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Complément - Chapitre 7

Alcènes et alcynes

Réactions d’addition sur des systèmes conjugués (addition électrophile


et cycloaddition de Diels-Alder sur les diènes conjugués)
Puisque le phénomène de résonance est possible dans les systèmes conjugués, une
attention particulière doit être apportée à ce genre de structure lors des réactions
chimiques.

- Addition électrophile sur les diènes conjugués


Les réactions d’addition sur les diènes conjugués donnent lieu à un résultat quelque peu
étonnant. En effet, quand une mole de bromure d’hydrogène est additionnée à une mole
de buta-1,3-diène, deux produits sont obtenus (voir la figure 7.a).

Figure 7.a Réaction globale de l’addition d’un halogénure d’hydrogène sur un diène
conjugué

CH2 CH CH CH2 (Addition-1,2)

H Br
CH2 CH CH CH2 HBr
3-bromobut-1-ène
buta-1,3-diène
CH2 CH CH CH2 (Addition-1,4)

H Br

1-bromobut-2-ène

Au cours d’une addition-1,2, le réactif est additionné au premier et au deuxième atome de


carbone d’un diène conjugué, tandis que pour l’addition-1,4, l’addition se réalise sur le
premier et le quatrième carbone ; une liaison double apparaît entre les carbones 2 et 3.

La formation du 3-bromobut-1-ène implique que le HBr s’est additionné à l’une des deux
liaisons doubles, sans toucher à la seconde. Ce produit résulte d’une addition-1,2. La
formation du 1-bromobut-2-ène peut paraître inattendue. L’hydrogène et le brome se sont
ajoutés au carbone-1 et au carbone-4 du diène de départ, mais une nouvelle liaison double
est apparue entre le carbone-2 et le carbone-3. Ce phénomène, appelé addition-1,4, se
rencontre couramment avec les additions électrophiles sur les diènes conjugués.
Comment peut-on l’expliquer ?
Au cours de la première étape, l’atome d’hydrogène s’additionne à l’atome de carbone
terminal de l’une des liaisons doubles selon la règle de Markovnikov (voir la figure 7.b).

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Figure 7.b Première étape du mécanisme réactionnel :
attaque du diène sur l’halogénure d’hydrogène

+ CH2
CH2 CH CH CH2 + H Br CH2 CH CH

1 2 3 4
H
buta-1,3-diène

Le carbocation qui en découle est stabilisé par résonance. Il s’agit de l’hybride de


résonance des deux formes limites de résonance présentées à la figure 7.c.

Figure 7.c Formes limites de résonance du carbocation

+ +
CH2 CH CH CH2 CH2 CH CH CH2

H H

La charge positive est donc délocalisée sur le carbone 2 et le carbone 4. Au cours de


l’étape suivante, le carbocation réagit avec l’ion bromure (le nucléophile), soit sur le
carbone 2 pour aboutir au produit de l’addition-1,2, soit sur le carbone 4 pour former le
produit de l’addition-1,4 (voir la figure 7.d).

Figure 7.d Deuxième étape du mécanisme réactionnel : deux additions possibles


de l’ion halogénure menant aux additions-1,2 et -1,4

_
+ CH2 Br CH2
CH2 CH CH CH2 CH CH

H H Br
et
+
_
+ Br
CH2 CH CH CH2 CH2 CH CH CH2

H H Br

L’addition-1,2 est un produit à contrôle cinétique. Il est plus rapide à former et


majoritaire lorsque la réaction est réalisée à basse température. Par opposition,
l’addition-1,4 est un produit à contrôle thermodynamique et s’avère être plus stable
que celui de l’addition-1,2 puisque l’alcène résultant est plus substitué, c’est-à-dire qu’il
y a plus de substituants, autres que des atomes d’hydrogène, sur les carbones de la liaison
double (on respecte ici la règle de Saytzev, voir la section 9.3.1). Le produit d’une
addition-1,4 sera majoritaire lorsque la réaction se déroule à haute température.

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Exercice 7.a

Expliquez pourquoi, pendant la première étape de la réaction présentée à la figure 7.b, le


proton s’additionne sur le C-1 et non sur le C-2.

Dans un cation allylique, la liaison double carbone–carbone est adjacente à l’atome de


carbone positivement chargé.

Le carbocation intermédiaire de ce genre de réaction, muni d’une liaison double carbone–


carbone adjacente à l’atome de carbone positivement chargé, est appelé cation allylique.
Le cation allylique parent, illustré ci-dessous sous la forme d’un hybride de résonance, est
un carbocation primaire. Cependant, il est plus stable qu’un cation primaire ordinaire
(comme, par exemple, le cation propyle) car sa charge positive est délocalisée entre les
deux atomes de carbone terminaux, comme le montre la carte du potentiel électrostatique
accompagnant la figure 7.e.

Figure 7.e Formes limites de résonance d’un cation allylique et carte de potentiel
électrostatique de son hybride de résonance

H H

H H H H
+ +

H H H H

Exercice 7.b

Dessinez les formes limites de résonance qui contribuent à l’hybride de résonance du


cation cyclopentén-3-yle.

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Exercice 7.c

Écrivez l’équation des produits escomptés de l’addition-1,2 et de l’addition-1,4 du brome


(Br2) sur le buta-1,3-diène.

Cycloaddition sur les diènes conjugués : réaction de Diels-Alder

Les diènes conjugués subissent un autre type d’addition-1,4 lorsqu’ils réagissent avec les
alcènes (ou les alcynes). L’exemple le plus simple est l’addition d’éthylène sur le buta-
1,3-diène qui donne naissance au cyclohexène (voir la figure 7.f).

Figure 7.f Mécanisme général d’une réaction de Diels-Alder

Nouvelle liaison π Nouvelle liaison σ


CH2 CH2
HC CH2 200oC HC CH2
+
HC CH2 HC CH2
CH2 CH2

Nouvelle liaison σ
buta-1,3-diène éthylène cyclohexène
Rendement : 20%

Cette réaction est un exemple de cycloaddition, soit une addition qui aboutit à un produit
cyclique. Cette cycloaddition, qui transforme trois liens π en deux liens σ et un nouveau
lien π, est appelée réaction de Diels-Alder, d’après les deux chercheurs allemands qui
l’ont mise au point, Otto Paul Hermann Diels (1876-1954) et son étudiant Kurt Alder
(1902-1958). La grande utilité de cette réaction pour fabriquer des composés cycliques a
valu à ces chercheurs le prix Nobel de chimie en 1950. Comme pour l’hydroboration,
cette réaction s’effectue selon un mécanisme concerté. En effet, la rupture et la
formation des liaisons se font simultanément.

Les deux réactifs sont constitués d’un diène et d’un diénophile (qui aime les diènes). La
réaction présentée à la figure 7.f n’est pas typique de la plupart des réactions de Diels-
Alder parce qu’elle nécessite une forte température (200 °C) et ne se solde pas par un bon
rendement (20 %). Ce type de réaction donne un excellent rendement à des températures
modérées si le diénophile porte des groupes électroattracteurs 1 , comme on peut
l’observer à la figure 7.g.

La réaction de Diels-Alder est une cycloaddition mettant en jeu un diène conjugué et


un diénophile et qui aboutit à un produit cyclique dans lequel deux liens σ et un nouveau
lien π sont formés simultanément au bris de trois liens π.

1
Les groupes électroattracteurs sont des groupes d’atomes qui attirent les électrons du lien π, ce qui
appauvrit l’alcène de ses électrons et le rend donc plus électrophile vis-à-vis du diène.

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Figure 7.g Réactions de Diels-Alder impliquant des groupements électroattracteurs
sur le diénophile
O O

H H
30oC
+

CN
NC CN
CN
+ 0o C
CN
NC CN
CN

Remarque : Les réactions de Diels-Alder peuvent donner plusieurs produits possibles et


sont régiosélectives lorsque les diènes et les diénophiles ne sont pas symétriques. Ces
réactions sont alors nettement plus complexes et ne sont pas au programme du cours de
chimie organique au niveau collégial.

Exemple 7.a

Comment une réaction de Diels-Alder pourrait-elle permettre la synthèse du composé


suivant ?
O

Solution
Travaillons dans le sens inverse. La liaison double du produit obtenu était auparavant une
liaison simple entre les deux liaisons doubles du diène conjugué de départ. Par
conséquent,
O O

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Exercice 7.d

Montrez comment le limonène pourrait être formé par une réaction de Diels-Alder de
l’isoprène (2-méthylbuta-1,3-diène) avec lui-même.

limonène

Exercice 7.e

Dessinez la structure du produit obtenu pour chacune des réactions de cycloaddition


suivantes.

a)
O + CH2 CH CN

b) CH2 CH CH CH2 + CN C C CN

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Solutionnaire des exercices du complément

Exercice 7.a

Lorsque le proton s’additionne sur le deuxième carbone (C-2), il y a formation d’un


carbocation primaire, qui ne peut être en plus stabilisé par la résonance. Par contre,
lorsque le proton s’additionne sur le premier carbone (C-1), il y a formation d’un
carbocation secondaire, plus stable par effet inductif répulsif (respect de la règle de
Markovnikov) et qui, en plus, fait partie d’un système conjugué (résonance).

Exercice 7.b

+ +

Exercice 7.c

CH2 CH CH CH2 (Addition-1,2)

Br Br
Br2
CH2 CH CH CH2
3,4-dibromobut-1-ène
buta-1,3-diène
CH2 CH CH CH2 (Addition-1,4)

Br Br

1,4-dibromobut-2-ène

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Exercice 7.d

Pour déterminer les structures du diène et du diénophile, il suffit de briser la deuxième


liaison de part et d’autre de la double liaison du cyclohexène tel que démontré ci-dessous.

+
Δ
L’équation est donc :

Exercice 7.e

a) O b) CN

CN

CN

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