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6. Milliot E. (2005), "Stratégies d’internationalisation : une articulation des


travaux de Porter et Perlmutter", Revue Management & Avenir, n° 3, janvier,
p. 43-60.

Article · January 2005

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Eric Milliot
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Article publié dans la revue Management & Avenir, N° 3, Janvier 2005, p. 48-60.

Stratégies d’internationalisation :
une articulation des travaux de Porter et Perlmutter

Eric Milliot

Résumé
En lançant de nombreux défis et en offrant de nouvelles opportunités, la mondialisation des marchés
permet d’élargir le champ des réponses stratégiques des entreprises. Même si ces réponses sont
partiellement conditionnées par des facteurs culturels et sectoriels, elles traduisent la grande liberté
d’action des dirigeants.
Pour offrir une grille de lecture à ce sujet, il est particulièrement intéressant de rapprocher les travaux
de Porter et Perlmutter. Ces travaux, souvent considérés comme redondants, abordent en réalité des
thématiques complémentaires. Nous proposons dans cet article, après les avoir adaptées, d’associer
les typologies développées par ces deux auteurs pour préciser le cadre d’analyse des stratégies
d’internationalisation.

Abstract
By creating numerous challenges and offering new opportunities, market globalization is leading to
an increase in the scope of companies’ strategic responses. Even if these responses are partially
conditioned by cultural and industrial factors, they nonetheless demonstrate executives’ freedom of
action.
To develop a new conceptual reference frame for this subject, it is particularly interesting to bring
together the works of Porter and Perlmutter. Their ideas, often considered as being redundant,
instead can be understood as offering complementary viewpoints. In this article, we propose to adapt
the typologies developed by these two authors and then to combine them to create a new analytical
framework for internationalization strategies.
STRATEGIES D’INTERNATIONALISATION :
UNE ARTICULATION DES TRAVAUX DE PORTER ET PERLMUTTER

La mondialisation peut être définie comme un mouvement qui, engendrant le décloisonnement des
marchés et soulignant l'interdépendance des acteurs, facilite la coordination et/ou l'intégration des
opérations industrielles et commerciales au-delà des frontières nationales. Cette dynamique, qui
change la nature même de certaines activités, n’impose pas de réponse stratégique unique et
déterminée.
Partant de ce constat, Porter (1986) propose une typologie permettant de repérer les grandes logiques
d’action des entreprises à l’échelle internationale. Il identifie, à partir du degré de coordination et de
la configuration géographique des activités, quatre options possibles : la stratégie fondée sur
l’exportation, la stratégie centrée sur les marchés nationaux, la stratégie de forte coordination entre
les filiales et la stratégie globale simple. Perlmutter (1969), quant à lui, avance une typologie bien
connue sur les modes organisationnels établis entre maisons mères et filiales. Trois profils
managériaux (ethnocentrisme, polycentrisme et géocentrisme) sont ainsi identifiés pour traduire la
diversité des principes de gestion adoptés par les entreprises travaillant à l’échelle internationale.
Les travaux de ces deux auteurs, qui abordent sous des angles différents une même réalité, sont
présentés comme des recherches quasi similaires et non comme des recherches complémentaires
(Bartlett et Ghoshal, 1989 ; Malnight, 1995…). Nous pensons, cependant, que leur rapprochement
peut enrichir la réflexion sur l’appariement des logiques stratégiques et organisationnelles dans un
contexte mondialisé.1
Pour justifier ces propos, nous tenterons, dans un premier temps, d’associer les travaux revisités de
Porter et Perlmutter. Nous développerons, ensuite, un modèle composite facilitant l’étude des
stratégies d’internationalisation.

UN CADRE D’ANALYSE ADAPTE


Face aux multiples défis lancés par la mondialisation des marchés, Porter (1986) propose une matrice
traduisant la variété des réponses stratégiques possibles. Cette matrice, qui offre un cadre interprétatif
intéressant, peut cependant être développée à trois niveaux : la structuration, la terminologie et la
présentation analytique.
DES ELEMENTS DE STRUCTURATION A AFFINER
Les critères utilisés par Porter, pour élaborer sa typologie, peuvent être précisés pour mieux cerner la
nature des orientations développées par les entreprises engagées au niveau international. Présentons
sommairement les limites des deux axes retenus par l’auteur.
 Le premier élément de structuration, la configuration géographique des activités, ne permet
pas de traduire exactement la stratégie d’internationalisation développée. Ce critère est, en
effet, source de confusion pour deux raisons. Premièrement, parce qu’un dirigeant décide
parfois de répartir ses activités pour des questions purement opérationnelles. Il peut, par
exemple, adopter une approche multi-zones pour avoir ponctuellement accès à des ressources
et compétences locales. Deuxièmement, parce que le développement d’entités virtuelles invite
à relativiser l’importance du critère de configuration pour caractériser la stratégie étudiée.
Pour véritablement cerner les contours de la politique retenue, il semble préférable de
s’intéresser au degré de concentration de l’autorité exercée. La délégation ou la non-
délégation du pouvoir traduit plus clairement les orientations choisies par l’entreprise.
Présenté de manière simple, cet axe fait référence à un ensemble de solutions allant de la

1. Cette recherche de congruence, à l’échelle internationale, a déjà été étudiée par un certain nombre d’auteurs (Fouraker
et Stopford, 1968 ; Stopford et Wells, 1972 ; Egelhoff, 1982 et 1988…). Le rapprochement des travaux de Porter et
Perlmutter permet, cependant, de développer la réflexion à ce sujet.
1
faible concentration (réponses précises aux conditions locales, meilleures utilisations des
attributs nationaux…) à la forte concentration (fort contrôle des opérations, réduction des
coûts unitaires…) du pouvoir de décision.
 Le second axe retenu par Porter, la coordination des activités, est lui aussi relativement peu
précis. Le concept de coordination peut faire référence à plusieurs types d’articulation
(organisationnelle, industrielle, commerciale…) de nature stratégique ou opérationnelle.
Là encore, pour faciliter l’identification de la stratégie développée, il semble que le terme
d’interdépendance soit plus approprié. Il permet de passer de la description des faits à
l’analyse des causes, de la présentation des applications aux principes qui les régissent... Deux
cas de figure, aux extrémités d’un continuum, peuvent être utilisés pour structurer la matrice :
la faible interdépendance (les unités sont indépendantes ou unilatéralement dépendantes) et la
forte interdépendance (les unités sont complémentaires) des activités.
UNE TERMINOLOGIE A HOMOGENEISER
Porter identifie quatre logiques d’action : la stratégie fondée sur l’exportation avec un marketing
décentralisé, la stratégie centrée sur les marchés nationaux, la stratégie d’investissements à l’étranger
avec une forte coordination entre les filiales et la stratégie globale simple. Il associe ainsi, de manière
non systématique, modes d’internationalisation (exportation, investissements à l’étranger), champs
d’action (marchés nationaux, marché global) et logiques organisationnelles (marketing décentralisé,
forte coordination entre les filiales). Il en découle un amalgame qui gêne la lisibilité de la typologie.
Pour éviter cet écueil, nous préférons reprendre les intitulés génériques proposés par Bartlett (1986),
à savoir : la stratégie internationale, la stratégie multinationale, la stratégie transnationale et la
stratégie globale. Cette présentation homogène permet de traduire, de manière plus cohérente et
harmonieuse, la nature et la portée des politiques développées par les entreprises.
UNE ANALYSE A COMPLETER ET A SYTEMATISER
Etudiant la concurrence sectorielle dans un contexte globalisé, Porter présente de manière partielle
les stratégies d’internationalisation. Il se focalise sur les trois logiques d’action qu’il considère liées à
la mondialisation (stratégie centrée sur les marchés nationaux, stratégie d’investissements à l’étranger
avec une forte coordination entre les filiales et stratégie globale simple) sans examiner celle fondée
sur l’exportation. De plus, il ne propose qu’une analyse embryonnaire de la mise en œuvre des
stratégies identifiées.
Pour compléter ce travail, il semble indispensable de présenter les principales caractéristiques des
politiques d’internationalisation et de préciser les modes organisationnels nécessaires à leur
application. Dans ce but, nous proposons de reprendre les travaux de Perlmutter (1969) et de les
adapter à la typologie de Porter. Cette association, que nous développerons ultérieurement dans cet
article, permet d’enrichir la réflexion sur les origines, les principes et les conditions de mise en œuvre
des logiques d’action des entreprises dans un environnement où les frontières politiques et
commerciales sont de plus en plus évanescentes.

LES STRATEGIES D’INTERNATIONALISATION


Suite aux remarques faites précédemment, nous proposons d'amender la typologie de Porter. Fondée
sur des critères de structuration que nous jugeons plus adéquats, la matrice présente les perceptions
de l’espace marchand inhérentes aux différentes stratégies (document 1).
Présentons plus en détail ces logiques d’action développées dans un contexte mondialisé.
L’ORIENTATION STRATEGIQUE INTERNATIONALE
L’entreprise connaît ici une forte concentration du pouvoir de décision et une faible coordination des
activités menées à l’international. Les entités à l’étranger (point de vente, usine d’assemblage…)
sont, en effet, fortement dépendantes de l’entité pivot (siège, usine principale…) généralement
implantée dans le pays d’origine de l’entreprise. Parallèlement, l’essentiel des activités constituant la
chaîne de valeur est concentré dans ce même pays.

2
Document 1

STRATEGIES D’INTERNATIONALISATION ET
PERCEPTIONS DE L’ESPACE MARCHAND

POUVOIR DE DECISION POUVOIR DE DECISION


CONCENTRE DISPERSE

Stratégie globale Stratégie transnationale

FORTE
INTER-
DEPENDANCE
DES
ACTIVITES

Stratégie internationale Stratégie multinationale

FAIBLE
INTER-
DEPENDANCE
DES
ACTIVITES

Marché d’origine Marché étranger

Dépendance Indépendance Interdépendance


Marché aux frontières commerciales évanescentes Bloc régional

3
Cette stratégie se caractérise par une faible adaptation des produits de l’entreprise proposés à
l’étranger. Le marché pivot est, en principe, le marché d’origine. Ce sont les conditions observées sur
ce marché qui vont déterminer la conception, la fabrication et la commercialisation des produits.
Les marchés étrangers sont considérés comme des marchés satellites qui permettent, dans la mesure
du possible, de saisir des opportunités commerciales. La principale modalité d’internationalisation est
la cession de brevets ou l’exportation des produits fabriqués dans le pays d’origine. Les concessions
de licence sont parfois utilisées pour diffuser les savoir-faire et les marques.
Cette orientation est souvent adoptée par les petites et moyennes entreprises qui font l’apprentissage
des marchés étrangers. Donnons l’exemple de Progial qui bénéficie, sur le marché français, d’une
position dominante dans le secteur des progiciels pour boulangeries industrielles. Ne pouvant guère
augmenter sa part de marché en France, cette entreprise cherche désormais, en évitant d’adapter ses
produits, à trouver des clients en Belgique et au Québec.
L’ORIENTATION STRATEGIQUE MULTINATIONALE
Cette stratégie se caractérise par une dispersion du pouvoir de décision et un faible degré de
coordination entre les activités menées dans différents pays. Contrairement à la stratégie
internationale, elle n’accorde pas d’attention particulière au marché d’origine pour approcher les
marchés étrangers. Elle cherche à répondre précisément aux conditions de chaque marché national
visé. C’est la stratégie de gestion de portefeuille (collection d’activités locales) qui engendre une
forte adaptation des produits. La grande différence avec la stratégie monodomestique est que
l’entreprise peut répartir sur plusieurs marchés les risques financiers et commerciaux.
Les filiales sont assez autonomes par rapport au siège, c’est pourquoi les investissements directs sont
souvent utilisés comme moyens essentiels d’internationalisation. Les concessions de licence (savoir-
faire, marque) sont également accordées à des partenaires pour faciliter l’implantation à l’étranger.
Pour illustrer cette orientation, donnons l’exemple du distributeur britannique Kingfisher. Les
enseignes qu’il possède servent en principe un marché national et sont gérées de manière autonome
par les équipes locales. Citons, dans le secteur de l’électrodomestique, BCC pour les Pays-Bas, But et
Darty pour la France, Comet pour le Royaume-Uni, Datart pour les Républiques Tchèque et
Slovaque, ProMarkt pour l’Allemagne et Vanden Borre pour la Belgique.
L’ORIENTATION STRATEGIQUE TRANSNATIONALE
Etudiée de manière approfondie par Bartlett et Ghoshal (1989), cette orientation se caractérise par
une faible concentration du pouvoir de décision et par une forte coordination d’activités
géographiquement dispersées. Le principe clé de cette stratégie est résumé par le célèbre slogan,
avancé au début des années quatre-vingt-dix par le président-directeur général d’Asea Brown Boveri
(ABB), penser globalement et agir localement. Présentée simplement, cette stratégie tente de
concilier les avantages de la standardisation pour les activités amont de la chaîne de valeur (vision
stratégique commune, économies d’échelle…) et de l’adaptation pour les activités aval (motivation
au sein des filiales, produits répondant aux exigences locales…). Elle se fonde sur divers systèmes
d’attributs pour optimiser ses activités réparties sur un ou plusieurs continents. Elle s’appuie sur la
décomposition internationale des processus productifs (Lassudrie-Duchêne, 1982) pour répondre à la
demande de différence des consommateurs (Lassudrie-Duchêne, 1971).
La mise en œuvre d’une telle approche demande de faire appel aux trois modalités génériques
d’internationalisation, à savoir : les investissements directs à l’étranger (filiale de production, filiale
de distribution, joint venture…), les concessions à durée limitée (crédit-bail, concession de licence,
franchise…) et les ventes fermes (exportation, cession de brevets, contrat clé en main…). En effet,
les investissements directs sont indispensables pour répartir à grande échelle les différentes
opérations complémentaires qu’il faut plus ou moins intégrer. Ne pouvant pas toujours financer les
lourds investissements nécessaires à sa présence régionale ou globale, l’entreprise a également
recours aux coopérations verticales et horizontales avec différents types de partenaires. Ces modes de
coopération se concrétisent par des contrats de sous-traitance et d’ingénierie, des licences de brevet et
de marque, des accords de recherche et de production communes, des unités de fabrication et de

4
commercialisation conjointes… L’intégration des opérations géographiquement dispersées fait que
l’exportation est aussi une modalité largement utilisée pour mettre en œuvre cette stratégie.
Procter & Gamble (P&G), par exemple, adopte cette orientation dans le secteur des lessives. En
associant des marques mondiales (Ariel, Dash…) et des marques locales (Bonux, Vizir…), P&G
élargit son positionnement et évite de laisser le champ libre aux rivaux. Parallèlement, en valorisant
les marques nationales, P&G permet aux filiales de prouver leur dynamisme et leur créativité. Le
groupe peut ainsi espérer transposer certaines idées locales à d’autres marchés (par exemple : le
cadeau dans la boîte Bonux).
L’ORIENTATION STRATEGIQUE GLOBALE
Cette orientation stratégique permet, avec un pouvoir de décision concentré au niveau de la maison
mère, de coordonner des activités géographiquement réparties dans quelques pays pour répondre de
manière harmonisée au marché mondial. Cette stratégie, rarement retenue, ne semble efficace que
pour quelques secteurs d’activité (aéronautique, informatique, marchés financiers…). Elle se fonde
sur l’idée que l’homogénéité croissante de la demande mondiale permet l’adoption d’un marketing
mix standardisé (Levitt, 1983). L’entreprise peut alors concentrer ses outils de production sur les
territoires, le pays d’origine n’étant pas forcément inclus, qui proposent les systèmes d’attributs les
plus intéressants.
Les modalités essentielles pour l’internationalisation sont les investissements directs dans le(s) pays
retenu(s) (pour développer les activités créatrices de valeur) et l’exportation (puisque les activités
sont relativement concentrées dans l’optique de servir le marché mondial). Le fait de s’intéresser au
vaste champ planétaire invite à adopter également la voie contractuelle, sous des formes variées, pour
partager les risques financiers, industriels et commerciaux.
Intel Corporation illustre l’application de cette stratégie centralisatrice. Ses microprocesseurs,
fabriqués dans douze usines et assemblés dans douze unités réparties dans le monde, sont vendus à
l’échelle mondiale sans adaptation.

UNE REALITE COMPLEXE


La matrice des stratégies d’internationalisation, dont l’objectif est de traduire simplement une réalité
complexe, ne doit pas occulter la diversité des logiques d’action développées. L’observation des
politiques mise en œuvre par les entreprises révèle une multitude de solutions possibles. Même si
l’environnement a un impact évident sur le choix de l’orientation stratégique, les faits démontrent
que la latitude des dirigeants est importante.
Pour comprendre la complexité évoquée, nous proposons d’aborder l’évolution des choix
stratégiques et les multiples facettes organisationnelles possibles pour l’application d’une même
stratégie.
L’EVOLUTION DES CHOIX STRATEGIQUES
L’observation diachronique des entreprises fortement internationalisées permet d’identifier une
tendance concernant l’évolution séquentielle des stratégies adoptées. Dans un grand nombre de cas,
l’entreprise met en œuvre, dans un premier temps, la stratégie internationale pour faire
l’apprentissage des conditions industrielles et commerciales à l’étranger. Elle développe, ensuite, une
stratégie multinationale pour optimiser ses opérations sur certains marchés nationaux clés. Elle
poursuit ensuite son développement, lorsque les conditions locales ne sont pas trop spécifiques, en
adoptant la stratégie transnationale pour profiter des avantages respectifs de différents systèmes
d’attributs et bénéficier d’économies d’échelle.2 Elle utilise enfin la stratégie globale, quand celle-ci
est envisageable, pour réduire ses coûts unitaires et augmenter son chiffre d’affaires. Cette séquence
n’est pas, bien évidemment, toujours vérifiée. Les entreprises peuvent, en effet, aller à contre-courant
ou sauter des étapes.

2.
Cette évolution est vérifiée empiriquement, pour les filiales espagnoles des entreprises multinationales, par Jarillo et
Martinez (1990).
5
Un mouvement à contre-courant
Certaines entreprises (Coca-Cola, McDonald’s…), par exemple, après avoir longtemps adopté une
approche globale, reviennent à une stratégie qui se rapproche de l’orientation transnationale.
Conscientes qu’il est difficile de satisfaire de la même manière les demandes à l’échelle mondiale et
qu’il est préférable d’établir une certaine proximité avec les prospects, elles intègrent plus de
paramètres locaux ou régionaux pour assurer leur développement à l’international. Comme nous
l’avons vu précédemment avec P&G, elles associent parfois marques locales et marques globales
pour couvrir un plus grand nombre de segments de marché.
Un passage non obligé
Des compagnies connaissent un développement à l’international atypique. Elles naissent, par
exemple, globales. Le cabinet McKinsey (Rennie, 1993) constate en effet, après avoir mené une
étude en Australie, que certaines entreprises impliquées dans des secteurs à forte valeur ajoutée
(équipements scientifiques, photographiques, électroniques…) adoptent d’emblée une stratégie
globale. Grâce aux progrès des télécommunications, des entités de petite taille sont désormais
capables d’établir très rapidement une position mondiale sur des niches stratégiques. Remarquons,
cependant, que les orientations qui reposent sur la standardisation (stratégies internationale et
globale) sont généralement plus accessibles aux petites et moyennes entreprises. Les coûts
d’adaptation, inhérents aux stratégies multinationale et transnationale, gênent ces structures qui n'ont
pas toujours la taille critique nécessaire.
DES LOGIQUES DE DEVELOPPEMENT VARIEES
Les quatre orientations stratégiques identifiées précédemment offrent une grille de lecture utile. Elles
ne doivent pas, pour autant, donner une image trop simplifiée de la réalité. Trois aspects peuvent être
évoqués pour relativiser la capacité descriptive de la typologie.
Une pluralité stratégique
Une entreprise peut développer simultanément plusieurs stratégies. Les raisons sont nombreuses :
domaines d’activités stratégiques exigeant des approches adaptées, marchés aux contraintes
réglementaires et culturelles spécifiques, phases du cycle de vie du produit différentes d’un marché à
un autre… Même si les stratégies sont a priori largement influencées par les contextes sectoriel et
concurrentiel, la recherche d’adéquation entre environnement et stratégie n’impose pas un mode
d’action uniforme. La diversité des modalités d’internationalisation, l’influence des cultures
nationales, les différentes facettes du marché, le choix du segment commercial et la liberté
décisionnelle des dirigeants expliquent pourquoi, dans un même secteur d’activité, les stratégies
développées par les entreprises sont parfois très variées. Le secteur de l’automobile illustre
parfaitement cette situation : General Motors développe un portefeuille de marques pour répondre
aux conditions domestiques ou multidomestiques des marchés visés (orientation stratégique
multinationale) ; Ford, avec son concept de centres d’excellence, opte depuis quelques années pour
une coordination forte des opérations (orientation stratégique transnationale) ; et Toyota concentre
une grande partie de ses activités industrielles au Japon pour répondre à une demande mondiale
(orientation stratégique globale). Les principaux constructeurs automobiles semblent, cependant,
progressivement converger vers une logique de coordination forte pour des activités pensées et
organisées au niveau régional.
L’impact identitaire
Une même stratégie peut reposer sur différentes bases culturelles (nationale, bi-nationale, régionale,
continentale ou mondiale). La référence identitaire a un impact sur la perception de l’espace
marchand, le choix de l’orientation stratégique et les modes organisationnels retenus. Pour illustrer
cet impact, il est possible d’élaborer une matrice croisant les orientations stratégiques caractérisées
par une forte interdépendance des activités (globale ou transnationale)3 et la référence identitaire

3.Les approches internationale et multinationale n’ont pas été retenues car elles sont, dans les faits, essentiellement
développées par des entreprises enracinées dans une culture nationale. Les conséquences de la référence identitaire sont
beaucoup plus visibles pour les orientations transnationale et globale.
6
(unique [nationale] ou plurielle [bi-nationale, régionale, continentale ou mondiale]) de l’entreprise.
En croisant ces deux dimensions, nous arrivons à identifier quatre profils se différenciant sur les
critères suivants : le pourcentage du capital détenu par des étrangers, le lieu d’implantation du siège,
la nationalité du P-DG, le nombre d’étrangers au sein du conseil d’administration, le nombre
d’étrangers au sein du comité de direction et la culture de référence (document 2). Cette liste n'est pas
exhaustive. Nous n'avons sélectionné que les éléments permettant d'apprécier la référence identitaire
de l'entreprise. Bien d'autres critères servent à évaluer le degré d'internationalisation d'une entreprise
(part du chiffre d'affaires à l'étranger, part des investissements réalisés hors des frontières nationales,
localisation de la recherche - développement...).
La matrice proposée, qui présente des firmes dont le siège est situé en France, montre qu’une même
stratégie peut être appliquée par des entreprises ayant une approche très différente du marché. Ce
dernier peut être considéré de manière relativement homogène, mais abordé de manière ethnocentrée
(référence identitaire unique) ou véritablement intégrée (référence identitaire plurielle). Les aspects
organisationnels doivent donc être étudiés pour comprendre, plus précisément, les orientations
stratégiques développées dans un contexte mondialisé.
L’intention stratégique des acteurs
Confrontées à un milieu socio-économique de plus en plus évolutif, certaines entreprises ne se
contentent pas d'adapter leur stratégie à l'environnement. Elles tentent, en développant un avantage
concurrentiel original, de modifier les règles du jeu sectoriel.4
En faisant de la sorte, elles remettent partiellement en cause les travaux académiques focalisés en
stratégie sur la problématique de l'adéquation (Learned et al., 1965 ; Boston Consulting Group, 1970
et 1982 ; Porter, 1980...) et alimentent le courant de pensée centré sur ce que Hamel et Prahalad
(1989) nomment intention stratégique.5
Le concept d'intention caractérise ici les entreprises proactives dont l’ambition est de modifier
radicalement leur position concurrentielle. Hamel et Prahalad proposent l'exemple de Canon qui s'est
donné comme objectif prioritaire de battre Xerox dans le secteur de la reprographie. Cette liberté
d'action explique pourquoi il faut relativiser le pouvoir interprétatif de la matrice de Porter.
Cependant, si la prédominance de la logique d'adaptation est reconsidérée, la cohérence stratégico-
organisationnelle reste de mise. Développons ce dernier point

LA MISE EN ŒUVRE DE L’ORIENTATION STRATEGIQUE RETENUE


La complexité croissante des opérations menées sur le plan international exige des logiques
organisationnelles de plus en plus sophistiquées. Pour faire face à la mondialisation, des modes de
fonctionnement particuliers sont adoptés en fonction des conditions environnementales et des
moyens de l’entreprise. Ces modes permettent, pour l’essentiel, de mettre en œuvre les orientations
stratégiques retenues. Eisenhardt (2002, p. 90) justifie ce lien de manière forte en disant que
l’organisation elle-même est la stratégie.
Sans aller aussi loin, mais en gardant à l’esprit la dimension stratégique de l’organisation, il est
particulièrement intéressant de mettre en parallèle la typologie revisitée de Porter et celle que
Perlmutter a développée sur les relations établies entre le siège et ses filiales. Ce rapprochement
permet de mieux comprendre la nature et les conséquences organisationnelles des orientations
stratégiques définies précédemment.

4. Ce débat est plus ancien en théorie des organisations. Il oppose les partisans du déterminisme environnemental
(Aldrich, 1975 ; Hannan et Freeman 1977...) et ceux du choix stratégique (Galbraith, 1971 ; Child, 1972...).
5. Ce courant est aujourd'hui développé sur le thème de la gestion permanente du changement et de l'évolution des
objectifs (D'Aveni, 1994 ; Slywotsky, 1996 ; Labowitz et Rosansky, 1997...).
7
DOCUMENT 2
REFERENCE IDENTITAIRE
DES STRATEGIES D’INTERNATIONALISATION :
EXEMPLES D’ENTREPRISE (ANNEE 2000)

STRATEGIE GLOBALE STRATEGIE TRANSNATIONALE

MICHELIN ACCOR
Implantation du siège : France Implantation du siège : France
REFERENCE Pays d’origine : France Pays d’origine : France
IDENTITAIRE Capital détenu par des étrangers : 48% Capital détenu par des étrangers : 40,8%

UNIQUE Nationalité du P-DG : française Nationalité du P-DG : française


Etranger(s) au conseil d’administration : 0 Etranger(s) au conseil d’administration : 2
Etranger(s) au comité de direction : 0 Etranger(s) au comité de direction : 0
Culture de référence : française Culture de référence : française

PHILIPS BCU WIRELESS (TELEPHONIE) AVENTIS


Implantation du siège : France Implantation du siège : France
REFERENCE Pays d’origine : Pays-Bas Pays d’origine : Allemagne et France
IDENTITAIRE Capital détenu par des étrangers : 72,3% Capital détenu par des étrangers : 81,4%

PLURIELLE Nationalité du P-DG : allemande Nationalité du P-DG : américaine


Etranger(s) au conseil d’administration : 5 Etranger(s) au conseil d’administration : 7
Etranger(s) au comité de direction : 5 Etranger(s) au comité de direction : 2
Culture de référence : mondiale Culture de référence : mondiale

Certaines informations sont empruntées à Deschamps et al. (2001).

8
Perlmutter (1969) identifie, chez les maisons mères, trois types d’attitude (ethnocentrique,
polycentrique et géocentrique) par rapport aux unités implantées à l’étranger. Ces types
d’attitude sont utiles pour traduire la mise en œuvre organisationnelle des stratégies
d’internationalisation. En effet, comme nous le présenterons dans les développements qui
suivent, il est possible d’associer la stratégie internationale au profil ethnocentrique, la
stratégie multinationale au profil polycentrique et la stratégie transnationale au profil
géocentrique.
Pour établir une totale correspondance avec la typologie de Porter, un quatrième profil doit
être ajouté à la classification de Perlmutter. Il nous faut, en effet, identifier l’orientation
organisationnelle qui correspond à l’approche globale (holistique) des marchés. Nous
donnerons, à cette quatrième orientation, le nom d’holicentrisme (document 3).
Développons l’articulation des travaux revisités de Porter et Perlmutter.
STRATEGIE INTERNATIONALE ET ORIENTATION ETHNOCENTRIQUE
Le profil ethnocentrique de Perlmutter est particulièrement pertinent pour comprendre la mise
en œuvre d’une stratégie internationale. En effet, pour assurer la cohérence de son action à
l’étranger, le siège définit les valeurs et intérêts de l’entreprise par rapport au seul marché
domestique. Il exerce en principe sur ses filiales une forte autorité. En déterminant des
indicateurs de performance homogènes, la direction générale contrôle ainsi étroitement les
opérations menées à l’étranger. Pour faciliter ce contrôle et respecter la logique de
standardisation retenue, les dirigeants sont généralement issus du pays d’origine.
STRATEGIE MULTINATIONALE ET ORIENTATION POLYCENTRIQUE
Le profil polycentrique illustre les principales logiques organisationnelles nécessaires à la
mise en œuvre de la stratégie multinationale. Les valeurs et intérêts de la compagnie sont, en
effet, appréciés au niveau local puisque l'hétérogénéité des marchés impose généralement une
décentralisation de la prise de décision. La maison mère exerce par conséquent une faible
autorité sur ses unités implantées à l’étranger. Quant aux responsables des filiales, ils sont en
principe issus du ou des pays hôte(s) car ils doivent être capables d’adapter les logiques
industrielles et commerciales aux particularités du marché local.
STRATEGIE TRANSNATIONALE ET ORIENTATION GEOCENTRIQUE
Le profil géocentrique traduit l’application de la stratégie transnationale. La maison mère,
pour gagner en efficience, tente d’établir une collaboration intra-organisation (entre elle et ses
filiales ; entre les filiales) à l’échelle régionale ou mondiale. Cette collaboration, qui permet la
mise en place de politiques industrielle et commerciale intégrant à la fois des normes
universelles et locales, demande un suivi régulier et coordonné des opérations. Pour assurer
cette tâche, les dirigeants sont choisis pour leurs compétences et leurs expériences à
l’international. Les responsables issus du pays d’origine sont donc relativement peu nombreux
sauf, parfois, quand la référence identitaire de l’entreprise est unique.
STRATEGIE GLOBALE ET ORIENTATION HOLICENTRIQUE
L’intégration supranationale des économies, dans certains secteurs d’activités, permet
d’approcher le marché mondial de manière homogène. Les normes sur lesquelles se fondent la
conception, la fabrication et la commercialisation du produit sont alors quasi universelles.
La stratégie globale, qui peut en résulter, exige un profil particulier qui n’est pas identifié par
Perlmutter. Pour compléter la typologie de ce dernier, nous proposons d’ajouter le profil
holicentrique qui correspond à la mise en œuvre de cette stratégie mondiale. Les principales
caractéristiques de ce profil organisationnel peuvent être résumées comme suit.
Les indicateurs de performance étant mondiaux, le siège peut aisément centraliser la prise de
décision pour contrôler des opérations géographiquement dispersées et interdépendantes.

9
DOCUMENT 2

PROFILS ORGANISATIONNELS ADAPTES A L’INTERNATIONAL

Orientations de
Ethnocentrique Polycentrique Géocentrique Holicentrique
l’entreprise
Forte
Relative Forte
Forte dépendance interdépendance,
Relations entre indépendance des interdépendance des
des filiales vis-à- orchestrée par la
maison mère et filiales vis-à-vis de filiales au niveau
vis de la maison maison mère, des
filiales la maison mère et régional, continental
mère filiales au niveau
des autres filiales ou mondial
mondial
Forte implication Faible implication
Forte collaboration Fort implication de
de la maison mère de la maison mère
Autorité et prise entre maison mère la maison mère dans
dans le dans le
de décision et filiales partout le fonctionnement
fonctionnement fonctionnement des
dans le monde des filiales
des filiales filiales
Flux d’informations
Flux d’informations
Grand nombre relativement peu
Communication très importants Grand nombre
d’ordres et de importants entre
et flux partout dans le d’ordres et de
conseils aux maison mère et
d’informations monde et tous conseils aux filiales
filiales filiales, et entre
azimuts
filiales
Normes et
indicateurs de
Normes et Normes et Normes et
performance de
Evaluation et indicateurs de indicateurs de indicateurs de
différentes origines
contrôle performance du performance du performance
(locale, régionale,
pays d’origine pays hôte internationaux
continentale et/ou
globale)
Locale, régionale,
continentale et/ou Globale (sauf quand
Culture(s) de Locale Locale globale (sauf quand la référence
référence (pays d’origine) (pays hôte) la référence identitaire est
identitaire est unique)
unique)
Agents de différents Agents de différents
pays partout dans le pays partout dans le
Agents du pays
Occupation des Agents locaux dans monde (sauf quand monde (sauf quand
d’origine partout
postes-clefs leur propre pays la référence la référence
dans le monde
identitaire est identitaire est
unique) unique)
Exemples Progial, Kingfisher, Ford, Intel,
d’entreprise Pizza Hut… Unilever... Procter & Gamble... Total…

Source : Les trois premières orientations sont adaptées de Perlmutter (1969).

10
Contrairement au profil ethnocentrique, cette centralisation n’est pas toujours assurée depuis
le pays d’origine par des membres issus de ce même pays. L’importance du champ d’action,
en effet, invite l’entreprise à s’implanter là où les systèmes d’attributs sont les plus
avantageux. De même, les postes clés sont généralement confiés, quelle que soit l’origine
nationale, aux personnes ayant les compétences les plus adaptées. Dans les faits, nous
constatons cependant que le pays d’origine reste largement représenté quand la référence
identitaire est unique.
UN MODELE COMPOSITE
La présentation sommaire des quatre orientations organisationnelles permet d’apprécier leurs
liens avec les modes de développement à l’international. Elle permet de proposer un modèle
composite qui valorise la convergence des recherches menées par Porter et Perlmutter
(document 3). Cette convergence, malgré la spécificité des thématiques et problématiques
traitées, nous invite à présenter l'alignement interactif des logiques stratégiques et
organisationnelles (alignement managérial6) comme l’axe pivot pour faciliter la réussite des
opérations menées à l'échelle internationale. Deux raisons justifient cette prise de position.
Premièrement, la nature même de ces opérations (modes de présence à l’étranger, arbitrages
entre adaptation et standardisation, dimensions humaines et sociétales...) exige que les
principes relationnels, décisionnels, communicationnels et culturels soient cohérents avec la
politique d’expansion géographique de l’entreprise. Deuxièmement, la forte congruence des
deux typologies s’explique par le référencement croisé des deux dimensions évoquées :
- les stratégies d’internationalisation sont identifiées à partir de critères organisationnels
(interdépendance des activités, répartition du pouvoir de décision) ;
- les profils d’entreprise sont appréciés à partir d’éléments stratégiques (représentation
géographique, identité culturelle…).
Ce modèle composite met ainsi en relief la corrélation particulière des logiques stratégiques et
organisationnelles pour les opérations menées à l’international. En effet, cette corrélation ne
se traduit pas par un alignement managérial aussi systématique pour les orientations
génériques (domination par les coûts, différenciation et focalisation) car celles-ci reposent sur
des principes qui dépassent la dimension organisationnelle (concurrence, positionnement…).
L'expression axe pivot, retenue à propos de l’imbrication des orientations et des profils, est
volontairement utilisée pour relativiser l'impact de l'environnement sur les choix des
dirigeants. Comme cela a été présenté dans les développements précédents, le contexte
d'affaires n'est pas forcément la référence prioritaire pour définir les actions à mener à
l'international. Deux cas de figure sont, en réalité, observables.
 La subordination aux conditions environnementales (adéquation stratégique).
L'alignement stratégico-organisationnel répond ici aux forces concurrentielles,
sociétales, politico-légales… auxquelles l’entreprise est confrontée. Il repose, pour
l’essentiel, sur les ressources et compétences déjà disponibles au sein de l'entreprise.
Nous pouvons donner l'exemple de McDonald's qui, pour ne plus apparaître comme un
envahisseur étranger dans certains pays, offre plus de liberté décisionnelle à ses
filiales.
 La modification des conditions environnementales (intention stratégique). L'entreprise,
animée par une ambition forte et portée par un projet original, cherche ici un
appariement stratégico-organisationnel particulier. Elle va pour cela tenter d'acquérir
les ressources et compétences nécessaires à son plan de développement.
Nous pouvons présenter le cas de L’Oréal qui, pour mettre son savoir-faire scientifique
au service de différents types de beauté, rachète des marques locales et les transforme,

6. Stratégie et organisation sont, en effet, les composantes fondamentales du management.


11
grâce à des équipes autonomes et pluriculturelles, en marques internationales (Soft
Sheen/Carson, Kiehl’s…).

DOCUMENT 3

APPARIEMENT DES LOGIQUES STRATEGIQUES ET ORGANISATIONNELLES


DANS UN CONTEXTE MONDIALISE

ENVIRONNEMENT
(culturel, sectoriel, concurrentiel…)

Adéquation Adéquation

Intention Intention

STRATEGIE PROFIL
D’INTERNATIONALISATION ORGANISATIONNEL
- internationale - ethnocentrique
- multinationale - polycentrique
Alignement
- transnationale managérial - géocentrique
- globale - holicentrique

Cette présentation triangulaire s’inscrit dans la logique des travaux de Galunic et Eisenhardt
(1994).

12
Cette orientation stratégique a des effets importants sur les concurrents qui, pour ne pas se
laisser distancer, font des efforts particuliers en matière de recherche-développement et
dynamisent à leur tour le secteur d’activité.
Les approches de l'adéquation et de l'intention stratégique, loin d’être incompatibles, sont en
fait supplétives (Saïas et Métais, 2001).7 Le modèle composite proposé ici intègre cette
complémentarité tout en soulignant l’importance centrale de l'alignement managérial pour
optimiser les chances de réussite des actions menées à l’échelle internationale.

CONCLUSION
Face à la globalisation des marchés, les dirigeants cherchent plus à développer un portefeuille
d'options et moins à gérer un portefeuille d'activités statiques (Bryan et Farrell, 1996). Ils sont
par conséquent invités, tout en veillant à la pertinence et à la cohérence des orientations
retenues, à adopter un management assez flexible pour mettre en œuvre des plans d'action
évolutifs dans un environnement turbulent et protéiforme.
Pour développer la réflexion à ce niveau, nous avons adapté et associé les travaux de Porter et
Perlmutter. Ce rapprochement, marqué par la forte convergence des deux typologies, a permis
de proposer un modèle composite soulignant l’importance et la spécificité de l'alignement
interactif des stratégies d’internationalisation et des profils organisationnels. Ce cadre
d’analyse, loin d’être déterministe8, peut être compris comme un ensemble de garde-fous ou
de points de repère facilitant la réflexion des dirigeants pour les opérations menées à
l’international. Il contribue à préciser le projet d'entreprise, à vérifier la compatibilité des
choix et des moyens, à améliorer la communication entre les parties prenantes et à assurer la
cohérence de l'action dans le temps.
Si ce modèle demande à être spécifié en fonction du milieu culturel et des caractéristiques
sectorielles (sensibilité aux évolutions technologiques, degré d’internationalisation des
acteurs, intensité concurrentielle…), il relativise l'impact de l'environnement sur les choix
stratégiques et organisationnels des dirigeants. Il invite, tout en respectant la cohérence interne
des décisions, à envisager différentes postures managériales dans un contexte où les menaces
et opportunités sont fluctuantes et multiformes.

7. L'adéquation stratégique semble particulièrement pertinente pour les secteurs caractérisés par un cycle de vie
des produits relativement long. L'entreprise, dans ce cas, a plus de facilité pour s'adapter à son environnement et
développer un avantage durable par rapport aux rivaux.
L'intention stratégique, par contre, semble concerner davantage les entreprises impliquées dans les secteurs
évolutifs. Les conditions environnementales actuelles, notamment à l'échelle internationale, obligent un nombre
croissant d'entreprises à rechercher l’efficience économique, la flexibilité structurelle et l’apprentissage
organisationnel. L'acquisition de ces capacités peut passer par l'intention de modifier le jeu concurrentiel.
8. Le nombre important de paramètres à prendre en considération, l’évolution rapide des conditions contextuelles
et l’imagination des dirigeants invitent à considérer plusieurs configurations pour mettre en œuvre une stratégie
dans un secteur particulier. Sur ce point, nous adhérons à la théorie de la contingence de Lawrence et Lorsch
(1967) qui avance qu’il n’y a pas de solution optimale, mais que toutes les organisations ne permettent pas
d’atteindre le même degré d’efficacité.
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