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EU loan syndication and its impact on competition in credit markets
Commission européenne
Rapport final
Février 2019
Luxembourg, 2019
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EU loan syndication and its impact on competition in credit markets
Europe Economics est une société de conseil indépendante spécialisée dans l’application de la
pensée et de la pratique économique à un large éventail d'enjeux de politiques publiques et de
marché. Ross Dawkins et Deborah Drury ont dirigé ce travail pour Europe Economics.
Euclid Law est un cabinet d’avocats spécialisé dans l’application du droit et de la politique de la
concurrence. Oliver Bretz, Marie Leppard et Helen Bardell ont été les principaux contributeurs
pour Euclid Law.
Les vues et opinions exprimées dans ce rapport sont celles de ses auteurs, et non pas de la
Commission européenne.
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EU loan syndication and its impact on competition in credit markets
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EU loan syndication and its impact on competition in credit markets
Synthèse
Ce document est le rapport final élaboré par Europe Economics sur « La syndication
des prêts et son impact concurrentiel sur le marché du crédit ». Ce rapport a été
entrepris par la Direction générale de la concurrence de la Commission européenne.
La Commission européenne est principalement intéressée de savoir si le marché de la
syndication de prêts fonctionne correctement et efficacement, étant donné qu'il
constitue une source de financement. Ainsi, l’objectif de cette étude de marché est de
réaliser une évaluation du marché de la syndication de prêts en termes d’efficacité et
de fonctionnement et d’identifier les problèmes de concurrence éventuels.
Notre étude est principalement basée sur un échantillon de six États membres: la
France, l’Allemagne, les Pays-Bas, la Pologne, l’Espagne et le Royaume-Uni. Ces pays
– le Royaume-Uni, la France et l’Allemagne en particulier – sont les plus importants en
termes de la situation géographique d’emprunteurs, de prêteurs et d’investisseurs.
L’étude se concentre sur des segments spécifiques du marché des prêts syndiqués :
les «Leveraged Buy-Outs» (LBO), ce qui se traduit en français par « rachat par effet
de levier »), et le financement de projets et d’infrastructures (PF/INFRA):
Les LBO : les LBO sont principalement utilisés pour des opérations de fusions et
acquisitions (M&A selon son sigle en anglais) dans lesquelles l’emprunteur utilise le
marché de la dette pour acquérir les actions envisagées. La plupart des prêts à effet
de levier européens provient d'emprunteurs parrainés par des fonds
d’investissement privés. En Europe, toutes ces activités de placement privées, y
compris pour le refinancement et la recapitalisation, sont appelées LBO.1
Financement de projets (PF) : De manière générale, le financement de projets
consiste dans le financement de projets à grande échelle et de long terme, qui
requièrent beaucoup d'emprunts et de fonds propres. Les prêts syndiqués ont
tendance à être particulièrement utilisés dans ce type d'investissement, car ils
permettent de partager les risques d'un projet (qui peuvent être importants) entre
plusieurs banques.
Financement d’infrastructures (INFRA) : Les prêts pour les infrastructures sont
considérés dans cette étude comme un sous-ensemble des prêts pour le
financement de projets, car il s'agit d’un type similaire de financement. La
distinction essentielle entre les deux est le type de projets financés : en général, les
prêts pour les infrastructures sont utilisés pour des projets dans les domaines des
équipements publics, des transports et des télécommunications. Comme dans le cas
du financement de projets en général, la taille et la complexité de ces projets les
rendent particulièrement susceptibles à un financement par prêts syndiqués.
Nous avons adopté une stratégie multi-facette pour mener cette recherche. En
particulier :
Nous avons développé un cadre conceptuel pour analyser les potentiels problèmes
de concurrence sur le marché des prêts syndiqués. Notre conseiller académique, le
1
Voir, par exemple, Standard & Poor’s (2010) “A Guide to the European Loan Market”.
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EU loan syndication and its impact on competition in credit markets
L'évolution des emprunts en fonction de leur objet et de l'État membre où ils sont
réalisés est présentée ci-dessous. En Espagne, une baisse des emprunts a été
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Figure 1: Valeur totale des transactions par État Membre (par semestre, en millions
d’euros)
DE ES
FR NL
PL UK
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Commission européenne (2011) : “Lignes directrices sur l'applicabilité de l'article 101 du traité
sur le fonctionnement de l'Union européenne aux accords de coopération horizontale“ (2011/C
11/01). L’analyse est principalement basée sur les principes généraux de l’appréciation des
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EU loan syndication and its impact on competition in credit markets
Le recours à un seul MLA pour constituer un syndicat et négocier avec d'autres banques
est plus susceptible de se produire dans le cadre des prêts PF / INFRA (bien que cela ne
soit pas encore fréquent). Bien que le travail de terrain indique que les emprunteurs /
sponsors conservent le contrôle de ce processus, il existe toujours la possibilité que le
partage d’informations se fasse de la manière suivante: les négociations du syndicat
seraient coordonnées et le prix et les conditions du prêt se feraient à l'encontre de
l’emprunteur. La nécessité d'un tel échange d'informations devrait être évaluée au cas
par cas, mais cela reste un domaine à risque. Ce risque serait encore plus élevé si la
banque agissant comme MLA dans un tel cas agissait également (au travers d’une
branche distincte) comme conseiller de l’emprunteur / sponsor ou si les alternatives à
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EU loan syndication and its impact on competition in credit markets
Etape du
Résultats et conclusions sur les garanties et les risques
processus
de cette banque comme MLA étaient limitées. Cependant, la nomination d'un seul MLA
dans le segment PF / INFRA est rare.
Les preuves des multiples interactions entre les prêteurs dans les transactions au fil du
temps nous portent à conclure qu’il existe un risque certain que les prêteurs puissent
observer les comportements et les stratégies des autres, ce qui leur permettra peut-
être de coordonner certaines opérations de prêts futures. Nous n'avons pas de preuve
directe que cela se produit en pratique. Étant donné que, dans la plupart des cas, les
discussions qui ont lieu à ce stade ne comportent pas d'informations détaillées sur les
prix et les stratégies de placement, la quantité d'informations que les prêteurs peuvent
obtenir sera probablement limitée. Bien que cela reste une zone à risque, nous
considérons que ce risque est relativement faible.
Dans la plupart des cas de notre travail de terrain concernant les prêteurs et les
emprunteurs / sponsors, la fourniture de services auxiliaires est décidée dans le cadre
de l'accord initial des conditions de prêt ou à l’issue d’un processus concurrentiel après
la clôture du prêt. Dans les deux cas, l’emprunteur / sponsor pourrait choisir entre les
La
offres des banques et maintenir une pression concurrentielle.
répartition
des
Cependant, une petite minorité d'emprunteurs / sponsors ont indiqué que les MLA font
services
de la fourniture des services auxiliaires une condition des prêts (les autres négocient
auxiliaires
des services auxiliaires dans la phase initiale du processus de prêt, ou après la clôture
entre les
du prêt). Alors que la jurisprudence en matière de droit de la concurrence (par
banques et
exemple, le CNMC, l’Autorité de la concurrence espagnole) n’a pas conclu qu’il était
la
illégal pour les prêteurs d'obliger les emprunteurs à se fournir en services auxiliaires
tarification
auprès d'eux, nous considérons qu’une telle obligation augmente le risque d’un effet
de ces
économique sous optimal pour les emprunteurs. Nous notons en outre que toutes les
services
personnes interrogées qui ont cité une telle disposition comme condition du prêt
provenaient d'Espagne. Quand cela se produit, nous considérons qu’il s’agit d’un
domaine d’intérêt pour le moins modéré.
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Etape du
Résultats et conclusions sur les garanties et les risques
processus
Dans le segment PF / INFRA, il est plus fréquent que les services auxiliaires
directement liés au prêt soient attribués par l'emprunteur / sponsor aux banques
prêteuses au stade initial de la fixation des conditions générales du prêt. Le fait que les
banques sachent qui fournira les services leur permet de discuter et de s'entendre sur
la tarification (c’est-à-dire qu’il est plus facile pour elles de bouleverser la procédure
convenue). Les restrictions imposées par les prêteurs sur les entités susceptibles de
fournir des services de couverture de risques seront plus problématiques sur les
marchés où il existe un nombre limité de prêteurs dans le syndicat capables de fournir
de tels services, limitant ainsi le choix de l’emprunteur / sponsor. Nous n’avons aucune
preuve que cela se produise en pratique, mais notez que les plus petits marchés
nationaux (comme la Pologne dans notre échantillon) ou encore dans un contrat PF /
INFRA plus personnalisé seront plus à risque.
Les services auxiliaires qui ne sont pas directement liés au prêt (par exemple,
financement supplémentaire, services d’investissement) peuvent être négociés dans le
cadre de la négociation du prêt, en utilisant les clauses de « droit de premier refus » et
de « droit de correspondance ». Le régulateur britannique a constaté que ces produits
n’avaient aucun avantage sur les clients - sauf en ce qui concerne le refinancement – et
ils avaient été interdits au Royaume-Uni, mais leur utilisation pourrait s'étendre en
dehors du Royaume-Uni (représentant un risque permanent de résultat sous optimal
pour les emprunteurs / sponsors).
Le recours à des conseillers qui font également partie du syndicat est très répandu
parmi les emprunteurs et les sponsors, et dans certains cas, il n’y a pas d’autres
sources de conseils externes.
Ce problème est plus fréquent dans le segment PF / INFRA (mais pas non plus
inexistant dans le segment LBO) et pourrait représenter une fraction non négligeable
des transactions.
Notre travail de terrain auprès des prêteurs montre que lorsqu'un rôle de conseil est
fourni par une banque prêteuse, cela est fonctionnellement distinct du rôle de prêt, et
Le recours
le respect de protocoles devrait atténuer le risque de résultats sous-optimaux pour les
à des
emprunteurs qui serait dû à la partialité du conseil.
conseillers
de dette
Il existe des preuves (limitées) que certains prêteurs regroupent - à la demande de
qui
l'emprunteur / sponsor - le rôle de conseil et le rôle de prêt dans le segment PF /
participent
INFRA. Les risques ici seraient élevés dans le cas où le conseiller serait nommé
également
directement sans processus concurrentiel et combinerait à la fois le rôle de prêt et le
au prêt
rôle de conseil, l’emprunteur / sponsor pouvant se retrouver avec une stratégie de prêt
syndiqué
non optimale.
Une autre forme d’inquiétude proviendrait du fait que la banque de conseil essaie
d'orienter l’emprunteur / sponsor vers une stratégie ou une structure de dette qui
correspond particulièrement à ses propres offres de prêts, c’est-à-dire en détruisant la
muraille de Chine qui sépare les fonctions de conseil et de prêt, sans que cela soit tout
à fait transparent pour l'emprunteur / sponsor. Vu la description des politiques de
gestion de telles situations que nous ont donné les prêteurs, cela représenterait une
violation significative de ces protocoles internes. Si tels contrôles s'avéraient faibles,
cela serait un sujet de grande préoccupation.
Nous n'avons rencontré dans notre travail aucune preuve d’une activité coordonnée
Coordinatio
pour manipuler les prix sur le marché secondaire, et la garantie relative aux niveaux de
n des
détention est largement respectée dans la pratique (en effet, c’est un élément clé du
prêteurs
processus). Les caractéristiques du marché des prêts secondaires - qui reste un marché
sur la vente
« aux risques de l'acheteur ou « caveat emptor » d'après l’expression latine avec des
du prêt sur
acheteurs implicitement avertis - devraient limiter toute tentative des vendeurs de
le marché
manipuler le prix de la dette, à moins qu'ils soient capables d'identifier simultanément
secondaire
un groupe d'acheteurs de la dette peu avertis. L'avantage économique d'une
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Etape du
Résultats et conclusions sur les garanties et les risques
processus
coordination entre prêteurs peut donc être limité, réduisant la plausibilité de ce risque.
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Remarques finales
Le marché secondaire des prêts européen est nettement plus petit que celui des États-
Unis. Il a été démontré que le marché secondaire américain a des influences positives
sur le marché primaire américain. Bien que nous n'ayons aucune preuve indiquant que
le commerce sur le marché secondaire européen est inefficace et les données étant
très limitées, telles influences positives sur le marché primaire sont moins claires en
Europe.
Un domaine inefficace sur le marché de la syndication de prêts, qui n'est pas
directement lié aux risques de la politique de concurrence évoqués ci-dessus, est la
lenteur et le coût des règles « connaître son client » (KYC, selon son sigle en anglais)
appliquées par les prêteurs et plus généralement aux processus de règlement. Nous
avons réuni des éléments de preuves suggérant qu'il existe un problème de
coordination parmi les acteurs du marché, ce qui pourrait également constituer un
domaine de règlementation à analyser dans le futur.
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Résumé
La dette est une source essentielle de financement pour l’économie européenne. Le
marché des prêts syndiqués est un contributeur majeur du financement par emprunt,
notamment en termes de dette à grande échelle.
Cette étude réalisée par Europe Economics examine si le marché des prêts syndiqués
dans six pays sélectionnés - la France, l’Allemagne, les Pays-Bas, la Pologne,
l’Espagne et le Royaume-Uni - fonctionne bien et de manière efficace. Cette recherche
se concentre sur deux segments importants du marché global des prêts syndiqués -
les prêts liés au rachat par effet de levier (« LBO » selon son sigle en anglais) et celui
liés au financement des projets et d’infrastructures.
Notre analyse identifie certains domaines de préoccupation potentielle pour la
concurrence, en particulier sur les aspects de l'échange d'informations entre les
prêteurs, la fourniture de services auxiliaires (tels que la couverture) par les banques
qui participent aussi au syndicat, la combinaison des activités de conseil et
d'arrangement de dette et de refinancement. Nous illustrons comment ces risques
diffèrent entre les segments LBO et PF / INFRA. Nous identifions également les
caractéristiques du marché et des acteurs du marché qui peuvent influencer la
probabilité que ces risques soient réalisés.
Nous déterminons également un domaine d’inefficacité sur le marché de la syndication
de prêts, qui n’est pas directement lié aux risques de la politique de concurrence,
autour des processus de règlement qui pourrait constituer un autre domaine
d’attention réglementaire à l’avenir.
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