaires sont
dès la cicatrisation obtenue permet- sures et donner des conseils d’achat, découpés à la taille exacte de la
tant un bilan des deux pieds pour – s’enquérir de la “technique” de la lésion.
adapter le chaussage (orthèses/ coupe des ongles, Il faut éviter de mécher (allergie avec
chaussures). Le suivi régulier des – nettoyer le pied avec du Dakin® ou l’alcool iodoformé, traumatisme du
patients en podologie est indispen- du Septéal® avant le soin, et ensuite bourgeon et mauvais drainage de la
sable pour vérifier la bonne adapta- laver la plaie avec du sérum physiolo- plaie).
tion des orthèses plantaires et gique. Éviter les antibiotiques locaux Éventuellement, si la plaie est très
chaussures orthopédiques prescrites (antibiothérapie par voie générale si profonde, la tapisser sans “bourrer”
et les faire modifier ou renouveler si infection locorégionale, signes géné- avec de l’Urgosorb®. Des pulvérisa-
nécessaire. raux ou ostéite), tions (plaies fibrineuses) avec de
– en cas de mycose sans fissure avec l’Hexomédine diluée de moitié avec
Pratique infirmière macération, utiliser une poudre type du sérum physiologique pourront
Devant une plaie du pied chez un Mycoster, veiller à la désinfection de être utilisées. Rincer avec du sérum
patient diabétique, outre le contrôle la chaussure, utiliser une serviette physiologique.
du suivi des traitements, le rôle infir- personnelle, effectuer le séchage
mier consiste à : avec un séchoir à cheveux position ALP
PLAIES ET CICATRISATION 27
Les brûlures
Quel degré d’urgence ? Quel soin ?
La grande brûlure constitue la deuxième cause d’acci- d’apprécier la profondeur de la lésion
dents mortels en France. Si le phénomène est limité pendant les 8/10 premiers jours, car
la nature des produits n’est pas tou-
>> DOSSIER
quant au nombre de personnes atteintes, il n’en est pas jours certaine, ceux-ci pouvant avoir
moins catastrophique sur le plan humain, et particulière- des effets toxiques systémiques.
ment lourd sur le plan de la prise en charge. Chaque
année, en France, se produisent 400 à 500 000 brûlures. Que faire devant une brûlure
thermique ?
Il faut refroidir immédiatement la brû-
28 DOSSIER
teur (penser à éliminer un pneumo- ✓ Si l’état n’est pas grave, on doit res-
affectant moins
de 10 % thorax par effet de blast). Elle pecter quelques règles comprenant :
de la surface recherche également des troubles de – une asepsie parfaite utilisant des
corporelle relèvent la conscience comme un collapsus : il gants, compresses, champs stériles ;
d’un traitement faut dans ce cas placer deux voies – une aspersion de la zone atteinte
ambulatoire. d’abord et passer une perfusion avec de l’eau ;
PUB
>
Dossier 23/02/04 15:49 Page 30
30 DOSSIER
© Burger-HIA Percy/Phanie
>> Des incisions de décharge et une toire, d’un encombrement bron-
antibiothérapie s’avèrent nécessaires chique, l’existence d’une défense à la
en cas de brûlure profonde, souillée, palpation abdominale. Dans le cadre
ou de fractures ouvertes. du bilan d’extension seront pratiqués :
– un ECG avec une recherche de l’al-
La brûlure longement du segment QT qui signe
due à un produit caustique une hypocalcémie, des troubles du
>> DOSSIER
Aux urgences, l’IAO (infirmière d’ac- rythme et de l’excitabilité , ✓ En cas d’œdème glottique, réani-
cueil et d’orientation), par son interro- – une saturation en O2, qui peut être mation respiratoire et intubation, si
gatoire, va rechercher, interroger le normale ou abaissée ; besoin ventilation assistée.
malade et son entourage et noter : – une formule sanguine, une glycémie. Si l’état du patient n’est pas inquié-
– le type de caustique, sa forme, sa L’état du patient peut être considéré tant, il suffit de pratiquer :
concentration ; comme grave si on note la présence – un nettoyage de la bouche par
– l’heure d’ingestion, la quantité de signes abdominaux mais aussi, essuyage ;
absorbée ; lorsque l’ingestion de produits a été – un lavage oculaire à l’eau ;
– l’état du patient, ses antécédents massive, qu’un long délai s’est écoulé – la pose d’une voie d’abord vei-
médicaux. depuis l’accident. En ce cas, quelle neuse avec un remplissage.
Tous ces éléments réunis, elle attitude adopter ? ✓ Attention ! En cas d’absorption de
recherche les stigmates de l’atteinte ✓ En cas de dysphonie avec signe caustique :
caustique, telles une brûlure locale au d’atteinte laryngée : traitement au – ne pas faire vomir,
niveau de la bouche et des lèvres, Solumédrol. – ne pas donner de “supposé anti-
voire du cou ou du thorax par coulée ✓ En cas de collapsus : pose de deux dote”,
caustique, ou une lésion oculaire. Elle voies veineuses et remplissage par col- – ne pas mettre de sonde gastrique,
apprécie de même la présence d’un loïde (pas de cathéter jugulaire au cas – ne pas faire de lavage gastrique.
état de choc, d’une détresse respira- où une intervention serait nécessaire). Jacques Bidart
Les escarres
Ce n’est pas une fatalité
L’escarre est souvent évitable. Elle se doit d’être prévenue gique lorsqu’une pathologie neurolo-
au mieux, sinon combattue, afin d’éviter les nombreuses gique sous-jacente existe, ou multi-
factorielle, lorsque plusieurs facteurs
complications au minimum handicapantes, douloureuses, s’imbriquent. Mieux comprendre les
voire présentant un risque létal. Il convient pour ce faire de phénomènes de déclenchement de
Focus ... bien connaître ses caractéristiques ainsi que les facteurs
de risque de son déclenchement.
la plaie cutanée permet d’en prévenir
l’apparition et d’en apprécier les fac-
Selon les teurs de risque de déclenchement.
recommandations
de l’ANAES :
“L’acte chirurgical
S elon la définition retenue de
l’escarre, la prévalence de l’af-
fection tourne autour de 8 % de la
superficielle, ou d’une phlyctène. Au
stade suivant (IV), le décollement
périphérique s’accompagne d’une
Physiopathologie
Se produisant préférentiellement à un
doit être encadré
d’une préparation population française hospitalisée, perte de substance comprenant le point de pression du corps, l’escarre
médicale et de soins avec une nette augmentation en cas tissu sous-cutané. Au dernier stade est due à plusieurs mécanismes.
postopératoires de maladie neurologique sous- (V), la perte touche les os, les articu- Le premier est la simple pression qui,
particulièrement jacente. À son stade initial, il s’agit lations, les muscles ou les tendons. À en interrompant la microcirculation,
rigoureux. Ces soins d’un simple érythème qui blanchit à chaque stade, doivent être précisées cause l’escarre. La deuxième cause
portent sur la la pression et disparaît spontanément la situation, l’étendue des lésions, est le cisaillement. Lorsque le corps
surveillance de l’état sans séquelle au bout de 24 heures. leur profondeur, les caractéristiques glisse vers le bas, il provoque un glis-
cutané local, l’aspect Au stade II, la rougeur ne disparaît de la nécrose sèche ou humide, la sement des couches cutanées les
de la plaie et des
plus à la levée de la pression, on note nature des tissus et l’existence de unes sur les autres. Ce phénomène
sutures, une mise
un œdème, une induration localisés. signes infectieux locaux. est aggravé par l’humidité (inconti-
en décharge
en utilisant Au stade III, est notée une perte de Au terme de ce bilan effectué nence urinaire, transpiration exces-
un support, substance touchant essentiellement conjointement par l’infirmière et le sive), mais aussi par la housse du
un équilibre l’épiderme et légèrement le derme, médecin, l’escarre est classée en acci- matelas ou le port de vêtements trop
nutritionnel et l’aspect réalisé étant celui d’une dentelle, consécutive à un épisode de serrés. Le second mécanisme à éviter
hydro-électrolytique.” simple érosion, d’une ulcération mobilité réduite réversible, neurolo- est le frottement tel que celui provo-
PLAIES ET CICATRISATION 31
qué par la mobilisation pour les soins 3. Légèrement diminué : répond position du corps ou de ses extrémi-
(surtout dans les régions des coudes, aux commandes verbales, mais ne tés sans aide.
du sacrum, des talons). Il provoque peut pas toujours communiquer son 2. Très limité : effectue occasionnel-
une abrasion épidermo-dermique. inconfort ou son besoin d’être tourné lement de légers changements de
Enfin, l’étirement est responsable de OU a une sensibilité diminuée qui position du corps et de ses extrémi-
fissures, par exemple au niveau du pli limite sa capacité à sentir la douleur tés, mais est incapable d’effectuer de
interfessier. ou l’inconfort à l’un des deux manière autonome de fréquents et
Tous ces phénomènes mécaniques membres inférieurs ou aux deux. importants changements de position.
sont aggravés par l’existence de fac- 4. Aucune diminution : répond aux 3. Légèrement limité : effectue seul
teurs de risque locaux ou généraux. commandes verbales. N’a aucun défi- de fréquents petits changements de
L’immobilisation prolongée est un fac- cit sensoriel qui limite sa capacité à position du corps et de ses extrémités.
teur de risque important. Autre fac- sentir et à exprimer sa douleur et son 4. Aucune limitation : effectue des
teur, la dénutrition, fréquente chez la inconfort. changements de position majeurs et
personne âgée, doit être systémati- ✓ Humidité fréquents sans aide.
quement dépistée, ne serait-ce que Le degré d’humidité auquel est expo- ✓ Nutrition
par le dosage de l’albuminémie, alors sée la peau est ainsi calculé. Quelles sont les habitudes alimen-
bas. Elle entraîne une déshydratation, 1. Constamment mouillé : la peau taires ?
une cachexie et donc une souffrance est presque continuellement en 1. Très pauvres : ne mange jamais un
tissulaire vulnérabilisant les zones contact avec la transpiration, l’urine, repas complet. Mange rarement plus
exposées. L’humidité, par exemple, etc. L’humidité de la peau est obser- du tiers des aliments proposés.
celle résultant d’une incontinence, vée à chaque fois que le patient est Mange deux rations de protéines, ou
par la macération qu’elle provoque, tourné ou mobilisé. moins, par jour (viande ou produits
favorise également la lésion de la 2. Humide : la peau est souvent mais laitiers). Boit peu. Ne prend pas de
peau qui, en vieillissant, devient plus pas toujours humide. La literie doit suppléments alimentaires liquides
vulnérable. La vulnérabilité est d’au- être changée au moins une fois par OU est à jeun et/ou est hydraté par
tant plus aggravée par l’existence équipe. voie orale ou intraveineuse depuis
sous-jacente d’une affection neurolo- 3. Humidité occasionnelle : la peau plus de cinq jours.
gique. En effet, une para- ou une est occasionnellement humide, un 2. Probablement inadéquates : mange
tétraplégie diminue, ou fait dispa- changement de la literie est néces- rarement un repas complet et mange
raître, toute sensibilité cutanée, tout saire environ une fois par jour. en général seulement la moitié des
sens de la douleur, toute capacité à 4. Rarement humide : la peau est aliments proposés. Prend seulement
réagir. Le patient, ne sentant pas ou généralement sèche ; la literie est trois rations de viande ou de produits
peu, ne souffrant pas, ne signale pas changée selon les habitudes de laitiers par jour. Peut prendre occa-
>> DOSSIER
de symptômes annonciateurs de l’équipe. sionnellement un supplément diété-
lésions. ✓ Activité tique OU reçoit moins que la quantité
C’est le calcul du degré d’activité optimale requise par un régime
Instrument de mesure physique. liquide ou par sonde.
du risque 1. Alité : confiné au lit. 3. Adéquates : mange plus de la
L’instrument de mesure du risque 2. Au fauteuil : capacité à marcher moitié des repas.
d’escarre de Braden est traduit de très limitée ou inexistante. Ne peut Mange quatre rations de protéines
l’anglais par l’ANAES. supporter son propre poids et/ou doit (viande, produits laitiers) par jour.
✓ Perception sensorielle être aidé au fauteuil ou fauteuil rou- Refuse occasionnellement un repas,
C’est la capacité à répondre de lant. mais prend généralement un supplé-
manière adaptée à l’inconfort provo- 3. Marche occasionnellement : mar- ment alimentaire s’il est proposé OU
qué par la pression. che occasionnellement durant la jour- est alimenté par sonde ou nutrition
1. Complètement limité : aucune née mais sur de petites distances, parentérale, adaptée à la plupart de
réaction (plainte, action) à la dou- avec ou sans aide. Passe la grande ses besoins nutritionnels.
leur, due à une diminution de la majorité du temps au lit ou au fauteuil. 4. Excellentes : mange presque la
conscience ou aux effets de sédatifs 4. Marche fréquemment : marche totalité de chaque repas. Ne refuse
OU incapacité à sentir la douleur sur en dehors de sa chambre au moins jamais un repas. Prend habituelle-
presque toute la surface du corps. deux fois par jour et dans sa chambre ment au moins quatre rations de
2. Très limité : répond seulement à au moins une fois toutes les viande ou de produits laitiers par jour.
la douleur. Ne peut communiquer deux heures durant la journée. Mange occasionnellement entre les
son inconfort que par des plaintes ou ✓ Mobilité repas. Ne requiert aucun supplément
de l’agitation OU une altération de la C’est la capacité à changer et à alimentaire.
sensibilité qui limite la capacité à sen- contrôler la position du corps. ✓ Friction et cisaillement
tir la douleur ou l’inconfort sur la moi- 1. Complètement immobile : ne peut 1. Problème : requiert une assis-
tié du corps. effectuer le moindre changement de tance modérée à complète pour se >>
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 52 • janvier-février 2004
Dossier 23/02/04 15:49 Page 32
32 DOSSIER
>> mobiliser. Se relever complètement luation du risque n’est pas bien éta-
dans le lit sans glisser sur les draps blie, il est néanmoins recommandé
est impossible. Glisse fréquemment de procéder à une nouvelle évalua-
dans le lit ou le fauteuil, nécessite de tion à chaque changement d’état du
fréquents repositionnements avec un patient.
maximum d’aide. Spasticité, contrac- Les soignants doivent être entraînés à
© Raguet/Phanie
tures ou agitation provoquent la reconnaissance des facteurs de
>> DOSSIER
presque constamment des frictions. risque et formés à l’utilisation d’une
2. Problème potentiel : se mobilise échelle d’identification du risque.
difficilement ou requiert un minimum ✓ Diminuer la pression en évitant les
d’aide pour le faire. Durant le trans- appuis prolongés par la mobilisation, permanent du risque d’escarre (auto-
fert, la peau glisse contre les draps, la la mise au fauteuil, la verticalisation et surveillance, autosoulèvement). Une
chaise, les contentions ou autres la reprise de la marche précoces. Des transcription des facteurs de risque,
appareillages. Garde la plupart du changements de position doivent des mesures de prévention mises en
temps une relative bonne position au être planifiés toutes les 2 à 3 heures, œuvre et de l’observation de l’état
fauteuil ou au lit, mais glisse occa- voire à une fréquence plus élevée, et cutané dans le dossier du patient est
sionnellement vers le bas. les phénomènes de cisaillement et utile à la continuité des soins. Une
3. Aucun problème apparent : se de frottement doivent être évités par démarche d’amélioration de la qua-
mobilise seul au lit et au fauteuil et a une installation et une manutention lité est nécessaire à l’appropriation
suffisamment de force musculaire adéquates du patient. Le décubitus des mesures de prévention, quel que
pour se soulever complètement durant latéral oblique à 30 ° par rapport au soit leur lieu de mise en œuvre.”
le transfert. Garde en tout temps une plan du lit est à privilégier car il réduit
bonne position au lit et au fauteuil. le risque d’escarre trochantérienne. Au stade thérapeutique
✓ Score total ✓ Utiliser des supports (matelas, sur- Un important distinguo thérapeutique
Un score total de 23 points est pos- matelas, coussins de siège) adaptés au est à faire. Il convient, en effet, de dis-
sible. Plus le score est bas (15 points patient et à son environnement y com- tinguer la surinfection à combattre de
ou moins), plus l’individu a de ris- pris sur les tables de blocs opératoires, la colonisation bactérienne à respec-
ques de développer une escarre. les lits de salles de surveillance postin- ter. Quasi constante dans les plaies
L’évaluation du patient étant établie et terventionnelle et en postopératoire. chroniques, cette dernière est fonciè-
le bilan de risque défini, il convient ✓ Observer de manière régulière rement utile à la cicatrisation et doit
d’adopter une stratégie préventive l’état cutané et les zones à risque (au être favorisée par un nettoyage et
pour le personnel soignant. moins quotidiennement, à chaque une détersion soigneux des tissus
changement de position et lors des nécrotiques. En revanche, l’infection
Les mesures générales soins d’hygiène) afin de détecter pré- d’escarre se caractérise par la pré-
de prévention cocement une altération cutanée. sence de deux au moins des symp-
D’après les recommandations de L’observation cutanée doit être asso- tômes suivants : rougeur, douleur ou
l’ANAES : “La mise en place des ciée à une palpation de la peau à la œdème des bords de la plaie.
mesures générales de prévention recherche d’une induration ou d’une La confirmation est apportée par l’iso-
commence dès l’identification des chaleur, en particulier pour les peaux lement du germe à la culture du
facteurs de risque. Elle s’applique à pigmentées. liquide obtenu par aspiration ou biop-
tout patient dont l’état cutané est ✓ Maintenir l’hygiène de la peau et évi- sie du bord de la plaie. L’intérêt des
intact mais estimé à risque, et vise à ter la macération par une toilette quoti- antibiotiques ou des antiseptiques
éviter la survenue de nouvelles dienne et renouvelée si nécessaire. Le locaux en l’absence de diagnostic
escarres chez les patients déjà por- massage et la friction des zones à d’infection d’escarre n’a pas été
teurs d’escarre. Elle concerne l’en- risque sont à proscrire puisqu’ils dimi- démontré.
semble des professionnels de santé nuent le débit microcirculatoire moyen. Le traitement chirurgical est néces-
en contact avec le patient. Les massages, frictions, applications de saire en cas de nécrose tissulaire
Focus ... Les mesures de prévention sont les
suivantes :
glaçons et d’air chaud sont interdits.
✓ Assurer un équilibre nutritionnel en
importante, d’atteinte marquée, d’in-
fection nécessitant une mise à plat de
Pour mieux établir le ✓ Identifier les facteurs de risque au évaluant quantitativement les prises vaisseaux, de tendons, d’os, d’articu-
bilan de la situation moyen du jugement clinique associé alimentaires. L’utilité d’une prise en lations. Il est contre-indiqué chez le
du patient, l’équipe
à l’utilisation d’une échelle validée charge nutritionnelle spécifique a été sujet âgé porteur d’escarres plurifac-
soignante peut
d’identification des facteurs de risque. insuffisamment évaluée. torielles, ainsi qu’en l’absence de
s’aider d’échelles
d’évaluation. Mais L’élaboration d’une stratégie de pré- ✓ Favoriser la participation du patient mise en place ou d’efficacité des
un examen attentif vention adaptée à chaque patient et de son entourage à la prévention mesures de prévention des récidives.
journalier de tout le découle de l’évaluation du risque, des escarres par une information et JB
corps est le premier réalisée dès le premier contact avec des actions éducatives ciblées en (Selon les conférences de consensus
soin de l’escarre. le patient. Si la fréquence de rééva- fonction du caractère temporaire ou de l’ANAES 1998/2001)
PLAIES ET CICATRISATION 33
© Phanie
ralement situé au niveau des deux tique ou de bas de contention et,
malléoles (saillies osseuses de d’autre part, éliminer les facteurs favori-
chaque côté de la cheville). Ce sont sants (équilibre d’un diabète, suppres-
des ulcères relativement douloureux, sion de l’alcool et du tabac, diminution Le débridement de la plaie peut faire
associant des problèmes cutanés et de l’apport de graisses alimentaires). appel à une détersion mécanique, auto-
s’accompagnant de suintement, géné- Le débridement et le nettoyage sont lytique, enzymatique ou chirurgicale.
ralement secondaire à une infection des actes particulièrement importants ✓ Le débridement mécanique fait
localisée. L’ulcère artériel, lui, est plus dans le soin des ulcères de jambe. Le appel, entre autres, à l’application de
petit que l’ulcère veineux, et classi- type, la quantité et le siège des tissus pansements humidifiants ou secs, à
quement beaucoup plus doulou- nécrotiques, ainsi que la profondeur l’hydrothérapie (l’irrigation au sérum
reux. Les ulcères mixtes associent les de la lésion ulcéreuse, l’abondance de physiologique).
deux variétés d’ulcères précédents. l’exsudat, l’état général du patient ✓ La détersion autolytique peut être
>> DOSSIER
déterminent les modalités de débri- favorisée et renforcée par le maintien
Traitement de la plaie dement. Il convient de distinguer d’un microclimat humide au moyen
Quel que soit l’ulcère, le traitement l’ablation des éléments superficiels, de pansements occlusifs.
passe par plusieurs étapes. Après c’est-à-dire des tissus épidermiques ✓ Le débridement enzymatique repose
le nettoyage de la plaie, la deuxième ou dermiques, de celle qui intéresse sur l’application d’enzymes protéoly-
étape consiste à faire proliférer les cel- les tissus nécrotiques sous-cutanés tiques au niveau de la plaie.
lules (bourgeonnement). La troisième situés en profondeur. En effet, la pro- Ces méthodes peuvent être utilisées
étape, l’épidermisation, dure parfois cédure à appliquer est différente et il en vue d’un débridement superficiel
plusieurs mois. Quand la cicatrisation en est de même de l’évaluation des car l’ablation des tissus nécrotiques
a du mal à se faire, il est parfois néces- résultats. situés en profondeur nécessite, elle,
une intervention chirurgicale.
Le débridement des lésions ulcé-
Traitement ambulatoire de l’ulcère de jambe reuses est nécessaire car il diminue le
risque d’apparition d’une surinfection.
Traitement local Traitement systémique
Cependant, le débridement manuel
– Débridement, – Intervention relationnelle, des tissus nécrotiques, ainsi que des
– Nettoyage de la plaie, – En cas de thrombophilie : dépôts fibrineux particulièrement
– Contrôle bactériologique, traitement anticoagulant, adhérents, peut être extrêmement
– Cicatrisation en milieu humide, – En cas d’artériopathie oblitérante : désagréable et douloureux pour le
– Pansements biologiques, minimisation des facteurs de patient, notamment lorsqu’il existe
– Contention veineuse, risque, une composante étiologique arté-
– Rééducation à visée vasculaire – Correction des troubles rielle. Néanmoins, cette technique
par des exercices adaptés. nutritionnels, présente les avantages d’un résultat
– Traitement antalgique. immédiat et d’une stimulation des
mécanismes de cicatrisation. >>
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 52 • janvier-février 2004
Dossier 23/02/04 15:49 Page 34
34 DOSSIER