LA STRATÉGIE DES COMBATS CLÉS

Focaliser l'énergie de l'organisation sur quelques

objectifs cruciaux

Avec un deuxième regard, issu de "The World Café", de Juanita Brown,

chercheur affiliée à Sloan School, MIT.

nos sources
Synthèse des idées publiées
par les meilleurs experts, en
particulier dans les publications
citées ci-dessous et dans les
encadrés "en savoir plus" :
idées clés
Quel dirigeant, quel responsable d'équipe, ne s'est jamais senti désorienté
face à l'ampleur des changements qu'il souhaitait mettre en œuvre ? La
réaction naturelle est alors d'élaborer un plan d'action recensant, organisant
et cadençant toutes les actions nécessaires à la bonne exécution de ces
changements.

Erreur, soulignent les auteurs de Must-win Battles. Très souvent, c'est en

se limitant à un petit nombre d'objectifs clés et en acceptant de renoncer
à d'autres objectifs pourtant perçus comme essentiels que l'on parvient à
impulser des changements significatifs.

Cette stratégie requiert néanmoins de porter une attention particulière à

la sélection des combats clés :
- Choisissez des combats susceptibles de mobiliser l'ensemble de
l'organisation.
- Faites l'effort d'obtenir un consensus sur le choix de ces combats clés.
- Préparez dès la sélection des combats clés les conditions qui
permettront de les déployer rapidement.
MUST-WIN BATTLES
Peter Killing, Thomas Malnight,
avec Tracey Keys, éd. Wharton School
Publishing, 2006, 288 pages.

Cette synthèse a été rédigée à partir

d’une analyse critique de publications
soigneusement sélectionnées. Il s’agit
d’une œuvre originale, et non d’un simple
condensé de ces publications. Elle ne peut
donc se substituer à la lecture de celles-ci.

La stratégie des combats clés m • N° 162a 3

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 analyse
1 Le risque
de dilution
des efforts
L'excès de priorités conduit
souvent à n'avancer sur
aucune.
Pour mener à bien ses ambitions,
la démarche naturelle consiste à
dresser la liste de tous ses objectifs,
à les hiérarchiser, puis à définir des
plans d'action pour organiser la fa-
çon de les atteindre. Une approche
qui semble fondée, en toute logique.
Et pourtant, elle se heurte à bien des
difficultés… "Nous avions trop de
priorités", affirme ce senior manager
cité dans Must-win Battles. "Tout était
important. Tout le monde était dé-
bordé et prêt à partir dans toutes les
directions. Cela nous est finalement
retombé dessus. Trop de priorités
revient à n'avoir aucune priorité".
De fait, beaucoup d'entreprises
qui sont parvenues à réaliser des
projets ambitieux, comme des chan-
gements de cap radicaux dans leur
stratégie ou leur organisation, des
redressements spectaculaires ou des
restructurations complexes, ont fait
un choix particulier : elles ont dé-
cidé de se focaliser sur un très petit
nombre d'objectifs clés.
La relance d'Unilever en Afrique
en est une illustration exemplaire.
Unilever avait un fort historique de
succès dans cette partie du monde,
mais le risque concurrentiel s'ac-
croissait. Pour insuffler une nouvelle
énergie à leurs équipes, ses dirigeants
ont défini cinq "combats clés", qui
ont mobilisé et canalisé les énergies
des équipes sur tout le continent : as-
surer une présence de la marque par-
tout en Afrique, atteindre en Afrique
de l'Ouest les volumes obtenus en
Afrique du Sud, ne recruter que les
meilleurs, etc. Véritable révolution
pour certains managers de pays, ha-
bitués à se focaliser sur la performan-
ce dans leur territoire, cette stratégie
a créé un regain de dynamisme et de
coopération entre pays qui n'aurait
probablement pas émergé sans une
feuille de route aussi ciblée.
Le choix de se limiter à 3 ou 5
"batailles" peut paraître paradoxal,
4 m • N° 162a
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car il implique de mettre de côté
d'autres objectifs qui peuvent être
légitimement jugés comme tout
aussi importants. Mais l'expérience
montre que cela présente de nom-
breux avantages :
• Garder à l'esprit les priorités
réellement importantes.
Fréquents sont les comités de pi-
lotage ou de direction qui comp-
tent des dizaines de projets dans leur
ordre du jour, survolant chacun. Et
nombreux sont les managers qui,
tentant de tout amorcer, se laissent
submerger par le nombre de tâches
et s'exposent ainsi à l'essoufflement.
Ou qui constatent chaque fin de
mois que, bien que certains projets
stratégiques leur tiennent à cœur, ils
ne les ont aucunement avancés, car
les tâches opérationnelles "urgentes"
ont empiété sur le temps qu'ils comp-
taient leur allouer. Au contraire, fo-
caliser l'attention de l'équipe sur un
petit nombre de projets maximise les
chances que chacun avance.
• Eviter la dilution des
ressources.
Quelle part de l'énergie des diri-
geants est-elle consacrée à négocier
les ressources indispensables pour
faire avancer leurs projets, et à réa-
liser de difficiles arbitrages ? Com-
bien de projets échouent faute de
moyens, qu'ils soient financiers, hu-
mains, ou de disponibilité du top
management ? Restreindre le nom-
bre de ses ambitions assure d'allouer
l'énergie requise à celles qui sont
retenues.
• Recréer un esprit
entrepreneurial.
Une entreprise en création béné-
ficie généralement d'une atmosphè-
re de bouillonnement, d'émulation :
tout le monde se serre les coudes
autour d'objectifs communs, claire-
ment définis. Mais lorsque l'entre-
prise grandit, se diversifie, s'étend
géographiquement, il est très dif-
ficile de maintenir cet élan. Foca-
liser l'attention sur quelques com-
bats clés, sous réserve qu'ils soient
perçus comme motivants, est une
façon efficace de recréer l'état d'es-
prit des débuts. C'est ce qu'a connu
Microsoft en lançant le mot d'or-
dre "battre Netscape". Alors que le
succès incontestable de l'entreprise
sur le marché du logiciel aurait pu
l'inciter à se reposer sur ses lauriers,
ce cheval de bataille, à fort pouvoir
émotionnel, a très fortement mobi-
lisé les collaborateurs et apporté un
renouveau d'énergie.
Définir un petit nombre de ba-
tailles pour focaliser les efforts et
mobiliser les énergies est souhai-
table dès lors que l'on a besoin de
provoquer le mouvement dans son
organisation. Mais le succès de cette
approche dépend non seulement de
la pertinence des combats retenus,
mais aussi du processus qui a été
suivi pour les sélectionner.
2 Les caracté-
ristiques d'un
bon "combat clé"
Les combats retenus
doivent déclencher une
motivation profonde
et durable de tous les
collaborateurs.
Pour qu'une stratégie des com-
bats clés soit efficace, il faut que les
combats retenus suscitent une mo-
bilisation de toute l'organisation.
Ils doivent donc à la fois provoquer
l'enthousiasme, pouvoir se traduire
rapidement en résultats tangibles
pour entretenir l'élan sur la durée,
et impliquer chacun pour éviter de
laisser certains collaborateurs sur le
bas-côté (figure A).
- Susciter
l'enthousiasme
L'objectif d'une stratégie des
combats clés est de mettre les colla-
borateurs en mouvement. Pour cela,
chacun doit ressentir que le jeu en
vaut la chandelle. Cela requiert que
les combats retenus possèdent plu-
sieurs qualités :
• Avoir un réel impact.
Pour être prêts à se dépasser, les
collaborateurs doivent savoir que
leurs efforts feront une vraie dif-
férence au regard des objectifs de
La stratégie des combats clés
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l'entreprise ou de leur unité. C'est
pourquoi les combats choisis doi-
vent être ambitieux. Unilever Afri-
que a ainsi réussi à susciter un regain
d'énergie dans ses équipes en défi-
nissant sa mission comme "Toucher
la vie de tous les Africains, en antici-
pant et en répondant à leurs besoins
en matière d'hygiène, de soins et
de nutrition chaque jour, partout".
Dans ce contexte, chacun des cinq
combats clés sélectionnés corres-
pondait à une ambition claire et co-
hérente : être présent dans chacune
des régions d'Afrique, répondre à
tous les besoins quotidiens dans ces
domaines, etc.
• Séduire intellectuellement
mais aussi émotionnellement.
Des objectifs exclusivement ra-
tionnels ou financiers – devenir EBI-
TDA positif, par exemple – suffisent
rarement à générer un enthousiasme
sincère et durable. Au contraire, une
"vision" qui sait toucher les cœurs
peut avoir un impact bien plus pro-
fond. Le patron de Nestlé en Chine
a joué sur ce levier en 1998. Nestlé
était en difficulté, accumulant les
stocks de lait en poudre et concen-
tré. Pour redresser la situation, Joe
Muller a lancé un mot d'ordre : "sau-
vez les vaches". En effet, si sa société
réduisait ses achats de lait auprès
des fermiers, de nombreuses bêtes
étaient destinées à être abattues. Ce
mot d'ordre à fort pouvoir émotion-
nel a largement contribué à mobi-
liser toute son organisation, qui a
trouvé de nouveaux débouchés pour
ses produits laitiers sur le marché
chinois et redressé sa performance
en 18 mois. Créer un sentiment d'ur-
gence est aussi très efficace, comme
le soulignait John Kotter dans son
ouvrage de référence Leading Change :
l'impression qu'un changement
rapide est vital remet en cause le
sentiment de sécurité, qui favorise
la passivité. Carlos Ghosn a su en
tirer parti lors du redressement de
Nissan.
• Etre tournés vers l'externe
plutôt que l'interne.
Plus les batailles choisies seront
focalisées sur le marché, plus elles
ont de chances d'être efficaces. A
défaut, le risque est grand de voir ces
combats se transformer en querel-
les intestines, certes mobilisatrices
d'énergies, mais au détriment de la
La stratégie des combats clés
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A
Les caractéristiques d'un bon combat clé
Impact
Gagner le combat clé doit faire une
vraie différence au regard des objectifs
fondamentaux de l’entreprise
Précision
La crédibilité des combats clés repose sur
des objectifs tangibles qui peuvent être
"traduits" en mesures concrètes
Transversalité
Les combats clés doivent concerner
l'ensemble de l'organisation, en
traversant ses frontières internes
performance. Plus une organisation
est tournée vers l'extérieur, plus elle a
tendance à faire preuve de cohésion.
Le mot d'ordre "battre Netscape"
de Microsoft a été particulièrement
mobilisateur pour cette raison.
- Etre susceptible
de se traduire
rapidement en
résultats concrets
Un risque courant lorsqu'on
mobilise des équipes sur un nouvel
objectif, aussi enthousiasmant soit-
il, est de voir progressivement la
motivation s'essouffler : embûches
rencontrées dans la mise en œuvre,
saturation face au travail qui vient
s'ajouter aux tâches opérationnelles
courantes, etc. C'est pourquoi il est
indispensable que les combats clés
soient choisis pour leur potentiel à
démontrer rapidement des résultats,
qui joueront un rôle critique dans
l'entretien de la motivation.
Il en découle d'autres critères im-
portants pour définir un bon combat
clé :
• Pouvoir être gagné.
Des objectifs séduisants mais trop
ambitieux ont comme effet pervers
de susciter un enthousiasme dispro-
portionné dans les débuts, qui s'ef-
fondre brusquement lorsqu'on prend
conscience qu'ils ne sont pas réalis-
tes. C'est ce qui est arrivé à Xerox
en 1999 lorsque son PDG Richard
Thoman a souhaité redéployer son
activité de la vente de produits vers
Emotion
Un combat clé ne pourra être porté par
un effort soutenu que si l’émotionnel de
chacun est autant impliqué que l’intellect
Réalisation sous trois ans
Au-delà de cette durée, les motivations
s’effondrent
Fédération
Chaque collaborateur doit sentir que ses
actions contribuent à l'atteinte de ces
combats clés
la prestation de services. Pertinent
dans l'absolu, ce projet nécessitait
une restructuration complète à la fois
de l'organisation administrative et
des équipes de vente. Les chantiers
ont été lancés tambour battant mais,
quelque mois plus tard, la désorga-
nisation engendrée par ces projets
était telle que la restructuration a dû
être abandonnée. La démesure de
l'ambition au regard du contexte de
Xerox s'est avérée rédhibitoire.
• Aboutir à brève échéance.
Des projets dont la mise en œu-
vre excéderait trois ans présentent le
danger de voir la motivation s'effri-
ter. En effet, si les changements in-
duits par ces projets n'ont de chances
de se manifester que tardivement, ils
risquent de paraître "irréels" pour les
collaborateurs. A fortiori si ceux-ci
ont une évolution de carrière telle
qu'ils auront probablement changé
de poste d'ici là ! C'est la raison pour
laquelle tous les projets initiés par
Carlos Ghosn lors du redressement
de Nissan tenaient dans un horizon
de trois ans.
• Etre précis et concret.
"Nous avions des soi-disant prio-
rités comme innover plus", se sou-
vient un dirigeant cité dans Must-
win Battles, "ce qui ne veut presque
rien dire […]". De fait, de tels mots
d'ordre restent vagues, tant qu'ils
ne sont pas clairement traduits en
mesures concrètes. Mieux vaut par
exemple choisir comme combat clé
"sortir 8 nouveaux produits en un
an" : les collaborateurs sauront bien
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 en savoir plus
MUSTWIN BATTLES
Peter Killing, Thomas
Malnight, Tracey
Keys, Wharton School
Publishing, 2006.
Co-écrit par trois professeurs de management
stratégique à l’IMD, cet ouvrage s'adresse aux
dirigeants et managers qui souhaitent donner de l’élan
à leur entreprise ou à leurs projets, en y insufflant
un état d'esprit entrepreneurial. Il constitue aussi un
excellent support pour les consultants qui souhaitent
animer des séminaires destinés à donner une nouvelle
impulsion à l’entreprise cliente. Must-win Battles a
la particularité d’être à la fois un ouvrage qui force
à prendre du recul sur la situation présente, mais
qui, loin de rester dans le théorique, apporte de
très nombreuses techniques de mise en œuvre, de
"comment faire", sous forme d’exemples ou d’exercices
à reproduire avec les membres de l’équipe concernée.
L’idée principale de l’ouvrage réside dans la nécessité de
s’accorder autour de quelques combats clés – de l'ordre
de 4 à 5 – cruciaux pour l’entreprise ou le projet, et de
canaliser l’énergie du groupe autour de ces batailles.
Les auteurs, au travers d'un exemple mis en scène,
proposent de façon claire, didactique et concrète une
méthodologie pour s’accorder autour de ces thèmes,
et pour "gagner" ces combats – autrement dit pour
mettre en œuvre les changements stratégiques
cruciaux. Les conseils des auteurs ont d’autant plus de
poids qu’ils ont eux-mêmes organisé de tels processus
pour des grosses ou moyennes entreprises.
- Si vous avez besoin d'être convaincu – ou de
convaincre – de la vertu de se concentrer sur quelques
combats clés, vous trouverez quelques arguments
pertinents et structurés en introduction, au début
du chapitre 1 ainsi que dans le chapitre 3 qui dresse
les conditions de succès d'une telle approche. Mais
les bénéfices de ce choix stratégique transparaissent
surtout en filigrane tout au long de l'ouvrage, en
particulier dans les cas d'application présentés.
- Les auteurs proposent une démarche, appelée
"must-win battle journey", dont vous pourrez vous
inspirer, que vous ayez besoin de redynamiser une
entreprise tout entière ou simplement votre équipe.
Vous en trouverez un résumé au chapitre 1, chacune
des étapes de ce "voyage" faisant ensuite l'objet d'un
chapitre dédié.
- L'organisation du séminaire au cours duquel se fera
le choix des combats clés est particulièrement détaillée.
Le chapitre 2 souligne la nécessité de le préparer avec
soin. Mais nous vous recommandons surtout les
chapitres 4 et 5, qui distillent de nombreux conseils
et proposent de multiples exercices qui vous seront
très utiles – à cette occasion comme dans d'autres
situations où vous auriez besoin d'animer une équipe
et de rechercher un consensus.
- Enfin, le livre ne serait pas complet s'il ne recensait
pas les conditions clés pour assurer le déploiement
des combats sélectionnés. C'est l'objet des chapitres 7
et 8 qui soulignent l'enjeu de la rapidité de la mise
en œuvre et la nécessité d'impliquer l'ensemble de
l'organisation.
plus précisément vers quoi orienter • Intégrer les autres objectifs de
leurs efforts. l'entreprise.
Les combats clés ne doivent pas
- Impliquer toute constituer des combats supplémen-
taires qui se cumulent aux objectifs
l'organisation existants – auquel cas la motivation
pour les mener à bien risque d'être de
L'objectif d'une stratégie des faible durée. Ils doivent être repré-
combats clés est de mettre toute sentatifs de l'ensemble des priorités
l'organisation en ordre de marche de l'entreprise, qui doivent pouvoir
dans la même direction. L'auteur s'y subordonner. Par exemple, Uni-
de Leading Change estime que, pour lever Afrique n'a bien évidemment
insuffler un réel changement dans pas renoncé à développer son chif-
une entreprise de 100 000 salariés, il fre d'affaires en lançant ses combats
faut pouvoir compter sur l'implica- clés : l'objectif de développement
tion personnelle de 15 000 person- du CA s'insérait naturellement dans
nes. Les combats doivent donc être deux de ses combats – être présent
choisis de façon à pouvoir impliquer partout, et atteindre en Afrique de
chacun des managers : l'Ouest les volumes obtenus en Afri-
que du Sud.
• Dépasser les cloisonnements
de l'organisation. • Résulter d'une démarche
Les combats choisis doivent aller participative.
au-delà des divisions traditionnelles, "Nos leaders disaient vouloir lan-
faute de quoi une équipe sera sou- cer un même nouveau produit par-
dée, tandis que les autres se sentiront tout, sous la même marque et avec la
délaissées. Le regroupement de l'en- même proposition commerciale", se
semble des offres de France Telecom souvient Kees van der Graaf, patron
sous la marque Orange a ainsi été un d'Unilever Afrique avant d'identifier
signal fort que chacun des salariés quelques combats clés qui ont chan-
devait être impliqué dans la muta- gé la donne. "Mais le jour suivant,
tion du Groupe. De même, Unilever l'un faisait une chose et l'autre son
Afrique a, par ses 5 combats clés, contraire – personne ne travaillait en
réussi à dépasser les cloisonnements équipe". Cette remarque illustre que,
régionaux et à mobiliser l'ensemble quelle que soit la qualité intrinsèque
du territoire africain sur une même d'un objectif, il est indispensable que
ambition. chacun y adhère pour qu'il soit mis
en œuvre. C'est pourquoi, plutôt que
de s'attacher à choisir "le meilleur"
B
Exemple de séminaire de définition des combats clés
Ouverture Identification Préparation
des esprits des combats clés du déploiement
Créer une compréhension Par la confrontation des idées, Lancer le déploiement dès la
partagée de la situation, en débattre des combats clés sélection des combats clés :
élargissant les perspectives : possibles, et les sélectionner : - Constituer des équipes
- Encourager la - Elaborer une large liste de projet, choisir des leaders
transparence sur les combats possibles et définir les grandes
données - Les redéfinir, regrouper lignes d’action pour
- Mettre à jour les points chaque combat clé
- En débattre pour affiner la
sensibles, les non-dits, liste - Prendre un engagement
les émotions solennel, pour l'équipe et
- Faire un choix final par
- Confronter différents à titre individuel
consensus, en tenant compte
points de vue pour de la cohérence d'ensemble - Définir les messages clés à
engendrer des communiquer rapidement
des combats retenus
perspectives partagées au reste de l’entreprise
Timing :
Timing : de quelques heures Timing :
de 1 à 2 jours à 1 jour et demi environ une demi-journée

6 m • N° 162a La stratégie des combats clés

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 combat, il est bien plus important
en fait d'impliquer les collaborateurs
dans un processus de sélection qui
aboutit à choisir collectivement les
combats à retenir – quitte à accepter
quelques compromis sur ce qu'on
aurait pensé être la priorité. L'essen-
tiel n'est-il pas que l'organisation se
mette en mouvement ?
3 Un processus
de sélection
participatif
La qualité du processus de
sélection des combats clés
est le principal facteur de
succès.
Plus les collaborateurs adhèrent
aux combats clés sélectionnés, plus
les chances de succès sont grandes.
C'est pourquoi les auteurs de Must-
win Battles insistent pour que cette
sélection soit effectuée à l'occasion
d'un événement rassemblant les
principales parties prenantes, et que
le temps nécessaire y soit consacré
(figure B). Ainsi, Unilever Europe
a lancé les combats qui ont redyna-
misé sa branche "glaces et produits
surgelés" à l'occasion d'un séminaire
de 5 jours rassemblant 45 dirigeants
dans un château de la campagne
française.
C ment pas. En effet, ils risquent sinon
Quelques pistes pour explorer les non-dits et les émotions
Les auteurs de Must-win Battles ont identifié quelques exercices à conduire en sous-groupes : ils
peuvent vous aider à faire s'exprimer les non-dits qui pourraient nuire ensuite à la mise en œuvre
de la stratégie retenue.
Mythes
Les participants identifient les mythes du
secteur et de l'organisation, en veillant à
les remettre en question.
Ex : Ce marché est-il réellement attractif ?
Tel concurrent est-il vraiment imbattable ?
Nos produits sont-ils vraiment meilleurs
que ceux de nos concurrents ? Avons-nous
réellement une culture de coopération ?
Tabous
Les participants s'efforcent de formuler les
tabous de l'organisation.
Ex : Parler de sous performance, redéfinir
les objectifs en fonction des premiers
enseignements, parler d'échec, réallouer les
ressources…
La stratégie des combats clés
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L'objectif est de construire un
consensus sur les combats prioritai-
res, à partir d'une vision partagée de
la situation de l'entité concernée, et
d'impliquer chacun dans la mise en
œuvre des batailles. Pour y parvenir,
il faut être prêt à accepter que cette
convergence prenne du temps.
- S'accorder sur l'état
des lieux
La tentation est grande de se lan-
cer immédiatement dans la recher-
che d'idées : le plus efficace n'est-il
pas que chacun donne ses idées de
combats clés, et de trancher par un
vote ? Cette précipitation serait une
erreur.
En effet, même si tous les partici-
pants font partie de la même entité,
chacun a son propre vécu, sa pro-
pre personnalité et a tiré ses propres
conclusions de ses expériences. Si
ces divergences de vues ne sont pas
discutées, elles risquent de donner
lieu à un accord de façade, chacun
adaptant ensuite son comportement,
plus ou moins consciemment, à ses
propres convictions. Par exemple,
un manager peut être convaincu que
le succès vient du volume des ventes,
tandis qu'un autre est plus axé sur la
recherche d'une marge par le main-
tien de prix élevés. Si ces différences
Espoirs et craintes
Les participants expriment leurs espoirs et
craintes pour l'entreprise…
Ex : Perspectives de développement, risque
concurrentiel, etc.
…mais aussi pour ce séminaire.
Ex : Une perte de temps, l'occasion de donner
un coup de pouce à mon activité, le risque de
voir telle division prendre le dessus…
Modus operandi
Les participants analysent leur façon de
travailler en tant qu'équipe.
Ex : Communiquons-nous ouvertement ?
Savons-nous gérer les conflits ? Sommes-
nous collectivement responsables ?
de croyances ne sont pas débattues,
les deux risquent d'être d'accord sur
le choix d'un combat clé "faire de tel
produit le fer de lance de la politique
de commercialisation". Mais la mise
en œuvre de ce combat risque de
prendre des formes pour le moins
disparates !
La recherche d'une compréhen-
sion partagée requiert des échanges
approfondis :
• Communiquer en toute
transparence les données de base.
Mieux vaut retourner aux don-
nées brutes que partir des conclu-
sions que les uns ou les autres en
auront tirées. Tout mettre sur la table
est souvent l'occasion de remettre
en cause des convictions fermement
ancrées. En témoigne cette entre-
prise d'électronique, chez qui do-
minait la croyance qu'un fort taux
de pannes était la cause de la dé-
saffection progressive des clients.
Les dirigeants présents lors d'un tel
séminaire ont pris conscience que
ce taux de un pour mille était tout à
fait dans la norme du secteur, et qu'il
fallait chercher ailleurs la cause de
leurs problèmes !
• Explorer les non-dits et les
émotions.
Il est important de mettre à jour
les oppositions et les ressentis,
même – et surtout – s'ils ne s'expri-
de resurgir au moment de mettre
en œuvre les décisions. Différents
exercices sont très efficaces pour le-
ver, avant même le lancement de la
stratégie, les principaux freins à sa
mise en œuvre (figure C).
• Elargir l'horizon de réflexion
en changeant l'angle de vue.
Pour élaborer des combats clés
susceptibles de toucher toute l'or-
ganisation, chacun doit prendre
conscience que son point de vue
n'est que l'une des façons possibles
de voir les choses. L'exercice consis-
tant à demander à des collaborateurs
d'endosser temporairement le rôle
d'un client, d'un investisseur, d'un
concurrent, du membre d'une autre
division, etc. et de défendre sa po-
sition lors d'un débat est très utile
pour cela. On peut aussi revenir sur
les succès et les échecs passés en
cherchant d'autres explications que
celles couramment admises.
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 D
Arriver progressivement au consensus
Le choix des combats clés doit suivre un processus progressif pour amener toutes les parties prenantes à faire évoluer leur point de vue et à adhérer au choix final.

Brainstorming

Combiner et reformuler les batailles de façon à :

Liste exhaustive - Maximiser l’impact sur le business global
Filtre 1 - Les tourner davantage vers l’externe
- Les rendre tangibles et mesurables

- Evaluer le potentiel de chaque combat : Pouvons-nous le gagner ? Comment

Liste réorganisée réagiront les concurrents ? Avons-nous les moyens de les battre et sinon, pouvons-nous
Filtre 2 développer nos compétences ?
- Analyser les positions de chacun : Pour chaque combat, classer les parties en
"partisans", "neutres" et "opposants", et évaluer la force de leur impact, afin d'éliminer
ceux dont les opposants ont le plus d’impact.
« Portefeuille » de combats
Filtre 3 - Evaluer le portefeuille de combats clés : impact, chances de succès, ressources
nécessaires et délai de mise en œuvre (voir figure E).
- Vérifier la cohérence d'ensemble : tous les combats ensemble peuvent-ils être gagnés ?
Liste réduite 1
Affiner la liste à l'aide de l'exercice des « cyniques et croyants » : scinder l’équipe de
Filtre 4 management en deux, donner à chacun des groupes le rôle de cynique puis celui de
croyant pour chaque combat, puis échanger les rôles. Chacun se force alors à sortir de son
propre prisme pour avoir une vision extérieure "neuve" de la situation.
Liste réduite 2
Finaliser le choix : travailler en sous-groupes et confronter les points de vue jusqu'à
Filtre 5 atteindre un consensus.

3 à 5 combats clés
D'après Must-win Battles, Peter Killing, Thomas Malnight, éd. Wharton School Publishing, 2006.

Ainsi, les participants pourront
aborder la phase de sélection des
combats clés avec un esprit plus
ouvert.
- Procéder
par itérations
Si l'on souhaite l'adhésion du plus
grand nombre, il n'est souhaitable ni
de décréter quels seront les combats
clés – cette approche autoritaire a
peu de chances de susciter l'adhésion
– ni de trancher par vote – cela ris-
que de générer des frustrations trop
importantes parmi les minoritaires.
Mieux vaut arriver progressivement
à un consensus, par l'affrontement
constructif des idées (figure D).
• Faire s'exprimer toutes les
idées.
Le choix des combats clés doit
démarrer par l'élaboration d'une
liste, aussi longue que possible, des
thèmes envisageables. L'enjeu est,
d'une part, que tout le monde puisse
s'exprimer, afin de minimiser le ris-
que de frustrations par la suite. Il
8 m • N° 162a
est aussi de parvenir à formuler des
idées réellement percutantes. Pour
cela, on procédera par approfondis-
sements successifs. On cherchera
par exemple comment tourner en
combat externe des combats appa-
remment internes – un enjeu de li-
vraison en juste-à-temps n'est pas
qu'un problème de logistique, mais
bien de service client, par exemple.
Ou encore, on regroupera et refor-
mulera les combats de façon à ce
qu'ils puissent englober différentes
facettes de la vie de l'entreprise.
• Procéder par élimination
progressive.
L'objectif est de faire évoluer
progressivement les convictions de
chacun, pour parvenir à un accord
sincère sur les combats retenus. Ain-
si, on commencera par éliminer les
combats qui sont rejetés en bloc par
la majorité des personnes présentes.
De même, on écartera assez rapide-
ment ceux qui ne répondent pas, de
façon évidente, aux caractéristiques
d'un bon combat clé : qui ne font pas
une vraie différence, qui pourraient
bien ne pas être atteignables, qui ne
concernent qu'un sous-ensemble de
l'organisation, etc. Ensuite, on pour-
ra réduire la liste par regroupements
successifs, en sollicitant chaque fois
l'approbation des personnes ayant
proposé chaque combat. Il est alors
possible d'établir une short-list des
combats possibles, que l'on classera
en fonction de leur impact, de leurs
chances de succès, des ressources
nécessaires et de leur délai de mise
en œuvre (figure E), pour avancer
ainsi progressivement vers le choix
final.
• Finaliser un ensemble
cohérent de combats clés.
Le choix final des 3 à 5 com-
bats clés prend nécessairement du
temps. L'important est d'accepter
de poursuivre la discussion et de ne
pas céder à la facilité : c'est en effet
souvent lors des affrontements que
naissent les meilleures idées et que
se forge une profonde adhésion aux
objectifs, une fois "l'abcès crevé".
Travailler en petits groupes, à qui
on demande d'endosser successive-
ment la peau d'un cynique ou d'un
croyant par rapport à chaque com-
La stratégie des combats clés

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 bat proposé est généralement effica- savoir aux réfractaires que c'était une est essentiel de préparer le discours
ce pour affiner la liste. Il faut aussi ne condition du maintien dans leurs que chacun tiendra à ses collabo-
pas perdre de vue que les combats responsabilités. rateurs dès le lendemain : c'est le
retenus doivent former un ensemble meilleur moyen de faire état de la
cohérent au regard des objectifs de • Organiser la mise en œuvre des détermination sans faille de l'équipe
l'entreprise. combats clés et le plan d'action. dirigeante. Il faut aussi communi-
La mise en œuvre des combats clés quer régulièrement sur la progres-
- Préparer le demande un haut degré de colla- sion de chacun des combats, pour
boration dans l'entreprise. Or, sou- entretenir l'enthousiasme. Après un
déploiement dès vent, cette collaboration est laissée tel séminaire, Carlsberg a ainsi mis
la sélection à la bonne volonté des acteurs… qui en place une newsletter bimensuelle,
tardent à la traduire dans les faits. introduite par le PDG, consacrant
Les combats clés dépassant les Il est donc important de créer une en moyenne 6 à 8 pages à l'avan-
objectifs propres à chaque entité ou structure transverse, par projet, qui cée de chaque combat clé : mesures
individu, il est critique d'engager transcende les clivages organisation- concrètes, premiers résultats, che-
clairement et rapidement la mise en nels et donne corps aux combats – min restant à parcourir.
œuvre de la nouvelle stratégie, faute à l'exemple de ce qu'a fait Carlos
de quoi elle risque de passer au se- Ghosn chez Nissan avec ses "Cross •••
cond plan face aux urgences opéra- Functionnal Teams". Chaque équipe Face à la nécessité d'insuffler un
tionnelles dès le retour au bureau. peut ainsi définir un plan de vol : ac- changement d'envergure, mieux vaut
tions, cibles mesurables, ressources se fixer un petit nombre de priori-
• Prendre un engagement nécessaires, responsabilités, risques tés très concrètes, plutôt que ten-
solennel. à pallier, etc. ter en vain de tout changer. Choisir
Une façon très efficace de pro- quelques combats susceptibles de
voquer le mouvement est que cha- • Communiquer intensément. recueillir l'adhésion de tous est la
cun s'engage formellement à mettre Si la motivation des participants meilleure façon de libérer les éner-
en œuvre les combats sélectionnés. au séminaire doit être entretenue, il gies et d'enclencher un processus de
Parce que ce geste a un fort pou- est tout aussi important que ceux qui changement durable.
voir mobilisateur, le patron d'Uni- n'y ont pas participé se sentent rapi-
lever Afrique a demandé à chaque dement partie prenante de la nou-
participant à son séminaire de ré- velle stratégie. C'est pourquoi il faut
sumer en quelques mots son enga- veiller particulièrement à la commu- en savoir plus
gement sur un grand poster, et fait nication. Lors même du séminaire, il Si vous souhaitez approfondir ce sujet, nous
vous recommandons les lectures suivantes,
E dont nous nous sommes aussi inspirés pour
rédiger cette synthèse :
Evaluer le portefeuille de combats clés possibles - Comment Carlos Ghosn a sauvé
Quatre principaux critères entrent en compte pour comparer les combats clés : la « quantité » de Nissan, David Magee, éd. Dunod, 2003. (Livre
ressources à investir (taille des bulles), le pourcentage de chance de réussite (couleur des bulles), le temps et synthèse Manageris n° 117a)
de réalisation du projet (abscisse) et leur fort ou faible impact (ordonnée). Les principes à l'origine d'un redressement
réussi.
Fort
impact - Les clés de la réussite des séminaires
de réflexion participatifs (Synthèse
Manageris n° 143a)
Combiner en quelques jours la créativité et
les connaissances d'un grand nombre de
personnes.
- Leading Change, John P. Kotter, éd.
Harvard Business School Press, 1996. (Livre et
La taille des bulles indique la quantité de ressources à
Faible synthèse Manageris n° 43a)
engager dans le combat
impact Les 8 étapes d'une démarche de changement
réussie.
Temps de mise en œuvre
- Accroître la capacité de changement
de l'organisation (Synthèse Manageris
n° 137a)
S'appuyer sur un réseau de "champions du
Combat à plus de 70 % de Combat à chances de réussite Combat à faibles chances changement" pour rendre l'entreprise plus
chances de réussite moyenne (50-70 %) de réussite (30-50 %) réactive.
- Les réflexes indispensables à la
Les projets à retenir en priorité sont les bulles de taille importante, de couleur foncée, conduite d'un redressement (Synthèse
placées dans le cadran supérieur gauche de la matrice. Manageris n° 150b)
Adapter son style de management à l'urgence
D'après Must-win Battles, Peter Killing, Thomas Malnight, éd. Wharton School Publishing, 2006. de la situation pour permettre la sortie de crise.

La stratégie des combats clés m • N° 162a 9

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 regards croisés
Un deuxième regard issu de "The World Café", de Juanita Brown, chercheur affiliée à Sloan School, MIT.
L
es promoteurs de la
stratégie des combats
clés insistent sur l'im-
portance du processus
qui conduit à définir ces
combats : ceux-ci doivent émerger
d'un processus participatif impli-
quant l'ensemble des décideurs clés,
en prenant le temps d'aboutir à un
consensus sur les combats retenus.
Une belle ambition… plus facile à
proclamer qu'à mettre en pratique !
Peut-on réellement organiser de fa-
çon efficace, en dépassant la simple
consultation de façade, la réflexion
collective de dizaines ou centaines
de personnes ?
Le "World Café" constitue un
exemple de méthodologie éprou-
vée, mise en œuvre par plusieurs
grandes organisations, qui permet
d'organiser efficacement les débats
et échanges entre un grand nombre
de personnes, en favorisant l'émer-
gence d'une conclusion collective
– et donc d'un consensus. Lancée
en 1995 à l'initiative de chercheurs
affiliés au MIT, elle a depuis fait ses
preuves au sein de plusieurs entre-
prises. Yvon Bastien, président de
Sanofi-Synthelabo Canada, l'a ex-
périmentée dans le cadre du proces-
sus de planification stratégique. Le
succès a été tel qu'il l'a étendue au
processus budgétaire, puis à de nom-
breuses autres occasions : séminaires
marketing, séminaires de travail avec
des partenaires, etc.
Son principe de fonctionnement
est simple : il s'agit d'organiser l'es-
pace en petites tables de 4 ou 5
participants, dans un cadre invitant
à engager des conversations déten-
dues, puis à effectuer des rotations
de participants entre les tables, se-
lon des modalités qui permettent
d'organiser une réflexion collective.
MANAGERIS • 28, rue des Petites Écuries - 75010 Paris • Tél : 01 53 24 39 39 • Fax : 01 53 24 39 30 • E.mail : info@manageris.com
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Rédactrice en chef : Chrystel Martin
Développement commercial : Sabine de Virieu
Relations clients : Christophe Leroux
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10 m • N° 162a
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Plusieurs ingrédients, parfois en ap-
parence anodins, jouent un rôle clé
dans le bon fonctionnement de ces
échanges et leur convergence vers
une vision partagée des enjeux et
priorités.
Tout d'abord, il faut s'efforcer de
conduire les participants à prendre
du recul sur leurs schémas de pen-
sée habituels. Chacun arrive natu-
rellement avec sa propre vision de la
situation, et parfois son opinion sur
ce qui devrait être fait. Mais les com-
bats clés doivent refléter des enjeux
d'ensemble, qui prennent en compte
les différentes facettes de l'organisa-
tion et de ses préoccupations. Avant
de se précipiter sur l'identification
des pistes envisagées par chacun, il
faut conduire les participants à ac-
quérir la vue d'ensemble nécessaire,
à se confronter à des points de vue
inattendus ou nouveaux. Cela peut
passer par le choix des participants,
en s'efforçant de veiller à la présence
de personnes reflétant des perspecti-
ves variées : les différents dirigeants,
mais pourquoi pas des clients, des
fournisseurs, des représentants syn-
dicaux, des citoyens ordinaires im-
pactés indirectement par l'activité
de l'entreprise, des représentants
d'associations…
Parallèlement, pour que cette di-
versité soit productive, il faut veiller
aux conditions qui conduiront cha-
cun à valoriser le point de vue de
l'autre, même et surtout si celui-ci pa-
raît à première vue "à côté de la pla-
que". Cela requiert quelques règles
simples dans la gestion des échan-
ges, destinées à favoriser l'écoute. La
technique de la "pierre de dialogue"
en constitue un exemple efficace. Il
s'agit simplement d'une pierre, ou
de tout autre objet, qui confère à son
détenteur le droit de parler : les 3 ou
Publication mensuelle composée de 2 synthèses,
éditée par Manageris, SA au capital de 47 689 €
RCS B 388 524 290 – ISSN : 1243-3462
Impression : Promoprint, 79 rue Marcadet, Paris 18e
Commission paritaire : 0607 I 86735
Dépôt légal à parution – Copyright 2007.
4 autres participants assis à sa table
ne sont pas autorisés à l'interrom-
pre. Paradoxalement, cela conduit
chacun à être plus efficace dans ses
propos, la conscience de monopo-
liser la parole étant plus aiguë. Un
autre mécanisme consiste à inviter
les participants à décider régulière-
ment d'une à deux minutes de ré-
flexion silencieuse pour faire le point
sur les échanges. Dans les deux cas,
on évite la dynamique de ping-pong
verbal qui freine l'écoute en focali-
sant chacun sur la préparation de sa
prochaine répartie.
Enfin – et cela participe aussi à
la qualité d'écoute – il faut parvenir
à combiner les idées émises par de
multiples contributeurs, pour pro-
duire un résultat collectif. Cela passe
bien sûr par la définition des étapes
successives du séminaire. Mais cela
passe aussi par des mécanismes d'or-
ganisation des débats. L'un consiste
à demander aux participants d'utili-
ser la nappe en papier de leur table
pour dessiner les associations d'idées
qui retracent la discussion : cette
construction collective met l'accent
sur la globalité du débat. Dans le
même ordre d'idées, on nomme un
"ambassadeur" par table, qui a pour
rôle de restituer les débats de sa ta-
ble à d'autres participants : cela foca-
lise son écoute, et la compréhension
des autres participants, sur la logique
d'ensemble des échanges.
L'expérience de ceux qui ont
conduit de tels séminaires montre
que la logique de structuration de la
réflexion – les étapes successives de
discussions et leurs productions in-
termédiaires – n'est qu'un paramètre
du succès : la création d'une atmos-
phère et de modalités de conduite
des échanges joue un rôle au moins
aussi important.
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